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25 ans d’H
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Votre numéro 228 Lorsque j’avais rencontré l’as Pierre Clostermann en 2004, nous avions beaucoup parlé avia-
tion, Spitfire, Tempest, combat aérien… Mais il m’avait avoué être incapable de répondre
en kiosque le 22 février 2019 !
précisément à une de mes questions sur ses victoires. « Vous comprenez, m’avait-il dit,
Les Farges - 15 rue des Ligures pendant la guerre moi je faisais mon boulot de pilote de chasse : je tirais sur des avions.
87110 LE VIGEN. France
Mais ensuite, ce n’était plus moi qui m’occupais des confirmations. Du coup, je ne connais
Tel : (00.33) 05.55.31.08.28.
E-mail : contact@avions-bateaux.com pas avec certitude le détail de mon palmarès. La seule chose dont je suis sûr, c’est que les
Revue Bimestrielle éditée par les Éditions LELA PRESSE Anglais m’ont homologué 23 appareils détruits. Je ne revendique que cela. Rien d’autre ! »
LIMOGES 387 641 202 00032 C’est pour cela que je pense que « Cloclo » aurait apprécié cette étude dans laquelle je
détaille pour la première fois l’intégralité de son tableau de chasse
RESPONSABLE CLIENTÈLE : Sylvie BROQUET
DIRECTEUR DE LA RÉDACTION : Michel LEDET mais aussi sa manière de combattre. J’ai pu l’effectuer en croisant
DIRECTEUR DE PUBLICATION : Michel LEDET l’ensemble des sources disponibles, en particulier ses deux carnets
COMITÉ DE RÉDACTION : Christophe CONY, Michel LEDET de vol dans la Royal Air Force et les journaux de marche des cinq
RÉDACTEUR EN CHEF : Christophe CONY
Tél : 04.93.58.09.53 Squadrons dans lesquels il a combattu au cours du conflit. Tous
sont très évocateurs. J’espère donc que vous aurez autant de plai-
PRINCIPAUX COLLABORATEURS : sir à lire cet article que j’en ai eu à l’écrire, et j’en profite pour vous
Pierre CORTET (+), Claude ARCHAMBAULT, Jean BARBY,
Matthieu COMAS, Jean-Louis COROLLER, Alain COSTE, souhaiter de passer une très bonne année 2019…
Jean-Louis COUSTON (+), Pascal FAUCARD, Jean-Luc
FOUQUET, Bertrand HUGOT, Serge JOANNE, Jean-Marie
KRAUSENER, Jacques MOULIN, François NEVEU, Lionel
Christophe Cony
PERSYN, Alain PIGEARD, Bernard PHILIPPE, Jacques
ROBINEAU, Marc ROSTAING, Jacques SACRÉ (+)
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COLLABORATEURS ÉTRANGERS :
ALLEMAGNE : P. Heck. H.-W. Neulen, H.Thiele. ARGENTINE :
J.F. Nunez Padin, S. Bellomo. AUTRICHE : R. Reisinger, La rédaction d’Avions recherche documents et photographies concernant les dif-
Tom Cooper. Belgique : J.-L. Roba, E. Mombeeck, P. férentes versions du Potez 63 : photos d’usine (prototypes et avions de sé-
Saintes, P. Taghon. BRÉSIL & PORTUGAL : M. Canongia rie), photos en unités, détails, carnets de vol, etc. Nous recherchons une ou des
Lopes. BULGARIE : S. Boshniakov, M. Andreev. CANADA :
D. Bernad, G. Beauchamp. CROATIE : D. Frka. ESPAGNE : photographies de l’unique Potez 63 F-ARIR d’Air Bleu ainsi que du Potez 631
J. Arraez Cerda, C. O’Donnell Torroba. ÉTATS-UNIS : F-ARQV. En plus de cela, nous recherchons également de la documentation tech-
F.W. Bailey, D.Y. Louie, G. von Rauch. FINLANDE : K. nique sur la version de bombardement, le Potez 633.
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Jarrett, D. Nicolle, N. Franks, A. Thomas. GRÈCE : A. Merci de contacter Michel Ledet (mi.lela.presse@gmail.com) ou Matthieu Comas
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Gentilli, G. Massimello. JAPON : K. Osuo, S. Nohara. seront bien sûr rendus. Toute aide est bienvenue. Merci d’avance.
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4 Courrier des lecteurs
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Couverture : Lionel LABEYRIE. Profils couleur : Andreï
YOURGENSON, Thierry DEKKER (http://dekker-artwork. 6 Pierre Clostermann
blogspot.com/), Serge JAMOIS, Michel MARTRAIX, L’instinct du chasseur
Bogdan PATRASCU, Pierre TILLEY. Dessins techniques :
Iulian ROBANESCU, Shigeru NOHARA Récit complet, par Christophe Cony
PUBLICITÉ à l’adresse de la rédaction
MISE EN PAGE : Jean-Baptiste Delcambre
48 FIAT CR 42 Falco
IMPRESSION : MAQPRINT LIMOGES 87 - FR Dans la bataille d’Angleterre !
3e partie, par Luigino Caliaro
La reproduction, même partielle, des articles et
des illustrations de ce magazine est soumise à
autorisation préalable de l’éditeur et des auteurs 56 Les liaisons d’état-major en 1939-1940
All contents copyrights LELA PRESSE Récit complet, par Matthieu Comas
N° ISSN : 1243-8650
N° Commission Paritaire : 0922 K 88015 70 Les escadrilles françaises sur le front de Vénétie
Diffusé par MLP
5e partie : janvier 1918
Parc d'Activité de Chesnes - 55 bld de la Noirée - Par Luigino Caliaro et Roberto Gentilli,
38070 ST QUENTIN FALLAVIER. avec la collaboration de Christophe Cony
04.74.82.14.14 / www.mlp.fr
Bertrand Hugot
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Rééditions !
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PIERRE CLOSTERMANN
L’instinct du chasseur
Par Christophe Cony (profils de Thierry Dekker)
Le 18 avril 1945, à l’occasion Un seul but : Navarre et Fonck, les héros de l’aviation française…
du retour en opérations du No Il faut dire que son oncle Robert Aubry, à qui l’ont
3 Sqn après un stage de tir au devenir aviateur confié ses parents, est un ancien pilote de la Grande
Royaume-Uni, le célèbre pho-
Guerre. Quant aux vacances, elles sont ponctuées
tographe Charles E. Brown
est mandaté par la RAF pour Pierre, Henri, Clostermann est né le 28 février par de longues parties de pêche, une passion qui lui
immortaliser le plus grand 1921 à Curitiba, petite ville de l’état brésilien du a été très tôt transmise par son grand-père mater-
as de l’escadron, un certain Paraná ; il est le fils unique de Jacques Clostermann, nel. Au cours d’un séjour sur l’étang de Biscarosse,
Pierre Clostermann… Le voici diplomate à São Paulo, et de Madeleine née Carlier.
en vol sur son Tempest Mk V C’est à quatre ans qu’il découvre l’aviation lorsqu’un
NV994 « JF-E » à proximité Breguet 14 de la CGEA – future Aéropostale – vient
de la petite cité de Riesenbeck
se poser sur la plage de Guarujá à Santos, au sud-
(au sud-est de Rheine) dont on
est de São Paulo. J’accompagnais mon père et, cu-
aperçoit le clocher de l’église.
L’Allemagne est déjà à genouxrieux, je m’étais approché de l’avion dont les capots
comme le montrent tous les étaient remis en place. L’hélice lancée péniblement
à la main, le moteur Renault démarra soudain dans
ponts détruits sur le parcours
du canal Dortmund – Ems. l’énorme pétarade et le vacarme des douze cylindres
(RAF Museum) déchaînés (…). Hurlant de frayeur, je me réfugiai
dans les jambes paternelles [1]… Sanglé dans sa
veste de cuir, le pilote Paul Vachet coupe le contact
[1] « Une vie pas comme puis s’approche d’eux : Ah ! Monsieur le consul, je
les autres », éd. Flammarion crois bien que vous n’avez rien à craindre, votre fils
2005. ne sera jamais pilote ! Vachet ne sait pas encore que
près de vingt ans plus tard il devra féliciter Pierre
pour ses premières victoires aériennes…
Pierre ajustant son parachute
devant un Bücker Bü 131
Jungmann de l’aéroclub du La même année, il est mis en pension en France, le
Brésil à Manguinhos, sort classique à l’époque des enfants de diplomates
au nord de Rio. en poste à l’étranger. Étudiant à l’école religieuse
(toutes les photos : coll. Pierre Notre-Dame de Boulogne à Auteuil, il profite de ses
Clostermann, sauf autre mention) temps libres pour dévorer les récits sur Guynemer,
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en 1935, l’adolescent effectue son baptême de l’air à Face à son destin
bord de l’hydravion géant Latécoère 521 Lieutenant
de Vaisseau Paris. Ayant réussi ses deux baccalau- En juin 1940, l’effondrement brutal de la France lui
réats latin-sciences et sciences-langues à quinze et fait l’effet d’un coup de tonnerre. J’appartenais à la
seize ans avec dispense d’âge, Pierre part rejoindre génération des fils de 14-18. Pour nous, l’Armistice
ses parents à Rio de Janeiro où son père est désor- était difficile à avaler. Par-dessus le marché, j’étais
mais consul. Au Brésil, tout en passant cette fois un Alsacien, de mère Lorraine et issue d’une longue li-
bac de philosophie, il s’inscrit à l’aéroclub local où gnée militaire ! Quelque temps après, il reçoit de son
il obtient dès le 27 novembre 1937 son brevet de père une lettre qui lui demande de rechercher tous
pilote. Mes parents m’ont offert le diplôme. Pour le les articles de presse traitant d’un certain général
reste, je gagnais mon argent de poche en écrivant
des articles dans différents journaux [2]. Curieuse
ironie de l’histoire pour celui qui deviendra le plus
célèbre des pilotes de chasse français libres, son
moniteur Arthur « Karl » Benitz et les appareils qu’il « Cloclo » est breveté pilote
pilote – des biplans d’acrobatie Bücker Jungmann et fin 1937, à 16 ans et 1/2…
Jungmeister – sont tous allemands !
que je le suivrai, qu’il me guidera vers des chemins ser. Tout va bien, il a passé l’épreuve haut la main. Un Tiger Moth Mk II en vol
droits, escarpés peut-être, mais droits, au service de L’instructeur lui précise quand même en lui rendant au-dessus de la campagne
la France (…) ! son carnet : Si ça vous intéresse, le déclenché est britannique. C’est le premier
type d’appareil de la RAF
interdit en Tiger Moth. Il perd sa queue ! Au rythme
dont « Cloclo » prendra les
Puis c’est le cheminement classique du futur élève- d’un à trois vols par jour, Pierre enchaîne jusqu’au 8 commandes…
pilote : visite médicale, test d’anglais (passé bien sûr juin – seul ou en doubles commandes – 43 heures et (DR)
brillamment – il parle aussi le portugais, l’espagnol 30 minutes de vol, toutes à bord de DH.82 sauf une
et l’italien) et enfin tests d’aptitude au pilotage afin séance d’acrobaties de 30 minutes en solo, le 3 juin,
de déterminer son éventuelle affectation. Son pre- sur un monoplan à train fixe Miles Magister Mk I.
mier vol se déroule le 1er mai 1942 sur un biplan L’appréciation du chef-pilote instructeur de la No 6
De Havilland DH.82 Tiger Moth (serial BB706), le EFTS à l’issue de ce mois de formation se résume [3] En mars 1940, le Cdt
fameux « Tigre Mou », à la No 6 Elementary Flying en un mot : « average », dans la moyenne… Ce Martial Valin a été affecté à
Training School de Sywell située au nord-est de qui est un peu vexant. Il accomplit dans le même la mission militaire française
à Rio de Janeiro. Promu colo-
Northampton. Après 40 minutes qu’il termine par temps treize séances – 9 heures – de simulateur
nel à titre mission, il a rallié le
un magnifique tonneau déclenché, son instructeur de vol, ou Link Trainer. Du 10 au 16 juin, le jeune général de Gaulle qui l’envoie
le S/Ldr Turner lui fait déjà signe de revenir se po- homme effectue un bref passage à la No 28 EFTS de à Brazzaville, puis en mars
1941 en Angleterre où il se
verra confier la formation des
Forces Aériennes Françaises
Libres (FAFL). Il sera nommé
général de brigade et chef
des FAFL à l’été suivant.
[4] Son père y dirigera du-
rant la guerre les services de
renseignement de la France
Libre en Afrique australe.
Wolverhampton, au nord-ouest de Birmingham, où Miles Master qu’il utilise à Cranwell sont nettement
l’on teste à nouveau son potentiel au cours de sept plus puissants que les « Tigres Mous » et leurs
vols sur Tiger Moth [5] totalisant 5 h 5 min. 130 ch puisqu’ils sont équipés d’un moteur Bristol
Mercury en étoile de 870 ch dans leur version Mk II,
Après une semaine d’attente à Camberley, le camp celle qu’il pilote presque systématiquement. Pierre
de transit des FAFL, notre sergent se voit convoqué à ressort de Cramwell le 26 octobre, crédité cette fois
l’Air Ministry où on lui annonce que ses compétences en pilotage de la mention « above the average »
le désignent pour devenir instructeur en Rhodésie ou (au-dessus de la moyenne) assortie d’excellentes
au Canada. Devant son refus, il est sélectionné pour notes à l’écrit ; par exemple 48 sur 50 en interpré-
suivre les cours d’élève-officier au Royal Air Force tation des photos et 100 sur 100 en reconnaissance
College de Cranwell, l’école de l’Air britannique, des appareils. Durant ce cours n° 39, il n’a connu
où il arrive le 26 juin. Il y reste quatre mois à se que deux incidents : un atterrissage forcé lors d’une
perfectionner au pilotage et à la navigation dans le séance d’acrobaties le 20 août sur le Master Mk I
-À mon cher Papa adoré brouillard typiquement britannique du Lincolnshire, N7552, suite à une fuite de glycol, et un autre le
avec toute l’affection de son
accumulant plus d’une centaine d’heures de vol sup- lendemain, près du petit village de Wellingore, sur le
« petit » Pierrot. Pierre Henri
Clostermann – 25.7.1942 – plémentaires [6]. Les monoplans à train rentrant Mk II DL196 [7].
Somewhere, in a RAF Station.
[5] Clostermann aura piloté 17 DH.82A différents à la No 6 EFTS : serials [7] Clostermann a piloté 32 Master différents au RAF College : Mk I N7552 ;
N6773, R5027, R5113, R5115, R5202, T5676, T5677, T6057, T6161, T6389, Mk II DK822, DK829, DK830, DK832, DK836, DK838, DK859, DK934,
T7391, T7700, T7790, T7881, BB706, BB715 et BB788, plus 5 autres à la DK974, DK978, DK984, DK986, DL120, DL123, DL124, DL192, DL193,
No 28 EFTS : R4878, R5240, R5835, T5629 et T5835. DL194, DL196, DL284, DL285, DL286, DL292, DL341, DM381 (EM381 ?),
[6] Exactement : 125 h et 20 min réparties en 97 h 30 min de jour et 20 h DL822, DL830, DL832, DL833, DL837 ; Mk III W9094 ; plus deux vols sur
45 min de nuit, plus 23 séances de Link Trainer d’une durée de 20 h 30 min. les bimoteurs Oxford Mk I T1057 et Mk II X6979.
11
Un instructeur (à gauche) et son élève-pilote devant un Spitfire
Mk IIA à la No 61 OTU de Rednal, dont le code TO est bien visible.
Clostermann a l’air moins content de lui. Le sergent Clostermann rentre outré et peu satisfait
[12] Aux commandes du Maridor tient toujours parole. de lui-même (fait très rare).
Spitfire Mk VB « NL-H ». - Mon lieutenant, explique-t-il, j’ai fait mon tir sur une
[13] Sur le Spitfire Mk VB Quatre jours plus tard, le 2 mars : mouette. Je n’ai pas pu l’avoir, pourtant, je tirais au
« NL-K », au cours d’un canon [13].
entraînement aux missions Le lieutenant Maridor (91 Sq. C de G. Palmes va- Nous lui avons suggéré une faute de déflection. Le
Rhubarb et à l’attaque. riées. DFC) part en chasse avec le Lt Martell. Ils ren- même sergent Clostermann, d’un très joli dessin,
contrent le Lt Boudier et le Gremlin du « B » Flight. nous illustre sa mésaventure. Seule sa modestie
coutumière et bien connue doit être tenue respon-
sable du manque de conformité entre les faits et
le dessin (rapport aux plumes qui tombent). Après
étude du film, l’oiseau est définitivement rentré à sa
base.
