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Démocratie

représentative
démocratie dans laquelle les citoyens
élisent des représentants afin de prendre
les décisions politiques à leur place

La démocratie représentative, le gouvernement représentatif ou le régime représentatif est


un système politique dans lequel on reconnaît à une assemblée restreinte le droit de
représenter un peuple, une nation ou une communauté et de prendre les décisions la
concernant. Elle se distingue de la démocratie directe, dans laquelle l'essentiel des décisions
sont prises directement par les citoyens.

Dans ce type de régime, la volonté des citoyens s’exprime à travers des représentants qui
établissent les lois (pouvoir législatif) et les font appliquer (pouvoir exécutif). Dans les
démocraties représentatives contemporaines, ces représentants sont élus.
Usages historiques de
l'expression

La Révolution de 1789
Dans la France d’Ancien Régime, une forme de représentation des différents groupes sociaux
auprès des seigneurs était en place. Il ne s'agissait cependant pas d'un gouvernement
représentatif au sens moderne du terme. Ce sens commence à émerger à la fin du
xviiie siècle, et à la Révolution française se forme l'idée d'une « représentation nationale qui,
pensée comme l'expression de la volonté commune du peuple, [apparaît] comme la condition
d'une politique de liberté »[1].

Monarchie de Juillet
L'expression « gouvernement représentatif » est celle avec laquelle les contemporains de la
monarchie de Juillet présentent le régime, qu'ils soient partisans ou opposants de celui-ci.
Celui-ci est théorisé dès les années 1820 par les doctrinaires, en particulier François Guizot,
avant d'être en partie mis en œuvre dans les années 1830-1840. Selon Guizot, le
gouvernement représentatif repose « sur cette vérité que la souveraineté de droit n'appartient
à personne », mais correspond en fait à la raison et à la justice, ce qui suppose que toutes les
décisions soient publiques et ouvertes à la discussion ; que le pouvoir politique soit réparti
« en raison de la capacité d'agir selon la raison et la justice » — principalement grâce à
l'élection — ; et que l'État soit doté de moyens de connaître la société, et en particulier
l'opinion publique, grâce à la libre discussion et à l'élection de représentants. Les
révolutionnaires de 1848 opposeront la République au gouvernement représentatif[2].
Motivations

Fin des absolutismes


La démocratie représentative (appelée aussi gouvernement représentatif)[3] est présentée
comme une alternative au despotisme par les philosophes des Lumières.

Opposition à la démocratie directe


Selon le politologue Bernard Manin, « les démocraties contemporaines sont issues d'une
forme de gouvernement que ses fondateurs opposaient à la démocratie ». Il illustre son
propos par les considérations de James Madison lors de la Révolution américaine et
Emmanuel-Joseph Sieyès lors de la Révolution française, qui « soulignaient ainsi en des
termes très proches le contraste entre le gouvernement représentatif ou républicain et la
démocratie. Cette proximité est d'autant plus saisissante que des différences multiples et
profondes séparaient par ailleurs le principal architecte de la Constitution des États-Unis et
l'auteur de Qu'est-ce que le Tiers-État ? : leur formation, le contexte politique dans lequel ils
parlaient et agissaient, leurs conceptions constitutionnelles elles-mêmes »[4].

Emmanuel-Joseph Sieyès, à l'époque de la première constitution française dont il fut co-


rédacteur, l'exprime clairement[5] :

« La France ne doit pas être une démocratie, mais un régime


représentatif. Le choix entre ces deux méthodes de faire la loi, n’est
pas douteux parmi nous. D’abord, la très grande pluralité de nos
concitoyens n’a ni assez d’instruction, ni assez de loisir, pour
vouloir s’occuper directement des lois qui doivent gouverner la
France ; ils doivent donc se borner à se nommer des représentants.
[...] Les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et
doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté
particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne
serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique.
Le peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie
(et la France ne saurait l’être), le peuple ne peut parler, ne peut agir
que par ses représentants. »

Pour certains auteurs, elle serait plus adaptée aux nations modernes que, par exemple, la
démocratie athénienne. C'est ainsi que pour Benjamin Constant le système représentatif (on
ne disait pas encore « démocratie représentative ») permet au plus grand nombre d'être libéré
de la gestion quotidienne des affaires publiques[6] :

« Les individus pauvres font eux-mêmes leurs affaires : les hommes


riches prennent des intendants. C'est l'histoire des nations
anciennes et des nations modernes. Le système représentatif est
une procuration donnée à un certain nombre d'hommes par la
masse du peuple, qui veut que ses intérêts soient défendus, et qui
néanmoins n'a pas le temps de les défendre toujours lui-même[7]. »

Elle est largement plus répandue que la démocratie directe : environ la moitié des habitants
de la planète vivent sous un régime de démocratie représentative.

