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MÉCANISMES IMPLIQUÉS DANS LA PRÉ-ÉCLAMPSIE :

PROGRÈS RÉCENTS

par

S.A. KARUMANCHI et C. LAM*

La pré-éclampsie est caractérisée par la triade, hypertension artérielle, protéinu-


rie et œdèmes après 20 semaines de gestation [1-3]. Le tableau clinique peut être
dominé par une microangiopathie modérée à sévère dans laquelle les organes
cibles principaux sont le cerveau (éclampsie), le foie (syndrome HELLP) ou le
rein (endothéliose glomérulaire et protéinurie) [4]. Bien que la pré-éclampsie ait
été considérée traditionnellement comme une maladie spécifique de la grossesse,
des données récentes suggèrent que les femmes ayant une histoire de pré-éclampsie
ont un risque huit fois supérieur de mortalité cardiovasculaire au cours de leur vie
[5]. La pré-éclampsie survient uniquement en présence du placenta, même en
l’absence de fœtus (môle hydatiforme) ou en cas de grossesse extra-utérine et
s’estompe de manière dramatique en post-partum après l’expulsion du placenta
[6]. Les facteurs de risque pour la pré-éclampsie sont la nulliparité, une hyper-
tension artérielle préexistante, l’obésité, une maladie thrombogène (comme des
anticorps antiphospholipides, un facteur V Leiden) et une histoire familiale de pré-
éclampsie [7]. Des travaux antérieurs suggèrent que les modifications patho-
logiques les plus précoces dans la pré-éclampsie surviennent dans la circulation
utéroplacentaire résultant en une ischémie placentaire qui peut être considérée
comme le stade I de la maladie [2]. Dans le stade II, le placenta ischémique sécrète
des facteurs circulants qui provoquent une atteinte des cellules endothéliales chez
la mère entraînant le syndrome clinique de pré-éclampsie [2, 8]. Les mécanismes
physiopathologiques impliqués, notamment les données récentes concernant le
rôle du VEGF et du PIGF, seront détaillés dans cette revue.

* Departments of Medicine, Obstetrics and Gynecology, Beth Israel Deaconess Medical Center and
Harvard Medical School, Boston, MA, États-Unis.

