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Chapitre VII : Facteurs susceptibles de modifier l’action

des médicaments
Table des matières
Introduction : Notion de l’efficacité thérapeutique............................................. 3
1 Les facteurs physiologiques de la variation des paramètres PK/PD ............. 4
1.1 Variabilités chez un sujet âgé ................................................................. 4
1.1.1 Influence sur l’absorption ............................................................. 4
1.1.2 Influence sur la distribution .......................................................... 5
1.1.3 Influence sur le métabolisme ........................................................ 5
1.1.4 Influence sur l’élimination ............................................................. 6
1.2 Variabilités chez le nouveau ne, le nourrisson et l'enfant ....................... 6
1.2.1 Influence sur l’absorption ............................................................. 6
1.2.2 Influence sur la distribution .......................................................... 7
1.2.3 Influence sur le métabolisme ........................................................ 8
1.2.4 Influence sur l’élimination ............................................................. 8
1.3 Variabilités chez la femme enceinte ....................................................... 9
1.3.1 Influence sur l’absorption ............................................................. 9
1.3.2 Influence sur la distribution .......................................................... 9
1.3.3 Influence sur le métabolisme ........................................................ 9
1.3.4 Influence sur l’élimination ............................................................. 9
1.4 Variabilités génétiques ......................................................................... 10
2 Les facteurs physiopathologiques de la variation des paramètres PK/PD . 12
2.1 L’insuffisance rénale ............................................................................. 12
2.2 Insuffisance hépatique ......................................................................... 12
2.2.1 Influence sur la biodisponibilité .................................................. 13
2.2.2 Influence sur la distribution ........................................................ 13
2.2.3 Influence sur le métabolisme ...................................................... 13
2.2.4 Influence sur l’excrétion biliaire .................................................. 13
2.3 Insuffisance cardiaque ......................................................................... 14

1
2.3.1 Influence sur l'absorption ........................................................... 14
2.3.2 Influence sur la distribution ........................................................ 14
2.3.3 Métabolisme/Excrétion............................................................... 14
2.4 Dénutrition .......................................................................................... 15
2.4.1 Modification de la résorption...................................................... 15
2.4.2 Modification de la distribution .................................................... 15
2.4.3 Modification du métabolisme hépatique .................................... 15
2.4.4 Modification de l’excrétion rénale............................................... 16
2.5 Obésité pathologique........................................................................... 16
2.5.1 Modification de la distribution .................................................... 16
2.5.2 Modifications du métabolisme hépatique................................... 16
2.5.3 Modification de l’élimination ...................................................... 16
2.6 Immunodépression .............................................................................. 16
3 Les interactions médicamenteuses ........................................................... 17
3.1 Définition d’interaction médicamenteuse ............................................ 17
3.2 Mécanisme d’interaction médicamenteuse ......................................... 18
3.2.1 Les interactions physico-chimiques ............................................. 18
3.2.2 Les interactions pharmacocinétiques .......................................... 18
3.2.3 Les interactions pharmacodynamiques ....................................... 18
3.3 Exemple d’interaction médicamenteuse .............................................. 19
3.3.1 Exemple d’interactions physico-chimiques ................................. 19
3.3.2 Exemples des interactions pharmacocinétiques.......................... 20
3.3.3 Exemples d’interactions pharmacodynamiques .......................... 20
3.4 La prévention des interactions médicamenteuses................................ 21

2
Introduction : Notion de l’efficacité thérapeutique
Un médicament est un principe actif plus un ou plusieurs excipients présentés
sous une forme galénique. Le principe actif est la partie du médicament
responsable de l’effet thérapeutique. Cet effet thérapeutique n’est optimal que
si le médicament est utilisé correctement en termes de dose, voie
d’administration etc. Donc pour parler d’efficacité thérapeutique plusieurs
facteurs doivent être réunis, parmi lesquels la dose. En effet, un médicament ne
donne son effet thérapeutique souhaité que s’il est administré à dose efficace.
Une dose efficace est corrélée avec une concentration plasmatique dans la
marge thérapeutique. Une dose inférieure à la dose recommandée entraîne
une inefficacité du traitement vu que la concentration plasmatique reste
infrathérapeutique. En revanche, une dose supérieure à la dose efficace peut
augmenter le risque de toxicité vu la concentration plasmatique élevée du
principe actif.

L’efficacité thérapeutique du médicament n’est pas seulement conditionnée par


la dose administrée mais aussi par plusieurs autres facteurs. Ces facteurs
peuvent interférer avec les paramètres pharmacocinétique et
pharmacodynamique (PK/PD) du médicament. En effet, sur le plan
pharmacocinétique une variabilité interindividuelle (entre les différents sujets
de même espèce) est observée surtout en termes d’absorption, de distribution,
de métabolisme et d’élimination. En contrepartie, sur le plan
pharmacodynamique il existe aussi une variabilité notable qui influence la
nature des récepteurs ainsi que l’interaction médicament récepteur ce qui
modifie significativement l’action de médicament.