Souveraineté
En démocratie représentative, c'est le corps des élus dans son ensemble qui exerce la
souveraineté. Les élus n'ont donc de légitimité qu'au sein de l'assemblée qu'ils constituent.
Cette caractéristique explique l'importance du débat au sein de l'assemblée, de la discussion
censée faire naitre la meilleure solution. Elle justifie la place de l'opposition.

Cela implique aussi que chaque élu représente l'ensemble des citoyens : la Nation et non pas
seulement ses électeurs. En France, c'est le cas par exemple des députés, tandis que les
sénateurs représentent au contraire les collectivités territoriales.
La Nation et le Citoyen
S'il n'est plus systématiquement lié à la notion de communauté de culture, le régime
représentatif est apparu historiquement dans le cadre de la souveraineté nationale. La Nation
doit donc être entendue ici comme un collectif, le corps des citoyens, qui a pour unique
fonction l'exercice de la souveraineté. Le citoyen est ainsi une forme idéalisée de l'individu
qui se caractérise par son abnégation, son absence de préjugés de classe. Dénué d'égoïsme,
il est capable de faire un choix politique en fonction de l'intérêt général en faisant abstraction
des avantages personnels qu'il pourrait en tirer.

La nation étant une abstraction, sa volonté ne peut être exprimée que par des individus qui
parleront en son nom. C'est l'un des rôles des représentants élus. Emmanuel-Joseph Sieyès
écrit ainsi : « Il n’y a, il ne peut y avoir, pour un député, de mandat impératif, ou même de
vœu positif, que le vœu national ; il ne se doit aux conseils de ses commettants directs,
qu’autant que ces conseils seront conformes au vœu national. Ce vœu, où peut-il être, où
peut on le reconnaître, si ce n’est dans l’Assemblée nationale elle-même[8] ? » Il écrit encore
que « l’intégrité nationale n’est pas antérieure à la volonté du peuple réuni qui n’est que sa
représentation. L’unité commence là. Donc rien n’est au dessus de la représentation, elle est
le seul corps organisé. Le peuple dispersé n’est pas un corps organisé, il n’a ni un vouloir, ni
une pensée, ni rien comme un[9] ».

Le politologue Didier Mineur voit dans cette conception l'une des origines de la « crise de la
représentation », car les représentés n'y ont pas vocation à se reconnaître dans leur
représentation[10].

Incapacité des peuples à se


gouverner
Montesquieu : « Comme la plupart des citoyens, qui ont assez de suffisance pour élire, n’en
ont pas assez pour être élus ; de même le peuple, qui a assez de capacité pour se faire rendre
compte de la gestion des autres, n’est pas propre à gérer par lui-même »[11].
John Adams : « L'idée que le peuple est le meilleur gardien de sa liberté n'est pas vraie. Il est
le pire envisageable, il n'est pas un gardien du tout. Il ne peut ni agir, ni juger, ni penser, ni
vouloir. »[12].

Emmanuel-Joseph Sieyès (corédacteur de la constitution française) oppose le gouvernement


représentatif, qu'il contribue à mettre en place, à la démocratie (qu'il rejette) dans son
discours du 7 septembre 1789 : voir citation ci-dessus.

Emmanuel-Joseph Sieyès fut un contradicteur des théories de Jean-Jacques Rousseau, qui


se prononçait pour la démocratie directe. Opposé à la démocratie au sens littéral du terme,
Sieyès était également contre le suffrage universel, lui préférant le suffrage censitaire. Ce
système d'inspiration ploutocratique fut introduit dans la Constitution française et a prévalu
jusqu'en 1848.

Caractéristiques

Vote
Dans un régime représentatif, le vote est un mode de la désignation et pas un transfert de
responsabilité. Les élus tirent leur légitimité de la délégation de la souveraineté de leurs
électeurs puisque ces derniers n'ont alors plus aucun moyen de contrôler l'action postérieure
de leurs représentants. La souveraineté véritable aliénée en revient donc aux élus
(principalement parlementaires) qui se chargent du débat et des prises de décisions sans
s'en référer à leurs mandants dont ils sont totalement indépendants en dehors du fait d'élire.