Si le sergent Clostermann ne participe pas à la pre- C’est seulement le 17 que l’escadron est engagé
mière sortie de l’unité sur la France occupée, le 3 par la Luftwaffe, lors du Circus 286 dont « Cloclo »
avril, il est de celle du lendemain, le Ramrod 51 au ne fait pas partie. Hélas pour les Français, la
cours duquel les 341e et 611e Squadrons escortent chasse allemande se montre ce jour là la plus forte
jusqu’à 40 km à l’intérieur des terres 70 Forteresses puisqu’elle abat dans le secteur du Havre les lieu-
volantes partant bombarder les usines Renault de tenants Raoul-Duval (prisonnier), Béraud (tué) et
Boulogne-Billancourt. Ailier du capitaine Martell lors Pabiot (sauf). L’ambiance au groupe s’en ressent
cette mission sans histoire, il doit se poser au retour à évidemment, même si depuis deux jours il a eu le
West Malling en compagnie du sous-lieutenant Borne, plaisir d’être rejoint par Jacques Remlinger arrivé du
tous deux s’étant retrouvés à court de carburant. No 602 Squadron avec déjà plusieurs dizaines de
F
B C D E
A
Le 15 mai 1943, la base de Biggin Hill est la première à atteindre le chiffre magique de mille victoires homologuées. On reconnaît le S/Ldr « Jack » Charles
(A) commandant le No 611 Sqn, le W Cdr « Al » Deere (B) commandant le Wing de Biggin Hill, le Gp/Capt « Sailor » Malan (C) commandant la base de
Biggin Hill, le Cdt René Mouchotte (D) commandant le No 341 Sqn, le Cne Michel Boudier (E) et le Cne Christian Martell (F) par-dessus l’épaule
de qui se dresse la tête de « Cloclo » ! (IWM)
14
participe au Circus 299, un Sweep sur Rouen au
cours duquel il est l’ailier du commandant Mouchotte
lors de l’escorte de deux Squadrons de bombar-
diers Boston. La formation est interceptée par les
Messerschmitt Bf 109 G et les Focke-Wulf Fw 190
A des I. et II./JG 2 dont trois sont descendus par
Mouchotte, le capitaine Boudier et le sous-lieutenant
Bouguen. Tout en protégeant consciencieusement
Les deux vainqueurs de la
son leader, Clostermann se met lui aussi en évidence
millième victoire : le « pa-
tron » du No 341 Sqn le Cdt comme il l’inscrit dans son carnet : Grande bagarre.
René Mouchotte (à gauche) et Le squadron descend 3 boches. Je me fais serin-
celui du No 611 Sqn le S/Ldr guer par un 109 G au ras de la flotte. Je tire aussi
Edward Charles. et le manque. Je me pose à Tangmere. Trouille ! (ce
(coll. Norman Franks) 109 m’est accordé endommagé plus tard [14]).
Voici ce qui arrive quand on rêve un peu trop aux belles brunes… Illustration par « Cloclo » du combat du 17 mai 1943 à
l’issue duquel il déposera sa première revendication de victoire. On peut noter que l’insigne du pélican est également peint
du côté droit du capot-moteur. (EC 1/30 « Alsace » via Bertrand Hugot)
16
Supermarine Spitfire Mk IXA « NL-B » du Sgt Pierre Clostermann, No 341 Sqn,
Biggin Hill juin 1943.
lance dans un virage désespéré. Dans l’air froissé sauve ; dépassé par le duo, il tire l’ailier à bout por-
par le bout de ses ailes, deux fins filets blancs de tant entre Saint-Pol et Mardyck. Il est 18h45, Pierre
condensation se forment… Soudain le Focke Wulf Clostermann vient de remporter sa troisième victoire
éclate comme une grenade ! Un grand éblouisse- confirmée [18]. Hélas, malgré les bons résultats
ment, un nuage noir et les débris voltigent autour de l’escadron au cours de cette mêlée générale –
de mon avion… Le moteur tombe comme une boule capitaine Boudier : un Fw 190 sûr, sous-lieutenant
de feu. Une des ailes arrachées par la déflagration Laurent : un Fw 190 probable et un endomma-
descend plus lentement, virevoltant sur elle-même, gé, aspirant Buiron : un Fw 109 endommagé –, il
[17] « Le Grand Cirque 2000 montrant alternativement son intrados jaune pâle et manque le sergent Magrot et surtout le commandant
», éd. Flammarion 2001. son extrados vert olive [17]… Mouchotte qu’on ne reverra jamais vivant.
[18] La 3./JG 26 perd le Fw
190 A-5 W.Nr. 152532 écrasé
La disparition du comman- Au retour à Biggin Hill le commandant Bernard
à Saint-Nicolas et la 5./JG 26
Dupérier [19], ancien chef du No 340 Sqn « Île de
le Fw 190 A-4 W.Nr. 142379 « dant Mouchotte France » qui vole en surnuméraire au 341e, met
5 noir » (pilote Uffz. Heinrich
Krieg) tombé 2 km au sud de immédiatement aux arrêts Clostermann pour avoir
Saint-Venant après combat La carrière du futur as vient de démarrer sur les cha- « abandonné son leader ». Également suspendu de
avec des Spitfire. peaux de roue... Le 25 août, Mouchotte qui apprécie
[19] Nom de guerre du ba- ce jeune sergent-chef extraverti et plein d’allant fait
ron Bernard Sternberg de de lui son équipier lors d’une « reconnaissance mé-
Armella, qui terminera la téorologique » très spéciale, puisqu’elle consiste à
guerre avec 7 victoires aé- détecter dans le secteur de Sommery le train chargé
riennes sûres, 1 probable et de chars Tigre d’une brigade blindée allemande. Les
4 avions endommagés.
deux hommes trouvent bien le train qu’ils attaquent
en rase-mottes, mais aussi la Flak qui manque de
peu de descendre « Cloclo ». Deux jours plus tard,
Pierre ignore qu’il décolle pour ce qui sera sa der-
nière mission en formation au No 341 Squadron,
une escorte de B-17 de la 8th Air Force (Ramrod 8)
partant pilonner l’ouvrage spécial de Watten, un site
de lancement de V1, au nord de Saint-Omer. Il est
René Mouchotte et le W/Cdr de nouveau l’ailier du commandant Mouchotte.
« Al » Deere, commandant du
Wing de Biggin Hill.
La chasse allemande, plutôt tranquille depuis
quelques semaines, intervient cette fois en force
alors que les Spitfire volent à 5500 mètres, l’alti-
tude critique du changement automatique d’étage
de leurs compresseurs. Alors que son chef exécute
un virage serré très cabré pour faire face aux Focke-
Wulf des JG 2 et 26, le moteur de « Cloclo » coupe
net. Séparé du reste de sa formation, il part en perte
de vitesse et ne peut relancer le Merlin que mille
Le Fw 190 abattu par mètres plus bas, au beau milieu des Fw 190 dont
Clostermann le 27 août 1943. deux tentent de lui « faire la peau ». Sa lenteur le
17
Cet appareil sera abattu par la Flak le 1er juillet 1944, son pilote (F/Lt H.J. Cleary) tué.
Cet appareil sera accidenté par le P/O Pierre Clostermann le 7 mars ; il rejoindra après réparations la Bomber Support Development
Unit le 11 décembre 1944 et sera enfin livré au Portugal en juin 1947.
20
Les pilotes du No 602 Sqn à leur retour à Detling fin mars
1944. Le S/Ldr Max Sutherland est le second en partant de
la gauche, avec derrière lui le commandant du « A » Flight
Ken Charney. Derrière le canon d’aile du Spitfire LF IX,
Jacques Remlinger ; assis nonchalamment contre le cockpit,
Pierre Clostermann.
(No 602 Sqn)
Supermarine Spitfire LF IX « LO-D » (MH526) du P/O Pierre Clostermann, No 602 Sqn, Ford 6 juin 1944.
Affecté au 602e en octobre 1943, cet avion ne quittera l’escadron qu’un an plus tard. Il sera livré à l’Italie en juin 1947.
22
Le Spitfire LF IX MJ276 jours du débarquement n’entraînent qu’une faible mion sous lequel il s’était réfugié était chargé d’obus
« LO-C » posé en urgence par réaction de la Luftwaffe, Pierre et Jacques décident de 20 mm ! Le lendemain matin, c’est la panique
le F/O G.L. Robinson le 15 le 15 juin d’aller mitrailler l’aérodrome de Saint-André générale quand une quinzaine de Fw 190 et de Bf
juin 1944 sur l’ALG A.6 de
de l’Eure, à une trentaine de kilomètres au sud-est de 109 passent au-dessus du terrain, sans pouvoir être
La Londe, un terrain avancé
construit par les Américains Paris. « Max » Sutherland accepte de leur laisser carte rattrapés malgré le décollage en urgence de tous les
au nord-est de Sainte-Mère- blanche, même si ce n’est pas très réglementaire… appareils disponibles. De retour à Ford dans la jour-
Église. Au premier plan à che- Partis à 10h57 selon leur rapport de combat, les deux née, il prend pour la première fois les commandes
val, le Lt Herbert J. Moore de hommes surgissent au-dessus du terrain grouillant du MJ586 « LO-D » qui va devenir jusqu’à la fin de
la 9th Air Force. L’avion arbore d’appareils à 11h40. Un Bf 109 est justement en train son tour d’opérations son nouveau Spitfire person-
24 missions de bombardement de se poser, que Clostermann abat aussitôt au sud de nel. Le 17, c’est avec lui qu’il effectue une ultime
peintes devant le pare-brise. la piste principale [25]. De son côté Remlinger détruit sortie de bombardement en piqué à l’est de Fruges,
(USNA)
deux He 111 au sol, dont un « probable », malgré dans le Pas-de-Calais. Le débarquement ayant plei-
[25] Sans doute le Bf 109 une Flak désormais déchaînée. Ce sont les premières nement réussi, les missions commencent à se diver-
G-6 W.Nr. 163609 « 3 jaune » revendications du No 602 Sqn depuis le Jour-J ! Les sifier et une de ses deux sorties du 18 juin consiste à
du Stab JG 3 (Ofhr. Alfred autorités vont fermer les yeux sur cette incartade qui escorter 54 bombardiers Mitchell de la RAF qui vont
Rossmeissl parachuté blessé) leur apporte la confirmation que les Allemands font attaquer un dépôt de munitions au nord-ouest de
tombé aux Andelys, 31 km au bien parvenir des renforts sur le « front d’invasion ». Le Bourg.
nord-est d’Évreux.
[26] Bf 109 G-6 W.Nr. 412681 Pierre peut enfin fouler le sol français dans la soirée, Le 24 juin, « Cloclo » se pose de nouveau en
« 2 blanc » de la 1./JG 27 (pi-
lorsqu’il se pose avec le NH345 sur le terrain avancé France (sur l’ALG B.9 de Lantheuil) à l’issue de sa
lote Lt. Siegfried Günthert tué)
tombé dans le secteur de Caen. de Bazenville (ALG B.2). Il regrette vite d’avoir pour patrouille. Le 25 à l’aube, tandis qu’on ravitaille son
l’occasion mis son uniforme de sortie tant la piste appareil pour la première sortie, il a la satisfaction
Un Bf 109 G abattu par un dégage de poussière et passe la nuit à la belle étoile, de voir un Spitfire norvégien descendre un « 109 »
chasseur allié en juin 1944. inconfortablement salué par les bombes allemandes à proximité du terrain… Son vainqueur est le W/
(USNA) dont l’une le rate de peu… Heureusement, car le ca- Cdr George Keefer, commandant du No 126 Wing
RCAF. Pierre l’imite dès le 26 au départ de Longues
(ALG B.11), le terrain sur lequel vient de s’installer
le No 602 Sqn : Volant comme 1 Bleu, j’ai décollé
en alerte vers 11h10. J’ai immédiatement grimpé à
travers les nuages (8-10/10e entre 600 et 2100 m).
Immédiatement un Me 109 a fait une passe frontale
sur moi. J’ai tiré mais l’ai raté. Je suis parti patrouil-
ler au nord de Caen. J’ai vu 4 Me 109 sous moi à
travers un trou dans les nuages. J’ai tiré sur celui
de gauche, ouvrant le feu avec une déflection de
15° et me rapprochant rapidement. À la seconde
rafale mes coups ont porté sur l’aile gauche, avec
pour effet que le canon sous l’aile est tombé. L’a/e
(avion ennemi, NdA) a grimpé sec dans un nuage en
lâchant une épaisse fumée noire. Je l’ai suivi, tirant
sur les vagues contours de l’appareil ennemi. L’a/e
est subitement passé sur le dos (à 1000 m dans les
nuages) et a piqué en perdant des pièces [26].
Missions journalières à
mie : À peine arrivé au-dessus de Caen-Carpiquet, nom sera celui qui reviendra le plus souvent dans Longues-sur-Mer (ALG B.11),
j’ai été engagé par 4 Focke Wulf 190 dont le chef l’ORB du No 602 Squadron au chapitre des avions un terrain avancé occupé par
le No 602 Sqn du 25 juin au
de patrouille m’a attaqué en chandelle par en des- abattus…
12 août 1944. Pour damer la
sous. J’ai fait face, ouvrant le feu à 800 mètres d’une piste, une jeep tire un rouleau
rafale continue jusqu’à ce que la portée soit réduite Le 28 juin, « Cloclo » réalise sur le MJ586 deux agricole alourdi par deux
à 40 mètres. Une série d’explosions s’est produite missions dont il mélange un peu les détails dans son bombes de 227 kg. Au volant
sur le bord d’attaque de l’aile gauche du FW. Le ca- logbook… Lors de la première, une reconnaissance le F/O Dudley Osbourne,
pot du moteur s’est détaché, fracassant le gouver- armée entre Caen et Falaise entre 11h30 et 12h25, contrôleur aérien, accompagné
nail de direction. L’a/e est il mitraille trois camions de des P/O J.W. Scott au premier
entré en vrille et malgré les
efforts apparents du pilote
« Le capot du moteur la Wehrmacht, une magni-
fique voiture d’état-major
plan et C.A. Rice à droite,
deux pilotes australiens du No
453 Sqn. Le Spitfire LF IX
s’est écrasé près du hangar
sud-ouest de l’aérodrome.
du FW s’est détaché, dont les officiers s’épar-
pillent dans un fossé et
« LO-D » à gauche est le MJ586
de Clostermann, le « LO-B »
J’ai réussi à me débarras-
ser des trois autres. Si son
fracassant le gouvernail enfin un QG allemand bien
camouflé dans les arbres.
chargé d’une bombe qui
décolle au fond à droite étant le
Bf 109 demeurera « pro-
bable », le Fw 190 va lui être
de direction » Lors de la seconde, une
reconnaissance armée dans
MK624 sur lequel Pierre a volé
à quatre reprises au mois de
rapidement confirmé comme sa cinquième victoire mai précédent. On notera que
le secteur Argentan – Bernay entre 18h50 et 19h50,
la « tour de contrôle » improvi-
aérienne. Pierre Clostermann fait désormais partie il mitraille encore deux camions puis attaque trois sée n’est autre qu’une guérite
du clan très fermé des « as » et il ne va pas s’arrêter Fw 190. Il en accroche un en particulier, l’assassine de sentinelle repeinte !
en si bon chemin puisqu’à partir de cette date, son mais il se file dans les nuages. Cet appareil qui n’est (IWM)
24
Les Spitfire LF IX du No 602 pas mentionné dans l’ORB du No 602 Sqn lui sera son erreur, il replonge dans la couverture nuageuse
Sqn décollant de Longues crédité « probable » ; il s’agit peut-être du Fw 190 pendant cinq minutes puis pique pour rentrer à sa
dans un nuage de poussière. A-7 W.Nr. 340026 « 11 jaune » de la 1./JG 11 (pilote base. Trois minutes plus tard, il aperçoit un avion
(coll. Chris Thomas) Uffz. Hans Jaeger tué) qui est tombé à Madré ou à volant au ras du sol en direction du Sud-Est le long
Villaines-la-Juhel, au sud-ouest d’Argentan. d’une route. Lorsqu’il s’en rapproche, il constate qu’il
s’agit d’un Fw 190 gris clair, à croix noires et portant
Le 29 juin en début de soirée, treize Spitfire LF une barre rouge sur la queue. Il lui tire plein arrière
IX du 602e partent effectuer une reconnaissance une courte rafale entre 270 et 90 m, à la suite de
armée dans le secteur de Rouen. Pris à partie par quoi le monoplace effectue un atterrissage forcé au
la Flak, notre officier s’égare dans les nuages à nord de Rouen et prend feu. C’est sa sixième vic-
bord de son « LO-D ». Émergeant seul du coton, toire aérienne ! Constatant que sa cinémitrailleuse
il repère un groupe de huit Fw 190 qu’il prend tout n’a pas fonctionné, l’as refait un passage sur l’épave
d’abord pour des appareils alliés. S’apercevant de secouée d’explosions, au cours duquel il prend dix
Joli profil du MJ586 « LO-D » en juillet 1944. Le chasseur sera généralement piloté par le F/O Bruce Oliver après le retrait des opérations de Clostermann.
