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Commentaire De Texte

•Article 2 du code civil: « La loi ne dispose que pour l’avenir; elle n’a point d’effet rétroactif »

La loi du 11 Juillet 1975 a élargi les cas dans lesquels le divorce peut être demandé. Elle a instauré le
divorce par consentement mutuel. Cette loi s’applique aux époux mariés après l’entrée en vigueur des
dispositions qu’elle contient. Cependant est-elle applicable aux époux qui se sont mariés avant l’entrée en
vigueur, ou doit-on considérer que ces personnes sont encore soumises à loi qui était en vigueur le jour de
leur mariage ?

Ainsi l’article 2 du code civil pose le principe de non rétroactivité de la loi nouvelle, tout en persistant que
celle-ci ne dispose que pour l’avenir. Cet article - qui n’a absolument aucune modification depuis son
entrée en vigueur en 1804 – appartient au titre préliminaire relatif à la publication, aux effets et à
l’application des lois en général. Cette loi est divisée en deux propositions distinctes, séparées l’une de
l’autre par un point virgule. La construction de cette règle de droit nous amènera à étudier les deux
dispositions selon un plan linéaire.

Depuis un certain nombre d’années les lois se succèdent à un rythme soutenu : c’est le phénomène de
l’inflation législative. Cette inflation pose des problèmes aux citoyens et aux juges chargés de faire
respecter la loi. Puisqu’une nouvelle loi est censée abroger une loi ancienne, soit par une décision
expresse du législateur, soit par une opposition entre les dispositions contenues dans chacune des deux
lois ; il semblerait qu’elles ne pourraient jamais entrer en concurrence ce qui revient à dire qu’un conflit
entre deux lois successives semble inconcevable. Cependant, de tels conflits sont fréquents, et
l’imprécision qui frappe l’article 2 du code civil n’a pour effet que de renforcer ces conflits de lois dans
le temps.

Ce constat nous amène à nous poser la question suivante : La loi nouvelle peut-elle régir les dispositions
nouvelles sous l’empire d’une loi ancienne ? De façon logique, nous étudierons dans un premier temps
l’application immédiate de la loi nouvelle dans le temps, puis en second lieu, nous analyserons le principe
de rétroactivité contenu dans l’article 2 du code civil.

I -L’application Immédiate De La Loi Nouvelle

Nous étudierons dans une première sous partie la théorie de l’effet immédiat développé par le doyen
Roubier, puis dans une seconde partie, nous analyserons les exceptions.

A –La Théorie De L’effet Immédiat.

Là ou les anciens auteurs n’avaient vu qu’une redondance, le doyen Roubier va faire un nouvelle
interprétation de l’article 2 du code civil. Roubier pose en effet deux propositions et admet ainsi deux
dispositions distinctes l’une de l’autre. La seconde phrase, « elle n’a point d’effet rétroactif », expose le
principe classique de la non rétroactivité de loi. La nouveauté réside dans la première proposition de la loi
qui affirme que la loi régit l’avenir : « la loi ne dispose que pour l’avenir ». Roubier en tirera le principe
de l’application immédiate de la loi. Ainsi, il y a effet immédiat de la loi nouvelle lorsque celle-ci régit
dès son entrée en vigueur, les faits qui lui sont postérieurs ou lorsqu’il s’agit d’une situation juridique
dont les effets ne se réalisent pas instantanément, mais se prolongent dans le temps et, à plus forte raison,
après l’entrée en vigueur d’une loi nouvelle. En effet, dans les situations qui ne sont pas contractuelles, la
loi nouvelle s’applique immédiatement aux effets à venir.

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Par exemple, la cour de Cassation, a énoncé dans un arrêt du 29 avril 1960 si une loi nouvelle s’applique
aux effets à venir les situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur,
en revanche elle ne saurait sans avoir d’effets rétroactif, régir rétrospectivement les conditions de validité
ni les effets passé d’opérations juridiques antérieurement achevés

L’idée développée est que les personnes n’ont aucun droit acquis au maintient de la loi qui règle ses effets
et donc que le législateur peut modifier à tout moment l’ordonnancement juridique.

Cependant, le théorie de l’effet immédiat est soumise à une exception : celle de la survie de la loi
ancienne, que nous étudierons dans une seconde sous section.

B –Exception Au Principe Immédiat De La Loi Nouvelle : La Survie De La


Loi Ancienne.

