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Syndrome alvéolaire
G. Chassagnon, C. Guinet

Résumé : Le syndrome alvéolaire correspond aux manifestations radiographiques du comblement des


alvéoles par du liquide ou du tissu. En imagerie, on parle plutôt de condensations parenchymateuses.
L’imagerie joue un rôle important dans le diagnostic et l’orientation étiologiques devant un syndrome
alvéolaire. On différencie classiquement le syndrome alvéolaire aigu du syndrome alvéolaire chronique
qui est plus rare. Les deux étiologies les plus fréquentes de syndrome alvéolaire aigu sont la pneumonie
infectieuse et l’œdème pulmonaire. Le syndrome alvéolaire chronique regroupe, quant à lui, les condensa-
tions alvéolaires persistantes dont les étiologies incluent notamment l’adénocarcinome mucineux invasif
et le lymphome, et les condensations alvéolaires récidivantes qui incluent entre autres la pneumonie
organisée. Cet article décrit les caractéristiques en imagerie du syndrome alvéolaire et des condensations
parenchymateuses et en présente les principales étiologies ainsi que les signes sémiologiques pouvant
orienter vers ces diagnostics.
© 2022 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Syndrome alvéolaire ; Condensation ; Scanner ; Radiographie

Plan dans l’interstitium. Le terme de syndrome alvéolaire est réservé à


la radiographie conventionnelle. En imagerie scanographique, le
■ Définition et physiopathologie 1 terme de condensation parenchymateuse lui est préféré et corres-
pond aux mêmes processus physiopathologiques [1] .
■ Sémiologie radiographique 1
■ Sémiologie scanographique 1
■ Diagnostic étiologique 3  Sémiologie radiographique
■ Principales étiologies 3
Syndrome alvéolaire aigu 3 Le syndrome alvéolaire est caractérisé par la présence d’opacités
Pneumonies infectieuses 3 aux limites floues ayant tendance à la confluence et à la systéma-
Syndrome alvéolaire chronique 5 tisation. Ces opacités peuvent être le siège d’un bronchogramme
Pneumonie d’aspiration 6 aérique et/ou d’un alvéologramme aérique qui sont évocateurs.
Pneumonie chronique à éosinophiles 8 Le bronchogramme aérique correspond à la visualisation des
Ischémie veineuse pulmonaire 9 bronches remplies d’air au sein des zones de condensation alvéo-
Apport de la distribution 9 laire (Fig. 2). Le bronchogramme aérique n’est pas systématique.
■ Conclusion 9 L’alvéologramme aérique correspond, quant à lui, à la visualisa-
tion de petites clartés arrondies (1–5 mm) au sein des opacités
alvéolaires. Ces clartés sont des acini non encore remplis et sil-
houettés par la condensation alvéolaire adjacente.
 Définition et physiopathologie Une opacité est dite systématisée lorsque sa distribution corres-
pond à une réalité anatomique du poumon. Un exemple parlant
est la pneumonie franche lobaire aiguë où le syndrome alvéolaire
Le syndrome alvéolaire correspond à l’ensemble des mani- s’étend à un lobe. Une distribution bilatérale ou multifocale peut
festations radiologiques consécutives au remplacement de l’air également être observée en fonction des étiologies. Le syndrome
alvéolaire par du liquide ou du tissu. Ce comblement alvéolaire se alvéolaire présente des limites nettes lorsqu’il atteint la plèvre,
propage d’alvéole en alvéole par les pores de Kohn et de lobule notamment en regard des scissures (Fig. 3).
en lobule par les canaux de Lambert, expliquant le caractère
systématisé de l’atteinte en imagerie (Fig. 1). Le syndrome alvéo-
laire est à distinguer du syndrome interstitiel qui correspond aux
manifestations radiologiques consécutives à une infiltration de  Sémiologie scanographique
l’interstitium pulmonaire.
Par extension, le syndrome alvéolaire inclut également les Grace à sa meilleure résolution en densité et sa meilleure
manifestations radiologiques du syndrome pseudoalvéolaire qui résolution spatiale, le scanner permet une analyse plus fine
correspond à un écrasement de la lumière des espaces aériens du parenchyme pulmonaire. Une plage de condensation paren-
distaux par une prolifération granulomateuse ou lymphocytaire chymateuse correspond à une augmentation de densité du

EMC - Radiologie et imagerie médicale - cardiovasculaire - thoracique - cervicale 1


Volume 41 > n◦ 1 > février 2023
Téléchargé pour cdsm cdsm (cdsmbd546@outlook.fr) à Central Military Hospital à partir de ClinicalKey.fr par Elsevier sur avril 12, 2024.
http://dx.doi.org/10.1016/S1879-8535(22)43150-3
Pour un usage personnel seulement. Aucune autre utilisation n´est autorisée. Copyright ©2024. Elsevier Inc. Tous droits réservés.
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*
*

A B
Figure 1. Mécanismes de formation de l’image alvéolaire.
A. Remplissage progressif, de proche en proche, des sacs alvéolaires (astérisques) par les pores de Kohn
(flèche) et des lobules pulmonaires secondaires par les canaux de Lambert (têtes de flèches).
B, C. Le deuxième mécanisme de formation de l’image alvéolaire consiste en un épaississement de
l’interstitium des cloisons alvéolaires, écrasant progressivement les espaces aériens distaux.

