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PIERRE GRIMAL

ART DÉCORATIF ET POÉSIE AU SIÈCLE


D'AUGUSTE
11 est
inutile de souligner la place que
que décoratif, àRome, pendant tiennent
dans l'art dans la poésie
le cours du [er siècle av.aussi bien
enrésentations et les descriptions de
Rotte omniprésence de ceux-ci paysages. Cette
J-C.
fréquence plutót
ou
les
nous invitent à nous
fonction dans la vie quotidienne, la manière dont ils interroger sur leur
action sur la sensibilité chacun.
de étaient perçus, leur
Qu'il y eût un rapport établi
consciemment entre les images et les mots
entre le spectacle et le poème, nous ne pouvons en
dit, en passant, Horace dans l'Epitre aux Pisons; et,douter. Vt pictura poesis,
au début de la même
lettre, il constate, comme un fait d'évidence, que
limagination poétique et
l'imagination picturale obéissent aux mêmes lois, qui sont celles de la
fantaisie, tempérée, toutefois, par le respect du réel, une «imitation » réglée
dans le détail, même si l'ensemble de la composition ne reproduit pas un
lieu existant. Horace, nous le savons, ninnove pas; il ne tait ici que
suivre
une tradition bien établie!. Le paysage, aussi bien peint que décrit, est une
iopothesia, une composition mise en place par l'artiste ou le poète et
adaptée au dessein qu'il s'est formé. Le paysage est, essentiellement, alors,
le lieu de l'imaginaire.
Mais cet imaginaire peut prendre bien des formes, et l'art décoratif
romain, pour cette période, nous en livre quelques-unes, quil ne sera pas
inutile de rappeler brièvement. Tantôt le paysage se présente comme le lieu
d'une scène épique, et raconte une histoire - et nous en connaissons, avec
les peintures odysséennes de l'Esquilin, l'exemple le plus caractéristique.
Là les personnages, en mouvement, sont comme écrasés par les éléments
de nature où ils se déplacent; rochers, arbres, les surplombent et les
reduisent à n'être que d'insignifiantes silhouettes. - Tantöt les personnages
Frment l'essentiel de la composition, et les éléments du paysage passent au

Woir C. 0. Brink, Horace on Poetry, I, Cambridge 1971, au v, 361.


322
PIERRE GRIMAL

second plan, rejetés derière le sujet,


sanctuaire dionvsiaque» provenant come toile de fond
les tableaux qui onaient la de la Villa à la
Ainsi le petit
dans cette mme Maison
Maison d'Auguste, au Farnésinen, ou
Palatin Argus et encore
comme intemédiaire entredAuguste, un autre tableau
peut lo. Mais
les deux tvpes : les etre
Galatée, dans leque] T'etendue de la mer amours de
représentés avec des dimensions restreintes cst peuplée de
Une autre
distinction peut etre
phèmeconsidéré
Polvpersonnages
et de

précédentes: parfois le decor avec sonetablie, qui ne


pavsage, est lerecouvre
lieu pas les deux
(histoire d'Io: dUlvsse chez les Lestrvgons, d'une àanecdote
soit que les etc.), lantôt il se suffit lhi c
persOnnagCs De sCmblent pas sintégrer dans
cohérent soit qu is aicni un
tiennent les « friscs dites Compleiement disparu. Au premier
type scénario
sacro-idvlliques»
Maison dAuguste) et. naturcllement, les stucs de la célèbre est celleappar-
(la plus de
Au second. le tableau, Villa «à la
provenant. lui aussi, de la Maison d'Auguste
représentant un sanctuaire dArtémis. Les seuls êtres Farnésine».
Sont un perroquet et des canards en train de nager vivants qui l'animent
dans un ruisseau
pavsage se suffit évidemment à lui-mnéme. Il est le centre d'intérêt Ieiot L.L
tableau aété peint pour lui.
On peut considérer soit comme une troisième
catégorie, distincte des
deux précédentes, soit comme une variante de la seconde les représenta.
tions de « jardins», ou plutót de bosquets, animés par des oiseaux et des
fruits. On reconnait les peintures de la Villa de Livie à Prima Porta, celles
de la salle souterrainex desjardins de Mécène, et l'on sait que, à Pompéi ce
genre trouva un terrain délection.
Telles sont, schématisées, les données de la peinture décorative pour Je
milieu et la seconde moitié du Ier siècle av. J.-C. En quoi correspondent.
elles àce que nous offre la poésie contemporaine?

