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14/20

Bon devoir dans l’ensemble. L’arrêt est compris et correctement restitué et analysé même si
certains points ne sont pas vraiment commentés. Il y a de trop grands passages de paraphrase
ou de citation.

En réaction à une nouvelle crise, frappant notamment l’Espagne et l’Italie, à l’été 2012, et
alors que de très nombreux États Européens doivent faire face au plus fort de la crise de leur
dette souveraine, le président de la Banque Centrale Européenne (que nous nommerons
simplement BCE par la suite) de l’époque, Mario draghi, s’engage alors à réaliser tout ce qui
sera nécessaire pour sauver l’Euro.1
En effet, face à l’inquiétude grandissante des investisseurs concernant la solvabilité de
certains États de la zone euro, les taux d’intérêts des obligations de ces différents États
connaissent alors une forte volatilité, des écarts extrêmes, et sont de plus en plus prohibitifs,2
provoquant le risque pour certains États de perdre l’accès au crédit, et donc de s’exposer à un
risque de faillite.3 ok

Ensuite, lors de la réunion du Conseil des Gouverneurs de la BCE des 5 et 6 Septembre de la


même année, sont « approuvés, les principaux paramètres des opérations monétaires sur titre »
(ci-après OMT) sur titre4, dans le but notamment d’assurer la stabilité de la politique
monétaire de l’Union.
Ce programme permet à la BCE d’acheter des obligations d’État sur les marchés secondaires,
c’est-à-dire, à une partie qui a déjà acheté des obligations émises par un État, sans que lae
BCE ne soit habilité à acheter des obligations directement auprès de l’État qui les émet.ok
Aucune limite quantitative n’est imposée à la BCE concernant le montant des OMT, mais
nous devons noter tout de même que les OMT sont sélectifs et conditionnels puisqu’ils ne
sont disponibles que pour les obligations émises par des États, faisant l’objet d’une assistance
financière, soit via le Mécanisme européen de stabilité, soit via le fonds européen de stabilité
financière. Ok mais précisez surtout qu’il n’y a pas de décision et donc que les conditions de
mise en œuvre sont un peu difficiles à connaître.

Notons par ailleurs que bien que ce programme n’ai jamais fait l’objet de mesures juridiques
de mise en œuvre, il « a indéniablement produit des effets économiques puisque la seule
annonce politique a suffi à apaiser les tensions spéculatives pesant sur l’Espagne et l’Italie. 5

Après la diffusion de ce communiqué de presse, de nombreux requérants allemands, parmi


lesquelles le parti politique « Die Linke » ou encore le députe eurosceptique allemand Peter
Gauweiler, forment un recours constitutionnel, afin que le gouvernement et le parlement
allemand agissent pour empêcher la mise en œuvre de la décision OMT.
1
Déclaration de Mario Draghi le 26 juillet 2012: “Within our mandate, the ECB is ready to do whatever it takes
to preserve the euro. And believe me, it will be enough.”
2
Point 72 de l’arrêt du 16 juin 2015, Gauweiler, affaire C-62/14
3
Voir Revue du droit de l’Union Européenne 4/2015, Athena Christofi, page 662
4
BCE, Technical features of Outright Monetary Transactions, Press Release, 6 September 2012
5
Francesco MARTUCCI : La Cour de justice face à la politique monétaire en temps de crise de dettes
souveraines : l’arrêt Gauweiler entre droit et marché », CDE, 2015, page 496
Les requérants invoquer alors notamment le fait que l’OMT est un acte « ultra vires », c’est-à-
dire qui dépasse le champ de compétence de la BCE, puisqu’elle serait un instrument de
politique économique, alors que la BCE doit être strictement limité à l’exercice de la politique
monétaire.
Ensuite, ils affirment que l’achat d’obligation enfreint également l’article 123 du Traité sur le
Fonctionnement de L’union Européenne (TFUE), qui interdit le financement monétaire.
Enfin, ils invoquent également une violation du principe de démocratie, consacré par l’article
20 de la Constituions allemande.

