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CIFEC_APPLICATIONS MANAGEMENT_MASTER 1 J/S_EMMANUEL AGUI_2018-2019

APPLI 1 - CAS BBC


BBC est le premier site mondial du covoiturage de longue distance. Son activité consiste à
mettre en relation des conducteurs qui voyagent avec des places libres et des personnes qui
souhaitent voyager, en leur permettant de partager les frais de transport du trajet. En effet,
il y a en France 38 millions de voitures qui ne sont utilisées que 4 % du temps, avec un taux
de remplissage de 1,3 personne par véhicule. Le principe est alors le suivant. Les
conducteurs publient une annonce en indiquant leur trajet, leur nombre de places libres et
leur prix, et les passagers sélectionnent leur conducteur en fonction de critères multiples
(dates, heures de départ et d’arrivée, genre du conducteur, fumeur ou non, nombre
d’avis…). Une commission de 15 à 20 % est prélevée par la plateforme sur chaque trajet,
ainsi qu’une pénalité financière en cas d’annulation. Devenu premier site de covoiturage
français dès 2008, l’entreprise multiplie des levées de fonds exceptionnels pour financer sa
croissance, dont la dernière en 2015, atteint les 200 millions de dollars. Une des licornes
(start-up dont la valorisation dépasse 1 milliard de dollars) emblématiques de la France, BBC
compte en début 2018 50 millions d’inscrits dans 22 pays1, dont 11 millions en France.

Si l’initiative du covoiturage n’était pas nouvelle dans les années 2000, le contexte lui
devient favorable à plusieurs égards. Le développement technologique, l’augmentation du
taux d’accès des ménages à Internet, ainsi que la démocratisation des moyens de
télécommunication ont été des conditions nécessaires pour que le modèle BBC fonctionne.
De plus, la crise de 2008 et la hausse du coût de la vie attirent l’attention vers des modes de
consommation alternative et la recherche de liens sociaux. Ainsi, le modèle BBC est en plein
dans le mouvement de l’économie collaborative ou de partage : la mobilité (VelibAutolib,
Cotyscoot, Uber, BBC…), au même tire que le logement (Airbnb) ou le loisir (Netflix), devient
un service et non plus une propriété. BBC se présente alors comme un facilitateur de mise
en relation entre conducteurs et passagers particuliers. Sa mission est de faire voyager un
maximum de personnes en covoiturage lors de tous leurs déplacements dans une démarche
d’écomobilité. Elle revendique ainsi une démarche citoyenne de réduction de l’émission de
gaz à effet de serre en diminuant les embouteillages et la consommation de carburant.

L’entreprise a dû toutefois déployer les efforts pour dépasser les freins au covoiturage. Au
début gratuit, le site devient payant en 2011, lorsque la taille du réseau devient
suffisamment importante. Pour l’instant, les conducteurs ne sont pas taxés, car il s’agit de
particuliers qui cherchent à réduire leurs frais de transport, e non des professionnels qui
cherchent à faire du profit. Les prix sont d’ailleurs encadrés par BBC, afin que le covoiturage
ne soit pas lucratif Par ailleurs, l’entreprise a toujours beaucoup travaillé sur la plateforme
Internet et mobile pour améliorer le design et l’ergonomie. La simplicité d’utilisation est en
effet cruciale pour faciliter l’accès au service. Enfin, la sécurité et la fiabilité du service sont
un élément essentiel sur lequel l’équipe de la plateforme travaille quotidiennement. Elle
passe notamment par le développement de la confiance au sein de la communauté BBC.
Ainsi, les conducteurs et passagers doivent s’inscrire sur la plateforme avec leur vrai nom et
utiliser une photo nette qui permet leur identification. Ils se notent mutuellement sur
différents critères pour laisser un avis à la communauté, tandis que l’équipe de la plateforme
qui modère les profils se réserve le droit de radier les membres dont les comportements
posent problème. Toutefois, la sécurité n’est pas toujours garantie comme le montrent

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certains faits dans le passé (conduite dangereuse malgré des avis très favorables de la
communauté, délais de réaction de l’équipe pour la radiation d’un conducteur accusé
d’attouchements…). Par exemple, la plateforme ne demande pas le permis de conduire aux
conducteurs, faute de pouvoir vérifier leur véracité ni les points qu’il contient.

En 2017, les ‘membres » de la communauté BBC (on ne parle pas de « clients ») ont
aujourd’hui en moyenne 35 ans. Focalisés initialement sur la population étudiante, ils se
sont élargis progressivement à toutes les générations et catégories socioprofessionnelles. Le
nombre d’inscrits grimpe particulièrement rapidement chez les quadras, quinquas et
sexagénaires. L’activité est saisonnière, avec un pic important au moment des vacances de
fin d’année, avec d’ailleurs plus de demandes que d’offres.

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1France, Espagne, Royaume-Uni, Italie, Pologne, Allemagne, Portugal, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Russie, Ukraine,
Turquie, Inde, Mexique, Serbie, Roumanie, Croatie, Hongrie, Brésil, Slovaquie, République Tchèque

QUESTIONS :

Q1. Quels sont les différents mécanismes de coordination selon Mintzberg ? Le(s)quel(s)
peut-on identifier chez BBC ?

Q2. Quelles sont les conditions requises pour le développement de l’activité de


covoiturage de longue distance ?

Q3. Réalisez un diagnostic des forces concurrentielles en présence dans les plateformes de
covoiturage de longue distance en France, à l’aide des 5(+1) forces de Porter.

Q4. Après avoir donné une définition des facteurs clés de succès, vous indiquerez ceux qui
sont pertinents pour BBC.

Q5. Commentez les voies de développement de BBC au regard de la Matrice Ansoff dont
vous rappellerez le principe. Précisez également les modes de développement
utilisés par l’entreprise.

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ANNEXE 1 : LA CULTURE ET LE MANAGEMNT DE BBC

Tout en se développant à grande vitesse, BBC a toujours veillé à maintenir une culture de
start-up pour continuer à nourrir l’esprit entrepreneurial et la cohésion de ses équipes. En
2017, la plateforme emploie 500 personnes dans le monde, dont 350 au siège de Paris. Elle
met tout en œuvre pour attirer et intégrer les meilleurs talents qui lui permettront de
soutenir sa croissance exponentielle.

Ingénieurs, équipe relation membres (relation clients), marketing et communication, chefs


de produit marketing, concepteurs de logiciels…les profils recherchés sont divers. Les
candidats, généralement d’un niveau bac+5, se bousculent pour intégrer cette entreprise qui
leur pose un défi stimulant et leur demande beaucoup d’autonomie dans leur travail. Le
recrutement est principalement basé sur cooptation, parmi les fervents utilisateurs du
service BBC, afin de s’assurer que les candidats sont déjà familiers avec les valeurs de
l’entreprise. Chaque nouvelle recrue est accompagnée par un parrain au sein de l’entreprise
qui lui présente la culture, les valeurs et le fonctionnement informel de l’entreprise.

