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Chapitre 7 : Bavardage et poésie

1. Le social, l’interpersonnel et le personnel

Habituellement, les gens envisagent leurs conflits émotionnels par rapport à leurs exigences et
responsabilités éthiques : ils constatent que leurs désirs personnels et leurs rôles sociaux se
confrontent à l'intérieur d'eux-mêmes.
Les relations sociales existent dès l'origine dans tout champ humain, bien avant qu'on ne se
reconnaisse en tant que personne singulière.
La personnalité est une structure qui se crée à partir de ces relations interpersonnelles précoces, et
habituellement, lors de sa formation, il y a déjà eu incorporation d'une énorme quantité de matériel
étranger, inassimilé ou même inaccessible.

a. Les relations sociales préverbales de l'organisme


b. La formation d'une personnalité verbale dans le champ organisme/environnement.
c. Les relations ultérieures de cette personnalité avec les autres.

Dans chaque culture, nous développons des manières de langage qui deviennent sans signification. Si
on se concentre sur ces habitudes de langage, nous rencontrons des fuites extraordinaires, la
fabrication d'alibis, et en fin de compte, une énorme anxiété. Parce que attirer l'attention sur le
langage (ou sur les vêtements) constitue véritablement un affront personnel.

2. Parole-contact et poésie

La parole est un bon contact quand elle tire son énergie des 3 personnes grammaticales :
JE : celui qui parle (le style, et surtout le rythme, l'animation et la gradation qui expriment le besoin
organique et celui qui parle)
Le "Je" est le style dont le poète fait usage dans le moment, ce n’est pas sa biographie.
TU : celui à qui on parle (l'attitude rhétorique efficace dans la situation interpersonnelle - courtiser,
dénoncer, enseigner, intimider)
CELA : ce dont on parle (le contenu, ou la vérité sur les objets impersonnels dont on parle).

Le poème est un cas particulier du discours de qualité :


Dans un poème, beaucoup de choses s'expriment : le contenu, l'attitude et le caractère, le ton et le
rythme s'expriment mutuellement les uns les autres et c'est ce qui crée l'unité structurelle du
poème.
L'activité de la parole pour le poète est une fin en soi. Rien qu'en parlant, le poète résout son
problème.
À la différence du discours ordinaire, le poète joue librement avec les mots dans la réalité du
moment. Son contenu n'est pas une réalité du moment, mais dans l'expérience, il trouve le souvenir
ou l'imaginaire. Ainsi, au lieu d'être des stéréotypes verbaux, les mots sont plastiquement détruits
pour être combinés en une figure plus essentielle.
La poésie est langage en tant qu'activité organique de résolution de problème.
Un poème a un début, un milieu, une fin ; il achève une situation.

3. Bavardage et poésie

Le bavardage sert aisément de substitut à la vie. C’est un moyen tout prêt par lequel une personne
étrangère que l'on a introjectée avec ses croyances et ses attitudes peut vivre à notre place.
Ce qui est important n'est pas ce que dit celui qui parle, mais comment il le dit.
Au lieu d'être un moyen de communication ou d'expression, le bavardage protège l'isolement de
l'individu à la fois de l'environnement et de l'organisme.
Le manque de contact avec le "JE" dans la division du corps entre, d'une part, une bouche qui émet
des sons, et d'autre part, tout le reste du corps qui est tenu à distance et désinvesti.

En revanche, le discours poétique a une pulsation, une musique, un rythme. Une intensité qui monte
pour diminuer jusqu'au silence. Le poète écoute sa voix et déguste les mots. Il prend plaisir à occuper
le centre de la salle.
L'artiste ne résout pas son problème, mais après chaque œuvre, quelque chose se termine. Les
œuvres d'art qui se succèdent sont fondamentalement différentes les unes des autres ; elles
permettent un approfondissement du problème artistique.

Celui qui bavarde s'ennuie parce qu'il veut ennuyer, il veut qu'on le laisse seul. Le poète choisit son
contenu, la vérité est librement déformée et transformée en symbole au profit de l'intérêt sous-
jacent : il n'hésite pas à mentir ou à être irrationnel. Il entre en empathie avec les situations
émotionnelles, s'y projette tout entier plutôt que d'aliéner ses propres sentiments et de les projeter.

4. Critique de l'association libre comme technique de thérapie

Est-ce que l'association libre est utile pour la thérapie sachant que c'est le thérapeute qui devient
conscient de quelque chose à propos du patient ? Le patient, lui, est en état de non-conscience. Alors
que le but de la thérapie est que le patient devienne conscient de lui-même.

Le patient, en respectant la règle de ne pas censurer ses mots, se dégage de la responsabilité de les
avoir dits. Il ne met pas lui-même le sens sur ce qu'il dit. Il avale tout rond ce que lui dit son
thérapeute. Il met entre parenthèses le "self" qui est responsable. La technique peut le rendre
encore plus confus.

5. L'association libre en tant qu'expérimentation du langage

Par exemple, un rêve : le rêve parle en images. Un exercice plus direct : se concentrer sur l'acte de
parole tout en associant librement ou en émettant des syllabes sans signification ou des bribes de
chanson. L'association libre permet de sortir du discours habituel qui est névrotiquement rigide et
qui est une fausse intégration de son expérience.

L'association libre permet à d'autres choses de venir à l'avant-plan. Il apprend que quelque chose
qu'il ne reconnaît pas comme sien surgit de ces pénombres et s'avère pourtant significatif. L'attitude
impénétrable du thérapeute à l'égard de l'interprétation, qui la retient ou la dispense au bon
moment, va en sens contraire. Il faut au contraire interpréter très peu et donner au patient des outils
d'analyse.

Le thérapeute, l'adulte, sait tout et l'on ne peut jamais connaître le secret si on ne nous le dit pas.
Mais c'est la possession des outils qui permet de dépasser le sentiment d'être exclu.

6. Les philosophes de la réforme du langage

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