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MONDES
ET
UNIVERS
PARALLÈLES
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D U MÊME AUTEUR

La Mecque de glace — roman, Robert Laffont. 1981.


Aga Khan, les princes nomades, Encre, 1982.
David Bowie, Encre, 1984.
Bob Dylan, vivre à plein, éditions du Cerf, 1986.
Rencontres avec l'Invisible, M.A., 1986.
Guide de la quatrième dimension (avec Sophie Schallenberg),
Henri Veyrier, 1986.
Opéra et Cinéma — préface de Daniel Mesguich, Henri Veyrier,
1987.
L ' O r des druides, Henri Veyrier, 1989.
Génération Aoun — récit, Robert Laffont, 1990.
Les Derniers Matins du monde — roman, éditions de Magrie,
1992.
La Quête du Graal, Dervy, 1993.
Voyage au Centre de la Vie, Robert Laffont, 1993, et éditions
J'ai Lu.
Le Buveur d'Enfance, Littéra, 1994.
Croatia, journal de guerre, Cahiers de nuit, 1995.
Secrets et Magie de l'Histoire de France, Claire Vigne, 1995.
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Jean-Paul Bourre

MONDES
ET
UNIVERS
PARALLÈLES
A
TRAVERS
L'IMAGINAIRE
ET
LES SCIENCES

filipacchi
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© 1996 — ÉDITIONS FILIPACCHI — Société SONODIP


151, rue Anatole-France, 92598 Levallois-Perret Cedex

Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est interdite


sans l'autorisation préalable et écrite de l'éditeur.
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« Lorsque je me fus approché de la huitième enceinte,


et que j'en aperçus le fond, je la vis étinceler de
flammes resplendissantes. »
Dante, L a Divine Comédie.

« Il n'y a pas un monde physique unique.


Nous participons à l'intérieur d'un spectre de
toutes les réalités possibles. »
John A. Wheeler.

« Si ce monde vous ennuie, changez-en ! »


Philip K. Dick
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Voir les mondes

L e Seuil d u j a r d i n

Le 10 août 1901, deux enseignantes anglaises, Charlotte


Moberly et Eleanor Jourdain, se mêlent à la foule des nom-
breux touristes qui découvrent le château de Versailles.
Après avoir visité les appartements royaux, elles se dirigent
vers le Petit Trianon, se perdent sous les frondaisons du
parc, et finissent par trouver un chemin de terre, étrange-
ment vide.
Le témoignage de ces deux Anglaises, enseignantes à
Manchester, est des plus troublants. Les journaux britan-
niques de l'époque relatent ainsi l'aventure surprenante
des deux touristes, considérées comme des personnes
« sérieuses et dignes de foi ».
Miss Moberly raconte :
«Au détour du chemin, vide de touristes, nous avons
croisé deux hommes vêtus de redingotes à l'ancienne mode
et coiffés d'un tricorne. Nous leur avons demandé le chemin
du Petit Trianon. Ils ont tourné la tête dans ma direction, et
c'est alors que je me suis sentie envahie par une profonde
tristesse. Un sentiment étrange, indéfinissable. Je me suis
demandé si je n'étais pas devenue somnambule. »
Miss Moberly et miss Jourdain rencontrèrent dans le parc
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plusieurs personnages en vêtements d'époque, dont un


homme en manteau, assis près d'un pavillon, à la lisière du
bois. Miss Moberly précise :
« Tout autour de moi sembla soudainement anormal, et
déplaisant. Il n'y avait plus d'effet de lumière et d'ombre, et
aucun vent ne faisait bouger les arbres. Tout était intensé-
ment fixe. »
Près du Petit Trianon, les deux touristes anglaises aper-
çurent « une jolie jeune femme blonde aux vêtements
anciens, assise sur un siège de jardin, qui dessinait des esquis-
ses. »
Charlotte Moberly et Eleanor Jourdain s'approchèrent
du Petit Trianon. Dès qu'elles pénétrèrent dans le manoir,
elles se retrouvèrent mêlées à la foule des touristes. Le
charme avait cessé. La vision s'était éteinte. Les deux
Anglaises revenaient d'un voyage de deux siècles dans l'his-
toire. Elles avaient reconnu Louis XVI, dans la personne
de l'homme au manteau, assis près du pavillon.
« La jeune femme blonde ressemblait à la reine Marie-
Antoinette, telle qu'elle apparaît dans les gravures et les
tableaux de l'époque », dirent-elles.
Pour expliquer l'aventure survenue aux deux touristes
anglaises, certains évoquent l'existence d'une poche de
temps parallèle, hors de notre perception, tout à coup visi-
ble, ce 10 août 1901, dans le parc de Versailles.
Charlotte Moberly et Eleanor Jourdain avaient franchi
une porte dimensionnelle, ce que les physiciens appellent
« une fissure » ou « une déchirure de l'espace-temps... »
Plus près de nous, dans son roman visionnaire Le Seuil
du jardin, André Hardellet décrit le moment mystérieux
où son héros — le peintre Masson — change de monde,
sans même s'en apercevoir :
« Masson approchait d'un jardin à l'abandon, désert, tou-
ché par la lumière d'été. Sa porte vermoulue était ouverte,
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mais il n'éprouvait pas l'envie d'y pénétrer ; il lui suffisait