Les dix valeurs fédératrices de l’entreprise sont affichées sur les murs des bureaux et
rappelées chaque jour : « Fun and Serious » (la motivation naît de la combinaison entre la
fierté du travail bien fait et le plaisir de réaliser des choses ensemble dans un environnement
optimiste et fun), « Fail, Learn, Succeed » (échouer, apprendre et réussir pour innover),
« Thinkit, Buildit, Use it » (favoriser l’innovation et la responsabilité face à l’expérience-
utilisateur… Ces valeurs guident les prises de décision des équipes dans une activité en
constante évolution où la formalisation des processus est difficile. En cohérence avec ces
valeurs, les pratiques managériales ont pour but de nourrir la cohésion et l’esprit d’entraide
au sein des équipes. Le « BlaBlaTalk », par exemple, est une réunion hebdomadaire durant
laquelle un département présente ses projets en cours. Enregistrée et rediffusée dans tous
les locaux du monde, elle permet de savoir qui fait quoi dans l’entreprise, de responsabiliser
et valoriser les départements par rapport à leurs missions et de développer un respect des
équipes les unes envers les autres2.

Récompensé par l’obtention du prix « Entreprise fun et performante » du palmarès f », le


management de l’entreprise est toutefois accusé ces dernières années pour son manque de
transparence et son caractère arbitraire. Les critères d’avancement professionnel seraient
davantage fondés sur les affinités personnelles plutôt que sur des critères objectifs du travail
réalisé. Le management de proximité peut manques de séniorité et de leadership, sans que
les salariés aient la possibilité de faire remonter ces problèmes.

ANNEXE 2 : LA CONCURRENCE

Avec 95 % de parts de marché sur le covoiturage de longue distance (environ 300 km), BBC
est de loin de leader incontesté. Il existe toutefois d’autres sites de covoiturage, en France et
à l’étranger, avec des modèles économiques sensiblement différents. Ainsi, Covoiturage libre
est le 2ème acteur français derrière BBC. Porté par une association lilloise à but non lucratif
depuis 2006, le site se présente comme le contre modèle social et solidaire de BBC qui serait
devenu une plateforme avant tout marchande en délaissant ses valeurs d’origines. Le site

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qui fonctionne seulement avec les dons des membres compte, en 2017, 200 000
conducteurs inscrits et 130 000 trajets par ans. De même, le danois GoMore accroit sa
menace sur BBC, par ses 1,7 million d’inscrits à travers 5 pays européens (Danemark, Suède,
Norvège, Espagne et France). Implanté en France depuis 2016, il propose un service sans
frais qu’il finance par ses deux autres activités complémentaires : la location de voitures
entre particuliers et le leasing. Waze, la filiale de Google connu pour son appli GPS, a
étalement affiché son intention de lancer sa propre offre de covoiturage en France dès 2018.

BBC a aussi bousculé les acteurs traditionnels du transport des personnes par voies
ferroviaires (SNCF et RATP) ou aériennes (court courrier) en s’imposant comme substitut et
complément à leurs services peu flexibles et aux tarifications plutôt chères et opaques. Bien
qu’avec un temps de retard, les géants du transport ripostent toutefois face à l’agression de
BBC. La SNCF rachète en 2013 le spécialiste du covoiturage de proximité, 123envoiture.fr,
rebaptisé depuis iDVRoom. Elle propose aussi désormais des trajets TGV low-cost (Ouigo) et
un abonnement TGV et Intercités illimité sur toute la France pour les 16-26 ans pour un prix
imbattable (TGVmax). Encouragés par la libéralisation des transports permis par les décrets
de la loi Macron en 2015, l’offre des cars de longues distances a également explosé, avec
FlixBus, Ouibus (filiale de la SNCF) ou Isilines (groupe Transdev) qui proposent des tarifs très
attractifs. Avec des prix cassés et un accès Wifi et de la place pour les bagages, Ouibus aurait
repris 25 % de parts de marché paux sites de covoiturage sur les longues distances. De plus
en plus de sites de comparaison (kelbillet.com, liligo.com) mettent en parallèle les trajets en
avion, en train, en car ou en covoiturage. Preuve que ces différentes offres répondent au
même besoin de se déplacer d’un point A à un point B au moindre frais

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2«Le BlaBlaTalk est une réunion hebdomadaire durant laquelle un département présente ce qu’il a fait lors des dernières
semaines à venir à l’ensemble de la société ».

ANNEXE 3 : LE DEVELOPPEMENT

BBC, développé par 3 associés à travers la société anonyme Commute, est devenu le leader
mondial du covoiturage grâce à une internationalisation fulgurante, après avoir consolider sa
position sur le marche domestiques français. Le service s’installe en Espagne en 2009, au
Royaume-Uni en 2011, puis dans une série de pays européens en 2012 et 2013 (Italie,
Portugal, Pologne, Pays-Bas, Luxembourg, Belgique et Allemagne). Après avoir acquis son
principal concurrent allemand Carpooling en 2015, la plateforme a étendu sa présence au-
delà de l’Europe (Russie, Turquie, Inde, Mexique…), et affiche son ambition de s’attaquer à
l’Asie et à l’Amérique Latine. Pour s’implanter sur un marché étranger, BBC pratique de sa
motivation, de ses connaissances du marché local et de ses éventuelles parts de marché.

Cette rapide internationalisation a été permise grâce à des levées de fonds successives. Sa
première levée de fonds a eu lieu en 2009, auprès de « business Angels » pour 600 000
euros, suivie de 1,2 millions en 2011. En 2014, 100 millions de dollars (73 millions d’euros)
sont levés auprès du fonds d’investissement Index Ventures, avec la participation des fonds
déjà associées AccelPartners. Il s’agit de fonds d’investissement ayant une expertise dans le
financement et la gestion opérationnelle des activités liées aux technologies d’Internet et

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l’économie collaborative. Si l’entreprise ne communique pas sur la répartition de son capital


ou de la composition de son conseil d’administration, on sait que de nouveaux membres se
sont invités à son conseil d’administration, dont Dominique Vidal d’Index Ventures, Philippe
Botteri, Partner chez AccelPartners ou Jean-David Chamboredon, Président Exécutif d’ISAI.

L’expansion internationale de l’entreprise connaît toutefois un ralentissement ces dernières


années. En effet, le choix d’internationalisation doit prendre en compte des critères du
marché local, et le défi de faire entrer le covoiturage dans les mœurs est plus ou moins
difficile selon les pays. En 2016, l’arrêt des investissements est annoncé au Royaume-Uni, en
Inde, en Turquie et au Mexique. A ces difficultés à l’international il convient d’ajouter ne
concurrence indirecte qui se renforce sur son marché domestique. Le chiffre d’affaires de
BBC stagne depuis 2015, et du fait d’avoir toujours privilégié l’investissement dans la
croissance, BBC n’est toujours pas rentable. L’entreprise décide alors de se recentrer sur ses
pays clefs et sur l’amélioration de son produit. Il s’agit d’améliorer les fonctionnalités de la
plateforme, mais aussi de s’attaquer à un nouveau segment de marché tout en développant
des services complémentaires.

