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Chapitre- Conflits et mobilisation sociale Référentiel 

: syndicats, mouvements sociaux,


institutionnalisation des conflits, mobilisation collective,
identités, valeurs, groupes de pression

Fiche 3 – La transformation des conflits sociaux dans la société


contemporaine

Partie 1 –Une remise en cause des conflits sociaux traditionnels ?

I. Depuis le XVIII° siècle, les conflits sociaux étaient essentiellement des conflits du travail repris
du manuel en ligne Brises)

Depuis que les sociétés sont entrées dans la modernité, depuis le 18 ème siècle environ, l’essentiel des conflits sociaux s'est déroulé
sur le terrain du travail et de l’emploi. On peut essayer de comprendre pourquoi : le travail occupe, directement ou
indirectement, l’essentiel de la vie des individus, en temps d’abord (et bien plus au 19 ème siècle qu’aujourd’hui) et aussi parce
qu’il est à l’origine de certaines des inégalités dont nous avons parlé dans le dernier chapitre (revenus en particulier). C’est aussi
dans le travail que se noue une bonne partie des relations sociales qui entourent (et intègrent) l’individu. Pour toutes ces
raisons, auxquelles il faut ajouter la valeur hautement symbolique du travail, les conflits sociaux sont bien souvent nés
dans le monde du travail depuis la naissance du capitalisme.
C’est la première question qu’il faut se poser : pourquoi le travail est-il une source de conflit social ? Nous allons pour cela
réutiliser ce que nous avons vu dans les chapitres précédents, tant sur les inégalités que sur la division du travail - la division,
c’est déjà un peu le conflit ! Mais nous verrons qu’il y a un autre facteur de conflit social, c’est ce que l’on appelle la capacité de
mobilisation d’un groupe social, c’est-à-dire la capacité des individus qui le composent à agir en commun, de façon coordonnée
et au profit de buts communs.

A. - Les inégalités du monde du travail peuvent déboucher sur des conflits.

 Les inégalités suscitent le conflit quand elles ne sont pas acceptées.. Les inégalités font partie du fonctionnement de
l’économie, mais on a vu qu’il est très difficile de leur trouver une justification consensuelle. Les inégalités sont souvent
l’enjeu des conflits sociaux : on se bat pour accroître la part des salaires dans la valeur ajoutée au détriment des profits,
ou pour améliorer sa rémunération par rapport aux autres métiers de l’entreprise.

 Mais les inégalités ne suffisent pas à engendrer un conflit social, parce qu’elles peuvent susciter une compétition
entre les individus plutôt qu’entre les groupes. C’est une analyse somme toute assez classique et assez simple. Si un
individu n’est pas satisfait de sa situation sociale, il peut l’améliorer de deux façons : soit en changeant de position dans la
société en obtenant une promotion individuelle, soit en agissant pour améliorer le sort de tous ceux qui ont la même
position sociale que lui – c’est-à-dire de son groupe social. Dans ce dernier cas, il y a effectivement un conflit collectif.
Mais dans le premier cas, il n’y a qu’une compétition entre individus pour parvenir aux meilleures places offertes par
l’entreprise ou la société. On ne peut pas parler à ce moment-là de “ conflit social ”.

 La plus ou moins grande mobilité sociale entre les métiers joue aussi sur la capacité de mobilisation. S’il existe une
grande fluidité entre les positions dans l’entreprise, si l’on peut facilement obtenir une promotion individuelle, alors un
individu peut espérer améliorer sa situation personnelle par son seul mérite, sans agir au profit de l’ensemble de son
groupe social. Mais si la mobilité sociale est faible, si les métiers restent fermés les uns aux autres, alors les
revendications personnelles passeront d’autant plus par une revendication collective
 les inégalités ne sont pas à elles seules la cause des conflits sociaux.
B - Ces inégalités et ces conflits finissent par constituer les individus en groupes rivaux.

