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THEOLOGICUM

Faculté de Théologie et de Sciences Religieuses


Deuxième Cycle

AUX SOURCES D’UNE FÉCONDITÉ CROISÉE :

ARCHITECTURE D’ÉGLISE ET KÉRYGME CHRÉTIEN


PARCOURS HERMÉNEUTIQUE POUR DEUX ÉGLISES

par
Olivier PASCAL

MÉMOIRE DE DIPLÔME
Présenté au Conseil des enseignants de l’Institut Supérieur de Théologie des Arts
Faculté de Théologie et de Sciences Religieuses

Pour l’obtention du diplôme supérieur de théologie des Arts

Directeur : Arnaud MONTOUX


Deuxième lecteur : Florent DUMONTIER

Juillet 2023
opriétaires-bailleurs de l'appartement 861, lot n°115 de la résidence Bagatelle-Grand Parc, 6
ace d'Olomouc, 92160 ANTONY,
donnent quittance
à Frédéric et Anne-Laure PASCAL, locataires au titre du bail en référence,
des paiements faits pour la location de Janvier à Décembre 2017
Engagement de non-plagiat
o 12 425,70 € pour le loyer ( 6 mois à 1 035,58 € - 6 mois à 1 035,37 € )
Je soussigné, PASCAL Olivier, certifie qu’il s’agit d’un travail original et que toutes les sources
o 200,20 €utilisées
de provision pour
ont été charges (40,42
indiquées € pour
dans leur le 1erJe
totalité. semestre,
certifie, 28,63 €/mois que je n’ai ni recopié ni utilisé
de surcroît,
pour le premier semestre)
des idées ou des formulations tirées d’un ouvrage, article ou mémoire, en version imprimée ou
électronique, sans mentionner précisément leur origine et que les citations intégrales sont signalées
entre guillemets.
e 6 janvier 2018
Je certifie être informé que la non-application de ces règles m’expose au Conseil de discipline, qui
pourra aller jusqu’à prononcer la nullité du diplôme.

25 juin 2023

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2 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Remerciements
Ma reconnaissance va à tous les guides qui m’ont fait visiter des églises ; grâce à eux, le sens s’en
est approfondi.
J’ai dans le cœur toute l’équipe de l’ISTA, enseignants et étudiants dans les configurations des
années 2017 à 2023, puisque, parmi les meilleurs ingrédients d’une pédagogie passionnante,
l’amitié et le dialogue ont beaucoup compté.
Je sais particulièrement gré à Denis Hétier pour l’accueil à l’ISTA et l’initiation en profondeur à
la théologie de l’art, à Florent Dumontier pour les parcours philosophiques et herméneutiques,
maintes fois renouvelés, au père Arnaud Montoux pour l’accompagnement stimulant de mon
travail de mémoire, la bienveillance soutenant la critique.
Et par-dessus tout, je remercie mon épouse Bénédicte, pour son patient soutien.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 3


4 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
SOMMAIRE
INTRODUCTION
1. L’expérience initiale de la visite guidée d'église sous mode profane
2. Comment le kérygme s’exprime-t-il dans le langage d'architecture des églises ?
3. La voie herméneutique
4. Comprendre le kérygme dans deux églises

I - LE KÉRYGME COMME SOURCE, L’ARCHITECTURE COMME CHEMIN


1. Le kérygme, entre proclamation, contenu et approfondissement
2. Le kérygme en annonce parlée
3. Le kérygme en langage d’architecture
4. Lire le kérygme par la visite d'architecture
5. Synthèse et conclusion de la première partie

II - SAINTE-MARGUERITE DU VÉSINET ET SAINTE-GENEVIÈVE DE NANTERRE


1. L'église Sainte-Marguerite du Vésinet
2. La cathédrale Sainte-Geneviève de Nanterre
3. Récapitulation comparative

CONCLUSION
1. Récapitulation
2. Fécondités croisées

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 5


Principales abréviations pour les textes du MAGISTÈRE
Nota : les références d’édition sont données dans la bibliographie

Constitutions et décrets du concile œcuménique Vatican II (pape PAUL VI)


SC, pour Sacrosanctum Concilium, Constitution sur la Sainte Liturgie, 1963.
LG, pour Lumen Gentium, Constitution dogmatique sur l'Église, 1964.
UR, pour Unitatis Redintegratio, Décret sur l'œcuménisme, 1964.
DV, pour Dei Verbum, Constitution dogmatique sur la Révélation divine, 1965.
GS, pour Gaudium et Spes, Constitution pastorale sur l'Église dans le monde de ce temps, 1965.
AG, pour Ad Gentes, Décret sur l'activité́ missionnaire de l'Église,1965.

Exhortations apostoliques et lettres encycliques


MC, pour Mystici Corporis Christi, Lettre encyclique du pape PIE XII sur le corps mystique de
Jésus-Christ et sur notre union en lui avec le Christ, 1943.
EN, pour Evangelii Nuntiandi, Exhortation apostolique du pape PAUL VI sur l’évangélisation
dans le monde moderne, 1975.
RM, pour Redemptoris Missio, Lettre encyclique du pape JEAN-PAUL II sur la valeur
permanente du précepte missionnaire, 1990.
EG, pour Evangelii Gaudium, Exhortation apostolique du pape FRANÇOIS sur l'annonce de
l'Évangile dans le monde d'aujourd'hui, 2013.
GE, pour Gaudete et Exsultate, Exhortation apostolique du pape FRANÇOIS sur l’appel à la
sainteté dans le monde actuel, 2018.

Autre texte
LJPA, pour la « Lettre du pape JEAN-PAUL II aux artistes, à tous ceux qui, avec un dévouement
passionné, cherchent de nouvelles “ épiphanies ” de la beauté pour en faire don au
monde dans la création artistique », 1999.

SAINTES ÉCRITURES
Sauf mention d’une autre version ou citation de tiers, les saintes Écritures citées en français le
sont selon la « Traduction œcuménique de la Bible »1 ; citées en grec ou en latin, elles le sont
selon « La sainte Bible polyglotte »2 (synopsis conjointe avec l’hébreu, le français).

1
Traduction œcuménique de la Bible, Paris, Cerf, 1991 (nouvelle édition revue).
2
Fulcran VIGOUROUX, La Sainte Bible Polyglotte contenant le texte hébreu original, le texte grec des Septante,
le texte latin de la Vulgate, et la traduction française de M. l'Abbé Glaire, 8 volumes, Paris, Roger et Chernoviz,
1900-1909.
6 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
INTRODUCTION

1. L’expérience initiale de la visite guidée d'église sous mode profane


Mon expérience de guide pour des visites de mon église paroissiale, Sainte-Marguerite, au
Vésinet, diocèse de Versailles, m’a suggéré que l’édifice que je faisais visiter sous un mode
profane n’en était pas moins annonciateur de la foi chrétienne, autrement dit que son architecture
avait un rôle kérygmatique.
S’agissant de l’architecture, elle est à entendre dans un sens holistique, qui réunit ses
composantes culturelles, artistiques, fonctionnelles, historiques, patrimoniales. Ceci inclut aussi
bien les formes générales de l’édifice, que sa situation géographique, voire cosmique, et
urbanistique ; ou bien les décorations et aménagements qui en font partie et lui donnent sa
personnalité artistique. L’architecture de l’édifice, c’est l’ensemble de ces termes, de ces
« figures », qui lui donnent à la fois son identité et sa singularité3, fondant ainsi « l’édifice en soi »
et lui conférant une fonction de communication de l'ordre du langage.
S’agissant de l’annonce de la foi chrétienne, nous la désignons comme « kérygme » selon le
terme employé par les théologiens et le magistère pour l’annonce des vérités de la foi à des
personnes ignorantes de la Révélation4. « Kérygme » est congruent avec « visite guidée
profane » – nous pouvons dire aussi « visite d’architecture » –, pour une visite qui s'adresse aussi
bien aux chrétiens qu’aux non-chrétiens ; de même, le terme « kérygme » renvoie à un processus
inclusif, qui conjugue d’une part annonce des croyants aux non-croyants, d’autre part réception et
approfondissement de la foi par tous, dans l'approche du mystère de l'Incarnation.
La réalité d’un rôle langagier et kérygmatique de l’architecture d’église, ainsi pressenti, est déjà
attestée. Nous prenons à témoin le cardinal Jean-Marie Lustiger qui y fait référence dans la préface
écrite pour la plaquette de présentation de l’église Notre-Dame de l'Arche d'Alliance à Paris

3
C’est en ce sens que Christian NORBERG-SCHULZ, architecte, historien et théoricien de son art, propose le terme
de « totalité architecturale » ; nous expliquerons dans notre travail comment les réflexions de Norberg-Schulz
sur l’architecture en sa totalité permettent d’expliquer la fonction langagière de l’architecture ; voir p.112 et 260,
de son ouvrage Système logique de l'architecture, 4e édition, Liège, Pierre Mardaga, 1981 (édition originale
en anglais titrée Intentions in architecture, Gr∅ndahl & S∅n, Oslo, 1963), et extrait en annexe 2.
4
« Révélation », avec une majuscule initiale, pour désigner la Révélation divine à l’origine de la foi chrétienne.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 7
inaugurée en 1998 :

L'architecture est un langage. Par ses monuments, l'homme exprime ce qu'il est et comment il vit,
ce qui le pousse à agir et ce qu'il cherche, ce qu'il désire et ce qu'il adore. Ainsi, les accumulations
dont les hommes encombrent le globe terrestre peuvent être étudiées pour comprendre ceux qui
les construisent. Elles ont un sens, même dans leur chaos.
Mais quel est le rapport entre le sens et le langage architectural ? Peut-on déduire une forme d'une
idée, de sorte qu'elle soit comprise par ceux qui la verront ou l'utiliseront ? Car le langage est
communication. Cela est particulièrement visible pour l'architecture religieuse.
Après coup, à la lumière de la foi, les œuvres de jadis, revêtues de la gloire des siècles, nous
semblent immédiatement compréhensibles.5
Entre les questions du cardinal Lustiger, sur le sens du langage architectural, et sa phrase
prophétique finale, sur la foi comme clé de compréhension, un espace de réflexion est ouvert.
J’ai pu le parcourir au cours des années 2018 à 2023 en participant à des groupes de guides de
visite d’église, pour des sessions d’étude ou de formation. Ce fut le cas lors des formations
proposées par l’association Art, Culture et Foi du diocèse de Paris, pour les guides des églises
parisiennes, qui interrogeaient conjointement la théologie et l’architecture d’églises comme Saint-
Joseph-Artisan, Saint-Ambroise, Saint-François-de-Molitor, Saint-Eustache, Saint-Honoré-
d'Eylau ; de même dans un groupe d’échanges du service d’art sacré du diocèse de Versailles,
autour de plusieurs églises de bourgs et villages anciens du diocèse ; puis plus récemment dans un
groupe analogue du diocèse de Vannes ; quant aux consœurs et confrères guides de Sainte-
Marguerite du Vésinet, diocèse de Versailles, c’est avec les guides de la cathédrale Sainte-
Geneviève, église voisine, du diocèse limitrophe de Nanterre, qu’ils ont discuté des significations
à faire valoir dans leur mission.

2. Comment le kérygme s’exprime-t-il dans le langage d'architecture des


églises ?
Ces réflexions pouvaient s’ordonner autour de deux questions : Comment le kérygme s’exprime-
t-il dans le langage d'architecture des églises ? Comment amener les visiteurs à une
compréhension de cette expression ?
Ce faisant, nous retournions la problématique indiquée par le cardinal Lustiger : pour des visites
profanes, ne pouvant présupposer la foi des visiteurs, et la lumière qu’elle apporterait à leur
compréhension de l’architecture, nous recherchions d’abord comment l’architecture peut
introduire à la foi, et donc comment elle peut contribuer au « processus kérygmatique »6.

5
Cardinal Jean-Marie LUSTIGER, « Préface », in plaquette non paginée Notre-Dame de l'Arche d'Alliance, Paris,
Paroisse Notre-Dame de l'Arche d'Alliance, éditeur, 1998.
6
Voir ci-dessous au chapitre I, § 2.
8 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
La première question sera le sujet principal du présent mémoire, étant entendu qu’elle rejoint
et prolonge les enseignements et études développés au même moment au sein de l’ISTA sur l’art
comme lieu d’approfondissement théologique, et aussi sur les transitions possibles entre
herméneutique des œuvres d’art et herméneutique théologique7.
La seconde question, qui se conjugue avec la première, sera en partie reprise parce qu’elle
renvoie à un certain nombre de considérations pratiques, « expérientielles », qui permettent
d’éclairer notre sujet principal : comment nos moyens de lire une architecture se conjuguent-ils
avec « l’éclairage de la foi », le moyen de compréhension indiqué par le cardinal Lustiger ?
En nous référant à la visite guidée profane d’architecture comme exercice de mise en œuvre
pratique de la lecture d’architecture, nous pourrons décrire des voies d’accès à la signification
kérygmatique grâce à l’architecture prise pour elle-même.
Bien entendu, les visites d’architecture ne sont qu’un des types des médiations de foi auxquels
l’architecture peut contribuer, à côté d’autres telles que l’édifice d’église pris comme lieu
liturgique, par exemple8. L’intérêt de la référence à de telles visites, c’est l’intérêt premier porté
au rôle de l’architecture, en vue de dégager son apport spécifique.

3. La voie herméneutique
Nous pouvons envisager un schéma herméneutique pour traiter notre sujet, selon la « démarche
interdisciplinaire » dont Werner Jeanrond définit les principes dans le premier chapitre du livre
« Introduction à l’herméneutique théologique »9. Ce chapitre, intitulé « Objet de
l’herméneutique », fait la proposition que les grands sujets de l’existence peuvent être éclairés par
l’association de démarches « micro-herméneutiques », qui correspondent à l’interprétation
d’objets et de types d’objets spécifiques, à une macro-herméneutique, d’ordre plus général,
philosophique, qui regroupe les questions d’interprétation en vue de « comprendre » l’univers.
Werner Jeanrond formule une recommandation primordiale :

Ces deux champs de l’herméneutique [ nota : c’est-à-dire : macro-herméneutique et micro-


herméneutique ] sont interdépendants. Une démarche macro-herméneutique n’est possible qu’aux
prix d’études micro-herméneutiques minutieuses.10
Pour l’appliquer à notre sujet, nous sommes renvoyés à deux « micro-herméneutiques » : celle

7
Séminaires : « Herméneutique, imagination et théologie d’herméneutique » d’Elbatrina CLAUTAUX et de Florent
DUMONTIER, 2019-2020 ; « Herméneutique théologique et expérience artistique » de Florent DUMONTIER, 2020-
2021, 2021-2022 et 2022-2023 ; Institut Supérieur de Théologie des Arts, Faculté de Théologie et des Sciences
Religieuses, Institut Catholique de Paris.
8
Car, réciproquement, « La liturgie n’est pas l’unique activité́ de l’Église », selon la constitution Sacrosanctum
Concilium, analysée au chapitre I, § 1.5 ci-après.
9
Werner G. JEANROND, Introduction à l’herméneutique théologique, Paris, Cerf, 1995, p. 7-19.
10
Ibid., p. 16.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 9
du kérygme – d’ordre théologique – et à celle de l’architecture – qui procède de l’herméneutique
des œuvres d’art, mais qui est plus encore, en particulier parce que l’architecture se déploie selon
des considérations fonctionnelles –.
Bien entendu, le préfixe « micro- » n’est justifié que par le vocabulaire de hiérarchie
épistémologique de Werner Jeanrond, et non par l’ampleur des thématiques. En pratique nous
devrons toutefois les délimiter de façon minimaliste, mais conjuguée, avec la visée de montrer la
possibilité d’une herméneutique intégrée du kérygme et de l’architecture d’une église, celle-ci
étant dynamisée par celui-là, celui-là se déployant dans des effectivités singulières.
Pour obtenir cette conjugaison, par cohérence avec l’origine de notre questionnement, nous
proposons de constituer l’herméneutique d’architecture en porte-greffe, destiné à accueillir le
greffon de l’herméneutique théologique.
Situons ces deux herméneutiques, celle qui sert de support épistémologique et celle qui oriente
la visée théologique.

a. L’herméneutique d’architecture Fides Quaerens Intellectum


On peut parler « d’herméneutique d’architecture »11, dès lors qu’on cherche à trouver des
significations à un édifice, et qu’à cette fin on se livre à une appréciation conceptuelle ou esthétique
de son architecture, dans l’acception holistique que nous avons indiquée. L’herméneutique
d’architecture suppose l’existence d’un « langage d’architecture »12, c’est-à-dire la pré-existence
d’un ensemble de références symboliques reliées entre elles par diverses logiques, spatiales ou
formelles, dont l’identification permet d’accéder aux significations exprimées par l'édifice.
Par analogie avec la compréhension d’un texte, qui passe par sa lecture – usuellement de gauche
à droite et de bas en haut –, le langage d’architecture peut être « lu » dans « le parcours de visite ».
La compréhension du visiteur en parcours est amplifiée par les explications du guide, un
« herméneute-praticien », situé dans le projet de comprendre l’édifice visité où il agit comme
auteur « d’explications » pour mener les visiteurs au « comprendre ».
Expliquer et comprendre sont donnés par Paul Ricœur comme pôles de « la fonction
herméneutique de la distanciation » entre lesquels se construit l’accès aux significations d’un texte,
et en général de toute réalité destinée à « être comprise » : « La notion de texte [ …] témoigne [ …

11
Paul RICŒUR, « Architecture et narrativité́ », in Revue Urbanisme à Paris, n° 303, p. 44-51, 1998. Cet article
décrit les spécificités de la démarche herméneutique au regard d'une œuvre d’architecture.
12
Des philosophes de l’herméneutique comme Ricœur, Gadamer utilisent le terme « langage » pour désigner la
syntaxe des significations qui adviennent pour tel ou tel type d’objet d’herméneutique. De tels langages peuvent
être éloignés du langage parlé ou écrit, notamment dans ses potentialités conceptuelles ou discursives. Le langage
d’architecture, selon Ricœur (voir note précédente), s’appuie sur des jeux de spatialités, qui servent de repères
pour (re)trouver des temporalités, des narrativités.
10 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
de ] la fonction positive et productive de la distanciation au cœur de l'historicité de l'expérience
humaine »13. « L’herméneutique d’architecture », comme cadre de pensée du processus de « visite
d’architecture », peut être poussée vers la compréhension des significations religieuses de l’église-
édifice.
Dans la visite profane, l’architecture est le centre d’intérêt premier – au plan épistémologique.
Toujours dans ce schéma, s’il y a une signification du kérygme dans l’expression architecturale,
on doit la rechercher d’une part dans des indices concrets et expressifs, et d’autre part dans une
cohérence de ces indices, entre eux et avec le système architectural global, si tant il est vrai que le
kérygme chrétien n’est pas une proposition limitée et contingente, mais au contraire une
proposition qui fait globalité.
Dans ce mouvement, la première observation à prendre en compte vient de la variété des églises
que nous avons récemment « interrogées » en lien avec une vingtaine de leurs guides. Les
expressions de la foi chrétienne que nous y avons vu sont multiples et différentes d’une église à
l’autre, tout comme d’ailleurs les styles et les partis architecturaux. Chacun des guides rencontrés
témoignait de cohérences des significations religieuses exprimées par l’église qu’il présentait, et
indiquait des correspondances avec les singularités de son architecture. C’est l’existence de ces
cohérences dans la variété qui permet de proposer une notion d’accent théologique, qui
caractériserait spécifiquement les expressions de foi chrétienne réunies dans une église donnée, et
qu’il est possible de mettre en rapport avec son architecture.
Nous devrons vérifier la portée et même simplement la légitimité théologique de cette notion
d’accent théologique, employée dans ce contexte. Nous avançons déjà ici son intérêt d’être
« opérante » pour notre sujet, qu’elle permet d’éclairer par une proposition au point d’articulation
des deux herméneutiques :
L’architecture, par les « figures » qui la composent – selon un vocable que nous préciserons –
, rend compte de ces accents théologiques ; autrement dit, il y a des consonnances entre des
accents théologiques de la foi exprimée et l’architecture de l’église.
Notre démarche visera à attester cette proposition, en en précisant les termes d’abord, en
soumettant ensuite deux églises à un approfondissement conjoint de leur architecture et de leurs
accents théologiques.

13
Paul RICŒUR, Du texte à l'action : essais d'herméneutique II, Paris, Seuil, 1986 ; « La fonction herméneutique
de la distanciation » est le titre d’un des chapitres, p. 101-117.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 11
b. L’herméneutique théologique Credo ut intelligam
Assumer que nous voulons bénéficier de notre élan de guide profane, herméneute
d’architecture, pour lire et expliquer le kérygme dans nos églises, n'empêche pas de s’inscrire dans
une logique de foi : notre recherche sur l’expression du kérygme par l’architecture doit tout autant
être ordonnée aux raisons de notre foi.
Ainsi une autre question doit être posée : est-il théologiquement concevable que le kérygme
puisse s’exprimer par le langage d’architecture ? et si oui, y a-t-il des conditions à cette expression
? Cette question est préalable à un double titre : elle fonde l’objet de notre recherche, et elle permet
de qualifier le kérygme dont nous cherchons à trouver l’expression.

4. Comprendre le kérygme dans deux églises, pourquoi, comment ?


Étant remonté aux sources de notre questionnement sur l’existence et la portée de consonnances
entre les accents du kérygme et l’architecture d’église, notre recherche va pouvoir descendre son
cours, selon trois étapes :
En vue de fonder les deux notions d’accent théologique et de figure d’architecture, nous
préciserons les hypothèses que nous venons de formuler concernant notre herméneutique de guide
d’église : le kérygme chrétien peut-il vraiment s’exprimer dans une architecture d’église ?
comment le langage d’architecture peut-il être kérygmatique et quelle est sa fécondité ? et
finalement est-il possible qu’il fasse accéder à de nouveaux espaces de compréhension du
kérygme ?
Deux églises à l’architecture remarquable, contrastées entre elles, Sainte-Marguerite du
Vésinet, diocèse de Versailles, et Sainte-Geneviève, cathédrale du diocèse de Nanterre, seront
mobilisées pour y expérimenter la consonnance entre architecture et théologie, notamment par la
construction d’un parcours de visite.
Il nous restera ensuite à faire un retour sur ces expériences, à montrer ce qu’elles valident et ce
qu’elles suggèrent, tant pour la compréhension de l’architecture que pour celle du kérygme.

12 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


I - LE KÉRYGME COMME SOURCE, L’ARCHITECTURE COMME CHEMIN

Nous rappelons la proposition que nous voulons préciser : L’architecture, par les figures qui la
composent, rend compte d’accents théologiques ; autrement dit, il y a des consonnances entre des
accents théologiques d’une foi exprimée et l’architecture d’église.
L’aptitude du langage d’architecture à l’expression de la foi chrétienne, en grande part de
l’ordre de l’annonce dans son application aux édifices d’église, devra être évaluée selon deux
termes : d’une part la possibilité d’exprimer le contenu de cette foi en annonce, d’autre part
l’effectivité qui peut en résulter.
Pour fonder l’une et l’autre de ces évaluations, il nous faut d’abord caractériser la foi annoncée,
tant au plan du contenu qu’à celui de processus d’annonce. Le vocable de « kérygme », qui
implique l’annonce et même la proclamation, nous servira de point d’entrée pour cette double
recherche à mener dans les Écritures et dans la tradition de l’Église, pour préciser son contenu et
sa portée théologique. Nous en rendrons compte dans le paragraphe 1. Nous rendrons compte de
son effectivité annonciatrice en tant que parole dans le paragraphe 2.
Viendra ensuite la question de la transposition en langage d’architecture, pour laquelle, nous
devons interroger un paradoxe : comment l’effet d’annonce peut-il être pris en compte par un
langage muet ? Les Écritures nous donneront des pistes sur la légitimité de la démarche, puis nous
solliciterons des « grammairiens » de l’architecture pour établir des voies de correspondance entre
langage parlé et langage d’architecture, et ensuite les adapter à l’expression du kérygme dans le
langage d’architecture d’église. Nous en rendrons compte dans le paragraphe 3.
Après le stade de la grammaire, il faudra passer à celui de la lecture, abordée par l’expérience
de la visite d’architecture : nous en préciserons le rôle et les conditions dans le paragraphe 4.
Le paragraphe 5 proposera une synthèse du présent chapitre.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 13


1. Le kérygme, entre proclamation, contenu et approfondissement

1.1. Origines linguistiques et scripturaires


Au plan linguistique, le terme « kérygme » est un néologisme de la théologie moderne qui s’est
généralisé dans toutes les langues de la théologie, d’abord dans l’univers protestant bibliste,
ensuite, par les écrits de J. Jungman et K. Rahner, dans la théologie catholique, comme en rendent
compte en particulier le Lexikon für Theologie und Kirche14, en langue allemande,
et l’encyclopédie « Catholicisme, hier, aujourd'hui, demain »15.
Cette dernière source énonce synthétiquement : « Kérygme : Terme du vocabulaire technique
des biblistes […], désigne la proclamation de l'Évangile aux non-croyants en vue de leur
conversion »16.
Les Écritures et la patristique en langue grecque emploient bien le mot kêrygma [κήρυγμα] pour
désigner les prédications de certains prophètes, du Christ ou des Apôtres, mais les traductions
anciennes et modernes dans d’autres langues n’emploient pas de vocable directement dérivé
de kêrygma. En latin, notamment, on traduisait par « praeconium » ; et en français, par
« proclamation », ou par « prédication » dans le contexte religieux.
Dans tous les cas, qu’il s’agisse du substantif grec ou de ses diverses traductions, le terme peut
être entendu avec l’une ou l’autre des trois significations : ce qui est proclamé (ou prêché), ou
l’acte de de proclamer (ou prêcher), ou l’événement de la proclamation (ou de la prédication). Hors
contexte théologique, la proclamation visée par le terme grec classique peut être de toute nature,

14
Michael BUCHBERGER, Walter KASPER et al, Lexikon für Theologie und Kirche, en huit volumes, tome
quatrième, Fribourg-en-Brisgau (Allemagne), Herder, 1999, p.1407-1409. Au début de l’article « Kérygme » du
Lexikon, on lit : « En employant le terme de kérygme comme expression de la prédication chrétienne, depuis
Martin Kähler [théologien protestant et bibliste prussien, 1835 – 1912 ], la théologie moderne a élevé un mot
biblique au rang programmatique, alors que ce mot n’appartient pas à la terminologie du Nouveau Testament ;
conjointement avec κηρύσσειν (proclamer) et κηρύξ (héraut), ce terme ne représente qu'une partie du champ de
mots diversifié concernant la proclamation de l'évangile d’un point de vue soit objectif (la Parole de Dieu), soit
subjectif (l’annonce). […] Les implications systématiques qui s'attachent au terme de kérygme, en particulier
chez R. Bultmann et son école (et donc aussi chez H. Schlier), dépassent par conséquent la terminologie du
Nouveau Testament avec sa portée particulière et pointent vers des significations ordonnées supérieurement » ;
notre traduction de « Kerygma : Mit dem Begriff K. als Ausdr. für die chr. Predigt hat die neuere Theol. seit M.
Kähler einem bibl. Wort zu programmat. Rang verholfen, den es in der Terminologie des NT nicht besitzt ; dort
markiert es zusammen mit κηρύσσειν und κηρύξ (Herold) nur einen Ausschnitt aus einem vielgestaltigen
Wortfeld, das die Verkündigung des Evangelium nach seiner obj. (“Wort Gottes”) wie subj. (“verkündigen”)
Seite hin besitzt. […] Die systematischen Implikationen, die besonders bei R. Bultmann und seiner Schule (und
so auch bei H. Schlier) am Kerygma-Begriff haften, überschreiten infolgedessen die NT Terminologie mit ihrer
partikularen Reichweite und weisen auf übergeordnetem Zusammenhange hin ».
15
Gabriel JACQUEMET et al, Catholicisme hier, aujourd'hui, demain : encyclopédie en sept volumes, tome 3, Paris,
Letouzey et Ané, 1948-2009, p.1414. A l’article « Kérygme », on lit : « L'expression fut très employée, il y a
quelques années, pour désigner, à la suite de Jungmann [Josef Andreas Jungmann 1889 – 1975 ] et Rahner, le
renouvellement de la théologie en vue d'en faire une préparation à la prédication ».
16
Catholicisme hier, aujourd'hui, demain, tome 3, Ibid., p.1414.
14 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
selon le dictionnaire Bailly17.
Dans le grec des Écritures, le substantif kêrygma est en réalité assez peu employé, apparemment
seulement quelques occurrences dans le nouveau Testament, ci-dessous, notamment dans les
épîtres de Paul.