Le vote n'est donc pas un droit, mais une fonction. Ce n'est pas une manifestation de la
volonté individuelle, mais une fonction exercée au nom de la nation.

Historiquement, les premiers représentants étaient élus au suffrage censitaire. Un individu ne


pouvait être élu qu'en fonction de l'impôt qu'il payait (historiquement, le cens), et donc de sa
capacité financière. Le suffrage universel s'est développé par la suite.
Mandat représentatif
De plus, on a un mandat représentatif, c'est-à-dire que le député, une fois élu, est indépendant
de ses électeurs, il est irrévocable, et n'est pas tenu de suivre explicitement leur volonté.
Néanmoins, la durée du mandat étant toujours limitée, l'élu peut penser qu'il doit agir
globalement dans le sens des intérêts de ses électeurs, dans l'espoir d'être réélu.

Selon John Dewey : la domination du


« souci du bien être public »
Dans Le Public et ses problèmes (1927), John Dewey estime que[13]

« ceux qui s'impliquent dans un gouvernement sont encore des


êtres humains. Ils conservent leur lot de traits ordinaires de la
nature humaine. Ils ont toujours des intérêts privés à servir, ainsi
que des intérêts qui sont propres à des groupes particuliers comme
ceux de la famille, de la clique ou de la classe à laquelle ils
appartiennent. Il est rare qu'une personne s'immerge
complètement dans sa fonction politique ; au mieux la plupart des
hommes parviennent-ils à faire que leur souci du bien être public
domine sur leurs autres désirs. Un gouvernement « représentatif »
signifie que le public est délibérément organisé en fonction de
l'intention d'assurer cette domination. Chez les individus, la double
capacité de chaque officier du public provoque un conflit entre
leurs buts et leurs actes véritablement politiques, et ceux qu'ils ont
dans leur rôle non politique. Lorsque le public adopte des mesures
particulières pour veiller à ce que ce conflit soit atténué et à ce que
les fonctions représentatives aient la priorité sur les fonctions
privées, alors les institutions politiques sont appelées
représentatives. »
Limites

Représentativité
L'un des enjeux de la démocratie représentative est de savoir si les élus « représentent »
effectivement leurs électeurs non seulement au sens politique mais aussi au sens
sociologique (comme on parle de la représentativité statistique d'un échantillon dans un
sondage) à savoir dans leur diversité, tant au niveau des revenus, des classes sociales ou
des niveaux d'instruction.

Mode de scrutin
En démocratie représentative, le mode de scrutin a une influence importante sur le choix final
des élus.

La méthode la plus couramment utilisée pour former une chambre est le vote par
circonscriptions, à scrutin majoritaire. Montesquieu la défendait ainsi dans son ouvrage De
l'esprit des lois :

« L'on connaît beaucoup mieux les besoins de sa ville que ceux des
autres villes ; et on juge mieux de la capacité de ses voisins que de
celle de ses autres compatriotes. Il ne faut donc pas que les
membres du corps législatif soient tirés en général du corps de la
nation ; mais il convient que, dans chaque lieu principal, les
habitants se choisissent un représentant. »

Ce système pose des problèmes de représentativité du fait du poids démographique des


circonscriptions et des possibilités de manipulation du découpage électoral. Le vote
majoritaire tend également à bipolariser le paysage politique et à écraser les opinions
minoritaires. Néanmoins il instaure des majorités franches qui n'auront pas l'excuse en fin de
mandat d'avoir été obligées de composer.

On peut être tenté de répondre à ces difficultés par une modification du système électoral en
utilisant par exemple un scrutin de liste comme le scrutin proportionnel plurinominal intégral
que l'on retrouve aux élections générales de pays comme l'Espagne ou Israël lors desquelles
le pays tout entier ne forme qu'une seule circonscription électorale. Cela soulève d'autres
problèmes, comme le poids des partis, à qui revient la constitution des listes, la stabilité des
gouvernements et la nécessité de former des coalitions. Les scrutins de liste à la
proportionnelle ont l'inconvénient de faire disparaître le lien direct électeur-élu et donc
estomper le sentiment d'être effectivement représenté, puisque selon les modes de calculs, il
n'est pas toujours possible de savoir quel candidat précis son bulletin de vote a fait élire.

