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Séance 3: Exécution des politiques

publiques ou mise en œuvre

• Passage de l’écrit ou du non écrit à la pratique (« implémentation ») ;


• Le rôle des acteurs : organismes gestionnaires et autres intermédiaires
et sous-traitants ;
• Mobilisation des ressources ;
• Suivi et reporting ;
• Coordination institutionnelle
• Les obstacles à la mise en œuvre
• Spécificité dans le contexte africain
Plan de la discussion

1. Notions, acteurs, évolution théorique

2. Approches théoriques de la mise en œuvre

3. Déterminants et enjeux de la Mise en œuvre

4. Échanges autour de la problématique des  policies fiascos au


Cameroun
DEFINITIONS ET NOTIONSDE BASE
• La mise en œuvre (MEO) d’une politique désigne le processus d’application
des décisions.
• « Processus d'interaction entre la fixation d'objectifs et les actions
effectuées pour les réaliser. » (Pressman et Wildavsky, 1973)
• La MEO est la conversion d’un programme ou de nouvelles lois en
pratiques.
• « Phase des PP à partir de laquelle des actes et des effets sont générés à
partir d’un cadre normatif d’intentions, de textes, de discours. » (Yves Surel,
2001)
• « Succession de séquences d’actions sociales survenant après qu’une
politique aura été légalement définie. » (J.-. Padioleau)
• Couplage entre le courant des solutions et le courant des problèmes.
MEO et formulation
• La formulation ou l’élaboration des politiques affecte toujours la mise
en œuvre de celle-ci en :
• Définissant, ne serait ce que de façon sommaire, le type d’environnement
dans lequel devra se dérouler le processus ;
• Identifiant les gestionnaires responsables ;
• Spécifiant leurs rôles et responsabilités ;
• Précisant la marge de manœuvre dont ils pourront disposer et enfin en 
• Décidant de l’allocation d’un montant de ressources.
MEO et formulation
Toutefois, il est également vrai qu’en procédant à l’implantation et à
la gestion d’une politique ou d’un programme :
Les responsables procèdent à une certaine reformulation ;
Ils contribuent donc à changer le design original. 
L’analyste de l’implantation et de la gestion des politiques et
programmes doit considérer et expliquer précisément les
changements ainsi apportés en cours d’exécution.
Modalités et styles de MEO

• Flexibilité et adaptation

• Ritualisme et formalisme

• Négociation et compromis

• Délégation
Acteurs de la MEO

• Espaces d’action et ressources d’action: distinction centre/périphérie

• Les street-level bureaucrats comme acteurs centraux de la MEO


Historique de l’analyse de la MEO
• L’analyse de la mise en œuvre peut être décrite à partir de la prise en compte de trois périodes dans son
développement :

• Jusqu’aux années 70 : la démarche juridique prédomine, on s’intéresse à l’analyse de l’administration dans sa
fonction exécutive (administration publique) et au fonctionnement interne des organisations politiques
comme facteur de différenciation dans la mise en œuvre (perspective de sociologie des organisations).

• Durant les années 70, l’analyse de la mise en œuvre a connu une phase d’approfondissement et de
spécialisation

• Depuis la seconde moitié des années 80, l’analyse de la mise en œuvre fait partie intégrante de l’analyse des
politiques publiques et on y retrouve les mêmes débats théoriques qu’autour des autres moments des
politiques publiques (rôle des acteurs, dimension cognitive, poids des institutions, etc.)
Approches théoriques de la MEO
• D'après T. YOUNIS (1990), ELMORE (1982)
• L'approche de haut en bas: top-down approach.
• L'approche du bas vers le haut: bottom-up
approach.
Approche classique de la MEO ou approche
Top-down
• Traditionnellement la question de la mise en œuvre renvoyait dans une
perspective de gouvernement et d’administration à l’application des décisions.