de savoir que ce jardin existait et de le contempler jusqu'à
ses limites perdues dans les broussailles, entre des bassins et
des kiosques en ruine. Il longeait le mur, regardait p a r les
brèches, dans l'attente d'un événement qui ne survenait pas,
mais une attente sans impatience et sûre d'être satisfaite. Puis,
à un moment donné, il se trouvait à l'intérieur du jardin,
bien qu'il n'ait jamais eu conscience du passage. Une paix
surnaturelle l'entourait... »
C'est dans une disposition particulière de l'esprit, un état
hypnotique de la conscience, que Masson franchit le seuil
du jardin... à cause, dira Hardellet, « d'une certaine lumière,
d'une combinaison des formes et du mouvement ».
Le Seuil du jardin agit comme une porte temporelle, une
fissure dans l'espace-temps. Le peintre Masson, comme les
deux Anglaises du parc de Versailles, n'ont qu'un pas à
faire pour changer de monde.
Tous disent qu'ils ne sont pas dans leur état normal. Les
sensations et les émotions sont modifiées. L'une évoque
une étrange tristesse, s'étonne de la fixité intense du pay-
sage, l'autre parle d'un abandon de la conscience, et d'une
paix surnaturelle qui l'entourait.
Le franchissement du seuil qui sépare ce monde des
mondes qu'on dit « invisibles », est toujours lié à un état
particulier de la conscience, proche de la transe et de l'hyp-
nose. C'est ce que démontre aujourd'hui la physique quan-
tique : la modification de la conscience peut changer la per-
ception que nous avons du temps et de l'espace. La
chronologie peut très bien se renverser, et notre présent
immédiat ouvrir une fenêtre sur l'année 1787. Il suffirait
de changer de regard, pour changer de monde réellement.
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L ' a u t r e côté d u m i r o i r

« Si ce monde vous ennuie, changez-en ! », lance Philip


K. Dick au congrès de S.F. de Metz.
Il ne s'agit pas seulement d'un jeu d'esprit, d'une bou-
tade d'un auteur de science-fiction. L'expérience vécue par
les deux Anglaises du Trianon peut parfaitement être
approchée par la physique moderne. Il est vrai que, depuis
la théorie de la relativité, nos certitudes de l'espace et du
temps ne sont plus tout à fait les mêmes.

Au moment où le lecteur pose les yeux sur ces lignes,


par exemple, il a dans les mains un livre avec une appa-
rence solide. Un microscope électronique lui permettrait
de comprendre que ce livre n'existe pas. C'est un tourbillon
de particules, d'atomes, de vibrations. Il suffirait d'augmen-
ter sans cesse la puissance optique du microscope pour
découvrir avec vertige que l'exploration de l'infiniment
petit débouche sur l'infiniment grand. Chaque centimètre
carré contient des milliards d'années-lumière, des distances
infinies. Il n'y a plus ni passé ni futur, mais un présent éter-
nel, sans commencement ni fin. Nous avons atteint une
région de l'espace où les choses sont toujours là. Un peu
comme si vous appuyiez sur la touche avance ou retour
d'un magnétoscope. Les images vous attendent, enroulées
sur l'axe de la bobine. C'est votre perception qui n'est pas
assez complète. Vous n'avez qu'un seul écran pour contrô-
ler le film, image après image.
Si vous aviez un écran par image — donc une multitude
d'écrans fonctionnant simultanément — vous auriez le film
VIVANT et ÉTERNEL, c'est-à-dire la Réalité infinie, avec
toutes ses variations.
Après son voyage dans le mystérieux jardin, le peintre
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Masson expliquera qu'il imaginait « une réserve sans limite


où toute l'histoire des hommes se trouvait inscrite ».
Cette idée d'une vision circulaire, panoramique, qui
embrasserait tous les temps, toutes les dimensions, est celle
des mystiques, qui la considèrent comme le plus haut
niveau d'éveil, d'union « avec Dieu ».
La physique moderne ne fait que redécouvrir ce que les
visionnaires vivaient par la transe, le yoga, et tous les états
intérieurs de la conscience.

Comment peut-on surgir dans les jardins de Versailles


en 1787, au milieu des personnages de l'époque ? Comment
expliquer ce voyage dans le temps ? Sans doute par un
effondrement de notre espace-temps, une déchirure qui
nous ouvre une porte sur l'année 1787. Mais par quel obs-
cur mécanisme ?
Dans l'un des contes des frères Grimm, le héros enfour-
che un cheval magique et lui souffle à l'oreille le nom du
lieu qu'il veut atteindre. En une fraction de seconde, il se
retrouve dans un autre univers. Le temps et la distance ne
comptent pas. Le voyage se fait simultanément. Les auteurs
de science-fiction ont donné des noms divers à cette façon
surprenante de voyager, comme télétransportation, dépla-
cement dans l'hyperespace, ou voyage supra-lumineux. On
peut s'interroger sur la véracité de ces récits où des témoins
racontent leurs voyages dans les autres mondes. Le scepti-
que haussera les épaules, refusant de comprendre. Pour-
tant, depuis Einstein et Werner Heisenberg, la science a
ouvert une fenêtre sur ces autres dimensions. Elle affirme
que nos croyances ordinaires sur la solidité de la matière,
la structure du temps, ne sont qu'une parfaite illusion, pro-
fondément enracinée depuis des siècles.
Le mathématicien Rudy Rucker révèle : « Il y a une
chance pour qu'en manipulant des systèmes très massifs —
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comme les trous noirs — on puisse peut-être arriver à défor-