Figure 2. Pneumonie gauche. Radiographie thoracique de face en posi- Figure 3. Bronchopneumonie. Radiographie thoracique de face en
tion assise montrant un syndrome alvéolaire se présentant sous la forme position debout montrant un syndrome alvéolaire de l’hémichamp supé-
d’opacités confluentes aux limites floues avec bronchogramme aérique rieur droit. Le bord inférieur rectiligne bien limité de l’opacité correspond
(flèche). Cet aspect est celui d’un syndrome alvéolaire. à la scissure horizontale et montre la localisation lobaire supérieure de
la pneumonie. Il s’y associe plusieurs autres condensations alvéolaires
bilatérales (flèches) réalisant un tableau de bronchopneumonie.
parenchyme pulmonaire effaçant les vaisseaux le traversant sur
des images acquises sans injection de produit de contraste. Ce cri-
tère permet de différencier les condensations parenchymateuses voxel. Cela explique le fait que du verre dépoli soit fréquemment
du verre dépoli qui correspond également à une augmentation de visible à la périphérie des condensations parenchymateuses.
densité du parenchyme pulmonaire mais celle-ci n’efface pas les Comme en radiographie, les condensations parenchymateuses
vaisseaux qui le traversent [1] . Le verre dépoli peut résulter soit d’un présentent des limites floues et ont une tendance à la confluence
comblement alvéolaire, soit d’une infiltration de l’interstitium. et à la systématisation. Le scanner permet de mieux visualiser
Dans le contexte du comblement alvéolaire, le verre dépoli cor- la systématisation des condensations qui traduit une extension
respond à un comblement partiel des alvéoles dans le volume du de proche en proche respectant l’organisation architecturale du

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poumon. Le bronchogramme aérique est également mieux visua- le tableau radiologique est différent et les infarctus pulmonaires
lisé au scanner et n’est pas spécifique de la condensation sont généralement responsables de douleurs thoraciques.
parenchymateuse puisqu’il peut également être observé dans les
atélectasies qui correspondent à une condensation du paren-
chyme pulmonaire par perte de volume. Le bronchogramme Pneumonies infectieuses
aérique peut être rencontré dans de multiples étiologies de Les pneumonies infectieuses se manifestant par des condensa-
syndrome alvéolaire telles que les pneumonies infectieuses, la tions alvéolaires sont le plus souvent d’origine bactérienne mais
pneumonie organisée ou les lymphomes. Un bronchogramme peuvent également être d’origine virale, fongique ou parasitaire.
liquidien peut également être parfois observé. Il correspond à une Les tableaux de pneumonie infectieuse se manifestant par des
stase liquidienne endobronchique et évoque une pneumonie obs- condensations alvéolaires sont la pneumonie alvéolaire (Fig. 2)
tructive secondaire à une obstruction bronchique d’amont. Cette et la bronchopneumonie (Fig. 3). La pneumonie alvéolaire se pré-
obstruction peut notamment être d’origine tumorale ou liée à un sente sous la forme d’opacité à limites floues sous-pleurales, avec
corps étranger. En cas d’injection de produit de contraste, le signe systématisation segmentaire ou lobaire, avec ou sans broncho-
de l’angiogramme peut être visualisé. Il correspond à la visualisa- gramme aérique. Rarement, elle peut être de forme sphérique
tion des vaisseaux opacifiés traversant le parenchyme condensé. Il pseudotumorale (pneumopathie ronde), ce qui s’observe plus fré-
peut être particulièrement marqué en cas de carcinome mucineux quemment chez l’enfant. La bronchopneumonie a, quant à elle,
invasif ou de lymphome pulmonaire primitif. une distribution multifocale. Elle associe des lésions de bronchio-
Le scanner permet une étude des densités, ce qui offre une lite et de condensations alvéolaires en mottes centrées sur les voies
aide pour l’orientation étiologique. La présence de zones de den- aériennes. Ces condensations peuvent progresser vers une atteinte
sité fortement négative (−80 à −30 UH en incluant la déviation segmentaire ou lobaire. Un épanchement pleural est retrouvé dans
standard) oriente vers une pneumonie lipidique exogène (Fig. 4). 20 à 60 % des pneumonies bactériennes, et correspond le plus sou-
Dans le cas des condensations alvéolaires lipidiques, la différence vent à un épanchement parapneumonique, ou plus rarement à un
de densité entre la graisse et les vaisseaux peut être à l’origine empyème. Les pneumonies infectieuses sont rarement associées à
de signe de l’angiogramme positif qui correspond à la visualisa- des adénomégalies hilaires. On peut en particulier les retrouver en
tion des vaisseaux au travers d’une condensation lipidique malgré cas de tuberculose (adénopathies nécrotiques évocatrices), nocar-
l’absence d’injection. La présence de zones de forte densité sur diose, candidose ou mycoplasme. Les pneumonies infectieuses
un scanner non injecté (> 70 UH) oriente vers une pneumonie peuvent nécroser et s’excaver, ce qui fait alors suggérer des germes
médicamenteuse à l’amiodarone [2] . Enfin, la présence de calcifica- particuliers comme les bactéries anaérobies, la tuberculose, Staphy-
tions diffuses oriente vers des étiologies telles que la microlithiase lococcus aureus, Klebsiella pneumoniae et Pseudomonas aeruginosa, la
alvéolaire (Fig. 5). nocardiose et l’aspergillose.
Lorsque le scanner thoracique est indiqué pour explorer un L’immunodépression est une situation particulière où des
syndrome alvéolaire, il est le plus souvent réalisé sans injection condensations alvéolaires nodulaires cernées de verre dépoli
de produit de contraste iodé. L’injection de produit de contraste doivent faire systématiquement évoquer une infection fongique,
iodé peut être requise pour rechercher des signes d’abcédation, en particulier l’aspergillose angio-invasive et la mucormycose.
de nécrose, d’empyème, d’obstruction vasculaire, de masse sous- Le scanner n’est pas un examen de première intention en cas
jacente, ou pour mieux différencier la condensation d’un éventuel de pneumonie infectieuse. Il peut être indiqué en cas de forte sus-
épanchement. picion clinique et de radiographie non évocatrice, de suspicion de
forme compliquée, de lésion sous-jacente à la radiographie, de sus-
picion de tuberculose ou d’évolution défavorable à 48–72 heures
 Diagnostic étiologique de l’initiation du traitement antibiotique. Il faut privilégier une
acquisition basse dose ou très basse dose [3] .
En fonction des étiologies, le diagnostic étiologique peut repo- L’injection de produit de contraste avec acquisition au temps
ser sur les seules données cliniques, biologiques et radiologiques, veineux est réservée aux suspicions de pleurésie ou d’abcédation.
ou nécessiter un lavage bronchoalvéolaire, des biopsies d’éperon Une acquisition avec injection est également à réaliser en cas
(dans les syndromes pseudoalvéolaires) ou une ponction trans- d’excavation pour rechercher un faux anévrisme et doit, dans ce
thoracique. cas, être faite au temps artériel.

