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Cognition et apprentissage
Revue de la littérature scientifique
relative notamment aux minorités
ethnolinguistiques
Patricia M. Davis
Cognition et apprentissage
SIL International®
2017
SIL e-book
67
ISSN: 1934-2470
Redacteur-en-chief
Eric Kindberg
Directeur de publication
Becky Quick
Services de production
Lois Gourley, Director
Margaret González
Bonnie Waswick
Barbara Alber
Table des matières
Préface
Remerciements
Introduction : Survol des théories de l’apprentissage
Quelques définitions
Quelques importantes théories de l’apprentissage émises au 20ème siècle
Limites de cet ouvrage
Intérêt de cette étude
Chapitre 1 : Les théories développementales
Introduction
La programmation génétique
La théorie de Piaget
Les stades du développement humain selon Piaget
Le stade des opérations concrètes
Le stade des opérations formelles
Applications dans les sociétés occidentales
Applications aux minorités ethnolinguistiques
Les équilibrations successives
Les conséquences pédagogiques
Application
Chapitre 2 : Le behaviorisme
Les principaux thèmes behavioristes
L’utilité de cette théorie pour l’enseignement
Les réactions
Application
Chapitre 3 : Les théories du traitement de l’information
Introduction
Les idées fondamentales
L’apprentissage passif – David P. Ausubel
L’importance d’un apprentissage qui a du sens
Les concepts intégrateurs
La leçon : le stockage des informations et leur rappel
Une aide pour les pédagogues
Application
La théorie des schémas – Richard C. Anderson
Le concept de schéma
Des conséquences importantes
Application
Le traitement de l’information - Robert Gagné
La séquence des processus internes selon Gagné
La hiérarchie des connaissances
L’importance du concept de hiérarchie
Les catégories d’apprentissage
La conception d’un enseignement permettant d’améliorer l’apprentissage
iii
iv
Application
La Théorie de l’Apprentissage Social – Albert Bandura
Condensé de la théorie de Bandura
La contagion de l’exemple
Les catégories de modèles
La façon efficace de montrer l’exemple
Le renforcement
L’auto évaluation et le choix des amis
L’évitement du sentiment de culpabilité
Les mécanismes qui impliquent la restructuration cognitive
Les mécanismes qui voilent ou dénaturent la relation entre actions et
effets.
Les mécanismes qui déshumanisent la victime
Les mécanismes qui déplacent la responsabilité
Conseils pour les enseignants
Application
Chapitre 4 : Les styles d’apprentissage et les méthodes d’enseignement
Introduction
Quelques mots sur la terminologie
L’evolution des recherches
Des tests fiables
La définition que Witkin donne des styles cognitifs
Les caractéristiques dominantes
La différenciation psychologique
Les variations culturelles et sociales
Les caractéristiques du groupe
Les facteurs déterminants
L’aptitude à se développer
Les styles d’apprentissage et L’éducabilité
Tests de Quotient Intellectuel (Q.I.)
La discrimination scolaire
Les domaines d’apprentissage affectés
Le contenu social
Le renforcement
L’organisation
L’acquisition de concepts
La saillance des indices
Les rôles attendus des adultes et des enfants
Quelques autres styles d’apprentissage
La prédominance d’un hémisphère
En classe
Les caractéristiques des élèves
Un exemple de classe holistique.
Les techniques pédagogiques holistiques
Enseignement et stratégies d’apprentissage IC/ID
Plan d’un cours holistique
v
Dans cet ouvrage, l’auteur passe en revue la littérature scientifique sur la cognition et
l’apprentissage, notamment en ce qui concerne les minorités ethnolinguistiques. Le
chapitre 1 porte sur les théories développementales, le chapitre 2 résume le
behaviorisme, le chapitre 3 examine les théories du traitement de l’information, le
chapitre 4 expose les différents styles d’apprentissage, en particulier le style global ou
holistique. Pour finir, le chapitre 5 examine les bases de la théorie du constructivisme
social.
La bibliographie citée, même si elle n’est pas exhaustive, réunit les principales
références parues sur le sujet jusqu’en 1991, ainsi que quelques ouvrages plus récents.
Les traducteurs se sont permis d’ajouter, pour le lecteur francophone, une liste
complémentaire d’ouvrages en français, non cités dans le texte anglais. Afin de
présenter avec le plus d’exactitude possible le point de vue des auteurs mentionnés,
nous nous sommes efforcés de trouver les textes source et de les citer. Les recherches
entreprises pour cet ouvrage ont été, à l’origine, menées à une époque où les
pédagogues s’intéressaient particulièrement au traitement de l’information et aux styles
d’apprentissage. Leurs découvertes ont posé les bases de la plupart des pratiques
pédagogiques actuelles.
Ce livre, en tant qu’étude longitudinale, retrace comment la pensée actuelle en
matière de cognition et d’apprentissage s’est construite. Il contient également une
multitude d’idées pour les pédagogues confrontés aux difficultés propres aux classes
dans d’autres cultures que la leur. À notre connaissance, c’est le seul livre qui réunit ces
informations en un seul volume.
vi
Remerciements
Patricia M. Davis
vii
Introduction:
Pendant des siècles, les intellectuels ont réfléchi aux mystères de la cognition humaine
et ont cherché à comprendre comment les êtres humains acquièrent des connaissances
et s’en servent. Parmi les recherches entreprises en Occident durant ces 100 dernières
années, il y a deux éléments qui sont particulièrement utiles dans notre étude : les
constantes universelles et les variations culturelles. Peu à peu et non sans hésitations, il
a été compilé un corpus d’informations qui enrichit notre connaissance et fait l’objet
d’applications importantes pour ceux qui enseignent des élèves d’autres cultures que la
leur.
Quelques définitions
1
2
Théories développementales
1900___Baldwin___Hall___Levinson___Erickson__Piaget___________________________________________
La faculté de raisonnement s’accroît à mesure que le calendrier génétique permet au
cerveau de se développer.
Behaviorisme
Début des années 1900_Pavlov___Thorndike___Watson___Skinner________________________
Comprendre et contrôler les comportements élémentaires au moyen de séquences
stimulus-réponse.
Théories des styles d’apprentissage
Les années 1940_Witkin, Cohen, Kolb, Kogan, Myers-Briggs_____________
Comprendre de quelles manières les gens préfèrent apprendre.
Théories du traitement de l’information
Les années 1950___Ausubel___R.C. Anderson___Gagné___________________________
Comment le cerveau traite l’information.
Théorie de l’apprentissage social
Les années 1960_____________Bandura____________________________________
Apprendre en imitant des exemples et des modèles.
Théorie du Constructivisme social
Les années 1980___Vygotsky_________________________________________
Apprendre par le dialogue.
Chaque théorie de l’apprentissage contient des idées importantes pour les enseignants
et les parents. Cependant, les principales théories sont très riches et il est impossible de
tout dire sur elles dans ce bref survol. Nous avons donc choisi les éléments importants
pour l’enseignement à des élèves d’autres cultures. En faisant cela, nous réduisons la
charge informative à des proportions gérables, mais courons le risque de déformer la
pensée des théoriciens ou de la détailler insuffisamment. C’est pourquoi, même si nous
nous sommes efforcés de présenter avec exactitude chaque idée, nous invitons les
lecteurs à étudier les textes source indiqués dans les références.
Les références citées dans ces chapitres ne sont pas exhaustives. On peut trouver
dans n’importe quel manuel de psychologie ou de développement personnel des
informations sur ces mêmes sujets. Nous avons, cependant, fait l’effort de citer les
textes source et les autorités en la matière afin que les lecteurs aient accès aux
informations originelles.
Lorsqu’on écrit un livre de cette nature, on se demande comment désigner les
groupes ethnolinguistiques, notamment parce qu’au fil des ans les termes considérés
comme acceptables deviennent péjoratifs. Dans cet ouvrage, j’ai pris en considération la
façon dont les populations autochtones parlent d’elles-mêmes et j’ai alterné entre
« Amérindiens », « minorité ethnolinguistique », « groupe ethnolinguistique », « société
minoritaire », « minorité ethnique », « minorité », « population », « autochtone » et
« Aborigène », en m’efforçant toujours d’utiliser ces termes avec respect. Le mot
« communauté » n’a pas été employé, car, en Europe, il a de plus en plus une
connotation très négative, surtout dans le contexte séculier.
4
Introduction
5
6
La programmation génétique
Les toutes premières recherches sur le sujet ont été menées par les psychologues
américains James Mark Baldwin et G. Stanley Hall. Baldwin propose une théorie
décrivant le développement de l’enfant sous forme de stades qu’il appelle « réactions
circulaires », « accommodation » et « adaptation » (Baldwin, 1894 ; Dworetzky, 1987,
p. 226). Hall postule que les stades de développement du cerveau humain ont une
origine génétique (1917, p. 1–6, 234–237 ; 1920, p. 7–18, p. 449–454). Ces stades
sont 1 :
• Le stade « simiesque », où le sujet ne peut pas comprendre des idées abstraites mais
apprend par récompense et punition ;
• Le stade « sauvage », où le sujet ne peut pas comprendre d’idée abstraite mais
apprend par l’exemple et l’imitation ;
• Le stade « rationnel », où le sujet peut comprendre des idées abstraites et est
capable d’apprendre par la découverte.
Hall a orienté ses recherches vers l’expérience commune (par exemple « c’est quoi
les nuages ? ») plutôt que vers la connaissance scolaire. Comme il pensait que le
développement mental pouvait être entravé si on le forçait prématurément, il
recommande donc de n’enseigner les grandes idées qu’à partir de l’adolescence,
moment où, selon sa théorie, les gènes et l’instinct naturel auraient automatiquement
développé chez les élèves des facultés de raisonnement supérieures. Ces points de vue
rejoignent l’enseignement de Darwin sur l’évolution physique et sociale.
Les théories de la programmation génétique et de l’évolution sociale ont fait l’objet
d’un vif intérêt lors de la découverte des Aborigènes d’Australie. Saisissant l’occasion
d’une recherche interculturelle, une expédition est partie pour le détroit de Torres
(Rivers, 1901). Là, les chercheurs ont interprété « l’absence, chez les Aborigènes, de
possessions matérielles, comme un signe d’appauvrissement culturel (avec son
1
Hall s’est inspiré de la façon de penser en vigueur à son époque pour choisir le nom de ces stades.
7
La théorie de Piaget
Recherchant des informations plus précises sur les sociétés non occidentales
minoritaires, les chercheurs ont commencé à orienter leurs études en utilisant le
modèle de développement cognitif de Jean Piaget. Piaget était un brillant universitaire
suisse qui, à vingt-deux ans, a obtenu un doctorat en sciences naturelles (zoologie) et, à
trente ans, a publié environ vingt-cinq articles sur les mollusques et sur des sujets
connexes. (Lefrancois, 1988, p. 180). Il a aussi étudié la psychologie, la
psychopathologie, la logique et l’épistémologie (l’étude de la nature des connaissances).
En 1920, il travaille, au laboratoire de Binet à Paris, sur la standardisation de
certains tests mentaux en collaboration avec Théodore Simon, co-inventeur avec Alfred
Binet du test d’intelligence pour les enfants qui porte leur nom. Dans son approche de
ce travail, Piaget est influencé par les publications de Baldwin et par sa formation à
l’observation et à la description biologiques (Dworetzky, 1987). Il est fasciné de
découvrir que des enfants du même âge donnent souvent les mêmes réponses
incorrectes aux questions, et il se met à examiner la manière dont la pensée se construit
chez les enfants et en quoi ceux-ci perçoivent le monde différemment au cours des
différents stades de leur développement. Ses recherches reposent sur deux
problématiques : (1) quelles caractéristiques permettent aux enfants de s’adapter à leur
environnement ? (2) quelle est la façon la plus simple, la plus juste et la plus utile pour
8
2
Épistémologie : étude de la nature des connaissances.
9
3
Piaget, 1972b, 1932 ; Dworetzky, 1987, p. 228 ; Lefrancois, 1988, p. 184–195
http://www.britannica.com/EBchecked/topic/459096/Jean-Piaget Accédé October 23, 2013.
10
Entre 1959 et 1969, un certain nombre d’études se sont intéressées aux compétences
entrant en jeu dans la capacité d’un sujet à considérer que le poids et la quantité se
conservent, c’est à dire à reconnaître qu’une masse reste toujours la même en dépit de
la variation de sa forme et de sa taille. Heron et Simonsson (1974, p. 335) donnent la
liste des sept études les plus connues sur la conservation de la masse : à Aden : Hyde,
1959 ; au Nigeria : Price-Williams, 1961 ; à Hong Kong : Goodnow, 1962 ; au Sénégal :
Greenfield, 1966 ; chez les Aborigènes d’Australie : de Lemos, 1969 ; en Papouasie
Nouvelle Guinée : Prince, 1968 ; en Jamaïque et chez les Esquimaux canadiens et
indiens : Vernon, 1969.
Le concept de conservation a suscité l’intérêt parce qu’il est proche des opérations
formelles, le plus haut niveau de développement cognitif dans le schéma piagétien. On
l’évalue en versant de l’eau dans des récipients de formes différentes ou en modifiant la
forme d’une même boule d’argile. Les résultats des études menées durant cette période
ont été très variés et certains des chercheurs, conscients que les variables culturelles
non identifiées pouvaient influencer leurs constatations, ont exprimé des réserves sur la
validité des résultats. Greenfield et Burner (1966, p. 94), par exemple, ont signalé que
les enfants wolof du Sénégal devaient verser l’eau eux-mêmes pour éliminer la
suspicion de « pratiques magiques » qui expliqueraient l’apparente inégalité des
quantités d’eau dans leurs gobelets.
Dans une recherche de nature différente, de Lacey, faisant le compte-rendu d’une
étude publiée pour la première fois en 1970, cherche à établir si l’aptitude
classificatoire est liée à l’environnement. Il compare des enfants aborigènes d’Australie
avec des enfants australiens d’origine européenne. Chez les Aborigènes, il remarque
11
Genve Algérie
Conservation Conservation Conservation Conservation
de la quantité du poids et de de la quantité du poids
la longueur et de la
longueur
7–8 ans 9 ans 9 ans 12–13 ans
Face aux mêmes activités que les enfants, les adultes algériens analphabètes n’ont
eu aucune difficulté avec les concepts de conservation des quantités de liquides, mais
les femmes, habituées à estimer le poids de la pâte à pain en la soupesant, ont eu du
mal à évaluer le poids des objets en les regardant.
Dans ses commentaires sur les résultats, Bovet note l’influence du conditionnement
dû à l’environnement (il n’y avait pas, dans cette culture, de récipients de taille
standardisée comme des bouteilles de soda d’un litre et demi, par exemple). En réponse
à sa question initiale, elle a conclu qu’on trouve en effet des niveaux supérieurs de
cognition pour des activités pratiquées fréquemment.
En dépit de ces observations, la possibilité que des peuples ne disposant que d’une
technologie rudimentaire puissent atteindre le stade du raisonnement abstrait a
continué à faire l’objet de vives discussions. En Nouvelle Guinée, avec des tests
logiques oraux et des tests formels empiriques, Were (1968, cité dans Dasen 1974,
p. 412) n’a pas trouvé de trace de pensée formelle chez les sujets âgés de quatorze à
seize ans. Lancy (1983, p. 119, citant Townshend, 1979) affirme qu’en Nouvelle-Guinée
« aucune société n’a de jeux comportant des éléments qui sollicitent des habiletés de
haut niveau pour la résolution de problème ou la mémorisation ». En ce qui concerne le
système de classification en Nouvelle-Guinée, Lancy conclut que « les catégories
existent bien, mais elles ne sont pas mutuellement exclusives : elles ne sont pas
organisées en une hiérarchie et la mention du nom d’une catégorie n’incite pas à en
donner des exemples » (1983, p. 116). Wilson et Wilson, après avoir évalué plus de
12
4
Dans certains pays francophone, l’établissement qui accueille les trois dernières années d’école avant l’entrée à
l’université s’appelle le lycée.
5
Dans les systèmes scolaires belge, congolais ou québécois, il s’agit de la 5ème secondaire.
13
Quelques années plus tard, suite à des échanges avec le grand psychologue russe L.
S. Vygotsky, Piaget reformule ses thèses pour faire du développement du langage une
étape essentielle pour se représenter abstraitement des actions concrètes (Vygotsky,
1962, t 7, p. 9–24 ; Piaget, 1962). Il reconnaît aussi qu’un environnement stimulant
tend à hâter l’âge auquel un enfant devient capable de penser en se servant
d’opérations formelles (Piaget, 1972a, p. 6–8 ; Hunt, 1961, p. 346–347, 362–63).