La Cour constitutionnelle allemande, en tant que juridiction de dernière instance, a saisi la


Cour de Justice, pour la première fois de son histoire, sur le fondement de l’article 267 du
TFUE, de deux questions préjudicielles en appréciation de validité, formulé avec une
précision redoutable et une circonspection remarquable.6

En effet, dans l’arrêt de renvoi, d’une notable longueur (105 points) pour un renvoi
préjudiciel, la Cour de Karlsruhe, ne se contente pas de rédiger la question préjudicielle, mais
établie ce qui s’apparente presque à un « pré-constat d’invalidité. »7 ok

Alors, et bien que la Cour de Karlsruhe ne soit pas en droit de constater l’invalidité d’un acte
de l’union, elle semble estimer que le programme OMT est incompatible avec le droit
européen.

La Cour de Justice devait alors établir si la BCE, avec la décision du conseil des gouverneurs
du 6 Septembre 2012, avait excédé les pouvoirs qui lui sont attribués en vertu des articles 119,
123 et 127 du TFUE, ainsi que des articles 17 et 24 du protocole n°4 sur les statuts du
Système Européen des Banques Centrales (SEBC) et de la BCE.
Plus particulièrement, il fallait établir si le programme OMT relève de la politique monétaire
ou économique ; et si ce programme est compatible avec l’article 123 paragraphe 1 du TFUE
qui interdit à la BCE et aux banques centrales des États membres d’accorder directement des
découverts ou des crédits aux États membres e situation de graves difficultés financières.

Par un arrêt du 16 juin 2015, GAUWEILER, la grande chambre de la Cour de Justice de


l’Union Européenne affirme que le programme OMT est compatible avec le droit primaire de
l’Union Européenne. Ce qui implique également que la BCE n’a pas outrepassé le mandat qui
lui est conféré, et le rachat de titres souverains sur le marché secondaire n’est pas contraire à
l’article 123 du TFUE.ok

Avant toute chose, nous devons signaler que nous n’aborderons pas, dans la suite de ce
commentaire, la question de la recevabilité de la requête, contesté par un grand nombre
d’États8, mais que nous ne développerons pas davantage ici, les considérants en question

6
MARTUCCI, précité, pages 498-499
7
Fr ; Mayer, “Die EZB vor Gericht – nachste Runde” page 121
8
Banque et Droit N° 162 Juillet Août 2015, Juliette Morel-Maroger, Point n°3.
n’étant pas reproduits. Nous considérerons dès lors, la compétence de la Cour comme
acquise.ok

La politique monétaire, est une compétence exclusive de l’Union dont l’exécution est confiée
à la Banque Centrale Européenne, alors que la conduite de la politique économique revient
aux États membres, dès lors, il était nécessaire, pour établir que la BCE avait bien agi dans le
respect des limites de son mandat, que le programme OMT est bien une mesure de politique
monétaire, respectueuse du principe de proportionnalité (I), ce qu’affirme la Cour de Justice
dans son considérant numéro 56.
Ensuite, nous constaterons que malgré les nombreuses difficultés soulevées par cette question,
nous pouvons affirmer, avec la Cour, que le programme OMT, respecte la règle de
l’interdiction du financement monétaire, posé par l’article 123 du TFUE (II).
Introduction satisfaisante. L’arrêt et ses enjeux semblent compris.

I- Le programme OMT relève de la politique monétaire

La Cour de Luxembourg, pour affirmer que le programme OMT relève bien de la politique
monétaire, procède en deux étapes, d’abord elle affirme que l’achat de titres souverains peut
être rattachés à la politique monétaire (A), puis elle précise que les mesures envisagées
respectent bien le principe de proportionnalité (B).

