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Histoire nationaliste et cohésion nationale.

Mustapha El Qadéry, BNRM, Rabat.

Les défis de la connaissance du passé continuent à hanter les sciences de la


société à un moment où certaines disciplines continuent à croire que certains
phénomènes sont liés au passé uniquement et non au devenir. Le cas du
nationalisme comme objet d’étude continue à être évoqué comme un sujet lié à
l’époque coloniale. Ses résidus aujourd’hui en sont les héritiers légitimes dont ce
capital constitue l’image positive d’un mouvement libérateur du joug colonial.
L’évolution du pays et ses différentes mutations liés à son contexte «spécifique»
comme son espace régional et continental dans le contexte des nouvelles formes
de mondialisation, nécessite cette permanence de l’observation et des rappels.

Le temps présent n’est pas suffisamment clair pour prétendre connaître le passé
car la lecture de celui-ci a fait longtemps l’objet d’appropriation par les clivages
partisans de la scène politique. L’enjeu est de taille. Entre la tradition et la
modernité, l’instrumentalisation par les acteurs des deux vecteurs théoriques de
la culture dans son sens le plus général offre aujourd’hui à l’observation les
limites des deux approches qui furent souvent opposées. Question
d’optique entre divers projets en compétition, au nom de la nation, pour
s’accaparer l’Etat ? La phase coloniale dans l’histoire du Maroc n’est pas encore
suffisamment clarifiée malgré les nombreux raccourcis dominant l’interprétation
de période, ses politiques et ses conséquences.

Comment donc pourrait-on clarifier les traditions qui s’opposent à la modernité


ou l’inverse ? La tradition elle-même est un objet de débat, pour toutes les
disciplines, tradition qui permet de constituer ces fameux éléments de la nation,
de l’habitus national et du sentiment national. Il paraît, selon Ernest Renan, que
la formation de l’idée de nation et de son contenu dans les divers pays du monde
est un agrégat de souvenirs communs et de passé partagé, qui lient les gens et
qui contribuent à la formation de cette nation qui s’y reconnaissent. Mais, nous
précise t-il, «l’oubli et l’erreur historique sont un facteur essentiel de la création
d’une nation»1. S’agit-il de la raison pour laquelle des conflits, insoupçonnables
à priori, sont apparus pour réparer les amnésies et les erreurs historiques ?

Aujourd’hui, les exemples ne manquent pas à travers le monde, et les


divers conflits pacifiques ou armés en illustrent l’état des lieux, dans la mesure
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où depuis la fin de la guerre froide et la chute du mur de Berlin, d’autres murs
symboliques se sont effondrés successivement dans divers pays et continents.

Même en France, pays du jacobinisme et du républicanisme par


excellence, on assiste aujourd’hui à des remises en causes de la notion de nation
et de l’identité nationale, l’une des matrices fondatrices de la République. Ce
volet de la nation et de l’identité nationale est même devenu un objet de
politiques publiques sectorielles, à travers la mise en place d’un ministère de
l’Immigration et de l’Identité Nationale, ce qui n’a pas manqué de provoquer
des débats sur l’approbation ou non de cette initiative du Président Nicolas
Sarkozy. La nation française n’est plus cet objet de consensus entre les acteurs
de la vie politique et académique, et de nombreux phénomènes contribuent ainsi
à ce double mouvement. Citons parmi ces phénomènes les revendications
culturelles régionales et l’origine immigrée et étrangères d’une partie des
nouveaux citoyens, notamment ceux de confession musulmane dont l’action et
le vécu ont reposé la question des lois de 1901 et 1905 sur la gestion des cultes.
Certains épisodes du passé avaient également surgi parmi ces phénomènes,
notamment le rôle Vichy sous l’Occupation (1940-1944) et l’amnésie ou
l’occultation qui ont accompagné de larges pans de cette période que l’héroïsme
de la Résistance et la Libération avaient longtemps couvert.

La France qui avait son Empire colonial, avait cherché à le façonner


quasiment à son image et y avait instauré par sa présence, son occupation et son
administration un système à la française basé sur une unification de territoires et
une gestion centralisée. Les héritages des systèmes coloniaux ainsi mis en place
furent, souvent, « nationalisés » au lendemain des indépendances, sans pour
autant y ajouter la modalité de fonctionnement prévalant en métropole, centrale
et manquante durant la période coloniale, en l’occurrence la représentation
démocratique qui soumet l’Etat à la nation et le centre à la périphérie. Le Maroc
n’échappe pas à la règle coloniale comme son voisin l’Algérie. Malgré les
différences des systèmes politiques, entre les deux pays, l’héritage jacobin
français est omniprésent dans le système administratif comme dans le système
éducatif et culturel de l’Etat. Le système chargé d’inculquer l’habitus national
aux individus, par le biais divers instruments comme l’école, les mass media et
la production culturelle est aujourd’hui en crise, dans la mesure où les divers
acteurs et responsables, reconnaissent une certaine faillite de ce système, non
seulement dans ses finalités professionnelles, mais aussi et surtout dans la
construction de la citoyenneté, prélude de tout développement et de toute
identité nationale sans accroches.

Diverses théories ont essayé d’analyser les phénomènes nationalistes dans


leurs berceaux, en Europe notamment. Depuis les historiens pionniers qui ont
pensé les assises de la nation, à l’instar de Renan et de Michelet jusqu’aux
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historiens d’aujourd’hui, la nation continue à faire l’objet de narration et
d’interrogation. D’autres disciplines, notamment l’anthropologie et la science
politique, se sont associées à cette interprétation et ont contribué à élargir le
champ du débat. Ce n’est pas qu’une question du passé liée à l’histoire la nation
et sa constitution par des héros et des moments héroïques. C’est également un
problème actuel est une question du devenir d’un ensemble de collectivités qui
constituent les sociétés nationales aujourd’hui. On croyait la question en voie
d’enterrement par le biais du cosmopolitisme et l’internationalisme après les
désastres du premier et du second conflit mondial en Europe, mais voilà que le
phénomène ressurgit au cœur de l’Europe même après les changements
géopolitiques survenus avec l’effondrement de bloc de l’Est dans la suite du mur
de Berlin. L’URSS s’est disloqué non sans douleurs, l’Allemagne s’est réunifiée
dans la joie, la Tchécoslovaquie a divorcé dans le consensus, la Yougoslavie a
éclaté dans le sang et les autres pays ont connu des changements de régime dans
des contextes pacifiques ou révolutionnaires. Ainsi les questions nationales
qu’on croyait enterrées ont resurgi là où les attendait le moins, dans les pays
perçus comme étant gouvernés par des régimes forts que l’idéologie structure et
sur lesquels l’armée veille.

C’est dans ce contexte qu’on assiste à un regain de l’interrogation sur


l’idée nationale, par les disciplines qui croyaient le phénomène historique
uniquement et non d’actualités. Dans les autres pays d’Europe c’est
l’immigration qui va constituer cette matrice qui va mettre à l’ordre du jour la
question nationale. C’est ainsi que l’histoire, la science politique, la philosophie
et l’anthropologie ont en fait des objets d’étude et de réflexion, comme en
témoigne l’abondante bibliographie sur le thème. Citons à titre d’exemple ce
livre collectif intitulé Théories du Nationalisme2 qui a entrepris de mettre à jour
le débat et ouvrir le chantier de nouvelles réflexions entamés par les pionniers
tels Ernest Gellner, Karl Deutsch, Isiah Berlin et Anthony Smith. Eu delà des
écoles, c’est la question de l’historiographie et de l’épistémologie de l’histoire
qui sont de nouveaux, un jeux. Les fables de la mémoire tombent petit à petit,
dans un contexte où le passé ressurgi constamment, surtout ses épisodes
sombres. C’est un moment pour que l’école historique française, commence à
vivre entre le doute et le renouvellement depuis les années quatre-vingt dix3.