Ainsi, en mai 2017, l’entreprise lance BlaBlaLines, une nouvelle application mobile pour le
covoiturage quotidien de courts trajets de type domicile-travail. D’après le fondateur, le
covoiturage de courte distance présente trois principaux freins : « les conducteurs ne
veulent pas perdre de temps en faisant des détours, ils ne souhaitent pas passer du temps à
organiser leurs trajets tous les jours et les passagers veulent pouvoir être sûrs de rentrer à
l’heure qu’ils souhaitent, sans être dépendants d’une autre personne ». Un nouvel
algorithme a alors été mis au point pour lever ces freins : c’est l’application qui mettra
directement en lien les membres en fonction des horaires et trajets et décidera de point de
rencontre. Si la concurrence est déjà bien présente sur ce créneau (ex. société Karos,
iDVroom, ou les gestionnaires de flottes d’entreprise utilisant WayzUp), le potentiel du
marché reste important, avec 43 % des Franciliens qui vont travailler en voiture avec un taux
d’occupation de leurs véhicules autour de 1,05 par voiture. D’après le PDG de BBC, la
circulation pourrait diminuer d’un tiers si les 1,23 million d’automobilistes franciliens
prenaient deux passagers dans leur voiture. Toutefois, pour que le service soit opérationnel,
il faut un nombre minimal de membres pour atteindre une taille critique. Le service se
développe donc progressivement sur certaines zones tests et sans facturation de
l’entreprise.
L’entreprise développe aussi des services complémentaires pour améliorer la qualité de son
offre afin de fidéliser et attirer de nouveaux « membres ». Ainsi depuis peu, la plateforme
propose à ses conducteurs une carte de 20 euros à utiliser dans les stations de service Total
lors de leur premier trajet avec BBC, ainsi qu’une carte de télépéage gratuite pour les
autoroutes de Vinci. Le partenariat avec Axa leur permet d’offrir des garanties
complémentaires gratuites à ses conducteurs, tandis que celui avec la banque en ligne
Boursorama permet des réductions intéressantes. BBC s’est aussi lancé dans l’offre de
location automobile de longue durée pour ses conducteurs assidus, grâce au partenariat
avec ALD Automotive (filiale de la Société Générale) et le constructeur automobile Opel. Ce
forfait vise l’allégement de la facture liée à l’achat et à l’entretien d’un véhicule pour les
conducteurs de BBC. « Nous allons désormais explorer de nouveaux services autour de
l’assurance et de l’automobile. Les 2,3 ou 4 prochaines années seront davantage consacrées
à cette diversification que sur l’ouverture de nouveaux pays », explique le DG de BBC en avril

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2017.

APPLICATION 2 - CAS MECAF


Question 1 – Après avoir rappelé la définition des alliances stratégiques et les deux principaux types
d’alliance qui peuvent être observés, exposer les raisons qui pouvaient justifier le rapprochement
entre les groupes MECAF et Mitsubishi en 2010 et celles qui ont provoqué son échec.

Question 2 – Comment peut-on positionner la stratégie de développement du groupe MECAF de


2010 à fin 2013 selon la matrice de Ansoff ?

Question 3 – Présenter les objectifs et les stratégies des trois actionnaires principaux depuis 2014 ?

Question 4 – Quel concept peut être mobilisé pour analyser les choix d’externalisation ? Les
équipementiers automobiles sont-ils des sous-traitants des constructeurs ? Quels sont les avantages
et limites pour les constructeurs de l’organisation économique du secteur de la construction
automobile ?

Question 5 – Rappeler et définir rapidement les deux outils classiques du diagnostic stratégique
externe. Proposer une application synthétique au secteur de la construction automobile sous forme
d’un tableau.

GROUPE MECAF
MECAF est un constructeur automobile français issu de la famille Gipi de l’est de la France. Sa
situation s’est sérieusement détériorée de 2010 à 2013 ce qui a entraîné une restructuration
profonde de son actionnariat avec l’arrivée de l’Etat français et d’un partenaire chinois.

La famille Gipi a une longue tradition d’activité industrielle entamée par un ancêtre au 18e siècle,
propriétaire d’un moulin à huile et d’une teinturerie. La famille développe des activités de
métallurgie. Au 19e siècle, elle produit des lames de ressort, des baleines pour corsets et à la fin du
siècle des outils. La famille, protestante est très pratiquante, est pionnière en matière sociale :
création de fonds de secours puis de fonds de pension pour les veuves (1811), assurance mutuelle
(1853), logements à bas prix et hôpital pour les salariés (1870), etc…

A la fin du 19e siècle, Gipi fabrique des cycles et développe un prototype de véhicule avec moteur à
vapeur. C’est avec un moteur à essence Daimler-Levassor qu’il développe la Gipi type 3. En 1897, Gipi
vend 54 voitures, 156 en 1898 et 500 en 1900. La société va se développer avec de nombreux
soubresauts jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.

En 1966, les différentes activités sont regroupées lors de la constitution de MECAF (Mécanique
Française) qui assure une gestion financière unique pour l’ensemble du groupe (automobiles, cycles,
aciers et outillages). Le groupe est côté en bourse. En 1976, MECAF absorbe un concurrent français,
Lemon, au bord de la faillite. Le groupe obtient rapidement de bons résultats après une
réorganisation de la filiale et l’utilisation de plateformes communes.

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En 1978, le groupe rachète Micas, filiale française d’un groupe américain Carster Europe. Carster
prend 14% des parts de MECAF et la famille Gipi passe de 49% à 37% mais garde la majorité des
droits de vote. MECAF n’arrive pas à redémarrer. Lemon et Gipi ont des modèles vieillissants. Des
grèves paralysent les usines de la région parisienne. En 1986 MECAF annonce des suppressions
d’emplois d’environ 9% des effectifs.

De 1984 à 2006, les présidents du directoire développeront la banque d’organes communs au


groupe, le partage des plateformes entre les deux marques du groupe (Micas a été abandonné), le
regroupement de la production, des études et des méthodes pour les deux marques qui ne
conservent que l’activité commerciale, le marketing et la communication. Il développe également de
nombreux accords de coopération technique avec d’autres constructeurs. Il s’agit de garder le
groupe indépendant d’un point de vue capitalistique en multipliant les accords techniques.

La croissance est forte jusqu’en 2003. En 2004 et 2005, les ventes stagnent. Les ventes en 2006
diminuent et le résultat chute de moitié. La famille, par l’intermédiaire de T. Gipi, président du
conseil de surveillance, décide de changer le président du directoire et nomme. C Raigue. Le nouveau
président du directoire va entreprendre un gros effort de réorganisation stratégique : forte
croissance à l’international, baisse des frais généraux, différenciation des deux marques et
développement des synergies internes. Jusqu’en 2008, les objectifs de croissance sont tenus. Le
résultat 2008 est déficitaire. Suite à des problèmes de santé, C. Raigue est remplacé P. Biran début
2009 qui doit annoncer pour le premier semestre 2009 une perte de 960 millions d’euros et une
baisse des ventes de 22%.

En mars 2010, le groupe MECAF annonce la fin des discussions stratégiques avec Mitsubishi. Fin
2009, MECAF avait annoncé l’ouverture de négociations entre les deux groupes pouvant aller jusqu’à
un partenariat stratégique alors que le groupe japonais avait des difficultés financières et recherchait
une alliance capitalistique. Le projet s’est heurté à l’évolution du cours des deux titres (forte hausse
de Mitsubishi après de bons résultats financiers et baisse du cours de MECAF) qui aurait conduit
MECAF à payer beaucoup plus cher que prévu cette participation. Cette opération était un élément
majeur de la stratégie de P. Biran : s’adapter aux pays émergents, se renforcer en Europe et
développer de nouvelles technologies. Mitsubishi apportait une implantation commerciale
significative dans des pays où MECAF est très faible (Etats-Unis, Asie du sud-est, Russie), des
compétences technologiques fortes (batteries lithium, 4X4) et des modèles non produits par MECAF
(4X4, key cars – voitures de moins de 3,50 m). Des projets de coopération industrielle restent en
cours.