FLAMMARION MÉDECINE-SCIENCES— ACTUALITÉS NÉPHROLOGIQUES 2004


(www.medecine.flammarion.com)
168 S.A. KARUMANCHI ET C. LAM

ANOMALIES DE LA PLACENTATION
ET ISCHÉMIE PLACENTAIRE

Plusieurs arguments suggèrent que l’ischémie placentaire joue un rôle central


dans la pré-éclampsie [4] : 1) l’examen histologique de placentas de grossesses
avec pré-éclampsie montre de nombreux infarctus placentaires et un rétrécissement
scléreux des artérioles [9, 10] ; 2) les biopsies du placenta de ces patientes ont
révélé une invasion trophoblastique inadéquate des artérioles déciduales maternel-
les conduisant à des vaisseaux étroits [11, 12] ; 3) les facteurs de risque maternels
de pré-éclampsie incluent des conditions médicales qui prédisposent les patientes
à une insuffisance vasculaire telles que l’hypertension artérielle chronique, le dia-
bète, le lupus et les maladies thrombogènes acquises ou héréditaires [7] ; 4) les
situations obstétricales comme les grossesses multiples ou les môles hydatiformes,
qui accroissent la masse placentaire mais avec une diminution relative du flux
sanguin, augmentent le risque de pré-éclampsie [7] ; 5) les modèles animaux de
pré-éclampsie consistent en la création d’une ischémie placentaire par perturbation
du flux sanguin [13, 14].
Durant le développement placentaire normal, le cytotrophoblaste envahit les
artérioles spiralées maternelles et les remodèle complètement pour former des vais-
seaux à grande capacitance avec une faible résistance [11, 12]. Cette invasion
endovasculaire du cytotrophoblaste implique le remplacement non seulement de
l’endothélium, mais aussi de la tunique musculaire média. Dans la pré-éclampsie,
il y a une invasion uniquement superficielle par le cytotrophoblaste des artérioles
utérines spiralées conduisant à une perfusion placentaire réduite et à une insuffi-
sance placentaire [15]. De façon paradoxale, même dans le placenta normal, il y
a peu ou pas d’invasion des veinules utérines. Le mécanisme primaire qui conduit
à une faible invasion/différenciation trophoblastique dans la pré-éclampsie est
inconnu ; cependant, des facteurs génétiques, immunologiques et environnemen-
taux (comme l’hypoxie et la malnutrition) jouent certainement un rôle. Des travaux
extensifs du groupe de Fisher suggèrent que des différences de tension en O2
seraient le primum movens régulant la capacité invasive du cytotrophoblaste [16,
17]. On considère que le remodelage des artérioles spiralées commence à la fin du
premier trimestre et est complété entre 18 et 20 semaines. Bien que l’âge gesta-
tionnel exact auquel l’invasion trophoblastique de ces artérioles cesse soit inconnu,
des études histologiques ont montré que l’invasion trophoblastique diminue dans
la colonne déciduale quand l’âge gestationnel augmente.
La différenciation des trophoblastes le long de l’invasion implique la modifi-
cation d’expression de plusieurs classes de molécules, incluant les cytokines, les
molécules d’adhésion et la matrice extracellulaire, les métalloprotéinases et les
molécules de classe Ib du complexe majeur d’histocompatibilité, HLA-G [18-20].
Durant leur différenciation, les trophoblastes modifient leur profil d’expression
de molécules d’adhésion, passant d’un phénotype épithélial (intégrines α6β4,
αVβ5 et E-cadhérine) vers un phénotype endothélial (intégrines α1β1, α5β3,
PECAM et V-cadhérine), un phénomène appelé pseudo-vasculogenèse [21, 22].
Des études in vitro et in vivo montrent que les trophoblastes de patientes atteintes
de pré-éclampsie ne subissent pas ces modifications phénotypiques et la pseudo-
vasculogenèse [23, 24]. Les voies de signalisation qui régulent cette pseudo-
vasculogenèse pourraient impliquer une grande variété de facteurs de transcription,
de facteurs de croissance et de cytokines [25]. Une attention considérable s’est
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récemment focalisée sur des facteurs impliqués dans l’angiogenèse comme le


VEGF, les angiopoïétines et la famille des éphrines. De façon intéressante, il a
été montré que les trophoblastes exprimaient VEGF, PIGF, VEGF-C et leurs
récepteurs. De plus, le blocage de leurs voies de transduction diminue l’expres-
sion de l’intégrine α1 (un marqueur de pseudo-vasculogenèse) in vitro [26].
Cependant, aucune expérimentation in vivo n’a pu à ce jour directement impliquer
la voie du VEGF dans le défaut de pseudo-vasculogenèse. Plus récemment, il a
été montré que les trophoblastes invasifs exprimaient aussi la L-sélectine, une
molécule d’adhésion nécessaire à l’extravasation des leucocytes [27]. Il a été
suggéré que des anomalies du système des sélectines à l’interface mère-fœtus
pourraient rendre compte des anomalies d’implantation dans la pré-éclampsie.
Finalement, l’expression de HLA-G par le trophoblaste, une molécule dont
l’expression est diminuée dans la pré-éclampsie, pourrait protéger les trophoblas-
tes de l’attaque par les cellules NK au site d’implantation [28].
Les modifications secondaires du placenta incluent l’athérome, la nécrose fibri-
noïde, la thrombose et l’infarctus [9]. Bien que toutes ces lésions ne soient pas
présentes chez toutes les patientes, il a été retrouvé une corrélation entre la sévérité
de la maladie et l’étendue de ce lésions. Le remodelage anormal des artérioles
spiralées entraîne une ischémie placentaire, qui à son tour entraîne la sécrétion de
facteurs solubles dans la circulation maternelle ; cependant, la preuve d’une rela-
tion causale entre la placentation anormale et le syndrome maternel fait défaut.

