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Analyse Linéaire 8 – CANDIDE– Voltaire

Introduction :
(Accroche) : François Marie AROUET plus connu sous le nom de Voltaire (1694-1778), fut l’un
des plus éminents écrivains et philosophes du siècle des lumières en France
Célèbre pour son esprit incisif, son engagement en faveur de la tolérance et son combat
contre l’obscurantisme, Voltaire fut un auteur prolifique qui s’est exprimé dans de nombreux
genres : théâtre, contes et essais philosophiques, poésie, articles d’Encyclopédie…
Son esprit critique et son engagement pour la liberté ont contribué à diffuser l’esprit des
lumières dans l’ensemble de la société européenne.
(Présentation de l’œuvre) : Ecrit en 1748, Candide ou l’optimisme s’inscrit dans un débat
important au 18eme siècle qui oppose Voltaire et le philosophe allemand Leibniz.
Leibniz soutient l’idée que le monde est guidé par Dieu, que tout est organisé par une
intelligence supérieure, celle de Dieu et qu’ainsi « tout est pour le mieux »
Pour Voltaire, cet optimisme philosophique défie la raison et l’observation
C’est ainsi qu’il décide d’écrire un conte philosophique avec deux personnages types, le
professeur Pangloss (incarnation de Leibniz) et Candide un personnage naïf, vierge de tout
préjugés qui va mettre à l’épreuve les théorie optimiste de son maître.
(Présentation générale du passage) : C’est ainsi que dans l’extrait du chapitre 3 que nous
allons étudier Candide va découvrir la guerre. Apres avoir été chassé du château de Thunder-
ten-tronch, Candide est enrôlé dans l’armée bulgare et découvre les horreurs de la guerre
Par la suite il connaitra la superstition, l’injustice, la captivité, l’ennui, la maladie, le
scepticisme, la vanité des sciences et la déception.
(Problématique) Nous allons voir quel sont les procédés utilisés par Voltaire pour dénoncer
la guerre
(Annonce du plan) : Dans un premier mouvement nous allons étudier de qu’elle manière la
guerre est mise en scène comme un spectacle
Dans un deuxième mouvement nous verrons le retour à la réalité et la cruauté de la guerre
Dans un troisième mouvement nous mettrons en avant la critique de la philosophie et de la
politique.

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Premier mouvement : Les apparences : la guerre comme un spectacle
 La guerre est présentée comme un spectacle. On relève ainsi dès la première phrase de
l’extrait une suite d’adjectifs qualificatifs élogieux renforcés par l’adverbe d’intensité « si »
qui mettent en relief la beauté du spectacle : « si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné ».
Le lecteur à l’impression d’assister à une parade militaire.
 Ce spectacle n’est pas qu’esthétique : il est également sonore comme le relève
l’énumération d’instruments de musique « les trompettes, les fifres, les hautbois, les
tambours, les canons »
 Voltaire introduit toutefois une dissonance avec le dernier terme de cette énumération
« canons » qui perce à jour la réalité de cette guerre.
 Le substantif « enfer » dans la suite de la phrase ruine l’impression favorable suscitée par la
description des armées : celle-ci, loin de créer l’harmonie, est une incarnation de l’enfer sur
terre.
 On observe une métaphore entre les armées et des soldats de plomb. Ainsi le verbe
« renversés » employé à la place de « tués » suggère une armée de soldats de plombs
balayés d’un revers de main : « les canons renversent d’abord ».
 Loin d’être individualisés les soldats apparaissent interchangeables et indifférenciés.
 Les morts se comptent de façon très approximatives : « à peu près »(L3), « environ » (L4),
« quelques milliers » (L5), « pouvait bien se monter à « (L5)
 On constate que dans une logique de guerre, quelques milliers de morts de plus ou de moins
laissent indifférents.

Deuxième mouvement : La réalité : la cruauté de la guerre


• Dans le deuxième paragraphe, Voltaire dresse un tableau pathétique des victimes de la
guerre.
 Les victimes énumérées sont des êtres faibles : vieillards, femmes et enfants. Leur faiblesse
et leur innocence sont renforcées par l’emploi de participes passés au sens passif : « criblés
de coups », « égorgées », « éventrées », « à demi brulées » qui souligne leur position de
victime
 Voltaire accumule les détails anatomiques qui suscitent l’indignation et l’horreur : « femmes
égorgées », « mamelles sanglante », « filles éventrées », « des cervelles étaient répandues »,
« de bras et de jambes coupés ».
 Les deux armées se ressemblent. Elles donnent à voir le même spectacle. Elles ont
quasiment le même nom (bulgare et abare) qui de façon non anodine, rime avec barbare.
Elles chantent toutes deux le Te Deum après la bataille. Elles sont d’une même cruauté sans
borne si bien que Voltaire décrit une « boucherie héroïque », oxymore qui dénonce la fausse
valeur qu’est l’héroïsme.
 Cette scène du chapitre 3 est racontée du point de vue neutre de Candide. En effet, ce
dernier ne prend pas parti pour une armée particulière : il est placé entre les deux armées et
ne cherche qu’à sauver sa peau. Il importe peu, à Candide comme au lecteur, qu’une armée
gagne sur l’autre. Cette absence de parti pris renforce l’inutilité de cette guerre.