A) Une conception extensive de la politique monétaire

La Cour de justice, comme dans l’arrêt Pringle9, et dans un souci de clarté et de pédagogie, va
soigneusement développer son raisonnement ; et donc pour répondre à la question de
l’étendue des compétences du SEBC et de la BCE, va d’abord définir quelle sont ses
compétences, puis quelle est leur limite. ok

Alors, la Cour dans ses points 35 et 36, et en vertu de l’article 127 du TFUE, rappelle que
l’Union Européenne dispose d’une compétence exclusive dans le domaine de la politique
monétaire pour les États membres dont la monnaie est l’euro.
Elle précise que ces politiques sont conduites par la BCE et par les banques centrales des
États membres dont la monnaie est l’euro, de manière indépendante10
Se faisant, la Cour reprend les principes déjà posés par son arrêt Pringle du 27 novembre
2012, dans ses points 49 et 50, ce qui marque la volonté de la Cour de s’inscrire dans une
certaine continuité de cet arrêt, différentd dans le fond, mais que la Cour invoquera a de
multiples reprises dans l’arrêt du 16 juin 2015.

Ensuite, la Cour, dans son point 41 continue son développement en rappelant que,
conformément à l’article 5 paragraphe 2 du TFUE, l’étendue de cette compétence, énoncé
précédemment, est régie par le principe d’attribution, selon laquelle, le SEBC doit agir dans

9
CJUE (assemblée plénière), 27 novembre 2012, Pringle, aff. C 370/12
10
Point 40 de l’arrêt GAUWEILER qui reprend l’article 130 du TFUE
les limites des pouvoirs qui correspondent à la compétence de politique monétaire, tel que
prévu par le droit primaire de l’union.
C’est-à-dire, que la question auquel la Cour doit faire face est celle de la répartition verticale
des compétences entre l’Union et les États membres de la zone euro, ce qui apparait
véritablement comme fondamental.11 ok

Alors, et puisque « les actes du SEBC se trouvent soumis, dans les conditions prévues par les
traités, au contrôle juridictionnel de la Cour (voir, en ce sens, arrêt Commission/BCE,
C-11/00, EU :C :2003 :395, point 135). », il faut d’abord définir la politique monétaire.
Même si aucune disposition des traités n’en donne une définition explicite 12 ; il ressort du
point 46 de l’arrêt, et notamment en application des articles 127 et 282 TFUE, que « pour
déterminer si une mesure relève de la politique monétaire, il convient de se référer
principalement aux objectifs de cette mesure. Les moyens que celle-ci met en œuvre en vue
d’atteindre ces objectifs sont également pertinents. » quels sont cet objectif et ces moyens, en
principe ?
Là encore, c’est une reprise de l’arrêt Pringle, arrêt dans laquelle la Cour devait déjà délimiter
le champ de la politique monétaire.

La Cour va alors, dans ses points 46 à 65, appliqueré cette méthode, et se concentrer sur les
objectifs et les instruments de la mesure.

Pour commencer, la Cour note que l’objectif du programme OMT est la préservation d’une
transmission appropriée de la politique monétaire et de l’unicité de cette politique. 13
Ce qui est un objectif en lien direct avec l’objectif principal du SEBC, qui est le maintien de
la stabilité des prix.14 ok
Ensuite, la Cour note que l’aptitude du SEBC à assurer la stabilité des prix dépend du bon
fonctionnement du mécanisme de transmission de la politique monétaire (cela implique les
taux d’intérêt et le crédit), c’est à dire le processus grâce auquel les décisions de politique
monétaire exercent un effet sur l’économie en général et plus particulièrement sur le niveau
des prix.15
Donc, puisque l’objectif du programme OMT est de rétablir le fonctionnement du mécanisme
de transmission de la politique monétaire, qui fut affecté par la crise des dettes souveraines ;
la Cour peut considérer que cela relève bien de la compétence du SEBC.