DYSFONCTION ENDOTHÉLIALE SYSTÉMIQUE

Une dysfonction endothéliale généralisée pourrait expliquer une grande partie


des aspects cliniques de la pré-éclampsie [29] : l’hypertension artérielle par ano-
malie du contrôle endothélial du tonus vasculaire, la protéinurie par une augmen-
tation de la perméabilité glomérulaire, la coagulopathie comme résultante de
l’expression anormale de facteurs procoagulants et la dysfonction hépatique secon-
daire à l’ischémie. Les résultats de plusieurs études supportent la théorie d’une
dysfonction endothéliale à l’origine des lésions maternelles dans la pré-éclampsie.
A été rapportée une augmentation des taux circulants de fibronectine, de fac-
teur VIII, et de thrombomoduline, tous marqueurs de souffrance endothéliale [30-
32]. La vasodilatation induite par le flux a été retrouvée altérée dans les vaisseaux
de patientes en pré-éclampsie, suggérant une dysfonction endothéliale [33, 34].
Une baisse de la production de molécules vasodilatatrices dérivées de l’endothé-
lium comme les prostacyclines, une augmentation des taux d’endothélines et une
réactivité accrue à l’angiotensine II suggèrent également une dysfonction endothé-
liale [35-37]. Les biopsies rénales de ces patientes ont révélé un gonflement endo-
thélial glomérulaire, appelé endothéliose glomérulaire [38]. Enfin, le sérum de
femmes en pré-éclampsie induit l’activation de cellules endothéliales de la veine
ombilicale in vitro [39].
De nombreux laboratoires ont essayé depuis des années d’identifier les
facteurs circulants responsables de cette dysfonction endothéliale. Plusieurs
groupes ont rapporté des altérations de cytokines/facteurs de croissance/molé-
cules tels que TNF-α, IL-6, IL-1β, Fas ligand, lipides oxydés et ADMA (asy-
metric dimethyl arginine) qui sont relargués par le placenta et/ou d’autres sources
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maternelles dans la pré-éclampsie [3, 40-42]. Cependant, il n’y a pas de preuve


que l’un de ces facteurs soit réellement à l’origine de la maladie. Récemment, la
neurokinine-B (proche de la substance P) a été retrouvée produite par les placentas
de pré-éclampsie, et pouvant induire une hypertension artérielle transitoire chez le
rat femelle, mais sans causer de protéinurie ou d’endothéliose glomérulaire [43].
La sensibilité accrue à l’angiotensine II, une anomalie constante de la pré-éclampsie,
pourrait être secondaire à une surexpression du récepteur à la bradykinine (B2)
[44]. Cette surexpression conduirait à une hétérodimérisation des récepteurs B2
avec le récepteur de type I de l’angiotensine II (AT1), et ce récepteur augmenterait
la réponse à l’angiotensine II in vitro. Il reste à démontrer que ces anomalies sont
pathogéniques et non des épiphénomènes. Des résultats très récents de notre labo-
ratoire et d’autres ont montré une expression et une sécrétion accrue de sFlt-1
(soluble fms-like tyrosine kinase 1, voir ci-dessous), un antagoniste naturel du
VEGF, chez les patientes atteintes de pré-éclampsie [26, 45, 46]. De façon très
intéressante, l’administration exogène de sFlt-1 seul chez le rat est capable
d’induire un syndrome proche de la pré-éclampsie [45].