Les différentes organisations du travail aboutissent toujours à différencier et hiérarchiser les tâches dans l’entreprise, mais cette
division horizontale et verticale du travail est aussi une division des travailleurs, donc une source de conflits potentiels.
Comment passe-t-on de la division au conflit social ? Ce n’est pas si simple qu’on peut le croire. Le point essentiel est que la
division du travail peut renforcer la conscience d'appartenir à un groupe social.
 La division du travail entraîne la différenciation des travailleurs et donc l’émergence d’identités professionnelles
distinctes. Construire son identité professionnelle, c’est revendiquer certaines appartenances, se reconnaître une certaine
position dans le groupe et dans sa hiérarchie, se sentir différent d’autres individus (n’appartenant pas au groupe, en
général). L’identité professionnelle, c’est aussi les valeurs partagées au sein du collectif de travail, au sein d’un métier.
Ces valeurs peuvent changer en fonction de ce que l’on fait dans l’entreprise (on peut penser à la solidarité des mineurs
face à la pénibilité et la dangerosité de leur métier), mais aussi en fonction de ce que l’on est (la féminisation d’un métier
peut en changer les valeurs).
 Les identités professionnelles deviennent facilement concurrentes dans l’entreprise. On veut dire par là que les
valeurs des groupes sociaux s’opposent sur toutes les questions qui concernent l’entreprise, et au-delà la société – un peu
comme une culture et une contre-culture, revoyez votre cours de première. Le premier point d’opposition est bien sûr les
inégalités de rémunérations. Chaque groupe a une idée différente de la valeur des métiers, et donc des inégalités “ justes ”
ou “ injustes ” L’affirmation d’une identité professionnelle fait donc non seulement apparaître un groupe social,
mais elle lui donne aussi un adversaire.
 L’organisation matérielle du travail est un autre déterminant de la construction de la conscience du groupe. Si les
individus sont dispersés et travaillent séparément, sans se rencontrer, il leur sera très difficile de se coordonner pour agir.
Marx expliquait ainsi au 19ème siècle que les paysans français étaient trop dispersés géographiquement pour agir, bien
qu’ils aient eu matière à se révolter. Inversement, le regroupement des ouvriers dans les ateliers puis dans les grandes
usines, où l’on travaille ensemble, fait la pause ensemble, mange ensemble, où l’on se rencontre en allant au travail et en
repartant chez soi, a incontestablement favorisé l’organisation de la classe ouvrière. Plus près de nous, la connexion des
individus sur Internet a facilité la réussite du mouvement des chercheurs, en permettant la circulation des informations,
des mots d’ordre et des pétitions.
 Pour qu’il y ait un conflit du travail, il faut donc qu’il y ait un conflit d’intérêt, autour des inégalités dans l’entreprise.
Il faut aussi qu’il y ait des identités collectives fortement affirmées pour que le conflit prenne une dimension sociale, et
oppose des groupes les uns aux autres. Enfin, il faut que ces groupes se mobilisent, c’est-à-dire que les individus qui les
composent acceptent d’agir ensemble avec des objectifs communs. Mais la relation entre conflit et identité
professionnelle fonctionne également dans l’autre sens. Ainsi, un conflit peut déboucher sur l’affirmation renouvelée
et vivante d’une solidarité retrouvée, et donc reconstituer un groupe social. Ainsi, le conflit des infirmières, au milieu des
années 90, permit à celles-ci d’affirmer et d’afficher une solidarité qui ne s’était jamais réellement exprimée jusque-là et
de s’éprouver elles-mêmes comme membres d’un collectif de travail.

C- Les conflits portés par ces groupes finissent par déborder du cadre du travail proprement dit pour
concerner l'ensemble de la société

 L’opposition entre ouvriers et bourgeoisie a pris une valeur politique. Au début du 20ème siècle, le clivage entre la
gauche et la droite s’est progressivement confondu avec le clivage entre travailleurs et capitalistes. Au fur et à mesure que
les ouvriers devenaient numériquement plus importants (au détriment notamment des agriculteurs, qui avaient une toute
autre vision du monde), le conflit politique s’est cristallisé sur la question de la propriété, la gauche, représentant les
salariés, voulant “ nationaliser ” le capital, c’est-à-dire exproprier les capitalistes pour qu’ils ne contrôlent plus les
entreprises, et donc pour résoudre le conflit social par la disparition d’un des adversaires ! Symétriquement, la droite
défendait le droit de propriété comme principe, et donc le pouvoir des actionnaires dans l’entreprise. Moins radicalement,
l’enjeu politique entre la droite et la gauche était aussi l’adoption de lois et de règlements qui limitaient le pouvoir des
employeurs sur les salariés (Semaine de 40h, Congés payés, Droit du travail, protection contre les licenciements, mais
aussi indemnisation du chômage).