Œdème pulmonaire
 Principales étiologies L’œdème pulmonaire cardiogénique débute par un œdème
interstitiel lié à l’accumulation de liquide plasmatique dans
Les causes de syndrome alvéolaire sont nombreuses mais cer- l’interstitium. L’œdème alvéolaire apparaît secondairement et cor-
tains éléments permettent d’aider le diagnostic étiologique. Parmi respond à l’inondation des alvéoles.
eux, on note le caractère aigu ou chronique, la distribution des En radiographie, l’œdème pulmonaire se présente classique-
lésions, les signes associés et, bien évidemment, le contexte. ment sous la forme d’un syndrome alvéolo-interstitiel ayant une
prédominance centrale avec une redistribution vasculaire vers les
apex, des épanchements pleuraux bilatéraux et une cardiomégalie
Syndrome alvéolaire aigu (Fig. 6). Les opacités alvéolaires présentent des contours flous et
Les deux principales étiologies à évoquer en cas de syn- peuvent avoir une distribution évocatrice en ailes de papillon. Les
drome alvéolaire ou de plage de condensation parenchymateuse opacités interstitielles rencontrées incluent les lignes de Kerley.
d’évolution aiguë sont la pneumonie infectieuse et l’œdème Une normalité de la silhouette cardiaque plaide en faveur d’une
pulmonaire. La distinction entre ces deux étiologies est habi- cause lésionnelle plutôt que cardiogénique.
tuellement aisée du fait d’une présentation clinique et d’une Le scanner n’a pas de rôle pour l’évaluation de l’œdème
topographie lésionnelle généralement différentes. Il existe cepen- pulmonaire, en particulier à sa phase alvéolaire. L’œdème pul-
dant d’autres étiologies de syndrome alvéolaire aigu (Tableau 1) monaire se manifeste par des plages de verre dépoli et parfois
et certaines pathologies habituellement classées dans les causes de de condensation pulmonaire, des épaississements septaux (débu-
syndrome alvéolaire chronique peuvent se révéler de façon aiguë tant souvent aux apex), un épaississement péribronchovasculaire
ou subaiguë par un tableau de pneumonie. Cliniquement, la pneu- et des épanchements pleuraux [4] . L’importance et l’association
monie infectieuse, la pneumonie organisée et la pneumonie aiguë de ces signes dépendent de l’ancienneté et de l’importance
à éosinophiles sont généralement associées à des signes généraux de l’œdème. L’œdème pulmonaire est habituellement bilaté-
tels que la fièvre. L’œdème pulmonaire est, quant à lui, le plus ral mais des formes unilatérales peuvent être observées en cas
souvent d’origine cardiogénique et s’associe alors à d’autres signes d’insuffisance mitrale (prédominance lobaire supérieure droite)
d’insuffisance cardiaque gauche. L’hémorragie intra-alvéolaire et ou d’évacuation trop rapide d’un pneumothorax (œdème de réex-
l’infarctus pulmonaire peuvent être la cause d’hémoptysies mais pansion).

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Figure 4. Pneumonie lipidique exogène.


A. Le scanner thoracique non injecté passant par
les bases montre des condensations parenchyma-
teuses bilatérales associées à des plages de verre
dépoli et des épaississements septaux à droite.
B. En fenêtre médiastinale, on visualise des densi-
tés graisseuses (flèche) au sein de la condensation
lobaire inférieure gauche.

A B

Figure 5. Microlithiase alvéolaire. Le scanner


thoracique non injecté montre des condensations
parenchymateuses bilatérales de densité calcique.
Cet aspect est caractéristique de la microlithiase
alvéolaire.

A B

Tableau 1.
Principales étiologies des condensations alvéolaires
Condensations alvéolaires aiguës Condensations alvéolaires chroniques
Condensations récidivantes Condensations persistantes
Pneumonies infectieuses Pneumonie organisée Pneumonie lipidique exogène
Œdème pulmonaire Pneumonie d’aspiration Sarcoïdose
Infarctus pulmonaire Granulomatose avec polyangéite Fibrose postradique
Hémorragie alvéolaire diffuse Granulomatose éosinophilique avec polyangéite Adénocarcinome mucineux invasif
Pneumonie aiguë à éosinophiles Ischémie veineuse pulmonaire Lymphome pulmonaire

souvent observé en cas d’embolie pulmonaire distale [6] et est asso-


cié à une fréquence accrue de douleurs thoraciques par irritation
pleurale et de fièvre.
En imagerie, il se présente sous la forme d’une condensation
alvéolaire sous-pleurale de forme triangulaire à base pleurale.
Cette condensation correspond à un remplissage alvéolaire par
du sang et des cellules inflammatoires autour d’une nécrose cen-
trale. Au scanner, la présence de clartés aériques au sein d’une
condensation parenchymateuse sous-pleurale est très évocatrice