(coll. Chris Thomas)
saient brusquement pour éviter le sol. Mon canon stade de dépression nerveuse où l’on n’a plus peur
En bas à droite : gauche s’est enrayé et je suis rentré à la base sous de rien, où l’on n’a plus conscience du danger. C’est
dans l’habitacle d’un Spitfire les nuages. J’ai vu deux appareils brûlant au sol 8 aussi le moment où les réflexes n’existent plus, où
LF IX en Normandie, à 16 km au sud de Cabourg, pas très loin du canal l’on pilote mécaniquement dans une sorte de béati-
« Cloclo » qui porte ici son de l’Orne. Ma cinémitrailleuse fonctionnant, j’ai pris tude artificielle produite par la benzédrine [28] et la
uniforme français apparait les
5 secondes de film. PS. Des observateurs au sol ont fatigue… C’est la recette pour se faire tuer. En tenant
traits marqués.
vu deux avions s’écraser lors du combat. compte du fait que l’as a oublié de noter dans son
logbook deux patrouilles les 29 juin et 2 juillet 1944
Les vols ininterrompus depuis un mois l’ont pour- – ce qui en dit long sur son état –, Pierre a accompli
Gros plan sur le tableau de
chasse de Pierre Clostermann
tant usé, aussi bien nerveusement que physique- lors de son tour d’opérations 158 sorties offensives
qui détaille l’ensemble de ses ment. Le lendemain, son tour terminé, il est retiré dont 3 de nuit consistant pour moitié en escortes de
revendications, moins celle du des opérations... Après avoir perdu huit kilos, il est bombardiers ; le reste se répartissant en Sweeps,
16 octobre 1943 qui ne lui a au bord de l’épuisement et ce retrait arrive à point bombardements en piqué, reconnaissances armées,
pas été homologuée. nommé : Cela me fait peine de quitter mon esca- reconnaissances météo, chasses libres et Rangers.
(coll. Chris Thomas) drille, surtout maintenant, mais je suis arrivé à ce Il a aussi effectué 25 sorties défensives dont 2 de
27
Supermarine Spitfire LF IX « LO-D » (MJ586) du P/O Pierre Clostermann, No 602 Sqn, Longues-sur-Mer (ALG B.11) 2 juillet 1944.
Arrivé à l’escadron le 15 juin 1944, cet avion sera transféré le 16 août suivant à l’état-major du 127e Wing.
nuit consistant en décollages sur alerte, accumulant 31 juillet avant de disparaître dans la Manche le 29 [28] La Benzedrine, large-
au total 310 heures et 20 minutes de vols de guerre. août. Jacques Remlinger, quant à lui, termine son ment utilisée par les deux
propre tour d’opérations dans un tourbillon d’at- camps durant la Seconde
Tandis qu’il patiente en attendant le bateau qui va taques au sol, sa grande spécialité. Guerre mondiale, est une
amphétamine destinée à
le reconduire en Grande-Bretagne pour y poursuivre
éviter l’endormissement.
un repos bien mérité, Ronald Sutherland qui s’est Le 7 juillet 1944 le Marshal Charles Portal, com- Si elle accroît les capacités
blessé en jeep à l’issue d’un repas normand un peu mandant de la Royal Air Force, vient rendre visite physiques et psychiques, elle
trop bien arrosé avec les trois Français de l’esca- aux unités basées à Bazenville en compagnie du provoque aussi une augmen-
dron est temporairement remplacé par le Squadron ministre de l’Air britannique Sir Archibald Sinclair. tation de la confiance en soi,
Leader Johannes Le Roux, un sud-africain enragé Ce dernier remet à l’aspirant Pierre Clostermann la une excitation générale, une
qui revendiquera huit chasseurs allemands du 15 au Distinguished Flying Cross qui lui a été décernée anorexie et un état dépres-
sif à court terme. Ses effets
pour avoir détruit « au moins 11 avions ennemis » –
sur la santé étant désastreux
on notera au passage que pour la RAF, seuls les avi- à moyen et long terme, elle
ons endommagés sont considérés comme douteux... sera interdite en 1959.
Dans la soirée, « Cloclo » qui a enfin reçu son return
ticket embarque en compagnie du F/Lt Frank Wooley
à bord de la barge de transport de tanks LCT 322
pour traverser la Manche ; les deux hommes seront
suivis au début du mois d’août par Jacques qui aura
eu l’occasion d’ajouter à son palmarès, le 16 juillet,
un Fw 190 endommagé en combat aérien au nord-
ouest de Bayeux.
Fiche technique :
Tempest Mk V (février 1945)
combat aérien et du vol en rase-mottes, il s’étonne sur le EJ689 le 25 février (tirs air-sol et vols sur la
lui-même en constatant que les Typhoon peuvent campagne à basse altitude) sont suivies le lendemain
[30] Clostermann a successi-
tourner (« Typhoons can turn !! »). Deux sorties en d’une dernière, sur le NV918 « 7S-F », pour s’entraî-
vement volé à la No 55 OTU
sur les Typhoon codés L, N,
formation les 13 et 14 février clôturent son séjour ner à la lecture de carte. Ces appareils que l’on dé-
B, Z et Y. [30]. Au bout de 4 h 30 min de vol, il est prêt à signe parfois comme des Series 2 correspondent en
l’étape suivante : le Hawker Tempest… fait aux trois derniers lots de production portant des
serials en EJ, NV et SN ; ils diffèrent des Series 1 –
Pierre passe alors à la No 83 Group Support Unit, en fait des avions du premier lot portant des serials
Les deux premiers un « pool » de pilotes et d’avions prêts à rempla- en JN – par leur moteur Napier Sabre IIB légèrement
Tempest sur lesquels Pierre
cer au pied levé les pertes des unités dépendantes plus puissant, leurs canons Hispano Mk V à tubes
Clostermann a volé en février
1945 : le EJ760 « 7S-H » (au du 83e Group. C’est sur la base de Dunsfold, dans courts, leur structure de fuselage arrière renforcée,
second plan) et le NV918 le Surrey, qu’il effectue ses deux premiers vols sur leurs nouveaux ailerons et la possibilité d’emporter
« 7S-F ». Il effectuera au total Tempest Mk V le 21 février 1945, à bord des EJ760 deux réservoirs supplémentaires largables de 45
cinq vols, soit 5 h 20 min, à la « 7S-H » et EJ689 « 7S-L ». Le chasseur lui plaît gallons chacun, soit 204 litres. Malgré un poids en
No 83 GSU de Dunsfold. (coll. d’entrée comme le montre son seul commentaire : charge de presque cinq tonnes, les performances à
Chris Thomas) Avion au poil. Deux nouvelles sorties d’entraînement basse et moyenne altitude du Tempest Mk V sont
31
Hawker Tempest Mk V « 7S-H » (EJ760) de la No 83 Group Support Unit, Dunsfold février 1945.
Livré à la No 83 GSU le 29 septembre 1944, cet appareil sera transféré en août 1945 à la No 5 School of Technical Training
comme cellule d’instruction 5703M.
stupéfiantes puisqu’il atteint 700 km/h à 5800 m ! compte à l’époque 12 victoires sûres plus 2 au sol
À titre d’exemple, les P-51D Mustang et Spitfire Mk sur Tempest. Mais il est abattu et capturé le jour
XIV volent à peine 670 km/h à cette hauteur car ses même de l’arrivée de Clostermann ! Son successeur
célèbres rivaux ont tous deux été optimisés pour la va être le commandant du « B » Flight, l’as « Jesse »
haute altitude… Hibbert (5 victoires) qui accueille avec plaisir le ren-
fort que constitue Pierre – a Frenchman of conside-
Un passage très bref rable experience selon l’ORB du 274e –, affecté le 1er
mars au « B » Flight en tant que Flight Lieutenant
au No 274 Sqn (capitaine) surnuméraire. Il y arrive sept jours seu-
lement après un autre pilote français, le F/Lt Régis
Le 28 février 1945, le jour même de ses 24 ans, Deleuze [31], tué par la Flak le 25 février à sa pre-
« Cloclo » rejoint enfin le 122e Wing sur la base de mière mission… Un troisième et dernier Français les
Volkel en Hollande. Cette escadre dépendant du No avait précédés sur Tempest au No 274 Sqn : le com-
83 Group comprend cinq Squadrons de Tempest mandant Jean Vaissier, hélas grièvement blessé au Le F/Lt Pierre Clostermann à
Mk V (No 3, 56, 80, 274 et 486) plus un de Spitfire décollage le 8 décembre 1944. son arrivée au No 274 Sqn en
Mk XIV, le No 41 qui la quittera dès le 7 mars. Le mars 1945.
commandant administratif du Wing est le Group Le 2 mars, « Cloclo » effectue une reconnaissance (R.V. Denis via Chris Thomas)
Captain Patrick G. Jameson, que seconde en tant de secteur en compagnie du F/Lt D.M. Nicholls, puis
qu’officier volant le Wing Commander Richard E.P. il participe à sa première sortie sur l’Allemagne : un
Brooker titulaire de 7 victoires aériennes sûres et 2 grand Sweep sur le secteur Rheine – Osnabrück à [31] Deleuze avait abattu 8
probables. « L’as des as » du 122e Wing est le S/Ldr bord de l’avion de son Squadron Leader, le NV722 V1 au cours du second se-
David Fairbanks, surnommé « la terreur du Rhin », codé JJ-M. Les 24 Tempest des No 3, 80 et 274 Sqn mestre 1944.
un pilote américain qui commande le No 274 Sqn et rentrent bredouilles, Pierre ayant été le seul à aper-
Une autre vue du Tempest « 7S-H » à Dunsfold. Pour l’anecdote, c’est sur cet aérodrome que sont toujours tournés
la plupart des essais automobiles de la célèbre série télévisée « Top Gear »…
(coll. Chris Thomas)
32
Monture habituelle du
S/Ldr Hibert, le Tempest
Mk V NV722 « JJ-M » sera
piloté à deux reprises par
Clostermann, en particulier
lors de sa première sortie sur
l’Allemagne le 2 mars 1945.
(coll. Chris Thomas)
cevoir trois Bf 109 qui se sont très vite échappés il s’envole seul à bord du Tempest « JJ-W » (EJ893)
[32] Cette victoire probable dans les nuages. L’ORB du No 274 Squadron résume pour tester ses armes dans la région de Nordhorn.
lui sera confirmée deux mois l’opinion générale : le Boche sait bien ce qui est bon La chance est avec lui puisque malgré le temps cou-
plus tard, le 24 mai 1945. pour lui, et ces sorties en masse ne semblent pas vert, il repère au ras du sol quatre Bf 109 en échelon
être propices au moindre incident. Trois jours après, refusé qui se préparent à faire un mauvais parti aux
quatre Typhoon qu’il vient tout juste de croiser. Il
a le temps de tirer trois rafales avec 60 à 40° de
déflection sur le plus proche avant que les autres
ne réagissent. Il sème ses poursuivants dans les
nuages avant de revenir sur les lieux du combat où
il aperçoit sa victime en train de brûler, un parachute
déployé à proximité de l’épave qu’il photographie
Rapport de combat de la pre- à plusieurs reprises pour être certain d’en obtenir
mière victoire de Clostermann l’homologation. Commentant sa victoire, l’ORB du
sur Tempest, qu’il remporte le 274 estime « qu’il a dû se perdre » pour tomber sur
5 mars 1945 en désobéissant quatre Bf 109 vers Hengelo, d’autant qu’il est rentré
aux ordres donnés… « très embêté » à l’idée que son escapade soit consi-
(PRO via Chris Thomas)
dérée comme irrégulière… L’affaire n’ira pas plus loin
pour cette fois.
toute attaque au sol a été interdite aux chasseurs du primer toute mention du résultat de cette mission
122e Wing depuis la perte de « Foob » Fairbanks. Cet dans les ORB du Squadron et du Wing. Le rapport
ordre daté du 1er mars interdit aussi toute pénétra- de combat de Pierre ayant disparu des archives du
tion dans l’espace aérien allemand à des formations Public Records Office – comme tant d’autres – à la
inférieures à seize appareils, ce qui fait que les can- fin des années 80, il est difficile d’en savoir plus sur
non tests se multiplient bizarrement depuis lors... Le ces victoires même si « Jesse » Hibbert en personne
lendemain, Pierre qui effectue justement un essai les a confirmées en contresignant son carnet de vol
d’armement avec le F/O B. Walker entend à la radio sur la ligne où elles sont reprises… Le lendemain,
le contrôle annonçant que des Boches se posent à Pierre ne participe pas au Sweep de l’escadron sur le
Nordhorn. Il abandonne aussitôt son équipier pour triangle Münster – Hamelin – Hamm ; il se contente
se précipiter sur place et voir les deux derniers chas- d’effectuer un cannon test (un vrai, cette fois !) de
seurs allemands rouler au sol à son arrivée, salué 20 min aux abords de Volkel. Le 17 mars, lorsque le
par la Flak ! À son retour, le Squadron Leader lui No 274 Sqn déménage pour rejoindre à Gilze-Rijen
fait aimablement mais fermement remarquer qu’il (B.77) le 135e Wing en manque de Tempest, l’as
commence à prendre un peu trop de liberté avec le n’en fait plus partie : un accord a été trouvé avec Après Bernard Dupérier en
déroulé de ses missions. le commandant du No 56 Sqn, le S/Ldr MacKichan 1943, « Jesse » Hibbert va
qui accepte de le prendre en surnuméraire dans son être le second commandant
Après quatre sorties sans résultat, Clostermann qui « B » Flight sous les ordres du F/Lt Francis MacLeod. d’unité à virer « Cloclo »
de son Squadron
n’a toujours pas d’avion personnel participe dans Mais plus question d’en faire à sa guise ! Du 2 au
à la mi-mars 1945.
l’après-midi du 14 mars à deux Sweeps de seize 15 mars 1945, Pierre Clostermann a accompli onze (coll. Chris Thomas)
Tempest des No 80 et 274 Sqn sur Hanovre puis sur missions de guerre au sein du 274e, plus trois essais
le secteur Osnabrück – Hamm. Lors du second, en- d’armement dont on a vu à quoi ils lui servaient,
tamé à 16h50 sur le « JJ-R » NV660, il fausse com- pour un total de 16 h 30 min de vol.
pagnie à « Jesse » Hibbert en emmenant avec lui ses
ailiers pour aller jeter un œil du côté du terrain de
Wunstorf, 100 km plus à l’Est, où il espère trouver Au No 56 « Punjab » Sqn
des « 109 ». Ne dénichant rien sur place, il décide
de poursuivre vers le Nord quand soudain, à mi- Le 18 mars, aux commandes du Tempest EJ708
chemin de Brême, une trentaine de Messerschmitt « US-W » du F/O William MacLaren, l’as va rendre
Bf 109 leur tombent dessus près de l’aérodrome de visite à ses camarades français du No 145 Wing dont
Hoya ! À l’issue d’une Grosse bagarre avec (les) les Spitfire LF IX et LF XVI sont basés à Schijndel
chasseurs boches, il peut inscrire sur son carnet (B.85), au nord d’Eindhoven. Belle occasion pour
qu’il en assomme trois : un confirmé, un « probably frimer un peu… écrit-il dans « Le Grand Cirque ».
destroyed » [32] et un endommagé, ajoutant que Hélas pour lui, après avoir survolé l’aérodrome en
malgré le renfort d’autres Tempest Nous perdons rase-mottes et à pleine vitesse dans un fracas de
trois types mais le squadron descend 2 D. 2 P. 4 jugement dernier, il oublie de sortir son train à
end. – un D. un P. et un E pour moi. l’atterrissage et n’est sauvé in extremis que grâce
à l’intervention du capitaine Jacques Andrieux, le
Cette fois, c’en est trop ! Fou de rage, Hibbert inter- commandant du No 341 Sqn présent sur la tour de
dit de sortie de groupe « Cloclo » ; et pour être cer- contrôle, qui tire une fusée rouge sous son nez !
tain que l’attitude irresponsable de ce « chien fou » C’est un « Jaco » hilare qui accueille « Cloclo »
ne déteigne pas sur les autres pilotes, il fait sup- nettement moins fier à sa descente d’avion…
34
Le lendemain, Pierre effectue sa première sortie de citerne, deux longs camions chargés de troupes. Je
guerre au 56e, de nouveau sur le EJ708, une escorte détruis un avion de reconnaissance Fieseler 156 et
de Typhoon du No 121 Wing à l’issue de laquelle les j’intercepte une batterie lourde tractée (3 canons de
Tempest « poussent » jusqu’au secteur de Rheine 150 mm) sur laquelle je fais trois passes de mitrail-
où Pierre aperçoit sur la piste huit Messerschmitt lage. Son rapport de combat donne quelques détails
262, les seuls qu’il rencontrera jusqu’à l’armistice. supplémentaires sur sa première victoire au sol : Je
Hélas pour lui, aucun ne décolle pour lui laisser une volais comme Nalgo jaune 3 pour une reconnais-
chance de l’encadrer dans son viseur… sance armée dans le secteur de Münster. Après
avoir attaqué plusieurs objectifs au sol, j’ai vu un
Le 23, l’interdiction des attaques au sol est enfin Fi.156 parqué entre deux maisons à la lisière d’un
levée car la traversée du Rhin par les armées alliées grand terrain herbeux. Trois véhicules d’état-major
doit être lancée le lendemain et ce sont les Tempest camouflés stationnaient à proximité. Le moteur de
du 122e Wing qui sont chargés de la protéger. Il l’A/E tournait. J’ai effectué un long piqué sur une
enchaîne en deux jours cinq missions sans résultat pente faible et j’ai tiré une longue rafale des quatre
en protection de la tête de pont, puis le 26 deux canons. L’A/E a immédiatement pris feu et une
« reconnaissances armées » au cours desquelles jambe du train d’atterrissage s’est effondrée. La flak
il peut détruire sept locomotives et plusieurs véhi- de 20 mm a ouvert le feu depuis le bord du terrain
cules. Le 28 mars, le naturel finit par reprendre le alors que je rompais. Un survol à 1800 m après mon
dessus et Clostermann quitte sa patrouille pratique- attaque m’a montré l’A/E et une des maisons qui
ment dès le départ. Il inscrit dans son carnet de vol : brûlaient. Je revendique un Fi.156 détruit.