 L’opposition entre ouvriers et bourgeoisie a pris une valeur culturelle. Chaque groupe a affirmé ses valeurs, et son
mode de vie. La “ culture ouvrière ” était nourrie de la fierté du métier : essentiellement masculin, le travail ouvrier
supposait souvent la force physique, des connaissances et astuces, essentiellement pratiques, qui se transmettaient au sein
de l’atelier. La “ culture bourgeoise ” était ce qu’on appellerait aujourd’hui la culture savante, celle qu’on transmet à
l’école et à l’université (littérature, musique classique, sciences, beaux-arts, …). Les loisirs des deux groupes n’étaient pas
non plus les mêmes, d’ailleurs l’obtention d’un droit aux congés payés en 1936 avait une valeur conflictuelle
symbolique : jusque-là les vacances étaient l’apanage de la bourgeoisie.
 L’opposition entre ouvriers et bourgeois a engendré une véritable ségrégation sociale. Elle était visible dans la
structure des villes, où les “ quartiers ouvriers ” – généralement les banlieues où la périphérie des villes – s’opposaient
aux “ beaux quartiers ” – le centre-ville. Mais on la retrouvait aussi à l’école, puisque les enfants des classes populaires et
supérieures ne fréquentaient pas les mêmes cursus scolaires. Il a fallu attendre 1975 et la création du collège unique pour
que tous les écoliers suivent la même scolarité obligatoire.

 On voit donc que le conflit social, initialement circonscrit à l’entreprise, s’est étendu à toute la société, ce qui justifie que
l’on parle de classes sociales plutôt que de groupes sociaux, puisque les groupes ne rassemblent plus seulement, par
exemple, les ouvriers d’une entreprise, mais tous les ouvriers de la société. De même, le conflit social mérite l’appellation
de “ lutte des classes ” parce qu’il prend une valeur générale.

A. Des conflits menés par les syndicats de salariés

Rappel historique : Les corporations sont dissoutes par la loi d’Allarde , en 1791. La même année la loi Le Chapelier interdit
toute association en vue de défendre les intérêts communs car l’association des travailleurs est considérée comme une entrave au
fonctionnement du marché. Les syndicats demeurent interdits en France durant la majeure partie du 19ème siècle.
Le droit de grève n’est légalisé qu’en 1864. Et il faut attendre encore 20 ans (1895) avant que le droit syndical ne soit reconnu en
France .

Conséquences : Le syndicalisme s’est donc développé tardivement par rapport à la révolution industrielle. Il faut attendre 1906
pour que la CGT fixe ses principes d’action dans la charte d’Amiens :
 le syndicat est l’outil des améliorations immédiates , arrachées au patronat dans les luttes quotidiennes (demandes
d’augmentation de salaires, journée de 8 heures, etc.)
 Le syndicat à néanmoins un objectif plus ambitieux (cf. le principe d’historicité de Touraine) : renverser la société
capitaliste, il dispose pour cela d’une arme : la grève générale .
 Le capitalisme disparu , le syndicat sera le groupement de base de production et de répartition .

Définition du syndicat : association assurant l’organisation et la défense des salariés pour la


reconnaissance et le respect de leurs droits professionnels, économiques et sociaux

Constat : Néanmoins le syndicalisme aura des difficultés à s’implanter en France : il connaîtra deux âges d’or :
 les grandes grèves de 36
 les années 50 durant lesquelles selon A Beuve-Mery : « le syndicalisme a le vent en poupe. Se syndiquer est alors la norme.
Dans une France à reconstruire, à l’échelon local dans une usine, ou une administration, les syndicats sont une structure
d’accueil, un lieu de formation et d’éducation ».

Ce que représentent les syndicats en entreprise. Centre d’études de l’emploi. Septembre 2009 par Thomas
Amossé et Loup Wolff. Connaissance de l’emploi n°69, septembre 2009.

Sur le site de la Dares : 2007-08.1 - Des conflits du travail plus nombreux et plus diversifiés

II. Une remise en cause des conflits sociaux traditionnels

A. Les mutations de la classes ouvrière ( p 148 à 150) : repris du manuel en ligne Brises
Les transformations du travail et les mutations de la classe ouvrière remettent-elles en cause la division de la société française en
classes sociales antagonistes ? C’est ce que pensent certains sociologues, et nous allons présenter leurs principaux arguments.

1. La diminution de la part des ouvriers dans la population active

Le recensement de mars 1999 en France met en évidence la poursuite du mouvement amorcé dès le milieu des années 1970 : les
ouvriers étaient encore plus de 7 millions en 1982, ils étaient 6.5 millions environ en 1990 et 5.9 millions seulement en 1999.
Cela représente une diminution de plus de 15%  des effectifs ouvriers entre 1982 et 1999, alors que, dans le même temps, la
population active occupée augmentait. Résultat : la part de la P.C.S. “ ouvriers ” dans la population active occupée a encore plus
nettement diminué que ses effectifs : elle est passée de 32.8% de la population active occupée en 1982 à 25.6% en 1999 (Insee,
recensements de la population), soit une diminution de 22% environ.  Aujourd’hui, la part des ouvriers dans la population active
est inférieure à celle des employés.
2. La transformation de la nature du travail des ouvriers