Lors du jugement, les hommes de Ninive se lèveront avec cette génération et ils la condamneront,
car ils se sont convertis à la prédication de Jonas ; eh bien ! ici il y a plus que Jonas (Mt 12, 41)18 ;
À Celui qui a le pouvoir de vous affermir selon l'Évangile que j'annonce en prêchant Jésus Christ,
selon la révélation d'un mystère gardé dans le silence durant des temps éternels (Rm 10, 25)19 ;
Ma parole et ma prédication n'avaient rien des discours persuasifs de la sagesse, mais elles étaient
une démonstration faite par la puissance de l'Esprit (1 Co, 2, 4)20 ;
Et si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est donc vide, vide aussi est votre foi (1 Co, 15,
14)21.
Au rebours, les Écritures usent largement du verbe de la même racine, kêryssô [κηρύσσω]22,
qui en grec classique signifie « proclamer publiquement ». Cet emploi fréquent
montre l’importance du fait d’annoncer, en soi, et même lui confère de la solennité23. Bien entendu,
le contexte n’oblitère pas la référence au contenu de l’annonce, même s’il n’est pas substantivé.
On trouve ce verbe dans l’évangile de Matthieu, où il s’applique à la prédication de Jean :

En ces jours-là paraît Jean le Baptiste, proclamant dans le désert de Judée. (Mt 3, 2) 24
et à celle de Jésus :

Dès lors Jésus commença à prêcher, et à dire : Repentez-vous, car le royaume des cieux est
proche (Mt 4, 17) 25
… ainsi que dans les deux autres synoptiques, mais non dans l’évangile de Jean, pas plus que
dans l’Apocalypse.
Dans des circonstances analogues, l’évangile de Jean utilise soit le verbe legô [λέγω], soit le

17
Dictionnaire Bailly, p. 1088.
18
Ἄνδρες Νινευῖται ἀναστήσονται ἐν τῇ κρίσει μετὰ τῆς γενεᾶς ταύτης καὶ κατακρινοῦσιν αὐτήν : ὅτι
μετενόησαν εἰς τὸ κήρυγμα Ἰωνᾶ : καὶ ἰδού, πλεῖον Ἰωνᾶ ὧδε.
19
Τῷ δὲ δυναμένῳ ὑμᾶς στηρίξαι κατὰ τὸ εὐαγγέλιόν μου καὶ τὸ κήρυγμα Ἰησοῦ Χριστοῦ, κατὰ ἀποκάλυψιν
μυστηρίου χρόνοις αἰωνίοις σεσιγημένου.
20
Καὶ ὁ λόγος μου καὶ τὸ κήρυγμά μου οὐκ ἐν πειθοῖς ἀνθρωπίνης σοφίας λόγοις, ἀλλ’ἐν ἀποδείξει πνεύματος
καὶ δυνάμεως.
21
εἰ δὲ χριστὸς οὐκ ἐγήγερται, κενὸν ἄρα τὸ κήρυγμα ἡμῶν, κενὴ δὲ καὶ ἡ πίστις ὑμῶν.
22
Dictionnaire Bailly, p. 1088. Nota : dans nos mentions des verbes grecs, nous utilisons la forme traditionnelle
employée par le dictionnaire Bailly, qui est la 1ère personne du singulier. Mais pour des citations employant la
forme infinitive, par exemple dans les dictionnaires de théologie, telle que κηρύσσειν, nous gardons cette forme.
23
Selon une remarque de Colette et Jean-Paul DEREMBLE, in Jésus selon Matthieu : héritages et rupture, Artège
Lethielleux, 2017, p.78.
24
Ἐν δὲ ταῖς ἡμέραις ἐκείναις παραγίνεται Ἰωάννης ὁ βαπτιστής, κηρύσσων ἐν τῇ ἐρήμῳ τῆς Ἰουδαίας.
25
Ἀπὸ τότε ἤρξατο ὁ Ἰησοῦς κηρύσσειν καὶ λέγειν, Μετανοεῖτε : ἤγγικεν γὰρ ἡ βασιλεία τῶν οὐρανῶν.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 15
verbe anangellô [ἀναγγέλλω], soit le verbe krazô [κραζω]. Legô signifie simplement dire, et son
emploi concernant Jésus renvoie évidemment au substantif logos, le « verbe », la « parole », par
lequel l’évangéliste désigne Jésus-Christ. Concernant anangellô, le dictionnaire Bailly propose
« revenir annoncer »26, et on comprend que Jean souhaite souligner une origine de l’annonce,
plutôt que ses destinataires dans leur ampleur comme le fait le verbe kêryssô. Par exemple dans
Jean 4, 25 : « La femme lui dit : “ Je sais qu'un Messie doit venir – celui qu'on appelle Christ.
Lorsqu'il viendra, il nous annoncera toutes choses ” »27. De même, dans Jean 16, 25 et Jean 20,
18. Concernant le verbe krazô, le dictionnaire Bailly indique « crier fortement »28. Dans 1 Jn 1, 3,
c’est apangellô [ἀπαγγέλλω]29 : « ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons, à vous
aussi, afin que vous ayez, vous aussi, communion avec nous ; et notre communion à nous est avec
le Père et avec son Fils Jésus-Christ »30
On relève kêryssô dans les Actes des Apôtres où il s’applique à la prédication de Pierre ainsi
qu’à celle de Paul :

Et il nous a ordonné de prêcher au peuple, et d'attester que c'est lui qui a été établi par Dieu
comme juge des vivants et des morts (Ac 9, 42)31.
Des exorcistes juifs itinérants entreprirent à leur tour de prononcer, sur ceux qui avaient des esprits
mauvais, le nom du Seigneur Jésus ; ils disaient : “ Je vous conjure par ce Jésus que Paul
proclame ! ” ; proclamant le Règne de Dieu et enseignant ce qui concerne le Seigneur Jésus Christ
avec une entière assurance et sans entraves (Ac 19, 13)32.
Paul emploie kêryssô abondamment dans ses épîtres, selon notre recensement : 10 fois dans
Romains, 5 fois dans 1 Corinthiens, 3 fois dans 2 Corinthiens, 2 fois dans 2 Timothée, 1 fois dans
respectivement Colossiens, 2 Thessaloniciens, Philippiens, et sans autre occurrence ailleurs.
Les éditions en français du Nouveau Testament traduisent le plus souvent kêryssô par
« prêcher » (Louis Segond, Bible de Jérusalem) ou « proclamer » (TOB, Traduction Liturgique),
à l’exception des hébraïstes Claude Tresmontant33 et André Chouraqui qui traduisent par « crier »

26
Dictionnaire Bailly, p. 117.
27
Λέγει αὐτῷ ἡ γυνή, Οἶδα ὅτι Μεσίας ἔρχεται – ὁ λεγόμενος χριστός : ὅταν ἔλθῃ ἐκεῖνος, ἀναγγελεῖ ἡμῖν πάντα.
28
Dictionnaire Bailly, p. 1129.
29
Dictionnaire Bailly : « Revenir annoncer, répondre », p. 198.
30
Ὃ ἑωράκαμεν καὶ ἀκηκόαμεν, ἀπαγγέλλομεν ὑμῖν, ἵνα καὶ ὑμεῖς κοινωνίαν ἔχητε μεθ’ἡμῶν : καὶ ἡ κοινωνία
δὲ ἡ ἡμετέρα μετὰ τοῦ πατρὸς καὶ μετὰ τοῦ υἱοῦ αὐτοῦ Ἰησοῦ χριστοῦ.
31
Καὶ παρήγγειλεν ἡμῖν κηρύξαι τῷ λαῷ, καὶ διαμαρτύρασθαι ὅτι αὐτός ἐστιν ὁ ὡρισμένος ὑπὸ τοῦ θεοῦ κριτὴς
ζώντων καὶ νεκρῶν.
32
Ἐπεχείρησαν δέ τινες ἀπὸ τῶν περιερχομένων Ἰουδαίων ἐξορκιστῶν ὀνομάζειν ἐπὶ τοὺς ἔχοντας τὰ πνεύματα
τὰ πονηρὰ τὸ ὄνομα τοῦ κυρίου Ἰησοῦ, λέγοντες, “ Ὁρκίζομεν ὑμᾶς τὸν Ἰησοῦν ὃν ὁ Παῦλος κηρύσσει ”
κηρύσσων τὴν βασιλείαν τοῦ θεοῦ, καὶ διδάσκων τὰ περὶ τοῦ κυρίου Ἰησοῦ χριστοῦ, μετὰ πάσης παρρησίας,
ἀκωλύτως..
33
Voir Claude TRESMONTANT, Le Christ hébreu : la langue et l'âge des Évangiles, Paris, O.E.I.L. 1983. La thèse
de Claude Tresmontant est que les évangiles connus en grec sont une traduction de textes hébreux ou araméens,
un temps conservés soit par oral, soit par écrit, mais disparus depuis. Il développe plusieurs arguments en ce
16 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
et indiquent ainsi que le terme hébreu d’origine est particulièrement intense.
Les colorations de l’expression kérygmatique sont donc multiples comme le relève
l’encyclopédie « Catholicisme, hier, aujourd'hui, demain » :

On aurait tort de le [kêryssein] traduire simplement par « prêcher », ce verbe désignant de façon
trop générale l’ensemble du ministère de la parole. Le vocabulaire du N. T. traduit la diversité des
formes et des fonctions de ce ministère.34

Le contexte linguistique des Écritures étant posé, regardons comment le concept de kérygme
s’est développé, selon quelles significations théologiques.

1.2. Le kérygme, terme polysémique de théologie pour conjuguer événement et


message
La définition citée ci-dessus, de « proclamation de l'Évangile aux non-croyants en vue de leur
conversion »35 recouvre aussi bien ce que proposent les dictionnaires de théologie36 que le
magistère, dans les textes relatifs à l’évangélisation qui s'y réfèrent spécifiquement : Evangelii
Nuntiandi37 (1974), Redemptoris Missio38 (1990) et Evangelii Gaudium39 (2014).

sens, notamment celui des analogies entre le grec des Évangiles et celui de la bible des Septante, traduction de
l’hébreu, tant au plan du vocabulaire que des tournures littéraires ou grammaticales. Comme d’autres biblistes,
il se fonde sur ces analogies pour retrouver les termes hébreux qui pourraient être en arrière-plan de différents
termes grecs des évangiles, avec les nuances de sens que cela peut induire ou suggérer.
34
Catholicisme hier, aujourd'hui, demain, tome 3, op.cit., p. 1414.
35
Catholicisme hier, aujourd'hui, demain, tome 3, Ibid.
36
Outre les sources précédemment citées, nous avons consulté l’article « kérygme » dans les dictionnaires
suivants : de René LATOURELLE, Rino FISICHELLA, Dictionnaire de théologie fondamentale, Montréal, Bellarmin
Paris, Cerf, 1990 ; de Peter EICHER et al, Dictionnaire de théologie fondamentale, Paris, Cerf, 1988 ; d’Olivier
LA BROSSE, Antonin-Marcel HENRY, Philippe ROUILLARD, Dictionnaire des mots de la foi chrétienne, Paris, Cerf,
1989 ; de Michel DUBOST, Xavier LESORT et al, Paris, Théo, nouvelle encyclopédie catholique, Droguet &
Ardant/Fayard, 1989 ; de Karl RAHNER, Herbert VORGRIMLER, et al, Petit dictionnaire de théologie catholique,
Électre, 2020 ; ainsi que l’article « kérygme » rédigé par André PAUL, in Encyclopædia Universalis, et l’article
« kérygme », in le « Glossaire » du site Internet de la Conférence des Évêques de France [en ligne par URL :
https ://eglise.catholique.fr/glossaire, © Église catholique en France].
Trois sources sont quasiment muettes sur le kérygme et sa théologie : Catéchisme de l’Église catholique, Paris,
Centurion/Cerf/Fleurus-Mame, 1998 ; Hugues DERYCKE, André DUPLEIX, et al, sous la direction de Gérard
REYNAL, Dictionnaire des théologiens et de la théologie chrétienne, Paris, Bayard/Centurion Paris,
Bayard/Centurion, 1998 ; Jean-Yves LACOSTE directeur de la publication, Paul BEAUCHAMP, directeur de la
rédaction, Dictionnaire critique de théologie, Paris, PUF, 3e édition, 2013 (1ère édition, 1998).
37
PAUL VI, Evangelii Nuntiandi (EN), exhortation apostolique sur l’évangélisation dans le monde moderne,
Paris, Téqui, 1975.
38
JEAN-PAUL II, Redemptoris Missio (RM), lettre encyclique sur la valeur permanente du précepte missionnaire,
Paris, Téqui,1990.
39
FRANÇOIS, Evangelii Gaudium (EG), exhortation apostolique sur l'annonce de l'Évangile dans le monde
d'aujourd'hui, Paris, Téqui, 2013.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 17
Sous cette définition générale, les dictionnaires repèrent une polysémie du terme :
En premier lieu, la proclamation kérygmatique désigne ensemble l’événement d’annonce
(proclamatoire) de l’Évangile et le message contenu par cette annonce.
En second lieu, au plan de l’historicité du terme, on peut distinguer d’une part le « kérygme
primitif », ou « kérygme apostolique », la proclamation de foi des Apôtres, exposée en diverses
occurrences des Actes des Apôtres ou des épîtres apostoliques, et d’autre part le kérygme de la
théologie et du magistère contemporains, relatif à l’action de l’Église pour l’évangélisation et la
catéchèse, sous forme de processus40, et que nous pourrons appeler « kérygme
d’évangélisation »41.

Pour comprendre comment ces significations se conjuguent, nous proposons d’examiner


successivement le contenu du message, tel que le comprend le kérygme primitif, puis sa
dynamique trinitaire comme événement de l’économie du salut, et enfin le kérygme au cœur de
l’Église.

1.3. Le kérygme primitif, au temps des Apôtres : christologie et rhétorique du


témoignage
Les termes du kérygme primitif, ceux de l’annonce de l’Évangile par les Apôtres, nous sont
connus par les Actes des Apôtres et les épîtres apostoliques42. Les dictionnaires cités ont analysé
ces annonces, et l’un d’entre eux, Théo, nouvelle encyclopédie catholique, en donne une
synthèse assez simple : « les textes de la prédication des apôtres […] ont en commun quatre
affirmations essentielles : Jésus a été condamné et mis à mort ; Dieu l’a ressuscité ; nous [ tous ]
en sommes témoins ; c’est en Lui que se trouve le salut des hommes : convertissez-vous ».43
Au-delà de ces affirmations en elles-mêmes, essentiellement christologiques, le fait de les
« proclamer », comme « témoignage », les inscrit dans une rhétorique et une effectivité.
La rhétorique est celle de « l’histoire du salut concentrée dans « l’événement Jésus Christ » qui
donne ainsi sa signification eschatologique à l’histoire des hommes » et dont il se déduit « une

40
Dans le Dictionnaire de théologie fondamentale, op. cit., l’article « kérygme » est décomposé selon trois
termes : « Kérygme, catéchèse, parénèse : ces trois termes désignent les formes et les étapes d'un même
processus d'évangélisation en usage dès le début de l'Église ».
41
Nous reviendrons sur ce terme, au § « kérygme d’évangélisation », au chapitre I, § 1.5 ci-dessous.
42
Voir en annexe 1 le kérygme « prototype » de l’Apôtre Pierre le jour de la Pentecôte (Ac 2, 14-40) et le
kérygme de l’Apôtre Paul (1 Eph 15, 3-8).
43
Théo, nouvelle encyclopédie catholique, op.cit., p. 518.
18 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
exhortation à la conversion évangélique »44. L’effectivité est fondée sur le témoignage, mis en
valeur par le mode proclamatoire.

1.4. Le kérygme en sa dynamique trinitaire, comme événement clé de l’économie


du salut, pour actualiser la Révélation
Le kérygme est central dans le processus de la Révélation, dans la mesure où il repose sur
l’ultime invitation de Jésus Christ, au terme de sa vie terrestre, telle que nous la lisons dans
l’Évangile de Matthieu : « Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au
nom du Père et du Fils et du Saint Esprit » (Mt 28, 19) ; et dans celui de Marc : « Et il leur dit :
“ Allez par le monde entier, proclamez l’Évangile à toutes les créatures ” » (Mc 16, 15).
C’est la perspective du salut qui constitue le motif « programmatique » de cette proclamation,
comme Jésus Christ l’annonce lui-même, à la suite de cette invitation :

Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé, celui qui ne croira pas sera condamné. Et voici les
signes qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom, ils chasseront les démons, ils
parleront des langues nouvelles, ils prendront dans leurs mains des serpents, et s'ils boivent
quelque poison mortel, cela ne leur fera aucun mal ; ils imposeront les mains à des malades, et
ceux-ci seront guéris. (Mc 16, 16-18).
Nous voyons ainsi le kérygme confié aux Apôtres s’insérer dans le processus de la Révélation,
comme l’événement qui en fonde nouvellement la dynamique, la ré-initie, pour finalement jouer
un rôle majeur dans le déploiement de l’économie du salut.
Cette fonction de dynamisation est marquée par la structure linguistique de chacun des deux
termes, « Révélation » et « kérygme » ; l’un et l’autre conjuguent une double signification, en
désignant soit l’objet, soit l’agir ; soit d'une part l'annonce ou le message porté par l’un des
événements, Révélation ou kérygme, soit d'autre part l'événement lui-même. Cette structure
linguistique commune est en soi bien ordonnée à une dynamique, le message porté par son
mouvement.
L’étendue et l’ampleur de cette dynamique s’apprécient quand on considère que l’un et l’autre
des événements, Révélation ou kérygme, peuvent chacun s’inscrire dans des temporalités soit
ponctuelles, strictement événementielles, soit étendues, à la fois événement et processus.
Concernant la Révélation, l’événement central est l’incarnation de « [Jésus-]Christ, plénitude
personnelle de la Révélation », selon le titre du paragraphe 4 de Dei Verbum45. La temporalité

44
En reprise de l’analyse de l’encyclopédie Catholicisme, hier aujourd'hui demain, tome 3, article « kérygme »,
p. 1414-1418.
45
Dei Verbum (DV), Constitution dogmatique sur la Révélation divine, Concile œcuménique Vatican II, 1965,
in Concile œcuménique Vatican II, constitutions, décrets, déclarations, messages, op.cit., p. 123-146.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 19
étendue, c’est la parole de Dieu à travers tout l’Ancien Testament, et aussi la « tradition » de cette
parole par l’Église, et son incorporation historique, ce qu’on appelle son « actualisation »46.
Concernant le kérygme et ses modalités, le kérygme primitif revêt une forme de ponctualité,
tandis que le kérygme du temps de l’Église est temporellement étendu, comme nous le verrons.
Pour articuler les deux notions, nous pourrions dire que la Révélation c’est la parole de Dieu à
l’homme, sur Lui-même, à accueillir dans la Foi ; le kérygme comme action, c’est la reprise de
cette parole par l’Église, pour propager et consolider la Foi.
Nous proposons une diachronie de ces deux niveaux de parole, dans leur dynamique conjointe.

Temporalité Temps du Christ


Temps d'Adam Temps apostolique Temps de l'Église
du salut incarné
Révélation Plénitude de la Tradition initiée Tradition et
Révélation
hébraïque Révélation (évangiles, épîtres) actualisation
Pentecôte
Approfondissement :
Kérygme Kérygme primitif évangélisation et
conversion
Fig. 1 - Diachronie conjointe de la Révélation et du kérygme47
Dans un tel schéma, le déploiement du kérygme est l’agir de l’Église pour assumer le processus
de la Révélation, à partir d’un événement-origine : la Pentecôte chrétienne, à la fois moment du
kérygme primitif et moment d’initiation de l’Église, avec sa mission essentielle « d’annoncer le
salut » dans une nouvelle dynamique de la Révélation. Dei Verbum le rappelle dans son paragraphe
introductif sur le rôle de l’Église : « proposer la doctrine authentique sur la Révélation divine et
sur sa transmission, afin que, en entendant l’annonce du salut, le monde entier y croie, qu’en
croyant il espère, qu’en espérant il aime »48.
L’origination du kérygme dans l’événement de la Pentecôte, et la dynamique qui s’en suit,
impliquent qu’il doit être compris de manière trinitaire ; Evangelii Gaudium le souligne : « Le
kérygme est trinitaire. C’est le feu de l’Esprit qui se donne sous forme de langues et nous fait croire
en Jésus Christ, qui par sa mort et sa résurrection nous révèle et nous communique l’infinie
miséricorde du Père ».49

46
Voir les enjeux de cette actualisation dans l’ouvrage de Claude GEFFRÉ, « La Révélation hier et aujourd'hui,
de l'Écriture à la prédication, ou les actualisations de la Parole de Dieu », en son chapitre V « Révélation de
Dieu et langage des hommes », Paris, Cerf, 1972.
47
Schéma de l’auteur.
48
DV, § 1.
49
EG, § 165.
20 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
Après son contenu christologique, c’est la dynamique trinitaire du kérygme que nous voulions
repérer ici, avant de caractériser sa dimension ecclésiale.

1.5. Le kérygme du temps de l’Église


Le terme « kérygme » semble faire son apparition dans le magistère, selon notre recherche, à
l’occasion du concile Vatican II, dans un des premiers textes publiés, la Constitution sur la Sainte
Liturgie Sacrosanctum Concilium. Le paragraphe 9, intitulé. « La liturgie n’est pas l’unique
activité́ de l’Église », souligne un rôle complémentaire de l’activité évangélisatrice de l’Église par
rapport à la liturgie.

[…] car, avant que les hommes puissent accéder à la liturgie, il est nécessaire qu’ils soient appelés
à la foi et à la conversion : « Comment l’invoqueront-ils s’ils ne croient pas en lui ? Comment
croiront-ils en lui s’ils ne l’entendent pas ? Comment entendront-ils sans prédicateur ? Et
comment prêchera-t-on sans être envoyé ? » (Rm 10, 14-15).
C’est pourquoi l’Église annonce aux non-croyants le Kérygme du salut [nous soulignons], pour
que tous les hommes connaissent le seul vrai Dieu et celui qu’il a envoyé, Jésus Christ, et pour
qu’ils changent de conduite en faisant pénitence.50
Nous consolidons au passage notre hypothèse qu’une église-édifice peut voir reconnaître sa
signification kérygmatique, indépendamment de son rôle liturgique.
Au plan linguistique, le « Kérygme du salut » ici mentionné représente bien la « proclamation
de l'Évangile aux non-croyants en vue de leur conversion », mais c’est ultérieurement que sa
signification se précise, successivement par Evangelii Nuntiandi (1974), Redemptoris Missio
(1990) et Evangelii Gaudium (2014). Ces textes, déjà cités, amplifient le décret sur l'activité́

50
Constitution sur la Sainte Liturgie Sacrosanctum Concilium (SC), in Concile œcuménique Vatican II,
constitutions, décrets, déclarations, messages, Paris, Centurion, 1967, § 9, p. 155. Cet emploi du terme
« Kérygme », dans la locution « Kérygme du salut », est une nouveauté puisqu’auparavant le magistère
pontifical paraît ignorer ce terme. C’est aussi une singularité de la version française de SC, et cela fait penser à
une initiative isolée du traducteur en français de cette Constitution ; les éditions du Centurion mentionnent ce
traducteur simplement comme étant le « Centre de pastorale liturgique ». Dans les versions de SC en d’autres
langues, y compris le latin, ci-dessous, des termes plus classiques, signifiant également « message » ou
« annonce (du salut) » sont employés, alors que les langues en question paraissent avoir déjà disposé à l’époque
des néologismes fondés sur la racine grecque kerygma, tels qu’ils seront employés ensuite dans le magistère
pontifical, en premier dans Evangelii Nuntiandi (EN en 1975) au § 23 ; ces emplois ultérieurs par le magistère
seront alors écrits avec un k minuscule, en français comme dans les autres langues, hormis l'allemand.
Latin : « Quare Ecclesia non credentibus praeconium salutis annuntiat » (au lieu de kerygma dans EN).
Allemand : « Darum verkündet die Kirche denen, die nicht glauben, die Botschaft des Heils » (au lieu de
Kerygma dans EN).
Anglais : « Therefore the Church announces the good tidings of salvation » (au lieu de kerygma dans EN).
Italien : « Per questo motivo la Chiesa annunzia il messaggio della salvezza a coloro che ancora non credono »
(au lieu de kerigma dans EN).
Espagnol : « Por eso, a los no creyentes la Iglesia proclama el mensaje de salvación » (au lieu de kerygma dans
EN).
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 21
missionnaire de l'Église Ad Gentes 51, pris au terme du Concile Vatican II (1965).
Alors qu’Ad Gentes n’emploie pas le terme-même de « kérygme », ces textes ultérieurs en
consacrent l’apparition pleine et entière dans le vocabulaire du magistère pour le lier à
l’évangélisation, à la catéchèse et à l’ensemble de la démarche de foi, voire à la spiritualité de
l’Église.
Le concept de kérygme a donc été repris et développé par le magistère, dans plusieurs
dimensions.

Le kérygme d’évangélisation
Le magistère propose une compréhension élargie du contenu du message kérygmatique, ou du
moins de le mieux expliciter. Ainsi, Redemptoris Missio :

Aujourd'hui, il faut de même unir l'annonce du Royaume de Dieu (le contenu du « kérygme » de
Jésus) et la proclamation de l'événement Jésus Christ (c'est-à-dire le « kérygme » des Apôtres).
Les deux annonces se complètent et s'éclairent réciproquement.52
Pour unir ces deux annonces, nous avons proposé l’expression « kérygme d’évangélisation »
qui traduit une finalité pratique. Nous aurions pu conserver « kérygme du salut », introduit par
Sacrosanctum Concilium, pour traduire la finalité anagogique.
Evangelii Nuntiandi indique au paragraphe 25 que le kérygme comprend un message essentiel
et des messages secondaires :

Dans le message que l’Église annonce, il y a certes beaucoup d’éléments secondaires. Leur
présentation dépend fortement des circonstances changeantes. Ils changent aussi. Mais il y a le
contenu essentiel, la substance vivante, qu’on ne pourrait modifier ni passer sous silence sans
dénaturer gravement l’évangélisation elle-même.53
Le message essentiel est précisé ensuite, au paragraphe 27, sous l’intitulé « Au centre du
message : le salut en Jésus-Christ » :

L’évangélisation contiendra aussi toujours – base, centre et sommet à la fois de son dynamisme –
une claire proclamation que, en Jésus-Christ, le Fils de Dieu fait homme, mort et ressuscité, le
salut est offert à tout homme, comme don de grâce et miséricorde de Dieu.54
On reconnaît là le contenu et la rhétorique du kérygme primitif, présenté comme immuable au
cœur du discours d’évangélisation, et sa référence à la perspective du salut proposée par
l’Évangile.

51
PAUL VI, Ad Gentes (AG), décret sur l'activité́ missionnaire de l'Église, in Concile œcuménique Vatican II,
constitutions, décrets, déclarations, messages, op.cit., p. 537-602, 1965.
52
RM, § 16.
53
EN, § 25.
54
EN, § 27.
22 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
La référence à la perspective du Salut, le message de Jésus Christ dans l’Évangile, n’est
évidemment pas secondaire en soi. Ce qui reste ouvert dans cette définition du noyau du « kérygme
d’évangélisation », et qui peut renvoyer au registre des annonces secondaires, possiblement
changeantes, ce sont plutôt les « voies du salut », les nombreuses manières pour l’homme d’entrer
en conversion, de rencontrer Dieu, ou de vivre évangéliquement.
Nous notons que, dans ces différents aspects du « kérygme d’évangélisation », les messages
secondaires ne peuvent être dissociés du kérygme primitif ou central.

Annoncer le kérygme, mission d’Église


Concernant le rôle du kérygme, d’autres évolutions ou accentuations sont apparues, par rapport
au kérygme primitif.
La première est la désignation de la tâche d’annonce chrétienne comme une mission de l’Église
dans son ensemble. Cet enseignement magistériel ancien, majeur dans le concile Vatican II, est
bien souligné dans le décret Ad Gentes, au chapitre premier dédié aux « Principes doctrinaux » :

Par nature, l’Église, durant son pèlerinage sur terre, est missionnaire, puisqu’elle-même tire son
origine de la mission du Fils et de la mission du Saint-Esprit, selon le dessein de Dieu le Père.55
D’autres textes magistériels le soulignent, Sacrosanctum Concilium56, déjà cité, puis Evangelii
Nuntiandi :

Il y a donc un lien profond entre le Christ, l’Église et l’évangélisation. Pendant ce “tempus


Ecclesiae”, c’est l’Église qui a la tâche d’évangéliser. Cette tâche ne s’accomplit pas sans elle,
encore moins contre elle.57
Par la suite, Redemptoris Missio est entièrement consacrée au thème de « la validité permanente
du précepte missionnaire de l'Église », en voici la déclaration initiale :

La mission du Christ Rédempteur, confiée à l'Église, est encore bien loin de son achèvement. Au
terme du deuxième millénaire après sa venue, […] nous devons nous engager de toutes nos forces
à son service. C'est l'Esprit qui pousse à annoncer les grandes œuvres de Dieu : « Annoncer
l'Évangile, en effet, n'est pas pour moi un titre de gloire ; c'est une nécessité qui m'incombe. Oui,
malheur à moi si je n'annonçais pas l'Évangile ! » (1 Co 9, 16)58.
Le témoignage, source de l’effectivité
Vient ensuite la notion décisive de témoignage, pris comme source de l’effectivité de l’annonce
kérygmatique. Cette effectivité par le témoignage est originelle, puisque les Apôtres l’affirment
dans le kérygme primitif : « nous tous en sommes témoins » (Ac 2, 32).