entre le paysage de l'idylle


On a sOuvent étudié les rapports qui existent
des animaux, des personna
sacrée- cest-á-dire une campagne animée par sanctuai
sacrifiant, apportant une offrande àun tombeau ou à un pëtit
ges évocations d'Ovide, dans les
etc. - et les
re, des voyageurs, des pécheurs, Fastes. Ici comme là, reviennent les
Métanorphoses, et, parfois, dans les
sanctuaires rustiques, les arbres sacrés, les sources et les
mémes thèmes, les évidemment traditionnel.
ruisseaux, quiforment un décor
ART DE ORATIF ET POÉSIE AU SIEKLE D'GEsTE
analvse semblable est possible à propos
Une exemple, le sanctuaire des des Elégier de
Dar Lares, avec les Tibule On
livreoffrandes
ou. dans le pocme liminaire du rituelles
chapellede Cérès, et tout le paysage qui est premier
itera. l0)
la , tort proche deI'aceuK
utel rust
guE nons
Elkee

au Paalatin et ailleurs I| faut ajouter que les


icque.
semnblable à ceux u pavsage de
rorons

diey de Lampsaque - sans


l'idvlle sacrée, Priapees
ou apparait suppnsent
si
un
décor
du doute parce quil est le sOEVent
(image dela Naturc. theatre où se
excellence joue
veetdela mort. Et nous devinons que le sans fin peint
décor le double svmbole par
nest pas indiffe
mystere de la
rent",quil,n'est pas un lieu vide, qui ne voudrait qu ètre plaisant pour Iei.
Lesimagesqu'il offre eveillent des échos dans l'âme : sentiment du divin, de
la présence, dans les objets naturels, de «démons», qui sont. tantöt. les
åmes des morts, tantot de véritables divinités, dont la bienveillance est
l'on est ainsi aux portes memes de la
priée. Et posie.
pavsages des Métamorphoses, ceux des Elegies de Tibulle
Les sont
généralement esquisses; les personnages ysont ce que perdus
la nature, et l'on rencontre maint exemple de comme nous au miieu lesde
montrent
odysséens cités plus haut. Mais il existe,
Properce, des paysages d'un autre stvle, où le detail estchezmisunen autre
paysages
valeurpoete.
et où
les personnages sont vus à plus grande échelle. Nous sommes alors pius
prèsdu relief dit «alexandrin ». Voici, par exemple. la grotte des Muses, que
le poète décrit ainsi : transporté en Béotie, près de la source Hippocrène.
Phébus lui était apparu, appuyé sur sa lyre et perche sur un laurier:
cumme Castalia speculans ex arbore Phoebus
sicait, aurata nixus ad antra lvra.
Ia situation du dieu paraitra moins incongrue si l'on se rappelle d ung
nart la scène où le dieu Tiberinus apparait à Enée, au livre VIll de l'E ne ude
e d'autre part, l'envol d'Amour échappant à Psych, dans les Metamorph
ses d'Apulée, et lui adressant la parole du haut d'un cvpres La tigure
d'Apollon domine donc toute la scène, et ses proportions sont evidemnent
beaucoup plus amples que celles des figurants d'une idylle sacree
Le centre de la composition est formé par une grotte en rocaille, ornee
dune mosaique verte: aux parois sont suspendus des tambourins et des

P. Grimal, Les Métamorphoses d'Ovide et la peiture pavsagiste 4 l'que dAuguNe, danx


REL, XVIL 1938, p. 152 et suiv.
I, 3, 13-14 : Castalia ex arbore. L'èpithete e embarrasse les comaenaeurs Elle aa
evidemment ici qu'une valeur d'espèce: le laurier est l'arbre delphique par exellence
324 PIERRE GRIMAL