 la première grande transformation est que les ouvriers travaillent de plus en plus souvent dans les services, comme les
chauffeurs routiers, par exemple. Ainsi, en 2001, il y a plus d’ouvriers travaillant dans le tertiaire que d’ouvriers
travaillant dans le secondaire
 La deuxième transformation touche la qualification des ouvriers : la qualification personnelle des ouvriers s’est plutôt
élevée (il y a davantage de diplômes professionnels) mais ils exercent souvent un emploi dont la qualification est
inférieure à celle qu’ils possèdent (31% des salariés embauchés pour un emploi ne nécessitant pas officiellement de
qualification sont titulaires d’un CAP ou d’un BEP). Le nombre des emplois d’ouvriers non qualifiés avait beaucoup
diminué entre 1982 et 1994 mais il a réaugmenté entre 1994 et 2001. Au total, la part des emplois d’ouvriers qualifiés
dans l’ensemble des emplois ouvriers progresse cependant.

 Taille des entreprises et du collectif de travail( 6 p 185) : parce que la nature du travail a changé, la taille des
entreprises dans lesquelles travaillent les ouvriers a beaucoup diminué. Cela s’explique d’une part par l’automatisation
des tâches de production proprement dites : certaines usines sont aujourd’hui quasi “ désertes ”, d’autre part par le fait
que les ouvriers travaillent de plus en plus souvent dans des entreprises du tertiaire qui sont traditionnellement, en
moyenne, de taille inférieure à celle des entreprises industrielles. Le cadre de travail des ouvriers a donc été
bouleversé : les grands rassemblements ouvriers à l’ouverture des grilles de l’usine ne font bien souvent plus partie de
l’expérience vécue par les ouvriers. Mais le fait que la taille de l’entreprise diminue ne signifie pas que les ouvriers
seront plus proches du patron : en règle générale, ces petites entreprises appartiennent à de grands groupes industriels et
financiers et le pouvoir est en général bien loin du lieu de production.

 Les transformations récentes du travail et de l’emploi (précarisation du travail, suppression de certains emplois non
qualifiés, par exemple d’ouvriers, individualisation de la carrière des salariés, etc…) agissent aussi sur l’identité
professionnelle : les frontières de l’emploi sont plus floues, les métiers se transforment, les horaires sont “ à la carte ”,
l’individu semble triompher et les collectifs de travail semblent moins englobants, moins contraignants pour les
individus, mais aussi moins protecteurs. L’identité professionnelle semble donc moins “ imposée ” à l’individu qui
doit bien davantage trouver ses repères seul pour la construire. Dans ces conditions, on voit bien que la mobilisation en
vue d’un conflit sera sans doute plus difficile à obtenir.

3. La transformation de la culture ouvrière

- La précarisation du travail et l’expérience du chômage (qui touche proportionnellement plus les ouvriers que les
autres P.C.S.) dévalorisent le travail ouvrier, tandis que le changement de la nature du travail ouvrier (moins
directement en contact avec la matière et la production) attaquent directement sa spécificité.
- De même, les conditions de vie des ouvriers se sont transformées, semblant rejoindre celles d’une vaste “ classe
moyenne ” : d’une part, les revenus, et donc la consommation, se sont élevés rapidement durant les années 1960
et 1970, permettant aux ouvriers d’accéder aux biens de consommation durables comme la télévision, la machine
à laver ou l’automobile ; d’autre part, les modes de vie des ménages ouvriers se sont également transformés par
le développement du travail des femmes d’ouvriers, l’allongement de la durée de scolarisation des enfants
d’ouvriers et le développement de l’accession à la propriété grâce au crédit.
- Au final, les conditions de vie semblent s’égaliser avec celles d’autres groupes sociaux et les éléments qui
contribuent à forger et à transmettre la culture ouvrière semblent peu à peu disparaître.

Un dossier de libération traduit tres bien la crise de la classe ouvriere : ici

B. Une crise du syndicalisme ( p 166-168)

L’échec des grandes grèves de la fin des années 40, les répercussions de la guerre froide, le manque de cohérence de l’action
syndicale qui hésite entre l’action directe et la négociation par branche vont entraîner un tassement des effectifs qui seront divisés
par deux durant les années 50, avant de se stabiliser jusqu’à la crise actuelle.

