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Passé et present de la psychologie en Afrique subsaharienne

Past and present of psychology in Subsaharan Africa

Joseph LOUAKIMA *

Docteur en Psychologie Sociale

Laboratoire parisien de psychologie sociale (LAPPS, EA 4386)

Université Paris Ouest Nanterre La Défense, 200 Avenue de La République, 92200 Nanterre

Cedex.

* 06 50 81 84 91 / joseph.louakima@laposte.net

© 2019. This manuscript version is made available under the Elsevier user license
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Résumé.

Le but de cet article est de présenter le passé et le présent de la psychologie en général et de la

psychologie sociale en particulier en Afrique subsaharienne. Pour des raisons de domination et

d'impérialisme en psychologie, la plupart des psychologues subsahariens tentent de produire et/ou

de reproduire ce qui se fait chez les psychologues des anciennes puissances coloniales. Il s'agit-là

d'une psychologie d’inspiration occidentale en Afrique subsaharienne. En dépit de l'importance de

la psychologie dans les programmes universitaires, il est tentant de dire que l'Afrique subsaharienne

demeure l' une des régions du monde où la recherche psychologique est mineure et marginale.

Abstract.

This article is aimed at presenting the past and present of psychology in general and social

psychology in particular in subsaharan Africa. For domination and imperialism reasons, most

subsaharan psychologists try to reproduce or imitate what is done by psychologists in Western

countries. Thus, sub-Saharan psychology is western inspiration. In spite of the important

development of psychology teachings in the curriculum of african universities, psychological

research in subsaharan Africa remains rather minor and marginal.

Mots-clés : Psychologie dominante ; Psychologies indigènes ; Afrique subsaharienne ; Occident.

Keywords: Mainstram psychology; Indigenous psychologies; Subsaharan Africa; West.

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Introduction

L' Afrique noire ou l' Afrique subsaharienne1 est la partie du continent africain située au sud du

désert du Sahara. Elle compte 48 pays (Iles comprises) avec 973, 4 millions d'habitants et quelques

deux mille langues. Elle dispose d'un PIB par habitant très faible (environ 1000 dollars PPA par an)

et d'un IDH de 0,465 (moyenne mondiale de 0,729) en 2014. La plupart des pays subsahariens ont

des régimes politiques autoritaires, bâillonneurs et des légitimités populaires minimales. Ayant

successivement vécu la traite négrière, l'esclavage, le colonialisme et le néocolonialisme, elle

demeure une des parties du monde la plus démunie, la plus politiquement mouvementée et la moins

développée sur le plan économique, sanitaire, industriel, scolaire et universitaire. Par exemple, son

taux d'achèvement de l'école primaire est de 69% et son accès à l' université de 7% en 2013.

Dans les universités et/ou les grandes écoles subsahariennes qui sont des institutions

d'enseignement, de recherche, de consultance et/ou de marketing, force est de constater que la voix

des psychologues sociaux subsahariens est quasi inaudible. De par le monde, de nombreux

chercheurs en psychologie sociale se demandent même ce qu'est la psychologie sociale

subsaharienne tant ils n'en ont jamais entendu parler. Tout se passe comme si le monde de la

psychologie sociale et du psychologue social se réduisaient à l' Occident qui reste largement

ethnocentrique dans sa réflexion et sa rhétorique. L'Occident marginalise les sources locales

(Baldwin, 1992), prône l'afrophobie (Akin-Ogundeji, 1991) ou il n' y a pas d' Homo academicus

africains (Copans, 1986). Néanmoins depuis plusieurs décennies, l'enjeu est la question de la

reconnaissance internationale des savoirs « décoloniaux » (Roulleau-Berger, 2015). Dans un

contexte de mondialisation et de circulation des idées, des concepts, des théories et des paradigmes,

1
Nous excluons volontairement l'Afrique du sud du fait de sa singularité d'être la seule partie de l'Afrique
noire où l'établissement des Blancs eut lieu à grande échelle. Hormis le champ politique aux mains de la
majorité noire, les principaux domaines scientifiques et technologiques en Afrique du sud sont managés et
occupés par la minorité blanche qui pense et travaille comme des populations blanches occidentales. En ce
sens souligne Copans (1986), la scène intellectuelle sud-africaine véhicule pour le meilleur et pour le pire des
ingrédients tout à fait exceptionnels dont certains sont d'ailleurs des caractéristiques classiques de la figure de
l'intellectuel occidental.

2
les « nouveaux » centres de production de savoirs se déplacent de l' Europe vers l'Asie du sud-est,

orientale, centrale et vers l'Afrique subsaharienne. Il s'agit de réparer des « injustices épistémiques »

(Bhargava, 2013) qui ont altéré ou endommagé les cadres de pensée des sociétés et des cultures

colonisées. Ainsi il est une exigence intellectuelle pour tout psychologue social subsaharien et

probablement occidental d'opérer une « alchimie psychologique » qui répond à la « glolocalité » et

à l'abandon de son héritage colonial.

La psychologie en général, la psychologie sociale en particulier, est un corpus de connaissances

scientifiques élaborées pour être universelles tout en proclamant leurs particularismes et leurs

spécificités culturelles (Beauvois, Joule et Monteil, 1998). Nous avons affaire à l'universalisme du

relativisme ou au multiversalisme scientifique (Kuhn, 2013) nécessaire à la compréhension des lois

psychologiques. Chaque société et culture secrètent des normes, des valeurs et représentations

spécifiques. Nous avons donc le besoin de réviser ou de revisiter les concepts établis comme

invariants (Koyré, 2001). La production de la psychologie sociale en Afrique subsaharienne est utile

et nécessaire, parce que l'Afrique est non seulement le berceau de l'humanité, mais également «

l'avenir de l'économie-monde dans laquelle nous sommes tous engagés » (Kodjo-Grandvaux, 2013,

p.19). Le savoir psychologique des sociétés et des cultures subsahariennes reste quasi vierge de

toute interprétation (une terra incognita), même si Jahoda (1983), Akin-Ogundeji (1991), Tobie

(2009) notent que la psychologie est une réalité vivante et pertinente en Afrique.

Le but de cet article est de présenter les aspects historiques et contemporains de la psychologie

en général et de la psychologie sociale en particulier en Afrique subsaharienne. Quelles sont les

origines de la psychologie sociale en Afrique subsaharienne ? Qu'est-ce qui caractérise la

psychologie sociale subsaharienne ? Le caractère africain des chercheurs les conduit-il à produire

un discours scientifique différent de celui des chercheurs occidentaux ? Pourquoi des psychologues

africains publient-ils moins que leurs pairs occidentaux ? Sont-ils moins sollicités ou sont-ils

victimes d'un « effet de structure » qui les rend moins représentés dans les sciences psychologiques

et sociales du fait même des positions dominantes occupées par des chercheurs occidentaux?

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L'Afrique subsaharienne n'est-elle pas suffisamment entrée « dans la période de

postoccidentalisation des savoirs et de coproduction d'agencements entre des savoirs situés »

(Roulleau-Berger, 2011) ? Quels sont donc les facteurs d'échec et du succès de la science

psychologique et du psychologue en Afrique subsaharienne ? Les réponses à ces questions

s'intéresseront plus à l'Afrique subsaharienne de manière ensembliste que de procéder pays par

pays.

1. Origines de la psychologie sociale en Afrique subsahrienne

Le mot de « psychologie » évoqué pour la première fois par Goclenius dans le titre d'un de ses

ouvrages en 1590 n'existe dans aucune langue bantoue ou africaine. Il a été introduit en Afrique

subsaharienne par les anciennes puissances coloniales européennes. En Zambie par exemple, la

psychologie professionnelle est née en 1937 durant la colonisation, notamment dans le contexte de

la recherche anthropologique britannique en vue de servir les intérêts coloniaux britanniques

(Peltzer et Bless, 1989). Le premier laboratoire de psychologie expérimentale en Afrique

subsaharienne a été créé en Zambie en 1965 (Heron, 1967). Le premier cours de psychologie a été

donné en Afrique anglophone en 1949. Les exemples et le matériel essentiellement occidentaux

étaient imposés par les colonialistes européens aux sujets africains. Il y avait différents thèmes

d'enseignements comme l'intelligence, la mémoire, la perception, etc. Les puissances coloniales ont

produit une idéologie présente dans les discours populaires, politiques et scientifiques qui

permettaient non seulement d'asservir et d'assimiler l'homme noir dans ses états mentaux et

comportementaux, mais également de combattre son « ignorance » par l'école en vue de le faire

évoluer dans la hiérarchie sociale, de repérer des différences, des similitudes « raciales », de

corroborer ou de remettre en question certaines théories ou hypothèses (Knapen, 1962), de ramener

le singulier au général, de se référer en permanence à l'ethnocentrisme occidental. Le Noir se pense

lui-même socialement par rapport au monde des Blancs. Les Blancs, écrit Du Bois (2007),

possèdent tous les privilèges, notamment celui de dire, de voir et de faire le monde, et de poser leurs

normes comme universelles. Les Noirs n'ont ainsi d'existence que dans et par la vision qu'ont d'eux
4
les Blancs. Hampaté Bâ (1972) rapporte qu'à l'école occidentale en Afrique, on empêchait les

enfants africains de parler leur langue maternelle, afin de les soustraire aux influences de l'école

traditionnelle. L'enfant africain devait penser et vivre à l'européenne. Une fois adultes, les enfants

africains élevés à la française par exemple seront les plus insipides de tous les Blancs (Tobie, 2009).