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Ces facteurs modifiant la PK/PD des médicament peuvent être :
- Des changements physiologiques du patient
- Des changements pathologiques du patient
- Des interactions médicamenteuses

1 Les facteurs physiologiques de la variation des paramètres PK/PD


En dehors de toute pathologie, on observe une variabilité importante de la
réponse aux traitements entre les différentes classes d’âge (enfant, sujet âgé) et
même entre une femme non enceinte et une femme enceinte. Récemment
plusieurs équipes de recherche ont montré le rôle des gènes dans la
modulation de l’action du médicament.

1.1 Variabilités chez un sujet âgé


Les effets pharmacologiques observés chez le sujet âgé peuvent être très
différents de ceux mis en évidence avec la même dose chez un sujet plus jeune
de même sexe et de poids comparable. L’âge en dehors de toute pathologie
peut intervenir sur les paramètres contrôlant la pharmacocinétique et donc sur
la concentration des médicaments. En effets, toutes les étapes du devenir du
médicament dans l’organisme peuvent être influencées. Ces changements font
que les personnes âgées sont plus exposées aux effets indésirables des
médicaments et notamment lors d’administrations chroniques.

1.1.1 Influence sur l’absorption


Au cours du vieillissement, il y a :
- Une diminution de la sécrétion en acide gastrique
- Une diminution de la vitesse de la vidange gastrique
- Une diminution de la motilité gastro-intestinale
- Une diminution du débit sanguin (surtout vers la peau ce qui diminue
l’absorption des médicaments absorbé par voie cutanée et
transdermique).
Conséquences : l’absorption est ralentie par une modification de la dissolution,
de l’état d’ionisation et de la solubilité de certaines molécules. Il peut exister
une augmentation de la biodisponibilité par diminution de l’effet de premier
passage hépatique.

4
1.1.2 Influence sur la distribution
Les principales modifications physiologiques dues à l’âge pouvant modifier la
pharmacocinétique sont :
- Diminution de la surface corporelle
- Diminution de l’eau corporelle
- Diminution de la vascularisation tissulaire
- Une fonte musculaire accompagné par une augmentation relative de la
masse graisseuse.
Conséquences : de manière générale, il y a augmentation du volume de
distribution pour les molécules lipophiles et une diminution pour les molécules
hydrophiles. Par exemple, si le Vd est augmenté, la concentration sera plus forte
et la T½ vie augmentée.
Conséquences : diminution de la fixation à l’albumine des médicaments acides
avec une Augmentation de la fraction libre, seule pharmacologiquement active.
Augmentation probable des concentrations tissulaires et une modification du
Vd pouvant être à l’origine d’une majoration des effets thérapeutiques ou de
l’apparition de phénomènes toxiques. (Diminution de l’albuminémie)
De façon simple, la modification de la liaison plasmatique a un impact pour les
médicaments très liés aux protéines sanguines et ayant un index thérapeutique
étroit.

1.1.3 Influence sur le métabolisme


Les modifications physiologiques observées au cours du vieillissement sont :
- Diminution de la masse hépatique
- Diminution du flux sanguin hépatique (diminution de 0,3% à 1,5%/ an
après 25 ans)
- Diminution du pouvoir métabolique hépatique (diminution de plus de
30% après 70 ans)
Conséquences : Pour les molécules à métabolisme hépatique élevée, celle-ci
diminue avec le flux sanguin hépatique. Concernant le pouvoir métabolique, ce
sont surtout les voies métaboliques de phase I qui sont concernées. Les plus
touchées sont les réactions d’oxydation par diminution de l’activité des
cytochromes P450 et les réactions de déméthylation.

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Il faut donc adapter les doses afin d’éviter des concentrations trop élevées
source d’effets secondaires plus importants.
La biodisponibilité d’un médicament ayant un effet de premier passage
hépatique important augmente et des phénomènes de toxicité peuvent
apparaître.

1.1.4 Influence sur l’élimination


On observe chez le patient âgé :
- Diminution du flux sanguin rénal
- Diminution de la filtration glomérulaire
- Diminution de la fonction tubulaire
Conséquences : Pour les molécules à clairance rénale ou les composés
hydrosolubles, il y a une diminution de leur élimination et donc une
augmentation de leur demi-vie plasmatique.
Prudence de mise chez le sujet âgé avec les médicaments dont l’élimination est
essentiellement rénale et ayant un index thérapeutique étroit.