mer l'espace et le temps de façon à rendre possible ces
espèces de bonds dans l'espace-temps qu'exigent le voyage
dans le temps et le voyage supra-lumineux. » 1
Il signale l'un des nombreux paradoxes que rencontrerait
le voyageur dimensionnel : « Une fois que vous voyagez
plus vite que la lumière, vous voyagez en fait dans le passé
par rapport à certains observateurs. Cela étant, vous pouvez
vous retrouver dans votre propre passé. En d'autres termes,
un voyageur supra-lumineux peut revenir de son voyage
avant de l'avoir commencé — et cela, c'est le voyage dans
le temps. »
Rudy Rucker insiste lui aussi sur la simultanéité du
voyage. Le voyage ne commence pas. Il a lieu instantané-
ment. Il se situe en dehors du temps.

C o m m e n t sortir d u t e m p s

Si l'on en croit les théoriciens de la physique moderne,


celui qui remonterait le temps ne voyagerait pas sur la
même route, dans l'autre sens. Il n'emprunterait pas la
même ligne du temps, et l'on ne verrait pas les aiguilles de
sa montre se mettre à tourner à l'envers. Par sa vitesse
absolue de propulsion, il échapperait au temps et surgirait
immédiatement en 1787, dans la Gaule des premiers siè-
cles, ou à l'époque des dinosaures.
Le voyageur dimensionnel n'emprunte pas une route
qu'on peut mesurer en terme de temps et d'espace à par-
courir. Il ne se déplace pas. Il se contente tout simplement
de franchir une porte, l'un de ces seuils magiques qui ont
1. Rudy Rucker, La Quatrième Dimension, Le Seuil, 1985.
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le pouvoir de nous basculer aussitôt dans une autre dimen-


sion.
Pour changer de monde, il faut d'abord réunir certaines
conditions qui permettront l'effondrement de notre espace-
temps. D'après les physiciens, ces conditions sont réunies
dans les trous noirs, qu'on situe très loin, au-delà de notre
système solaire. Celui qui voudrait voyager à travers un
trou noir devrait d'abord faire un voyage spatial de plu-
sieurs milliers d'années-lumière. Une vie ne lui suffirait pas.
Ainsi sommes-nous dans l'incapacité d'atteindre l'une de
ces portes dimensionnelles, l'un de ces lieux où l'espace et
le temps s'effondrent. Nous sommes rivés au sol, et même
si nous le pouvions, qui aurait envie de se jeter dans ces
broyeuses géantes que sont les trous noirs, véritables tour-
billons d'antimatière ?

Un film de science-fiction, produit par Walt Disney,


raconte la plongée d'un vaisseau spatial à l'intérieur d'un
trou noir. On y voit les héros subir d'incroyables turbu-
lences magnétiques, emportés dans la spirale géante du
trou noir.
Le vaisseau est aspiré jusqu'au centre du trou noir, que
les physiciens appellent « point de singularité ». Ce nom
étrange désigne la porte, qui communique sur les autres
mondes. C'est ce que révèle Jean-Pierre Luminet, astro-
nome à l'Observatoire de Meudon et chargé de recherches
au CNRS :
« La richesse structurelle du trou noir en rotation ouvre
des perspectives d'exploration passionnantes. Il est théori-
quement possible de pénétrer à l'intérieur du trou noir, et de
ressortir pour déboucher dans d'autres univers exté-
rieurs... » 1
1. Jean-Pierre Luminet, Les Trous Noirs, Pierre Belfond, 1987.
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Mais il précise : « Quand à l'autre côté de la singularité,


c'est un morceau d'espace-temps spatialement infini, dans
lequel les distances sont " négatives " ».
Les propriétés des trous noirs sont un véritable casse-
tête pour la logique cartésienne. On apprend qu'à l'inté-
rieur du tourbillon « l'espace et le temps perdent leur iden-
tité. Les règles permettant de mesurer distances et durées y
ont un comportement aberrant ; l'une devient infinie, l'autre
nulle. »
Essayons d'imaginer ce que seraient une distance infinie
et une durée nulle. La distance infinie indique qu'il y a un
déplacement, et la durée « négative » que ce déplacement
se fait instantanément.
Nous voici revenus au cheval magique du conte de
Grimm. Le voyage est immédiat. Il échappe au temps. Pour
Jean-Pierre Luminet, quelle que soit la puissance de ses
moteurs, le vaisseau spatial emporté dans la spirale d'un
trou noir « ne mettrait qu'un dix millième de seconde pour
l'explorer ».
Toutefois, notre problème reste le même. Le navigateur
hardi qui voudrait tenter l'aventure est dans l'incapacité
matérielle de s'approcher d'un trou noir. Trop loin, et beau-
coup trop dangereux. Les portes nous sont définitivement
fermées. Il nous reste les récits de science-fiction, le voyage
des mystiques — comme Dante, qui affirma avoir traversé
les portes —, ou la description poétique du maelstrôm, lais-
sée par Edgar Poe dans le Manuscrit trouvé dans une bou-
teille. Le héros lancé dans la spirale géante s'écrie :
« Je fus possédé de la plus ardente curiosité relativement
au tourbillon lui-même. Je sentis positivement le désir
d'explorer ses profondeurs, même au prix du sacrifice que
j'allais faire ; mon principal chagrin était de penser que je
ne pourrais jamais raconter à mes camarades les mystères
que j'allais connaître. Mais il me reste peu de temps pour
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rêver à ma destinée ! Les cercles se rétrécissent rapidement