Les différences de psychologie, de mentalités, de coutumes et de traditions faussent et fabriquent

les interprétations nées de l'extérieur (Wickert, 1967 ; Evans, 1970). Fick (1929) trouve que les

Noirs obtiennent des scores plus faibles que les Blancs aux tests d'intelligence. Biesheuvel (1958)

souligne la suprématie des Européens sur les Africains. Cette suprématie blanche versus noire n'est

pas une position qu'on pourrait croire dépassée. Aujourd'hui, elle constitue une « menace dans l'air

» (Steele, 1997 ; Steele, Spencer et Aronson, 2003 ; Steele et Aronson, 1995). Les Noirs réalisent

qu'ils peuvent être jugés ou traités en fonction du stéréotype négatif et craignent de confirmer ce

jugement. Si cette peur est suffisamment forte et également personnellement pertinente pour le

membre du groupe stéréotypé, elle peut créer une menace du stéréotype qui interfère avec la

réussite académique (Aronson, Quinn et Spencer, 1998). Dans l'une de leur étude sur la menace du

stéréotype et la performance des Africains-Américains au test d'intelligence, Steele et Aronson

(1995) rapportent que les Noirs à qui on disait que le test était un diagnostic des capacités

intellectuelles (la condition diagnostique) étaient plus susceptibles de compléter des fragments de

mots conformément au stéréotype des Noirs (completer…Resse en Paresse plutôt qu'un autre mot

comme Caresse). Dans la condition diagnostique, les Noirs étaient également plus susceptibles de

compléter les fragments de mot qui indiquait qu'ils doutaient d'eux (par exemple, compléter Per...

en Perdant) et prenaient plus souvent leurs distances par rapport à des activités stéréotypées comme

noires, telles qu'aimer le jazz ou le basket-ball. Ces résultats tendent à montrer que la simple attente

de la passation d'un test provoque des pensées stéréotypées, des doutes sur soi, et un désir de se

distancier du stéréotype noir. De telles pensées sont également dans l'exemple fourni par Steele

(1997) : un homme noir attendant près d'un distributeur d'argent qu'une femme blanche finisse sa

transaction. Cet homme est probablement conscient de la croyance stéréotypée selon laquelle les

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hommes noirs sont violents et même s'il n'a pas lui- même aucune intention violente, il se peut que

la femme le craigne et s'inquiète. Aux USA, Rolland-Diamond (2016) note des tensions entre élèves

à l'intérieur des établissements où la mixité raciale des écoles est instituée. Dans les classes pour

élèves en difficulté, les enseignants blancs expriment des difficultés à enseigner aux élèves noirs qui

avaient tendance à se regrouper entre eux pour affronter l'hostilité ambiante. Inversement, les

enseignants africains-américains rencontrent parfois des problèmes avec des élèves ou ont des

attentes différentes selon les élèves : plus élevées pour les blancs et moindres pour les élèves noirs.

Cette ségrégation raciale est également présente dans les domaines économique et social. Conduite

par un Brésilien, l'expérience de Lima et Vala (2005) sur la couleur du succès économique et social

illustre la force des préjugés interraciaux. Quand les participants brésiliens blancs arrivaient au

laboratoire, on leur montrait la photographie d'un Blanc ou d'un Noir. Ensuite, ils prenaient

connaissance d'un groupe de Blancs ou de Noirs qui avaient connu le succès ou l'échec économique

et dont faisait partie la personne dont ils avaient vu la photo. Les expérimentateurs donnaient

ensuite une série de questionnaires à remplir dont un d'infrahumanisation (phénomène inconscient

par lequel les gens estiment que leur groupe est plus humain que les autres ou que les membres

d'autres groupes sont moins humains que l'endogroupe (Leyens, 2015). Ils montraient une série de

visages allant d'un noir de jais à un blanc d'ivoire en demandant d'indiquer la photo vue

précédemment. Les cibles qui connaissent la faillite sont infrahumanisées par rapport à celles qui

réussissent. De plus, les Blancs qui réussissent sont rappelés comme Blancs et les Noirs qui ratent

sont rangés parmi les Noirs. En d'autres termes, un Blanc qui rate voit sa couleur de peau s'obscurir

alors que le Noir qui réussit se voit blanchir. Dans cette expérience, le groupe d'appartenance des

participants est blanc et réussit. Pour les Noirs qui réussissent, les groupes verront un progrès ou les

Noirs qui échouent, les groupes verront la routine. Les Noirs qui réussissent sont perçus comme des

cas exceptionnels ou comme des Blancs. Ces différentes études sont faites plutôt sur les Noirs

qu'avec les Noirs, même si des auteurs comme Tobie (2009), Beauvois (1999) s'insurgent contre cet

ethnocentrisme occidental. Ainsi la psychologie eurocentrique joue en Afrique deux fonctions

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importantes dans la contribution de l'idéologie de la dépendance africaine à l'égard de l' Europe et

dans l'appui de l'exploitation européenne en Afrique (Bulhan, 1981). La psychologie apparaît plus

comme une arme intellectuelle de la mission civilisationnelle de l' Europe que comme une science

universelle du comportement humain (Nsamenang, 2006) ou l' Europe comme le lieu d'énonciation

et les autres civilisations de la planète comme des lieux des énoncés (Mignolo, 1998).

2. L’ére post-indépedance de la psychologie sociale en Afrique subsahrienne

2.1. Psychologie subsahrienne d’inspiration occidentale

Au début des années 1960 d' indépendance subsaharienne, l'Afrique comptait deux universités

pour l'Afrique francophone et quatre pour l'Afrique anglophone. Le défi de construire des pays

modernes, de rompre avec les anciennes puissances coloniales est le maître mot de la plupart des

planificateurs des «nations» et des politiciens africains. Il va s'opérer un vaste mouvement politique

d'africanisation de l' Afrique. Il s'agit pour certains leaders africains comme Sékou Touré, Kwame

Nkrumah, Patrice Lumumba (1960) de refuser les postures hégémoniques coloniales, de résister à

l'imposition de modèles intellectuels occidentaux et d'affirmer une pensée située culturellement et

socialement africaine. Pour d'autres comme Félix Houphouët-Boigny (1945/1993), cette

africanisation doit s'organiser autour d'un processus d'oscillation pendulaire entre passion de

l'Occident et exaltation de l'esprit africain d'une part, dépassement de l'Occident, d'autre part.

L'Afrique africaine tentait de se démarquer des savoirs dominants occidentaux.

Sur les vestiges coloniaux, plusieurs pays africains créent et/ou renforcent les universités

nationales ou régionales ayant pour mission d’enseigner, de consulter et de faire de la recherche sur

les problèmes et les questions (la surpopulation, l'injustice sociale, l'instabilité politique, la

détérioration de l'environnement, etc.) qui agitent le continent africain. Nées dans un continent de

grave pauvreté économique, de maladie et ravagées par les anciennes puissances européennes

coloniales, les universités subsahariennes sont caractérisées par d'énormes stigmates du sous-

développement. La faiblesse numérique des spécialistes qualifiés, l'absence de moyens financiers, la

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mauvaise répartition de la richesse nationale, les guerres civiles récurrentes empêchent d'atteindre la

masse critique qui autorise une production dynamique et originale et un développement scientifique

acceptable et durable.

Dans les universités subsahariennes de type néo-colonial, la psychologie fait ses débuts dans les

départements de philosophie, des sciences de l'éducation ou d'anthropologie. Cette entrée dans les

établissements universitaires s'effectue grâce à l'assistance des ex-colonialistes européens, des

enseignants haïtiens et locaux. Dans certains établissements où la psychologie est mentionnée, elle

apparaît comme une option, alors que dans d'autres, elle n'existe pas dans les programmes. Elle est

perçue par des hommes et des femmes politiques subsahariens comme une science de l'homme

blanc, une science incapable de résoudre les problèmes économiques africains, une résistance

délibérée à ce qui est nouveau, un charlatanisme susceptible de faire tomber les pouvoirs politiques

en place. Ces derniers sont probablement ignorants de cette science et profession de psychologue,

parce qu'elle n'a presque pas de visibilité dans la pensée sociale subsaharienne. On peut également

noter que les jeunes universités subsahariennes sont davantage composées d'enseignants et/ou de

chercheurs publiant rarement leurs travaux de recherche en psychologie que de chercheurs publiant

régulièrement. Publier n'est probablement pas leur impératif. Les chercheurs subsahariens sont en

quelque sorte « fâchés » avec l'écriture, leurs travaux de recherche sont continuellement inachevés

parce qu'ils sont non publiés ou non publiables ou leurs textes ne répondent pas aux critères des

revues scientifiques occidentales. Ils oublient souvent que la communication écrite occupe une

place importante dans la communauté scientifique. Plus vous publiez, plus vous êtes visibles dans l'

arène scientifique. Inversement, moins vous publiez, moins vous êtes visibles. Telle était la devise

de Michael Faraday « Work, finish, publish! » (« Travaille, finis, publie ») ou le proverbe américain

« publie ou péris ». Ainsi le scientifique doit fournir un document écrit montrant ce qu'il a fait,

pourquoi il l' a fait, comment il l' fait. Ne doit-il pas seulement « faire » la science, mais aussi «

écrire » la science (Day, 1983).

