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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

PREMIER SEMESTRE
La Dissertation juridique

Construction d'une dissertation juridique


Une dissertation juridique n'a rien à voir avec une dissertation littéraire ou
philosophique. Elle se présente, comme tout devoir de droit, en deux parties. Dans
chacune de ces parties, il y a deux sous-parties,
sous parties, qui comporte deux paragraphes... mais
bon après
rès ca n'a plus trop d'intérêt. En résumé, un plan de dissertation en droit a cette
forme :

I. Titre de la partie
A. Titre de la sous-partie
sous

B. Titre de la 2e sous-partie
sous

II. Titre de la 2e partie


A. Titre de la sous-partie
sous

B. Titre de la 2e sous-partie
sous

Il n'y a pas réellement de plan type pour une dissertation, tout dépend du sujet. En droit on ne
demande pas de nuance, ou pas tellement. Les parties
parties doivent donc être assez différentes,
parfois même opposée. Il faut essayer de trouver deux centres d'intérêt autour du sujet, deux
manières de l'aborder. Un des "trucs" pratiqués consistent à mettre sur une feuille tout ce qui
entre dans le sujet et qui est intéressant. Une fois qu'on arrive à une liste de 7, 8 idées, il reste
à les rapprocher entre elles, puis à les mettre à la suite les unes des autres, en retenant
l'essentiel au milieu... tout le découpage et le plan aura été fait.. Il faut toujours
toujou garder, comme
pour le commentaire, le sujet dans l'axe de son devoir, ne pas s'en écarter. C'est vrai que c'est
plus dur de citer le sujet à tous les paragraphes, mais vraiment ne vous éloignez pas (trop) du
sujet. On part assez vite en hors sujet. Un des
des points fondamentaux du devoir (comme pour le

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commentaire d'arrêt) est l'introduction. C'est elle qui va non seulement introduire le devoir,
mais le justifier, lui donner de l'intérêt... ce qui est fondamental.

L'introduction

Elle
le comporte en principe 8 points. Si ces 8 points sont présents, c'est selon les profs,
incontestablement un plus...
On ne vous donne pas d'exemples, car on n'en a vraiment pas fait beaucoup. Cependant c'est
une méthode très proche de celle du commentaire, donc vous pouvez vous référer à ce dernier

1) Amener le sujet

. C’est la phrase d’accroche, encore appelée l’entrée en matière


Il s’agit de situer progressivement la question à traiter dans l’ensemble de la matière, en
centrant jusqu’à la cerner avec précision. C’est la méthode de l’entonnoir.
l’entonnoir Cependant, il faut
éviter de prendre la question de trop loin ou de trop haut, ce qui retarderait
retarderait à l’excès l’étude
du sujet lui-même (par
par exemple il ne faut pas décrire toutes les sources de la règle de droit
avant d’en arriver à la jurisprudence ou encore, il ne faut pas exposer la règle de droit à
propos de l’étude de la preuve des droits subjectifs).
). Il faut essayer aussi de se distinguer en
proposant parfois une accroche qui va dans le sens du cours qui vous a été dispensé, mais qui
provient d’une autre source. Vous prouverez en outre que vous avez fait des recherches, donc
fourni un travail
ail qui donne une valeur ajoutée à votre devoir. Citer le professeur de cours
magistral ou le chargé de TD n’est pas conseillé.
Exemple d’entrée en matière par la méthode de l’entonnoir (sujet : l’abrogation de la loi
par désuétude)
iste à la placer dans le cadre général des sources du droit positif et,
Situer la question consiste
parmi ces sources, la loi (dont on mentionnera la prééminence), puis à propos de la loi, à
poser la question de sa durée d’application, de son abrogation en général, et enfin du cas
particulier
rticulier de son abrogation par désuétude
Cette façon d’ « attaquer » le sujet n’est pas la seule : L’entrée en matière peut notamment
faire référence à l’actualité juridique ou à l’histoire. Mais la méthode de l’entonnoir est la plus
usuelle.

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2) Poser le sujet
Le sujet doit être progressivement annoncé. Il ne doit pas y avoir de rupture entre l’entrée en
matière et la citation du sujet

3) La définition des termes

C'est un passage obligé, parce qu’on ne peut pas bien traiter un sujet de dissertation
sans définir le sujet. Là on ne délimite plus le sujet, à l'intérieur de cette délimitation on
essaye de décortiquer le sujet. Dans le droit fil de la phrase d’accroche qui peut être une
définition, vient le moment où il faut définir le sujet (après l’avoir posé) pour le comprendre.
Montrer que vous l’avez compris, comment vous l’avez compris et pourquoi. En fait, il s’agit
de prendre les mots du sujet et de les définir en disant pourquoi vous avez retenu telle
signification particulière de chaque mot et du sujet en général. En procédant ainsi, vous
dégagez et mettez en évidence, le sens du sujet.

A RETENIR : seuls les mots qui font partie du langage juridique sont à définir. Aussi, seuls
les vocables en relation directe avec le sujet appellent des définitions. Il n’y a pas lieu
d’expliquer chaque terme technique rencontré, ce qui alourdirait trop la dissertation.
Pour le sujet précédent (l’abrogation de la loi par désuétude : il s’agit de définir les termes :
loi, abrogation et désuétude).

4) La délimitation du sujet

Vous devez ciblez les idées que le sujet vous impose de traiter, tout en les délimitant d’abord
par rapport au sujet, mais aussi en prenant en compte des paramètres temporels (dates,
chronologie), géographique (le sujet impose-t-il de traiter que le cas sénégalais ou d’autres
pays sont concernés ? ), voire institutionnels (si le sujet impose une institution particulière,
peut-être cela suppose-t-il d’en évoquer d’autres. Ne serait ce que parce que l’institution du
sujet entretien des rapports avec les autres institutions).
Chose très importante aussi, dites ce que vous ne traiterez pas et pourquoi. L’intérêt de passer
par cette étape, consiste à montrer que vous avez connaissance de certaines notions mais dont
vous ne voyez pas l’utilité pour la démonstration que vous allez mener.

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A RETENIR : délimiter un sujet ne consiste surtout pas à écarter une ou des questions qui
n’ont rien à voir avec le sujet (exemple pour traiter de la formation du mariage, l’étudiant n’a
pas à préciser que la question du divorce ne sera pas abordée parce que c’est une évidence).
Pourquoi dois-je parler de ce sujet :
Le sujet soulève une ou plusieurs questions fondamentales qui présentent certainement des
intérêts (sinon on ne vous l’aurait pas proposé). A ce stade, posez la problématique et le (ou
les) intérêt (s) du sujet.

5) Problématique du sujet

Sujets sous forme interrogative

Parfois, la question que vous devez traiter est directement posée dans le sujet. Il convient alors
de répondre précisément à la question posée. Exemple : la jurisprudence constitue t-elle
une source de droit ? En général, ce genre de sujet invite l’étudiant à prendre
personnellement position. Il doit donc réunir les éléments de résolution du sujet présentés
dans le cours et les manuels, et les organiser pour construire un plan sous forme de réponse à
la question posée.

Sujets sous forme non interrogative

D’autres fois, la question que vous devez exposer n’est pas clairement exprimée dans le sujet.
Dans cette hypothèse, il ne vous appartient pas d’inventer n’importe quelle problématique. La
problématique préexiste certainement, et vous devez la retrouver à travers le sujet. En général,
elle a été exposée en cours et elle figure dans les manuels.
Eventuellement, si vous avez du mal à dégager la problématique, essayez de reformuler le
sujet sous forme interrogative en utilisant des formules variées : « Quelle est l’influence de
… ? » ; « A quoi sert … ? » ; « Comment fonctionne … ? » ; « Quelle est la portée de
… ? » Pour la réponse, vous devez vous servir des matériaux (cours, documents) et de vos
réflexions personnelles.

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6) L'intérêt du sujet

L’intérêt du sujet
Une fois que vous pensez savoir (mais mieux vaut en être certain) où le sujet veut vous
emmener, il faut insister sur l’intérêt du sujet. Il s’agit de répondre à la question : « pourquoi
dois-je parler de ce sujet ? ». Si le sujet a été donné, c’est qu’il est important. Il faut donc
rechercher pourquoi le sujet a été donné et le dire franchement. Ces intérêts, souvent liés à des
développements d’actualité, peuvent être d’ordre pratique et/ou théorique :
Intérêt théorique :
Ce sont les implications théoriques du sujet à savoir : les débats qui se sont soulevés (ce sont
les controverses doctrinales), lorsque les principes juridiques traduisent une évolution
particulière (de la législation, des mœurs, de la société…).

Exemple d’intérêt théorique


- Actualité législative. Par exemple avec l’OHADA, la consécration d’un patrimoine
d’affectation avec la société unipersonnelle.
- Controverse doctrinale. Par exemple, en ce qui concerne la nature du patrimoine, du droit au
nom ou du droit réel, la nature juridique du mariage.
- Evolution d’un fondement du droit. Par exemple, en matière de responsabilité, l’idéologie de
la réparation qui conduit à indemniser toutes sortes de préjudices.
L’intérêt pratique
L’intérêt pratique se découvre la plupart du temps en cherchant à imager des cas d’application
concrets des règles juridiques en cause. On peut alors montrer que la question envisagée se
pose fréquemment, que les solutions à dégager intéressent beaucoup de personnes ou
commandent des conséquences (économiques, sociologiques…) importantes. Faire apparaître,
quand c’est possible. L’actualité des problèmes renforce considérablement le dynamisme de
la dissertation ; mais n’extrapolez surtout pas !

Exemple d’intérêt pratique


- Conflit dans les sources du droit. Par exemple, le problème de la violation de la
Convention de l’OIT soulevé dans l’affaire Séga Seck Fall, le problème de la violation de la
convention de New York contre la torture dans l’affaire Hissen Habré.

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- Hiatus entre la législation existante et les besoins pratiques. Par exemple les problèmes
posés par l’exigence du divorce judiciaire et la pratique de la répudiation ; les problèmes
posés par la limitation des dépenses excessives dans les cérémonies familiales.
- Aspects sociologiques. Par exemple en France, le débat judiciaire sur l’adoption d’enfants
par des couples homosexuels (NB : la question sera bientôt réglée par la loi).
Eventuellement, on peut retracer à ce stade de l’intérêt du sujet l’évolution du sujet dans le
temps (historique) et dans l’espace (droit comparé).

A RETENIR : un sujet peut revêtir un intérêt théorique ou un intérêt pratique (pas forcément
les deux à la fois). Aussi, lorsque vous souligner l’existence d’un intérêt, il faudra
effectivement le préciser. Exemple : Il ne suffit pas de dire (comme on le remarque dans la
plupart des copies) : le sujet revêt un intérêt théorique (sans aucune précision). [Vous ne
soulignez là aucun intérêt !].

7) L'annonce et la justification du plan du plan

Vous voilà en possession de votre problématique qui prend le plus souvent la forme d’une
question. Le plan n’est autre que la réponse en deux points à cette question. Mais il ne s’agit
pas seulement de dire quelle articulation a été choisie ; il faut justifier ce plan. On doit
commencer par exprimer l’idée ou les idées essentielles animant le sujet ; puis on annonce
l’ordonnancement de la démonstration. Le plan adopté doit apparaître comme une
conséquence logique et naturelle des principes antérieurement dégagés.
L’essentiel consiste donc à expliquer pourquoi la présentation retenue s’impose.
L’annonce proprement dite se limite à la phrase dans laquelle vous ferez apparaître entre
parenthèse le I et le II du plan. Ex : ...............(I), ...................(II).
En première année, vous pouvez vous satisfaire de phrases assez simple comme : dans un
premier temps, puis dans un second, ou, dans une première partie nous traiterons telle chose
et puis telle autre dans une seconde. Mais il faudra assez vite dépasser ce stade car il
n’apporte pas de réelle satisfaction sinon celle de mettre en parallèle deux idées principales.
A RETENIR : l’étudiant doit impérativement, dans l’introduction, veiller à: Amener et
poser le sujet – Définir les termes du sujet – Poser la problématique – Donner l’intérêt
du sujet – Justifier et annoncer le plan.
Les différentes phases de l’introduction ne doivent pas être intitulées dans la rédaction.
Il suffit d’aller à la ligne après chaque phase.

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B. Le plan
Le plan est commandé par le sujet, ou, plus précisément, par l’idée directrice que vous avez
dégagée. Il convient donc d’adopter un plan qui suive une ligne directrice claire, que l’on
s’attache à respecter et à démontrer.
Concrètement : le plan est la réponse à la problématique posée.
En droit, le plan se structure en deux parties, deux sous-parties. Ce qui fait un total de
quatre sous parties. Si vous avez lu attentivement ce qui précède, vous devez vous souvenir
que, lors de la recherche de notre problématique, nous avons regroupé nos idées en 4
catégories. Celles-ci correspondent aux 4 sous parties. Mais pour réaliser le plan, ces 4
catégories doivent être contenues dans deux grandes catégories. De telle sorte que : Catégorie
1 regroupe Une sous catégorie, Une seconde sous catégorie, Catégorie 2 regroupe Une sous
catégorie, Une seconde sous catégorie.
Ce travail doit aboutir à plan qui devra avoir pour résultat ce qui suit :
Structure du Plan d’une dissertation juridique
I. Le titre de ma PREMIERE PARTIE
J’annonce que je vais parler ma première sous-partie (A), puis de ma seconde sous-partie (B)
A. Le titre de ma première sous-partie
Développement

Je fais une transition pour annoncer la seconde sous-partie


B. Le titre de ma seconde sous-partie
Développement

Je fais une transition pour annoncer la SECONDE PARTIE


II. Le titre de ma SECONDE PARTIE
J’annonce que je vais parler de ma première sous-partie (A), puis de ma seconde sous-partie
(B)

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A. Le titre de ma première sous-partie


Développement

Je fais une transition vers ma seconde sous-partie


B. Le titre de ma seconde sous-partie
Développement

ATTENTION : il est préférable et même important de réserver le I.B. et le II.A. aux


catégories les plus essentielles. C’est le cœur de votre devoir.
Comme vous pouvez le voir, le plan n’est pas qu’une succession de catégories. Il y a des
titres. Chaque titre de PARTIE doit être suffisamment englobant pour regrouper les
sous parties qui le composent (les sous parties doivent correspondre aux parties. Soit
elles se complètent ou elles s’opposent). De même, les titres doivent être la réponse à
votre problématique, de telle sorte qu’en le lisant le correcteur sait ce que vous allez dire
dans les parties et sous parties.
Ce n’est pas parce que vous n’avez pas le même plan que votre camarade que vous êtes hors
sujet ou que vous avez fait un faux plan. Idem, en ce qui concerne votre plan et celui du
chargé de TD. Il y a plusieurs bonnes démarches pour traiter un sujet.
Tout dépend de la façon dont vous avez compris le sujet (en restant, bien sûr, dans le cadre de
la problématique posée par le sujet) mais aussi, dont vous l’avez amené. Il est alors important
de justifier (de bien justifier) les choix que vous avez faits lors de la délimitation du sujet.
Les différents plans possibles:
Le plan d’idées : c’est un plan qui valorisera toujours votre travail. Il est construit à partir
d’une idée que vous avez du sujet exposée en deux parties. Exemple de plan d’idées sur le
sujet le « dol » I- Le dol, vice du consentement dans la formation du contrat II- Le dol, délit
dans l’exécution du contrat.

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Les plans types


- Les plans de comparaison : pour les sujets de comparaison, il faut proscrire l’examen séparé
des deux termes de la comparaison (Exemple pour le sujet Droit et morale, éviter de faire : I-
Le droit II- La morale). A la limite, on peut envisager de présenter successivement : les
ressemblances (I) et les différences (II), en habilitant ces intitulés.
- Les plans de continuation : le plan type le plus utilisé est celui dit « de continuation », dont
les deux parties se prolongent en intégrant deux aspects distincts du sujet.
I-/ Les conditions II-/ Les effets /// I- La formation II- Le contenu /// I- La formation
II /L’exécution
/// I- Les sujets ou les titulaires du droit II- L’objet ou le contenu du droit….

A RETENIR : Veiller à réaliser un certain équilibre des parties et sous-parties, en volume et


en intérêt autant que possible.
III- La rédaction
Vous devez retenir qu’une dissertation est une démonstration et non pas un simple exposé des
connaissances. Les connaissances sont mises au service de la démonstration, c’est à dire de la
problématique.
Contrairement à la forme, le fond ou le contenu est fonction du sujet qui vous est donné. Mais
il y a quelques règles essentielles qui ne changent pas. Elles sont relatives à la rédaction ou la
formulation du contenu et son développement.
Faites des phrases courtes et simples. Les phrases courtes rendent le contenu dynamique, léger
et maintient l’attention du correcteur ou du lecteur. Les phrases simples rendent la dissertation
plus claire et compréhensible. Vous éviterez ainsi de perdre le lecteur. Généralement tout se
passe en trois temps : je vais dire quelque chose, je dis la chose en question, voilà ce que je
voulais vous dire. Il faut exprimer vos intentions, les réaliser et les résumer.
Privilégiez une idée par partie, mais une idée importante peut être accompagnée d’autres idées
accessoires. Le risque reste que des idées accessoires peuvent être hors sujet.
Il n’est pas possible de schématiser ou d’aller plus en profondeur pour deux raisons : la
première c’est qu’il existe une multitude de sujets et que chaque sujet peut être traité
différemment. C’est selon l’importance que l’on accorde à telle ou telle idée.
Pour quelques conseils de rédaction: soigner l’écriture, l’orthographe et l’expression ;
proscrire les abréviations, les sigles et les schémas ; éviter les familiarités ; ne pas
employer le mot « je », mais plutôt « nous », « on », « il » ; éviter l’emploi de verbes dans

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les intitulés ; éviter les répétitions ; aller à ligne pour chaque idée nouvelle, enchaîner les
phrases de manière logique ; enfin, relire la copie.
Remarque générale
Tout exposé de connaissances est un exercice de communication. Il requiert:
- Aisance et maîtrise de soi
- Brièveté et concision
- Nécessité absolue d'un plan tant pour l'écrit que pour l'oral
- Indication des Titres
- Transitions
- Ecriture aérée et lisible
Surtout éviter le remplissage hors sujet qui indispose fortement le lecteur et témoigne d'une
profonde méconnaissance du sujet demandé.
NB : Explication pratique en cours

Application pratique de la méthodologie de la dissertation


juridique

Sujets :

1/ DROIT ET EQUITE

2/ DROIT ET MORALE

3/ DROIT ET RELIGION

4/ SPECIFICITE DE LA REGLE DE DROIT

5/ LOI ET REGLEMENT

6/ AUTORITE DES TRAITES EN DROIT INTERNE

7/ DROITS REELS ET DROITS PERSONNELS

8/ DROITS PATRMONIAUX ET DROITS EXTRA PATRIMONIAUX

9/ THEOTIE CLASSIQUE DU PATRIMOINE

10/ LA PREUVE DES ACTES JURIDIQUES

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SUJET : DROIT ET EQUITE

La règle de droit n’est pas la seule règle de conduite sociale ; il existe bien d’autres
prescriptions qui ont également pour but d’assurer le fonctionnement harmonieux des
relations humaines, sans pour autant ressortir de la sphère du droit. Ainsi en est-il notamment
des règles de bienséance, des préceptes moraux, des lois religieuses et des commandements de
l’équité. Mais en ce qui nous concerne, seule l’étude du droit et de l’équité sera envisagée.

Si le droit peut être considéré comme" l’ensemble des règles de conduite socialement édictées
et sanctionnées qui s'imposent aux membres d'une société», l’équité en revanche est selon
Aristote une force qui corrige les éléments d'injustice du droit strict. C’est le principe
modérateur du droit objectif selon lequel chacun peut prétendre à un traitement juste,
égalitaire et raisonnable.
Dès lors se pose la problématique de savoir des rapports entre le droit et équité. En d’autres
termes l’équité est elle prise en compte dans l’application du droit ?
Droit et équité ne sont ni identique ni très différents. Le droit ne permet pas au juge de statuer
en équité. Celui ci doit juger en droit. Cela peut conduire à des jugements inéquitables, des
arrêts considérés comme injustes et contraire au bon sens. Mais c’est un rempart efficace
contre une insécurité juridique qui rendrait difficile à évaluer les conséquences de tout acte.
Pour autant cela ne signifie pas que l’équité n’est pas prise en compte par le droit.
L’étude d’un tel sujet renferme un double intérêt théorique et pratique. S’agissant de l’intérêt
théorique, il faut préciser que l’étude des rapports entre droit et équité est très controversée en
doctrine. En effet, Aristote, après avoir affirmé la difficulté de séparer l’équité de la loi, du
fait que « leurs caractères ne sont pas absolument identiques sans différer spécifiquement »,
pose que la nature propre de l’équité consiste à corriger la loi dans la mesure où elle se montre
insuffisante en raison de sa généralité. Pour MALAURIE en revanche « l’équité est une
notion pour laquelle il existe un risque constant d’imprévisibilité et d’insécurité, sans compter
l’arbitraire du juge ».
S’agissant de l’intérêt pratique, l’étude d’un tel sujet nous permet de savoir que l’équité n’est
pas une source du droit et le juge reste soumis au droit et non à l’équité en raison de la
subjectivité inhérente à cette notion. Cependant, On assiste en effet à une renaissance du
jugement dit « ex æquo et bono », dans la mesure où le juge n’a pas pour intention de
concurrencer la loi, mais seulement d’écarter dans un cas considéré, une législation
inopportune ou malfaisante dans une espèce.

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Le droit se distingue de l’équité. Mais Dans certains cas limités, la loi fait une place à la
notion d'équité en laissant au juge le soin de se déterminer selon ce qui est équitable et bon
c'est à dire, en écartant les règles légales lorsqu'il estime que leur application stricte aurait des
conséquences inégalitaires ou déraisonnables.
Pour en avoir la conviction, il y a lieu dans un premier temps de voir le principe de
l’exclusion de l’équité dans l’application du droit (I) avant de voir dans un second temps la
prise en compte exceptionnelle de l’équité dans l’application du droit (II)

I/ principe de l’exclusion de l’équité dans l’application du droit


Ce principe se manifeste au niveau de l’interdiction faite au juge de statuer en équité (A) et
sur le caractère subjectif de l’équité (B)

A/ l’interdiction faite au juge de statuer en équité

Le droit sénégalais et le droit français ne permettent pas au juge de juger en équité. Celui ci
doit juger en droit. Cela est valable dans tous les domaines du droit. Ainsi le juge civil
français est soumis à l’article 12 du code de procédure civile français : " le juge tranche le
litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ". Il rend la justice en droit, au
moyen d’une décision soutenue par des motifs de droit. On lui demande d’appliquer la loi à la
cause, peu important les blessures et les conséquences dommageables, souvent perçues
comme injustes qui peuvent résulter de cette application inflexible des textes : " Dura lex, sed
lex ". La Cour de Cassation sanctionne de façon systématique tout jugement établi par des
moyens s’appuyant sur le principe d’équité.

Le droit administratif impose lui aussi au juge de statuer en droit et non pas en équité. C’est
une règle très solidement établie et officiellement formalisée. Ainsi dans l’arrêt du conseil
d’Etat du 6 juillet 1956, Dame Monfort, on peut lire " le moyen tiré de ce que l’application
d’une réglementation entraînerait des conséquences inéquitables pour les agents concernés
n’est pas susceptible d’être invoqué à l’appui d’un recours en excès de pouvoir "

Cette conception du droit en général s’oppose donc à la justice rendue en équité, qui s’appuie
sur un sentiment de droiture interne, de respect de l’équilibre des situations en présence.
Celle-ci s’efforce de tenir compte, au delà de l’application stricte de la loi, de la situation
particulière du conflit, pour parvenir à résoudre celui-ci au mieux des intérêts des deux

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parties. Cela conduit à des jugements conformes aux règles de droit, mais parfois inéquitables
et perçues comme profondément injustes

Pourtant, le droit a de bonnes raisons de se méfier du jugement en équité. Le principe qui


consiste à juger uniquement au regard de la règle de droit possède de très solides fondements
juridiques et pratiques. Il évite de dévier vers l’arbitraire et de compromettre la sécurité
juridique du justiciable. Les sentiments, les intuitions, les désirs d’être bon et équitable sont
subjectifs et inévitablement changeants au gré de la diversité des caractères, des opinions, de
l’état d’esprit des juges et des plaideurs.

B/ le caractère subjectif de l’équité

Les sentiments, les intuitions, les désirs d’être bon et équitable sont inévitablement
changeants au gré de la diversité des caractères, des opinions, de l’état d’esprit des juges et
des plaideurs. L’utilisation du principe d’équité tel quel conduirait à une forte insécurité
juridique, et à des disparités de traitement encore plus injustes et plus fréquents que les
problèmes que pose le fait de ne juger qu’au regard de règles de droit semblables pour tous.
Le risque est aussi de voir les juges tentés de substituer leur propre appréciation à celle du
législateur. En second lieu, la notion d’équité est dominée par sa dimension morale,
émotionnelle. En effet, d’un côté purement logique, la spécificité première de l’équité est de
faire appel aux sentiments, dans la mesure où les décisions admettant cette notion varient
indiscutablement en fonction de la décision rendue, selon la conscience et la morale de
chacun. Ce caractère, permet même si cette notion demeure importante, de légitimer le
principe de la prédominance de la loi et de ne justifier le recours à cette notion que pour des
cas exceptionnels.
Les parlements de l'ancien droit s'octroyaient le droit de juger en équité. Le problème est que
Dans la pratique, cela a donné lieu à plusieurs abus qui ont entraîné les réactions des
révolutionnaires. Et pendant la révolution on pouvait entendre : “ Dieu nous garde de l'équité
des parlements ”. Le culte de la loi, expression de la volonté générale, a chassé l'équité des
parlements. Permettre au juge de statuer en équité, c’est prendre le risque d’une justice
arbitraire, d’insécurité juridique car l’équité reste une notion subjective.
Donc, l’équité a longtemps suscité la méfiance en droit sénégalais et français. Le juge ne peut
généralement pas juger en équité. Le but est d’éviter la grande insécurité juridique qui
risquerait de se développer si l’on jugeait en équité, ainsi que des décisions arbitraires, tenant

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autant à la personnalité du juge qu’aux faits. Cela ne signifie pas pour autant que l’équité soit
absente du droit.

II/ la prise en compte exceptionnelle de l’équité dans l’application


Du droit
L'équité est un moyen de réaliser cet idéal de justice, moyen qui nécessite une médiation
juridique concrète. Le droit objectif, apparaît clairement être l'outil par lequel l'équité pourra
s'appliquer en vue d'une justice idéale. C’est justement la raison pour laquelle il y’a dans un
premier temps une référence à l’équité dans le droit (A) sans oublier dans un second temps le
recours du juge à l’équité dans certains cas (B)

A/ la référence à l’équité dans le droit

L’équité, si elle ne constitue pas un critère de jugement pour le juge, n’en est pas moins
présente dans les textes de loi, qu’elle soit directement mentionnée ou qu’elle en ait inspiré la
rédaction. Dans certains cas, La loi nomme explicitement l'équité, mais elle fait de plus
référence à la compétence du juge. Il en est de même dans l'article 1135 du Code civil, selon
lequel les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les
suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature. Mais le domaine
le plus représentatif de l’évolution actuelle est le droit civil et en particulier le droit des
contrats. Tout le développement récent du droit des contrats pousse vers un plus grand
équilibre contractuel. Le droit de la consommation, comme le droit de la concurrence ont ainsi
contribué à faire du contrat un engagement plus équitable. Ainsi l’obligation de bien informer
l’autre partie, le délai de rétractation laissé au client sont autant de dérogations à l’autonomie
de la volonté, élaborées dans le but de rendre le contrat plus équitable. La possibilité pour le
juge d’annuler les clauses abusives est la encore inspirée du principe d’équité. De même
l'article 700 du NCPC permet au juge de condamner une partie à lui payer une certaine
somme qu'il détermine "lorsqu'il paraît inéquitable de laisser à la charge d'une partie" par
exemple les honoraires de son propre avocat. D'autres fois, c'est plus indirectement que le
pouvoir d'équité est attribué aux juges. Ainsi, le juge peut octroyer des délais au débiteur
malheureux (art. 1244 al. 2 du code civil ). Ce pendant au delà de cette référence, le juge peut
aussi avoirs recours à l’équité pour statuer

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B/ le recours du juge à l’équité


Les règles de droit, laissent parfois une place à la recherche de l’équité par le juge. Dans tous
les cas où le juge est appelé à donner une appréciation subjective d’une responsabilité ou
d’une indemnité, sa décision recherchera l’équité. C’est le cas du partage des responsabilités
dans un accident, l’évaluation des droits à indemnité de chaque ayant droit en cas de partage
ou encore l’évaluation du montant de préjudices difficilement chiffrables comme celui de
préjudices moraux. De même, Le principe premier de l’interprétation des contrats est celui de
l’autonomie de la volonté des parties. Il ne saurait donc être question pour le juge
d’interpréter un texte clair. Quand la loi est claire, il faut la suivre; quand elle est obscure, il
faut en approfondir les dispositions. Si l’on manque de loi, il faut consulter l’usage ou
l’équité. L’équité est le retour à la loi naturelle, dans le silence, l’opposition ou l’obscurité des
lois positives. C’est ainsi que l’article 103 du code des obligations civiles et commerciales
dispose que : « En l'absence de volonté exprimée, le contrat oblige à toutes les suites que la
loi, les usages, la bonne foi ou l'équité donnent à l'obligation d'après sa nature ». Par ailleurs,
en matière d’arbitrage. L’article 811 du code de procédure civile sénégalais prévoit que « Les
arbitres et les tiers arbitres décident, d’après les règles du droit, à moins que le compromis ne
leur donne pouvoir de prononcer comme amiables compositeurs ». Dans cette optique, le juge
a le pouvoir de juger selon son intime conviction. Néanmoins, il faut préciser que pour que
l'habilitation du juge soit licite, deux conditions sont nécessaires : L'accord des plaideurs, le
fait que seuls les droits dont les parties ont la libre disposition peuvent faire l'objet d'un
jugement en équité).
Donc, l’équité a longtemps suscité la méfiance en droit. Le juge ne peut généralement pas
juger en équité. Le but est d’éviter la grande insécurité juridique qui risquerait de se
développer si l’on jugeait en équité, ainsi que des décisions arbitraires, tenant autant à la
personnalité du juge qu’aux faits. Cela ne signifie pas pour autant que l’équité soit absente du
droit. Le jugement ne doit pas être rendu au regard de l’équité, mais les principes de droit
tiennent souvent compte de l’équité.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

SUJET : DROIT ET RELIGION

La règle de droit, de caractère général et impersonnel, n'est pas la seule qui régisse les
rapports dans la société. D’autres règles comme notamment la morale, la religion et la
bienséance régissent aussi la vie en société. Mais en ce qui nous concerne, seule l’étude du
droit et de la religion sera envisagée.