plaques de terre cuite, dont une au moims porte l'image d'un


Silène ou peut-être, tout simplement, un tel masque de
qu'une flúte de Pan:
masque en terre-cuite
ainsi
Hic erat adfixis uiridis spelunca lapillis
pendebantque cauis vnipana pumicibus
orgia MusarWn et Sileni patris iiago
fictilis et calai, Pan Tegaee, tui".
Tout près, sont posées des colombes, «au bec pourpré » (punica rostyn)
Dans le reste du champ, les neut Muses, occupées àdiverses tâches: l'une
Cueille du lierre pour en faire des thyrses, une autre tresse des roses en
guirlandes, une autre joue de la lyre, ou plutôt cherche, sur les cordes. un
accompagnement pour un poème. Nous sommes bien loin de l'idyle
sacrée: les personnages sont, pourrait-on dire, «grandeur nature», mais il y
a plus. L'ensemble forme un tableau composé, centré sur le dialogue entre
le dieu et le poète, et les accessoires sont symboliques. On pense évidem
ment aux reliefs de rocaille et au répertoire de l'art hellénistique. Mais un
détail ne laisse pas de surprendre, si l'on s'en tient à cette interprétation :
l'évocation des colombes qui «teignent leurs becs pourprés dans le bassin
relief, elle appar.
de la Gorgone»5. La touche de couleur nous éloigne du d'Artémis, dans la
sanctuaire
tient à la peinture. Et l'on se souvient alors du
sous lequel nagent des
Maison d'Auguste, avec le ruisseau et le pontle dieu est un laurier, son
canards. De même, l'arbre dans lequel apparaîtarbres et les arbustes de la
comme le sont les
espèce est reconnaissable,
différence de ceux que l'on aperçoit sur les
peinture «à Prima Porta», et àla
rochers, dans les paysages odysséens.
sommes ici en présence d'un trait de sensibili
Il est probable que nous objets
romain, qui reconnaît une valeur esthétique à des
té spécifiquement « anecdote», un sujet
indépendamment de tout rapport avec uneprésence humaine. De
de nature, aussi en-dehors de touteexemples, chez Properce
légendaire, par exemple, et
délectation, nous pouvons citer bien des
cette pure
lui-même, d'abord. premier livre nous lisons:
second poème du
Ainsi, dès le colores,
humus formosa
aspice quos sunnittatsponte Sua melius,
ut ueniant hederae

4 Jbid, v. 27-30.
32: tingunt Gorgoneo punica rostra lacu.
5 Tbid. v.
ART DÉCORATIF ET POÉSIE AU SIÉCLE D'AUGUSTE
125
sIurgatelin solis fornnosius arbutus antris
et sciat indocilis currere lympha uias :
litora natiuis persuadent picta lapillis
uolucres nulla dulcius arte canunt.

Certes,les aléments de ce paysage sont traditionnels: le


lierre. lamaisgrotte.
eruisseau qui sort du rocher, les rivages parsemés de gravier; cela
nempche pas le poète de les considérer chacun en
lui-meme, et d'en
la beauté. Le débat, ici, est engage entre natura et ars. La
percevoir,
peinture
etle relief helléniques «imitent » - nous l'avons rappelé - des objets
naturels, mais c'est cette imitation que l'on juge belle, la beauté venant de
lintervention de l'artiste. C'est précisément ce que nie le poete
romain. Et
lon retrouve un mot célèbre sur la «vanité de la peinture». Si les Grecs
n'accordent de valeur esthétique quà ce qui sort de la main humaine, les
eux, suppriment la nécessité de celle-ci et situent la beauté
Romains, dans
«en soi», non dans son reflet imité par I'artiste.
l'obiet
Débat typiquement romain, dont la peinture illustre assez bien un
aspect, mais dont les poètes nous livrent l'essence. Properce, ici, peut et doit
ètre rapproché d'Horace et, particulièrement, de l'Epitre àFuscus, où nous
lisons ce passage bien connu:
est ubi diuellat somnos minus inuida cura?
Deterius Libycis olet aut nitet herba lapillis?
Purior in uicis aqua tendit rumpere plunbum
quam quae per pronum trepidat Cum murmure riuom3

La «nature» elle-mème est supérieure à lart, parce quelle realise


mieux que celui-ci les conditions de la vie heureuse. Et, parmi ces condi
tions, figurent les plaisirs des sens: parfums, éclat des couleurs, fraicheur
d'une eau courante, musique sourde de l'eau qui se précipite sur la pente
du ruisseau. On se souvient aussi de Lucrèce, et du prologue au chant l.
qui évoque le bonheur que répand la paix d'un beau jour.
NOus sommes ainsi conduits ànous demander si cette valorisation des
Objets naturels, au-delà de leur représentation, n'est pas en rapport avee un
developpement romain de l'epicurisme. Mais observons d'abord que ce