Le philosophe et politicien Alain se montre, dans ses Propos sur les pouvoirs, très critique sur
le système proportionnel face au système par circonscription (qu'il nomme « scrutin
d'arrondissement »), car il explique qu'avec le second l'élu doit tout à ses électeurs et peu à
son parti, tandis qu'avec le premier il doit tout à la place dans la liste que lui octroie son parti
et sera donc tenté de suivre celui-ci plutôt que l'électeur. Le scrutin à vote unique transférable
évite cet inconvénient, mais au prix d'un dépouillement très coûteux.

Conflits d'intérêt
Les intérêts des représentants élus ne coïncident pas nécessairement avec ceux de leurs
électeurs. Par exemple, il est fréquent que ce soit les représentants eux-mêmes qui
déterminent leurs propres salaires, ou leurs régimes spéciaux de retraite.

La concentration de pouvoir politique entre les mains d'une minorité tend à favoriser la
corruption. Le représentant, se retrouvant seul dans sa mandature, est souvent partagé entre
son intérêt individuel et l'intérêt collectif du corps électoral. Il peut également subir l'influence
des lobbies.
Instabilité
Le changement d'un parti dirigeant à un autre, ou dans une moindre mesure d'un
représentant à un autre, peut causer une rupture gouvernementale substantielle et un
changement de lois et donc de la vie quotidienne des citoyens.

Partis politiques
On peut considérer les partis politiques comme un « mal nécessaire » de la démocratie
représentative, dans la mesure où il est souvent impossible à un candidat de remporter les
élections sans se présenter au nom d'un parti politique. Ce qui a pour conséquence que, par
la suite, un représentant politique risque de devoir agir à l'encontre de ses convictions pour
être en conformité avec la ligne directrice de son propre parti. De temps en temps, il s'agira
d'un compromis mineur. Mais il peut arriver qu'un changement de cap important soit exigé
d'un représentant par son parti, de telle sorte qu'il n'ait comme alternatives que de
démissionner de sa fonction ou de quitter le parti.

A contrario, le mandat représentatif permet le « nomadisme politique » : après les élections,


un élu peut démissionner de son parti, voire rejoindre le camp adverse, sans que son mandat
soit remis en cause.

Les partis politiques ont donc une position singulière : les candidats doivent représenter les
opinions du parti qui le mandate auprès des électeurs.

Coûts de fonctionnement
Beaucoup de ressources sont dépensées pour les élections. En outre, le besoin de lever des
contributions de campagne est susceptible d'endommager la neutralité des représentants :
ceux-ci peuvent se sentir redevables à l'égard des principaux contributeurs et vouloir les
récompenser en leur facilitant certaines démarches, par exemple l'obtention de marchés
publics.

Court-termisme
Les penseurs de l'écologie ont été conduits à s'interroger sur l'inadaptation de la démocratie
représentative aux enjeux écologiques, à cause de ses élections incessantes, de son court-
termisme, et de son rétrécissement à des objectifs étroitement nationaux. Dominique Bourg
et Kerry Whiteside, dans Vers une transition écologique (2010), proposent de réformer le
système démocratique actuel en complétant la démocratie représentative par des
institutions où ce sont les experts et les ONG qui jouent le premier rôle, non les élus[14].

Critiques
Étienne de La Boétie (1530-1563), dans son Discours de la servitude volontaire, qualifie les
élus de tyrans. Selon lui, ils surpassent en vices et en cruautés les deux autres types de
tyrans, à savoir ceux qui obtiennent le pouvoir de manière héréditaire et ceux qui l'obtiennent
par la force des armes. Il ajoute que les tyrans sont élus en raison de leur prestige, de leur
grandeur ou toute autre qualité leur ayant permis de séduire le peuple[15].

Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), dans Du contrat social, a dressé au chapitre « Des


députés » une vive critique du système parlementaire, alors en vigueur en Grande-Bretagne. Il
considère qu'en se donnant des représentants, c'est-à-dire en déléguant le temps d'un
mandat son pouvoir législatif, le peuple abdique sa souveraineté et renonce à sa liberté. Car
s'il est possible que le peuple veuille ce que veulent ceux qui le représentent à l'instant où il
leur délègue son pouvoir, rien ne l'assure qu'il le voudra tout le temps du mandat : « Le
souverain peut bien dire : « Je veux actuellement ce que veut un tel homme, ou du moins ce
qu'il dit vouloir » ; mais il ne peut pas dire : « Ce que cet homme voudra demain, je le voudrai
encore »[16]. ». Pour Rousseau, le peuple, au lieu de payer des personnes pour faire les lois,
devrait donc accepter de payer s'il le faut pour les faire lui-même.