1. Constat : une perte d’audience ( 2 p 167)

 Le taux de syndicalisation passe de 25 % en 65 à 7-9 % aujourd’hui


Pour l’évolution du taux de syndicalisation : ici
 Une présence syndicale et un taux de syndicalisation très inégaux
 suivant la taille de l’entreprise : la présence syndicale sur le lieu de travail varie de 8%(entreprises de moins de
50 salariés) à 81%(entreprises de plus de 500 salariés)
 suivant le statut de l’individu : un salarié en CDI sur 10 est syndiqué, un salarié en CDD sur 25 est syndiqué
 suivant le statut : le taux de syndicalisation des fonctionnaires est 3 fois plus élevé que celui des salariés du
privé

 Le taux de syndicalisation varie énormément entre pays :


 Il est supérieur à 70% dans les pays scandinaves
 Pour tomber à moins de 20 % dans les pays du Sud de l’Europe et en France

Pour des statistiques plus précises : ici

 Une érosion de la participation aux élections professionnelles qui se traduit par une montée de l’abstention , un
accroissement du pourcentage des votes en faveur des non syndiqués .

 une hausse de la part des votes en faveur des non syndiqués lors des élection aux comités d’entreprise qui passe de
12% en 1966 à 30% en 1993 avant de redescendre à 25% en 1999.

 Une diminution des conflits du travail (1 à 4 p 164-165) après le record de mai 68 : 15 millions de journées perdus pour
fait de grève ; on observe dans les années 70 , une moyenne autour de 3,5 millions de journées , dans les années 80 la
moyenne passe à 1,5 millions , dans les années 90 elle passe à 500 000 , mais remonte légèrement lors de la reprise
économique de 1998-2000 pour atteindre en 2000 : 800 000( p 188)

Pour en voir l’évolution : ici

 La chute est encore plus spectaculaire si l’on ne retient pas les salariés de la fonction publique :

 On constate de plus que le taux de conflictualité varie en fonction


 de la taille de l’entreprise (taux de conflictualité d’autant plus faible que la taille de l’entreprise
est réduite : 3p 164)
 du secteur d’activité (la conflictualité est plus forte dans l’industrie que dans le tertiaire : 3 p164)
 de la part des précaires dans l’entreprise ( plus la part des précaires est forte plus la fréquence
des conflits est faible : 4 p 165)

 On constate que les salariés sont certes majoritaire à considérer que les syndicats jouent un rôle irremplaçable dans la
représentation des salariés (63%des ouvriers, 54%des cadres). Mais un pourcentage fort de salariés considèrent que les
syndicats font passer leurs intérêts avant ceux des salariés (55% des ingénieurs,48 % des employés)

Pour les statistiques : ici

Sur le site de la Dares :


 le paradoxe du syndicalisme français (doc avril 2008) (pdf - 248.6 ko)
 Présence syndicale : des implantations en croissance, une confiance des salariés qui ne débouche pas sur des adhésions
(pdf - 346.5 ko)
 Présence et activité des organisations syndicales (pdf - 190.4 ko)
 Mythes et réalités de la syndicalisation en France (pdf - 152.7 ko)

2. Les explications théoriques

a ) le paradoxe d’Olson (1 p 379).

Constat :Il montre que l’existence d’un groupe non organisé d’individus aux intérêts communs , dotés de moyens d’action et
conscients de leurs intérêts n’implique pas automatiquement , contrairement aux intuitions de type marxiste , l’apparition d’une
action collective .

Explications : En effet, quand le produit obtenu par une telle action est un bien ou un service collectif ( ex : une augmentation de
salaire pour tous ) et lorsque le groupe est assez large pour que des pressions ne s’exercent pas sur les individus afin de l’inciter à
l’action , alors se produit le phénomène du passager clandestin ( lson construit son analyse dans une perspective libéral puisqu’il
adopte le modèle de l’homo-oeconomicus égoiste et rationnel) :
 Chaque individu va se dire que puisqu’il peut profiter de l’action sans avoir à agir lui-même,
 il aura intérêt à laisser les autres dépenser de leur temps et de l’énergie pour se procurer les biens publics.

conséquences : Ceci doit , selon Olson , permettre d’expliquer l’absence de mouvements collectifs : en France et en Allemagne ,
les résultats de l’action de la grève s’appliquent à tout le monde ( syndiqués et non syndiqués ) ; il est interdit de faire une
discrimination , ce qui n’est pas une incitation à la syndicalisation .
Conclusion : Pour que la syndicalisation se développe , il faut que les syndicats offrent à leurs membres des incitations sélectives
 soit pénaliser le refus de participation à l’action ( ex : dans un petit groupe , rompre la solidarité peut entraîner une mise à
l’écart ) .
 soit accorder des avantages spécifiques : protection juridique du salarié , postes dans l’organisation , ...

