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Gueroult - La Philosophie Transcendantale de Salomon Maimon PDF
Gueroult - La Philosophie Transcendantale de Salomon Maimon PDF
Philosophie transcendantale
de
Salomon Maïmon
par
M. GUEROULT
Ancien élève de l'École normale supérieure
Mattre de conférences à la Faculté des Lettres
de l'Université de Strasbourg
PA HIS
LIBRAIRIE FÉLIX ALCAN
108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 108
1929
DU M};:ME AUTEUR
-----
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A MONSIEUR LÉON ROBIN,
professeur à la Sorbonne,
HOMMAGE
DE RESPECTUEUSE AFFECTION
INTRODUCTION
(1) Streifereien, p. 10-13 ; 220-222.- Baco von Verulam traduction avec remar
quesdeMAÏMON (Berlin1793)p. LXIIIetsq.; Logik, p. XLIV-XLVIII, 296,389;
Die J(ategol·ien des Aristote/es (Berlin 1794) pp. 116-123. L'étroit enchalnement
de la philosophie au mouvement des sciences, la substitution d'une recherche
indéterminée et comme anonyme, à la philosophie comme système déterminé,
selon une dialectique sui gene1·is, à partir d'un principe métaphysique, est
également la marque de certaines philosophies contemporaines, cf. BRUNS-
CHVICG, l'Orientation du Rationalisme (Rev. de Métaphysique 1920). • La substi-
tution d'un programme d'orientation à un programme de déduction tient au
caractère radical de l'idéalisme. • (p. 325.) Mais ou l'unité se réalise et Je système
se constitue en dehors et au-dessus du progrès indéterminé et anonyme des
sciences, ou il ne se constitue pas, et l'on a une série de réflexions et de tendances
qui attend la cristallisation en système. La philosophie ne peut échapper à la
loi du système, mais elle peut toujours considérer le système, non comme une
fin, mais comme un moyen, non comme un résultat ultime, mais comme un
moment, aussi bien pour le philosophe que pour la philosophie. cf. à ce sujet
ScHELLING B1·iefc über Dogmalismus und Criticismus (1795) lettre V.
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 13
(1) Il est visible que MAiMON médite sur la Critique en lecteur assidu de
LEIBNIZ, particulièrement des Nouveaux Essais sur l'Entendement humain,
parus à une date relativement récente (1765) et traduits en allemand par
J. H. ULRICH entre 1778 et 1780, c'est-à-dire une dizaine d'années avant le
Versuch über die TraTIJicendantalphilosophie. - REINHOLD, Uber das Fundament
des philosophischen Wissens, p. 13, y voyait un des quatre ouvrages indispen-
sables à tout philosophe.
• La définition n'est que nominale quand elle n'exprime point en même
temps la possibilité, car alors on peut douter si cette définition exprime quelque
chose de réel, c'est-à-dire de possible, jusqu'à ce que l'expérience vienne à
notre secours pour nous faire connaltrè cette réalité a posteriori, en exposant
la cause ou la génération possible de la chose définie. Il ne dépend donc pas de
nous de joindre les idées comme bon nous semble, à moins que cette combinaison
ne soit justifiée ou par la raison qui la montre possible, ou par l'expérience
qui la montre actuelle, et par conséquent possible aussi. • (Nouveaux Essais.