De même, concernant les moyens, la Cour rappelle, dans son point 54 que le SEBC est
habilité à intervenir sur les marchés de capitaux, et notamment « pour acheter et vendre des
titres négociables libellés en euros. », ce qui implique que les opérations monétaires prévues
par le programme OMT utilisent un instrument prévu par le droit primaire.ok

11
Revue du droit de L’Union européenne 4/2015, précité, page 664
12
Arrêt commenté, point 42
13
Ibidem, point 47
14
Article 127 du TFUE
15
Arrêt commenté, point 50
Enfin, et avec ce que certains auteurs ont qualifié de mauvaise foi 16, la Cour avance que le fait
que ce programme puisse également avoir incidemment contribué à atteindre un objectif de
politique économique (assurer la stabilité de la zone euro) ne peut pas remettre en cause cette
analyse, et ne peut pas permettre d’assimiler une mesure de politique monétaire à une mesure
de politique économique.17 Ok. Là encore, les prémices de ce raisonnement étaient présents
dans l’arrêt pringle.
Cette analyse de la Cour, que nous venons de succinctement retranscrire, lui permet donc de
conclure que le programme OMT est bien une mesure de politique monétaire.18
Finalement le contrôle de la Cour pourrait sembler assez léger de prime abord, celle-ci se
contentant d’un contrôle abstrait de vérification des objectifs du programme OMT, qui
relèvent bien de la politique monétaire. Mais il parait difficile d’en faire le reproche à la Cour,
celle-ci n’ayant pas l’expertise nécessaire à une analyse économique de la situation, qu’il
n’appartient pas au juge de fournir. 19 Ok. Là encore, à mettre en relation avec ses autres arrêts
en la matière.
En effet, les objectifs du programme OMT relèvent de la politique monétaire, mais la Cour ne
peut pas apprécier si en pratique, ce programme permettrait effectivement de préserver le
mécanisme de transmission, parce qu’elle n’en a pas la compétence technique.ok

Maintenant qu’il est établi que le programme OMT est une mesure de politique monétaire, la
Cour doit également s’assurer que la BCE n’a pas outrepassé ses pouvoirs afférents au titre de
la compétence monétaire.

B) La proportionnalité des mesures envisagés par le programme OMT

La Cour commence par rappeler que notamment selon l’article 5 paragraphe 4 du Traite sur
l’Union Européenne « le principe de proportionnalité exige, selon une jurisprudence
constante de la Cour, que les actes des institutions de l’Union soient aptes à réaliser les
objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause et ne dépassent pas les limites
de ce qui est nécessaire à la réalisation de ces objectifs. »

Ensuite, par son point 68, la Cour de Justice commence par reconnaitre au SEBC un large
pouvoir d’appréciation, conséquence de la très grande technicité du programme OMT. Ok +
de l’indépendance des banques centrales.
Ainsi la Cour va opérer un contrôle restreint, ce qui peut logiquement s’expliquer par la
complexité de la matière, ce qui dans la jurisprudence de la Cour, implique souvent un

16
Journal D’actualité du Droit Européen, Olivier Clerc et François-Vivien Guiot
17
Arrêt Commenté, point 52 et 57-59
18
Ibidem, point 56
19
MARTUCCI, précité, page 509 et 510
contrôle restreint20, c’est-à-dire que l’intensité du contrôle de validité est tributaire de
l’étendue du pouvoir d’appréciation.21 oui

Puis la Cour procède au traditionnel double test d’aptitude et de nécessité de la mesure


adoptée.
Concernant l’aptitude de la mesure à atteindre les objectifs poursuivis par le SEBC, la Cour
doit apprécier la cohérence entre l’objectif visé et l’instrument mis en œuvre.
Ici, la Cour avance que l’achat des obligations souveraines est susceptible de diminuer les
taux d’intérêts, se faisant, le programme OMT corrige le mécanisme de transmission de la
politique monétaire et en préserve l’unicité.22
Cela semble pertinent, qui plus est car comme signalé par la Cour dans son point 79, la seule
annonce du programme OMT, qui rappelons-le n’a jamais été mis en pratique, a déjà apporté
les résultats souhaité, faisant même dire à certains auteurs 23, qu’« il s’agissait d’ une des
annonces les plus efficaces jamais réalisés par une banque centrale. » oui

Enfin, le programme OMT apparait, selon la Cour, comme une mesure nécessaire pour
atteindre l’objectif dudit programme.
En effet, dans son point 82, la Cour rappelle que les acquisitions ne seront effectuées que pour
atteindre ces objectifs, et cesseront dès qu’ils auront été atteints. Là encore, elle fait en
quelque sorte confiance au SEBC
Dès lors, le fait que le programme n’ait jamais été mis en œuvre suffi à prouver que ces
mesures n’iront pas au-delà de ce qui est strictement nécessaire. Oui mais la cour ne pouvait
pas le savoir à ce moment là.