L’année 2011 est marquée par la volonté des dirigeants de se tourner résolument vers le marché
chinois qui connaît une forte croissance. La PS5 est présentée officiellement à Shanghai. C’est un
signe de l’importance que MECAF accorde à ce marché. De nouvelles usines doivent être construites.
De très importants investissements sont programmés pour développer des moteurs peu polluants. La
lutte contre la pollution est en effet devenue une priorité pour le gouvernement chinois. Fin 2011, le
groupe annonce une baisse significative des ventes et annonce 6 000 suppressions de poste. Face
aux difficultés de trésorerie, les actionnaires cherchent un partenariat. Le groupe américain General
Motors prend 7% du capital de MECAF.

Le résultat de 2011 est divisé par deux par rapport à 2010. MECAF annonce son intention de céder
pour 1.5 milliard d’actif. Pour limiter la dégradation de sa trésorerie, MECAF décide en juin 2012 la

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cession de son siège social à Paris. Un bail de neuf ans lui permet de continuer à utiliser les locaux.
Parallèlement, le groupe suspend ses opérations en Iran. Son partenaire PATA aurait fortement
insisté pour que les règles de l’embargo économique soient respectées par le groupe alors que ce
pays représente le premier marché de MECAF après la France.

En Avril 2013, les nouveaux SUV (Sport Utility Vehicle) du groupe sont présentés en Chine et ne sont
prévus en Europe que dans un an. MECAF est présent en Chine avec deux partenaires : Hongdong et
Chan Han. Avec ce dernier, MECAF a créé une nouvelle usine pour produire la PS5 sur place alors que
les PS3 et PS4 sont fabriqués en France. En Chine, PS est une marque autonome et nettement
séparée de Lemon, au contraire de la situation dans le reste du monde. La Chine est devenue le
premier marché de MECAF au monde, avant la France ;

En octobre 2013, un accord de compétitivité est signé entre la direction et quatre syndicats. Il prévoit
un gel des salaires et une baisse du taux des heures supplémentaires, plus de flexibilité et de
mobilité. En contrepartie, le groupe s’engage à ne pas fermer les sites en France jusqu’en 2016, à
produire au moins un million de véhicules par an et à construire un nouveau modèle par an en
France. Le groupe a cédé des participations importantes dans des filiales historiques pour dégager les
ressources financières.

L’alliance avec General Motors, présentée comme une « alliance stratégique mondiale » en 2012 se
révèle être un échec. Les accords qui avaient une ambition mondiale se sont limités dans les faits à
une coopération technique entre MECAF et la filiale européenne nettement déficitaire de General
Motors. En décembre 2013, MECAF annonce son retrait du capital de MECAF. Les 7% du capital sont
vendus avec une moins-value des investisseurs institutionnels.

Parallèlement, en Novembre et décembre 2013, de nouvelles discussions sont engagées sur la


structure capitalistique. Le président P. Biran voulait procéder à une importante augmentation de
capital qu’une partie de la famille Gipi (menée par T. Gipi) refuse à cause du risque de dilution. Une
proposition est faite par le partenaire chinois Hongdong pour obtenir 35% des droits de vote et
devenir l’actionnaire principal. L’Etat intervient pour éviter une prise de contrôle étrangère en
proposant son entrée au capital. Le Président du directoire est remplacé par le candidat de la famille
Gipi, C. Bretail, accepté par l’agence des participations de l’Etat. Hongdong, le nouvel actionnaire,
serait favorable à ce changement car le nouveau président serait le garant du maintien de la
politique de recherche du groupe MECAF, premier déposant de brevets en France. En 2013, les
ventes mondiales de MECAF ont diminué de 5% par rapport à l’année précédente.

En janvier 2014, le conseil d’administration de MECAF entérine l’entrée de Hongdong et de l’Etat


français au capital de MECAF pour environ 14% du capital chacun. La famille détient actuellement
14%, des investisseurs institutionnels 52%, les salariés 3,5% et le reste est de l’autocontrôle. T. Gipi
est maintenant vice-président du conseil de surveillance et R. Gipi membre de ce conseil. Le ministre
de l’économie s’est directement impliqué dans la négociation pour éviter que Hongdong soit le plus
gros actionnaire. Il justifie sa position au nom de la défense d’emplois industriels directs et indirects
en France.

En mars 2014, M.L. Lefranc est nommé à la tête du conseil de surveillance de MECAF en
remplacement de T. Gipi qui devient vice-président. Cet ancien haut fonctionnaire, PDG de sociétés
nationalisées (SNECMA, Aérospatiale et SNCF) de 1989 à 2006 puis d’EADS de 2006 à 2012 a été

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préféré au candidat de la famille Gipi. Le conseil de surveillance comprend deux membres


représentant la famille Gipi, deux membres représentant Hongdong, deux membres représentant
l’Etat français et six administrateurs indépendants.

En avril 2014, la nouvelle direction présente un nouveau plan stratégique « le nouvel élan ». Le
groupe se fixe un objectif de flux de trésorerie opérationnel cumulé de 2 milliards d’euros entre 2014
et 2018, une marge opérationnelle de 2% en 2018 et de 5% pour le prochain plan 2019-2023. Pour
cela, le nombre de modèles de la gamme devrait être réduit, la marque PS rendue autonome. La
croissance en Chine et en Asie du Sud-est doit être renforcée et il faut assurer le retour à la
rentabilité en Russie et en Amérique latine. Un grand programme de modernisation des usines est
lancé visant la réduction des coûts et des stocks et le renforcement très strict des procédures de
contrôle de la qualité. Depuis mars 2014, la Chine est le premier marché du groupe. La production
est encore majoritairement réalisée en Europe.

Juin 2014. La production de modèles MECAF en Iran par le partenaire Kodo a cru de 50% de janvier à
juin. Le marché redécolle dans le sillage de la levée des sanctions économiques. Le développement à
moyen terme est cependant difficile à cause de la difficulté de trouver des banques partenaires qui
sont devenues très prudentes après des sanctions américaines récentes envers des banques
françaises ayant opéré avec des pays sous embargo américain. Hongdong pourrait faciliter cette
expansion grâce aux bonnes relations entre la Chine et l’Iran et d’autres pays émergents.

Juillet 2014. T. Gipi, ancien président du conseil de surveillance de MECAF, était connu pour sa
réticence envers l’accord avec Hongdong et l’Etat français. La holding familiale EGF (Etablissement
Gipi Frères) vient d’annoncer qu’il serait remplacé à son poste de vice-président de MECAF par S.
Coroli, sa sœur, qui a commencé sa carrière dans de grands groupes d’audit.

Décembre 2014. De sources internes au groupe, on apprend deux déménagements :

- En 2015, les holdings faimiliales EGF et FPG qui portent la participation de la famille Gipi dans
MECAF quitteront l’immeuble de prestige qu’occupe MECAF dans Paris. Le nouveau
président de MECAF insisterait sur le fait qu’aucun actionnaire n’aurait plus de bureau dans
le siège de MECAF. C’est un changement important car les bureaux d’EGF et FPG étaient
situés depuis quarante ans au même étage que la direction générale de MECAF.
- En 2018, le siège historique du groupe, aujourd’hui loué par MECAF, ne sera plus utilisé. Une
partie du personnel serait déplacée dans les usines parisiennes du groupe, le reste serait
réinstallé en proche banlieue.