Benjamin Constant (1767-1830), homme politique franco-suisse, de conviction libérale et


favorable au régime représentatif, entrevoyait cependant ses limites :
« Chez les modernes, au contraire,
l'individu, indépendant dans la vie
privée, n'est, même dans les États les
plus libres, souverain qu'en apparence.
Sa souveraineté est restreinte, presque
toujours suspendue ; et si à époques
fixes, mais rares, durant lesquelles il
est encore entouré de précautions et
d'entraves, il exerce cette souveraineté,
ce n'est jamais que pour l'abdiquer. »
(De la liberté des Anciens comparée à
celle des Modernes, discours prononcé
en 1819, dans De la liberté chez les
Modernes, Livre de Poche,
coll. « Pluriel », p. 494-496.)
« Le danger de la liberté moderne, c'est
qu'absorbés dans la jouissance de
notre indépendance privée, et dans la
poursuite de nos intérêts particuliers,
nous ne renoncions trop facilement à
notre droit de partage dans le pouvoir
politique. Les dépositaires de l'autorité
ne manquent pas de nous y exhorter.
Ils sont si disposés à nous épargner
toute espèce de peine, exceptée celle
d'obéir et de payer ! […] Non, Messieurs,
ne laissons pas faire. Quelque
touchant que soit un intérêt si tendre,
prions l'autorité de rester dans ses
limites. » (op. cit., p. 512-513.)
Dominique Bourg (né en 1953) et Kerry Whiteside estiment que la démocratie représentative
se révèle impuissante face à l'ampleur des défis environnementaux. Selon eux, les principes
sur lesquels elle repose sont intrinsèquement incompatibles avec la survie de la planète. Ils
proposent une refondation institutionnelle en injectant une bonne dose de démocratie
participative et délibérative. L'inertie des gouvernements face à l'urgence écologique serait
imputable à notre système de décision collectif. « Protéger la biosphère exige donc de
repenser la démocratie elle-même »[17].
Le sociologue ivoirien Alfred Babo remet en cause l'opportunité d'organiser des élections
présidentielles en Afrique, compte tenu de leur cout élevé, de la violence qu'elles engendrent,
et de leur faible impact démocratique[18]. Il ne remet toutefois en cause ni la démocratie ni
son caractère représentatif, mais il propose d'organiser autrement la nomination du président
de la République.

Histoire

Les démocraties représentatives selon l'ONG Freedom


House.

La plupart des démocraties actuelles ont adopté ce système dès leur fondation.

Évolutions et variantes
Parmi les variantes nées de la démocratie représentative, on compte :

la « démocratie du public », concept


proposé par Bernard Manin et
décrivant à ses yeux l'évolution
actuelle de la démocratie participative,
caractérisée notamment par une perte
d'importance des partis politiques au
profit des médias ;
la « démocratie continue », promue par
Dominique Rousseau ;
la démocratie participative ou
« locale », qui consiste à élaborer les
décisions collectives en ne se limitant
pas aux lieux où se prennent les
décisions politiques ;
la cyberdémocratie.

Mise en pratiques
Aucun pays n'est gouverné selon un régime purement représentatif. Tous limitent par
plusieurs mesures le pouvoir des élus.
Le pluralisme et l’alternance
La tenue d’élections à échéances régulières permet de limiter l’autonomie des élus. Un
régime est démocratique quand les gouvernements et les représentants n’héritent pas de leur
charge mais sont élus au terme d’une procédure élective, et leur programme est soumis à
l’approbation des électeurs. Le pouvoir est à prendre en ce sens qu’aucune équipe dirigeante
n’est jamais définitivement installée, qu’aucun programme ne peut être tenu pour définitif,
qu’aucune politique n’est jamais que provisoirement officielle.

Cette ouverture, ou plutôt cette disponibilité du pouvoir est commandée par une philosophie
pluraliste qui fait de l’opposition une force aussi légitime que le sont les gouvernants en
place. Non seulement toutes les tendances et tous les intérêts sont admis à s’exprimer, mais
encore l’espoir est offert à tous d’accéder au gouvernement et d’en utiliser les prérogatives
selon leurs vues. La représentation permet de surmonter la division : en défendant la
diversité des intérêts, la représentation évite que des groupes d’intérêts ne viennent menacer
les droits des minorités. Et dès lors, plus l’État est grand, plus les avis ont de chance d’être
divergents.