L’armée allemande semble en pleine déroute. Les
routes sont littéralement couvertes de véhicules en Plus tard dans l’après-midi, il recommence en
fuite. C’est du massacre, mais on est sonné terrible- abandonnant très tôt la patrouille emmenée par
ment en revanche par la Flak. J’attaque 2 transports MacKichan pour dénicher vers Münster une colonne
de onze Sturmgeschütz III qu’il mitraille aussitôt.
Il constate avec surprise que l’un des blindés, sans
doute effrayé par son attaque, se jette dans un fos-
sé où il se retourne ! Plus tolérant que « Jesse »
Hibbert, « Little Mac » le laisse faire tant que cela
ne met pas en cause la sécurité de ses équipiers…
Le 30, reprenant ses « chasses libres », il écrit : Je
tourne pendant 5 minutes autour du fameux aéro-
drome de Lippstaad [Lippstadt, NdA]. Au sol il y
avait un Arado 234 à réaction et 15 Messerschmitt
109. Le courage m’a manqué. Cela aurait pu être
stupide d’attaquer étant donné la formidable DCA.
Le 31 mars, « Cloclo » touche enfin un avion person-
nel, le serial EJ536 « US-W » aux commandes du-
quel il détruit six locomotives dans le secteur Brême
– Hanovre, rentrant avec un avion dont l’aile droite
commence à prendre feu après avoir été touchée
par la Flak.
Interdiction de rail ! Un
cliché pris par la cinémi-
trailleuse d’un Tempest
de la 2nd Tactical Air Force
lors de l’attaque d’un train
dans le secteur Kassel –
Hamm au printemps 1945.
(IWM)
Le 2 avril, c’est à bord du NV968 « US-G » que l’as Cloppenburg et Ahlhorn. Quand j’ai redressé à 1200
effectue entre 18h10 et 20h00 sa vingt-neuvième m après ma première attaque, j’ai vu deux avions
mission de guerre sur Tempest : Je volais comme ennemis décoller de ce dernier aérodrome, dont la
Nalgo 2 Jaune dans une reconnaissance ar- Flak nous tirait dessus. J’ai prévenu à la radio et j’ai
mée sur le secteur Brême – Hanovre. attaqué, choisissant le second avion ennemi qui ren-
Nous avons attaqué des MET sur la trait son train en grimpant au-dessus de la piste ; je
route principale entre les aérodromes de l’ai attaqué par en dessus et par l’arrière. J’ai tiré
Le Tempest Mk V NV994, le
premier des fameux « JF-E »
de Pierre Clostermann,
immortalisé le 18 avril 1945
par Charles E. Brown depuis
un petit Taylorcraft Auster
de la RAF. On remarque que
la lettre E est plus claire que
le reste du code, ce qui est
logique puisqu’elle n’a été
peinte que quatre jours plus
tôt. Son séjour sur le continent
achevé, le célèbre photographe
rentrera en Grande-Bretagne
le lendemain.
(RAF Museum)
journée (deux Fw 190 abattus par MacKichan et un dant du No 80 Sqn Evan Mackie, mais l’escadron et
par Payton) ne va même pas daigner mentionner le son chef ont remplacé le No 3 en stage à Warmwell
départ du Français, alors qu’il souhaitera la bienve- et Mackie ne rejoindra effectivement l’escadre que
nue à cinq nouveaux pilotes tout en regrettant que le 2 mai 1945. Dans l’intervalle, les divers Squadron
ses rangs se soient fort dégarnis suite à plusieurs Leaders vont se charger de mener le Wing au com-
tours d’opérations terminés et (à) la perte de quatre bat. « Cloclo » va bénéficier en ce qui le concerne de [34] « Cloclo » a accompli au
sous-officiers. plus de liberté en tant que commandant d’escadrille. total 9 h 45 min de vol au No
17 APC de Warmwell, dont 6
Le 19, il emmène dans l’après-midi huit Tempest en
h 25 min d’exercices de tir et
Derniers jours au No 3 Sqn : reconnaissance armée sur Brême et Hambourg, puis de bombardement.
repart en début de soirée mitrailler l’aérodrome de
la légende des Tempest Rotenburg (40 km à l’est de Brême) avec deux volon-
« JF-E » taires, le F/Lt J. Bone et le F/O J.I. Adams. Passant
à travers les tirs de la Flak, le trio se défoule sur
Le No 3 Sqn a la particularité d’avoir détruit à l’été quatre bombardiers quadrimoteurs Heinkel 177 dont
précédent près de 300 V1 grâce à ses Tempest, ce deux leur seront confirmés (on voyait les flammes à
qui place l’unité largement en tête de ce palmarès 40 kilomètres), les deux autres demeurant « proba-
très particulier. L’escadron, commandé par le S/Ldr blement détruits » au sol.
« Bruce » Cole, stationne sur le polygone de tir de
Warmwell où il parfait l’instruction de ses pilotes à Le 20 avril, Pierre conduit en fin de matinée un
l’attaque au sol et au tir aérien. Ses avions ont reçu premier Sweep sans résultat de huit Tempest sur la « Cloclo » s’offre une
sur place des lance-bombes grâce auxquels l’entraî- Baltique. Comme la veille, il enrôle deux volontaires cigarette devant le NV994
nement au bombardement en piqué et en vol rasant pour aller rôder à la nuit tombante dans son secteur après l’atterrissage à Rheine,
à débuté le 4 avec de bons résultats. Clostermann favori. Voici son rapport de combat : Je comman- le 18 avril 1945.
rejoint le Squadron comme commandant du « A » dais la section Filmstar blanc dans une patrouille au (RAF Museum)
Flight où il remplace le F/Lt J.E. McCairns transféré
au No 56 Sqn ; il y réalise son premier vol le 8 avril
sur un Spitfire pour un exercice de tir avec déflec-
tion à l’aide du viseur gyroscopique, puis entame le
lendemain les bombardements sur Tempest. C’est
le 14 qu’il perçoit son appareil personnel, le NV994
« JF-E » avec lequel il effectue jusqu’au 17 avril
quatre séances de tir au canon et une de bombar-
dement en piqué [34]. Le 18 du mois, la formation
quitte Warmwell pour rejoindre le No 122 Wing sur le
continent, non plus à Volkel qui est maintenant trop
éloigné du front, mais à Rheine-Hopsten (B.112)
en Allemagne. Si les lance-bombes ne seront fina-
lement pas utilisés en opération, cet entraînement
à l’attaque au sol va se montrer fort utile dans les
derniers jours de la guerre…
Le « JF-E » NV994 photogra- crépuscule entre Brême et Hambourg, à très basse après ça, je me suis retrouvé à basse altitude au-
phié à Fassberg où le No 122 altitude. Vers 20h30, au SO de Hambourg alors que dessus des docks de Brême en train de chasser un
Wing est venu s’installer le 27
nous volions vers le SO, j’ai aperçu un tir intense de FW 190 tout en étant moi-même pris en chasse par
avril 1945.
DCA légère venant d’une colonne blindée amie der- six autres. Une Flak intense a ouvert le feu depuis
rière nous. Aussitôt d’autres armes de DCA légères le secteur des docks. Après trois minutes d’un com-
ont ouvert le feu sur nous. Il pleuvait fort à ce mo- bat tournoyant confus au cours duquel mon appareil
ment et nous avons dégagé dans des nuages bas a été touché, je me suis retrouvé juste au nord de
vers 250 m. Je suis redes- Brême derrière un FW 190
cendu plus loin et je me suis qui ne semblait pas avoir
retrouvé au milieu de six « Le FW 190 a basculé remarqué ma présence. J’ai
FW 190 qui mitraillaient des ouvert le feu plein arrière à
[35] Vraisemblablement
les Fw 190 D-9 des Uffz.
objectifs au sol. Un combat et est tombé une distance de 370 m et je
général a suivi au milieu de n’ai noté aucun résultat sauf
Erich Schumacher et Joseph
Simmer, de la 7./JG 26, dispa- la Flak légère, auquel une tout droit en feu » que l’avion ennemi a aussi-
rus en soirée le long de l’au- autre formation de six FW tôt fait un atterrissage sur le
toroute Brême – Hambourg 190 s’est jointe. Je me suis retrouvé à environ 250 m ventre. Je l’ai alors mitraillé au sol par deux fois et il
au nord de Soltau. derrière un FW 190, avec une correction de 30° ; j’ai a pris feu. Je revendique deux FW 190 détruits [35].
tiré deux longues rafales et j’ai vu un grand éclair. Le
FW 190 a basculé à environ 30 m et est tombé tout Ces 13e et 14e victoires aériennes, ses dernières,
droit en feu près d’une de nos colonnes blindée. Peu sont les seules remportées par le 122e Wing en
À son retour de blessure début mai 1945, le F/Lt Clostermann s’approprie un des nouveaux Tempest à hélice Rotol, le SN222 identique au SN212
« JF-T » visible ici. On remarque bien la casserole d’hélice plus allongée et moins pointue, de même que les supports transparents des réservoirs
supplémentaires. Spécialement carénés, ceux-ci font l’objet des plus grands soins car ils coûtent une fortune !
(RAF Museum)
40
appareils de la Luftwaffe qui tentent désespérément
d’échapper aux Soviétiques en allant se réfugier au
Danemark…
Le premier des deux rap-
ports de combat soumis par Je commandais Filmstar Squadron dans une re-
Clostermann le 3 mai 1945, connaissance armée, et j’ai été dirigé par Kenway
dans lequel il revendique
sur un aérodrome et une base aéronavale près de
trois Fw 190 peints en noir et
chargés de bombes jaunes. Les Heiligenhafen. J’ai vu approximativement 100 appa-
deux avions « endommagés reils ennemis, pour la plupart sur des slips et au sol.
en fumée » seront requalifiés J’ai attaqué du Sud vers le Nord, touchant 2 BV 138
« probables ». et 1 DO 24 sur un slip. Le DO 24 est tombé dans l’eau
(PRO via Chris Thomas) et s’est brisé. J’ai ensuite coulé un DO 24 amarré à sa
balise. J’ai repris de l’altitude et comme il n’y avait pas
de Flak j’ai décidé d’effectuer une seconde attaque
du Nord vers le Sud. Cette fois j’ai choisi des cibles
[38] Après réparation, le sur l’aérodrome lui-même. J’ai mis des coups au but
SN222 demeurera en service sur 2 AR 234 [lire 232, NdA] et à très courte distance
au No 3 Sqn jusqu’à ce qu’il sur un JU 352. Le JU 352 s’est cassé en deux et son
s’écrase par mauvais temps à aile gauche s’est brisée. J’ai vu en début de matinée
Schwagstorf le 27 juin 1946, du lendemain les deux DO 24 coulés et l’épave du JU
tuant le F/Sgt J.W. Coates.
352. Je revendique deux DO 24 détruits, 1 JU 352 Le 7, c’est Pierre Clostermann en personne qui
détruit, 2 BV 138 endommagés, 2 AR 232 endomma- commande les dix Tempest chargés d’escorter le
gés. Tous au sol ou sur l’eau. Dakota du général Miles Dempsey, commandant de
la Deuxième Armée britannique, vers Copenhague
Le 4 mai, l’as accomplit de nouveau trois missions, où celui-ci va recevoir la reddition officielle des
toujours sur le SN222, emmenant d’abord à l’aube troupes allemandes du secteur. Il a encore la sur-
sept Tempest pour une reconnaissance de convois prise de voir débarquer le 8 mai 1945 à Fassberg
Le 8 mai 1945, sept Me
au cours de laquelle il découvre un croiseur lourd des visiteurs plutôt inattendus : les Messerschmitt
262 se rendent aux forces
britanniques sur la base de allemand et (…) attaque un sous-marin au large de 262 du III./JG 7 emmenés par le Major Wolfgang
Fassberg, parmi lesquels le Kiel. La seconde est une reconnaissance armée qui Späte, un as aux 99 victoires aériennes, venus se
Me 262 A-1a WNr. 111690 « 5 ne donne rien, mais il se venge lors de la dernière en rendre aux forces britanniques afin d’éviter de tom-
jaune » dont « Bruce » Cole et attaquant avec huit Tempest la base aéronavale de ber entre les mains des Soviétiques. Plusieurs jours
« Johnny » Forster examinent Schleswig où il détruit au mouillage deux hydravions d’agapes en commun prouveront que la fraternité
ici la tuyère gauche. Cet avion Dornier 18 (dont l’un en feu) pour son 47e et dernier entre pilotes de chasse n’est pas un vain mot !
est celui du Staffelkäpitan de vol de guerre au 122e Wing. Le F/Lt Longley reven-
la 2./JG 7, l’Oblt. Fritz Stehle
dique de son côté un Bf 110 détruit au sol ainsi qu’un
qui vient de remporter à son
Do 24 détruit et un endommagé sur l’eau, plus deux
L’apprès-guerre et
bord la dernière victoire de la
guerre en abattant un chas- He 115 endommagés, tandis que le W/O W. Malia les homologations
seur russe au nord-ouest de ajoute un BV 138 détruit au mouillage. La guerre
la Tchécoslovaquie. Au fond, se termine dans le secteur car à 18h30, les repré- Le 12 mai, le 122e Wing doit effectuer un vol de
le Me 262 A-1a WNr. 110800 sentants allemands signent l’acte de reddition sans démonstration au-dessus de la base aéronavale
« 7 jaune » de l’Uffz. Günther condition des forces de la Wehrmacht présentes en de Bremerhaven ; Pierre décolle avec un avion de
Engler a déjà été repeint aux Allemagne du Nord, aux Pays-Bas et au Danemark. remplacement car son SN222 a une fuite d’huile
couleurs anglaises ; il sera
Du 19 avril au 4 mai 1945, « Cloclo » n’a effectué [38]. C’est alors que deux des douze Tempest du
endommagé à l’atterrissage
à Lübeck le 29 mai par le en raison de sa blessure que dix missions de guerre No 3 Sqn entrent en collision. L’hélice de l’un d’eux
W/Cdr Warren Schrader, au sein du No 3 Sqn, soit 15 h 25 min de vol. Il ter- cisaille le fuselage de son avion qui tombe en vrille
commandant du No 616 Sqn mine son deuxième tour d’opérations avec un total et ce n’est que par miracle qu’il s’en parachute à
équipé des nouveaux jets général de 230 sorties de guerre en 376 heures et 5 temps. Lorsqu’il arrive hébété à terre, c’est pour
Gloster Meteor Mk III. minutes de vol. constater que le F/Lt W.R. Robertson s’est écra-
41
sé en sautant trop bas du EJ588 « JF-N » tan-
dis que le Sgt W. Campbell est mort dans l’épave
du SN166 « JF-G » (?). Spectacle horrible, écri-
ra-t-il. Je n’ai jamais frôlé la mort d’aussi prêt !
L’as ne vole plus pendant douze jours après ce
dramatique accident, reprenant seulement le
24 mai les commandes de son bon vieux NV994
« JF-E » qu’il baptise Le Grand Charles et fait
orner de ses victoires sous le pare-brise. Le 28,
il effectue un aller-retour à Drope (B.105) pour
y rencontrer l’Air Vice Marshal Harry Broadhurst,
commandant du No 83 Group, qui lui annonce
que le Roi d’Angleterre vient de signer le décret
accordant une barre à sa DFC pour avoir « dé-
truit douze nouveaux avions ennemis ». Je fais
peindre en vitesse la casserole de mon hélice (…)
en rouge vif pour frimer (illégalement !). Sur place,
il peut faire admirer son chasseur aux prisonniers
La guerre est finie, les tenues
des membres du No 3 Sqn
sont plus décontractées…
Deuxième à gauche, le grand
« Bay » Adams (1,88 m).
« Cloclo » fume la pipe car
les cigarettes disponibles à
l’époque étaient infectes ! Au
second rang, toujours le crâne
chauve de « Curly » Walker.
français en cours de rapatriement et repart en « EDM » de l’as Evan D. Mackie. Le 20, « Cloclo »
faisant un décollage « à l’américaine » en leur se rend à Copenhague sur le Messerschmitt Bf 108
[39] Le G/Capt Patrick G. honneur. Taifun « PGJ » [39] pour organiser le transfert du
Jameson, commandant du 122e Wing invité par le roi Christian X de Danemark.