De plus, la Cour précise tout de même que le conseil des gouverneurs avait entendu limiter les
types d’obligations pouvant être achetés, avec des limites qualitatives (uniquement les
obligations des États sous assistance financière) et temporelle (uniquement les titres à
maturité limité) sans qu’il ne soit nécessaire de limiter quantitativement ce programme, ce qui
aurait risqué d’en limiter l’efficacité.24 ok
Cette sélectivité n’étant pas un problème pour la Cour 25 , car elle était légitimée de par
l’objectif même du programme : remédier aux perturbations de la politique monétaire de la
zone euro générées par la situation spécifique de la situation de certains États membres, ce qui
implique donc nécessairement une certaine sélectivité.

Donc finalement, la Cour peut légitimement affirmer que le principe de proportionnalité est
respecté, notamment puisque le seul fait que le programme n’a jamais été mis en œuvre, tout

20
Nombreux exemples pour des matières techniques, comme pour la politique de la concurrence (Arrêt CJCE,
13 juillet 1966, Consten et Grundig, affaires 56 et 58/64), pour la politique agricole commune (CJCE, 14 mars
1973, Westzucker, affaire 57/72)
21
MARTUCCI, précité, page 514
22
Arrêt commenté, point 72 à 80
23
C. Gerner-Beuerle et E. Schuster, « Law Meets Economics in the German Federal Constitutional Court:
Outright Monetary Transaction on Trial” 2014, 15, German Law Journal
24
Arrêt commenté, point 84 à 88
25
Ibidem, point 89
en remplissant certains de ces objectifs, prouve que ces mesures était apte et nécessaire à leur
objectif.

II- Un programme respectant la règle de l’interdiction du financement


monétaire

Le fait que le financement monétaire des États membres par le SEBC soit strictement prohibé
(A), a conduit la Cour de Justice, à s’assurer que le programme OMT n’implique que les États
membres cessent de mener une politique budgétaire saine (B).

A) L’interdiction absolue du financement monétaire

L’article 123 du TFUE dispose que :


« 1. Il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États
membres, ci-après dénommées "banques centrales nationales", d'accorder des découverts ou
tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l'Union, aux
administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques,
aux autres organismes ou entreprises publics des États membres; l'acquisition directe, auprès
d'eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des
instruments de leur dette est également interdite.
2. Le paragraphe 1 ne s'applique pas aux établissements publics de crédit qui, dans le cadre
de la mise à disposition de liquidités par les banques centrales, bénéficient, de la part des
banques centrales nationales et de la Banque centrale européenne, du même traitement que
les établissements privés de crédit. »

Ainsi, l’article 123 du TFUE interdit le financement monétaire, c’est-à-dire que « cette
disposition interdit à la BCE et aux banques centrales des États membres d’accorder des
découverts ou tout autre type de crédit aux autorités et aux organismes publics de l’Union et
des États membres ainsi que d’acquérir directement, auprès d’eux, des instruments de leur
dette. » 26
Il faut encore noter que cela est dans la continuité de l’arrêt Pringle. A développer. Quel est
l’objectif poursuivi par cette disposition ?
Ainsi, en combinant ces dispositions avec celle de l’article 18 du protocole sur les statuts de la
BCE, on peut conclure que le SEBC peut intervenir sur le marché secondaire mais pas sur le
marché primaire de la dette souveraine.ok