III, ch. Ill, p. 306.) • Les vérités nécessaires • telles qu'on les trouve dans le•
mathématiques pures et particulièrement dans l'arithmétique et dans la géomé-
trie, doivent avoir des principes dont la présence ne dépende point des exempla
ni par conséquent du témoignage des sens, quoique sans les sens on ne se serait
jamais avisé d'y penser. C'est ce qu'il faut bien distinguer et c'est ce qu'Euc.LIDB
a si bien compris en montrant par la raison ce qui se voit assez par l'expérience
sensible et les images sensibles... • (Ibid. Avant-propos, p. 195.) Ce demleJ"
passage est cité par REINHOLD, Beitrfige zur Berichitigung (note de la p. 40,
p. 448). Si l'inspiration de, MAÏMON est ici lelbnitienne, son modus probandi
est d'inspiration kantienne, car le caractère illusoire d'une combinabon
a priori ne peut être définitivement écarté par la réalisation possible dana
un exemple, mais la démonstration de la réalité de la combinaison a priori
consiste à prouver que l'exemple lui-même est rendu possible par la combinaison
a priori, comme le jugement a priori rend possible l'expérience de robjet qu'tl
détermine de façon transcendantale. L'exemple pour LEIBNIZ est bien rendu
possible par la combinaison a priori : • le succès des expériences sert de confir-
mation à la raison à peu près comme les épreuves servent dans l'arithmétique
pour mieux éviter l'erreur des calculs quand le raisonnement est long. • Mais
alors que le jugement synthétique a priori détermine Immédiatement dana
le sensible l'intuition ou J'exemple particulier qu'il rend possible, le principe,
inné n'est pas tel parce qu'il conditionne l'expérience, mais parce qu'il eat
indépendant d'elle. S'Il la détermine, c'est médiatement, en rendant possible
les essences elles-mêmes ou leur combinaisons sur quoi est fondée l'expérience,
ou l'intuition, qui en elle-mêmes n'est que connaissance imaginative ou confu-
24 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
(1) Tr. Phil. p. 45-49. - Streifereien p. 22, 263.- Cf. LEIBNIZ, Nouueauz
Essais, avant-propos. • C'est ainsi que les idées et les vérités nous sont innées,
comme des inclinations, des dispositions, des habitudes ou des virtualités
naturelles, et non pas comme des 11-ctions, quoique ces virtualités soient toujours
accompagnées de quelques actions souvent insensibles qui y répondent. •
(Erdmann, p. 196.) C'est conformément aux théses kantiennes de l'analytique
gue MAÏMON élimine la virtualité pour y substituer l'activité transcendantale
(c'est-à-dire qui rend possible la connaissance des objets). Mais dans cet
exempje, MAÏMON substitue à la possibilité de l'expérience (prémisse kantienne)
la . possibilité de la perception. Les conséquences s'en feront sentir dans la
déduction de l'espace et du temps, et dans celle des catégories. (V. plus bas,
p. 129.)
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 25
qu'un jour nous ne percevrons pas un objet qui ne sera pas dans l'espace?
En réalité, on passe d'nne généralité produite par une induction a posteriori
à une nécessité a priori••• KANT pose simplement le ·fait, il ne le prouve pes.
Ses principes restent donc vraisemblables, mais non nécessaires. •
(1) Ibid., p. 60 sq., p. 169 sq, etc. L'objectivité de l'identité peut se justifier
ici encore de deux manières: 1• par le fait de sa généralité maxima.(point de
vue empirique); 2• parce qu'elle est condition de pensabilité de tout objet;
ici la généralité est fondée sur le caractère de condition absolument pure et
a priori, c'est l'universalité objective (point de vue critique).
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 31
(1) Ce qui est surtout visible dans l'arithmétique pure, où les objets sont
entièrement déterminés par la simple pensée du rapport des grandeurs, sans
qu'intervienne comme en géométrie, la détermination intuitive de la situation,
étrangère à ce rapport. ·
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 33
Il n'en reste pas moins vrai que seule est objective et néces-
saire toute synthèse dont les éléments ne peuvent être pensés
séparément, et arbitraire et sans fondement, toute synthèse
dont les termes peuvent être pensés séparément. Mais à côté
du mode réciproque de la synthèse (wechselseitig), il y a
le mode unilatéral (einseitig). Avec ce mode l'un des termes
de la synthèse peut être pensé séparément. Si ligne peut
subsister sans droit, droit ne peut subsister sans ligne, si
triangle peut subsister sans isocèle, rectangle ou scalène,
le contraire ne peut avoir lieu. La synthèse n'est pas nécessaire
mais elle n'est pas arbitraire, car elle a un fondement : c'est
un possible objectif, un « vrai concept ''· Le fondement de cette
synthèse unilatérale est le principe cherché ; c'est celui de
déterminabililé : pas de détermination, sans déterminable et
non réciproquement. Le concept absolu, unilatéral (einseitig)
(1) Tr.phïl., p. 101-102. -LEIBNIZ, Nouveau:x; Essais, Uv. III, chap. III
p. 306.