Dans ses écrits de 1972, Piaget tient compte des différents rythmes de progression
au cours des stades de développement, en particulier d’une culture à l’autre,
reconnaissant que « selon leurs aptitudes et leurs spécialisations professionnelles, les
enfants 6 présentent souvent des différences concernant les domaines de fonctionnement
auquel ils appliquent les opérations formelles » (1972a, p.1 ; voir aussi Inhelder,
Sinclair et Bovet, 1974, p. 128). À cet égard, Piaget se distingue des premiers
développementalistes qui attribuaient moins d’importance à la socialisation et à la
transmission par l’éducation.
Voici quelques exemples parmi les études qui prolongent ou remettent en questions
les conclusions de Piaget :
Hatch observe que de jeunes enfants manifestent souvent une conscience
métalinguistique et qu’à cinq ou six ans ils savent déduire les règles d’une autre langue
(1978, p. 14–15).
Donaldson constate que même de jeunes enfants peuvent avoir recours à la pensée
abstraite, mais pas sous la forme exacte recommandée par Piaget (1978, p. 56–59).
Desforges et Brown citent des études dans lesquelles même des étudiants de
troisième cycle universitaire échouent à certains tests de conservation. Ils en concluent
que les stades piagétiens sont « seulement secondaires pour répondre à la principale
question pédagogique, à savoir : pourquoi les enfants échouent-ils avec certains
matériaux et réussissent-ils avec d’autres ? » (1979, p. 279).
Entwistle se réfère aux études ci-dessus et ajoute que les épreuves piagétiennes
favorisent les personnes qui ont une pensée scientifique, mais ne prennent pas en
compte la démarche intuitive. À son avis, même si l’absence de mise en œuvre des
opérations formelles chez certains élèves peut s’expliquer par leurs compétences
cognitives préalables, il ne s’agit pas d’une déficience, mais d’« un manque de
connaissances ou d’expérience, ou [...] un faible intérêt pour la tâche proposée ou pour
la matière étudiée » (1981, p. 173).
Christie (1982) et Graham (1986) ajoutent à cela une ignorance des finalités de
l’école et des processus scolaires, ainsi qu’un manque de maîtrise du vocabulaire et de
la façon de s’exprimer par rapport à ce qui est exigé en classe.
On doit aussi se demander si les notions (comme la conservation), qui se
développent normalement avec une expérience croissante, doivent être assimilées (ou
servir d’indicateurs) à l’aptitude au raisonnement intellectuel qui, elle, doit être
enseignée et normalement ne s’apprend pas par l’expérience.
6
Par « enfant », Piaget désigne ici des jeunes de 11 à 15 ans et de 15 à 20 ans, en apprentissage (voir une référence
au texte original dans http://www.erudit.org/revue/rse/1975/v1/n2-3/900014ar.pdf, page 1).
14
Les études qui ont tenté d’appliquer la théorie piagétienne à d’autres cultures ont
rencontré de multiples problèmes, en grande partie dûs à des biais non conscients et à
une méconnaissance de la culture locale de la part des chercheurs, ce qui s’est traduit
par des instruments d’évaluation inadéquats. McLaughlin (1976, p. 87–90) énumère les
problèmes qui ont caractérisé les études interculturelles en Afrique. Il cite les variables
imprécises, les facteurs culturels requérant des compétences particulières pour être
interprétés ainsi que les difficultés à établir une comparaison juste et équitable entre
cultures. Pour McLaughlin, tous les sujets mettent en œuvre des processus cognitifs de
niveau supérieur, mais ne les appliquent pas aux mêmes situations.
Klich et Davidson (1984, p. 169–171) font la liste des points problématiques dans
les nombreuses études menées en Australie. Cette liste vaut pour toute évaluation
interculturelle :
• La barrière de la langue ; (La plupart des tests ont été administrés en anglais à des
sujets qui le maîtrisait mal et dont la langue n’offrait pas de correspondance pour
certains termes du test.)
• Les tests consistant à exécuter une tâche au lieu d’entretiens comme le faisait
Piaget ;
• Les risques implicites lorsque des sujets d’une culture doivent répondre à des
stimuli et à des procédures établies par des chercheurs d’une autre culture. Ceci
englobe les situations de test inconnues des sujets ;
• L’incertitude quant à l’universalité du modèle piagétien ;
• Le présupposé que la compétence cognitive dans la culture blanche et la
compétence cognitive dans la culture aborigène s’excluent mutuellement.
Cherchant à identifier les fonctions abstraites derrière les modes d’organisation
d’informations culturellement différents, Klich et Davidson (1984, p. 182) se sont servis
des travaux de Luria (1966a) en neuropsychologie. Luria considère les fonctions
mentales supérieures comme des « systèmes fonctionnels organisés et complexes qui
opèrent suite à des interactions entre des structures cérébrales différenciées ». Klich et
Davidson ont mis au point une étude dont les résultats montrent que sur les onze tests
administrés « aucune différence apparente dans la structure sous-jacente des fonctions
cognitives de traitement des informations n’a pu être établie entre les enfants
aborigènes ou non aborigènes qui ont participé à la recherche » (Klich et Davidson
1984, p. 164).
Les procédures de test rigoureuses et culturellement adaptées de Klich et Davidson
comportent :
• des consignes dans la langue vernaculaire ;
• l’administration du test par l’enseignant aborigène habituel soit à des groupes, soit
en présence et à portée de voix d’autres aborigènes ;
• des items d’entraînement pour s’assurer que l’enfant comprend chaque façon de
procéder ;
• la possibilité pour l’enfant de choisir la personne suivante qui passera le test.
15
En 1974, Piaget développe sa théorie, affirmant que quatre facteurs principaux entrent
en œuvre pour rendre l’enfant apte à avoir une pensée de plus en plus complexe : (1) la
maturation ; (2) la capacité à organiser les informations par équilibration successive
(c’est-à-dire, assimiler l’information et la ranger séquentiellement dans des structures
mentales existantes) ; (3) la socialisation ; (4) la transmission par l’éducation et la
culture (1974, p. 300–303).
Voyat (1983, p. 131), qui a mené des études approfondies sur soixante-et-onze
enfants sioux âgés de quatre à dix ans, met en évidence l’apparition, dans l’ordre
annoncé, des quatre stades de développement décrits par Piaget. Il montre aussi que la
maturation exerce moins d’influence sur le développement cognitif que l’expérience
concrète associée à un raisonnement déductif en cours de construction : « Ni les enfants
oglala, ni les enfants genevois n’ont l’intuition de la conservation ou de l’espace ; ils les
construisent » (1983, p. 134). Il fait la distinction entre les expériences physiques qui
mènent à une abstraction directe découlant de l’objet (comme lorsqu’un enfant associe
le concept de chaleur avec celui de feu) et les expériences logico-mathématiques qui
désignent le résultat d’actions. La connaissance logico-mathématique est acquise par
équilibration successive plutôt que par connaissance additive (comme lorsqu’un enfant
parvient à comprendre le concept de fraction en regardant découper une pomme en
plusieurs morceaux).
Étant donné que « bien des découvertes faites au cours de la vie d’un enfant ne lui
sont pas transmises par l’éducation ou les relations sociales », Voyat (1983, p. 134–35)
pense que l’équilibration (assimilation des informations et accommodation au sein des
structures mentales déjà existantes) est le mécanisme clé du développement cognitif et
de l’apprentissage organisationnel.
La théorie de l’équilibration peut aider à expliquer pourquoi des adultes faisant
partie de sociétés minoritaires peuvent ne pas arriver à mettre en œuvre des notions de
conservation de type occidental alors qu’ils font preuve d’autres types de raisonnement
abstrait, tels que, par exemple, les calculs compliqués utilisés dans des jeux
mathématiques comme le mankala, qu’on trouve dans de nombreuses cultures non
occidentales et qui existaient bien avant l’arrivée des Blancs (Townshend, 1979,
p. 794).
En raison de tout ce qui précède, une question a continué à préoccuper les pédagogues.
Puisque les membres de sociétés non technologiques sont capables d’abstraction et de
16
Application
Extrait résumé de Ferreiro (E.), « Literacy Development: Psycho-genesis », dans Y. M. Goodman (éd.),
How children construct literacy: Piagetian perspectives, Newark, DE, International Reading Association,
1990, p. 12–25.
Troisième niveau
1. L’hypothèse syllabique : recherche de lettres identiques pour écrire des « séries de
sons » similaires.
2. L’hypothèse alphabético-syllabique : certaines lettres peuvent remplacer des
syllabes tandis que d’autres représentent des unités plus petites (phonèmes).
3. L’hypothèse alphabétique. La similarité des sons implique la similarité des lettres.
Des sons différents impliquent des lettres différentes. (Là les enfants essaient
d’éliminer les irrégularités de l’écriture.)
Chapitre 2
Le behaviorisme
19
20
de récompense suite à son action. On peut éliminer (ou éradiquer) une réaction
indésirable en enlevant tous les renforcements positifs qui lui sont liés.
Les réactions
Cependant, les pédagogues ont commencé à s’apercevoir que bien que le stimulus-
réponse explique nombre de comportements humains et qu’il ait légitimement sa place
dans l’éducation, le behaviorisme n’explique pas tous les phénomènes observés dans les
situations d’apprentissage. On a commencé à s’intéresser à l’approche cognitive tandis
que les théoriciens behavioristes continuaient d’étudier les possibilités d’apprentissage
programmé à l’ère de l’informatique. De nos jours, tout l’enseignement assisté par
ordinateur repose solidement sur les fondements que les chercheurs behavioristes ont
posés. À l’occasion, observez comment des cours par ordinateur stimulent
l’apprentissage au moyen de la répétition et des renforcements.
Application
Introduction
Vers 1960, parallèlement aux études menées par les chercheurs de l’école piagétienne,
d’autres chercheurs ont commencé à s’intéresser aux processus mentaux à l’œuvre dans
l’apprentissage scolaire, notamment à la façon dont l’éducation formelle peut faciliter
un apprentissage similaire à l’apprentissage naturel que Piaget a observé. Cela a donné
des théories qui, à ma connaissance, n’ont pas été testées dans des situations
interculturelles. Toutefois, la nature de ces observations laisse à penser qu’elles sont
universelles. C’est pourquoi, et vu qu’elles contiennent des notions utiles à ceux qui
enseignent dans des minorités ethniques, nous les présentons dans ce chapitre.
Les théories du traitement de l’information s’occupent de questions relatives à la
cognition, c'est-à-dire à l’action de connaître (Le François 1988, p. 21). Elles cherchent
à expliquer comment le cerveau traite de nouvelles informations et les stocke. Nous
allons recenser ici la terminologie commune à toutes les théories du traitement de
l’information, avant de voir les principaux théoriciens et leurs découvertes majeures.
Les idées suivantes, ainsi que les termes utilisés, sont à la base des théories du
traitement de l’information.
Concept : le concept, ou idée, est l’élément de base de l’apprentissage. Un concept
est quelque chose qui est conçu par l’intelligence : une pensée, un condensé ou une idée
générique issue de la généralisation de cas particuliers.
Toutes les théories de l’apprentissage partent du principe qu’une personne apprend
quelque chose lorsqu’elle accumule des informations et les organise en un ensemble
signifiant, c.-à-d. un concept. Cela peut concerner un seul élément, mais souvent il
s’agit de plusieurs éléments entre lesquels on finit par voir un lien. On appelle
élaboration d’un concept le processus par lequel on définit des éléments, on les
comprend et on établit des relations entre eux.
L’élaboration des concepts : les concepts s’élaborent au fil de l’expérience. Pendant
que nous avançons dans la vie, et particulièrement durant notre jeunesse, nous
construisons, dans notre cerveau, des concepts relatifs au monde qui nous entoure, ce
que sont les choses et ce qu’elles ne sont pas. Les sens (le toucher, l’ouïe, la vue,
l’odorat et le goût) envoient des messages au cerveau et ce dernier les organise selon de
nombreuses manières logiques.
Les modèles mentaux : les concepts prennent souvent la forme de modèles
mentaux. Un modèle mental consiste en symboles mentaux organisés en une structure
qui décrit l’élément ou les éléments représenté(s). Ces représentations mentales
peuvent être visuelles ou verbales (McNamara, Miller, et Bransford, 1991, p. 490).
L’étude, citée par ces auteurs (1991, p. 493–509) et par d’autres, indique qu’en général
l’apprentissage et le rappel sont améliorés lorsque la personne a construit une
représentation mentale claire.
22
23
Un exemple : l’élaboration de concepts commence dès notre plus jeune âge. Nous
sommes souvent allés en voiture. Nous avons appris à imiter son bruit et un jour on
nous a dit « C’est une VOITURE. » Progressivement, nous avons construit ce concept
dans notre cerveau : ce véhicule à quatre roues, c’est une VOITURE. En grandissant, ce
concept VOITURE va se développer pour inclure différents modèles et nous en
déduirons d’autres concepts. (Angelika Marsch, communication personnelle)
Selon cette théorie, une image correspondant à l’objet VOITURE s’est formée dans
l’esprit de la personne et lui reviendra en mémoire chaque fois qu’elle entendra ce mot.
Cependant, il se peut que, suite au contact avec de nombreux autres modèles de
voitures, l’image associée à la première voiture évolue vers une image plus générique.
Les concepts organisateurs : l’esprit humain organise ses connaissances et utilise
cette connaissance organisée pour intégrer de nouvelles informations. Ainsi, quand un
nouvel élément attire notre attention, l’organisation existante offre une structure et la
nouvelle donnée est réunie à d’autres éléments ayant des qualités similaires.
Glenys Waters donne deux exemples :
1. Mon neveu a récemment acheté un « whippet. » 1 Je n’avais aucune idée de ce
qu’était un « whippet. » En parlant avec mon neveu et en voyant le chien, j’ai compris
que c’était comme un lévrier, mais plus petit. J’ai également appris qu’il y a des courses
de « whippets. » Ceci m’a permis d’ajouter « whippet » à la catégorie « chiens utilisés
pour le sport et la course » dans ma connaissance organisée (Waters 1998, p. 3).
2. Quand j’étais jeune, les chiens d’aveugle étaient souvent des labradors. Mais plus
tard, j’ai vu plusieurs bergers allemands guidant des aveugles ; j’ai ainsi adapté mes
connaissances et ai ajouté la nouvelle information : « berger allemand » à ma structure
de connaissances : « chien d’aveugle. » (Glenys Waters, 1998, p. 4).
Voyons maintenant comment, d’après les recherches de quatre des théoriciens les
plus célèbres dans ce domaine, les concepts s’élaborent et s’organisent dans la structure
mentale.
David P. Ausubel, psychiatre et professeur de médecine bien connu, a mis toutes ses
immenses compétences au service de l’étude des processus cognitifs impliqués chez les
adultes dans l’apprentissage, de contenus verbaux significatifs, notamment en situation
de classe. Il adopte le cours magistral, qu’il appelle apprentissage passif, car il
considère que pour communiquer un grand nombre d’informations 2 (1963, p. 19), c’est
une méthode plus rapide et plus efficace que l’apprentissage par la découverte.
1
En français, il s’agit d’un « lévrier nain ». Contrairement à l’anglais, ce nom indique clairement de quoi
il s’agit et le processus mental qu’a dû faire Glenys Waters n’aurait pas eu lieu chez un francophone.
Comme, dans ce passage, l'important est le processus mental, nous avons gardé le mot anglais.
2
Ausubel ne traite que des cas où l’enseignement se fait dans la langue maternelle de l’élève.
24
par cœur, jusqu’à ce qu’un réseau soit établi. Ausubel a toujours cherché à éviter
l’apprentissage par cœur en préparant les élèves à l’aide de concepts intégrateurs.
Dès que l’enseignant est certain que l’élève comprend le concept de la même
manière que son professeur et qu’ils ont tous les deux le même concept en tête, la leçon
peut commencer.
Application
• si on organise ce que sait déjà l’élève en vue de la nouvelle leçon, ce qui est
enseigné aura du sens ;
• les structurants antérieurs sont particulièrement utiles aux élèves qui ne disposent
d’aucune catégorie où placer les informations qu’ils doivent apprendre ;
• les structurants antérieurs peuvent être :
o des comparaisons,
o des explications ;
• on mémorise mieux un contenu lorsqu’il est ancré dans une structure cognitive
comprenant de nombreux liens (associations).
Le concept de schéma
Un schéma, au sens donné dans la théorie des schémas, représente un ensemble de
connaissances génériques. Une catégorie générale (schéma) comprend des
emplacements pour tous ses éléments constitutifs, ses caractéristiques. Les schémas
sont imbriqués les uns dans les autres, à différents niveaux d’abstraction. Leurs
relations sont représentées sous forme de réseaux (plutôt que de hiérarchies) ; ainsi,
chaque schéma est relié à de nombreux autres. Par exemple, le schéma de quelqu’un
pour « œuf » pourrait comprendre les composantes illustrées dans le diagramme ci-
dessous.