Dans des universités subsahariennes où il y a des départements de psychologie, il est organisé

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des associations nationales de psychologues, des séminaires, des colloques, des congrès et des

journées portes ouvertes en vue de faire connaître et d'échanger avec les experts et/ ou le public sur

les savoirs psychologiques. Au Congo-Brazzaville, au Cameroun, au Ghana, en Angola, au Congo-

Kinshasa, au Sénégal, en Côte d'Ivoire, au Kenya, au Nigeria par exemple, les enseignements en

psychologie sont donnés aux futurs chercheurs et enseignants en psychologie, aux futurs

professeurs d'écoles, du collège et du lycée, aux cadres administratifs et pédagogiques (inspecteurs,

conseillers pédagogiques). Ils reçoivent entre autres des enseignements de psychologie de l'enfant et

de l'adolescent, de psychologie générale, de psychologie sociale et de psychologie du travail. Ces

enseignements se sont propagés au-delà des universités pour entrer dans les instituts et les écoles de

métiers de la santé, de travail social, d'éducation, d'agriculture, des mines. En Zambie, au Malawi

par exemple des entreprises étatiques, para-étatiques et privées font appel à l'expertise

psychologique dans le cadre du recrutement de la main d’œuvre locale (Peltzer et Bless, 1989).

Dans la recherche d'un emploi par les candidats, le test psychologique est considéré comme plus

juste que l'entretien, parce qu'il est un instrument qui surpasse le favoritisme tribal, ethnique ou

racial. Il ne distingue pas les candidats à l'embauche en fonction de leur appartenance ethnique ou

culturelle.

Manquant cruellement de véritables centres de recherche et d'une masse critique de chercheurs,

l'Afrique subsaharienne francophone fait former ou recycler son personnel pédagogique

(enseignants, étudiants) principalement en France, en Belgique, en Suisse ou au Canada

francophone, celle anglophone au Royaume- Uni, aux USA, ou au Canada anglophone, et celle

lusophone au Portugal ou au Brésil. Dans les pays subsahariens où sont mises en chantier les

formations doctorales, le personnel éducatif a tendance à choisir des écoles et des universités

occidentales pour parfaire ses études. Formés dans les universités occidentales, ils tentent

d'interpréter leurs travaux de recherche à partir des théories psychologiques occidentales.

2.1. Domination de la psychologie occidentale en Afrique subsahrienne

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Les théories psychologiques occidentales peuvent être jugées selon leur portée, leurs hypothèses

et lois (clarté, consistance, précision, testabilité, support empirique, production des résultats). Le

critère de falsification de Popper (1934), selon lequel si une hypothèse ne peut pas être falsifiée ou

falsifiable n'a pas de qualité scientifique, est un critère nécessaire, mais pas suffisant. Pour qu'un

sujet puisse être considéré comme scientifique, il faut qu'il puisse satisfaire un certain nombre de

critères: le phénomène traité doit être confirmé par des observateurs indépendants, par la

consistance des idées, par les explications du phénomène liées aux autres branches de la science. Il

y a également des lois ou des mécanismes susceptibles d'expliquer une large variété de phénomènes

apparemment complexes et quantitatifs. Les théories exprimables en langages mathématiques

tendent vers «l'absolu». Popper affirme également : « Tant qu'une théorie résiste à des tests

systématiques et rigoureux et qu'une autre ne la remplace pas avantageusement dans le cours de la

progression scientifique, nous pouvons dire que cette théorie a « fait ses preuves » ou qu'elle est

corroborée » (1934, p. 30). Néanmoins les sciences dites dures ou exactes comme la physique, les

mathématiques ne sont pas de même nature que les sciences humaines et sociales. L'une des

particularités de ces dernières est la complexité de la question-sujet (subject-matter) (Wolpert,

1993). Démêler les relations sociales présente une grande difficulté. Le scientifique/ praticien doit

être un individu neutre, libre et objectif. Il est celui qui sait ou qui cherche à savoir en appliquant

une méthode scientifique (Lavarde, 2014). Elles tirent leur solidité et leur valeur essentiellement de

leur contexte. Dans la pensée scientifique, cette objectivité a des limites, parce qu'elle est

inadéquate avec la subjectivité humaine. Selon les contextes idéologiques et les conditions sociales

des sociétés où elles se fondent, les théories scientifiques peuvent évoluer (Lavarde, 2014). Dans la

même lignée, Roulleau-Berger suggère que : « les contextes politiques, historiques, sociaux et

économiques jouent sur la production d'autonomies épistémiques d'intellectuels qui défendent des

positions, des sensibilités, des rapports au monde divers dans le champ scientifique en fonction des

marges d'action et de liberté variant d'un pays à l'autre » (2015, p.14). Ainsi l'approche positiviste

« ignore » les dimensions sociales et historiques de la subjectivité humaine trouvable ou trouvée en

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psychologie subsaharienne.

La psychologie subsaharienne est essentiellement dominée par les théories psychologiques

occidentales présentées comme plus universalistes que relativistes. Elles voient des différences

interculturelles comme des phénomènes indigènes ou des curiosités (Cheung, 2006), parce que des

résultats de recherche en Afrique subsaharienne ne répondent pas souvent au postulat de

l'individualisme libéral américain. L'ethos scientifique importé en Afrique est comme un « paquet

intellectuel déjà fait » (Kagitcibasi, 1984). L'Afrique subsaharienne psychologique manquant de

concepts, de théories et de méthodes propres se place ou est placée dans une posture «

d'acculturation scientifique qui n'est pas simplement une domination académique impérialiste des

psychologues subsahariens mais aussi une émulation imposée des modèles euro-américains »

(Nsamenang, 1995, p. 732). Il s'agit par exemple des théories des représentations sociales, de

l'identité sociale avec la prédominance de l'utilisation des méthodologies qualitatives dans les pays

africains francophones ; des théories du Locus of Control, de l'attribution, de la dissonance

cognitive avec la prédominance de la pratique des méthodologies quantitatives dans les pays

africains anglophones.

Dans le champ des théories des représentations sociales de Moscovici (1961), Moneze (1991)

étudie les représentations sociales différentes du planteur de cacao chez les ruraux camerounais.

Yapo Yapi (1992) se consacre à la diffusion des théories des représentations sociales dans le monde

de l'éducation en Côte d' Ivoire et en Afrique. Mbambi (2004) qui étudie les expériences féminines

à Brazzaville au Congo, souligne que la résistance des Congolaises à des politiques de limitations

des naissances correspond à un choix de société dont la finalité est la préservation du lien social, la

pérennité de la famille, la stabilité de l'union conjugale et l'affirmation des identités culturelles. Des

représentations associées au refus de l'usage de la contraception sont multiples: la pilule est

considérée comme un médicament qui fait penser à un traitement médical et donc à la maladie, une

forme de débauche sexuelle, ou de libertinage sexuel. La pilule c'est pour les « mamans » . Elle

constitue la perte du « pouvoir » masculin interprétée comme l'illustration de la peur d' être débordé

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par la jouissance, en relation avec le fantasme de « l'orgasme infini » de la femme.

En s'inscrivant dans la théorie de l'orthodoxie religieuse de Deconchy, Mvessomba et Deconchy

(2012) comparent les croyances, les énoncés et les comportements des groupes catholiques

traditionnels (fortement institutionnalisés, socialement dominants et à forte régulation sociale) et les

chrétiens pentecôtistes (extérieurs à l'église catholique) au Cameroun. Ils observent que les

catholiques traditionnels et chrétiens pentecôtistes (orthodoxie et néoorthodoxie) perçoivent de

façon identique la vigueur et les modalités du réglage de l'appartenance, chez eux comme dans

chacun des autres groupes. Déjà en 2009, Mvessomba, Mbédé et Deconchy établissaient des liens

entre herméneutique radicale et proximité intergroupes: catholiques traditionnels, catholiques

charismatiques et pentecôtistes au Cameroun. Ces auteurs relevaient des proximités « doctrinales »

intragroupes (Dieu a créé le monde, le Pape est infaillible, etc.), ou intergroupes (la réforme de

l'église renvoie à la protestation interne/externe). Il semble que d'une part la croyance collective et

la croyance personnelle constitutives se renvoient l'une à l'autre, selon le modèle qui intègre les

notions d'identité personnelle et d'identité sociale (Carrier, 1960). D'autre part, pour rendre compte

de la double évaluation des sujets, on est tenté d'en appeler au concept de « cohésion » reformulé en

termes de catégorisation et d'identité (Hogg, 1995). Dans la même lignée, Owusu-Bempah et

Howitt (1995) suggèrent que la notion psychologique de déindividuation présuppose l'existence de

deux identités séparées: une identité personnelle et une identité de groupe. Mais dans la plupart des

sociétés africaines traditionnelles, un individu a juste une identité de sa communauté (ou de son

groupe) même si cette identité peut varier d'un village à l'autre, d'une ethnie à l'autre. Les intérêts de

la communauté sont plus importants que ceux de l'individu. Il s'agit de ce que suggère Mbiti (1969,

p. 214): « Je suis parce que nous sommes ». Dans la culture du Rwanda par exemple, écrit Roux

(2016, p.30) : « l'accusé n'est pas un individu isolé; il appartient non seulement à une famille, mais

aussi à une communauté, à une colline (le Rwanda est le « pays des mille collines »), très présentes.

La reconnaissance de sa culpabilité, doit aussi être comprise, acceptée, assumée par toute sa

communauté ». En d'autres termes l'homme n'est homme qu' à travers d'autres hommes. Il existe à

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travers l'interaction des forces visibles et/ ou invisibles, des forces physiques et/ou sociales. C'est

donc un individu constituant un chaînon dans la chaîne des forces vitales, un chaînon vivant, actif et

passif, rattaché par le haut à l'enchaînement de sa lignée ascendante et soutenant sous lui la lignée

de sa descendance (Tempels, 1949; Louakima, 2017). Ailleurs, Tobie (2009) souligne que les

travailleurs sociaux français oublient souvent que chez les Bambaras du Mali, le mariage est une

alliance entre deux familles et non pas entre deux individus. Il importe donc d'aider les travailleurs

sociaux français à fabriquer et à diffuser de nouvelles représentations des étrangers.