55
AG, § 2.
56
SC, § 9.
57
EN, § 16.
58
RM, § 1.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 23
L’enjeu est l’effectivité du message, attendue en termes de conversion, en faisant le lien entre
la crédibilité du message et la crédibilité des messagers.
Le décret Ad Gentes y consacre un article (le premier) intitulé « le témoignage chrétien » avec
les sous-titres successifs « Le témoignage de la vie et le dialogue » et « Présence de la charité »59.
Plus tard, c’est l’exhortation apostolique Evangelii Gaudium, qui reprend ce thème tout au long
de ses développements, relatifs aux voies du salut.

Effectivités matérielles et spirituelles


La capacité transformatrice de l’annonce de l’Évangile est invoquée tout au long de
l’exhortation, puisqu’elle est à la fois remède contre les grands « défis du monde actuel » – tels
que « l’économie de l’exclusion, l’idolâtrie de l’argent, qui gouverne au lieu de servir, la disparité
sociale qui engendre la violence, les défis de l’inculturation de la foi ou ceux des cultures
urbaines » (EG, 50-109) – et source de sainteté.
Evangelii Gaudium y ajoute une dimension spirituelle : la transformation des chrétiens par la
joie de l’annonce, y compris la joie de la vie chrétienne qui témoigne, selon le titre même de

l’exhortation, et aussi le sous-titre : « La douce et réconfortante joie d’évangéliser » (EN, 9-13).

Ceci est particulièrement expliqué au paragraphe 10 :

Il nous est proposé de vivre à un niveau supérieur, et pas pour autant avec une intensité moindre :
« La vie augmente quand elle est donnée et elle s’affaiblit dans l’isolement et l’aisance. De fait,
ceux qui tirent le plus de profit de la vie sont ceux qui mettent la sécurité de côté et se passionnent
pour la mission de communiquer la vie aux autres ».
Quand l’Église appelle à l’engagement évangélisateur, elle ne fait rien d’autre que d’indiquer aux
chrétiens le vrai dynamisme de la réalisation personnelle : « Nous découvrons ainsi une autre loi
profonde de la réalité : que la vie s’obtient et se mûrit dans la mesure où elle est livrée pour donner
la vie aux autres. C’est cela finalement la mission »
Quand le magistère du pape François insiste sur cette dynamique spirituelle du l’évangélisation,
fondée sur le kérygme, c’est qu’il la voit rejoindre la sainteté, par la disposition joyeuse qui
l’accompagne. En effet, l’identification de la joie comme voie de sainteté est un message
permanent de son magistère. En témoignent l’incipit Gaudete et Exsultate, choisi comme titre de
l’exhortation apostolique sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel, et la référence à la parole

du Christ « Soyez dans la joie et l’allégresse » (Mt 5, 12), à l’intention de « ceux qui sont persécutés

ou humiliés à cause de lui. ».60

59
AG, § 11-12.
60
Pape FRANÇOIS, Gaudete et Exsultate (GE), exhortation apostolique sur l’appel à la sainteté́ dans le monde
actuel, Perpignan, Artège, 2018.
24 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
Le kérygme en approfondissement : les accents du message
Evangelii Gaudium souligne aussi que kérygme et catéchèse se complètent organiquement. En
effet, puisque la proclamation du kérygme est une activité d’Église et qu’elle invite à la conversion,
il en résulte pour elle une responsabilité directe quant à l’accompagnement des convertis, au plan
catéchétique notamment.
Aussi l’Église invite ses membres, anciens comme nouvellement convertis, à « approfondir »
le kérygme. Nous lisons cela aux paragraphes 165 et 167 d’Evangelii Gaudium, dans un passage
intitulé « Une évangélisation pour l’approfondissement du kérygme ».

Nous avons redécouvert que, dans la catéchèse aussi, la première annonce ou « kérygme » a un
rôle fondamental, qui doit être au centre de l’activité évangélisatrice et de tout objectif de
renouveau ecclésial. […] Quand nous disons que cette annonce est « la première », cela ne veut
pas dire qu’elle se trouve au début et qu’après elle est oubliée ou remplacée par d’autres contenus
qui la dépassent. Elle est première au sens qualitatif, parce qu’elle est l’annonce principale, celle
que l’on doit toujours écouter de nouveau de différentes façons et que l’on doit toujours annoncer
de nouveau durant la catéchèse sous une forme ou une autre, à toutes ses étapes et ses moments.
Ainsi le message originel est matrice d’enseignements catéchétiques plus développés ou
actualisés, et d’une manière générale source de l’ensemble des vérités de foi.
Le contenu du kérygme, annonce première, inclut au moins l’amorce de ce que Evangelii
Nuntiandi appelle les « messages secondaires » destinés à l’approfondissement du kérygme, et le
contenu du kérygme n’atteint son plein sens que dans la reconnaissance de ces articulations avec
les « messages secondaires », notamment parce qu’ils peuvent dessiner des chemins de sainteté,
des « voies du salut ».
Nous disposons de nombreux exemples de cet approfondissement du kérygme, dans le temps
de l’Église, par ces relations entre le message central d’une part, et ses messages complémentaires
d’autre part, dont l’advenue en relation avec le kérygme est plus circonstancielle.
Un des premiers en est donné par le récit que donnent les Actes des Apôtres, au chapitre 8, de
la conversion de l’eunuque éthiopien. L’apôtre Philippe lui propose le kérygme comme explication
d’un texte d’Isaïe (Is 53, 7, sur la souffrance silencieuse des aimés de Dieu) : « Philippe ouvrit
alors la bouche et, partant de ce texte, il lui annonça la Bonne Nouvelle de Jésus », et par la suite
« L'eunuque répondit : “ Je crois que Jésus Christ est le Fils de Dieu ” »61. À noter que le texte des
Actes ne précise pas les termes de la « Bonne Nouvelle » annoncée en relation avec Isaïe. Il dit
essentiellement qu’il y a un témoin du Christ, Philippe, que le kérygme qu’il annonce permet de
comprendre Isaïe, et que de cette compréhension naît la conversion. Autrement dit l’efficience du

61
Ac 8, 35 et 37.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 25
kérygme passe d’une part par le témoignage, d’autre part par la complémentarité entre le message
central et un (ou des) message(s) secondaire(s) pour reprendre l’analyse d’Evanglium Nuntiandi.
La genèse du « credo » de l’Église, élaboré au fil des premiers conciles, est un autre type
d’approfondissement du kérygme.
Au plan du contenu, on peut lire la formule finalement agrégée dans le symbole de Nicée-
Constantinople, comme une extension du kérygme primitif, par ajout des vérités qui le situent dans
l’ensemble de l’économie du salut. Autour de la réalité centrale de l’Incarnation, une construction
trinitaire commençant par Dieu le Père, poursuivie dans la foi en l’Esprit Saint, l’Église et la
perspective de la vie éternelle. Nous sommes toujours dans la promotion de la foi par l’articulation
des messages kérygmatiques. Mais l’articulation devient d’un autre nature, adaptée à la finalité du
credo : faire ensemble communauté d’église par adhésion à la même foi. Ce n’est plus une
articulation en progression comme pour l’eunuque, mais une articulation rhétorique sur un mode
systématique, faisant ressortir l’organicité de la foi. La « voie de salut » promue par le credo est
l’appartenance à l’Église. C’est cette efficience qui est recherchée.
Ces deux exemples illustrent comment la pluralité des messages au sein du « kérygme
d’évangélisation », et les liens entre eux, se justifient dans les finalités particulières qui orientent
sa mise en œuvre. Ces finalités dépendent aussi bien de l’émetteur du message kérygmatique (ce
dont il peut témoigner) que du destinataire (ce à quoi il est sensible, ce qui peut éveiller son
attention), ainsi qu’éventuellement des relations préexistantes entre eux.
Pour caractériser les actes kérygmatiques, les événements qui mettent en scène une visée
évangélisatrice, ce sont les divers messages qui composent le kérygme, dits « secondaires » parce
qu’ils se lient au message premier, qui détermineront la voie de compréhension proposée aux
destinataires du message ; ils donneront au kérygme sa coloration, son accent particulier, et
finalement son efficience.
Nous reprendrons cette notion, en l’appelant « accent théologique » quand nous évoquerons le
kérygme d’évangélisation exprimé en langage d’architecture.

La richesse de signification du kérygme, la dynamique intrinsèque que manifeste son contenu,


les enjeux de son approfondissement ne peuvent être compris ou appréciés qu’en fonction de leurs
modes d’expression, ce qui intéresse notre recherche sur « kérygme et langage », dans les deux
paragraphes qui suivent, sur la parole puis l’architecture.

26 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


2. Le kérygme en langage parlé

2.1. La fondation du kérygme parlé

La parole primordiale : le Christ comme Verbe


L’origine christique du kérygme confère une valeur primordiale à son expression parlée,
puisque le Christ se désigne comme le Verbe, la Parole (Jn 1). Cet ancrage théologique est d’autant
plus fort que la parole de Dieu Lui-même est déterminante dans le processus de la Révélation,
comme on le lit tout au long des Écritures. Dei Verbum, dans son appellation elle-même, et dans
son explication de la Révélation, pointe comment l’agir de Dieu se lie à sa parole, et comment le
Christ le manifeste suprêmement :

[Pareille économie de] la Révélation comprend des actions et des paroles intimement liées entre
elles, de sorte que les œuvres, accomplies par Dieu dans l’histoire du salut, attestent et corroborent
et la doctrine et le sens indiqués par les paroles, tandis que les paroles proclament les œuvres et
éclairent le mystère qu’elles contiennent. […] La profonde vérité que cette Révélation manifeste,
sur Dieu et sur le salut de l’homme, resplendit pour nous dans le Christ, qui est à la fois le
Médiateur et la plénitude de toute la Révélation. 62
Ceci se retrouve dans la dynamique du kérygme d’évangélisation ; confiée à l’Église, cette
parole prend une forme d’invincibilité (Evangelii Gaudium au paragraphe 22) :

La parole a en soi un potentiel que nous ne pouvons pas prévoir. L’Évangile parle d’une semence
qui, une fois semée, croît d’elle-même, y compris quand l’agriculteur dort (cf. Mc 4, 26- 29).
L’Église doit accepter cette liberté insaisissable de la Parole, qui est efficace à sa manière, et sous
des formes très diverses, telles qu’en nous échappant elle dépasse souvent nos prévisions et
bouleverse nos schémas.
Le parole des apôtres
Nous avons quelques indications sur le langage parlé du kérygme primitif, selon les Actes des
Apôtres.
La langue de transcription – Actes, Épîtres – est le grec ancien. La langue de proclamation
initiale n’est pas précisée : l’annonce de Pierre à la Pentecôte, relatée au chapitre 2 des « Actes des
apôtres », se fit-elle en grec ? Quoi s’il en soit, cette proclamation fit l’objet d’une compréhension
polyglotte de la part des auditeurs.
Compte tenu de l’invitation à « enseigner toutes les nations » (Mc 16, 15 et Mt 28, 19), on peut
supposer que les diverses proclamations initiales furent, selon les occasions, soit dans les langues
vernaculaires propres au monde hébreu, soit en grec comme langue koinê.

62
DV, § 2.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 27
Le kérygme dès l’origine s’est donc déployé dans plusieurs langues parlées. Le magistère assure
l’immuabilité d’un message central entre les différentes langues de proclamation. La
conceptualisation associée au message comprend une forme de dépendance à la langue
d’expression, à travers toutes les implications culturelles de la langue. Concernant le message
évangélique, la question s’est beaucoup posée de l’influence de l’usage de la langue grecque et de
la culture hellénique sur le substrat hébreu et sémitique des évangiles (comme sur celui de l’Ancien
Testament avec la traduction des Septante). Ce point est noté ici parce que, dans la perspective de
l’expression du kérygme en architecture, la problématique du biais ou de l’éclairage culturel
devient complètement transversale, dans la mesure où le message devient indépendant de la langue
parlée mais peut devenir particulièrement dépendant de la culture sous l’angle de l’architecture.
On peut comprendre que l’aptitude initiale du kérygme à la multitude des langages parlés puisse
être en soi une invitation à accepter que d’autres formes de langages soient invitées à l’expression
kérygmatique. Cette affirmation d’ouverture comprend dans la même temps la signification d’un
lien de subordination des autres langages à celui originel de la parole, ce qu’affirme déjà l’axiome
de saint Paul : « La foi vient de ce qu’on entend » (Rm 10, 17)63.

2.2. Caractéristiques de l’annonce kérygmatique proclamée


La question d’autres types de langage supposera la transposition de tout ou partie des
caractéristiques du langage parlé au service du kérygme. Dans cette perspective, nous proposons
de les recenser.

Puissance de l’expression
L’acte est une proclamation et même un cri ; le message est mobilisateur : « convertissez-
vous ». Tout le texte des Actes des apôtres révèle une puissance de transformation. Ce point est
souligné par Carmelo Torcivia : « le langage du kérygme est fortement performatif, capable de
mettre l’auditeur du message en état de conversion » 64.

63
EN le développe au § 42 : « Oui, elle est toujours indispensable, la prédication, cette proclamation verbale
d’un message. Nous savons bien que l’homme moderne rassasié de discours se révèle souvent fatigué d’entendre
et, pire encore, immunisé contre la parole. Nous connaissons aussi les idées de nombreux psychologues et
sociologues, lesquels affirment que l’homme moderne a dépassé la civilisation du verbe, désormais inefficace et
inutile, et qu’il vit aujourd’hui dans la civilisation de l’image. Ces faits devraient nous pousser, certes, à mettre
en œuvre dans la transmission du message évangélique les moyens modernes suscités par cette civilisation. Des
efforts très valables, d’ailleurs, ont été déjà accomplis dans cette ligne. Nous ne pouvons que les louer et les
encourager pour qu’ils se développent encore davantage. La fatigue que provoquent aujourd’hui tant de discours
vides et l’actualité de bien d’autres formes de communication ne doivent cependant pas diminuer la vertu
permanente de la parole ni faire perdre confiance en elle. La parole reste toujours actuelle, surtout lorsqu’elle
est porteuse de la puissance de Dieu. C’est pourquoi reste lui aussi d’actualité l’axiome de saint Paul : “ La foi
vient de ce qu’on entend ” : c’est la Parole entendue qui conduit à croire. »
64 Cité par Henri Derroitte, op. cit., qui mentionne : Carmelo Torcivia, Turin, Elledici, 2016, p. 28.

28 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Un vaste public de destinataires
…dans leur nombre et leur variété, de la personne individuelle jusqu’à l’universalité.
Le tout premier public est celui des Juifs, dans leurs cultures variées, helléniques ou non,
Pharisiens ou Saducéens, ou bien les Samaritains ; mais rapidement les non-Juifs en font partie,
avec le centurion converti par Pierre, et ce sans attendre l’action de Paul, apôtre des Gentils. A ce
stade, les convictions de foi préalables ne sont pas discriminantes.
Par la suite, la nécessité « d’approfondir le kérygme » réunit non-croyants et croyants dans le
public du kérygme.

Un langage conceptuel pour un message riche, structuré et rhétorique


L’effectivité conceptuelle du langage parlé est déterminante pour l’articulation des
composantes du message, tant centrale que complémentaires, et donc d’y faire valoir les accents
théologiques qui le structureront selon les circonstances, assureront son déploiement.
La conceptualisation du kérygme est un socle pour fonder sa rhétorique centrale, articulée aux
rhétoriques des significations complémentaires.

Place du non-verbal
Le kérygme évangélique verbalise l’actualité de Jésus Christ, mais cette verbalisation n’est pas
exclusive d’autres expressions associées.
Différentes formes du non-verbal sont des attributs complémentaires de la verbalisation du
kérygme. Par exemple, le silence en est une composante majeure, puisque c’est lui qui permet
d’accéder au non-dit, au « destiné à être compris » ou peut introduire à l’apophatique.
Dans la forme duale de l’écrit, le « non-écrit » fait écho au « non-dit ».

Fécondité du message
Le kérygme vise une fécondité « en soi », celle de la conversion des destinataires, mais il vise
au-delà, la poursuite des conversions, l’avènement du royaume de Dieu. Il porte un envoi
anagogique à l’échelle de l’Église, voire à l’échelle du monde.

Pérennité
Pour le croyant, la question n’est pas la pérennité du message en soi, puisque le Christ assure
que « le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas » (Mc 13, 31). La question concrète
est celle de la pérennité du support de communication dans lequel s’exprime le kérygme.
C’est de là que résulte l’importance des saintes Écritures, le support matériel de la prédication
verbale du Christ et de la Révélation en général. A vue humaine, elle en permet la conservation
indéfinie, au besoin dans une variété de langues par le jeu de traductions comme introduit dès
l’origine.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 29
Nous reprendrons plus loin l’ensemble de ces axes de performativité, pour les évaluer selon les
facultés du langage d’architecture. Pour cela, il faut que nous indiquions d’abord le rôle et les
propriétés de ce langage.

3. Le kérygme en langage d’architecture

3.1. Éligibilité du langage d’architecture (d'église) à la médiation de foi et à


l’annonce kérygmatique
Indiquer la puissance spirituelle intrinsèque de la parole conduit à poser la question de la
légitimité des langages non parlés dans le domaine des médiations de foi en général, et celui de
l’annonce kérygmatique en particulier.
Qu’en est-il dans les faits ?

L’architecture dans les Écritures


Les saintes Écritures elles-mêmes témoignent des difficultés que peut soulever le langage
d’architecture dans un rôle de médiation dans la relation à Dieu, mais finissent par dessiner sa
place au fil des textes.
A l’origine, l’Ancien Testament qualifie la relation à Dieu dans la seule parole, comme celles
que Dieu échange avec Adam et Eve. Puis ceux-ci sont conduits à découvrir la nécessité de
l’habillement, ce qui laisse supposer qu’ils découvriront ensuite la nécessité de l’habitation.
Comme la Bible s’inscrit à ce moment dans une culture nomade, on suppose que l’architecture au
sens où nous l’entendons, celle qui configure des lieux, n’apparaîtra que progressivement.
Néanmoins, la Genèse témoigne de l’expérience d’une œuvre d’architecture, celle de la tour de
Babel, qui se trouve bientôt au cœur d’un conflit entre Dieu et les hommes (Gn 11, 1-9) ; l'édifice
se trouve alors symboliser la discorde, au rebours de la concorde auquel le langage parlé pouvait
donner accès. L’architecture en soi apparaît alors subordonnée à une prééminence d’un langage
parlé commun, auquel elle ne saurait se substituer.
Le second livre de Samuel évoque la réticence de Dieu pour que David lui construise un temple,
préférant résider dans l’Arche :

Va dire à mon serviteur David : Ainsi parle le Seigneur : Est-ce toi qui me bâtiras une Maison
pour que je m'y installe ? Car je ne me suis pas installé dans une maison depuis le jour où j'ai fait
monter d'Égypte les fils d'Israël et jusqu'à ce jour : je cheminais sous une tente et à l'abri d'une
demeure. Pendant tout le temps où j'ai cheminé avec tous les fils d'Israël, ai-je adressé un seul
mot à une des tribus d'Israël que j'avais établies en paissant Israël mon peuple, pour dire : Pourquoi
ne m'avez-vous pas bâti une Maison de cèdre ? (2 Sm, 7, 5-7)

30 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Cette réticence est explicitée par la bouche du prophète Isaïe :

Ainsi parle le Seigneur : Le ciel est mon trône et la terre, l’escabeau de mes pieds.
Quelle est donc la maison que vous bâtiriez pour moi ? Quel serait l’emplacement de mon lieu de
repos ? (Is 66, 1)
Dans ces récits, le thème est celui de l’incommensurabilité de Dieu, qui ne peut être ni rejoint,
encore moins défié, par des ouvrages d’homme. Faute de l’admettre, leurs auteurs pouvaient se
montrer obnubilés par leur propre gloire, au détriment du rôle religieux de l’édifice.
S’agissant du Temple, la marge de justification pour le construire s’est trouvée ainsi délimitée,
pour signifier la présence de Dieu parmi les hommes, évoquer la gloire de Dieu par sa munificence,
mais être inscrit dans une histoire humaine où il resterait contingent, aussi glorieuse et solide que
soit son architecture.
De ce point de vue, l’arche d’Alliance, dans sa fragile dignité, correspondait à l’essentiel des
fonctions d’une maison de Dieu parmi les hommes, tout en répondant aux exigences du nomadisme
originel. D’ailleurs, la prévalence de cette compréhension des choses est bien marquée par le rôle
dévolu au Temple : abriter l’Arche d’Alliance

Les prêtres amenèrent l'arche de l'alliance du SEIGNEUR à sa place, dans la chambre sacrée de
la Maison, dans le lieu très saint, sous les ailes des chérubins. […] Il n'y a rien dans l'arche, sinon
les deux tables de pierre déposées par Moïse à l'Horeb, quand le SEIGNEUR conclut l'alliance
avec les fils d'Israël à leur sortie du pays d'Égypte. (1 Rois 8, 6 et 9)
La condition de contingence et de mortalité attribuée au Temple, et que nous évoquons ici dans
l’idée qu’elle s’attribue à toute forme de sanctuaire, est rappelée dans l’Évangile, celui de Marc
notamment quand Jésus Christ annonce que sa Résurrection est en correspondance avec la
destruction annoncée du Temple de Jérusalem :

Comme Jésus s'en allait du Temple, un de ses disciples lui dit : “ Maître, regarde : quelles pierres,
quelles constructions ! ” Jésus lui dit : “ Tu vois ces grandes constructions ! Il ne restera pas pierre
sur pierre ; tout sera détruit” (Mc 13, 1-2)
Nous l'avons entendu dire : “Moi, je détruirai ce sanctuaire fait de main d'homme et, en trois jours,
j'en bâtirai un autre, qui ne sera pas fait de main d'homme.” (Mc 14, 58)
Les passants l'insultaient hochant la tête et disant : “Hé ! Toi qui détruis le sanctuaire et le rebâtis
en trois jours, sauve-toi toi-même en descendant de la croix.” (Mc 15, 29-30)
Le voile du Temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu'en bas. (Mc 15, 38)
A ce stade, les Écritures nous sensibilisent à deux facultés de l’architecture, et de son langage :
celle d’une expression imposante, transposition de celle qu’en rhétorique, on appelle la captatio,
d’une part, et la durabilité, même si elle est relativisée, d’autre part.
Ces réticences n’emportent pas que les édifices construits par l’homme ne puissent être

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 31


légitimes pour une expression religieuse, voire une médiation.
Ceci est dit dans l’Ancien Testament : « Car la pierre crie du milieu de la muraille, et le bois
qui lie la charpente lui répond. » (Habacuc 2, 11) ; comme dans le Nouveau : « Quelques
Pharisiens, du milieu de la foule, dirent à Jésus : “ Maître, reprends tes disciples ! ”. Il répondit :
“ Je vous le dis : si eux se taisent, ce sont les pierres qui crieront ”. » (Lc 19, 39 - 40)
Dans les faits, aucun de ces récits et enseignements ne débouche sur un bannissement de
l’architecture comme médiation entre Dieu et les hommes, mais tous indiquent des limites, des
priorités, des dangers, en tout cas des contingences.

Édifices sacrés au temps de l’Église


Dans le temps de l’Église, la question de la médiation architecturale paraît avoir reçu une
réponse plus positive, comme le traduit la métonymie entre Église et église, présente dans toutes
les langues théologiques, et dont l’origine est bien le Nouveau Testament.
Nous trouvons un fondement essentiel de ce lien entre l’Église, héritière « kérygmatique » du
Christ, et la notion d’édifice, symbolisé, dans l’évangile de Matthieu :
16
Prenant la parole, Simon-Pierre répondit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » 17 Reprenant
alors la parole, Jésus lui déclara : « Heureux es-tu, Simon fils de Jonas, car ce n'est pas la chair et
le sang qui t'ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. 18 Et moi, je te le déclare : Tu es
Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et la Puissance de la mort n'aura pas de force contre
elle. 19 Je te donnerai les clés du Royaume des cieux ; tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aux
cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié aux cieux. »
Par la suite, les épîtres apostoliques maintiennent et amplifient cette symbolisation de temples
pour le Christ et ses disciples, désignés collectivement comme « communauté sacerdotale ». C’est
la première épître de Pierre (2, 4-5) :

Approchez-vous de lui, pierre vivante, rejetée par les hommes mais choisie et précieuse devant
Dieu. Vous-mêmes, comme des pierres vivantes, entrez dans la construction de la Maison habitée
par l'Esprit, pour constituer une sainte communauté sacerdotale, pour offrir des sacrifices
spirituels, agréables à Dieu par Jésus Christ.
Et aussi la première épître de Paul aux Corinthiens et son épître aux Éphésiens :

Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l'Esprit de Dieu habite en vous ? Si
quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira. Car le temple de Dieu est saint et ce temple,
c'est vous. (1 Co 3, 16-17)
Vous avez été intégrés dans la construction qui a pour fondation les apôtres et les prophètes, et
Jésus Christ lui-même comme pierre maîtresse. C'est en lui que toute construction s'ajuste et
s'élève pour former un temple saint dans le Seigneur. C'est en lui que, vous aussi, vous êtes
ensemble intégrés à la construction pour devenir une demeure de Dieu par l'Esprit. (Ep 2, 20-22)
Naturellement, cette réalité théologique de l’Église comme temple n’emporte pas

32 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


d’essentialisation des églises-édifices65. Néanmoins, cela leur donne une légitimité particulière à
être comprises comme une matérialisation de l’Église ; et même ceci permet de soutenir
l’hypothèse que ces édifices ont bien à médiatiser les rôles essentiels de l’Église.
C’est pourquoi nous supposons que l’ecclésiologie du magistère puisse trouver des
transpositions dans l’architecture d’église66.

Pour aborder ce point, nous allons préalablement nous donner quelques repères sur le langage
d’architecture.

3.2. Le langage d’architecture entre « intentions » et « figures d'architecture »


En désignant l’architecture comme un langage, dans un principe sémiotique qui associe
signifiants et signifié, la première tâche est de marquer les limites et les correspondances d’une
analogie avec le langage parlé.
Il était tentant d’examiner cela à l’aune de la doctrine des quatre sens de l’Écriture : la lettre qui
te dit les faits, l'allégorie ce que tu dois croire, la morale ce que tu dois faire, l'anagogie ce que tu
dois viser [Littera gesta docet, quid credas allegoria, moralis quid agas, quo tendas anagogia] ;
et donc de poser la question : quelle aptitude aurait une architecture pour exprimer tel ou tel de ces
différents sens ? Nous y reviendrons.
Toutefois, la perspective de notre recherche, focalisée sur les capacités propres d’expression de
l’architecture, nous a incité à suivre une approche plus profane, fondée sur une comparaison des
« grammaires » mêmes des langages en cause. Deux textes nous y ont particulièrement aidé : un
article de Paul Ricœur, « Architecture et narrativité »67, publié en 1998, et un ouvrage de référence
sur la sémiotique d’architecture, celui de l’architecte norvégien Christian Norberg-Schulz,
« Intentions in architecture »68, publié en 1963.

65
Dans le paragraphe suivant, à propos de notre épistémologie de référence, nous prendrons soin de rester du
côté de la sémiotique et non de l’essentialisation, en nous appuyant sur l’approche « instrumentale » de
l’architecture.
66
Au chapitre I, § 3.3 ci-dessous.
67
Paul RICŒUR, « Architecture et narrativité́ », in Revue Urbanisme, op.cit.
68
Christian NORBERG-SCHULZ, Intentions in architecture, op. cit. ; nous avons consulté la traduction en français :
Système logique de l'architecture, op. cit. Le décalage du titre entre les deux langues donne un éclairage sur la
finalité de l’ouvrage : une théorie du langage d’architecture, comme « méta-grammaire », avec l’importance des
« intentions » dans cette « grammaire ». Il faut se reporter aux autres ouvrages de Christian NORBERG-SCHULZ,
pour trouver les illustrations pratiques de ses théories sur l’architecture en tant qu’activité sémiotique,
notamment :
- Genius loci : paysage, ambiance, architecture, Liège, Pierre Mardaga, 1981 (édition originale en italien,
1979).
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 33
L’architecture comme langage intemporel et artistique, à la narrativité ouverte
« Architecture et narrativité » observe que le langage d’architecture est dépourvu de la linéarité
d’expression du langage parlé, avec la temporalité induite, celle qui permet d’accéder directement
au mode narratif ou discursif. Par ailleurs, la fixité du construit et son intemporalité nourrit un effet
de mémoire, en présentant simultanément aux yeux du visiteur, ou de l’utilisateur, des
significations symboliques de toutes natures.
Cette simultanéité, qui est atemporalité, ouvre la possibilité, et même envoie vers la
construction de multiples récits, par la latence ouverte de diverses associations et caténations entre
les significations symboliques ainsi offertes. Cette narrativité ouverte est le propre de
l’architecture, et son effectivité dépend beaucoup de la culture du visiteur, déterminante pour la
façon dont sa compréhension entre en résonnance avec l’architecture.
C’est d’ailleurs en ce sens que le langage d’architecture est bien un langage artistique : il a un
effet sur les sens du visiteur, cet effet orientant la compréhension à construire69.
L’ouverture narrative est également l’explication du rôle déterminant que peut jouer un guide
puisqu’il aura la possibilité d’introduire de la temporalité de différentes manières, soit par les récits
de son propos, soit par la temporalité du parcours de visite qui ordonne une mise en scène des
diverses significations de l’édifice.