Si le droit peut être défini comme un ensemble de règles régissant la conduite des hommes
vivant en société et dont le respect est assuré par l’autorité publique, la religion en revanche
est considérée comme un ensemble de croyances et de dogmes définissant les rapports de
l'homme avec Dieu.

Des lors se pose la problématique de savoir : quels sont les rapports entre droit et religion ?

Droit et religion sont deux règles de conduite distinctes dans plusieurs points mais si il est
reconnu que cette distinction n’est absolue que droit et religion peuvent se rencontrer dans
certains domaines.

L’étude d’un tel sujet renferme un double intérêt théorique et pratique. S’agissant de l’intérêt
théorique, il faut préciser que les débats sur le fait religieux bénéficient d’une place
importante dans la doctrine. Ainsi, pour Jean Carbonnier, si l’Etat et la religion ne peuvent
pas s’ignorer, c’est sans doute parce que les droits positifs empruntent néanmoins ne fut ce
que par la médiation de la morale ou des mœurs, à la religion qui les entoure. Paul Esmein en
revanche décelait la notion théologique du pêché sous la notion juridique de la faute.

S’agissant de l’intérêt pratique, il faut préciser que l’étude des rapports entre Droit et Religion
intéresse particulièrement l’actualité notamment avec l’interdiction en France du port des
signes religieux dans les lieux publiques qui montre l’indifférence du droit vis-à-vis de la
religion même si cette indifférence doit être nuancée.

Le Droit a un but précis qui est de maintenir l’ordre et l’harmonie dans la société alors que la
religion vise le salut de l’être humain, sa conformité avec les prescriptions divines. Raison
pour laquelle la violation du droit entraine des sanctions extérieures alors celle de la Religion
se manifeste par des troubles, remords, blâme etc.

C’est justement la raison pou laquelle il est important de voir dans un premier temps : la
distinction du Droit et de la Religion (I) avant de voir dans un second temps : la relativité de
la distinction du Droit et la Religion (II)

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

I/ la distinction du Droit et de la Religion

La distinction s’opère dans un premier temps quant aux sources et à la finalité des deux corps
de règles (A) ensuite quant aux sanctions des deux types de règles (B)

A/ la distinction du Droit et de la Religion quant à leurs


sources et leur finalité
Fondée sur un rapport transcendant, la religion présente ses commandements comme venant
de Dieu. La règle religieuse veille au salut de l'être humain. Elle a donc une source divine
alors que la règle provient du législateur qui édicte les règles de droit selon une procédure
bien déterminée.
La séparation du droit et la religion est aussi conceptuellement satisfaisante si l’on considère
que les deux sortes de règles n’ont pas la même finalité. En effet, au contraire de la règle de
droit dont la finalité sociale se traduit dans l’organisation des relations humaines au sein de la
cité temporelle, la règle religieuse vise au salut de l’âme, finalité spirituelle dans la rencontre
avec dieu. Le droit régit donc par essence le temporel c'est-à-dire la vie en société de
façon à assurer l’ordre et la sécurité des personnes et des biens sur terre alors que La religion
prend en charge le domaine spirituel, les liens de l’être humain avec le divin et les moyens de
les renforcer. Il en va de même de la sanction.

B/ la distinction du Droit et de la Religion quant leur sanction


La distinction s’affirme aussi quant à la sanction attendue de leur violation : dans le
commandement religieux, la sanction n’appartient pas à l’Etat. Elle ébranle plutôt l’espérance
d’une attente spirituelle. La sanction de la violation de la règle religieuse émane donc de dieu
et intervient dans l’au-delà alors que la sanction de la règle de droit émane de l’Etat et
s’applique ici bas. Le manquement à la règle de droit engendre une sanction objective mettant
en mouvement l’appareil de la puissance publique : juge, commissaire de police etc.
La règle de droit, en effet, a pour but de faire régner l’ordre dans la société en délimitant la
sphère d’activité de chacun vis-à-vis d’autrui. Qu’un empiétement se produise, il faut le
repousser, à peine de laisser s’instaurer l’anarchie ; et ce rétablissement doit venir de la force
publique.
Ces distinctions devront néanmoins être nuancées car les forces religieuses ne sont pas
ignorées du droit.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

II/ la relativité de la distinction du Droit et la Religion


La distinction du Droit et la Religion doit être nuancée car la religion influence le droit (A) et
le droit aussi prend en compte le fait religieux notamment à travers la laïcité. (B)
A/ l’influence de la Religion sur le Droit
La religion exerce une certaine influence sur le droit. Le droit sénégalais de la succession
musulmane s’est inspiré de la religion. Il en est de même du mariage coutumier. Le droit
français actuel est imprégné de morale judéo-chrétienne et il suffit pour s’en convaincre de
constater que la plupart des prescriptions du Décalogue sont consacrées par le droit positif et
il est ainsi par exemple de l’art. 371 c. civ.: qui dispose que «L’enfant, à tout âge, doit
honneur et respect à ses père et mère»).
En outre, dans certaines sociétés, les préceptes religieux sont élevés au rang de règles
juridiques de sorte que leur effectivité est assurée au moyen de la contrainte étatique. Il s’agit
des Etats théocratiques ou religieux. Dans ces pays, la distinction des règles de droit et des
règles religieuses est souvent difficile et artificielle. On en compte quelques uns dans le
monde : le Soudan, Israël, l’Iran, l’Afghanistan, etc. Ces Etats sont à distinguer des Etats laïcs
comme le Bénin, le Sénégal, La France, au sein desquels la contrainte étatique n’assure pas
l’application des règles religieuses.
B/ la prise en compte du fait religieux par le droit
La question de la gestion des croyances dans une société laïque ressurgit en ce début de
XXème siècle, comme en témoignent les récentes lois qui cherchent à adapter le concept de
laïcité à l'évolution du paysage religieux en France. On peut citer entre autres la loi du 12 juin
2001 qui met en place un dispositif pour pouvoir mieux prendre en compte les phénomènes
sectaires en France et prévenir ses effets les plus dangereux, ou la très controversée loi sur le
port des signes religieux dans les écoles, collèges et lycée du 15 mars 2004. Au Sénégal,
l’article 1er de la constitution du 22 janvier prévoit également que « La République du
Sénégal est laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les
citoyens, sans distinction d'origine, de race, de sexe, de religion. Elle respecte toutes les
croyances. » de même l’article 24 de la constitution prend en compte la liberté religieuse en
disposant : « La liberté de conscience, les libertés et les pratiques religieuses ou cultuelles, la
profession d'éducateur religieux sont garanties à tous sous réserve de l'ordre public. Les
institutions et les communautés religieuses ont le droit de se développer sans entrave. Elles
sont dégagées de la tutelle de l'Etat. Elles règlent et administrent leurs affaires d'une manière
autonome ».

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Thème : le droit objectif.

Sous thème : la règle de droit.

Dissertation : Droit et Moral.

La conduite humaine met en jeu des normes qui prescrivent et autorisent des actions. Ainsi,
ces normes peuvent être coutumières, juridiques et même morales.

C’est justement ces deux dernières catégories de règles dont il est question dans le sujet
soumis à notre étude à savoir droit et moral.

De ce fait, il faut entendre par droit l’ensemble des dispositions interprétatives qui, à un
moment et dans un Etat déterminé, règlent le statut des personnes et des biens ainsi que les
rapports que les personnes publiques et privés entretiennent. Autrement dit, il s’agit de
l’ensemble des préceptes, règles ou lois qui gouvernent l’activité humaine dans la société et
dont l’inobservation est sanctionnée au besoin par la contrainte sociale ou la force publique.

La morale quant à elle, a trouvé son origine dans le mot latin « moralis » qui signifie «
relatif aux mœurs » est une loi bien précise qui régit les sociétés modernes et qui est respectée
parce qu’elle est imposée par la foi, la raison, la conscience ou tout simplement suivie par
l’habitude ou par respect humain(Ripert).

Réfléchir sur un tel sujet revient à faire une étude comparative de la morale et le droit.
Cependant, force est de rappeler que nous écarterons toute autre règle de conduite sociale
comme l’équité, la religion qui sont toutes des règles mais n’entrent pas dans notre champs
d’étude.

Ainsi la problématique dégagée par le sujet est celle de savoir comment concevoir le rapport
entre droit et moral ? Autrement dit qu’est –ce qui fait l’intérêt de la distinction entre le droit
et la morale ? Celle-ci est-elle absolue ou relative ?

L’étude d’un tel sujet soulève deux intérêts à la fois théoriques et pratiques.

L’intérêt théorique du sujet se justifie par le fait qu’un tel rapport a fait l’objet d’une
controverse doctrinale entre les idéalistes (Kant) qui soutiennent que le droit est
l’autoréalisation de l’exigence morale. Cela veut dire que pour eux la morale sert de
fondement au droit. Et de l’autre côté les réalistes (Hobbes, Rousseau) qui soutiennent que le
droit est l’auto- réalisation des penchants sauvages et la condition du progrès moral des

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

hommes. IL en est également que cet intérêt est régi par les textes notamment les articles
42 ,76 ,93 ,187 du code des obligations civiles et commerciales(C.O.CC).

L’intérêt pratique quant à lui se justifie par le fait que le droit comme la morale sont tous deux
des règles de conduite sociale destinées à encadrer la vie en société et dont les sanctions l’une
sont externes et l’autre internes.

Pour mieux étudier notre sujet, nous verrons dans une première partie que le droit et la
morale sont deux règles de conduite différentes (I) et dans une seconde partie nous
aborderons le caractère relatif de cette distinction (II).

I/ Droit et morale : deux règles de conduite différentes.


Etudier les sources formelles du droit, les textes de lois nous permettent de souligner
d’emblée qu’il y’a une nette distinction ² entre le droit et la morale. Et cette distinction se
ressent aussi bien à leur source qu’à leur finalité (A) mais également au niveau de leur
sanction( B).

A/ Droit et morale : deux règles de conduite différentes quant à


leurs source et de leur finalité.
Les sources du droit et de la morale ne coïncident pas, mieux encore n’ont pas la même
origine.

En effet, nous pouvons apporter une distinction du point de vue des sources. La morale peut
être d’origine divine et peut provenir de la conscience et même de la science.la loi quant à elle
est édictée par les autorités institutionnelles. En outre la finalité du droit et de celle de la
morale sont également différentes.

La morale s’occupe par exemple non seulement des devoirs de l’homme en vers autrui mais
aussi de ses devoirs en vers lui-même et en vers Dieu.

L’étude de la morale peut être plus large que celle du droit. A contrario, le droit est
susceptible de choquer la morale. On peut par exemple être surpris d’apprendre qu’un voleur
devient propriétaire de la chose volée après l’écoulement d’un certain délai fixé par la loi.

La finalité fixée par la morale peut être plus exigeante. La morale cherche la perfection alors
que le droit ne s’occupe que du maintien de la sécurité, de l’ordre et de la paix.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Mais cette distinction liée aux sources et à la finalité ne suffit pas car à côté d’elle il existe une
autre liée aux sanctions.

B/ Droit et morale : deux règles de conduite différentes quant à


leur sanction
Les sanctions du droit et celles de la morale sont bel et bien distinctes. En effet la violation
ou la transgression de la morale se répercute sur la conscience humaine en faisant naitre un
sentiment de culpablité.IL n’en est pas de même de la violation du droit qui, elle appelle une
réaction exogène, externe, une réaction étatique celle de la puissance publique. En outre la
règle de droit est donc imposée par la contrainte, par la coercition. Sa sanction est
indépendante du sujet lui-même alors que la sanction des principes moraux est d’ordre
personnel, psychologique. Kant disait que la législation parce que morale est dite intérieure
qu’elle nous est connue dans l’intérêt de la conscience. C’est pour cela que même une
mauvaise intention sans qu’une action s’en suive est déjà moralement répréhensible. A
l’évidence il n’en va pas ainsi du point de vue du droit. Si le droit fait l’objet d’une
l’législation externe , c’est parce qu’il concerne le rapport externe entre deux individus
considérés comme libres et déterminés si l’action de l’un s’accorde avec la liberté de
l’autre.IL ne s’agit pas alors de savoir si l’action est faite par devoir , mais seulement si elle
est conforme au devoir , à la loi. En somme, il convient de remarquer que si le droit se
différencie de la morale dans plusieurs domaines, il est à remarquer également que cette
différence n’est pas absolue car droit et moral ont des points communs.

II/ la relativité de la Distinction


Rappelons que le but visé par le droit n’est pas le même que celui de la morale. Le droit
cherche la justice et l’ordre social alors que la morale tend à la vertu et à la perfection de
l’individu. La morale est en chacun d’entre nous alors que le droit est la manifestation d’un
pouvoir étatique. Cependant il ne fait aucun doute que plusieurs règles de droit s’inspirent de
la morale. Autrement dit la morale influence le droit(A), et il faut noter qu’il existe plusieurs
interférences entre ces deux règles de conduite(B).

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

A/l’influence de la morale sur le droit.


La morale exerce une influence remarquable sur certaines règles juridiques. En effet, la
plupart des règles de droit tendent à consacrer une règle morale. La morale irrigue le droit,
elle le nourrit et on peut même dire qu’il n’y a pas de séparation radicale entre le droit et la
morale. Par exemple ,l’article 371 du code civil en prévoyant qu’un enfant doit honneur et
respect à l’égard de ses parents et qu’en cas de litiges graves avec les enfants , les parents ont
droit de révoquer et d’annuler donation consacre un droit moral.IL faut également faire
référence à certains commandements du Décalogue qui prendront la formule de règles
juridiques tels que l’interdiction de tuer autrui. Notons aussi que cette relativité apparait
surtout dans le droit des contrats ou la plus part des règles sont des règles morales. Exemple la
règle « pacta sunt servanda » qui veut dire que les conventions doivent être respectées , règle
qui est devenue l’article 96 du c.occ, ou bien le respect de la parole donné.IL en est encore de
l’article 76 du c.occ qui dispose que « le contrat est nul pour cause immoral ou illicite lorsque
le motif déterminant de la volonté des parties est contraire à l’ordre public ou aux bonnes
mœurs ». Nous remarquons ici que cet article consacre une véritable règle morale en prenant
en compte la notion de bonnes mœurs.

Au-delà de cette dite influence exercée par la morale sur le droit, il convient de préciser que
certaines règles juridiques sont teintées de moralité.

B/Les interférences entre le droit et la morale.


Certaines règles juridiques ont une valeur morale dès lors qu’elles tendent directement ou
indirectement à assurer le respect de la morale. C’est le cas notamment de certaines règles du
code de la route imprégnées d’une valeur morale puis qu’elles tendent à sauvegarder la vie
humaine. Plus généralement, l’ordre et la paix sociale sont des valeurs que la morale ne peut
également ignorer. Le respect de la règle juridique est également une obligation morale, tant
que le droit ne transgresse pas lui-même la morale la violation du droit est donc immorale
sauf si la règle violée est elle-même contraire à la morale.

Cet aspect des rapports entre le droit et la morale pose le problème fondamental de la
résistance à une loi injuste.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Sujet : L’autorité des traités en droit interne

Les règles du droit positif émanent d’autorité diverses. Certaines autorités élaborent
directement les règles dont elles imposent l'observation. Les autres n'ont en revanche de
pouvoir que pour assurer l’application de ces règles et pour les interpréter. Ainsi, on rencontre
parmi les sources : la loi, la coutume, la jurisprudence, et les traités internationaux. Mais dans
ce sujet, il s’agira essentiellement pour nous de réfléchir sur l’autorité des traités en droit
interne.
Si le droit interne est constitué par l’ensemble des textes normatifs adoptés par un Etat, et
uniquement applicables à l’intérieur de cet Etat, les traités internationaux en revanche sont
constituées par l’ensemble des normes juridiques applicables entre les Etats et les autres sujets
de droit international.
Dès lors se pose la problématique de savoir : quelle est la valeur, la place des traités en
droit interne ?
L’étude d’un tel sujet présente un double intérêt théorique et pratique. S’agissant de l’intérêt
théorique, il faut d’abord souligner que la question des rapports entre lois nationales et
conventions internationales est très controversée en doctrine. En effet, si Pour Hans Kelsen
« le traité a vis-à-vis de la loi et même de la Constitution une prééminence, en ce qu'il peut
déroger à une loi ordinaire ou constitutionnelle, alors que l'inverse est impossible car d'après
les règles du droit international, un traité ne peut perdre sa force obligatoire qu'en vertu d'un
autre traité ou de certains autres faits déterminés par lui, mais non pas par un acte unilatéral de
l'une des parties contractantes, notamment par une loi. Pour d’autres auteurs par contre : le
droit interne et le droit international constituent deux systèmes égaux, indépendants et
séparés. Ces auteurs conféraient au seul droit interne un statut d’autorité. Le droit
international, simple outils de coordination des politiques nationales était considéré comme
une rhétorique sans effet.
S’agissant de l’intérêt pratique, l’étude du sujet montre que les traités internationaux priment
sur les lois internes. Ce pendant les traités internationaux doivent remplir certaines conditions
avant de produire des effets dans l’ordre interne
Les normes internationales sont intégrées dans l’ordre juridique interne à une place
normalement supérieure à la loi mais inférieure à la Constitution, comme le souligne
d’ailleurs l’article 98 de la constitution qui dispose que les traités ou accords régulièrement
ratifiés ou approuvés ont dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie. Une fois cette
primauté constatée, les conventions vont produire des effets dans l’ordre interne.

Ainsi pour mieux appréhender les aspects essentiels de ce sujet il conviendra donc pour nous
de voir dans un premier temps : la supériorité des traités internationaux sur les lois nationales
(I) avant de voir dans un second temps : les conséquences de cette primauté des traités
internationaux sur les lois nationales (II).

I/ la supériorité des traités internationaux sur les lois nationales


La constitution sénégalaise du 22 janvier 2001 actuellement en vigueur subordonne la
primauté des traités internationaux à l’existence de certaines conditions qui sont la ratification
et l’approbation (A) mais en plus de cette condition l’article 98 ajoute également
l’application par l’autre partie et la publication (B).

A/ la ratification et l’approbation des traités internationaux


Les traités internationaux forment la base de réalisation de l’exigence démocratique. Le
législateur reconnait que sa marge de manœuvre est limitée par le respect qu’il doit aux
obligations découlant du droit international. Ce principe, aujourd’hui considéré comme de
nature générale, est confirmé par l’article 98 de la constitution sénégalaise du 22 janvier 2001
et la constitution française du 4 octobre 1958. Aux termes de ces constitutions: « les traités
ou accord régulièrement ratifies ou approuvés ont dès leur publication, une autorité supérieur
à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité de son application par l’autre
parti. » ce texte pose une exigence précise. Toutes les autorités de l’Etat et les juges doivent
en cas de contradiction entre les dispositions d’une loi et celles d’un traité international, faire
prévaloir la règle internationale à laquelle l’Etat a souscrit. L’application du droit
international suppose donc comme l’exige l’article 98 de la constitution sénégalaise, la
ratification ou l’approbation. La ratification est un acte postérieur à la signature par laquelle
l’autorité Etatique investie du pouvoir de ratifier confirme l’authentification du traité. La
conclusion solennelle des traités s’exprime le plus souvent par la ratification. Elle peut être
indispensable au plan international pour toutes les parties si la convention le prévoit ou si cela
est spécifié au cours de la négociation. Elle peut être indispensable pour un Etat en particulier
si celui-ci a signé le traité sous réserve de ratification ou s’il a fait savoir de manière claire
durant les négociations, qu’il ne s’engageait qu’après ratification. La procédure de
ratification est fixée par le droit interne. Le président de la république ratifie les conventions.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Ce pendant, Si le Conseil constitutionnel a déclaré qu'un engagement international comporte


une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de le ratifier ou de l'approuver ne peut
intervenir qu'après la révision de la Constitution.

Quant à l’approbation la constitution précise que c’est au gouvernement, après autorisation


du parlement si cela est nécessaire qu’il revient d’approuver les conventions qu’il a lui-même
négocié en tenant simplement le président informé.

En somme nous pouvons retenir que les traités internationaux qui ont une autorité supérieure
à celle des lois concernent uniquement les traités ou accord régulièrement ratifiés ou
approuvés et publié, et encore faut-il que ces derniers soient appliqués par l’autre partie.

B/ la publication et le principe de la réciprocité des conventions


les traités internationaux
La publication au journal officiel des engagements internationaux est révélatrice de la place
croissante prise par les traités internationaux parmi les sources de droit interne et de la
nécessité qui s’attache, dans un contexte général favorable à une meilleure information des
administrés et à un renforcement de leurs droits, à rapprocher le régime de publication des
conventions dans l’ordre juridique sénégalais de celui des autres sources de droit. Les raisons
qui justifient la publication des conventions dans l’ordre interne diffèrent sensiblement de
celles qui sont généralement avancées dans l’ordre international. A l’origine de l’article 18 du
Pacte de la Société des Nations relatif à l’obligation d’enregistrement des traités se trouvait le
souci des rédacteurs du pacte en assurant la publicité des conventions de permettre le contrôle
de l’opinion publique et d’éviter la pratique de la diplomatie secrète. Tout autre est la
justification de la publicité organisé pour les conventions sur le plan interne, qui tient
essentiellement aux exigences du juge de n’appliquer que des textes que leurs destinataires
ont eu la possibilité de connaître par la publication officielle, à l’instar de ce qui est exigé
pour les textes du droit interne.la publication apparaît ainsi comme le corollaire nécessaire de
la présomption selon laquelle « nul n’est censé ignorer la loi ». Le traité international doit
également être appliqué par l’autre parti. C’est ce qu’on appelle le principe de la réciprocité. Il
faut ce pendant préciser que ce principe de la réciprocité ne s’applique pas dans les
conventions ayant pour objet la protection des droits de l’homme.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

II/ les conséquences de la supériorité des traités internationaux


sur les lois nationales
La supériorité des traités internationaux sur les nationales produit des conséquences qui sont
relatives à l’effet directe des traités internationaux dans le droit interne (A) et la valeur
constitutionnelle de certains traités (B).

A/ l’effet direct des traités internationaux dans le droit interne

La règle internationale ne sera directement applicable que si elle remplit deux conditions
cumulatives tenant à la fois à son incorporation dans l’ordre juridique interne et à sa qualité
propre. L’applicabilité directe suppose que la règle internationale n’a pas besoin, pour être
applicable, d’être introduite dans l’ordre juridique interne par une disposition spéciale. Cette
question de la « réception » de la règle conventionnelle dans le droit interne, qui vaut pour
toute convention internationale et n’est pas propre aux traités protecteurs des droits de
l’homme qui possède une place parmi les dispositions de la constitution, relève du régime
constitutionnel des Etats, qui définit l’attitude générale de l’Etat face au droit international.
S’agissant du Sénégal , c’est donc de l’article 98 de la constitution que résulte à la fois
l’intégration directe de la règle conventionnelle dans l’ordre juridique national et la définition
de son rang dans la hiérarchie des normes : le traité international dés sa publication « une
autorité supérieure à celle des lois » ; il se situe à un rang supra législatif mais nécessairement,
infra constitutionnel puisque c’est de la constitution que procède son autorité juridique en
droit interne. En France, la primauté des traités internationaux sur la loi nationale et, en
conséquence, sur les actes juridiques internes subordonnés à la loi, posée par l’article 55 de la
constitution, est désormais admise sans discussion, que la loi nationale soit antérieure ou
postérieure au traité. La Cour de cassation française, dans un arrêt de 1975, prit position en
faveur d’une supériorité sans condition du traité sur la loi interne, qu’elle soit antérieure ou
postérieure à celui-là. La Haute juridiction reconnut ainsi le droit à tout tribunal de l’ordre
judiciaire de juger de la conformité de la loi aux traités afin de faire prévaloir ces derniers.
Quant au Conseil d’État, celui-ci s’est refusé pendant très longtemps à juger de la
compatibilité des lois aux traités. Il effectuait une distinction tout à fait illogique entre les lois
antérieures, qu’il considérait comme implicitement abrogées par le traité, et les lois
postérieures aux traités qui, elles, l’emportaient sur la convention internationale. L’arrêt
Nicolo du 20 octobre 1989 opéra un alignement de la position du Conseil d’État sur celle de la

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Cour de cassation. La question de l’incorporation de la norme internationale en droit interne


est donc réglée de manière uniforme par l’article 98 de la constitution du 22 janvier 2001 pour
l’ensemble des traités internationaux. Le second problème la valeur constitutionnelle des
traités relatives aux droits de l’homme de s’avère alors décisive.

B/ la valeur constitutionnelle des traités relatives aux droits de


l’homme

Selon le préambule de la constitution du 22 janvier 2001 le Sénégal proclame son adhésion à


la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 et aux instruments internationaux
adoptés par l'Organisation des Nations Unies et l'Organisation de l'Unité Africaine,
notamment la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, la
Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes du
18 décembre 1979, la Convention relative aux Droits de l' Enfant du 20 novembre 1989 et la
Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples du 27 juin 1981. Ces dispositions du
préambule concernant les droits de l’homme font parti intégrante de la constitution et ne
peuvent être détachées de la constitution. En effet, Selon un principe bien établi un « accord
international, ne peut, comme tel créer directement des droits et obligations pour des
particuliers », sauf à ce que les parties contractantes aient exprimé leur intention d’adopter
« des règles déterminées créant des droits et des obligations pour les individus,
susceptibles d’être appliquées par les tribunaux nationaux ». L’effet directe de la norme
internationale est donc l’exception et tient à l’intention exprimée des Etats parties à la
convention: cette condition est généralement remplie par les conventions internationales des
droits de l’homme qui fait partie intégrante de la constitution puisque c’est l’objet même de
la proclamation internationale que de reconnaître des droits aux individus d’autant plus que la
constitution du 22 janvier 2001 les intègre dans son préambule . En second lieu, il faut que les
dispositions de la convention en cause soit suffisamment précises, à la fois dans leur objet et
dans leur forme, pour être appliqué dans l’ordre interne sans mesures complémentaires
d’exécution. C’est l’appréciation de cette dernière condition qui va, bien souvent, permettre
au juge Sénégalais saisi d’une affaire d’appliquer un traité.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

METHODOLOGIE DU CAS PRATIQUE

(Inspirée d’Isabelle Defrénois-Souleau, Je veux réussir mon droit. Méthodes de travail


et clés du succès, 7è éd., Dalloz, 2010)

Comme tous les exercices juridiques, le cas pratique est un travail de démonstration qui
conduit à une réponse ponctuelle et précise à la question posée. Aucune extrapolation n’est
admise. L’étudiant doit mener une démonstration concise en évitant de verser dans des
développements théoriques sans intérêt.
Dans un cas pratique, on ne vous demande pas lequel des protagonistes, vous semble dans son
bon droit, ou quel arrangement vous paraîtrait équitable.
On vous demande la solution imposée par la loi ou, plus largement, par le droit positif en
vigueur ; autrement dit, la solution qu’apporterait un tribunal si le cas lui était donné à juger.
Vous devez découvrir les règles applicables et les mettre en œuvre comme si vous étiez le
juge.
Puisque la solution d’un cas pratique ne s’invente pas, des connaissances précises sont
nécessaires pour parvenir à des réponses exactes. N’essayez pas de résoudre un cas avant
d’avoir appris et compris la matière théorique sur laquelle il porte.
Il faut connaître les règles de droit, leurs conditions d’application, leurs effets, leurs
exceptions, sans oublier les détails tels que la durée des délais, etc. Il faut savoir quelle est la
position de la jurisprudence récente, et pour cela, avoir étudié quelques arrêts.
Il faut avoir acquis une certaine familiarité avec la terminologie, afin que les mots employés
dans l’énoncé ne soient pas vides de sens, mais éveillent des échos, déclenchent des
associations d’idées, suggèrent des solutions possibles. En un mot, il faut être précis et
attentif à tous les détails. Ne cherchez pas un plan subtil. Le cas pratique est un exercice
simple, qui n’obéit à aucune règle de forme particulière. Il s’agit seulement de répondre,
dans l’ordre, aux questions posées. On attend de vous une réponse qui soit à la fois précise
et raisonnée. Une solution non justifiée par un raisonnement juridique serait sans valeur
pour le correcteur. Et, de même, une argumentation ou un exposé de connaissances qui
ne déboucherait pas sur une réponse précise à la question posée resterait inachevé.
Donc : pas de solution sans raisonnement, pas de raisonnement sans une solution.
Et pour justifier clairement la solution, la meilleure méthode est celle du raisonnement
juridique classique :
1. Résumé des faits
2. Qualifications juridiques

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

3. problème juridique
3. Règles applicables
4. Corrélation entre les faits et la solution
4. Solution finale.
Construction
A- Schéma d’un cas pratique ne comportant qu’une question
1- Exposé des faits
Pour présenter l’exposé des faits, exprimez-vous en juriste. Il est sans intérêt de reprendre
textuellement l’énoncé, ou de le paraphraser maladroitement. L’exposé des faits doit se faire
dans l’ordre chronologique (la démarche consistant à exposer les faits dans l’ordre de leur
importance est aussi admise). Les actes, les évènements doivent être précisés en termes
juridiques et abstraits. Les personnes ne doivent pas être nommées sauf si le cas pratique est
relatif à l’identification des personnes.
2- Qualification juridique des faits
Qualifier, c’est nommer en termes juridiques. On qualifie des faits, ou une situation, en les
exprimant en termes juridiques et abstraits, afin de les rattacher aux cas prévus et réglementés
par la loi. Exemple, dire est-ce qu’il s’agit d’un problème d’application de la loi dans le
temps, est-ce un problème de preuve ou un problème de nullité du mariage etc.
3- Formulation du ou des problèmes de droit à résoudre
Elle permet de dégager et de formuler un ou plusieurs problèmes de droit. Elle n’est
nécessaire que quand la question n’est pas déjà formulée en termes techniques et précis.
D’une demande de conseil, d’une question posée en langage courant, ou en termes vagues (du
genre « quels sont ses droits, de moyens dispose-t-il, que peut-il faire, qu’en pensez vous
? »), Vous tirez donc une ou plusieurs questions de droit, précises, bien circonscrites,
auxquelles l’exposé des règles applicables va répondre.
Pour être parfaitement clair et précis, aboutissez à la formulation de problèmes de droit, posés
en termes abstraits et concis.
A RETENIR: Le problème de droit doit toujours être posé au regard de la règle de
principe
4- Règles applicables (ou principes de solution)
La deuxième phase du raisonnement consiste en une description et une explication des règles
applicables à la situation juridique que vous venez de dégager. Ce sont ces règles qui
apportent les principes de solution et qui justifient vos réponses.
Cet examen du droit positif portera sur : Textes (légaux et réglementaires) et grands principes.