Qu’en est-il du nationalisme des colonies dont l’idée est tributaire à


l’Europe et au colonialisme qui a introduit ses idées et ses systèmes dans ses
possessions sud-américaine, asiatique et africaine ? Le nationalisme est
libérateur de ce même colonisateur qui l’a introduit et a accédé au pouvoir pour
diriger la nation au nom de laquelle il tire sa légitimité. Son rôle libérateur a
pendant longtemps consacré la sacralité de ce nationalisme dont la légitimité est
puisée dans ce combat anti-colonial.

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Dans la majorité des études consacrées à cette période, rarement le
nationalisme a fait l’objet de mise en questionnement. Il est même érigé en l’une
des valeurs positives constitutives de l’identité nationale. Dans le cas du Maroc
par exemple, les nationalistes ont longtemps constitué le modèle militant, et les
principales forces politiques et culturelles du pays s’en réclament et y puisent
leurs sources de légitimité. Ce nationalisme a puisé ses origines culturelles dans
les idées arabo-islamiques comme l’attestent les différentes biographies et
autobiographies des leaders fondateurs et ceux qui ont agi pour l’indépendance.
L’arabité et l’islamité comme concepts ont constitué l’idée nationaliste au
Maroc, idée née dans un contexte politique et historique dont la genèse est
connue et reconnue.

C’est dans cette genèse que nous allons l’examiner pour étudier et analyser
ses résultats, puisque la genèse qui semble tranchée depuis longtemps, ne cesse
de connaître des rebondissements. On croyait aussi la question nationale une
question du passé, et voilà qu’elle surgit sur la question territoriale au Sahara ou
la question identitaire des Imazighen pour que l’historien se retrouve de
nouveau, au cœur de la problématique du passé et des usages du passé, non
seulement d’un point de vue historique mais aussi et surtout de point de vue
politique et anthropologique. Le passé en vigueur est l’objet d’interrogation à la
lumière des évolutions locales, régionales, nationales et universelles. Les
différents événements mondiaux ne cessent d’influer sur l’évolution des
systèmes et des régimes. Les facteurs endogènes et exogènes jouent leurs rôles,
et ce ne sont pas l’amnésie officielle et le volet sélectif de cette amnésie qui
constituent pour le chercheur l’obstacle d’interrogation. L’historiographie est
constamment mise à jour, et c’est par cette reconstitution du passé récent que le
passé lointain pourrait être éclairé, au niveau des faits comme au niveau des
lectures.

1. Le passé est-il composé ?

Parmi les éléments constitutifs de l’amnésie collective, «la question


berbère» est l’élément qui, en filigrane, traverse la perception globale de ce qui
fut à «oublier». L’un des premiers actes législatifs de l’Etat indépendant est
d’annuler le dahir de la justice berbère, le dahir connu par le nom du «dahir
berbère». Parmi tous les dahirs de l’époque coloniale, c’est ce dahir qui fut à
l’origine de la naissance du mouvement nationaliste qui a été choisi pour
marquer la rupture avec l’ancien régime et marquer le recouvrement de la
souveraineté nationale4. Selon le sens commun des chroniques relatives à cette
«question», toutes concordent à considérer l’idée de sa naissance, comme
politique après la mise en place du Protectorat, quand Lyautey cherchait à

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réaliser des alliances avec les caïds et chefs des tribus et des confédérations dans
différentes régions.

La majorité de ceux du Moyen Atlas, du Haut Atlas oriental, du Tafilalet,


de l’Anti-Atlas et du Sahara avaient globalement exprimé un non catégorique à
l’offre de ralliement au nouveau Makhzen offerte par Lyautey et ses
successeurs5. Après avoir occupé militairement le Dir nord du Haut et du Moyen
Atlas, Lyautey passa à la conquête de la montagne pour atteindre Khénifra en
juin 1914. En novembre, il fait publier le Dahir sur le respect des coutumes pour
les tribus qui "rentrent dans l’obéissance du Makhzen et acceptent sa paix",
dahir publié dans un contexte où la grande guerre commençait en Europe et le
doute sur le sort du Maroc français était à l'ordre du jour. Cette action politique
et militaire de Lyautey fut qualifiée de politique des grands caïds (berbères) pour
le sud, et de politique coutumière (berbère) au Moyen Atlas. Le deuxième grand
événement de la politique berbère est celui du «dahir berbère» (16 mai 1930) et
la question de la justice, dahir associé tantôt à la transgression de la charia,
tantôt au non respect de l’Islam et de l’autorité su Sultan, et tantôt à
l’évangélisation potentielle que cache le Dahir.

Le sujet du dahir est le noyau du mythe fondateur du nationalisme


marocain, qui a fait du dahir et de ses suites politiques l’essentiel de sa légitimité
dans son émergence politique. Le dahir fut ainsi élevé comme l’apogée de la
politique berbère, débutée avec le Dahir de novembre 1914, à laquelle se sont
attaqués les premiers nationalistes. Le dernier acte de la politique berbère est
retenu dans «la révolution»6 de 1951 et 1953, quand «les tribus berbères» sous
l’égide du Glawi avaient entrepris de déposer le Sultan, selon la version de la
Résidence qui avait ainsi couvert ses actes par le subterfuge des «forces
internes».

Un autre volet de la politique berbère, également retenu dans la


thématique générique est celui de la politique scolaire, où les Berbères avaient
fait l’objet d’une politique qui excluait la langue arabe de l’enseignement qui
leur est réservé, selon le découpage des Arabes et des Berbères. Ceci avait
même constitué un élément de suspicion, vis-à-vis de ceux issus de ce système,
et facteur de leur déloyauté probable à l’identité arabo-islamique, la matrice
fondamentale d'un nationaliste. C’est probablement Maurice Le Glay, en 1921,
connu comme berbérophile notoire, qui fut le premier à utiliser cet intitulé de
«Question berbère», dans un article consacré à cet "enseignement berbère", au
moment de la création des écoles franco-berbères7 à l’instar des écoles «franco-
arabes» mise en place dès 1913. La même année c’est un bureau des «Questions
berbères» qui est crée à la Direction des Affaires Indigènes (DAI), bureau qui a
vu le jour pour suivre et gérer les «institutions» en pays berbère, à savoir l’école,
les jmaâs et les tribunaux de coutume. Cette appellation de «question berbère»
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est restée en vigueur dans le débat académique et politique jusqu’à une date
récente, qui correspond aux premières décisions de réhabilitation de Tamazight
après l’avènement de Mohammed VI. Comment donc cette «question» coloniale
a pu traverser le nationalisme marocain pour en faire son acte de naissance et
objet de son amnésie ?

