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Manga-Wikipédia 1713608091131
Manga-Wikipédia 1713608091131
Un manga ( 漫画) est une bande dessinée japonaise. La plupart des mangas se conforment à un style développé au Japon à la
fin du xixe siècle, alors que la forme a une longue préhistoire dans l'art japonais antérieur. Au Japon, le terme manga désigne
plus généralement la bande dessinée, quelle que soit son origine. En Occident, le mot « manga » désigne une bande dessinée
japonaise, mais aussi parfois une bande dessinée non japonaise respectant les codes des productions populaires japonaises ou
pour nommer, par métonymie, d'autres produits visuels rappelant certaines de ces bandes dessinées (dessins animés, style
graphique, etc.).
Rayon de mangas.
Les mangas se lisent généralement de droite à gauche. En raison du rythme élevé de parution[1] et pour limiter le coût
d'impression, la plupart des mangas sont dessinés en noir et blanc, mis à part la couverture. Les deux premiers pays les plus
consommateurs de mangas sont le Japon et la France en 2021[2],[3],[4],[5],[6]. La personne réalisant des mangas est appelée
mangaka.
Étymologie
Le mot japonais « manga » souvent traduit littéralement par « image dérisoire » ou « dessin non abouti », est composé de « ga »
(画), qui désigne la représentation graphique (« dessin », « peinture » ou toute image dessinée — comme l'estampe), et « man »
(漫), « involontaire », « divertissant », « sans but », mais aussi « exagérer », « déborder » (qui peut être interprété comme
caricature), ainsi qu'« au fil de l'idée ». Ainsi on pourrait aussi bien traduire ce mot par « dessin au trait libre », « esquisse au gré
de la fantaisie », « image malhabile » ou tout simplement caricature ou grotesque dans le sens de Léonard de Vinci.
Le terme devient courant à partir de la fin du xviiie siècle avec la publication d'ouvrages tels que Mankaku zuihitsu (1771) de
Kankei Suzuki, Shiji no yukikai (1798) de Kyōden Santō ou Manga hyakujo (1814) de Minwa Aikawa. Également en 1814, Hokusai,
futur graveur de La Grande Vague de Kanagawa, donne à ses recueils d'estampes parfois grotesques le titre Hokusai manga. C'est
ce dernier ouvrage qui fait connaître le mot en Occident. Il aurait été ainsi choisi pour son analogie avec un terme similaire dans
l'ancien temps mais dont l'écriture diffère, et qui décrit la conservation de proies dans les becs des pélicans[7] indiquant des
scènes prises sur le vif — comme l'oiseau fondant sur sa proie.
Il ne prend le sens précis de « bande dessinée » qu'au cours du xxe siècle, avec l'introduction de celle-ci au Japon. Lorsqu'elle y
devient très populaire, après 1945 et grâce à Osamu Tezuka, le terme s'impose pour finir par ne plus désigner qu'elle[8]. C'est ce
terme qui a été utilisé à l'étranger (France, États-Unis, Allemagne, etc.), pour caractériser la bande dessinée japonaise, dont il est
devenu un synonyme, et parfois grossièrement ramené à un genre.
Manga s'écrit mangas au pluriel, selon la règle du pluriel des mots étrangers intégrés dans la langue française (les dictionnaires
actuels ne donnent d'ailleurs pas le mot comme invariable)[12].
Le manga, bien que très ancré dans la culture japonaise moderne, trouve ses péripéties dans la peinture narrative qui apparaît à
l'époque de Nara, avec l'apparition des premiers rouleaux narratifs peints japonais : les emakimono. Ces œuvres associaient en
effet des peintures à des textes calligraphiés qui assuraient, ensemble, le récit d'une histoire que l'on découvrait au fur et à
mesure que se déroulait le rouleau[13]. Le premier des emakimono, l’E inga kyō ( 絵因果経), illustration d'un sûtra, était la copie
d'une œuvre chinoise et marquait une nette séparation entre le texte et la peinture. Pourtant, durant l'époque de Heian
apparaissent les premiers emakimono de goût japonais (le style yamato-e), dont l'emaki du Genji monogatari datant du xiie siècle
est l'un des plus anciens représentants conservés[14]. Ces derniers faisaient souvent intervenir de courts textes explicatifs après
de longues scènes peintes. Les Chōjū-giga, soient « caricatures de la faune », une satire anthropomorphique, sont constitués
uniquement de dessins à l'encre[15]. Cette priorité accordée à l'image – qui peut assurer seule la narration – est aujourd'hui une
des caractéristiques les plus importantes du manga.
De même, lors de la période Edo, les estampes étaient d'abord destinées à l'illustration de livres, mais, très vite, le rapport de
force s'inversa et l'on vit l'apparition de « livres à lire » en opposition avec les « livres à regarder », les kusazōshi tels que le
kibyōshi. Puis vint la disparition relative des écrits complémentaires et la naissance de l'estampe « indépendante » en une seule
illustration, qui est la forme la plus fréquente de l’ukiyo-e. C'est d'ailleurs Katsushika Hokusai (1760-1849), le fondateur de
l'estampe de paysage, qui donna son nom au manga (littéralement « dessins grotesques »), nommant ainsi ses célèbres
caricatures les Hokusai Manga, qu'il publia de 1814 à 1834 à Nagoya.
Enfin, et notamment dans le manga de type shōjo, l'Art nouveau occupe une place prépondérante parmi les influences des
mangakas, tout en sachant que ce mouvement a été provoqué en partie par le japonisme en Europe, à la suite de la découverte
des estampes par les Occidentaux[16].
De 1861 à 1931
Les deux seuls quotidiens existants au début des années 1860 étaient à destination de la colonie étrangère, le Nagasaki Shipping
List and Advisor (bihebdomadaire de langue anglaise) et le Kampan Batavia Shinbun (Journal officiel de Batavia). La presse
japonaise naît avec le Yokohama Mainichi Shinbun en 1871 et le Tokyo Nichinichi Shinbun en 1872. C'est le Shinbun Nishikie, créé
en 1874, qui introduit le premier les estampes dans la presse japonaise.
La presse japonaise se transforme aussi sur le modèle de la presse anglo-saxonne avec l’apparition des dessins d’humour sur le
modèle américain et des caricatures à la mode britannique à partir de 1874 avec le E-Shinbun Nipponchi, créé par Kanagaki
Robun et Kawanabe Kyōsai, et surtout avec le Marumaru Shinbun créé par Fumio Nomura ( 野村 文夫, Nomura Fumio) qui a fait
une partie de ses études en Grande-Bretagne. Imprimé entre 1877 et 1907, il publie des dessins de Kinkichirō Honda (本多 錦吉
郎, Honda Kinkichirō) et de Kiyochika Kobayashi, créateur d'estampes ukiyo-e, qui fut élève de Charles Wirgman . [17]
Wirgman fait partie de ces trois Européens qui ont une influence certaine sur l'avenir de la bande dessinée et du manga. Ce
caricaturiste anglais arrive à Yokohama en 1861, et l'année suivante il crée un journal satirique, The Japan Punch, dans lequel il
publie jusqu'en 1887 nombre de ses caricatures, dans lesquelles il utilise des balloons[18]. Il enseigne en même temps les
techniques occidentales de dessin et de peinture à un grand nombre d'artistes japonais comme Takahashi Yuichi[19].