Le système requiert que soient garantis le multipartisme, nécessaire pour qu’il puisse y avoir
des élections, et la liberté d’expression de l’opinion publique, pour permettre l’échange et la
délibération. La représentation contribue à la formation de la volonté générale, construite
grâce à l'apport des idées de tous.

Certaines démocraties représentatives connaissent la séparation stricte des pouvoirs ; dans


d’autres, notamment celles dans le système de Westminster, le gouvernement est
responsable devant le parlement.

La formation d’une classe politique


La démocratie représentative est marquée par la nécessité d’une division du travail dans une
économie marchande : en confiant la gestion des affaires publiques et la représentation de
leurs intérêts aux représentants, les individus peuvent vaquer à leurs occupations privées,
s’adonner au commerce, etc.
Les procédures de démocratie
directe
Il est fréquent de recourir à des procédés de démocratie semi-directe ; il s'agit de permettre
au peuple, dans les démocraties représentatives, d'intervenir ou de décider directement.
Exemple : recourir au mandat impératif ou au référendum.

Un régime représentatif peut également admettre une petite dose de participation directe des
citoyens. Une procédure de référendum peut notamment exister, et peut même être
obligatoire pour certaines décisions, par exemple pour la révision constitutionnelle si le
législateur n’est pas également constituant.

Le référendum est généralement peu apprécié des partis politiques car il est plus
difficilement contrôlable que les élections. Il pose en outre le problème du risque de
détournement plébiscitaire.

Les États vivant sous ce système admettent généralement des droits d’expression, de
pétition et de manifestation très développés. Dans certains pays, une proposition de loi ou
d’abrogation de loi, dite « d’initiative populaire », peut être déposée par des citoyens grâce à
une collecte de signatures.

La Constitution
La Constitution encadre et limite les prérogative des élus. C'est une sorte de mandat donné
par la population auquel ils ne peuvent déroger. Les modifications par le Congrès sont
d'ailleurs problématiques en matière de démocratie car la teneur de cette constitution peut
ainsi être modifiée sans intervention directe du peuple.

Notes et références

1 Simone Goyard-Fabre « L’idée de


1. Simone Goyard-Fabre, « L idée de
représentation à l’époque de la
Révolution française », Études
françaises, volume 25, numéro 2-3,
automne 1989, p. 71 (lire en ligne
[PDF] ).

2. Samuel Hayat, Quand la République


était révolutionnaire : citoyenneté et
représentation en 1848, Paris, Seuil,
2014, 405 p. (ISBN 978-2-02-113639-5, lire
en ligne (https://books.google.fr/books?id=J

d-TBQAAQBAJ) [archive]), p. 33-36.

3. Archives parlementaires de 1787 à


1860, Librairie administrative de Paul
Dupont, 1875, [lire en ligne (https://books.
google.fr/books?id=co4LAQAAIAA

J) [archive]].
4. Bernard Manin, Principes du
gouvernement représentatif,
Flammarion, 1995, rééd. 2012,
p. 12-14.

5. « Sur l’organisation du pouvoir


législatif et la sanction royale », in
Les Orateurs de la Révolution
française. Les Constituants, Tome I,
Paris, Gallimard, 1989, p. 1025 et
1027.

6. Auguste Bertholet, « Constant,


Sismondi et la Pologne », Annales
Benjamin Constant, no 46,‎2021,
p. 65-85 (lire en ligne (https://www.slatkin
e.com/fr/editions-slatkine/75250-book-0507

7807-3600120175625.html) [archive]).
7. Benjamin Constant, De la liberté des
Anciens comparée à celle des
Modernes (1819).

8. Emmanuel-Joseph Sieyès, Écrits


politiques, Paris, E.A.C, « Dire sur le
véto royal ».

9. Emmanuel-Joseph Sieyès, Archives


nationales : 284 AP. 5, dossier 1, cité
par Pierre Rosanvallon, Le peuple
introuvable, Gallimard, 1998, p. 38.

10. Didier Mineur, Archéologie de la


représentation politique : Structure et
fondement d'une crise, Paris, Presses
de Sciences Po, 2010, 296 p..
11. Montesquieu, Esprit des lois, 1777
(lire en ligne (https://fr.wikisource.org/wiki/E

sprit_des_lois_(1777)/L2/C2) [archive]).