Aujourd’hui, la connaissance de l’histoire du Maroc et des institutions qui


s’y sont succédées, avant la conquête coloniale, demeure dominée par l’héritage
de la tradition savante née dans le contexte colonial. La science coloniale avait
«grosso modo» divisé les indigènes entre l’orientalisme des études arabo-
islamiques et l’ethnologie des Berbères. Le premier thème fut considéré comme
exogène, dépositaire ou reproducteur d’un savoir dont les origines sont arabes.
Le second thème fut considéré comme autochtone, d’origine locale, tout en
insistant sur l’origine éternellement douteuse de ses autochtones, vus et perçus
comme éternellement dominés par leurs divers conquérants qui structurent leur
histoire, selon la vision conceptualisée et tranché d’Ernest Renan8.

La France s’est inscrite dans une logique coloniale que structure cette
vision de l’histoire de l’Afrique du Nord, et ne fait par sa conquête d’Alger que
prendre la place d’un autre conquérant, selon cette construction. L’autochtone
n’est qu’un éternel dominé et assujetti, précise Renan dans son exploration
scientifique, et ne peut être producteur à ce titre, selon lui, de civilisation ou de
système de gouvernement. Ce jugement académique doublé d’un ensemble de
politiques coloniales ont fini par consacrer une distinction politique, ethnique,
voire raciale des «Arabes conquérants» objet de l’orientalisme et les «Berbères
conquis» objet de l’ethnologie. La majorité des recherches continuent à
reproduire ce schème d’une manière systématique, et l’analyse en terme
d’Arabes et de Berbères continue à faire la part belle à ses stéréotypes.
L’exemple de la tradition savante et des sciences religieuses ou profanes
produites en Afrique du Nord est éloquent.

L’orientalisme avait qualifié ce savoir de «science arabe» que prouvent


«les manuscrits arabes». Pourtant il est facile de constater un glissement
sémantique, qui pourrait nous permettre de s’interroger sur ces manuscrits s’ils
sont «arabes» ou «en arabe». Examinons le titre de cet ouvrage édité par un
linguiste berbérisant de référence, Textes arabes en parler chleuh du Sous9.
Simple lapsus ou bien un raccourci qui renvoie aux caractères d’écriture, d’un
texte en chleuh par un lettré versé dans les sciences de la langue arabe ou de la
religion musulmane ?

En arabe ou en chleuh, le manuscrit est considéré par l’orientalisme


comme «arabe», par ses caractères d’écriture ou sa langue de rédaction, peut-on
conclure. La nuance est de taille malgré la simplicité de ce glissement, puisque
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au fond, les producteurs de ces manuscrits, en Afrique du Nord comme dans le
reste de l’Afrique musulmane et de l’Andalousie (l’Occident musulman) furent
des érudits autochtones, qu’ils soient de confession musulmane ou juive. La
question des généalogies (supposées) ne se pose pas dans ce cas, pour la simple
raison que le savoir est tout d’abord un métier qui nécessite apprentissage,
formation et mobilité pour l’impétrant, chez lui et ailleurs. Comment donc la
science en Afrique du Nord serait-elle une oeuvre «arabe» ou des «Arabes» ?
Qu’il est le contenu de «l’arabité» dans le discours colonial, orientaliste,
nationaliste et académique ? S’agit-il d’une thématique répandue chez les
auteurs des manuscrits d’avant le Protectorat ?

Dans sa sociologie de l’Algérie, Pierre Bourdieu avait souligné que ceux


désignés comme Arabes en Algérie sont dans leur fonctionnement culturel et
cultuel, semblables aux groupes berbères et se distinguent uniquement par leur
langage d’expression10. Le chapitre qu’il a consacré à cette catégorie est intitulé
Les Arabophones, qu’il a prolongé par un autre chapitre intitulé, Le fonds
commun pour parler, en fin de compte en termes de désagrégation et désarroi
durant la situation coloniale. Sa conclusion sur les «Musulmans» d’Algérie vus
et perçus comme Arabes et Berbères, est la suivante : Les échanges ont été si
intenses et si prolongés que les termes en présence, tels l’arabisme et le
berbérisme, ne peuvent plus guère être distingués que par une opération de
l’esprit . Il faut y voir des types idéaux au sens de Max Weber, issus de la seule
reconstruction historique – avec toutes les incertitudes que cela implique – et
nécessaires à la compréhension de cette synthèse originale, résultat de la
confrontation dialectique qui n’a cessé d’opposer le fonds local aux apports
orientaux11.

Marcel Mauss dans son unique article consacré au Maroc avait pourtant,
mis en garde contre ces types idéaux à la Max Weber. Pour lui, le Maroc est
«foncièrement berbère», malgré les apparences que laissent entendre les études
marocaines12. Pourtant, Robert Montagne qui avait soutenu sa thèse13, sous ses
auspices juste après ce séjour marocain, avait conclu en la «spécificité berbère».
Dans son ouvrage, Révolution au Maroc, Montagne précisait que sa thèse est à
l’origine, une réponse à la commande de Lyautey, qui voulait comprendre
comment un chef tribal se transformait en caïd et arrivait à «manger» sa tribu et
à s’imposer au détriment des «républiques» qui s’administrent elle mêmes14.
Comment donc résoudre ce double dilemme d’un Maroc «foncièrement
berbère» de Marcel Mauss, et les Berbères de R. Montagne qui représentent une
«spécificité» par rapport à la norme qui est «le Makhzen arabe» si cher à
Lyautey ? L’étude d’un manuscrit édité et annoté par A. Sedki d’Azaykou sur la
destruction d’une zawiya par Moulay Ismaïl, en 1720, dans le Haut Atlas de
Marrakech15 coïncide avec l’installation de l’ancêtre du Glaoui, comme caïd des
armées du même Sultan dans le col de Telouat, comme le révèle le livre de
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Abdessadeq El Glaoui sur son père et ses ancêtres16. Où peut-on trouver la
spécificité alors que le Makhzen et ses agents sont issus du terroir ?

1930 est l’année de publication de la thèse de Montagne. Elle fut aussi


l’année du «dahir berbère», du décès de Michaux-Bellaire qui s’était installé à
Salé pour sonder la ville frondeuse, et c’est également l’année de la naissance du
nationalisme marocain, selon les mémoires de ces fondateurs. Simple
coïncidence ? C’est la date charnière qui exprime un mouvement entamé
auparavant, une année où les différents ont coïncidé avec l’aboutissement d’un
processus. Rappelons que la guerre du Rif s’était éteinte en 1926. En 1927, suite
au décès de Moulay Youssef, le plus jeune de ses fils est intronisé, contre toute
attente, ce qui avait amené les autorités du Protectorat à changer une partie du
Makhzen, à commencer par le chambellan qui s’est retiré à Fès. 1928 à Paris fut
l’année de la conversion au catholicisme de l’étudiant Mohamed Ben Abdeljalil,
fils de l’adjoint du Pacha de Fès, et son entrée, en 1929, dans l’ordre des
Franciscains.

Tous ces événements réunis ne pouvaient pas passer sans un impact


considérable dans la ville de Fès, ville de l’Islam, de la bourgeoisie, des citadins
et des indigènes évolués. Les différents agents et fonctionnaires du Makhzen, les
élites, les notables, les étudiants, et les diverses personnalités du système ne
pouvaient pas rester insensibles à un tel évènement de conversion, qui a en
réalité, malgré le silence des différents acteurs du nationalisme dans leurs
mémoires sur l’évènement, déclenché un véritable ouragan.