No 122 Wing, apprécie les Le 1er juin, il emmène deux passagers à Drope à
avions allemands puisqu’il bord du Fieseler Storch du No 145 Wing et poursuit Arrivé à Copenhague-Kastrup, Clostermann doit
dispose aussi d’un Ju W34 jusqu’à Paris aux commandes d’un Caudron Goé- faire le 23 juin un aller-retour à Schleswigland
codé PGJ...
land. Neuf jours plus tard, pour la réception du (B.164) malgré un temps dégoutant. Il note : Je
maréchal Joukov par le général Eisenhower et vais chercher de la pénicilline pour un pilote
le maréchal Montgomery, une immense pa- qui a eu un accident hier. Je m’en tire par mi-
Le 14 juin 1945, « Cloclo » rade aérienne de plus de mille avions est or- racle. À Schleswig, j’examine les restes des
effectue un aller-retour ganisée par les alliés au-dessus du GQ amé- avions boches que nous avons attaqués. Le
Fassberg - Drope sur le ricain de Francfort. Pendant 2 h 35 min, meeting du 122e Wing a finalement lieu
Tempest « EDM » (SN228) c’est l’occasion pour Pierre, qui com- dans l’après-midi du 1er juillet au-dessus
personnel du W/Cdr Ops du
mande la Section Jaune du 122e Wing, de l’aérodrome de Kastrup (B.160) noir
122 Wing, Evan D. Mackie.
Codé à ses initiales, l’appareil de « suer sang et eau » à éviter de per- de monde. Mais le temps, de nouveau
de ce grand as néo-zélandais cuter les Mosquito et autres Spitfire qui très mauvais, contraint les appareils à
arbore sur la dérive l’insigne remplissent le ciel autour de lui… Le aller se reposer sur le petit terrain de
du 122 Wing (cf. incrustation). 14, nouvelle visite à ses amis fran- Vaerlose, au nord-ouest de la capitale
(coll. Chris Thomas) çais à Drope, cette fois sur le Tempest danoise, qu’il ne connait pas. Pierre
43
fait une erreur de jugement et « avale » la première Wing, une escadre de reconnaissance canadienne
partie de la piste en herbe ; son avion dont le train équipée de Spitfire RF IX, RP XI et Mk XIV. Le 8 août,
d’atterrissage ne descend qu’à moitié s’écrase sur le le Squadron rejoint finalement à Lübeck le No 124
ventre, quitte la piste et termine dans une rivière, Wing dirigé par le plus grand as de la RAF, le Group
Le second et dernier
le laissant une nouvelle fois choqué mais indemne. Captain « Johnnie » Johnson (41 victoires sûres et 5
« JF-E » NV724 vu sur la
Bien qu’il écrive dans son carnet Mon pauvre probables). Mais les jours du Flight Lieutenant Pierre base de Lüneburg (B.156)
« Grand Charles » est réduit en miettes. Ça me brise Clostermann dans la Royal Air Force sont comptés ; entre le 18 juillet et le 8 août
le cœur, le NV994 sera récupéré par la No 419 R&SU la Seconde Guerre mondiale terminée, l’as qui a 1945, avec les Spitfire Mk
et renvoyé chez le constructeur pour réparations. compris que l’accident du 1er juillet était le dernier XIV du No 39 Wing cana-
avertissement du Destin qui se lassait demande sa dien à l’arrière-plan. L’avion
Le lendemain, « Cloclo » rentre en Angleterre pour démobilisation, qui devient effective le 27 août 1945. n’est pas neuf comme le
s’y choisir à Dunsfold un nouveau « JF-E », le NV724 Il n’aura accompli que deux vols en août, une sortie montrent les flancs du capot
bien encrassés ; il était en
sur lequel il revient à Copenhague le 7 juillet. Deux « d’entraînement avancé » le 2 et enfin un aller-
effet entré en service en
tests les 9 et 13 juillet lui montrent qu’il s’agit d’une retour à Schleswig le 17 pour y rencontrer une der- février 1945 au No 486 Sqn
bonne machine : Bon moteur. Stable en piqué à nière fois l’AVM Broadhurst. avec le code SA-V, qu’il avait
1300 KH mais lent en croisière. Le 18 du mois, il faut quitté le 12 mars pour la No
deux essais au No 3 Sqn pour gagner au milieu d’un De mai 1943 à juillet 1944 et de mars à mai 1945, 151 RU en raison de pro-
orage épouvantable sa nouvelle base de Lunebourg durant ses deux tours d’opérations, Pierre Clostermann blèmes moteur.
(B.156) où l’escadron est rattaché au No 39(Recce) a déposé 50 demandes d’homologation (27 aériennes (coll. Chris Thomas)
44
Probablement le plus célèbre et 23 au sol) auprès des autorités de la Royal Air Force. ses succès signée le 1er novembre 1945 par Harry
des clichés de Hawker Une seule de celle-ci, celle du 16 octobre 1943, ne lui a Broadhurst, désormais officier de l’Air en charge
Tempest ! Le 27 août 1945, pas été accordée. Des 49 qui lui ont été homologuées à de l’administration (AOA) du Fighter Command,
jour de son départ de la
des degrés divers – destroyed, probably destroyed ou comporte à cet égard comme à d’autres un cer-
RAF, Pierre Clostermann
se fait photographier par damaged –, 6 ont été requalifiées (upgraded) dans les tain nombre d’erreurs. Clostermann n’est d’ailleurs
son camarade le F/Lt F.L. deux mois suivant leur obtention : pas un exemple unique. Ainsi Jean Demozay, pre-
Latham sur son nouveau -le 20 août 1944, deux des Fw 190 endommagés le mier grand as « Français Libre » en 1941-1942 : les
« JF-E », le NV724 livré à 2 juillet précédent sont devenus un « détruit » et un Britanniques lui reconnaissent 21 avions détruits dont
l’escadron le 8 juillet précé- « probablement détruit » ; 2 au sol, 3 avions probablement détruits dont 1 au
dent... L’appareil ne porte -le 24 mai 1945, le Bf 109 probable du 14 mars pré- sol et 11 avions endommagés dont 8 au sol ; l’état-
pas l’inscription Le Grand cédent a été confirmé comme « détruit » ; major des FAFL – probablement pour « gonfler » les
Charles mais il a maintenant
-en juin 1945, les deux Fw 190 endommagés au sol résultats obtenus – a transformé dans ses citations
reçu une croix de Lorraine
sur le radiateur. le 3 mai précédent ont été considérés comme « pro- tous ces chiffres en victoires aériennes ! Les auto-
bablement détruits », le Do 24 endommagé sur l’eau rités françaises ne se contentent pas d’amalgamer
étant confirmé « détruit ». les victoires aériennes et les victoires au sol, elles
mélangent aussi bien les succès sûrs et probables
Toutes ses victoires ont été obtenues à titre indivi- en l’air... On peut citer le cas de Jean Maridor, fait
duel, sauf les quatre He 177 du 19 avril 1945 qui ont officier de la Légion d’Honneur à titre posthume le
été détruits en coopération avec le F/Lt J. Bone et 30 décembre 1944 pour « sept victoires aériennes et
le F/O J.I. Adams. Il a participé à plusieurs missions de nombreux bateaux et autres objectifs détruits »
au cours desquelles des victoires ont été rempor- alors qu’il lui a été homologué par la RAF 4 appareils
tées par d’autres pilotes que lui, mais sans qu’il y ennemis sûrs, 2 probables et 3 endommagés, plus 7
collabore et en reçoive donc le crédit. La liste de V1 détruits en combat aérien.
Hawker Tempest Mk V « JF-E » (NV724) du F/Lt Pierre Clostermann, No 3 Sqn, Lübeck mi-août 1945.
Avion posé sur le ventre par le F/Lt C.E. Hall le 10 novembre 1945 à Fassberg,
le train étant rentré à l’atterrissage.
45
Pour compliquer un peu plus les choses, les auto- plus cette fois que de 19 + 2 – mais au même rang
rités britanniques ne font plus de différence à la fin que de grands as comme Michel Dorance et Camille
de la guerre, dans leurs citations, entre appareils Plubeau qui ont remporté comme lui 14 victoires
détruits en vol et au sol. La RAF avançant sur le aériennes sûres et 4 probables. Il faut cependant
continent européen a en effet demandé à ses chas- noter que seul Demozay a remporté plus de victoires
seurs de détruire tout ce qui circule, en l’air comme individuelles que lui, les autres pilotes ayant établi
au sol, au sein des territoires encore occupés par les une bonne partie de leur palmarès en collaboration
Allemands. Elle imite en cela l’USAAF qui, depuis le avec leurs équipiers.
8 février 1944, a donné l’ordre aux chasseurs de la
8e Air Force de détruire tout appareil ennemi en l’air homme politique,
comme au sol. L’homologation de ces destructions
« terrestres » est une bonne façon d’encourager industriel et écrivain
les pilotes à affronter la redoutable Flak allemande.
Beaucoup d’aviateurs britanniques, particulièrement Revenu en France, le lieutenant Clostermann est
au sein du 122e Wing, vont ainsi ajouter des avi- déçu par la société qu’il y retrouve. Hébergé par Le Lt Pierre Clostermann en
ons détruits ou endommagés au sol à leur palmarès son oncle à Corbeil car ses parents sont encore en officier de la Légion d’Hon-
officiel. La seconde DFC (DFC and bar) attribuée en Afrique australe, il s’octroie trois semaines de pêche neur, un portrait envoyé à ses
mai 1945 au S/Ldr Robert Cole, commandant du No à la truite en remontant la Seine afin de s’habituer parents pour la Noël 1945.
3 Sqn, mentionne ses « six victoires » mais ce pilote en douceur au rythme de la vie civile… Robert Aubry
a en fait obtenu la moitié de ce score au sol ! Le l’emmène passer le réveillon de Noël 1945 chez
F/Lt Harold Longley, lui aussi du No 3 Sqn, rece- des amis dans la Marne. C’est là qu’il rencontre
vra la DFC en juillet 1945 pour « six victoires » qui Jacqueline Renaudat, âgée tout juste de quinze
se répartissent en 3 avions abattus en combat aé- ans. C’est le coup de foudre ! Les deux jeunes gens
rien et 3 appareils détruits en l’air ou sur l’eau. Le se marieront le 24 juin 1947. Le couple aura trois
W/Cdr Evan Mackie, dernier commandant opération- enfants, Jacques, Jean-Pierre et Michel. Mais avant
nel de l’escadre, choisira de ne pas représenter les cela son vieil ami Paul Vachet, l’ancien pilote de l’Aé-
cinq appareils ennemis qu’il a détruits au sol dans ropostale, lui offre l’aventure : trois mois de pêche
les derniers jours de la guerre ; mais il fera quand au gros dans l’Amazone, le début d’une passion qui
même décorer son Tempest avec 25 swastikas cor- ne fera que se renforcer au fil des ans puisqu’il de-
respondant aux 23 victoires aériennes sûres et 2 viendra délégué de la fédération mondiale de pêche
probables qu’il a accumulées depuis 1942, jugeant en mer (IGFA) en 1966. Sur ordre du général de
comme « Cloclo » qu’une victoire « probable » est Gaulle, « Cloclo » est rapatrié en France début 1946
avant tout une victoire « vraisemblable »… afin se porter candidat aux élections législatives en
Alsace. J’avais bien d’autres projets, mais comment
Si l’on prend en compte l’ensemble des victoires qu’il dire non au Général ? écrira-t-il…
a remportées en l’air et au sol, Pierre Clostermann
(23 avions détruits et 9 probablement détruits) est Les aviateurs Français Libres que Charles de Gaulle
en tête du palmarès des pilotes de chasse français pourrait proposer en exemple à la Nation sont hélas
de la Seconde Guerre mondiale devant Marcel Albert de moins en moins nombreux : le Wing Commander
(23 + 3), Jean Demozay (21 + 3), Pierre Le Gloan Max Guedj, un pilote de Mosquito titulaire du pres-
(18 + 2), Louis Delfino (16 + 5), Jacques André (16 tigieux Distinguished Service Order, a été tué au
+ 4), Edmond Marin la Meslée (16 + 4), Roland de combat le 15 janvier 1945 ; le lieutenant-colonel
la Poype (16 + 2) et Roger Sauvage (16 + 1). Si l’on Jean Demozay a disparu sur accident le 19 décembre
ne considère que les victoires aériennes, « Cloclo » 1945 ; le commandant Marcel Albert, Héros de
figure en neuvième position du palmarès derrière l’Union Soviétique, n’a quant à lui pas les faveurs du
les pilotes déjà cités – le score de Demozay n’étant pouvoir car il a combattu aux côtés des communistes
FIAT CR 42 « Falco »
La légende italienne
Troisième partie, par Luigino Caliaro (traduction de Christophe Cony et profils de Thierry Dekker)
Le Ten. Giulio Cesare Giun- Dans la bataille d’Angleterre ! la Luftwaffe sur la Manche. Le 10 septembre 1940
tella fait chauffer le moteur fut donc formé le CAI (Corpo Aereo Italiano) sous
de son FIAT CR 42 « 85-7 » Quelques mois après la fin de la campagne de le commandement du Generale Rino Corso Fou-
(MM56xx) à Ursel en no-
France, Mussolini, pensant que la Grande-Bretagne gier. Celui-ci venait tout juste d’achever une mission
vembre 1940.
(toutes les photos : coll. Giorgio était désormais « dans les cordes », estima que d’étude sur ce front, au terme de laquelle il avait
Apostolo, sauf autre mention) pour des raisons de prestige il était nécessaire que proposé que l’on envoie seulement du personnel
l’Italie apporte sa contribution au combat que l’Alle- italien car les Allemands disposaient de matériels
magne livrait alors au-dessus de l’Angleterre. Malgré mieux adaptés à ce théâtre d’opérations.
[1] Chef d’état-major. l’avis contraire du Capo di Stato Maggiore [1] de la
Regia Aeronautica, le Generale Pricolo, il décida de Mais sa suggestion ne fut pas retenue et le 27
déployer un corps aérien pour opérer aux côtés de septembre furent dévoilées les unités composant
le contingent : le 56° Stormo CT (caccia terrestre), chines des commandants d’escadrille étant pour leur
créé en regroupant le 18° Gruppo de l’ex 3° Stormo part pourvues d’un poste émetteur-récepteur.
avec cinquante biplans CR 42 Falco et le 20° Gruppo
du 51° Stormo, équipé de monoplans FIAT G 50bis Les appareils du contingent italien entamèrent leur [2] Devant être démonté à
Freccia. La force de bombardement se composait transfert dès le 27 septembre mais en raison des leur arrivée.
des bimoteurs FIAT BR 20M Cicogna des 13° et 43° conditions météorologiques les trois escadrilles du
Stormo BT (Bombardamento Terrestre) ainsi que 18° Gruppo (83a, 85a et 95a Sq.) ne purent partir que
des trimoteurs CANT Z 1007bis Alcione de la 172a le 6 octobre, suivies par une partie du personnel au
Squadriglia RST (Ricognizione Strategica Terrestre). sol dans les trois Ca 133 assignés au groupe tandis
Les liaisons et le support logistique étaient réservés que le restant voyageait en train. La première partie
à quelques Caproni Ca 164 et Ca 133, l’effectif total du trajet amena les biplans à Munich, où de nouveau Ci-dessous à gauche :
du CAI se montant à plus de 4500 hommes. Pour le le mauvais temps les bloqua jusqu’au 17. Après une le FIAT « 95-4 » peu après
son arrivée sur le sol belge.
vol de transfert d’Italie vers la Manche, tous les CR escale à Bruxelles le 18 octobre, les FIAT arrivèrent
(coll. Jean-Louis Roba)
42 reçurent un réservoir supplémentaire [2] placé le lendemain à leur destination : Ursel, en Belgique.
derrière le siège du pilote et l’une des deux mitrail- Lors de l’ultime partie du voyage, un officier de la Le CR 42 « 85-12 » du Serg.
leuses de 12,7 mm fut remplacée par une arme de Luftwaffe était présent pour guider les pilotes ita- Cavallar a terminé sur le nez
7,7 mm pour gagner du poids. Quelques appareils liens qui furent extrêmement surpris à leur arrivée son vol de reconnaissance du
furent équipés d’un récepteur radio IMCA, les ma- de constater que le terrain avait été parfaitement secteur en octobre 1940 !
50
camouflé par les Allemands, avec des abris dissimu- seurs eux-mêmes, mais aussi avec les bombardiers
lés au milieu des sapins et des hangars déguisés en qu’ils allaient devoir escorter et les appareils de la
bâtiments de ferme. Luftwaffe. Par contre, les pilotes allemands se mon-
trèrent fort coopératifs en fournissant à leurs collè-
Après quelques vols de reconnaissance du secteur, gues transalpins des cartes aériennes détaillées et
il devint vite évident que le Falco était totalement des informations précieuses sur les tactiques em-
inadapté à ce théâtre d’opérations. L’habitacle ou- ployées par la RAF, tout en distribuant généreuse-
vert créait de nombreux problèmes dont le pire était ment aux équipages des gilets de sauvetage et des
le froid glacial en cette saison ; les instruments dis- effets de vol adaptés – ce qui montrait aussi à quel
ponibles étaient insuffisants pour naviguer au-des- point l’organisation italienne était rudimentaire. Sur
sus de la Manche en hiver ; le pire étant le manque leur suggestion, les CR 42 reçurent également une
de postes radio émetteurs-récepteurs, qui handica- plaque de blindage de 25 kg derrière le siège pour
pait considérablement la coordination entre les chas- protéger le pilote.
Autre vue d’un abri d’Ursel, avec à l’arrière-plan un hangar de réparation maquillé en ferme.
52
Le CR 42 « 95-15 » du Cap.
Gino Lodi, commandant de la
95a Sq., s’apprête à décoller
avec au second plan l’appareil
du Magg. Vosilla, « patron »
du 18° Gruppo.
Filmée par une caméra allemande, cette séquence dramatique montre le retour mouvementé
du FIAT CR 42 « 95-10 » qui s’écrase à Maldeghem le 11 novembre 1940.
(coll. Jean-Louis Roba)
54
FIAT CR 42 Falco MM5701 « 95-13 » du Serg. Pietro Salvadori de la 95a Squadriglia du 18° Gruppo, Ursel novembre 1940.