1.2 Variabilités chez le nouveau ne, le nourrisson et l'enfant


L’enfant est un organisme en développement. Les transformations
physiologiques (réactions de biotransformation et d’élimination) ne sont pas
optimales à la naissance, ce qui modifie le devenir de nombreux médicaments
dans l’organisme.
Selon l’âge, on peut distinguer 3 catégories :
- Nouveau-né (NN) : 0-30 jours
- Nourrisson (N) : >1 mois - 2 ans
- Enfant (E) : > 2 ans - 17 ans

1.2.1 Influence sur l’absorption


En ce qui concerne la voie per os, et bien qu’elle ne soit pas la voie optimale à
cette population spéciale elle présente une variabilité importante :
- Chez le NN :
• Une hypochlorydrie gastrique
• Une diminution de la vidange gastrique
• Une diminution de la vitesse de résorption intestinale
- Chez NN, N et E
• Une réduction de la synthèse des acides biliaires
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La voie rectale : c’est la voie pédiatrique par excellence surtout qu’elle est peu
influencée par l’âge
La voie cutanée :
- Chez NN et N :
• faible poids et rapport élevé entre la surface cutanée par rapport au
poids fait que les posologies doivent être calculées en mg/kg/j voire en
mg/m²/j.
• Augmentation de la proportion d'eau pour l'organisme entier : > 75 %
chez le NN versus 65 % chez l'adulte et 60% chez le sujet âgé. Cette
constitution particulière et la fréquence de pathologies digestives (gastro-
entérites saisonnières, voire épidémiques) qui entraînent des
vomissements et/ou de la diarrhée soulignent la nécessité d'apports
hydriques importants. Pour mémoire la ration moyenne est pour 24
heures (en ml) de : P/10 + 250 +/- 100 ; en cas de déshydratation il faut
compenser très rapidement les pertes et si celles-ci sont estimées > 8%
du poids l'enfant devra être perfusé.
• Peau fine et richement vascularisée ; l’hydratation de la couche cornée
est plus importante que chez l'adulte. Mentionnons aussi la grande
fragilité de la peau des prématurés.
- La peau du jeune enfant peut résorber de manière anormalement élevée
certains produits toxiques, en particulier quand elle est irritée voire suintante.

1.2.2 Influence sur la distribution


- Chez NN et le N :
• Eau totale et extracellulaire augmentée
• Compartiment adipeux réduit et présence de graisse brune (essentielle
à thermogénèse)
• Barrière hémato-encéphalique très perméable jusqu’à 2 ans (= E)
• Réduction de la concentration et de l’affinité de l’albumine ; de plus à la
naissance l’albumine peut-être saturée par la bilirubine libre (peut
entrainer un ictère nucléaire si déplacement par des médicaments très
liés)

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1.2.3 Influence sur le métabolisme
- Chez le NN :
• Immaturité des réactions de phase I.
• Immaturité des réactions de phase II
Pour les enzymes de phase I on retiendra l'immaturité des déméthylasses à la
naissance. De fait, la théophylline, utilisée comme stimulant de la respiration,
s'est avérée dangereuse car en se méthylant elle devient caféine qui peut
induire des convulsions si sa concentration atteint des valeurs toxiques. En
pratique les néonatalogistes prescrivent comme stimulant respiratoire la
caféine elle-même, directement éliminable dans les urines, et surveillent sa
concentration sérique.
Pour les enzymes de phase II, on se souviendra de l'immaturité de la
glucuroconjugaison. Elle contribue avec l'hémolyse physiologique des globules
rouges faits d'hémoglobine foetale a un risque d'hyperbilirubinémie libre, car la
bilirubine peut se déposer dans les noyaux gris centraux et cochléaires pour y
entrainer des apoptoses neuronales responsables d'athétose et de surdité,
définitives.
Conséquences : Réduction de la clairance et de la vitesse d’élimination de la
plupart des médicaments métabolisés par le foie chez le NN puis, en quelques
mois évolution vers l'hypermétabolisme (en rapport avec la croissance staturo-
pondérale très rapide du nourrisson). Donc chez l’enfant la demi-vie
plasmatique est élevée, avec de grandes variations inter-individuelles.
Remarque : La vitesse de maturation des voies métaboliques est variable,
parfois tardive à la puberté (ex. métabolisme de la phénylalanine). Cependant,
en général chez le N, l’activité métabolique est importante et se traduit par une
clairance plus élevée que chez l’adulte (en la pondérant par kg ou m²)d’où la
nécessité de rapprocher les doses unitaires après la période néonatale. L’âge de
transition entre le statut d’hypométaboliseur constant du NN et celui de
l’hypermétaboliseur n'est bien établi que pour quelques Médicaments.