29
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Jurisprudence (quelques mots sur l’évolution, puis explication des solutions actuelles).
Doctrine.
Expliquez de manière approfondie les points de droit utiles à la solution mais n’indiquez
que brièvement ceux qui ne font pas de difficulté en l’espèce.
5. Corrélation entre les faits et la solution
Il s’agit ici de revenir dans le cas d’espèce et d’établir un rapport entre les faits et les règles
applicables ou principes de solution en l’espèce
6- SOLUTION (ou réponse) finale
La dernière étape consiste à tirer les raisonnements en appliquant les règles de droit au cas
d’espèce. On aboutit ainsi aux solutions imposées par le droit positif.
Dans la dernière partie de votre devoir, vous devez apporter des solutions nettes et explicites à
un double niveau :
Au plan juridique et abstrait, donnez réponse aux problèmes de droit que vous avez
dégagés plus haut. Expliquez de manière claire et convaincante la solution tirée des règles
exposées, la décision que prendrait un tribunal saisi de l’affaire.
Puis au plan concret, répondez à la question pratique posée : donnez une réponse ou conseil
concret et précis.
Eventuellement, pour une deuxième réponse écartant une autre solution, et/ou proposant une
solution subsidiaire, le plan sera le même.
A RETENIR : De manière détaillée, dans un cas pratique il faut obligatoirement : rappeler
les faits, qualifier juridiquement les faits, poser le problème juridique, donner le (ou les)
principe(s) de solution, rattacher le (ou les) principe (s) de solution au cas d’espèce, donner la
solution.
B- Schéma d’un cas pratique comportant plusieurs questions
- Exposé des faits (dans l’ordre chronologique (par exemple), en se limitant à ceux qui
constituent les données de l’ensemble des questions).
- Qualification juridique des faits
PREMIERE QUESTION
Transposition de la question en termes juridiques (si nécessaire) et formulation d’un ou
plusieurs problèmes de droit (concis et abstraits).
Réponse au premier problème :
Règles applicables : exposé du droit positif.
Corrélation entre les faits et la solution
. Solution du problème de droit

30
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

. Réponse concrète.
Réponse à un deuxième problème (s’il y a lieu) : même raisonnement.
DEUXIEME QUESTION : même raisonnement.
TROISIEME QUESTION : même raisonnement

1/ Conflits de lois dans le temps

Cours
L'entrée en vigueur d'une loi nouvelle peut créer un problème de conflit de lois dans le
temps. Il faut organiser cette succession pour éviter l’instabilité juridique. Lorsque deux lois
se succèdent, il faut déterminer à quels faits s'appliquent la loi nouvelle. Cependant, les faits
régis par la loi ne sont pas tous instantanés. Il arrive bien souvent qu’une situation juridique se
prolonge dans le temps (ex. mariage, contrat de location, de travail, etc..). Il faut donc
déterminer la loi applicable pour les situations juridiques qui ont commencé sous l'empire de
la loi ancienne et qui se poursuivent sous celui de la loi nouvelle. Le problème de conflits de
lois dans le temps a une importance pratique considérable, étant donné l'inflation des textes
législatifs et réglementaires.
Ex. Divorce aboli en 1816. Que se passe t-il pour ceux qui se sont mariés avant 1816 alors
que le divorce était possible à cette époque ?
- Parfois, le législateur prévoit dans le corps du texte de la loi nouvelle, ses modalités
d'application dans le temps et prévoit des mesures transitoires, chargé d'aménager la
transition entre la loi nouvelle et le régime antérieur. Les dispositions du législateur
s’appliquent prioritairement aux règles de conflits de lois dans le temps.
Mais s'il est muet sur ce point, le juge doit recourir à l'application d'un certain nombre de
principes.
- Les individus ont besoin de sécurité juridique : ils accomplissent les actes de la vie
juridique en fonction de la législation en vigueur à l'époque où ils agissent. Mais la loi est
supposée réaliser une amélioration par rapport à la loi ancienne. Donc, le besoin de justice
rend son application rapide nécessaire. De plus, l'égalité entre les citoyens peut conduire à
appliquer généralement et immédiatement la loi nouvelle pour que tous les citoyens soient
régis par la même loi. Sécurité juridique, égalité des citoyens et amélioration du droit, le
législateur a tenté de poser des principes répondant à ces deux exigences contradictoires.
Ceux-ci sont énoncés à l’article 2 du Code civil : "La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle
n'a point d'effet rétroactif" et à l’article 831 du code de la famille « La loi nouvelle a effet
immédiat au jour de sa mise en vigueur. Elle régit les actes et faits juridiques postérieurs et les
conséquences que la loi tire des actes ou faits qui ont précédé sa mise en application.
Demeurent soumis aux règles en vigueur lorsqu’ils ont été passés ou sont intervenus, les actes
ou faits ayant fait acquérir un droit ou créer une situation légale régulière. »

31
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Deux principes résultent de cette proposition : le principe de non-rétroactivité des lois (§1) et
le principe de l'effet immédiat de la loi nouvelle (§2). Chacun de ces principes sera étudié
successivement.

§ 1 : LA NON-RETROACTIVITE DES LOIS


L’article 2 pose le principe de la non-rétroactivité des lois (I) mais l’application de ce principe
connaît certaines limites (II).

I. -Le principe de non-rétroactivité

Aux termes de l’article 831, alinéa 2 du code de la famille : « Demeurent soumis aux règles
en vigueur lorsqu’ils ont été passés ou sont intervenus, les actes ou faits ayant fait acquérir un
droit ou créer une situation légale régulière. »
- Une loi est rétroactive lorsqu’elle s’applique à des situations juridiques constituées avant sa
mise en vigueur, ainsi qu’aux effets passés de cette situation.
- La loi n’a pas, en principe, d’effets rétroactifs, ce qui signifie qu’une loi est sans application
aux situations juridiques dont les effets ont été entièrement consommés sous l’empire de la loi
ancienne. Il ne faut donc pas appliquer une loi à des actes ou des faits juridiques qui se sont
passés antérieurement au moment où elle a acquis effet obligatoire. Une loi nouvelle ne peut
modifier ou effacer des effets juridiques qui se sont produits sous l’empire de la loi ancienne.
Ex. 1 : La loi du 8 mai 1816 a supprimé, en France, le divorce. Des époux qui ont divorcés
avant la loi du 8 mai 1816 ne peuvent voir leur divorce remis en cause. La loi ne peut pas
remettre en cause des situations juridiques valablement créée sous l’empire de la loi en
vigueur au moment de leur constitution.
Ex. 2 : La loi du 31 décembre 1917 a modifié l’article 755 du Code civil en matière de
succession. Avant cette loi, il était possible d’hériter d’un parent, jusqu’au douzième dégré.
Depuis cette loi, il n’y a plus, en principe, de vocation successorale au delà du sixième degré.
Maintenant, imaginons une succession ouverte en 1916 et qui a été liquidée conformément
aux prescriptions de la loi en vigueur. Le partage a été fait et l’actif successoral a été mis en
possession e collatéraux du huitième degré. Il est clair que cette succession ne sera pas remise
en cause par la loi de 1917 qui lui est postérieure.
- Le principe de non-rétroactivité est une règle qui apparaît non seulement rationnelle mais
encore juste.
Il faut, en effet protéger la liberté de l’homme contre la loi. L’homme a besoin de sécurité
juridique. Or, il n’y aurait plus aucune sécurité si on pouvait remettre en question les actes
passés par les individus conformément aux prescriptions légales. Imaginons une loi selon
laquelle les testaments doivent être faits devant notaire sous peine de nullité. Si la loi est
rétractive, elle s’appliquera à tous les testaments antérieurement et à leurs effets passés.
Toutes les successions dévolues par testament avant l’entrée en vigueur de la loi seront
remises en cause. Si les dispositions testamentaires conféraient à X des immeubles, il s’en
trouve dessaisi par l’effet de cette loi. Or, X a pu conclure, entre temps des conventions
relatives à ces biens : ces opérations tomberont alors automatiquement. De plus, on peut faire
valoir que si les lois avaient un effet rétroactif, il n’y aurait plus aucun intérêt à les respecter.

32
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

En effet, n’importe quelle prescription impérative pouvait être remise en cause, respecter la
loi ne serait même plus un gage de sécurité. N’importe quel agissement, pourtant régulier,
pouvant être remis en cause par une loi nouvelle et inconnue.
- Cependant, il ne faut pas exagérer la portée du principe de non-rétroactivité des lois
nouvelles. En effet, ce principe ne s’impose en réalité qu’aux juges et aux autorités
administratives. Il ne s’agit que d’un principe d’interprétation. En l’absence de dispositions
transitoires, le juge doit appliquer la loi nouvelle sans rétroactivité.
- On peut d’ailleurs observer que les juges ne respectent pas toujours cette règle, notamment à
l’occasion de revirement de jurisprudence. En effet, ces revirements vont s’appliquer aux
litiges en cours. Il y aura donc rétroactivité car les plaideurs ont constitués une situation
juridique sous l’empire de l’ancienne jurisprudence et se voient appliquer la nouvelle
jurisprudence. Mais il ne s’agit pas là d’une véritable exception dans la mesure où il n’y a pas,
à proprement parler, de véritable loi nouvelle. En revanche, d’autres cas de figures
apparaissent comme de sérieuses limites au principe de la non-rétroactivité des lois.

II. - Les limite au principe de non-rétroactivité

- A la différence de la Constitution de l'an III, le principe de la non-rétroactivité des lois ne


figure pas dans notre Constitution. Le Préambule n'impose que la non-rétroactivité des lois
pénales. Aussi, ce principe de non rétroactivité est un principe qui ne s'impose qu'au juge. Le
législateur peut y porter atteinte, de façon directe en adoptant des lois expressément
rétroactives (A), soit de façon indirecte, en adoptant des lois "faussement" interprétatives (B).
Il faut noter qu'il est de mauvaise politique d'édicter des lois rétroactives, qui ruinent toute
sécurité juridique. Une particularité du droit pénal implique les lois pénales plus douces soient
toujours rétroactives (C).
A - Les lois expressément rétroactives

· En matière pénale, il n’est pas possible d’édicter une loi expressément active lorsque la loi
est plus sévère (nouvelle incrimination, aggravation de la peine, suppression de circonstances
atténuantes…) Il s’agit d’un principe constitutionnel inscrit dans la Déclaration des droits de
l’homme de 1789. Le Conseil Constitutionnel veille à son respect et annule les lois qui y
porteraient atteinte.
· En matière civile, les lois expressément rétroactives sont possibles mais elles sont rares.
Elles interviennent souvent en période exceptionnelle. On pourrait citer ainsi quelques lois
prises à la Révolution, comme celle de 1794 qui a réformé le système des successions et
déclarée applicable pour toutes les successions ouvertes depuis 1789 ! On a du refaire toutes
les successions liquidées avec les principes nouveaux. Il y eut aussi une loi du 27 juillet 1940
qui a exonéré les chemins de fer de leur responsabilité à l'égard des transports effectués
depuis l'invasion allemande. Ces lois exceptionnelles, rétroactives correspondent à des
périodes à des périodes troublées de l'Histoire où il existe une volonté de faire table rase du
passé. Les lois ne sont rétroactives que si le législateur l'a expressément prévu. Aujourd'hui
ces lois sont très rares. On peut cependant noter, assez récemment, la loi du 5 juillet 1985
relative aux accidents de la circulation comportant un article 47 disposant : «les dispositions
des articles 1er à 6 s’appliqueront dès la publication de la présente loi, même aux accidents

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

ayant donné lieu à une action en justice introduite avant cette publication, y compris aux
affaires pendants devant la Cour de cassation». La disposition donnant un caractère rétroactif
à la loi est bien expressément exprimée.

B - Les lois interprétatives

- Une loi est interprétative lorsqu'elle vient seulement "préciser et expliquer le sens obscur
et contesté d'un texte déjà existant" (Soc. 20 mars 1956) On considère alors que la loi
nouvelle fait corps avec la loi ancienne, qu'elle n'est qu'une partie, un prolongement de la loi
ancienne. Aussi, la jurisprudence décide que la loi interprétative rétroagit au jour où la loi
ancienne est entrée en vigueur. Ce procédé législatif est critiqué car le rôle d'interprétation
n'appartiendrait qu'aux tribunaux et non au législateur et surtout parce que parfois, sous
couvert d'interprétation, la loi "interprétative" ajoute à la loi ancienne qu'elle est chargée
d'interpréter.
- Un tel procédé est assez contestable. Par définition, si le législateur éprouve le besoin
d’intervenir, c’est parce qu’il n’est pas d’accord avec une interprétation jurisprudentielle : il
change donc le droit existant. Il a été utilisé lorsque le législateur voulait contrecarrer une
interprétation jurisprudentielle qu'il contestait. Cette intervention est limitée par le fait que
la jurisprudence ne se considère pas liée par l'intitulé de la loi et vérifie si elle est bien
rétroactive. Le juge veille ainsi au respect du principe de non-rétroactivité.

C - Les lois pénales plus douces

- Lorsqu'une loi pénale plus douce entre en vigueur, soit parce qu'elle réduit la peine
encourue, soit parce qu'elle supprime l'infraction ou une circonstance aggravante, par
exemple, elle s'applique immédiatement à toutes les situations juridiques pénales, même nées
avant son entrée en vigueur. C'est, ce qu'on appelle la rétroactivité "in mitius". Les délits
antérieurs sont jugés conformément à la loi nouvelle, car il semble normal de considérer que
si une loi pénale nouvelle est plus douce, c'est parce que la sévérité antérieure n'a plus
d'utilité sociale. Si le législateur estime inutile de maintenir une sanction plus sévère pour un
comportement délictueux déterminé, il n'y a aucune raison de continuer à l'appliquer à des
délits antérieurs à la loi nouvelle. Cette règle spécifique à la matière pénale a une valeur
constitutionnelle et toute loi contraire serait donc annulée par la
Conseil Constitutionnel sur le fondement de la l'article 8 de la Déclaration des droits de
l'Homme et du citoyen de 1789.
Aussi, le délinquant pourra t-il invoquer une loi pénale plus douce même pendant le procès.
La Cour de cassation annulera simplement la décision mais ne cassera pas la décision qui n'a
pas violé la loi. Le 5 sept. 2000, la Chambre criminelle a rappelé la règle : « Les dispositions
d’une loi nouvelle s’appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et
n’ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée ». La Cour de
cassation a, par exemple récemment, annulé de nombreuses décisions rendues avant l’entrée
en vigueur de la loi du 10 juillet 2000 modifiant l’art. 121-3 du Code pénal sur les délits
d’imprudence, dans un sens plus favorable aux délinquants. Si la décision a acquis l'autorité
définitive de la chose jugée, sa condamnation n'est plus remise en cause.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

§ 2 : L’EFFET IMMEDIAT DE LA LOI NOUVELLE

Nous étudierons le principe de l’effet immédiat dans un premier temps (I). Mais nous verrons
que ce principe ne s’applique qu’en matière extra-contractuelle. En effet, en matière
contractuelle, c’est un autre principe qui est applicable : celui de la survie de la loi ancienne
(II).
.
I. Le principe de l’effet immédiat

Selon l’article 831, alinéa 1er du code de la famille :


« La loi nouvelle a effet immédiat au jour de sa mise en vigueur. Elle régit les actes et faits
juridiques postérieurs et les conséquences que la loi tire des actes ou faits qui ont précédé sa
mise en application » .
- La loi nouvelle s'empare des situations juridiques nées postérieurement à son entrée en
vigueur et s'applique immédiatement à eux. La loi nouvelle va aussi saisir les effets futurs
(c'est-à-dire non encore réalisés) d'une situation juridique née antérieurement à son entrée en
vigueur qui seront régis par elle. La loi ancienne n'est plus applicable.
- Le législateur peut donc modifier à tout moment les effets des situations juridiques en
cours. Il peut modifier les effets de la situation juridique du père (plus de droits pour le père
naturel par la loi du 8 janvier 1993), de l'épouse (égalité des droits par la loi du 30 décembre
1985), du propriétaire (restriction des droits des propriétaires pour l'aliénation d'œuvre d'art),
etc... Leur qualité résulte d'une situation juridique qui est née dans le passé mais qui se
prolonge dans l'avenir et dont le législateur modifie les effets futurs. Ainsi, par exemple, la loi
du 3 janvier 1972 a voulu donner aux enfants (qu'ils soient légitimes ou naturels) des droits
égaux, notamment sur le plan successoral. Cette loi n'a pas remis en cause les successions
déjà ouvertes (effet non rétroactif) mais elle a été déclarée immédiatement applicable aux
successions ouvertes et non liquidées ainsi qu'aux successions qui s'ouvriraient dans l'avenir.
- Il ne s'agit certainement pas d'un effet rétroactif, car comme le soulignait Portalis, "Détruire
une institution qui existe, ce n'est certainement pas faire une loi rétroactive, car, si cela était, il
faudrait dire que les lois ne peuvent rien changer. Le présent et l'avenir sont sous leur empire.
Elles ne peuvent certainement pas faire qu'une chose qui existe n'ait pas existé, mais elles
peuvent décider qu'elle n'existera plus".
- Pour résumer, les conditions de validité et les effets passés sont soumis à la loi ancienne
tandis que les effets à venir es situations non contractuelles en cours sont soumises à la loi
nouvelle. 3 cas de figures doivent donc être distingués :
- Concernant les conditions d’établissement des situations juridiques, la loi nouvelle ne les
remet pas en cause. Il n’y a pas rétroactivité de la loi nouvelle. Ainsi, imaginons qu'une loi
nouvelle impose que chaque époux ait au moins 2 témoins pour se marier (alors qu'on exige
qu'un par époux) : les mariages déjà célébrés avec un témoin par époux resteront valables.
- Concernant les effets passés des situations juridiques antérieurement créées, ils restent
eux aussi soumis à la loi ancienne. La loi nouvelle ne s’applique pas à eux en vertu du
principe de non-rétroactivité.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

- Concernant les effets futurs des situations juridiques antérieurement créées, ils sont
saisis par la loi nouvelle en vertu du principe de l’effet immédiat.
- Le principe de l’effet immédiat s’inspire de l’idée que la loi nouvelle est meilleure. Il faut
donc que tous les individus en bénéficient. Cette solution est aussi nécessaire pour assurer une
certaine harmonie juridique. Il est important que tous les individus soient soumis à la même
loi. Cependant, ces considérations cèdent devant un autre impératif : celui de la sécurité
juridique en matière contractuelle.

II. Le principe de la survie de la loi ancienne en matière contractuelle

- Il y a survie de la loi ancienne lorsqu'elle continue de régir des faits qui se situent après
l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, c'est-à-dire après l'abrogation de la loi ancienne.
La loi nouvelle ne va donc pas s'appliquer immédiatement mais la loi ancienne va régir les
effets futurs nés sous l'empire de la loi nouvelle. La jurisprudence a décidé que "les effets
d'un contrat sont régis, en principe, par la loi en vigueur à l'époque où il a été passé"
(Com. 27 oct. 1969) Cela signifie donc que les contrats en cours d'exécution, lorsqu’entre en
vigueur la loi nouvelle, continuent à être régis par le loi qui était en vigueur au moment de
leur conclusion. La loi ancienne survit donc puisqu'elle s'applique après son abrogation et
ceci dans tous les cas où une situation contractuelle est née avant elle.
- On explique cette exception par le fait que la situation contractuelle est largement laissée à
la maîtrise de ceux qui l'ont crée. On peut considérer que la loi ancienne s'était incorporée
dans le contrat (ex. statut d'une société rédigés selon la loi ancienne : ils ont acquis une
nature contractuelle). Cette exception s'explique dans un système libéral où l'on privilégie
l'autonomie de la volonté sur la volonté du législateur. Il est normal que les volontés des
cocontractants ne soient pas déjouées par la suite. Il est nécessaire qu'existe une certaine
sécurité juridique et les contractants peuvent être ainsi certains que l'équilibre qu'ils ont crée
par contrat ne sera pas déjouer plus tard par une loi nouvelle.
- Néanmoins, il existe une exception au principe de la survie de la loi ancienne en matière
contractuelle pour les lois d'ordre public. A chaque fois que le législateur l'impose parce
qu'il veut uniformiser toutes les situations juridiques, quelles soient en cours ou celles qui
sont à venir, il va décider que la loi nouvelle est immédiatement applicable, même aux
situations juridiques contractuelles en cours. Il en va souvent ainsi lorsque la loi nouvelle
exprime un intérêt social tellement impérieux que la stabilité des conventions ne saurait
y faire échec. le seul fait que la loi nouvelle soit impérative au sens de l’article 6 ne saurait
suffire à attester de l’existence d’un tel intérêt.
- En revanche, il en est fréquemment ainsi lorsque le législateur intervient en matière de baux
à usage d'habitation et professionnels. C'est parfois aussi le cas en matière de prêt d'argent
ou de contrat d'assurance vie, de droit du travail. La survie de la loi ancienne ne sera
écartée par le juge que s'il existe soit une disposition expresse du législateur en ce sens, soit
si pour des motifs tirés de l'ordre public, "l'uniformité des situations juridiques doit
l'emporter sur le respect des prévisions des parties". Cet ordre public doit être
particulièrement grave et impérieux pour faire céder la sécurité des contractants pour des
raisons sociales ou nationales. La Cour de cassation considère que cet ordre public impose

36
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

l'uniformisation de certaines situations, comme celle qui découlent de l'exécution du contrat


de travail. En raison de l'abondante et impérative réglementation à laquelle est soumis le
contrat de travail, sa nature n'est plus vraiment contractuelle. La jurisprudence décide alors
que les lois nouvelle s'appliquent aux effets futurs de tous les contrats de travail, ce qui
conduit à une juste égalité des citoyens devant la loi, quelque soit la date de leur contrat de
travail. Ainsi, si une loi nouvelle accorde un avantage social aux salariés, il paraît juste que
tous les salariés bénéficient de ce progrès social immédiatement. L'intérêt poursuivi justifie
que le bienfait de la loi s'étende même aux contrats en cours.

37
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

APPLICATION PRATIQUE.
Devoir de droit civil : Introduction au droit
Cas n°1 (Durée 3h)

Kène Bougoul est née le 12 décembre 1980. A cette date, elle n’était pas reconnue par son
père comme étant son enfant. Voulant établir sa filiation paternelle, sa demande fut rejetée au
motif que le code de la famille interdit la recherche de paternité à tout enfant naturel. Mais en
1998, une loi nouvelle entre en vigueur et modifie les dispositions relatives à la recherche de
paternité. Par cette loi, le législateur prévoit que « l’action en recherche de paternité est
ouverte à tout enfant naturel désirant établir sa filiation paternelle ». Kène Bougoul qui
était désespérée saisit la justice d’une demande en établissement de sa filiation paternelle.
Mais son père Baye soutient que cette loi ne peut lui être appliquée car au moment de la
naissance de Kène Bougoul la loi qui était en vigueur n’autorisait pas une telle action.
Qu’en pensez-vous ?

Cas n° 2
La société Immobilière Keur Gui avait acheté en 2000 des Immeubles à Mbour ; Rufisque
et Toubabe Dialaw. Au moment de l’achat aucune formalité administrative n’était requise
par la loi en vigueur. Mais une loi entrée en vigueur en 2005 soumet à autorisation
administrative préalable, à peine de nullité, toutes les ventes portant sur des immeubles. Un
étudiant en deuxième année de droit vient voir la société et lui affirme que les achats qu’elle
avait faits en 2000 ne sont plus valables. La société désespérée et ne sachant plus quoi penser
vient vous voir pour savoir si les acquisitions, faites avant l’entrée en vigueur de la loi de
2005, demeurent valables, bien que l’autorisation administrative n’est point été sollicitée.
Cas n°3

Dans les années cinquante, l’entreprise LE PLAISIR DE BOIRE était prospère : elle avait mis
sur le marché une boisson pétillante, fortement sucrée, légèrement amère et d’un rouge
magnifique. On se l’arrachait, et rien n’était plus prisé, depuis le cocktail chez l’ambassadeur
jusqu’aux surprises- parties que d’absorber ce breuvage. Le fabricant avait pour cela, dès
1952 et pour dix (10) ans, passé un contrat avec le producteur d’une substance chimique, de
nature à donner à la boisson cette belle couleur rouge. Mais, en 1958, une loi nouvelle interdit
l’usage de cette substance, dont on a démontré la nocivité pour la santé de l’homme, et prévoit
que sa production, son utilisation et sa distribution en sont désormais strictement interdites.
Qu’advient-il du contrat ?

Cas n° 4

Adji Ndella a commis un avortement clandestin en juin 2011. Au moment de l’avortement la


loi qui était en vigueur prévoyait une peine de 10 ans pour l’auteur et 3 ans pour les
complices. Mais avant son jugement, une loi entre en vigueur et prévoit désormais une peine
de 5ans pour l’auteur et 30 ans pour les complices.

Qu’en pensez-vous ?

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Proposition de correction
Cas n° 1

Kène bougoul est une enfant naturelle née en 1980. A cette date, la loi en vigueur n’autorisait
pas l’action en recherche de paternité. Mais en 1998, une loi nouvelle entre en vigueur et
autorise désormais la recherche de paternité à tout enfant naturel désirant établir sa filiation
paternelle.

Les faits soumis à notre réflexion concernent l’application de la loi dans le temps en matière
extra contractuelle.

Le problème de droit qui se pose est de savoir si une nouvelle loi qui autorise la recherche de
paternité peut s’appliquer à un enfant naturel née antérieurement à son entrée en vigueur ?

Aux termes de l’article 831 alinéa 1er du code de la famille : « La loi nouvelle a effet
immédiat au jour de sa mise en vigueur. Elle régit les actes et faits juridiques postérieurs
et les conséquences que la loi tire des actes ou faits qui ont précédé sa mise en
application. » En d’autres termes, la loi nouvelle s’applique immédiatement à toutes les
situations extra contractuelles en cours à partir de son entrée en vigueur.
Dans notre cas d’espèce, au moment de la naissance de Kène bougoul ; la loi qui était en
vigueur interdisait la recherche de paternité à tout enfant naturel. Mais quelques temps après
son entrée en vigueur une loi nouvelle entre en vigueur et autorise l’action en recherche de
paternité naturelle à tout enfant désirant établir sa filiation paternelle. Nous somme donc en
présence d’une situation extra contractuelle qui entraine l’application immédiate de la loi
nouvelle.
En conclusion nous pouvons donc préciser conformément à ce qui précède qu’à partir de
l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, Kène bougoul pourra établir sa filiation paternelle avec
Baye conformément à la loi nouvelle.
Cas n° 2

Une société immobilière avait acquis en 2000 des immeubles à Mbour, Rufisque et Toubab
Dia Lao. A cette époque aucune formalité administrative n’était requise par la loi en vigueur.
Cependant en 2005, une loi nouvelle entre en vigueur et exige désormais une autorisation
administrative préalable pour toutes les ventes portant sur des immeubles.
Les faits soumis à notre réflexion concernent l’application de la loi dans le temps sur les
droits acquis.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Le problème de droit qui se pose est de savoir si une loi nouvelle qui soumet à autorisation
administrative préalable toutes les ventes d’immeubles peut remettre en cause les ventes faites
avant son entrée en vigueur ?
Selon l’article 831 alinéa 2 : « Demeurent soumis aux règles en vigueur lorsqu’ils ont été
passés ou sont intervenus, les actes ou faits ayant fait acquérir un droit ou créer une
situation légale régulière. » En d’autres termes, les acquisitions faites sous l’empire d’une
loi restent régies par cette loi. Les droits acquis ne sont donc pas remis en cause par la loi
nouvelle.
Dans notre cas d’espèce, la société Immobilière Keur Gui avait acquis à Mbour, Rufisque et
Toubab dia Lao des immeubles sans autorisation administrative conformément à la loi qui
était en vigueur en 2000. Mais en 2005, une loi nouvelle entre en vigueur et soumet à
autorisation administrative préalable les ventes portant sur des immeubles. Nous sommes
donc en présence des droits acquis sous l’empire d’une loi ancienne qui restent soumis à cette
loi.
Pour terminer, nous pouvons préciser que les acquisitions faites par la société avant l’entrée
en vigueur de la loi de 2005, demeurent valables conformément à la loi de 2000.
Cas n° 3

Une entreprise avait mis sur le marché une boisson d’un rouge magnifique. En 1952, elle avait
pour 10 ans conclus un contrat avec le producteur d’une substance chimique de nature à
donner à la boisson cette belle couleur rouge. Mais en 1958, une loi nouvelle interdit l’usage
de cette substance dont on’ a démontré la nocivité pour la santé de l’homme, et prévoit que sa
production, son utilisation et sa distribution en son strictement interdites.
Les faits soumis à notre réflexion concernent l’application de la loi dans le temps en matière
contractuelle.
Le problème de droit qui se pose est de savoir : si une loi nouvelle peut remettre en cause un
contrat conclu avant son entrée en vigueur ?
En matière contractuelle, c’est le principe de la survie de la loi ancienne qui s’applique au
contrat. Ce principe se justifie par le fait que le contrat est un accord de volonté entre les deux
parties qui se sont conformées à la loi qui était en vigueur au moment de la conclusion du
contrat. Une loi ne peut donc remettre en cause les prévisions contractuelles des parties.
Ce principe comporte cependant des exceptions qui sont les lois d’ordre public qui expriment
un intérêt social tellement impérieux qu’elles doivent être appliquées immédiatement,
même aux contrats en cours.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Dans notre cas d’espèce, l’entreprise LE PLAISIR DE BOIRE avait conclus un contrat avec
le producteur d’une substance chimique de nature à donner à la boisson une belle couleur
rouge. Mais avant la fin du contrat, une loi nouvelle entre en vigueur et interdit désormais la
production, l’utilisation et la distribution de la substance. Il s’agit donc d’une loi d’ordre
public qui s’applique immédiatement au contrat en cours.
En conclusion, nous pouvons retenir que la loi de 1958 étant une loi d’ordre public va
s’appliquer immédiatement au contrat. Par conséquent, à partir de son entrée en vigueur, le
contrat ne pourra plus produire d’effets juridiques.
Cas n° 4

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Travaux dirigés: Introduction à l'étude du droit


Séance N°5
Thème: Application de la loi dans le temps
Sous-thème: Le conflit de lois dans le temps
Exercice: Résoudre les cas pratiques suivants
Cas n°1

Modou est depuis 2000 locataire pour dix (10) ans d'une maison sur la VDN pour un loyer de
250.000FCFA. En 2005, intervient une loi nouvelle qui fixe le loyer maximum à lOO.OOO
FCFA dans le but de lutter contre la propension des bailleurs à fixer des taux de loyer
exorbitant. Modou demande à son bailleur de lui rembourser les 150.000F de plus perçus
pendant les 5 années passées. Devant le refus catégorique de ce dernier, Modou s'est adressé à
son voisin juriste qui lui explique qu'il ne pourrait prétendre au remboursement demandé mais
qu'il ne paiera plus pour l'avenir la somme convenue dans le contrat de location. Justifiez
juridiquement les solutions avancées.