Magazine satirique Tôbaé,
no 34, 1888 édité par Georges
Ferdinand Bigot.
Autre caricaturiste, le français Georges Ferdinand Bigot arrive à Yokohama en 1882, il enseigne les techniques occidentales du
dessin et de l'aquarelle à l'École militaire de la ville[18]. Parallèlement, il publie des caricatures dans des journaux locaux et édite
des recueils de gravure. En 1887, il crée lui aussi une revue satirique, Tôbaé, alors que Wirgman arrête la sienne, dans laquelle il
démontre sa maîtrise de la technique narrative en introduisant la succession des dessins dans des cases au sein d'une même
page. Il part en Chine en 1894 pour couvrir pour The Graphic de Londres le conflit sino-japonais. De retour en France en 1899, il
collabore comme illustrateur pour l'imagerie d'Épinal[20].
C'est à cette période qu'un fils d'enseignant hollandais dans une mission de Nagasaki quitte le Japon pour suivre des cours d'art
à Paris, où il tente quelques bandes dessinées dans le Chat noir avant de s'exiler aux États-Unis. C'est là que Gustave Verbeck
dessine un des strips les plus originaux de l'histoire de la bande dessinée, The Upside-Downs of Little Lady Lovekins and Old Man
Muffaroo. Le strip de quatre cases se lit dans le sens normal de lecture, de gauche à droite, puis l’histoire se continue en
retournant tête-bêche le journal et en relisant les cases dans le sens inverse, lady Lovekins se transforme alors en old man
Muffaroo, le chapeau de l’une devenant la barbe de l’autre[21].
Création
C'est le caricaturiste australien Frank Arthur Nankivell qui travaille pour le Box of Curios ( ボックス・オブ・キュリオス, Bokkusu
obu kyuriosu), publié à Yokohama par E. B. Thorne, qui initie Yasuji Kitazawa à la caricature, lequel prendra ensuite le nom
d'artiste Rakuten Kitazawa. En 1899, Rakuten quitte Box of Curios pour rejoindre le Jiji Shinpō ( 時事新報) créé par l'intellectuel
Yukichi Fukuzawa, désireux de développer le mode satirique au Japon. C’est Kitazawa qui reprend le terme de manga pour
désigner ses dessins, il se désigne lui-même comme mangaka (dessinateur de mangas)[22]. Le premier manga considéré comme
tel date de 1902. Il s’agit d’une histoire dessinée par Kitazawa dans les pages illustrées du supplément du dimanche du Jiji
Shinpō. Kitazawa s’inspire beaucoup de la culture européenne, son premier manga reprend le thème de l’arroseur arrosé[18]. Le
時事漫画).
supplément du Jiji Shinpō prend rapidement le nom de Jiji Manga (
En 1905, Kitazawa crée son premier magazine le Tokyo Puck (東京パック) en s'inspirant de l'américain Puck et du Rire français.
Ce magazine en couleurs paraît deux à trois fois par mois et contient des textes en japonais, chinois et anglais, des caricatures
et un manga en six cases de Kitazawa. Plusieurs fois censuré pour ses caricatures féroces contre le pouvoir, il crée en 1912
deux nouveaux magazines, Rakuten Puck ( 楽天パック) et Katei Puck (家庭パック). Mais c'est en 1908 que Kitazawa innove dans
la presse japonaise en publiant Furendo ( フレンド, Amis), un magazine en couleurs exclusivement réservé aux enfants. Devant le
succès, il renouvelle l'expérience en 1914 en créant la revue Kodomo no tomo (子供之友) dans laquelle il dessine L'enfance de
Toyotomi Hideyoshi . Ce succès allait marquer le marché des mangas pour longtemps . En 1914 paraît Shōnen Club (少年倶
[23] [24]
楽部, Le Club des garçons), en 1923 Shōjo Club (少女倶楽部, Le Club des filles) et en 1926 Yōnen Club (幼年倶楽部, Le Club des
jeunes enfants)[25]. En 1929, Kitazawa entreprend un long voyage en Europe, en Afrique et aux Amériques. De passage à Paris en
1929, il expose en présence de Léonard Foujita et y reçoit la Légion d'honneur[18].
À la fin de l'ère Meiji, à l'ère Taishō (1912-1926), Ippei Okamoto ( 岡本 一平, Okamoto Ippei) dessine des mangas pour le quotidien
Asahi Shinbun. Il est l'un des inspirateurs du mouvement des « Nouveaux représentants progressistes du manga » qui introduit
au Japon les comics, entre autres Bringing up Father (La famille Illico) de Geo McManus paraît dans Asahi Gurafu ( アサヒグラフ).
Si à cette époque tous les mangas utilisent plus ou moins la bulle, il y a encore beaucoup de texte écrit dans les dessins. Le
premier à généraliser l'emploi de la bulle est Katsuichi Kabashima ( 樺島 勝一, Kabashima Katsuichi) qui dessine Les Aventures de
Shōchan ( 正チヤンの冒険, Shōchan no bōken) accompagné de son écureuil dans le premier numéro de Asahi Gurafu en
1923[15],[26].
La satire et la caricature sont féroces envers le pouvoir en place et, en 1925, le gouvernement établit une censure en
promulguant une « Loi de préservation de la paix ». La presse japonaise devient « politiquement correcte » mais la publication de
mangas se développe. Des magazines féminins comme Shufu no tomo ( 主婦の友, L'ami des ménagères) ou Fujin Club (婦人倶楽
部, Le Club des femmes) publient aussi des mangas à destination de leurs lectorats ou pour des mères de familles qui lisent ces
mangas à leurs enfants[25].
À partir de la guerre sino-japonaise, et comme plus tard aux États-Unis ou en Italie, la presse, y compris les mangas, se met au
service de l'État pour soutenir l'effort de guerre. Ainsi le très militariste Norakuro ( のらくろ) de Suihō Tagawa nous montre un
[15]
chien paresseux engagé dans l'armée impériale, première série longue . C'est comme cela que les Japonais lisent aussi les
aventures de Speed Tarō ( スピード太郎, Supīdo Tarō) de Sakō Shishido (宍戸 左行, Shishido Sakō), qui déjoue toutes sortes de
conjurations étrangères, et celles de Dankichi dans Bōken Dankichi (冒険ダン吉, « Les Aventures de Dankichi ») de Keizō
Shimada (島田 啓三, Shimada Keizō). Ce seront les séries les plus populaires au Japon jusqu'au milieu des années 1940 pendant
lesquelles toute la presse ainsi que toutes les activités culturelles et artistiques subissent la censure du gouvernement militaire,
ce dernier n'hésitant pas à mobiliser ces milieux à des fins de propagande.