Ezembé (2003) qui étudie l'enfant africain relève un phénomène de mode dans les sociétés noires

à propos de la dépigmentation de la peau. Il suggère que cette volonté de s'éclaircir la peau procède

d'un profond traumatisme post-colonial. Le paradigme de la représentation de l'homme blanc, de la

peau blanche fournit consciemment ou inconsciemment un modèle supérieur hantant l'imaginaire de

l'Africain. Il est donc le fruit d'un complexe d'infériorité auquel il faut ajouter l'influence majeure du

christianisme (où le Noir s'oppose toujours à la pureté du Blanc). Ntsiba-Madzou (1996) observe

une relation positive entre l'art de s'habiller et l'exigence d'une peau claire chez des Congolais.

A Nairobi au Kenya, Fabianova et Sramata (2007) rapportent que les enfants infectés par le virus

du VIH/SIDA, transmission de la mère à l'enfant, ont pour la plupart été abandonnés à la naissance

par leurs parents et deviennent des orphelins. Ils sont quotidiennement confrontés aux problèmes

sociaux de malnutrition, d'alphabetisation, de criminalité et de toxicomanie. Ces mêmes auteurs

précisent que ces enfants n'ont pas tous été abandonnés et tous ne vivent pas dans la rue. L'UNICEF

(2005) établit une différence basée sur la situation familiale entre deux groupes d'enfants :

- Les enfants à la rue (children « on » the street): ils travaillent dans la rue, vivent dans leurs

familles, considèrent qu'ils ont un foyer, même s'ils y sont absents quelquefois.

- Les enfants des rues (children « of » the street): pour ces enfants, la rue est leur maison. Ils y

mangent, y dorment et y jouent dans la rue. Ils y ont des amis. Il se peut qu'ils aient des contacts

avec des membres de leurs familles, mais ils ne retournent jamais chez leurs parents. Certains

enfants ont été abandonnés ou mis à la porte, d'autres ont purement décidé de quitter la vie

13
familiale. Ils doivent donc pourvoir à leurs propres besoins.

Néanmoins ces deux groups d’enfants ont en commun des relations émotionnelles instables avec

le monde des adultes, une mauvaise image d'eux-mêmes, les stigmates de la vie, la violence,

l'exploitation et un avenir incertain. Ainsi pour leur assurer une meilleure protection de l'enfance, il

est important d'explorer leur psychologie et leur statut social, de comprendre leurs réactions, leurs

sentiments, leurs attitudes et leurs mécanismes de défense. Dans cette optique, Oburu Odhiambo et

Palmérus (2003) examinent les méthodes de discipline utilisées par les grand-mères adoptives

auprès des enfants kényans. Ce sont des enfants orphelins à la suite de la mort de leur mère atteinte

du sida. Quatre stratégies de discipline sont notées : (1) Autoritarisme (punition corporelle quand

l'enfant commet des actes socialement indésirables) ; (2) Modification comportementale (ne pas

permettre à l'enfant d'aller jouer avec les voisins, ignorer l'enfant alors qu'il est entrain de crier, de

pleurer) ; (3) Contrôle de la coercition verbale (menaces, réprimandes verbales, par exemple dire à

l'enfant je t'enverrai te faire manger par un lion ou un sorcier si tu n'arrêtes pas de crier) et (4)

Induction (raisonner l'enfant lorsqu'il adopte un comportement socialement indésirable ou

dangereux). Les résultats de cette étude indiquent l'utilisation de stratégies d'autoritarisme et de

modification comportementale plus élevées chez les grand-mères seniors (plus de 62 ans) que chez

les grand-mères plus jeunes. Dans les sociétés traditionnelles et collectivistes, l'obéissance de

l'enfant à l'autorité parentale est un comportement socialement admirable. Les menaces physiques,

le châtiment corporel sont vus comme nécessaires dans l'éducation et la socialisation des enfants qui

les transgressent. Les styles disciplinaires des parents kényans sont socialement et culturellement

différents de ceux des parents suédois (Palmérus, 1999). D'autres auteurs, comme Ferguson,

Cassells, MacAllister et Evans (2013) insistent sur la quasi absence d' études sur l'environnement

physique et le développement cognitif et socio-émotionnel de l'enfant en Afrique. Les effets nocifs

de l'environnement, par exemple, les toxines, les polluants, le bruit, la surpopulation, la mauvaise

qualité des logements et de l'air, les sureffectifs des classes, l'accès difficile à des ressources

matérielles telles que l'électricité, la radio, la télévision, le téléphone et le transport, les ordinateurs,

14
les bibliothèques, l'absence de lieux où les enfants peuvent jouer ou l'exiguïté du logement avec des

familles nombreuses impactent le développement cognitif des enfants. Il en est de même du trafic

routier, aérien, des maladies ou de la malnutrition pouvant augmenter le taux d'absentéisme scolaire

des enfants et/ou leur baisse d'attention en classe (Bradley et Putnick, 2012). C'est le cas au Ghana

(Mull et Kirkhorn, 2005) et au Nigeria (Okafor, 2010).

Dans le domaine des théories de l'attribution, Kouabenan (1999) étudie les attributions de

l'accident routier auprès d'un échantillon ivoirien composé de conducteurs professionnels, de

conducteurs particuliers et de piétons. Les conducteurs qu'ils soient professionnels ou particuliers,

attribuent prioritairement les accidents de la route à des facteurs externes (facteurs techniques,

atmosphériques, infrastructures, etc.) alors que les piétons les attribuent massivement à des facteurs

internes aux conducteurs (vitesse excessive, imprudence, non-respect des règles de circulation,

mauvaises manœuvres, etc.). Ces résultats indiquent des biais d'attribution en faveur de

l'endogroupe et en défaveur de l'exogroupe. Il y a là la protection des membres de l'endogroupe au

détriment de ceux de l'exogroupe perçus menaçants à leur existence humaine. Dans le contexte

ivoirien, ces biais sont interprétables par la nature des relations conflictuelles entre les conducteurs

et les piétons. Les premiers se considèrent comme des riches. Ils se croient « possesseurs » de la

route. En revanche, les seconds se considèrent (sont considérés) comme des misérables gens à qui

les conducteurs peuvent ôter la vie. Dans une autre étude, Louakima (2012) manipulant

expérimentalement les appartenances catégorielles du pilote d'avion (noir versus blanc) lors d'une

catastrophe rapporte le même pattern de résultats avec des sujets blancs, mais pas avec des sujets

noirs qui incriminent davantage le pilote noir que le pilote blanc. Il interprète ses résultats obtenus

avec des sujets noirs en s'appuyant sur Jahoda (1961) qui fournit une explication de l'acceptation

des traits négatifs par des Africains en évoquant trois raisons de ce comportement auto-dévalorisant.

Premièrement, le fait que pendant longtemps dans le passé, les Africains ont eu un statut inférieur

dans leur pays. Deuxièmement, l'éventualité que les sentiments de dépréciation de soi ont été

inculqués par certains éducateurs européens à l'écolier africain. Enfin, troisièmement la possibilité

15
que l'intériorisation des valeurs positives attribuées aux Européens ait donné lieu à un effet de

contraste. Il s'agit-là de l'existence d'une culture de honte chez des Noirs ou de la négrophobie.

L'ensemble des attitudes du Noir vis-à-vis des Blancs doit être probablement jugé en fonction des

attitudes des Blancs vis-à-vis du Noir.

Il n'est pas rare de noter qu'un certain nombre de recherches en Afrique subsaharienne soient

notamment financées et guidées par des fonds extérieurs aux universités africaines, par des agences

américaines pour le développement international (USAID), par le Haut Commissariat des Nations

Unies pour les Réfugiés (UNHCR), par exemple dans le cas des réfugiés du Mozambique, du

Zimbabwé, du Congo-Kinshasa, du Congo-Brazzaville, du Mali, de la Côte d'Ivoire ou encore de la

République Centrafricaine.

Dans le cadre de l'enseignement universitaire, des enseignants subsahariens utilisent des

manuels, des concepts, des théories et méthodes psychologiques occidentaux. Ils encouragent leurs

étudiants à employer des tests, des échelles ou autres outils développés dans les pays occidentaux

(Carr et Maclachlan, 1993). Formés dans la tradition occidentale, des psychologues africains

travaillant en Afrique se comportent comme des étrangers ou des enseignants immigrants dans leur

propre continent. Ils enseignent aux étudiants africains la psychologie avec des exemples et des

instruments occidentaux. Ils gardent des liens professionnels et intellectuels plus ou moins étroits

avec les universités occidentales qui les ont formés. Le minimum de leur « respectabilité

scientifique » (Tajfel, 1972) passe par l' Occident. Il y a également l'adoption récente du système

d'études occidental, notamment anglo-saxon appelé LMD (Licence, Master, Doctorat) en Afrique

subsaharienne. Cette adoption de « type neocolonial » (Tiberghien et Beauvois, 2008) formaterait

les étudiants subsahariens selon les normes et les valeurs nord-américaines via les universités

françaises pour les universités africaines francophones. Toutefois, il y a des psychologues africains

formés en Afrique pratiquant un certain nationalisme universitaire face à leurs compatriotes formés

à l'étranger. Afin de ne pas pratiquer une psychologie subsaharienne de sous-traitance, ils plaident

en faveur d'une psychologie sociale plus sociale (Moscovici, 1972) ou d'une psychologie sociale

16
indigène (Adair, 1999). On oublie souvent qu'un « concept exprime une réalité ou un ensemble de

réalités (. . .) qui doit rendre compte, le plus fidèlement possible, des limites de ces réalités et de

leurs contenus spécifiques » (Sow, 1979). La notion d' Œdipe par exemple, relève de la psychologie

occidentale. Sa compréhension, ses significations et axiomes sont de la culture globale occidentale.