Les schémas sont toujours organisés de façon pertinente. Ils sont extensibles et
peuvent évoluer pour inclure d’autres variables et d’autres particularités, au fil des
expériences de la personne. Certaines variables sont obligatoires ; d’autres non. Chaque
schéma est imbriqué dans d’autres schémas et contient lui-même des sous schémas. Les
schémas changent constamment en fonction des informations reçues. Ils peuvent être
réorganisés lorsque des données entrantes demandent une restructuration. Les
représentations mentales utilisées lors de la perception et de la compréhension évoluent
suite à ces processus et se combinent pour former un ensemble plus vaste que la somme
de ses parties (Anderson, 1977, p. 418–419).
Schallert, un disciple d’Anderson (1982, p. 24–25), considère que les enfants :
1. progressent clairement dans leur acquisition de métaconnaissances (conscience
de ce qu’ils savent personnellement, connaissances concernant les stratégies
d’apprentissage, etc.) ;
2. font la preuve, entre cinq et sept ans, d’une compréhension de la structure des
histoires ; (la capacité de construire des histoires de plus en plus complexes augmente
par la suite.)
3. font évoluer les concepts vers une plus grande spécificité (en réduisant les
concepts compris au départ de manière trop large) et une plus grande extension (en
élargissant les concepts compris au départ de manière trop restrictive).
Les études portant sur des adultes ont principalement comporté des tests où les
sujets devaient assimiler de nouvelles informations au moyen de schémas déjà établis.
Schallert (1982, p. 26) se réfère à des études montrant que les gens comprennent mieux
des concepts abstraits après avoir assimilé des informations concrètes et utiles à leur
compréhension. Ces connaissances générales, également appelées connaissances
préalables, constituent un cadre dans lequel la structure nouvellement créée peut
s’insérer.
L’exemple suivant souligne l’importance des connaissances préalables : un jour,
dans une salle informatique, j’ai entendu par hasard une conversation en anglais.
L’anglais étant ma langue maternelle, j’ai été stupéfaite de constater que je ne
comprenais absolument rien à cette discussion de 15 minutes, mis à part qu’il était
question d’ordinateurs. Mes connaissances préalables n’englobaient ni les termes
techniques, ni les concepts dont parlaient ces programmeurs en informatique. Ceci dit,
je suis tout à fait capable d’employer dans une discussion les termes techniques des
théories de l’apprentissage, car c’est un domaine pour lequel j’ai construit des schémas.
Ceux qui connaissent moins ce domaine ne comprendront rien à cette discussion tant
qu’ils n’auront pas développé leurs schémas, grâce aux explications et aux définitions
du vocabulaire employé.
Ainsi, concernant l’interprétation des messages, la compréhension augmente à
mesure que la pensée interagit avec le message et se sert des indices qu’il contient pour
insérer les nouvelles données dans la structure existante des connaissances. Les
connaissances que la personne possède déjà et son analyse du contexte influencent
fortement ce processus (Anderson, 1978, p. 72). Cette interaction entre les
connaissances nouvelles et anciennes, Anderson l’appelle l’instanciation (Anderson,
Pitchert, Goetz, Schallert, Stevens et Trollip, 1976). Dans ce processus, deux méthodes,
l’une « généralisante » et l’autre « particularisante, » servent à opérer une sélection
parmi les variables possibles. Tout comme les expériences antérieures du sujet et la
30
(celle reliée à OISEAU) appartient à un niveau hiérarchique plus élevé que les autres.
Lors de l’enseignement du concept œuf, une bonne interprétation du diagramme
mentionnerait l’importance de cette catégorie-là.
À mesure que de nouvelles informations sont acquises, les schémas évoluent par
extension, articulation et affinement progressifs. Cependant, un enseignement
didactique aura rarement une influence sur les schémas les plus profonds (par exemple,
ceux relatifs à la vision du monde). Plus le schéma est construit, moins il sera
susceptible d’évoluer. Les études à ce sujet montrent que, lorsque l’acceptation de
nouvelles informations nécessite une réorganisation cognitive majeure, les gens
peuvent éprouver un fort conflit interne et tendent à s’opposer à cette réorganisation
(Anderson, 1977, p. 424–425). (La personne perçoit les difficultés inhérentes à une
réorganisation totale et a peur de renoncer aux convictions qui lui ont donné des
repères toute sa vie). Cela concerne particulièrement les situations interculturelles
d’enseignement et explique (d’un point de vue psychologique) pourquoi des messages
nouveaux peuvent faire l’objet d’un fort rejet.
Les gens qui tiennent beaucoup à un certain schéma sont souvent enclins à tolérer
et à assimiler dans leurs schémas de nombreuses preuves du contraire (telles que des
incohérences et des contre-exemples évidents) (Anderson, 1977, p. 425). Même s’ils
peuvent s’apercevoir que les nouvelles données sont plus logiques, ils peuvent choisir
de camper sur leur position afin de ne pas avoir à réajuster des convictions
profondément enracinées.
Un schéma a le plus de chances de changer quand quelqu’un identifie une difficulté
dans sa position actuelle et se rend compte que le problème peut être réglé dans un
schéma différent (Anderson, 1977, p. 427). Lorsque les preuves allant à l’encontre de
l’ancienne position deviennent si convaincantes que celle-ci n’apparaît plus tenable, la
personne peut alors adopter rapidement la nouvelle position. Cela est vrai pour tout
changement de paradigme, qu’il soit séculier ou religieux.
Les personnes qui enseignent dans des classes d’une autre culture que la leur
peuvent se servir des principes de la théorie des schémas pour identifier des concepts-
clés, donner des informations de base avant la leçon, aider les élèves à faire le lien
entre des idées pertinentes et les aider à en déduire des interprétations. Cette théorie
leur permet également de mieux comprendre les élèves ayant des difficultés à assimiler
un schéma qui va à l’encontre de leurs suppositions préalables.
Application
Plan de la leçon
1. Commenter l’image avec les enfants. Leur expliquer que la nourriture contient de
nombreuses substances qui nous aident à rester en bonne santé. Dans la banane
plantain, par exemple, ce que nous voyons, ce sont les fibres alors qu’elle est
essentiellement composée d’eau. En plus de l’eau et des fibres, elle contient une
dizaine de substances, qui ont chacune un rôle particulier.
Lire tous les noms de substances écrits dans la liste et parler du rôle de chacune.
Expliquer que tous les aliments contiennent des fibres, de l’eau, des vitamines et des
sels minéraux.
2. Travail en groupe. Se laver les mains, peler les bananes plantain, les mettre dans la
marmite avec de l’eau. Les faire cuire sur la cuisinière.
34
3. Pendant que les bananes cuisent, apprendre aux élèves le chant suivant sur l’air de
Matsigenka lullaby :
1. A l’intérieur de ma banane 3. A l’intérieur de ma banane
Il y a surtout de l’eau, Il y a de bonnes vitamines,
Surtout de l’eau. De bonnes vitamines.
2. A l’intérieur de ma banane 4. A l’intérieur de ma banane
Il y a des fibres délicieuses, Il y a aussi des sels minéraux,
Des fibres délicieuses. Il y a aussi des sels minéraux.
4. Écraser les bananes plantains cuites, ajouter de l’eau et servir cette boisson.
Expliquer que celle-ci est très nourrissante et qu’on la boit dans de nombreux pays.
5. Revoir les informations sur les tableaux et rechanter le chant.
6. Demander aux élèves de citer quatre éléments importants contenus dans les bananes
et dans tous les aliments.
Les processus de traitement de l’information sont définis par Gagné (1985, p. 76) de la
façon suivante :
1. Les récepteurs sensoriels (yeux, oreilles, peau, etc.) reçoivent des stimuli ;
2. Ces stimuli se transforment en impulsions nerveuses qui sont transmises à ... ;
3. Un registre sensoriel qui filtre et élimine les stimuli inutiles tels que les bruits de
fond et qui retient les éléments devant être emmagasinés dans la mémoire
(perception sélective) ;
4. Les signaux choisis sont envoyés dans la mémoire à court terme où ils sont
conservés peu de temps : sensations auditives, paroles, images visuelles. Ils sont,
soit :
a. retenus quelques secondes ou éliminés (comme dans le cas d’un numéro de
téléphone qu’on compose et qu’on oublie aussitôt),
b. soit encodés sur le plan sémantique (c’est-à-dire par des mots) et envoyés à...
5. La mémoire à long terme qui les stockera ;
lorsqu’on fait appel à une information stockée, un processus de rappel se met en
marche.
6. Une recherche s’effectue dans la mémoire à long terme ;
7. L’information est retrouvée et envoyée dans la mémoire à court terme ;
8. De là, elle est envoyée dans un générateur de réponses qui ordonne au cerveau et
aux muscles de réagir ;
9. Pour finir : des effecteurs donnent la réponse nécessaire, ensuite l’organisme
chargé du traitement…
10. attend la réaction, ce qui fournira un renforcement et lui signalera si d’autres
réactions sont nécessaires.
(Gagné, 1985, p. 71–77)
Gagné a émis une théorie disant que toutes les connaissances sont hiérarchisées de
façon ascendante (même si, dans ses écrits ultérieurs, il est moins certain de cette
hiérarchisation et met plutôt l’accent sur les pré requis à partir desquels l’apprentissage
se fait). Selon son schéma hiérarchique cependant, toutes les compétences
intellectuelles et l’apprentissage suivent le schéma ci-dessous où, pour atteindre chaque
niveau, il faut maîtriser les niveaux inférieurs.
36
4. Règles
3. Concepts
2. Différenciations
Explications :
Les associations sont les éléments de base à partir desquels est construit ce modèle.
Une association, c’est tout simplement deux idées habituellement mises ensemble
(Gagné, 1985, p. 23). Par exemple, les noms communs avec les objets correspondants :
le mot « table » associé au meuble, « cheval » à l’animal, « arbre » au végétal, « mère » à
la personne, « nourriture » à des choses à manger. Il existe aussi des associations de
nature différente, comme par exemple « rose » avec l’odeur, « docteur » et « hôpital »,
« feu » et « danger », le chiffre « 1 » et la quantité « un ». Avec les associations, un
stimulus donné déclenche une réponse ou une image mentale données.
Les chaînes sont des suites logiques d’associations, comme attacher ses chaussures,
s’asseoir sur une chaise, souffler une bougie, se servir d’un crayon, bander une plaie,
chanter une chanson, faire ses devoirs, conduire une voiture, utiliser un ordinateur ou
écrire une rédaction. Les chaînes peuvent être simples ou complexes, mais pour réussir
l’action, il faut exécuter les séquences dans l’ordre. (Gagné, 1985, p. 36–38).
Les différenciations sont les différences observées entre des propriétés et des objets
légèrement différents. Cela veut dire que l’on reconnaît la distinction entre des
concepts tels que « balle » et « ballon », « homme » et « femme », les nombres « un »,
« deux » et « trois » et les lettres « a », « b », « c ». Savoir discriminer les sons devient
important quand on étudie une langue étrangère.
Différencier implique aussi de savoir faire la différence entre des propriétés comme
« doux » et « dur » ; « rouge », « rouge foncé », « rouge léger » et « rose » ; « gentil »,
« généreux », « poli » et « pacifique » ; « grand », « plus grand », « le plus grand » ;
« vert », « mûr », « pourri ». Reconnaître la différence entre un chat et un chien est une
différenciation entre deux catégories. Faire la différence entre un chat domestique, un
chat persan et un chat siamois est une différenciation à l’intérieur d’une catégorie.
Les concepts sont des idées abstraites formées chacune d’un réseau d’idées et de
définitions. Exemples de concepts abstraits : la justice, la politique, la crise, la
sympathie, la vieillesse, l’amitié, l’honneur, la rébellion, la gloire, l’autorité, la loyauté,
la vertu. Vous remarquerez la façon dont chacun de ces concepts contient un réseau
d’idées.
37
Parmi les exemples de concepts contenant des définitions qui équivalent à une
règle, il y a : un litre, qui représente une quantité de liquide égale à 100 millilitres ; un
mètre qui équivaut à une longueur de 100 centimètres ; un pourcentage, qui représente
une partie d’un certain objet ou d’une quantité ; une bibliothèque, qui désigne une
pièce ou un édifice contenant des livres. Gagné (1985, p. 53) fait remarquer qu’il ne
suffit pas de connaître la définition ou la règle inhérente au concept, mais qu’il faut
savoir l’appliquer ou comprendre comment l’on se sert du concept.
Les règles (ainsi que les généralisations) établissent des principes valables dans de
nombreux cas. Ceux-ci sont fréquemment des liens de cause à effet ou des corrélations.
Exemples :
• règle scientifique : l’air chaud monte, l’air froid descend.
• règle de mesures : 100 millilitres de liquide égalent un litre.
• règle de grammaire : le verbe s’accorde avec son sujet en personne et en nombre.
• règle mathématique : trois fois quatre égalent douze.
• règle de conduite : si vous voulez que les autres vous traitent bien, traitez-les
bien.
Les règles d’ordre supérieur combinent des règles simples en un processus plus
complexe. C’est le domaine où la résolution de problèmes se produit.
Contrairement à Piaget, Gagné pensait que tout enfant peut comprendre n’importe
quel principe, règle ou généralisation, si on lui a enseigné au préalable les
connaissances pré requises (associations, différenciation et concepts). Une fois le
concept compris, l’élève peut l’utiliser sans limitation. Cette idée, révolutionnaire
lorsqu’elle fut exposée pour la première fois, est à présent mieux acceptée.
Gagné (Gagné, 1985, p. 47–48) a divisé les conduites humaines en cinq grandes
catégories ou aboutissements d’apprentissage.
• Les compétences intellectuelles : les connaissances procédurales, lesquelles incluent
la connaissance de la langue et autres activités symboliques.
• L’information verbale : la connaissance déclarative ou capacité à formuler des idées
et des propositions.
• Les stratégies cognitives : l’aptitude à organiser son propre apprentissage, sa
mémoire et sa pensée. Les stratégies cognitives incluent les techniques d’analyse et
la résolution de problèmes.
• Les compétences motrices : la capacité organisée d’exécuter des mouvements
comme conduire une voiture ou jouer au tennis.
• Les attitudes : les états mentaux qui influencent, chez un individu, le choix de ses
actions.
L’état de l’élève, ainsi que les conditions d’apprentissage, ont des effets différents
sur ces cinq catégories d’activités et affectent grandement les résultats.
Selon Gagné, l’élève trouve de la motivation grâce à la motivation incitative
(l’usage de récompenses), la motivation pour la tâche elle-même (la satisfaction
d’acquérir de nouvelles connaissances), la motivation pour atteindre des objectifs
choisis (la recherche du succès) et en l’informant des objectifs (afin qu’il puisse faire
correspondre ce qu’il fait aux attentes de l’enseignant). Le transfert de connaissances
d’une situation à l’autre est obtenu par la généralisation du stimulus quand les stimuli
39
sont similaires ou par la généralisation du concept. (Les stratégies cognitives, les règles
classificatoires et les indices nécessaires au rappel de l’information jouent tous un rôle
dans la généralisation du concept.) L’oubli est dû aux interférences, aux inhibitions et à
l’extinction.
Pour Gagné, il est important de noter que lorsqu’un élève traite un nouveau
contenu, comme indiqué ci-dessus, il acquiert de nouvelles structures mnésiques.
Celles-ci permettent à l’apprenant de montrer ce qu’il a retenu et de changer sa façon
de procéder (Gagné et White, 1978, p. 187).
Selon Gagné (1985), voir aussi Gagné et Briggs (1979) et Gagné et Dick (1983), il
existe une forte relation entre de bonnes techniques d’enseignement et l’ordre dans
lequel le cerveau traite les informations. Gagné les schématise comme suit (les
explications en italique sont de Patricia Davis) :
Processus Élément de la leçon
d’apprentissage (ce que l’enseignant doit faire)
(dans la tête de l’apprenant)
Explication :
Selon Gagné, on capte l’attention en utilisant un procédé quelconque, parfois une
simple phrase comme « Nous allons commencer », Cela informe les élèves que le cours
va débuter et qu’il est temps d’écouter.
Les attentes dirigent l’attention des élèves vers les buts choisis afin qu’ils puissent
se concentrer sur ces objectifs et soient motivés pour les atteindre. Il faut leur dire ce
qu’ils doivent être capables de faire à la fin du cours ou bien leur faire lire le
questionnaire final pour qu’ils sachent ce qu’ils doivent apprendre.