En 2014, une importante réorganisation du comité exécutif a eu lieu. Il est dorénavant composé de la
manière suivante :

- Trois directeurs de marques (Lemon, Gipi et PS)


- Six régions (Amérique latine, Chine et Asie du Sud-est, Eurasie, Europe, Inde-Pacifique et
Moyen-Orient Afrique). Chaque région est dirigée par un directeur opérationnel, responsable
du résultat économique et du management des ressources du groupe dans la région, y
compris les activités industrielles et commerciales.
- Sept directeurs métiers : Achats, Finance et Systèmes d’Information, R et D, Programme et
Stratégie, Ressources Humaines, Secrétariat Général et Industrie et Supply Chain.

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Parmi ce comité, six directeurs ont été recrutés depuis 2010, dont trois en 2014. La moitié sont des
ingénieurs de formation, les autres viennent d’écoles de commerce, de sciences politiques ou la
maitrise de gestion. L’une est anglaise, un portugais, les autres sont français. Presque tous les
directeurs ont passé l’essentiel de leur carrière dans l’industrie automobile et la moitié sont chez
MECAF depuis une vingtaine d’années. La politique avant 2010 était de privilégier la promotion
interne et de valoriser l’attachement à l’entreprise. Depuis 2010, il y a eu appel fréquent à l’extérieur
pour remplacer des managers jugés insuffisamment performants.

C. Bretail, le nouveau PDG, est l’ancien numero deux d’un grand groupe automobile. Il y a commencé
sa carrière comme ingénieur d’essais et a participé à de grands programmes de recherche et de
développement de produits. Depuis toujours passionné de sport automobile, il continue à participer
à des compétitions.

Production et recherche. Le groupe est unanimement reconnu pour sa compétence en recherche et


développement. Les personnels de ces services sont très fiers de leur appartenance au groupe et se
considèrent comme les meilleurs sur le marché.

Annexe 1 : la famille Gipi

Elle comprend plus d’une centaine de membres actionnaires. Ses intérêts sont concentrés dans la
holding EGF (Etablissement Gipi Frères) qui est actionnaire principal de la FPG (Financière Parisienne
de Gestion), société cotée en bourse qui détient les parts de la famille dans MECAF.

EGF gère les participations de la famille. Sa politique est de réaliser des investissements à long terme,
de l’ordre de10% du capital des sociétés concernées et de consacrer 10% de ces investiss1ements à
du capital risque. Les secteurs sont sélectionnés en fonction des grandes mutations du capitalisme
international. Pendant l’année2013 et 2014,la holding EGF a procédé à des mouvements importants
dans ses participations : cession de parts dans deux grandes entreprises françaises, investissements
dans plusieurs projets à Maurice, en Afrique centrale et dans un fonds spécialisé dans le Moyen-
Orient.

Le PDG de la FPG est R. Gipi, issu de l’école centrale, qui a commencé sa vie professionnelle chez
MECAF en commençant comme ouvrier pour arriver au comité exécutif. La situation nette de FPG est
passée de 225 millions d’euros en 2002 à 2,6 milliards d’euros en 2011 malgré la crise. Il est membre
du conseil de surveillance de MECAF depuis 2007. Il semble représenter une partie de la famille
privilégiant la valorisation du portefeuille familial avant le contrôle de MECAF.

T. Gipi, issu de l’ESSEC est nommé président du conseil de surveillance à la mort de son père. Il était
alors le plus gros porteur d’actions. Sa décision de nommer C. Raigue en 2007 crée un conflit dans la
famille dont certains membres, parlant d’erreur de Casting, auraient préféré R. Gipi. Sa stratégie
principale a toujours été de préserver coûte que coûte le contrôle familial, ce qui a entraîné son
éviction du conseil de surveillance en 2014.

Annexe 2 : le groupe HongDong

Ce groupe chinois créé en 1968 est le deuxième constructeur automobile chinois. Son capital s’est
ouvert au public en 2000. Il a développé quelques modèles propres (véhicules militaires clonés de

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modèles américains, véhicules d’entrée de gamme) mais s’est surtout concentré sur des partenariats
avec des constructeurs internationaux pour fabriquer en Chine des modèles qu’ils avaient conçus :

- Coentreprises avec MECAF pour produire de nombreux modèles GIPI et Lemon.


- Partenariats avec Nisan pour différents modèles de petites voitures de 4X4 et d’utilitaires
légers, avec Honda pour des modèles de milieu de gamme et des monospaces, avec Kia pour
des petits véhicules, avec Cummins pour la production de camions.
- Coentreprise avec Renault pour la production de véhicules Renault à partir de 2016.

Avant son accord avec MECAF, le groupe HongDong n’était pas implanté directement ou
indirectement hors de Chine.

APPLI 3 - CAS BUROPRESTO


La société Buropresto est spécialisée dans la distribution de fournitures de bureau non
stratégiques (articles de papeterie comme les enveloppes, consommables informatiques et
bureautiques comme les cartouches d’imprimantes petits matériels comme les corbeilles à
papier, etc.). Elle compte près de 600 salariés.
Son catalogue comporte près de 6000 références et offre souvent, pour chaque type
d’article, un choix assez large en termes de prix et de niveau de qualité, afin que les clients
puissent faire le choix le plus pertinent en fonction de leurs besoins. Par exemple, pour un
paquet de 50 enveloppes kraft 162 sur 229, le catalogue offre 5 produits différents, à des
prix allant de 4 à 9 euros HT. La plupart des articles sont des produits de marques connues
sur le marché (Clairefontaine, Oxford, etc.).
La clientèle, qui est constituée par quelques grands comptes, mais essentiellement par des
PME, comporte environ 15000 clients « fidèles » (qui passent en moyenne au moins deux
commandes par an), et 20000 clients « occasionnels » (clients nouveaux ou clients ayant
passé au plus une commande depuis un an). Les clients « fidèles » bénéficient d’offres
promotionnelles et d’une ristourne en fin d’année.
La prise de commande peut se faire par téléphone, par courrier ordinaire ou par internet. La
société a lancé il y a 3 ans son site « buropresto.com », dont le succès a été fulgurant. Le
pourcentage des ventes réalisées grâce au net est en effet passé de 5% la première année à
10, puis à 20%. Néanmoins, le catalogue « papier » continue à être envoyé chaque année à
tous les clients.
Buropresto a beaucoup investi dans la logistique. Elle dispose de locaux de stockage et de
préparation des livraisons de 11000 mètre carré en banlieue lyonnaise. Une commande
reçue avant 15 heures est préparée avant la fin de la journée. Elle est prise en charge
pendant la nuit, soit par un camion de la société, soit par un transporteur, et livrée à un
correspondant régional qui se charge de l’éclatement et de la livraison finale le lendemain, à
l’adresse du client, avant 18 heures. Le « taux de service » est très bon : moins de 5% des
commandes seulement ne sont livrées que le surlendemain.