• La notion de fonction exécutive rend compte de cette vision « juridique » des


choses

• C'est la raison pour laquelle on a privilégié dans un premier temps une approche
top down de la mise en œuvre. Selon cette logique, qui repose largement sur la
fonction administrative, le déroulement d'une politique publique suit une
séquence linéaire qui descend du centre (décisionnel) vers la périphérie
(territoires/société).
Approche classique de la MEO ou approche Top-
down
• Selon Pressman et Wild. 1973 : X : Hood, 1976 : 6-7 ; Gunn 80 : 5 ;
Mountjoy O'T. 1979 : 466-467. (in T. Younis 1990) :
• Solution analytique : centralisation au moyen de normes, de structures
formelles et de contrôles administratifs (budgétisation, planification et
évaluation initiées au central).
• Conséquences : les metteurs en œuvre sont responsables de l’exécution de
politiques et programmes pour lesquels ils n'ont en aucune façon participé à
la formulation.
L'approche top down (suite)
• le concepteur de politiques détermine centralement comment se fera
la mise en œuvre qui sera réalisée par des "metteurs en œuvre".
• Il contrôle les processus organisationnels et se donne des outils pour
ce faire.
Implications pratiques de l’approche « top-
down »
• La politique publique préexiste à l'exécution.
• Il s'agira donc de corriger les dysfonctions au moyen d'une série de
prescriptions (voir T. Younis 90). 
• RESULTAT : "Quand la mise en œuvre consiste essentiellement à
contrôler la discrétion, l'effet est de réduire la confiance dans le savoir
et l'habileté au point de service et d'augmenter la confiance en des
solutions abstraites et standardisées (Elmore 1982 : 27)".
L'APPROCHE DE BAS EN
HAUT ou « bottom-up »
 Selon "Backward mapping" de R. Elmore 1982
Hypothèse : le concepteur de politiques NE CONTRÔLE PAS les processus
organisationnels et NE PEUT SE DONNER des outils pour ce faire (cf Ed. & Shar.
1981).
Logique :
Connecter les décisions de la politique (policy décisions) directement là où leur effet se fait
sentir.
Ceux qui vont résoudre le problème, ce sont les « street-level bureaucrats »  (Lipsky, 1980)
L'habileté à résoudre un problème dans les systèmes complexes dépend de la maximisation
de la discrétion au point où le problème est le plus immédiat.
L'APPROCHE DE BAS EN
HAUT(Suite)
Solution analytique :
Dispersion du contrôle
Concentration sur des facteurs que les concepteurs de politiques ne
contrôlent qu'indirectement
Relations de marchandage entre acteurs politiques
Utilisation stratégique des fonds pour influencer les choix discrétionnaires 
Le rôle de la politique publique est ici de diriger l'attention vers les individus au
bas de la pyramide (street level bureaucrats), de leur fournir une occasion
d'appliquer leurs compétences et leur jugement.
Déterminants de la MEO: les facilitateurs
Selon Edwards et Sharkansky, 1981 : 227-251 : 
• Communication:
• Transmission
• Clarté et Cohérence dans l'action gouvernementale
• Ressources:
• Le personnel
• Nombre et formation
• Information
• Autorité du metteur en œuvre et leadership:
• Effective
• Importance élites locales
• Attitudes des responsables
• Modes opératoires (planification)
• Suivi de l'exécution
Déterminants de la MEO: les
facilitateurs
• Trois facteurs affectant la mise en œuvre des politiques publiques
• Les caractéristiques du programme (ses objectifs, sa temporalité, son mode de mise en
œuvre)
• Les réactions des groupes-cibles (reste un domaine peu étudié mais qui dépend notamment
du caractère conflictuel de la politique dans la société… ex: réformes de l'éducation)
• Le comportement des metteurs en œuvre
• L'attitude des metteurs en œuvre résulte de la conciliation de 3 objectifs :
• Un impératif légal (rapport à loi, respect ou permissivité)
• Un impératif organisationnel (prise en compte des intérêts de l'organisation, du groupe, des
valeurs ou traditions du corps)
• Un impératif consensuel (relation avec les différents intervenants, risques de conflits,
avantage à concilier les intérêts locaux)
Déterminants de la MEO: les facilitateurs
• Le type et la complexité du problème traité;
• L’ampleur du changement attendu et les groupes visés par la
politique;
• • Les ressources humaines et financières consacrées à l’implantation;
et
• • Les structures administratives et règlements que l’on mettra en
place pour soutenir l’implantation de la politique (Sabatier et
Mazmanian, 1995).
Déterminants de la MEO: les obstacles
• La résistance au changement
• L’environnement externe
• La multiplicité des intervenants induisant une multiplicité des points
de veto. Exemple du dispositif institutionnel de lutte contre la
corruption au Cameroun.
• L’absence des éléments cités de facilitation
La résistance au changement: les facteurs
Le manque d’homogénéité d’une mesure et de compatibilité avec d’autres
mesures connexes ou relevant de programmes liés peut entraîner de la confusion
et susciter une opposition.
La peur et l’incertitude face à un nouvel environnement de travail suscitent
l’opposition à une action de réforme.
Les implications négatives perçues par les individus et les groupes peuvent
déclencher une résistance au changement.
La complexité de l’action de réforme peut se traduire par une opposition si elle
n’est pas clairement expliquée par les dirigeants et les gestionnaires et comprise
par l’ensemble des parties prenantes.
La résistance au changement: les
facteurs
• Le fait que le changement soit imposé peut susciter une opposition à l’action de
réforme.
• Le changement peut être perçu différemment par les gens se situant à des
niveaux différents de l’organisation.
• La réduction de l’importance du facteur humain dans le processus de
changement.
• Le manque d’information et de communication peut accroître l’incertitude et le
manque de confiance ce qui entraîne une résistance au changement.
L’environnement extérieur
• Les facteurs sociaux: rapport de la communauté à la mesure à mettre
en œuvre (lésés, nouveau cycle)
• La conjoncture économique: crises, etc.
• Les variables techniques ou scientifiques
• La dynamique politique: changement politique, changement de
ministre, évènement politique national ou international, etc.
La multiplicité des intervenants: la
nébuleuse de la corruption au
Cameroun
• Complexité du dispositif institutionnel et normatif
Floraison des structures de lutte contre la corruption:
- CONSUPE/CDBF
- Observatoire national et cellules ministérielles de lutte contre la corruption (2001)
- CONAC
- ANIF
- Chambres des Comptes de la Cour Suprême
- PNG
- Programmes en collaboration avec bailleurs de fonds. Exemple: CHOC (changer d’habitudes,
s’opposer à la corruption)
La nébuleuse de la corruption au Cameroun
Floraison du dispositif normatif
- Constitution
- Plan gouvernemental de lutte contre la corruption
- Stratégie nationale de lutte contre la corruption
- Dispositions du Code pénal
- Convention des Nations-Unies contre la corruption
- Convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la
corruption
Enjeux de la MEO: apports de l’analyse
spécifique de la MEO
• Jeffrey Pressman & Aaron Wildavsky : Implementation: how great expectations in
Washington are dashed in Oakland: Or, Why it's amazing that Federal programs
work at all, this being a saga of the Economic Development Administration as told
by two sympathetic observers who seek to build morals on a foundation of ruined
hopes, Berkeley, University of California Press, 1973)