Appareil contraint à un atterrissage forcé le 11 de ce mois, suite à un problème moteur, sur une plage proche du phare
d’Orfordness dans le Suffolk. Cet avion est aujourd’hui exposé au musée de Hendon.
LES LIAISONS
D ’ É TAT- M A JOR
Par Matthieu Comas (profils de Yann Le Gall)
C’est totalement par hasard À la mobilisation apparaissent, comme prévu par les deux sections vont être équipées de six Maillet et
que nous avons pu trouver les plans, une centaine de sections d’avions esta- six Simoun. La requête est acceptée et les livraisons
ces magnifiques esquisses
fette au sein de l’Armée de l’air [1]. Plusieurs sont débutent depuis Orly et l’EAA 301, mais pas avant
représentant le Maillet 201
n° 12 et un Caudron C.635 directement rattachées aux grands états-majors et novembre 1939. C’est au sein de ces deux unités
Simoun dans leur environne- disposent d’effectifs spécifiques. Deux d’entre elles que les Maillet vont principalement servir [2]. Voici
ment d’opération au groupe nous intéressent particulièrement : la section 1/104, leur histoire, reconstituée avec les quelques pièces
aérien du GQG. Leur auteur rattachée au GQG (Grand quartier général) Air du historiques que nous avons pu rassembler.
est Charles Kiffer (1902-1892), commandant Pélissier, et la section 2/104, rattachée
affichiste de renom travaillant au GQG Terre du capitaine Gaible.
dans les années 30 pour Mau-
rice Chevalier mais aussi pour
Ces deux unités touchent à la mobilisation dix
Georges Guétary, Charles
Trénet, Édith Piaf, etc. Selon Caudron Simoun, mais ceux-ci ne s’avèrent pas
sa biographie, il a été mobilisé totalement adaptés à la tâche demandée. En consé-
dans un service ayant pour quence, le 9 septembre 1939, le général Vuillemin
mission de repeindre et demande au ministre de l’Air la mise à sa disposition
camoufler les avions à Rouen. des douze Maillet 201 jusque-là réceptionnés par le
A l’aune de ces croquis, il est Centre de réception des avions de série (puis des
plus probable que cela a été au dix-huit à venir) afin d’en équiper les sections GQG
Bourget ou à Orly ou ces des-
pour remplacer les avions Simoun actuellement en
sins ont sans doute été réalisés.
(coll. M. Comas) service, dont la visibilité, nulle vers l’arrière est par-
ticulièrement dangereuse pour les vols à proximité
des lignes. Cette demande engage une modification
des tableaux d’effectifs de guerre et officiellement,
[1] Ce sujet sera prochainement traité dans son ensemble et en détail dans AVIONS.
[2] Contrairement à ce qui a pu être régulièrement écrit jusqu’à aujourd’hui, aucun Maillet
201 ne sert donc au sein des écoles en 1940.
57
Les liaisons du GQG Air : de Dès le 22 décembre 1939, dans le cadre de la ratio-
nalisation des éléments de liaison [3], il est envi-
la section 1/104 au groupe sagé la constitution d’un « Groupe aérien du grand
aérien du GQG Air quartier général aérien » dont la création est offi-
ciellement entérinée le 1er février 1940. Son rôle est
À la déclaration de guerre, la section 1/104 – dé- double : mettre en œuvre les moyens nécessaires
diée au GQG Air stationné à Saint-Jean-les-Deux- aux liaisons du GQGA, mais aussi assurer l’entraî-
Jumeaux – s’installe sur le terrain de Coulommiers nement aérien du personnel naviguant affecté ou
avec très vraisemblablement sa dotation initiale de détaché au GQGA. Le groupe est en conséquence
dix Caudron Simoun et de dix pilotes dont le com- organisé en quatre sections. La dissolution des sec-
mandant Jean Pélissier et le lieutenant Antoine tions 4/109 et 7/127 [4] va permettre la constitution
Cuny. Dès le 1er septembre 1939, ses appareils sont des trois premières. La quatrième section est, quant
envoyés pour camouflage à Dugny avant que les à elle, directement issue de la 1/104 dont elle garde
opérations actives ne débutent. Comme on vient les prérogatives et l’effectif plus étoffé. Il en résulte Le Cdt Jean Pélissier, patron de
de le voir, elle subit une première réorganisation fin l’organisation théorique suivante (voir carte) : la section 1/104 puis second du
septembre avec une nouvelle dotation de six Simoun Cdt Peillard au groupe aérien du
et six Maillet 201. Ces derniers n’arrivent pas avant Commandant : Cdt Peillard [5] GQG Air comme patron de la 4e
section. Il a intégré l’aviation en
novembre 1939 et seuls trois numéros sont connus :
1918 après avoir été grièvement
31 (accidenté le 31 décembre 1939) et peut-être les 1re section blessé dans l’infanterie en 1915.
28 et 29 (détruit le 3 décembre 1939 à Vaire par Avions destinés aux liaisons et à l’entraînement du Réserviste au 34e RAO, il prend
le sergent Coulot). L’un des Maillet est par ailleurs général commandant en chef des Forces aériennes, le commandement de la 1/104 à
reversé au lieutenant-colonel René Fonck, l’as des des officiers de son cabinet et des officiers généraux la mobilisation. Il aura un rôle
as alliés durant la Grande Guerre (75 victoires confir- de l’EMG et du bureau du personnel. Un officier na- important dans la Résistance
mées), avant d’être remplacé. On sait malheureuse- viguant : lieutenant Cuny ; deux pilotes. Dotation : comme chef des FFI de Seine-
ment peu de chose de cette période, si ce n’est que trois C.635 Simoun, un MS 230, un Maillet. Station- et-Oise avant de s’opposer à
Rol-Tanguy qui le relèvera de
la 1/104 est épaulé par la section estafette 7/109 nement : Coulommiers.
son commandement. Lt-Col au
qui aurait dû recevoir elle aussi des Maillet, ce qui ne Ministère de l’Air après-guerre,
semble pas avoir été le cas. Jean Pélissier est décédé en 1985.
(coll. SHD-Air)
Le Maillet 201 « 12 » affecté à la 1/104 dont on aperçoit un bout de l’inscription sur la dérive,
puis au GQG Air. On peut remarquer son camouflage zébré, typique de la majorité des Maillet.
L’homme à l’emplanture de l’aile pourrait être le Sgt Fourquez.
(coll. P. Ricco)
Le Caudron C.635 n° 510 du groupe aérien du GQGA, dont il porte la diagonale rouge sur la
dérive. Récupéré par le groupe début mai, ce Simoun porte le camouflage des usines Caudron.
Il a été abandonné en bon état et dans des circonstances inconnues à Bordeaux fin juin 1940.
L’occupant est déjà à l’œuvre pour le mettre à ses couleurs…
(coll. AOMC)
61
Voici un dernier Maillet 201 totalement inédit du groupe aérien du GQGA : le n° 24 codé 17. Stationné à Pierre-Levée, il vole très régulièrement avec le
groupe avant de rejoindre Briare. Le 14 juin, il est replié vers Aulnat par le Cne Étienne de l’État-Major, en passant par Bourges et Châteauroux. Il dispa-
raît ensuite de l’unité, stocké à Clermont. Pris en plein soleil, ce qui a tendance à « brûler » les contrastes, ce cliché permet cependant d’apprécier dans son
ensemble la ligne de l’appareil. Il révèle quelques détails précieux, dont les inscriptions de gouvernail (avec le numéro de série peint au pochoir) et la bande
rouge diagonale tout juste visible sur la dérive. Comme pour le Maillet n° 19 codé 11, on constate qu’il n’y a aucune corrélation entre le numéro tactique de
fuselage et le numéro de l’appareil. (coll. Debever)
65
Maillet 201 309 Dotation initiale. Envoyé en réparation le 13/04/1940. A Aulnat le 18/06/1940
12 Premier vol le 03/03/1940, Accidenté le 07/04/1940. Réparé, réapparait à Briare. 449 Perçu le 05/06/1940. Replié à Francazal
Dernier vol vers Avord le 14/06/1940 Maillet 201
13 Dernier vol le 23/04/1940 à Coulommier. Plus de vol jusqu’à sa réapparition lors 15 Perçu le 05/12/1939. Accidenté le 04/03/1940
du repli le 16/06/1940 vers Aulnat
20 Perçu le 27/11/1939. Abattu le 22/05/1940
14 Dernier vol le 18/04/1940
23 Perçu le 03/12/1939, reversé le 14/05/1940 au Groupement 23
16 Dernier vol le 16/04/1940
26 Perçu le 02/01/1940. Dernier vol le 21/05/1940 vers Berck, touché par la Flak.
17 Stationné à Coulommier. Replié à Aulnat le 16/06/1940 Probablement abandonné à Pierre-Levée
18 Stationné à Coulommier. Replié et abandonné à Avord 28 Perçu le 01/12/1939. Reversé à une date inconnue.
19 Stationné à Pierre-Levée. Replié à Agen le 23/06/1940, codé «11» 29 Vient de la section CFACN. Premier vol le 01/06/1940. Dernier vol le 17/06/1940
21 Stationné à Pierre-Levée. 4e section à Briare. Replié à Aulnat le 16/06/1940 vers Vichy. Sans doute sur place à l’Armistice (accidenté)
29 Accidenté le 03/12/1939 > réparé, présent à la 2/104 (après passage à la section C.635 Simoun
CFACN) le 01/06/1940 67
31 Accidenté le 31/12/1939 139 Mis à dispostion le 18/03/1940. Abandonné à Bordeaux
32 Accidenté le 24/04/1940 à Pierre-Levée. Abandonné par le parc 6/104 214 Dotation initiale
Hanriot 182 331 Dotation initiale. Replié à Aulnat par la 2/104
6 Provient de l’EAP 16 d’Agen. Un vol unique le 22/06/1940. A Agen à l’Armistice Maillet 201
7 Provient de l’EAP 16 d’Agen. Premier vol le 20/06/1940. A Agen à l’Armistice 11 Mis à dispostion le 18/03/1940. Abandonné accidenté à Vichy
13 Provient de l’EAP 16 d’Agen. Deux vols. A Agen à l’Armistice 25 Dotation initiale. Abandonné à ?
17 Provient de l’EAP 16 d’Agen. Deux vols. A Agen à l’Armistice 29 Replié à Vichy par la 2/104
19 Provient de l’EAP 16 d’Agen. Un vol unique le 21/06/1940. A Agen à l’Armistice Luciole
206 Provient de l’EAP 16 d’Agen. Deux vols. A Agen à l’Armistice F-ANTH dotation initiale
226 Provient de l’EAP 16 d’Agen. A Agen à l’Armistice F-AMSI dotation initiale
70
En janvier 1918, les escadrilles d’Armée continuent au nord d’Alano. Cette victoire, d’abord considérée
les missions de reconnaissance photographique, comme probable, va finalement être homologuée par
en collaboration avec des Italiens, sur le massif du le Bulletin de la guerre italien [2]. Un Sopwith 1 A2
mont Grappa et le bassin de l’Asiago. L’aviation du de la Sop 221, en panne de moteur, est le même jour
31e CA a repris contact avec l’ennemi qui s’est re- contraint à un atterrissage forcé à San Vito, près de
tiré de plusieurs kilomètres après la prise du mont Bassano.
Tomba, attaquant les batteries d’artillerie et procé-
dant au relevé photographique des zones conquises. L’aviation de corps d’Armée effectue ses nom-
En voilà un qu’il valait
L’AR 14, escadrille de la 46e DI, et la Sop 206 qui breuses missions habituelles. Dans les rapports quo-
mieux ne pas embêter, en
travaille pour les groupes d’artillerie déployés à tidiens apparait la désignation « Groupement Robin l’air comme au sol ! Le Sgt
Bassano et à Breganza au profit des troupes ita- – Sop. 221 », du nom du général commandant la Ercole Balzac, de la Spa 69,
liennes, vont soutenir leurs attaques en continuant 64e DI, à laquelle est également rattachée la 60e va remporter en Italie deux
les relevés photographiques du plateau, de la vallée Cie d’aérostiers. Ce nom sera utilisé jusqu’à la fin victoires homologuées (plus
de Brenta et de la Grappa, qui seront ensuite fournis du mois de février. L’activité aérienne des Français un avion détruit au sol) ; il en
aux Italiens. L’aviation du 12e CA (AR 22, AR 254 et est tout aussi intense dans les jours qui suivent. ajoutera une troisième sur le
Sop 214) va assurer la surveillance face au plateau C’est à cette période qu’entrent en action, avec des front français le 25 juin 1918.
Boxeur professionnel dans
et participer à l’instruction des troupes italiennes et résultats dévastateurs, les bombardiers allemands
le civil – il a déjà disputé 24
françaises. Les ballons français vont eux aussi être AEG G.IV de la Bogohl 4. Dans la nuit du 1 au er
combats avant la guerre –, ce
très actifs, réglant les tirs des batteries de siège 2 janvier, ces bimoteurs attaquent méthodiquement talentueux poids moyen sera
italiennes et ceux des canons français. Le 12e CA Castelfranco où se trouve le Quartier général fran- plusieurs fois champion de
a jusqu’alors été en instruction en deuxième ligne çais, causant avec plus d’une centaine de bombes la France et accèdera au titre de
mais, à la fin du mois de janvier, il relèvera le 31e mort de vingt personnes ; ils lâchent aussi une ving- champion d’Europe en 1920…
CA en première ligne. La 23e DI va taine de projectiles sur le terrain de (coll. Christophe Cony)
quitter Malo pour le secteur de la Castello di Godego, endommageant
Piave où elle remplacera la 65e DI cinq appareils de la Sop 36 et de
se repliant sur Peschiera, tandis que l’AR 44. Par contre, l’activité des
la 2e DI quittera Sommacampagna avions de reconnaissance et des
pour se positionner dans la région chasseurs ennemis est jugée en Fanion original de la Sop 221
de Malo. Entre les 26 janvier et le décroissante très nette. en Italie.
(coll. Rémy Longetti)
1er février, l’AR 22 déménagera de
Castelgomberto pour Castello di Le 3 janvier, l’AR 22 effectue trois
Godego, le terrain le plus proche de missions avec des observateurs
la Piave et, le 2 février, la 40e compa- de la Sop 214 dont les avions
gnie d’aérostiers s’installera près de sont tous indisponibles (le dernier [2] À juste raison puisque
Montebelluna. d’entre eux, perdu dans la brume, l’appareil abattu est sans
s’est brisé en se posant en cam- doute un Rumpler C.IV de la
Mais revenons-en au début du mois… Le pagne) et dix-sept missions diverses sont réalisées FA(A) 219 (équipage : Uffz. P.
1er janvier 1918, l’Aéronautique d’Armée lance 20 mis- par les deux escadrilles de chasse. Le 4 janvier, en Hildebrandt, blessé et Ltn.d.R.
sions dont une de reconnaissance photographique, se posant à contre-sens à Castello di Godego, le Johannes Weckert, tué) tom-
bé vers Moriago à 12h30 ou
conduisant à un engagement dans l’après-midi. Vers Pomilio PE n° 3981 de la 139a Squadriglia venu de
bien un biplace de la RHBZ 1
14h00, le sergent Ercole Balzac de la Spa 69 s’en San Pietro entre en collision avec le Dorand n° 349 (équipage tué : Ltn.d.R. Karl
prend à un biplace ennemi à 4200 m au-dessus de de l’AR 14. L’avion français est détruit mais l’équi- Koelschtzky et Ltn.d.R. Robert
la région d’Alano di Piave. Il l’attaque à nouveau à page italien, composé du sergente pilote Tremolada Wiegard) tombé sur les Alpes
2800 m et le voit tomber désemparé, probablement et du tenente observateur Guido Aldi, s’en tire vénitiennes.
72
Lizé, commandant l’artillerie de la 10e Armée, alors
qu’il prodiguait les premiers soins à des blessés. Ce
même jour à 14h50 se produisent deux engage-
ments aériens au nord de Grappa, mais sans résul-
tats. Lâché par son moteur en plein brouillard, un
Spad de la Spa 69 est détruit en percutant un arbre
lors d’un atterrissage forcé à Fanzolo et son pilote
est assez sérieusement contusionné.
Joli profil de l’AR 1 n° 366 de l’AR 14 à San Pietro in Gu en janvier 1918. L’insigne de l’escadrille, sur cet avion codé 0 qui doit être celui du
commandant d’unité (le Lt Georges Chardenot), n’est pas de la couleur habituelle.