"1,2,9 et suiv. Properhnd, p l0 propuse de


Les editeurs suspectent persuadent, que Shackleton Bailey,
corriger en sua gaudent, sans doute imprudemment.
Horace, Epis., I, 10, 18-21.
326
PIERRE GRIMAL

changement d'esthétique,
à qui accorde à l'objet le pouvoir
lal'imitation, avait eu une conséquence immédiate, Rome,reconnu
naissance d'un art des
jardins- en jusque là
à
objets de cest-à-dire
de manière à provOquant
nature élaient la création lieux
de
plaisir et, plus rassembles, composés
prendre. généralement, la delectation esthétique que l'on assurer le
Le
plaisir que l'on prenait àvoir là « pouvait y
avoir été étranger au hature » dans sa réalitéparaît bien
renseigné sur stoicisme primiiil. Plutarque nous a quelgue nos
Plutarque, dans l'esthétique
de
le traité De la Chrvsippe. Celui-ci avait écrit, nous
animaux pour leur beauté, parcenatiure, «que la nature a produit bien
qu'elle est amie du
apprend
dos
variété»9. Mais il n'admet pas que lon éleve des beau et se plaît à la
il exclut de la paons «pour le plaisir», et
République
paons et d'entendre des
les hommes qui
sadonnent au plaisir de voir des
« Dans ce même rossignols - entendez, les amateurs de jardins
traité, De la République,
avoir dit que nous sommes disposés à continue Plutarque, peu après
ajoute qu'on orne parfois les champs de peindre même des immondices
qu'on élève des paons, des pigeons, des vignes grimpantes et de myrtes, et
perdrix, pour imiter leur cri et des
rossignols»!0, Le philosophe n'admettait comme beauté que celle du Logos.
et considérait comme une
perversion le plaisir que l'on prenait aux objets
sensibles. Nous retrouvons ici une position traditionnelle de la pensée
hellène, présente chez Platon et Aristote, l'intelligible l'emportant en valeur
sur le sensible.
L'épicurisme a adopté une conception inverse. Tandis que Chrysippe
soutenait que la beauté n'était que lun des moyens utilisés par Dieu pour sa
création - la queue du paon est la «raison d'être» de cet animal - mais ne
devait pas être objet de délectation pour l'esprit, Epicure et ses disciples,
tout en reconnaissant que la beauté rentre dans le plan du monde (on se
souvient de l'hymne à Vénus, au livre I de Lucrèce), pensent que le
sentiment que l'on en a est l'une des composantes de la uoluptas, donc qu'il
entre, avec les autres données des sens, dans la «moralité» (le Souverain
Bien).
Au temps de Cicéron, Posidonius admettait que la nature était un
et devait
modèle, proposé par la Raison universelle, mais que l'art pouvait
mesure où l'art révélait
la perfectionner, et, d'abord, l'imiter. Dans la Sénèque, lui, n'ad
l'action intelligente de l'homme, il devenait légitime!!,
suiv. (trad. E. Bréhier).
9 Plutarque, Contr. des stoic. XXI, 1044 b et
i0 Plutarque, ibid.
IV. Sénèque, Ad Luc. passim.
ART DÉCORATIF ET POÉSIE AU SIÉCLE D'AUGUSTE
327

thèse. L'art nest, ses yeux, qu un moyen de se donner des


à
cette

(allcias)dont la nature
pas peut se passer. Il est
wra

sposiTs d e Posidonius,
Sencque se révèle fort
proche
remarquable
de
que, dans
ortigue
pour nous ctonner. Ce changement de
n'est pas semble bicn
l'epicàuril'esgard
réaction me.
g cela

naturels s'ètre opéré, dans la pensée


précisément lephilosophique
Mais
objets Je
du siècle av. J-C.,
fs Vers le milieu moment ou
apparaitre etse développer un sens
OUS
aine,
décordela vie quotidienne, ainsi qu'en témoignent la paysage
Semble nouveau du
peinturedans
qui
àla mode et aussi le nouvel art des jardins.
alors d'être
in'estpas possible de développer ici l'étude des conditions spirituelles
ommence