— nous plongeons follement dans l'étreinte du tourbillon —
et, à travers le mugissement, le beuglement et le détonnement
de l'Océan et de la tempête, le navire sombre — oh Dieu !
— il se dérobe, il sombre ! »
Nous pouvons rêver sur les œuvres des poètes, des vision-
naires, en imaginant les péripéties du voyage. Nous ne
quittons pas la solidité du fauteuil, et ce livre est toujours
là, avec son poids de papier, sa présence habituelle, maté-
rielle.
Les poètes et les mystiques ont-ils rêvé leur traversée
des mondes multiples, ou bien ont-ils réellement accompli
le voyage ?

Le passage d'un monde à l'autre est-il possible ? Si l'on


en croit les affirmations de William Blake, qui déclarait en
1793 avoir visité plusieurs mondes, il n'est pas nécessaire
d'aller à la rencontre d'un tourbillon d'antimatière, aux
confins des galaxies. Le voyage peut être réalisé instanta-
nément, là où nous sommes, — un peu comme le magicien
qui change de monde en claquant des doigts.
Nous avons vu qu'il est nécessaire de réunir certaines
conditions, pour que l'espace-temps s'effondre et nous pro-
pulse dans un autre monde, et que ces conditions sont pré-
sentes dans les trous noirs. Comment réunir ces conditions
dans notre environnement quotidien ?
Une fois de plus la physique moderne vient au secours
du voyageur hardi. Il n'est pas nécessaire d'aller chercher
les trous noirs aux confins de l'univers, car ils sont ici, réel-
lement, là où nous sommes.
Les physiciens John A. Wheeler et Jacques Sarfatti décri-
vent la réalité qui nous environne comme « un bouillonne-
ment quantique », une sorte d'océan de particules et de
vibrations, sans cesse agité. Ils considèrent notre monde
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matériel, quotidien, que nous imaginons stable et solide,


« comme une mer turbulente formée de micro-trous noirs...
Ces minuscules trous noirs apparaissent et disparaissent
continuellement. Diverses forces électromagnétiques et gra-
vitationnelles peuvent agir sur ce bouillonnement et former
des modèles vibratoires. Ces modèles agissent les uns sur les
autres pour former des atomes, qui agissent à leur tour pour
former des molécules, qui agissent enfin pour former la subs-
tance du monde physique ».1
Ainsi, chacune des bulles qui constituent le bouillonne-
ment de la matière, qu'on imagine à tort solide et stable,
est un micro-trou noir, qui possède les mêmes propriétés
que les trous noirs astronomiques. Nous sommes envi-
ronnés de micro-portes dimensionnelles. Elles sont là, par-
tout, dans l'air que nous respirons, dans la matière de ce
livre, dans le bois de la table, ou le granit d'une montagne.
Wheeler appelle les micro-trous noirs des wormholes —
des « tourbillons ». Il affirme que c'est par eux que nous
pouvons sortir du temps et changer de monde. Les raisons
tiennent en quelques mots, qu'il énonce ainsi, sous forme
de théorème :
« Les wormholes forment donc des trous dans l'espace-
temps. Ils créent une interconnexion mettant chaque point
de l'espace en contact avec tous les autres. »
Swedenborg, Dante ou William Blake, visionnaires et
précurseurs, ont-ils utilisé les micro-trous noirs dont parle
Wheeler pour changer de mondes ?

Au XVIII siècle, le graveur-poète William Blake, auteur


du Mariage du Ciel et de l'Enfer, déclare qu'il peut voyager
dans les autres mondes, et s'entretenir avec les esprits.
1. Michael Talbot, Mysticisme et Physique Nouvelle, Mercure de France-Le
Mail, 1984.
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Pour William Gibson, ce monde existe, et il y envoie ses


cybernautes, les « voyageurs du Cyberespace ». Pour James
Cameron, qui écrivit le scénario de Strange Days, film apo-
calyptique sur la réalité virtuelle, les voyages proposés par
Gibson seront possibles d'ici cinquante ans.