(coll. Roberto Gentilli)
73
chives du 31e CA reconnaissent non pas une, mais Avril), mentionneront une patrouille de sept avions L’AR n° 441 de l’escadrille 22
deux victoires françaises dans la région de Quero… ennemis auxquels ils ont tenu tête bien qu’ayant eu à Castelgomberto en janvier
Un Dorand de l’AR 44, piloté par le sous-lieutenant (leur) appareil gravement endommagé par le feu de 1918. Cet appareil camouflé y
Bérard avec le sous-lieutenant Angenoust comme l’adversaire. Par contre, un Sopwith de l’escadrille a été convoyé depuis Vérone
le 4 de ce mois par l’Adj Félix
observateur, est sérieusement atteint par la DCA 214 se met en vrille à 200 m d’altitude après son dé-
Fratoni.
ennemie (un éclat ayant percé le réservoir et cassé collage de Castelgomberto et s’écrase au sol. Cette (coll. SHD-Air)
le bord d’attaque) mais il peut revenir à sa base. faute de pilotage coûte la vie à son auteur, le sergent
Paul Lénis, tandis que son observateur le sous-lieute-
L’intense activité aérienne française finit bien sûr par nant Jean Choux est assez grièvement blessé. Enfin,
occasionner des pertes. Le 11 janvier, un avion du un Dorand de l’AR 254 à l’entraînement est brisé au
Groupement Robin – Sop 221 est attaqué par deux cours d’un atterrissage forcé en campagne suite à
monoplaces ennemis rouges et encaisse quinze une panne de moteur, équipage indemne. Le même
coups de mitrailleuses mais il parvient à s’échapper jour à 11h30, l’équipage du Dorand n° 380 de l’AR [3] Équipages : Sgt Dufresne
et son équipage est indemne ; les citations à l’ordre 22 (adjudant Touéry – lieutenant Maudet) ne peut – Sdt Blanchaud, Sgt Plocque
de l’armée reçues plus tard par l’équipage (maré- être rejoint par les deux AR de son escadrille chargés – Lt Thomas, Lt Dezerville –
chal des logis Marcel Meunier et lieutenant Léon de l’escorter. Il part donc seul effectuer sa mission Lt Puisolle.
Ce Sopwith 1 A2 de la Sop
221 a été photographié sur le
terrain de Nove début 1918.
(coll. AUSME)
74
L’AR 1 n° 380 de l’escadrille photographique mais doit rentrer sous la menace parvient parfois à empêcher les appareils de recon-
22 à Castello di Godego vers la de trois avions ennemis ; ses adversaires engagent naissance italiens et français de mener à bien leurs
fin janvier 1918. Attaqué le 11 alors un combat avec un appareil inconnu, combat missions. Le 12 janvier, les chasseurs français par-
du mois par la chasse ennemi, à l’issue duquel un avion non identifié tombe en ticipent à un engagement sans succès sur le mont
cet appareil est sauvé grâce à
flammes. Un des pilotes ennemis est peut-être le Forano. Le même jour, un Sopwith de la Sop 221 a la
l’intervention courageuse d’un
pilote de Sopwith Camel bri- StabFw. Richard Müller de la Flik 15/F autrichienne mauvaise surprise de rencontrer trois Albatros mais
tannique qui y laissera sa vie. qui revendique un Nieuport entre Monte Sprung et il parvient à leur échapper. Trois autres accidents
(coll. Dino Uliana) Fontanelle, mais il n’a pas été possible d’identifier le sont à déplorer dans la semaine du 5 au 12 ; ils
pilote qui s’est sacrifié pour sauver le biplace fran- concernent deux Sopwith de la Sop 36 et de la Sop
çais [4]. 214 ainsi qu’un Nieuport de la N 82. Tous ces appa-
reils sont brisés en se posant en campagne suite
[4] Trois Sopwith Camel du Pendant cette période, la chasse ennemie est par- à une panne de leur moteur Le Rhône 120 HP et
RFC ont été perdus ce jour-là, ticulièrement active entre Asiago et le Grappa et le commandant de l’aéronautique de la Xe Armée se
mais dans d’autres secteurs.
Il est cependant possible que
le Camel B2436 du No 45 Sqn
abattu à Scomigo par l’Oblt.
Josef Loeser (commandant
de la Jasta 39) et dont le
pilote, le 2Lt Douglas W. Ross
a été tué, soit le chasseur que
les Français ont vu s’abattre.
Selon les Britanniques, il opé-
rait en mission d’escorte et
s’est abattu au sud de Fior di
Sopra (au sud de Vittorio).
Touché par la DCA française la N 82 prend feu au sol à San Pietro in Gu en rai- mises à la disposition du commandement de la DCA.
lors de l’attaque du terrain son d’un retour de flammes du moteur ; le pilote, Le 28 janvier, le Bulletin de guerre italien accorde deux
de Castello di Godego, dans l’adjudant Jean Chalambel, est gravement brûlé aux victoires aux Français mais les archives relatives à
la nuit du 25 au 26 janvier
mains et au visage. cette journée sont inexistantes. Fort heureusement,
1918, l’AEG G.IV 1110/16
de la Bogohl 4 (Bosta 21) est les citations obtenues par les vainqueurs permettent
capturé avec son équipage. Dans la nuit du 27, Castello di Godego est à nouveau de reconstituer leur combat... Il apparaît qu’une
Bien qu’il soit ici repeint aux bombardé mais sans dégâts réels. À Castelfranco par patrouille de la N 82, rejointe par une patrouille de
couleurs françaises et entouré contre un dépôt de munitions explose après avoir la 79a Squadriglia, a tout d’abord abattu sur Asiago
d’aviateurs italiens, il sera été frappé. Les bombardements ennemis deviennent un biplace qu’escortaient sept monoplaces (ho-
finalement récupéré par le préoccupants et, à la fin du mois de janvier, deux mologué un mois et demi plus tard à l’adjudant
Royal Flying Corps… compagnies de mitrailleurs arrivent de France et sont Jean Rimbaud comme sa 1re victoire personnelle).
(coll. AUSSMA)
Photographie aérienne de
la zone de Quero, prise par
un appareil de l’AR 44 le 25
janvier 1918.
(coll. Roberto Gentilli)
77
Carnet de vol du Lt Jean Philippe en Italie en janvier 1918.
Comme les autres observateurs de l’AR 22, Philippe a gagné
Castello di Godego dès le 26 du mois, les appareils ainsi que
l’échelon roulant de l’escadrille ne rejoignant ce terrain que
du 30 janvier au 1er février. Dans l’intervalle, les observateurs
de l’AR 22 volent sur des appareils de l’AR 44.
Un Nieuport 120 HP de la N 82 en
vol sur le front alpin début 1918.
(coll. SHD-Air)
78
BULLETIN DE COMMANDE/SOUSCRIPTION
(port compris)
Version imprimée :
AirCrash 2000 - 2009 :( ) x 25€
AirCrash 1990 - 1999 :( ) x 25€
AirCrash 1980 - 1989/1 :( ) x 25€
AirCrash 1980 - 1989/2 :( ) x 25€
AirCrash 1975 :( ) x 25€
AirCrash 1968 :( ) x 25€
BOEING
EA-18G
GROWLER
3 2
Un programme très complexe 17 mai 2005, dépourvu des nacelles fixes ALQ-218
dont il disposera fin mars 2006. Il est rejoint par le
Même si les différences aérodynamiques semblent FA-18E BuNo 165779 codé SD101 spécialisé dans les
de peu d’importance, Boeing s’attache à démontrer essais de flottement et par le FA-18E BuNo 165167
qu’une cellule de Super Hornet peut supporter trois SD213 qui réalise au sol les essais de catapultage et
nacelles ALQ-99 sans difficulté. Du 15 novembre d’appontage avec de multiples charges, même asy-
2001 à août 2002, le premier FA-18F (BuNo 165166) métriques, le Growler devant opérer à des masses
réalise des essais positifs avec les nacelles, plus deux dépassant largement celles des Super Hornet. Pour
bidons, jusqu’à Mach 0,9. Pain béni pour les com- les premiers essais de largage un quatrième appareil
municants qui diffusent à l’envie des photos en vol est utilisé, le FA-18E BuNo 165537 SD100 qui effec-
d’un appareil pas encore commandé ! De quoi leur- tue 14 vols avant que le programme ne s’achève en
rer n’importe quel sénateur ou parlementaire peu juin 2007. Le domaine aérodynamique a été très lar-
au fait des sujets militaires, soit la majorité d’entre gement ouvert en 346 vols sans employer des EA-
eux... Trois Super Hornet, portés plus ou moins au 18G…
standard aérodynamique du Growler, sont affectés à
la flottille d’essais VX-23 des « Salty Dogs » (Chiens Le premier Growler, BuNo 166641, sort d’usine le
Réalisé à partir d’une cellule
Salés) stationnée au NATC de Patuxent River. 3 août 2006 ; il effectue son premier vol le 15 août, de FA-18F (F-134), le proto-
réalisant quelques vols de contrôle avant d’être livré type du EA-18G BuNo 166641
Le premier, le FA-18F BuNo 165875 (F35) codé à la VX-23 le 22 septembre 2006. Il dispose de la (EA-1) décolle pour son pre-
SD120 effectue le premier vol de son programme plupart des équipements électroniques qu’il faut mier vol devant les usines de
d’essais des qualités de vol et de performances le maintenant évaluer. Saint Louis, le 15 août 2006.
82 ACTUALITÉS ACTUALITÉS ACTUALITÉS ACTUALITÉS
La toute première difficulté rencontrée par les ingé- compte des sautes de fréquence des radars adverses.
nieurs de Boeing et de Northrop Grumman reste de La position des radars hostiles émettant du sol est
réaliser un appareil dont l’équipage passe de quatre à calculée par interférométrie, c’est-à-dire en mesurant
deux, même si la plupart du temps le Prowler effectue les différences d’angle de la forme des ondes par rap-
sa mission avec deux NFO (Naval Flight Officers). Le port à la position du Growler en temps réel. La focali-
cœur de l’ICAP III est le récepteur ALQ-218 dont les sation obtenue permet de dépenser peu d’énergie. À
antennes principales sont placées dans des nacelles la place de la soute à canon de la version chasseur,
en bout d’aile, secondées par deux autres placées dont l’EA-18G est dépourvu, on trouve l’ALQ-218, le
Le DD500 largue des leurres à l’avant et à l’arrière du fuselage. Les informations LR700 et l’ALQ-227 de brouillage des communications
ALE-47 au-dessus du champ recueillies sont traitées par un calculateur LR700 ainsi que ses antennes. L’ALQ-218 transmet les infor-
de manœuvres de la NAWS de capable de sélectionner immédiatement le type de mations tactiques sur les quatre écrans du NFO et sur
China Lake. brouillage adapté pour chaque menace, en tenant le seul accordé au pilote.
ACTUALITÉS ACTUALITÉS ACTUALITÉS ACTUALITÉS 83
À gauche :
insigne de la Naval Air
Weapons Station de China
Lake.
la NAS de Whidbey Island dans l’État de Washing- commençant par la VAQ-132. Cette mission se pro-
ton, elle accueille son premier exemplaire le longe jusqu’en avril 2016, époque à laquelle les
9 avril 2007. Il s’agit du second NEA-18G quatorze flottilles sont passées du Prowler
BuNo 166642 codé NJ522 ; il est bientôt au Growler. Simultanément, la VAQ-129
rejoint par le premier EA-18B de produc- touche des officiers pilotes, ou NFO, qui
tion dépourvu de l’électronique offensive, viennent d’assurer un tour dans l’adminis-
le BuNo 166855 NJ551, qui va servir à la tration et reprennent un service en pre- Insigne de la VAQ-129.
familiarisation des futurs pilotes-instruc- mière ligne. Les cursus sont allégés quand
teurs avec leur nouvelle monture. Deux les pilotes ont préalablement volé sur
FA-18F le secondent dans cette tâche. La Super Hornet ou que les NFO ont l’expé-
VAQ-129 reste aussi étroitement associée rience du Prowler.
aux essais. Le 3 juin 2008, le BuNo 166858 NJ550
est le premier exemplaire livré avec une électronique Si la VAQ-129 dispose d’une quarantaine d’EA-
complète. On a vu aussi que le NJ551 participe aux 18G, c’est d’abord pour former de nouveaux équi-
premiers essais en mer fin juillet – début août 2008. pages, tout droit issus des écoles. D’une durée de 52
semaines, les cours débutent par un vol effectué sur maine alors que sur le Prowler son rôle se limitait au
un EA-18G standard équipé de doubles commandes, pilotage. Vu la quantité d’informations à gérer, une
désigné officieusement EA-18GT. Ensuite les élèves coordination parfaite doit régner avec le NFO afin de
pilotes effectuent des vols de familiarisation en com- pouvoir les hiérarchiser très rapidement comme par
pagnie d’un NFO instructeur, avant de se consacrer exemple choisir entre la chasse ou la guerre élec-
à la mission de protection aérienne. L’usage d’un tronique, ce qu’aucun ordinateur ne peut accomplir.
Le 15 juillet 2016, l’EA-18G
radar air-air est une première pour l’élève qui bé-
BuNo 168898 NJ524 s’en- néficie aussi d’heures sur simulateur. Cette mission L’enseignement de la guerre électronique com-
traîne pour la première fois secondaire prend un tiers du temps d’instruction ; mence par des cours d’un niveau élevés, puis par
avec un Rockwell B-1B du le reste est consacré à l’attaque électronique car le des vols en situation sur des bases équipées de mis-
24th BW d’Elsworth AFB. pilote doit pouvoir intervenir activement dans ce do- siles sol-air russes (Ellsworth AFB, Mountain Home
ACTUALITÉS ACTUALITÉS ACTUALITÉS ACTUALITÉS 87
AFB et la NAS Fallon). Enfin l’instruction s’achève par Au total, la VAQ-129 forme annuellement une soixan-
une qualification sur porte-avions qui comporte des taine de pilotes et autant d’EWO parmi lesquels on
appontages nocturnes, une première pour les nou- trouve des équipages australiens dispensés des qualifi-
veaux venus. Quant aux NFO, le parcours pour qu’ils cations sur porte-avions, de même que les quelques of-
deviennent des EWO (Electronic Warfare Officers) ficiers du 390th Electronic Combat Squadron de l’USAF.
est tout aussi long que pour les pilotes. L’appren- Celle-ci souhaite conserver un lien avec le type de mis-
tissage commence par l’étude des cinq écrans de sions assurées par le Growler, mission qui lui avait été
présentation et de leurs commandes et il faut du supprimée par mesure d’économie en juin 1988.
temps pour être capable de jongler sans effort avec
tant de matériel mis à leur disposition... Suivent des À suivre…
cours sur la guerre électronique et l’art de brouiller
les radars ou les communications adverses. Il leur
Bureau of Aeronautics Numbers du Growler
faut aussi bien distinguer la surveillance de l’attaque
électronique que repérer quelle est la menace priori- 166855 à 166858 4
taire pour un groupe volant sur l’objectif. C’est aussi 166893 à 166900 8
l’EWO qui décide de l’emploi des missiles antiradar 166928 à 166946 19
AGM-88E. 168250 à 168274 25
168371 à 168392 22
168765 à 168776 14 À gauche :
l’EA-18G DD531 de la VX-31
168893 à 168904 12 mène des essais de compa-
168931 à 168942 12 tibilité électronique avec le
169124 à 169147 14 F-35C NJ104 de la VFA-101
169148 à 169159 12 Australie au-dessus du désert de Mojave
en août 2014.
169206 à 169220 15
169400 à 169409 10
Ci-contre et ci-dessus :
les Growler NJ512 et NJ5072
de la VAQ-129 lors de qua-
lifications en mer à bord
de l’USS Vinson, le CVN-70,
en juillet 2017.
88
Deux Do 17 P de la 3.(F)/11
portant l’insigne de leur esca-
drille sous l’habitacle.
Lorsque nous nous posâmes, nous percutâmes des nier en faisant barrage. Un Hurricane est endom-
arbres. Je fus éjecté de l’appareil et perdis connais- magé, les autres sont repoussés et le Fernaufklärer
sance. Je souffrais de diverses blessures, fractures peut mener sa mission à bien...
et brûlures et demeurai inconscient six semaines.
Comme je l’appris par les Français, je fus retrouvé Le 2 avril, mésaventure quelque peu semblable
sur les lieux six jours après avoir été abattu. J’entrai pour trois Morane-Saulnier MS.406 du GC II/3 qui
ainsi en captivité le 6 avril à Bourneaubort [com- poursuivent sur Metz des Do 17 protégés par des Bf
prendre Pouru-au-Bois, NdA], à dix kilomètres à l’est 110 ; mais ils font chou blanc sans pouvoir même
de Sedan. Quand je sortis de mon coma, je me trou- obtenir un contact. Un autre bimoteur est poursui-
vais dans un hôpital français, je ne sais où. Le Fw. vi par une seconde patrouille du GC II/3, toujours
Scholz, le radio, avait reçu sept balles dans le ventre sans succès. Finalement, le Cne André Naudy peut
et était décédé dans le même hôpital comme les s’approcher d’un « Do 215 » et enflammer un de
Français me l’ont raconté. Le pilote, l’Uffz. Franke, a ses moteurs après pas moins de sept attaques au
été enterré sur place dans le cimetière civil de Fran- canon. Cet appareil lui sera crédité comme une vic-
cheval. Je suis ainsi le seul survivant de mon équi- toire confirmée. Il doit cependant s’agir d’un Do 17
page. Je n’ai rien à dire de mal en ce qui concerne P de la 4.(F)/121 que l’on signale attaqué près de
mon séjour à l’hôpital. Je fus soigné aussi bien que Pirmasens par des MS.406 du GC I/2 et posé en
possible. urgence sur un moteur à Lahr (équipage indemne,
Altmann est non seulement l’unique survivant mais avion réparé). Un autre Do 17 P, de la 3.(F)/123
également un étonnant miraculé puisque, projeté au cette fois, revient se poser à Hanau avec un blessé à
sol, grièvement blessé et inconscient, il a survécu bord après avoir été endommagé en combat.
pendant six jours en dépit du froid ambiant. On aura Il semble que, désormais, les Do 17 volent dans
noté qu’il avait pris d’office les commandes du Dor- un premier temps en petits groupes, pour bénéficier
nier, les observateurs ayant suivi un entraînement de la protection temporaire de chasseurs, avant de
de base de pilotage dans le cas où il leur faudrait s’égailler vers leurs objectifs.
remplacer peu ou prou leur pilote mis hors combat. La chasse allemande devient de plus en plus agres-
À noter que le pilote, l’Uffz. Otto Franke, est signalé sive. Ce 2 avril, une patrouille de cinq Hurricane des
décédé le 5 avril et le Fw. Karl Scholz le 7 avril. No 1, 85 et 87 Sqn aperçoit un Do 17 isolé et lance
son attaque. Mais plus haut, des Bf 109 E du III./JG
C/ À Kirchgöns, un Do 17 P de la 4.(F)/11 s’écrase 53 veillent. Un combat acharné s’engage sur Saint-
lors d’un vol de nuit probablement suite à un arrêt Avold et un pilote britannique est contraint de se
moteur. L’équipage de trois hommes est tué. parachuter de son Hurricane.
