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Texte 5 – Dom Juan, acte II scène 3

Introduction : Au cours de la deuxième moitié du XVIIe, un mouvement littéraire et


artistique apparaît en France et en Europe : le Classicisme. Ce courant s’avère étroitement
lié au règne de Louis XIV ; il ne représente pas une école littéraire à proprement parlé mais il
réunit des écrivains ayant un idél commun, celui d’attendre la beauté des œuvres antiques.
Pour ce faire, les auteurs dits classiques s’imposent des règles de constructions claires et
rigoureuses, esthétiques et morales comme la sobriété, l’imitation des auteurs anciens, la
volonté de plaire et d’instruire, un style simple et naturel, etc.

Parmis ces auteurs tels Corneille ou Racine, figure Molière (1622-1673) – de son vrai nom
Jean-Baptiste Poquelin – marqua l’histoire du théâtre ; il créa la Comédie Françaises et se
distinguera par des pièces qui mêlent le comique, le pathétique et la critique, tout en
conservant le soutien du roi Louis XIV.

Il met en scène « Dom Juan ou le Festin de pierre » en 1665 soit un an après l’interdiction de
sa précédente pièce, « Tartuffe ». Dom Juan relate la vie libertine du héros éponyme
accompagné de son fidèle valet, Sganarelle. Il s’agit de la réécriture du « Dom Juam » de
Tirso de Molina (1583-1648). Dans cette œuvre, Molière ne respecte pas les règles classiques
(règle des trois unités, bienséance et vraisemblance) et mélange les registres.

La scène 3 de l’acte II met en situation Dom Juan, Pierrot, Sganarelle et Charlotte ; à savoir,
le libertin accompagné de son valet est confronté à un amant manant et vindicatif, jaloux,
nouvellement éconduit, par sa gueuse éprise du bel-âtre qui lui a promis le mariage. Alors
que le paysan à sauvé la vie de l’aristocrate, il se voit remercier par un double affront. Cet
extrait prend d’ailleurs des allures de farce (il s’agit du genre comique médiéval qui repose
sur une intrigue simple dans laquelle les personnages types – pour ne pas dire arqué type –
tentent de se flouer les uns les autres ; à ceci s’ajoute les comiques de gestes et de mots
maîtrisés ici par Molière.

Dans un premier temps, nous insisterons sur le caractère comique de la scène puis nous
mettrons en exergue les abus de pouvoirs montré dans cette scène.
Plan détaillé :

I) La double farce
A) La joue ridicule entre Pierrot et Dom Juan
1) Un paysan caricaturé dans ses paroles
(Pierrot se place supérieur à Dom Juan aussi bien physiquement que par le
discours mais utilise des marques de politesse, et cela alors que quelques ligne
plus tard celui-ci va se voir se remettre à sa place par Dom Juan de manière
brutale.
Comique de mots : mâche ses mots, parle en patois contrairement à Dom Juan
→ « Quement ? »L.9; « ous viendrez caresser vos femmes »L.11 ; « allez-v’s-en
caresser les vôtres »L.12
Jurons → »Jerniquenne ! »L.7 ; « Testiguenne ! »L.11 ; « Testigué »L.14 ;
« jernigué », « ventrequé », « Palsanqué, Morquenne »L.15
Décalage des actions de Pierrot avec ses mots → « Didascalie : s’éloignant
derrière Charlotte.-Jerniquennne, je ne crains rien »L.33)

2) Un personnage au comportement caricatural


(Comique de gestes : se moque de Pierrot en ne prenant même pas la peine de
lui répondre, lui lance des soufflets → « Didascalie : Dom Juan lui donne un
soufflet »L.14 ; « Autre soufflet. »L.15)

B) Le statut chimérique de Charlotte


1) Une femme crédule
(Défend Dom Juan face à Pierrot : « Didascalie : prenant Pierrot par le bras.-ET
laisse-le faire aussi Piarrot. »L.8 ; « Ce Monsieur veut m’épouser, et tu ne dois
pas te bouder en colère »L.20-21)

2) Une paysanne qui « joue » à la Dame


(Essaie de moins parler en patois et de parler comme Dom Juan, se voit déjà
Madame et se réjouit pour ce futur → « ne dois-tu pas être bien aise que je
devienne Madame ? »L.24 ; « si je sis Madame, je te ferais gagner queuque
chose, et tu apporteras du beurre et du fromage cheux nous. »L.26-27)

II) Les abus de pouvoir


A) Dom Juan profite des privilèges de sa classe sociale
1) Il maltraite ses gens
(Ne s’adresse pas à Pierrot directement mais le désigne péjorativement et le
menace de le frapper → « Qui amène cet impertinent ? »L.4 ; « Qu’est-ce que
vous dites ? »L.32
Il s’abaisse de son statut social en giflant Pierrot et cela à de nombreuses
reprises, alors que celui-ci lui à sauver la vie → « Didascalie : Dom Juan lui donne
un soufflet »L.14 ; « Autre soufflet. »L.15)
Dom Juan à toujours le dernier mot, voulait montrer qu’il est le plus fort et donc
par conséquent sa supériorité.)

2) Il maltraite son valet


(Lui donne un soufflet par maladresse mais ne s’excuse pas → « Disdacalie : lève
la main pour donner un soufflet à Pierrot, qui baisse la tête, et Sganarelle reçoit le
soufflet »L .43-44)

B) Dom Juan méprise les sentiments des personnes de basses conditions


1) Il manipule Charlotte
(Il lui ment pour son mariage avec lui dans le but de profiter d’elle, et cela
fonctionne si bien qu’elle rejette Pierrot pour lui, le tout grâce à son statut social
→« Ce Monsieur veut m’épouser, et tu ne dois pas te bouder en colère »L.20-21)

2) Il se moque de Sganarelle
(Alors que Sganarelle essaie de raisonner Dom Juan et Pierrot, celui-ci ce prend
un soufflet par son maître, sa « récompense » pour sa bonté envers Pierrot
→ « Te voilà payé de ta charité »L.47)

Conclusion : La scène 3 du deuxième acte revêt toutes les caractéristiques du burlesque.


Cependant, le rire franc et spontané laisse un rictus au goût amer. La scène s’avère être du pur
divertissement ais le spectateur est invité malgré lui à réfléchir.

Molière en dramaturge stratège pointe du doigt l’hypocrisie et surtout les violences sociales
légitimes et éhontées que pratique la noblesse pieuse et empruntée de son temps vis-à-vis de ceux
issues de la basse couche de la société.

Si son public n’éprouve pas encore de gêne consciente, l’auteur saura très vite leur porter une
estocade qui provoquera certaines réactions protestataires. En effet, il consacrera une scène entière
à la Religion dans laquelle le laconisme de Dom Juan éraflera subtilement la Religion eu égard
l’exaltation spirituelle de Sganarelle.

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