Cas n°2

Ndioukhoump, un grand escroc devant l'éternel, a commis un vol en réunion avec/une


personne qu'il avait connue en prison. Ils furent condamnés en première instance à dix (10)
ans de prison. Le lendemain, une loi nouvelle entre en vigueur et fixe la peine maximum pour
de tels faits à cinq (05) ans. Ayant interjeté appel, Ndioukhoump s'est vu affirmer par son
avocat que sa condamnation sera revue à la baisse conformément à la loi nouvelle. Devant le
juge d'appel, sa condamnation fut effectivement ramenée à cinq (05) ans. Tout heureux
d'avoir bénéficié de la loi nouvelle à l'issue de son procès en appel, il en fait part à .son
complice qui estime qu'il doit aussi en bénéficier puisqu'étant condamné en même temps que
celui-ci. Mais son avocat déçoit son espoir en lui disant qu'il ne peut en bénéficier.
Justifiez juridiquement ces solutions avancées.

Cas n°3

Lamine s'est marié avec deux femmes sous le régime polygamique. Séducteur invétéré, il s'est
entiché de la ravissante Coumba avec qui il s'est fiancé le 2 mai 2004 et la date du mariage fut
fixée au courant du mois de mars 2005. Mais le 1er janvier 2005, intervient une loi nouvelle
qui interdit la polygamie. Devant le refus de l'officier d'état-civil de célébrer son mariage avec
Coumba alors qu'il a déjà versé la dot, il s'affole lorsque ce dernier lui dit qu'il devra même se
séparer d'une de ses femmes.
Il vient vous voir pour avoir des éclairages juridiques sur les dires de l'officier d'état-civil.

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PROPOSITION DE CORRECTIION

Cas n°1

En 2000, une personne a loué une maison pour dix (10) ans, pour un loyer de 250.000FCFA.
En 2005, intervient une loi nouvelle qui fixe le loyer maximum à 100 000 FCFA dans le but
de lutter contre la propension des bailleurs à fixer des taux de loyer exorbitant. Le locataire
demande à son bailleur de lui rembourser les 150.000F de plus perçus pendant les 5 années
passées.
Les faits soumis à notre réflexion concernent le conflit de lois dans le temps en matière
contractuelle.
Les problèmes de droit qui se posent sont de savoir d’une part : une loi nouvelle qui modifie
les taux de loyer, peut elle remettre en cause les effets postérieurs d’un contrat antérieur à son
entrée en vigueur ? D’autre part, une loi nouvelle qui modifie les taux de loyer des contrats en
cours, peut elle remettre en cause les effets antérieurs d’un contrat antérieur à son entrée en
vigueur ?

Première question : une loi nouvelle qui modifie les taux de loyer, peut elle remettre en
cause les effets postérieurs d’un contrat antérieur à son entrée en vigueur ?

En matière contractuelle, c’est le principe de la survie de la loi ancienne qui s’applique au


contrat. Ce principe se justifie par le fait que le contrat est un accord de volonté entre les deux
parties qui se sont conformées à la loi qui était en vigueur au moment de la conclusion du
contrat. Une loi ne peut donc remettre en cause les prévisions contractuelles des parties.
Ce principe comporte cependant des exceptions qui sont les lois d’ordre public qui expriment
un intérêt social tellement impérieux qu’elles doivent être appliquées immédiatement,
même aux contrats en cours.
En l’espèce, au moment de la conclusion du contrat, la loi qui était en vigueur prévoyait un
taux de 250.000FCFA. Mais, pour lutter contre la propension des bailleurs à fixer des taux de
loyer exorbitant, une nouvelle entre en vigueur et fixe le loyer maximum à 100 000 FCFA.
Nous sommes donc en présence d’une loi d’ordre public qui s’applique donc immédiatement
aux effets postérieurs des contrats en cours

En conclusion, qu’à partir de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, le locataire ne paiera que
100 000f conformément à la nouvelle loi de 2005.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Deuxième question : une loi nouvelle qui modifie les taux de loyer des contrats en cours,
peut elle remettre en cause les effets antérieurs d’un contrat antérieur à son entrée en vigueur
?
Aux termes l’article 831, alinéa 2 : « Demeurent soumis aux règles en vigueur lorsqu’ils
ont été passés ou sont intervenus, les actes ou faits ayant fait acquérir un droit ou créer
une situation légale régulière. » En d’autres termes, les acquisitions faites sous l’empire
d’une loi restent régies par cette loi. Les droits acquis antérieurement ne sont donc pas remis
en cause par la loi nouvelle.
En l’espèce, au moment de la conclusion du contrat, la loi qui était en vigueur prévoyait un
taux de 250.000FCFA. Une nouvelle entre en vigueur et fixe le loyer maximum à 100 000
FCFA. Ainsi, le débiteur vient voir son bailleur pour lui réclamer les 150.000F de plus perçus
pendant les 5 années passées. Nous sommes donc en présence des droits acquis sous l’empire
d’une loi ancienne qui restent soumis à cette loi.
En conclusion, nous pouvons donc retenir que le locataire ne pourra en aucun cas obtenir
remboursement des 150.000F de plus perçus pendant les 5 années passées qui restent soumis à
la loi ancienne.

Cas n°2

Un escroc, a commis un vol en réunion avec/une personne qu'il avait connue en prison. Ils
furent condamnés en première instance à dix (10) ans de prison. Le lendemain, une loi
nouvelle entre en vigueur et fixe la peine maximum pour de tels faits à cinq (05) ans. Ayant
interjeté appel, l’escroc s'est vu affirmer par son avocat que sa condamnation sera revue à la
baisse conformément à la loi nouvelle. Devant le juge d'appel, sa condamnation fut
effectivement ramenée à cinq (05) ans. Tout heureux d'avoir bénéficié de la loi nouvelle à
l'issue de son procès en appel, il en fait part à .son complice qui estime qu'il doit aussi en
bénéficier puisqu'étant condamné en même temps que celui-ci. Mais son avocat déçoit son
espoir en lui disant qu'il ne peut en bénéficier.
Les faits soumis à notre analyse sont relatifs au conflit de lois dans le temps en matière
pénale.
Le problème de droit qui se pose est alors de savoir : une loi nouvelle réduisant la peine
encourue pour une infraction, peut elle s’appliquer à une personne condamnée en première
instance et qui n’a pas interjeté appel dans les délais ?

Aux termes de l’article 831, alinéa 1er, du code la famille : « La loi nouvelle a effet immédiat
au jour de sa mise en vigueur. Elle régit les actes et faits juridiques postérieurs et les
conséquences que la loi tire des actes ou faits qui ont précédé sa mise en application. » En
d’autres termes, la loi a effet immédiat à partir de son entrée en vigueur, elle n’a pas vocation
à revenir en arrière pour régir des situations qui étaient sous l’empire d’une loi ancienne. Ce

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

pendant, si tel est le principe, il comporte des exceptions qui sont les lois interprétatives, les
déclarées expressément rétroactive par le législateur et les lois pénales plus douces qui
suppriment une incrimination ou réduisent le taux d’une peine lors que la condamnation n’est
pas encore passée en force de chose jugée.
En l’espèce, au lendemain de sa condamnation en première instance, une loi nouvelle entre
en vigueur et ramène la peine maximum pour de tels faits à cinq (05). Nous somme donc en
présence d’une loi pénale plus douce qui ne s’applique si la condamnation n’est pas encore
définitive. Malheureusement, le complice n’ayant pas interjeté appel dans les délais, il est
forclos et ne pourra plus bénéficier de cette nouvelle loi.
En conclusion, nous pouvons préciser conformément à ce qui précède que l’avocat se fonde
simplement sur le fait que son client est forclos parce qu’il n’a pas interjeté appel dans les
délais et par conséquent, il ne pourra plus bénéficier de cette nouvelle loi.

Cas n°3

Une personne s'est mariée avec deux femmes sous le régime polygamique. Séducteur
invétéré, il s'est entiché d’une ravissante fille avec qui il s'est fiancé le 2 mai 2004 et la date
du mariage fut fixée au courant du mois de mars 2005. Mais le 1er janvier 2005, intervient une
loi nouvelle qui interdit la polygamie. Devant le refus de l'officier d'état-civil de célébrer son
mariage avec la fille alors qu'il a déjà versé la dot, il s'affole lorsque ce dernier lui dit qu'il
devra même se séparer d'une de ses femmes.

Les faits soumis à notre réflexion concernent l’application de la loi dans le temps en matière
extra contractuelle.

Les problèmes de droit qui se posent sont de savoir : une loi nouvelle interdisant la polygamie
peut elle empêcher la célébration du mariage d’un époux déjà polygame ? Ensuite, une loi
nouvelle interdisant la polygamie peut elle entrainer le divorce d’un mariage polygame
intervenu avant son entrée en vigueur ?

Première question : une loi nouvelle interdisant la polygamie peut elle empêcher la
célébration du mariage d’un époux déjà polygame ?

Aux termes de l’article 831 alinéa 1er du code de la famille : « La loi nouvelle a effet
immédiat au jour de sa mise en vigueur. Elle régit les actes et faits juridiques postérieurs
et les conséquences que la loi tire des actes ou faits qui ont précédé sa mise en
application. » En d’autres termes, la loi nouvelle s’applique immédiatement à toutes les
situations extra contractuelles en cours à partir de son entrée en vigueur.
Dans notre cas d’espèce, au moment du mariage, la loi nouvelle autorisait le mariage
polygame, mais avant de prendre une troisième épouse, une loi nouvelle entre en vigueur et

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

interdit désormais la polygamie. Par voie de conséquence, à partir de son entrée en vigueur
aucun mariage polygamique ne peut être valablement célébré.

En conclusion, le choix exprimé par cet homme lors de son premier mariage est devenu caduc
des lors qu’il n’a pas les trois épouses au moment de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi.
Pour cette raison, l’officier d’état civil à raison de refuser de célébrer le mariage.

Deuxième question : une loi nouvelle interdisant la polygamie peut elle entrainer le divorce
d’un mariage polygame intervenu avant son entrée en vigueur ?

« Demeurent soumis aux règles en vigueur lorsqu’ils ont été passés ou sont intervenus,
les actes ou faits ayant fait acquérir un droit ou créer une situation légale régulière. » En
d’autres termes, les acquisitions faites sous l’empire d’une loi restent régies par cette loi. Les
droits acquis antérieurement ne sont donc pas remis en cause par la loi nouvelle.
En l’espèce, le Monsieur avait déjà les deux épouses avant l’entrée en vigueur de la nouvelle
loi, par conséquent même si la loi nouvelle s’applique immédiatement, elle ne remet
nullement en causes le mariage avec les deux précédentes épouses qui est déjà acquis sous
l’empire de la loi ancienne.
En conclusion, on peut convenir qu’il n’a pas divorcé avec l’une de ses épouses car son
mariage avec ses deux épouses reste soumis à la loi ancienne.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

THEME : Application de la loi


Sous-thème : conflits de lois dans le temps
Exercice: faire les cas pratiques
Cas n° 1
Mamadou et Aïda se sont mariés en juin 2009, puis ont divorcé en mars 2011 pour cause
d’incompatibilité d’humeur à la demande de l’époux. Une pension alimentaire de 50 000 F
CFA par mois fut alors fixée à la charge de ce dernier.
Pour des raisons diverses, une loi nouvelle entre en vigueur en juillet 2011 et prévoit que le
divorce n’est autorisé qu'après sept ans de mariage. Elle exige en outre que la pension
alimentaire soit plafonnée à 25000 FCFA par mois.
Le divorce est-il valable ?
Mamadou pourra- t-il profiter du plafonnement à 25000 F CFA et obtenir
remboursement des 25000 F CFA des mois précédents?

Cas n° 2
Ababacar, un commerçant très connu dans le marché du riz, a contracté un prêt auprès de sa
banque en octobre 2010 pour financer son commerce. La banque lui avait consenti ce prêt à
un taux d’intérêt de 11% pour une durée de trois ans. Ababacar espère voir sa dette allégée
avec cette information qui lui est parvenue d’un de ses neveux, étudiant en droit, selon
laquelle, une loi est entrée en vigueur en avril 2011 et qu’elle propose aux banques de fixer
les taux d’intérêt des prêts à moins de 10 %. Ababacar a-t-il raison d’espérer bénéficier des
taux proposés par la loi nouvelle?

Cas n°3
Jean, homme d’affaires, marié et père de deux enfants, a convolé en secondes noces ; il a,
depuis qu’il s’est remarié il y a dix mois, quitté la résidence conjugale et cessé d’assurer les
charges de son premier ménage. Il est, de ce fait, après jugement, condamné pour abandon de
famille le 2 mars 2009 à 3 mois de prison et à une amende de 200 000 F CFA. Une loi
nouvelle, entre en vigueur le 10 mars 2009 pour limiter la sanction de l’abandon de famille à
une amende de 200 000F CFA. L’avocat de Jean, confiant, lui apprend qu’il va bientôt être
libéré. Sur quel argument se fonde t-il ?

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Proposition de correction des cas

Cas n°1

Un couple s’est marié en juin 2009, puis ont divorcé en mars 2011 pour incompatibilité
d’humeur à la demande du mari. Il fut alors condamné à verser une pension alimentaire de
50 000 par mois à sa femme. En juillet 2011, le législateur une nouvelle loi qui reporte
qu’après 7 ans de mariage et plafonne en même temps la pension alimentaire à 25 000f.

Les faits soumis à notre réflexion concernent l’application de la loi dans le temps en
matière extra contractuelle.

La question qui se pose est alors de savoir : une loi n’autorisant le divorce qu’après 7
ans de mariage, peut-elle remettre en cause un divorce antérieur à son entrée en vigueur. ?
Ensuite une nouvelle loi qui plafonne la pension alimentaire à 25 000f, peut elle remettre en
cause une pension fixée en 50 000 par une loi ancienne ? Enfin, une loi qui diminue la
pension alimentaire peut elle entrainer remboursement des mois précédents ?

En ce qui concerne la première question ; il faut préciser qu’aux termes l’article 831,
alinéa 2 : « Demeurent soumis aux règles en vigueur lorsqu’ils ont été passés ou sont
intervenus, les actes ou faits ayant fait acquérir un droit ou créer une situation légale
régulière. » En d’autres termes, la loi nouvelle ne remet pas en cause des situations
intervenues sous l’empire d’une loi ancienne.
Dans notre cas d’espèce, la loi de mars 2011 autorisait le divorce sans aucune condition.
Par conséquent, une loi nouvelle ne peut venir pour remettre en cause un divorce régulier
intervenu sous l’empire de cette loi ancienne.
En conclusion, nous pouvons soutenir que le divorce de Mamadou et Aida intervenu sous
l’empire de la loi de mars 2011 reste toujours valable.
Concernant maintenant la question de savoir si une nouvelle loi qui plafonne la pension
alimentaire à 25 000f CFA, peut remettre en cause une pension fixée en 50 000f CFA par une
loi ancienne. Il faut soutenir que l’article 831 alinéa 1er du code de la famille : « La loi
nouvelle a effet immédiat au jour de sa mise en vigueur. Elle régit les actes et faits
juridiques postérieurs et les conséquences que la loi tire des actes ou faits qui ont
précédé sa mise en application. » En d’autres termes, la loi nouvelle s’applique
immédiatement à toutes les situations extra contractuelles en cours à partir de son entrée en
vigueur.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

En l’espèce, au moment du divorce, la loi qui était en vigueur prévoyait pension


alimentaire de 50 000f CFA par mois mais après quelques versements, une loi nouvelle entre
en vigueur et diminue la pension alimentaire à 25 000f CFA. Nous somme donc en présence
d’une situation extra contractuelle qui entraine l’application immédiate de la loi nouvelle.
En conclusion, nous pouvons soutenir conformément à ce qui précède qu’à partir de l’entrée
en vigueur de la nouvelle loi Mamadou pourra profiter du plafonnement à 25 000f CFA.
Concernant enfin la question de savoir si une loi qui diminue la pension alimentaire peut
entrainer remboursement des mois précédents, il faut préciser que « Demeurent soumis aux
règles en vigueur lorsqu’ils ont été passés ou sont intervenus, les actes ou faits ayant fait
acquérir un droit ou créer une situation légale régulière. » En d’autres termes, les
acquisitions faites sous l’empire d’une loi restent régies par cette loi. Les droits acquis ne sont
donc pas remis en cause par la loi nouvelle.
Dans notre cas d’espèce, Aida avait acquis le droit de percevoir une pension alimentaire
de 50 000f CFA par mois conformément à la loi de mars 2011 mais après quelques
versements, une loi nouvelle entre en vigueur et diminue la pension alimentaire à 25 000f
CFA. Nous sommes donc en présence des droits acquis sous l’empire d’une loi ancienne qui
restent soumis à cette loi.
Pour terminer, nous pouvons préciser que Mamadou ne pourra pas obtenir
remboursement des 25 000f CFA des mois précédents acquis régulièrement par Aida sous
l’empire de la loi ancienne.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Cas n°2

Un Monsieur a contracté un prêt auprès de sa banque en octobre 2010. Le prêt a été


consenti avec un taux de 11% pour une durée de trois ans. En avril 2011, le législateur met en
vigueur une loi qui propose aux banques de fixer le taux d’intérêt à moins de 10%.

Les faits soumis à notre analyse concernent l’application de la loi dans le temps en matière
contractuelle.

La question qui se pose est alors de savoir : une loi qui propose un taux d’intérêt des
prêts à moins de 10% peut elle s’appliquer à un prêt consenti antérieurement à son entrée en
vigueur ?

En matière contractuelle, c’est le principe de la survie de la loi ancienne qui s’applique au


contrat. Ce principe se justifie par le fait que le contrat est un accord de volonté entre les deux
parties qui se sont conformées à la loi qui était en vigueur au moment de la conclusion du
contrat. Une loi nouvelle ne peut donc remettre en cause les prévisions contractuelles des
parties.
Ce principe comporte cependant des exceptions qui sont les lois d’ordre public qui expriment
un intérêt social tellement impérieux qu’elles doivent être appliquées immédiatement,
même aux contrats en cours.
Dans notre cas d’espèce, l’entreprise Babacar avait conclus un contrat de prêt avec la
banque avec un taux de 11%. Mais avant la fin du contrat, une loi nouvelle entre en vigueur et
propose aux banques de fixer le taux d’intérêt à moins de 10%. Il ne s’agit donc pas d’une loi
d’ordre public car cette n’est qu’une simple proposition et ne s’applique donc pas au contrat.
En conclusion nous pouvons soutenir que Babacar n’a pas raison d’espérer car la
nouvelle loi n’est pas une loi d’ordre public et ne s’impose donc pas à la banque.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Cas n°3

Un homme marié a convolé en secondes noces. Il a depuis qu’il s’est marié il y’a dix mois
quitté la résidence familiale et à arrêter d’assurer les charges du premier ménage. Condamné
le 2 mars 2009 en première instance à 3 mois de prison et une amende de 200 000f CFA. Une
nouvelle entre en vigueur le 10 mars et limite la sanction de l’abandon de famille à une
amende de 200 000f CFA seulement.

Les faits soumis à notre réflexion concernent l’application de la loi dans le temps en
matière pénale.

La question de droit qui se pose est alors de savoir : une loi qui limite la sanction de
l’abandon de famille à une simple amende peut elle s’appliquer à une personne condamnée en
première instance à une peine pour abandon de famille ?

Selon l’article 2 du code civil : « la loi ne dispose que pour l’avenir, elle n’a point d’effet
retro actif » en d’autres termes, la loi concerne le futur, elle ne revient pas en arrière pour
résoudre des situations qui étaient sous l’empire d’une loi ancienne. Si tel est le principe elle
comporte cependant des exceptions qui sont notamment les lois déclarées expressément
rétroactive par le législateur, les lois interprétatives et les lois pénales plus douce qui
suppriment une condamnation ou diminuent le taux d’une peine lorsque la condamnation
n’est pas encore définitive.

Dans notre cas d’espèce, Jean fut condamné en première à une peine de 3 mois de
prison et une amende de 200 000f CFA conformément à la loi qui était en vigueur. Mais avant
l’appel, Une nouvelle entre en vigueur le 10 mars et limite la sanction de l’abandon de famille
à une amende de 200 000f CFA seulement. Nous somme donc en présence d’une loi pénale
plus douce qui intervient avant l’épuisement des voies de recours.

En conclusion nous pouvons dire que : puisque les voies de recours ne sont pas encore
épuisées, Jean sera libre parce qu’en appel il sera jugé conformément à la nouvelle loi qui
prévoit une amende de 200 000f CFA seulement.

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SANS CORRECTION
Sous-thème : conflits de lois dans le temps
Exercice: faire les cas pratiques
Cas n° 1
Le 15 Octobre 2003, Birane et Ousmane ont conclu par acte sous seing privé un contrat de
bail à usage d’habitation d’une durée de 5 ans. Le montant du loyer mensuel est fixé par les
deux parties à 290 000 frs/ mois
Le 15 juin 2005, le législateur qui a voulu mettre fin aux prix prohibitif des bailleurs, a fixé un
plafond à 150 000 frs/ mois pour un bail de cette nature. Dans la même loi figure une nouvelle
disposition selon laquelle « tout bail à usage d’habitation dont le montant dépasse 100 000frs
/mois doit faire l’objet d’un acte notarié à peine de nullité ».
1°/ A quel montant le locataire Ousmane doit il payer les loyers qui restent à courir après
l’entrée en vigueur de la nouvelle loi ?
2°/ Le bail liant Birane à Ousmane est il valable après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi ?

Cas n°2
La semaine dernière Demba a brulé un feu rouge et le policier qui l’a interpellé et a dressé un
constat l’a prévenu qu’il serait convoqué au tribunal et qu’une telle infraction était passible
dune amende et d’un retrait de permis de conduire. Mai il a entendu dire que le gouvernement
envisageait de supprimer la sanction lorsqu’il n’y avait pas de récidive et qu’il s’agissait donc
de la première infraction de ce genre.

1°/ Il vous demande si il pourrait bénéficier de cette reforme si celle-ci était votée avant qu’il
ne soit jugée.

2°/ que se passerait-il si cette reforme était votée après sa condamnation définitive ?

Cas n° 3
Adji Awa a commis un avortement clandestin en juin 2011. Au moment de l’avortement la
loi qui était en vigueur prévoyait une peine de 10 ans pour l’auteur et 3 ans pour les
complices. Mais avant son jugement, une loi entre en vigueur et prévoit désormais une peine
de 5ans pour l’auteur et 30 ans pour les complices.
Cette loi est elle applicable en l’espèce ?

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Sous-thème : conflits de lois dans le temps


Exercice: faire les cas pratiques

Cas n° 1
ALIMA, une jeune villageoise qui a quitté le collège après son échec au BFEM vient en ville
pour travailler comme domestique. Pendant deux années, elle est payée 25. 000 F CFA (vingt
cinq mille francs CFA) le mois. Un jour, à la radio, elle apprend qu’une loi nouvelle est en
vigueur depuis des mois et qu’elle prévoit un salaire minimum de 35. 000 F CFA (trente cinq
mille francs CFA) pour tout travailleur. Au retour de son employeur, ALIMA le lui fait savoir
et lui demande une augmentation de 10. 000 F CFA (dix mille francs CFA). Mieux, elle lui
demande de lui rembourser le surplus de 10. 000 F CFA (dix mille francs CFA) par mois pour
les deux années déjà écoulées. Qu’en pensez-vous ?

Cas n° 2
Modou est un farouche opposant politique ; il ne se lasse jamais d’afficher dans des endroits
publics des tracts contenant des messages hostiles au pouvoir en place.
Un jour, il est surpris et appréhendé par un agent de police pour affichage illégal.
Après jugement, il est condamné à 1 mois de prison. La semaine suivant sa condamnation,
entre en vigueur une loi qui dépénalise l’affichage illégal.
Son avocat, confiant, lui apprend qu’il va bientôt être libéré. Sur quels arguments se fonde ce
dernier ?

Cas n° 3
Mor Thiam est inquiet. Lors d’une discussion à la place du village, un étudiant en sciences
juridiques venu en vacances, lui a appris qu’il avait été voté une loi interdisant la polygamie
au-delà de 2 épouses sous peine d’emprisonnement. Mor Thiam, qui, déjà, avait 3 épouses, a
deux craintes majeures : Il envisageait de convoler en quatrième noce le mois suivant ; son
projet a-t-il des chances d’aboutir ?
D’un autre côté, le jeune étudiant en droit lui a fait savoir qu’il devait divorcer d’avec l’une de
ses trois épouses sous peine de violer la loi ? Ce dernier a-t-il raison ?

Cas n° 4

En 1993, M. Malade est victime d’un grave accident de la circulation qui lui a provoqué une
commotion cérébrale. Ce qui nécessite une greffe de la moelle épinière. C’est ainsi que son
médecin conseil à sa famille d’acquérir ledit organe auprès de M. Bonnemort qui était atteint
d’un cancer irréversible. Ce dernier qui avait besoin d’argent pour subvenir aux besoins de sa
famille vient vous demander si la conclusion d’un tel contrat est juridiquement possible ?

53
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Sous-thème : conflits de lois dans le temps


Exercice: faire les cas pratiques

Cas n°1

Monsieur Fall a signé un contrat de prêt avec sa banque le 2 juin 2004. Le jour de la
conclusion du contrat, la loi prévoyait que « le remboursement du prêt est soumis à un taux de
6 % maximum ».
Mais, le 7 avril 2011, une loi nouvelle est venue diminuer à peine de nullité absolue le taux
d’intérêt en le fixant à 3 %.
Monsieur Fall a écrit à la banque pour lui faire savoir que désormais elle comptait appliquer
ce nouveau taux de 3%.
La banque est inquiète et vient vous consulter pour savoir si elle peut imposer à Monsieur Fall
de respecter le taux de 6 %. Qu’allez-vous lui répondre ?

Cas n°2

Une loi du 16 janvier 2011 a porté la durée des congés payés à 6 semaines au lieu de
5 jusque-là. Elle a également fixé le préavis légal auquel le salarié a droit en cas de
licenciement à 3 mois au lieu de 2 précédemment.
Mademoiselle Diop est salariée de la société Baba depuis 3 ans. Elle a été licenciée avec
dispense de préavis le 6 juillet 2011. Son employeur lui a versé une indemnité compensatrice
de congés payés calculée sur la base de 5 semaines et une indemnité de préavis égale à 2
mois seulement. Mademoiselle Diop souhaite obtenir le paiement de ses indemnités sur la
base de la loi nouvelle. Elle vous consulte pour savoir quelles sont ses chances de succès
devant le tribunal. Que lui direz-vous ?

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

REVISION DROIT CIVIL 2011-2012 (FSJP)

Application de la loi dans le temps

Cas n° 1
Le 10 Décembre 2011, le Sieur Beuri Fitna prête à un de ses clients Niémé Bor, la somme
de sept cents mille (700 000) francs payable en douze (12) mensualités, avec un taux d’intérêt
de 13%. Le 20 janvier 2012, une loi votée par l’Assemblée Nationale dispose : « qu’en
matière de prêt d’argent, le taux d’intérêt ne peut dépasser 8%, à peine de nullité absolue du
contrat ». La même loi ajoute que « pour tout prêt dont le montant dépasse cinq cents mille
(500 000) francs, un acte authentique doit être dressé. Le Sieur Beuri fitna vient vous voir
pour savoir si le contrat qui le lie à Niémé Bor et qui a fait l’objet d’un acte sous seing privé
est valable. Et à quel taux de remboursement doit-il être fait après l’entrée en vigueur de la
nouvelle loi ?

Cas n° 2
Abdou est employé dans un grand restaurant qui s’appelle Mossalma. Cela fait plus de 10
ans qu’il travail. Il s’est marié il ya deux ans avec une très belle fille et va bientôt découvrir
les joies de la paternité. Un de ses meilleurs amis Ousmane lui fait part d’une nouvelle loi
entrée en vigueur et qui consacre désormais un congé parental à la naissance de son
enfant. Or son employeur ne veut rien savoir prétextant que son contrat de travail a été signé
voila plus de 10 ans, bien avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi instituant ce congé.
Qu’en pensez-vous ? Motivez votre réponse.

Cas n° 3
Ndèye Boury s’est mariée avec Touki, un modou modou qui est parti en France depuis plus
de dix ans. Entre temps, Ndèye Boury est tombée en ceinte d’un autre homme. Ne voulant
pas que son mari découvre sa grossesse, elle décide de recourir à l’avortement clandestin. Au
moment de l’avortement la loi qui était en vigueur prévoyait une peine maximale de 10 ans.
Alors qu’elle est en détention provisoire, une loi nouvelle qui décriminalise l’avortement est
adoptée par le législateur sénégalais.