* * du diagnostic (Fig. 7) [7] . La condensation sous-pleurale peut être


associée à un épanchement pleural habituellement de faible abon-
dance qui est lié à une réaction pleurale au contact. On retrouve
également fréquemment des stigmates d’hémorragie alvéolaire
sous forme de verre dépoli au pourtour de la condensation paren-
chymateuse principale. Une image d’infarctus pulmonaire sans
embolie pulmonaire visible doit faire réaliser une exploration vei-
Figure 6. Œdème pulmonaire aigu chez un patient de 63 ans admis neuse exhaustive pour rechercher une phlébite.
pour détresse respiratoire. La radiographie réalisée en position couchée
montre un syndrome alvéolo-interstitiel bilatéral (astérisques) et une car-
diomégalie. Hémorragie alvéolaire diffuse
En fonction de son abondance, l’hémorragie alvéolaire diffuse
peut se manifester par des plages de verre dépoli ou des plages de
Infarctus pulmonaire condensation alvéolaire. Le tableau radiologique peut mimer un
Un infarctus pulmonaire est retrouvé chez 10 à 50 % œdème pulmonaire aigu. Les lésions sont habituellement bilaté-
des patients présentant une embolie pulmonaire [5] . L’absence rales avec une prédominance centrale et peuvent s’associer à une
d’infarctus pulmonaire dans la majorité des embolies pulmonaires hémoptysie et une déglobulisation. Le diagnostic est habituelle-
est liée au double apport artériel du poumon, à la fois par le réseau ment porté par le lavage bronchoalvéolaire qui met en évidence
artériel pulmonaire et le réseau artériel systémique (artères bron- la présence de sidérophages.
chiques). Ces deux réseaux sont anastomosés en distalité, ce qui Au scanner, les opacités présentent habituellement des limites
permet une suppléance par la vascularisation systémique en dis- floues (Fig. 8) et peuvent s’associer à des nodules centrolo-
talité des embolies pulmonaires. L’infarctus pulmonaire est plus bulaires. Dans les jours suivant l’hémorragie, une association

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Figure 7. Infarctus pulmonaire.


A. L’angioscanner pulmonaire montre une
condensation sous-pleurale triangulaire à base
pleurale contenant des clartés aériques caractéris-
tiques d’infarctus pulmonaire mais sans embolie
pulmonaire visible.
B. Un complément par phléboscanner permet de
prouver le diagnostic en montrant une phlébite
iliaque droite (flèche).

A B

Figure 8. Hémorragie alvéolaire diffuse idiopathique chez un patient


présentant une hémoptysie. Le scanner thoracique non injecté montre
des plages de verre dépoli et de condensation parenchymateuse (flèche)
plus marquées à gauche. Le verre dépoli correspond à un comblement
partiel des alvéoles.

Figure 9. Pneumonie aiguë à éosinophiles chez une patiente cocaïno-


d’épaississement des septa interlobulaires et de verre dépoli mane. La radiographie thoracique de face en position debout réalisée dans
(aspect de crazy paving) peut être observée et correspond à la un contexte de détresse respiratoire aiguë montre des opacités alvéolaires
phase de résorption. Les causes d’hémorragie alvéolaire diffuse confluentes des deux bases pulmonaires. Le lavage bronchoalvéolaire a
sont multiples. Elles incluent les vascularites pulmonaires (dont la montré une hyperéosinophilie pulmonaire et la patiente s’est rapidement
polyangéite microscopique, le syndrome de Goodpasture, la gra- améliorée sous corticothérapie.
nulomatose éosinophilique avec polyangéite et la granulomatose
avec polyangéite) mais également les troubles de la coagulation,
la sténose mitrale et des formes idiopathiques [8] . l’adénocarcinome mucineux, les infections pulmonaires chro-
niques et le lymphome pulmonaire. En cas de lésions récidivantes,
les principales étiologies à évoquer sont la pneumonie organisée,
Pneumonie aiguë à éosinophiles la pneumonie d’aspiration, la granulomatose avec polyangéite et
La pneumonie aiguë à éosinophiles correspond à une détresse la granulomatose éosinophilique avec polyangéite.
respiratoire aiguë fébrile associée à des opacités alvéolaires ou Les signes associés peuvent aider à orienter le diagnostic.
alvéolo-interstitielles en imagerie et à une éosinophilie pul- Ainsi, la présence d’une distorsion architecturale est en faveur
monaire sans infection ou allergie [9] . L’hyperéosinophilie au d’une cause fibrosante et va orienter vers une sarcoïdose, une
lavage bronchoalvéolaire permet de poser le diagnostic alors que pneumonie organisée fibrosante ou une fibrose postradique.
l’hyperéosinophilie sanguine est le plus souvent absente à la phase La distribution des lésions et la présence de micronodules et
initiale. Parmi les causes retrouvées, on note un début récent de d’adénomégalies vont permettent de différencier ces trois étio-
tabagisme ainsi que l’exposition aux poussières ou aux fumées. logies.
Les patients sont le plus souvent de jeunes hommes âgés de 20 à Enfin, il faut toujours penser à la possibilité d’une ischémie vei-
40 ans [10] . neuse devant un syndrome alvéolaire chronique récidivant dans
En imagerie, les lésions associent des plages de verre dépoli, des un même lobe et s’associant à des signes de congestion veineuse
réticulations et parfois des plages de condensation pulmonaire localisée. De même, il faut systématiquement penser à recher-
(Fig. 9). Les diagnostics différentiels sont l’œdème pulmonaire, le cher une densité graisseuse intralésionnelle en cas de syndrome
syndrome de détresse respiratoire aiguë et la pneumonie infec- alvéolaire persistant car cela permet de reconnaître la pneumo-
tieuse. Les patients répondent rapidement à de fortes doses de nie lipidique exogène chronique qui est une étiologie rare mais
corticothérapie. d’aspect caractéristique.