Le rappel des connaissances préalables dans la mémoire de travail se fait par des
rappels et à l’aide des concepts intégrateurs. On peut aussi poser des questions qui
aideront les élèves à organiser leurs idées.
La perception sélective est obtenue grâce à une présentation très claire du contenu
de la leçon à l’aide d’objets ou d’illustrations. Le plan doit être rigoureux et conçu pour
faire ressortir les informations importantes. L’enseignement doit être très vivant pour
que les élèves perçoivent facilement son importance et sélectionnent les données
importantes à mémoriser.
L’encodage fait référence à la forme sémantique (verbale), sous laquelle une
donnée est mise en mémoire. L’enseignant peut poser des questions pour aider les
élèves à formuler les concepts avec leurs propres mots. En donnant différents types
d’exercices dirigés, il leur permettra de maîtriser le nouveau contenu et de
l’emmagasiner en mémoire à long terme. Cette étape prolonge la leçon. Elle donne aux
élèves l’occasion de consolider leurs connaissances et d’avoir une réponse claire à leurs
questions.
On obtient la réponse d’abord à l’aide d’exercices (souvent oraux et en groupe)
sous forme de questions, puis par des travaux individuels. L’enseignant pourra proposer
des façons pertinentes d’organiser le contenu. Les exercices ou activités contribueront à
fixer les nouvelles connaissances dans la mémoire.
Le renforcement se fait par des exercices supplémentaires (exercices systématiques,
devoirs à la maison ou série de questions) avec une correction immédiate. Des études
ont montré que la rétention est meilleure quand les enseignants ont trouvé un moyen
permettant à chaque élève de répondre individuellement (soit en levant la main, soit en
montrant la réponse sur sa feuille) au lieu d’avoir une réponse de groupe. L’apprenant
doit pouvoir vérifier aussitôt si sa réponse est juste ou, sinon, quelle est la bonne
réponse.
Le rappel et le renforcement s’obtiennent souvent en donnant aux élèves un moyen
mnémotechnique (aide-mémoire) dont ils pourront se servir pour se rappeler une
réponse. Il est aussi important de les habituer à répondre à des questions qui
nécessitent le transfert et la mise en pratique des connaissances.
Quand les élèves semblent avoir appris le contenu enseigné, on les soumet à un
contrôle officiel. Ce test va montrer tout ce dont ils arrivent à se souvenir. Revoir
ensuite le contrôle en classe va aider les élèves à en fixer le contenu. Après le contrôle,
il est important de réviser les concepts de temps à autres pour qu’ils ne soient pas
oubliés.
Le rappel et la généralisation s’obtiennent en habituant les élèves à répondre à des
questions qui nécessitent le transfert et la mise en pratique d’informations. Ces
questions doivent être préparées avant le cours, en tenant compte d’autres sujets et
41
Application
La contagion de l’exemple
Bandura affirme que, dans la vie courante, « les gens apprennent la majeure partie de
leurs comportements en observant ceux qui en donnent l’exemple » (1977, p. 22). Il
souligne l’immense diversité des comportements bien imités : par exemple, les
compétences linguistiques, les styles de vie, les attitudes, les émotions, les modes, les
habitudes, les façons de faire (comment se raser ou faire le ménage), les
comportements obéissant à des règles, les normes sociales et morales. Il reconnaît la
forte influence des personnes importantes dans notre entourage (parents, héros
sportifs…) et étudie l’énorme potentiel multiplicateur des modèles présentés dans les
média (acteurs, personnalités de la télévision…). « Les exemples peuvent instruire,
inhiber, désinhiber, faciliter, renforcer un stimulus et provoquer des émotions. »
(Bandura 1977, p. 50).
Les publicités à la télévision inculquent souvent quelque chose par l’exemple. Voici
un exemple hypothétique, quoique correspondant bien à la réalité :
On montre un 4x4 traversant un terrain accidenté alors que son conducteur est
assis dans le véhicule climatisé. (Exemple instructif : le spectateur apprend quelles sont
les performances du véhicule.)
Les vêtements et l’attitude du propriétaire du 4x4 indiquent que le véhicule est
celui de Monsieur Tout-le-monde. (Désinhibiteur, au cas où la réaction initiale du
spectateur serait que le véhicule est trop cher.)
La femme séduisante assise à côté du chauffeur montre que le véhicule apporte
prestige et succès amoureux. (Renforcement du stimulus et éveil d’émotions.)
On voit le couple s’avancer vers un grand garage où ces 4x4 sont vendus à bas prix.
(Facilitation : cela montre au spectateur comment acheter un nouveau 4x4.)
Une vidéo finale montre des amis déçus d’avoir acheté un modèle plus cher qui n’a
pas les mêmes performances. (Inhibiteur : le spectateur apprend à se méfier des modèles
plus chers.)
Le terme « modèle » peut se rapporter à une personne dont le comportement peut être
perçu comme positif par quelqu’un qui essaiera de l’imiter. Cependant, des individus
qui ne respectent ni les règles, ni les conventions, ni la morale peuvent aussi donner
indirectement un fort enseignement. Leurs pairs, voyant les conséquences de leurs
actes, décident souvent que cela ne vaut pas la peine de prendre de tels risques.
Les modèles exemplaires : Ceux qui manifestent un comportement, qu’il soit bon
ou mauvais, sont appelés modèles exemplaires. Observer le choc et les regrets de ceux
qui ont perdu des êtres chers dans des accidents causés par la conduite en état
43
d’ivresse, par exemple, a fortement contribué à ce que, dans notre société, on accepte
que, si l’on boit, on ne doit pas conduire.
Les modèles symboliques : Contrairement aux modèles vivants, ces modèles
peuvent être des livres, des enseignements écrits, des photos, des images mentales, des
personnages de bandes dessinées, dessins animés ou de films, des figures religieuses et
des personnalités de la télévision.
Casimir, le sympathique dinosaure orange de la télévision française des années
1980, est un modèle symbolique qui enseigne des règles sociales aux jeunes enfants en
leur montrant ce qu’est la gentillesse, l’adaptation aux besoins des autres et la prise en
considération de leurs sentiments.
Lire dans un journal les problèmes rencontrés par un adolescent rebelle qui a été
exclu de l’école ou a plongé dans la drogue peut avertir d’autres jeunes des risques d’un
tel comportement.
L’exemple sera efficace s’il respecte les étapes que Bandura a identifiées. Dans la
société, ce processus se produit naturellement. Si des enseignants veulent préparer un
enseignement par l’exemple, ils devront suivre chacune des étapes suivantes :
1. Le processus attentionel : pour toucher l’apprenant, le modèle doit attirer
l’attention (en étant séduisant, célèbre, en ayant du succès) ou être, d’une façon ou
d’une autre, attachant et crédible. Les comportements exemplaires doivent également
suivre un plan rigoureux, conçu pour attirer l’attention. Ils doivent être
caractéristiques, attrayants, moyennement complexes (ni trop simples, ni trop
difficiles), assez communs pour être pertinents et fonctionnels.
Les apprenants doivent être physiquement capables de recevoir les stimuli et de
les imiter (inutile de montrer un film à des gens qui voient mal, par exemple !). Il faut
qu’ils aient envie de le faire et soient convaincus que, s’ils essaient d’imiter l’action
donnée en exemple, ils réussiront. (Reiser et Gagné, 1982, p. 499–512).
Par exemple, on demande souvent à des joueurs de basket-ball célèbres d’entraîner
des enfants handicapés ou des jeunes. En tant que modèles, ils attirent l’attention grâce
à leurs compétences et à leur succès. Quand ils entraînent le groupe à un niveau de
difficulté adapté, la tâche n’est ni trop difficile ni trop facile, mais appropriée et utile à
des enfants qui ont besoin d’avoir confiance en eux-mêmes. Le succès de leur
entraîneur les encourage à croire qu’avec beaucoup de travail ils pourront eux aussi
atteindre leurs objectifs.
2. Les processus de rétention. Pour que les élèves bénéficient du comportement
montré, ils doivent se souvenir de ce qu’ils ont vu. Un encodage symbolique
(habituellement, une explication verbale) aide les élèves à retenir une leçon. Une
illustration marquante peut avoir le même effet, tout comme une répétition mentale, et
une répétition (une mise en pratique) de l’action motrice.
Par exemple, l’émission télévisée éducative « 1, rue Sésame » pour les enfants, ou les
séries télévisées pour adultes portant sur des leçons de cuisine, d’art ou d’exercice
physique. Ces émissions sont préparées avec soin de façon à être intéressantes, avec des
couleurs vives et des actions dont on se souvient facilement. On y trouve toujours une
démonstration et, en plus des explications verbales, il peut y avoir des sous-titres. Les
44
modèles sont attrayants et les sujets adaptés à chaque âge visé. Les images vives et les
démonstrations rendent ces cours faciles à mémoriser et illustrent bien les principes de
Bandura.
3. Les processus de reproduction motrice consistent à mettre en pratique le
comportement montré, qu’il s’agisse d’être une bonne hôtesse, de faire un discours, de
nager ou lancer correctement un ballon. Les techniques complexes telles que le billard,
le golf ou la gymnastique acrobatique demandent une longue période de tâtonnements
et d’améliorations par de l’autocorrection et des retours sur la performance.
4. Les processus motivationnels. Même si on a appris un comportement, on ne le
met pas nécessairement en pratique. Tout dépend des conséquences observables. La
récompense ou l’absence de récompense influencent la mise en pratique de façon
positive ou négative. De plus, tout le monde n’a pas les mêmes goûts, ce qui fait que le
comportement exemplaire n’est pas accepté par tous de la même façon. Il est donc
important que les enseignants donnent des incitations qui sont des récompenses aux
yeux des élèves.
Le renforcement
Les conséquences extérieures auront un grand impact sur le comportement quand elles
sont compatibles avec les valeurs déjà internalisées. Ainsi, les actes suivis d’une
récompense externe procurent de l’autosatisfaction et les actes suivis d’une punition
externe sont autocensurés (Bandura, 1977, p. 155). À cause de cela, les gens ont
tendance à s’associer à ceux qui ont les mêmes normes de conduite, ce qui assure un
soutien social à leur propre système d’auto renforcement.
Ceux qui, pour une raison ou une autre, se conduisent sciemment de manière
répréhensible ont des mécanismes pour éviter de se sentir coupables. Voici ceux que
Bandura (1977, p. 155–158) décrit :
La justification morale : les actes répréhensibles sont justifiés parce qu’ils servent à
des objectifs prétendument valables : de nombreux actes de cruauté, par exemple, ont
été opérés au nom de principes religieux, d’idéologies de pureté et de l’ordre social
(1977, p. 156). Les Nazis ont exterminé des Juifs au nom de « la purification raciale ».
La comparaison palliative : on fait paraître dérisoires des actes répréhensibles en
les comparant à des atrocités plus flagrantes ; « Ce que je leur ai fait n’est rien en
comparaison avec ce qu’ils m’ont fait. »
L’euphémisation : la personne désigne des activités répréhensibles par un
euphémisme qui les masque, diminue leur gravité, voire les rend respectables. « Une
abondance de paroles, qui ne disent presque rien, vise à minimiser une conduite
pernicieuse et à dédouaner de leurs actions ceux qui les commettent. » (1977, p. 156)
Les exemples sont multiples : les termes « pieux mensonges », « emprunter » (pour
« voler »), « tombé du camion » (pour « voler »), « elle a fêté Pâques avant les
Rameaux » au lieu de « elle a eu un enfant avant le mariage », « il a fait une bêtise » au
lieu de « il a commis un délit ».
Minimiser les conséquences : Justifier l’acte en lui accordant peu d’importance, par
exemple :
« Personne n’a souffert. » ; « Cela a seulement touché un petit groupe de gens. » ; « Pas
besoin de leur rendre l’argent : ils sont riches. »
46
Ignorer les conséquences, c’est négliger les effets néfastes de nos actions,
notamment quand leurs conséquences n’affectent pas directement les personnes au
pouvoir. Les gouvernements et l’industrie, par exemple, nient souvent la pollution de
l’environnement ou les risques d’accident du travail jusqu'à ce qu’il y ait une crise
sanitaire ou des accidents.
Mal interpréter les conséquences : Certains se persuadent eux-mêmes que personne
ne va découvrir qu’ils ont fait de fausses déclarations d’impôt, ou bien qu’ils se sont
enrichis en détournant des fonds ou encore qu’ils peuvent résoudre une mésentente en
accusant à tort un collègue pour le faire licencier. En interprétant mal les conséquences
de leurs actions, ils parviennent (au moins pour un temps) à ne pas tenir compte des
effets négatifs de leur conduite et à éviter le sentiment de culpabilité.
peuvent se grouper pour harceler un enfant plus faible et se montrer plus insensibles
collectivement que s’ils agissaient seuls.
Il faut que les enseignants sachent voir clair dans ces justifications d’actes
répréhensibles pour aider les élèves à s’en rendre compte afin de les éviter.
Pour les enseignants, l’intérêt de la théorie de l'apprentissage social est de porter sur les
stratégies d’enseignement et d’apprentissage qui ont fait leurs preuves dans le
fonctionnement de la société. Montrer l’exemple est parfois le meilleur moyen
d’enseigner certains comportements et de mettre en garde contre d’autres. En s’en
inspirant, les enseignants en tireront un bénéfice. Pour que l’exemple réussisse, il faut
cependant veiller à :
• Attirer l’attention ;
• Rendre l’apprentissage mémorable ;
• Donner des occasions de le mettre en pratique ;
• Dispenser des récompenses appropriées aux yeux des élèves.
On doit fixer des attentes d’efficacité. Bandura (1977, p. 80) conseille de montrer
aux élèves qu’ils sont capables de réussir au moyen :
• de tâches réalisées (en les aidant à les faire) ;
• d’expériences indirectes (observer quelqu’un d’autre faisant l’action) ;
• de persuasion verbale (leur dire qu’ils sont capables de le faire) ;
• d’éveil de leurs émotions (les aider à vouloir faire la tâche).
Le renforcement, interne, externe et indirect entretient les comportements. Les
élèves oublient un comportement quand il n’est plus renforcé. Il est possible de leur
apprendre à se fixer des objectifs et à se récompenser par un auto renforcement
approprié.
Pour les enseignants qui enseignent à des minorités ethnolinguistiques, montrer
l’exemple est un excellent outil pédagogique, tout comme l’emploi de marionnettes, de
jeux de rôles, de saynètes ainsi que l’exemple de visiteurs officiels, de certains parents,
de notables et autres personnalités.
Application
Introduction
Les recherches de Herman A. Witkin et de ses associés, commencées dans les années
1940, sont à l’origine d’une l’école de pensée : les styles d’apprentissage.
Les styles d’apprentissage concernent la façon dont les gens abordent
habituellement des tâches d’apprentissage. Il existe différents styles d’apprentissage :
auditif, visuel, kinesthésique ou tactile (Constantinidou et Baker, 2002 ; Dunn et
Griggs, 2003), mais notre chapitre portera sur les styles d’apprentissage cognitifs, c’est-
à-dire les processus mentaux impliqués dans l’apprentissage.
Witkin et ses collègues ont identifié deux principaux styles d’apprentissage : la
dépendance du champ et l’indépendance du champ (Cohen, 1968, 1969 ; Witkin, 1978,
p. 2). Leurs découvertes ont suscité un vif intérêt parmi les pédagogues et, au fil des
ans, d’autres styles d’apprentissage ont été proposés. Ils sont représentés ci-dessous
comme les pôles d’un continuum :
Pour comprendre les contrôles cognitifs, Klein, Gardner et Schlesinger (1962) ont
fait des recherches sur la tolérance à des expériences irréalistes. Kagan, Rosman, Day,
Albert et Phillips (1964) ont étudié le traitement de l’information en fonction des
attitudes analytiques ou réflexives. Pask (1976a ; 1976b) a amélioré les connaissances
sur les apprenants holistiques, les apprenants analytiques et ceux qui fonctionnent selon
les deux modes (à savoir les apprenants bicognitifs 1 qui manifestent des compétences à la
fois holistiques et analytiques). Dunn et Dunn (1978) ont étudié les éléments de
l’environnement et les méthodes pédagogiques qui affectent nettement les apprenants
n’ayant pas les mêmes styles d’apprentissage. Avec Price, ils ont élaboré cinq
1
Un apprenant bicognitif utilise les deux façons d’apprendre : le mode holistique et le mode analytique.
L’un des deux modes est néanmoins souvent dominant.
48
49
Les termes en usage pour décrire les fonctions cognitives comportent d’importantes
nuances.
Le style cognitif se rapporte à la manière dont le cerveau d’une personne traite des
données.