Quel sera le sort de Ndèye Boury ?

Cas n° 4
Massata a loué un appartement à usage d’habitation chez Keur Gui pour une durée de quatre
(4) ans renouvelables avec un loyer mensuel d’un montant de 60 000francs. Au bout de huit
(8) mois d’occupation, une loi nouvelle intervient pour fixer désormais les taux des loyers à
40 000 francs pour lutter contre le taux prohibitif appliqué par les bailleurs.
Massata interpelle son bailleur Keur Gui pour pouvoir profiter de cette baisse. Le bailleur
refuse de se conformer à la nouvelle loi en soutenant que cette loi n’est pas applicable à leur
contrat.
Tranchez ce différend.

55
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

La distinction entre meubles et immeubles

La distinction entre meubles et immeubles reposait en droit romain sur un critère matériel, la
possibilité de déplacer ou pas une chose. Sous l’Ancien droit, il est apparu nécessaire de
distinguer les choses selon leur valeur, c’est-à-dire de distinguer différentes valeurs de
propriété des choses. Or cette nouvelle distinction correspondait à la césure meuble-
immeuble. La propriété des meubles n’avait que peu de valeur au regard des propriétés
terriennes : res mobilis, res vilis.
Aussi la distinction meubles-immeubles a-t-elle désormais reposé sur un double critère
physique et économique. La prise en compte de ce dernier critère explique que la distinction
meuble-immeuble ait été appliquée non seulement aux choses corporelles mais aussi aux
choses incorporelles et même aux droits sur les choses, c’est-à-dire aux biens. En fonction de
leur valeur, les choses incorporelles ont été rattachées à l’une ou l’autre des catégories : ainsi
les offices considérés comme des immeubles sous l’Ancien Régime ont été par la suite
qualifiés de meubles.
La distinction, reprise par le Code civil et toujours importante dans notre droit, présente de
multiples intérêts.

Certains tiennent à la nature physique de la chose.


Exemple : Les aliénations immobilières sont soumises à publicité, pas les aliénations
mobilières.
De même, si la juridiction compétente est en principe celle du lieu où demeure le défendeur
(art. 42 NCPC), « en matière réelle immobilière, la juridiction du lieu où est situé l’immeuble
est seule compétente » (art. 44 NCPC). La fixité des immeubles par rapport aux meubles
explique que le débiteur qui consent une hypothèque sur un immeuble en conserve la
possession alors que le débiteur qui consent un gage sur un meuble en est souvent dépossédé
au profit du créancier
L’intérêt le plus important concerne les effets attachés à la possession. Par exemple, en cas de
possession de bonne foi, le possesseur d’un meuble en acquiert immédiatement la propriété
(art. 2279 C. civ. Et 262 COCC), alors qu’il faut un délai de dix ou vingt ans en matière
immobilière (art. 2265 C. civ.).
D’autres intérêts attachés à cette distinction reposent sur une prétendue différence de valeur
entre la propriété des meubles et des immeubles, qui s’est estompée depuis le Code civil. Ils
apparaissent parfois anachroniques.
On peut citer en exemple les règles relatives à la lésion. La vente d’immeuble est rescindable
pour cause de lésion de plus des sept-douzièmes subie par le vendeur (art. 1674 C. civ.), alors
que la vente de meuble ne l’est pas en principe.
De même, sur le plan fiscal, en principe, le transfert de propriété des immeubles est taxé, pas
celui des meubles.

1. Les meubles

On peut distinguer plusieurs catégories de meubles :


• les meubles par nature,
• les meubles par anticipation
• et les meubles par détermination de la loi.

56
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

• Meubles par nature

« Sont meubles par leur nature, les animaux et les corps qui peuvent se transporter d’un
lieu à l’autre, soit qu’ils se meuvent par eux-mêmes, comme les animaux, soit qu’ils ne
puissent changer de place que par l’effet d’une force étrangère, comme les choses
inanimées » (art. 528 C. civ.).
Exemple : On peut citer à titre d’exemples : voitures, meubles meublants, navires, livres,
billets de banque…

• Meubles par anticipation

Les meubles par anticipation sont des immeubles par nature considérés comme des meubles
parce qu’ils sont appelés à le devenir bientôt. La raison d’être de la catégorie des meubles par
anticipation est surtout fiscale, les mutations immobilières étant lourdement taxées.

Exemple : Tel est par exemple le cas d’une récolte sur pied, normalement immeuble par
nature puisqu’elle est rattachée au sol, mais qui est meuble par anticipation car elle a vocation
à être coupée et donc à devenir meuble.

• Meubles par détermination de la loi

Cette catégorie regroupe d’abord les choses incorporelles : clientèle commerciale, œuvre
artistique, office ministériel ou action de société (art. 529 C. civ.). D’une manière beaucoup
plus discutable, le législateur a parfois confondu les droits et les choses sur lesquels portent
ces droits.
Les droits réels ou personnels portant sur un meuble, les actions en justice relatives à un
meuble sont ainsi considérés par la loi comme des meubles.

2. Les immeubles
La catégorie des immeubles se subdivise en immeubles par nature, immeubles par destination
et immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent.

• Immeubles par nature


Les immeubles par nature sont les choses qui ne peuvent ni se déplacer, ni être déplacés.
• Il s’agit d’abord du « fonds de terre » (art. 518 C. civ.), c’est-à-dire du sol (surface et sous-
sol).
• Il s’agit également de ce qui est fixé au sol. Le Code civil évoque les « bâtiments » (art. 518
C. civ.) ou « les moulins à vent ou eau, fixés sur piliers et faisant partie du bâtiment » (art.
519 C. civ.), mais plus largement, toute construction fixée dans le sol et tout ce qui s’intègre
dans cette construction sont des immeubles : bâtiment, serre, poteau électrique… mais il faut
impérativement un ancrage dans le sol.
• Il s’agit enfin des végétaux : « les récoltes pendantes par les racines, et les fruits des arbres
non encore recueillis, sont pareillement immeubles » (art. 520, al. 1er, C. civ.). Il n’en va
autrement que pour les végétaux détachés du sol : les fruits détachés ne sont par exemple plus
des immeubles.

57
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

• Immeubles par destination

Les immeubles par destination sont des choses qui seraient normalement meubles par nature
mais qui sont considérées comme immeubles parce que leur propriétaire les a rattachées
matériellement ou économiquement à un immeuble qui lui appartient.
L’intérêt de cette catégorie intervient principalement en cas de vente : lorsque la vente d’un
immeuble par nature intervient sans autre précision, la vente porte également sur les
immeubles par destination

Trois conditions sont donc exigées pour la qualification d’immeuble par destination :

Première condition, l’immeuble par destination et l’immeuble auquel il est rattaché doivent
appartenir au même propriétaire.

Deuxième condition, il faut également que le propriétaire accomplisse un acte d’affectation


de l’immeuble par destination à l’immeuble auquel il est rattaché, la volonté du propriétaire
jouant ainsi un rôle non négligeable dans la qualification d’immeuble par destination. Le
propriétaire peut ainsi faire cesser l’immobilisation en aliénant séparément les deux biens ou
en faisant cesser leur rattachement. A l’inverse, il ne peut être mis fin à l’immobilisation sans
sa volonté.

Enfin, troisième condition, il faut que cet acte d’affectation puisse découler d’un
rattachement économique ou matériel de l’immeuble par destination à l’immeuble par nature.
Sont économiquement rattachés à un fonds les animaux et les objets que « le propriétaire
d’un fonds y a placés pour le service et l’exploitation de ce fonds » (art. 524 C. civ.).
Jurisprudence :
La jurisprudence a renforcé cette condition, exigeant que le bien soit indispensable à
l’exploitation du fonds (par exemple la Cour de cassation a considéré qu’un stock de cognac
ne constitue pas un immeuble par destination car il n’est pas indispensable à l’exploitation du
domaine agricole dans lequel il est produit : Civ., 1, 1er déc. 1975).

L’article 524 du Code civil donne une liste d’exemples pris dans le domaine agricole, qui ne
manque pas de poésie pour un lecteur d’aujourd’hui : animaux attachés à la culture, ustensiles
aratoires, semences données aux fermiers, pigeons des colombiers, lapins de garenne, ruches à
miel… Cette liste n’est pas limitative et peut être actualisée (tracteurs, machines…). Les
immeubles par destination peuvent aussi servir à une exploitation industrielle (cf. art. 524 C.
civ. : « les ustensiles nécessaires à l’exploitation des forges, papeteries et autres usines » ;
aujourd’hui camions ou matériel de production), voire commerciale ou civile (comptoir d’un
magasin ou fauteuil du dentiste…)..
Sont également immeubles par destination les meubles matériellement rattachés à un
immeuble, « les effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure
» (art. 524 C. civ.). L’article 525 du Code civil explicite cette dernière expression : « Le
propriétaire est censé avoir attaché à son fonds des effets mobiliers à perpétuelle demeure,
quand il y sont scellés en plâtre ou à chaux ou à ciment, ou lorsqu’ils ne peuvent être
détachés sans être fracturés et détériorés, ou sans briser ou détériorer la partie du fonds à
laquelle ils sont attachés », donnant plusieurs exemples.
Les glaces d’un appartement, les tableaux ou les autres ornements sont censés être mis à
perpétuelle demeure lorsque le parquet sur lequel ils sont attachés « fait corps avec la boiserie
».

58
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

« Quant aux statues, elles sont immeubles lorsqu’elles sont placées dans une niche pratiquée
exprès pour les recevoir, encore qu’elles puissent être enlevées sans fracture ou
détérioration. ».
Le rattachement matériel à un immeuble découle donc d’une adhérence matérielle qui ne
pourrait cesser sans détérioration de cet immeuble ou du bien qui y est rattaché.

Exemple : Par exemple, des boiseries simplement posées sur le sol qui peuvent être arrachées
sans dommage pour elles mêmes ou pour l’immeuble ne sont pas des immeubles par
destination.

• Immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent (art. 526 C. civ.)


Par une confusion entre le droit et la chose qui en est l’objet, similaire à celle rencontrée à
propos des meubles, le législateur a qualifié d’immeubles les droits portant sur un immeuble :
« l’usufruit des choses immobilières ; les servitudes ou services fonciers ; les actions qui
tendent à revendiquer un immeuble » (art. 526 C. civ.).
La doctrine affirme en général que cette liste est imprécise et incomplète. Devraient être
considérés comme immeubles au titre de l’article 526 du Code civil, les droits réels portant
sur un immeuble (exemples : servitude, hypothèque…), les droits personnels relatifs à un
immeuble (exemple : créance de transfert de la propriété d’un immeuble lorsque celui-ci a été
retardé) et toutes les actions réelles immobilières, c’est-à-dire toutes les actions qui
sanctionnent des droits réels immobiliers (exemple : actions possessoires).

B/. Les droits

1. Les droits réels et droits personnels


a. Les droits réels
Le droit réel est celui qui confère à son titulaire un pouvoir direct et immédiat sur la chose
(exemple : la propriété). Les droits réels se décomposent traditionnellement en droits réels
principaux et droits réels accessoires.
Si la question du caractère limitatif ou non des droits réels divise les auteurs, deux certitudes
s’imposent toutefois.
Le législateur peut créer de nouveaux droits réels, comme en témoignent deux exemples
postérieurs au Code civil : le bail à construction né de la loi du 16 décembre 1964 par lequel
le preneur s’engage à édifier des constructions sur le terrain dont il a la jouissance, l’article L.
251-3 du Code de la construction lui reconnaissant un droit réel, et le bail à réhabilitation né
de la loi du 31 mai 1990 par lequel une personne morale de droit public s’engage à réaliser
des travaux de réhabilitation sur l’immeuble qu’elle loue dans le but de le louer à son tour
pour assurer le logement de certaines personnes, l’article L. 252-2 du Code de la construction
reconnaissant à cette personne morale un droit réel.
De plus, la limite à la création de nouveaux droits réels est plus pratique que juridique car
l’imagination ne permet pas de décomposer à l’infini les pouvoirs sur une chose.
On distingue les droits réels principaux et les droits réels accessoires :

59
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

• Les droits réels principaux


Les droits réels principaux sont le droit de propriété et ses démembrements.
Le droit de propriété est le droit réel par excellence, puisqu’il confère à son titulaire le
pouvoir de disposer de la chose (abusus), de l’utiliser (usus) et d’en percevoir les fruits
(fructus).
Les prérogatives du droit de propriété peuvent être démembrées de différentes manières.
L’usufruit confère à l’usufruitier le droit d’utiliser la chose et d’en percevoir les fruits,
laissant au nu-propriétaire le droit d’en disposer. On peut rapprocher de l’usufruit le droit
d’usage (conférant à son titulaire le droit d’utiliser une chose et d’en percevoir les fruits dans
les limites de ses besoins et de ceux de sa famille) et le droit d’habitation (droit reconnu à
une personne d’utiliser une habitation dans les limites de ses besoins et de ceux de sa famille).
Un autre démembrement du droit de propriété est la servitude, charge imposée à un
immeuble bâti ou non bâti, que l’on appelle fonds servant, au profit d’un autre que l’on
appelle fonds dominant. Par exemple, lorsqu’un fonds est enclavé, c’est-à-dire n’a pas d’accès
suffisant à une voie publique, il dispose d’une servitude de passage sur un fonds voisin, à
charge d’indemniser le propriétaire (art. 682 C. civ.).
On rattache également aux démembrements du droit de propriété l’emphytéose, bail
immobilier d’une durée pouvant aller jusqu’à 99 ans ou le droit de superficie, droit de
propriété portant sur les édifices et les plantations du terrain d’autrui conféré au superficiaire,
le tréfoncier conservant la propriété du sol et du sous-sol.
• Les droits réels accessoires
Les deux plus importants droits réels accessoires sont l’hypothèque, qui porte en principe sur
un immeuble, et le gage, qui porte en principe sur un meuble.
Ces droits réels accessoires confèrent à leur titulaire un droit de préférence et un droit de
suite.
Le droit de préférence permet au créancier titulaire d’un droit réel accessoire d’être payé
avant les créanciers chirographaires. Le droit de suite lui permet de saisir le bien sur lequel
portait son droit réel en quelque main qu’il se trouve. Ainsi, un créancier hypothécaire peut se
faire payer en saisissant l’immeuble hypothéqué entre les mains d’un tiers acquéreur à qui son
débiteur l’aurait vendu.

b. Les droits personnels


Le droit personnel (ou obligation) est le lien de droit entre deux personnes, en vertu duquel
l’une d’entre elles, le créancier peut exiger de l’autre, le débiteur, l’exécution d’une prestation
de donner, de faire, ou de ne pas faire. Les droits personnels sont en nombre illimité.
Les droits personnels peuvent naître d’un acte juridique, manifestation de volonté destinée à
produire des effets de droit. La catégorie la plus importante des actes juridiques est le contrat,
accord de volonté destiné à produire des effets de droit. Ainsi, par un contrat de travail,
l’employeur est débiteur de l’obligation de payer le salaire dont le salarié est créancier ; le
salarié est débiteur de l’obligation d’accomplir un travail, dont l’employeur est créancier.
Les droits réels peuvent également naître d’un fait juridique, qui est un événement
indépendant de la volonté d’où découle des effets de droit : décès, accident…

60
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

3. Appréciation de la distinction
La distinction entre droit réel et droit personnel a fait l’objet de nombreuses critiques
doctrinales, la plus célèbre ayant été émise à la fin du XIXe siècle par Planiol.
Affirmer qu’un rapport d’ordre juridique puisse exister entre une personne et une chose serait
un non sens : tout droit ne peut être qu’un rapport entre personnes. Le droit réel établirait ainsi
un rapport entre son titulaire, sujet actif, et toutes les autres personnes considérées comme
sujets passifs.
Exemple : Par exemple, le propriétaire a le droit d’exiger que tout individu respecte sa
propriété. À l’instar du droit personnel, le droit réel engendrerait une obligation, mais très
spécifique. Il s’agirait d’une obligation passive (n’imposant qu’une abstention : ne pas
troubler la possession du sujet actif) et universelle (les sujets passifs seraient toutes les
personnes en relation avec le titulaire du droit réel).
Force est de constater que cette analyse personnaliste n’a pas connu d’applications pratiques
et a même été rejetée par la doctrine dominante. Les auteurs font en particulier valoir qu’elle
reposerait sur une confusion entre caractère obligatoire d’un droit et opposabilité de ce droit.
Un droit personnel crée une obligation, qui permet au créancier de demander à un débiteur
déterminé une prestation précise. Le droit personnel oblige ainsi le débiteur, mais il est
également opposable aux tiers, en ce sens qu’ils ne peuvent lui porter atteinte.

Exemple : Par exemple, un tiers qui pousserait une personne à lui vendre un bien au mépris
d’une promesse de vente engagerait sa responsabilité. Le droit réel ne crée pas de lien
obligatoire : l’obligation passive universelle est trop imprécise pour être une véritable
obligation. Mais le droit réel doit simplement, comme le droit personnel, être respecté par les
tiers : il leur est opposable.
D’autres critiques plus récentes ont débouché sur des propositions de nouvelles
classifications, mais n’ont pas eu plus de succès.
Remarque :
Mais la principale imperfection de la distinction entre droits réels et droits personnels tient à
son impossibilité de prendre en compte ce qu’on appelle les droits intellectuels, droits dont
l’objet est immatériel et procède généralement de l’activité de l’esprit. Les frontières de ces
droits sont imprécises, mais on peut citer le droit d’un auteur sur son œuvre, le droit d’un
inventeur sur son invention, le droit d’un commerçant ou d’un membre d’une profession
libérale sur sa clientèle…
Ces droits ne peuvent s’analyser comme des liens entre deux personnes et ne peuvent donc
être considérés comme des droits personnels : le droit d’un auteur sur son œuvre par exemple
ne s’exerce pas par rapport à un sujet passif mais s’impose à tous.
On pourrait songer à classer les droits intellectuels parmi les droits réels. L’absence de
débiteur, l’existence d’un objet distinct de la personne (œuvre, clientèle, invention) les en
rapproche. On les désigne d’ailleurs souvent sous le terme de propriété : propriété littéraire et
artistique, propriété industrielle…
Mais les particularités des droits intellectuels rendent difficile une telle assimilation :
• Tout d’abord, alors que la propriété est par essence perpétuelle, les droits intellectuels sont
limités dans le temps : par exemple, le droit d’un écrivain sur son œuvre est limité à 50 ans
après son décès.
• D’une manière plus fondamentale encore, pour reprendre l’exemple d’un auteur, le droit sur
son œuvre ne se confond pas avec le support dans lequel elle s’incorpore (livre, tableau,
sculpture…) : « La propriété incorporelle définie par l’article L. 111-1 est indépendante de la
propriété de l’objet matériel » (art. L. 111-3 du Code de la propriété intellectuelle). La notion
de droit réel ne permet pas de prendre en compte les prérogatives attachées au droit moral
d’un auteur sur son oeuvre (droit de repentir, droit de publication, droit au respect…). Les

61
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

droits intellectuels semblent donc former une catégorie de droits irréductibles à la dualité
droits réels-droits personnels

2. Les droits patrimoniaux et droits extrapatrimoniaux


1. Notion de patrimoine

Définition : Même si le terme de patrimoine a aussi un sens courant, même si la mode est à
invoquer dans des textes juridiques un patrimoine culturel (cf. Convention du Conseil de
l’Europe du 3 octobre 1985 pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l’Europe), un
patrimoine commun de la nation (pour le territoire sénégalais, même s’il existe désormais un
Code du patrimoine, le terme de patrimoine n’en garde pas moins une signification juridique
précise.
Le Code civil n’a évoqué le patrimoine qu’indirectement, et la théorie du patrimoine est
l’œuvre d’Aubry et Rau qui définissent le patrimoine comme « l’ensemble des biens d’une
personne, envisagé comme formant une universalité de droit » (Cours de droit civil français,
5ème éd., 1917, § 573). Le patrimoine est donc l’ensemble des biens et des obligations
formant une universalité dans laquelle actif et passif ne peuvent être dissociés. Cette théorie
repose sur deux idées essentielles : le patrimoine est une universalité ; le patrimoine est lié à la
personne.

Du patrimoine conçu comme une universalité, on peut déduire deux conséquences :


• Tout d’abord, l’unité du patrimoine entraîne corrélation entre l’actif et le passif. Ainsi
s’explique que l’ensemble des biens composant le patrimoine d’une personne constitue le
gage commun de ses créanciers. L’article 2284 du Code civil dispose en ce sens que : «
Quiconque s’est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses
biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir. ». 1Cette corrélation explique également
que les successeurs d’une personne recueillent l’ensemble de l’actif et du passif de cette
personne.
• D’autre part, le patrimoine forme un tout dont les éléments sont interchangeables grâce au
mécanisme de la subrogation réelle, mécanisme de remplacement d’un bien par un autre, le
bien nouveau ayant la même nature que le bien ancien.

Exemple : La créance du prix remplace l’immeuble vendu sans affecter l’existence du


patrimoine

Le lien étroit entre le patrimoine et la personne peut être schématisé en trois propositions :
• Première proposition, toute personne a un patrimoine. L’existence d’un patrimoine est
indépendante de la situation financière de son titulaire : même un individu criblé de dettes ou
ne possédant aucun bien a un patrimoine. Le patrimoine est ainsi conçu plus comme une
enveloppe, un contenant d’éventuels biens ou créances que comme un contenu concret.
• Deuxième proposition, toute personne n’a qu’un patrimoine L’ensemble de ses biens
forme une masse qui ne peut être divisée, en particulier pour restreindre le droit de poursuite
de ses créanciers.
• Troisième proposition, tout patrimoine est lié à une personne. Une personne ne peut donc
céder entre vifs son patrimoine, ce qui reviendrait à aliéner sa personnalité. On ne peut parler
de patrimoine de la famille, de l’indivision, ou du groupe de société qui sont dépourvus de la
personnalité morale.

1
Voir article 200 Cocc

62
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Critiques : Cette théorie produit des conséquences parfois critiquables.


L’exigence d’un lien entre patrimoine et personne limite la création de fondations, c’est-à-dire
l’affectation de certains biens à un but charitable ou culturel : il apparaît impossible de créer
une fondation par testament, faute d’une personne apte à recevoir les biens au moment du
décès. La jurisprudence a dû imaginer d’ingénieuses combinaisons avant que le législateur
n’intervienne par une loi du 23 juillet 1987, complétée le 4 juillet 1990 admettant la fondation
comme « acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident
l’affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d’une oeuvre d’intérêt
général » (art. 18, al. 1er).

L’indivisibilité du patrimoine débouche également sur des conséquences critiquables.


Ainsi, les biens et dettes d’un défunt se confondent avec le patrimoine de son héritier pour ne
former qu’un tout. Cette confusion peut être préjudiciable à l’héritier, si la succession se
révèle insolvable, préjudiciable aux créanciers du défunt si c’est l’héritier qui est insolvable.
Pour remédier à ces inconvénients sans méconnaître la règle de l’unité du patrimoine, le droit
français a dû recourir à des mécanismes complexes : acceptation à concurrence de l’actif net,
privilège de séparation des patrimoines.
L’indivisibilité du patrimoine présente aussi des inconvénients économiques : une personne
peut hésiter à se lancer dans l’exercice d’une activité en sachant que ses créanciers
professionnels pourront saisir ses biens personnels. Or, d’autres pays comme l’Allemagne,
admettent la théorie du patrimoine d’affectation qui évite cet inconvénient. Chaque personne
peut affecter une masse de biens à une activité déterminée : les créances liées à l’exercice de
cette activité ne seront payées que sur cette masse de biens.
Le droit français a voulu arriver à une solution voisine, tout en ménageant la conception
classique du patrimoine.
Ainsi, la loi du 11 juillet 1985 a créé l’EURL, entreprise unipersonnelle à responsabilité
limitée, la loi du 12 juillet 1999 ayant également autorisé la SASU, société par action
simplifiée unipersonnelle. Chaque individu pourra isoler son patrimoine personnel et son
patrimoine professionnel en créant une EURL, même s’il faut observer que la cloison entre les
deux patrimoines se révèle souvent illusoire, les créanciers professionnels réclamant
l’engagement personnel de leur débiteur en qualité de caution. La loi du 11 juillet 1985, si elle
a considérablement perturbé le droit des sociétés permet de sauvegarder la conception
traditionnelle du patrimoine, puisque l’EURL ainsi créée est dotée de la personnalité morale.
Une loi du 1er août 2003, par dérogation expresse à l’indivisibilité du patrimoine, a permis à
une personne physique exerçant une activité commerciale, artisanale, agricole ou libérale de
déclarer unilatéralement par acte notarié sa résidence principale insaisissable par ses
créanciers professionnels postérieurs à la déclaration (art. L 526-1 C. Com.).
Quelles que soient les critiques formulées, la théorie classique du patrimoine, malgré ses
imperfections, fait partie de notre droit positif.

63
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

2. Contenu de la distinction
Définitions : Les droits patrimoniaux ont une valeur pécuniaire qui permet de les inclure dans
le patrimoine d’un individu, et qui leur confère plusieurs caractéristiques.
Ils sont cessibles (entre vifs), transmissibles (à cause de mort), prescriptibles (ils disparaissent
après l’écoulement d’un certain délai), saisissables (par le créancier de leur titulaire). Un droit
réel sur un bien, un droit de créance contre une personne constituent par exemple des droits
patrimoniaux. À l’inverse, un droit extra-patrimonial n’a pas de valeur pécuniaire. Sont des
droits extra-patrimoniaux les droits de l’homme ou libertés publiques (droit de penser
librement, de s’exprimer librement, d’aller et venir…), les droits liés à la personne (droit au
respect de la vie privé et ses différentes facettes), les droits liés à la famille (prérogatives de
l’autorité parentale…). Les droits extra-patrimoniaux ont des caractéristiques inverses des
droits patrimoniaux : ils sont incessibles, intransmissibles, imprescriptibles, insaisissables.
Appréciation : Cette distinction entre droits patrimoniaux et droits extra-patrimoniaux n’est
pas toujours aussi rigide. On peut d’abord observer que droits patrimoniaux et extra-
patrimoniaux peuvent parfois coexister dans un même cadre : par exemple le droit d’un auteur
sur son œuvre comprend à la fois des aspects patrimoniaux (droit de céder l’édition de son
œuvre) et extra-patrimoniaux (droit moral de faire respecter son œuvre, de ne pas la
divulguer, voire de la détruire).
D’autres constatations relativisent d'avantage la distinction :
• La patrimonialité d’un bien est susceptible de degrés, comme en témoignent plusieurs
exemples. Le cas le plus éloquent est peut-être celui des clientèles civiles. En raison des liens
personnels entre le professionnel et ses clients, la jurisprudence s’est refusée à admettre leur
cession 24 jusqu’il y a peu. On peut également évoquer la force de travail, à mi-chemin entre
la sphère patrimoniale et la sphère extra-patrimoniale.
• D’autre part, les droits extra-patrimoniaux ne sont pas toujours dépourvus de conséquences
pécuniaires : par exemple, l’établissement d’un lien de filiation pour un enfant produit des
conséquences patrimoniales.
• Enfin, on ne peut que constater une certaine patrimonialisation de la personne : la violation
d’un droit extra-patrimonial a souvent une compensation pécuniaire, à travers la
responsabilité civile. Par exemple, qu’il soit porté atteinte au droit à l’honneur d’une personne
dans la presse, et elle obtiendra des dommages-intérêts compensant ce préjudice. De plus, la
personne ou certains de ses éléments devient fréquemment l’objet de conventions : contrats
relatifs à l’exploitation de l’image d’une personne, dons d’organes en sont autant d’exemples.

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Thème : Les droits subjectifs


Sous-thème : La classification des biens
Exercice : Faire les cas pratiques

Cas 1
Amadou et Amina, deux jeunes stars de la chanson sénégalaise ont enfin pu réaliser leur rêve:
s'installer à Sangalkam pour y vivre éloignés de toutes les peines de la capitale. Ils ont acheté
un terrain, bordé de manguiers à la sortie du village. L'immobilier étant hors de prix, ils ont dû
contracter un prêt auprès d’une banque pour accéder à leur bonheur, leurs droits d'auteurs ne
suffisant pas pour régler le tout.
Le terrain est alors bien aménagé avec une partie habitation, un jardin muni de gazon et une
surface cultivable.
Goûtant à cette nouvelle vie, Amadou et Amina ont décidé d'arrêter la chanson et de se lancer
dans la culture de haricot. Ils achètent à cet effet tout le matériel nécessaire. Ils exercent cette
activité sur la surface cultivable. Ils ont fait construire un entrepôt à cet effet.
Malheureusement cette entreprise est un échec et leur haricot ne se vend pas. Il leur reste en
stock dans l’entrepôt plus de trois mille kilos. Pour subvenir à leurs besoins, ils ont vendu les
mangues qui seront cueillies par l’acheteur lorsqu’elles seront plus mûres. Comme si cela ne
suffisait pas, la banque leur réclame le remboursement du prêt. Elle leur rappelle qu'elle
dispose d'une hypothèque sur leurs biens immobiliers et que le cas échéant elle pourra en faire
usage.