L'après-guerre
Sous l'occupation américaine, les mangakas d'après-guerre subissent l'énorme influence des comic strip qui sont alors traduits
et diffusés en grand nombre dans la presse quotidienne japonaise. Sazae-san de Machiko Hasegawa sera le premier grand
succès d'après-guerre[15]. Cette génération a vu ses villes rasées, ses pères vaincus, son empereur déchu de sa divinité, et ce que
leurs idéologies véhiculaient jeté dans les poubelles de l'Histoire par les vainqueurs[28]. Les bombardiers B29, les avions
invulnérables, et les jeeps armées apparaissent dans la vision des futurs mangaka encore adolescents. Après sa défaite, le
Japon s'est reconstruit au prix d'un lourd sacrifice ; d'ailleurs dans les mangas apparaît souvent la devise de Shōnen Jump :
« Amitié, effort, victoire » (devise choisie par les lecteurs).
L'un d'entre eux, influencé par Walt Disney, révolutionnera le genre et donnera naissance au manga moderne : il s'agit du célèbre
Osamu Tezuka. C'est en effet Tezuka qui introduira le mouvement dans la bande dessinée japonaise par des effets graphiques
comme des traits ou des onomatopées soulignant toutes les actions comportant un déplacement, mais aussi et surtout par
l'alternance des plans et des cadrages comme il en est usage au cinéma, rompant ainsi avec une tradition théâtrale, les
personnages étant jusque-là toujours représentés en pied, à égale distance et au centre de l'image. On considère généralement
Shin-Takarajima ( 新宝島, lit. « La nouvelle île au trésor »), parue en 1947, comme marquant le début du manga moderne.
L'animation étant la véritable passion de Tezuka, il réalisa la première série d'animation japonaise pour la télévision en janvier
1963, d'après l'une de ses œuvres : Tetsuwan Atom ( 鉄腕アトム, Tetsuwan Atomu), plus connue en France sous le nom d'Astro, le
petit robot. Finalement, le passage du papier au petit écran devint courant et l'aspect commercial du manga prit de l'ampleur.
Tezuka bouleversa le mode d'expression du manga, en explora les différents genres – alors principalement infantiles – et en
inventa de nouveaux. Il inspira de nombreux artistes tels que le duo Fujiko Fujio (Obake no Q-tarō, Doraemon), Fujio Akatsuka
(Tensai bakabon) et Shōtarō Ishinomori (Cyborg 009, Kamen Rider) qui se succédèrent au Tokiwasō, voire Leiji Matsumoto
(Galaxy Express 999)[15].
Les années 1960 voient l'émergence de mangas plus dramatiques dans lesquels sont abordés des sujets plus « sérieux » et
réalistes, appelés gekiga[15]. Initié par Yoshihiro Tatsumi et Takao Saitō (Golgo 13), le style influencera notamment Sampei
Shirato (Ninja bugeichō, Kamui den), Shigeru Mizuki (Kitaro le repoussant) et le duo Tetsuya Chiba/Asao Takamori (Ashita no Joe),
la plupart de ces auteurs participant au magazine d'avant-garde Garo[15].
En 1964 naît l'association des mangakas du Japon ( 日本漫画家協会, Nihon mangaka kyōkai), qui décerne des prix annuels à
partir de 1972. Dans les années 1970, le manga pour filles, écrit par des femmes (shōjo) se développe à l'initiative du groupe de
l'an 24, notamment Moto Hagio (Poe no ichizoku) et Keiko Takemiya (Kaze to ki no uta), puis de Riyoko Ikeda (La Rose de
Versailles), Suzue Miuchi (Glass no Kamen), et Yumiko Igarashi et Kyoko Mizuki (Candy Candy)[15]. Mettant en avant les relations
psychologiques des personnages, il se détache des mangas pour garçons (shōnen)[15].
La première librairie dédiée uniquement à la vente de manga ouvre à cette époque en 1979 dans le quartier Jinbōchō de Tokyo,
la librairie Comic Takaoka.
En 1985, Tezuka Osamu reçoit le prix culturel de Tokyo, et en 1990, un an après sa mort, le Musée d'art moderne de Tokyo lui
consacre une exposition. Cet événement marque l'introduction du manga dans l'histoire culturelle japonaise.
Le logo de Pokémon.
Dans les années 1980 et plus encore 1990, l'émergence du jeu vidéo comme industrie de masse au Japon s'imprègne de culture
manga (notamment le genre du « J-RPG »), et en retour a un effet sur la production de mangas, à tel point que les éditeurs
commencent à sortir des univers multimédias comme la franchise Pokémon (jeu de Game Boy devenu manga, jeu de cartes, et
une multitude de produits dérivés).
Actuellement
Ainsi, les mangas « grandissant » en même temps que leurs lecteurs et se diversifiant selon les goûts d'un public de plus en plus
important, l'édition du manga représente plus d'un tiers par ses tirages, et près d'un quart par ses revenus, de l'ensemble de
l'édition japonaise. En 2008, sur 3,2 milliards de publications vendues au Japon (2 000 milliards de yens), on comptabilisait
669 millions de magazines de manga (21 % des publications) et 478 millions de recueils de manga (15 %), pour un chiffre
d'affaires respectif de 211 et 237 milliards de yens (22 % des ventes totales), chiffre relativement stable depuis le début des
années 1990[29],[30]. Les hommes de moins de 30 ans lisent environ six mangas par mois, contre trois pour les femmes[29]. La
vente de mangas numériques représentait déjà en 2008 3/4 des ventes de livres électroniques avec 35 milliards de yens[29].
Le jeu de cartes à jouer Yu-Gi-Oh!.
Le manga va plus loin, il en existe des jeux de cartes, des jouets, des jeux vidéo, des films d'animation et des films ; ces derniers
pouvant même être à l'origine d'un manga (comme c'est le cas avec Pokémon qui était à l'origine un jeu vidéo). Il est devenu un
véritable phénomène de société puisqu'il touche toutes les classes sociales et toutes les générations, traitant de tous les thèmes
imaginables : la vie à l'école, celle du salarié, le sport y compris cérébral tel le jeu de go, l'amour, la guerre, l'épouvante, jusqu'à
des séries plus didactiques comme la littérature classique, l'économie et la finance, l'histoire, la cuisine et même le code de la
route, dévoilant ainsi ses vertus pédagogiques.
Caractéristiques du manga
Les mangas comptent souvent un nombre important de pages (planches). À titre d'exemple, une bande dessinée européenne
contiendra une quarantaine de planches quand le manga en comptera plus d'une centaine, voire plus de deux cents. Par ailleurs,
le manga est le plus souvent une série en plusieurs volumes. Finalement, le nombre total de planches racontant une histoire
dans un manga est beaucoup plus élevé que dans une bande dessinée européenne (même s'il s'agit d'une série). Ceci affecte
par conséquent beaucoup la structure du récit et sa narration. D'où les techniques propres au manga.