Pourrait-on suggérer l’achèvement de ce processus par l’orage du «dahir


berbère», mythifié depuis, qui fut un parfait prétexte à «la bourgeoisie» qui a cru
au Protectorat et à ses objectifs, pour lui exprimer ses nombreuses colères et
craintes face à l’évolution du système et les différents dangers qui
l’accompagnent, depuis Ben Abdelkrim jusqu’à Ben Abdeljalil ?

A cette date de 1930, «La pacification» battait encore campagne dans les
diverses zones et taches de «dissidence berbère». En même temps, le Protectorat
connaissait une renaissance, après sa défaillance lors de la guerre du Rif, ce qui
avait fait développer l’idée d’une nouvelle politique indigène selon des plans de
Lyautey pour réaménager l’organisation territoriale du Makhzen et refonder la
politique indigène. R. Montagne rapporte vingt ans plus tard, ce n’est qu’en
1928-1930, que les sociologues et les juristes devaient réussir à achever des
travaux qui renouvelleraient nos idées sur le rôle historique du Maghzen en
tribu et mettraient en évidence les capacité que pourraient avoir les tribus à
s’administrer elles mêmes...Mais...les vues politiques des spécialistes allaient
partout s’effacer devant la supériorité des techniciens de l’administration et les

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grands travaux. Nul ne pensait plus alors à réexaminer le plan laissé par
Lyautey17.

La vision coloniale (et académique) est devenue une vulgate sur le bled
makhzen arabe avec ses soumis, ses scribes et ses vieilles familles citadines, et
bled siba berbère avec ses marabouts, ses coutumes et ses éternelles
insoumissions. Les racines savantes de cette vision sont résumées dans l’étude
d’Edmund Burke sur les origines «intellectuelles» de la politique de Lyautey18.
Quels que soient les plans de Lyautey, des techniciens de la colonisation et des
spécialistes des indigènes, aux divers plans du Protectorat, à l’indépendance
d’autres plans se sont succédés, plans qui se résument dans la matrice de la
nation arabo-islamique, dont l’histoire commence avec l’avènement de l’Islam,
et tourne autour des Arabes et de la langue arabe, normes constitutives, légitimes
légales et historiques retenues pour exprimer le passé.

La base de tout cela est un ensemble d’idées génériques qui sont le fruit
d’une vision idéologique du nationalisme, et d’une instrumentalisation des
éléments constitutifs de l’identité nationale supposée, en opposition à la vision
coloniale à vocation purement politique dans un contexte de domination et de
colonialisme. Les deux premiers ouvrages publiés au lendemain de
l’indépendance véhiculent ce que E. Gellner avait qualifié de, The Struggle for
Morocco’s past19 qui s’annonçait, comme enjeux, au lendemain de
l’indépendance. Toute une autre histoire qui atteste les origines allogènes de la
civilisation marocaine, consacrée par les premiers livres à vocation nationaliste,
publiés au lendemain de l’indépendance.

2. Constructions types :

Retracer l’aventure du nationalisme marocain, au-delà des idées


génériques qui constituent une vulgate reconnue et diffusée, suggère un retour
sur son archéologie. L’acte de naissance du mouvement nationaliste atteste lui-
même du degré du "beau" mensonge, puisque il s’est avéré que l’histoire du
«dahir berbère» n’est plus à célébrer par la mémoire nationale, pour continuer à
légitimer les idées que le nationalisme marocain a construit sa conception de son
passé, sa source de mobilisation anti-coloniale, sa source de construction
nationale et sa matrice des politiques publiques en matière éducative et
culturelle après l’indépendance.

La genèse de l’idée nationaliste et le mouvement né au Maroc, à travers


les témoignages des différents leaders de «droite» et de «gauche», conservateurs
ou progressistes, ruraux ou citadins, traditionalistes ou modernistes, arabisants,
francisants ou hispanisants attestent ce grand évènement du «dahir berbère»
comme acte de naissance du mouvement. Il fut l’occasion de la première
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mobilisation publique des différents groupements, où les jeunes scolarisés, les
vieux turbans et les jeunes tarbouchs se sont «réunis» pour la première fois dans
un seul objectif, la lutte contre la politique coloniale dans le domaine «berbère».
On dirait que les domaines «arabe» et «islamique» constitutifs de l’identité du
mouvement nationaliste ne faisaient pas l’objet de contestation.

C’est la «la politique berbère» qui pose problème et qui avait fait, donc, la
raison de la protestation, pourrait-on avancer. Cela constitue un prolongement de
la dichotomie coloniale et sa consécration par le nationalisme naissant.
Rappelons que nous sommes déjà dans un univers d’une politique
«naturellement» «arabe» et «musulmane», conformes aux souhaits du système
édifié depuis 1912, système basé sur une construction assez élaborée dès 1909,
par l’un des penseurs de ce même système, Michaux-Bellaire, respectivement de
1906 à 1930, patron de la Mission Scientifique, de la Section Sociologique de la
Direction des Affaires Indigènes et Conseiller de la Résidence.

Celui-ci dans son article «fondateur»20, après une lecture de l’histoire du


Maroc depuis Carthage jusqu’au Sultan Moulay El Hassan, s’appuyant sur une
lecture de diverses sources dans leurs versions traduites, comme Ibn Khaldoun
ou Naciri, avait conclu son étude, à priori documentée et les étapes restituées, en
l’existence au Maroc de deux organismes bien distincts, un Makhzen arabe qui
constitue le cinquième dominant, et le quatre autres dominés sont composés de
tribus Berbères. Il écrit : «En premier lieu, le Makhzen, avec son Sultan, son
organisation, ses vizirs, ses tribus arabes, guichs et naïbas ; en un mot tout ce
qui concerne le Maroc officiel, le Maroc diplomatique, celui avec lequel on
traite, auquel en prête de l’argent, et auquel on fait payer des indemnités, en un
mot le Maroc souverain d’Algéciras. Cet organisme représente le cinquième du
territoire marocain. Les quatre autres cinquième sont représentés par le Maroc
berbère, qui depuis les phéniciens et avant peut-être, lutte pour conserver son
indépendance et son autonomie, qui veut bien changer de religion, mais qui
refuse de se laisser asservir…La situation du Makhzen vis-à-vis de cet
organisme national est à peu près la même que celle des anciens conquérants
phéniciens et Romains ; comme eux, il est impuissant à terminer sa conquête et
à l’organiser… »21. Comment peut-on croire à cette construction, alors qu'un
mouvement général s'est déclenché, un an avant la publication de cet article,
depuis Smara jusqu'à Marrakech pour introniser Moulay Hafid à la place de son
frère Moulay Abdelaziz, qui a fini par abdiquer après la Bay'a de Fès et de
Tétouan.

Comment peut-on donc croire en cette opposition du Makhzen avec les


tribus «Berbères» alors que celles-ci en sont les bases et les soutiens ? L’objet
ici n’est nullement de discuter l’optique de Michaux-Bellaire. Si la validité
scientifique de cette dualité de «l’organisme marocain» ne peut résister à
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l’épreuve des exemples de successions où les tribus «Berbères» furent les
principaux acteurs des divers prétendants, sa validité politique est prouvée par le
mouvement nationaliste qui a incarné cette typologie et en a fait sa matrice
intellectuelle. Le Maroc «arabe» de la première catégorie de Michaux-Bellaire
se manifeste contre l’Etat protecteur qui a voulu «toucher» au «Berbère» son
frère précise t-on. L’Islam, additif qui a échappé à Michaux-Bellaire est de
taille pour ne pas le mentionner ici, même s’il en fait le nœud de sa
démonstration historique sur la succession des dynasties. Mais qui incarne cet
Islam ?