Aucune dérogation n’étant prévue, cette interdiction est absolue, et c’est pourquoi, il est
nécessaire d’accorder une vive attention au champ d’application de l’article 123 du TFUE.ok
C’est pourquoi l’on peut s’étonner que la Cour de Justice, dans cet arrêt, n’utilise pas le
règlement d’application de l’article 123, qui aurait pu permettre de clarifier certains termes
comme « découverts » ou « tout autre type de crédit ».27

26
Ibidem, point 94
27
MARTUCCI, précité, page 520
Finalement, et notamment en utilisant les points 123 et 132 de l’arrêt Pringle, la Cour dans
son point 97 affirme que « le SEBC ne saurait valablement acquérir des obligations
souveraines sur les marchés secondaires dans des conditions qui donneraient, en pratique, à
son intervention un effet équivalent à celui de l’acquisition directe d’obligations souveraines
auprès des autorités et des organismes publics des États membres, remettant ainsi en cause
l’efficacité de l’interdiction énoncée à l’article 123, paragraphe 1, TFUE. »
Alors, en se fondant sur les travaux préparatoires de certains traités28, et en consacrant la
position prise par son avocat général29, la Cour affirme que la BCE peut procéder à
l’acquisition de titres sur les marchés secondaires, mais « elle doit entourer son intervention
de garanties suffisantes pour concilier celle-ci avec l’interdiction du financement monétaire
découlant de l’article 123, paragraphe 1, TFUE. »

Alors, la Cour constate, dans son point 104 alors que dans le cadre du programme OMT :
« l’intervention du SEBC pourrait avoir, en pratique, un effet équivalent à celui de
l’acquisition directe d’obligations souveraines auprès des autorités et des organismes publics
des États membres si les opérateurs susceptibles d’acquérir des obligations souveraines sur
le marché primaire avaient la certitude que le SEBC va procéder au rachat de ces obligations
dans un délai et dans des conditions permettant à ces opérateurs d’agir, de facto, comme des
intermédiaires du SEBC pour l’acquisition directe desdites obligations auprès des autorités
et des organismes publics de l’État membre concerné. »
Mais cela est improbable selon la Cour, notamment grâce à l’indépendance du SEBC vis-à-vis
des États membres, qui n’auront alors jamais la certitude que le SEBC va procéder à des
acquisitions de de titres de dette souveraine, dès lors son intervention ne peut en aucune
façon, s’apparenter à une mesure d’assistance financière à un État.30 Comment appréciez vous
ce raisonnement ?

Un peu trop de paraphrase / de citations dans cette sous partie.

Alors, dans ces conditions la Cour peut affirmer que l’incitation des États membres à mener
une politique budgétaire saine ne serait pas remise en cause31, car l’intervention du SEBC est
limitée et imprévisible.

B) Le maintien de l’incitation faite aux États membres de mener une politique budgétaire
saine

Puisque l’intervention du SEBC est limitée, imprévisible et subordonné au respect des


programmes d’ajustement, qui ont une conditionnalité relativement stricte, on peut affirmer,
avec la Cour, que les États membres affectés continueront leurs efforts pour corriger leur
endettement excessif.

28
Arrêt Commenté, point 100
29
Ibidem, point 102
30
Ibidem, points 106 et 107
31
Ibidem, point 111
Pourtant, comme en témoigne le point 108 de l’arrêt, il n’est pas évident « d’influencer le
marché sans en fausser le fonctionnement. »32
En effet, les interventions de la BCE sont susceptibles, et même doivent, pour être efficace,
exercer une influence sur les marchés primaires et secondaires de la dette souveraine de
certains États membres, sans que cela, et comme l’avait justement démontré M. l’avocat
général dans ses conclusions, au point 259, n’infirme ce raisonnement, puisque cette influence
est nécessairement inhérente aux acquisitions sur le marché secondaire.
Dès lors, il nous apparait que la Cour était fondée à considérer que le programme OMT ne
viole pas l’article 123 du TFUE, ni dans l’esprit, ni dans la pratique, puisqu’il s’agit d’une
mesure non conventionnelle de politique monétaire qui ne fausse pas le fonctionnement du
marché. Ok mais raisonnement un peu circulaire.