Le dessin, en général, est moins « statique » que dans les bandes dessinées occidentales. Le manga utilise un découpage
temporel proche de celui du cinéma, adoptant souvent ses cadrages et utilisant une décomposition similaire du temps et de
l'action. On retrouve souvent une mise en scène comme la plongée ou la contre-plongée. La perspective varie systématiquement
d'une image à l'autre.
De nombreux codes graphiques sont utilisés pour symboliser l'état émotionnel ou physique d'un protagoniste. Les personnages
ont souvent de grands yeux, ce qui permet de renforcer l'expressivité du visage. L'étonnement est souvent traduit par la chute du
personnage ; l'évanouissement, par une croix remplaçant les yeux. Pour traduire l’excitation sexuelle chez un personnage
masculin, un saignement de nez plus ou moins important est provoqué. Dans le manga City Hunter (connu à la télévision
française sous le nom Nicky Larson), la colère de Kaori (Laura) est souvent traduite par l'apparition inopinée d'une énorme
massue qu'elle assène sur la tête de son partenaire (ce gag est si répandu dans les mangas qu'un univers parallèle où seraient
stockés les marteaux a été inventé).
Il y a également une utilisation fréquente d'onomatopées relatives aux mouvements, actions ou pensées des personnages.
Notons au passage que le japonais est beaucoup plus riche que le français en onomatopées et que leur champ d'application est
plus large, incluant des concepts surprenants tels que l'onomatopée du sourire (niko niko ( ニコニコ)), du silence (shiīn (シイー
ン)) ou encore du scintillement (pika pika (ピカピカ), d'où le nom de Pikachu).
Une particularité à noter est que la plupart des personnages ont souvent des traits occidentaux, au-delà du simple tracé des
grands yeux des personnages. Un samouraï roux, un exorciste aux yeux bleus ou une écolière blonde n'ont rien d'étonnant pour le
lecteur japonais, même s'ils sont censés être japonais ou de culture japonaise. La simple nécessité de distinguer physiquement
deux personnages ne suffit pas toujours à expliquer cet aspect de la narration, puisque certains mangakas choisissent de donner
à tous leurs personnages un aspect purement japonais, sans que cela pose de problème de compréhension de l'histoire.
Certains y voient une façon d'afficher un attrait pour l'Occident, qui apparaît largement ailleurs dans la vie quotidienne au Japon.
[réf. nécessaire]
Les décors des scènes sont parfois moins fouillés que pour une bande dessinée occidentale. Cela peut aller jusqu'à faire évoluer
les personnages dans un décor blanc. Ce parti pris a pour conséquence de focaliser l'attention du lecteur sur l'histoire en général
et sur les dialogues en particulier. On note ainsi une certaine résurgence de l'aspect théâtral. Enfin, les personnages ont souvent
des attitudes expressives à outrance : la colère, la jalousie ou la gêne se montrent facilement, alors que cette attitude est plutôt
mal vue dans la culture japonaise, où le calme et la retenue sont de rigueur dans les rapports sociaux. Le passage de l'absurde et
du comique au sérieux ou au drame, sans aucune transition, fait également partie de la narration, sans jamais susciter
d'interrogation de la part du lecteur qui accepte par avance cette convention de lecture.
Une autre particularité est le jeu de l'auteur avec le lecteur. Ainsi, dans Rough, on peut voir les personnages faire de la publicité
pour d'autres mangas de l'auteur, ou bien ramasser des phylactères tombés sur le sol. De manière générale, on peut noter une
plus grande liberté quant à l'interaction entre les dessins et leur support (jeu avec les cadres, personnages sortant des
cadres, etc.). Dans les mangas destinés à la jeunesse, les kanji, caractères chinois ou sinogrammes, sont souvent accompagnés
de furigana pour faciliter la lecture.
1: 2: 3 : aplat
esquisse lineart. de
crayon. couleur.
Système de prépublication
Les mangas japonais sont très rarement édités directement sous forme de volumes reliés ; ils paraissent tout d'abord de
manière découpée dans des magazines de prépublication, des revues spécialisées qui leur sont consacrées[31].
Les rythmes de publication de ces magazines peuvent beaucoup varier, allant de l'hebdomadaire aux publications mensuelles
voire trimestrielles[31]. Les séries y sont souvent publiées par chapitres d'une dizaine à une vingtaine de pages[31]. À l'intérieur
d'un même magazine, le papier peut parfois changer de couleur, afin de distinguer rapidement les différentes séries les unes des
autres.
Ces magazines, bon marché, s'écoulent en grand nombre, c'est-à-dire en millions d'exemplaires pour certains, et se lisent un peu
partout. On en retrouve parfois abandonnés dans les trains, les rames de métro, les cafés, etc. Ils alimentent un système de
lectures multiples : un même exemplaire serait lu par plusieurs personnes.
Principalement en noir et blanc[32], les premières pages des magazines sont souvent en couleurs, mettant tour à tour à l'honneur
l'une de leurs séries vedettes à cet emplacement, souvent de manière que le chapitre en cours soit un début de volume.
Ce n'est que dans un deuxième temps, lorsqu'un manga rencontre un certain succès, qu'il est édité en volumes reliés, similaire à
ceux que l'on trouve en France, entamant ainsi une deuxième carrière. Ces volumes reliés sont appelés tankōbon (format poche),
bunkōbon (format plus compact, utilisé pour des rééditions) ou wide-ban (format « luxe », plus grand que le format poche). En
l'absence de succès auprès du public, une série pourra voir sa parution arrêtée, le mangaka étant prévenu peu avant pour trouver
une fin rapide à son histoire et permettre une éventuelle parution en volumes. Certaines revues décident désormais de la fin
d'une série dès la fin du second volume, conduisant à des histoires finales en quatre volumes. Dans certains cas, un manga à
succès peut se voir adapté en anime (dessin animé).
Sens de lecture
Les mangas se lisent originellement de droite à gauche (ce qui correspond au sens de lecture japonais), en commençant par la
dernière page. Cela amène une certaine confusion puisque la lecture des mots se fait alors dans le sens inverse de celui des
cases (ce qui n'est pas le cas au Japon). Introduits en France en 1978 avec la revue Le cri qui tue, les mangas ne sont publiés
dans ce sens que depuis 1995 environ. Toutefois, les éditeurs français ne se plient pas systématiquement à cette spécificité.
Certains choisissent alors de simplement retourner les images, ce qui occasionne des incohérences pouvant sembler douteuses
(un droitier qui devient gaucher, un coup porté au cœur qui perd son sens). D'autres adaptent entièrement les ouvrages en
retournant seulement certaines images, en changeant la mise en page et en redessinant certains éléments graphiques, ce qui a
pour mérite de faire correspondre la forme des phylactères avec l'horizontalité des systèmes d'écriture occidentaux (Casterman
notamment, dans sa collection Écritures), mais génère toutefois un surcoût significatif.