L’architecture comme langage fonctionnel et intentionnel


À la différence de nombreux langages artistiques, celui d’architecture est également tributaire
d’un rôle fonctionnel. Pour en rendre compte, dans sa théorie de l’architecture publiée en français
sous le titre « Système logique de l'architecture », Christian Norberg-Schulz (1926 -2000)
introduit la notion « d’intention » comme déterminant majeur de la sémiotique du langage
d’architecture, conformément au titre anglais original « Intentions in architecture ».

- La signification dans l'architecture occidentale, 7e édition, Liège, Pierre Mardaga, 1997 (édition originale
en italien, 1974).
A signaler aussi que sur un plan philosophique, dans une dynamique phénoménologique et heideggérienne,
Christian NORBERG-SCHULZ source l’architecture dans schéma de constitution de l’Être, fondé sur « l’habiter »
et le « bâtir ». Il propose de faire les liens avec ses approches plus normatives dans :
- Existence, Space and Architecture, New York, Praeger, 1971
- Genius loci : towards a phenomenology of architecture, New York, Rizzoli, 1980.
- Heidegger's Thinking on Architecture, in Perspecta, publiée par The MIT Press, Vol. 20, pp. 61-68, 1983.
Les liens entre ces deux approches, sémiotique et philosophique, non nécessairement congruentes, ont été étudiés
par Nazlie MICHEL ASSO, dans sa thèse de Ph. D. non publiée, Significations et perceptions en architecture dans
l’œuvre de Christian Norberg-Schulz, présentée à la Faculté́ des études supérieures, Université́ de Montréal,
2010. Un résumé sommaire de cette thèse figure en annexe 3 du présent mémoire.
69
Cette épistémologie du langage artistique est développée par Baptiste MORIZOT et Estelle ZHONG MENGUAL au
chapitre intitulé « L'œuvre comme rencontre individuante » de leur ouvrage Esthétique de la rencontre : l'énigme
de l'art contemporain, Paris, Seuil, 2018, p. 81-125.
34 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
Sous ce terme, Norberg-Schulz désigne les buts qui unissent l’architecte, les commanditaires,
et possiblement les usagers d’une architecture, buts qui recouvrent aussi bien les fonctions
matérielles à assumer par telle construction, que les significations morales, sociales, symboliques
qu’elle doit porter 70.
Ces intentions peuvent être multiples et de différentes natures, mais Norberg-Schulz indique
qu’on peut les regrouper par « pôles intentionnels ». C’est à partir de ces pôles intentionnels que
se déterminent les formes de l’architecture et ses structurations d’espace, ainsi que les systèmes
de symboles qui s’y incorporent. Cette approche est dite « instrumentale », par différenciation vis-
à-vis d’une compréhension « fonctionnelle » de l’architecture, dans la mesure où les diverses
fonctions de l’édifice sont secondaires par rapport aux intentions. Les intentions « instrumentent »
ou « sourcent » conjointement les fonctions, les formes, et les symboles. C'est en elles qu'on trouve
la possibilité d’une synthèse dans l’exercice de l’architecture, et dans sa compréhension, aussi
démultipliée qu’elle puisse être.
Dans la logique d’architecture ainsi exposée, les compositions organiques conjointes de formes
et de symboles, sont désignées aussi bien dans la version anglaise que française par le terme
allemand71 : « Gestalt » (forme, figure)72. Nous proposons d’appeler ces formes typées associées
à leur symbolique : « figures ».

Les figures d’architecture entre spatialité et temporalité


Au regard des architectures d’église telles que nous les abordons, le premier intérêt de la
construction épistémologique de Norberg-Schulz réside dans la prise en compte de la totalité de
l’expérience d’architecture en liant spatialité et temporalité.
Au plan de la spatialité, l’ensemble des formes et des symboles envisagés est considérée aussi
bien à l’échelle de la localisation et de l’implantation de l’édifice – dans sa relation au cosmos ou
à l’environnement urbain – qu’à celle propre des espaces construits, de leurs parties, ou de leurs
décorations ; au plan de la temporalité, l’histoire de l’édifice se recueille dans les diverses
empreintes qu’elle laisse et dont il fait ainsi mémoire.

70
Pour qualifier cette épistémologie l’auteur indique : « les intentions déterminent des schémas de conception »,
la notion étant référée à Egon Brunswik et Piaget, respectivement p. 30 et 40, in Système logique de
l'architecture, op. cit.
71
Norberg-Schulz, pour bien serrer sa pensée, utilise parfois dans le texte anglais des mots allemands.
72
Dans Système logique de l'architecture, op.cit., le concept de Gestalt est référé à Piaget, p. 44, puis il est
précisé, p. 89 : « Ce n’est que lorsqu’on a en vue que la forme représente comme manifestation d’objets plus
élevés que l’on peut parler d’expérience architecturale réelle ». Nota : les « objets plus élevés » renvoient aux
symboles ou aux intentions.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 35
Avant d’explorer pratiquement les formes et les symboles, leurs liens avec les fonctions de
l’édifice, il faut donc aller au-devant des « intentions » des constructeurs et des
habitants/utilisateurs.
C’est ici qu’on peut articuler la grammaire des « intentions d’architecture » avec celle de la
doctrine des quatre sens des textes parlés ou écrits : ce qu’on appelle le sens littéral d’un texte peut
être mis en parallèle avec les fonctions propres de l’édifice, l’allégorie concernerait les différents
symboles exprimés dans l’architecture, la morale la façon dont l’édifice est reçu – en ferais-je
source de contemplation ou d’une activité donnée ? – et l’anagogie représenterait l’intention
générale, qui dans la grammaire de Norberg-Schulz « instrumente », pour ne pas dire
« détermine » les trois sens repris par chaque figure d’architecture.
Autrement dit, si on veut « traduire » un message religieux, comme le kérygme, de son
expression parlée à celle de l’architecture, la « traduction » doit s’envisager au niveau du sens
anagogique, vers les intentions incorporées dans les figures.

3.3. Intentions d’Église, avec Lumen Gentium


A partir du point de vue de l’édifice d’église conçu comme le cadre matériel d’une médiation,
ontologiquement portée par l’Église, nous proposons de regarder les « intentions » de « l’Église
pour elle-même » comme sources des intentions des constructeurs et utilisateurs de « l’église-
édifice ».
La proposition est de nommer ces intentions à partir de ce que l’Église dit d’elle-même et de
son rôle, en premier lieu les textes du magistère relatifs à l’ecclésiologie. Nous nous référons en
premier lieu à la Constitution dogmatique sur l'Église Lumen Gentium73 (Concile œcuménique
Vatican II, 1967), en ses chapitres I et II, intitulés respectivement « Le Mystère de l’Église » et
« Le Peuple de Dieu », qui traitent de « sa propre nature et sa mission universelle ».
Lumen Gentium inventorie (au chapitre Ier sur « Le Mystère de l’Église », paragraphe 6) les
« images » de l’Église, des expressions métaphoriques qui reflètent son identité et sa mission.
Nous avons retenu cinq d’entre elles, particulièrement développées dans la suite de Lumen
Gentium, qui pourront éclairer le rôle des églises en leur architecture.
La première image est celle de son rôle de reflet du Christ, lumière des nations, selon le titre
même de la Constitution ; la mission de l’Église est de l’annoncer à tous, bref de proclamer le

73
Constitution dogmatique sur l'Église Lumen Gentium, in Concile œcuménique Vatican II, constitutions,
décrets, déclarations, messages, Paris, Centurion, 1967, p. 14-122.
36 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
kérygme74 ; la deuxième est celle de « Corps mystique du Christ » selon le titre du paragraphe 7,
évoquant la lettre encyclique d’ecclésiologie du pape Pie XII, Mystici Corporis Christi75 (1943),
relativement à son rôle d’union de la communauté des baptisés à Dieu, par l’intermédiaire du
Christ ; la troisième est celle de « Temple du Saint-Esprit », selon le paragraphe 476, qui exprime
son rôle de ferment de conversion ; la quatrième est celle de « Peuple de Dieu », selon le titre du
chapitre II, qui exprime son rôle de « communauté sacerdotale » ; la cinquième est celle de
« L’Église, Mère et Vierge », selon le titre du paragraphe 64 du chapitre VIII ; c'est l'expression
de son rôle d’engendrement « maternel », ainsi que de proposition et d’exaltation pure des vertus
théologales de foi, de charité et d’espérance, comme composantes spirituelles de cet
engendrement77.
Les développements de Lumen Gentium pour chacune de ces « intentions » montrent des
complémentarités entre elles, notamment dans leur perspective missionnaire, comme l’indiquent
le titre et le préambule, paragraphe 1, déjà cités, et comme le récapitule le paragraphe 17 sur « Le
caractère missionnaire de l’Église », notamment dans sa conclusion :

Ainsi, l’Église unit prière et travail pour que le monde entier dans tout son être soit transformé́ en
Peuple de Dieu, en Corps du Seigneur et temple du Saint-Esprit, et que soient rendus dans le
Christ, chef de tous, au Créateur et Père de l’univers, tout honneur et toute gloire.78
Ces formes d’identité vocationnelle de l’Église peuvent se transposer comme « intentions
spécifiques » à l’origine d’une architecture d’église, qui les traduira fonctionnellement et
symboliquement.
« L’Église, annonciatrice du Christ lumière des nations » correspond à la vocation de l’église-

74
Lumen Gentium, § 1 : « Le Christ est la lumière des peuples […] L’Église étant, dans le Christ, en quelque
sorte le sacrement, […] elle se propose de mettre dans une plus vive lumière, pour ses fidèles et pour le monde
entier, en se rattachant à l’enseignement des précédents Conciles, sa propre nature et sa mission universelle ».
Nota : S’appuyant sur la prédication de Jésus Christ « Vous êtes la lumière du monde » (Mt 5, 14), un autre texte
du magistère conciliaire, le Décret sur l'activité́ missionnaire de l'Église Ad Gentes, affirme au § 1 : « l’Église,
sel de la terre et lumière du monde ».
75
Pape PIE XII, Lettre encyclique Mystici Corporis Christi, sur le Corps Mystique de Jésus-Christ et notre union
en Lui avec le Christ, Paris, Bonne Presse, 1943.
76
Lumen Gentium, § 4, cite saint Paul : « L’Esprit habite dans l’Église et dans le cœur des fidèles comme dans
un temple » (1 Co 3, 16 ; 6, 19).
77
Ici, deux extraits de ce chapitre VIII, intitulé « La bienheureuse Vierge Marie, mère de Dieu dans le mystère
du Christ et de l’Église » :
Au § 63, Marie, modèle de l’Église
[…] de l’Église, comme l’enseignait déjà̀ saint Ambroise, la Mère de Dieu est le modèle dans l’ordre de
la foi, de la charité et de la parfaite union au Christ […].
Au § 64, L’Église, Mère et Vierge
[…] en contemplant la sainteté mystérieuse de la Vierge et en imitant sa charité, […] l’Église […] devient
à son tour Mère : par la prédication en effet, et par le baptême, elle engendre à une vie nouvelle et
immortelle des fils conçus du Saint-Esprit et nés de Dieu […]
78
LG, § 17.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 37
édifice d’annoncer le kérygme christique et le mystère de l’incarnation.
« L’Église, corps mystique du Christ » correspond à la vocation de l’église-édifice comme
maison de Dieu, lieu d’une présence transcendantale.
« L’Église, Temple du Saint-Esprit » correspond à la vocation de l’église-édifice, comme lieu
de présence de Dieu au monde.
« L’Église, Peuple de Dieu » correspond à la vocation de l’église-édifice, comme lieu
d’assemblée des fidèles en leur communauté.
« L’Église, Mère et Vierge » correspond à la vocation de l’église-édifice d’être en soi un lieu
d’un « engendrement », c’est à dire d’une transformation personnelle, et par là d’exalter leur
relation de Dieu, par le chemin des vertus théologales.
Ces cinq intentions sources de l’architecture peuvent alors être identifiées comme autant de
champs théologiques d’approfondissement du kérygme, dans une forme de diffraction, que nous
serons amenés à distinguer dans les formes architecturales et dans les « récits » qu’elles portent.

3.4. Les facultés du langage d’architecture d’église et l’expression d’intentions


religieuses
Nous pouvons maintenant regarder comment le langage d’architecture, ordonné à ce type
d’intentions, pourra rejoindre les caractéristiques d’expression déjà relevées à propos de
l’expression du kérygme dans le langage parlé (paragraphe 2.2 ci-dessus).

Puissance de l’expression
Si la proclamation kérygmatique doit prendre la forme d’un cri puissant, il n’y a pas de doute
que c’est bien une des capacités qu’offre l’architecture. Le terme de « monument » indique la
puissance évocatrice qui peut être celle d’un édifice, par exemple du fait de ses dimensions, et de
sa faculté à provoquer la captatio du visiteur.

Un vaste public de destinataires


Du point de vue de sa réception, la capacité langagière de l’architecture peut être considérable.
Dans le discours du kérygme prototype, seule l’intervention divine a permis que Pierre pût être
compris par tous, malgré l’obstacle de la diversité des langues. A contrario, l’universalité du
langage d’architecture transcende d’emblée les barrières propres à la langue parlée.
Le public d’une architecture peut contempler l’édifice, soit de l’extérieur, le situant dans sa
relation à l’environnement, soit de l’intérieur, ce qui peut se prolonger dans l’état intime de
« l’habiter ». Ceci introduit à une forme d’analogie avec les différents destinataires du kérygme,
non-croyants et croyants.
38 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
Un langage pour un message de rhétorique « pré-conceptuelle »
Ayant posé que la « déclinaison » d’intentions dans le langage d’architecture, passe par des
« figures » qui associent formes et symboles, nous sommes loin de la conceptualisation propre au
kérygme verbalisé.
Pourtant, les correspondances sont possibles et multiples : des formes et spatialités, des
symboles signifient des concepts religieux ; par exemple dans le domaine des formes, une coupole
pour le ciel, un clocher pour l’élévation ; dans celui des symboles, une croix pour la sacralité,
différentes couleurs, etc.
Dans le domaine de la perception, ce sont des dynamiques qui sont induites : l’intériorisation
quand on entre dans un espace fermé ; le lien à l’immanence quand on descend dans une crypte ;
l’état de naissance quand on en sort ; la réception de la transcendance par l’accueil de la lumière,
et plus précisément le Christ, Lumen Gentium ; l’élévation de l’âme par la hauteur sous voûte ; la
projection de soi par le franchissement de la porte de sortie, surtout quand elle est large.
Chaque édifice peut proposer un jeu de ces correspondances ou inductions, voire consonnances,
qui concerneront soit le kérygme central, soit ses déclinaisons.
Il est certain que la richesse des significations symboliques de l’architecture peut répondre à
celle des conceptualisations verbalisables, mais elles donnent également accès à d’autres types de
compréhensions, comme certaines que nous venons de citer.
Ceci peut être à l’origine d’un apport spécifique de l’architecture à la compréhension du
kérygme, du fait de la mobilisation de plusieurs niveaux de compréhension, soit indépendamment,
soit même conjointement.
Ce seraient les significations de l’architecture du bâti en tant que tel, articulées par exemple aux
effets de la situation géographique – topographique ou cosmique ou bien à d’autres effets
artistiques comme la musique jouée dans l’église.

Ressaisir la temporalité
Sur le plan de la rhétorique kérygmatique, et de la temporalité qu’elle suppose, langage
d’architecture et langage parlé se positionnent différemment.
Naturellement, la compréhension d’une architecture résultera de parcours de visites, avec leur
linéarité séquentielle, analogue à l’écoute temporalisée d’une parole. Mais, avant l’introduction de
cette temporalité de parcours, l’architecture s’embrasse d’un regard, possiblement selon différents
points de vue, faisant monter pour le regardant une simultanéité d’impressions. Marcel Proust a
décrit ce type de perception des lieux, citons l’emblématique texte sur la force évocatrice du

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 39


clocher de l’église de Combray, ouverte à une contemplation intemporelle79.
Dans cette réception simultanée de significations multiples, on peut entendre le kérygme,
messages central et secondaires, avant la rhétorique. A ce stade, le langage d’architecture se situe
avant le discours, sa linéarité et sa rhétorique. Il ouvre à la méditation et à une réception de la
transcendance.
Puis, la temporalité qui découle du parcours de visite, choisi, guidé ou providentiel, offrira des
déplacements de points de vue et pourra mettre en route des séquences de compréhension
rhétorique ou l’accès à la dynamique du kérygme en déploiement.

Le non-parlé comme ouverture


Le non-parlé – dans lequel se situe le langage l’architecture – peut être intensifié par les lieux
de moindre signification formalisée, de silence, ou d’obscurité. C’est le cas aussi des constructions
inachevées ou en ruine, pour des significations qui restent à dire ou qui se sont tues, mais qui
néanmoins « mettent l’âme en marche ».

Fécondité et anagogie
L’anagogie plus lointaine d’une architecture résultera de divers supports d’inspiration : il
s’agira de son lien au cosmique, de sa participation au « génie du lieu »80, de son histoire propre
ou de son ancrage chtonien par l’existence d’une crypte, de sépultures. Il s’agira aussi de toutes
les significations induites par l’usage du lieu, dont bien sûr celles d’ordre liturgique ou
sacramentel.
Chacune de ces réalités peut ouvrir à des significations parousiaques en développant
l’impression qui résulte de la rencontre architecturale dans son immédiateté comme kairos,
correspondant à l’instance du « convertissez-vous » du kérygme.
Prenons comme exemples d’événement forts dans leur kairos la façon dont les vêpres de Noël
entendues à Notre-Dame de Paris déterminèrent la conversion de Paul Claudel en 1886, ou
comment l’effondrement de la flèche incendiée de cette cathédrale provoqua le saisissement d’une
foule immense, un lundi de semaine sainte de l’an 2019.

Pérennité
Si l’œuvre d’architecture s’inscrit dans la durée et répond souvent à une vocation monumentale
– faire mémoire –, c’est bien sa finitude que les Écritures en général et l’Évangile en particulier
mettent en cause, comparativement à la temporalité du Salut, par exemple l’Évangile de Jean (Jn

79
Passage de La recherche du Temps Perdu, en annexe 4.
80
Christian NORBERG-SCHULZ, Genius Loci, op.cit.
40 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
2, 19-21) : « Jésus leur répondit : Détruisez ce temple, et en trois jours je le relèverai. Les Juifs
dirent alors : Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce temple, et toi, en trois jours tu le relèveras !
Mais lui parlait du temple de son corps ».
Néanmoins, après l’éternité de Dieu, et la durée indéfinie du support écrit pour la langue parlée,
il y a une durabilité de l’architecture dans laquelle peut se valoriser le kérygme. Ce qui est
marquant dans cette durabilité est qu’elle peut se différencier, en allant du plus durable, les
fondations, au moins durable, la décoration ou les aménagements, en passant par la superstructure.
L’architecture est un langage qui permet de valoriser le durable dans le plus ou moins éphémère.
C’est ce que les Écritures retiennent quand elles emploient l’image de la « pierre angulaire »,
symbole de durée, avec le psaume 118 :
21
Célébrez le Seigneur car il est bon, et sa fidélité est pour toujours […]
22
La pierre que les maçons ont rejetée est devenue la pierre angulaire.
Dans le nouveau Testament, la pierre angulaire est le Christ.
La possibilité d’une durée au sein d’une architecture périssable est particulièrement évidente
quand on visite des ruines. Quelle meilleure expression de la parole d’éternité que le ciel ouvert
au-dessus des colonnes de l’abbaye de Jumièges ?

Au terme de cet inventaire comparatif des facultés d’expression du langage parlé et de celui
d’architecture, ordonnés à l’annonce chrétienne, nous avons vu apparaître des potentialités
spécifiques de l’architecture. Nous retenons le mode « évocatoire » de ce langage, qui permet
d’entrer en résonnance avec une multiplicité de significations, et le rôle de la perception, c’est-à-
dire celui de l’efficience esthétique, sous forme de « captatio »81.
Nous avons indiqué que le kérygme s’inscrivait dans une rhétorique, le langage parlé est fait
pour la traduire et la développer. Le langage d’architecture comprend, quant-à-lui, un potentiel de
manifestation et d’accueil plus immédiats de la transcendance.

81 Si on passe de l’efficacité langagière en tant que telle, à l’efficacité religieuse, cette captatio est déterminante.
Voir l’article de Bernard KLASEN, « L’efficacité des formes architecturales », in Transversalités, vol. 142, no. 3,
L’expérience artistique, p. 35-48, juillet-septembre 2017. Cette efficacité se répartit selon quatre formes : une
signification de la consécration – par le beau, le rôle des images, l’efficacité des formes et des volumes – dans
le cadre de la séparation intérieur/extérieur ; la Captatio ; l’efficacité didactique ; et, en majeure, la fonction de
louange.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 41


4. Lire le kérygme dans l'architecture d'église, par la visite profane guidée
Après avoir qualifié les possibilités d'expression kérygmatique, au sens large, par l’architecture
d'église, il reste à envisager la manière pratique d'en faire la lecture. Dans une optique de continuité
de notre support expérientiel, nous allons rester focalisés sur le cadre particulier que procure la
visite d’architecture d’église.

4.1. La visite d’architecture profane


La visite d’architecture profane est celle proposée par un service culturel ou touristique, par un
propriétaire public ou privé, ou une communauté affectataire, pour un édifice d’intérêt patrimonial.
Dans le cas qui nous concerne, celui du patrimoine sacré et plus particulièrement d'églises, la
qualificatif profane renvoie à l’objet premier de la visite : le monument pour son intérêt
architectural, indépendamment d’une dévotion, même quand cette visite est guidée par l’utilisateur
religieux.
Il est tout aussi possible d’envisager des visites accordées primordialement à un motif religieux,
comme dans le cadre de pèlerinages, mais ce n’est pas le cadre retenu ici, puisque nous voulons
faire ressortir le rôle de l’architecture en soi, quand elle est prégnante ; ceci nous a conduit à
prendre l’exemple d’églises classées « Monuments Historiques ».
De toute façon, la rigueur et la loyauté de la démarche de présentation de l’édifice requièrent
que la finalité des présentations explicatives soit bien accordée entre organisateurs et visiteurs.
Concernant la prise en compte de la signification religieuse, dans le contexte d’une visite culturelle
ou touristique, elle se conçoit facilement : chacun sait qu’une architecture se comprend selon des
représentations anthropologiques, y compris religieuses.
Ce sont d’ailleurs ces considérations qui permettent la mise en œuvre pratique de visites
profanes pour des églises que leur antériorité à la loi de séparation des Églises et de l’État (1905)
a rendu propriétés publiques (communes, voire État), avec une utilisation cultuelle sous le régime
de l’affectation.
Au-delà de ces principes, la question se pose de la portée d’une adhésion – ou d’une non-
adhésion – aux significations religieuses, pour la compréhension de ce que l’architecture exprime.
La notion de kérygme accentue la question, tout en y apportant des réponses. Elle s’aiguise parce
que le discours kérygmatique primitif, rapporté au long des Actes des Apôtres82, réclame
l’adhésion : « C’est en lui que se trouve le salut des hommes : convertissez-vous » (Ac 2, 38). Et
on peut d’autant moins l’éluder que c’est un prolongement de l’envoi final de Jésus Christ : « Allez

82
Ac 2, 22-38 ; 3, 13-19 ; 4, 10-12 ; 10, 37-43 ; 13, 23-38.
42 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint
Esprit » (Mt 28, 19). La réponse est dans la modalité d’adhésion, qui suppose la liberté de
conscience comme donnée essentielle de la relation à Dieu, et d’accueil de la Révélation. Une
traduction pratique concernant l’annonce du kérygme en est donnée dans Evangelii Gaudium :

Les chrétiens ont le devoir de l’annoncer sans exclure personne, non pas comme quelqu’un qui
impose un nouveau devoir, mais bien comme quelqu’un qui partage une joie, qui indique un bel
horizon, qui offre un banquet désirable. L’Église ne grandit pas par prosélytisme mais « par
attraction ».83
Ainsi, dans la mesure où la liberté de croire ou de ne pas croire relève d’une décision
individuelle, il y a une responsabilité propre du guide d’église sur la façon dont il exprime ses
convictions de foi, pour que sa propre adhésion de foi autorise une compréhension ouverte, ne
requérant pas absolument l’adhésion de foi des visiteurs, mais pouvant les y intéresser.
Une implication pratique de cette ouverture conduit à éviter qu’une polarisation sur les
explications religieuses ne subordonne excessivement les significations d’un autre ordre ; au
contraire, il s’agira de montrer la complémentarité des explications religieuses avec d’autres points
de vue sans imposer de hiérarchie qui ne serait justifiée que par la seule foi du guide.
Concernant ce lien entre explications d’architecture et explications religieuses, c’est dans le
présent travail que nous allons poursuivre l'étude de leurs complémentarités, articulations,
ajustements.

4.2. La visite d’architecture profane guidée


La fonction de guide pour comprendre une architecture s’entend en complément de ce que
permet la lisibilité propre de l’édifice.
La multiplicité des efficiences du langage d’architecture induit une profusion de significations,
profusion dont la prise en compte est également conditionnée par les effets de simultanéité propre
au langage d’architecture.
En architecture, les réceptions non narratives occasionnées par les spatialités sont essentielles.
Pour autant, la possibilité d’introduire des temporalités et des modes narratifs constitue une
occasion d’amplifier la compréhension de l’église-édifice.
Le guide de visite assure une fonction-clé dans une telle amplification du processus
herméneutique, qu’il peut temporaliser de deux manières, d’une part par les narrations des
explications qu’il propose, d’autre part par la conception du parcours de visite, constitutif d’une
temporalité de référence, au sein de laquelle les spatialités, vues ou parcourues, les formes et les

83
EG, § 14.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 43
symboles sont séquencées.
S’agissant de la mise en relation du discours kérygmatique et de l’architecture, l’enjeu pour le
guide consiste ainsi à créer une concordance entre la temporalité résultant du parcours de visite le
long duquel se révèlent les figures d’architecture, et celle des explications relatives aux accents
théologiques de l’église, par les différentes narrations qui les forment, y compris l’histoire de
l’édifice ou la rhétorique du kérygme84.
Le guide-herméneute, pour préparer ces explications et le parcours support, s’appuiera sur une
première compréhension de l’architecture concernée et de sa théologie, fondée sur un
apprentissage tant de l’architecture que de la théologie du lieu. Concernant l’architecture, il s’agira
de reconnaître sa lisibilité immédiate, de prendre soin de la lire sur un mode analytique, et enfin
de laisser les visiteurs être éprouvés par le génie du lieu, par « l’aura »85 qui en émane. Au plan
théologique et religieux, le guide croyant pourra nourrir sa foi et son chemin spirituel en participant
à la vie chrétienne de l’église visitée, notamment les liturgies ; l’initiation aux accents théologiques
passe aussi par la rencontre de chrétiens familiers du lieu, qui en sont religieusement imprégnés,
de manière à recueillir l’héritage de foi en relation avec l’édifice dont ils peuvent témoigner.
Cette première compréhension devra alors être mise en forme par le relevé des figures
d’architecture et celui des accents théologiques propres à l’édifice, puis de parcours qui les
révèlent. C’est à cette mise en forme que nous nous livrons dans la partie suivante du mémoire,
pour deux églises que nous aimons.

84
Si, comme Paul Ricœur le propose, le travail de compréhension pourra s’apparenter à celle d’un texte, nous
nous référons à un mode lecture, où le déchiffrage de gauche à droite et de haut en bas est remplacé par la
déambulation de visite, le parcours proposé par le guide étant une composante de son travail d’explication ou
plutôt un complément maïeutique.
85
Nathalie HEINICH, « L'aura de Walter Benjamin » in Actes de la recherche en sciences sociales, Vol. 49, La
peinture et son public, p. 107-109, septembre 1983 ; « L’aura », comme révélation unique du « lointain » ; voir
aussi Christian NORBERG-SCHULZ, in Genius Loci : paysage, ambiance, architecture, op.cit, qui désigne par
« aura » la force d’expression, en son unicité, du « génie d’un lieu ».
44 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
5. Synthèse et conclusion de la première partie
Il s’agissait dans ce chapitre de préciser les termes de notre proposition : L’architecture, par les
figures qui la composent, rend compte des accents théologiques ; autrement dit, il y a des
consonnances entre des accents théologiques du kérygme et l’architecture d’église. On résume ici
les étapes parcourues pour caractériser les concepts en jeu et leurs articulations.

5.1. Notion dynamique de kérygme et notion d’accent théologique


Grammaticalement, « kérygme » est un néologisme de la théologie biblique. La signification
du terme passe donc d’abord par les références dans les Écritures en langue grecque, à l’origine
du terme, ensuite par les textes du magistère qui l’ont adopté après le concile Vatican II.
Dans les Écritures, la dynamique du terme vient de son emploi comme verbe, « proclamer »
[kêryssô], plutôt que comme substantif, « proclamation » [kêrygma].
Selon le magistère, le kérygme stricto sensu recouvre un message central immuable, celui du
kérygme primitif proclamé par les Apôtres, devenu trinitaire. Sa dynamique résulte de ce qu’il ne
se comprend que dans l’économie du salut et dans l’ensemble du processus d’évangélisation
– annonce et témoignage –, suivi de l’approfondissement de la foi.
Dans sa dimension trinitaire, le kérygme central est en relation essentielle avec les diverses
vérités de foi, qui doivent l’accompagner d’une manière ou une autre, et qui introduisent à la
sainteté et aux voies du salut – comme on le lit dans Evangelii Gaudium.
Ainsi apparaît la notion d’accent théologique dans l’annonce chrétienne. Le kérygme
« s’approfondit » dans la progression de la relation entre la « vérité première » et les autres vérités
de foi, porteuses d’accents spécifiques.

