Lecture linéaire 3 Le malade imaginaire acte III, scène 12, Molière
Introduction : voir LL1
Présentation de l’extrait : L’extrait à analyser est la scène 12 de l’acte III. Il s’agit du piège de Toinette qui fait croire à Béline que son époux Argan est mort. Mais celui-ci n’est évidemment pas mort et va écouter tout ce que sa femme pense de lui. Lecture expressive du texte Problématique : On peut se demander comment cette scène révèle le véritable visage de Béline. Annonce du plan : d’abord dans un 1er mvt nous analyserons la comédie dans cette scène de la L1 à 12 Ensuite le 2e mvt de la L13 à 24 nous aborderons la fin de la comédie de l’amour Et enfin ds le 3e mvt de la 25Là 31, nous montrerons le réveil spectaculaire d’Argan. Analyse linéaire : Dans le 1er mvt , Molière fait une parodie de la mort, Toinette annonce à Béline la mort d’Argan avec une apparence de tonalité dramatique, le lexique et les interjections : « Ah !, Mon dieu ! » (L1) Toinette fait une parodie du désespoir. Elle évoque la mort d’Argan par une énumération descendante. La phrase interrogative « qu’est- ce que Toinette ? » ( L2), traduit la surprise de Béline. La supercherie de Toinette fonctionne bien, Toinette annonce à Béline la mort de son mari (l5), elle continue dans la L7 avec l’exclamation et l’interjection, Toinette troublée, elle est submergée par l’émotion grâce au comique de caractère et de situation « hélas oui , le pauvre défunt est trépassé ». Béline est sous l’effet de la curiosité par l’envie de savoir ce qui s’est passé. La stichomythie montre une vivacité de dialogues et révèle de la comédie. Toinette ensuite insiste sur la solitude pour faire croire à Béline que personne n’est au courant de la nouvelle « personne ne sait » (L10). Cette comédie du désespoir, montre directement la réaction froide de Béline. Tout d’abord elle pose des questions sans émotion. L’adverbe « assurément » renforcée par l’interrogation donne l’impression que Béline est toujours dans l’attente sans émotion. Ensuite elle reprend les mêmes mots que Toinette « mon mari est mort » (L5/6) toujours sans aucune émotion. Transition : Après avoir analysé la comédie de cette scène nous allons étudier la comédie de l’amour. 2e mvt : Ce 2e mvt s’ouvre sur les vrais sentiments cachés de Béline à l’égard de son mari. La réaction de Béline constitue un 1er coup de théâtre l’expression lithurgique « le Ciel en soit loué « qui traduit un remerciement à dieu est un décalage intégral avec la veuve éplorée que l’on attendrait. La situation est comique du fait que le spectateur sait qu’Argan entend tout. On imagine la périphrase « un grand fardeau » résonner de manière douloureuse à ses oreilles. Le déterminant démonstratif « cette » (cette mort), (L12) montre une indifférence cynique de Béline à la mort d’Argan qu’elle met à distance. Toinette ramène ironiquement B à son statut de veuve avec les obligations comportementales qui vont avec « je pensais Madame qu’il fallut pleurer » (L13). Elle met en évidence le décalage entre la froideur de Béline et l’attitude escomptée d’être veuve. Le verbe «falloir »(L13), associer au verbe « pleurer » dénonce l’artificialité des rôles joués sur la scène sociale ou les pleurs ne sont souvent qu’un spectacle offert aux autres. Béline se lance à partir de la L14 dans un portrait critique d’Argan , esquissant le portrait du fâcheux, comme le montre le champ lexical de la saleté, « incommode, malpropre, dégoutant, mouchant, crachant » (L15/16), fait d’argan un personnage repoussant. Les énumérations ascendantes, « mouchant, crachant toujours », renforce la dimension satirique de cet anti-portrait. Le champ lexical de la maladie, « lavement, médecine, ventre, mouchant, toussant, crachant », en fait l’anti portrait d’un héros, atrabilaire, hypocondriaque et colérique. L’enchainement des participes présent « fatigant, grondant, » (L17), dresse un portrait en action du personnage dans le plus pur style de la littérature satirique. Mais surtout Béline fait d’Argan une figure diamétralement opposée à celle de l’honnête homme. Argan est l’anti honnête homme, ce qui au XVIIe siècle disqualifie immédiatement le personnage. Toinette répond avec une ironie cinglante par l’antiphrase « voila une belle oraison funèbre ». Toinette souligne le décalage entre la tonalité tragique et la louangeuse de l’oraison funèbre et ce portrait satirique sans concession. Béline ne perçoit pas l’ironie, tellement occupée par son désir de s’enrichir. Le champ lexical de l’économie « récompense, affaire, argent, papiers, me saisir, sans fruit »(L21/23) , montre le matérialisme de Béline qui la rend insensible à la mort d’Argan. Le tps passé avec est Argan est envisage comme un investissement « il n’est pas que j’aie passé sans fruit auprès de lui mes plus belles années » (L23/24), autrement dit, elle a vendu sa jeunesse d’hier contre l’argent d’aujourd’hui. Béline achète de surcroit Toinette comme le montre la phrase « Ta récompense est sure » (L21), elle conclut avec Toinette un contrat de nature commerciale. Les impératifs « portons-le, tenons, viens, prenons auparavant » (L24), transforme Béline en metteur en scène qui dirige Toinette pour arriver à ses fins. Transition : Mais Béline n’arrivera pas à ses fins comme on va le découvrir dans le 3e mvt 3e mvt : Coup de théâtre, le réveil d’Argan. En effet Argan sonne la fin de la représentation comme l’indiquent les didascalies « se levant brusquement » (L25). Le rideau du spectacle inventé par Toinette tombe, les masques sont levés, Argan est vivant d’où le cri de surprise de Béline qui se rend compte qu’elle a été dupée surprise et épouvantée comme le souligne l’interjection « Ahi » (L26). Argan utilise une périphrase ironique « Mme ma femme » (L27) qui rappelle à Béline ses obligations d’épouse, »ma femme » tout en la mettant à distance grace « au madame ». L’allitération en « m » mme, ma, femme c’est ainsi que vous m’aimez », est ironique puisqu’elle constate le non amour de Béline . Argan poursuit dans le registre satirique à travers l’expression ironique « le beau panégyrique » qui montre le décalage entre le terme « panégyrique » discours de louange destiné aux saints ou au héros et le portrait désastreux qu’a fait Béline de son époux. La mise en scène de Toinette a permis de dévoiler à Argan les sentiments de Béline. Il peut maintenant la lire à livre ouvert. La sortie immédiate de Béline montre que le trompeur est trompé et que son sort est scellé comme le montre la didascalie » a Béline qui sort » (L28). Ce dévoilement est salutaire pour Argan qui se dit plus » sage » (L30) pour l’avenir comme le souligne le futur simple de l’indicatif « me rendra sage », « m’empêchera » (L31) L’impératif dans la réplique de Toinette » remettez-vous comme vous êtes », souligne que la servante reprend son rôle de conseillère. Le champ lexical de la connaissance » j’entends, voyons, éprouver, connaitrez » (L ), montre que Toinette tend un miroir aux personnages qui dévoilent leur âme. Elle est une allégorie de la vérité et met à nu les secrets des personnages. Conclusion Cette scène de théâtre dans le théâtre organisée par Toinette a permis de révéler la vérité cachée des personnages, en faisant tomber le masque de Béline. Le théâtre de Toinette est donc paradoxalement un révélateur de vérité. Ouverture : Ce texte fait écho au portrait satirique de Giton , dressé par La Bruyère dans les caratères.