Comment les bourlingueurs dimensionnels de Gibson


pénètrent-ils dans le Cyberespace ?
« Il passait ses journées entières avec ses consoles, ses
orgues FX, ses holoprojecteurs, et ne sortait que lorsqu'il
avait faim... Il enfila l'adaptateur Hitachi dans sa douille, se
disposa les électrodes sur le front, et il cliqua.
— ... Ils furent aspirés au-delà du rideau de laine rancie
dans un tourbillon de poussière, basculant en chute libre
dans un corridor cylindrique de béton lunaire cannelé,
annelé de néons blancs à deux mètres d'intervalles. Le cor-
ridor se rétrécit soudain, s'incurva, se dédoubla... » 1
Ou bien :
« Les données en mémoire centrale montent autour de
nous comme des trains de marchandises à la verticale,
affectées de différentes couleurs selon leur code d'accès... Au
cœur des ténèbres, dans le calme central, les générateurs
déchirent la nuit de leurs tourbillons de lumière... Nous
sommes suspendus au centre d'une silencieuse explosion au
ralenti, fragments de glace en dégringolade éternelle, et la
voix de Bobby me parvient à travers des années-lumière
d'illusions de vide électronique. » 2

Toutes ces descriptions racontent un voyage fait dans le


réseau géant des communications, considéré par Gibson et
ses adeptes comme un univers réel :
1. Neuromancien, opus cité.
2. Gibson, Gravé sur chrome, opus cité.
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« Vivre ici, dit-il, c'est vivre pour de vrai. Il n'y a pas de


différence. » 1
Les personnages mutants de Gibson utilisent les hautes
technologies comme nous ne savons pas encore le faire.
Certains portent des implants électroniques dans le cer-
veau, se sont fait greffer des yeux artificiels, des amplifica-
teurs intégrés, des microprocesseurs. Chacun d'eux est déjà
une extension du Cyberespace. Il est capable de plonger
dans le vide électronique qui prend l'apparence d'architec-
ture néo-aztèque, jungle bolivienne, paysages de l'arctique,
villes étranges... « vastes organismes uniques codés dans le
silicone ».
Pour Roy Ascott, prophète du Cyberespace, nous
sommes à l'aube d'une grande mutation. Il affirme que la
pratique du Cyberespace réveille des zones obscures du
cerveau qu'il nomme « hypercortex ».
Le fait de « zapper d'un esprit à un autre, plus vite que
la lumière ne peut le permettre, indique que les choses sont
en train de changer. Nous entrons dans un monde de
réseaux, dans un univers postbiologique ».
Le Cyberespace a ses détracteurs, qui le décrivent
comme un univers déshumanisé, dangereux pour l'homme.
En 1995, le philosophe Jean Baudrillard lança la croisade
anticyberespace :
« L'homme virtuel, immobile devant son ordinateur, fait
l'amour par écran et ses cours par téléconférence. Il devient
un handicapé moteur, et sans doute aussi cérébral. »
Paul Virilio répond, dans Le Monde diplomatique :
« Le cyberespace est une forme nouvelle de perspective.
Une perspective tactile... Toucher à distance, sentir à dis-
tance, c'est déplacer la perspective vers un domaine qui lui
1. Neuromancien, opus cité.
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échapperait : le contact, le télécontact. Nous nous trouvons


devant un phénomène nouveau : la désorientation. »

Certains allumés du Web, des fanas de l'Internet, guet-


tent le développement des technologies, comme on sur-
veille la météo marine avant une course en mer. Ceux-là
sont prêts à faire le voyage. Ils considèrent réellement le
Cyberespace comme un espace dimensionnel. On peut lire
les messages de ces explorateurs de l'Internet, dans la page
courrier des journaux spécialisés.
« La révolution électronique est en marche. C'est la mise
en perspective selon plus d'axes que n'en contient le simple
point de vue. »
Ou bien, plus énigmatique : « Internet découvre Interac-
tif.. http /// www. planète. Net... Depuis, le vide sidéral. Rien.
La neige du Web. Trou noir du réseau... » 1
Tous rêvent de s'embarquer physiquement dans les
dédales du Cyberespace. De devenir les Christophe
Colomb, les Cortez ou les Marco Polo de ce nouveau
monde.
Ceux qui naviguent sur les vagues virtuelles de l'Internet
portent le nom de surfeurs, référence sans doute au Surfeur
d'argent des éditions Marvel qu'on voit glisser à travers les
espaces galactiques, explorant les mondes à la vitesse de la
lumière.
L'un d'eux, Francis B. est l'un de ces aventuriers du
Cyberspace, un surfeur virtuel. Musicien de talent — vir-
tuose des claviers au sein du groupe Métisse — il a installé
son Pentium 90 à Royat, dans une région de volcans très
forte en tellurisme.
Fenêtre ouverte sur les volcans d'Auvergne vieux de cent
1. Lu dans la page courrier du magazine Univers Interactif n° 7,
février/mars 1996.
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millions d'années, Francis se déplace sur Internet, cherche