1.2.4 Influence sur l’élimination


Le débit de filtration glomérulaire est fortement réduit chez le NN. Au bout de 6
à 8 mois (N), il a atteint celui de l’adulte, qu’il dépasse ensuite largement
jusqu’à 2 ans (= E).

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Conséquences : Les médicaments qui dépendent de la fonction rénale pour
l’élimination sont épurés de l’organisme très lentement à la naissance où il
existe une augmentation de la demi-vie plasmatique des médicaments : ex x10
pour le valium…

1.3 Variabilités chez la femme enceinte


1.3.1 Influence sur l’absorption
Au cours de la grossesse :
• Le temps de vidange gastrique est augmenté
• L’activité sécrétoire est réduite surtout pendant les deux premiers trimestres
Conséquences : Ces modifications concourent à élever le pH gastrique,
influençant ainsi l’ionisation des molécules acides et bases faibles.
Augmentation de la vitesse d’absorption, mais elle peut être inchangée.

1.3.2 Influence sur la distribution


- Dès le premier trimestre : Le débit sanguin est augmenté avec un débit
cardiaque augmenté de 50%, le débit rénal varie dans les mêmes proportions
(augmentation de la filtration glomérulaire), mais le débit hépatique n’est pas
modifié.
- A partir de la 30ème semaine d’aménorrhée :
• Le volume plasmatique a augmenté d’environ 50%
• Il existe une hypoalbuminémie de dilution
Conséquences : diminution de la concentration plasmatique des médicaments
par dilution et augmentation de leur fraction libre.
Remarque : il existe un passage des médicaments, et de certains de leurs
métabolites, vers le placenta et le foetus qui est fonction de nombreux
paramètres (liposolubilité, pKa, taille/poids moléculaire du principe actif...)

1.3.3 Influence sur le métabolisme


Au cours de la grossesse : l’activité métabolique est augmentée sous l’effet des
œstrogènes.

1.3.4 Influence sur l’élimination


En fin de grossesse : le débit sanguin rénal est augmenté de 50%

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Conséquences : il existe une augmentation de la filtration glomérulaire (donc
augmentation de la clairance à la créatinine). Ainsi, l’excrétion de certains
médicaments peut être accélérée.

1.4 Variabilités génétiques


Depuis l’achèvement du séquençage du génome humain en 2003, on sait que
notre génome comprend moins de 30 000 gènes mais qu’il existe une variabilité
physiologique de la séquence de notre ADN génomique. Nous différons les uns
des autres de quelques millions de bases : toutes les 2000 bases en moyenne,
un nucléotide est remplacé par un autre ; à une position donnée (locus), la
version du gène la plus fréquente dans la population est appelée « allèle
sauvage » et la version du gène la moins fréquente « variant allélique ». Ces
variants alléliques dont la fréquence est observée chez plus de 1% dans une
population donnée sont dénommés Single Nucleotide Polymorphisms (SNP). Il
en résulte la notion que tous nos gènes sont polymorphes. La plupart de ces
SNP sont sans aucune traduction clinique (non fonctionnels). Mais un faible
nombre de ces SNP entraîne cependant des conséquences plus ou moins
importantes dans la réponse aux traitements, plus connues sous le nom de «
pharmacogénétique » ; cette dernière se définit comme l’étude des
conséquences de la variabilité de séquence de notre génome sur la réponse à
certains traitements. La pharmacogénétique n’intéresse pas seulement par la
réponse (cible des médicaments) aux médicaments mais tous les gènes
impliqués dans le métabolisme et le transport médicaments.
On sait que certains patients ont des réponses exacerbées à certains
traitements ou ne répondent pas à d’autres traitements en raison de
modifications d’origine génétique des processus de métabolisme des
médicaments. Certains sujets sont déficients en un enzyme spécifique du
métabolisme des médicaments. Les sujets homozygotes pour les variants
alléliques non fonctionnels sont dénommés métaboliseurs lents, les sujets
hétérozygotes métaboliseurs intermédiaires et les sujets qui ne présentent pas
le variant allélique déficitaire, homozygotes pour l’allèle sauvage, sont appelés
métaboliseurs rapides. Les métaboliseurs lents présentent des clairances
parfois 10 fois plus basses que les sujets métaboliseurs rapides. Pour une même
posologie, les patients métaboliseurs lents ont des concentrations circulantes

10
de certains médicaments bien plus élevées que les métaboliseurs rapides et
sont davantage exposés aux effets indésirables.

Dans certaines situations, la mutation ne touche pas un cytochrome de


métabolisation mais elle touche les récepteurs (cellulaires ou enzymatiques),
changeant ainsi leur affinité aux médicaments. C’est ainsi que ces mutations
induisent la formation des récepteurs très affines et/ou puissants au
médicament augmentant ainsi l’effet de thérapeutique. En revanche, ces
mutations peuvent donner des récepteurs moins affinés et/ou efficaces d’où la
diminution de l’action du médicament.