5.2. Du lien préférentiel du kérygme au langage parlé, à la légitimité


théologique du langage d’architecture
Le lien préférentiel du kérygme au langage parlé résulte de ce que le Christ est le Verbe.
S’agissant d’un rôle du bâtir dans la relation à Dieu, les Écritures attestent à la fois la possibilité
et les limites d’une telle médiation. Le Nouveau Testament est néanmoins encourageant au travers
de sentences telles que « vous êtes le temple de Dieu et [… ] l'Esprit de Dieu habite en vous [… ]
Car le temple de Dieu est saint et ce temple, c'est vous. » (1 Co 3, 16-17)

5.3. Transposition d’un message parlé dans le langage d’architecture


Nous nous sommes éloignés de la notion de traduction, qui supposerait une temporalité

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 45


commune entre langage parlé et langage d’architecture ; nous avons noté avec P. Ricœur86 le
système de temporalité propre à l’architecture-langage, qui comprend d’une part une aptitude à la
fonction mémorielle, d’autre part une ouverture à des narrativités multiples, selon la temporalité
ou la simultanéité de la perception des spatialités.
Dans ce contexte, nous avons interrogé la structure de l’architecture-langage à partir de la
grammaire qu’en propose C. Norberg-Schulz, qui accorde un rôle primordial à « l’intention », puis
à la « figure ». « L’intention », mise en rapport avec des concepts du langage parlé, fondera à la
fois les symbolisations et les fonctionnalités des formes architecturales. Les formes architecturales,
informées par une « intention » et caractérisées par des symbolisations et des fonctionnalités,
constitueront une « Gestalt », nous disons une « figure ». Dans ce schéma, la correspondance entre
langage parlé et langage d’architecture passe par la prise en compte dans « l’intention » de
significations issues de la parole, puis par leur incorporation dans les « figures ».

5.4. Intentions d’Église, intentions d’église, figures d’architecture


Dans l’idée d’appliquer ce schéma aux significations religieuses portées par les églises-édifices,
nous avons admis qu’elles résultent d’intentions d’architecture ordonnées aux intentions
fondamentales de l’Église, ce qu’elle dit sur son rôle et son identité ; Lumen Gentium nous a permis
de repérer cinq types d’intentions d’Église, transposables en intentions architecturales d’église.
Le tableau ci-après en rend compte. Il doit permettre, après relevé des figures d’architecture, de
repérer celles qui consonnent à des intentions théologiques fondamentales.
Images d’Église comme
Figures
sources d’intentions Intentions pour le lieu église
d’architecture
théologiques
Reflet du Christ, lumière du Annonce à tous du kérygme
monde christique – Incarnation
mém ns la

Maison de Dieu, présence


oire

Corps mystique du Christ


da

transcendantale
suit plète

Temple du Saint-Esprit Présence de Dieu au monde


e du

Assemblée des fidèles en leur


om

Peuple de Dieu
communauté
Se c

Engendrement et transformation
Mère et Vierge
personnelle
Cette évaluation pratique est l’objet de la suite de notre mémoire, dans une deuxième partie qui
établira ces « consonnances » dans deux églises prises comme cas d’école, et en fera ressortir les
accents théologiques.

86
Architecture et narrativité, op. cit.
46 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
II - SAINTE-MARGUERITE DU VÉSINET ET SAINTE-GENEVIÈVE DE NANTERRE

En nous familiarisant avec ces deux églises, nous avons fini par distinguer des figures saillantes
de leur architecture, conjointement aux accents théologiques avec lesquels elles consonnent.
Pour restituer cette « compréhension », nous allons parcourir trois étapes, pour chacune des
deux églises : d’abord, un relevé des figures majeures constitutives de l’architecture, en les mettant
en rapport avec des intentions théologiques spécifiques ; ensuite, une synthèse de ces intentions
figurées pour proposer une tonalité théologique globale ; enfin une mise en perspective à travers
le tracé d’un parcours de visite, apte à soutenir et à faire partager cette compréhension.

1. L'église Sainte-Marguerite du Vésinet

1.1. Principales figures d’architecture


L’identité architecturale de l’église Sainte-Marguerite résulte de quatre « figures » principales
dans lesquelles son architecture se constitue87 :
A - Une figure historique, celle d’un moment de l’identité chrétienne traduite en urbanisme ;
B - Une architecture techniquement innovante dans un style composite, économique ;
C - Une unité de conception et de style, selon un plan basilical, lisible et fonctionnel ;
D - L’ensemble des vitraux et peintures, par eux-mêmes et leurs complémentarités.
Nous les passons en revue.

A - La figure historique, caractéristique d’un christianisme traduit en urbanisme


L’église Sainte-Marguerite est un édifice de la deuxième moitié du XIXe siècle, construit à
l’initiative d’un homme d’affaires, Alphonse Pallu, fondateur et promoteur de la « colonie du
Vésinet », un lotissement implanté dans une ancienne forêt de chasse royale, réparti sur plusieurs
communes de l’ouest parisien. Cette « colonie » a été créée en 1859, sous l’égide d’une société
Alphonse Pallu et Cie, à la faveur de la desserte offerte par la première ligne française de chemin
de fer de Paris au Pecq (1837), bientôt prolongée jusqu’à Saint-Germain en-Laye (1847).
Plus tard, par une loi du 31 mai 1875, Le Vésinet, « ville nouvelle » avant l’heure, fut doté d’un
plein statut communal, par démembrement des communes voisines. Alphonse Pallu fut élu maire.

87
Description plus détaillée en annexe 5.
Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 47
Alphonse Pallu avait pourvu au
financement de l’église en instaurant
dans les comptes de sa société un fonds
alimenté par les acquéreurs des terrains
vendus par sa société, selon un tarif d’un
centime par mètre carré pendant trois
ans. Un concours fut organisé qui
déboucha sur l’adoption du projet
présenté par l’architecte Louis-Auguste
Boileau (1812-1896). Le style est néo-
gothique (voir ci-après).
Commencée en 1862, l’église fut
consacrée en 1865, sous l’appellation de
Sainte-Marguerite en mémoire d’une

Fig. 2 - L'église Sainte-Marguerite - CdA fille d’Alphonse Pallu, ainsi dénommée


et décédée à l’âge de dix ans.
Une décision impériale de juillet 1866 l’érige en église paroissiale, par amputation des
paroisses voisines, et à leur mécontentement. Après huit mois de tractations pour quelques
rectifications de frontières, l’évêque de Versailles officialisa ce remembrement paroissial
imposé dans le cadre du concordat.
L’église Sainte-Marguerite, propriété privée, fut transférée gratuitement par la société
Alphonse Pallu et Cie à la nouvelle commune du Vésinet88, dès 1876, tout comme les voiries ou
l’emprise foncière de la future mairie, qui formaient « parties communes » de la « colonie ».
Une expertise d’architecte attesta du bon état de l’église transférée89.
De 1898 à 1900, l’architecte Louis Gilbert ajouta les deux chapelles, le déambulatoire et la
sacristie, extensions dont les plans de Boileau avaient réservé la réalisation. Les décors de ces
espaces, peintures et vitraux, furent confiés au jeune Maurice Denis. Gravement endommagés
par un incendie en 2009, les peintures ont été restaurés en 2012 et 2013.
L'église est classée Monument historique depuis 201690.

88
Anticipation délibérée de la partie immobilière de la Loi de 1905 sur la séparation de l’Église et l’État.
Pour autant, la querelle des inventaires fut localement violente.
89
Dans le contexte particulier de la proximité des entités cédante et cessionnaire.
90
Arrêté ministériel du 29 avril 2016 : - Article 1er : Est classée en totalité au titre des monuments historiques
l'église Sainte-Marguerite située place de l'Église au Vésinet […] - Article 2 : Le présent arrêté se substitue
à l'arrêté d'inscription au titre des monuments historiques du 19 décembre 1978 […]
L’église au centre de la ville
La situation topographique et urbanistique de l’église reste celle du programme d’urbanisme
originel, qui avait délibérément élargi les espaces autour de l’église à construire91.
L’église est située à mi-chemin entre la gare existante et l’hôtel de ville, dessinant le
triptyque central du bourg. Sa position au centre d’une vaste place, dont les bords sont très en
recul par rapport à l’édifice, lui confère une place éminente, spécifiant la fonction
aphique - Géoportail
sociale
13/11/2022 23:54

majeure que les fondateurs lui assignaient. La volonté d’assumer cette place est également

Le Vésinet
marquée par le choix d’occidentaliser l’église, mettant sa façade à l’est, en pignon sur la rue
axiale, le cardo, qui réunit la gare à l’hôtel de ville.
Il s’agit ici d’un urbanisme inspiré par la
vision politico-sociale concordataire93,
prégnante sous le second empire. Cet
urbanisme valorise l’Église comme
institution sociale, qui s’assume comme un
partenaire majeur des pouvoirs publics et
participe primordialement à l’organisation
de la cité. L’intention théologique à laquelle
nous sommes renvoyés correspond non pas
tant à « l’Église, peuple de Dieu », mais
plutôt, à « l’Église, temple de l’Esprit »,
parce que son « objet social » concerne le
bien de toute la cité, et non pas celui des
seuls baptisés.

Fig. 3 – Le Vésinet – Centre-ville92

91
Voir annexe 5.
92
Annotation du fond de plan sélectionné dans le « Fond cartographique proposé par l’Institut national de
l’information géographique et forestière (IGN) », édité sur le site Internet geoportail.gouv.fr.
93
Voir l’analyse de Gilles DROUIN dans l’article « Initier au mystère de et par la cathédrale », in
Transversalités n° 154, p. 49-64, juillet-septembre 2020, Institut Catholique de Paris, 2020/3 : « Nous avons
souligné [… ] combien la conception concordataire de l’église comme lieu du culte chrétien, le culte envisagé
comme une des fonctions parmi d’autres de la société́ , se situait en rupture avec l’approche médiévale.
L’évolution de l’urbanisme est à ce titre éloquente. Il suffit de comparer l’isolement de la cathédrale [N-D
de Paris] dans la configuration haussmannienne et son insertion dans le tissu urbain médiéval ».

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 49


B- Une architecture techniquement innovante dans un style composite
Une pensée utilitariste et fonctionnaliste a présidé au projet, puisque le concours d’architecte
demandait une église susceptible d’être agrandie en fonction de l’évolution de la démographie
locale. La solution d’une architecture métallique permettait de faire d’emblée un édifice plus
vaste pour un prix compétitif. Cet argument fut déterminant pour choisir le projet de Boileau94.
La structure du bâtiment repose sur une
trame de colonnes en fonte supportant une
charpente légère et complexe, en arcatures
métalliques brisées (vue ci-contre).
Plutôt que les traditionnels moellons, les
murs extérieurs sont constitués de « béton
aggloméré » (c’est à dire du béton non
armé), coulé entre les colonnes, selon la
proposition de l’entrepreneur Coignet que
le promoteur Alphonse Pallu imposa à
l’architecte.
Le clocher, les balustrades sont
également en béton.
Fig. 4 - Dessin projet de L-A Boileau95
Cet assemblage se comporta de façon satisfaisante, tant pour ce qui concerne les parties
métalliques que le béton, sans vieillissements néfastes, comme le constata l'expert mandaté par
la mairie lors de la cession de l’église à la commune.
Boileau était un architecte autodidacte, issu des métiers de la charpente métallique.
L’architecture métallique prit son essor en France avec Baltard (les pavillons des Halles de
Paris à partir de 1852, et à partir de 1866 l’église Saint-Augustin). Boileau est un des premiers
à utiliser ce matériau pour une église en construisant l’église Saint-Eugène-et-Sainte-Cécile à
Paris (1854-1856). Sainte-Marguerite est sa réalisation suivante. Boileau poursuivra son œuvre
avec l’église Saint-Paul à Montluçon, de conception très proche.
Les architectes de l’époque (par exemple Laloux, pour la gare d’Orsay) cachaient les

94
Les instances professionnelles des architectes déplorèrent les modalités peu rigoureuses du concours,
jugées déloyales, caractérisées finalement par la sélection d’un projet non conforme au cahier des charges.
95
SOCIÉTÉ D'HISTOIRE DU VÉSINET, Sainte-Marguerite du Vésinet, une église à nulle autre pareille, Le
Vésinet, Éditions de la Couronne d'Or, 2015, p. 25.
charpentes métalliques. Boileau l’assume en se référant au style gothique par l’élévation et la
lumière et par des rappels de l’arc d’ogive dans la charpente supérieure, comme dans les baies.
Le brio conceptuel de la charpente est réel, selon la vignette ci-dessus, mais il est difficile
d’en pleinement juger, ni de l’intérieur, encore moins de l’extérieur.
Cette référence gothique réinterprétée, tant par la création de pseudo-collatéraux dans la nef
que par la charpente complexe, suscita des critiques à propos d’un style jugé sans appartenance
véritable, y compris de la part de Viollet-le-Duc – dont Boileau était pourtant un admirateur.
A l’extérieur, malgré une couverture plutôt ordinaire, l’église ne manque pas d’allure,
comme une grande nef, au milieu de la place conçue pour elle, en dégageant un large parvis
(photo du paragraphe A ci-dessus). Le clocher axé en façade donne de l’élancement, et ratifie
la présence (au-dessus d’une façade plutôt banale).
Cette monumentalité générale de l’édifice et la captatio qu’elle suscite renvoient à une
théologie de la présence, soulignée par l’inscription au-dessus du portail : « DOMUS DEI INTER
HOMINIBUS », « la maison de Dieu parmi les hommes ». Ceci consonne avec « Nous tous en
sommes témoins » du kérygme primitif.
Il s’agit d’une présence annonciatrice, qui s’exprime dans le langage du XIXe siècle, non
seulement en adoptant une architecture au goût du jour, mais en la marquant d’un élan
d’invention, d’entrepreneuriat, cohérent avec les intentions d’une ville à l’aménagement créatif,
au rebours de ce que serait une architecture passive. Toutefois le langage prend garde de bien
se référer aux signes architecturaux de la chrétienté supposés immuables tels que le clocher.
La relative modestie de l’édifice, avec ses aspects fonctionnels évidents, est un autre facteur
moral à souligner, dans la mesure où il rend l’église et son message abordables, manifestes
d’une présence. La créativité technique à l’origine de l’édifice est moins perceptible par le
public d’aujourd’hui, mais l’harmonie maîtrisée, sans grandiloquence, subsiste et elle dispense
un message accueillant, reflète une figure bienveillante de Dieu.

C - Plan basilical, lisibilité, unité de conception


Le plan est basilical : une grande nef, selon un simple rectangle longitudinal, sans transept,
prolongé par un chœur comme une grande abside, elle-même entourée d’un déambulatoire et
de deux chapelles absidiales latérales. Les pseudo-collatéraux dans la nef rappellent
l’architecture religieuse classique. C’est un schéma anthropomorphique, comme le souligne le
rapprochement avec un dessin connu de Francesco di Giorgio.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 51


Fig. 5 - Plan de l’église (1903) Fig. 6 - Dessin du Traité d’architecture
extensions en rouge 96 de Francesco di Giorgio97

S’agissant de la conception intérieure, les espaces sont clairement répartis en trois pôles : la nef
et ses collatéraux réunis en une vaste salle pour les assemblées ; devant cette nef, le chœur,
surélevé et séparé, mais pleinement communiquant ; deux chapelles absidiales, l’une dédiée à
la Vierge, au sud, l’autre au Sacré-Cœur, au nord, reliées par un déambulatoire qui dessert la
sacristie dans l’axe du chœur.
Ainsi les fonctions trouvent leur place : les liturgies solennelles dans l’espace du chœur et
de la nef entière, le recueillement dans les chapelles. Ceci résulte bien sûr du plan horizontal et
des circulations, mais aussi de la verticalité et de l’éclairage des espaces. La grande hauteur
sous les voûtes de la nef et du chœur favorise l’élévation de la prière commune. Les voûtes
moins hautes des chapelles favorisent le recueillement.

96 97
Reproduit par SOCIÉTÉ D'HISTOIRE DU VÉSINET, Reproduit par C. NORBERG-SCHULZ, in Système
in Sainte-Marguerite du Vésinet, une église à logique de l'architecture, op.cit, p 107.
nulle autre pareille, op.cit., p. 98.

52 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Fig. 7 - Une nef ample, claire, basilico-rectangulaire - CdA
Les modes organisés de l’Église, ceux qu’exposent Lumen Gentium ou Sancrosanctum
Concilium, y trouvent des traductions commodes. Par exemple, le chœur à la fois bien délimité,
et relié à l’espace de l’assemblée, avec une visibilité centrale de l’autel, favorise les dialogues
de la messe qui relient le prêtre sacrifiant et le peuple ; c’est un lieu pour la prière sur les
offrandes : « ce sacrifice qui est aussi le vôtre… ».

D – Les vitraux et peintures, adaptés à leurs espaces


L’ampleur du programme de vitraux et peintures constitue une signature architecturale pour
l’église Sainte-Marguerite.
Par leur répartition accordée aux espaces que sont la nef, le chœur, les chapelles et
déambulatoire, ils contribuent à valoriser leurs polarités théologiques respectives, à mieux les
comprendre, tout en les rassemblant.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 53


Fig. 8 - Les vitraux de la nef nord et sud, i.e. à droite et à gauche, le chœur est à droite98

98
SOCIÉTÉ D'HISTOIRE DU VÉSINET, Sainte-Marguerite du Vésinet, une église à nulle autre pareille, op. cit., p. 94-95.

54 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


La nef est bordée de chaque côté par douze grandes baies équipées de vitraux de factures
similaires, soit vingt-quatre en défalquant deux grisailles latérales, et en en ajoutant deux
vitraux sur les ouvertures en pignon, au fond de la nef. En effet c’est le même atelier vitrailliste
(ateliers Lobin99 à Tours) qui les fabriqua entre 1865 et 1904, au fur et à mesure des dons des
paroissiens, le processus ayant été initié par les premiers dons d’Alphonse Pallu.
Ces vitraux représentent des personnages uniques en pied, soit le Christ en croix ou en gloire,
soit des saints. Au fur et à mesure de leur réalisation, ils ont formé une sorte de ronde car ils
étaient installés en priorité dans le chœur, ensuite déplacés sur les côtés de la nef tandis que de
nouveaux vitraux, illustrant de nouveaux saints, étaient livrés, et commençaient par les
remplacer dans le chœur.
La signification religieuse de ses vitraux s’accorde avec celle du « Peuple de Dieu », et est
bien propre à la nef où le peuple se rassemble. En effet, les vitraux évoquent le déploiement de
l’Église, avec son peuple de saints, et à partir des événements fondateurs de la passion et de la
résurrection du Christ. C’est l’universalité de l’Église et du message évangélique qui sont
proclamés, à travers l’inter-temporalité des saints représentés, leur diversité d’origine – sainte
Marguerite d’Antioche est révérée en orient – et avec l’universalité des attributs de
représentation qui permettent de reconnaître les évêques, pape, les martyrs, les saints apôtres.
Les vitraux du chœur
Au fond du chœur, à l’occident de l’église, les anciens vitraux figurant le Christ en pied ont
été remplacés, en 1980-1982, par un triptyque de vitraux, une réalisation d’Emmanuel Chauche,
artiste contemporain du Vésinet.

99
Un seul n’est pas signé Lobin, mais Florent, qui se rattache toutefois au même atelier.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 55


Fig. 9 - Les vitraux du chœur (à l'occident)100
Cette réalisation semi-figurative représente la Christ en gloire dans le temps de
l’Apocalypse. L’éclairage des vitraux au couchant – puisque l’église est occidentalisée –
correspond bien à une référence au futur et la parousie.
Le style marque une rupture avec les vitraux de la nef ; notamment l’intensité visuelle prise
par le chœur crée une attraction qui s’impose sur l’équilibre des vingt-quatre vitraux du « peuple
de Dieu » de part et d’autre de la nef.
Ainsi toute la nef bascule son orientation vers le chœur et sa signification christique. Chœur
et nef, par leur configuration, par leurs vitraux, expriment une Église qui conjugue ses images
de « Peuple de Dieu » et de « Corps mystique du Christ ».
Les vitraux et peintures des chapelles et du déambulatoire (œuvres de Maurice Denis,
sur la période 1901-1903)
Après les espaces dédiés aux liturgies solennelles, les chapelles absidiales sont propres au
recueillement, l’une par la piété mariale, l’autre par la dévotion au Sacré-Cœur.
Des peintures de Maurice Denis ornent chacune de ces deux chapelles, sous la forme de
toiles marouflées sur les murs et les voûtes. Ce sont des représentations plus narratives.

100
SOCIÉTÉ D'HISTOIRE DU VÉSINET, Sainte-Marguerite du Vésinet, une église à nulle autre pareille, op. cit.,
p. 93.

56 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Fig. 10 - La chapelle de la Vierge
CdA

Fig. 11 - La voûte de
la chapelle du
Sacré-Cœur (avant
l’incendie)100

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 57


Il en est de même des vitraux (cartons du même artiste, réalisations du vitrailliste Henry
Carot). Quatre d’entre eux sont présentés ici.

Fig. 12 - L’annonciation Fig. 13 - La fontaine d’eau vive


CdA CdA

Fig. 14 - La guérison des malades


CdA

Ces représentations intériorisées sont propices à la méditation et au recueillement, dans une


« Église Mère et Vierge ».

58 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


1.2. Synthèse théologique

Les intentions d’Église


Nous pouvons maintenant récapituler comment les principales figures d’architecture de
Sainte-Marguerite se réfèrent aux pôles intentionnels que nous avons attribué à l’architecture
d’église :
Images d’Église
comme sources Intentions pour le
Figures d’architecture
d’intentions lieu église
théologiques
Annonce à tous du D - Vitrail de l’apocalypse
Reflet du Christ,
kérygme christique –
lumière du monde D – Chapelle du Sacré-Cœur
Incarnation
Maison de Dieu, B - Volume et lumière
Corps mystique du
présence
Christ D - Vitraux
transcendantale
A - Mise en scène urbaine et

Temple du Saint- Présence de Dieu au monumentalité de l’édifice


Esprit monde B - « DOMUS DEI INTER HOMINIBUS »
en façade
C - Fonctionnalité liturgique des
Assemblée des fidèles différents espaces
Peuple de Dieu
en leur communauté
D - Figures des vitraux de la nef
Engendrement et B - Chapelles de dévotion
Mère et Vierge transformation
D - Décoration de cette chapelle
personnelle
Accent théologique : la pédagogie

Plus généralement, le parti théologique de l’église Sainte-Marguerite apparaît d’abord


comme étant celui d’une théologie pédagogique, tant kérygmatique que catéchétique, visant à
signaler aux citoyens, passants ou visiteurs une présence de Dieu dans la cité, et aux fidèles les
différents aspects de la foi, dans une organisation des lieux tout en cohérences, au plan des
fonctions sociales et cultuelles, au plan des symboles qui s’y rapportent, et plus spécialement
des consonnances entre accents théologiques et « figures » d’architecture.

Le parcours de visite permettra de faire valoir ces cohérences.

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 59


1.3. Le parcours de visite101
Le parcours de visite prendra en compte deux considérations de spatialité :
La première est d’ordre topologique : les
compréhensions distinctes de l’extérieur et
de l’intérieur de l’édifice, qui regrouperont
les significations mentionnées en A et B ci-
dessus d’un côté, les significations
D D
Chapelle de Chapelle du
la Vierge Sacré-Coeur mentionnées en C, D de l’autre.
La seconde est d’ordre géométrique et
D
concernera l’intérieur. La configuration
basilicale de l’église comprend un axe
central, qui sert naturellement d’appui au
parcours de visite. Cet axe peut être
C parcouru de façon centripète, quand on
s’approche du centre théologique de
l’église, l’autel, ou centrifuge si on envisage
le rayonnement du Christ célébré sur
l’autel.
Ce sont deux dynamiques
complémentaires qui s’accordent avec le
A B souci de cohérence théologique qui habite
cette église.
Fig. 15 - Parcours de visite102
Nous imaginons donc qu’un parcours de visite-type doit confirmer l’accord de ces deux
mouvements, et qu’il devra alors être conçu comme un aller-retour le long de l’axe longitudinal
depuis l’extérieur jusqu’au centre de l’église, puis retour ; bien sûr, ceci est proposé non pas de
façon rectiligne, mais en laissant la place à des mouvements complémentaires à choisir pour
approfondir la rencontre de telle ou telle manière.
Néanmoins, se maintenir dans la progression axiale permettra de donner crédit à la
dimension initiatique du parcours de guide.

101
Les lettres majuscules sur le plan sont relatives aux figures d’architecture à commenter.
102
Schéma de l’auteur.

60 Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Globalement, on peut proposer les moments suivants :
Au début à l’extérieur, on déambule autour de l’église puisque la place le permet ; sur le côté
on voit l’allongement de la nef avec son clocher qui s’avance au-devant des visiteurs, alors que
la seule façade peut paraître un peu austère, voire fade. C’est le moment d’évoquer l’insertion
urbaine sociale de l’église, la concordance de son édification avec la fondation de la nouvelle
ville, et sa référence à une pensée intégratrice qui réunissait la foi en Dieu, le progrès
scientifique et technique et la cohésion sociale. La possibilité de cette concordance n’est pas à
présenter comme acquise, mais comme la perspective commune des divers dons de l’Esprit,
signifiée par une église représentant un « Temple de l’Esprit ».
L’entrée dans l’église avec l’inscription au fronton DOMUS DEI INTER HOMINIBUS
permet de commenter la réalité d’une église pour tous les hommes, comme l’Église « Corps
mystique du Christ ». Les vitraux de fond de chœur y répondent, en annonçant le Christ de
l’apocalypse.
Le passage dans la nef permet de commenter la ronde des vitraux, illustratifs de la
communauté chrétienne qui est à la fois celle de l’assemblée dans la nef, mais aussi celle de la
succession chrétienne dans l’histoire avec ses saints.
La complémentarité des vitraux modernes du chœur avec ceux historiques de la nef permet
de commenter l’articulation entre ces deux espaces pour évoquer les rôles du prêtre et de
l’assemblée dans la célébration de l’Eucharistie.
Le phénomène d’attirance que nous avons repéré de la part des vitraux de chœur par rapport
à la galerie des vitraux de nef pourra être commenté comme témoin de la réminiscence du style
gothique, tant au plan du rôle de la lumière qu’à celui de l’axialité de la relation à Dieu.
Enfin les peintures et vitraux de Maurice Denis dans les chapelles absidiales fondent une
explication sur le lien entre des peintures au style intériorisé et des espaces pour l’oraison et la
dévotion personnelle.

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 61


2. La cathédrale Sainte-Geneviève103 de Nanterre

2.1. Principales figures d’architecture


L’identité architecturale de la cathédrale
Sainte-Geneviève104, comprend trois
grandes figures :
A – Un édifice empreint par l’histoire ;
B – Une savante organisation des espaces
– comme caractéristique primordiale du
style de la construction ;
C – Un ample programme de fresques et
de vitraux contemporains.
Nous les passons en revue en
mentionnant les accents théologiques qui s’y
associent.

Fig. 16 - Façade de la cathédrale Sainte-


Geneviève - CdA
A – Un édifice empreint d’une histoire multiséculaire
L’église témoigne d’un enracinement profond dans l’histoire de France, dans l’histoire de la
chrétienté, et d’une capacité de reviviscence de la foi. Depuis l’époque gallo-romaine jusqu’à
nos jours, sur plus de seize siècles, chaque grande époque aura apporté sa marque, dans une
forme de scansion historique.
Origine gallo-romaine et moyen-âge
Une paroisse aurait existé à Nanterre depuis le IIIe siècle. La titulature d’église Saint-
Maurice est signalée en 426. Cette église est ravagée à plusieurs reprises au cours de la guerre
de Cent ans, notamment lors de l’incendie de Nanterre en 1346 par les troupes anglaises
d'Édouard III. A la fin du XVe s, l’église est en piteux état.
Seule subsiste aujourd’hui la tour placée au côté du chœur qui pourrait dater de 1300 environ.

103
Édifice classé aux Monuments Historiques : Le clocher, par arrêté du 20 mai 1975 ; la cathédrale en
totalité, par arrêté du 23 septembre 2010 ; Baullet Louis (maître verrier) ; Pradelle Georges (architecte).
104
Description détaillée en annexe 6.