Ce 1er avril, trois Hurricane du No 1 Sqn repèrent un Le 7 avril, un Do 17 P de la 1.(F)/123 est pris à par-
Do 17 de la 3.(F)/11 qui bénéficie d’une imposante tie par la chasse française alors que l’équipage du Lt.
escorte de neuf Bf 110 C du I./ZG 26. Volant 1200 Oswald tente de vérifier les mouvements ferroviaires
mètres plus haut, les Britanniques espèrent bénéfi- autour de la gare de Laon. Une patrouille légère du
cier de leur avantage et piquent. Mais les Zerstörer GC III/6 (S/Lt Villemin et Sgt Gabriel Pimont) at-
les ont repérés et protègent avec efficacité le Dor- taque la première le bimoteur, le poursuivant cepen-
90
Trajet de reconnaissance
pour un Do 17 P de l’Aukl.Gr.
ObdL le 7 avril 1940. Son par-
cours lui fait survoler le sud
de la Belgique et le nord de la
France. Un mois plus tard, les
troupes de terre profiteront
amplement des informations
obtenues grâce à ces clichés.
dant de trop loin pour pouvoir tirer efficacement. Les Le lendemain 8 avril, deux Do 17 P sont détruits
deux chasseurs s’obstinent pourtant, allant jusqu’à dans des accidents. Un appareil de la 3./(F)/123
la limite de leur carburant, ce qui oblige Pimont à se s’écrase à Hanau lors d’un vol de nuit, tuant ses deux
poser en campagne près de Cambrai. C’est sur cette aviateurs, tandis qu’un bimoteur de la 4.(F)/123
ville qu’une patrouille du GC III/2 (A/C Barrio, S/C percute des arbres près de Stommeln (équipage de
René Pizon et S/C Guy Bouttier) prend le relais. Bar- trois hommes tué).
rio attaque en venant du soleil mais son moteur le
lâche et, perdant de la vitesse, il ne peut réitérer son Le 9 avril, lors d’un « vol d’exercice de nuit »,
attaque. Le pilote allemand, le Stfw. Kühhorn, fait un He 111 de la 3./KG 54 s’écrase avec son équi-
piquer son Dornier vers des nuages. Bouttier dont page en se reposant à Quackenbrück. Or, en ce
le collimateur est en panne vide en vain ses char- mois d’avril, la Totenkopfgeschwader est à son tour
geurs. Pizon se montre plus agressif mais le tir précis impliquée dans la « Papierkrieg », ses bombardiers
du mitrailleur allemand, le Fw. Strattmann, frappe à partant larguer des tracts sur Paris, Cherbourg,
plusieurs reprises son appareil, le forçant à revenir Metz, etc. Un équipage aurait été perdu. Proba-
à son aérodrome. Le Dornier, abandonné avec un blement celui-ci puisqu’il s’agit de la seule mention
moteur fumant, sera accordé comme « probable » d’une perte à l’Ouest. Les missions de ce type sur le
aux pilotes français. Mais Kühhorn, volant sur un France semblent souvent avoir été reprises comme
seul moteur, va parvenir à ramener son appareil et « Nachtübungsflug » (exercices de nuit) ce qui per-
ses camarades sans autre mal à Langendiebach. met difficilement de les identifier…
Le point de chute du Do 17
« 6M+AM » abattu par cinq
chasseurs français le 11 avril
1940 près de Metz.
(coll. EC 02.003)
92
L’épave en feu du Ju 88 A-1 l’altitude dans le voisinage de Langres où le chas- à une certaine distance de l’avion, quelques docu-
W.Nr. 681, quelques minutes seur attaquant avait été perdu de vue ; ments et effets personnels étant dérobés par des
après s’être posé sur le ventre -on ne sait toujours pas pourquoi, à ce moment, l’avion civils en dépit de la présence des soldats :
au lieu-dit « Les Drouillards »,
emprunta un cap presque complètement vers le Sud -tous les prisonniers, à l’exception du mitrailleur,
sur la commune d’Ozolles (au
sud-est de Charolles), victime mais il est certain qu’il se posa à 11h30 à Charolles ; l’Uffz. Joachim Adam, avaient effectué quinze à
d’un Bloch 151 du GC III/9 le -dix minutes environ avant cet atterrissage forcé, le vingt vols sur la France, étant par conséquent expé-
20 avril 1940. moteur gauche, peut-être atteint auparavant par le rimentés. Les Français aussi bien que moi-même ne
(coll. Y. Soudit) chasseur, s’arrêta et prit feu ; comprenons dès lors pas leur changement de direc-
-suivant les prisonniers de guerre, ils eurent tout tion. Invités à montrer l’endroit où ils se posèrent, ils
juste le temps d’évacuer l’avion avec leurs effets de désignèrent tous un lieu différent dont aucun n’était
vol contenant certains documents et instruments, en deçà des cent kilomètres ;
lesquels ont été saisis et sont actuellement entre les -suivant une carte capturée intacte, ils effectuaient
mains des autorités françaises ; une mission photographique des objectifs suivants :
-les aviateurs furent alors capturés par des soldats 1) Sarrebourg ; 2) Toul ; 3) Saint-Dizier ; 4) Romilly ;
5) Épinal ; 6) Langres ; 7) Châtillon ; 8) Belfort ; 9)
Besançon ; 10) Dijon ; 11) Châlons-sur-Saône. À
l’exception des n° 5 et 8, tous les points sont mar-
qués au crayon rouge ;
-la Staffel, la n° 121, est à Böblingen depuis no-
vembre. Elle est mixte avec cinq Ju 88 et six Do 17.
Les Ju 88 n’étaient présents que depuis deux mois ;
-tous les prisonniers déclarent que la grande majo-
rité des officiers et aviateurs de Böblingen sont d’ac-
tive. On ne mentionne que deux ou trois réservistes ;
-les prisonniers évoquent avec un peu d’orgueil des
Venu sur place le lendemain, vols météorologiques qu’ils ont effectué récemment
l’Asp Georges Lamouroux sur la France, de nuit, et souvent profondément sur
pose fièrement devant la le pays ;
queue de sa victime. -tous les membres de cet équipage ont combattu en
(coll. Y. Soudit)
Pologne et, à la fin de cette campagne, sont tous
revenus au dépôt de Prenzlau avant de gagner Bö-
blingen en novembre ;
-l’Oblt. Klaus Pritzel, le chef de bord, semble décla-
rer avec assurance qu’à la fin du printemps « Hitler
entreprendrait une grande offensive sur le front occi-
dental ». Pressé de questions, il a dit que le 21 juin
pourrait être la date de cette offensive ;
-les prisonniers étaient d’un bon type allemand ty-
pique des jeunes gens étant dans la Luftwaffe de
93
nos jours. Mais leurs réponses à des questions poli- abandonnent le combat, faute de munitions, laissant
tiques ne montraient pas la même compréhension le Boche en mauvaise posture.
des traditions allemandes et des raisons pour les- Endommagé, le bimoteur codé V4+DA est alors
quelles ils se battaient que celles affichées par les pris à partie sur Visé par trois Gloster Gladiator du
prisonniers de guerre d’il y a vingt-cinq ans. I/I/2 de l’Aé.Mi. Il se pose finalement à Bunde dans
Suspicieux, le narrateur britannique demande que le Limbourg néerlandais. L’équipage est interné aux
l’on vérifie les dires des Allemands selon lesquels Pays-Bas mais un correspondant de guerre présent
ils ont été victimes d’un Morane-Saulnier MS.406 : dans l’appareil décède le lendemain de ses bles-
L’avis des prisonniers relatif à un Morane est faible sures ; il sera inhumé à Maastricht quatre jours plus
et ne doit pas être considéré comme fondé avant tard avec les honneurs militaires. Lors de cette pour-
une enquête plus poussée… suite, le C/C tchèque Vaclav Cukr est contraint de
poser son MS.406 à Rosée (près de Philippeville) où
Le No 1 Sqn connait simultanément un autre en- il est lui aussi interné. Vingt jours plus tard, lors de
gagement lorsque le F/Lt Hanks, le P/O Mould, le l’invasion de la Belgique, il sera renvoyé en France
Sgt Berry et le Sgt Albonico interceptent un He 111 et deviendra un as aux commandes d’un Dewoitine
disposant d’une escorte conséquente fournie par la D.520. Les Français ayant poursuivi le Heinkel pro-
JG 2. Dans le combat qui s’ensuit, les Britanniques fondément sur la Belgique tout en échangeant des
revendiquent le Heinkel et trois « 109 » mais rien ne tirs, une protestation officielle devrait être émise par
permet de confirmer ces « claims ». le gouvernement belge. Cependant, le souvenir de
la mort du Lt Henrard est toujours présent à l’esprit
Un He 111 H-2 du Stab/KG 1, envoyé prendre de la population et l’armée belge a certainement
des photos entre Reims et Paris, est intercepté par compris l’inanité de ces indignations diplomatiques
le GC II/3 comme le décrit le journal de guerre à une époque où le danger d’une guerre de mouve-
de l’escadrille : Samedi 20 avril : jour anniversaire ment se précise sans que l’on puisse faire quelque
du Führer… Le temps aujourd’hui est propice aux chose…
missions aériennes. (…) 09h31. Un avion ennemi Peu après, une seconde patrouille du GC II/3 inter-
laissant derrière lui une grande traînée blanche ap- cepte sur Dunkerque un « Do 215 » qu’elle pour-
paraît à l’horizon. Le décollage de la patrouille est suit en vain jusqu’à Bruxelles. Les belligérants ne se
accéléré. Bientôt le chef de patrouille Poincenot et donnent même plus la peine de feindre de respecter
son équipier Loï prennent le contact avec le Boche l’espace aérien des pays neutres tant la tension est
(8.500 m.) et nous annoncent à la radio un superbe palpable en cette fin avril !
Heinkel 111. Du sol, nous suivons les évolutions de
ces trois avions. Le Boche persiste dans l’exécution De son côté, le Stab III./KG 2 est amputé tempo-
de sa mission ce qui permet au capitaine Clausse rairement d’un appareil lors d’une mission de lar-
de faire décoller une seconde patrouille et de la pla- gage de tracts sur Pont-à-Mousson. Égaré lors de
cer judicieusement à la verticale de Charleroi. Le la nuit du 20 au 21 avril, le Do 17 Z « U5+BD »
Heinkel se voyant poursuivi et après une attaque de franchit la frontière helvétique vers 01h15. L’appareil
Poincenot fait demi-tour ce qui permet à Loï de lui orbite un temps sur Bâle avant de se poser sur l’aé-
couper la route et de se rapprocher. Le Boche conti- rodrome de Birsfelden probablement éclairé en sa
nue à fuir mais au bout de quelques minutes est faveur pour faciliter sa manœuvre. En atterrissant,
intercepté par la patrouille du S/Lt Troyes qui aussi- l’avion est légèrement endommagé mais l’équipage
tôt lui livre combat. La poursuite se prolonge sur le de quatre hommes est sauf. Les aviateurs sont inter-
territoire belge jusqu’à Hasselt. Les quatre Morane nés. Le lendemain, ils refuseront de faire décoller
l’appareil pour le bénéfice des militaires suisses qui Reims lorsque les Curtiss H-75 du S/Lt Warnier et
se passeront néanmoins de leur concours, un pilote du Sgt Tallent surgissent du soleil. Ils ne peuvent
local convoyant sans encombre le bombardier à Dü- être repoussés car la mitrailleuse arrière se bloque.
bendorf. Il y sera repeint aux couleurs de l’aviation Le pilote plaque alors son bimoteur au sol et vole à
suisse puis longuement testé. Si les hommes vont cinq ou six mètres d’altitude, sautant les obstacles
très vite être renvoyés dans le Reich, le « U5+BD » en tous genres qui se présentent devant lui. Les
ne sera retourné que le 19 septembre 1940 à ses chasseurs lâchent finalement prise et le Dornier peut
propriétaires, unique cas de restitution d’un appareil revenir à Langendiebach. Le radio a été légèrement
militaire posé en Suisse neutre lors de la Seconde blessé, une balle ayant arraché son serre-tête et tail-
Guerre mondiale... lé une large estafilade sur son front. Un centimètre
plus avant et il était tué ! Le Staffelkapitän viendra
Le jour suivant, le 21 avril, le Do 17 P « 4U+EH » en personne féliciter l’équipage pour avoir ramené
de la 1.(F)/123 revient très avarié après une ren- l’appareil troué par cent dix impacts...
contre avec une patrouille légère du GC I/5. Le
Dornier piloté par l’Uffz. Hauburg a pour mission de Le 22 avril, nouvelle victoire pour l’Armée de l’Air
photographier les aérodromes dispersés autour de lorsque le GC I/5 attaque un Do 17 P de la 3.(F)/11
En mai 1940,
un aviateur
allemand traver-
sant Neuchâteau
photographiera
la tombe de
l’Uffz. Siegfried
Beisbarth tué à
Rancimont.
Le Do 17 « 7A+BM » de la
4.(F)/121, égaré sur la France,
vient se poser à Tintigny le 25
avril 1940.
FIN
Sources
Et si pour 2018,
vous preniez une résolution culturelle...
- N°227 - Pierre Clostermann : le véritable palmarès du héros du "grand cirque"
- N°226 - Les aigles sauvages de l'armée impériale japonaise
- N°225 - SPÉCIAL LUFTWAFFE
Cultivez l'envie d'apprendre - N°224 - SPÉCIAL AS
en vous ABONNANT. - N°223 - FIAT CR 42 : LA LÉGENDE ITALIENNE
- N°222 - F6F HELLCAT : LA RECONQUÊTE
- N°221 - Blitzkrieg sur la France : la KG 27 en mai-juin 1940
Limitons les INTERMÉDIAIRES - N°220 - 1941-1942 : ruée sur l’Extême-Orient !
- N°219 - No 351 et No 352 (Y) Squadrons : les partisans de la RAF
et disons OUI à la vente en DIRECT - N°218 - FAIREY SWORDFISH LE GARDIEN DE L’ATLANTIQUE.
- N°217 - FRANCE 1943 - LE CRÉPUSCULE DES GÉANTS.
grâce à l’ABONNEMENT. - N°216 - LA FORCE AÉRIENNE SOVIÉTIQUE EN JUIN 44.
- N°215 - 1st AIR COMMANDO GROUP. La terreur des Japonais.
- N°214 - Du LaGG-3 au La-7, un des plus grands as soviétiques témoigne…
Vous ne prenez aucun risque ! - N°213 - L’OGRE DU PACIFIQUE. Grumman contre F6F Hellcat.
- N°212 - 1943 - La libération de la Corse.
- N°210 - Le Il-2 CHTOURMOVIK à L’ASSAUT.
- N°209 - « BÂZU » CANTACUZINO. Le prince des as du front de l’Est.
- N°208 - Seafire contre Zero : Le dernier combat.
- N°207 - LES FRANÇAIS LIBRES DANS LA BATAILLE D’ANGLETERRE.
- N°206 - 6 JUIN 1944 : «TYPHON» sur la Normandie.
- N°205 - JUIN 1940 - Chasseurs Marins sur MORANE 406.
- N°204 - Corsaires du désert : Les Belges sur Beaufighter au N° 272 Squadron.
- N°203 - Jusqu’au bout sur Focke-Wulf FW 190 : Hans Karger, pilote de chasse à la JG 6.
- N°202 - CAHIER SPÉCIAL : LES AVIONS D’ADOLF GALLAND.
- N° 201 - PRINTEMPS 1945 : l’ultime combat du Wildcat en Europe.
- N°200 - 1914 : La France invente le combat aérien.
- N°199 - 6 JUIN 1944, LE JOUR LE PLUS LONG.
- N°198 - 1914 - 2014. Centenaire de la 1ére Guerre Mondiale.
- N°196 - Un martin-pêcheur bien nommé : le Vought OS2U Kingfisher.
- N°195 - BONS BAISERS DE RUSSIE. Les HURRICANE de la RAF à MOURMANSK.
- N°194 - LA «RAFALE BAHARAV». Le témoignage d’un des plus grands As Israéliens.
istoire
25 ans d’H
ensemble...