(2) Ibid., p. 184, sq.
(3) Ibid., p. 71-72; p. 174, 184, etc.
(4) Comparer avec JACOBI; notre entendement ne porte pas au delà d
ses Jilropres productions. Une physique pure mathématique est possible, mais
précisément parce ~·eue est l'œuvre de l'entendement, nous n'avons pas
le droit de penser quelle soit adéquate à la réalité de la nature. JACOBI, S. W.
IV, 2, p. 132.
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 49
(1) Tr. phil. p. 351, 358. Une figure en général, c'est une figure dont la
grandeur est déterminable et indéterminée ; elle se définit donc comme les
dilJéren ielles : dire qu'elles sont des grandeurs les plus petites possibles, cela
veut dire qu'elles n'ont pas de grandeurs déterminées (p. 352; p. 354).
(2) Ibid., p. 35.
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 63
(1) Tr. Phil., p. 340-350 ; Streifereien, notes de la p. 211 et des p. 228 11q
Le caractère incomplet est la cause du caractère • représentatif» (Vorstellende).
l'illusion consiste à prendre l'incomplet pour le complet ; les conséquences
permettent de déceler l'illusion. On trouve des pensées analogues dans le Dft
lntelleciUll Emendatione. Ces textes d'inspiration avant tout leibnitienne sont à
rapprocher de § 73 de l'Erziehung des Menschengeschleehtes, de LESSING, où la
réalité se distingue de la pure image par l'achèvement total de la représentation.
GUÉROUL1' Il
66 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
·'1
considérés en soi est pour nous = x, mais si l'on admet
différents phénomènes, on est obligé d'admettre aussi des
objets différents qui leur correspondent ; objets qui ne peuvent
être déterminés en soi, mais par analogie avec les phénomènes
correspondants. Ainsi l'aveugle-né ne peut certes penser une
couleur en soi, mais il peut s'en former un objet déterminé
en pensant la réfraction propre de celle-ci, au moyen de lignes
qu'il construit dans son intuition.
On peut donc concevoir que les images empiriques sont
produites par la réflexion du Moi pur sur le miroir du Moi
empirique : elles sembleraient alors venir de choses placées
derrière le miroir, c'est-à-dire hors de nous (l). Mais comme
l'espace est une forme en nous, cet « hors de nous » ne peut
signifier un rapport d'espace, il exprime seulement que, dans
ces représentations, nous n'avons conscience d'aucune spon-
tanéité; elles constituent à l'égard de notre conscience un
pur pâtir (blosses Lei den) et une négation de l'activité ( Keine
Tiitigkeit) (2).
La projection hors de nous de la synthèse entière comme
cause de la représentation est donc la façon dont nous exprimons
à nous-mêmes le sentiment de passivité résultant de l'ignorance
où nous sommes de la synthèse originaire. La représentation,
comme conscience d'un rapport entre une image et un objet
dont elle est la copie, est l'expression confuse du rapport de
différence entre la synthèse complète et la synthèse partielle.
C'est parce que l'imagination laisse échapper toujours la
richesse du détail de la synthèse complète, qu'elle fait de
cette dernière l'objet auquel elle rapporte les détails qu'elle
aperçoit et qu'elle devine liés à d'autres, non aperçus, dans
cet objet. L'imagination n'a ainsi jamais conscience d'autres
choses que des représentations ; elle a donc fatalement l'illusion
que tous les objets de la conscience sont des représentations ;
elle est amenée par là à considérer comme étant aussi une
représentation l'objet originaire ou la synthèse complète.