sFlt-1 ET ÉTAT ANTI-ANGIOGÉNIQUE

Le VEGF est un mitogène spécifique des cellules endothéliales qui joue un rôle
clé dans la promotion de l’angiogenèse. Les activités du VEGF sont médiées par
son interaction avec deux récepteurs tyrosine kinase de haute affinité : KDR
(kinase-insert region) et Flt-1 qui sont sélectivement exprimés sur les cellules
endothéliales [47]. L’épissage alternatif de Flt-1 conduit à l’expression d’une pro-
téine endogène sécrétée appelée sFlt-1, qui n’a plus de domaine cytoplasmique et
transmembranaire, mais qui garde le domaine de liaison au ligand, VEGF [48, 49]
(fig. 1). Ainsi, sFlt-1 peut antagoniser le VEGF circulant en s’y liant et empêcher
l’interaction du VEGF avec ses récepteurs naturels. sFlt-1 se lie et antagonise aussi
PIGF, un autre membre de la famille du VEGF, produit principalement par le
placenta.
Des études in vitro confirment qu’un excès de sFlt-1 induit un état anti-angio-
génique dans le sérum des femmes atteintes de pré-éclampsie, qui peut être levé
par l’apport exogène de VEGF et de PIGF [45]. Un excès de sFlt-1 isolé, admi-
nistré à des rates enceintes, induit une albuminurie, une hypertension et des lésions
histologiques rénales d’endothéliose glomérulaire. Cet effet passe par la neutrali-
sation du VEGF et du PIGF circulant et par l’induction d’une dysfonction endo-
théliale. De plus, des taux abaissés de VEGF et de PIGF libres ont été retrouvés
en même temps que des taux élevés de sFlt-1 dans la circulation des patientes au
moment des premiers symptômes [45, 46]. Plus récemment encore, les taux cir-
culants de VEGF et de PIGF libres ont été retrouvés abaissés, bien avant l’appa-
rition des premiers signes cliniques [50, 51]. VEGF stimule l’angiogenèse et la
vasodilatation par la production de NO et de prostacycline (molécules dont les
taux sont abaissés dans la pré-éclampsie) [52]. De plus, un nombre significatif de
patients cancéreux recevant des antagonistes du VEGF développent une hyperten-
sion et une protéinurie [53, 54]. Une simple baisse de 50 p. 100 de la production
rénale de VEGF chez des souris génétiquement modifiées suffit à entraîner des
lésions d’endothéliose et une protéinurie [55]. Ces résultats suggèrent qu’un excès
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Membrane plasmique

Domaines extracellulaires 1-7 Domaine kinase


intracellulaire
1 2 3 4 5 6 7
Flt-1

1 2 3 4 5 6
sFlt-1

Domaine unique 31 AA C-terminal

Domaine de liaison au VEGF ou au PlGF

FIG. 1. — Structure des protéines Flt-1 et sFlt-1 à 7 domaines immunoglobine-like (IgG)


qui sont impliquées dans la liaison à VEGF, PIGF. La protéine sFlt-1 a un domaine
unique de 31 AA c-terminal dérivant d’un épissage alternatif et ne possède pas de
domaine transmembranaire et cytoplasmique.

de sFlt-1, en neutralisant VEGF et PIGF, pourrait jouer un rôle central dans la


pathogénie de la pré-éclampsie. Cependant, il reste des questions en suspens. Les
mécanismes précis conduisant à une production excessive de sFlt-1 par le pla-
centa ne sont pas connus et, de façon importante, le rôle de sFlt-1 dans le déve-
loppement normal du placenta et dans la pseudo-vasculogenèse n’est pas clair.
Il n’a pas été rapporté d’anomalies de la coagulation, d’anomalie cérébrale
(éclampsie) ou d’anomalie hépatique chez les animaux traités par sFlt-1. La rela-
tion de sFlt-1 avec les facteurs de risque de la pré-éclampsie n’est pas claire. Une
hypothèse suggère qu’il existe un seuil de sFlt-1, au-dessous duquel une gros-
sesse normale peut se développer et au-dessus duquel la pré-éclampsie survient ;
les femmes à risque pourraient représenter un groupe dont le seuil a été abaissé,
les rendant plus susceptibles au sFlt-1, ce qui conduit au syndrome maternel de
pré-éclampsie pour des niveaux proches de ceux d’une grossesse normale.
D’autres facteurs produits par le placenta agissant en synergie avec le sFlt-1 sont
vraisemblablement impliqués dans le développement de cette dysfonction endo-
théliale généralisée.

ANTICORPS AGONISTES DES RÉCEPTEURS AT1

La présence d’anticorps circulants contre le récepteur AT1 de l’angiotensine II


(AT1-AA) a été rapportée chez les femmes atteintes de pré-éclampsie [56]. Ces
anticorps stimuleraient le récepteur AT1 et participeraient ainsi aux lésions vas-
culaires induites par l’angiotensine II chez la patientes en pré-éclampsie [57, 58].
Des données récentes de Dechend et coll. ont montré que ces anticorps pouvaient
stimuler la NADPH oxydase des trophoblastes et des cellules vasculaires muscu-
laires lisses et suggèrent que la NADPH oxydase puisse être une source importante
172 S.A. KARUMANCHI ET C. LAM

de l’élévation de ROS (reactive oxygen species) retrouvée dans la pré-éclampsie


[59]. Cependant, l’implication directe des AT1-AA dans la pré-éclampsie n’a pas
été établie. De plus, la relation temporelle entre ces auto-anticorps et le syndrome
clinique n’a pas encore été rapportée. Il reste également à déterminer si ces anti-
corps agissent en synergie avec d’autres protéines comme le sFlt-1, pour induire
une dysfonction endothéliale généralisée ou s’ils résultent simplement des lésions
endothéliales diffuses. Enfin, la source de l’antigène responsable de ces anticorps
n’a pas été identifiée.