Les études orientalistes sont passées par le raccourcis des "sciences


arabes" pour en attribuer la paternité aux "Arabes". Ils en sont les plus proches
et ce sont eux qui l’incarnent disent-ils, puisque cela est visible à travers les
manuscrits arabes, comme ils sont nommés par la corporation des interprètes de
l’armée, depuis Napoléon I. Les «Berbères» dont le paganisme est la
caractéristique sont loin de ce domaine de l’Islam, disent-ils, même s’ils en sont
les fanatiques instruments dans le passé, précise les plus érudits, ce qui les
exclue du champ orientaliste au bénéfice de l’ethnologie pour en déceler les
résidus de ce qui n’est pas dans l’Islam des textes, support essentiel de l’Islam
des orientalistes, sans aucune attache sociale et historique. «Le dahir berbère»fut
ainsi cette synthèse qui incarne ce duel de «l’organisme marocain» qui a fini par
prendre forme.

Rappelons, que c’est un fonctionnaire de l’administration du Makhzen


chérifien, fraîchement revenu de ses études parisienne à l’Ecole des Langues
Orientales, après avoir suivi à Salé avec succès, l’école franco-arabe des fils de
notables, et collège franco-musulman de Rabat, issu d’une famille qui occupe la
fonction de Pachalik dans la ville de Salé, les Sbihi, qui avait déclenché la
tempête de Dahir. Tous ses éléments ne sont pas anodins et illustrent le
processus de 1926 à 1929. Ce personnage est, pourrait-on avancer, par son
origine sociale et son parcours, l’idéal type de l’ensemble des catégories mêlées
à l’histoire de la protestation contre le Dahir.

On dirait qu’il s’agit bel et bien de la première catégorie de Michaux-


Bellaire, qui s’incarne sous le Protectorat par l’histoire de ce dahir, pour en faire
un instrument d’une mobilisation et acte de sa réelle existence. Cela est visible
dans tous les témoignages des acteurs de Salé et de Fès qui furent mêlés de près
ou de loin à l’évènement du «Dahir berbère»22. Le prétexte tant attendu est
discuté dans les groupes, pour se mettre d’accord sur la mobilisation contre la
Résidence, sur l’Islam menacé par un dahir des «Berbères». Double calamité qui
a inspiré aux protagonistes de réciter la prière de la circonstance à la mosquée,
pour se manifester et exprimer le désarroi des croyants !

M. Kenbib, Temps présent et fonctions de l'historien, Publications de la 11


Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Rabat Agdal, n° 158
L’idée nationale, selon les acteurs, est née dans une pratique religieuse
comme geste de protestation contre une décision du Protectorat qui s’est engagé,
pourtant, à respecter l’Islam voire le promouvoir. Ce n’est qu’en 1930 que le
Protectorat avait touché à un fondement de l’islamité du pays ? Ou bien ce n’est
qu’en 1930 que certaines catégories du Makhzen se sont rendues compte de
l’islamité menacée ? Et où réside cette menace ? Quelle est la réalité de cette
catégorie du Makhzen qui a pris en charge la défense de l’Islam sans craindre le
châtiment du Makhzen lui même ? Tout cela n’est pas l’objet de cette étude. Il
donne par contre l’indication sur les éléments à étudier pour replacer
l’association de la menace contre l’Islam et ses instruments les Berbères, alors
que le dahir en question, ne relate ni de près, ni de loin, l’image générée par le
nationalisme qui a émergé au sein de la première catégorie de «l’organisme
marocain».

Si on peut résumer cette idée générique devenue vulgate à propos de ce


dahir, les Berbères sont des Musulmans menacés par un dahir, le protectorat
voulait en profiter pour les sortir du giron de l’Islam, leurs frères «Arabes» les
défendent et appellent au développement de l’arabe pour les immuniser contre
les desseins de l’Eglise qui avance sous le couvert de ce dahir que le jeune
Sultan a signé sans en mesurer ces conséquences désastreuses. La suite est
connue. Tous les ouvrages qui ont étudié la politique coloniale au Maroc ont
diffusé et diffusent encore, sans exception, la vision nationaliste du «dahir
berbère», malgré la diversité des analyses, qui finissent toutes par «condamner»
cet aspect de la politique indigène de la France coloniale au Maroc. Les divers
rebondissements de la mouvance Amazigh sur le sujet ont pourtant mis en cause
cette thématique, et même le journal Al Alam qui rappelait aux Marocains
chaque année ce capital symbolique du mouvement national et nationaliste, a
fini par se «rétracter» et a enterré «le dahir» dans son édition du 16 mai 2001,
coupant ainsi avec la tradition de sa célébration habituelle. Tout est à refaire
donc ou bien faut-il ajouter cela à l’amnésie pour continuer à constituer une
nation qui se reconnaît dans le passé commun ? Et quel passé ?

3. Types d’amnésies :

La défense des «Berbères» par leurs frères «Arabes» dans leurs versions
coloniales, a pourtant glissé durant les décennies suivantes vers la lutte contre
«le berbère», perçu comme facteur de déstabilisation de la matrice «arabo-
islamique» de la nation, perturbateur de sa pureté arabe et de son orthodoxie
islamique dans sa version orientaliste. Les exemples ne manquent pas, depuis la
naissance sous le Protectorat, comme à l’indépendance avec l’accès au pouvoir,
le nationalisme a marocain a exalté son arabo-islamité, pourtant, simple idée
académique d’essence coloniale, contestable sans sa construction comme dans
sa lecture, transformée par la machine intellectuelle en matrice et support
M. Kenbib, Temps présent et fonctions de l'historien, Publications de la 12
Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Rabat Agdal, n° 158
idéologique de nouvelles idées politiques et éducatives. Comment ce processus
est-il né ?

Revenons au début, et examinons les premiers pas «culturels» des


nationalistes marocains et comment, la science de la culture «arabe» va servir de
comme savoir mobilisé pour l’idée nationale, qui fait des éléments déterminés
par Michaux-Bellaire sur la première partie de cet organisme, les fabricants des
atouts d’une construction idéologique. Au lendemain de la protestation contre
«le dahir berbère» on assiste à un mouvement culturel engendré par la
mobilisation, et des actions culturelles commençaient à voir le jour, dont une
particulièrement a été suivie par la création théâtrale comme moyen d’action,
d’animation et de construction du passé et de ses amnésies.

En novembre 1932, à la mort du poète Egyptien, Ahmed Chawki,


surnommé le prince des poètes a eu lieu à Fès une manifestation à l’occasion du
quarantième jour de son décès. Allal Al Fassi en avait édité un livre, trois mois
plus tard, et nous donne les détails de ce grand événement qui a marqué l’une
des premières manifestations «culturelles» du nationalisme naissant23. Il ne
s’agit pas d’un événement anodin surtout qu’après les protestations contre le
dahir berbère et leurs répressions par le Pacha de Fès, la paix était revenue pour
que les vieux et les jeunes, unis à l'occasion du dahir, en compagnie des gens du
Makhzen et du Protectorat et se sont tous réunis, autour d’un événement
soigneusement choisi.