Restant alors un dernier argument a opposé au programme OMT, concernant les risques de
perte de la BCE, lié au programme OMT, même si la Cour précise qu’il existe également des
garanties permettant de limiter ce risque. Point 123 et 124.
Mais comme l’a très justement expliqué la Cour, la SEBC agit en tant qu’opérateur de
marché, et c’est donc logique, et même souhaitable, qu’il encourt les risques inhérents à une
opération de marché. Le cas contraire reviendrait d’ailleurs à fausser le marché.
En ce sens, la Cour constitutionnelle allemande avait suggéré que le fait que la BCE puisse
s’exposer au risque de subir une décote décidée par les autres créanciers de l’État membre, en
cas de restructuration au profit de l’État émetteur, ce qui pourrait caractériser un financement
monétaire prohibé.
La Cour de Justice répond simplement dans son point 126, qu’il s’agit une fois encore d’un
risque inhérent à toute opération de marché.

Toutefois, nous voyons ici qu’il existe un risque, très théorique puisque le programme OMT
n’a jamais été appliqué, mais réel en théorie. Ce risque résiderait dans le volume de titres émis
par l’État détenu par le SEBC.
Par exemple dans le cas où le SEBC disposerait d’une majorité d’action, elle pourrait choisir
de bloquer ou de décider de la restructuration, auquel cas, il pourrait s’agir d’un financement
monétaire caractérisée, dans cette éventualité où le SEBC agirait en tant qu’autorité de
politique monétaire, et non plus en tant que créancier dans les conditions du marché.33ok

Finalement, la Cour de Justice achève là son raisonnement, aux termes de 127 considérants
« closely reasoned »34 , pour conclure que le programme d’OMT est bien comptatible avec le
droit de primaire de l’Union européenne :
« Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux
questions préjudicielles posées que les articles 119 TFUE, 123, paragraphe 1, TFUE et 127,
paragraphes 1 et 2, TFUE ainsi que les articles 17 à 24 du protocole sur le SEBC et la BCE
doivent être interprétés en ce sens qu’ils autorisent le SEBC à adopter un programme d’achat

32
MARTUCCI, précité, page 527
33
MARTUCCI, précité, page 528
34
Editorial, «Gauweiler: What next ? » European Law review, volume 40, 2015, n°4, pages 473-474
d’obligations souveraines sur les marchés secondaires tel que celui annoncé dans le
communiqué de presse. »

Pour conclure et afin d’apprécier encore davantage de la portée réelle de cet arrêt, il est
intéressant de noter que contrairement à ce que l’on aurait pu craindre, la Cour
Constitutionnelle allemande, par une décision du 21 juin 2016, accepta l’argumentation de la
CJUE, évitant alors un conflit, pourtant probable, avec celle-ci.ok
Ensuite, la Cour de Justice fut à nouveau saisie d’une question préjudicielle, issue de la
contestation par des citoyens et politiciens allemands qui contestait un programme d’achat de
titres publics de la BCE.
La Cour de justice, par un arrêt, WEISS du 11 décembre 2018 avait alors confirmé les larges
pouvoirs offerts à la BCE, tels qu’ils ressortaient de l’affaire GAUWEILER.oui
Mais cette fois, par un arrêt du 5 mai 2020, la Cour constitutionnelle allemande s’est écartée
de la solution retenue par la CJUE et a estimé que la décision PSPP de la BCE était
incompatible avec le traité, s’érigeant de facto en juge de la BCE, et laissant craindre ce que
certains appellent déjà une guerre des juges, que la Cour de Justice avait pourtant absolument
tenté d’éviter, notamment à travers ses arrêts Pringle, Gauweiler et Weiss, tout 3, longuement
développé avec une grande pédagogie et fondé en droit, afin d’instaurer un véritable dialogue
entre la Cour et les plus hautes juridictions nationales ( et à ce titre, et dans des domaines
différends, ce titre, nous pourrions aussi citer les arrêts Melki et Abdeli du 22 juin 2010 et
Aranyosi du 15 avril 2016).

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