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2 Les facteurs physiopathologiques de la variation des paramètres PK/PD
La prescription d’un médicament vise à traiter un état pathologique donné. Or,
le patient peut souffrir d’une autre affection sous-jacente qui pourrait
influencer les paramètres pharmacocinétiques et pharmacodynamiques des
médicaments.

2.1 L’insuffisance rénale


- Il s’agit d’une pathologie relativement fréquente qui altère le fonctionnement
de tous les organes et donc leur réponse aux traitements.
- En préalable à tout traitement, il faut rechercher une insuffisance rénale (IR),
qu’elle soit aigue ou chronique. Le niveau d’IR va conditionner l’adaptation de la
posologie et de la chronologie de la prescription médicamenteuse.
- L’évaluation de la fonction rénale se fait par la mesure de la clairance à la
créatinine, égale à la filtration glomérulaire.
La formule de Cockcroft et Gault permet le calcul de la filtration glomérulaire
en connaissant la créatinémie, l’âge, le poids (kg) et le sexe du malade.
Conséquences : pour les substances à élimination rénale, plus la clairance à la
créatinine diminue, plus la demi-vie des médicaments augmente, ce qui peut
induire un « cercle vicieux » néphrotoxique.
Certains médicaments sont éliminés principalement par voie biliaire, l’IR
n’affecte donc pas leur élimination. Gardons toujours à l’esprit que certains
métabolites formés sont actifs ou toxiques et à élimination rénale don il faut
faire attention à leur accumulation.
Quelques grandes règles à respecter :
• Utiliser, si possible, des substances à élimination biliaire et à index
thérapeutique élevé
• Adapter la posologie à la fonction rénale. Pour les médicaments les plus
dangereux, une table d’adaptation est donnée dans le Vidal.

2.2 Insuffisance hépatique


L’insuffisance hépatique (IH) se définit comme l’incapacité du foie à remplir sa
fonction, qui est essentiellement la biotransformation et l’élimination de
certains déchets, mais également la synthèse de nombreuses substances
biologiques indispensables à l’organisme : albumine, cholestérol et facteurs de

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coagulation. Elle peut résulter de différents états pathologiques tels que les
hépatites virales, cirrhose, hépatocarcinome…

2.2.1 Influence sur la biodisponibilité


• Au cours de l’IH, on observe des anastomoses porto-caves
Conséquences : court-circuit du métabolisme hépatique et donc augmentation
de la biodisponibilité de certains médicaments dont F est affecté par le 1er
passage hépatique.
Avec ces médicaments il faudra initier le traitement avec des posologies faibles
qui seront ensuite adaptées prudemment en fonction de la réponse
thérapeutique.

2.2.2 Influence sur la distribution


L’IH entraîne :
• Une hypoalbuminémie par diminution de synthèse
• Une augmentation de la bilirubine et d’autres substances endogènes
Conséquences : diminution de la liaison aux protéines, surtout si le médicament
est fortement liée aux protéines plasmatiques, et donc une augmentation de la
fraction libre des médicaments et du volume de distribution. C’est pour cela on
observe une augmentation de l’effet thérapeutique du médicament.

2.2.3 Influence sur le métabolisme


L’activité hépatocytaire est fortement modifiée au cours de l’IH ce qui entraîne :
Une diminution de l’activité enzymatique du foie. Les enzymes de la famille du
cytochrome P450 sont surtout concernés car très sensibles à l’anoxie dûe à la
baisse de débit sanguin hépatique.
Conséquences : le métabolisme est modifié. Rappelons que la présence d’une
circulation collatérale (surtout en cas de cirrhose), diminue l’effet de premier
passage hépatique ce qui aboutit à une augmentation de la concentration
plasmatique des médicaments.

2.2.4 Influence sur l’excrétion biliaire


C’est essentiellement la cholestase qui modifie l’excrétion biliaire des
médicaments des médicaments éliminés essentiellement par cette voie.
- Médicaments à forte extraction hépatique dont la clairance dépend du débit
sanguin hépatique : propranolol, lignocaïne, désipramine, nortryptyline,

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alprénolol, aldostérone, hydrocortisone, phénacétine, péthidine,
propoxyphène, imipramine
- Médicaments à faible extraction hépatique dont la clairance dépend de
l’activité hépatocytaire et de la fixation aux proteines plasmatiques : antipyrine,
amidopyrine, warfarine, tolbutamide, diazépam, phénylbutazone,
diphénylhydantoïne

2.3 Insuffisance cardiaque


Elle se caractérise par un bas débit tissulaire et des signes de congestion. Les
modifications pharmacocinétiques qui surviennent (par exemple l’altération de
la fonction rénale) peuvent être dûe à l’âge ou indirectement à une insuffisance
cardiaque (IC). L’effet de traitement est donc parfois difficilement prédictible.