Poussée par l'habitude, elle transporte à celle-ci le procédé
qu'elle emploie à l'égard de la synthèse incomplète, elle forge
la fiction d'un objet absolument hors de la pensée et inconnais-
sable, pour pouvoir rapporter à lui comme à sa cause la cc Dars-
(1) rN 0.81 ~A rTO N, oder Magll%in zur Erfahrungsseelenkunde ais ein Lese-
bach für Gelehrle und Ungelehrle (Berlin 1792), Partie III, p. 9. - Slreifereien
p. 195,209-212. -Die J(alegorien des Arisloleles, p. 99 sq.; 143 sq.- Comparez
avec FICHTE, Sonnenklarer Berichl, II, p. 177 sq.- Avec ScHELLING, Abhand-
lungen zur Erlâulerung des ldeallsmus der W. L., Anhang.- System des Tram-
eendantalen Idealismus, III, p. 361 sq. : • L'intuition intellectuelle est pour la
plûlosophie transcendantale, ce qu'est l'intuition de l'espace pour la géométrie. •
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 73
d'une chose signifie ne pas pouvoir donner d'une chose qui peut être
pensP.e comme détl'rminée de p.usieurs manières, les déterminations particu-
lières, par .esquelles elle peut réellement être pensée. Mais si l'on doit penser la
chose, abstraction faite de toutes ses déterminations possibles, son concept
sera précisément déterminé de façon complète par ce fait qu'eile peut être
pensée comme complètement dépouillée, par abstraction, de toutes ses déter-
minations possibles. On ne la confondra ni avec une chose subordonnée (car
celle-ci y ajouterait une détermination), ni avec une autre chose, qui comme elle
ne serait subordonnée à aucun concept supérieur. Le particulier, dans chaque
conscience ne peut. être pensé, abstraction faite de la conscience, en général
(car la pensée est un mode de la conscience). En revanche, la conscience en
général, abstraction faite de toute détermination particulière, peut certes ne
pas exister réellement, mais peut être pensée par chaque conscience particulière...
Ce qu'il faut dire c'est que la conscience étant le déterminable absolu peut bien
être pens~e. par l'abstraction des déterminations particulières, mais qu'elle ne
saurait jamais de la sorte être représentée (Logik p. 15; p. 243-245).
(1) Tr. phil., p. 207-208.
76 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
(1) Lorsque MAÏMON ajoute que son • infinité n'est pas contredite par là,
puisque celle-ci consiste dans la faculté de penser tout ce qui n'est que pensable '•
et que ce donné est par sa nature, non pensable, il ne fait que mieux trahir
son embarras.
(2) Pour employer le langage de FICHTE on peut dire que MA'iMON oscille
entre l'idéalisme qualitatif ou l'absolu étant posé, conformément à sa nature, sana
difféience, le passage à la différence se fait par une limitation inintelligible, et
l'idéalisme quantitalif, ou l'être limité et différencié est posé comme absolu,
contrairement à la nature de l'absolu qui exclut limite et différence.
86 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
(1) Les deux procédés ne sont d'ailleurs pas nettement distingués par
MAïMoN, mais confondus dans des exposés épars; jamais la déduction n'oiJre
J'aspect systématique que nous lui donnons ici.