Pneumonie organisée
Syndrome alvéolaire chronique
La pneumonie organisée correspond au développement de
Le terme de syndrome alvéolaire chronique rassemble les remaniements fibro-inflammatoires au sein des espaces aériens
condensations alvéolaires persistantes et les condensations alvéo- distaux en réaction à une agression de l’épithélium alvéo-
laires récidivantes (Tableau 1). En cas de condensation alvéolaire laire [11, 12] . Elle peut être idiopathique (pneumonie organisée
persistante, les trois principales étiologies à évoquer sont cryptogénique) ou être secondaire à une agression pulmonaire

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Figure 10. Pneumonie organisée cryptogénique. Le scanner tho-


racique non injecté montre des condensations parenchymateuses Figure 11. Pneumonie d’aspiration. Le scanner thoracique non injecté
bilatérales. À droite, les condensations parenchymateuses forment une montre une condensation parenchymateuse chronique déclive du lobe
couronne cerclant une plage de verre dépoli. Il s’agit du signe de l’atoll qui inférieur droit chez un patient de 64 ans ayant un antécédent de cancer
est très évocateur de pneumonie organisée mais non pathognomonique. œsophagien. Le diagnostic de pneumonie d’aspiration a été confirmé par
biopsie pulmonaire transpariétale.
(infection, toxicité médicamenteuse, collagénose, radiothérapie,
inhalation pathogène, etc.). Bien que traduisant un processus L’élément évocateur du diagnostic est alors la présence de densités
essentiellement intra-alvéolaire, la pneumonie organisée crypto- graisseuses (−80– −30 UH en incluant la déviation standard) au
génique est classée parmi les pneumonies interstitielles diffuses. sein de la lésion (Fig. 4). La pneumonie lipidique exogène chro-
En imagerie, la pneumonie organisée peut revêtir des aspects nique peut parfois prendre une forme pseudotumorale spiculée,
variables. Elle se présente souvent sous la forme de condensations mais là encore la densité graisseuse permet d’évoquer le diagnos-
périphériques et/ou péribronchovasculaires. Ces condensations tic. Les formes pseudotumorales sont souvent hypermétaboliques
peuvent s’associer à des lésions de verre dépoli, à un broncho- à la tomographie par émission de positons (TEP-scanner) [15] .
gramme aérique et à des distorsions bronchiques généralement L’autre présentation de la pneumonie lipidique exogène chro-
réversibles. Les caractéristiques évocatrices du diagnostic sont un nique est la présence de plages de crazy paving associant verre
aspect arciforme des condensations, le signe de l’atoll, ainsi que dépoli et réticulations.
le caractère migrateur des lésions qui correspond en fait à une Le diagnostic est radioclinique dans la majorité des cas mais
régression des condensations alvéolaires et l’apparition de nou- peut être aidé du lavage bronchoalvéolaire, voire de biopsies dans
velles condensations dans d’autres territoires. Le signe de l’atoll ou les cas difficiles. Rarement, les pneumonies lipidiques exogènes
du halo inversé est très suggestif mais n’est pas pathognomonique chroniques peuvent se compliquer d’une surinfection à Mycobac-
(Fig. 10). Il peut notamment être retrouvé dans la granuloma- terium fortuitum [16] .
tose avec polyangéite, la sarcoïdose et certaines infections. Ce
signe doit être différencié du signe du halo inversé nodulaire ren- Sarcoïdose
contré dans certaines granulomatoses comme la tuberculose [13] .
D’autres aspects de pneumonie organisée incluent les conden- Les condensations alvéolaires sont une manifestation atypique
sations périlobulaires, les condensations en bande et les aspects de sarcoïdose qui est retrouvée chez environ 10 % des malades.
pseudotumoraux à type de nodule ou de masse solitaire. La plupart Ces condensations sont formées par la coalescence des granu-
du temps les lésions de pneumonie organisée régressent intégrale- lomes. Elles sont habituellement bilatérales et symétriques, avec
ment sous traitement corticoïde. Dans certains cas, elles peuvent une distribution péribronchovasculaire. Alors qu’une localisation
cependant évoluer vers une distorsion architecturale persistante. dans les régions moyennes ou supérieures des poumons est habi-
tuelle dans la sarcoïdose, les formes alvéolaires sont associées à
des formes très actives de la maladie où la distribution supérieure
Pneumonie d’aspiration prédominante peut être absente [17] . Ces condensations peuvent
contenir un bronchogramme aérique et peuvent s’excaver. Outre
L’aspiration est définie par l’entrée accidentelle de substance leur topographie supérieure quand elle est présente, les éléments
exogène (liquide, nourriture) ou endogène (sécrétions oropha- évocateurs du diagnostic sont la présence de nodules périlympha-
ryngées, liquide gastrique) dans l’arbre trachéobronchique. En tiques notamment à la périphérie des condensations, la présence
fonction de leur nature, les substances aspirées peuvent conduire de ganglions médiastinohilaires et la présence fréquente d’une
au développement de pneumonie infectieuse ou chimique. La distorsion architecturale marquée (Fig. 12).
pneumonie peut parfois être chronique. Le territoire déclive de
la condensation, les signes de bronchiolite et le terrain (antécé-
dents oto-rhino-laryngologiques, troubles de la déglutition) sont
Fibrose postradique
des éléments d’orientation vers le diagnostic (Fig. 11). La fibrose postradique est une cause classique et facile-
ment identifiable de syndrome alvéolaire chronique. Le tableau
Pneumonie lipidique exogène chronique radiologique évocateur (Fig. 13) est l’aspect bien limité des
condensations, leur caractère rétractile et leur topographie qui
La pneumonie lipidique exogène chronique est une forme
suit les champs d’irradiation et ne respecte pas l’architecture des
particulière de pneumonie d’aspiration. Elle correspond à une
poumons (franchissement des scissures). Le caractère rétractile se
pneumonie réactionnelle liée à des aspirations bronchiques répé-
traduit par une perte de volume et la présence de bronchectasies
tées des graisses animales ou d’huiles végétales ou minérales.
par traction.
Ces substances incluent la paraffine utilisée pour maigrir, les
préparations nasales huileuses, le gloss à lèvres et la vaseline.
L’interrogatoire permet généralement de retrouver la substance
Adénocarcinome mucineux invasif
imputable. La plupart des huiles aspirées sont minérales. La pré- L’adénocarcinome mucineux invasif (anciennement carcinome
sence d’huile dans les alvéoles est responsable d’une inflammation bronchioloalvéolaire) est un sous-type d’adénocarcinome pulmo-
et de la formation de granulomes. naire caractérisé par une croissance lépidique [18] et pouvant se
La pneumonie lipidique exogène chronique peut se présen- manifester par des condensations alvéolaires chroniques. Histo-
ter sous la forme de condensations pulmonaires chroniques bien logiquement, il correspond à une prolifération tumorale muco-
limitées prédominant aux lobes inférieurs et au lobe moyen [14] . sécrétante disséminant par voie aérienne au sein des poumons.