2.3.1 Influence sur l'absorption


- L’hypo-perfusion splanchnique diminue l’absorption digestive des
médicaments. Une stase veineuse du système porte freine également
l’absorption.
- L’hypo-perfusion tissulaire accompagnant l’insuffisance cardiaque peut
également ralentir de façon considérable l’absorption des médicaments
administrés par voie intramusculaire et/ou sous-cutanée ou par patch. A
l’extrême, dans des situations de choc cardiogénique, leur réabsorption est
quasi nulle.

2.3.2 Influence sur la distribution


Les conditions hémodynamiques diminuent les échanges. On observe une
diminution du volume de distribution avec la plupart des médicaments donc
une élévation des concentrations plasmatiques, notamment lors de la mise en
route du traitement. Au plan pratique il est recommandé de diminuer aussi les
doses de charge.

2.3.3 Métabolisme/Excrétion
Dans l’insuffisance cardiaque, la clairance des médicaments peut être diminuée
du fait de l’hypoperfusion des organes excréteurs (foie ou reins) mais
également par une altération des capacités métaboliques du foie.
Conséquences : Le retentissement de l’insuffisance cardiaque sur les
paramètres pharmacocinétiques est souvent très difficile à prédire. La valeur du

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débit cardiaque seul n’est pas un paramètre fiable pour faire les adaptations
posologiques nécessaires. La principale recommandation reste donc une grande
prudence dans les posologies, essentiellement lors de la mise en route des
traitements. En cas de faible index thérapeutique, un monitorage des
concentrations plasmatiques est recommandé.

2.4 Dénutrition
Elle est fréquente dans les pathologies cancéreuses, les syndromes
inflammatoires intenses, la chirurgie majeure, les septicémies, les
traumatismes, les brûlures et l’hospitalisation prolongée. Elle concerne aussi les
âges extrêmes.

2.4.1 Modification de la résorption


De nombreux facteurs de la résorption comme le pH gastrique, le débit sanguin
intestinal, la perméabilité de l’épithélium digestif, la vidange gastrique, peuvent
être affectés dans les 2 sens par la dénutrition et/ou les diverses pathologies
intercurrentes des patients.

2.4.2 Modification de la distribution


La malnutrition provoque une perte de masse grasse et /ou une fonte
musculaire. Ceci va affecter le volume de distribution des médicaments
lipophiles (barbituriques, fentanyl…) ou hydrophiles (aminosides, digoxine,
paracétamol…) avec un risque latent de surdosage surtout pour les molécules à
fenêtre thérapeutique étroite.

2.4.3 Modification du métabolisme hépatique


Les sujets dénutris présentent une forte diminution de la capacité de synthèse
protéique et en particulier une diminution de la synthèse des protéines de
transport (albumine, alpha-1 glycoprotéine acide). Cette hypoprotéinémie peut
entraîner une augmentation de la forme libre du médicament et conduire
éventuellement à un effet thérapeutique majoré.
Le métabolisme hépatique est normal ou même augmenté dans les
malnutritions faibles à modérées mais souvent très altéré lorsque des signes de
malnutrition sévère (œdème) sont présents.

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2.4.4 Modification de l’excrétion rénale
Il a été montré que la demi-vie des médicaments qui se lient faiblement aux
protéines est plus longue lors de la dénutrition : ceci peut être dû à une
altération du débit sanguin rénal et de la filtration glomérulaire. Inversement,
pour les médicaments à forte fixation protéique, l’élimination rénale lors de
dénutrition est plus rapide du fait de l’hypoalbuminémie.

2.5 Obésité pathologique


L’obésité est définie par un index de masse grasse (Body Mass Index : BMI)
supérieur à 30. L’adaptation des doses chez les sujets obèses est
particulièrement importante pour les médicaments à fenêtre thérapeutique
étroite.

2.5.1 Modification de la distribution


Chez l’obèse on a une majoration très importante de la masse grasse. En ce qui
concerne les médicaments hydrophiles qui se distribuent dans la masse maigre,
l’adaptation posologique doit se faire par rapport au poids idéal (calculé par la
formule de Lorentz, en fonction du sexe et de la taille) et non par rapport au
poids total réel de l’individu.
Le problème classique des médicaments très lipophiles qui s’accumulent dans
les tissus graisseux (opiacés) est leur relargage massif lors d’un amaigrissement
rapide, d’un stress libérant des catécholamines, conduisant à une augmentation
importante des concentrations plasmatiques par relarguage.