88 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
que l'espace puisc;e être conçu sans les objets, et non les objets
sans lui. En effet les parties étant des quanta ou valeurs dôter-
Dlinées de l'espace concept, rapport ùitTérentiel en lui-même
quantitativement indéterminé, elles ne peuvent évidemment être
conçues avant lui. En revanche on peut concevoir les objets
gans l'espace, et non l'espace sans les objets : l o parce que
l'espace est condition de la perception de la différence des
objets, et qu'un objet sans diflérence devrait être conçu en
dehors de tout espace; 2° même. lorsqu'on a affaire à des
objets différents, on doit concevoir que la différence est uu
fondement de la forme qui conditionne sa perception, non le
contraire à moins de faire de la diflérence une propriété de
notre esprit fini, et de transformer la condition de perception
en condition d'existence. Les objets que nous concevons
comme possibles après l'abolition de l'espace, ne sont pas
les intuitions empiriques des objets, mais les différentielles
qui sont à leur fondement. Ces difTérentielles n'ont aucune
détermination numérique, ce ne sont pas des quanta, des parties
d'espace : ainsi il est à la fois vrai que nous ne pouvons pas
concevoir l'espace sans des objets, que nous pouvons concevoir
des objets sans espace, et que nous ne pouvons concevoir des
parties de l'espace (intuition} antérieurement à l'espace (concept).
J} L'espace et le temps comme concepts sont grandeurs inten-
sives et s'eœcluenl r~clproquemenl ; comme Intuitions, ils sont
grandeurs eœtenslves et s'Impliquent réciproquement. - C'est
là une conséquence de ce qui précède. L'espace et le temps
comme concepts sont grandeurs intensives, car l'unité (celle
du rapport} est réelle, la pluralité est virtuelle (elle sera réalisée
avoo les valeurs définies de l'intuition empirique). - Alors
la position de l'un (soit de l'espace, soit du temps) rend
la suppression de l'autre nécessaire, et si l'autre doit être
nécessairement· posé, c'est précisément pour qu'il puisse être
supprimé par le premier. En effet, on ne peut se représenter
des objets les uns hors des autres que dans le même point
temporel, car le rapport à l'extériorité réciproque est une unité
indivisible : cette simultanéité n'est que la négation du temps.
Réciproquement, si nous devons nous représenter des choses
dans une succession, nous devons nous les représenter dans
le même lieu, autrement il nous faudrait les représenter dans
un même point temporel; cette identité de lieu est négation
de l'extériorité réciproque, de l'espace.
OIIBBGUL'II 7
98 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
(1) Tr. Phil., p. 18-19. -Ces formules sont claires bien que contradictoires
, dans leur expression. En effet la condition qu'elles énoncent est toujours
impossible. 1• S'il n'y avait qu'une intuition uniforme (par ex. celle de l'eau,
d'un fleuve) il n'y aurait pas de concept (discursif) de différence en général, ou
d'espace, ca1· aucune comparaison ne serait possible entre des différences diffé-
rentes. II n'y aurait pas de concept discursif, parce qu'il n'y aurait pas de diffé-
rence " objective • au fondement ou de forme objective de différence. Dans ce
cas, il n'y aurait pas non seulement de concept d'espace, mais encore d'intuition
uniforme dans l'espace (le fleuve ne pourrait être perçu dans l'espace); 2• S'il
y avait des intuitions radicalement différentes, il y aurait un concept de différence
en général, un concept d'espace mais pas d'intuition parce qu'il n'y aurait
pas dans les «parties • cette identité à l'égard du concept qui fait l'unité de
l'intuition (de l'espace et de temps) et donne aux représentations situées dans
cette intuition leur caractère de « parties •. L'identité de la différence pour
toutes les différences rend possible l'unité soit du temps soit de l'espace, d'où
vient ensuite l'intuition (comme quantum). Mais on voit que dans ce cas a) des
intuitions radicalement différentes ne peuvent être conçues, car il faudrait pour
elles une conscience avec son unité et son identité ce qui est contradictoire
(point de vue subjectif) ; b) le simple concept d'espace ou de différence en
général est impossible pour la même raison ; il suppose l'identité (point de vue
objectif).
(2) Tr. Phil., p. 132.