62 Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Sainte Geneviève
En 429, saint Germain et saint Loup passent par Nanterre au cours d’une mission
d'évangélisation, ils rencontrent une jeune fille âgée de sept ans, qui deviendra sainte Geneviève
ainsi que le relate la Vita Genovefa105. La jeune femme se consacre à la religion et acquiert une
grande importance spirituelle et politique. Après sa mort, des pèlerinages vers Nanterre se
développent rapidement.
A côté de l’église Saint-Maurice, une chapelle semi-enterrée dédiée à sainte Geneviève est
construite vers le XIe siècle – selon la tradition, sur la maison des parents de la sainte et à côté
du puits miraculeux, dont l'eau aurait guéri la mère de Geneviève de sa cécité –. Cette chapelle
n'est plus modifiée à partir du XIIe siècle.
Temps modernes
En 1494 l’église Saint-Maurice est reconstruite. Elle reçoit une nouvelle façade de style
jésuite en 1699. Le pèlerinage est relancé à cette même période.
Pendant les troubles révolutionnaires l'église devient un Temple de la Raison, puis le
bâtiment est rendu au culte. De nombreux pèlerins sont guéris par l'eau du puits miraculeux, et
des ex-voto ornent les murs de la chapelle.
La reconstruction de l'église durant l'entre-deux-guerres
En 1924, le curé de Nanterre, Jules Froidevaux, lance un projet visant à doter le lieu de
naissance de sainte Geneviève d’une « grande église de pèlerinage » à son nom.

Fig. 17 - Projet de Georges Pradelle106


Seule la partie Est (à droite) fut réalisée et
le clocher du XIVe s. fut conservé.

105
La Vita Genovefa est une biographie de sainte Geneviève commandée par son amie sainte Clotilde, et
publiée seulement 18 ans après la mort de Geneviève. Il s’agit d’un récit de grande valeur historique,
exceptionnel compte tenu de son ancienneté.
106
Dessin reproduit dans la fiche « Église paroissiale-cathédrale Sainte-Geneviève Saint-Maurice », in
Inventaire général des Monuments Historiques du département des Hauts-de-Seine, cote I4000 10312, 1990.

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 63


Il obtient du pape l’autorisation de renommer l’église Saint-Maurice qui devient église
Sainte-Geneviève107. Cette initiative se situe dans le courant du « catholicisme patriotique » qui
est apparu à la suite de la grande guerre, avec un besoin de réconciliation du pays, après que la
loi de séparation des Églises et de l’État, en 1905 l’eut divisé. Dans un contexte de
reconnaissance des souffrances partagées, des négociations sur la question des associations
diocésaines permettaient au pape Pie XI de les autoriser sous conditions, en publiant
l’enyclique Maximam gravissimamque108. Jeanne d’Arc était canonisée (1920) et de
nombreuses églises de reconstruction lui étaient dédiées. Quant à sainte Geneviève, depuis la
Révolution, elle ne disposait plus de sanctuaire propre, puisque l’abbaye Sainte-Geneviève qui
contenait son tombeau, avait été saccagée à la Révolution, puis expropriée pour devenir le lycée
Henri IV, tandis que la basilique à son nom, construite par Soufflot, était devenue un mausolée
laïque, le panthéon, avant que d'avoir pu recevoir ses reliques. La constitution d’un sanctuaire
propre à la sainte devenait un enjeu du temps. Nous pourrions rattacher ce projet aux pôles
intentionnels de signifier « l’Église peuple de Dieu » ou de celui de « l’Église Temple de
l’Esprit » dans la mesure où Geneviève se signale tout à la fois par sa participation éminente au
Peuple de Dieu, selon sa sainteté, et par son engagement universel d’héroïne historique.
Les architectes Georges Pradelle, puis Yves-Marie Froidevaux (neveu du curé) planifient
trois tranches de travaux : le transept est construit de 1924 à 1928 puis ce sont le chœur et la
crypte entre 1934 et 1937. La mort du chanoine Froidevaux en 1943 et les difficultés de l’après-
guerre empêchent de construire la nouvelle nef prévue. L'ancienne est donc provisoirement
conservée avec sa façade jésuite ; de même l’ancien clocher est maintenu.
À la suite de la création du diocèse de Nanterre, qui correspond au nouveau département des
Hauts-de-Seine, l’église Sainte-Geneviève devient cathédrale en 1966.
La façade et l’ancienne nef, à l’emplacement du parvis actuel, sont démolies en 1972 en
raison de leur mauvais état. Une nouvelle façade est réalisée avec une porte monumentale,
œuvre de Pierre Sabatier en 1974.
En 2012-2013, une ample restauration est entreprise conjointement par la ville et le diocèse
pour redonner à l’édifice son éclat, et mieux assumer son architecture interrompue.

107
Titulature canonique actuelle : cathédrale Sainte-Geneviève-et-Saint-Maurice.
108
Pape PIE XI, Encyclique Maximam gravissimamque sur les associations diocésaines, 18 janvier 1924.
« En effet, à la clôture de l'horrible guerre [ …], la vue des faits glorieux que le clergé, tant séculier que
régulier, oubliant les injures reçues et ne se souvenant que de l'amour de la patrie, et accomplis aux yeux de
tous, avait fait naître de jour en jour plus ardent le désir que la paix religieuse, troublée par la loi de séparation,
fût rétablie [ …] », et « [ …] jugeant que, avec les dispositions de l'opinion publique, les circonstances et les
relations entre le Siège apostolique et la République française étaient profondément changées »

64 Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


B- Une savante organisation des espaces
L’organisation des espaces, soit transformés, soit maintenus au fil du temps, dégage de
nombreuses significations. Leur combinaison reflète à la fois les origines du lieu et la façon
dont l’église paroissiale, puis basilicale, puis diocésaine s’est actualisée selon les besoins des
époques. Un parallèle s’impose avec la logique du kérygme, à la fois immuable et particularisé.
Commençons par l'insertion dans le tissu urbain, celui de l'ancien Nanterre, qui se fait
selon une double modalité.
On remarque principalement la continuité et la proximité, du fait de l’insertion dans un
schéma urbain et viaire ancien, selon le mode de qui existait pour la construction de l'église
précédente du XVIIe siècle, respectant un parcellaire historique puisque l'emplacement de la
maison de sainte Geneviève est encore identifiable.
L'espace de la nef non construite, disposé en grand parvis, joue toutefois un rôle
d'autonomisation de l'édifice. Il ne manifeste pas de coupure, compte tenu des signes de son
appartenance à l'espace religieux, que cela concerne le lien avec la chapelle et le puits de
l’ancienne maison de sainte Geneviève, attenants, ou que cela résulte de la quasi-absence de
façade en soi de la cathédrale, le très grand portail ouvrant sur l'amorce de transept, et en retour
conférant au parvis une fonction de narthex.
Cette fonction de transition est tripolaire dans la mesure où ce parvis relie la cité profane de
Nanterre dans son ensemble, l’espace mémorial de sainte Geneviève et la Cathédrale.
La forme de trapèze rectangle du parvis reprend l’orthogonalité du plan de la cathédrale, en
y apportant la triangulation de la tripolarité.
Le pôle du tissu urbain se joint de plain-pied au parvis par la voirie qui le borde sur deux
côtés du trapèze, et l’insère dans le système viaire.
Les deux pôles religieux se présentent sur l’un et l’autre des deux autres côtés.
Chacun d’eux est annoncé par un plan majestueux, celui de la mosaïque de la Jérusalem
céleste, dédiée à sainte Geneviève, d’une part, celui du portail monumental de la cathédrale
d’autre part.

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 65


Puits de sainte Geneviève Portail monumental
Mosaïque de la Jérusalem céleste

Fig. 18 - La cathédrale et son grand parvis109


insérés dans le tissu urbain

109
Photographie aérienne sélectionnée dans le « Fond cartographique proposé par l’Institut national de
l’information géographique et forestière (IGN) », op. cit.

66 Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Fig. 19 - Le puits de sainte Geneviève
CdA

Arrêtons-nous sur cette mosaïque,


adjacente au puits : la scène supérieure est
inspirée du livre de l'Apocalypse cité
librement : « Je vis descendre du ciel
d’auprès de Dieu la ville sainte, la nouvelle
Jérusalem préparée comme une épouse qui
s’est parée pour son époux ». Sainte
Geneviève s’y reconnaît à sa croix et à son
cierge allumé ; elle contemple l'Agneau sur
Fig. 20 - Mosaïque de la Jérusalem céleste
un trône, symbole de Jésus Christ glorieux,
Œuvre de Mario Rupnik (2017) - CdA
entouré de la Vierge Marie et de saint Jean-
Baptiste. Du trône, jaillit le fleuve de la vie La fresque signifie bien les deux
divine vers notre terre. Dessous, sur cette registres de vénération de la Sainte : son
terre, sainte Geneviève est à genoux implication dans la vie de la cité, et ses
confiant Nanterre et Paris à Jésus Christ. actions d’intercesseuse, tant spirituelle que
temporelle.

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


La transition extérieure /intérieure est la fonction de l’immense portail qui ferme l'origine
de la nef manquante. Son ampleur en fait l’élément essentiel de la façade, qui ne requiert aucune
autre décoration.
Le bas-relief en laiton embouti décline le
thème du « Buisson ardent » (Ex 3, 1-7), la
rencontre de Moïse avec Dieu, événement
majeur de la Révélation.
Cette signification de la rencontre de
Dieu, à cet endroit, se met en parallèle avec
l’inscription « DOMUS DEI INTER
HOMINIBUS », relevée au portail de Sainte-
Marguerite, et comme elle, renvoie à une
Église « corps mystique du Christ ».

Fig. 21 - Portail monumental en métal et en


verre – œuvre de Pierre Sabatier - CdA
Plan centré et coupole
Si le projet de Georges Pradelle visait un plan basilical en long, la configuration actuelle
« fonctionne » selon un plan centré. En effet, l’importance prise par la croisée du transept induit
une géométrie très orthogonale, qui évoque un plan de croix latine. Cette croix est toutefois
dissymétrique du fait de l’importance différente de ses quatre bras, par ordre de taille
décroissante : un chœur, à l’orient, assez profond, un transept nord constitué, une nef amorcée,
à l’occident, et une « intention » de transept sud.
Cette dissymétrie correspond à une élongation qui dissocie le centre en deux foyers, selon
une remarque110 de l’architecte Jean-Marie Duthilleul, auteur de la restauration de 2013 :
- D’une part un foyer F1, devant l’autel, à l’intersection de l’axe chœur-nef et d’un axe
transversal passant par la cathèdre ;
- D’autre part un foyer F2 à la croisée du transept, à l’aplomb de la coupole centrale.

110
Jean-Marie DUTHILLEUL Espace et liturgie, Paris, Desclée Mame, 2015, p. 76.

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


-Geneviève
VisPilatneCrathlaédcraalethSéadinratele

111
5
Visiter la cathédrale
7
8

C
C
Parvis

B
4
2
D
3

F2
F1
A
1

transversaux et deux foyers111


Fig. 23 - Plan-masse : deux axes
A
6
9

Les abords La façade en métal


et en verre est
réalisée par Pierre
Sabatier en 1974
avec une porte monu
La Cathédrale Sa me
inte-Geneviève a embouti, étain et plo ntale en laiton
été construite da mb sur le thème
ns les années 30 du buisson ardent
en pierre de Nante (épisode biblique
rre et de Château- de la première re
Landon, dans le sty ncontre de Moïse
le romano-byzantin avec Dieu).

congruentes
en vogue à l’époqu
e.
Devant le parvis se
tro

:
puits de sainte Gene uve le célèbre
viève et une petite
chapelle souterraine
, très ancienne,
qui marque l’emp
lacement supposé
de sa maison natal

un
e.
Fig. 22 - Vue d'ensemble devant la croisée du transept - CdA

Le clo ch er 1 go
th iqu e da te du
14ème siècle et cons
titue le seul élé-
ment subsistant de la cathèdre A, du baptistère C.

Annotation du plan-masse de Jean-Marie DUTHILLEUL, in Espace et liturgie, op. cit., p. 76.


l’ancienne église ;

vaste
il abrite quatre clo
ches du 19ème et
début 20ème siècle.

Sacré-Cœur de Jésus qui le domine.

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Depuis la rue de l’É
glise, on peut aper-
cevoir sur le haut de
la
une statue représen façade latérale
tant saint Germain

s’élargit au chœur et à la grande fresque du


attraction vers le foyer F1. Cette attraction
l’autel en entrant dans la cathédrale crée une
deux espaces d’assemblée. La visibilité de
emmarchement pour la transition, et les
concélébrations autour de l’évêque, un large
déambulatoire, le grand autel apte aux
communiquant à grandes ouvertures vers le
chœur
l’espace du chœur, dans des dimensions
transition entre l’espace de l’assemblée et
Ce mobilier liturgique détermine la
la disposition de l’autel D, de l’ambon B, de
Le foyer F1 à l’entrée du chœur équilibre

6 bénissant sainte Ge
neviève, œuvre du
sculpteur Réal del
Sarte.
Ainsi l’espace des assemblées s’articule pleinement avec celui du chœur, chacun ayant une
forme de plénitude. Dans la large charnière de la transition entre ces deux espaces, formée par
l’axe transversal F1, les liturgies peuvent s’ordonner autour des mobiliers tels que le baptistère,
l’ambon, l’autel, la cathèdre.

Fig. 24 - Le baptistère
au pied du chœur,
conçu pour un rite de
passage solennel
CdA

Nous sommes référés au « peuple de Dieu » rassemblé et agissant en liturgie dans sa


diversité « fonctionnelle » (telle qu'exposée par Lumen Gentium)
Le rôle du deuxième foyer est tout autre. Il faut s’avancer jusqu’à lui, ce à quoi invite l’allée
centrale vers l’autel. Au fur et à mesure de l’avancée, le regard qui était appelé par la fresque
du Sacré-Cœur de Jésus, bascule vers le haut, et monte au centre de la croisée vers la « coupole
des anges » entourant un chrisme. Sur les piliers, vers le haut, des images en fresque illustrent
les huit paroles des Béatitudes proclamées par Jésus, chacune symbolisée par un saint.
Le système des deux foyers œuvre pour faire émerger une verticalité ascendante. La
proposition d’une rencontre avec Dieu est introduite, et le sujet des Béatitudes offre un relais
vers cette rencontre. Cette adhésion à Dieu, pour laquelle le visiteur sera mobilisé par le
déplacement de son regard, illustre la constitution du « Corps mystique du Christ ».
Les espaces latéraux
Cette organisation principale de l’espace est précisée par le traitement de sa périphérie selon
deux modalités : d’une part des espaces directement intégrés à l’espace principal qu’ils bordent
sans discontinuité, d’autre part des espaces autonomes au creux des angles de la croix latine.
Au titre des espaces intégrés, nous nommons : le fond du transept nord, le déambulatoire,
qui communique pleinement avec le chœur, le pignon-transept sud, formant une façade sur
laquelle s’appuie l’autel de la Vierge. Ils élargissent l’espace principal, mais c’est par leurs
motifs décoratifs, fresques en premier lieu, qu’ils proposent leurs fonctions singulières (nous

70 Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


en parlons au paragraphe C ci-après).
Au titre des espaces autonomes, nous nommons : la chapelle Sainte-Geneviève, qui accueille
la chasse des reliques de la sainte, et la chapelle Saint-Maurice.
Leur position en retrait est propice au recueillement, ce sont des lieux propres à la fonction
d’engendrement de l’Église. Comme pour les espaces intégrés, leurs rôles spécifiques sont
soutenus par leurs motifs décoratifs.
Bien entendu, la chapelle Sainte-Geneviève est dédiée à la dévotion envers la sainte, en
présence de la chasse. Les fresques représentent les grands passages de sa vie et les axes
d’édification qui en résultent.
La chapelle Saint-Maurice est dédiée au saint patron d’origine de la paroisse, qui partage
avec la sainte parisienne la titulature canonique de la cathédrale. C’est la mémoire des morts de
la grande guerre qui fonde le recueillement dans cette chapelle au nom d’un saint soldat.

C - Un ample programme de fresques et de vitraux


Ces fresques et vitraux contemporains couvrent en grand part l’intérieur du bâti, et
concourent, avec la coupole, à conférer un style romano-byzantin.
Le programme de fresques fut conçu par Paul Baudoüin, 1844-1931, fresquiste et mentor du
fresquisme. Il fut réalisé, selon les panneaux, par lui-même ou ses élèves, en collaboration avec
les maçons chargés des supports, qu’ils prirent souvent le soin de faire signer. Il s’agit d’une
beauté majeure de la cathédrale, en soi, et aussi parce que l’ensemble lui confère une
remarquable unité de style. La composition de l’espace, comme nous venons de l’exposer,
accroît l’expression de son sens par la disposition des fresques. Les vitraux ne peuvent être
dissociés des fresques avec lesquelles ils s’harmonisent selon chacun des pans de mur décorés
Outre les fresques déjà indiquées - la coupole des anges, les Béatitudes, le Christ en gloire
du fond de chœur -, trois ensembles majeurs retiennent l’attention : la translation de la chasse
de sainte Geneviève, les paraboles d’Évangile dans le déambulatoire, et le couronnement de la
Vierge.
Une thématique générale de ces fresques est la part que Dieu prend à la vie des hommes, soit
dans l’histoire, soit de façon contemporaine.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 71


Fig. 25 - La translation des reliques de sainte Geneviève - fresque de Paul Lemasson (1930)112

La fresque de la translation (transept nord) décrit, sur sa partie


droite, les miracles qui accompagnent ce convoi, au XIIe siècle.
La partie gauche aborde la question de la participation à la vie Les quatorze fresques du déambulatoire illustrent des paraboles de
publique, selon l’exemple de sainte Geneviève. Entre les évêques l’Évangile, qui toutes témoignent de la sollicitude de Dieu pour
d’entre les deux guerres qui présidèrent à la nouvelle translation, l’homme.
apparaissent les figures très politiques de Charles Maurras et de Léon
Daudet, en relation avec les thèmes de patriotisme ; la figure de
Maurras est barrée par une crosse d’évêque, en indication du problème
politique qu’il posait.

112
Photographie citée par BUET, Madeleine, DADOU, Hélène, JAVARY, Franck et al, Découvrir la Cathédrale Sainte-Geneviève de Nanterre, non paginée, Nanterre,
Paroisse Sainte-Geneviève, éditeur, 2017.

72 Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


L’autel de la vierge est surmonté d’une fresque représentant le couronnement de la Vierge.

Fig. 26 - Couronnement de la Vierge fresque de Paul Baudoüin et Louis Dussour (1930) - CdA
Autour de la fresque, le florilège des appellations invocationnelles de la Vierge : Mundi
Domina, Cœlorum Regina, Virgo virginum, Stella matutina, Plena gratia, Clara lux divina.
`
Une verrière simple et monumentale
domine cet autel et cette fresque en retable.

Fig. 27 - La verrière de la Vierge


Œuvre de Paul Baudoüin et Louis Dussour
CdA

Juillet 2023 – ISTA– Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 73


2.2. Synthèse théologique

Les intentions d’Église


Nous pouvons maintenant récapituler comment les trois principales figures d’architecture de
Sainte-Geneviève se réfèrent aux pôles intentionnels que nous avons attribués à l’architecture
d’église :
Images d’Église
comme sources Intentions pour le
Figures d’architecture
d’intentions lieu église
théologiques
Annonce à tous du A – Permanence historique
Reflet du Christ,
kérygme christique B – Insertion dans la cité, multi
lumière du monde
– Incarnation fonctionnalisme
B – Plan centré permettant une transition de
fresques illustratives du peuple de Dieu
Maison de Dieu,
Corps mystique du vers une élévation à Dieu par la coupole
présence
Christ centrale, surmontant l'évocation des
transcendantale
Béatitudes
B- C – Portail du buisson ardent
A - B - C – Mosaïque de la Jérusalem
Temple du Saint- Présence de Dieu céleste.
Esprit au monde A - B – Insertion étroite et fonctionnelle
dans l'espace urbain.
A - C – Fresques historiques de l'Évangile
et de la chrétienté
Assemblée des B – Valorisation du chœur comme espace
Peuple de Dieu fidèles en leur épiscopo-presbytéral
communauté Articulation du chœur et de l’assemblée.
A - B – Parvis itinéraire depuis le puits et la
chapelle de sainte Geneviève.
A - B – L’engendrement répété et inabouti
de l’édifice sur lui-même
C– Chapelle de la Vierge (verrière et
Engendrement et
retable d'invocation)
Mère et Vierge transformation
C – L'engendrement par les saints dans la
personnelle
progression de l'iconographie fresquiste
B – Le baptistère, en un lieu explicite d'un
rite de passage.

74 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Les accents théologiques : intercession, ascendance et inaboutissement

Dans la richesse des messages théologiques, il paraît possible de faire valoir particulièrement
ceux qui font référence à l’Église Peuple de Dieu, et ceux relatifs à l’Église Mère et Vierge.

L’Église Peuple de Dieu est manifestée primordialement par l’insertion dans l’histoire d’un
édifice maintes fois reconstruit. C’est aussi le fait de l’insertion géographique de l’édifice dans
la cité. C’est enfin le thème des fresques, qui retracent des thèmes où l’histoire humaine
rencontre Dieu, depuis la rencontre du buisson ardent, jusqu’à des événements contemporains
en passant par les récits des paraboles.

L’Église Mère et Vierge se manifeste dans les thèmes de l’auto-engendrement de l’édifice,


rebâti sur lui-même, et bien sûr dans la beauté particulière de l’ensemble de l’autel de la Vierge,
lieu à la fois ouvert et favorable au recueillement.

Le patronage de sainte Geneviève se rattache à l’une et l’autre de ces références d’Église :


Geneviève a suscité une vie du peuple de Dieu sous l’effet de sa puissante personnalité, et de
son action tout-à-la-fois de pouvoir, de service et de dévotion. Le type d’engendrement qu’elle
occasionne résulte d’un mode d’être, caractérisé par de sa capacité d’intercession, qui fut aussi
bien temporelle que spirituelle.
L’accent théologique qui se dégage à la suite de sainte Geneviève pourrait être nommé
« théologie de l’intercession »
Naturellement la rencontre personnelle de Dieu est l’objet premier de la démarche de foi. Ici
nous sommes renvoyés à la promotion de la rencontre dans un mode partagé, celle qui existe
quand un être devient le reflet d’un autre être. Spirituellement, nous pensons à une exposition
à Dieu qui permet d’en reconnaître le reflet dans chaque être ; et possiblement d’en vivre
activement, y compris en mettant dans sa vie et dans sa prière les attentes d’autrui. Autrement
dit, la vertu d’Espérance mise en commun.
C’est cette exposition qui est invoquée dans la cathédrale Sainte-Geneviève, par la
représentation des tribulations humaines, dans leur multiplicité et leur diversité, avec une place
particulière aux souffrances de la guerre. Ces tribulations son un moment de l’amour, quand
elles sont sources d’intercession. Par exemple, les fresques relatives à la grande guerre visent à
témoigner d’une situation de solidarité dans les souffrances partagées, en y voyant un
prolongement de la communion chrétienne.
Un autre accent est celui d’une « théologie ascendante et inaboutie ».
Tous les éléments signifiant le peuple de Dieu conjointement à la présence de Dieu au monde
structurent fortement l’horizontalité de l’architecture, multiple et très ouverte. Ces éléments

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 75


horizontaux sont repris dans une élévation, celle que proposent le portail dans sa hauteur, le
clocher, l’étagement du programme de fresques, depuis les plus horizontales du transept nord,
suivies de la verticalité des fresques du déambulatoire, et enfin celles qui montent vers la
coupole.
C’est également l’interruption de la construction qui est prégnante : elle se charge de sens
en elle-même puisque les solutions d’attente architecturale marquent aussi une attente
théologique. Le vaste porche, par exemple, aux dimensions de la nef absente, souligne en soi
un inaboutissement, comme il en est de la rencontre avec Dieu, évoquée par le bas-relief du
buisson ardent.

2.3. Le parcours de visite

Parcours extérieur
Le grand parvis est le lieu où le visiteur peut être mis en présence de l’insertion de la
cathédrale dans le tissu urbain ; de l’histoire du lieu, puisque les principales époques s’y
signalent, depuis l’ancien puits de sainte Geneviève jusqu’à la façade monumentale actuelle,
en passant par le clocher du XIVe siècle, et, à titre d’évocation, l’ancienne nef de l’église
classique qui occupait le parvis.
Concernant le parcours-même, le plus naturel est donc d’obéir à la temporalité historique et
de commencer par faire mémoire de sainte Geneviève avec le puits de son miracle. La chapelle
est un élément adjacent qui, comme tel, peut être visité sur le moment ou plus tard.
Le passage par le parvis vers la cathédrale permet ensuite d’en montrer la fonction de
transition, selon la triple polarité déjà évoquée. Le lien avec la cité profane est presque
osmotique, en tout cas non solennisé, au contraire du lien aux deux lieux religieux, l’espace de
sainte Geneviève et la cathédrale, annoncés par des plans monumentaux, celui de la mosaïque
de la Jérusalem céleste et celui grand portail du buisson ardent.
L’entrée usuelle par une porte latérale maintient le visiteur dans l’attitude du parcours
d’initiation.

Parcours intérieur
Cette entrée franchie, l’ensemble de l’espace et des volumes se déploie très vite, il suffit de
rejoindre l’axe central, où l’on est mis devant la large ouverture du chœur.
L’effet de monumentalité prédomine et s’amplifie où que les pas s’avancent. Par exemple,
nous avons signalé le basculement de la vision, qui remonte vers le haut quand on s’approche
de la croisée du transept.
Cette configuration autorise différentes formes de déambulations, qu’il est intéressant de

76 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


laisser se faire, pour que le visiteur éprouve l’aspiration par laquelle il s’approche du centre de
l’édifice, dans une spirale centripète, dans une logique « d’entonnoir » ou de vortex.
Il est toutefois possible de guider cette
spirale et c’est le rôle que le programme de
Fresques des paraboles
C
fresques peut jouer, de façon presque
impérative d’ailleurs.
Il est logique de le suivre en commençant
par les deux fresques du transept nord,
Chapelle Saint- C
dédiées à sainte Geneviève ; leur Maurice

B
« programme de sainteté », avec la richesse

Fresque de la translation
B Autel de
de ses fondements historiques, peut la Vierge
C C
permettre d'expliciter le rôle de femmes et B

hommes de foi dans la construction des


sociétés humaines. C
Chasse de sainte
On continue par les fresques d'Évangile Geneviève

dans le déambulatoire (sens des aiguilles


d'une montre) qui remontent aux
fondements de la Révélation chrétienne. A B
C Mosaïque
Jérusalem céleste

Fig. 28 - Circuit de visite de l'intérieur de la


cathédrale113
Puis l'autel de la Vierge (ouverture du transept sud, vitrail du rosaire) est l'occasion de
découvrir une fresque très spirituelle, représentant le couronnement de la vierge, et la façon
dont elle se lie avec la grande verrière vitraillée qui raconte la vie de la Vierge.
Quand on revient devant le chœur, ses fonctions liturgiques apparaissent explicites par sa
vaste géométrie, sa relation très ouverte avec l'espace général, le lieu du baptistère à mi-
distance.
Cette déambulation induite par l'architecture elle-même nous remet au centre de l'édifice et
nous permet de lever les yeux vers la « coupole des anges » entourant un chrisme. Sur les piliers
des images en fresque illustrent les paroles des Béatitudes. Ainsi le parcours dans une
horizontalité qui s’est cherchée se termine dans une verticalité toute naturelle, les Béatitudes
paraissant les grands termes d’une « théologie ascensionnelle ».

113
Schéma de l’auteur.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 77


3. Récapitulation comparative
Nous rapprochons ces descriptions théologiques des deux églises selon leur architecture, et
les compréhensions qui en viennent par les parcours de visite.

3.1. La signification dépasse le style architectural


Après avoir identifié les figures d’architecture des deux églises, Sainte-Marguerite et Sainte-
Geneviève, nous remarquons leur forte personnalité, à l’une comme l’autre. Chacune peut être
considérée comme plutôt originale ; aucune d’entre elles ne pourrait être citée comme
illustrative d’un style architectural donné.
En termes de style, leurs visées architecturales respectives sont orientées à créer des espaces
fonctionnels, dans la « noble simplicité » préconisée par le magistère à partir de la deuxième
partie du XIXe siècle ; ce fut l’époque des églises « néo », caractérisées sommairement par
l’installation de vastes espaces liturgiques au sein de bâtis de tels ou tels styles, au gré de modes
diverses, dont les variétés étaient permises par la nouvelle richesse des procédés de
construction.
Sainte-Marguerite est néo-classique, Sainte-Geneviève est néo-byzantine, chacune comme
un certain nombre de leurs contemporaines. Mais les choix quasi-expérimentaux de techniques
de construction pour l’une, ou bien la construction inaboutie pour l’autre, confèrent à toutes
deux un caractère composite, et finalement en font des édifices attirants par leur originalité.
Il est probable que la compréhension théologique d’une église archétypique, de style
gothique ou baroque par exemple, passerait par une lecture plus générale des significations de
leur style.
Au cas particulier, nous avons eu la chance de découvrir d’un côté une église d’urbanisme
et de théologie catéchétique, de l’autre une riche spiritualité induite par la profusion des
références théologiques.
Un enseignement à en tirer est que la compréhension théologique d’une architecture ne passe
pas par le seul canal de son « style ». Et de façon plus générale, ces églises confirment la
richesse performative de l’architecture, par elle-même.

