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« Personne n'est puni pour avoir voulu la punition, mais pour avoir voulu une

action punissable ; car il n'y plus de punition dès qu'il ne vous arrive que ce
qu'on veut, et il est impossible de vouloir être puni. — Dire : je consens à être
puni, si je tue quelqu'un, ne signifie rien autre chose, sinon : je me soumets, avec
tous les autres, aux lois qui naturellement seront aussi des lois pénales, s'il y a
des coupables dans le peuple. Il est impossible que, comme colégislateur, dictant
la loi pénale, je sois la même personne qui, comme sujet, est punie au nom de
cette loi ; car, sous ce dernier rapport, c'est-àdire comme criminel, il est
impossible que j'aie droit de suffrage dans la législation (le législateur est saint).
Quand donc je porte une loi pénale contre moi, comme criminel, c'est alors en
moi la raison pure, en tant qu'elle est la source des lois juridiques (homo
noumenon), qui me soumet à cette loi, comme un être capable de crime, c'est-à-
dire comme une autre personne (homo phœnomenon). En d'autres termes, ce
n'est pas le peuple (chacun des individus qui le composent), mais le tribunal (la
justice publique), par conséquent un autre que le criminel qui dicte la peine de
mort, et le contrat social ne contient pas du tout la promesse de se laisser punir
et de disposer ainsi de soi-même et de la vie. En effet, s'il fallait que le droit de
punir fût fondé sur une promesse du coupable de consentir à se laisser punir, il
faudrait aussi lui laisser la faculté de se déclarer lui-même passible ou non de la
peine, et permettre au criminel d’être son propre juge. »
Emmanuel Kant, Doctrine du droit (1796)

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