La plupart des éditeurs français ont actuellement adopté le sens de lecture japonais, dans un but d'économie et de respect de
l'œuvre. Cela les expose à se couper d'un lectorat plus large (notamment âgé) que les habitués du genre. Depuis son
« invention » par Rodolphe Töpffer en 1827, la bande dessinée occidentale a été codifiée pour une lecture exécutée de gauche à
droite et le lecteur risque donc de lire la fin d'une action ou d'un gag avant le début. Cependant, la vague de démocratisation qu'a
connu le manga en France auprès des jeunes a fait qu'ils sont désormais plus habitués à un autre sens de lecture.
Le sens de lecture japonais est également devenu le standard de lecture des mangas aux États-Unis depuis le début des années
2000.
Wikipe-tan, un
exemple de
dessin
d'inspiration
manga.
Par démographie
Les mangas sont traditionnellement classifiés en fonction de l'âge et du sexe du lectorat visé. Il existe six classes
démographiques :
Ces démographies sont généralement réutilisées telles quelles par les éditeurs occidentaux afin de créer leurs collections,
toutefois les stéréotypes de genre et le rapport à la violence et au sexe n'étant pas les mêmes au Japon et en Occident, il arrive
que les éditeurs occidentaux changent la démographie-cible d'un manga[34], typiquement les shōnen romantiques sont reclassés
en shōjo. Quelques rares éditeurs occidentaux préfèrent quant à eux totalement ignorer la classification japonaise à l'instar
d'Akata[35].
Par genre
Les mangas reprennent les genres et registres littéraires usuels, du roman d'amour à l'horreur en passant par la science-fiction,
et n'hésitent pas à les mélanger. En plus de cela il existe quelques genres typiques des mangas et de ses dérivés, ou dont le nom
japonais a pris le pas sur le nom français auprès des éditeurs et des fans :
Diffusion
Au Japon
La grande popularité des mangas rivalise avec les grands noms de la bande dessinée européenne ; ainsi, les 42 tomes de Dragon
Ball se sont vendus à plus de 230 millions d'exemplaires dans le monde[42],[43] et les 95 tomes de One Piece se sont vendus à
plus de 430 millions d'exemplaires dans le monde[44], un chiffre qui surpasse celui enregistré par Les Aventures de Tintin avec 24
albums édités à plus de 200 millions d'exemplaires. Rien qu'au Japon, le tirage de One Piece dépasse les 360 millions
d'exemplaires à la sortie du tome 86 le 4 août 2017[44].
Les mangas sont vendus moins chers au Japon qu'en Europe, leur prix avoisinant les 500 yens (5,23 euros en juillet 2012), alors
qu'en France, le prix d'un manga se situe généralement entre 6 et 15 euros selon le format et les éditions. Les mangas publiés
dans les magazines de prépublication sont considérés au Japon comme des objets de grande consommation plutôt que comme
des objets de valeur. Cependant, des éditions reliées et brochées à l'image de celles paraissant en Occident, sont destinées à
être collectionnées et conservées.
Depuis son ouverture en novembre 2006, le musée international du manga de Kyoto offre une impressionnante collection de
mangas (plus de 300 000 volumes en 2012, sachant que la collection est amenée à évoluer).
En Asie
En France
La bande dessinée japonaise est très peu présente dans le monde francophone avant 1978 : quelques planches de Bushidou
Muzanden d'Hiroshi Hirata dans Budo Magazine Europe, publication consacrée au judo, en 1969, plusieurs mangas sur les
samouraïs traduits et publiés au début des années 1970 dans la nouvelle formule de Budo magazine Europe et l'article « La
Bande dessinée japonaise » de Claude Moliterni et Kosei Ono qui lui est consacré en 1972 dans Phénix[48]. En 1978, Atoss
Takemoto publie le premier numéro du Cri qui tue, fanzine d'assez mauvaise qualité (impression, choix des bandes). On y
retrouve dans les six numéros qui paraissent jusqu'en 1981 Golgo 13 de Takao Saito, Le Système des Super Oiseaux d'Osamu
Tezuka, Good bye de Yoshihiro Tatsumi et des histoires de Shōtarō Ishinomori, Fujiko Fujio, Masashi Ueda. Toutes les planches
sont adaptées au sens de lecture européen.
En 1979, Kesselring, associé à Takemoto, publie le premier album : Le vent du nord est comme le hennissement d'un cheval noir
de Shōtarō Ishinomori. Le format choisi, supérieur à la norme européenne, met peu en valeur les particularités du format
japonais, le lettrage est bâclé : comme le premier périodique, le premier album est un échec. En 1982, les éditions Télé-Guide,
désireuses de profiter du succès de la série animée Candy, publient avec succès la bande dessinée originelle de Yumiko Igarashi
et Kyoko Mizuki dans les douze numéros de Candy Poche. C'est pourtant dans les années 1980 le seul manga adapté en dessin
animé à faire l'objet d'une traduction, les autres adaptations étant le fait de studios français, afin d'éviter de payer des droits
d'auteurs.
En 1983, le premier volume de Gen d'Hiroshima de Keiji Nakazawa est publié par Les Humanoïdes associés dans la collection
« Autodafé », dans une édition correcte, mais qui ne rencontre aucun succès. De même, l’Hiroshima de Yoshihiro Tatsumi édité
par Artefact en 1983 ne trouve pas son public. Les éditeurs sont alors refroidis par l'expérience et, dans un contexte de
récession, plus aucune bande dessinée japonaise n'est éditée en album jusqu'à Akira, hormis en 1989 chez Albin Michel le
premier tome des Secrets de l'économie japonaise en bandes dessinées d'Ishinomori.
Les premiers mangas pornographiques sont traduits, avec la publication chez Idéogram dans les onze numéros de la revue
Mutant, de janvier 1985 à janvier 1986, d'Androïde, de Sesaku Kanō et Kazuo Koike et celle dans Rebels no 3 (juin 85) à 9 (janvier
86) de Scorpia de M. Yuu et K. Kazuya.
L'absence de traduction de ce que les spécialistes savent être le premier marché de la bande dessinée suscite cependant les
interrogations de Thierry Groensteen en 1985[49] et la publication de divers articles dans Les Cahiers de la bande dessinée.
En septembre 1990, s'inspirant des exemples étrangers (par exemple Protoculture Addicts au Canada en 1987 et Yamato en Italie
en mars 1990), naît Mangazone, le premier fanzine d'information sur la bande dessinée japonaise en France. Il est tiré à
700 exemplaires et connaît huit numéros avant sa disparition en 1994, ses éditeurs préférant se consacrer à leur autre
production Scarce[51]. En mars 1991 naît AnimeLand, fanzine luxueux qui remplace Mangazone comme référence
francophone[52].