Le style d’apprentissage cognitif est la manière habituelle avec laquelle une
personne apprend. Ce n’est pas la même chose que :
Le développement cognitif : capacité croissante du cerveau à traiter l’information et
qui évolue avec les stades successifs de son développement.
Les stratégies d’apprentissage : techniques spécifiques utilisées pour favoriser
l’apprentissage, telles que la démonstration ou la répétition en groupe.
Les modalités habituelles d’apprentissage : méthodes d’apprentissage et
d’enseignement habituellement utilisées dans une société donnée.
Les lecteurs doivent bien identifier ces différences et utiliser les termes avec
précision, car les publications scientifiques les confondent parfois.
Les chercheurs ont utilisé parfois des termes différents pour les deux styles
principaux d’apprentissage que Witkin et ses collaborateurs appellent dépendance du
champ et indépendance du champ :
Après des années de travail, Witkin et ses collègues sont parvenus à mettre au point des
tests qu’ils ont jugé fiables et qui permettent d’identifier les différences de style cognitif
(Witkin, 1974, p. 103 ; 1976, p. 39–42 ; Witkin et al., 1977, p. 2–6). Les trois
principaux tests sont :
• Le test appelé Rod-and-Frame Test : on demande aux sujets de placer une tige
lumineuse à la verticale tandis qu’un cadre lumineux, seul point de référence dans
une pièce totalement sombre, est en position inclinée ;
• Le test appelé le Body-Adjustment Test : on demande aux sujets, assis dans une pièce
où tout est penché, de se tenir droits ;
• Le test appelé Embedded Figures Test (Test des figures imbriquées) : on présente des
figures géométriques ; les sujets doivent ensuite les retrouver dans une figure plus
complexe.
Exemples de figures
Si le sujet arrive à accomplir ces tâches de façon satisfaisante, on dit qu’il est
indépendant du champ (IC), puisqu’il est capable de percevoir les éléments en les
isolant du champ organisé dont ils font partie. S’il n’y arrive pas, on dit qu’il est
dépendant du champ (DC), puisque l’environnement exerce une influence sur sa
perception des éléments constituants. Cependant, les résultats à ces tests montrent une
51
Suite aux découvertes de Witkin, les styles cognitifs sont définis comme étant :
[…] les modes typiques de fonctionnement logique présents dans toutes les activités
cognitives, c’est-à-dire dans les activités intellectuelles et perceptives. Ce sont […] des
manifestations […] de dimensions encore plus larges du fonctionnement personnel, qui
se retrouvent sous une forme similaire dans de nombreux domaines de l’activité
psychologique. (Witkin, 1974, p. 99)
Messick l’exprime plus simplement : « Les styles cognitifs sont les différences
individuelles constantes dans la manière d’organiser et de traiter l’information. »
(Messick, 1978, p. 5) Ausubel et ses collègues ont confirmé cette définition (1978,
p. 203).
Dans un important article qui résumait les connaissances accumulées jusqu’à la date de
sa rédaction, Cohen (1969, p. 844–852) a utilisé les termes analytique et relationnel
pour décrire les styles cognitifs dépendants ou indépendants du champ. Les
caractéristiques socio comportementales de chaque style étaient présentées en détail
dans des tableaux. Par exemple :
52
Analytique Relationnel
Sensibilité aux parties d’objets Sensibilité aux caractéristiques
globales
Attitude plus réfléchie Les réactions apparaissent plus
impulsives
Grande concentration Dispersion
Préférence pour une distance Préférence pour une intégration
sociale sociale
Fait beaucoup d’abstractions Fait peu d’abstractions
Voit l’enseignant comme une Voit l’enseignant en tant que
source personne
d’information
Cohen (1969, p. 829) considérait les styles cognitifs comme des traits hautement
individuels, indépendants des capacités innées, de la race, du sexe ou du statut socio-
économique. Les styles cognitifs, cependant, ont un impact direct sur l’apprentissage
(Cohen, 1968, p. 201).
Witkin (1978, p. 25–29) était d’accord avec les descriptions faites par Cohen. Il
considérait l’IC et la DC comme des paramètres de traitement, des dimensions
omniprésentes du fonctionnement individuel, bipolaires (c’est-à-dire se trouvant le long
d’un continuum) et dont la valeur est neutre (c’est-à-dire qu’elles sont également
valables et utiles). Les résultats de ses travaux montrent aussi que le style cognitif d’une
personne tend à rester stable dans la durée et quel que soit le domaine (Witkin, 1978,
p. 25–29 ; Witkin, Moore, Goodenough et Cox, 1977, p. 7, 15).
La différenciation psychologique
Selon Bertini, Pizzamiglio et Wapner (1986, p. 95), parmi toutes les théories cognitives,
c’est celle de Witkin qui a été la plus documentée tant pour la société occidentale que
sur le plan interculturel avant 1966 (Witkin, 1967). Bien qu’on reconnaisse que la
DC/ID est une affaire individuelle, on a aussi observé, dans certaines cultures, une
prédominance pour l’un ou l’autre mode de fonctionnement (Chapelle et Roberts, 1986,
p. 29).
Les sociétés agraires ou autoritaires, qui ont en général une forte organisation sociale et
ont des normes d’éducation très strictes, ont tendance à produire davantage de
personnes dépendantes du champ. Les sociétés démocratiques et industrialisées avec des
pratiques d’éducation plus souples tendent à produire plus d’indépendance du champ.
(Hansen, 1984, p. 313, citant Witkin et Goodenough, 1981 et Berry, 1976)
Ainsi, beaucoup de citoyens des États-Unis sont indépendants du champ (Ramirez
et Castañeda, 1974, p. 156), tout comme les Mende du Sierra Leone (Witkin, 1974,
p. 106–108) et les Esquimaux (Witkin, 1974, p. 109–110). Les enfants mexico-
américains tendent, eux, à être plus dépendants du champ (Ramirez et Castañeda,
1974, p. 79, p. 132–133), tout comme les afro-américains (Cox et Ramirez, 1981), les
membres de certains groupes amérindiens d’Amérique du Nord (Pepper et Henry c.
1984, p. 4), les Aborigènes australiens (Harris, 1982), certaines minorités ethniques de
la jungle péruvienne (Davis, 1987, p. 2) ainsi qu’au moins une des cultures ethniques
des Philippines (Bulmer, 1983) et une du Ghana (Lingenfelter et Gray, 1981).
Cohen (1969, p. 852–854) a décrit les différences d’organisation collective selon les
styles cognitifs. Parmi celles-ci, elle a cité :
Caractéristiques du groupe
Analytique : organisé de façon formelle Relationnel : Fonctions partagées
Les fonctions essentielles sont définies en Les fonctions essentielles sont liées aux
bonne et due forme et partagées statuts socio-économiques
L’individu se réserve le droit de refuser L’individu ne peut pas refuser d’agir
d’agir
Identification occasionnelle au groupe Forte identification au groupe
54
2
Les tests des « textes à trous » servent à évaluer la compréhension écrite. On demande aux élèves de
lire un paragraphe dans lequel un mot sur cinq (ou sur huit ou sur dix) a été remplacé par un blanc,
selon le niveau de difficulté souhaité par l’enseignant. (Plus il y a de mots enlevés, plus le test est
difficile.) Les élèves doivent remplir les blancs. S’ils retrouvent les mots exacts employés par l’auteur,
c’est la preuve qu’ils ont bien compris le texte.
55
Voici [...] le cas de deux jeunes micronésiens qui ont vécu pendant six ans au domicile
de l’un des auteurs. Ces jeunes étaient apparentés, mais l’un avait tendance à être
relationnel [R] alors que l’autre était plus analytique [A]. L’étudiant A a très bien réussi
dans le système scolaire américain, car il était doué pour l’analyse et l’abstraction.
L’étudiant R, bien qu’intelligent, a eu beaucoup plus de difficultés à comprendre les
exigences des devoirs à l’université. Cependant, de retour en Micronésie, ce dernier s’est
assez rapidement adapté et a fait honneur à son père. Sa capacité à saisir une situation
dans son contexte l’a énormément aidé dans son travail. Par contre, l’étudiant A a eu
beaucoup de difficultés à s’adapter aux exigences culturelles de la Micronésie, où son
aptitude pour l’abstraction et les questions l’ont fait passer pour un « Monsieur-je-sais-
tout » et où les personnes plus âgées n’apprécient pas du tout ses idées de changement.
(1981, p.15–16)
En 1983, après plusieurs études transculturelles, Greenfield a conclu, non sans
hésitation, que, dans le domaine de la formation de concepts, des systèmes où les
catégories sont fermées (où les erreurs ne sont pas permises, car il n’y a qu’une réponse
ou qu’un seul résultat considéré comme juste) font principalement appel à l’observation
et à la démonstration. Les systèmes ouverts (où l’expérimentation est permise) sont
enseignés, eux, par essais ou erreur, ce qui ouvre la porte à l’innovation mais aussi aux
erreurs (1983, p. 128).
Cox and Ramirez (1981, p. 62–63) identifient trois facteurs qui influencent la
manière dont les enfants apprennent à se comporter : la tâche, la situation et les
contenus. Selon Cox et Ramirez, la manière dont les parents éduquent leurs enfants
exerce, chez ces derniers, une influence primordiale sur l’installation de leur mode
habituel d’apprentissage. Le style éducatif des parents est lui-même fortement influencé
par les valeurs culturelles. Voici donc un schéma représentant les influences qui
s’exercent.
Les manières dont
Les valeurs influencent Les pratiques de qui influencent les enfants
culturelles socialisation
préfèrrent apprendre
Les études faites par Greenfield (1976, p. 322–333) au Mexique, parmi les
Zinacantan du Chiapas, ont confirmé que, dans des situations multiculturelles, les
recherches effectuées selon les méthodes occidentales (questions, explications verbales
et raisonnement hypothétique) peuvent ne pas donner de résultats fiables, surtout s’il
s’agit de sujets peu familiers. (Greenfield recommande, dans le cas de test où l’on pose
des questions, que les consignes soient accompagnées d’exemples concrets clarifiant ce
que la personne testée doit faire). De plus, elle souligne la nécessité de comprendre les
idéaux culturels. À partir de là, on peut identifier la façon dont ces valeurs sont
inculquées aux jeunes. Les méthodes et les stratégies utilisées pour diriger
l’apprentissage et façonner le style cognitif dans la culture en question ne seront pas
nécessairement conformes aux schémas de pensée occidentaux.
Laosa reconnaît que la communication du savoir-vivre à des enfants est propre à
certaines cultures et tend à favoriser le développement de styles cognitifs particuliers,
mais il signale le risque d’appliquer aux individus les résultats obtenus au niveau du
groupe. Il soulève alors une autre question :
Si […] des styles cognitifs caractéristiques sont adaptés aux contextes écologiques et
culturels dans lesquels vivent les groupes au sein d’une société, qu’advient-il de ces
56
L’aptitude à se développer
Witkin (1974, p. 100–101) a décrit le processus mental comme passant par différentes
étapes de développement allant de la perception globale d’un domaine à une
perception organisée d’éléments distincts, mais où néanmoins une structure est imposée
à l’ensemble. Les études que Greenfield a faites au Sénégal, parmi les Wolof en 1963–
1964, le confirment (Greenfield et Bruner 1966, p. 104–105). Greenfield a testé la
façon dont les différentes catégories d’enfants wolofs (ceux des campagnes qui
n’allaient pas à l’école, ceux qui étaient scolarisés en brousse, ceux des villes)
catégorisaient les concepts. Elle a constaté ceci :
[…] C’est toujours la scolarisation qui modifie la direction du développement des
enfants et sa qualité. Les enfants Wolof scolarisés présentent, avec les enfants vivant
dans le même village de brousse mais non scolarisés, plus de différences intellectuelles
qu’avec ceux des villes du Sénégal, ou même de […] Brookline dans le Massachusetts.
(1966, p. 104)
Greenfield et Bruner (1966, p. 104) mentionnent d’autres études menées au Congo
belge (Cryns, 1962) et en Afrique du Sud (Biesheuvel, 1949) qui démontrent l’immense
influence de la scolarisation.
Néanmoins, une étude ultérieure faite parmi les Zincantecan au sud du Mexique
(Greenfield, Brazelton et Childs, 1989) n’a pas confirmé les résultats des premières
recherches. La scolarisation n’a pas influencé le résultat de tests où les sujets devaient
classer des objets ou représenter des motifs tissés (1989, p.38–39). En revanche, les
différences reflétaient le niveau culturel et, dans une moindre mesure, le sexe du sujet.
Pour les Zinacantecan, la conservation des valeurs de leur culture est une priorité.
Les enfants apprennent en commençant par observer, puis essayent d’imiter sous le
contrôle constant de la mère ou d’un mentor qui intervient chaque fois que l’apprenant
hésite, de sorte qu’il y a peu de possibilité d’erreur. De ce fait, les enfants pensent qu’il
n’y a qu’une bonne façon de faire, la façon traditionnelle. La créativité et l’expression
personnelle ne sont pas valorisées, mais au contraire, réprimées. Devant une nouvelle
tâche demandant de l’ingéniosité, les enfants avaient tendance à être bloqués, car il ne
leur était pas possible de faire autrement que selon la manière établie. La plupart des
exceptions ont été trouvées parmi les garçons, car certains étaient autorisés à faire des
expériences en-dehors de la société zinacantecan. Comme les Zinacantecan voulaient
que ce soient ces jeunes qui résolvent les problèmes lors des transactions avec la société
hispanique, ils ont souhaité que ceux-ci aient plus d’idées novatrices (1989, p. 42).
Une expérience faite dans la forêt amazonienne au Pérou montre qu’on peut
apprendre des stratégies concernant la DC/IC si celles-ci sont explicitées et présentées
lentement. (Davis, 1981, p. 231–232). C’est ce que montre également une expérience
faite au Ghana :
« Parmi les Bulsa, l’anglais était à la fois la langue officielle et la langue de prestige.
Les enfants fréquentaient les écoles anglophones. Le taux d’abandon scolaire était élevé
et, donc, le taux de poursuite des études était faible. En cherchant à utiliser la capacité
57
des Bulsas à mémoriser de façon globale, Claire Gray a rédigé un nouveau manuel de
lecture qui ne contenait que seize mots. Le manuel suivant ajoutait seulement
l’équivalent de « C’est ». Certains mots clés étaient décomposés en syllabes, mais
seulement ceux dont les syllabes, prises séparément, avaient un sens. Grâce à la
signification des syllabes, les élèves ont vite compris la syllabation. Le 3ème manuel
contenait des histoires toutes simples et élargissait leur vocabulaire à environ 80 mots,
mais seuls quelques mots nouveaux étaient décomposés en syllabes. Le 4ème manuel
montrait comment transférer la décomposition en syllabes à des mots dont les syllabes,
prises seules n’avaient pas de sens. Les enfants avaient alors acquis l’analyse et la
synthèse et ils ont progressé sans autres difficultés. »
À ce sujet, Pepper et Henry font remarquer que, bien qu’il soit souhaitable de tirer
profit des styles d’apprentissage des élèves quand on leur présente de nouveaux
concepts, il est aussi nécessaire de les aider à acquérir d’autres styles pour qu’ils
continuent leur développement intellectuel. « Trop souvent, les élèves indiens
progressent normalement ou brillamment dans une école « protégée » pour échouer,
dès qu’ils la quittent […]. N’est-il pas de notre devoir de développer les styles
d’apprentissage des élèves indiens […].pour éviter de les enfermer dans un certain
moule ? » (Pepper et Henry, circa 1984,
p. 18–19).
Ayant trouvé que les apprenants relationnels avaient tendance à avoir de moins bons
résultats aux tests de Q.I., Cohen a fait une étude des mesures non verbales de
l’intelligence. On pensait que les tests verbaux étaient les seuls à avoir une composante
culturelle et que les tests non verbaux portaient uniquement sur le raisonnement
logique. Or elle a trouvé que « la nature même de ces séquences logiques véhicule les
aspects les plus liés à la culture de la classe moyenne ou à la façon « analytique » de
penser ». (1969, p. 840)
Les résultats d’évaluation de soixante-six élèves de 3ème et de 2nde (14 à 16 ans),
d’intelligence moyenne ou supérieure, confortent sa position. Les élèves plus
intelligents, plus relationnels, ont eu de très faibles résultats (15ème au 20ème centile)
à deux sous-tests du « Project Talent Achievement Inventory » 3 mais ont eu de très bons
résultats (90ème au 95ème percentile) pour deux séries de problèmes concrets. Cohen
en a conclu que, pour bien apprendre et avoir de bons résultats, les élèves très
relationnels ont besoin de concret et que le degré d’abstraction requis pour les tests de
Q.I. joue en leur défaveur.