Amadou et Amina viennent vous consulter afin de connaître les droits de la banque sur
leurs biens.
Cas 2
Modou est récemment décédé. Il a légué ses biens immobiliers à sa fille cadette Fama qui
toujours été à ses côtés et ses biens mobiliers à son fils Abdou qui vit à la capitale avec sa
petite famille. Etabli à Sébikhotane, Modou avait pour activité professionnelle l’élevage de
bovins. Il était ainsi propriétaire de plusieurs hectares de terre, cultivés en foin.
Il avait également une ferme avec la partie habitation proprement dite, ainsi qu’une étable et
un hangar.
Modou occupait son temps libre en faisant du jardinage et de l’horticulture. A cette fin, il
avait installé, à quelques mètres de la maison, une serre aisément démontable.
L’étable est un bâtiment construit à la même époque que la ferme, dans les mêmes matériaux
et avec la même assise. Elle abrite plusieurs bovins, que le chien de la maison aime embêter.
En revanche, le hangar est de construction plus récente. C’est un bâtiment précaire qui abrite
un tracteur loué et une petite voiture achetée au début de l’année pour que Fama puisse
conduire Modou à l’hôpital. Le foin récolté, destiné à l’alimentation des bovins, y est
également entreposé.
Abdou vient vous consulter et vous demande de quels biens il héritera.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Cas 3
Le 03 juillet 2011, Adama Fall, homme d’affaire très endetté, vend, à contrecoeur, au sieur
Sidi Dieng une maison, sise à Ngaparou, qu’il a héritée de son père et qui servait d’habitation
à ses ascendants depuis plusieurs générations. Auparavant M. Dieng avait procédé à une visite
des locaux, accompagné d’un notaire et d’un expert.
Avant la remise des clefs, prévue dans le contrat pour le 01 Janvier 2012 auprès du notaire,
Adama Fall entreprend de déménager et emmène avec lui certains objets de souvenir. C’est
ainsi qu’il retire la poterie ornementale placée dans un renfoncement du vestibule. Cette
poterie avait été achetée par l’arrière grand père de M. Fall. Par ailleurs, M. Fall a enlevé la
tapisserie encastrée dans un mur du salon lors de la construction de la maison, et a pris les
tableaux d’art qui étaient accrochés sur les murs de l’espace familial.
Or, pour M. Dieng, ces objets font partie intégrante de la vente. D’ailleurs, leur existence a
déterminé son acceptation du prix de vente.
Qui est le propriétaire de chacun de ces biens, à l’issue de la vente?

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CAS PRATIQUES
Cas n° 1

Viticulteur à Bignona, M. Gomis est propriétaire d’une maison entourée de vignes. Dans la
cave, on trouve des cuves et un pressoir posés à même le sol. La salle à manger est garnie
d’un mobilier de grande valeur.
La sœur de M. Gomis possède quelques veaux. Elle les élève dans un enclos situé dans la
propriété du viticulteur. M. Paye a prêté une importante somme d’argent à M. Gomis qui lui a
consenti une hypothèque sur ses biens. A l’échéance, M. Gomis ne peut pas payer sa dette.
M. Paye vient aujourd’hui vous demander conseil.

Cas n° 2

Au cours d’un repas donné par son amie TERALE GANE, Alma a prêté la somme de
300 000frcs à son fils Thiakhane qui se disait dans le besoin. En voyant le geste d’Alma,
TERALE GANE s’est dite émue de la complicité et de la confiance existant entre le père et
le fils. Alma est excédé. Il vient d’apprendre que pour asseoir son image de diaye tar,
Thiakhane s’est acheté une voiture de sport avec la somme prêtée. Avec une particulière
mauvaise foi, Thiakhane prétend aujourd'hui que son père ne lui a jamais prêté d’argent.
Alma est d’autant plus préoccupé qu’il n’avait exigé de son fils aucune reconnaissance écrite
de dette : ayant toujours entretenu de très bons rapports avec Thiakhane, jamais Alma
n’aurait imaginé qu’il puisse se montrer si malhonnête. Or cette somme lui serait aujourd’hui
nécessaire pour honorer ses propres dettes. Sa banque lui réclame plusieurs échéances du prêt
qu’elle lui avait accordé pour financer la construction de sa maison bâtie sur 7 hectares de
terrain. Dans l’entrée se trouve une statue à l’effigie d’Alma, réalisée par un célèbre sculpteur
Italien. Celle-ci est fixée au sol par du ciment. Au fond de la propriété est posé à même le sol
un abri de jardin en bois. Afin de garantir le paiement de sa dette, Alma avait consenti à sa
banque une hypothèque sur ses biens immobiliers. La banque menace Alma de saisir les biens
composant l’assiette de l’hypothèque. Celui-ci souhaite savoir s’il peut contraindre son fils
Thiakhane à lui rembourser la somme qu’il lui a prêtée. Il vous demande également quelle
est la nature de chacun de ses biens, afin de déterminer lesquels seraient susceptibles d’être
saisis par la banque si celle-ci devait mettre sa menace à exécution, étant précisé que
l’existence de la créance de la banque est établie et non discutée.

67
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

LA PREUVE DES DROITS SUBJECTIFS


Prouver est faire apparaître ou reconnaître quelque chose comme vrai, réel, certain ; la
preuve est donc ce qui sert à établir qu'une chose est vraie.
En matière judiciaire, il s'agit de convaincre le juge de la vérité de l'allégation. (Ghestin et
Goubeaux) Elle permet à celui qui se prévaut de l’affirmation de la faire tenir pour vraie et
d’en tirer les bénéfices juridiques qui y sont attachées. Cette matière présente un intérêt
pratique considérable et bien souvent l'issue d'un procès dépend directement de la preuve
d'un droit. Celui qui perd son procès est bien souvent celui qui n'a pas pu apporter la preuve
de l'existence du droit allégué. Finalement, il ne suffit pas d’être titulaire d’un droit pour
obtenir satisfaction. Encore faut-il pouvoir en établir l’existence. Aussi, même si l’existence
du droit et sa preuve sont fondamentalement différents, puisque le droit ne dépend pas,
dans son existence de la preuve qui peut en être rapportée, il n’en demeure pas moins, qu’en
pratique, ils sont très liés. Quel intérêt y a t-il à être titulaire d’un droit, si on ne peut en
établir l’existence et donc en bénéficier ? Dès lors, on affirme, depuis le droit romain que
n’avoir pas de droit et ne pouvoir le prouver sont des situations équivalente pour la
personne ! Avant de voir comment prouver, il faut auparavant, et c’est l’objet de cette
section préliminaire, déterminer ce sur quoi doit prouver la preuve, en clair quoi
prouver.

SECTION PRELIMINAIRE : L’OBJET DE LA PREUVE


- L’objet de la preuve est ce sur quoi doit porter la preuve. Or, la détermination de l’objet
de la preuve est commandée par la distinction du fait et du droit. En effet, tous les droits
subjectifs dont une personne est titulaire ont été acquis à la suite d'un acte ou d'un fait
juridique. Ils constituent la source des droits subjectifs. C'est ce fait ou cet acte juridique
qui doit être prouver par celui qui invoque à son profit un droit subjectif. Ainsi, par
exemple, une personne qui se prétend créancière d’une autre au titre de la réparation du
dommage qui lui a été causé à l’occasion d’un accident. Elle devra rapporter la preuve de la
réalité de l’accident, l’importance du préjudice qu’elle a ressenti à cette occasion, ces
éléments étant les faits pertinents à prouver.
- Par principe, les parties n’ont pas à prouver l’existence, le contenu ou la portée des
règles juridiques qu’elles invoquent pour appuyer leur prétention. Il n'est pas nécessaire
pour celui qui invoque un droit subjectif à son profit de prouver la règle de droit objectif
qui lui reconnaît telle prérogative, tel droit subjectif. En effet, les parties doivent elles-
mêmes faire la preuve des faits qu'elles allèguent mais elles n'ont pas à faire la preuve de la
règle de droit qui leur reconnaît un droit subjectif. C'est au juge qu'il appartient de vérifier
l'existence et le sens de la règle de droit.
- Par exception, l’existence de certaines règles de droit doit être rapportée par les parties.
Le juge est en droit de les ignorer. Il en est ainsi des usages et coutumes qui doivent, en cas
de contestation, être établis dans leur existence et dans leur teneur par celui qui s’en prévaut.
On a vu que cette preuve peut être facilitée par la délivrance de parères délivrées par les
Chambres de commerces qui en attestent l’existence. La preuve de l’existence et du contenu
des lois étrangères doit également être rapportée par les parties. Là encore, il ne peut être
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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

reproché au juge français d’ignorer toutes les lois étrangères. Le juge va se contenter de
déclarer la loi étrangère applicable. Il appartiendra aux parties de rapporter le contenu de la loi
applicable.
- En définitive, les parties prouvent les faits et le juge applique la loi qu'il doit connaître.
Les parties n'ont pas à prouver la loi (sauf coutume, usages et loi étrangère : les parties
doivent apporter la preuve de leur existence et de leur contenu). C'est le sens de l'article 9 du
nouveau Code de procédure civile français : "Il incombe à chaque partie de prouver
conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention". Quand au rôle du
juge, il est précisé à l'article 12, alinéa 1 du nouveau Code de procédure civile français : "Le
juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables." Très
souvent, les parties indiquent au juge la norme juridique qu'elles estiment applicables, mais il
s'agit là d'une simple suggestion, d'un simple avis, car la loi reconnaît au juge le pouvoir de
"donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la
dénomination que les parties en auraient proposée. (art. 12 alinéa 2)" Aux parties, le fait ; au
juge, le droit ».
- Les parties doivent prouver les faits qu'elles allèguent. Il faut noter que notre procédure
civile est organisée selon un modèle contradictoire. Le juge est, en principe, neutre au
procès civil. Il se borne à trancher à trancher deux prétentions opposées.
- La preuve des droits subjectifs soulèvent deux questions : qui doit prouver ? C'est le
problème de la charge de la preuve (Section 1). Comment prouver ? C'est le problème des
procédés de preuve déterminés par la loi, c'est -à- dire la manière dont doit se faire la preuve
(Section 2).

SECTION I : LA DETERMINATION DE LA CHARGE DE LA PREUVE


- Il est capital de savoir lequel des deux adversaires au procès a la charge de la preuve, au
moins lorsque rien ne peut être établi ni par l'un, ni par l'autre. Dans ce cas, celui sur qui
pesait la charge de la preuve perdra son procès. C'est sur lui que pèse le risque de la
preuve. La Cour de cassation française a eu l'occasion de le rappeler : "l'incertitude et le
doute subsistant à la suite de la production d'une preuve doivent nécessairement être
retenus au détriment de celui qui avait la charge de cette preuve" (Soc. 31 janv. 1962,
Bull. IV n°105).
- C'est à propos des obligations, dans les articles 9 à 38 que le Code des obligations civiles
et commerciales expose l'essentiel des règles de fond concernant la preuve. La solution n'est
pas satisfaisante car la généralisation des solutions posent parfois des difficultés. L'article 9 du
Code des obligations civiles et commerciales donne la solution de principe en matière de
charge de la preuve (§1) mais la loi apporte des exceptions à ce principe en posant des
présomptions légales (§2).

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

§ 1 : LE PRINCIPE

- L'article 9 du Code des obligations civiles et commerciales (cocc), pourtant relatif à la


preuve des obligations, est considéré comme ayant une portée générale. Il pose, dans deux
alinéas, les règles qui permettent de déterminer qui supporte la charge de la preuve :
" Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit en prouver l'existence.
Celui qui se prétend libéré doit prouver que l'obligation est inexistante ou éteinte. ".
- Suivant l’article 9 cocc, il convient de distinguer celui qui réclame et celui qui se prétend
libéré : L’alinéa 1er dispose : «Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit en
prouver l'existence». Interprétée en terme généraux, cette règle est la traduction de l'adage :
"Actor incumbit probatio ; reus in excipiendio fit actor" Ce qui signifie : "au demandeur
incombe la charge de la preuve ". On peut donc ériger en principe général, "La preuve
incombe à celui qui avance la réalité d'un fait" (Mazeaud et Chabas). Généralement, la place
du « demandeur à la preuve » coïncide avec celle de demandeur à l‘instance : c’est celui qui
saisit le juge et qui forme la première prétention et la première affirmation, qui doit agir sur le
terrain de la preuve.
L’alinéa 2 ajoute : «Celui qui se prétend libéré doit prouver que l'obligation est
inexistante ou éteinte». Là encore, en généralisant, il apparaît que celui qui se prétend libéré
a pour charge d’en rapporter la preuve. Or, il est rare qu’une personne saisisse la Justice pour
qu’il soit constaté qu’elle ne doit plus rien. En fait, le plus souvent, c’est lorsqu’elle est
assignée en Justice qu’elle va prétendre qu’elle ne doit rien. Elle a dû quelque chose mais elle
n’est plus débitrice.
- A travers l’article 9 du cocc se dessine ainsi le dialogue entre les parties qui
caractérise le procès civil.
- Au cours de ce dialogue, le défendeur peut se contenter de nier les faits allégués par le
demandeur et adopter une attitude purement passive. Ainsi si le demandeur veut engager
la responsabilité pour faute du défendeur, il lui appartient d'apporter la preuve d'une faute
imputable au défendeur. Le défendeur peut demeurer purement passif et l'issue du procès
dépendra du succès du demandeur dans l'administration de la preuve. Mais, le plus
souvent, le défendeur est actif : il invoque un fait grâce auquel il entend paralyser la
demande. Dans notre exemple, le défendeur va tenter de démontrer qu'il n'a pas commis de
faute, qu'il a eu une attitude diligente, qu'une autre personne placée dans les mêmes
circonstances aurait agit de la même façon.
- De ce fait, le défendeur qui invoque un fait de nature à faire échouer la requête du
demandeur, se place lui aussi dans la situation d'un demandeur : il lui appartient
d'apporter la preuve du fait qu'il invoque. (Reus in excipiendo fit actor : le défendeur joue
le rôle de demandeur chaque fois qu'il invoque une exception). Ainsi, au cours du procès, la
charge de la preuve peut peser alternativement sur chacune des parties, au fur et à
mesure qu'elles avancent de nouveaux faits qui ont pour effet d’opérer un renversement
de la charge de la preuve. L'ordre théorique de la production des preuves n'est donc pas
toujours suivi par les parties. Chacune des parties contribue à la recherche de la vérité et le
juge lui-même intervient le plus souvent de façon active. La loi a accordé au juge des

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

pouvoirs d'initiative dans le domaine de la preuve : il peut ordonner des expertises destinées à
établir la réalité des faits et donc l'éclairer dans son jugement.
- La règle que nous venons de présenter a un aspect trop théorique. Elle ne rend pas non plus
compte du fait que le demandeur ne doit pas tout prouver. Il est certains faits qui sont d'une
telle évidence, qu'il n'est pas nécessaire d'en apporter la preuve. Ainsi celui qui invoque
une situation normale n'a pas à la prouver.
Celui qui se prévaut du fait qu'à minuit, la visibilité était très réduite, n'a pas à prouver ce fait.
Par compte s'il veut démontrer qu'en raison d'un éclairage artificiel ou d'un clair de lune, la
visibilité était excellente, devra le prouver. La charge de la preuve pèse sur celui des deux
adversaires qui veut démontrer un fait contraire à la réalité apparente (Thèse Gény,
repris par Mazeaud et Chabas). De nombreux auteurs soutiennent que celui qui doit faire la
preuve est celui contre lequel l'apparence existe. Il faudrait donc apprécier, dans chaque
cas, où est la situation normale pour attribuer la charge de la preuve. On peut relever, par
exemple, qu'a priori, toute personne jouit d'une pleine capacité juridique et qu'il appartiendra
donc à celui qui entend démontrer l'incapacité du contractant de la prouver. De même, a priori
toutes les situations et tous les actes sont conformes aux prescriptions légales. Il appartiendra
à celui qui se prévaut du contraire de le prouver.
- Cependant, si cette idée de l'apparence explique un certain nombre de solutions, elle ne
suffit pas toujours pour expliquer toutes les situations. Ainsi, que décider si une personne
veut récupérer les deniers qu'elle prétend avoir prêté et que l'autre prétend avoir reçu à titre de
donation. Quelle est l'apparence ? Dans de telles situations, il faut revenir à la règle selon
laquelle c'est au demandeur, celui qui agit est celui qui a versé l'argent, qu'il appartient
d'apporter la preuve du prêt. Un arrêt de la CA de Paris (D. 2000-776, note Vich-Y-Llado) a
rappelé récemment cette solution : « Il appartient à celui qui revendique la chose de
rapporter la preuve de l’absence d’un tel don » (donc nécessité de rapporter la preuve du
prêt). Si cette preuve est apportée, il appartient au défendeur, celui qui détient les fonds, de
démontrer que finalement le prêteur avait ultérieurement renoncé à sa créance, en faisant
donation des fonds prêté.

§ 2 : LES PRESOMPTIONS LEGALES


- Très souvent, il est extrêmement difficile de prouver le fait même qu'on désire établir.
On peut néanmoins relever un certain nombre de circonstances qui rendent très probables
l'existence du fait qu’on n’arrive pas à établir. Pour venir en aide au demandeur, il existe un
certain nombre de présomptions. Une présomption, c'est déduire d'un fait connu
l'existence d'un fait inconnu. Il y a, selon l'expression de Bartin, " déplacement de la
preuve". On n'exige plus de demandeur la preuve du fait précis sur lesquels il fonde ses
droits, mais un fait voisin, plus facile à prouver, duquel on va en déduire l'existence du
fait inconnu.
"Les présomptions sont des conséquences que la loi ou le magistrat tire d'un fait connu à
un fait inconnu". Les conséquences déduites par la loi sont de présomptions légales. Les
conséquences déduites par le magistrat sont des présomptions de l'homme.
Les présomptions de l'homme sont des procédés de preuve. On les envisagera plus loin. En
revanche, les présomptions légales sont analysées comme des dispenses de preuve. Le plus

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

souvent, il suffira d'établir un fait plus facile à prouver et la loi en déduira l'existence du fait
inconnu. Il y a alors un renversement de la charge de la preuve. Ces présomptions s'imposent
au juge : il doit obligatoirement appliquer la déduction prévue par la loi. Les présomptions
sont simples ou irréfragables.

I. - LES PRESOMPTIONS LEGALES SIMPLES


- La présomption simple, dite également présomption relative est celle qui souffre de
preuve contraire. Il s'agit donc d'une conséquence que la loi tire d'un fait connu mais qui
peut être renversée par la preuve contraire. Il est donc possible de démontrer que la
conséquence que la loi tirait du fait connu n'existe pas en l'espèce. On peut apporter la preuve
contraire. Il faut noter qu'en principe, c'est-à-dire à défaut de disposition contraire, les
présomptions légales sont simples.
- La loi a édicté un certain nombre de présomptions simples qui se caractérisent par la
vraisemblance de la conséquence déduite. Ainsi, la loi présume que la personne qui a
l'apparence d'être titulaire de certains droits, en est véritablement titulaire. En effet, la
possession d'un bien fait présumer la propriété ou n'importe quel droit réel. De même, celui
qui a la possession d'état d'enfant légitime est présumé être un enfant légitime.
- Le juge est souverain dans l'appréciation de cette preuve contraire.
- Les règles relatives aux présomptions simples constituent des règles de preuve. A ce titre,
elles s'appliqueraient immédiatement au procès en cours.

II. - LES PRESOMPTIONS LEGALES IRREFRAGABLES


- Les présomptions dites irréfragables ou absolues sont des présomptions légales contre
lesquelles la preuve contraire n'est pas possible. Il n'est pas permis de démontrer
l'inexistence de la conséquence déduite par le législateur du fait connu. Le juge ne dispose
d'aucun pouvoir d'appréciation. Le bénéficiaire d'une présomption irréfragable est donc
dispensé de faire la preuve de la circonstance dont il se prévaut pour bénéficier d'un droit.
L'article 10 alinéa 1er du COCC énonce cette caractéristique : " Celui qui établit les actes
ou faits auxquels la loi a attaché une présomption bénéficie pour le surplus d'une
dispense de preuve. ". Son adversaire ne peut pas démontrer l'inexistence de cette
circonstance. C’est ce que prévoit l’article 11 alinea 2 du COCC qui précise que la preuve
contraire est : « Interdite dans les cas expressément prévus par la loi, la preuve contraire
peut également être limitée dans son objet ou dans les moyens de preuve laissés à la
disposition des parties. »
- Les présomptions irréfragables sont des règles de fond qui modifient la situation
juridique d'une personne : elles ne s'appliqueraient qu'aux faits futurs. Les présomptions
irréfragables sont énumérées limitativement par la loi. Une disposition expresse est
nécessaire.
- Le législateur, en vertu de présomptions irréfragables, dénie certaines actions en
justice. La loi va alors accorder au défendeur une exception qui va lui permettre d'écarter
l'action de son adversaire. Ainsi, l'article 211 COCC présume que le paiement a été effectué
lorsque le créancier a remis le titre de créance au débiteur. Une autre présomption

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

irréfragable, d'une grande importance pratique, est prévue par l'article 1351 du Code civil.
Cette présomption irréfragable est liée à la décision de justice. Il est nécessaire, en effet,
que ce qui a été définitivement jugé ne puisse être remis en cause. Sans cette présomption, il
n'existerait aucune sécurité juridique et il n'y aurait aucune fin au procès. Les nécessités de
l'administration judiciaire impliquent l'existence d'une règle absolue qui consacre l'autorité
absolue des décisions de justice. Il existe donc une présomption irréfragable d'autorité de
la chose jugée qui tient pour vrai ce qui a été définitivement été jugé. On ne peut dès lors
remettre en cause une décision définitive, même en apportant la preuve contraire, tel l'aveu ou
le serment.

SECTION 2 : LA DETERMINATION DES PROCEDES DE PREUVE


Pour déterminer les procédés de preuve admis par le droit, il faut au préalable analyser la
nature de la prétention émise par le demandeur, celui sur qui pèse la charge de la preuve : que
veut-il prouver ? En effet, nous verrons que notre droit n’admet pas tous les procédés de
preuve (§ 1). Ce point résolu, nous examinerons les différents procédés de preuve existants
(§ 2).

§ 1 : L’ADMISSIBILITE DES PROCEDES DE PREUVE


Domat a pu écrire : "La preuve, c'est tout ce qui persuade l'esprit d'une vérité". Dès lors,
on aurait pu concevoir que le droit admette tous les modes de preuve envisageable quel que
soit la circonstance dont le demandeur invoque l'existence. Or, dans notre droit, tous les
modes de preuve ne sont pas également admissibles : il existe une certaine hiérarchie
entre eux. Certains s'imposent au juge, d'autres laissent au juge sa liberté d'appréciation.
Notre droit a donc adopté un système mixte en matière de preuve. Dans certaines hypothèses,
la preuve est légale. Cela signifie que le législateur et non le juge apprécie la valeur des
procédés de preuve. Dans d'autres hypothèses, la preuve est libre, c'est-à-dire que le juge
apprécie en conscience si le fait est ou non prouvé.
Cette opposition se traduit par deux systèmes de procédés de preuve. Le système de la
preuve légale correspond à la preuve des actes juridiques ; tandis que le système de la
preuve libre correspond à la preuve des faits juridiques.
Pour connaître les procédés de preuve admis par le droit, il faut examiner la nature de la
prétention de celui sur qui pèse la charge de la preuve : Veut-il prouver un acte ou un fait
juridique ? Cette distinction entre actes et faits juridiques (I) est donc fondamentale pour
déterminer les règles de la preuve. Nous verrons, en effet, que les actes juridiques (II) ne se
prouvent pas comme les faits juridiques (III).

I. - LA DISTINCTION DES ACTES ET DES FAITS JURIDIQUES


Elle repose sur une distinction sur les circonstances d’après lesquelles une personne se
prétend titulaire d’un droit. La classification que nous allons maintenant étudier est fondée
sur la volonté ou l'absence de volonté de ceux qui créent le droit. Toute personne peut en
principe, modifier sa situation juridique. L'acte de volonté par lequel une personne va
modifier sa situation juridique, est un acte juridique (A). Sa situation juridique peut se

73
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

modifier en dehors sa volonté ou même contre sa volonté. Cette modification résulte alors de
la survenance d'un fait juridique (B).

A- LES ACTES JURIDIQUES


- L'acte juridique est une manifestation de volonté destinée à modifier une situation
juridique, à produire des effets de droit. Ces effets de droit sont la création, l'extinction ou
la transmission d'un droit subjectif.
Nous n’envisagerons ici que les différentes classifications des actes juridiques.
- Lorsqu'un acte juridique est la manifestation de la volonté d'une seule personne, on
l'appelle acte unilatéral. Une personne peut modifier seule sa situation juridique mais ne
peut, de sa seule volonté modifier la situation juridique d'un tiers.
L'occupation, l'abandon d'une chose. La personne, par sa seule volonté, devient propriétaire
ou perd son droit de propriété. Le testament est aussi un acte unilatéral. C'est l'acte juridique
en vertu duquel le testateur règle sa succession pour le temps où il ne sera plus, en faisant
échec aux règles de la dévolution légale. Seule la volonté du testateur intervient ; celles des
légataires ne sont pas requises au moment de la rédaction du testament : ils peuvent d'ailleurs
en ignorer l'existence. Puisqu'il s'agit d'un acte unilatéral, les légataires, visés par le testament,
peuvent refuser le legs. On peut également citer la reconnaissance d'un enfant naturel, qui
est un acte juridique unilatéral de nature extra-patrimonial.
On se pose la question de savoir si un acte juridique unilatéral peut être générateur
d'obligations. Il est bien certain qu'une personne ne peut de sa seule volonté créer une
obligation à la charge d'un tiers.
Mais on peut se demander si une personne peut de sa seule volonté, créer une obligation au
profit d'un tiers. C'est l'engagement unilatéral de volonté qui suscite un débat doctrinal. La
jurisprudence admet quelques hypothèses d'engagement unilatéral (offre).
- Lorsque l'acte juridique entraîne la modification juridique de plusieurs personnes,
toutes ces personnes doivent donner leur accord de volonté. Cet acte juridique, accord
de volonté de plusieurs personnes, est appelé convention. C'est un terme générique. Le
contrat est une espèce particulière de convention. Le contrat, c'est l'acte juridique plurilatéral
créateur d'obligations. Les autres actes juridiques, qui ont pour but de modifier ou d'éteindre
une obligation sont des conventions.

B - LES FAITS JURIDIQUES


- Il y a fait juridique lorsque l'événement a crée, transmis ou éteint un droit sans qu'une
personne ait voulu ce résultat. Le fait juridique peut être un fait naturel, c'est-à-dire
l'œuvre de la nature : un décès, la maladie, etc. Ce fait naturel va produire des conséquences
juridiques : naissance de prérogatives, extinction de droits, etc. Le fait juridique peut être le
fait de l'homme, c'est-à-dire l'œuvre de l'homme. Celui qui commet une maladresse et
blesse quelqu'un, a accompli un fait juridique. Il n'a pas voulu cet événement et les
conséquences juridiques. Même si l'événement est intentionnel (ex. meurtre ou assassinat), il
s'agit toujours d'un fait juridique parce que son auteur n'a pas voulu les conséquences
juridiques (obligation d'indemniser, sanctions pénales). Et quand bien même les aurait-il

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

voulu, ce n'est sa volonté qui est la source de ses conséquences juridiques mais bien la loi qui
est la seule source du droit subjectif dont va être titulaire la victime de ce fait juridique. -
Cette classification des actes et faits juridiques a une importance capitale, surtout dans le
domaine de la preuve, car la qualification de l'événement détermine directement le régime
de la preuve.