Dans sa préface, Allal El Fassi résume l’ensemble des interventions en


prose et en poésie, qui ont pleuré le héros de la langue arabe, de la nation
arabe, de la grandeur arabe, dont tous les présents se sentaient les fils
orphelins. Aux côtés de l’ensemble des interventions en arabe, Allal El Fassi a
édité le discours en français qui a été lu lors de cette cérémonie par un élève
français, Alfred Fauque. Celui-ci ayant publié ses mémoires24, relate les
circonstances et ses relations personnelles avec les étudiants Fassis, qui l’ont
mené à accepter de lire un discours qu’on lui avait préparé pour la circonstance,
étant donné qu’il n’avait jamais fréquenté leurs cercles ni entendu parler de ce
prince des poètes que ses amis fêtaient avec grand éclat25.

Dans ce discours publié par Allal El Fassi, nous pouvons lire l’importance
accordée par son auteur à l’étape française dans la formation académique et
littéraire de ce grand homme de son pays et de la nation arabe, qui avait fait ses
études à Paris et longuement séjourné dans diverses régions et pays d’Europe.
Dans ce discours en français, il fut précisé aussi que la famille de Chawki est
d’origine arabe, venue du pays des Kurdes et qui a suivit Mohamed Ali en
Egypte ! A. Fauque rapporte que cette «journée nationaliste» comme il la
nomme, commémorée le 28 novembre par l’élite de la ville où les étudiants de la
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Qarawiyine côtoyaient ceux du Collège franco musulman Moulay Driss, ce qui
est en soit un évènement, précise t-il. Parmi les invités, il y avait également des
enseignants français du lycée, et cite Le Tourneau26, Bonjean27 et Sallefranque.
Allal El Fassi présidait la cérémonie et distribua la parole, en commençant par le
témoin qu nous citons ici, Alfred Saab Fauque, qui fut élève au Lycée et à qui
les organisateurs avaient demandé d’ouvrir les festivités28.

La suite est un ensemble de discours et de poèmes en arabe, éloge du


défunt, symbole de la grandeur arabe et de la langue arabe, comme le relate
l’introduction de A. El Fassi à tous les textes et poèmes publiés. Parmi les huit
bacheliers «musulmans» de cette année, précise le témoin, sept sont devenus des
ministres au lendemain de l’indépendance. A. El Fassi rapporte la liste des
intervenants dont le pacha de Taroudant, les alem et étudiants de la Qarawiyyin
et même un jeune enfant, les poètes reconnus, les futurs leaders de l’Istiqlal et
notamment l’ingénieur agronome Omar Ben Abdeljalil, frère de Mohamed, le
converti de Paris. De nombreuses personnalités avaient envoyé des lettres tels le
caïd des Oulad Jamaâ, Mokhtar Soussi et Mekki Naciri. A. El Fassi publie dans
son livre les photos de la circonstance où les drapeaux marocains et égyptiens
furent à l’honneur.

Le second évènement qui fait suite à cette célébration a donné lieu à un


autre plus important. L’année suivante, la première pièce de théâtre est jouée par
les élèves du Collège Franco-musulman sous l’égide de l’Association des
anciens élèves. C’est Majallat Al Maghrib, qui nous rapporte le compte rendu de
l’évènement qui date le début du théâtre moderne chez les Marocains. La pièce
choisie est intitulée Amirat Al Andalus (la princesse d’Andalousie) écrite en
poésie par Ahmed Chawki. Le choix de la pièce n’est pas anodin, pour l’utiliser
comme support historique du passé supposé et probablement comme référence
au nationalisme naissant, puisque le sujet traite de l’Andalousie, le paradis
perdu, symbole de la grandeur du passée et la chute des Arabes.

La pièce est consacrée à cette princesse devenue brodeuse, à cause de la


chute de son père le Roi de Séville, Ibn Abbad et son exil à Aghmat non loin de
Marrakech par l’Empereur Almoravide, Youssef Ben Tachfine. L’auteur (et les
acteurs) fait l’éloge du premier, poète et bon vivant, et critique le second qu’il
qualifie de Barbari barbare (jeux de mots en arabe sur le Barbari du Maroc et le
barbari sauvage). En septembre 1933 la pièce est jouée à Marrakech devant les
notabilités locales dont le Pacha de la ville, le Glawi, ainsi que de son secrétaire
et poète Ben Brahim. Majallat El Maghrib, rapporte qu’à la fin de la
présentation, le poète improvisa, en arabe, un poème de 28 vers pour critiquer
Chawki et sa version de l’histoire, et rappeler les événements qui ont amené le
poète admiré à son sort par Youssef le justicier, fondateur de Marrakech et

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Empereur vénéré, après avoir souhaité la bienvenue à ses frères Fassi, leur
rappelant la générosité de Marrakech29.

Comment donc des Marocains dans leurs constructions du nationalisme,


expriment une animosité vis-à-vis de l’histoire du Maroc, celle des
Almoravides ? Ou bien, s’agit-il des descendants supposés d’Al Mouatamid, qui
s’apprêtent à la revanche, dix siècles plus tard ? Quelque soient les raisons, cet
exemple nous donne une idée sur l’une des origines du nationalisme marocain
dans sa construction intellectuelle et culturelle. A la lecture de Majallat Al
Maghrib elle-même qui rapporte l’évènement, et porte voix du nationalisme
naissant, le choix des articles et des rubriques nous montre les préoccupations
arabes dans le champ culturel naissant. Et ce n’est pas sans grand impact que
cette publication et beaucoup d’autres plus tard ont diffusé les diverses
constructions et idées en gestation.

De nombreux témoignages des nationalistes rapportent l’impact de cette


revue dans leurs formations intellectuelles et dans la construction des références
culturelles de leurs nationalismes. Dans le n° 15 daté de décembre 1933, la
revue publie un article intitulé, Ahbathou 3an Barbari (Je cherche un Berbère)30.
L’auteur qui a signé par un pseudonyme, Maâri qui est une sommité
intellectuelle, renvoi ainsi à l’un des illustres philosophes et poètes de l’époque
Abbasside connu par son ironie et sa profondeur, et a imaginé à l’instar de son
Epître du Pardon31 dont le récit se déroule dans l’autre monde. Ce Maâri du
nationalisme publie un texte sur l’arrivée dans l’au-delà, le jour de la
résurrection, d’un Berbère qui s’est déclaré comme tel au portier du Paradis qui
ignore l’existence de ce groupe humain, que même Adam ne reconnaît pas
parmi sa descendance.

Le texte s’interroge ainsi sur ce peuple, ses origines et son sort. Il passe en
revue toutes les polémiques académiques des principaux auteurs du moyen âge,
sur les origines et les convictions de cette branche humaine, pour conclure qu’il
n’y a pas lieu de chercher les Barabr, puisqu’ils ont les mêmes origines que les
Arabes, mais ayant été touchés par une déviation, ils portent en eux le stigmate
de la trahison de leurs origines d’où leur besoin perpétuel des Arabes pour
exister. L’auteur y aborde également les tenants des divers discours sur les
Barbar et les Berbères des divers camps en compétition à l’époque, en
distribuant les bons et les mauvais points aux différents acteurs des événements,
pour donner raison aux uns et critiquer les autres. Cet article est celui qui avait
sortis des méandres de la poésie, le vers d’un poète Andalou de l’époque
Almoravides, qui fait dire à Adam que s’il s’avère que les Barbar sont de sa
descendance, Eve serait répudiée.