Alors que de plus en plus de voix s'élèvent pour protester contre les animes, toujours plus présents dans les programmes
jeunesse, Glénat, une fois Akira achevé, publie d'autres mangas originaux d'animes à succès : Dragon Ball d'Akira Toriyama en
février 1993, Ranma ½ de Rumiko Takahashi en février 1994. La réussite de l'entreprise permet à Glénat de traduire d'autres
mangas, liés ou non à un anime : Appleseed de Masamune Shirow à partir de juin 1994, puis Orion du même auteur en
septembre, Crying Freeman de Ryōichi Ikegami en janvier 1995, Dr Slump de Toriyama et Sailor Moon de Naoko Takeuchi en
février, Gunnm de Yukito Kishiro en mars.
En 1994, les éditions Tonkam, l'une des plus vielles boutiques d'importation de manga japonais, se lancent dans l'édition et
deviennent rapidement le premier grand éditeur français spécialisé dans le manga. Ils publient notamment les séries du groupe
CLAMP (RG Veda en juin 1995) et sont les premiers à publier les mangas dans le sens de lecture japonais, à la fois pour des
raisons de coût et d'intégrité de l'œuvre[53], disposition qui devient assez rapidement la norme, sauf dans quelques cas
particuliers (comme la collection «Écritures» de Casterman).
D'autres éditeurs traditionnels commencent à s'intéresser au manga. Casterman publie d'abord dans sa collection « Manga »
créée en janvier 1995 deux bandes dessinées créées au Japon par des auteurs français (Kiro d'Alex Varenne puis en septembre
Au Nom de la famille de Jerome Charyn et Joe Staton) avant de publier en septembre Gon de Masashi Tanaka, L'Habitant de
l'infini d'Hiroaki Samura et L'Homme qui marche de Jirō Taniguchi. « Casterman manga » accueille de nouveaux titres de qualité
jusqu'en 1999, avant d'être remplacée par des collections plus spécialisées par la suite. Dark Horse France publie Outlanders (en)
de Johji Manabe (en) de janvier 1995 à janvier 1996. J'ai lu lance également sa collection manga en 1996, avec City Hunter et Fly.
Dargaud se lance également en créant la collection Kana avec Angel Dick puis Armagedon du Coréen Lee Hyun-se[54].
Des éditeurs spécialisés naissent également (en plus de Tonkam déjà cité) : Samouraï Éditions, qui publie des mangas érotiques
à partir de 1994 (Ogenki Clinic d'Inui Haruka) puis des mangas plus traditionnels l'année suivante (Vampire Miyu de Narumi
Kakinouchi et Toshiki Hirano), l'éphémère Star Comics en janvier 1995 avec Takeru de Buichi Terasawa, Kraken en avril (avant de
disparaître l'année suivante) avec l'ambitieux Shang Hai Kaijinzoku de Takuhito Kusanagi puis Les Élémentalistes de Takeshi
Okazaki ou encore Vaelber Saga de Nobuteru Yūki.
1995-1996 : la crise
Début des années 1990, il y a une vague « anti-manga », surtout anti-anime, alimentée par parents outragés par des scènes trop
violentes. Il y a de multiples censures face à l'insistance des groupes de parents, dues à des choix maladroits de
programmation ; par exemple Ken le Survivant était programmé en même temps que Mon Petit Poney, le mercredi après-midi. Les
dessins animés japonais sont accusés de tous les maux, d'avoir une influence néfaste. Certaines personnalités s'engagent
contre cette culture japonaise, dont Ségolène Royal, auteur du livre Le ras-le-bol des bébés zappeurs[55]. Cette dernière s'attaque
aux séries d'animations japonaises, qu'elle qualifie de « mauvaises, médiocres et laides ». Dorothée est, quant à elle, très
vivement critiquée : « Faut-il brûler Dorothée ? » titrait à la une le supplément télé du magazine VSD, TVSD en 1993[56]. Certains
mangas durent revêtir une couverture plastique avec la mention « vente interdite aux mineurs ». Pour Dorothée, c'est aussi la fin
du Club Dorothée, qui avait introduit l'anime en France sous le nom de Récré A2 (Antenne 2) avec Goldorak. C'est aussi la fin de la
publication japonaise d'un titre phare : Dragon Ball. Le marché du fanzine s’essouffle. Mais cette année sera un tournant
éditorialiste, où les enfants ne seront plus la cible privilégiée des éditeurs.
Le marché continue à croître à un rythme soutenu : 151 albums en 1998, 200 en 1999[57], 227 en 2000, 269 en 2001[58]. À partir
de 1999, Kana s'affirme comme le quatrième grand acteur du secteur. Cependant, alors qu'à cette date les principales séries
japonaises à succès des années 1980 et 1990 sont traduites, et qu'elles atteignent parfois d'enviables chiffres de vente (au
début du millénaire 120 000 exemplaires par volume de Dragon Ball[57], environ 20 000 pour les séries les plus populaires[58]), que
les magazines dédiés vont commencer à se multiplier, que les rencontres d'amateurs ont de plus en plus de succès, qu'Internet
va favoriser le développement des mangas, le monde de la bande dessinée tel que le laisse percevoir le Festival d'Angoulême
laisse peu de place à cette émergence, et les éditeurs alternatifs lui restent globalement indifférents, laissant inconnu du public
le large patrimoine de bandes dessinées d'auteur japonaises, hormis Taniguchi. Des séries plus récentes sont alors traduites, et
remportent également un grand succès : en 2000 Hunter × Hunter de Yoshihiro Togashi, Shaman King de Hiroyuki Takei, One
Piece d'Eiichirō Oda, en 2001 Great Teacher Onizuka de Tōru Fujisawa, I¨s de Masakazu Katsura, Samurai deeper Kyo d'Akimine
Kamijyō, Angel Sanctuary de Kaori Yuki, Monster de Naoki Urasawa, en 2002 Love Hina de Ken Akamatsu, Gunnm Last Order de
Kishiro, Fruits Basket de Natsuki Takaya, Naruto de Masashi Kishimoto, Bleach de Tite Kubo.
Le premier festival de bande dessinée et d'animation japonaises, la Japan Expo, est créé en 1999. Il se tient au centre des
nouvelles industries et technologies (CNIT) en 2003 et 2004, puis au parc des expositions de Paris-Nord Villepinte, où il attire en
2012 plus de 200 000 personnes.
En 2005, la forte part des mangas édités dans le marché de la bande dessinée francophone a fait écrire à Gilles Ratier que 2005
avait été en France « l'année de la mangalisation »[60], sans qu'il s'en offusque, contrairement à d'autres acteurs du secteur [Qui ?].