à cette évolution. Nous nous contenterons de donner


présidé
quelques.
i
ont indications rapides. Vers 50 av. J.-C., il semble bien que le stoicis-

traditionnel ait connu une crise: tandis qu' Athénodore


Cordylion,
me
de Caton, prêchait un retour aux principes les plus rigoureux de la
aupres
issu de Panétius, et représentéalors par Posidonius (mort
le courant
sers ce moment) et, surtout, Athénodore. fils de Sandon, précepteur du
ieune Occtavien,incline à I'éclectisme. Il nous a semblé autrefois!² que I'un
disciples de Panétius, Hécaton, acceptait des positions épicuriennes.
Athénodore fils de Sandon, de son côté, abandonne le précepte fondamental
de

de la secte, qui invitait le sage à ne pas dédaigner l'action politique, mais à


livrer de toutes ses forces. Enfin, Sextius le Père, bien quil se refuse
sy
dappartenir au Portique, en retient les principales maximes et met l'accent
ar les éléments cyniques qui étaient restés latents dans le stoicisme depuis
ses origines. Sextius insiste sur la valeur de la «nature», par opposition à
Iarifice. et satistait ainsi une très constante tradition romaine, représentée
autrefois par Caton, et demeurée sous son nom comme un mythe jamais
oublié.
C'est dans ce milieu, spirituel en pleine transformation, que se dévelop
pa le décor «naturel » de la demeure. Horace fait observer, dans >'Epire à
Fuscus, que nous avons citée, que ce décor naturaliste prouve l'excellence
des thèses épicuriennes. Il note que l'on plante des taillis (silua) dans une
cOur péristyle, entourée de colonnes en marbre de multiples couleurs (ner
arias nutritur silua columnas), que l'on aime les demeures qui dominent
Une vaste perspective (laudaturque domus longos quae prospiscit agros) : tant,
l, la «natura » nous est nécessaire. tant elle l'emporte sur les rattine
ments persvers (entendez: les artifices de l'art):

" Actes du VIlle Congrès de l'Association G. Budé, Paris 1970, p. l45.


328

11atur:
ei 111aiG CNDcllefta famen usqe
On ne pei1et furttn fastidia ctrireCurret
que nous saurait imaginer
(écrite entre connakkOns dans comment
2? e1 20 an lex air maisons
plus pertinent au ste
demeure urbainc 1C Lorsquc l'on cont
neempor a ines dedt
representait
blaient abolir Image sUT ienétres sur unepoUvait pas ainsicette iet
unc de ces vraie
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du J]caipagne.
l mu:
donne un lardin o meme façon,compositions
De la
lorsque stvle, uui sem
de le
planter UncU enfermait dans un T'espace manquait lle pour
peristvle, ou on 1rouvai
1nc peut-t te terrasse
deco; a crtie poqu pas 1emerairc d'affimer, dans ces moven
humaine | iCnd acn taire CNprime une veritable condi
de tilaons,conditi
que le
sant ct prendre une philosophie
plutót qu pounuivant un dialogue entre consCience
plus claire, en établie
cnte lui et l'homme leset
son habilete, les aries.sCs propres productions, les Iruits deobjcts naturels
son activité e A
Ainsi. dans cet art
ne renforcee par la decoratil, convergent une tradition naturaliste roma.
retlexion philosophique et des éléments
iechnique grecquc, mais depouilles de leur empruntés a la
leur prsuppose rationnel. signification philosophique, de

Ace moment, il devient possible, croyons-nous, de mieus comprendre


la signification profonde des paysages horaciens, dans les Odes. Certes, les
Carnina sacrifient-ils parfois a I'imagerie traditionnelle de l'art hellenisti
que. On yirouve, comme chez Properce, des antra quelque peu tradition
nelsi4, On y trouve aussi, en revanche, des esquisses où le paysage n'est
la realite -
aucunement conventionnel - il est méme inspiré directement de
fort près certains tableaux du
mais sa composition rappelle néanmoins de
avons pris pour type de louie la
Il° style, et notamment celui que nous
maison d'Auguste. Ainsi l'evocation des
série, le sanctuaire d'Artémis dans la
chèvres en liberté sur le Lucrétile:

3 Horace, Epist., I, 10, v. 2125.


14 Odes, I, 5,1 (a Pyrha).
Tmprrne ttutto
orueTutlare .

Onpourrait mul er les eremples, qui provent cette teieettion te


robjet menu, de tou itoresque precis et delicat les prermieres enies
prinimps les le2ards qui se
au coulent garmi les tones
inmages lo nlantes, presque des
songe aux inatures, rrent es
Ton Pompei les es argots en train de ramper sur un iris, re enr In
mursdetous ces themes qui seront repris plus tard, tans la tetion
orseau.
campanienne mais qur ne sont pas bsents fe art
Anterieur.
opulaire Comme suttiraient à le prouver les peintures e Vlam ni

allinas.
vie simple, contorme à la nature (au sens epicrten, non stocen),
La
satisfaction des besoins necessaires, ou quelque peu superthus, ais iars es
de la simple nature, tel est l'ideal de cette genertion, u jemaude
limites quotidienne est environnee detre en harmomie v
décor dont la vie
exigences de sa sensibilite Les Odes d'Horee illustrent nimrablement
au
ces que l'on commence à ressentir entre les etats de ime t ies
cet accord
nature. I| n'est sans doute i poss1ble iet, , probablement,
objets de poemes allient àtel ou tei tablea: la
nécessaire, de rappeler comment ces
mer, les arbres,
peupliers ou cvpres, qu agitent les briseK les rtassx,
montagne qui brille au lom, une greve ue kaguelle
cascades, la neige d'une
tirees des barques, la pleine lune de printemps tout le spectale uu
sont humaine, sur la mot, la brievete
monde) une reflexion sur la condition
est vrai, comme on Ta wutens, qe e
lemps. l'angoisse ou la serenite. Sil
representations de themes legendaires ontmnusee une signtication eligeuse t,
morale, voici que, le dex mager de hakue el
plus genralement, evmboler Nous
apparait dans les Curmina se charge, à wn our de Helatioh
quil
ici, le fond mème de ce lvrtsnHe, qui evt tre uNe
touchons,
statique enface du monde.ce mème caractere slatiqe appart;N à nage
Or, il est evident que le plus wuvent (et te beaueup)
telle que la conçoit, lEguln
the de la plastiquc, Certes, les peinturer wdveaemer de
lat deco atif augusteen. tableaus
aOnlCnlx, Cn une serie de
330
PIERRE GRIMAL
Mais nous avons dit que dejà
dans un paysage qui y chaque scène est
composition du décor sur occupe la plus grande composee
place. Si pour elle
dééroule l'heislteo-miréeme,
la ciste
Argonautes, puis, par les scènes Ficoroni, où se l'on en juge par la
I'Esquilin où sont représentés les historiques
que l'on voit
des
Samnites (peinture datant, semble-t-il, préparatifs de paix sur le
reliefs de la Basilique du IVe siècle av. entre toRomai
mbeauns
de
e
tradition de figurations Aemilia, il quiexistait dans l'art J-C), puis par les
rentes sortes dépopées. narratives,
Cette tradition correspondent, romain
en une solide
est habituel de citer à ce persistera dans poésie, aux diffe.
les tableaux qui 'art
propos
visiteurs dans la maison de Trimalcion et où
du maitre, ainsi que des jeux l'on voyait
se populaaieirnte,
present
et il
auaux
dans la petite ville. Aces tableaux particulièrement
répondent les fameux représentée
donnés
la
vie
la Porte de Nole, à Pompéi, où peintures du autrefoides
Or,
étaient figurés des jeux.
voici que, dans >'art augustéen, et, sans doute, tombeau
auparavant, s'affirme une autre tendance; l'art narratif déjà une
planté par un art de linstant, qui refuse l'anecdote ou la est génératsup-ion
largement
immobile. L'oeil n'est plus invité à suivre un récit, maisfigeà en un épisode
spectacle, qui devient objet de méditation. On pourrait ainsi contempler
opposerà uneun
peinture «épique », une peinture «tragique» ou «lyrique », Cette
n'est pas née à Rome. Elle existait depuis les origines de la tendance
grecque, et K. Schefold en a rassemblé et mis en lumière bjen des
peinture
exem
ples!7, mais il ne semble pas que, avant Rome, elle ait annexé la «natures
A Rome même, cet art «tragique », ou «lyrique» a inspiré les poètes.
Ainsi, les Elégies de Properce contiennent des méditations morales portant
sur des images humaines, un épisode isolé d'une légende ou d'un drame
sont
Ainsi nous voyons Briséis recevant le corps d'Achillel8; ailleurs, ce
véritables
Andromaque, ou Laodamie, ou Hélène, que l'on voit, au centre de
d'âme, un senti.
mégalographies qui servent àdéfinir chaque fois un état parfaitement
l'amour, et Properce est
ment, une variation sur le thème de
poésie; il se réfère explicitement
conscient de ce dialogue entre peinture et le répertoire de la peinture
que lui offrait
à ce musée du légendaire nombreuses répliques sur les murs des demeures
grecqu, dont il voyait de d'Horace
Schefold amontré que l'on trouve dans les Odes
romaines 19, K.
rappellent de fort près de représentations attestées
des exempla moraux qui

Croisille, Bruxelles 1972.