Un diaporama de C .Thuderoz : Sociologie du SYNDICALISME

b ) le modèle d’OBERSHALL .

remarque : Son analyse se situe explicitement dans la perspective de celle d’Olson mais elle est enrichie par une approche
sociologique qui cherche à définir quelles sont les conditions sociales susceptibles de favoriser l’émergence de mouvements
sociaux au sein d’une collectivité.
Présentation de l’analyse : Obershall croise deux dimensions pour expliquer la probabilité d’une organisation et d’une
mobilisation d’un collectif :

 Première dimension : la dimension horizontale qui renvoie à la nature des lien sociaux existant au sein de la
collectivité , c’est-à-dire la cohésion sociale du groupe . Obershall distingue 3 cas :
- relation de type communautaire : famille , village , clan , comme dans les sociétés traditionnelles .
- relation de type associatif : groupe professionnel , religieux , économique comme dans les sociétés industrielles .
- contrairement au troisième cas où les relations sociales sont peu développées .

Remarque : Dans ces 2 premiers cas , le sentiment de solidarité du groupe et son potentiel de mobilisation sont élevés

 Deuxième dimension : la dimension verticale renvoie au degré d’intégration sociale et politique entre les différents
groupes . Il est possible de mesurer ce niveau d’intégration par l’étendue des liens entretenus avec les groupes supérieurs
au sein de la pyramide sociale et politique .2 types sont alors distingués :
- dans les sociétés segmentées où les groupes sont peu intégrés , là où la mobilité ascendante est faible , les groupes
devront compter sur eux-mêmes pour faire entendre leur voix , leurs revendications . La segmentation est donc
propice à la mobilisation.
- dans les sociétés où l’intégration est forte, les groupes peuvent faire entendre leurs voix qui seront prises en
compte , ce qui réduit la probabilité de la mobilisation .
 Obershall croise alors les deux dimensions et essaye d’expliciter les modalités de mobilisation des groupes.

Pour l’exemple des Etats-Unis : ici

Pour les limites de des analyses : ici

Un article d’Obershall : Melchior - Le site des sciences économiques et sociales ...

III. Ces conflits du travail restent présents mais sous une forme différente

A. Le changement de rôle des syndicats : une institutionnalisation des syndicats (1 à 3 p 168-169)

On assiste aujourd’hui à une situation paradoxale : le taux de syndicalisation en France n’a jamais été aussi faible. Pourtant les
syndicats n’ont jamais été aussi reconnus comme interlocuteurs privilégiés des patronats et de l’Etat
Comment expliquer ce paradoxe ?
 jusqu’aux années 30 , les syndicats n’étaient pas reconnus comme interlocuteurs privilégiés . Pour faire entendre leurs
voix, les syndicats devaient mobiliser un nombre important de salariés , en particulier dans des manifestations . Le syndiqué
était un adhérent qui militait et participait à la vie du syndicat . Le syndicat développait une contre-culture qui avait pour
objectif de détruire la société capitaliste .
 au contraire , à partir des années 30 mais surtout après 45 , avec la création de la Sécurité Sociale , des comités
d’entreprise, des ASSEDIC , enfin avec les lois d’Auroux en 82 , on va observer une évolution qui se caractérise :
- par une reconnaissance institutionnelle des syndicats qui ont contribué à les légitimer et à les intégrer à la société
civile , qui ont donné aux syndicats une audience plus large , des ressources financières en les liant étroitement à
toutes les institutions de la société .
- Une autre conception du syndicalisme s’est développé : le syndicalisme essaye d’économiser la grève ; il l’utilise
comme un moyen de pression , il la brandit comme une menace .

conséquences : Ceci traduit une évolution de la stratégie syndicale : conformément à l’analyse de Simmel :
 jusqu’aux années 30 les conflits sociaux opposaient patronat et syndicats qui chacun développaient une culture et c’était
deux modèles de société qui s’opposaient .
 A partir des accords de Matignon au contraire , on passe de la dyade à la triade : de l’affrontement binaire où chacune des 2
parties en présence pouvait avoir le sentiment qu’elle triompherait totalement et imposerait sa manière de voir à
l’adversaire terrassé , on passe à des rencontres tripartites où la grève n’est plus qu’un moment de la négociation .
 La grève n’est plus alors qu’un signal avertisseur qui demande une intervention des pouvoirs publics .