les communications, les passages. Sur son lecteur-laser
tourne en permanence Black Nile, du saxophoniste Wayne
Shorter.
« J'ai découvert, dit-il, un village virtuel On y accède p a r
le serveur Villagina. Il suffit de te créer un personnage, une
doublure, avec une identité, pour te déplacer à l'intérieur du
village, communiquer avec d'autres doubles virtuels en pro-
venance de Tokyo, New York, Manille, Londres ou Paris...
en temps réel. Le village possède sa gazette locale, qui
raconte les événements, les rencontres, les faits divers, c'est-
à-dire ce que vivent entre eux les doubles virtuels... Bien sûr,
les technologies ne permettent pas encore de créer un double
virtuel à trois dimensions, un hologramme, relié à une
" I.A. ", une intelligence artificielle, comme dans " Neuro-
mancien " de William Gibson... pas encore. »
Les surfeurs se contentent pour l'instant de glisser sur
les vagues de l'Internet. Dans un avenir très proche, ils
descendront à l'intérieur du Cyberespace, doublure
consciente d'eux-mêmes, dans le rôle du pilote dimen-
sionnel.
« Et pourquoi pas la téléportation ? » interroge Joël de
Rosnay, directeur du Développement et des Relations
Internationales à la Cité des Sciences. Dans le magazine
Univers Interactif, il explique de quelle façon on pourrait
envoyer sa propre doublure virtuelle, instantanément, à
l'autre bout de la planète :
« On réalise le clone virtuel de quelqu'un par scanning
laser, on comprime le tout et on l'expédie à 128 mégabits
par seconde dans des petits trains ATM pour le redéployer,
grâce à une caméra holographique en 3D, à dix mille kilo-
mètres de là. Et voilà, une silhouette analogue à Schwarze-
negger dans Total Recall ou à Obiwan Kenobi dans La
Guerre des étoiles apparaît, animée à distance par son clone
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réel, qui le fait parler et bouger. Est-ce vraiment une forme


de téléportation ou un simulacre de téléprésence ? » (Inte-
ractif, mars 96).
Nous serons bientôt capables de nous dédoubler, de nous
multiplier virtuellement, et d'envoyer une image virtuelle
de nous-mêmes dans le passé ou le futur, de la même façon
que Günter Nimtz envoya des bribes de la 40e Symphonie
de Mozart.

La transcommunication

La communication avec les autres mondes prend parfois


des aspects surprenants. Des messages nous arrivent, là où
nous ne les attendons pas. Dans les bruits parasites d'une
cassette vierge, ou sur la neige d'un écran de télévision, à
la fin des émissions.
Cette technique bien connue des parapsychologues a
aujourd'hui ses adeptes, qui passent des heures en attente
devant l'écran vide d'un téléviseur, guettent l'Eurosignal
en fin de bande F.M., ou les bruits blancs entre deux sta-
tions de radio.
Cette technique de contact — souvent proche de l'hal-
lucination — a été inaugurée par Friedrich Jürgenson, le
12 juin 1959. Il affirma avoir capté des voix de morts, alors
qu'il enregistrait des oiseaux près de Stockholm.
En 1964, Constantin Raudive laissa son magnétophone
tourner, chez lui, dans une pièce vide. Le lendemain, en
écoutant la bande, il entendit sa mère morte l'appeler par
son diminutif : « Kosti, Kosti ! » Par la suite, Raudive
inventa le « psychophone » pour dialoguer avec les morts.
S'agit-il d'une escroquerie, ou de personnes hallucinées,
comme on en voit beaucoup dans les hôpitaux psychiatri-
ques ? En tout cas, des milliers de personnes à travers le
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monde s'essaient à la transcommunication, recherchant les


contacts audio ou vidéo avec l'autre monde. Le matériel
utilisé évoque le laboratoire du Dr Mabuse : magnéto-
phone, magnétoscope, microphone, haut-parleur, casque
stéréo, oscilloscope, rayon laser... Rien ne manque à la
panoplie du détective des autres mondes.
Quelques messages captés par les adeptes de la trans-
communication : un message de Jupiter, Edgar Poe dans sa
maison de Baltimore, Beethoven composant une sonate, la
reine d'Egypte dans la pyramide de Chéops, des habitants
d'Alpha du Centaure, communiquant à l'aide de voix syn-
thétiques...

La technique de transcommunication est très souvent la


même. On enregistre le vide, puis on réécoute la bande :
« On pourrait entendre plusieurs voix de défunts différents
au même endroit de la bande même si on change la vitesse
de défilement ou si on la lit à l'envers... »
Pour le téléviseur : « Photographier ou filmer avec divers
périphériques le téléviseur allumé ou éteint. Il peut être réglé
sur le canal UHF 47. Une bande de papier peint moucheté
contre l'écran peut aider à décrypter l'image du défunt, ou
de l'entité. »
On apprend que le C.E.T.L. (Centre d'Etude sur la
Transcommunication du Luxembourg) aurait mis au point
de nouvelles techniques, sur les conseils d'une entité appe-
lée « Le Technicien ».
«C'est une sorte " d'entité-standardiste " qui n'aurait
jamais vécu sur Terre mais qui prévient du début des mes-
sages et des fins de communications en allemand (" Kontakt
Ende "). »
Pendant que les transcommunicateurs invoquent Le
1. Cf. Univers Interactif
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Technicien, devant l'écran vide d'un téléviseur, Carl Sagan


prophétise :
« Peut-être les messages sont-ils déjà là, inscrits au cœur
de notre expérience quotidienne, et sommes-nous mentale-
ment incapables de les détecter. Peut-être une civilisation très
avancée a-t-elle le pouvoir de disposer secrètement ses mes-
sages dans la trame de notre existence la plus coutu-
mière... » 1
Le Technicien existe-t-il, quelque part dans la zone
d'échanges électromagnétiques, où se croisent les ondes
radio, les images de télévision et les messages informati-
ques ? Peut-être n'est-il qu'une construction virtuelle, plus
commode pour la logique du système... comme le sont les
constructions théoriques sur le big-bang, les particules ato-
miques, la réalité de la matière.