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Figure 15. Lymphome pulmonaire primitif de type diffus à grandes


Figure 12. Sarcoïdose avec masses de fibrose. Le scanner thoracique cellules. Le scanner thoracique injecté montre des condensations paren-
non injecté montre des condensations alvéolaires rétractiles des régions chymateuses péribronchiques du poumon gauche et une condensation
moyennes des poumons. L’association à des ganglions calcifiés, une sous-pleurale du lobe inférieur gauche.
importante distorsion architecturale et des nodules pulmonaires (flèche)
est évocatrice du diagnostic de sarcoïdose.
habituellement le traitement chirurgical à visée curative et doit
être systématiquement recherchée.
Le diagnostic d’adénocarcinome mucineux invasif doit être évo-
qué devant toute condensation alvéolaire persistante et cela doit
conduire à la réalisation d’un lavage bronchoalvéolaire dirigé,
voire d’une ponction thoracique transpariétale.

Lymphome pulmonaire
Les lymphomes pulmonaires peuvent être primitifs (plus rare-
ment) ou secondaires. Les lymphomes pulmonaires primitifs
correspondent dans 80 % des cas à des lymphomes non hodg-
kiniens de type B, le plus souvent de type mucosa-associated
lymphoid tissue (MALT). Les lymphomes du MALT peuvent être
asymptomatiques et de découverte fortuite. Dans un tiers des
cas, ils surviennent dans un contexte de syndrome de Gougerot-
Figure 13. Fibrose postradique chez un patient ayant un antécédent de Sjögren. L’autre forme primitive la plus fréquente est le lymphome
lobectomie inférieure droite et de radiothérapie hilaire droite. Le scanner diffus à grandes cellules B qui survient habituellement sur un ter-
thoracique injecté montre une condensation parenchymateuse périhilaire rain d’immunodépression comme chez les patients transplantés
droite rétractile, siège de dilatations bronchiques et dont la topographie sous ciclosporine. Les lymphomes pulmonaires secondaires cor-
suit le champ d’irradiation. respondent le plus souvent à des lymphomes non hodgkiniens,
même si proportionnellement une atteinte pulmonaire est plus
fréquente dans les lymphomes hodgkiniens.
Les manifestations radiologiques des lymphomes pulmonaires
sont variables et peuvent être trompeuses. Elles incluent le plus
souvent la présence de multiples nodules ou condensations alvéo-
laires avec parfois un bronchogramme aérique [20, 21] . Les nodules
et condensations peuvent également être uniques, et une présen-
tation sous la forme de syndrome interstitiel ou de lymphangite
est possible. Une excavation est également possible. Des gan-
glions médiastinaux ne sont retrouvés que chez une minorité de
patients lorsque le lymphome est pulmonaire primitif. Devant
une condensation alvéolaire, les éléments devant évoquer la pos-
sibilité d’une atteinte lymphomateuse sont le caractère chronique
de l’atteinte, la présence d’un bronchogramme aérique (Fig. 15),
un caractère péribronchiovasculaire ainsi que le contexte.