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Troisième mouvement : Une critique de la philosophie et de la politique.

 Voltaire fait semblant d’adopter la logique de la guerre en la présentant comme une


opération juste et équitable : « les canons renversèrent d’abord à peu près six mille hommes
de chaque coté, ensuite la mousqueterie ôta du meilleur des mondes environ neuf à dix
mille coquins qui en infectaient la surface »
 Les termes « coquins » et « infectaient » associent les victimes à des parasites nuisibles dont
l’élimination est bénéfique.
 On observe l’efficacité de la guerre à travers l’utilisation des adverbes de temps qui
suggèrent une mécanique bien rodée : « d’abord », « ensuite »
 Voltaire emploie des expressions aux tournures philosophiques afin de justifier les horreurs
de la guerre : « ôta du meilleur des mondes ». L’expression « meilleurs des mondes » fait
référence aux enseignements de Pangloss et souligne le principe de la guerre qui s’inscrirait
dans un ordre naturel du monde. Le vocabulaire philosophique est décrédibilisé par sa
juxtaposition à l’atrocité concrète des faits.
 Un peu plus loin Voltaire se moque directement des philosophes en soulignant leur absence
de courage par une comparaison peu flatteuse : « Candide, qui tremblait comme un
philosophe »
 Voltaire adresse ici une critique au rois qui règlent leur conflits au prix de sacrifices humains
épouvantables.
 Il dénonce la récupération de la religion pour justifier des actes barbares.
 Ainsi « les deux rois faisaient chanter des Te Deum chacun dans son camps ». Le Te Deum,
chant de grâces pour remercier Dieu, est chanté dans les deux camps après chaque bataille.
Cette similitude révèle le rôle complice de la religion récupérée dans les deux camps pour
légitimer la barbarie
 Voltaire critique également le droit qui, loin de protéger les plus faibles, autorise pillages et
massacres : « c’était un village abare que les Bulgares avaient brulé, selon les lois du Droit
public »
 Dans le dernier paragraphe de cet extrait, la fuite de Candide se poursuit et le mène dans de
nouvelles contrées : la Hollande. Le pays est présenté positivement : Candide recherche la
sécurité qu’il a perdue lorsqu’il a été chassé du château du Baron. Nous avons ici à nouveau,
une mise en avant de l’inconscience de Candide (donc des philosophes) face aux problèmes
de la société : Reprise de la théorie de Leibniz : si les Hollandais sont chrétiens alors c’est
l’assurance que la vie y est parfaite, paisible.
Conclusion :
(Reprise des conclusions des mouvements) : Dans ce chapitre 3, Candide est confronté pour
la première fois au problème de la guerre.
(Réponse à la problématique) C’est l’occasion pour Voltaire de procéder à une double
dénonciation. D’une part il dresse une satire de la guerre, barbarie contraire aux progrès de
la civilisation et au droits de l’homme ; d’autre part, Voltaire se moque de la théorie de
l’optimisme de Leibniz en lui assenant un démenti par les faits.
(Ouverture) : Cet extrait de Candide s’inscrit dans le mouvement des Lumières qui dénonce
la guerre et la barbarie contraires aux progrès de la civilisation.

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Vocabulaire :
 Leibniz: Gottfried Wilhelm Leibnizn né à Leipzig le 1er juillet 1646n 3 et mort à
Hanovre le 14 novembre 1716, est un philosophe, scientifique, mathématicien, logicien,
diplomate, juriste, historien, bibliothécaire et philologue allemand. Il occupe une place
primordiale dans l'histoire de la philosophie et l'histoire des sciences (notamment des
mathématiques) et est parfois considéré comme le dernier « génie universel »
Comment Appelle-t-on la philosophie de Leibniz qui croit que le monde est le meilleur
possible ?
La philosophie de Leibniz repose sur un principe : rien n’est sans raison. Nous vivons dans un
monde dont l’harmonie a été préétablie par un Dieu capable de tout calculer puisqu’il est
omniscient. Et parce que Dieu est parfaitement bienveillant, il n’a fait exister que le meilleur
des mondes possibles. Ainsi, tout mal est un moindre mal. Cette philosophie « optimiste »,
raillée par Voltaire dans Candide, doit beaucoup à la découverte par Leibniz du calcul
infinitésimal, qui permet de rationaliser ce qui est imperceptible en montrant que « les
choses les plus remarquables sont composées de parties qui ne le sont pas ». Appliquée à la
psychologie, cette découverte mathématique fait de Leibniz le premier penseur de
l’inconscient.
Au principe de raison suffisante, il faut ajouter le principe dit « des indiscernables », selon
lequel aucune chose n’est identique à une autre, car si deux choses ne différaient que
numériquement, Dieu n’aurait pas créé la seconde après la première. Tout est donc singulier
dans l’univers. Leibniz appelle ces individus des « monades », qui comme les perles d’un
collier reflètent celles qui les entourent et par là s’en différencient.
Enfin, l’invention du microscope par les Hollandais permet de voir la vie cachée. Leibniz
conjecture qu’elle se retrouve à toutes les échelles, et ce à l’infini. Ce « panvitalisme »
implique que la mort n’est qu’une illusion. L’univers est grouillant de vie. C’est là sa beauté.

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