Elle n'est ni neutre, ni innocente.

L'Afrique subsaharienne devra produire une recherche innovatrice traitant des thèmes pertinents

en Afrique. Elle pourra tirer profit de ce qui a été fait en Occident pour construire une recherche

véritablement porteuse. Cette recherche produirait des données devant servir d'indicateur pour les

actions en Afrique subsaharienne. Les sources locales seront davantage valorisées que celles

occidentales. Les efforts d'indigèniser le savoir psychologique occidental au Cameroun par

exemple, sont traduits dans le monde de l'éducation, du travail social, de la médecine, du curriculum

de formation issu de l'eurocentrisme (Nsamenang, 2006). Cet auteur plaide en faveur d'une

recherche développementale basée sur l'ontogenèse sociale africaine. Dans ce sens, comme le

suggère Moscovici (1972), le but de la connaissance n'est pas seulement de systématiser ce qui

existe, mais aussi d'inventer ce qui n'existe pas encore.

Ainsi, les travaux de recherche des psychologues sociaux subsahariens et/ ou co-publiés avec

leurs collègues occidentaux nous montrent que si leur terrain et leurs thèmes de recherche sont

subsahariens, il est indiscutable que les théories, les concepts et les méthodes sont largement

d'inspiration occidentale. Ils se contentent d'appliquer à l'enseignement et à la pratique de la

recherche un modèle occidental que tout désigne comme limité, car ne prenant pas en compte les

particularités et les différences des sociabilités, des cultures et des sociétés (Moscovici, 1970), des

écosystèmes psycho-socio-culturels différents ou une bio-écologie différente (Ferguson et Lee,

2013). Les psychologies sociales pratiquées en Afrique subsaharienne forment ce qu'on appelle les

psychologies indigènes.

3. Définitions : psychologies indigènes

17
Les sciences sociales et humaines « postoccidentales » se construisent dans le souci de passer de

l'universalisme occidental au « multiversalisme scientifique » (Kuhn, 2013). Elles contiennent et

saisissent les concepts, les théories et les paradigmes permettant de revisiter, de réinterroger ce qui a

été produit, pensé en Occident. Dans ce travail de refondation des sciences sociales et humaines, par

leur questionnement épistémologique, théorique et méthodologique et/ou politique (Santiago-

Delefosse, 2008), les psychologies indigènes sont des nouveaux centres de production de

connaissances refusant d'imiter les cadres épistémiques occidentaux. Elles « cherchent à montrer

que chaque culture a ses caractères psychologiques propres, correspondant à des modes de

socialisation particuliers et à une écologie particulière et à dénoncer ainsi l'éthnocentrisme

occidental » (Huteau, 2013, p.395). Elles plaident en faveur d'un universalisme du relativisme.

En effet, dans les années 1970, sous l'impulsion de l' Américano-PhilippinVirgilio Enriquez

ayant fait ses études de psychologie à l' Illinois aux Etats-Unis d' Amérique, la psychologie indigène

philippine est née. Son but était de créer une discipline/pratique psychologique propre à la vie

quotidienne et à la personnalité individuelle philippine opposée à l'épistème hégémonique des Etats-

Unis. En d'autres termes, elle avait pour but d'être une psychologie des, pour et par les Philippins

(San Juan, 2006). Des Philippines, le concept de psychologie indigène s'est porté vers l' Asie du

Sud-Est, vers la Chine, vers l' Amérique du Sud et vers l' Afrique (Kim, Yang et Hwang, 2006 ;

Pansu, Dubois et Beauvois, 2013). En Chine par exemple avec le psychologue Yang (2006), ce

mouvement concernait les construits de personnalité comme le traditionalisme/ modernisme,

l'orientation sociale (la perte de face, la relation prédestinée). Ce que l'on appelle la psychologie

indigène dans l'environnement académique s'apparente au drapeau qui est l'emblème de chaque

pays aux Nations Unies.

Ainsi, le concept de psychologie indigène recouvre de multiples significations. On peut le définir

avec Pansu, Dubois et Beauvois (2013, p.89) qui reprennent Ho (1998, p.89) comme « l' étude du

comportement humain et des processus mentaux au sein d'un contexte culturel qui s'appuie sur les

valeurs, les concepts, les systèmes de croyances, les méthodologies et autres ressources indigènes

18
dans le groupe ethnique ou culturel sous investigation ». Ces psychologies sont indigènes parce

qu'elles relèvent de cultures « spécifiques ». Elles sont nées en réaction à la psychologie occidentale

dominante considérant ses contenus, ses instruments d'observation, ses concepts et ses postulats

comme universaux. Elles cherchent à refléter le caractère social, politique et culturel des individus

du monde et sont perçues comme étant capables d'ouvrir, de revigorer et d'améliorer la psychologie

dominante (Allwood et Berry, 2006).

De par le monde, les psychologies indigènes se développent généralement par une série de quatre

stades (Adair, 2006) : importation, implantation, indigénisation, autochnisation.

- Le stade d'importation se caractérise par l'introduction de la discipline la psychologie dans un

autre pays. Elle fait partie des programmes scolaires et universitaires du pays. Les étudiants

nationaux envoyés et formés à l'étranger qui acceptent de rentrer dans leur pays d'origine appliquent

les programmes universitaires des pays formateurs.

- Le stade d'implantation renvoie au retour au pays d'origine des érudits formés à l'étranger. Ils

doivent être utilisés dans leur pays en tant que psychologues. Il est attendu qu'ils conduisent des

recherches susceptibles d'égaler ou de surpasser celles des psychologues occidentaux. Les axes de

recherche doivent concerner les thèmes, les problèmes et les phénomènes qui agitent leur propre

société et culture.

- Le stade d'indigénisation est celui des intellectuels nationaux capables de critiquer les concepts,

les théories et les méthodes occidentaux comme inappropriés aux cultures et sociétés non

occidentales. Ils les adaptent à la langue et à la culture locales. C'est le passage de l'indigénisation

exogène à l'indigénisation endogène. L'indigénisation est donc le stade par lequel une psychologie

importée est transformée en une discipline culturellement saillante ou psychologie indigène.

- Le stade d'autochnisation se réfère au stade conduisant à l'émergence d'une discipline s'auto-

perpétuant indépendamment de sa source importée. Les manuels des auteurs locaux doivent être

édités, publiés et utilisés. Le fonds national pour la recherche doit être disponible. Il est

indispensable d'avoir une masse critique de chercheurs locaux expérimentés et capables de

19
comprendre et d'analyser les problèmes culturels saillants.

Tous ces stades des psychologies indigènes ne s'opèrent pas de manière identique. L'histoire

(colonisée/coloniale), l'économie (pauvre/riche) de chaque pays peuvent influencer l'expression de

ces différents stades. L'évolution d'une science psychologique, suggère Adair (1996), dépend des

ressources structurelles, comme le nombre et la taille des universités locales où les chercheurs et les

professionnels doivent être formés, de la disponibilité financière, de la qualité des académies, de

l'accès aux revues et aux manuels présentant les théories et recherches locales, au choix des thèmes

de recherche considérés comme pertinents pour la recherche, la théorie, la méthodologie. La

psychologie en Afrique subsaharienne qui est la partie du monde la plus économiquement démunie

et la plus colonisée par exemple, correspond davantage aux stades d'importation et d'implantation

qu'aux stades d'autochnisation et d'indigénisation. Les étudiants subsahariens en psychologie

s'attendent plus à lire les manuels et à apprendre les théories, les concepts psychologiques produits

par les psychologues occidentaux que ceux produits par les psychologues subsahariens.

Il s'agit donc pour des chercheurs de la plupart des sociétés et des cultures non occidentales de

développer une science psychologique reflétant leurs propres prémisses sociales et culturelles. Les

psychologies indigènes ne doivent pas être confondues avec les psychologies interculturelle

comparative et culturelle (Hwang et Yang, 2000). La psychologie interculturelle comparative a une

perspective comparative des cultures sur différents critères psychologiques (valeurs, attitudes,

perception, cognition, développement, etc.). Elle est un défi pour ses hypothèses et pratiques et

soulève une prise de conscience de la part de la psychologie dominante qui est une forme «

indigénisée » de la psychologie (Berry, Poortinga, Segall et Dasen, 2002). En revanche, la

psychologie culturelle met en évidence des liens de cohérence entre la psychologie individuelle et

l'appartenance à une culture particulière (Licata et Heine, 2012). La psychologie culturelle peut être

illustrée par les écrits en anthropologie sociale. Les psychologies indigènes se distinguent de ces

autres approches par leur détermination à utiliser leurs propres ressources culturelles dans le

développement de la discipline psychologique. Elles inciteraient « les chercheurs en psychologie à

20
s'interroger sur le caractère indigène de la psychologie qu'ils connaissent, qu'ils pratiquent et qu'ils

enseignent comme une science » (Pansu, Dubois et Beauvois, 2013, p.89).