Voir l'invisible

Ce que nous voyons avec nos yeux physiques n'est pas


une image réelle, définitive. Ce n'est qu'un aspect du réel.
Il y a d'autres espaces, d'autres univers à l'intérieur d'un
seul grain de sable. Nos perceptions, même les plus affi-
nées, sont encore trop limitées et il nous faut l'aide de puis-
santes prothèses technologiques, pour essayer de voir les
autres réalités... un microscope électronique, une sonde
spatiale, ou un accélérateur de particules. Les mondes
parallèles commencent derrière la lentille du microscope,
avant de se déployer dans d'immenses paysages dimen-
sionnels.
La vision d'une solution chimique, observée dans l'objec-
tif d'un microscope, est un spectacle fascinant. D'abord, on
1. Carl Sagan, opus cité.
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ne voit rien, et puis sous l'action d'un élément extérieur —


variation de température, choc, poussière — se forment en
différents points de la goutte de minuscules cristaux bril-
lants qui se mettent à grandir. Pendant un bref instant, ils
forment une figure parfaite, une image d'ordre et de
beauté. Puis ils se contractent, se déploient, donnent nais-
sance à de nouvelles figures. On assiste en direct à la nais-
sance et à la fin d'un monde. Sur une échelle de temps
différente, cette naissance et cette mort se déploient dans
un univers gigantesque dans lequel le temps coule aussi
lentement que le nôtre.
Nos perceptions ne sont pas assez fines pour se glisser à
travers la matière solide. Utilisons une caméra thermogra-
phique pour visualiser un couple en train de faire l'amour,
et pour photographier son désir, ses émotions.
Les deux corps émettent un rayonnement thermique qui
rayonne essentiellement dans l'infrarouge. On peut donc
photographier les différentes parties du corps, plus chau-
des, plus tièdes ou plus froides, et voir apparaître les zones
de tension érotique. Cette expérience, réalisée dans les
laboratoires d'Osaka au Japon, porte le nom poétique de
« l'amour en couleurs ».
« Lors d'une étreinte amoureuse, le système vasculaire des
deux individus dégage de la chaleur : les zones apparaissent,
des plus chaudes aux plus froides, en blanc, rouge, jaune,
vert, bleu et violet. La caméra thermique montre qu'une
grande différence de température apparaît au moment du
baiser... », écrit Sophie Rigal, en relatant l'expérience
d'Osaka.

La multiplication des expériences pour saisir et photo-


graphier les autres réalités, se heurte à un obstacle. Il existe

1. Sophie Rigal dans Science et Avenir, opus cité.


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une limite qu'on ne peut pas franchir. Nous sommes au


cœur même de la matière, et on ne peut pas aller plus avant.
Ainsi les photographies des quarks, les plus petites parti-
cules atomiques que nous connaissons. La physique
moderne ne va pas plus loin que le quark. La matière
se divise jusqu'au quark. Il est le fondement de toute
chose. La brique ultime... du moins dans l'état actuel des
sciences.
Sur les photographies, on ne voit pas le quark, qui reste
invisible, mais un bouquet étroit de particules éjecté par le
quark, qui permet de deviner sa présence. On ne capture
que sa signature. La particule reste invisible, mais on la voit
vivre, respirer, éjecter des jets de matière.
L'invisible ainsi saisi, photographié, peut donner le ver-
tige et changer progressivement notre façon de sentir et de
voir. Marc Collins, physicien des particules, avait fixé des
semelles de plomb à ses pantoufles d'appartement, parce
qu'il avait peur du vide. Quand il marchait, il n'éprouvait
plus la résistance solide du plancher. Il ressentait partout
la présence de l'infini dans la matière. Ses expériences sur
les états énergétiques et les autres visions de la réalité
avaient fini par modifier ses perceptions.
Les chercheurs japonais de l'université de Tottori
(Osaka) ont été beaucoup plus loin dans l'exploration de
l'invisible. Ils ont tenté de photographier les rêves. L'enre-
gistreur des rêves, des pensées et des émotions, fait partie
des technologies prochaines, si l'on en croit l'expérience
récente faite à l'université de Tottori.
Une représentation mentale — une pensée, une idée, un
1. En mars 1996, les physiciens du Fermilab de Chicago ont découvert des
particules plus petites que les quarks, à l'intérieur des quarks ! A la suite de
violentes collisions de particules dans le Tevatron de Chicago « des trajec-
toires de particules inattendues ont été observées, qui pourraient signifier l'exis-
tence d'une structure interne aux quarks ».
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rêve — correspond à un état physico-chimique particulier