Figure 14. Adénocarcinome mucineux invasif de forme pseudopneu-


Granulomatose avec polyangéite
monique. Le scanner thoracique non injecté montre une condensation
parenchymateuse lobaire supérieure droite mimant une pneumonie. La granulomatose avec polyangéite (ex-maladie de Wegener)
Cette condensation s’associe à des zones de verre dépoli se superposant est une vascularite nécrosante associant une inflammation de la
à des réticulations (aspect de crazy paving). paroi vasculaire et une granulomatose. Elle est classée parmi les
vascularites des petits vaisseaux à antineutrophil cytoplasmic anti-
bodies (ANCA) [22, 23] . Une atteinte respiratoire est présente dans
Les adénocarcinomes mucineux invasifs sont souvent associés environ 90 % des cas. L’atteinte respiratoire inclut des nodules
aux mutations de KRAS [19] . Les patients sont souvent asympto- ou masses pulmonaires dans 40 à 70 % des cas, des condensa-
matiques, ce qui conduit à des diagnostics tardifs. Ils peuvent tions parenchymateuses ou plages de verre dépoli dans 30 % des
présenter une toux productive. cas (Fig. 16), une atteinte trachéobronchique dans 15 à 25 %
Radiologiquement, on distingue les formes pseudopneumo- des cas et des épanchements pleuraux dans 10 à 20 % des cas
niques et les formes nodulaires. Alors que les formes nodulaires qui peuvent être secondaires à une insuffisance rénale [24, 25] . Les
prédominent dans les régions supérieures, les formes pseudopneu- condensations alvéolaires de la granulomatose avec polyangéite
moniques prédominent dans les régions inférieures. Ces formes peuvent être causées par une hémorragie voire un infarctus pul-
pseudopneumoniques peuvent se présenter comme des plages monaire, ou de la pneumonie organisée. Ces condensations sont
de condensation alvéolaire, de verre dépoli ou de crazy paving habituellement denses et peuvent contenir un bronchogramme
(Fig. 14). La dissémination au poumon controlatéral empêche aérique. Un élément pouvant aider à suggérer le diagnostic est

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Figure 16. Granulomatose avec polyangéite


chez une femme de 32 ans. Le scanner thoracique
montre des condensations parenchymateuses du
lobe inférieur droit associées à des nodules du lobe
moyen (A, têtes de flèche) et un épanchement
pleural droit (B, flèche).

A B

Figure 17. Granulomatose éosinophilique avec


polyangéite chez un homme de 45 ans asthma-
tique présentant une hyperéosinophilie sanguine.
La radiographie thoracique de face debout (A)
montre des opacités alvéolaires bilatérales de
topographie périphérique. Ces opacités corres-
pondent à des condensations parenchymateuses
cernées de verre dépoli sur le scanner thoracique
sans injection réalisé le même jour (B). Le scanner
des sinus (C) montre une atteinte extrapulmo-
B naire à type d’épaississement polyploïde du fond
du sinus maxillaire droit.

A C

le caractère multifocal des condensations en association à une


distribution périhilaire bilatérale ou péribronchovasculaire. Les
condensations s’excavent rarement, au contraire des nodules et
masses qui s’excavent dans 25 % des cas lorsqu’ils mesurent plus
de 2 cm de diamètre [24, 25] .

Granulomatose éosinophilique avec polyangéite


La granulomatose éosinophilique avec polyangéite (ex-
syndrome de Churg et Strauss) est également une vascularite des
petits vaisseaux à ANCA [22, 23] . Elle survient chez des patients d’âge
moyen ayant des antécédents d’asthme ou de rhinite allergique et
est caractérisée par l’association d’une vascularite nécrosante, de
granulomes et d’une infiltration par des éosinophiles. La radiogra-
phie thoracique, qui est généralement réalisée pour l’exploration
Figure 18. Pneumonie chronique à éosinophiles chez une femme de
d’un asthme compliqué, montre des opacités alvéolaires bilaté-
34 ans asthmatique présentant une toux chronique et une hémoptysie
rales le plus souvent périphériques à prédominance supérieure.
récente. Le scanner thoracique sans injection montre des condensations
Le scanner montre des plages de condensation alvéolaire et de
parenchymateuses bilatérales associées à un épaississement des septa
verre dépoli dans 90 % des cas pouvant être associées à des épais-
interlobulaires. La patiente présentait une hyperéosinophilie sanguine sans
sissements des septa interlobulaires, des signes de bronchopathie
signe de vascularite, ni d’atteinte extrapulmonaire.
(nodules bronchiolaires, dilatations bronchiques, épaississements
bronchiques) et un épanchement pleural dans 50 % des cas
(Fig. 17). Des atteintes extrathoraciques peuvent être associées
et incluent notamment une atteinte cutanée de vascularite, une
atteinte sinusienne, une atteinte cardiaque et des signes de neu- cliniques sont souvent insidieuses et peuvent inclure une toux,
ropathie. une dyspnée et de la fièvre. Un point important est l’absence
de signes extrapulmonaires et notamment de vascularite. En
imagerie, l’aspect peut mimer une pneumonie organisée cryptogé-
Pneumonie chronique à éosinophiles nique ou une granulomatose éosinophilique avec polyangéite. Les
signes incluent des plages de condensation alvéolaire ou de verre
La pneumonie chronique à éosinophiles (ou maladie de dépoli et des épaississements septaux (Fig. 18) [9] . Une distribution
Carrington) est une maladie rare représentant 1 à 2 % des pneu- périphérique aux lobes supérieurs doit faire évoquer le diagnos-
mopathies interstitielles [26] et touchant des patients d’âge moyen tic. Des opacités arciformes et un signe de l’atoll sont possibles.
avec fréquemment des antécédents d’atopie ou d’asthme. À la Une hyperéosinophilie sanguine modérée est retrouvée chez la
différence de la granulomatose éosinophilique avec polyangéite, majorité des patients et le lavage bronchoalvéolaire montre une
il s’agit d’une maladie limitée aux poumons. Les manifestations hyperéosinophilie supérieure à 25 %.

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Figure 19. Ischémie veineuse pulmonaire.


A. Le scanner thoracique injecté montre des
condensations parenchymateuses confluentes
lobaires supérieures droites aux contours flous,
associées à des signes de congestion du même
lobe (épaississement des septa interlobulaires).
Cet aspect est évocateur d’ischémie veineuse.
B. La fenêtre médiastinale montre une masse
hilaire droite (flèche) responsable d’une occlu-
sion complète de la veine pulmonaire supérieure
droite.

A B

Ischémie veineuse pulmonaire Tableau 2.