3.1. Psychologies postoccidentales : diversité des autonomies épistémiques

De nombreux psychologues sociaux chinois (Kwang-Kuo Hwang; Kuo-Shu Yang), coréens

(Sang-Chin Choi, Uichol Kim), indiens (Sinha), philippins (Virgilio Enriquez; Rogelia Pe-Pua),

mexicains (Rolando Diaz-Loving), canadiens (John G. Adair), français (Jean-Léon Beauvois, Serge

Moscovici) et africains (A. Bame Nsamenang) par exemple, considèrent que chaque pays pratique

la psychologie indigène avec ce qu'il est, avec ses particularités qui sont acceptables et/ou acceptées

par les autres d'où l'appellation des psychologies indigènes qui ont des perspectives multiples, des

notions ou/et des concepts divers. Ils « adoptent des concepts indigènes et folkloriques dans le but

de maintenir les faits dans leur version originale » (Yang, 1993, p.37). Dans les psychologies

indigènes d'Asie de l'Est, on relève des concepts japonais de amae (confiance indulgente), chinois

de guanxi (relation humaine) ou encore coréen de chong (attachement affectueux pour une

personne, un lieu ou une personne). Il y a également la notion africaine de Ubuntu qui exprime la

voie africaine de contes humains impliquant l'humanité, l'attention, la compassion, la douceur, le

respect et l'empathie (Holdstock, 1999). Il s'agit par exemple pour l'archevêque anglican Desmond

Tutu d' Afrique du sud de rejeter le sentiment de revanche et d'encourager les accusés noirs et

blancs à confesser leurs violences et exactions contre le pardon. A propos de cette notion de «

Ubuntu », Desmond Tutu (1999, p.34-35) declare : « Lorsque nous voulons faire un compliment

important à quelqu'un, nous disons « Yu, unobuntu » ; « Eh ! Il ou elle est ubuntu ». Ceci signifie

qu'ils sont généreux, hospitaliers, amicaux, bienveillants et compatissants. Ils partagent ce qu'ils ont.

Cela signifie aussi que mon humanité est prise et inextricablement liée avec la leur. Nous

appartenons à un paquet de vie. Nous disons « une personne est une personne à travers les autres

personnes ». Ce n'est pas « Je pense, donc je suis ». Cela veut plutôt dire « Je suis humain parce

que je participe. Je participe, je partage ». D'autres concepts psychologiques sont développés au

21
Malawi : le « Pull Down » (Sous-développement) qui est le fait de croire qu'il y a une motivation

omniprésente et puissante qui agirait en vue d'arrêter le développement national. Dans la plupart des

pays subsahariens, les gouvernants et les gouvernés pensent par exemple que s'ils ne se développent

pas, la raison en revient à l' Occident. Un autre concept est celui de la double démotivation se

référant à la démotivation à la fois des deux groupes, local et expatrié, des travailleurs dans les pays

en développement. Le développement de ces derniers dépend partiellement des managers expatriés

souvent gracieusement payés pour leurs services comparés à leurs homologues locaux. Au Malawi

par exemple, le manager expatrié en éducation, en agriculture, en industrie, dans la santé gagne de

10 à 12 fois plus que le salarié local (Carr et Maclachlan, 1993). Le sur-payement de l'expatrié et le

sous-payement du salarié local peuvent provoquer de la démotivation chez les deux salariés. On

peut également citer le concept de la tolérance tropicale. Face aux différentes pathologies comme

l'épilepsie, la malaria, la maladie mentale, la folie, les gens sont extrêmement tolérants du fait qu'ils

acceptent d'être traités à la fois par le thérapeute traditionnel et le médecin formé à l'occidental et/ou

à la chinoise. Ces différents concepts d'Ubuntu, de sous-développement, de la double démotivation,

de la tolérance tropicale sont pertinents en Afrique subsaharienne et au Malawi. Ils mettent

davantage l'accent sur l'individu collectif que sur l'individu individuel.

Nous voyons là que dans la plupart des régions du monde, les psychologies indigènes sont

pratiquées. Elles sont les tentatives de produire des psychologies locales, des expériences et des

résultats locaux dans les contextes culturellement et historiquement spécifiques. Elles sont perçues

par certains comme étant capables d'enrichir et de revitaliser la psychologie dominante qui est une

forme d'impérialisme culturel perpétuant la colonisation de l'esprit, et par d'autres comme étant

congénitalement incomplètes (Tiberghien et Beauvois, 2008). Les variations culturelles des

définitions des psychologies indigènes selon chaque pays, à l'intérieur d'un même pays ou chaque

continent laissent penser que nous sommes entrés dans une période de postoccidentalisation des

savoirs et de coproduction d'agencements entre les savoirs situés (Roulleau-Berger, 2015). Kwang-

Yeong Shin (2013) parle de double indigénisation des sciences sociales et de comparaison

22
symétrique pour ouvrir une nouvelle voie aux savoirs non hégémoniques. La double indigénisation

signifie, d'une part, considérer les théories occidentales comme indigènes et les évaluer comme

telles, ancrées dans l'histoire occidentale, d'autre part, rétablir les symétries institutionnelles et

résister aux formes de domination dans les champs disciplinaires. Les frontières entre les anciens

centres de production des savoirs (l'Occident) et les anciennes périphéries (Asie du sud-est) sont en

train de laisser place à une pluralité de psychologies indigènes.

3.2. Approches en psychologies indigènes

L'approche correspond à une démarche impliquant le recours à une méthodologie de recherche

particulière. En psychologies indigènes, Adair (1999) distingue quatre approches: linguistique,

empirique, appliquée et pragmatique.

- L'approche linguistique s'intéresse essentiellement aux concepts issus de la langue autochtone

secrétant l'essence de la pensée, des valeurs, des croyances, des idéologies ou des comportements

intra-culturels. Pour entrer dans la culture humaine, il faut s'exercer à l'usage de sa langue qui est un

instrument de communication. L'identification des concepts indigènes spécifiques à chaque langue

doit être suivie par leur « élaboration sémantique » et par leur distinctivité linguistique et culturelle

(Enriquez, 1993). Toutefois, l'approche linguistique est plus constitutive qu' heuristique (Enriquez

et Marcelino, 1984/1989). Elle est souvent rejetée par la recherche occidentale qui valorise ses

propres langues notamment la langue anglaise dans laquelle la recherche est publiée, ses concepts,

ses modèles, ses méthodes, sa philosophie, ses études étiques (le chercheur étudie les

comportements à partir d'une position extérieure au système culturel donné) au détriment de celles

émiques (le chercheur adopte le point de vue des membres du groupe étudié). Les psychologues

subsahariens adoptent davantage ces dernières, mais la tendance actuelle est d'intégrer ces deux

approches dans la même étude (Cheung, Van de Vijver et Leong, 2011).

- L'approche empirique se fonde sur l'expérience et sur l'observation. En psychologies indigènes, il

peut s'agir d'interviews, d'enquêtes par mail, de l'analyse de contenu et de l'analyse bibliométrique

23
(Diaz-Guerrero, 1977 ; Pansu, Dubois et Beauvois, 2013).

- L'approche appliquée se distingue de l'approche fontdamentale. En effet, celle-ci vise à élaborer

des savoirs théoriques permettant la compréhension des états émotifs, affectifs et cognitifs des

paricipants face aux évenements psychologiques et économiques. Un bon acheteur par exemple, en

Afrique subsaharienne, est celui qui sait marchander avec le vendeur. En revanche, l'approche

appliquée concerne principalement l'application des savoirs théoriques, par exemple la résolution

des problèmes sociaux nationaux comme la pauvreté, le sexe et le genre dans le monde

professionnel, le terrorisme transfrontalier. Issue du terrain, cette approche offre des résultats ayant

généralement des retombées préventives et thérapeutiques. Quoique distinctes, ces deux approches

(fondamentale et appliquée) sont interactives: chacune précéde ou suit l'autre.

- Enfin, l'approche pragmatique s'attache aux faits, à la réalité concrète. Les facteurs locaux

influençant la psychologie nationale sont davantage pris en compte que les facteurs universels. Dans

son compte rendu sur la psychologie iranienne, Moghaddam (1987) insiste sur la formation des

psychologues indigènes, la fabrication et la diffusion des manuels locaux, le choix des thèmes de

recherche locaux fondant une psychologie nationale et nationaliste.

Ainsi, dans une recherche donnée, toutes ces approches prises séparément rendent partiellement

compte de la réalité sociale, mais utilisées ensemble elles peuvent se révéler très utiles afin de

donner une vue globale et compléte du phénomène étudié et/ou étudiable. Dans ce cas, Ferguson et

Lee (2013) proposent une approche holistique, multidisciplinaire et multipartite. Ce point de vue

concerne la diversité méthodologique qui n'est pas un chemin unique vers la « vérité »

psychologique.

3.3. Méthodes en psychologies indigènes

L'ensemble des méthodes ou la méthodologie spécificie comment mener à bien la recherche pour

savoir produire des données et les transformer en résultats de recherche. La connaissance, écrivent

Ferreol et Deubel (1993, p.40) est « perçue soit comme un produit qu'il convient de tester ou de

24
valider (logique de la preuve), soit comme un processus dont il importe de reconstituer la genèse

(logique de la découverte). Il faut tenir compte du rapport aux valeurs, des sources de financement

et des conflits d'intérêts ». Ainsi l'insatisfaction des psychologues indigènes pour des résultats

localement obtenus les a conduits à la reconsidération des théories et des méthodes occidentales.

Yang (2000) propose quatre méthodes d'intégration en psychologie interculturelle indigene : (1) l'

intégration empirique (application d'une série de principes communs ou des lois psychologiques) ;

(2) l'intégration théorique (compatibilité d'une théorie avec deux ou plusieurs cultures chrétienne,

confucéenne, musulmane, bouddhiste, animiste) ; (3) la synthèse d'assimilation (rétention des

savoirs sociaux importants et réintroduction des anciens savoirs dans de nouvelles formes adaptées

aux besoins présents), et (4) la synthèse d'accommodation du savoir indigène local au savoir

indigène occidental. Ces quatre méthodes représentent des voies possibles des psychologues dans

les pays en voie de développement. Elles peuvent répondre à l'entreprise académique afin de créer

une psychologie globale résultant des psychologies indigènes des pays en voie de développement,

des pays émergents et des pays développés. Elles utilisent non seulement des participants lettrés,

mais aussi des participants illettrés ou analphabètes. Dans le cas de ces derniers, la présentation

orale ou picturale est utilisée plus que celle écrite de stimulus. Dans le contexte local on utilise

également des équivalences sémantiques lorsqu'on recourt aux tests occidentaux. On suppose

qu'une approche multi-paradigmatique permet d'unifier les méthodes qualitatives et quantitatives.