Conclusion : dès lors les syndicats recourent de moins en moins à la mobilisation sous forme de grève ou de
manifestations : la grève est vue comme pathologique , comme l’échec d’une négociation ( ex : le modèle allemand de référence )
.

Conséquence : Mais alors le syndicat a de moins en moins besoin de syndiqués . P.Rosanvallon pose même la question :
qu’arriverait-il si les syndicats n’avaient plus d’adhérents ?:
 «  La légitimité syndicale serait-elle remise en cause ? Pas forcément : un taux marginal d’adhésion n’entraînerait pas de
basculement qualitatif par rapport à la situation actuelle , l’adhérent a en effet cesser de jouer un rôle déterminant dans le
phénomène syndical . »
 Dans la perspective d’une disparition des adhérents , la forme syndicale tendrait à se confondre avec la forme politique ,
seul le domaine d’intervention de chacune d’elle les distinguant .
 La légitimité syndicale deviendrait , comme celle des partis d’essence purement électorale ( le parti politique n’a pas besoin
d’adhérents , le nombre d’adhérents n’est pas le critère de sa représentativité , seuls comptent les résultats électoraux )

Apparition d’un nouveau modèle :On assiste d’ailleurs selon P Rosanvallon à une nouvelle conception du syndiqué qui :
 n’est plus considéré comme un adhérent, partageant avec les autres membres du syndicat des valeurs, une culture,
 mais qui devient un client .

conséquences : dans ce contexte , étudier la crise du syndicalisme par rapport à la chute du taux de syndicalisation n’est
pas un bon choix , car l’indicateur n’est pas bon . Pour étudier la représentativité syndicale , il faut étudier les résultats des
syndicats aux différentes élections .

mais cela entraîne une nouvelle conception du syndiqué auquel le syndicalisme français n’est pas encore complètement
préparé :
 On aurait d’un côté le délégué syndical qui siégerait dans de multiples commissions , le syndicalisme devenant un métier à
temps plein ;
 et de l’autre côté , le syndiqué qui ne serait plus qu’un client qui adhère pour obtenir des services .
 Ceci n’est pas sans danger car les délégués qui siègent dans les différentes commissions , ne sont plus sur le terrain avec les
salariés , ce qui engendre une coupure entre le mandant ( le syndiqué , l’adhérent ) et le mandataire ( le délégué) .

Conclusion : Dès lors plus que de disparition du syndicalisme ou de crise du syndicat , il faudrait parler d’une évolution
structurelle du syndicat qui s’adapte à une nouvelle forme de société plus complexe et c’est cette adaptation qui fait la crise .

Pour les dangers de la désyndicalisation : ici

Un article des Echos : Les conflits sociaux prennent des formes de plus en plus ...

B. De nouvelles formes d’action : la coordination

Constat : Depuis quelques années , on observe une montée des coordinations qui mettent en cause le monopole de défense des
droits des travailleurs dont disposaient jusqu’alors les syndicats . Les coordinations se sont multipliées dans les années 80 :
infirmières , cheminots , instituteurs , routiers , ...

Comment expliquer ce phénomène ? 6 raisons semblent l’expliquer selon F.Duchamps :


 la probabilité de constitution d’une coordination est d’autant plus forte qu’il n’y a pas de tradition syndicale
( infirmière) mais il existe des contre-exemples (les cheminots ont un taux de syndicalisation traditionnellement élevé).
 la coordination est catégorielle , elle défend les intérêts des membres d’une profession sans chercher à élargir le conflit à
des revendications plus globales ( telles que la lutte des classes ) qui semblent dépassées .
 la coordination apparaît généralement dans des professions dans lesquelles les salariés sont isolés (prof , cheminot ) .
 les coordinations s’implantent le plus souvent dans des professions dont l’image sociale , les traditions sont solides .
Mais , en même temps , les coordinations sont aussi le fait de professions apparues récemment qui ne sont pas reconnues à
leur juste valeur
 la coordination , contrairement aux syndicats habitués aux arrangements , est jusqu’au boutiste . Elle refuse le
compromis , ce qui rend les conflits longs et durs sans véritable porte de sortie , d’autant plus que les mandataires doivent
sans cesse se référer aux mandants .
 les coordinations résultent de la désyndicalisation , qui est elle-même le fait de deux tendances convergentes :
- volonté du patronat d’affaiblir les syndicats
- individualisation croissante du monde de travail

Conséquences : Les salariés n’ayant plus de structures collectives qui le représentent, se constituent alors des mouvements
puissants mais éphémères qui sont corporatistes , c’est-à-dire qui ne mesurent pas les retombées de leurs revendications .