Le doyen Roubier avait développé dans son principe d’application immédiate de la loi un tempérament
qui est celui de la survie de la loi ancienne. Ainsi il y a survie de la loi ancienne lorsque celle-ci continue
de régir les faits qui se situent après l’entrée en vigueur de la loi nouvelle. On applique cette exception au
principe de Roubier par les contrats en cours d’exécution. On écarte don le principe de l’effet immédiat
de la loi nouvelle au profit de la survie de la loi nouvelle. Cette situation vient de l’idée que le contrat est
l’expression de l’autonomie de la volonté des partis. En effet, par la conclusion d’un contrat, les partis ont
exprimé leur volonté et elles l’ont fait en considération de l’état du droit positif. Il est donc normal de
considérer que c’est la loi en vigueur à cette époque qui a guidé le choix de chaque partis de contracter, et
donc que c’est précisément cette loi qui doit continuer de régir les effets du contrat qui se prolonge dans
le temps.

Après avoir vu l’action de la loi nouvelle sur les évènements futurs, nous allons étudier dans une seconde
partie le principe de non rétroactivité de la loi

II –La Non Rétroactivité De La Loi

Afin d’analyser la seconde disposition de l’article 2 du code civil, nous examinerons dans une première
sous partie la théorie des droits acquis, puis nous en signalerons dans un second temps les exceptions.

A –La Théorie Des Droits Acquis

Cette théorie est celle proposée par les premiers commentateurs du code civil, et fut enseignée tout au
long du XIXème siècle. Les auteurs se sont attachés à expliquer la règle de la non rétroactivité de la loi.
Dire que la loi na point d’effet rétroactif signifie qu’elle ne doit pas être appliquée aux situations
juridiques nées avant son entrée en vigueur et dont les effets ont été entièrement réalisés avant cette date.
La loi ne peut pas revenir sur les situations juridiques qui ont été réalisés sous l’empire d’une loi
précédente. En effet, si la loi contenait des dispositions qui tendent à remettre en cause les effets déjà
passés d’une situation juridique alors ces dispositions auraient un caractère rétroactif et elles ne seraient
pas conformes à l’article 2 du code civil qui énonce le principe de non rétroactivité de la loi. Cette théorie
tend à conserver la loi ancienne, effectivement le législateur doit respecter le passé et la loi nouvelle ne
doit pas priver les individus de droits valablement acquis sous l’empire de la loi ancienne. La non

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rétroactivité se résume au respect des droits acquis, c’est-à-dire aux droits définitivement entrés dans le
patrimoine de leur titulaire contrairement aux simples expectations qui sont juste des droits éventuels.
Ainsi une loi postérieure au décès d’une personne ne pourrait modifier les droits acquis des héritiers,
sinon elle serait rétroactive. En revanche avant le décès, les héritiers présomptifs n’ont sur la succession
que de simples expectatives qu’une loi peut atteindre.

Ce principe de non rétroactivité de la loi est soumise à quelques exceptions que nous étudierons dans une
seconde sous partie.

B –Les Exceptions Au Principe De Non Rétroactivité

Certaines dérogent au principe de non rétroactivité et s’appliquent par conséquent à des droits acquis. En
effet, ce principe a une portée limitée dans la mesure où elle n’a pas de valeur constitutionnelle. Pas
conséquence, la loi s’impose aux juges et aux autorités qui exercent le pouvoir réglementaire, mais elle ne
s’impose pas au législateur. Ainsi sont rétroactive les lois expressément rétroactives, c’est-à-dire que la
rétroactivité doit être exprimée de façon expresse par le législateur. Il devra exprimer alors sa volonté
sans ambigüité de façon à anéantir toute possibilité d’interprétation. Sont également rétroactives les lois
dites interprétatives, c’est-à-dire celles qui ont pour objet de préciser le sens obscure ou ambigu des lois
antérieurs. Les lois confirmatives le sont aussi dans la mesure où elles viennent valider des actes
antérieurs qui étaient nuls selon les dispositions de la loi ancienne. En matière pénal il est également
admis que des lois soient rétroactives lorsqu’elles suppriment une infraction ou quand elles la
sanctionnent de manière moins sévère. Enfin, les lois concernant la compétence ou la règle de procédure
s’appliquent au procès en cours et ceci dès leur entrée en vigueur.

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