2.5.2 Modifications du métabolisme hépatique


Des effets de l’obésité sur certaines isoformes du cytochrome CYP450 ont été
rapportés. Ils se traduisent par une diminution d’activité du cytochrome P450
3A4 et une augmentation du CYPE21. Aucun effet de l’obésité sur le CYP450
1A2, 2C9, 2C19 et 2D6 n’a été mis en évidence.

2.5.3 Modification de l’élimination


Les études montrent que la fonction rénale pourrait être diversement affectée
par l’obésité.

2.6 Immunodépression
L’état d’immunodépression ne modifie pas par lui-même la pharmacocinétique
des médicaments mais il existe souvent d’importantes modifications induites
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par les effets secondaires des traitements (la pharmacodynamie). Il faudra donc
faire une adaptation personnalisée des doses.
Pour les anti-infectieux par contre, il n’y a plus l’appoint de défense immunitaire
du sujet qui est nécessaire pour éradiquer toute infection et donc les doses
d’antibiotiques, d’antifungiques et d’antiviraux seront plus élevées et
administrées plus longtemps (cf traitements médicaux spécifiques).

3 Les interactions médicamenteuses


Certains médicaments ne doivent pas être utilisés ensemble. Ils ne doivent pas
être présents dans l’organisme en même temps. Les prendre simultanément,
voire à distance, peut entraîner des interactions médicamenteuses, entraînant
des effets secondaires plus ou moins graves, voire une perturbation d'efficacité.
En effet une interaction entre deux médicaments ou plus, pourrait entraîner
une diminution ou augmentation de l’effet d’un ou des médicaments

3.1 Définition d’interaction médicamenteuse


Une interaction médicamenteuse peut survenir quand deux médicaments sont
présents au même moment dans l’organisme et que leur association modifie les
effets du traitement. L’activité thérapeutique du médicament peut alors se
trouver augmentée et ainsi devenir toxique et provoquer des effets indésirables
potentiellement graves. A l’inverse, elle peut également être diminuée et
perdre en efficacité.
Selon la gravité, les interactions médicamenteuses sont classées en :
- Contre-indication : elle ne doit pas être transgressée.
- Association déconseillée : elle doit être le plus souvent évitée.
- Précaution d’emploi : l’association est possible dès que les
recommandations de posologie et de surveillance clinique et biologique
sont respectées.
- A prendre en compte : dans ce cas le risque d’interaction
médicamenteuse existe. Il revient au médecin d’évaluer l’opportunité de
l’association.

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3.2 Mécanisme d’interaction médicamenteuse
3.2.1 Les interactions physico-chimiques
Le médicament est neutralisé avant l’administration et la phase d’absorption.
Cela est dû généralement à une incompatibilité entre le principe actif et la
solution de reconstitution ou de dilution. En effet, le principe actif peut être
chélaté sous l’action de deuxième médicament, induisant ainsi à une
précipitation. Une coloration anormale ou un dégagement gazeux sont aussi
des manifestations d’une interaction physicochimique. Parfois le mélange de
deux médicaments fait varier le pH ce qui entraîne la dégradation du principe
actif.

3.2.2 Les interactions pharmacocinétiques


C’est une interaction au cours de laquelle un médicament va modifier la
pharmacocinétique d’un autre médicament. Ces interactions médicamenteuses
suivent le devenir d’un médicament dans l’organisme : absorption intestinale,
diffusion, métabolisme et excrétion. Les interactions médicamenteuses
pharmacocinétiques qui ont une conséquence clinique sont celles qui
intéressent la pharmacocinétique d’un médicament à index thérapeutique
étroit, c’est à dire dont les seuils de toxicité par surdosage et d’inefficacité par
sous-dosage sont proches (ex anticoagulants, immunosuppresseurs,
l’hormonothérapie...).

3.2.3 Les interactions pharmacodynamiques


C’est une interaction au cours de laquelle l’activité pharmacodynamique d'un
médicament va être amplifiée, ou au contraire, opposée à l’activité
pharmacodynamique d’un autre médicament. Si les effets thérapeutiques des
médicaments s’ajoutent ou se multiplient entre eux, on parle de synergie ou de
potentialisation : cette situation est potentiellement dangereuse. Les
interactions médicamenteuses synergiques sont très fréquemment observées
lorsque que l’on prescrit 2 médicaments antihypertenseurs, le risque
d’hypotension artérielle orthostatique est naturellement plus fréquent. Si les
effets des médicaments sont au contraire atténués ou annulés, on parle
d’antagonisme ou d’inhibition : ce type d’effets nuit le plus souvent à l’efficacité
du traitement, c'est le cas des agonistes dopaminergiques et les neuroleptiques
s’antagonisent mutuellement.
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3.3 Exemple d’interaction médicamenteuse
Voilà quelques interactions médicamenteuses qui sont classées comme des
contre-indications absolues