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L’organisation est très « transversale » : dès la réception d’une commande, les différentes
opérations de préparation, d’expédition, de facturation, etc. s’enchaînent rapidement, en
étant pilotées par l’informatique. De par la nature de ses activités, Buropresto est obligée
d’avoir en permanence des stocks importants, afin de pouvoir satisfaire rapidement ses
clients sans rupture de stocks. Mais elle essaie actuellement de réduire ces stocks en
mettant en place un réapprovisionnement en flux tendus auprès de ses principaux
fournisseurs.
La société a également beaucoup investi dans la mise en place d’un PGI et d’un système
informatisé de contrôle de gestion qui repose sur une comptabilité analytique en coûts
complets, un contrôle budgétaire trimestriel et un système de tableaux de bord mensuels.
Une attention toute particulière est apportée au suivi des frais de livraison, avec comme
enjeu d’optimiser la répartition entre l’utilisation de la flotte interne et l’externalisation
auprès de transporteurs.
Après avoir connu, au début de la dernière décennie, une période de croissance très rapide
et de forte rentabilité, Buropresto connaît depuis quelques années un net ralentissement de
son chiffre d’affaires et un tassement de ses résultats, que ne parvient pas à enrayer la
montée en puissance des ventes sur le net. Le directeur financier est même assez pessimiste
pour le prochain exercice : il a confessé qu’il serait très heureux si on arrivait à équilibrer les
comptes …
La situation n’est pas dramatique, et l’entreprise n’est pas en difficultés, mais il devient
nécessaire d’enrayer cette dégradation si l’on veut éviter les problèmes à moyen terme.
Le problème est régulièrement évoqué en conseil de direction, qui regroupe chaque lundi le
directeur général, le directeur de marketing, le directeur de la logistique (qui supervise
l’ensemble des opérations d’approvisionnement, de stockage et d’expédition) et le directeur
financier. L’origine du problème semble bien identifiée. Plusieurs « fournituristes », comme
on dit dans la profession, ont fait le choix stratégique d’une approche « low-cost » qui
semble mieux répondre aux besoins de la clientèle, et gagnent des parts de marché.
Toutes les entreprises connaissent actuellement une concurrence accrue et cherchent par
tous les moyens à réduire leurs charges, en particulier leurs « frais généraux » administratifs.
Or, il se trouve qu’il est souvent facile de trouver des « gisements d’économies » au niveau
des consommations de fournitures de bureau, comme le montre la liste de conseils
prodigués aux responsables des achats dans le cadre d’un séminaire de formation continue
en contrôle opérationnel. Dans la « chasse au gaspi » désormais inévitable, les fournitures de
bureau sont en première ligne….
Par ailleurs, les entreprises sont très récepectives aux arguments publicitaires des
fournisseurs qui garantissent de substantielles économies sur les achats de consommables.

Question 1

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Quelles sont les grandes évolutions qui, dans l’environnement de Buropresto, peuvent être
interprétées comme des menaces ? Par rapport à ses concurrents, pensez vous que
Buropresto ait adopté le bon positionnement pour être en mesure d’affronter les difficultés
à venir ? Quels sont les « facteurs clés de succès » qui expriment la stratégie commerciale de
Buropresto ? Quel est l’impact de cette stratégie sur la chaîne de valeur de l’entreprise et la
structure de ses coûts ?
Question 2
Devant quel dilemme se trouve la société ? Quelles sont les stratégies « extrêmes » qui
s’’offrent à elle ? Est-il possible d’envisager une solution médiane ? Quels sont les risques ?
Question 3
Pour éclairer les orientations stratégiques qui devront être prise dans un proche avenir, la
direction de Buropresto a décidé d’initier une démarche de type target costing (coûts cibles).
Quelle différence faites-vous entre target costing et analyse de la valeur ?
Question 4
A quelle configuration structurelle au sens de Mintzberg vous fait penser Buropresto ? Est-ce
une force ou une faiblesse, dans l’optique des adaptations stratégiques que devra mener la
société ? Que peut-on conseiller à la direction ?
Question 5
Dans quelle phase du modèle de Greiner se trouve Buropresto ? Les adaptations
stratégiques nécessaires vont-elles obliger la société à entrer dans une nouvelle phase ?

APPLI 4 - CAS DANONE


En 2006, le groupe Danone a enregistré un chiffre d’affaires de 14 milliards d’euros.
Danone est numéro un mondial sur le marché des produits laitiers frais (8 milliards d’euros
de chiffre d’affaires), numéro deux mondial sur le marché des biscuits (2 milliards d’euros de
chiffre d’affaires), et enfin numéro deux mondial sur le marché des eaux (4 milliards d’euros
de chiffre d’affaires).

2007 est une année historique pour le groupe. Danone vend sa branche biscuits à Kraft
Foods qui a déposé le 2 juillet une offre s’élevant à 5,3 milliards d’euros. Dans le même
temps, il est fait l’acquisition de la société d’origine néerlandaise Royal Numico, leader de la
nutrition infantile. Certes, depuis 1965, Danone avait déjà un pied dans le segment de la
nutrition infantile avec Bledina, mais cette double opération constitue un virage stratégique
majeur pour le groupe. Désormais Danone se donne pour mission d’ « apporter la santé au
plus grand nombre par l’alimentation ». Le développement de Danone s’articule autour de la

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santé et de la nutrition, des marchés en forte croissance, qui concentrent aujourd’hui 80%
des projets de R et D.

Afin d’analyser le portefeuille d’activité du groupe Danone, il est décidé de recourir à


l’utilisation de la matrice BCG de l’année 2006. Vous vous aiderez des informations suivantes
(montant en €) :

DANONE ET SES CONCURRENTS (CHIFFRES D’AFFAIRES EN MILLIARDS D’EUROS)

BISCUITS CA 2005 CA 2006


DANONE 3 2
NABISCO 6 7
TOTAL 9 9

EAUX CA 2005 CA 2006


DANONE 4 4
NESTLE 9 12
TOTAL 13 16

PRODUITS LAITIERS CA 2005 CA 2006


DANONE 7 8
YOPLAIT 5 6
NESTLE 6 5
TOTAL 18 19

TRAVAIL A FAIRE

1. Remplir le tableau de calcul de la matrice.


2. Construire la matrice BCG et y placer les différents DAS
3. Commentez la matrice BCG de Danone. Expliquez les décisions « corporate » prises
par la direction du groupe.

APPLI 5 - CAS BOUYGUES


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Dans les contes de Grimm, des trois frères, c’est toujours le troisième le plus malin. Le benjamin de la
bande surpasse les autres, pourtant plus costauds, et empoche l’héritage du père ou le cœur de la
belle. Façon de conjurer par le rêve la malédiction des fils aînés. Et d’affirmer que parfois l’habileté et
l’intelligence peuvent avoir raison des situations les plus acquises. Dans l’industrie, c’est un peu la
même chose, le dernier venu a toujours du mal à faire entendre sa petite musique.

Né quatre ans après ses aînés, Bouygues Telecom est un peu dans cette situation. Quand il débarque
sur le marché du téléphone mobile en 1995, ses concurrents France (Itinéris devenu Orange) et SFR
ne l’ont pas attendu. Ils ont largement investi la place en construisant leur réseau. Or, en matière de
téléphonie mobile, plus encore que pour le fixe, l’eau et l’électricité, la couverture du territoire est le
premier argument commercial, puisque l’on vend justement du déplacement. Il faut donc accepter
de dépenser beaucoup, avant même de recruter le premier client. Du coup, il s’établit une
corrélation mécanique entre la taille et les profits, puisque les coûts fixes sont les mêmes pour tout
le monde.