Comme les tests de Q.I. ne mesurent pas correctement les styles cognitifs, Witkin a
proposé de les remplacer par une évaluation des styles cognitifs (1976, p. 70–71).
3
Litt. Projet talent : bilan des acquis
58
La discrimination scolaire
Suite à ses recherches, Cohen a identifié une autre source de problème pour les
apprenants relationnels. Les systèmes scolaires occidentaux étant fondés sur le modèle
analytique (IC), l’apprenant relationnel (DC) a « peu de chance d’être gratifié dans le
contexte scolaire, quelles que soient ses capacités naturelles et même s’il a les
connaissances et l’expérience adéquates. » (Cohen, 1969, p. 830). De ce fait, les
apprenants holistiques se sentent souvent frustrés et désavantagés. En utilisant une
batterie de tests psychologiques, de tests linguistiques et de tests d’attitudes, Cohen
(1968, p. 209) a identifié quatre catégories de réponses clairement différenciées :
• Les élèves très relationnels : faibles résultats scolaires ou en deçà de leurs
possibilités ;
• Les élèves très analytiques : bons résultats scolaires ;
• Les élèves moyens sur le plan relationnel et analytique : résultats dans la moyenne ;
• Les élèves très analytiques et très dépendants du champ : résultats moyens qui ont
montré des réponses conflictuelles et une certaine confusion.
Les preuves de Cohen ont conforté la conclusion de Witkin, qui affirme que les
styles cognitifs sont influencés par les premières expériences vécues dans la famille et
dans le groupe. Les tests de Cohen sur 500 élèves de 3ème (14–15 ans) n’ont cependant
donné aucun signe d’un lien entre le style cognitif et les capacités naturelles (1969,
p. 838).
Pepper et Henry identifient le handicap scolaire dont souffrent les apprenants DC
amérindiens : « en règle générale, les élèves amérindiens apprennent plus vite lorsque
l’enseignement va du concret vers l’abstrait, de la pratique à la théorie. Or, la plupart
des écoles suivent le modèle américain d’origine européenne qui va de la théorie à la
pratique » (circa 1984, p. 16).
Parlant des styles d’apprentissage traditionnels parmi les Aborigènes australiens,
Harris (1982, p. 129–133) a établi une liste des caractéristiques qui apparaissent
comme très relationnelles :
• Un apprentissage informel, conduit par différents membres de la famille sur
plusieurs années et passant surtout par des moyens non verbaux, sans lieu conçu à
cet effet ; c’est un processus inconscient issu des besoins vitaux ;
• L’observation et l’imitation (plutôt que des instructions verbales) ;
• L’apprentissage par essais et erreurs (plutôt que par des instructions verbales) ;
• Tourné vers les personnes (plutôt que vers les informations) ;
• Un apprentissage de l’ensemble (plutôt que des parties) ou en faisant des
approximations jusqu’à obtenir un bon produit final (plutôt qu’en séquençant les
compétences) ;
• L’acceptation de l’univers comme une chose « donnée » et non comme quelque
chose à changer ou à manipuler ;
• L’utilisation de l’insistance et de la répétition au lieu de l’analyse comme méthode
de résolution de problème ;
• Un évitement de la confrontation verbale ;
59
Witkin, Moore, Goodenough et Cox ont fait une revue des travaux sur les perceptions
faits jusqu’en 1977 et ont énuméré les domaines d’apprentissage qui sont influencés par
les styles cognitifs (1977, p. 17–27).
Le contenu social
Witkin et al. (1977, p. 18–19), citant des études faites par Ruble et Nakamura (1972),
Crutchfield et al. (1958), Fitzgibbons et al. (1965), affirment, preuves à l’appui, que les
sujets dépendants du champ, enfants comme adultes, arrivent mieux à assimiler et à
utiliser les indices sociaux, à mémoriser les visages et à apprendre le savoir social
entourant une tâche sur laquelle ils font porter leur attention.
Witkin en conclut : « les personnes dépendantes du champ se rappellent mieux ce
qui a trait aux relations humaines […] Cela est dû au fait qu’elles font porter leur
attention sur le contenu social. » Elles ont tendance à être meilleures dans les tâches ou
les situations où il faut prendre en compte des indices sociaux (Ruble et Nakamura,
1972).
Dans le même esprit, Bulmer (1983, p. 24–30) cite une expérience faite aux
Philippines auprès des Kalinga où les élèves n’ont progressé que lorsqu’on leur a
procuré un certain cadre social. Chez les Kalinga, le but, ce sont les personnes. Les
relations sont donc extrêmement importantes. En cas de désaccord, il faut faire appel à
des médiateurs pour éviter de faire perdre la face à quelqu’un. Pour que les élèves
soient heureux d’étudier, on ne doit pas les séparer et il faut qu’ils travaillent dans un
groupe homogène, formé de leurs fréquentations habituelles au village. Le temps en
classe doit être un temps social où les élèves sont libres de discuter de ce qui les
intéresse. On doit leur permettre de se copier et de s’entraider. Personne ne doit être
mis mal à l’aise ou humilié et on doit accepter des interruptions comme des
cérémonies, des visiteurs, ou des travaux.
Harris (1982, p. 132) relate une expérience similaire, qui, selon lui, montre que,
chez les Aborigènes australiens, l’apprentissage est tourné vers les personnes (souvent
les parents proches) plutôt que vers les informations. Pendant deux mois, avec sa
femme, il a aidé un directeur d’école lors d’un atelier d’écriture destiné à un groupe de
jeunes femmes aborigènes. Lorsque le directeur est parti en vacances pour une semaine,
60
les progrès des élèves ont pratiquement cessé. Pourtant elles continuaient à assister aux
cours. Pensant que c’était peut-être un problème de langue, même si elles maîtrisaient
plutôt bien l’anglais, les Harris ont demandé à un enseignant parlant la langue
aborigène de les aider. Bien que les élèves et le nouvel enseignant s’entendaient bien,
cela n’a guère changé à l’atelier. Celui-ci n’est revenu à la normale qu’au retour du
directeur.
Harris (1980, p. 19) donne aussi un aperçu des types d’expériences collectives qui
sont importantes pour des élèves dépendants du champ et tournés vers la tradition :
Il est courant dans la société aborigène, que des groupes fassent part de ce qu’ils ont
appris, surtout entre groupes de pairs. Ainsi, un moyen d’apprendre de longs cycles de
chants est de les chanter en groupe. De même, les cérémonies ou les cueillettes de
nourriture s’apprennent pour l’essentiel en groupe. Les membres du groupe sont donc
habitués à s’entraider. Une des raisons pour lesquelles les Aborigènes sont,
comparativement à d’autres, moins ennuyés de faire des activités répétitives est qu’elles
se passent au sein de groupes dont ils aiment faire partie. […] Un autre aspect important
[…] est que, le plus souvent, on donne la réponse à l’élève au lieu de le laisser batailler
seul pour arriver à maîtriser chaque partie. Les enseignants d’élèves aborigènes devront
décider si fournir les réponses est vraiment « tricher » ou est une mauvaise méthode
pédagogique, ou, alors, si c’est tout simplement une autre façon d’atteindre, en fin de
compte, le même but.
Le renforcement
« Comme les élèves apprenant de façon globale ont tendance à compter davantage sur
des référents externes pour se définir, […] les élèves dépendants du champ seront plus
susceptibles d’avoir besoin d’objectifs et de renforcements externes précis que ceux qui
sont indépendants du champ » (Witkin et al., 1977, p. 19). Comme leur sécurité dépend
de leur relation harmonieuse avec les autres, les personnes DC sont aussi plus sensibles
à la critique. Witkin et ses collègues citent un nombre d’études dans lesquelles les sujets
IC ont obtenus de meilleurs résultats que les enfants DC lorsque le renforcement était
abstrait, mais si les récompenses étaient matérielles ou sociales, les enfants DC et IC
avaient les mêmes résultats. En revanche, les personnes IC ont tendance à mieux
apprendre quand la motivation est intrinsèque (1977, p. 19–20).
Rapportant des preuves provenant des Kalinga (dépendants du champ), un peuple
des Philippines, Bulmer (1983, p. 29) écrit :
Le prestige obtenu est source d’une grande motivation pour l’alphabétisation et les gens
voient, déjà dans la scolarité, un moyen d’obtenir du prestige. La réussite doit être
reconnue et il est très important de donner des certificats et autres formes de
reconnaissance, lors d’une cérémonie de remise de diplômes. Le fait que le superviseur
des écoles publiques du district soit venu assister à Mallongo à notre cérémonie de
remise de diplômes pour les adultes […] a beaucoup encouragé les adultes.
L’organisation
Selon Witkin et al. (1977, p. 21–22), les élèves IC ont tendance à imposer une structure
aux contenus qui n’ont pas de structure intrinsèque manifeste. Ils créent eux mêmes des
indices qui les aident à retenir ce qu’ils apprennent. Les élèves DC, eux, éprouvent plus
de difficultés à apprendre les contenus dépourvus de structure, car ils n’inventent pas
61
aussi facilement des solutions pour organiser ou unifier les concepts. Contrairement aux
élèves IC, ils ne testent pas non plus des hypothèses. Ces auteurs font référence à une
étude que Fleming et al. ont faite en 1968, dans laquelle les sujets devaient apprendre
des mots qui soit allaient du plus général au plus spécifique (animal, vertébré,
mammifère, veau), soit étaient dans l’ordre inverse (veau, mammifère, vertébré,
animal). Dans les séries du premier type, le premier mot sert de titre ; l’hypothèse des
chercheurs était que sans cet indice, les sujets DC auraient plus de difficultés pour la
série partant de l’animal jusqu’au terme général. Comme prévu, les élèves DC se sont
rappelés de moins d’exemples de cette série alors qu’ils ont eu les mêmes résultats que
les sujets IC pour la série allant du plus général au plus spécifique.
Dans leur compte-rendu d’une étude faite par un de leur collègue, Walter
Emmerich, Witkin et al. signalent que les enseignants trouvent que les élèves DC ont de
meilleurs résultats quand on leur fournit un plan. « Une caractéristique du
comportement des personnes dépendantes du champ est qu’elles ont davantage besoin
que quelqu’un leur fournisse une structure » (1977, p. 23).
Greene (1972), cité par Witkin et ses collègues (1977, p. 23), rapporte un autre
élément prouvant que les DC ont davantage besoin de structures fournies par d’autres :
Les thérapeutes choisissent nettement plus souvent une thérapie de soutien pour leurs
patients DC et une thérapie modifiante pour leurs patients IC…Dans la thérapie de
soutien, le thérapeute joue un rôle plus important en fournissant une structure pour le
processus thérapeutique alors que dans une thérapie modifiante, le patient participe à la
détermination du contenu et à l’avancement du processus.
Des individus, mais aussi des sociétés tout entières, manifestent de grandes
capacités d’organisation. MacArthur a découvert que les Eskimos canadiens et les
Amérindiens, deux sociétés de chasseurs-cueilleurs, « étaient plus IC, c'est-à-dire, plus
aptes à imposer une structure dans les cas où il y a peu d’organisation intrinsèque (par
exemple, pour un territoire non cartographié) en raison de leur mode de vie et de leur
façon d’éduquer les enfants » (1968, cité dans More, 1984, p. 6).
Weitz « […] a étudié deux peuples amérindiens : les Algonkins et les Athapaskans.
Dans ces deux peuples, elle a distingué des populations urbaines, transitionnelles et
traditionnelles ainsi que des catégories homme/femme et personnes âgées/jeunes. Elle
a trouvé que l’ensemble de la population a un score IC très élevé » (1971, cité par
More, 1984, p. 6).
Ceci est apparemment contredit par une étude bien documentée sur les Aborigènes
d’Australie dépendants du champ. Celle-ci démontre que ces Aborigènes sont
exceptionnellement doués pour pister des animaux et s’orienter malgré l’immensité
monotone, du moins aux yeux d’Occidentaux, des terres du centre de l’Australie.
Lewis s’est aperçu que, dans des conditions normales, les Aborigènes utilisent un
« schéma topographique » complexe (Gibson, 1950) qui dépend essentiellement :
de la connaissance de points de repères importants ;
de la connaissance de l’ensemble des mythes associés à ces points de repères ;
de l’utilisation de cartes mentales dynamiques […] (Lewis, 1976a dans Klich et
Davidson, 1984, p. 172).
Lewis en a donc conclu que :
L’excellent sens de l’orientation visuo-spatial des Aborigènes du désert peut être attribué
à l’utilisation de processus de cartographie complexes suite à un « conditionnement
62
terrestre » effectué au moyen de liens émotionnels et spirituels avec la terre qui est
structurée par des réseaux d’évènements mythiques. (Lewis, 1976b dans Klich et
Davidson, 1984, p. 173)
La capacité des Aborigènes du type DC à imposer une structure au désert semble
être le résultat d’un apprentissage, exigé par la nécessité de survivre, qui s’appuie sur
une vaste structuration (les points de repère) renforcée par des croyances religieuses.
L’acquisition de concepts
4
Instrument de musique aborigène, fait d’un long bois creux dans lequel le musicien souffle.
63
Witkin et al. (1977, p. 25–27) citent les études de Bruner et al. (1956), Goodenough
(1976) ainsi que d’autres qui indiquent que les apprenants DC utilisent moins les
indices disponibles dans un champ que les IC. Face à une nouvelle situation, les
apprenants DC ont parfois également du mal à faire abstraction des indices inutiles,
mais qui ont été pertinents pour d’autres situations passées. Pour améliorer
l’apprentissage chez ces personnes, Witkin propose de leur donner des instructions qui
les aident à chercher les indices pertinents et de les encourager à trouver d’autres
manières de traiter les problèmes.
Le rôle qu’une société attend des adultes et des enfants a également un effet sur
l’apprentissage.
Flinn (1992) explique qu’en raison des valeurs de la culture de l’atoll de Pula, en
classe, il est indispensable d’être souple sur les horaires et d’être permissif.
Lipka (1991) décrit que, à la différence des coutumes pédagogiques occidentales,
un cours eskimo yup’ik se caractérise par des ordres indirects et des réponses mesurées
que l’enseignant donne calmement, d’une voix douce, en manifestant un grand respect
pour les personnes, y compris pour les enfants, car c’est ce qui est attendu d’un adulte.
Deyhle et LeCompte (1994) ont identifié des différences importantes entre les
Américains d’origine anglaise et les Navajos dans une école où les attentes envers les
adultes et les enfants affectent manifestement les cours.
64
Quelques différences culturelles dans les attentes concernant le rôle des adultes
et des enfants
Américains d’origine britannique de Navajo de 9 à 15 ans :
9 à 15 ans :
• sont toujours des enfants ; ils ne • sont en train de devenir des adultes ;
deviennent adultes qu’à l’âge d’au ils deviennent adultes après la
moins 18 ans puberté
• sont trop immatures pour prendre des • doivent apprendre à prendre leurs
décisions propres décisions et à en assumer les
conséquences
• ne savent pas ce qui est le mieux pour • sont en train d’apprendre ce qui est le
eux mieux pour eux
• doivent faire ce que les adultes leur • ne doivent pas être forcés à faire
demandent. quelque chose dont ils n’ont pas envie
Le travail de Witkin et Cohen a donné lieu à une explication physiologique des styles
d’apprentissage : ces différences seraient dues aux spécialisations de chacun des
hémisphères du cerveau. Selon le contrôle exercé par l’un ou l’autre des hémisphères,
les individus auraient des tendances analytiques ou holistiques. Si l’hémisphère gauche
prédomine, la personne tendrait à être analytique. Si c’est l’hémisphère droit, la
personne serait davantage créative et holistique. La prédominance hémisphérique serait
d’origine génétique.
Des tests neurologiques et psycho neurologiques effectués sur des patients atteints
de lésions cérébrales ont montré une spécialisation cérébrale, du moins pour certaines
fonctions.
En classe
Dans les sociétés occidentales, les méthodes d’enseignement ont, pour la plupart,
été conçues pour les apprenants analytiques. Mais, progressivement, on met au point
des stratégies d’apprentissage adaptées aux apprenants holistiques. Dans les pages
suivantes, vous trouverez quelques principes d’enseignement holistique. D’autres
sources d’informations sont recensées dans l’appendice B.