3.3.1 Exemple d’interactions physico-chimiques


- Ne pas administrer simultanément par la même voie un médicament très
acide avec un médicament très basique. En effet, lors de changement de pH on
observe la précipitation de la forme acide ou basique de sel.
Ex : Furosémide + midazolam = précipitation de la forme acide de furosémide et
la forme basique de midazolam
MEDICAMENTS ALCALINS ( pH > 7) MEDICAMENTS ACIDES (pH < 7)
Aciclovir (Aciclovir®) Amiodarone (Cordarone®)
Furosemide (Lasix®) Ciprofloxacine (Ciproxine®)
Ganciclovir (Cymevene®) Dobutamine (Dobutamine®)
Phénytoïne (Phenhydan®) Midazolam (ipnodis®)
Sulfamidés (Bactrim®) Norépinéphrine (Noradrenaline®)
Solution NaCl à 0,9% Solution glucosé a 5%

- Certains médicaments sont photosensibles c'est-à-dire qu’ils sont dégradés


lors de leur exposition à la lumière telle que : l’isoprénaline qui doit être
reconstituée dans une seringue opaque.
- Le mannitol 20 % est une solution presque saturée de mannitol. Or la
solubilité dépend de la température. Si la température est inférieure à 15 °C on
peut voir un précité dans la solution donc il est recommandé de réchauffer la
poche avant l’utilisation.
- La bicarbonate, en solution, lors de son contact avec une molécule acide peut
dégager un gaz, c’est la CO2, ce gaz pourrait être fatale chez le patient.
- Ne pas administrer les émulsions injectable (solution de nutrition parentérale,
le propofol…) par la même voie que les électrolytes (Mg, Ca, phosphate …) et
les médicaments acides et basiques. Cette association entraine la séparation de
phase de l’émulsion.

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3.3.2 Exemples des interactions pharmacocinétiques
Médciament 1 Médicament 2 Type d’interaction
Carvedilol (kardex) Cimétidine Diminution de
métabolisme hépatique
de carvédilol
Diltiazem Nifédipine (adalate) Diminution de son
métabolisme hépatique
avec risque
d'hypotension sévère
Carbamazépine Voriconazole Augmentation de
métabolisme hépatique
Produit de contrasté Metformine Diminution de
iodé l’élimination de
metformine ce qui
induit une acidose
lactique. La metformine
doit être suspendu au
moment de l'examen
radiologique pour n'être
repris que 2 jours après

3.3.3 Exemples d’interactions pharmacodynamiques


Médciament 1 Médicament 2 Type d’interaction
Les AVK (Sintrom) L’aspirine a dose >= a Majoration du risque
3g/j hémorragique
Miconazol (dactarin)
Methotréxate aspirine Augmentation de la
toxicité de méthotréxate
L’acide fusidique Voie atorvastatine Risque majoré d'effets
per os indésirables (type de
rhabdomyolyse)
Amiodarone sotalol Risque de torsade de
pointe

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Azathiopurine (immurel) Allopurinol (purinol) Insuffisance médullaire
grave
Digixine Calcium IV Trouble de rythme
colchicine Macrolide et Majoration des effets
pristinamycine indésirables de
colchicine
cycline Vitamine A et rétinoides Hypertension
intracrânienne
Dompéridone fluconazole Troubles du rythme
ventriculaire
Amantadine métoclopramide Risque de syndrome
bromoceptine…. extrapyramidale
Sulfamide miconazole Augmentation du risque
hypoglycémiants d’hypoglycémie
kayexalate sorbitol Risque de nécrose
colique
3.4 La prévention des interactions médicamenteuses
Le prescripteur doit connaître tous les médicaments pris par son patient, y
compris ceux prescrits par d'autres médecins, ainsi que les produits à base de
plantes et les compléments alimentaires. La prescription doit comporter le
moins de médicaments possible aux doses minimales et pour une durée aussi
courte que possible. Si possible il faut privilégier les médicaments ayant une
grande marge thérapeutique afin qu'aucune interaction médicamenteuse
inattendue ne provoque un effet toxique.
L’automédication et la prise d’un médicament prescrit précédemment
augmentent les risques d’interactions médicamenteuses. Les personnes qui
reçoivent des traitements de longue durée (diabète, hypertension artérielle,
maladie chronique…) peuvent demander à l’avance à leur médecin quels
traitements sont autorisés ou au contraire prohibés en cas de fièvre, douleur,
troubles digestifs…

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