Différents apports des sciences humaines, sociales et politiques sont nécessaires pour le

psychologue indigène (Diaz-Guerrero, 1993; Berry, Poortinga et Pandey, 1997). Ils privilégient des

études comparatives sans la domination des théories d'une culture donnée. Ce pluralisme

méthodologique serait la voie féconde pour une psychologie sociale subsaharienne devant tenir

compte des variables écologiques, historiques, religieuses, philosophiques, linguistiques pour mieux

comprendre les phénomènes psycho-socio-culturels subsahariens.

3.4. Rôle des langues autochtones en psychologies indigènes

25
Les langues autochtones parlées en Afrique subsaharienne sont plus des langues de culture, de

l'environnement que celles d'affaires, de scolarisation. Elles sont des langues d'appui ou des langues

vertébrales pour l'acquisition des langues adventrices ou langues coloniales comme l'anglais,

l'espagnol, le français et le portugais. Les langues vernaculaires sont utilisées dans les enquêtes,

dans les tests psychométriques, à la maison, au téléphone et dans la vie courante. Elles peuvent

apprendre beaucoup aux chercheurs sur les cultures et sociétés subsahariennes. Vecteurs de la

diffusion des instructions lors des entretiens, de l'expérimentation, les langues autochtones

indiquent l'indigénisation des méthodes. Adair, Puhan et Vohra (1993) notent que les articles ne

précisant pas la langue utilisée (excepté l'anglais) reflètent une insensibilité culturelle. Le rôle de la

langue au stade d'indigénisation peut être mieux compris par une application interculturelle des

mesures empiriques. Néanmoins Church (1987) suggère que le simple fait d'évoquer les mots

langue autochtone peut créer une fausse impression que l'indigénisation n'existe pas véritablement.

Le psychologue chinois Yang (1993) note que, dans notre vie quotidienne nous sommes Chinois.

Dès que nous faisons de la recherche scientifique, nous cessons d'être volontairement ou non

Chinois. Nous devenons des « Occidentaux » ou occidentalisés en empruntant l'anglo-américain.

Des scientifiques des sociétés non occidentales sont plus aptes à écrire et à parler l'anglais

(l'espagnol, le français, le portugais) que leur propre langue. Yang propose de ne plus penser en

anglais et de s'affranchir de sa propre aliénation linguistique. Il est difficile de comprendre un

individu si on ne part pas de ses représentations langagières en contexte socio-éducatif et culturel.

Cependant, pour le psychologue français Beauvois (2006), cela risquerait de déclasser le chercheur.

Dans la même lignée, les psychologues belges Kervyn, Leyens et le journaliste belge Deschamps

(2015) estiment que « tout chercheur qui se respecte publie en anglais » (p.72). Le rédacteur en

chef du Wall Street Journal, Bartley (1993) écrivait : « La langue mondiale est l' anglais » (p.6). La

langue que des personnes de différentes langues et différentes cultures utilisent pour communiquer

entre elles, si c'est la lingua franca mondiale (Fishman, 1977). Les diplomates, les milieux

d'affaires, les scientifiques, les touristes, les prestataires de service, les pilotes de ligne et les

26
contrôleurs aériens communiquent entre eux au moyen de l'anglais considéré comme « déethnicisé

» (ou moins marqué ethniquement). L'anglais est une langue d'affaires, de sciences, de culture et de

migration. Langue scientifiquement incontestable, l'anglais peut être un facteur de promotion des

psychologies indigènes et de visibilité des thèmes localement saillants. Un chercheur ghanéen,

nigérian, kényan par exemple, publiant en anglais présente des thèmes locaux pouvant retenir

l'attention de la psychologie dominante. Il y a alors un fort engouement pour les chercheurs du

monde entier à publier en anglo-américain et dans les revues étrangères de qualité, notamment

nord-américaines. Elles sont considérées comme un modèle et une reconnaissance stimulante pour

les chercheurs. En d'autres termes ces derniers ont tendance à se formater selon les standards

étasuniens. Cette exigence de publier est-elle moins présente chez les psychologues subsahariens

que chez leurs pairs occidentaux? Sont-ils victimes d'un « cens caché » de la part de leurs pairs du

Nord ?

4. Facteurs d’échec et de succès dans le développement de la psychologie sociale

subsaharienne

Il est avéré que l'entrée de la psychologie en Afrique subsaharienne en tant que science et/ou

profession dans les années 1960, est récente. Dans toute activité humaine, les débuts sont difficiles

et longs. Les résultats sont souvent incertains. Cette tardiveté présente des faiblesses et des forces

dans le contexte subsaharien.

4.1. Les faiblesses.

Nous avons indiqué plus haut que le manque de ressources disponibles pour le développement de

la psychologie, le manque d'une masse critique de psychologues formés localement, l'instabilité

politique récurrente, l'oppression politique et idéologique conduisant à la fuite des cerveaux, à

l'élimination physique des intellectuels, à la faible reconnaissance et utilisation par les entreprises

étatiques, para-étatiques et privées, le manque de revue de renommée internationale, l'insuffisance

des communications scientifiques (la tenue irrégulière de séminaires, de conférences et de congrès


27
dans et/ou entre les pays africains ou avec le reste du monde), le manque d'opportunité pour les

psychologues africains dans le monde académique (notamment ceux avec une expérience de

renommée internationale), le racisme institutionnel (Howitt et Owusu-Bempah,1990), l'influence

des psychologues occidentaux sur le développement de la discipline demeurent des facteurs majeurs

du sous-développement de la psychologie en Afrique subsaharienne. Bourdieu (1995) affirme que

tout champ scientifique est animé par des logiques d'un type de politique des relations de pouvoir,

d'autant plus qu'il est traversé par des questions de société plus globales.

On peut ajouter que les conditions de travail des enseignants, des chercheurs et des étudiants

africains dans les universités africaines sont alarmantes. Il manque d'ordinateur, d'imprimante, de

photocopieuse, de bureau climatisé (les températures oscillent entre 30 et 50°). Là où l'équipement

informatique existe, il est soit en panne, soit vétuste. Les coupures d'électricité, d'eau sont

chroniques. Il n' y a pas de délit de bruit en Afrique subsaharienne. Les budgets de recherche sont

quasi absents. Quand ils existent, ils ne couvrent même pas le prix d'un ordinateur d'occasion. Il n' y

a pas de Fondations de recherches. Les bibliothèques universitaires contiennent plus d'ouvrages

anciens que d'ouvrages récents. Elles ne veulent pas ou ne peuvent pas souscrire à long terme (en

ligne ou non) aux périodiques ou à l'achat de nouveaux livres formant des élements de savoirs

féconds et sempiternels. Dans Gargantua Rabelais insiste sur le fait qu'une bonne bibliothèque est

comparable à un chien avec son os. On discerne de humer, sentir et apprécier ces beaux livres de

haute graisse; puis par une lecture attentive et une réflexion assidue, rompre l'os et sucer la

substantifique moelle.

Ainsi, les chercheurs subsahariens vivent dans une précarité financière extrême. Ils gagnent en

moyenne par mois: 150 Euros au Burundi, 1145 Euros au Gabon, 840 Euros au Congo-Brazzaville,

120 Euros au Congo-Kinshasa. Il n' y a pas de paix, de liberté d'expression, de stabilité politique et

d'argent. Le développement de la science et de la technologie ne peuvent se faire que dans un climat

de liberté, de finance, de confiance et de paix comme le montrent les exemples ouest-européens et

nord-américains où la recherche est la plus structurée et la plus féconde.

28
L'Afrique subsaharienne valorise faiblement l'imagination et la créativité. Cela est lié aux

habitudes de penser, de gouverner des hommes et des femmes politiques subsahariens plutôt qu'aux

chercheurs subsahariens eux-mêmes. Le chercheur africain en Afrique subsaharienne publie

rarement ses travaux de recherche. En effet, les sciences sociales et humaines ne pratiquent pas

l'expérimentation de la même façon que les biologistes par exemple. Elles n'ont pas besoin

d'appareils coûteux et complexes. Elles ont besoin de gens de talent et de moyens financiers

acceptables qui permettent aux chercheurs de publier régulièrement leurs travaux. En psychologie

sociale par exemple, les exigences du chercheur moyen ne vont pas bien au-delà de l'ordinateur

personnel, de l'accès aisé à une bonne bibliothèque, d'une petite aide technique en matière

informatique. Souvent, ce chercheur se contente d'équipements aussi « hors d'âge » qu'un stylo et du

papier. Il est heureux s'il peut se rendre à des rencontres professionnelles, nationales et

internationales, s'il peut inviter ses collègues lointains à venir le rencontrer. Il est comblé s'il reçoit

une aide pour ses enquêtes sur le terrain et pour publier ses résultats. Il est bon qu'une recherche une

fois avancée soit soumise à l'examen critique d'autres spécialistes, de partager ses hypothèses avec

les aînés et les cadets. Par des échanges entre collègues, la recherche incite à se poser de nouvelles

questions. Or en Afrique subsaharienne, la recherche est plus discontinue que continue, plus

infructueuse que fructueuse. L'universitaire subsaharien finit par entrer dans le champ politique soit

par conviction, soit par appât du gain facile. La politique est un moyen d'enrichissement personnel,

un privilège. Doquet (2007) note qu'en sciences humaines, les chercheurs maliens manquant de

moyens adoptent des rôles de consultants auprès des ONG et des décideurs de l'Aide au

développement. Ingénieurs-conseils dans des missions dont les thèmes imposés n'ont souvent aucun

lien les uns avec les autres, les chercheurs maliens ont alors peu d'espoir de développer une pensée

continue et fructueuse. Les possibilités de publications des sciences humaines au Mali sont

inexistantes et les travaux d'expertise n'aboutissent qu'à la rédaction de rapports destinés au seul

commanditaire. Ces travaux ne durent que le temps du contrat de recherche. Pour des chercheurs

nationaux qui participent à de tel contrat, il s'agit d'arrondir les fins de mois difficiles. En revanche,

29
pour les ONG il est essentiellement question d'écrire des rapports d'activités et de les présenter aux

pays donateurs afin de solliciter de nouveaux crédits, d'alerter la communauté internationale. Or la

recherche doit s'inscrire dans la durée plutôt que dans l'urgence.