Une anectode rapportée par Harris (1982, p. 136) illustre comment a été réalisé un
programme d’apprentissage holistique :
J’aimerais maintenant montrer comment une méthode moderne s’est avérée efficace
avec au moins un groupe d’adultes aborigènes. Cette méthode intégrait de nombreux
processus d’apprentissage aborigènes et ceci sans que cela ait été le but, puisque, à
l’origine, elle a été mise au point en France pour apprendre l’anglais à des hommes
d’affaires internationaux. En 1977, la méthode audiovisuelle structuro-globale
d’enseignement de l’anglais parlé […] a été utilisée à Milingimbi (Australie), pendant six
semaines. Lors de cette formation, des Aborigènes ont été placés dans des situations
simulées où ils pouvaient apprendre les dialogues-types nécessaires pour s’en sortir
parmi les Australiens blancs. Grâce à l’usage répété de vidéos de dialogues, d’un
magnétophone et d’une machine à intonation, les élèves ont réussi peu à peu (grâce à
des mimes et des jeux de rôles) à oser s’exprimer en anglais. L’apprentissage s’effectuait
dans un cadre où les relations interpersonnelles étaient importantes. Les élèves passaient
la plupart de leur temps à essayer de parler à leurs camarades au moyen de groupes de
mots et de phrases tirés du film qu’ils venaient de voir. Ils apprenaient ainsi, par une
pratique constante, dans un environnement où ils n’étaient pas évalués, et donc ne
pouvaient pas se sentir humiliés. L’échec était impossible, car l’élève pouvait mimer le
dialogue s’il ne trouvait pas les mots. Il pouvait, de plus, choisir, dans une certaine
mesure, le moment exact et la manière de répondre, même si dans les faits, il était porté
par l’élan du groupe.
J’ai donné des cours aux adultes aborigènes, et j’ai assisté à des classes où plus
personne ne venait après deux ou trois sessions. Par contre, au bout de six semaines avec
trois heures de cours par jour, la plupart des hommes et des femmes du cours « All’s
Well » étaient toujours passionnés. J’attribue cela à une motivation initiale très forte, à
un enseignement très habile et à un processus d’apprentissage prenant bien en compte
les manières d’apprendre des Aborigènes. Il y avait une loyauté envers le clan et le
groupe, c.-à-d. une activité tournée vers les personnes ; les sessions étaient agréables,
c.-à-d. étaient une fin en soi et n’étaient pas considérées comme des exercices ennuyeux
en vue de finalités ultérieures ; il n’y avait pas de différence nette entre spectateurs et
acteurs (ce qui trouve son équivalent lors des danses aborigènes). Beaucoup d’activités
d’observation, de répétition, d’imitation, d’apprentissage par la pratique, d’essais et d’erreurs,
étaient menées, le tout dans un contexte rassurant. Il n’y avait pas de devoirs sur table et
le talent d’acteur des Aborigènes, associé à leur amour pour le spectacle, était utilisé au
maximum. Il n’y avait pas d’interrogation directe, ni de menace sur le droit qu’éprouvent
les Aborigènes à faire ce qu’ils veulent. Personne n’était mis mal à l’aise devant les autres
et il n’y avait pas de longues explications. »
69
Pepper et Henry (1986, p. 58–59) font remarquer que les élèves amérindiens peuvent
sembler désavantagés en classe, car ils développent des compétences dans d’autres
domaines que ceux requis à l’école. Ces élèves apprennent plus vite quand l’approche
est concrète et va de la pratique vers la théorie. Pepper et Henry recommandent donc
les stratégies pédagogiques suivantes :
18. Organiser des séances de brainstorming et d’activités libres non limitées dans le
temps
19. Prévoir des journées sportives et récréatives.
20. Utiliser des jeux pédagogiques.
21. Les jeux éducatifs conçus par les élèves sont particulièrement efficaces.
Extrait de: Pepper (Floy C.) et Henry (Steven L.), Social and cultural effects of Indian learning Style :
Classroom implications, Canadian Journal of Native Education, 13(1), 1986, p. 59. Reproduit avec
autorisation.
*
La première est une émission télévisée qui traite de l’école et des comportements des élèves, l’autre une
émission canadienne sur des sujets d’actualités destinés aux jeunes.
S’appuyant sur les travaux de Baumann (1984), Herold, Ramirez et Castañeda (1974) et
sur l’expérience des formations données par SIL au Brésil (Wieseman, 1978) et en
Angleterre, Kindell et Hollman ont élaboré un plan de leçon qui fait usage de stratégies
pédagogiques globales. Créé pour enseigner la linguistique, ce modèle de leçon peut
être utilisé pour des matières analytiques comme les mathématiques et les sciences. On
peut également l’adapter à d’autres disciplines. Voici le plan :
1. Introduction : un survol rapide visant à donner aux élèves une idée claire du
contenu et du but de la leçon ;
2. Enseignement direct : les connaissances nouvelles sont présentées en partant du
tout vers le détail ; les démonstrations et les exemples sont des éléments
importants de la leçon ; l’enseignant invite les élèves à poser des questions et
fournit des explications d’une manière rassurante ; on ne s’attend pas à ce que
l’élève fasse, intuitivement, des bonds dans l’apprentissage ;
5
Le terme « holistique » ou « global » suit la nomenclature utilisée par Kindell et Hollman, qui qualifient
le style dépendant du champ de global et le style indépendant du champ de linéaire. Les auteurs
préfèrent les termes global et linéaire parce que moins chargés de connotations péjoratives.
71
3. Mise en pratique dirigée par l’enseignant : les élèves s’entraînent avec le professeur
qui les guide et commente leur résultat ; le modèle doit être fidèlement reproduit ;
on ne demande pas à l’élève de « faire des bonds » dans la compréhension ;
4. Exercices indépendants : les élèves s’exercent seuls ou en groupe, avec la possibilité
de faire appel à l’enseignant si besoin est ; là encore, il faut suivre le modèle
fidèlement ;
5. Application indépendante : les élèves appliquent les nouvelles connaissances de
façon autonome et de préférence seuls ; ils devraient pouvoir à présent gérer des
écarts par rapport au modèle et se servir de nouveaux concepts et de nouvelles
manières de procéder.
(Kindell et Hollman, 2003, p. 30–32)
Le plan de Kindell et Hollman est très proche du modèle mis au point dans la
jungle péruvienne pour les écoles bilingues de vingt-huit minorités ethnolinguistiques.
Les cours de mathématiques, de sciences, d’histoire et de géographie suivent le plan ci-
dessous, à partir du CE2 (3e année) :
1. Révision des leçons précédentes ;
2. Motivation : pour introduire la leçon, l’enseignant présente quelque chose
d’intéressant ;
3. Observation : les élèves observent le professeur qui enseigne, démontre, donne des
exemples, explique et répond aux questions ;
4. Élaboration : le professeur montre comment représenter les nouvelles
connaissances à l’aide de nombres, de diagrammes, de graphiques, de méthodes de
rédaction des solution des problèmes ;
5. Expression : les élèves s’entraînent à suivre la méthode jusqu’à ce qu’ils puissent le
faire seuls par écrit. La forme des questions reste la même jusqu’à ce qu’ils
maîtrisent le modèle.
(Davis et Jakway, 1983, p. 82–86, traduit de l’espagnol)
Voir également Schooling (1984 et 1987) pour des conseils concernant la formation
des traducteurs en langue maternelle et Sodeman (1987) sur l’utilité des cours
magistraux et de la mémorisation dans les contextes interculturels.
Bowen et Bowen (1989) ont appliqué les recherches sur l’apprentissage global à
l’enseignement des élèves des écoles bibliques africaines. Voici leur liste des méthodes
utiles :
Tiré de Bowen (Earle) et Bowen (Dorothy), « Contextualizing teaching methods in
Africa », Evangelical Missions Quarterly, n° 25 (3), juillet 1989, p. 270–275.
72
15. Mettre le contenu du cours en relation avec des personnes et des situations de la
vie réelle, parce que les Africains apprennent mieux un enseignement orienté vers
les relations humaines.
16. Noter selon des critères : baser les notes sur ce que les élèves ont fait d’après des
critères fixés d’avance, sans comparer leurs performances. La compétition est
rarement profitable aux élèves dépendants du champ.
Cet article a été publié pour la première fois dans le numéro de juillet 1989 de la revue Evangelical
Missions Quarterly (EMQ). Reproduit avec autorisation des auteurs. EMIS, Box 794, Wheaton, IL 60187.
E-mail: emis@wheaton.edu, Website: www.emisdirect.com.
* Bien que les élèves DC apprécient d’être clairement corrigés et encouragés, certaines cultures
interprètent facilement un commentaire négatif comme de la critique. Les enseignants doivent être
sensibles aux normes culturelles et apprendre à corriger d’une manière culturellement acceptable.
Les Occidentaux, qui forment des enseignants autochtones venant de sociétés largement
holistiques, rencontrent souvent des difficultés.
Graham (1980a, p. 34–35) fournit des idées intéressantes tirées de son expérience
australienne. Elle recommande en particulier de développer des relations en mettant en
place des situations où Occidentaux et non Occidentaux travaillent en équipe d’égal à
égal : en travaillant par groupe de plusieurs personnes ; en ayant, dans chaque équipe,
des membres expérimentés qui montrent l’exemple aux autres, chacun dans sa
spécialité ; en étant sensible à la communication non-verbale et aux indices culturels ;
en utilisant la langue locale.
Graham a élaboré un guide de l’enseignant qui est adapté à la culture (1980b) ainsi
qu’une liste de conseils pratiques destinés à favoriser une bonne communication
interculturelle (1980a). Cette liste, reproduite ci-après, est valable pour de nombreux
pays, en plus de l’Australie :
6. Ne terminez pas un sujet sans avoir trouvé comment appliquer les idées discutées.
Cela demandera souvent de créer ou de recueillir des contenus adaptés, de mettre
au point des jeux ou des livres racontant des histoires, de faire un plan de cours.
7. Évitez d’utiliser le « jargon » pédagogique sauf s’il est bien expliqué et
régulièrement utilisé.
8. Accordez du temps aux enseignants aborigènes pour qu’ils puissent bien discuter le
sujet dans leur langue avant de vous dire ce dont ils ont parlé.
9. La règle est : « Hâtez-vous lentement ». N’essayez pas d’enseigner trop de choses en
trop peu de temps.
10. Laissez les enseignants illustrer certains points s’il s’avère difficile d’en faire des
listes.
11. Traduire des concepts pédagogiques dans la langue vernaculaire prend du temps.
Laissez leur le temps de bien comprendre et de faire des vérifications auprès de
personnes telles que le linguiste local ou du personnel plus expérimenté.
12. Faites en sorte que les idées concernant le contenu proviennent d’une
compréhension de la théorie. Une bonne théorie mènera à une bonne pratique.
13. Reprenez, dans les sessions de planification des programmes, les éléments acquis
lors des sessions de formation des enseignants.
14. Dans la mesure du possible, partagez la direction avec des enseignants aborigènes
plus expérimentés ou avec ceux qui ont déjà reçu des formations.
15. Si vous avez demandé à quelqu’un d’autre de diriger, ne reprenez pas la direction
et ne faites pas les choses à sa place. Si vous sentez que vous allez intervenir, partez
et laissez-le faire. Il vous fera un compte-rendu de ses activités plus tard.
16. N’ayez pas peur du silence : apprenez à vous détendre et à attendre que les autres
parlent. Vous pouvez reformuler la question si nécessaire, mais ne donnez pas la
solution. S’il n’y a toujours pas de réponse du groupe, proposez au groupe d’en
parler dans sa langue, car les personnes n’ont peut-être pas compris la question et
ont besoin de la clarifier.
17. Rappelez-vous que les Aborigènes utilisent beaucoup la communication non
verbale. Apprenez à « l’entendre » vous aussi.
18. Apprenez à ne pas écouter uniquement les mots que les gens disent. Cherchez aussi
à écouter les idées qu’ils essaient de faire passer. (Rappelez-vous qu’il est difficile
d’exprimer des idées dans une langue seconde.)
19. Rappelez-vous que les gens apprennent plus de choses lorsqu’ils réfléchissent par
eux-mêmes que lorsque quelqu’un les leur dit.
Extrait de Graham (Beth), « Starting where they are: Rethinking Aboriginal early childhood education »,
The Aboriginal Child at School, n° 9 (1), 1980a, p. 28–40. Reproduit avec permission
*
Litt. « Partir de là où ils en sont : Repenser l’enseignement en langue maternelle des Aborigènes. »
premières années, ceci afin de s’adapter aux élèves qui apprennent plus facilement par
la pratique qu’en écoutant.
Banks (1988, p. 273–292) énumère les orientations majeures des cursus d’enseignement
multiethnique dans les grands systèmes scolaires. Il conseille entre autres que le
programme multiethnique aide les élèves à développer des valeurs favorables au
pluralisme ethnique, qu’il accroisse la capacité des élèves à prendre des décisions, qu’il
améliore les capacités à participer à la société ainsi que le sens de l’efficacité politique,
qu’il aide les élèves à interpréter les événements selon les points de vue de différentes
ethnies.
Banks (1988, p. 293–301) recommande également un inventaire de l’éducation
multiethnique intitulé Evaluation Guidelines for Multicultural-Multiracial Education 6
(National Study of School Evaluation, 1973, p 25–33). Cette évaluation comprend des
listes de critères :
- l’équilibre ethnique et racial du personnel ;
- la conduite des enseignants et des directeurs ;
- l’organisation et le regroupement scolaire ;
- le cursus officiel ;
- le matériel pédagogique ;
- l’enseignement spécialisé.
Le développement bicognitif
Pour réussir les tâches du quotidien, chacun a besoin de faire appel à la fois aux
raisonnements analytiques et aux raisonnements holistiques, chacun ayant ses intérêts
et ses limites. C’est en faisant appel au raisonnement le plus approprié, qu’on est le plus
efficace.
Pour être efficace et compétent dans les deux styles cognitifs, il faut intégrer [...] les
domaines affectif et cognitif. L’objectif est que les enfants passent plus facilement d’un
style à l’autre pour s’adapter aux exigences de plus en plus complexes de la vie […].Pour
arriver à cela, il faut les aider à développer la capacité de tirer parti à tout moment des
deux styles. (Castaneda et Gray, 1974, p. 206).
Comme les enseignants sont confrontés aux deux types d’élèves dans leurs salles de
classe, Ramirez et Castaneda (1974, p. 150–151) recommandent aux enseignants de
cultiver les deux styles pédagogiques afin de toucher tous les élèves et de stimuler le
fonctionnement bicognitif. Ils considèrent comme inadapté le comportement IC qui
exprime une rivalité et une indépendance excessives, alors que pour réussir, il faut
aussi rivaliser avec soi-même, travailler de façon autonome, explorer un sujet et
aborder des abstractions mathématiques et scientifiques. Les comportements DC
6
Litt. Directives pour l’évaluation de l’enseignement multiculturel et multiracial.
76
Considérations supplémentaires
Au vu des dates des ouvrages cités, les lecteurs constateront que l’étude des styles
d’apprentissage cognitifs a fait l’objet d’un intérêt croissant et a atteint son apogée dans
les années 1970 et 1980. Depuis lors, les styles d’apprentissage constituent une partie
de la théorie de l’éducation. Ces recherches ont été très utiles aux apprenants
holistiques, car elles ont prouvé que leur style d’apprentissage cognitif est valable
(Cohen, 1969, p. 829), ce qui n’avait pas toujours été reconnu à cause de la tendance
analytique de l’enseignement occidental.
Il existe de nombreuses preuves empiriques. Dans la famille de l’auteur, il y a deux
étudiants holistiques, l’un en linguistique, l’autre en ingénierie. Tous deux sont de bons
élèves, qui se sentent frustrés par les méthodes inductives utilisées en cours de
linguistique et de mathématiques. Leur frustration perdure, même quand ils ont
compris ce qui était enseigné. Les élèves, qu’ils soient holistiques ou analytiques,
peuvent réussir avec les mêmes méthodes en langue étrangère, histoire, géographie et
sciences sociales, mais, comme Ramirez et Castañeda (1974, p. 56–157) et Carnine
(1990, p. 377), je pense que, si on veut réellement donner à tous les mêmes chances de
réussite scolaire, on doit développer des approches adaptées aux élèves DC, du moins
pour les matières les plus analytiques. On doit cependant enseigner aux élèves à se
servir des deux styles afin qu’ils adaptent leur méthode à ce qu’ils doivent apprendre.
Mises en garde
Ciborowski et Cole (1971) ont, quant à eux, identifié d’autres facteurs qui ont un
rôle dans la formation des concepts : l’influence du langage sur l’encodage des
perceptions en vue d’une utilisation ultérieure ; la mesure dans laquelle le langage est
utilisé pour résoudre des problèmes. Concernant les influences déterminantes,
l’expérience parmi les groupes ethnolinguistiques de la forêt tropicale péruvienne ne
confirmerait pas la théorie selon laquelle la dominance parentale engendre
inévitablement une dépendance du champ (Hansen, 1984, p. 313). En effet, dans cette
région, la dépendance du champ semble plus forte dans les sociétés les plus
permissives, alors que l’indépendance du champ est plus évidente parmi les Aguaruna,
une société très structurée où les parents ont le devoir de guider et discipliner
sévèrement les enfants.