RÔLE DE L’ACIDE URIQUE

Des travaux récents suggèrent que l’hyperuricémie joue un rôle dans le déve-
loppement de l’hypertension et du syndrome maternel [60]. L’hyperuricémie dans
la pré-éclampsie résulte principalement de la baisse de l’excrétion rénale par baisse
de la filtration glomérulaire [61]. Il y a aussi probablement une production exces-
sive d’acide urique par le placenta ischémique [62]. Souvent, l’élévation de l’uri-
cémie précède le développement de l’hypertension et de la protéinurie [63, 64], et
les taux d’uricémie sont corrélés à un mauvais pronostic, suggérant que l’acide
urique puisse avoir un rôle causal [65]. Des travaux expérimentaux chez le rat
rendu hyperuricémique par l’administration d’acide oxonique (un inhibiteur de
l’uricase) montrent l’apparition d’une hypertension, d’une hypertrophie glomé-
rulaire et d’une albuminurie [66-69]. Cependant, ces animaux n’ont pas d’endo-
théliose, suggérant que l’acide urique joue probablement un rôle contributif mais
non initial dans le développement de la pré-éclampsie.

CONCLUSION

La pré-éclampsie semble être une maladie en deux étapes avec une étape initiale
de syndrome placentaire qui est suivie par le syndrome maternel (fig. 2). Le syn-
drome maternel dans la pré-éclampsie correspond à un état de dysfonction endo-
théliale généralisée secondaire à un excès de facteurs circulants toxiques pour
l’endothélium (comme le sFlt-1) qui sont relargués par le placenta pathologique.
La compréhension des mécanismes conduisant à l’ischémie placentaire dans la pré-
éclampsie devrait nous éclairer sur la pathogénie de la pré-éclampsie. Les études
futures devront caractériser les diverses protéines circulantes élaborées par le pla-
centa ischémique et comprendre leur interaction avec les facteurs pathogènes déjà
identifiés tels que les AT1-AA, l’acide urique et le sFlt-1. Les études génétiques
multicentriques en cours (telle GOPEC, Genetics of pré-éclampsie) pourraient
nous renseigner sur l’importance des facteurs de prédisposition génétique à la pré-
éclampsie [70]. Bien que les progrès de l’obstétrique et de la néonatalogie aient
réduit considérablement la morbi-mortalité de la pré-éclampsie (spécialement dans
les pays développés), il n’y a pas eu de véritable révolution thérapeutique dans le
traitement de la pré-éclampsie depuis 40 ans. Les résultats initialement prometteurs
de traitements par l’aspirine et la supplémentation calcique n’ont pas été confirmés
dans de larges études randomisées [71-73]. Des approches thérapeutiques visant à
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Facteurs génétiques Facteurs environnementaux Facteurs immunologiques

Stade I Placentation anormale

sFlt-1
Stade II PlGF & VEGF
Autres facteurs maternels ? (ex. Uric Acid, AT1-AA)

? Dysfonction vasculaire systémique


?

Protéinurie Anomalies de la coagulation


Hypertension
Endothéliose glomérulaire (HELLP) Œdème cérébral (éclampsie)

FIG. 2. — Schéma résumant les mécanismes impliqués dans la pathogénie de la pré-éclampsie.

restaurer la fonction endothéliale avec des agents tels que le VEGF, le PIGF, les
prostacyclines, devraient être testées chez les patientes ayant une maladie sévère
pour espérer retarder l’accouchement sans mettre en danger la mère. Les compli-
cations à long terme cardiovasculaires et métaboliques chez les femmes atteintes
de pré-éclampsie devront être clarifiées.

Remerciements

Nous remercions vivement Bertrand Knebelmann d’avoir bien voulu se charger


de la traduction de ce texte.

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