M. Kenbib, Temps présent et fonctions de l'historien, Publications de la 15


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Selon le témoignage d’un «berbère» pionnier du nationalisme dans sa
tribu, les Zemmour, et animateur des diverses manifestations qui lui ont coûté la
prison à plusieurs reprises dans sa région, après son séjour d’études à
l’Université Qarawyine et les rencontres décisives dans sa vie de militant
nationaliste avec les divers acteurs et leaders à Fès, cet article de Majallat al
Maghrib avait eu un impact considérable sur les lecteurs dont il faisait partie,
lors de sa parution. Dans ces mémoires32, Ahmed Boubia relate que cet article
faisait même l’objet de lectures collectives et de commentaires, qui en
approuvent le contenu, dans les divers cercles de savants, des commerçants, des
étudiants et des hommes d’affaires durant une longue durée. Afin de généraliser
le contenu et le faire connaître, l’auteur le publie intégralement dans ce livre
autobiographique, et précise que son objectif est de le faire connaître afin que les
générations d’aujourd’hui y puisent le savoir et les desseins machiavéliques du
pouvoir colonial qui voulait évangéliser ses frères Berbères 33.

La question qui demeure, pourquoi cette systématique association du


dahir à l’évangélisation et à la menace de l’islamité des Berbères par
l’évangélisation, alors que le texte du dahir en est loin ? Comment peut – on
expliquer l’adhésion d’un lettré «berbère» à la fable du berbère imaginaire de
Majallat Al Maghrib ? Pourquoi la mémoire du sens commun, visible encore à
travers la presse aujourd’hui, garde cette image générique sur le berbère et son
passé vu et perçu dans la politique coloniale ?

Les exemples ne manquent pas à ce sujet, et les divers leaders de la


mouvance nationaliste et de la résistance qui se reconnaissent comme Berbères
furent parmi les ardents défenseurs de l’arabité du Maroc, de son passé et
devenir arabo-islamiques. Il y a là toute une série de matériaux à analyser pour
examiner l’arabité comme sentiment non seulement réservé aux supposés
«Arabes», alors que des «Berbères» conscient de leur appartenance y adhèrent
sans complexe en passant par le sentiment religieux. Cela pourrait conduire
également à examiner les prolongements politiques des Arabes et des Berbères
dans les analyses consacrées au Maroc post-colonial et la limite de ces idéal-
types devenus des paradigmes.

4. Conclusion

Dans l’un de ses livres34, Ernest Gellner a consacré le chapitre intitulé The
roots of cohesion (les racines de la cohésion)35, à un retour sur le Maroc et
l’Afrique du Nord. L’occasion de ce «retour» après son magistral travail sur la
Zawiya Ahensal, par lequel il a relancé dans le champ académique la théorie de
la segmentarité fut la réédition d’un livre référence sur l’Algérie et peu utilisé,
celui d’Emile Masqueray sur la formation des cités36.
M. Kenbib, Temps présent et fonctions de l'historien, Publications de la 16
Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Rabat Agdal, n° 158
Pour Gellner, ce livre négligé par les spécialistes au détriment d’un autre
plus connu et étudié37, ne manque pas de matériaux pour réfléchir sur les
sociétés nord-africaines pour comprendre et penser les racines de la cohésion
sociale dans une société où la citoyenneté est un fondement majeur. Gellner a
rappelé dans cette étude l’usage sélectif qu’avait fait E. Durkheim des travaux
de Masqueray et de Hanotaux sur l’Algérie, pour construire sa conception
théorique des sociétés mécaniques ainsi que sur les conditions de la société
organique et de la division sociale du travail. Gellner écrivait qu’il doit à R.
Montagne sa découverte de Masqueray, et nous offre une autre lecture de son
livre, le Makhzen et les Berbères38.

Ce retour de Gellner sur ce terrain de l’Afrique du Nord qui avait fait sa


gloire, après un long passage dans les études sur les théories des nationalismes
dans le monde donne une nouvelle perception de ce qu’il considérait comme
structurel dans la relation du Makhzen et les tribus dont il croyait avoir des
frontières. Il en arrive à cette conclusion, que le contexte étudié par R. Montagne
devrait être la grille de lecture d’un système de gouvernement à un moment où
l’Etat central était faible, et que le maintien de l’ordre dans les tribus est
tributaire à l’équilibre des segments tribaux. Le maintien de l’ordre comme
symbole de l’Etat est l’œuvre de la puissance publique locale ou centrale, cela
ne constitue pas une contradiction des structures du pouvoir comme le pensait
Montagne, conclue Gellner.

L’intérêt de ce rappel est de mettre en exergue les éléments


anthropologiques qui structurent l’organisation politique des cités où «la
citoyenneté» et le «patriotisme» sont liés pour la distinction des groupes
dominants dans le système tribal. Comment donc avec le nationalisme, la
légitimation patriotique est associée à une forme de nationalisme dont l’idée
culturelle se retrouve au cœur de la création d’une nouvelle forme, par une
nouvelle légitimation idéologique, de l’appartenance à la cité ?

De nombreuses questions additionnelles s’imposent pour comprendre le


cheminement de l’idée nationale, le nationalisme et la nation. Ce qui est certain,
c’est que la longue histoire humaine, religieuse, culturelle, économique et
politique du Maroc, offre encore des terrains de recherches qui ont déjà donné
lieu à de nombreuses théories de référence dans les sciences humaines et
sociales. Il continue à offrir des champs d’investigation pour comprendre les
transformations et les métamorphoses des peuples, de leurs structures et de leurs
systèmes. Comme si l’amnésie constitutive de la nation selon Renan avait besoin
de renouveler sa mémoire et les outils de sa compréhension.

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Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Rabat Agdal, n° 158
Comme le montre l’étude Ollivier Carré sur le nationalisme arabe, la
combinaison des nationalismes allemand et français, modèles considérés comme
opposés, constituent la matrice de ce nationalisme libérateur dans ses énoncés et
dominateur dans ses fondements, dans ses diverses versions, y compris son
épisode islamiste, comme ce fut celle du Baas ou de Nasser39. C’est pour cela
que les ambivalences du nationalisme qui traversent ce champ d’investigation
sont nombreuses, et quand on analyse aujourd’hui, les versions nationalistes sur
le nationalisme qui furent reprises par la recherche académique, pour en faire
des concepts et des vérités historiques, on peut s’apercevoir dans les récits et
mémoires que les acteurs ont souvent donné des versions de l’histoire plutôt que
la restitution supposée des faits. Est-ce là que commence l’amnésie entretenue ?

Ernest Renan parlait de l’amnésie constitutive de la nation. Il a évoqué


également les éléments de la cohésion auxquels les adhésions se font pour
exprimer la volonté de vivre ensemble dans une communauté de destin commun
et non de langue ou de race commune. Si l’idéologie a longtemps teinté le sens
commun véhiculé par les institutions éducatives et reproduis par la production
culturelle et les moyens de communications de masse, comment donc l’historien
pourrait participer au renouvellement des approches pour dépasser les canevas
nationalistes de la période post-coloniale ? Les canevas où la volonté, la langue,
la race et la religion constituent les grilles de lecture du passé, du présent et du
devenir. Les différents problèmes que traversent les sociétés aujourd’hui, avec le
développement vertigineux des idées et des moyens de communications, ainsi
que les recompositions des Etats et des Nations impliquent le renouvellement
qui devrait suivre dans le champ académique et celui des politiques publiques.
Les manuels scolaires demeurent fort problématiques tant par leur contenu
que par leur style. Ils semblent dupliquer et prolonger les formes de rhétorique
dont ont usé et abusé les divers mouvements et mouvances qui traversent la
société. Le nationalisme s’est approprié la dichotomie coloniale, l’anthropologie
et l’orientalisme ont en tracé les concepts en vigueur. L’histoire peut-elle se
dispenser de cette « archéologie » de construction académique et ses
sémantiques pour la compréhension des temps présents nécessaire aux
compréhensions des passés supposés ?