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 103
(1) Logik, p. 134-135 " Nous devons admettre dansee cas (les deux gouttes
d'eau) que le concept commun aux deux choses est incomplet c'est-à-dire qu'il
ne contient pas tout ce par quoi les objets sont déterminés. Il ne contient que ce
qui est commun aux deux, non ce qui est le propre à chacun d'eux et détermine
leurs rapports externes particuliers. Par là nous sommes conduits à rechercher
ce qui constitue le propre de chaque objet et à rendre nos concepts toujout·s plus
complets •: Zeit und Raum ais allgemelne Hinweisungen zür Vollsliindigmachung
unsere1· empirischen Erkenntniss.
(2) Tr. Phil., p. 182.
108 PHILOSOPHIE TRANSCBNDAN7ALE
8
114 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
(1) S'il y a en nous, selon LEIBNIZ, des vérités nécessaires et, des principes
innés antérieurs à la sensation, ce n'est pas parce que ces principes sont conditions
del' expérience, car l'expérience n'a en elle-même aucune nécessité; c'est le domaine
du simple contingent, Cf. REINHOLD, Uber das Verhültnis der The01·ie des Vors-
tellungsvermOgens zur Krilik der reinen Vernun/1. (Beitrage 1, p. 286, 303-304),
mais simplement parce qu'il y a en nous une nécessité que ne pourrait expliquer
l'expérience. Sans doute ces P.rincipes sont-ils valables parce qu'ils sont au
fondement des choses (intelligzbilia.) et que les choses ainsi fondées sont à leur
tour au fondement de l'expérience, c'est-à-dire au fondement de la connaissance
imaginative et confuse. Mais l'expérience se distingue des choses qui la fondent,
non pas comme le phénomène (sensible, mais réel) du noumène, mais comme
l'apparence (trompeuse) du réel (vérité), elle n'est pas en elle-même et comme telle
fondée dans les principes. Ces principes ne sont donc pas condition de la connais-
sance sensible, .bien que celle-ci ne soit qu'une connaissance confuse de choses
fondées par ces principes. Le principe inné n'a donc rien de commun avec le
principe a priori de la philosophie transcendantale qui précède la connaissance
sensible parce qu'il la rend possible, et qui tire toute sa valeur a priori de ce qu'il
rend possible ainsi la seule connaissance de l'objet qui nous soit permise. Chez
MAiMON les formes de la connaissance imaginative en tant que telle, qui étaient
chez LEIBNIZ des idées confuses et des résultats conditionnés dans l'intelli-
gible par des principes intellectuels objectifs et d'ailleurs innés, sont des prin-
cipes a priori transcendantaux qui rendent possible dans le sujet la connaissance
de l'objet dans une expérience en général, que cellP...ci soit entendue ou non dans
nn sens kantien.
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 117
(1) Tr. Phil., p. 220-223. Comparez avec KANT, Krlt. der. r. Vernunft, III,
p. 182-186.
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 127
(1) Tr. Phil., p. 71.- KANT, Krit der r. Vernunft III, p. 138. La logique
transcendantale indique bien dans le schématisme des règles pour l'application
des concepts purs de l'entendement, mais il s'agit là pour notre esprit de la
subsomption nécessaire et inconsciente du divers sous des règles qu'il possède
a priori, en vue d'une connaissance possible par lui du particulier. Au contraire
lorsqu'il s'agit de partir de ce particulier donné dans la connaissance, pour
s'élever à des • propositions d'expérience •, le jugement (réfléchissant et cons-
cient) dans le passage de l'analogie universelle, que fonde la logique transcen-
dantale à ces analogies particulières, est livré à ses seules ressources, et son
assertion, si motivée qu'elle soit est toujours au fond arbitraire (assertorique =
fakticsh =arbitraire).
(2) Tr. Phil., p. 71-74, 184 sq., 215.
132 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
(1) Logik, p. 168. Il n'y a pas brusque solution de continuité entre les deux
époques de la philosophie maïmonienne, puisque le motif sceptique tenait déjà
une large place dans la première, mais ellacement des théories d'inspiration
leibnitienne (entendement infini, dillérentielles) et renforcement du motif
huméen. Bref surtout un déplacement d'accent. Cf. KuNTzE, op. eilat. p. 340.