Heureusement, le faible nombre d’acteurs, limité par la loi ou par la profondeur des poches des
participants, produit des situations confortables assurant généralement une bonne prévisibilité des
revenus et des profits futurs. C’est aussi le cas pour Bouygues Telecom qui a versé ses premiers
dividendes en 2005 et dont la marge opérationnelle atteint désormais les 15%.

Pourtant, l’aimable club des opérateurs mobiles ne satisfait pas le petit numéro trois. Il est certes
invité à ce banquet très restreint, mais doit se contenter d’un strapontin et d’une petite assiette. Sa
part de marché est deux fois plus petite (17%) et son chiffre d’affaires parvient péniblement au
niveau des profits de ses concurrents.

Du coup, Bouygues Telecom se retrouve coincé entre, d’un côté, le régulateur des télécom, l’Arcep,
qui entend protéger le consommateur en voulant réguler le marché, et, de l’autre, ses deux « grands
frères » qui savent le moucher quand il montre un peu d’ambition. Forfait, terminal gratuit,
communications illimitées, toutes les innovations commerciales sont rapidement reprises par la
concurrence. Bouygues fait, dès le début des années 2000, le constat amer que les parts de marché
gagnées sont vite regagnées par les concurrents grâce à leur force de frappe financière. Un
investissement commercial et de longue durée aurait peut-être pu changer le cours de l’histoire vers
1999-2000. A fin de faire franchir à Bouygues Telecom le seuil fatidique des 20% du marché et donc
accroître quelques années plus tard son profil de rentabilité.

Le choix, patrimonial, de Martin Bouygues a été différent. Fortement endetté, attaqué en 1999 par
Vincent Bolloré qui voulait le contraindre à lâcher cette activité, il a fait le pari de la prudence….. et
de la résignation. Toute dépense inconsidérée aurait porté en germe le risque d’une perte de
contrôle du groupe par la famille Bouygues. D’où le constat un peu déprimant que les jeux sont faits,
SFR et Orange ayant un intérêt évident à garder leur concurrent à sa part de marché actuelle afin de
maintenir sa fragilité. Pour Bouygues, la croissance dans les télécoms appartient désormais au passé.

Dès lors, puisqu’il a renoncé à rattraper ses concurrents, Martin Bouygues (s’il ne siège pas au conseil
d’administration de sa filiale, il ne laisse à personne d’autre le soin des décisions stratégiques) n’a
que deux options : vendre cette activité pour en trouver une plus porteuse de croissance ou devenir
un acteur de niche.Tout laisse à penser qu’une fenêtre d’opportunité s’est ouverte l’an dernier avec
la reprise des fusions-acquisitions dans le secteur et les excellents résultats (favorisés par une pause

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dans les investissements), portant la valorisation au zénith. Elle s’est désormais refermée. Pourquoi
le groupe n’a-t-il pas saisi cette opportunité ? Bouygues n’est pas une holding de participation
arbitrant en permanence entre ses actifs. C’est un groupe industriel dont la stratégie consiste à
s’appuyer sur le cash généré par ses activités matures pour investir dans de nouveaux relais de
croissance. Ce fut le cas pour Colas (routes), puis pour TF1 et, enfin, pour les télécoms, la grande
affaire de Martin. Ce dernier est désormais à la recherche d’un nouveau territoire et n’a pas fait
mystère de son intérêt pour le nucléaire. Mais l’activisme actuel des fonds et la surenchère sur les
OPA portent la moindre affaire à des sommets qui ne sont pas compatibles avec le contrôle qu’il
entend conserver sur son groupe. Et puis il n’est pas facile de trouver des activités dont la marge
brute flirte avec les 30% comme dans le cas du mobile. Existe donc pour le moment l’hypothèse
d’une cession.

La valorisation immédiate n’étant plus la priorité, les dirigeants de Bouygues Telecom ont eu le feu
vert pour réinvestir dans le réseau (UMTS) et dans la reconquête des clients. Dernier coup : le
lancement d’un forfait de communications illimitées le soir à partir de 20 heures tous les jours et vers
tous les numéros fixes ou mobiles, quel que soit l’opérateur. Une vraie révolution par rapport aux
offres actuelles, en général restreintes à quelques numéros ou aux abonnés du même opérateur. En
quelque sorte, comme Free dans l’accès Internet, Bouygues brise un tabou en forfaitisant totalement
les appels téléphoniques. Les concurrents crient au casse-cou, assurant que la rentabilité sera
introuvable.

Le groupe de BTP assure, de son côté, que si à court terme la marge de l’activité sera pénalisée, cette
offre est extraordinairement puissante en termes de fidélisation et d’attraction des gros
consommateurs. Comme elle vient en concurrence directe du téléphone fixe, elle est, de plus,
difficile à répliquer pour Orange vis-à-vis de sa maison mère France Télécom. Aux antipodes de cette
dernière qui ne jure plus que par la convergence, Bouygues Telecom fait le pari du tout-mobile et de
la forfaitisation. Pour accompagner plutôt que combattre l’irruption inévitable de la téléphonie sur
Internet dans le mobile.

Cela ne bouleversera pas la donne sur la marché du mobile mais procurera peut-être à terme une
rente suffisante à Bouygues pour lui laisser le temps de se trouver un nouveau métier et de le
financer. Alors, seulement, on pourra dire que le petit dernier est, comme dans les contes, le plus
malin de la bande.

TRAVAIL A FAIRE

1 – En vous appuyant sur le texte, donnez un exemple de « Facteur-Clé-de-Succès » et de « barrière à


l’entrée » sur le marché de la téléphonie mobile.

2 – Comment qualifiez-vous la structure concurrentielle du secteur de la téléphonie mobile ?

En faisant référence au schéma des forces concurrentielles de Porter, comment peut-on évaluer
l’attrait du secteur de la téléphonie mobile aujourd’hui ? Quelles sont les principales forces du
schéma de Porter qui vous semblent les plus pertinentes à prendre en considération ?

3 – Comment qualifieriez-vous la stratégie du groupe Bouygues lorsqu’il a décidé d’entrer sur le


marché de la téléphonie mobile ? (donnez une réponse précise et justifiée)

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4 – Supposons que, aujourd’hui, Orange ait 50% de parts de marché, SFR 35% et Bouygues Telecom
15%. Si vous deviez faire une matrice de portefeuille des activités de Bouygues selon le schéma du
BCG, dans quel quadrant de la matrice BCG situeriez vous le DAS « téléphonie mobile » ? Ce
positionnement vous semble-t-il cohérent au regard de la contribution de ce DAS pour le groupe
Bouygues, de la stratégie actuelle de Bouygues dans ce même DAS et de la recommandation du
modèle BCG pour le quadrant en question ?

5 – Par quelle stratégie générique Bouygues Telecom a-t-il essayé au départ d’obtenir un avantage
concurrentiel sur ses concurrents ? Pourquoi ce type de stratégie était-il difficilement tenable jusqu’à
la dernière offre (illimitée) ?

6 – Quelle expression du texte évoque ce que Porter appelle une stratégie de focalisation ?