Reid met en garde les enseignants contre « une mauvaise utilisation de l’évaluation
du style d’apprentissage, de son diagnostic et des prescriptions qui y sont liées », du fait
de « la complexité des variables agissant sur l’apprentissage, dans l’enseignement en
général, et dans l’enseignement des langues étrangères en particulier » (1987, p. 102).
Pour McKenna (1984) et pour Widiger, Knudson et Rorer (1980), l’évaluation de la
théorie de la DC/IC n’a pas été concluante. Widiger et al. constatent que les résultats de
leurs évaluations indiquent qu’« il vaut mieux interpréter les mesures actuelles de la
DC/IC comme des tests d’aptitude plutôt que comme des tests de style cognitif » (1980,
p. 116). McKenna fait le compte rendu d’évaluations qui donnent à penser que les tests
de dépendance du champ, tels que le test des figures imbriquées, « ne remplissent pas
les critères qui permettraient d’évaluer le style cognitif à un niveau conceptuel, et qu’ils
présentent, sur le plan empirique, des corrélations substantielles avec les tests
standards d’aptitude » (1984, p. 593). Il recommande de poursuivre les évaluations
pour éprouver la fiabilité test-retest et la convergence entre des mesures très variées du
style cognitif.
McCarty, Wallace, Lynch et Benally (1991, p. 42–59) montrent que, pour la
formation de concepts, l’important c’est le mode de questionnement, et non le style
d’apprentissage. Des questions ouvertes sur des sujets qui les intéressaient ont permis à
des élèves amérindiens, jusque là inhibés et normalement considérés comme des
apprenants holistiques, de verbaliser et de faire des classifications avec beaucoup
d’enthousiasme et de compétence.
Une des écoles de pensée rejette totalement l’Aptitude Treatment Intervention
(ATI) (approches qui s’adaptent aux différences de chaque apprenant), pour plusieurs
raisons, dont celles-ci : (1) plusieurs études contestent la fiabilité des méthodes
d’évaluation des styles d’apprentissage ; (2) la corrélation entre les avantages de
certains styles d’apprentissage et les résultats scolaires est faible ; (3) un enseignement
correspondant aux styles d’apprentissage des élèves n’a qu’un impact très modéré sur la
réussite scolaire (Carnine, 1990, p. 377) ; (4) il est impossible pour un enseignant très
occupé de s’adapter à chaque élève.
Ceux qui pensent cela ont tendance à estimer que si l’enseignement est adéquat,
tout le monde peut, avec la même efficacité acquérir les concepts enseignés. Au lieu de
se préoccuper des différences individuelles, les enseignants devraient donc porter leur
attention sur des stratégies efficaces pour tous et mettre dans la leçon tous les éléments
nécessaires à chaque élève (comme ceux définis dans les étapes d’apprentissage de
Gagné).
79
Il faut donc avoir une position équilibrée. Même dans les cultures où la dichotomie
entre apprenants analytiques et apprenants holistiques est nette, toutes les difficultés
d’apprentissage ne sont pas attribuables aux différences de styles d’apprentissage.
L’analyse des styles d’apprentissage n’est qu’un des outils de la panoplie de
l’enseignant. Il est nécessaire de continuer les recherches empiriques au sein d’ethnies
du monde entier pour répondre à des questions telles que :
1. Quel est l’effet du contact entre les cultures et du changement social sur les styles
d’apprentissage ?
2. Dans les sociétés permissives, quels sont les facteurs qui donnent des apprenants
holistiques ?
3. Quelles sont les mesures interculturelles qui aident le mieux les individus à
apprécier les avantages d’un style d’apprentissage autre que le leur et qui les
poussent à l’acquérir (c.à.d. à développer une performance bicognitive) ?
Application
Introduction
Les travaux de Vygotsky abordent de nombreuses questions que nous ne pouvons pas
toutes étudier dans ce chapitre. Les concepts-clefs, cependant, sont les suivants :
80
81
C’est en observant des enfants que Vygotsky (1978, p. 56–57) a abouti à ses
conclusions sur la manière dont les concepts sont formés :
1. Un très jeune enfant essaie de saisir un objet ;
2. Sa mère s’en aperçoit et l’aide en plaçant l’objet à sa portée ;
3. Après avoir répété cette expérience à plusieurs reprises, le bébé n’essaie plus
d’attraper maladroitement l’objet mais le montre du doigt ;
4. La signification est née du contexte social des relations mère-enfant ;
5. Le bébé intériorise ensuite la signification ;
6. Très vite, le bébé va apprendre de sa mère les termes (paroles) correspondant à la
signification qu’il a déjà intériorisée. Il n’est pas libre de choisir le sens de ces mots.
Les mots lui sont donnés par les adultes et servent de substituts aux concepts
(1986, p. 122–123). Il est impossible pour l’enfant de découvrir tout seul leur sens.
Du point de vue du constructivisme social, on classe l’ensemble de l’échange entre
la mère et le bébé dans la catégorie dialogue.
Ainsi, pour Vygotsky « la pensée et la parole s’avèrent être la clef de la nature de la
conscience humaine […], un mot est un microcosme de conscience humaine » (1986,
p. 256).
Les recherches de Vygotsky l’ont également conduit à affirmer que « faire
semblant » et jouer (comme jouer à être une maman ou un bébé) favorisent le
développement cognitif, puisque la situation imaginaire que les enfants ont ainsi créée
les amène à adapter leur comportement à cette nouvelle situation. De plus, « lorsqu’ils
imitent leurs aînés dans des activités culturellement marquées, les enfants se créent
eux-mêmes des occasions de développement intellectuel et acquièrent un premier
niveau de maîtrise de la pensée abstraite » (Vygotsky, 1978, p. 129). En grandissant, les
enfants inventent des règles pour leurs jeux, ce qui est un autre progrès dans la
complexité de la pensée (1978, p. 103).
Selon Vygotsky, tout comme les enfants développent leurs compétences orales, ils
devraient aussi développer leurs compétences à l’écrit, afin que l’écriture devienne pour
eux tellement utile et naturelle qu’elle fasse partie de leur façon de s’exprimer. « En
fait, Il s’agit d’enseigner aux enfants la langue écrite et pas seulement à écrire les lettres
de l’alphabet » (Vygotsky, 1978, p. 119).
82
Le discours intérieur
Selon Vygotsky, pour que la pensée soit stimulée, il n’est pas toujours nécessaire de
parler avec une autre personne. Il est aussi possible de dialoguer avec soi-même après
avoir reçu des informations venant des autres. Un dialogue de cette nature favorise les
processus de pensée et conduit à une nouvelle compréhension des choses. Il s’appuie
toutefois sur l’analyse et la synthèse d’informations venant de l’extérieur, directement
ou indirectement, par des moyens de communication tels que les livres et la télévision.
Par conséquent, la connaissance qu’on développe est toujours construite socialement.
Le constructivisme social ne sait pas vraiment bien traiter les situations d’inspiration
solitaire, les changements de paradigmes résultant d’une compréhension subite, hors de
toute influence extérieure, par exemple la découverte de la gravité par Newton. Le
concept de dialogue intérieur était, peut-être, une tentative d’explication de ces rares
cas.
Les conséquences
S’il est vrai, comme l’a affirmé Vygotsky, que toute connaissance est construite
socialement, à savoir qu’elle se développe lorsque les gens interagissent dans certaines
situations, alors il devient capital de permettre aux élèves de parler et d’échanger des
idées. Puisque la pensée se développe même en parlant dans des jeux, l’acte de parler
est alors aussi important que l’acte d’écouter ce que disent les autres. Les parents
doivent donc comprendre l’intérêt du jeu pour leurs enfants et les enseignants doivent
créer, pour leurs élèves, le plus d’occasions possibles de dialoguer en classe.
Ce concept de dialogue, considéré par les disciples de Vygotsky comme
fondamental dans toute situation, a encouragé les activités collectives et les groupes de
travail dans les classes contemporaines et se montre particulièrement utile dans les
sociétés où les relations humaines priment. On peut construire des cours autour
d’activités d’apprentissage nécessitant des conversations ou des discussions pour
résoudre les problèmes. Les groupes de discussion et les groupes de recherche se
réunissent et exposent ensuite leurs conclusions. Les activités comme : parler d’un objet
qu’on montre, raconter des histoires, faire des jeux de rôle, animer des marionnettes,
échanger dans des débats et faire du théâtre, sont autant de moyens de stimuler la
pensée et d’échanger des idées en s’exprimant verbalement. Au lieu de toujours
83
Application
Le concept d’époque 2
Contexte
Les cultures amazoniennes sont des cultures orales. Leurs archives les plus anciennes
sont gardées dans la mémoire des grands-parents. Les temps plus lointains forment,
pour l’essentiel, un grand tout indéfini, avec une vague distinction entre le passé
lointain et le passé très lointain évoquée parfois dans les discours et les légendes.
Comme il était diplômé de l’enseignement secondaire, j’ai immédiatement compris que
le problème de mon étudiant, ce n’était pas qu’il n’avait pas étudié les civilisations
anciennes, ni eu connaissance de dates, mais qu’il ne disposait pas des outils
conceptuels nécessaires pour aborder les époques anciennes. Même s’il avait appris à
compter en années (1982, 1983, 1984, etc.) je me suis doutée qu’il ne faisait pas le lien
entre ces chiffres et le passé lointain ou qu’il ne comprenait pas leur origine.
J’ai réussi à fournir une explication qui a tellement ravi l’étudiant et tous ses amis
réunis autour de nous, qu’ils ont posé des questions pendant deux heures. Si j’avais su
ce que je sais maintenant, j’aurais pu commencer mon explication avec un concept
intégrateur déclaratif comme celui qui suit.
1
Cet exemple illustre l’idée d’Ausubel, qui conseille l’utilisation de concepts intégrateurs avant la
présentation de nouveaux concepts. Voir chapitre 3.
2
Cet exemple est plus complexe que bien d’autres concepts intégrateurs qui pourraient être utilisés, mais
il servira à illustrer la méthode de présentation.
84
85
2. Les époques portent souvent le nom du peuple qui avait le pouvoir pendant cette
période ;
3. Une époque couvre la durée de plusieurs générations ;
4. Certaines époques sont plus longues que d’autres.
Considérons que le temps est comme une ligne qui a commencé il y a si longtemps que
personne ne peut se souvenir de son début et qui se poursuit, dans le futur, plus
longtemps que nous ne pouvons l’imaginer, comme ceci :
Les gens de votre peuple parlent « du temps de ton père » ou « quand ton grand-
père était en vie. » Cependant, dans d’autres pays, l’histoire écrite s’étend sur beaucoup
plus d’années et rend compte des vies de tellement de personnes que nous devons
découper le temps en périodes bien plus longues que les durées de vie des ancêtres
dont nous nous souvenons. C’est pour cette raison que les gens ont commencé à diviser
l’histoire en grands blocs, qu’on appelle périodes ou époques et qu’on leur donne
souvent le nom des civilisations qui exerçaient le pouvoir en ce temps-là.
Nous pourrions par exemple répartir l’histoire de l’Amazonie en deux grandes
époques :
Époque 1 Époque 2
l’époque avant l’arrivée des Blancs dans la jungle est beaucoup plus longue que celle
qui a commencé depuis la venue des Blancs.
Le contenu de la leçon
Nous avons des archives écrites datant de 4000 à 5000 ans, mais venant seulement
de certaines parties du monde. Ce que nous connaissons, nous pouvons le répartir en
grandes époques, selon les peuples qui étaient au pouvoir. C’est ce que nous avons fait
quand nous avons établi deux périodes : avant et après l’arrivée des Blancs dans la
jungle. Voici quelques grandes périodes de l’histoire (selon l’Encyclopédia Britannica,
volume 14, 1988, p. 721–722) :
88
Les années sont comptées à partir de la naissance de Jésus-Christ – avant (av. J.-C.) et après (ap. J.-C.)
Schéma 3. La Leçon.
Analyse
Le schéma 4 décrit ce qui s’est passé dans la structure cognitive des étudiants pendant
la leçon. Ils sont maintenant prêts à comprendre toute information qui pourrait leur
être donnée sur l’histoire ancienne et à la situer à peu près dans le temps.
89
Conclusion
Campbell (Linda), Campbell (Bruce) et Dickinson (Dee), Teaching and learning through
Multiple Intelligences, Needham Heights, MA, Allyn and Bacon, 1996.
Carbo (Marie), Dunn (Rita) et Dunn (Kenneth), Teaching students to read through their
individual learning styles, Englewood Cliffs, New Jersey, Prentice Hall, 1986.
Gardner (Howard), Frames of mind : The theory of multiple intelligences, New York,
Basic Books, 1983.
Les sept formes d’intelligences sont présentées : l’intelligence verbo-linguistique,
l’intelligence logico-mathématique, l’intelligence kinesthésique, l’intelligence
spatiale, l’intelligence musicale, l’intelligence interpersonnelle et l’intelligence
intra-personnelle.
Gardner (R.), Holzman (P.), Klein (G.), Linton (D.) et Spence (D.), « Cognitive control :
A study of individual consistencies in cognitive behavior », Psychological Issues IV,
New York, International Press, 1959.
Hernandez (Hilda), Multicultural education : A teacher's guide to content and process,
Columbus, Ohio, Merrill Publishing Company, 1989.
Les pages 121 à 125 présentent un inventaire informel des styles d’apprentissage,
ce qui donne un aperçu des styles d’apprentissage et des styles d’enseignement.
McCarthy (Bernice), The 4-mat system : Teaching to learning styles with right/left
mode techniques, Barrington, Illinois, Excel, 1980.
Meister Vitale (Barbara), Unicorns are real : A right-brained approach to learning,
Rolling Hills Estates, California, Jalmer Press, 1985.
Cet ouvrage recense des idées pour enseigner les couleurs, la lecture, l’écriture, les
opérations mathématiques, l’organisation, la grammaire, la musique. Il donne aussi
les titres d’autres ouvrages.
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Hernandez (Hilda), Multicultural education : a teacher's guide to content and process,
Columbus, Ohio, Merrill Publishing Company, 1989.
Les pages 131 à 133, adaptées de Weinstein et Mayer (1986), donnent une liste de
stratégies utiles pour les classes multiculturelles.
Herold (P. Leslie), Ramirez (Manuel III) et Castaneda (Alfredo), « Field sensitive and
field independent teaching strategies », New approaches to bilingual, bicultural
education, Austin, Texas, The Dissemination and Assessment Center for Bilingual
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Ces pages résument des différences importantes entre les cursus d’enseignement
dépendants et indépendants du champ. Bien que les auteurs parlent du contexte
américain, beaucoup de choses sont applicables aux cursus d’enseignement dans les
pays en voie de développement.
Kauback (Brent), « Styles of learning among native children : A review of the
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Kolb étend l’application des principes de style d’apprentissage à son modèle
d’apprentissage par l’expérience.
Ramirez (Manuel III) et Castaneda (Alfredo), Cultural democracy, bicognitive
development, and education, New York, Academic Press, 1974.
Ces auteurs ont observé et décrit des stratégies DC et IC d’apprentissage et
d’enseignement, surtout parmi les étudiants hispanophones aux États-Unis. Voir
plus particulièrement les pages 133 à 140.
Le développement bicognitif :
Davis (Thomas) et Pyatskowit (Alfred), « Bicognitive education : A new future for the
Indian child? », Journal of American Indian Education, n° 15 (3), 1976, p. 14–21.
Cet article aborde l’éducation bicognitive du point de vue de l’école Menominee
(réserve Menominee, nord du Wisconsin, U.S.A.). Ces auteurs recensent huit
concepts Menominee de soi et proposent un plan pour enseigner, de l’école
maternelle à la fin du lycée, à la fois les connaissances indiennes et celles
nécessaires à l’école et dans la société dominante.
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Sternberg (Robert J.), « Thinking styles : Keys to understanding student performance »,
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Sternberg traite des styles en termes de portées et de formes d’autogestion mentale.
Il relève la tendance des enseignants et des écoles de récompenser les élèves dont
les styles correspondent aux leurs. Il souligne également que les élèves ont besoin
de développer leurs capacités à passer d’un style à l’autre.
Williams (Linda Verlee), Teaching for the two-sided mind, Englewood Cliffs, New
Jersey, Simon and Shuster, 1983.
Williams traite des façons de penser et de la manière d’enseigner aux élèves à traiter ce
qu’ils perçoivent.
93
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