140 PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE
que tout ce qui est, n'est que pour le Moi - que le Moi d'autre
part ne peut être que le Moi. En conséquence, le Moi limité
doit exclure de lui la limite (ou le Non Moi) pour pouvoir la
poser; il doit être infini. Comme il ne peut être, sans poser
ce qu'il est ni sans le poser pour lui, il ne peut exclure la limite,
être infini sans se poser au préalable pour lui-même comme
essentiellement absolu et sans limite, c'est-à-dire sans avoir pris
conscience de son absoluité et de son absoluité comme Moi
(conscience de l'Autonomie). La conscience de la Loi morale
est donc une exigence qui conditionne la possibilité de poser
la limite à l'infini, c'est-à-dire la forme et la matière de la
perception. Cet idéalisme subjectif absolu soulève à son tour
bien des difficultés et bien des problèmes, mais il élimine le
doute de MAiMoN et répond à la double question quid juris
et quid facli, en se plaçant au point de vue même de MAiMON :
la négation de la chose en soi, l'affirmation de l'immanence
dans le sujet de toute réalité et du rapport réciproque du sujeL
et de l'objet (réforme copernicienne de la Critique) ( l ).
(1) MAÏ:MON n'est pas favorable pourtant à la W. L. Sa lettre à FICHTE
(Fichtes Lel>en und BJ•iefwechsel Il, p. 444) reprend à J>eU près les expressions ùont
il avait usé contre REINHOI.D dans les StreifeJ·eien (Cf. plus haut p. 5). L'esprit.
de cette philosophie lui paruît trop métaphysique ct pas assez positif : • Vous
m'interrogez sur les raisons de mon mécontentement général à l'égard de FICHTE.
Ces raisons se trouvent dans la différcnee des sujets, qui est très grande. Les
hommes amoureux de la vérité (et je suis de leur nombre) estiment sa façon de
philosopher plus sublile que solide, y voient un jeu de l'imagination, plt\S qu'un
procédé méthodique de l'entendement et de la raison. • (KIWNOS, Ein Arclliv
de1· Zeit, F. Ho:MBACH l,januar. April, Bcrlin1801, p. 140, cité par H.UNTZE, op. eilat
p. 348). En parlant des l<antiens en généml, et en pensant à FICHTE, il o;ioute :
• Ils s'approchent parfois très près du système de KANT- comme les coméles du
soleil - mais parfois aussi s'en éloignent, dans leurs orbites hyperboliques, si
bien qu'on le perd totalement de vue. Pour conserver d'autant plus l'apparence
de la profondeur et de la pénétration, ou pour enlever à lem· philosophie, tout
aspect empirique, ils ne donnent la plupart de temps dans leurs systèmes, aucnn
exemple destiné à éclaircir leurs hautes spéculations; ou, s'ils s'abaissent à en
donner, ces exemples sont d'une telle sorte que la plupart du temps ils emhronil-
lent les choses loin de les éclaircir. • Kritiscl1e Untersuchungen, Vvidmunp;,
cité par H:UNTZE, Ibid.)
CONCLUSION
(1) KANT déclare plus loin (De rusage régulateur des Idées de la Raison pure•
III, p. 448) que malgré la distinction des principes mathématiques, constitutifs.
et des principes dynamiques régulateurs, les lois regardées comme dynamique~,
sont certainement constitutives par rapport à l'expérience, en rendant possible
a priori les concepts sans lesquels aucune expérience n'a lieu. Remarquons que
oette explication laisse aux principes dynamiques, leur caractère constitutif,
même dans le cas où les rapports nécessaires qu'ils conditionnent, sont conçua
comme absolument indéterDllnés (au point de vue empirique) a priori.
PHILOSOPHIE TRANSCENDANTALE 165
PA.GBS
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