12. The proposition that the people are


the best keepers of their own
liberties is not true. They are the
worst conceivable, they are no
keepers at all; they can neither judge,
act, think, or will, as a political body.
publié en 1786 dans A Defense of the
Constitution of Government of the
United States of America (http://ww
w.teachingamericanhistory.org/librar
y/index.asp?document=78
9) [archive].
13. John Dewey (trad. Joëlle Zask), Le
Public et ses problèmes, Folio,
coll. « Essais », 336 p., p. 161-162.

14. Nicolas Weill, « Réconcilier


démocratie et écologie », Le Monde,
2 avril 2011, lire en ligne (https://ww
w.lemonde.fr/idees/article/2011/04/
02/reconcilier-democratie-et-ecologi
e_1502133_3232.html) [archive]

15. Corentin de Salle (préf. Alexander


Graf Lambsdorff et Charles Michel),
La Tradition de la Liberté : Tome II –
Les Lumières libérales, Forum libéral
européen (en) , 494 p. (lire en ligne (http://w
ww.cjg.be/wp-cont/uploads/2015/07/CJG-T

rad_Lib_Tome2-Fr.pdf) [archive]), p. 33.


16. Jean-Jacques Rousseau, Du contrat
social, chap. VII, 1.

17. Dominique Bourg et Kerry Whiteside,


Vers une démocratie écologique, Le
citoyen, le savant et le politique,
Éditions du Seuil / La République des
idées, 2010.

18. Alfred Babo, « Faut-il continuer


d’organiser des élections
présidentielles en Afrique ? (https://
www.lemonde.fr/afrique/article/201
6/09/09/faut-il-continuer-d-organiser-
des-elections-presidentielles-en-afriq
ue_4995283_3212.html) [archive] »,
Le Monde, 9 septembre 2016
(consulté le 30 décembre 2016).
Voir aussi

Bibliographie

Daniel Gaxie, La démocratie


représentative, Paris, Montchrestien,
2003 (4e édition), 159 p.
Claude Lefort (1981), L'Invention
démocratique. Les limites de la
domination totalitaire, nouvelle édition
revue et corrigée, Librairie Arthème
Fayard, Paris, 1994, 340 p.
(ISBN 2213593728)

Didier Mineur, Archéologie de la


représentation politique : Structure et
fondement d'une crise, Presses de
Sciences Po, Paris, 2010, 296 p.
Bernard Manin, Principes du
gouvernement représentatif (1re éd.
1995) [détail des éditions] (présentation en
ligne (http://www.persee.fr/web/revues/home/
prescript/article/rfsp_0035-2950_1995_num_4
5_6_403597) [archive]).

Pierre Rosanvallon, Le peuple


introuvable : histoire de la
représentation démocratique en France,
Paris, Éditions Gallimard, 1998, 379 p.
Jean-Jacques Rousseau (1762), Du
contrat social ou Principes du droit
politique, éd. par Bruno Bernardi,
Flammarion, coll. « GF » no 94, Paris,
2001, 256 p. (ISBN 2-08-071058-3)
Sabine Saurugger (dir.), Les modes de
représentation dans l'Union européenne,
Paris, Éditions L'Harmattan, 2003
Anne-Marie Le Pourhiet (auteur),
Bertrand Mathieu (auteur), Ferdinand
Mélin-Soucramanien (auteur),
Dominique Rousseau (auteur),
Représentation et représentativité,
Dalloz-Sirey, 2008
Simone Goyard-Fabre, « L’idée de
représentation à l’époque de la
Révolution française », Études
françaises, volume 25, numéro 2-3,
automne 1989, p. 71–85
DOI 10.7202/035785ar (https://dx.doi.org/10.7
202%2F035785ar)

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Liens externes

« L’esprit antidémocratique des


fondateurs de la « démocratie »
moderne » (http://classiques.uqac.ca/
contemporains/dupuis_deri_francis/es
prit_anti_democratique/esprit_anti_de
mocratique_texte.html) [archive],
Francis Dupuis-Déri 1999
Jérôme Montès, « Mouvements anti-
mondialisation : la crise de la
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internationales, vol. 32, no 4, 2001,
p. 773-782 (http://id.erudit.org/iderudi
t/704348ar) [archive],
DOI 10.7202/704348ar (https://dx.doi.org/10.7

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