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Références :
1
- Ernest Renan, Qu’est ce que une nation ? (1882), in œuvres complètes, 1947.
2
- Gil Delannoi et Pierre-André Taguieff (dir), Théories du Nationalisme. Nation, Nationalité, Ethnicité, éd.
Kimé, Paris, 1991
3
- Gérard Noiriel, Sur « la crise » de l’histoire, Paris, Belin, 1996.
4
- Ce paragraphe est développé dans M. El Qadéry, «La justice coloniale des «Berbères» et l’Etat national au
Maroc», in Y. Ben Achour et E. Gobe (dir.), L’Année du Maghreb, Dossier Justice, politique et société, Edition
2007, CNRS, Paris.
5
- A ce jour, on pourrait relever l’absence de travaux académiques sur les étapes politiques et militaires de la
conquête, en dehors de certaines recherches sur des régions ou des épisodes, ou encore des mémoires des divers
officiers qui ont participé aux différentes transactions et opérations.
6
- R. Montagne, Révolution au Maroc, France Empire, Paris, 1953.
7
- Maurice Le Glay, «L’école française et la question berbère », Bulletin de l’Enseignement Public du Maroc, n°
33 bis, Août 1921
8
- E. Renan, «Exploration scientifique de l’Algérie. La société berbère», Revue des Deux Mondes, T. 107,
septembre 1873, Paris.
9
E. Destaing, Texte arabe en parler chleuh du Sous. Librairie orientaliste P. Geuthner, 1937.
10
P. Bourdieu, Sociologie de l’Algérie, QSJ, n° 802, PUF, Paris, 1958.
11
Ibid, p. 90. Parler en termes d’apports d’orientaux uniquement, c’est restreindre les divers apports des
«étrangers» en Afrique du Nord. Aux côtés de l’Arabie, il y a les apports de l’Andalousie, de la Turquie et des
pays du Soudan.
12
M. Mauss, «Voyage au Maroc», L’Anthropologie, n° 40, pp. 453-456, 1930, Paris.
13
R. Montagne, Les Berbères et le Makhzen essai sur la transformation politique des berbères sédentaires,
groupe chleuh, F. Alcan, Paris, 1930.
14
R. Montagne, Révolution au Maroc, op. cit. p 162
15
A Sadki Azaykou. La Rihla du Marabout de Tasaft. (Manuscrit en arabe annoté et édité par), Publications de
la Faculté des Lettres de Kénitra, 1988.
16
A. El Glaoui, Le ralliement. Le Glaoui mon père : récit et témoignage éd. Marsam, Rabat, 2004.
17
R. Montagne, Révolution au Maroc, 1953, p. 141.
18
E. Burke III., “The image of the Moroccan state in French ethnological literature ; a new look at the origin of
Lyaute’s Berber policy”, in E. Gellner & Ch. Micaud, op. cit, pp. 175 et 216.
19
E. Gellner, Saints of the Atlas, Weidendenfield & Nicholson Ltd, London., 1969, The Struggle for Morocco’s
past, pp. 22-29 ; “The struggle for Morocco’s Past”, in I. W. Zartman (ed.), Man, State and Society in the
Contemporary Maghrib, Pall Mall Press, London, 1973.
20
- Ed. Michaux-Bellaire, «L’organisme marocain», Revue du Monde Musulman, Publication de la Mission
Scientifique du Maroc, 3ème année, n° 9, septembre 1909, Paris, E. Leroux.
21
- Ibid, pp. 42-43.
22
- Kenneth Brown, “The impact of the Dahir Berbère in Salé”, in E. Gllner & CH. Micaud (ed), Arabs and
Berbers, Duckworth, London, 1973, pp. 201-216.
23
- A. El Fassi, (présenté par) Yaoum Chawki Bi Fas (le jour de Chawki à Fès), avec dédicace des «fils de la
Qarawiyin» aux enfants de Chawki, édité par Haj Abdessalam Mekour, Imprimerie nouvelle, Fès, (1933 ?)
24
- Alfred Fauque, Eclats de vie. Mémoires d’un serviteur inutile, s.d. imprimerie El Oufouk, Fès. (1997 ?).
25
- pp. 33-37.
26
- Auteur de référence sur Fès et son passé, auteur entre autre de : Fès avant le protectorat : étude économique
et sociale d'une ville de l'Occident musulman, Publications de l'Institut des hautes études marocaines, n° 45,
1949.
27
- Romancier à capital positif dans l’histoire de la littérature marocaine, auteur de plusieurs romans dont,
Confidences d’une fille de la nuit, (Roman), Ed. Marocaines Internationales, Tanger, 1969, réédite en 1990,
Kalila wa Dimna, Rabat.
28
- A. El Fassi rapporte que ce discours avait été prononcé au milieu des festivités, que l’objectif était de faire
connaître ce poète arabe aux Français présents.
29
- Majallat Al Maghrib, 2ème année, n° 12, septembre 1933, Rabat, Riwayat Amirat Al Anadalus wa tamtiliha bi
lhamra (la princesse d’Andalousie et sa présentation à Marrakech) pp. 11-12.
30
- M. El Qadéry, «Je cherche un Barbari» Soi et l’Autre dans la construction du discours nationaliste au Maroc.
Traduction et annotation d’un texte en arabe de 1933, in Soi et l’Autre en Afrique, Institut des Etudes Africaines,
Rabat. 2008.

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Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Rabat Agdal, n° 158
31
- Vincent-Mansour Monteil, (traduction, introduction et notes par), L’Epître du pardon, Abû -l- A’Alâ’ al -
Ma’arri, Gallimard, Paris, 1984.
32
- Si Ahmed Boubia (Modhakkirat), Qaba’il Zemmour wa Lharaka Watania (Mémoires de, Les tribus Zemmour
et le mouvement nationaliste), Publication de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines, série Etudes et
mémoires, n° 38, 2003, Rabat.
33
- Ibidem, pp. 281-288.
34
- E. Gellner, Culture, Identity, and Politics, Cambridge University Press, 3ème ed. 1993 (1ère ed. 1987).
35
- Ibidem, pp. 29-46.
36
- E. Masqueray, Formation des cités chez les populations sédentaires de l’Algérie : Kabyles de Djerjura,
Chaouïas de l’Aouras, Beni Mzab, E. Leroux, Paris, 1886, réédité et préfacé par Fanny Colonna, CRESM-
Edisud, Aix en Provence, 1983.
37
- A. Hanoteau, et A. Letourneux, La Kabylie et les coutumes kabyles, 3 vol., Imprimerie Nationale, Paris, 1873,
réédité en 1893, 3ème édition présentée par A. Mahé et introduite par Hamann, éd. Bouchène, Paris, 2003
38
- Op. Cit.
39
- Olivier Carré, Le nationalisme arabe, Fayard, Paris, 1993.

M. Kenbib, Temps présent et fonctions de l'historien, Publications de la 21


Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Rabat Agdal, n° 158

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