La peinture
pompéienne, trad. fr. de M.
17K. Schefold,
18 II. 20.
19I, 2, 21-22.
ART DÉCCORATIF ET POÉSIE AU SIECLE DAUGUSTE
nouveau. chez
Pompéj0 Ce qui est
naturelspuissentservir de support à une méditationque lesHorace, cest
semblable. Et cela est images d'objets
égalementdans l'art contemporain.
i

LesOdes d'Horace, il est Vrai, atteignent dans la meditation lyrigue une


noureau

aux autres poètes de ce


profondeurrefusée temps. Mais Properce lu-mëme
poèmes d'une inspiration moins
en des
subi,
milieu et de l'esthetique de son temps. On le verra, par
philosophique,
cette influen-
a
e du oç est contée l'histoire d'Hylas. exemple, dans
élégieà Gallus, Properce y decrit avec
une grande force de suggestion
la source où les
l'enfant,
nymphes enleverentdes
la prairie, avec son verger naturel, ses arbres d'où pendent
une
de rosée (roscida desertis poma sub
fruits couverts arboribus)?1, ses lis
éclatant de blancheur, parmi des pavots couleur de pourpre (et circum
surgebantlilia prato, / candida purpureis mixta papaueribus"). Certes.
iriguo
là qu'un décor, qui veut surtout ètre «joli», suggérer une atmosphere
ilny a Mais si nous comparons ces images à celles que
Eraicheur et de jeunesse.
de Théocrite raconte la meme legende, nous nous
nousoffre l'idylle où
apercevrons quele poète grec compose tout autrement son pavsage. «Bien-
dans un lieu bas; autour, des joncs
remarqua une Source, poussaient
tß,il
abondance, la sombre chélidoine et le påle adiante, l'ache au feuillage
opulent et le
chiendent à la sinueuse racine »3, Ici, aucune couleur. mais
de nature, qui ont la valeur d'une simple esquisse. Il est donc
des épithètes le poète romain imaginait le paysage de la legende en se
bien certain que voyait autour de lui, et les notations
SOuvenant des représentations quil
à des peintures. Conclusion
colorées, qu'il introduit, prouvent quil pensait formuler à propos de l'antre
oui confirme celle que nous avions cru pouvoir
des Nymphes.
remarques n'épuisent naturellement pas toutes les obser
Ces quelques
l'on pourrait laire sur les rapports entre la poesie et l'art
vations que
suffisent peutètre àmontrer que la
décoratif àl'époque d'Auguste. Elles des mèmes tendances que celle
composition des æuvres peintes témoigne l'ode et l'elgie, elle abandonne
particulier
des poèmes. Comme ceux-ci, en et tragique. Ce qui subsiste
d'elements
narratif pour le style lyrique
le style sacrée, se charge d'elements de nature.
narratils, dans les frises de l'idylle reeit,
un paysage, préoccupation première du peintre, le
qui compOsent

2K. Schefold, op. cil., p. l28 et suiv.


21 |, 20, vers 35.
22 lbid. vers 37-38.
Théocrite, ldvlle XIII,. 41-42 (trad. Ph. E. Legand).
332

PIERRE GRIMAL
l'histoire
nous être racontée samenuisant au point de
tait un aujourd'
sujet » h ui insaisissable. Mais faut-ildisparaitre, ou.
raconté, une en toul
Farnésine,
qui
ou ceux de la Irise
fabula,
jaune
derrière les Vraiment
pavsagespenser qu'il
cas, de
franchissent un
inondée, ces 1illas dontpont, ces
à la