Dans un sub-continent avec peu de ressources financières disponibles, la recherche sans résultats

pratiques est considérée comme étant sans sens. Le chercheur est très peu écouté par les hommes et

les femmes politiques. Il s'installe chez lui de la démotivation encouragée par la non reconnaissance

de son statut. On assiste au déclassement du chercheur subsaharien non encore coopté par les Etats

ou les organismes internationaux. Les représentations sociales du statut du chercheur ne sont pas

toujours positives. En tant qu'agents salariés de l'Etat malien par exemple, les chercheurs sont avant

tout considérés comme une ressource financière obligée et permanente pour leur entourage proche.

En effet, qui jouit au Mali du statut de fonctionnaire est appréhendé comme quelqu'un qui profite

nécessairement de l'argent de la corruption, qu'il doit par la suite nécessairement partager avec les

siens. Le temps consacré par les chercheurs à résoudre les problèmes de leur entourage est déploré

par tous. Dans la résolution des difficultés d'autrui, le temps utilisé est plus important que celui

utilisé pour faire de la recherche. Devant l'impossibilité de satisfaire toutes ces revendications, leur

entourage leur renvoie souvent une image d'échec: le fonctionnaire qui réussit est celui qui aura su

accéder à une position institutionnelle lui garantissant privilèges et conforts personnels.

Les avancées dans les champs des technologies de l'information et de la communication ne

profitent pas véritablement aux chercheurs subsahariens. On conjecture une fracture numérique

entre les chercheurs occidentaux et les chercheurs subsahariens. Les premiers sont susceptibles de

travailler dans de « bonnes » conditions, d'obtenir un congé sabbatique, de voyager à travers le

monde, alors que les seconds travaillent souvent dans les conditions pénibles et voyagent

difficilement. Ces derniers sont soumis à la tyrannie du visa, à la fuite des cerveaux, aux difficultés

de payer leur séjour. Au niveau scientifique, le résultat d'une telle fracture est plus propice au

chercheur occidental qu'au chercheur subsaharien. On peut également noter de la frustration chez ce

dernier. La collaboration entre les chercheurs subsahariens est non seulement difficile avec leurs

30
homologues occidentaux, mais également entre les subsahariens eux-mêmes. Des psychologues

congolais par exemple, ne connaissent pas les thèmes de recherches de leurs collègues camerounais,

kényans, ghanéens. Quand ils le peuvent, ils cherchent à publier leur texte dans les revues de

psychologies occidentales, leur reconnaissance passe plus par l'extérieur que par l'intérieur du sub-

continent africain. Ils ont des difficultés à accéder aux groupes de psychologues de l'Occident

développant activement la psychologie sociale. Dans la diffusion des idées, dans leur acceptation et

dans leur reconnaissance accordées à ceux et à celles qui les produisent, les contacts personnels et

informels sont plus enrichissants que les contacts électroniques.

Les thèmes de la psychologie subsaharienne ne constituent pas un pôle de référence dans les

grandes écoles et universités occidentales (via les communications, les conférences et les revues

majeures). Dans la plupart des cas ils ne sont ni connus, ni reconnus par des psychologues

occidentaux qui ont tendance à favoriser leur propre publication dans leur propre revue. Dans les

grandes bibliothèques occidentales, il est très rare de voir les revues psychologiques des pays

subsahariens. Les psychologues subsahariens sont moins sollicités que leurs pairs occidentaux. Ils

sont victimes d'un « effet de structure » qui les rend moins représentés dans les sciences

psychologiques du fait même des positions dominantes occupées par des chercheurs occidentaux.

Les grands centres de recherche en Occident sont capables de recruter et de contenir une masse

critique des chercheurs de haut niveau. Ce n'est pas le cas des petits centres de recherche

subsahariens qui ne peuvent pas attirer de grands chercheurs. Ces petits centres continuent à

regarder du côté de l'Occident pour structurer et systématiser leur recherche. La diaspora

subsaharienne diplômée en Occident qui aurait pu venir à la rescousse de la psychologie sociale

subsaharienne serait davantage préoccupée par sa survie quotidienne que par la recherche

scientifique. En Suisse par exemple, elle exerce des « petits boulots » (nettoyage les soirs de la

semaine, travail dans un fast food ou dans un supermarché, hôtellerie, veilleurs de nuit dans des

maisons de retraite ou des foyers éducatifs, fret à l'aéroport le week-end, etc.) qui n'ont pas de

rapport avec leur qualification et qui sont difficilement valorisables sur le marché du travail (Guisse

31
et Bolzman, 2015). Il peut s'installer chez elle une « ouvriérisation » intellectuelle. Elle subirait

ainsi ce qu'on appellerait une double peine, dont la première correspondrait à la difficulté de

valoriser ses compétences dans le pays d'adoption et la seconde aux difficultés d'intégration dans le

pays d'origine. Ce gaspillage des ressources humaines qualifiées se traduit en recherche africaine

par la domination des chercheurs étrangers et l'inaptitude des méthodes occidentales à exploiter des

concepts africains (Nsamenang, 1995). Ainsi la visibilité internationale de la psychologie et des

psychologues subsahariens sur l'arène scientifique semble compromise.

4.2. Les forces

On peut signaler des avantages pour un chercheur de travailler en Afrique subsaharienne.

Nsamenang (1995) relève que les sociétés africaines subissant des changements socio-économiques

sont probablement un vaste laboratoire pour le psychologue et les scientifiques sociaux. Elles

offrent la possibilité de chercher différents patterns ou changements de patterns du fonctionnement

psychologique par des variables sociales ou religieuses souvent absentes en psychologie dominante.

Il peut s'agir de construire de nouvelles synthèses d'intégration théorique et /ou empirique. Pour le

psychologue « socialement impliqué », c'est une des manières d'informer le politique subsaharien

aux faits psychologiques qui agitent les sociétés et les cultures subsahariennes. Il peut s'agir

également de faire avancer la science psychologique internationale dans la circulation de

l'information non seulement à sens unique du nord vers le sud, mais aussi à double sens. Une telle

collaboration avec les pays africains est souvent dissuasive, parce qu'il y a des guerres, de

l'instabilité politique chronique, des épidémies. Cela n'est pas insurmontable. En effet, en 1967 par

exemple, lorsque s'est tenue à l'université d' Ibanda au Nigéria la conférence sur le thème de la

recherche en psychologie dans les pays en voie de développement, Henri Tajfel, qui est une des

figures majeures de la psychologie sociale européenne, était présent (Kelman, 1968, p.10-11), alors

qu'il y avait la guerre au Biafra au Nigéria. Cette conférence avait gagné en qualité.

Bien souvent les psychologues subsahariens sont formés en Occident. Etant multiculturels, ils

32
peuvent comprendre à la fois les phénomènes sociaux occidentaux et subsahariens. Ce n'est pas

toujours le cas des psychologues occidentaux formés uniquement en Occident ou n'ayant pas de

contacts avec des Africains en Afrique et avec l'Afrique. Toutefois, Bourdieu (1992) affirme que «

si au niveau du rapport au terrain, le regard autochtone est porteur d'une « familiarité première »,

cette familiarité ne constitue cependant pas en soi un avantage scientifique par rapport au « regard

étranger » nécessairement chargé d'ethnocentrisme. En effet, la pertinence de l'analyse est avant

tout conditionnée par l'objectivation par le chercheur de sa propre situation par rapport à son objet

» (p.55). Somme toute, la psychologie subsaharienne partie intégrante des psychologies indigènes

est, selon Nsamenang (1995), paroissiale et ethnocentrique comme la psychologie dominante.

5. Conclusion

L' objectif de cet article était de présenter les aspects historiques et contemporains de la

psychologie en général et de la psychologie sociale en particulier en Afrique subsaharienne.

Introduite en Afrique subsaharienne par les puissances coloniales européennes, la psychologie

sociale subsaharienne manque cruellement de théories, de concepts et de méthodes spécifiques.

Cette psychologie est subsaharienne, parce que son terrain d'études et ses thèmes de recherche sont

subsahariens. Les psychologues subsahariens sont potentiellement tributaires de ce qui se fait en

psychologie occidentale. Cette partie du continent africain a plus de psychologues de renommée

locale que de psychologues de renommée internationale.

Il est temps pour les psychologues subsahariens d'imaginer de façon indépendante une science

psychologique des sociétés et des cultures subsahariennes, qui fasse pièce aux arguments des

tenants des modèles dits universels (mais en réalité occidentaux ou étasuniens). La psychologie

subsaharienne, qui fait partie des psychologies indigènes est (sera) là pour désoccidentaliser la

psychologie. Elle devra construire ses concepts, ses théories et ses méthodes qui viendront s'inscrire

à côté, avec, voire contre la psychologie occidentale.

33
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