II. - LA PREUVE DES ACTES JURIDIQUES


- Il convient ici de distinguer la preuve de l'existence d'un acte juridique (A) et la preuve
contre l'écrit qui constate un acte juridique (B).
A - PREUVE DE L'EXISTENCE D'UN ACTE JURIDIQUE
- Rappelons qu'un acte juridique est une manifestation de volonté ayant pour but de la
création, la modification ou l'extinction d'un droit. Il s'agit d'un acte réfléchi, pensé. Dès
lors, au moment de sa naissance, il est tout à fait possible de consigner cet acte juridique par
écrit afin d'en conserver la preuve. Il est tout à fait possible de préconstituer un écrit, de se
ménager une preuve. Cette circonstance explique la sévérité du législateur qui interdit la
preuve des actes juridiques par un mode de preuve imparfait, considérés comme dangereux.
Dès lors, la règle est que les actes juridiques se prouvent par une preuve parfaite. C'est le sens
de l'article 14 du COCC.
- Il convient de rappeler qu'il ne s'agit que d'une règle de preuve. Cela ne concerne pas la
validité des actes juridiques qui n'est soumise à aucune condition de forme, donc pas à la
rédaction d'un écrit. Cela ne concerne pas non plus l'interprétation de l'acte juridique. Si celui-
ci est obscur, le juge peut avoir recours, par exemple, au témoignage pour déterminer ce que
les parties ont réellement convenu. Aussi paradoxalement, l'écrit n'est pas une condition
de validité de l'acte juridique mais une nécessité quant à sa preuve. On dit que l'écrit n'est
exigé que ad probationem et non ad solemnitatem. Il faut noter une expression qui peut
parfois prêter à confusion : le terme "acte". En effet, on peut remarquer qu'il est employé dans
l'article 14 du COCC mais dans le sens "d'écrit". Il faut prendre garde à ne pas confondre le
terme "acte" dans le sens de l'acte juridique, manifestation de volonté, le négotium avec le
terme "acte" dans le sens de l'écrit, l'instrumentum.
- Il faut noter que cette règle ne concerne pas les tiers. S'il s'agit pour eux de prouver une
convention à laquelle ils sont étrangers, ils peuvent utiliser tous modes de preuve. La
convention constitue pour eux un fait juridique, pouvant se prouver par tous moyens.
- Cette règle selon laquelle les actes juridiques ne se prouvent que par une preuve parfaite
souffre d'un certain nombre d'exceptions qui sont au nombre de 5. Si l'une des ces
exceptions trouve application, le demandeur pourra prouver l'acte juridique en ayant recours à
une preuve imparfaite, plus facile à administrer.
- Première exception : Le principe de la preuve parfaite pour un acte juridique est
écarté lorsqu'il s'agit de prouver un acte dont le montant est inférieur ou égal à 20.000F.
Lorsque l'acte juridique concerne des affaires de moindre importance, l'usage n'est pas de
constater cet acte par écrit. Cette formalité constituerait un important obstacle aux échanges
économiques s'il fallait constater tous les accords par écrit. Les actes juridiques portant sur

75
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

une somme inférieure ou égale à 20.000 F. se prouvent par tous moyens. Si l'objet du litige est
une prestation indéterminée en valeur, la preuve par écrit est toujours requise.
Il peut se poser des problèmes d’évaluation de l’objet en cause, notamment lorsqu’il ne s’agit
pas directement d’une somme d’argent, mais d’une chose dont il faut apprécier la valeur.
Dans ce cas, il appartient alors au demandeur de l’évaluer.
- Deuxième exception : L'article 16 du COCC prévoit une exception à la règle de la
preuve parfaite de l'acte juridique lorsqu'il existe un commencement de preuve par
écrit. Les rédacteurs du COCC en donnent une définition à l'alinéa 2 : "On appelle
commencement de preuve par écrit tout écrit qui rend vraisemblable le fait allégué et
qui émane de celui auquel on l'oppose, de son auteur ou de son représentant.". Ce texte
exige la réunion de 3 éléments.
- Un écrit : Il ne s'agit bien sur pas d'un écrit constatant l'accord de volonté puisque sinon, il
suffit à prouver l'acte juridique. Il s'agit d'un commencement de preuve. N'importe quel écrit
peut être considéré comme un commencement de preuve par écrit : il peut s'agir de lettres
missives, de papiers domestiques, de livres de comptes, d'un projet d'acte, d'un chèque, etc....
Tout écrit, même s'il n'avait pas été utilisé à titre de preuve. On peut aussi inclure dans cette
catégorie l'écrit qui avait pour but de constater l'acte juridique mais dont le vice de forme
l'empêche d'être pleinement probant. Cet acte inefficace à titre de preuve parfaite peut
néanmoins constituer une preuve imparfaite. La jurisprudence a entendu cette notion de
commencement de preuve par écrit de façon de plus en plus extensive. Elle a, par exemple,
considéré que les paroles prononcées par le défendeur au cours d'une comparution personnelle
et consignée par le greffier, pouvaient s'analyser comme un commencement de preuve par
écrit. Cette solution jurisprudentielle a été consacrée par le législateur Sénégalais et figure à
l'alinéa 3 de l'article 16 du COCC qui prévoit même que « Sont assimilées au
commencement de preuve par écrit les déclarations faites au cours d'une comparution
personnelle ordonnée par le juge. » preuve par écrit. On peut d'ailleurs noter une certaine
contradiction entre l'alinéa 1er et l'alinéa 3 puisque le premier que le commencement par écrit
"existe" alors que l'alinéa 3 implique une naissance de l'écrit au moment du procès (Mazeaud
et Chabas). Certains juges ont même retenu comme étant un écrit, constituant un
commencement de preuve, l'enregistrement de paroles sur un magnétophone.
- L'écrit doit émaner de celui contre lequel le demande est formée (et non de celui qui
s’en prévaut), ou de celui qui le représente. La jurisprudence admet aussi que l'écrit émane
de celui a été mandaté. Mais elle a refusé de considéré l'écrit émanant de l'avocat de celui
contre lequel on veut prouver l'acte juridique. Cette condition est très importante, car si on
admettait comme commencement de preuve l'écrit émanant d'un tiers, cela reviendrait à
admettre le témoignage pour prouver un écrit.
- Un écrit rendant vraisemblable le fait allégué : Il faut donc que cet écrit soit pertinent,
qu'il rende vraisemblable l'existence de l'acte juridique. Ainsi, on peut imaginer une lettre
missive par laquelle l'emprunteur sollicite des délais pour le remboursement ou remercier le
prêteur, etc...
Il faut, en dernier lieu, que cet écrit ne prouve pas : il constitue seulement un commencement
de preuve. La Cour de cassation francaise interdit au juge de se contenter de ce seul élément.
Le commencement de preuve par écrit rend admissibles les procédés imparfaits de preuve, tel

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

le témoignage. Le commencement de preuve doit donc être complété par d'autres éléments. Il
ne suffit pas à lui seul.
- Troisième exception : les copies. La loi reconnaît un certain effet probatoire aux copies à
certaines conditions :
- Il faut en premier lieu qu'une partie ou le dépositaire n'ait pas conservé l'original.
L'original doit avoir disparu et cette disparition doit être prouvée.
- En second lieu, il faut que la copie soit fidèle et durable. l'article 28 du COCC tente de
définir ces caractéristiques : "La copie, photocopie ou toute autre reproduction d'actes
authentiques, ou d'actes sous seings privés a la même force probante que l'acte lui-même
lorsqu'elle est certifiée conforme par un officier public ou, dans les limites de leurs
attributions, par le conservateur de la propriété foncière et le receveur de
l'enregistrement". (Loi du 6 juillet 1989).
La copie, photocopie ou toute autre reproduction d'actes sous-seings privés a également
la même force probante que l'acte lui-même, lorsqu'elle est certifiée conforme par un
officier de police judiciaire.,". Il s’agit de s’assurer que la copie n’est pas susceptible de
falsification. La loi a pensé, en premier lieu, au microfilm. Mais la photocopie en est un autre
exemple, on peut aussi songer au carbone ou au fax (mais problème la télécopie peut être
manipulée dans la date qu'elle affiche).
En l'état actuel de la science, rien ne permet d'affirmer qu'une copie est l'exacte réplique de
l'original, sauf si la copie est certifiée conforme à l'original. Et même dans ce cas, quelle est la
valeur de la conformité : elle est celle d'un témoignage.
Si la loi du 6 juillet 1989 a accordé une certaine valeur probatoire aux copies, encore faut-
il savoir laquelle.
Certains auraient voulu que la copie vaille l'original, quand bien même celui-ci ne pourrait
être produit. Le législateur n'a pas voulu aller aussi loin. Il s'est contenté d'affirmer que la
copie fidèle et durable, sans valoir l'original, rendait recevable, dans un système de
preuve légale, la présomption ou le témoignage. Or, c'était s'arrêter en chemin. En effet, en
vertu de l'art. 16 du COCC (commencement de preuve par écrit), la Cour de cassation a
donné un effet identique à toutes les sortes de copies, que la copie soit fidèle et durable ou
non. En effet, la Cour de cassation française admet, en cas de commencement de preuve
par écrit, la recevabilité de la preuve complémentaire par témoignages ou présomptions.
Par un arrêt du 14 fév. 1995 (J.C.P. 1995-II-22402, note Chartier), elle a décidé qu’une
photocopie constitue un commencement de preuve par écrit. Une valorisation de la copie
fidèle et durable, pour le rendre équivalente à l'original, est sans doute nécessaire. Par un autre
arrêt, la Cour de cassation française semble vouloir aller en ce sens. Elle a reconnu (Com., 2
déc. 1997) une pleine force probante à la télécopie « dès lors que son intégrité et
l’imputabilité de son contenu à l’auteur désigné ont été vérifiées ou ne sont pas
contestées ». La doctrine est divisée sur la portée de cette décision.
- Quatrième exception : l'impossibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve
littérale de l'acte juridique. Cette rédaction résulte de l’article 15 du COCC. L'hypothèse
d'une impossibilité purement "matérielle" n'a jamais reçu d'application en jurisprudence
et on ne voit les situations qu'elle recouvre. C’est l'exemple des dépôts faits par les voyageurs

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

dans les hôtelleries mais il faut relever qu'il n'y a aucune impossibilité matérielle de se
préconstituer un écrit. Il n'y a qu'une impossibilité morale. Aussi est-ce l'impossibilité
morale de se préconstituer un écrit qui suscite une jurisprudence abondante car cette
notion est entendue de façon assez large. L’impossibilité morale résulte de relations de
famille, d’affection, de subordination entre les parties, de pratiques professionnelles ou
d’usages commerciaux (vente de produits de luxe). Les exemples sont multiples en
jurisprudence. Il a été décidé qu'il y a impossibilité morale pour un fils d'exiger un reçu de sa
mère, ou pour un frère à l'encontre de sa sœur, ou encore de se préconstituer un écrit entre
fiancés (lien de parenté et d'alliance). De même, il y a impossibilité morale pour un médecin
d'établir par écrit ses visites. La même solution a été admise dans les rapports de maître à
serviteur. On peut se demander si l'impossibilité morale existe entre simples amis ou entre
concubins. Les auteurs ont des positions variées mais il semble qu'il n'existe aucune réponse
absolue et qu'il convient, in concreto, dans chaque cas, d'examiner la réalité de l'affectation
unissant les intéressés. La jurisprudence apprécie de façon assez large cette notion
d'impossibilité morale. C'est à celui qui se prévaut de cette impossibilité morale d'en
apporter la preuve. Là encore, s'il y a impossibilité de se préconstituer un écrit, les parties
sont admises à prouver l'acte juridique par tout moyens.
Perte de l'écrit constatant l'acte juridique ou l'impossibilité matérielle. C’est le cas de la
perte du titre qui lui (à l'acte juridique) servait de preuve littérale, par suite d'un cas fortuit ou
d'une force majeure. Il faut établir l'existence préalable de l'écrit. Mais, il ne suffit pas que
l'écrit ait été perdu. Cette perte doit être due à un événement de force majeure, c'est-à-dire
un événement imprévisible et irrésistible dont il faudra prouver l'existence (ex. incendie
accidentel de l'immeuble dans lequel était conservé le document).
Il faudra également prouver l’existence antérieure du titre détruit par cas fortuit. Si la
perte de l'écrit par cas fortuit est démontrée, la preuve pourra se faire par tous moyens.
- cinquième exception : Les opérations commerciales entre commerçants. Les
caractéristiques de la vie des affaires rend impossible une exigence formaliste, même si elle
est limitée à la preuve. La rapidité des opérations commerciales rend impossible la rédaction
d'un écrit constatant cette opération. De nombreuses opérations commerciales ou financières
sont conclues par téléphone, oralement. La preuve des opérations commerciales est donc libre,
peut donc se faire par tous moyens. Il faut cependant préciser que l'article 5 de l’Acte
Uniforme sur le Droit Commercial Général , qui pose en principe cette liberté de la preuve,
précise cette règle ne joue "qu'à l'égard des commerçants". Dès lors, la jurisprudence en a
déduit que s'il s'agit d'un acte mixte, c'est-à- dire conclu entre un particulier et un
commerçants (ex. : vente entre un commerçant et un client civil), la preuve est libre à
l'égard du commerçant mais doit se faire par preuve parfaite à l'égard du civil. Le
régime de la preuve va donc dépendre de la qualité de personne commerçante ou civile de
celui contre lequel la preuve est apportée. Si le demandeur à la preuve est commerçant, il
devra rapporter une preuve littérale ; si le demandeur à la preuve est civil, il pourra
tenter de convaincre le juge par tous moyens. Le législateur est intervenu pour exiger la
preuve par écrit de certains contrats commerciaux spécifiques. Il en est ainsi du contrat de
société, du contrat d'assurance.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

B - PREUVE CONTRE L'ECRIT QUI CONSTATE L'ACTE JURIDIQUE

- On suppose que le plaideur se trouve confronté à un acte juridique constaté par écrit ou dont
la preuve a été faite par un commencement de preuve par écrit complété par une autre preuve.
Peut-il apporter une preuve contre et outre le contenu de l'acte juridique ? : "Il n'est
reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait
allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou
valeur moindre" (c’est-adire inférieure à 20.000 F.) Celui qui voudrait donc démontrer
que l'écrit est inexact ou incomplet ou a été modifié depuis par un autre acte juridique,
devra se servir d'un procédé de preuve parfait.
- La première exception relative à la valeur de l'acte juridique est expressément écartée
par la loi. On peut dès lors se demander s'il ne convient pas d'écarter les autres exceptions. La
jurisprudence a admis les autres exceptions, tant celles relatives à la commercialité des
relations, que l'impossibilité d'établir un écrit ou encore le commencement de preuve par écrit.
Seule la première exception est écartée.

C. LES CONVENTIONS SUR LA PREUVE


- La jurisprudence a affirmé le caractère d'ordre privé des règles de preuve. Ainsi, la
Cour de cassation a admis que les parties au contrat puissent accorder valeur probatoire au
document, pourtant dénué de toute signature, résultant d'une transaction relative à
l'utilisation d'une carte bancaire de paiement, dès lors que le client avait composé son code
confidentiel (Com. 8 nov. 1989 (deux arrêts), D. 1990-369, note Ch. Gavalda ; J.C.P. 1990-II-
21576, note G. Virassamy).
Il résulte, en effet, l’article 37 du COCC que « Les conventions sur la preuve sont
valables dans la mesure où les parties règlent conventionnellement l'acquisition ou la
perte d'un droit par la production d'un mode de preuve déterminé » que les règles sur la
preuve peuvent faire l’objet d’un aménagement conventionnel. Les règles de preuve ne sont
donc pas d'ordre public : elles ne s'imposent pas aux parties qui peuvent y déroger par
conventions. La question a été vivement discutée en doctrine. La jurisprudence a décidé que
pourvu que les conventions sur la preuve ne touchent pas à l'organisation judiciaire ou à la
définition légale des pouvoirs des officiers publics, les parties sont libres d'aménager le
régime probatoire, tout comme elles peuvent disposer de leurs droits.
- Les parties peuvent librement déroger aux règles d'admissibilité de la preuve et
prévoir que la convention établie pourra se prouver par tous moyens ou par d'autres
modes. En pratique, les conventions sont une limite très importante aux exigences probatoires
relative aux actes juridiques. Il n'est d'ailleurs pas certain que cette liberté soit au-dessus de
toute critique, dans la mesure où la preuve littérale peut avoir pour fonction de protéger la
partie contractante faible, contrainte d'adhérer aux conditions imaginées par le cocontractant
puissant. On prive alors la partie faible de la protection que constitue la preuve légale.

Ce pendant, les conventions portant sur la charge de la preuve sont nulles. C’est ce que
prévoit l’article 38 du COCC qui dispose que « Sont nulles les conventions ayant pour

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

objet de modifier la charge de la preuve telle qu'elle est répartie par la loi.». Cette règle
est d’ordre public et sa violation entraine la nullité absolue de la convention.

III. - LA PREUVE DES FAITS JURIDIQUES


- Nous rappelons qu'un fait juridique est un événement qui peut survenir de façon soudaine ou
inattendue. Les intéressées n'ont pas pu rédiger un écrit pour constater l'événement. La preuve
écrite est peu concevable pour les faits juridiques. Aussi le législateur a prévu une quasi-
liberté du juge pour fonder sa conviction. Tous les moyens peuvent être utilisés pour la preuve
des faits juridiques. (art. 13 du COCC).

§ 2 : LES DIFFERENTS PROCEDES DE PREUVE


- On distingue les preuves parfaites et les preuves imparfaites. Les premières sont, en
principe, requises pour la preuve des actes juridiques. Ces procédés de preuve lient le juge :
il n'a aucun pouvoir d'appréciation (I). Les preuves imparfaites sont admises pour les faits
juridiques et pour les actes juridiques, par exception. Ces preuve imparfaites sont laissées à
l'appréciation souveraine du juge (II).

I. LES PREUVES PARFAITES


- Il existe 3 procédés de preuve dite parfaite : l'écrit, dit également preuve littérale (A), l'aveu
judiciaire (B) et le serment décisoire (C). Seul le premier a une grande importance pratique.

A- LA PREUVE LITTERALE (L’ECRIT)


- Le COCC distingue deux catégories de preuve littérale : l'acte sous seing privé (1) et l'acte
authentique (2). (attention au terme : "acte". Il signifie ici "écrit").

1. - LES ACTES SOUS SEING PRIVE


L'acte sous seing privé est l’écrit qui, contenant un acte juridique, comporte la signature des
parties. C'est la seule condition de forme requise par la loi.
L’art. 19 du COCC précise que l'acte sous seings privés est valable lorsqu'il est signé par les
parties. L’acte sous seing privé peut être relatif à un contrat synallagmatique ou à un
engagement unilatéral.
- Nous rappelons qu'un contrat synallagmatique est un contrat comportant des obligations
réciproques, où chacune des parties est à la fois débitrice et créancière. Dans ce cas, il apparaît
nécessaire, puisque chacune des parties est créancière, que chacune des parties se ménage une
preuve dans le cas où le cocontractant refuserait d'exécuter son engagement. Cette formalité
tend à assurer l’égalité entre les parties et ainsi éviter que l’une soit à la merci de son
adversaire. Aussi l'article 21 du COCC dispose : " L'acte sous seings privés relatif à une
convention synallagmatique doit être rédigé en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un
intérêt distinct.
Chaque original doit contenir la mention du nombre des originaux établis. ." Cette formalité
est appelée la formalité du "double original " ou du "double" car le plus souvent, il n'y a que

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

deux parties à l'acte juridique. Cette formalité s'explique par la nécessité qu'a chacun
d'apporter la preuve de l'obligation de l'autre. La Cour de cassation française a néanmoins
décidé qu'un seul original suffit, même pour un contrat synallagmatique, quand il se trouve
déposé entre les mains d'un tiers qui a pour mission de le produire à la requête de
chacune des parties (Par ex. Civ. 3e, 3 nov. 1968, Civ. 3e, 5 mars 1980).
Aussi, en pratique, il suffit aux parties de rédiger un seul original et le déposer chez un
notaire (coût moins élevé que la rédaction d'un acte authentique). Il faut aussi noter que
cette formalité du "double" n'est pas requise lorsqu'une des deux parties a déjà exécuté
son obligation (par ex., Civ. 1re, 14 déc. 1983). Ainsi, à l'occasion d'un contrat de vente à
crédit, si la chose a déjà été livrée, il suffit de rédiger un seul original que le vendeur
conservera pour le cas où l'acheteur ne paie pas le prix comme convenu. L'écrit ne présente
aucun intérêt pour l'acheteur à l'égard de qui le débiteur a déjà exécuté ses obligations.
Lorsque l'acte est constaté par plusieurs originaux, il doit être fait mention, dans l'écrit,
du nombre d'originaux. Bien entendu lorsque les règles posées par l'article 21 du COCC ne
sont pas respectées, l'acte juridique n'est pas nul, l'écrit est simplement dépourvu de force
probante. La jurisprudence décide que si l'une de ces formalités n'est pas respecté, c'est-à-dire
la formalité du "double" et la mention du nombre d'originaux, l'écrit n'a pas de force
probante mais il joue le rôle d'un commencement de preuve par écrit.
- Des formalités particulières sont aussi exigées pour certains actes unilatéraux. L'article
22 du COCC dispose : " L'acte sous seings privés contenant un engagement unilatéral
doit être rédigé en entier de la main de celui qui le souscrit.
Dans le cas contraire, il faut que celui qui s'engage écrive de sa main, outre sa signature
un bon pour ou un approuvé portant en toutes lettres le montant de son obligation dont
il fait preuve.
La présence des témoins certificateurs dispense les illettrés de l'accomplissement de la
présente formalité. " Cette règle a été édictée pour prévenir le risque de fraude qui consiste à
modifier la somme inscrite en chiffres par grattage. Dès lors que la somme est inscrite en
toutes lettres, il est plus difficile d'imiter l'écriture du débiteur et cette imitation pourra être
décelée par expertise. La loi n'exige aucune formule telle que "bon pour" ou "lu et approuvé"
qui n'ont aucune portée juridique. La loi exige que, outre la signature du souscripteur, il
indique, par lui-même, la somme ou la quantité à la fois en toutes lettres et en chiffres.
La loi précise qu'en cas de différence entre les deux sommes, c'est la somme écrite en toutes
lettres qui prévaut (plus difficile à imiter). On peut dire que la formalité est exigée lorsque
l'objet de l'obligation porte sur une chose fongible. Tel sera le cas en matière de
cautionnement où la caution devra indiquer, de sa main, en chiffres et en lettres, le montant
de la somme cautionnée ainsi que les intérêts prévus. Après une période de divergence
entre la Première Chambre civile et la Chambre commerciale de la cour de cassation
française, la première a fini par admettre avec la seconde que cette exigence de la mention
manuscrite n’est qu’une règle de preuve et non une règle de validité de l’acte, c’est à dire le
négotium. (Civ. 1re, 15 nov. 1989) En effet, si la formalité requise par l'article 22 n'est pas
observée, l'écrit (l’instrumentum) ne perd que sa force probatoire. Néanmoins, la
jurisprudence considère qu'il vaut à titre de commencement de preuve par écrit.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

- FORCE PROBANTE DE L’ECRIT :


L'acte sous seing privé tire sa force probatoire de la signature des parties. Néanmoins, si
l'écrit n'est signé, la jurisprudence a décidé que le juge peut néanmoins le retenir à titre
de commencement de preuve par écrit.
Dès lors qu'il a été régulièrement établi, " L'acte sous seings privés reconnu par celui
auquel on l'oppose, ou déclare sincère par le juge, fait foi de son contenu à l'égard de
tous jusqu'à preuve contraire. " (art. 23). Aussi, si les parties contestent l'écriture, l'acte
perd momentanément sa force probante. La loi précise que celui auquel on oppose l'écrit
doit avouer ou désavouer formellement son écriture ou sa signature. La jurisprudence a décidé
que "dans le cas où la signature est déniée ou méconnue, c'est à la partie qui se prévaut
de l'acte qu'il appartient d'en démontrer la sincérité" (Par ex. Civ. 1re, 17 mai 1972). La
charge de la preuve pèse sur celui qui veut opposer l'écrit. Il lui faudra alors intenter une
procédure de reconnaissance ou de vérification d'écriture. C'est là la principale différence
avec l'acte authentique. Dans le cadre d'un acte sous seing privé, celui qui veut l'opposer doit
établir sa réalité par la vérification d'écriture.
- Si l'écrit n'est pas désavoué ou s'il est établi qu'il émane bien de celui auquel on
l'oppose, l'écrit va faire preuve de son contenu, jusqu'à preuve contraire.

- La jurisprudence n’a jamais requis la mention de la date. La date figurant sur l'écrit
fait, à l'égard des parties, foi jusqu'à preuve contraire. Un acte sous seing privé doit
seulement constater l'acte juridique et comporter la signature des parties. A l'égard des tiers,
l'analyse est plus délicate. On peut, en effet, craindre un accord des parties pour antidater
l'acte juridique et ainsi frauder les droits des tiers. Ainsi, on peut imaginer que le propriétaire
d'une chose la vende une première fois et ensuite une seconde fois en indiquant dans ce
deuxième acte une date antérieure à la première vente. Aussi, l'article 24 du COCC prévoit-
il que les actes sous seing privé ne font pas foi de leur date à l'égard des tiers. Ceux-ci peuvent
toujours contester la date. Cependant, il est possible pour les parties de remédier à cette
faiblesse de l'acte sous seing privé en recourant à deux procédés :
- L'enregistrement de l'acte. Dans ce cas, les parties présentent deux originaux à
l’Enregistrement. L'acte sous seing privé aura acquis date certaine du jour de l'enregistrement
mais du jour où il a été passé. Un certain nombre d'actes juridiques sont soumis à un
enregistrement obligatoire (ex. promesse unilatérale de vente d'un bien immobilier).
- L'autre procédé qui rend certaine la date de l'acte sous seing privé, c'est la constatation de
cet acte dans un acte authentique. On peut également envisager un acte authentique
mentionnant un acte sous seing privé antérieur. L'acte authentique confère ainsi date certaine
à l'acte sous seing privé. Enfin, on doit relever que l'acte sous seing privé acquiert date
certaine au jour du décès de l'un des signataires. Il est, en effet, évident que l'acte sous
seing privé n'a pu être rédigé, au plus tard, le jour du décès de l'un des signataires.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

2. - LES ACTES AUTHENTIQUES


- L'article 17 définit l'acte authentique : " L'acte authentique est celui qui a été reçu par un
officier public compétent instrumentant dans les formes requises par la loi. ".
- Les officiers publics est une catégorie recouvrant des professions nombreuses. L'officier
public exerce une mission d'intérêt général. Cette mission lui a été conférée par le législateur.
On peut ainsi citer les notaires, les agents diplomatiques (consul à l’étranger), les
huissiers de justice et même les officiers de l'état civil (maire, adjoints, conseillers
municipaux) qui ne sont pas nommés par le gouvernement mais élus. Ces officiers sont
chargés de rédiger les actes auxquels les parties doivent conférer le caractère
d’authenticité et d’en 0assurer la conservation. Ces personnes présentent des garanties
sérieuses de moralité. Il leur est interdit d'instrumenter pour eux-mêmes ou les membres de
leur famille. Ils encourent de très graves sanctions pénales et civiles en cas de faux. Toutes
ces raisons expliquent pourquoi le législateur confère une très grande force probante aux actes
authentiques.
- Il faut relever les trois conditions requises pour qu'un acte puisse être qualifié d'authentique
- L'écrit doit être dressé par un officier public.
L'officier public doit être compétent. La compétence d'attribution de l'officier public
concerne la matière à propos de laquelle il peut instrumenter. Les officiers de l'état civil n'ont
compétence que pour dresser les actes de l'état civil. Les huissiers n'ont compétence que pour
signifier les actes de procédure et assurer l'exécution des décisions de justice. Les notaires ont
une compétence très étendue puisqu'ils ont qualité pour "recevoir tous les actes et contrats
auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d'authenticité attaché
aux actes de l'autorité publique...".
La compétence territoriale des officiers publics est fixée par la loi.
- Les formalités prévus par la loi doivent être respectées, l'acte doit être dressé avec les
"solennités requises". De nombreuses formalités sont prévues par la loi dans le but d'éviter
les fraudes pendant la rédaction mais surtout après. On peut ainsi citer l'obligation du notaire
d'utiliser un papier d'une qualité suffisante garantissant la conservation de l'acte, l'obligation
de rédiger en langue française, de ne pas faire d'abréviations, de blanc ou de surcharge. La
date doit être énoncée en lettres. Les pages sont numérotées et leur nombre est indiqué en fin
d'acte, etc...
- On peut se demander qu'elle est la sanction de l'inobservation de l'une ou l'autre de ces
conditions. La sanction est énoncée par l'article 1318 du Code civil : "L'acte qui n'est point
authentique par l'incompétence de l'officier, ou par un défaut de forme, vaut comme
l'écriture privée, s'il a été signé des parties". La jurisprudence française a donc décidé que
l'acte authentique entaché de nullité peut néanmoins valoir comme acte sous seing privé, s'il
obéit aux conditions de forme de ces actes (Civ. 1re, 11 juill. 1955).
- Mais si l'acte authentique est régulier en la forme, il est alors doté d'une force probante
particulière.
Cette force s'attache à la réalité même de l'acte et les constatations faites par l'officier public
(présence des parties, conformité entre leurs déclarations et les indications mentionnées dans
l'acte, la date de rédaction de l'acte authentique). L'acte authentique fait alors foi jusqu'à
inscription de faux de sa réalité et des constatations de l'officier public, à l'égard des

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

parties et des tiers. Pour le reste, c'est-à-dire par exemple, ce que déclarent les parties,
l'opinion de l'officier public, elles ne feront foi que jusqu'à preuve contraire ou n'auront
que la valeur d'un simple témoignage. Aussi, le contenu de l'acte authentique est tenu
pour vrai aussi longtemps que son caractère erroné n'aura pas été démontré à l'issue
d'une procédure d'inscription de faux. Cette procédure est prévue par l’article 18 du
COCC. La procédure est périlleuse car si le demandeur ne démontre pas le caractère erroné de
l'acte authentique, il sera condamné, non seulement aux frais mais aussi à une amende, voire
des dommages et intérêts.
- L'original de l'acte authentique signé par l'officier public et les parties sera conservé à
l'étude ou au tribunal. Cet original s'appelle la minute. Parmi les copies délivrées par le
notaire ou le greffe du tribunal, il faut distinguer celle qui est revêtue de la formule
exécutoire, la grosse. Sur simple présentation de la grosse, le créancier peut faire valoir ses
droits, c'est-à-dire procéder à l'exécution forcée de l'obligation (ex. saisie) sans passer par le
tribunal. Les autres copies sont les expéditions. Ces copies sont authentifiées par le
dépositaire, le notaire ou un clerc habilité à cet effet.

3-L'ADMISSION DE LA PREUVE ELECTRONIQUE DANS LE DROIT


SENEGALAIS
Un nombre croissant d'opérations sont réalisées actuellement à l'aide de moyens
électroniques, et il devient important de reconnaitre leur existence dans la pratique juridique
pour pouvoir revendiquer les droits légaux s'y rattachant. La définition de la preuve
électronique est donnée par l’article 2 de la Loi n° 2008 – 08 du 25 janvier 2008 sur les
transactions électroniques. Aux termes de cet article le Courrier électronique est tout
message, sous forme de texte, de voix, de son ou d'image, envoyé au moyen d’un réseau
public de communication, stocké sur tout serveur ou dans l'équipement terminal du
destinataire, jusqu'à ce que ce dernier en prenne connaissance.

• LA FORCE PROBANTE DE LA PREUVE ELECTRONIQUE

Aux termes de l’article 37 de la Loi n° 2008 – 08 du 25 janvier 2008 sur les transactions
électroniques : " l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que
l'écrit sur support papier et a la même force probante que celui-ci, sous réserve que
puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé
dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité. "Donc, le droit sénégalais reconnaît
la preuve électronique comme une preuve écrite. « l'écrit sur support électronique a la même
force probante que l'écrit sur support papier ». Lorsque il y a des conflits de preuve dans la
procédure, l’article 39 de la même loi précise qu’il appartient au juge d’apprécier
souverainement, au regard des circonstances de l’espèce, quelle est la preuve littérale la plus
vraisemblable.