• Parmi les différents enseignements qu’a pu apporter cette phase


d’approfondissement de la connaissance sur la mise en œuvre, on relèvera les
points suivants :
Les apports de l’analyse spécifique de la mise en
œuvre
• La mise en œuvre ne peut pas être séparée du reste du processus de construction des politiques
publiques

• Plus le processus de mise en œuvre décidé est simple, plus les metteurs en œuvre en viendront à
bout.

• la mise en œuvre doit être vue comme une succession de micro-décisions tout aussi importantes
pour la réussite d’un programme d’action publique que la décision initiale.

• La distorsion, la perturbation et le hasard sont des composantes « normales » de la mise en


œuvre des politiques publiques.
Les apports de l’analyse spécifique de la mise en
œuvre
• L’approfondissement de la connaissance des mécanismes de mise en œuvre conduit à relativiser
une approche trop figée des politiques publiques où l’élu décide tandis que le fonctionnaire se
borne à mettre en œuvre dans le respect d’une hiérarchie territoriale et/ou institutionnelle
classique.

• la mise en œuvre est aussi essentiellement une phase de négociation entre les différents
protagonistes d’une politique publique.

• l’importance de comprendre et analyser les mécanismes d’apprentissage dans la mise en œuvre.


La mise en œuvre comme partie intégrante de l’analyse
des politiques
• On aurait pu logiquement s’attendre à ce que ce courant d’analyse se renforce et se spécialise
davantage.

• Les facteurs sur lesquels on a attiré l’attention (dimension d’apprentissage, de négociation,


d’incertitude, de poids des organisations et des institutions, etc.) ne sont pas propres à la
phase de mise en œuvre mais sont transversaux aux différentes étapes de déroulement
d’une politique publique.

• Il était donc finalement logique que les travaux conduits depuis le milieu des années 85 dans
la foulée du questionnement initial des années 70 aient abouti à réinscrire la question de la
mise en œuvre dans des perspectives d’analyse plus large
MEO et gestion du changement
• Une PP suppose une vision stratégique et une théorie du
changement. La MEO, quant à elle, suppose un plan stratégique et
une théorie de gestion du changement.
• La gestion du changement désigne la manière de faire face aux
conséquences volontaires ou non d’un programme de réforme ou de
politiques publiques.
• La gestion du changement est une variable indépendante dans le
succès de l’action publique.
Les fiascos des politiques publiques:
échanges et réflexions autour du contexte
camerounais
• Ineffectivité
• Inefficacité
• inefficience
Merci de votre aimable attention

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