1 142 bandes dessinées asiatiques (soit 42 % des nouveautés) sont en effet éditées en 2005 dont 937 mangas[60], et 1 418 en
2006 (soit 44 % des nouveautés), dont 1 110 mangas[62]. Les tirages à la nouveauté des bandes dessinées japonaises les plus
populaires n'ont plus rien à envier à ceux des bandes dessinées traditionnelles populaires : 130 000 exemplaires pour Naruto,
80 000 pour Samurai deeper Kyo ou Fullmetal Alchemist (de Hiromu Arakawa, traduit à partir de 2005), 70 000 pour Gunnm Last
Order, Hunter × Hunter, Yu-Gi-Oh!, Fruits Basket et Shaman King, 65 000 pour Neko Majin de Toriyama, 60 000 pour Air Gear
(d'Ōgure Ito, traduit à partir de 2006) et One Piece d'Eiichirō Oda[62]. Début 2006, la France est, avec plus de 13 millions
d'exemplaires annuels, le plus gros « consommateur » de mangas au monde après le Japon et devant les États-Unis[63]. Les
mangas représentent 26 % du chiffre d'affaires de la bande dessinée et constituent la plus forte progression derrière la fiction
jeunesse, se plaçant en deuxième position des secteurs de l'édition les plus dynamiques. De plus, sur le marché français,
seulement dix séries mangas concentrent 50 % des ventes[64].
Parallèlement à ce succès populaire, les maisons d'éditions commencent à développer l'édition patrimoniale[65] : Vertige Graphic
réédite Gen d'Hiroshima et publie Yoshihiro Tatsumi, un des pères du gekiga à partir de 2003, Ego comme X traduit L'Homme sans
talent de Yoshiharu Tsuge en 2004, Cornélius publie Shigeru Mizuki depuis 2006, avec succès puisque NonNonBâ obtient le Prix
du meilleur album à Angoulême en 2007, respectabilité qui avalise la forte pénétration de la bande dessinée japonaise sur le
marché français. La bande dessinée d'auteur pour adultes, représentée d'abord par Jirō Taniguchi et Naoki Urasawa, se
développe à partir de 2002, tandis que les jeunes auteurs les plus novateurs le sont, hormis Taiyō Matsumoto publié dès 1996, à
partir de 2005[66]. L'intérêt pour le manga pousse des éditeurs à s'intéresser également aux bandes dessinées coréenne et
chinoise.
Glénat 23,6 %
Pika 19,4 %
Kana 16,5 %
Ki-oon 8,5 %
Kurokawa 8%
Panini 2,7 %
Doki-Doki 1,1 %
Komikku 0,5 %
Akata 0,4 %
En 2010, Kana et Glénat sont toujours leaders dans le domaine du manga, fort du succès de Naruto et One Piece qui sont les
bandes dessinées les plus vendues de l'année toutes catégories confondues, mais ils perdent du terrain à l'avantage de maisons
d'édition comme Pika Édition, Ki-oon ou Kazé, qui se fait une grande place dans le marché depuis son rachat en 2009 par
Shōgakukan et Shūeisha[68]. Certains éditeurs comme Tonkam, Panini ou encore Delcourt enregistrent des baisses très
importantes, tandis que la petite maison d'édition Doki-Doki enregistre la plus grande progression de l'année[68]. Pluto, Bakuman.
et Monster Hunter Orage (par Hiro Mashima) sont les trois nouvelles licences les plus populaires en 2010[69].
En 2011, le trio de tête reste identique, mais Glénat passe largement en tête devant Kana, du fait de la montée des ventes de One
Piece et du rythme de parution plus lent (3 tomes par an) de Naruto[70]. Glénat affiche donc une forte hausse (+13,3 %), alors que
ses deux concurrents directs Kana et Pika Édition affichent des baisses (-17 % pour Kana et -2,9 % pour Pika)[70]. Kurokawa, Kazé
et Ki-oon continuent leurs progressions et représentent à eux trois environ 20 % des ventes de manga en France, avec
notamment la fin de Fullmetal Alchemist ou le novateur Les Vacances de Jésus & Bouddha pour Kurokawa, l'arrivée de titres
comme Blue Exorcist, Beelzebub ou Toriko pour Kazé et de Judge, Pandora Hearts ou Bride Stories chez Ki-oon, mais également
avec l'arrivée d'un catalogue pour les enfants plus important, avec notamment Pokémon Noir et Blanc ou Beyblade: Metal
Fusion[70],[71]. Depuis le rachat de Tonkam et Soleil Manga par Delcourt, le groupe représente environ 10 % des ventes de manga
en 2011, mais les trois maisons d'édition continuent leur chute[70]. Seuls les petits éditeurs Taifu Comics et Doki-Doki sont à la
hausse[70].
Pour autant, le secteur du manga a vu sa croissance s'arrêter et ses ventes diminuer au début des années 2010. De fait, après
avoir plus que quadruplé entre 2001 et 2008, les ventes des mangas en France ont marqué un recul de 15 % en volume entre
2008 et 2011[72]. Après deux années propices à la stagnation, 2012 marquait cependant une hausse remarquable du nombre de
séries asiatiques sur le sol français. Mais la tendance des sorties s'est inversée en 2013, avec 1 575 titres parus (contre 1 621 en
2012 et 1 520 en 2011). Cependant, dans un marché général de la bande dessinée qui, pour la première fois depuis au moins
17 ans, est en baisse (-7,3 % de sorties), les sorties asiatiques se maintiennent et représentent une part des nouveautés
légèrement plus importante (40,7 % du marché, contre 39,4 % l'année précédente). Cette légère baisse s'accompagne en
revanche de ventes qui continuent de chuter de manière importante. En effet, alors que le marché général de la bande dessinée a
bénéficié d'une hausse de 1,4 % en valeur sur la fin de l'année 2013 (porté par les best-sellers évènementiels que furent les
derniers albums d'Astérix, de Blake et Mortimer ou du Chat), le secteur du manga accuse une nouvelle chute de -8,5 % de son
chiffre d'affaires, et ce alors qu'il avait déjà connu un recul de -3,8 % l'année précédente[73].
Comme pour les années précédentes, le marché du manga reste marqué par une très forte concentration, tant au niveau des
séries à succès (une dizaine de titres représente à elle seule la moitié des tirages de l'ensemble du marché) que des éditeurs.
Ainsi, les dix premières séries les plus vendues en 2013 (qui sont, dans l'ordre décroissant d'importance, Naruto, One Piece, Fairy
Tail, Black Butler, Bleach, King's Game, L'Attaque des Titans, Judge, Prophecy et Soul Eater) sont portées par seulement cinq
éditeurs que l'on identifiera sans surprise comme faisant partie des premiers groupes éditoriaux du secteur : Glénat, Pika Édition,
Kana, Ki-oon et Kurokawa[73]. Bien mieux, en 2013, les trois plus importants leaders éditoriaux du marché que sont Glénat, Pika
Édition et Kana ont cumulé à eux seuls près de 60 % des ventes[74].