troupeaux
Maison d'
qui 'Auguste?des stucs deexis
Ces la
chose quà éroquer un on aperçoit au loin les paissent dans
vOyageurs
l'imagerie pavsage, Oç portiques une
servent-ils àprairie
legendaire
que ce genre de
et des
jpeinture éléments s'unissent
empruntés
des
à la thèmes familiers autrea
que son apparut
initiateur fut ce Ludius dontprecisémnent au réalit? Et
pas inventé les parle Pline temps qui nous l'on sait
thenes de
paysage,au mais il les I'aAncien. OCcupe,n'a
Ludius, certes,
Contemporaine, e les
çaient à populariscr lart des rattachant compositions projetés dans la réalité
dans sa peinture le jardins24, Cela réelles
revient à dire que acommen-
aussi pendant la meme changement d'esthétique dont la quil traduit
eux-mêmes plutot qu en raison période: les objets de poésie témoigne elle
de la tradition à nature sont aimés pour
naguere. Certes, cetie tradition est laquelle ils étaient
exemples empruntés aux Elégies de
Properce nous
toujours intégrésles
présente, et ressentie:
servent plus seulement de décor, un l'ont montré. Mais ile
chez Théocrite (au moins dans peu vague et
TTdvlle XI), conventionnel,
1ls prennent comme
nouvelle, accepte le plaisir quils donnent,
on une importance
d'abord, puis, à travers ce que l'on pourrait plaisir uniquement sensoriel
apPpeler leur interprétation
épicurienne, ils en viennent àse charger de symboles
Nous sommes ici en présence d'une véritable spirituels.
et au-delà. de la mnanière dont les révolution de l'esthétioue
hommes pensent leurs rapports avec le
monde des animaux, des plantes, des choses vivantes, ou qui semblent
telles, comme la mer, l'eau courante, le vent quianime les forêts. Ce sont
croyons-nous, les réflexions des philosophes qui ont amorcé cette révolu
tion, mais cela n'a été possible qu'en raison de plus anciennes tendances
qui existaient avant leur venue. C'est parce que les Romains n'avaient
jamais renoncé àperdre leur paradis rustique, parce quils n'avaient jamais
cessé de se défier de l'artificiel, pour vanter tout ce qui éait «naturel», que
l'innovation de Ludius fut si bien accueillie, et qu'au même moment les
spectacles de nature venaient orner les murs de leurs demeure, sans que
leur donner
l'on crút nécessaire, comme le voulait l'esthétique des Grecs, de
aventure humaine. L'art
comme prétexte quelque fabula et le récit d'une mêmes du romantisme,
racines
comme la poésie romaine sont donc ici aux

éd. Paris 1969, p. 94 et suiv.


24 P. Grimal, Jardins romains, 2
ART DÉC ORATIF ET POÉSIE AU SIECLE
DAUGURtp
élégiaquesont innové en poetique lorsqu ils ont pensé gtue
propresamours était plus
importante intéressante
et l'histoirs
héros
légendaires Ludius et ses disciples,
leurs gue
directs ou indirects ontcelle
arnorté
des
de
yneinnovationnarallel et non moins lourde de conséquences en prouvant
quelesarbres, les caxles horizons d'une campagne vraie n etaient pas
moinsdignes d'attention, et susceptibles de beaute que les hauteurs du
d'une Arcacie conventionnelle.
Cithéronou

Paris IV
Universitede Pierre GRIMAL

INTERVENTIONS

Paolo Moreno:
Ciascuno di noi non può che confermare l'apprezzamento per le oservazioni di
Pierre Grimal sull''sestetica dell'epicureismo romano. Tuttavia e apparsa sorprenden
e la sua dichiarazione iniziale, che il rapporto natura arte, quale si pone tel
onlo non troverebbe precedenti nel mondo greco. L'intervento di Mario Toreli
servito aricordare quanto ciò sia legato a Teocrito ed alll'ellenismo. Vorrei aggung
re che ipunti toccati da Pierre Grimal, come caratteristiche originali del periodo ¢
dell'ambiente che ci interessano, non rappresentano altro che la continuità deila
diatriba estetica di etàclassica.
Democrito aveva teorizzato il valore relativo della visione, ed Apollodoro aveva
rifiutato una decorazione narrativa affermando di dipingere la parvenza " dele
cose : xypapia' e pavtaotuxn uIngç in Platone, species in Plinio'
Siparlava pertanto di valorionirici della pittura già a proposto di Parraie la
epigramma di Glauco,anteriore al ll secolo, aftermava che Parravto aveva dipuntu d

Platone, Crizia, 107 d: Repubblica. 365 c: 602 d: Fedone o9 b: E.C Keuls Pue and
Greek Painting, Leiden, 1978, p. l10; 15.
Platone, Sofista, 236 b4: Keuls, Plato and Greek Puining p cu,p lI3
Plinio, Naturalis historia, XXXV, 60.

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