apparait, le vaudeville. Ce sont des comédies à succès
bourgeoises et légères, où s’alternent du texte et des couplets bâtis sur des airs populaires. Le vaudeville est aussi une source de divertissement et de dénonciation à travers toutes les époques. Georges Feydeau excelle dans ce genre en étoffant l’intrigue et les rebondissements, jusqu’au paroxysme comme dans Monsieur Chasse ! (1892) ou Le Dindon (1896). Nous étudierons l’acte I scène XIV du Dindon paru en 1896, donnant à voir la rencontre du monde des affaires et du monde privée de la bourgeoisie. L’extrait étudié se déroule au tiers de l’œuvre et aborde le sujet du divorce et de la tromperie chez les bourgeois parisiens Lucienne et Vatelin. A la lecture de cet extrait, nous pouvons nous demander comment le ridicule des personnages permet-il à Georges Feydeau de critiquer la communauté bourgeoise ? Nous commencerons par voir la critique des pratiques bourgeoises à travers la tromperie et nous finirons par la décrédibilisation de la bourgeoisie par l’intermédiaire de Soldignac.
Dans une première partie, nous observons que
Georges Feydeau compose un dialogue comique pour aborder la situation qui prête à rire, afin de critiquer les pratiques bourgeoises à travers la tromperie. Tout d’abord, nous voyons dans cet extrait que le personnage de Vatelin est submergé par la venue de visiteurs. Nous observons dès le début de la scène un comique de situation puisqu’au moment où Maggy est chez Vatelin, son mari arrive. Vatelin dit par la suite « Lui ! Oui, tout de suite, je suis à lui. » (l.10), cette assonance en [ui] montre son empressement et souligne le fait qu’il est dépassé par les événements. Par la suite, il dit « aller ! aller ! » (l.23) soulignant ainsi sa panique face à la situation. Ensuite, nous comprenons le but de son empressement, pour masquer une faute du passé. En effet, suite à la question de Lucienne, il répond « Oui, oui ! » (l.33), cette répétition a une part d’insistance, montrant qu’il veut dissimuler cette tromperie. Cet effet va être renforcé lorsque Vatelin ajoute cette connotation : « Nom d’un petit bonhomme ! », représentant un appelle à dieu puisqu’il ressent une panique à la pensée même que son secret puisse être révélé. Enfin, nous voyons un homme apeuré par la possibilité que Soldignac découvre qu’il est l’amant de sa femme. Cette peur émerge suite aux paroles de Soldignac : « je l’aurai entre mes mains, je me réserve pour mon plaisir » en parlant de l’amant de sa femme. Ce parallélisme représente une promesse de vengeance qui va fortement inquiéter Vatelin. Cette inquiétude est d’autant plus renforcée par une anaphore en « Ah ! » (l.134 et 144) montrant le désespoir d’une quelconque confrontation avec Soldignac.
Dans une seconde partie nous allons traiter des
procédés déployés par Feydeau pour maintenir un échange comique face à la décrédibilisation de la bourgeoisie par l’intermédiaire de Soldignac. Tout d’abord, nous découvrons un personnage pressé par une certaine addiction aux affaires. Dès son arrivée chez les Vatelin, nous avons un comique de caractère autour de Soldignac. Ce comique de caractère transparait grâce à l’exagération, du défaut humain de penser avant tout au travail. Ceci se retrouve dès les premières paroles de Soldignac : « je suis très pressé » (l.50) et « les affaires » (l.51). Ces mots réapparaissent à la ligne 67 « je suis pressé, j’ai les affaires ». Cela souligne l’ignorance du personnage de Soldignac face à la situation. Les affaires avant tout. Ce comique de caractère est renforcé par une répétition : « très bien ! très bien ! ». Celle-ci renforce le fait que Soldignac n’a pas que ça à faire. A quoi s’ajoute la ponctuation : les « ! » montrant bien que son temps est précieux. Par la suite, Soldignac nous laisse douter de sa force. On reconnait alors le champs lexical de la bagarre avec « leçon de boxe » (l.132), « battu » (l.136), « flanqué une de ces tatouilles » (l.137) … on imagine alors un personnage ayant une certaine force. Cependant, cette impression va rapidement nous amener à hésiter lorsqu’il affirme « qu’il en a traversé la manche » (l.137-138). Cette hyperbole va alors nous questionner sur la réelle possibilité qu’il est pu battre « le premier champion de Londres ». Pour finir, des récits peu crédible sont tourné en ridicule. Après avoir raconté ses exploits, Lucienne répondra par « Oh ! Oh ! Oh ! ». Cette répétition d’interjection est interprétée comme du sarcasme car Lucienne n’est pas subjuguée par les exploits de Soldignac et n’y croit pas du tout. Elle va finir par se moquer de Soldignac en faisant encore du sarcasme : « Oh ! mais vous êtes poète » (l.151) qui montre qu’il n’est pas du tout pris au sérieux. Face à ces moqueries, il répond à côté de la plaque montrant une part d’innocence. Pour conclure, ce vaudeville de Georges Feydeau critique la communauté bourgeoise à travers le ridicule de Vatelin et Soldignac. Soldignac, qui est une homme d’affaire bourgeois, est représenté comme étant un enfant fuyant les problèmes et les responsabilités. Il témoigne également d’un caractère puéril ne lui permettant pas d’accéder à la compréhension du sarcasme. Quand a Vatelin, il est représenté comme étant cachotier et fourbe. Cette critique de la bourgeoisie se fait principalement par l’utilisation du comique de situation. D’autre auteurs ont également fait la critique des bourgeois, comme par exemple Molière dans Le Bourgeois Gentilhomme.