du cerveau. On sait que des ondes cérébrales, appelées
P300, apparaissent lorsqu'on se concentre sur une idée ou
sur une image. Sur l'électroencéphalogramme, le tracé n'est
jamais le même.
Les chercheurs de Tottori ont demandé à un volontaire
de se concentrer sur un mot, parmi une série de mots ins-
crits sur l'écran d'un ordinateur. L'homme avait la tête cou-
verte d'électrodes reliées à un électroencéphalogramme.
L'ordinateur analyse alors la signature des ondes céré-
brales de chacun des mots, puis compare avec le tracé
d'ondes du volontaire, au moment où il se concentre sur
un seul mot.
« Il faut vingt-cinq secondes pour savoir lequel des mots
la personne a choisi en pensée », explique Michio Inoué,
responsable du Département de l'ingénierie de l'informa-
tion.
L'application est vertigineuse. « Pour photographier un
rêve, explique Yuri Hana, il suffirait de pouvoir identifier
la multitude des tracés, de les traduire en onde, puis en forme,
et puis en vision, à l'aide d'un ordinateur numérique qui
reconstituerait les scènes du rêve sous forme d'images de
synthèse. »

La prochaine étape

Ces dernières années, de nouvelles lignes de spéculations


sont apparues, au sujet des mondes dimensionnels. La théo-
rie des « super strings » des physiciens Michio Taku, auteur
de Beyond Einstein, et Jennifer Trainer, conséquence de la
relativité générale. Pour eux, l'Univers serait né d'un noyau
à dix dimensions qui était instable. Au moment de la créa-
tion de notre univers, cette instabilité a modifié l'équilibre
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des forces en présence. Selon Michio Taku : «A ce


moment-là de la création, six dimensions se sont repliées sur
elles-mêmes, laissant intact notre univers en quatre dimen-
sions. »
Cette quête des dimensions perdues a été celle de nom-
breux visionnaires, comme Alfred Kubin qui explora
L'Autre Côté, ou Gustav Meyrink, l'auteur du Golem et du
Visage Vert1 Déjà Novalis, le poète romantique, déclarait
au XIX siècle : « Nous rêvons de voyage à travers l'univers.
L'univers n'est-il pas en nous, avec ses mondes, son passé,
son futur ? »
L'imaginaire apparaît aujourd'hui comme un autre
aspect du réel, un territoire inconnu, virtuel, qu'on peut
tirer vers soi et rendre visible.
Philippe Quéau écrit dans L'Eloge de la simulation:
« Les aspects les plus enfouis de la réalité ne sont pas pour
a u t a n t inaccessibles. O n p e u t les capturer, les enregistrer. » 2
Les sciences ont quitté depuis longtemps leurs certitudes,
leurs œillères, leurs affirmations pompeuses, rigides. Elles
sont devenues beaucoup plus fluides, presque immatériel-
les. Elles touchent à l'invisible, et nous forcent à voir autre-
ment.
Les croyances les plus folles peuvent être mesurées,
quantifiées, et parfois même vérifiées par l'expérience.
Dans le même temps, nos perceptions bougent, se modi-
fient, s'affinent. L'un ne va pas sans l'autre. Nous voici à
l'aube d'une grande mutation, qui concerne l'homme et sa
vision du monde. Chaque jour, il apprend à déchiffrer
l'invisible. Les récits des visionnaires ne sont plus des fabu-
1. Gustav Meyrink, né en 1868 à Vienne, auteur de romans initiatiques
sur l'accès aux autres réalités, dont Le Golem et Le Visage Vert, éditions de
la Colombe.
2. Philippe Quéau, Eloge de la simulation, Champ Vallon — INA. 1986.
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lations, et les univers qu'ils décrivent sont aussi réels que


l'univers apparemment solide dans lequel nous vivons.
« On pénètre un macro ou un micro-monde. Dans les cris-
taux, on visite à l'aide du microscope électronique des pay-
sages sévères d'atomes alignés, et avec le télescope, on erre
dans la distribution fantaisiste des galaxies. Sans aller aussi
loin, on peut, d'un côté, observer des acariens gigantesques
dans les poussières du tapis, et de l'autre, se confronter, à
bord d'un vaisseau interplanétaire, à des planètes géantes »,
écrit Paul Caro, délégué aux affaires scientifiques à la Cité
des Sciences.

Cette magie est celle des nouvelles technologies. Grâce


à elles, nous avons la possibilité de faire bouger notre
regard, nos sensations, de modifier nos perceptions, et
même de rencontrer des êtres virtuels.
« Nous ne sommes que temporairement enfermés dans
nos structures, dans la matière du monde physique », affirme
le physicien Michael Talbot.
Il semble que l'humanité soit programmée pour la plus
prodigieuse des aventures, depuis l'apparition de la vie sur
terre. L'exploration des autres univers, et en même temps
celle de sa conscience, du mystère de son espace-temps.
Prochaines étapes annoncées : la téléportation d'images
virtuelles sur le réseau Internet, des expériences à Stanford
(Californie) sur la symétrie entre matière et antimatière,
et deux missions de la NASA, à bord de la navette en 1998,
dont une depuis la station spatiale internationale en 2001.
Ce n'est que le début de la grande mutation. L'histoire
ne s'arrête pas là.
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REMERCIEMENTS

L'auteur tient à remercier Didier de Plaige, Gérard


Lemaire, Michel Alexandre dit « Skipper », et l'équipe de
radio Ici-et-Maintenant (88,2 FM)
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