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Guide des Employeurs et des

employés durant le “Pays


Lock”.
Certaines questions reviennent souvent, depuis le début des « Locks » du mois de
Septembre 2019, à savoir, Quid des contrats de Travail durant le « Lock »? Quoi faire
en cas d’impossibilité d’ouvrir son entreprise? Paiement intégral des salaires,
diminution des horaires de travail? Ouvrir les jours fériés? Ouvrir quand on peut? Etc.

Dans ce petit Guide, j’ai retracé les points les plus importants et les questions qui
reviennent le plus souvent :

1. SUSPENSION TEMPORAIRE DE TRAVAIL

Q : Puis-je suspendre temporairement mes employés ?

R : Le Code du Travail Haïtien en son Article 32 prévoit en effet la suspension


temporaire du contrat de travail de l’employé.

La suspension temporaire du contrat de travail est l’interruption du contrat sans que


l’existence du contrat lui même soit affecté.

Le contrat de travail peut être suspendu dans les cas suivants:

1) Le manque de matières premières pour la poursuite des travaux de


l’entreprise.

2) La force majeure* ou le cas fortuit, entrainant un arrêt immédiat mais


temporaire des travaux.

*Qu’est ce que la FORCE MAJEURE? Pouvons nous assimiler le « LOCK »à un


cas de Force majeure?
En Matière de droit du travail, la force majeure est par définition, un
événement imprévu, insurmontable, indépendant de la volonté de l’employeur,
ou de l’employé. Cet événement est susceptible de dégager l’employeur de ses
responsabilités, ses délais et de ses engagements contractuels.

Des exemples de cas de Force Majeure : catastrophes naturelles, fait de prince, accidents
relatifs aux matériels survenus dans l’usine, incendie, émeutes, soulèvement populaire, etc.

Le « Lock » peut être assimilé à un cas de force majeure s’il y a une totale paralysie des
activités économiques. Par conséquent dans ces cas listés plus haut l’employeur ne saurait
être tenu pour responsable.
2. CAS DE FORCE MAJEURE.

Q : Que doit faire l’employeur en cas de constat de Force Majeure ?

R : L’employeur a pour obligation de notifier le Ministère des Affaires Sociales et du


Travail (MAST) de toute suspension de travail sans solde. Il est à la charge de
l’employeur de fournir des preuves en cas de contestation (Constats / Journaux/
Photos/ etc).

Q : Que se passe t’il si l’employeur n’informe pas la Direction du Travail?

R : Si l’employeur n’informe pas la Direction sa Responsabilité sera alors engagée.

Q : Quel délai octroyé à l’employeur pour la suspension du Contrat de Travail?


R : Le délai accordé pour la suspension du Contrat de Travail est de 30 Jours.

Q : Puis-je demander un délai supplémentaire?


R : Soit le contrat de travail continu, l’employé revient travailler normalement, soit
l’employeur, toujours en impossibilité, demande alors à la Direction du Travail une
autre autorisation de prolongation. La Direction du Travail après enquête, peut
autoriser une prolongation de la suspension qui ne pourra pas dépasser trente (30)
jours ou un (1) mois.

Q : Et après ? Que se passe t’il en cas de non reprise du travail?

R : Toute suspension temporaire dépassant trente (30) jours pourra être considérée
par le travailleur comme une rupture de son contrat par l’employeur.

3. COMMUNICATION ENTRE EMPLOYEUR ET EMPLOYE DANS CES


CIRCONSTANCES.

Q : Comment avertir les employés de la reprise du travail?

R : 24 h au moins, avant la reprise des travaux, l’employeur informera ses employés


de cette reprise.

Q : Quels moyens dois-je utiliser pour avertir la reprise du travail?

R: 1-Correspondances

2-Journaux, radio, avis affiché sur la porte d’entrée de l’entreprise

3-Tout autre moyen (Website de l’entreprise/WhatsApp / email/


Réseau Sociaux/autres).

NB : En matière de Droit du travail, tous les moyens de preuves sont recevables.

4. SUSPENSION PERMANENTE DU CONTRAT DE TRAVAIL.

Q : Puis-je utiliser le « LOCK » afin de mettre fin définitivement au contrat


de travail de certains employés?
R : L’employeur qui désire mettre fin au contrat de travail, suite au « lock »
devra préalablement donner avis écrit à l’autre partie et verser toutes les prestations légales,
c’est à dire : le paiement du préavis en fonction de l’ancienneté, le boni, et le congé. Le
« lock » ne dispense pas l’employeur de verser les prestations légales à un employé.

5. DIMINUTION (REDUCTION) DU SALAIRE.

Q : Puis-je diminuer le salaire de l’employé?