Un exemple : les infirmières : ici

Partie 2_ Vers de nouveaux enjeux, de nouveaux mouvement sociaux ? ( 1 à 4 p 168-170)

Introduction : Définition du mouvement social

Selon Touraine les mouvements sociaux correspondent à une action collective organisée par
laquelle un acteur de classe lutte pour définir les grandes orientation culturelles de la société
(ce que Touraine appelle l’historicité ). Sa définition suppose donc la conjonction de trois
éléments :
 un acteur de classe (ex: la classe ouvrière): c’est le principe d’identité.
 un adversaire de classe (ex: la bourgeoisie) : c’est le principe d’opposition.
 un enjeu : c’est le principe de totalité.

I. Les caractéristiques communes des nouveaux mouvements sociaux (NMS)


Constat : Comme l’indique F.Dubet , «  le thème des nouveaux mouvements sociaux émerge au milieu des années 60 au moment
où le mouvement ouvrier qui était situé au cœur de la société industrielle ne semble plus avoir le monopole des grandes
mobilisations » . Ces nouveaux mouvements sociaux présentent plusieurs caractéristiques :

 ils désignent les objets les plus divers , du moment qu’ils se distinguent de la figure classique du mouvement ouvrier :
mouvement noir , luttes étudiantes aux USA , et partout mouvements écologistes ,féministes , regroupements pacifistes .

 ils mettent en scène de nouveaux acteurs comme les femmes , les jeunes , les classes moyennes .

 ces mouvements ne concernent plus directement les problèmes de la production et de l’économie ; ils se situent dans
le champ de la culture , de la sociabilité , de la ville , des valeurs et paraissent bousculer les formes classiques de gestion du
conflit social et de la représentativité politique .Les NMS mettent l’accent sur l’autonomie, la résistance au contrôle social

 les NMS inventent de nouvelles formes d’organisation et d’actions. Ils sont très méfiantsà l’encontre des structures
traditionnelles auxquelles les individus devaient déléguer l’autorité à des états majors constitués de permanents très
eloignés des préoccupations de la base

 Les NMS n’ont pas pour objectif de prendre le pouvoir , ils visent au contraire à se protéger de l’influence de l’Etat (cf.,
les mouvements régionnalistes) et à construire des espaces d’autonomie protégeant les individus.

Conclusion : la sociologie des nouveaux mouvement sociaux est associée à une critique des paradigmes jusque là dominants,
principalement le marxisme

Pour l’exemple du mouvement antinucléaire  : ici

Pour l’exemple du mouvement étudiant : ici

Des articles de Sciences humaines :


 Les théories du mouvement social et de l'engagement
 Peser sur les décisions
 Devenirs militants

II. Les limites de l’analyse des nouveaux mouvements sociaux

O Fillieule a étudié les formes actuelles de l’action collective et il a constaté que certains caractéristiques ressortent
qui semblent relativiser l’intérêt d’une analyse en termes de nouveaux mouvements sociaux , il remarque certes que :
 l’activité manifestante se diffuse aujourd’hui très largement dans toutes les CSP,
 que les acteurs des conflits interpellent directement les politiques , faute de croyance en l’efficacité des
représentants. Ceci semble bien traduire une crise de la représentation (cf. coordination).

Mais, contrairement à ce qui s’écrit le plus souvent, la période n’est pas marquée par un changement de nature de la
participation politique :

 l’analyse des revendications portées par les manifestations actuelles ne vient pas corroborer l’hypothèse
d’une modification des valeurs défendues : les valeurs matérialistes sont très largement dominantes : Emploi,
hausse du revenu.

Voir les valeurs développées aujourd’hui par les français : ici

 Les mobilisations porteuses de revendications post-matérialistes ( environnement, mœurs ) ne font pas


vraiment recette à l’exception des questions internationales et de l’antiracisme.

 l’hypothèse d’une modification des modes d’engagement politique n’est pas confirmée . Selon elle , la
participation aux mouvements de protestation serait marquée par une extrême fluidité , les individus s’engagent
et se désengagent en fonction du contexte . Il en résulterait un refus net des organisations . La réalité des
manifestations françaises vient infirmer ces considérations puisque plus des deux tiers d’entre elles ( hors Paris)
sont organisées à l’appel des centrales ouvrières . Cela laisse peu de doute sur la domination de la stratégie de la
rue par les syndicats . En revanche , il est vrai que les partis politiques ( surtout les partis de droite et le parti
socialiste ) appellent fort rarement à manifester .

Un diaporama de C.Thuderoz : Sociologie des conflits sociaux

Un article de Sciences humaines : Conflits et changement social aujourd'hui

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