Orientation étiologique selon la distribution des condensations
L’ischémie veineuse pulmonaire correspond à un infarctus alvéolaires.
d’origine veineuse par congestion. Elle est liée à une obstruc- Distribution Principales étiologies à rechercher
tion ou une sténose serrée d’une veine pulmonaire. Sa survenue
n’est pas systématique et peut être retardée. Les étiologies pos- Centrale avec épargne Œdème pulmonaire
sibles d’occlusion veineuse pulmonaire sont l’envahissement ou périphérique Hémorragie alvéolaire
la compression veineuse d’origine tumorale, un traitement par Périphérique en ailes de Pneumonie chronique à éosinophiles
radiofréquence d’une fibrillation auriculaire, une médiastinite papillon inversées
fibrosante, une ligature chirurgicale, une sténose congénitale, Péribronchovasculaire Bronchopneumonie infectieuse
voire un myxome ou un thrombus de l’oreillette gauche [27] . Pneumonie organisée
L’aspect scanographique de l’ischémie veineuse pulmonaire est la Lymphome
présence d’une ou de plusieurs condensations parenchymateuses Déclive Pneumonies d’aspiration (dont les
confluentes mal limitées (Fig. 19). Les signes évocateurs sont la pneumonies lipidiques)
systématisation à un territoire vasculaire veineux, l’obstruction Œdème pulmonaire lésionnel
de la veine de drainage, la présence d’un halo de verre dépoli Asymétrique Cancer
et les signes de congestion veineuse associant un épaississe- Lymphome
ment des septa interlobulaires, un épaississement bronchique,
Signe de l’atoll Pneumonie organisée
une scissurite, et parfois un épanchement pleural homolatéral.
Pneumonie chronique à éosinophile
Ces condensations ont tendance à régresser spontanément en
laissant fréquemment place à de petites opacités linéaires rétrac-
tiles séquellaires. L’apparition de nouvelles lésions peut donner lipidiques) et l’œdème pulmonaire lésionnel en cas de lésions
un aspect migrateur. L’injection de produit de contraste avec une extensives bilatérales.
acquisition à un temps veineux permet d’objectiver l’obstruction
veineuse et ainsi d’affirmer le diagnostic.
 Conclusion
Le syndrome alvéolaire traduit la présence d’un comblement
Apport de la distribution (Tableau 2) alvéolaire dont les étiologies peuvent être multiples. Néanmoins,
Dans les paragraphes précédents, nous avons déjà évoqué les le tableau clinique couplé à l’étude des caractéristiques morpho-
principales étiologies du syndrome alvéolaire et des conden- logiques et évolutives des condensations ainsi que des signes
sations parenchymateuses en les classant en fonction de leur associés peut aider à en déterminer la cause. Au besoin, le
évolutivité ou de la présence de signes associés. La distribution des bilan peut être complété d’un lavage bronchoalvéolaire ou d’une
lésions est également un élément sémiologique important dans la ponction thoracique [28] . Devant une condensation alvéolaire
démarche diagnostique. chronique, il faut être particulièrement vigilant quant à la pos-
En radiographie, une distribution centrale en ailes de papillons sibilité d’un cancer ou d’un lymphome.
est une distribution caractéristique d’œdème pulmonaire.
À l’inverse, une distribution en ailes de papillons inversées est
Déclaration de liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens
évocatrice de pneumonie chronique à éosinophiles.
d’intérêts en relation avec cet article.
Au scanner, une distribution péribronchovasculaire est un élé-
ment orientant vers une origine bronchique ou lymphatique.
Ainsi, les étiologies à évoquer sont la bronchopneumonie en cas
de foyers multiples de condensation parenchymateuse ou une  Références
pneumonie organisée qui est plus rare mais peut avoir une pré-
[1] Hansell DM, Bankier AA, MacMahon H, McLoud TC, Müller NL,
sentation clinique proche associant de la fièvre à une altération
Remy J. Fleischner Society : glossary of terms for thoracic ima-
de l’état général. Les lymphomes pulmonaires peuvent également
ging. Radiology 2008;246:697–722, https://doi.org/10.1148/radiol.
avoir une distribution péribronchovasculaire. 2462070712.
Au scanner, une forme en atoll ou une présentation arciforme [2] Ceylan N, Bayraktaroglu S, Savaş R, Alper H. CT findings
des condensations est très évocatrice de pneumonie organisée. Cet of high-attenuation pulmonary abnormalities. Insights Imaging
aspect n’est pas pathognomonique et peut également être observé 2010;1:287–92, https://doi.org/10.1007/s13244-010-0039-2.
dans les pneumonies chroniques à éosinophiles. [3] Claessens Y-E, Debray M-P, Tubach F, Brun A-L, Rammaert B,
Les condensations asymétriques ou unilatérales sont suspectes Hausfater P, et al. Early chest computed tomography scan to assist
de pathologie tumorale. diagnosis and guide treatment decision for suspected community-
Enfin, les condensations alvéolaires déclives doivent faire acquired pneumonia. Am J Respir Crit Care Med 2015;192:974–82,
rechercher des pneumonies d’aspiration (dont les pneumonies https://doi.org/10.1164/rccm.201501-0017OC.

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G. Chassagnon (guillaume.chassagnon@aphp.fr).
Service de radiologie A, Hôpital Cochin, AP–HP, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France.
Université Paris Cité, 85, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris, France.
C. Guinet.
Service de radiologie A, Hôpital Cochin, AP–HP, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Chassagnon G, Guinet C. Syndrome alvéolaire. EMC - Radiologie et imagerie médicale - cardiovasculaire
- thoracique - cervicale 2023;41(1):1-10 [Article 32-360-A-10].

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