R : Pour rappel, le salaire est une prestation versée par l’employeur au salarié
en contrepartie de sa mise à disposition pour effectuer le travail convenu. Il est interdit par le
Code de Travail de diminuer le salaire d’un employé, tout en gardant les mêmes horaires de
travail étant donné qu’on ne peut revenir sur les droits acquis de l’employé. Cependant
l’entreprise peut réajuster l’horaire de ces employés et aussi ajuster ses salaires en
conséquence.

6. JOURS DE CONGES ET JOURS RATES.

Q : Puis-je utiliser les congés de l’employé afin de ne pas le payer durant


le « Lock »?

R : Il y a certains employeurs qui unilatéralement ou d’un commun accord


avec leurs employés décident d’utiliser les congés annuels de l’employé durant le
« lock » en lieu et place des jours ratés. Cependant peut importe l’accord ou pas de
l’employé, il faut garder à l’esprit que le Code du Travail est d’ordre PUBLIC.
Les avantages et protections que la Loi accorde aux employés ne peuvent être l'objet
de renonciation de leur part. C'est donc un risque pour un employeur d’exiger à un
employé de renoncer aux prérogatives mises à sa disposition par la Loi. L’employé
qui l'aura accepté, pourra toujours revendiquer son droit au congé annuel même s'il a
signé la perte de ce droit.

7. FAILLITE DE L’ENTREPRISE CAUSEE PAR LE « LOCK ».

Je vous vois venir…

Q : Et si notre entreprise est en faillite? Que faire des salaires des


employés? La faillite d’une Enterprise justifie t-elle le non paiement des salaires
aux employés?

R : En cas de faillite, les articles 1868 et 1870 du code civil prévoit que le
salaire de l’employé est une créance privilégiée et de ce fait doit être donc liquidé en priorité
sur toutes les autres dettes de l’entreprise.

Avis Juridique
Si vous avez tout lu, vous remarquerez que je n’ai pas abordé la question relative au paiement
par jour de travail pour un employé qui détient un contrat avec un salaire fixe et un horaire
fixe, (exemple, les 48 h requis par la loi) .
Voici alors ma recommandation, en cas de suspension de travail durant le « LOCK », tout en
se basant sur l’article 18 du Code du travail qui prévoit que : « Le contrat de travail oblige
tant à ce qui y est exprimé qu'à ce qui en découle selon la bonne foi, l'équité, l'usage, la
coutume ou la loi. » et sur l’article 32 cité plus haut relatif à la Force Majeure.

Les deux parties (employeur et employé) doivent s’entendre sur un nouveau mode opératoire
qui n’engagera pas leur responsabilités. Il faudrait donc convenir d’un nouvel horaire
TEMPORAIREMENT aménagé (à savoir : travailler à mi temps, travailler à domicile,
travailler le Dimanche, Jour férié, etc) tout ceci en incluant également d’un nouveau salaire
TEMPORAIRE selon le cas de figure. Et s’il le faut, avertir la Direction du Travail du
nouveau accord afin d’éviter tout conflit découlant d’un malentendu. Ses mesures provisoires
prendront en considération la localisation géographique de l’entreprise, de la possibilité
d’ouverture de l’entreprise et du lieu de résidence de l’employé. Les deux parties devront
faire preuve de Bonne Foi et d’équité afin que nul ne soit lésé, c’est à dire garder la stabilité
de l’entreprise et aussi garder son emploi.

Le Code du Travail étant muet sur la question et n’avait pas pris textuellement en
considération ce cas de figure, alors je prends la liberté de faire l’analyse suivante : un
employé qui a un contrat de travail avec un Horaire X, un salaire X et que l’entreprise de son
employeur n’a pas pu fonctionner durant au moins 10 jours de « Locks » et en conséquence,
n’ayant pas généré de revenus, les deux parties peuvent alors s’entendre afin qu’aucune
responsabilité ne soit engagée. L’employeur peut alors être en mesure, après accord préalable
entre les parties, de payer l’employé uniquement pour les jours de travail fournis et ce, de
manière TEMPORAIRE.

Pour conclure, notre actuel Code du Travail Haïtien est flou sur certains points et n’avait
certainement pas prévu les cas de « Pays Lock » prolongé version 2019. Il faudra traiter
chaque cas au cas par cas, tout en respectant les Principes établis par L’organisation
Internationale du Travail (OIT), les Principes Cardinaux de la Constitution Haïtienne, et le
Code du Travail.

Fait à Port-Au-Prince le 1er Novembre 2019.

Elizabeth Mentor LAFONTANT, Avocate du Barreau de Port-au-Prince.


Contact: email : elizabethmentorlafontant@gmail.com
Phone : + (509) 3170-4533

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