3.2. L’apport de la perception


Notre approche s’est fondée sur la recherche de quelques significations théologiques
essentielles, par une « lecture » des figures d’architecture. Au sein de cette méthode
« analytique », la « lecture » des figures d’architecture l’était également, dès lors qu’elle
disséquait les espaces, nommait les styles des peintures et leurs motifs, etc.
Pour autant, le rôle de la perception en elle-même prend une grande part. C’est elle qui nous

78 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


a conduits à hiérarchiser les composantes architecturales pour dessiner les figures
d’architecture, c’est elle qui nous a indiqué les hiérarchies spatiales, traduites finalement par le
parcours de visite.
Nous retrouvons ainsi que l’architecture est bien un langage artistique. Dans la mesure où la
perception contribue à la compréhension des figures d’architecture, la performativité du
langage d’architecture prend un caractère d’autonomie par rapport à des significations parentes
tributaires d’expressions plus rationnelles, plus discursives.
Nous complétons la conclusion précédente en reliant la singularité performative du langage
d’architecture au rôle spécifique de la perception, et en lui attribuant une autonomie dans les
compréhensions qu’il offre, distinctes de celles des messages parlés en consonnance.

3.3. Parcours
La configuration des parcours dit aussi beaucoup des accents théologiques qui les inspirent,
avec les types d’initiation sous-jacents.
Ainsi, le parcours de visite axial de Sainte-Marguerite met en valeur son accent de
« théologie pédagogique », par l’approche géométrique du lieu.
Pour Saint-Geneviève, le parcours en spirale centripète, le long des fresques, se fonde sur la
progressivité, et l’empathie, dans cette modalité de théologie de l’intercession qui débouche sur
une ascendance. Cette progression favorise une compréhension spirituelle du lieu.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 79


CONCLUSION

1. Récapitulation
A partir de l’expérience de guide de visite d’église, nous posions une question générale :
Comment le kérygme s’exprime-t-il dans le langage d'architecture des églises ?
Elle était suivie de sa corollaire :
Comment amener les visiteurs à une compréhension de cette expression ?
par laquelle on visait spécialement le public profane, celui qui n’est pas censé disposer des
« lumières de la foi » pour cette compréhension.

Avec les notions de « figure d’architecture » et « d’accent théologique », qu’il s’agissait de


préciser, nous avons avancé une hypothèse qui devait éclairer ces deux questions :
L’architecture, par les « figures » qui la composent, rend compte de ces accents
théologiques ; autrement dit, il y a des consonnances entre des accents théologiques de la foi
exprimée et l’architecture de l’église.
L’éclairage recherché était la définition d’une voie de compréhension qui progresse de
l’architecture, comprise en soi – la notion de figure avec sa portée sémiotique –, vers les
significations théologiques. Ensuite, un guide pourrait baliser cette voie, pour y accompagner
des visiteurs.

1.1. Une voie de compréhension


Dans la première partie – le kérygme comme source, l’architecture comme chemin –, nous
avons caractérisé cette voie de compréhension de l’architecture d’église en relation avec
l’annonce chrétienne en direction du public profane.
Nous sommes partis de la référence théologique, l’annonce chrétienne désignée
génériquement comme « kérygme ». Ce kérygme se déploie dans le processus global de la
Révélation, en premier lieu dans le mode de communication qu’est la parole. Cette parole
s’enrichit, se démultiplie, et le message kérygmatique central – le témoignage du Christ et des
sa résurrection – s’exprime accompagné de messages secondaires, qui concourent à sa meilleure
compréhension, pour engager les destinataires sur des voies de conversion et de sainteté. A

80 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


propos des tonalités que prend le kérygme, nous parlons d’accents théologiques.
Par rapport à cette annonce en parole, le rôle de la médiation d’architecture est initialement
plus délimité dans les Ecritures. Il prend de l’amplitude dans l’Évangile et dans la théologie de
saint Paul, qui affirme notamment : « le temple de Dieu est saint et ce temple, c'est vous »
(1 Co 3, 16-17). L’analogie entre des sanctuaires et les personnes physiques, temples de Dieu,
situe de fait l’architecture d’église comme lieu de médiation.
Mais comment passer du lieu au langage ? de la spatialité à la temporalité ? c’est la suite de
notre recherche, qui s’est référée à Paul Ricœur et Christian Norberg-Schulz ; Ricœur pour
désigner les « lieux » et espaces constitutifs de l’architecture comme des espaces fixes et
atemporels ouverts à l’inscription de multiples récits, Norberg-Schulz pour une grammaire du
langage d’architecture inscrit dans les formes et les espaces. La grammaire proposée est
structurée autour de la notion « d’intention », comme source de la communication portée par
ce langage, et celle de « figures », les formes dans lesquelles s’inscrivent les intentions, soit
comme fonctions, soit comme symboles. La hiérarchie des significations de ce langage s’étage
à partir des fonctions et symboles, réunies en figures, pour remonter aux « intentions » dont
elles sont tributaires. Nous remarquons un étagement analogue dans les quatre sens des
Écritures, du littéral à l’anagogique, ce dernier niveau s’apparentant à celui des intentions
d’architecture.
Il en résulte une forme de paradoxe : dans le référentiel des temporalités il n’y a pas de lien
univoque entre les significations du langage parlé et celles du langage d’architecture ; tandis
que dans celui des spatialités, il est possible d’établir des correspondances, à lire dans les figures
d’architecture. Sur elles, nous pouvions nous appuyer, en recherchant des intentions. Nous
prenions le parti de repérer les intentions théologiques sur l’identité et le rôle de l’Église, celles
fournies par les images employées par Lumen Gentium (le corps mystique du Christ, le temple
de l’Esprit, le peuple de Dieu…).
L’étape suivante était celle de la réceptivité comparée des deux langages, dans la perspective
de « lire » le langage d’architecture. Comme pour beaucoup de langages artistiques, la notion
de perception y est importante. L’impact de sens que crée la simultanéité des perceptions fait
que l’architecture a une faculté d’évocation de la transcendance. Si la lecture effective de
l’architecture d’église passe par un repérage des intentions théologiques dans les figures
d’architecture, ceci se complète par l’accueil des effets plus esthétiques, pour entrer dans une
lecture spirituelle.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 81


1.2. La performativité propre du langage d’architetcture
Dans la seconde partie, nous avons donné une traduction pratique aux différentes étapes du
chemin de compréhension que nous venions de baliser, en y soumettant des cas d’école, celui
de deux églises, assez différentes dans leur inspiration, même si chacune peut être qualifiée de
contemporaine. Nous y avons reconnu successivement des figures d’architecture, les intentions
théologiques qu’elles révèlent, des accents théologiques en synthèse, pour en proposer une
lecture appliquée de ces figures, « expliquées » en un parcours de visite.
Par cette exposition à la personnalité architecturale de ces deux églises, la performativité
propre du langage d’architecture s’est affirmée.
L’exemple de la cathédrale Sainte-Geneviève est démonstratif des associations que permet
ce langage dans ses simultanéités : au centre de l’édifice, le regard peut basculer des grandes
fresques périphériques vers le chrisme de la coupole, et une théologie horizontale du peuple de
Dieu est associée à une ascendance. Au même moment, au même endroit, l’intériorité et le
rayonnement que propage l’autel de la vierge, sa fresque du couronnement et son vitrail,
emmènent dans une disposition spirituelle d’engendrement, tandis que le portail qui annonce
une possibilité de nef dit une spiritualité de l’attente.
C’est à ce propos que nous pouvons évoquer la fécondité croisée entre l’annonce parlée et
le langage d’architecture. Les significations qu’un langage conceptuel énonce séparément,
articule logiquement, peuvent se trouver directement unis dans l’architecture et prendre des
effets conjoints.

2. Fécondités croisées

2.1. Au-delà du kérygme, la médiation


Cette performativité et ces fécondités ne demandent qu’à amplifier leurs effets si on les
considère au-delà de la perspective de notre étude, limitée à un kérygme à l’usage de visiteurs
profanes.
Tout en poursuivant notre recherche dans l’axe de notre questionnement, nous avons vu
s‘ouvrir des questions latérales, dont nous devions suspendre l’examen, même si elles étaient
loin d’être secondaires.
Ainsi, il est apparu que les édifices d’église, les temples qui servent de modèle à l’âme
chrétienne selon saint Paul, avaient vocation à être des lieux de médiation de la relation à Dieu,
d’une façon générale, l’annonce kérygmatique n’en étant qu’une modalité. Nous notions dans

82 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Sacrosanctum Concilium114: « … l’annonce du Kérygme du salut aux non-croyants [s’exerce
en complément ]… de la liturgie [qui] n’est pas l’unique activité́ de l’Église ».
Ceci induit bien évidemment que l’expression d’architecture prendra aussi bien son sens
dans les liturgies que dans une annonce préalable.
Et aussi, puisque le langage d’architecture est propice à l’évocation de la transcendance,
nous remarquons que les rôles mystiques que peut jouer une église font partie du champ de la
médiation auquel se dédie son architecture.

2.2. La liturgie, en risque d’angle mort de l’expérience des visiteurs, ou


objet d’une nouvelle fécondité ?
À propos de la liturgie, un élargissement du regard serait possible, voire nécessaire.
La dualité kérygme-liturgie, citée par Sacrosanctum Concilium, a tendance à recouvrir aune
autre dualité, qui empêche de comprendre la complémentarité de ces deux termes, que nous
pourrions mieux réunir dans l’architecture. La dualité critique est celle de l’enfermement de
l’édifice d’église dans la formule « lieu de culte », avec son inconvénient de suggérer, voire
d’imposer une délimitation du rôle du bâtiment entre l’extérieur, lieu public, et l’intérieur, lieu
du culte, et donc de laisser croire que son rôle est de confiner la liturgie en ses espaces intérieurs.
A l’opposé, il faudrait proposer une compréhension plus vaste de l’architecture, tant
extérieure qu’intérieure ou dans la relation de ces deux spatialités. Cette compréhension
holistique induit que le parcours de visite puisse donner sa pleine valeur à la liturgie en tant
qu’explication de l’église, tant extérieurement qu’intérieurement. Le parcours devrait jouer un
rôle d’introduction à la vie de l’église, et donc de l’Église ; c’est-à-dire jusqu’à en faire, pour
les visiteurs, le moment d’une initiation adaptée à la liturgie.
Or nous tombons sur l’obstacle d’une vision réductrice du culte, trop systématiquement
opposé à la culture, selon des formules du type : « l’église a un rôle cultuel avant que d’être
culturel », à propos des visites culturelles d’église en concurrence avec des célébrations
liturgiques. Sur ce sujet, bien entendu, il y a des questions d’administration pratique des lieux
et des temps. Mais maintenant que nous sommes convaincus que la découverte d’une
architecture d’église, avec l’admiration qui l’accompagne, fait intrinsèquement partie du
processus de compréhension du kérygme, ne faut-il pas admettre qu’elle puisse être un acte
propédeutique du culte ? aussi préliminaire qu’on puisse le considérer. Et d’ailleurs faut-il être
baptisé pour participer au culte ? Aussi nous pensons qu’il ne faut pas essentialiser la question

114114

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 83


d’une opposition du culte et de la culture, alors que l’une mène à l’autre, selon différentes
fécondités.
En réalité, il faudrait que les visiteurs d’architecture puissent comprendre concrètement ce
qu’est une liturgie en église, tant du point de vue de leur culture architecturale, que de leur accès
au kérygme. Une conclusion pratique serait que l’expérience de visite d’architecture permette
aux non-croyants de toucher de près ce qu’est la liturgie d’église, que des visites guidées
organisées en recouvrement temporel des offices religieux peuvent avoir leur sens. Les plus
grandes basiliques s’y résolvent de fait. Pour les églises moins grandes ou petites, il y aurait du
sens à programmer des visites en séquence directe avec les temps de liturgie.

2.3. Fécondité spirituelle


En nous référant à Evangelii Gaudium pour situer le kérygme chrétien dans la perspective
du salut, sa fécondité spirituelle nous était indiquée : la joie de l’Évangile, par les multiples
voies du salut.
L’architecture d’église, propice à l’évocation de la transcendance, participe en soi aux
chemins du salut. Elle propose l’accès roboratif aux fondements de l’être profond que
recherchent des visiteurs du patrimoine, pour eux-mêmes ou pour faire société, dans un contexte
où les goûts culturels sont encouragés.
Cette conjonction d’une proposition et d’une attente, c’est l’opportunité d’une fécondité.
L’organisation de la présentation de nos églises pourrait faire partie d’une pastorale
ordinaire, qui unirait kérygme d’évangélisation et approfondissement catéchétique. Si la
mission des guides chrétiens était définie de ce point de vue, il s’agirait probablement de
l’esquisse d’un sacramental.

84 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


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Fiche de la base Mérimée.
Dossier de presse de l'inauguration de la cathédrale rénovée et réaménagée, 2013.
Messe d’inauguration en 2013, URL : https ://youtu.be/BnlmHN2CClQ
Visite vidéo virtuelle, URL : https ://www.cathedrale-sainte-genevieve.fr/visiter/visite-virtuelle-
cathedrale-Sainte-Genevieve-nanterre
Théologie générale, philosophie, herméneutique, anthropologie

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Sources scripturaires pour les citations

En français (sauf mention particulière) : Traduction œcuménique de la Bible, Paris, Cerf,


1991 (nouvelle édition revue).
En grec et en latin (synopsis conjointe avec l’hébreu, le français) : La sainte Bible
polyglotte de Fulcran VIGOUROUX, Paris, Roger et Chernoviz, 1908.

90 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Nota 1 : les citations des Écritures incorporées dans une citation autonome (textes
théologiques ou autres) sont données dans la version de la citation-support.
Nota 2 : le site Internet www.4evangiles.fr a permis de comparer rapidement différentes
traductions en français des quatre évangiles.
Nota 3 : les traductions en français ont été vérifiées avec les dictionnaires de langue :
Anatole BAILLY Grec-Français, Paris, Hachette, 1895.
Félix GAFFIOT Latin-Français, Paris, Hachette, 1935.
Magistère
Textes (par ancienneté)

Pape PIE XI, Lettre Encyclique Maximam gravissimamque, sur les associations
diocésaines, in Fonds historique de l’Assemblée Nationale, 1924.
URL : https ://www.assemblee-nationale.fr/histoire/eglise-etat/Pie-XI_Maximam-
gravissimamque_18011924.asp
Pape PIE XII, Lettre encyclique Mystici Corporis Christi, sur le Corps Mystique de Jésus-
Christ et notre union en Lui avec le Christ, Paris, Bonne Presse, 1943.
Pape PAUL VI, Constitution dogmatique sur l'Église Lumen Gentium, in Concile
œcuménique Vatican II, constitutions, décrets, déclarations, messages, Paris,
Centurion, 1967, p. 13-122.
Pape PAUL VI, Constitution dogmatique sur la révélation divine Dei Verbum, in Concile
œcuménique Vatican II, constitutions, décrets, déclarations, messages, Ibid., p. 123-
146.
Pape PAUL VI, Constitution sur la Sainte Liturgie Sacrosanctum Concilium, in Concile
œcuménique Vatican II, constitutions, décrets, déclarations, messages, Ibid., p. 147-
205.
Pape PAUL VI, Constitution pastorale sur l'Église dans le monde de ce temps Gaudium et
Spes, in Concile œcuménique Vatican II, constitutions, décrets, déclarations,
messages, Ibid., p. 207-348.
Pape PAUL VI, Décret sur l'activité́ missionnaire de l'Église Ad Gentes, in Concile
œcuménique Vatican II, constitutions, décrets, déclarations, messages, Ibid., p. 537-
602.
Pape PAUL VI, Décret sur l'œcuménisme Unitatis Redintegratio, in Concile œcuménique
Vatican II, constitutions, décrets, déclarations, messages, Ibid., p. 603-634.
Pape PAUL VI, Evangelii Nuntiandi Exhortation apostolique sur l’évangélisation dans le
monde moderne, Paris, Téqui, 1975.
Pape JEAN-PAUL II, Duodecimum Saeculum, Lettre Apostolique pour le 12ème Centenaire du
II ème Concile de Nicée, 1987.
Pape JEAN-PAUL II, Redemptoris Missio, Lettre encyclique sur la valeur permanente du
précepte missionnaire, Paris, Téqui, 1990.
Pape JEAN-PAUL II, Constitution apostolique Fidei Depositum, pour la publication de
Catéchisme de l’Église Catholique, rédigé à la suite du deuxième concile œcuménique
Vatican, 1992.
Catéchisme de l’Église Catholique, Paris, Mame / Plon, 1992.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 91


Pape JEAN-PAUL II, Lettre encyclique Fides et Ratio sur les rapports entre la foi et la raison,
Paris, Téqui, 1998.
Pape JEAN-PAUL II, Lettre du pape Jean-Paul II aux artistes, à tous ceux qui, avec un
dévouement passionné, cherchent de nouvelles « épiphanies » de la beauté pour en
faire don au monde dans la création artistique, Paris, Téqui, 1999.
Pape FRANÇOIS, Evangelii Gaudium, Exhortation apostolique sur l'annonce de l'Évangile
dans le monde d'aujourd'hui, Paris, Perpignan, Artège, 2013.
Pape FRANÇOIS, Veritatis Gaudium, Constitution apostolique sur les universités
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le monde actuel, Perpignan, Artège, 2018.

Commentaires

de MOULINS-BEAUFORT, Éric, « Les déplacements et les accentuations voulus par le concile


Vatican II », Revue d'éthique et de théologie morale n°272, p. 9-37, Paris, Cerf,
2012/4.
Autres sources
Iconographie

Sauf mention en note, les photographies sont des documents personnels, avec mention CdA
(cliché de l’auteur).
Les plans topographiques et images aériennes sont tirés du « Fond cartographique proposé
par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) », édité sur le
géoportail Internet, URL : www.geoportail.gouv.fr.

Visites guidées d’église

Basiliques et églises romaines, en octobre 2019 (guides : Sandrine Aye et père Romuald
Fresnais)
Saint-Pierre, Sainte-Marie-Majeure,
Saint-Clément, Saint-Jean-de-Latran,
Saint-Louis-des-Français, Saint-Paul-hors-les-Murs.
Églises franciliennes (par ancienneté de la visite)
Notre-Dame de l’Arche d’Alliance, à Saint-Louis-de-Gonzague, chapelle du
Paris, collège jésuite, à Paris,
Saint-Gervais - Saint-Protais, à Paris, Saint-François de Molitor, à Paris,
Saint-Ignace, à Paris, Saint-Ambroise, à Paris,
Saint-Léger, à Saint-Germain-en-Laye, Saint-Honoré d'Eylau, à Paris,
Sainte-Thérèse, à Chatou, Saint-Sulpice, à Paris.
Saint-Germain, à Saint-Germain-en-
Laye,

92 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


Églises bretonnes
Abbatiale Saint-Gildas de Rhuys, Chapelle Saint-Avoye, à Pluneret,
Saint-Pie X, à Vannes, Chapelle Saint-Quirin, à Blech,
Cathédrale Saint-Pierre, à Vannes, Sainte-Radegonde, à Riantec.
Hors classement
Cathédrale Sainte-Geneviève et Saint-Maurice, à Nanterre,
Sainte-Marguerite, au Vésinet.
TABLE DES ILLUSTRATIONS

Fig. 1 - Diachronie conjointe de la Révélation et du kérygme ................................................. 20


Fig. 2 - Façade de l'église Sainte-Marguerite CdA .................................................................. 48
Fig. 3 – Le Vésinet – Centre-ville ............................................................................................ 49
Fig. 4 - Dessin projet de L-A Boileau ...................................................................................... 50
Fig. 5 - Plan de l’église (1903) ................................................................................................. 52
Fig. 7 - Dessin de Francesco di Giorgio ................................................................................... 52
Fig. 8 - Une nef ample, claire, basilico-rectangulaire .............................................................. 53
Fig. 9 - Les vitraux de la nef nord et sud, i.e. à droite et à gauche, le chœur est à gauche ...... 54
Fig. 10 - Les vitraux du chœur (à l'occident) ........................................................................... 56
Fig. 11 - La chapelle de la Vierge ............................................................................................ 57
Fig. 12 - La voûte de la chapelle du Sacré-Cœur ..................................................................... 57
Fig. 13 - L’annonciation ....................................................................................................... 58
Fig. 14 - La fontaine d’eau vive ............................................................................................... 58
Fig. 15 - La guérison des malades ............................................................................................ 58
Fig. 16 - Parcours de visite ....................................................................................................... 60
Fig. 17 - Façade de la cathédrale Sainte-Geneviève - CdA ..................................................... 62
Fig. 18 - Projet de Georges Pradelle ........................................................................................ 63
Fig. 19 - La cathédrale et son grand parvis .............................................................................. 66
Fig. 20 - Le puits de sainte Geneviève ..................................................................................... 67
Fig. 21 - Mosaïque de la Jérusalem céleste .............................................................................. 67
Fig. 22 - Portail monumental en métal et en verre – œuvre de Pierre Sabatier - CdA ............. 68
Fig. 23 - Vue d'ensemble devant la croisée du transept - CdA ................................................ 69
Fig. 24 - Plan-masse : deux axes transversaux et deux foyers ................................................. 69
Fig. 25 - Le baptistère .............................................................................................................. 70
Fig. 26 - La translation des reliques de sainte Geneviève - fresque de Paul Lemasson (1930)72
Fig. 27 - Couronnement de la Vierge - fresque de Paul Baudoüin et Louis Dussour (1930) .. 73
Fig. 28 - La verrière de la Vierge, ............................................................................................ 73
Fig. 29 - Circuit de visite de l'intérieur de la cathédrale .......................................................... 77
Fig. 30 - Plan masse de la colonie du Vésinet, à l’état de projet, vers 1860 .......................... 100
Fig. 31 – Disposition des vitraux dans l’église Sainte-Marguerite ........................................ 101

94 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


ANNEXES
1. Kérygmes des saints Apôtres
Saint Pierre, le jour de la Pentecôte (Ac 2, 14-40)
14
Alors s'éleva la voix de Pierre, qui était là avec les Onze ; il s'exprima en ces termes :
« Hommes de Judée, et vous tous qui résidez à Jérusalem, comprenez bien ce qui se passe et
prêtez l'oreille à mes paroles. 15 Non, ces gens n'ont pas bu comme vous le supposez : nous ne
sommes en effet qu'à neuf heures du matin ; 16 mais ici se réalise cette parole du prophète Joël
: 17 Alors, dans les derniers jours, dit Dieu, je répandrai de mon Esprit sur toute chair, vos fils
et vos filles seront prophètes, vos jeunes gens auront des visions, vos vieillards auront des
songes, 18 oui, sur mes serviteurs et sur mes servantes en ces jours-là je répandrai de mon Esprit
et ils seront prophètes. 19 Je ferai des prodiges là-haut dans le ciel et des signes ici-bas sur la
terre, du sang, du feu et une colonne de fumée. 20 Le soleil se changera en ténèbres et la lune en
sang avant que vienne le jour du Seigneur, grand et glorieux. 21 Alors quiconque invoquera le
nom du Seigneur sera sauvé. 22 Israélites, écoutez mes paroles : Jésus le Nazaréen, homme que
Dieu avait accrédité auprès de vous en opérant par lui des miracles, des prodiges et des signes
au milieu de vous, comme vous le savez, 23 cet homme, selon le plan bien arrêté par Dieu dans
sa prescience, vous l'avez livré et supprimé en le faisant crucifier par la main des impies ; 2 mais
Dieu l'a ressuscité en le délivrant des douleurs de la mort, car il n'était pas possible que la mort
le retienne en son pouvoir. 25 David en effet dit de lui : Je voyais constamment le Seigneur
devant moi, car il est à ma droite pour que je ne sois pas ébranlé. 26 Aussi mon cœur était-il dans
la joie et ma langue a chanté d'allégresse. Bien mieux, ma chair reposera dans l'espérance, 27car
tu n'abandonneras pas ma vie au séjour des morts et tu ne laisseras pas ton saint connaître la
décomposition. 28 Tu m'as montré les chemins de la vie, tu me rempliras de joie par ta présence.
29
« Frères, il est permis de vous le dire avec assurance : le patriarche David est mort, il a été
enseveli, son tombeau se trouve encore aujourd'hui chez nous. 2 juins il était prophète et savait
que Dieu lui avait juré par serment de faire asseoir sur son trône quelqu'un de sa descendance,
issu de ses reins ; 31 il a donc vu d'avance la résurrection du Christ et c'est à son propos qu'il a
dit : il n'a pas été abandonné au séjour des morts et sa chair n'a pas connu la décomposition.
32
Ce Jésus, Dieu l'a ressuscité, nous tous en sommes témoins. 33 Exalté par la droite de Dieu,
il a donc reçu du Père l'Esprit Saint promis et il l'a répandu, comme vous le voyez et l'entendez.
34
David, qui n'est certes pas monté au ciel, a pourtant dit : Le Seigneur a dit à mon Seigneur :
assieds-toi à ma droite 35 jusqu'à ce que j'aie fait de tes adversaires un escabeau sous tes pieds.
36
« Que toute la maison d'Israël le sache donc avec certitude : Dieu l'a fait et Seigneur et Christ,
ce Jésus que vous, vous aviez crucifié. »
37
Le cœur bouleversé d'entendre ces paroles, ils demandèrent à Pierre et aux autres apôtres
: « Que ferons-nous, frères ? » 38 Pierre leur répondit : « Convertissez-vous : que chacun de
vous reçoive le baptême au nom de Jésus Christ pour le pardon de ses péchés, et vous recevrez
le don du Saint Esprit. 39 Car c'est à vous qu'est destinée la promesse, et à vos enfants ainsi qu'à
tous ceux qui sont au loin, aussi nombreux que le Seigneur notre Dieu les appellera. » 40 Par
bien d'autres paroles Pierre rendait témoignage et les encourageait : « Sauvez-vous, disait-il, de
cette génération dévoyée. »
Saint Paul (1 Eph 15, 3-8)
3
Je vous ai transmis en premier lieu ce que j'avais reçu moi-même : Christ est mort pour nos
péchés, selon les Écritures. 4 Il a été enseveli, il est ressuscité le troisième jour, selon les
Écritures. 5 il est apparu à Céphas, puis aux Douze. 6 Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents
frères à la fois ; la plupart sont encore vivants et quelques-uns sont morts. 7 Ensuite, il est apparu
à Jacques, puis à tous les apôtres 8 En tout dernier lieu, il m'est aussi apparu, à moi l'avorton.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 95


2. Le but de l'architecture – Selon Christian Norberg-Schulz, in « Système
logique de l’architecture », p. 260-261.
Le but de l'architecture a été décrit largement dans le chapitre consacré à la tâche de la
construction. Terminons par quelques remarques touchant son rôle culturel en général. On a vu
que l'architecture poursuivait un objectif pratique (instrumental) aussi bien qu'un but artistique.
Elle concrétise un complexe de pôles divers où sont compris les objets (valeurs) culturels. Elle
est aussi caractéristique parce qu'elle concrétise de nouveaux objets intermédiaires qui
réagissent sur la société. L'architecture est donc à la fois un « outil » pratique et un système
symbolique. Nous avons tenté d'exposer cet état de choses en définissant les dimensions
essentielles à la totalité architecturale.
Que l'architecture soit à la fois instrumentale et artistique signifie que son objectif comprend
des composantes cognitives, cathectiques et évaluatives. L'architecture n'est pas purement
cognitive puisqu'elle ne nous transmet pas la connaissance bien qu'elle contribue à ordonner
notre environnement. Elle n'est pas purement cathectique parce qu'elle ne nous procure pas le
divertissement, et pourtant elle est une source de joie et de mécontentement. Elle n'est pas non
plus évaluative parce qu'elle ne nous prescrit pas de règles de conduite et cependant elle révèle
des normes sociales et culturelles. L'architecture est en tout cas quelque chose de « plus » qu'un
outil purement pratique et ce « plus » est essentiel pour la vie humaine. C'est pourquoi
l'architecture forme une partie importante de notre environnement.
L'architecture constitue explicitement une « activité synthétique » qui doit s'adapter à la
forme de vie en tant qu'ensemble. Cette adaptation n'exige pas que toutes les œuvres soient liées
à tout l'ensemble. L'œuvre individuelle concrétise des ensembles secondaires mais, parce qu'elle
appartient à un système architectural, elle participe cependant à une concrétisation complète.
Les nouvelles concrétisations ne peuvent ni imiter le passé ni rompre avec la tradition.
Elles dépendent de l’existence de systèmes de symboles susceptibles de développement, ce
qui implique que nous devons conserver de la tradition non les motifs mais plutôt les principes
structuraux. La forme articulée permet à l’architecture de transcender son aspect purement
pratique.
La « forme » désigne en principe l'adaptation à un contexte plus vaste.
L'informe est sans adaptabilité parce qu'il manque de propriétés définissables. La forme
devient plus ou moins complexe selon la tâche et il faut, pour la décrire, utiliser un nombre
diversifié de mesures de comparaison. Nous devrions répéter que tous les aspects de la tâche se
présentent simultanément. Même l'aspect économique ne devrait pas être considéré séparément
comme il l'est si souvent. Le jugement économique dépend de la justesse de la définition de la
tâche de la construction. C'est seulement quand une solution est réelle que nous pouvons
analyser son aspect économique. On accepte souvent de nos jours d'apparentes solutions qui
servent de mesures de comparaison pour des solutions plus coûteuses mais réelles.
Étant donné que la solution architecturale est déterminée par des pôles pris parmi toutes les
catégories fondamentales d'objets, l'architecture est restée synthétique au cours de l'histoire. Ce
n'est que récemment qu'on a tenté de spécialiser l'architecture en la réduisant à une simple
activité pratique. Il n’est pas facile ni de comprendre ni de pratiquer une activité synthétique en
période d'intense spécialisation. Mais nous avons vu que les activités synthétiques
concrétisantes [ sic ] étaient essentielles à l'interaction et au développement culturel. Le fait que
nous désirons préserver le caractère synthétique de l'architecture ne signifie pas que nous ne
devons pas acquérir une connaissance poussée de ses composantes. Cette connaissance ne peut
s'acquérir que sur la base d'une théorie intégrée de l'architecture. Une fois la connaissance
complétée par une formation adéquate touchant la création et la perception de l'architecture,
nous pouvons atteindre notre objectif : un environnement ordonné de façon plus satisfaisante.