Pour une grande partie des séries à succès des années 2000, les rythmes de parution en France rattrapent de plus en plus ceux
du Japon et se font donc plus lents tandis que les nouveaux lecteurs se font de plus en plus rares, eu égard au grand nombre de
tomes existants à rattraper (Fairy Tail et Bleach en comptent respectivement plus de 40 et 60 tandis que Naruto et One Piece ont
déjà atteint les 70 tomes). Or, au Japon, certaines grandes séries emblématiques des années 2000, arrivées à maturité,
commencent à perdre plus de lecteurs qu'elles n'en gagnent. Ainsi, au sein du classement des quinze premières séries au Japon,
Naruto est tombé à la cinquième place du fait son rythme de publication moins rapide, et surtout parce que la série n'attire plus
autant de nouveaux lecteurs, voire lasse certains anciens lecteurs, au point de connaître une chute de ses ventes d'environ 15 %.
Il en va de même pour Hunter × Hunter (8e du fait de son rythme de publication irrégulier), Fairy Tail (9e), Sawako (11e), Gintama
(12e), Toriko (13e) ou encore Bleach (15e), qui baissent tous au profit de la nouvelle vague de titres emmenée par L'Attaque des
Titans, Kuroko's Basket, Magi, Silver Spoon, disposant tous d'adaptations animées de qualité et mieux étudiées pour soutenir leurs
ventes. De même, si Fairy Tail a toujours du succès en France, on constate que le premier volume n'est que 63e au sein du
classement par volume, et que la série a vu ses ventes baisser de 8 %, après avoir déjà connu une baisse de 12 % l'année
précédente[75].
En 2014, les ventes de mangas continuent de diminuer et sont inférieures à 12 millions d'exemplaires, chiffre le plus bas depuis
2004[46].
Les ventes de mangas retrouvent une forte croissance à partir de 2015 et finissent par dépasser le précédent record de 2008
avec plus de 16 millions d'exemplaires vendus en 2018 ; plus d'une bande dessinée sur trois vendues est alors un manga[79]. La
croissance continue dans les années suivantes, avec plus de 22 millions d'exemplaires vendus en 2020[46]. Une hausse de 107 %
est observée en 2021 avec plus de 47 millions de mangas vendus, soit plus d'une bande dessinée sur deux[80]. La mise en place
du Pass Culture a notamment eu « un effet démultiplicateur sur les ventes de mangas » selon Fabien Hyzard, responsable
marketing et commercial chez Ki-oon[81]. L'effet du Pass Culture dans la hausse des ventes est cependant contesté par plusieurs
spécialistes, comme Xavier Guilbert, qui analyse que : « On l'a surnommé le 'Pass Manga' mais son effet a été exagéré. L'an
passé, 47 millions de mangas ont été écoulés contre 22,5 millions en 2020 et le Pass Culture n'explique que 6 % de ces 24,5
millions de ventes en plus ». À l'inverse, les conséquences des confinements de 2020 puis 2021, avec la fermeture de plusieurs
secteurs d'activités culturelles (théâtre, cinéma, voyages…), peuvent expliquer que les budgets des ménages ont pu se reporter
en grande partie sur les librairies[82].
En 2022, les chiffres de ventes sont toujours à la hausse de 2 % avec plus de 48 millions d'exemplaires vendus, dont 36,5
millions de shōnen (soit une augmentation de 4 %) et 2 millions de shōjo (soit une augmentation de 15 %)[83].
En Europe
En Amérique
Influence du manga
Produits dérivés
De nombreux mangas ont aussi été adaptés en drama (série télévisée), dont certains sont très populaires comme Hana yori
dango.
Associés aux mangas, on trouve les artbooks, recueils d'illustrations en couleur et d'images originales, incluant parfois des
histoires courtes. De même, du fait de la popularité grandissante des mangas, les produits dérivés sont de plus en plus
nombreux : figurines, cahiers, calendriers, porte-clés, peluches, habits, costumes, accessoires, etc. La naissance de ces produits
dérivés est généralement associée aux séries Nonki na tōsan (1924) et Norakuro (1931).
On trouve également des jeux de rôle développant un riche univers post-apocalyptique ou de fantasy tels que Mekton Z, Anima,
Final Fantasy et Manga BoyZ.
En France, de nombreux festivals appelés conventions ont fait leur apparition ces dernières années. Ces conventions sont des
points de rassemblement pour les fans de mangas ou de culture japonaise moderne en général, proposant des projections, des
jeux, des spectacles de cosplay et étant souvent complétées par un espace où se côtoient professionnels (magasins de livres et
autres produits) et amateurs (clubs et associations exposant leurs propres œuvres). On compte parmi les conventions les plus
connues : Cartoonist, Epitanime, Japan Expo, G.A.M.E. in Paris (France), Tokyo Zone (France), Toulouse Game Show ou TGS
(France) Polymanga (Suisse), etc.
Notes et références
C) [archive]].
30. (en + ja) Sales and Issue of Books and Magazines (http://
www.stat.go.jp/data/getujidb/zuhyou/s01.xl
s) [archive], Bureau des statistiques du Ministère
japonais des Affaires intérieures et des
Communications
31. Karyn Poupée, « Mangaka et auteurs de BD ont beau
dessiner, ils ne font pas le même métier (http://www.
google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5jccd5N
Utkx9We9nWX-WvZLcDe5Pg) [archive] », AFP sur
Google News, le 21 novembre 2012.
32. « Pourquoi les mangas sont-ils « noir et blanc » ? » (ht
tp://www.manga-designer.com/?p=524) [archive] sur
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2015).
33. Nihon Zasshi Kōykai (http://www.j-magazine.or.jp/ma
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cat3cd=14&period_cd=3) [archive].
34. (en) Robin E. Brenner, Understanding Manga and
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(ISBN 978-1-59158-332-5 et 1-59158-332-2).
43. アニメ『ドラゴンボールZ』17年ぶり映画で復
(ja) «
活 Z~GT間の“空白の10年”紡ぐ (http://www.orico
n.co.jp/news/movie/2014350/full/?from_todaysnew
s) [archive] », sur Oricon Style,2012 (consulté le
21 septembre 2015).
Voir aussi
Revues
En français:
Bibliographie
Avant l'an 2000 :
Articles connexes
Notices d'autorité :
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Tchéquie (http://aut.nkp.cz/ph527859)
Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies
généralistes : Britannica (https://www.britannica.co
m/art/manga-Japanese-comics) [archive] · Den Store
Danske Encyklopædi (https://denstoredanske.lex.dk//m
anga/) [archive] · Enciclopedia De Agostini (http://www.
sapere.it/enciclopedia/manga.html) [archive] ·
Larousse (https://www.larousse.fr/encyclopedie/diver
s/manga/67941) [archive] · Nationalencyklopedin (http
s://www.ne.se/uppslagsverk/encyklopedi/l%C3%A5n
g/manga) [archive] · Store norske leksikon (https://snl.n
o/manga) [archive] · Treccani (http://www.treccani.it/en
ciclopedia/manga) [archive] · Universalis (https://www.
universalis.fr/encyclopedie/mangas/) [archive]
Ressource relative à la littérature : The Encyclopedia
of Science Fiction (https://www.sf-encyclopedia.com/
entry/manga)