APPLI 6 - CAS BASSIN ROANNAIS


La situation stratégique des entreprises du secteur textile-habillement dans le bassin roannais
La situation stratégique : la perte progressive d’autonomie de décision pour les entreprises du bassin
roannais.
(Extrait d’un rapport d’audit stratégique)

Le contexte concurrentiel s’est modifié depuis une quinzaine d’années, en raison de la concurrence
croissante des pays européens qui ont dévalué leur monnaie (Italie, Espagne au début des années 90),
d’abord, puis en raison des évolutions dans le secteur de la distribution (fin des années 90). On
supposera, dans la suite du texte, que les fabricants du bassin sont des entreprises effectuant en
totalité ou en partie les différentes opérations : tricotage (ou tissage), ennoblissement (apprêts des
matières), coupe et confection (assemblage).

La principale évolution, celle qui de fait induit les autres changements, concerne la modification de la
structure concurrentielle dans l’activité textile. Les dix dernières années semblent avoir marqué»,
pour le bassin roannais, le basculement d’une situation relativement stable vers une situation où le
pouvoir de marché est détenu par quelques demandeurs dominants, les centrales d’achat de la
grande distribution et les chaînes spécialisées (zara, Pimkie, H&M….…).
Auparavant, la situation était la suivante : existence d’un grand nombre d’offreurs sur le marché,
mais également d’un grand nombre de demandeurs (les détaillants clients directs des fabricants), et
surtout les produits vendus sur le marché n’étaient pas parfaitement substituables d’une entreprise
à une autre. Les producteurs devraient donc élaborer des politiques de produit et de prix visant à
convaincre de leur spécificité.
Cette situation présentait d’incontestables avantages, dans la mesure où elle évitait l’affrontement
direct entre fabricants, permettait l’arrivée de nouveaux entrants sur le secteur sans déséquilibrer le
jeu concurrentiel, ce qui était d’autant plus facile dans un secteur à maturité comme le textile que les
barrières à l’entrée sont faibles. De plus, comme les produits sont différenciés, cette situation
prémunit les entreprises contre les aléas de la demande générale, puisque chaque fabricant a sa
propre courbe de demande liée à son produit spécifique.
Cette situation donnait par ailleurs des marges de manœuvre stratégiques importantes. Chaque
entreprise pouvait en effet :

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- Se différencier « par le haut » : positionnement des produits sur le haut de gamme ; sur les
produits les plus sophistiqués ;
- Se différencier « par le bas » : produits positionnés bas de gamme, cette situation étant peu
probable dans le bassin roannais car les petites et moyennes entreprises qui le composent ne
sont pas armées pour lutter avec les pays à bas coûts de main-d’œuvre qui dominent ce
segment.
- Se différencier « horizontalement », c'est-à-dire avoir le même positionnement et les mêmes
prix que certains concurrents, mais faire porter la différenciation sur une coupe particulière,
un coloris… :
- Se focaliser sur une niche commerciale (produits techniques par exemple, ou produits à forte
valeur ajoutée).
La concentration dans la grande distribution et l’émergence progressive des chaînes spécialisées ont
profondément modifié le paysage concurrentiel. Les distributeurs constituent un intermédiaire
puissant entre les fabricants et les consommateurs finaux, dans la mesure où ils peuvent influencer le
comportement de ces derniers par leur propre politique de communication, qui se substitue à celle
des producteurs. Ils sont de plus en mesure d’imposer aux fabricants leurs conditions, de prix
notamment, mais aussi leurs exigences en termes de quantités, de délais.
Les fabricants du bassin roannais sont ainsi confrontés à des interlocuteurs dont le pouvoir de
négociation est sans commune mesure avec le leur. Les distributeurs tirent leur puissance d’une
superficie financière considérable et de l’accès aux marchés mondiaux, accès facilité par
l’amélioration et la baisse relative des coûts des moyens de communication et de transport. La fin
des accords multifibres en 2005 va rendre encore plus tangibles pour les fabricants français les
implications de cette mondialisation des échanges.
Du coup, face à ces clients, moins sensibles aux éléments de différenciation réels ou supposés des
produits de chaque entreprise qu’aux prestations associées (petites séries, délais, qualité, prix) les
fabricants du bassin roannais se voient imposer de nouvelles contraintes à peu près identiques pour
tous, et qui les privent d’une partie des degrés de liberté qu’ils avaient dans la situation précédente.
En tant qu’arme concurrentielle, la différenciation du produit perd de son efficacité, même s’il reste
des espaces possibles pour la focalisation sur quelques créneaux et pour une différenciation
« verticale » (ou « par le haut »). Avec le renforcement des intermédiaires de la distribution, la lutte
concurrentielle va porter de plus en plus sur les prestations offertes par les producteurs et, mais dans
une moindre mesure, sur les caractéristiques du produit lui-même. Or c’est bien sur le produit lui-
même et ses caractéristiques que notoriété du bassin s’est construite et que se sont constitués dans
le temps les apprentissages et l’expérience qui on fondé l’avantage concurrentiel fabricants roannais.
Autrement dit, ces derniers ont plus à convaincre aujourd’hui les distributeurs de la supériorité de
leur offre de services, pour laquelle ils ne disposent pas a priori d’avantages spécifiques, qu’à
chercher à fidéliser les consommateurs finaux par des caractéristiques différenciées de leurs
produits, ce qui était justement la base de leur réussite. La transformation de la structure du secteur
a conduit en quelque sorte à un déplacement et à une « dématérialisation » concomitante des
éléments sur lesquels repose l’avantage concurrentiel.
Même s’ils ont une perception lucide des menaces concurrentielles, les dirigeants des entreprises du
bassin restent en majorité peu enclins à s’engager de manière volontariste dans des actions
collectives pour y faire face ; ils se disent malgré tout prêts à s’associer à toute initiative allant dans
ce sens. On constate en réalité que les transformations du contexte concurrentiel tendent à
exacerber l’intensité de la lutte entre producteurs locaux. La « coexistence pacifique » peut alors
faire place à des tensions concurrentielles plus fortes à mesure que les difficultés vont s’amplifier. La
prise en compte de la nouvelle donne concurrentielle supposerait pourtant en théorie, à défaut
d’alliances locales qui auraient au moins le mérite de renforcer quelque peu le pouvoir de
négociation de la filière, des démarches collectives à plusieurs niveaux : fournisseurs, clients,
organisation de la chaîne logistique, promotion et communication institutionnelles…

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Travail à faire
1 – Faites une analyse du secteur « textile-habillement » dans le bassin roannais aujourd’hui, en
utilisant le schéma des formes concurrentielles de M. Porter.
2 - Comment pouvait-on qualifier la structure concurrentielle du secteur avant la montée en
puissance des distributeurs ? Justifier votre réponse en utilisant les éléments du texte.
3 – Comment qualifier la situation actuelle ? (Justifiez)
4 – A la lecture du texte, quels vous semblent être désormais les facteurs clés pour réussir dans le
secteur textile-habillement ?
5 – Elaborer la chaîne de valeur pour ce secteur en faisant apparaître les activités susceptibles de
constituer une source d’avantage concurrentiel.
6 – Sur quels éléments pourrait porter désormais une stratégie de différenciation pour les
entreprises du secteur ? Y a-t-il pour elles une autre stratégie générique envisageable?

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