96 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


3. Significations et perceptions en architecture dans l’œuvre de
Christian Norberg-Schulz – Selon le résumé figurant au début de la thèse de Ph.
D. de Nazlie Michel Asso, Faculté́ des études supérieures, Université́ de Montréal, 2010.

L’architecture au sens strict, qui renvoie à la construction, n’est pas indépendante des
déterminations mentales, des images et des valeurs esthétiques, comme références, amenées
par divers champs d’intérêt au problème du sens. Elle est, de par ce fait, un objet
d’interprétation. Ce qu’on appelle communément « signification architecturale », est un univers
vaste dans lequel sont constellées des constructions hypothétiques. En ce qui nous concerne, il
s’agit non seulement de mouler la signification architecturale selon un cadre et des matières
spécifiques de référence, mais aussi, de voir de près la relation de cette question avec l’attitude
de perception de l’homme. Dans l’étude de la signification architecturale, on ne peut donc se
détacher du problème de la perception. Au fond, notre travail montrera leur interaction, les
moyens de sa mise en œuvre et ce qui est en jeu selon les pratiques théoriques qui la
commandent.
En posant la question de l’origine de l’acte de perception, qui n’est ni un simple acte de voir,
ni un acte contemplatif, mais une forme d’interaction active avec la forme architecturale ou la
forme d’art en général, on trouve dans les écrits de l’historien Christian Norberg-Schulz deux
types de travaux, et donc deux types de réponses dont nous pouvons d’emblée souligner le
caractère antinomique l’une par rapport à l’autre. C’est qu’il traite, dans le premier livre qu’il a
écrit, Intentions in architecture (1962), connu dans sa version française sous le titre Système
logique de l’architecture (1974, ci-après SLA), de l’expression architecturale et des modes de
vie en société comme un continuum, défendant ainsi une approche culturelle de la question en
jeu : la signification architecturale et ses temporalités. SLA désigne et représente un système
théorique influencé, à bien des égards, par les travaux de l’épistémologie de Jean Piaget et par
les contributions de la sémiotique au développement de l’étude de la signification
architecturale.
Le second type de réponse sur l’origine de l’acte de perception que formule Norberg- Schulz,
basé sur les réflexions du philosophe Martin Heidegger, se rapporte à un terrain d’étude qui se
situe à la dérive de la revendication du fondement social et culturel du langage architectural. Il
lie, plus précisément, l’étude de la signification à l’étude de l’être. Reconnaissant ainsi la
primauté, voire la prééminence, d’une recherche ontologique, qui consiste à soutenir les
questionnements sur l’être en tant qu’être, il devrait amener avec régularité, à partir de son livre
Existence, Space and Architecture (1971), des questions sur le fondement universel et
historique de l’expression architecturale. Aux deux mouvements théoriques caractéristiques de
ses écrits correspond le mouvement que prend la construction de notre thèse que nous séparons
en deux parties.
La première partie sera ainsi consacrée à l’étude de SLA avec l’objectif de déceler les
ambiguïtés qui entourent le cadre de son élaboration et à montrer les types de legs que son
auteur laisse à la théorie architecturale. Notre étude va montrer l’aspect controversé de ce livre,
lié aux influences qu’exerce la pragmatique sur l’étude de la signification. Il s’agit dans cette
première partie de présenter les modèles théoriques dont il débat et de les mettre en relation
avec les différentes échelles qui y sont proposées pour l’étude du langage architectural,
notamment avec l’échelle sociale. Celle-ci implique l’étude de la fonctionnalité de
l’architecture et des moyens de recherche sur la typologie de la forme architecturale et sur sa
schématisation. Notre approche critique de cet ouvrage prend le point de vue de la recherche
historique chez Manfredo Tafuri.
La seconde partie de notre thèse porte, elle, sur les fondements de l’intérêt chez Norberg-
Schulz à partager avec Heidegger la question de l’Être qui contribuent à fonder une forme
d’investigation existentielle sur la signification architecturale et du problème de la perception.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 97


L’éclairage de ces fondements exige, toutefois, de montrer l’enracinement de la question de
l’Être dans l’essence de la pratique herméneutique chez Heidegger, mais aussi chez H. G.
Gadamer, dont se réclame aussi directement Norberg-Schulz, et de dévoiler, par conséquent, la
primauté établie de l’image comme champ permettant d’instaurer la question de l’Être au sein
de la recherche architecturale. Sa recherche conséquente sur des valeurs esthétiques
transculturelles a ainsi permis de réduire les échelles d’étude de la signification à l’unique
échelle d’étude de l’Être. C’est en empruntant cette direction que Norberg-Schulz constitue, au
fond, suivant Heidegger, une approche qui a pour tâche d’aborder l’« habiter » et le « bâtir » à
titre de solutions au problème existentiel de l’Être.
Notre étude révèle, cependant, une interaction entre la question de l’Être et la critique de la
technique moderne par laquelle l’architecture est directement concernée, centrée sur son attrait
le plus marquant : la reproductibilité des formes. Entre les écrits de Norberg- Schulz et les
analyses spécifiques de Heidegger sur le problème de l’art, il existe un contexte de rupture avec
le langage de la théorie qu’il s’agit pour nous de dégager et de ramener aux exigences du travail
herméneutique, une approche que nous avons nous- même adoptée. Notre méthode est donc
essentiellement qualitative. Elle s’inspire notamment des méthodes d’interprétation, de là aussi
notre recours à un corpus constitué des travaux de Gilles Deleuze et de Jacques Derrida ainsi
qu’à d’autres travaux associés à ce type d’analyse.
Notre recherche demeure cependant attentive à des questions d’ordre épistémologique
concernant la relation entre la discipline architecturale et les sciences qui se prêtent à l’étude
du langage architectural. Notre thèse propose non seulement une compréhension approfondie
des réflexions de Norberg-Schulz, mais aussi une démonstration de l’incompatibilité de la
phénoménologie de Heidegger et des sciences du langage, notamment la sémiotique.

98 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien


4. Exemple d’aura : le clocher de l’église Saint-Hilaire à Combray
décrit par Marcel Proust dans « La Recherche du Temps Perdu » (Du côté de chez Swann,
Partie 1- Combray, chapitre 2, in La Recherche du Temps Perdu, tome 1, Paris, Gallimard,
Collection La Pléïade, 1954).
Même dans les courses qu’on avait à faire derrière l’église, là où on ne la voyait pas, tout
semblait ordonné par rapport au clocher surgi ici ou là entre les maisons, peut-être plus
émouvant encore quand il apparaissait ainsi sans l’église. Et certes, il y en a bien d’autres qui
sont plus beaux vus de cette façon, et j’ai dans mon souvenir des vignettes de clochers dépassant
les toits, qui ont un autre caractère d’art que celles que composaient les tristes rues de Combray.
Je n’oublierai jamais, dans une curieuse ville de Normandie voisine de Balbec, deux charmants
hôtels du XVIIIe siècle, qui me sont à beaucoup d’égards chers et vénérables et entre lesquels,
quand on la regarde du beau jardin qui descend des perrons vers la rivière, la flèche gothique
d’une église qu’ils cachent s’élance, ayant l’air de terminer, de surmonter leurs façades, mais
d’une matière si différente, si précieuse, si annelée, si rose, si vernie, qu’on voit bien qu’elle
n’en fait pas plus partie que de deux beaux galets unis, entre lesquels elle est prise sur la plage,
la flèche purpurine et crénelée de quelque coquillage fuselé en tourelle et glacé d’émail. Même
à Paris, dans un des quartiers les plus laids de la ville, je sais une fenêtre où on voit après un
premier, un second et même un troisième plan fait des toits amoncelés de plusieurs rues, une
cloche violette, parfois rougeâtre, parfois aussi, dans les plus nobles « épreuves » qu’en tire
l’atmosphère, d’un noir décanté de cendres, laquelle n’est autre que le dôme Saint-Augustin et
qui donne à cette vue de Paris le caractère de certaines vues de Rome par Piranesi. Mais comme
dans aucune de ces petites gravures, avec quelque goût que ma mémoire ait pu les exécuter,
elle ne put mettre ce que j’avais perdu depuis longtemps, le sentiment qui nous fait non pas
considérer une chose comme un spectacle, mais y croire comme en un être sans équivalent,
aucune d’elles ne tient sous sa dépendance toute une partie profonde de ma vie, comme fait le
souvenir de ces aspects du clocher de Combray dans les rues qui sont derrière l’église. Qu’on
le vît à cinq heures, quand on allait chercher les lettres à la poste, à quelques maisons de soi, à
gauche, surélevant brusquement d’une cime isolée la ligne de faîte des toits ; que si, au
contraire, on voulait entrer demander des nouvelles de Mme Sazerat, on suivît des yeux cette
ligne redevenue basse après la descente de son autre versant en sachant qu’il faudrait tourner à
la deuxième rue après le clocher ; soit qu’encore, poussant plus loin, si on allait à la gare, on le
vît obliquement, montrant de profil des arêtes et des surfaces nouvelles comme un solide surpris
à un moment inconnu de sa révolution ; ou que, des bords de la Vivonne, l’abside
musculeusement ramassée et remontée par la perspective semblât jaillir de l’effort que le
clocher faisait pour lancer sa flèche au cœur du ciel : c’était toujours à lui qu’il fallait revenir,
toujours lui qui dominait tout, sommant les maisons d’un pinacle inattendu, levé devant moi
comme le doigt de Dieu dont le corps eût été caché dans la foule des humains sans que je le
confondisse pour cela avec elle. Et aujourd’hui encore si, dans une grande ville de province ou
dans un quartier de Paris que je connais mal, un passant qui m’a « mis dans mon chemin » me
montre au loin, comme un point de repère, tel beffroi d’hôpital, tel clocher de couvent levant la
pointe de son bonnet ecclésiastique au coin d’une rue que je dois prendre, pour peu que ma
mémoire puisse obscurément lui trouver quelque trait de ressemblance avec la figure chère et
disparue, le passant, s’il se retourne pour s’assurer que je ne m’égare pas, peut, à son
étonnement, m’apercevoir qui, oublieux de la promenade entreprise ou de la course obligée,
reste là, devant le clocher, pendant des heures, immobile, essayant de me souvenir, sentant au
fond de moi des terres reconquises sur l’oubli qui s’assèchent et se rebâtissent ; et sans doute
alors, et plus anxieusement que tout à l’heure quand je lui demandais de me renseigner, je
cherche encore mon chemin, je tourne une rue… mais… c’est dans mon cœur…

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 99


5. Éléments descriptifs de l’église Sainte-Marguerite

Fig. 29 - Plan masse de la colonie du Vésinet, à l’état de projet, vers 1860


la ville à construire devra entourer l’église

100 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
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s Les vitraux et les tableaux
n Fig. 30 – Disposition des vitraux dans l’église Sainte-Marguerite

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Juillet tableaux etPASCAL
– ISTA – Olivier peintures (voir d’église
/ M2 – Architecture plan) et kérygme chrétien 101

« La Vierge, l’Enfant Jésus et sainte Anne », tableau


6. Éléments descriptifs de la cathédrale Sainte-Geneviève
D’après le Guide « Découvrir la Cathédrale Sainte- Geneviève de Nanterre », Co-édition de la
paroisse Sainte-Geneviève, l’Office de Tourisme de Nanterre, la Société́ d’Histoire de Nanterre,
2013.

Les abords
La Cathédrale Sainte-Geneviève a été construite dans les années 30 en pierre de Nanterre et
de Château- Landon, dans le style romano-byzantin en vogue à l’époque.
Devant le parvis se trouve le célèbre puits de sainte Geneviève et une petite chapelle
souterraine, très ancienne, qui marque l’emplacement supposé de sa maison natale.
Le clocher 1 gothique date du XIVe s. et constitue le seul élément subsistant de l’ancienne
église ; il abrite quatre cloches du XIXe et début XXe s.
Depuis la rue de l’Église, on peut apercevoir sur le haut de la façade latérale une statue
représentant saint Germain bénissant sainte Geneviève, œuvre du sculpteur Real del Sarte.
La façade en métal et en verre est réalisée par Pierre Sabatier en 1974 avec une porte
monumentale en laiton embouti, étain et plomb sur le thème du buisson ardent (épisode biblique
de la première rencontre de Moïse avec Dieu).
L’intérieur
Des fresques réalisées dans une remarquable unité de style et de ton marquent d’emblée le
visiteur. Elles couvrent l’ensemble des murs et des voûtes : leur surface totale, environ 1000 m,
en fait le plus grand ensemble de fresques religieuses de France.
Elles ont été réalisées entre 1926 et 1937 sous la direction du Maître Paul Baudoüin (voir
encadré) avec une iconographie riche et originale : la vie de sainte Geneviève, les paraboles de
l’Évangile, les Béatitudes, le Sacré-Cœur de Jésus, le couronnement de la Vierge.
La nef 2
Les peintures de la première travée ont été créées par Marie-Lys de Castelbajac lors de la
restauration de 2013. Le saint Esprit (symbolisé par une colombe) figure au centre de la voûte,
il est encadré par les deux premiers couplets de l’hymne médiéval Veni creator spiritus (« Viens
Esprit créateur »). Sur les murs, la prophétesse Anne et saint Jean-Baptiste qui ont tout deux

102 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
annoncé la venue du Christ.
Plus en avant, le dôme culminant à vingt mètres figure une grande croix rayonnante entourée
de neuf anges. En dessous se trouve une banderole circulaire supportée par quatre anges peints
par Pierre Poulain qui symbolisent les quatre vertus cardinales : justice, prudence, tempérance
et force.
Dans les voûtes, le thème est celui des huit béatitudes proclamées par Jésus, chacune
symbolisée par un saint :
- Heureux les pauvres de cœur : saint François d’Assise (fresque de Pierre Pechmeja).
- Heureux les doux : saint François de Sales (Pierre Pechmeja).
- Heureux ceux qui pleurent : sainte Monique, mère de saint Augustin, représentée à ses pieds
(Maurice Jaladert).
- Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : saint Louis, roi de France (Maurice Jaladert).
- Heureux les miséricordieux : saint Vincent de Paul (Georges Lusseau).
- Heureux les cœurs purs : sainte Thérèse de l’Enfant Jésus (Georges Lusseau).
- Heureux ceux qui font œuvre de paix : saint Jean-Marie Vianney, le « curé d’Ars » (Paul
Baudoüin).
- Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : sainte Jeanne d’Arc (Paul Baudoüin).
Trois coupoles représentent les Évangélistes avec les symboles qui leur sont
traditionnellement associés : l’homme pour saint Matthieu (fresque de Raymond Feuillatte), le
lion pour saint Marc et le bœuf pour saint Luc. L’aigle de saint Jean aurait dû se trouver dans
une quatrième coupole, jamais réalisée du fait du maintien du clocher ancien.
Le chœur 3
Au centre, le majestueux maître-autel D mesure plus de quatre mètres. Autrefois situé au
fond du chœur, il a été déplacé en 2013. Le bas-relief sur le devant représente le pélican
nourrissant ses petits avec sa propre chair, symbole de Jésus-Christ donnant sa vie.
Sur un pilier est installée une remarquable statue de la Vierge Marie à l’enfant, en pierre
polychrome du XIVe s. donnée à la cathédrale par les religieuses carmélites de Clamart à
l’occasion de la restauration.
Le chœur est délimité par six colonnes de béton armé recouvertes de granito, un matériau
composite donnant l’apparence du granit. Hautes de neuf mètres, elles sont ornées de
chapiteaux qui retracent la vie de sainte Geneviève, réalisés par Madeleine Froidevaux-
Flandrin.
C’est un Christ en Majesté assis sur un trône avec à sa droite, sainte Geneviève et à sa gauche,
sainte Jeanne d’Arc, l’une et l’autre patronnes de la France. Cette fresque de Léon Toublanc
s’étend sur 150 m2 à plus de douze mètres de hauteur.
Les symboles d’une cathédrale
La cathédrale Sainte-Geneviève est l’église de l’évêque du « diocèse de Nanterre », qui
rassemble tous les catholiques des Hauts-de- Seine. L’appellation « cathédrale » vient de son
symbole principal, la cathèdre A, le siège solennel réservé à l’évêque. L’ambon B, sur le devant
du chœur, est utilisé pour les lectures et la prédication. Le baptistère, de très grande dimension,
est conçu pour permettre des baptêmes d’adultes. Ces trois éléments ont été dessinés par Jean-
Marie Duthilleul, l’architecte en charge de la rénovation de 2013, et taillés dans la même pierre
de travertin que l’autel-majeur.
Dans la voûte au-dessus de l’autel, une figure monumentale du Sacré-Cœur de Jésus occupe
le centre de la fresque.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 103
Le déambulatoire a été conçu comme un ensemble pédagogique qui symbolise le chemin de
la vie chrétienne. Il se parcourt de gauche à droite.
Les sept vitraux, réalisés par Louis Barillet, rappellent la Passion du Christ. Chaque vitrail
illustre par trois symboles une étape de la Passion : l’Eucharistie, le Jardin des Oliviers,
l’interrogatoire chez Caïphe, la comparution devant Ponce Pilate, la mort en croix au Calvaire,
la mise au Tombeau et la Résurrection.
Les fresques offrent un choix iconographique rare puisqu’elles représentent quatorze
paraboles de l’Évangile réparties en six panneaux de trois scènes chacun. Ces paraboles sont
des histoires d’apparence familière que Jésus utilisait pour transmettre son enseignement de
façon imagée ; le texte des Évangiles est rappelé en français sous chaque scène.
Par panneau, de gauche à droite, et de haut en bas :
- La maison bâtie sur le sable ; le mauvais serviteur ; les vierges sages et les vierges folles
(fresque de Marthe Flandrin).
- Le filet rempli de poissons ; le semeur ; le pharisien et le publicain (Pierre Pechméja).
- L’enfant prodigue (Joseph Radan).
- Le bon pasteur ; l’ami importun ; le levain (Myrthée Baillon de Wailly).
- Le bon Samaritain (Louis Dussour).
- L’ivraie ; le riche insensé ; le mauvais riche (Elisabeth Faure).
Sous les vitraux, la représentation des sept sacrements (Joseph Radan) : le baptême, la
confirmation, le pardon (ou confession), l’eucharistie (ou messe), l’onction des malades,
l’ordination d’un prêtre, le mariage. Sur la voûte se lit la prière du « Notre Père ».
Fresques de sainte Geneviève
Tout le transept gauche est consacré à sainte Geneviève.
Au centre d’une très grande fresque réalisée par Léon Toublanc, sainte Geneviève est
représentée protégeant Paris et la France, symbolisés par des silhouettes d’églises et
cathédrales. On reconnaît à gauche de la sainte notre église de Nanterre, représentée avec le
projet de clocher finalement jamais réalisé.
Sous les vitraux, réalisés en 2013 par les ateliers Duchemin, se trouve une fresque de Paul
Lemasson de 80 m2. Elle représente la procession dans Paris au XIIe s. de la châsse, coffret
contenant des reliques de sainte Geneviève, et les guérisons miraculeuses à son passage.
À droite et à gauche de la chapelle, deux fresques remarquables de Paul Baudoüin : saint
Germain et saint Loup bénissant Geneviève et la sainte guérissant sa mère auprès du puits.
La fresque, réalisée par Paul Baudoüin et Louis Dussour, représente le couronnement de la
Vierge par la Trinité (Dieu le Père, le Fils et le saint Esprit). Cette fresque est bordée de motifs
rappelant certains des titres honorifiques donnés à la Vierge dans la prière des litanies, récitées
pour l’invoquer.
Le grand vitrail de 9 x 11 m réalisé par l’abbé Paul Buffet donne sur la façade latérale sud
de l’édifice. Il représente cinq scènes de la vie de la Vierge Marie avec son fils Jésus : la nativité
du Christ, la fuite en Égypte, Jésus travaillant à Nazareth, les noces de Cana et la crucifixion
du Christ. Elles sont entourées de quinze scènes de l’Évangile méditées dans le chapelet.

104 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
Chapelle Sainte-Geneviève 7
Elle est couverte de fresques de Joseph Radan consacrées à saint Germain, évêque
d’Auxerre (mur de droite), et saint Loup, évêque de Troyes (mur de gauche), dont le passage a
déterminé la vocation de Geneviève. Le grand vaisseau reliquaire renferme des reliques de
sainte Geneviève. Une statue en marbre blanc d’Eugène Benet représente Geneviève grandeur
nature à l’âge de douze ans tenant la médaille donnée par saint Germain.
Chapelle Saint-Maurice 8
La fresque principale, une œuvre de Maurice Jaladert, représente saint Maurice et ses
compagnons de la Légion Thébaine, triomphant après leur martyr. Cette chapelle est aussi
dédiée au souvenir des soldats morts pendant la Première Guerre mondiale.
La crypte 9
La crypte est située sous le chœur de la cathédrale. Elle est éclairée par des fenêtres donnant
sur une cour extérieure. Les colonnes qui traversent la voûte deviennent les colonnes du chœur,
leur hauteur totale est supérieure à trente mètres. C’est ici que repose le chanoine Jules
Froidevaux, dans un caveau surmonté d’une fresque de Marthe Flandrin.
Dans la cour du presbytère, le puits miraculeux existe toujours. Voici le récit rapporté par la
tradition : Un jour de fête, Gerontia veut aller seule à l’église. Sa fille, la petite Geneviève, la
prie avec insistance de l’accompagner : elle souhaite ainsi accomplir la promesse de
dévouement à Dieu qu’elle a faite à l’évêque Germain. Sa mère croit voir un caprice et gifle
l’enfant. À l’instant même, cet acte est puni puisque Gerontia perd la vue. Près de deux ans
après, prise de remords, Gerontia demande à Geneviève d’aller chercher de l’eau au puits pour
se laver les yeux. Pendant que sa fille prie et la marque du signe de la croix, Gerontia se lave
les yeux avec l’eau du puits et retrouve la vue. Ce miracle entraine une grande dévotion
populaire : l’eau du puits, bénie par sainte Geneviève, posséderait le don de guérir des maladies,
en particulier celles de la vue !
À côté du puits, la chapelle souterraine rénovée en 2013 est le témoin très ancien de
l’emplacement supposé de la maison natale de Geneviève. Aujourd’hui encore, les pèlerins
viennent s’y recueillir.

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 105
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION 7
1. L’expérience initiale de la visite guidée d'église sous mode profane 7
2. Comment le kérygme s’exprime-t-il dans le langage d'architecture des églises ? 8
3. La voie herméneutique 9
a. L’herméneutique d’architecture 10
b. L’herméneutique théologique m 12
4. Comprendre le kérygme dans deux églises, pourquoi, comment ? 12
I - LE KÉRYGME COMME SOURCE, L’ARCHITECTURE COMME CHEMIN 13
1. Le kérygme, entre proclamation, contenu et approfondissement 14
1.1. Origines linguistiques et scripturaires 14
1.2. Le kérygme, terme polysémique pour conjuguer événement et message 17
1.3. Le kérygme primitif des Apôtres : christologie, rhétorique, témoignage 18
1.4. Le kérygme trinitaire, événement clé de l’économie du salut 19
1.5. Le kérygme du temps de l’Église 21
Le kérygme d’évangélisation 22
Annoncer le kérygme, mission d’Église 23
Le témoignage, source de l’effectivité 23
Effectivités matérielles et spirituelles 24
Le kérygme en approfondissement : les accents du message 25
2. Le kérygme en langage parlé 27
2.1. La fondation du kérygme parlé 27
La parole primordiale : le Christ comme Verbe 27
Le parole des apôtres 27
2.2. Caractéristiques de l’annonce kérygmatique proclamée 28
Puissance de l’expression 28
Un vaste public de destinataires 29
Un langage conceptuel pour un message riche, structuré et rhétorique 29
Place du non-verbal 29
Fécondité du message 29
Pérennité 29
3. Le kérygme en langage d’architecture 30
3.1. Éligibilité du langage d’architecture (d'église) à l’annonce kérygmatique 30
L’architecture dans les Écritures 30
Édifices sacrés au temps de l’Église 32
3.2. Le langage d’architecture entre « intentions » et « figures d'architecture » 33
L’architecture comme langage intemporel et artistique, à la narrativité ouverte 34
L’architecture comme langage fonctionnel et intentionnel 34
Les figures d’architecture entre spatialité et temporalité 35
3.3. Intentions d’Église, avec Lumen Gentium 36
3.4. Les facultés du langage d’architecture et l’expression d’intentions religieuses 38
Puissance de l’expression 38
Un vaste public de destinataires 38

106 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien
Un langage pour un message de rhétorique « pré-conceptuelle » 39
Ressaisir la temporalité 39
Le non-parlé comme ouverture 40
Fécondité et anagogie 40
Pérennité 40
4. Lire le kérygme dans l'architecture d'église, par la visite profane guidée 42
4.1. La visite d’architecture profane 42
4.2. La visite d’architecture profane guidée 43
5. Synthèse et conclusion de la première partie 45
5.1. Notion dynamique de kérygme et notion d’accent théologique 45
5.2. Du lien préférentiel du kérygme au langage parlé, à la légitimité théologique du
langage d’architecture 45
5.3. Transposition d’un message parlé dans le langage d’architecture 45
5.4. Intentions d’Église, intentions d’église, figures d’architecture 46
II - SAINTE-MARGUERITE DU VÉSINET ET SAINTE-GENEVIÈVE DE NANTERRE 47
1. L'église Sainte-Marguerite du Vésinet 47
1.1. Principales figures d’architecture 47
A - La figure historique, caractéristique d’un christianisme traduit en urbanisme 47
B- Une architecture techniquement innovante dans un style composite 50
C - Plan basilical, lisibilité, unité de conception 51
D – Les vitraux et peintures, adaptés à leurs espaces 53
1.2. Synthèse théologique 59
Les intentions d’Église 59
Accent théologique : la pédagogie 59
1.3. Le parcours de visite 60
2. La cathédrale Sainte-Geneviève de Nanterre 62
2.1. Principales figures d’architecture 62
A – Un édifice empreint d’une histoire multiséculaire 62
B- Une savante organisation des espaces 65
C - Un ample programme de fresques et de vitraux 71
2.2. Synthèse théologique 74
Les intentions d’Église 74
Les accents théologiques : intercession, ascendance et inaboutissement 75
2.3. Le parcours de visite 76
Parcours extérieur 76
Parcours intérieur 76
3. Récapitulation comparative 78
3.1. La signification dépasse le style architectural 78
3.2. L’apport de la perception 78
3.3. Parcours 79
CONCLUSION 80
1. Récapitulation 80

Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien 107
1.1. Une voie de compréhension 80
1.2. La performativité propre du langage d’architetcture 82
2. Fécondités croisées 82
2.1. Au-delà du kérygme, la médiation 82
2.2. La liturgie, en risque d’angle mort de l’expérience des visiteurs, ou objet d’une
nouvelle fécondité ? 83
2.3. Fécondité spirituelle 84

BIBLIOGRAPHIE ET SOURCES 85
Architecture, art, littérature 85
L'église Sainte-Marguerite du Vésinet 86
La cathédrale Sainte-Geneviève et Saint-Maurice de Nanterre 87
Théologie générale, philosophie, herméneutique, anthropologie 87
Sources scripturaires pour les citations 90
Magistère 91
Autres sources 92
Iconographie 92
Visites guidées d’église 92

TABLE DES ILLUSTRATIONS 94

ANNEXES 95
1. Kérygmes des saints Apôtres 95
2. Le but de l'architecture – Selon Christian Norberg-Schulz 96
3. Significations et perceptions en architecture dans l’œuvre de Christian Norberg-
Schulz – Selon le résumé de la thèse de Ph. D. de Nazlie Michel Asso 97
4. Exemple d’aura : le clocher de l’église Saint-Hilaire à Combray décrit par Marcel Proust
dans « La Recherche du Temps Perdu » 99
5. Éléments descriptifs de l’église Sainte-Marguerite 100
6. Éléments descriptifs de la cathédrale Sainte-Geneviève 102

TABLE DES MATIÈRES 106

108 Juillet 2023 – ISTA – Olivier PASCAL / M2 – Architecture d’église et kérygme chrétien

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