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

B - L'AVEU JUDICIAIRE
- Il faut ici citer la définition classique d'Aubry et Rau : "l'aveu est la déclaration par
laquelle une personne reconnaît pour vrai et comme devant être tenu pour avéré à son
égard, un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques." Planiol et
Ripert ont précisé la notion en relevant que le terme aveu doit être réservé aux "déclarations
accidentelles, faites après coup, par lesquelles une partie laisse échapper la
reconnaissance du fait ou de l'acte qu'on lui oppose". On dit que l'aveu est la reine des
preuves, si cela est faux en matière pénale, cela est finalement peut-être exact en droit civil.
Le COCC distingue deux sortes d’aveu : "L'aveu qui est opposé à une partie, est
extrajudiciaire ou judiciaire". Seul l’aveu judiciaire sera ici étudié puisque lui seul est une
preuve parfaite, liant le juge quant au prononcé de sa décision.
- L'aveu judiciaire est celui qui est fait au cours d'un procès et dont dépend le sort de ce
procès. Bien entendu, cette forme d'aveu est rare. Le plaideur reconnaît rarement le bien-
fondé de la prétention de son adversaire au cours du procès. Il le reconnaît avant ou jamais. Le
COCC précise qu' "il fait pleine foi contre celui qui l'a fait". Cela signifie que l'aveu est un
procédé de preuve parfait. Il lie le juge. Le juge doit tenir pour vrai ce qui est avoué et y
conformer sa décision. Pour prouver un acte juridique, l'aveu est aussi efficace que
l'écrit. Pendant très longtemps, l'aveu était un mode de preuve interdit en matière de divorce
pour faute. Le législateur français du 11 juillet 1975 a admis expressément ce mode de
preuve pour la faute en matière de divorce. La règle est contenue dans l'article 259 du Code
civil.
- L'aveu emportant des conséquences si graves, il est nécessaire qu'il émane d'une personne
capable de disposer pleinement de ses droits. Aussi, l'aveu n'est pas recevable s'il émane
d'un mineur ou d'un majeur protégé.
- L'aveu judiciaire est indivisible. L'article 33 alinéa 2 le précise : "il ne peut être divisé
contre lui". Cette règle signifie qu'on ne peut retenir qu'une partie de l'aveu et rejeter
l'autre. Mais l'aveu peut être complexe c'est-à-dire que l'auteur, tout en reconnaissant le fait
allégué par son adversaire, "articule un nouveau fait dont le résultat serait de créer une
exception à son profit". La jurisprudence a écarté la règle de l'indivisibilité de l'aveu,
lorsque l'aveu est complexe. Cette règle a diminué considérablement la portée du principe de
l’indivisibilité de l'aveu. Dans ce cas, les juges écartent les faits affirmés qui n'ont qu'un
rapport indirect avec le fait principal ou les faits qui apparaissent grossièrement
invraisemblables. Par exemple, la jurisprudence considère que l'aveu de l'existence d'une
convention n'oblige pas les juges à adopter l'interprétation que l'auteur de l'aveu donne
de cette convention. Ainsi, il a été décidé qu'il est possible de maintenir l'aveu de l'existence
d'un prêt et d'écarter l'affirmation selon laquelle l'emprunteur se serait libéré de sa dette (Civ.
1re, 17 juin 1968).
- L'aveu est enfin irrévocable. Le dernier alinéa de l'article 33 le précise : "il ne peut être
révoqué, à moins qu'on ne prouve qu'il a été la suite d'une erreur de fait". Il ne pourrait être
révoqué sous prétexte d'une erreur de droit. Cela signifie l'aveu ne fait foi que jusqu'à preuve
contraire. L'auteur de l'aveu peut donc démontrer la fausseté de son aveu, en apportant la
preuve qu'il n'a été donné qu'à la suite d'une erreur de fait.

85
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

C - LE SERMENT DECISOIRE
- "Le serment est la déclaration par laquelle un plaideur affirme d'une manière
solennelle et devant le juge, la réalité d'un fait qui lui est favorable". (Ghestin et
Goubeaux) Le serment décisoire est une espèce particulière de serment, très rare en
pratique, car très dangereux pour celui qui serait tenté de l'utiliser. Pour cette raison, seules
les personnes capables de disposer de leurs droits peuvent déférer le serment. En effet,
l'un des plaideurs offre de s'en remettre au serment de son adversaire pour établir le fait
contesté, dont dépend l'issue du débat. On dit qu'il défère serment à son adversaire. Celui-
ci peut adopter 3 attitudes. Ou bien il prête le serment qui lui est déféré et gagne son
procès. Ou bien il refuse de le prêter, ce qui constitue un véritable aveu judiciaire dont
l'autre partie pourra se prévaloir pour gagner le procès. Il lui reste une troisième
attitude possible : il peut référer le serment au plaideur qui le lui a déféré. Si ce dernier
prête serment, il gagne le procès ; si, au contraire, il refuse de prêter le serment, il perd
le procès.
- Le serment décisoire est un mode de preuve parfait. Le serment décisoire lie le juge qui
doit conformer sa décision aux conséquences du serment. Le serment dicte sa décision. Cet
appel à la bonne foi de son adversaire est, on se l'imagine, très rare.

II. - LES PREUVES IMPARFAITES


- L'élément commun des procédés de preuve imparfaits est qu'ils ne lient jamais le juge. Le
juge reste toujours libre de son appréciation. On distingue quatre types de preuve imparfaits :
le témoignage (A), les présomptions du fait de l'homme (B), l’aveu extra-judiciaire (C) et le
serment supplétoire (D).

A - LA PREUVE TESTIMONIALE
- Le COCC n'envisage le témoignage que sous l'angle de l'admissibilité de ce type de preuve.
Une définition du témoignage a été donnée par un auteur, M. Le Roy, "la preuve
testimoniale est celle qui résulte des déclarations faites sous serment en justice, au cours
d'une enquête par des personnes qui ont perçu avec leurs propres sens le fait contesté".
Aujourd'hui, la preuve testimoniale recouvre aussi les déclarations écrites sous forme
d'attestations. Le témoignage peut donc revêtir une forme orale ou écrite.
- Qui témoigne ? L'article 10 du Code civil dispose "Chacun est tenu d'apporter son
concours à la justice en vue de la manifestation de la vérité. Celui, qui sans motif
légitime, se soustrait à cette obligation lorsqu'il en a été légalement requis, peut être
contraint d'y satisfaire, au besoin à peine d'astreinte ou d'amende civile, sans préjudice
de dommages et intérêts". L'article 206 du N.C.P.C. F. Plus spécifique au témoignage
rappelle "Est tenu de déposer quiconque en est légalement requis". Mais il prévoit des
dispenses : "Peuvent être dispensées de déposer les personnes qui justifient d'un motif
légitime. Peuvent s'y refuser les parents ou alliés en ligne directe de l'une des parties ou son
conjoint, même divorcé". On peut donc en conclure que ces personnes bénéficient d'une

86
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

présomption de motif légitime quant à leur refus de témoigner. Les autres doivent en
apporter la preuve.
- L'objet du témoignage est toujours ce que le témoin a personnellement vu ou entendu.
Le témoin doit relater ce qu'il a perçu par ses propres sens (Mazeaud). Notre droit positif
prohibe la preuve par commune renommée, ou preuve par "on dit". Le déclarant se fait
l'écho de bruits incontrôlables qui se colportent de bouche à oreilles. Cette preuve, courante
sous l’ancien Droit, était et reste très dangereuse par son imprécision croissante au fur et à
mesure que l’on s’éloigne du témoignage direct. Le danger est évident étant donné la grande
probabilité de déformation des faits. Par contre, la Cour de cassation française paraît
admettre, de façon critiquable, le témoignage indirect qui est celui d'un témoin qui a
personnellement entendu la déclaration d'une autre personne relatant ce qu'elle a
constaté elle-même. Les juges devront bien sur apprécier souverainement la valeur probante
de tels "témoignages".
B - LA PREUVE PAR PRESOMPTIONS
- On appelle présomptions de l'homme ou présomption du fait de l'homme ou encore
présomption de fait, "les conséquences que le magistrat tire d'un fait connu à un fait
inconnu". C'est en fait l'intime conviction du juge qui, à partir de divers éléments de fait, va
forger son intime conviction quant à l'existence du fait litigieux. Il s’agit d’un mode de
raisonnement.
- Les indices à partir desquels le juge peut former son intime conviction sont nombreux. Il
peut s'agir de constatations matérielles, de déclarations de personnes qui ne peuvent être
entendues en qualité de témoins, tous les documents quelle qu'en soit la nature ou l'origine,
de l'attitude des parties au cours d'une comparution personnelle (ex. refus de se soumettre à
une expertise sanguine), des résultats d'une expertise, etc...
- Les présomptions du fait de l'homme ne sont, bien entendu pas un mode de preuve
scientifique. On peut même dire qu'elles sont dangereuses. Elles sont néanmoins
indispensables car il est bien rare que le fait litigieux précis soit prouvé, car c'est bien
souvent le doute quant à son existence qui a été l'occasion de la saisine du juge. La loi
recommande au juge la prudence quant à l'appréciation de ce procédé de preuve. Elle
précise que "Les présomptions qui ne sont point établies par la loi, sont abandonnées aux
lumières et à la prudence du magistrat, qui ne doit admettre que des présomptions graves,
précises et concordantes, ..." La formule légale n'est qu'un conseil de prudence adressé au
magistrat. Aussi, il a été décidé qu’il peut se baser sur un indice unique (concordants ?) Le
juge est libre quant à son appréciation, il est toujours libre de rejeter ces présomptions ou
de les accueillir si elles lui paraissent déterminantes.

C - L'AVEU EXTRA-JUDICIAIRE

- Tout aveu qui n'est pas émis devant le juge compétent au cours de l'instance dans
laquelle le fait est en cause est un aveu extra-judiciaire. Il ne présente pas les mêmes
garanties que celui qui est fait au cours de l'instance en cause. L'aveu extra-judiciaire a pu
être extorqué par violence, dol ou à la suite d'une erreur. L'aveu extra-judiciaire n'a pas du
tout la même force probante que l'aveu judiciaire. L'aveu extra-judiciaire ne lie pas le

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

juge. C'est un mode de preuve qui se rattache à la catégorie des présomptions du fait de
l'homme. Même si le législateur ne l'a pas précisé, il faut ranger l'aveu extra-judiciaire dans
la catégorie des modes de preuve imparfaits. On peut déduire cette conséquence de l'article
32 du COCC qui dispose que "L'aveu extrajudiciaire vaut comme présomption du fait de
l'homme. ", c'est-à-dire pour la preuve des actes juridiques. La pertinence de l'aveu
extrajudiciaire dépend entièrement de l'appréciation du juge, de son intime conviction.

D - LE SERMENT SUPPLETOIRE
- Le serment supplétoire est celui par lequel : "Le juge peut déférer à l'une des parties le
serment, ou pour en faire dépendre la décision de la cause, ou seulement pour
déterminer le montant de la condamnation". C'est le juge qui défère d’office ce serment et
non les parties. il s'agit pour lui d'un pouvoir discrétionnaire. Il choisit librement la
personne à laquelle il défère le serment. C'est un moyen d'instruction réservé à son usage. Le
serment ne vise qu'à éclairer le juge sur les circonstances de la cause. Aussi, le serment
supplétoire ne lie pas le juge. Le juge reste libre de sa décision. Le serment n'est utilisé que
pour compléter une preuve et fortifier la conviction du juge. Ce procédé de preuve, on s'en
doute, est très peu employé. Le serment des parties n'offre aucune garantie sérieuse de
véracité de leurs affirmations.
REVISION DE DROIT CIVIL
CAS PRATIQUE
Cas n° 1
Fatima et Tapha sont de jeunes mariés. Ce dernier, représentant de commerce, vient
de subir un accident de voiture. Son véhicule, indispensable à l’exercice de sa profession, a
été endommagé. Tapha ne dispose d’aucune économie et ne voit pas comment il pourrait
financer l’achat d’une nouvelle voiture. Il décide de solliciter son beau-père, Amadou, et lui
demande de lui avancer la somme de 5 000 000 (cinq million). Soucieux d’instaurer de
bonnes relations avec son gendre qu’il sait d’un tempérament dépensier, Amadou lui remet la
somme de 5 000 000 (cinq million) en présence de son épouse, Mamy. Tapha s’engage à
rembourser Amadou rapidement, dès qu’il aura touché sa prime de fin d’année. Pour montrer
sa bonne foi, il remet à son beau-père un document entièrement écrit de sa main, libellé
comme suit : « Je soussigné Tapha fall, demeurant a keur Mbalakadiaw, reconnais devoir
la somme de 5 000 000 (cinq million) à Amadou Sambe ».
Suite à l’achat, Amadou reçoit une lettre de remerciements de Tapha qui y écrivait :
« Grâce à vous, j’ai pu acheter une excellente voiture d’occasion chez mon
concessionnaire. Je l’ai payée 5 000 000 (cinq million frcscfa), mais je pense qu’en réalité
elle en vaut beaucoup plus. Merci encore de m’avoir aidé ! ». Quelques jours plus tard, sa
fille Fatima vient l’avertir que Tapha n’a aucune intention de le rembourser et qu’il entend
considérer la somme comme un cadeau de bienvenue dans la famille. Amadou vient vous
demander conseil sur la manière de récupérer les 5 000 000 (cinq million).

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Cas n° 2
Aliou et Aissatou ce sont mariés en 1989. Au moment de leur mariage, la loi de 1989
prévoyait que la femme mariée était soumise à l’autorité de son mari : la puissance maritale.
Elle lui devait obéissance totale et par voie de conséquence était incapable de passer seule des
contrats ; ceux-ci n’était valables que moyennant l’autorisation de son mari. En 1995, une loi
nouvelle entre en vigueur et supprime la puissance maritale, ainsi que l’incapacité de la
femme mariée. En 1998, Astou signe un contrat de vente d’un immeuble avec Cheikh, son
mari intente une action en nullité de la vente conformément à la loi de 1989.
Cette action a-t-elle des chances d’aboutir ?

Introduction à l’étude du droit


QCM sur le droit de la preuve

Consignes :
Vous pouvez ne cocher aucune ou plusieurs réponses par question.

1 – L'objet de la preuve porte sur :

A) la règle de droit et les faits, toujours


B) les faits uniquement
C) la règle de droit et les faits, parfois
D) obligatoirement sur les faits et parfois sur la règle de droit

2 – Le droit de la preuve est d'ordre public :

A) vrai, on ne peut jamais y déroger


B) faux, il est possible d'y déroger
3 – Suite à un conflit de voisinage, Monsieur Ndiaye et Madame Diop viennent vous
consulter – tout l'immeuble sait que vous êtes étudiant en droit. Monsieur Ndiaye,
garagiste de son état, réclame le paiement de travaux effectués sur la voiture de sa
voisine en arguant qu'elle doit justifier qu'elle avait bien commandé les réparations.
Celle-ci affirme qu'il méconnait les règles relatives à la charge de la preuve. Votre
réaction :

A) outré(e) : chaque mois, c'est la même histoire ( la voiture de Madame Diop est très
ancienne ). Et chaque mois vous leur rappelez que c'est bien votre voisine qui a raison. C'est à
Monsieur Ndiaye de prouver l'obligation dont il réclame l'exécution

B) révolté(e) : en vertu de l'adage Actori incumbit probatio, traduisant l'alinéa 1er de l'article

9 du COCC, c'est à Madame Diop de démontrer qu'elle a payé et qu'elle s'est libérée de son
obligation

89
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

C) agacé(e) : en application des dispositions du Code de procédure civile, chacun doit


prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention

4 – Votre oncle est très consciencieux et tient un livre de ses dépenses. Suite au nettoyage
de son manteau de jeunesse, il doit verser une somme importante au teinturier. Il
prétend avoir déjà effectué le paiement, et en veut pour preuve qu'il a noté dans son
livre de dépenses :

« jeudi 23 octobre, 150 000francs payés à la teinturerie Tachetache » :

A) la présentation de son livre de dépenses vaut preuve, d'autant qu'il s'agit d'un écrit

B) la présentation de son livre de dépenses ne vaut pas preuve

5 – La preuve par témoins consiste en :

A) la déposition en justice par les témoins de ce qu'ils ont entendu d'autres personnes au sujet
de l'affaire en cause

B) la déposition en justice par les témoins des faits dont ils ont personnellement
connaissance

6 – En matière de faits juridiques, la règle est :

A) la recevabilité de la preuve par témoins

B) l'irrecevabilité de la preuve par témoins

7 – Abdou a vendu son matériel hi-fi à son ami, pour une valeur de 20 000francs. Un
écrit est-il nécessaire ?

A) oui

B) non

8 - Il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toute convention
dont l’objet excède 20 000 francs, et il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et
outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis
les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre. L'interdiction de
prouver contre et outre un écrit par des témoins, issue de l'article 14 COCC, concerne :

A) tous les actes écrits, quel qu'en soit le montant

B) uniquement les actes écrits dont le montant est supérieur à 20 000 francs

9 – Mari est embêtée : étudiante en droit, elle a reçu un mail de sa famille lui posant une
question en droit de la preuve. Son père a signé un contrat comportant une clause qui
écarte l'exigence d'une preuve littérale et impose la preuve par témoins et
photographies. Ses cours remontant à sa première année, elle hésite sur la réponse à

90
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

donner et recherche sur des sites juridiques la réponse. Voici ce qu'elle trouve, elle se
demande quelle proposition est exacte :

A) « pas de souci, l'article 14 du COCC n'est pas d'ordre public ! Tu peux tout à fait stipuler
autre chose »
B) « mais si c'est dans le cadre d'un contrat de consommation, tu es obligé de garder la preuve
par écrit non ? »
C) « depuis quand l'article 14 peut être écarté ?! Retourne à la fac »

10 – Aissatou commerçante vend des vases. Elle s'est notamment engagée à vendre à un
de ses clients, Modou, particulier, une centaine de vases motifs baroques. Quelles règles
de preuve sont applicables, dans le cas où Aissatou ne s'exécute pas et dans celui où
Modou, ne s'exécute pas ?

A) Modou peut prouver par tous moyens son engagement

B) Modou doit prouver l'engagement par un écrit

C) Aissatou peut prouver par tous moyens son engagement

D) Aissatou doit prouver l'engagement par écrit

Dissertation

Sujet : la preuve des actes juridiques

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

Résoudre le cas pratique suivant

Pathé est un jeune étudiant qui n’a jamais aimé les études. Apres le BAC, il est orienté en
droit mais il refuse de poursuivre ses études parce qu’il veut partir en France. Ce pendant, son
ami Madi le convainc de poursuivre ses études de droit parce qu’avec le droit on peut
facilement réussir soit en devenant avocat, magistrat ou conseiller juridique. Convaincu, Pathé
accepte de rester et emprunte 300 000 frs CFA à un autre ami Ciss pour financer ses études.
A l’échéance, Ciss réclame son argent Pathé, mais ce dernier soutient qu’il s’agissait d’un
cadeau offert par Ciss qui venait de percevoir son premier salaire.

A qui incombe la charge de la preuve ? Par quels moyens doit-il prouver ?

Par ailleurs Khady, une étudiante sachant que Pathé est un Play boy qui n’aime pas être
dérangé, lui conseil de louer un appartement à la VDN. Apres avoir visité l’appartement,
Pathé décide de le louer le 5 mars 2010 à 250 000frs CFA par mois. Le bail conclu pour une
durée de 5 ans a été constaté par acte sous seing privé. Le 5 mars 2013 le législateur
intervient par une nouvelle loi qui limite le taux des loyers maximum à 100 000 frs CFA et
prévoit aussi dans cette même loi que lorsque le montant du loyer excède 90 000frs CFA, le
bail doit à peine de nullité être constaté par acte authentique.

A quel taux Pathé doit il payer les loyers qui reste, ensuite le contrat conclu par Pathé est il
toujours valable après l’entré en vigueur de la nouvelle loi ?

Ensuite, Pathé est très content parce qu’il a eu écho qu’un de ses amis encadreur aux cours de
renforcement M. Badiane est devenu un très grand avocat. Sachant qu’un de ses amis étudiant
Amadou est traduit en justice pour vol, il saisit Badiane pour le défendre. Devant le tribunal
de première instance Amadou est condamné à 6 mois d’emprisonnement ferme. Son avocat
Badiane interjette appel. Mais avant que les juges d’appel ne statuent, une loi nouvelle
intervient et réduit le vol à 3 mois. Badiane est très content car il est persuadé que la peine de
son client va bientôt être réduite mais un de ses amis M. Samb soutient le contraire, car selon
lui, l’étudiant est déjà jugé et condamné et qu’il ne peut plus bénéficier de la nouvelle loi

Que vous inspire cette situation ?

En outre après la vente d’un terrain à usage agricole, le vendeur vient récupérer des biens s’y
trouvant, mais à propos desquels le contrat de vente n’apporte aucune précision.

Ces biens se composent de tracteurs loués, d’instruments aratoires et de vache servant à la


production de lait et à la fertilisation des sols.

L’acquéreur s’oppose fermement à la récupération de ces biens

Ces biens sont- ils inclus dans la vente ?

92
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR Année universitaire 2011/2012


LICENCE 1EN DROIT
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES
ET POLITIQUES
SESSION DU 1er SEMESTRE
GROUPEB
SESSION DU 1erSEMESTRE

INTRODUCTION AU DROIT
ETUDIANTS QUI FONT T. D. EN INTRODUCTION AU DROIT

Exercice: Résoudre les cas pratiques fictifs suivants


Cas n° 1

Un délinquant est poursuivi pour crime de parricide. Un tel crime est sanctionné par la mort
d'après la loi applicable au moment de la commission de l'infraction. A la veille de la session
de la cour d'assises qui doit le juger, est entrée en vigueur une loi portant abolition de la peine
de mort.
La peine maximale pour les infractions les plus graves est désormais l'emprisonnement à
perpétuité.

Quelle est la peine encourue par le délinquant?

Cas n°2

Mme TERRE a vendu à M. SPECUL une de ses maisons. M. SPECUL a constaté avec
surprise que la dame TERRE est venue récupérer des biens qui s'y trouvaient au moment de la
vente et à propos desquels le contrat n'a rien précisé.
Ces biens litigieux sont constitués d'un cocotier planté au milieu de la cour, d'un divan posé
dans un salon, d'une glace scellée dans le mur par un locataire.

Quels sont les biens inclus dans la vente?

Cas n° 3

M. CHACAL prête à Mme FAILLITE le montant de 125000 francs. Mme FAILLITE, qui a
promis de payer si elle reçoit sa .pension alimentaire, a consenti à signer une reconnaissance
de dette. Mais M. CHACAL l'en dissuade au motif qu'il a confiance en elle. A l’échéance,
Mme FAILLITE refuse de payer en niant la créance.

Sur qui pèse la charge de la preuve?

Une lettre missive émanant de la femme de M. CHACAL faisant état de l'existence de la


créance litigieuse peut-elle être produite comme moyen de preuve du prêt?

93
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR Année universitaire 2012/2013


FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES LICENCE 1 EN DROIT
ET POLITIQUES SESSION DU 1er SEMESTRE
GROUPE A
INTRODUCTION A L'ETUDE DU DROIT
(Durée: 3 H)

Résoudre le cas pratique suivant:

Après une longue période de chômage, Assane, un ingénieur informaticien très doué, a pu
trouver un emploi dans une société de téléphonie. En septembre 2010, pour payer les frais
d'inscription universitaire de son fils aîné, la seule solution qui s'offrait à lui était de solliciter
un prêt bancaire d'un montant de trois millions de francs 'CFA (3 000 000 FCF A) à un taux
d'intérêt de Il %. Pour avoir le prêt bancaire, il lui a fallu hypothéquer la ferme héritée de son
grand gère paternel. Il avait d'ailleurs réussi à la valoriser. En effet, l'exploitation comptait
finalement cinquante (50) vaches laitières et vingt (20) moutons, sept (7) hectares de terre
cultivés en foin, de la volaille et un hangar pour garder le matériel agricole et stocker le foin.
Identifiez la nature de chacun des biens en question
Précisez les biens concernés par l'hypothèque
Assane vit le calvaire mais il a une lueur d'espoir que soient allégées ses charges financières
auprès de la banque avec la promulgation, le 02 juillet 2012, d'une loi qui plafonne le taux
d'intérêt des prêts à 9%.
A-t-il raison de croire au rabais du taux d'intérêt initial?
Par ailleurs, à l'occasion de la fête de tabaski, Assane avait vendu cinq (5) de ses moutons à
un revendeur, ami et confident de longue date de son père, pour soixante dix mille francs
(70 000 F CFA) la tête en présence de deux de ses voisins. Aucun écrit n'a été rédigé. Le
revendeur devait payer après la fête. Interpellé par Assane deux mois plus tard, ce dernier
estime qu'il ne s'agissait que deux moutons pour trente mille francs (30 000 frs CFA) la tête.
Assane saisit le juge.
Sur qui pèse la charge de la preuve?
Assane aura t-il raison devant le juge?

Bonne chance
.,

94
COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

INTRODUCTION AU DROIT
(Durée: 3 H)
SUJET POUR LES ETUDIANTS QUI FONT T. D. EN DROIT CIVIL
SESSION DE RATTRAPAGE 2012-2013
GROUPE B
1. Epreuve pour les étudiants qui n'ont pas validé le premier semestre
Sujet: Résoudre le cas pratique suivant:

Devant se marier le 14 février 2013, PIERRE conclut un contrat de bail à usage d'habitation,
le 28 janvier de la même année, pour une durée de 3 ans renouvelable. Le contrat prévoit un
loyer mensuel de 175000 francs pour la jouissance d'un appartement comportant une chambre
et un petit salon.
En janvier 2014, entre en vigueur une loi tendant à moraliser les baux à usage d'habitation.
Cette loi prévoit une réduction de 29% pour les baux dont le loyer mensuel est inférieur ou
égal à 150 000 francs.
PIERRE consulte sa nièce: étudiante en Licence 2 de Droit, pour savoir si son contrat est
concerné par la baisse des loyers. Sa nièce lui répond ceci:

a) Le bail étant un contrat, seule la volonté commune des parties peut modifier le prix du
loyer. Autrement dit, le législateur ne peut pas intervenir avant le renouvellement du contrat;
b} Et si jamais, il devait bénéficier de la baisse des loyers, le bailleur doit lui restituer le
surplus des 175000 perçus depuis février 2013.
Que pensez-vous des réponses données par la nièce de PIERRE ?
Par ailleurs, PIERRE avait prêté de l'argent à un collègue de bureau en présence de leur
patron. A l'échéance, le collègue bénéficiaire refuse de payer au motif qu'il ne doit rien.

Quelles devraient être les réponses de la nièce de PIERRE relativement aux questions
suivantes :
a) Sur qui pèse la charge de la preuve?
b) Dans quelle mesure hl preuve par témoignage est elle recevable, étant entendu que le
montant du prêt litigieux est de 120 000 francs?

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

SEANCE 4
Thème : application de la loi
Sous thème : conflits de lois dans le temps
Exercice: faire les cas pratiques

Cas n°1

Khady, une jeune villageoise qui a quitté le collège après son échec au BFEM vient en ville
pour travailler comme domestique. Pendant deux années, elle est payée 25.000 F CFA (vingt
cinq mille francs CFA le mois. Un jour, à la radio, elle apprend qu'une loi nouvelle est en
vigueur depuis, des mois et qu’elle prévoit un salaire minimum de 35. 000 F CF A (trente cinq
mille francs CFA) pour tout travailleur. Au retour de son employeur, Khady le-lui fait-savoir
et lui demande sur le champ une augmentation 10 000 F CFA (dix mille francs CFA). Mieux,
elle lui demande de lui rembourser le surplus de 10.000 F CFA. (dix mille francs CFA) par
mois pour les deux années déjà écoulées.
Qu'en pensez-vous?

Cas n°2

Modou est un farouche opposant politique; il ne se lasse jamais d'afficher dans des endroits
publics des tracts contenant des messages hostiles au pouvoir en place. Un jour, il est surpris
et appréhendé par un agent de police pour affichage illégal. Après jugement, il est condamné à
1 mois de prison. La semaine suivant sa condamnation, entre en vigueur une loi qui
dépénalise l'affichage illégal. Son avocat confiant, lui apprend qu'il va bientôt être libéré.

Sur quels arguments se fonde ce dernier?

Cas n°3

Mor Thiam est inquiet. Lors d'une discussion à la place du village, un étudiant en sciences
juridiques venu en vacances, lui a appris avait été voté une loi interdisant la polygamie au-
delà de 2 épouses sous peine d'emprisonnement. Mor Thiam, qui, déjà, avait 3 épouses, a
deux craintes majeures. Il envisageait de convoler en quatrième noce le mois suivant; son
projet a-t-il des chances d'aboutir ?

D'un autre côté, le jeune étudiant en droit lui a fait savoir qu'il devait divorcer d'avec l'une de
ses trois épouses sous peine de violer la loi ? Ce dernier a-t-il raison?

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UCAD- F. S. J. P. - LICENCE 1- GROUPE A


INTRODUCTION AU DROIT 1DROIT DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE

(Durée: 3 H)

Pour celles et ceux gui ont la matière en TD : Cas pratique

Le 12 décembre 2012, l'Assemblée Nationale vote une loi qui dispose en son article premier
que tout enfant qui naît d'un père ou d'une mère de nationalité sénégalaise est sénégalais.
Cette disposition abroge la disposition de la loi antérieure selon laquelle seul l'enfant né d'un
père sénégalais est sénégalais. L'enfant né d'une mère sénégalaise et d'un père étranger ne
pouvait acquérir la nationalité sénégalaise qu'à sa majorité et à condition d'en faire la demande
avant l'âge de 25 ans.
L Penda Diop Ndiaye, de nationalité sénégalaise, vous consulte pour savoir si, à partir de
l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sur la nationalité, sa fille Khadija Tall, née en 2009 d'un
père mauritanien, pourra avoir un certificat de nationalité sénégalais.

2. François Gomis, un jeune homme de 30 ans, de mère sénégalaise et de .père Bissau-


guinéen, vous consulte pour savoir s'il peut prétendre à l'application des dispositions de la loi
nouvelle alors qu'il a laissé passer le délai qui lui était imparti par la loi précédente pour
demander la nationalité sénégalaise.
Le deuxième article de la loi du 12 décembre 2012 dispose que le conjoint étranger d'un
Sénégalais pourra déposer à tout moment une demande d'obtention de la nationalité
sénégalaise dès que le mariage aura eu plus de deux ans d'existence. Cet article abroge la
disposition de la loi précédente selon laquelle l'époux d'une femme de nationalité sénégalaise
devait attendre au moins cinq ans avant de déposer une demande d'obtention de la nationalité
sénégalaise; tandis que l'épouse d'un Sénégalais obtenait automatiquement, dès
l'enregistrement de son mariage, la nationalité sénégalaise.

3. Ibnou Samaké, de nationalité sénégalaise, qui s'est marié le 1er décembre 2012 avec Marie-
Jeanne Blanchard de nationalité française veut savoir si, dès son entrée en vigueur, la nouvelle
loi sera applicable à son épouse ou si cette dernière peut continuer à bénéficier des
dispositions de la loi ancienne.

4. Penda Diop Ndiaye qui s'est mariée le 3 mars 2009, à la Mairie de Pikine, avec Maciré Tall,
de nationalité mauritanienne, vous consulte pour savoir à quelle date son mari pourra déposer
une demande d'obtention de la nationalité sénégalaise.

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INTRODUCTION A L’ETUDE DU DROIT

Cas n° 1
Le 15 Octobre 2003, Birane et Ousmane ont conclu par acte sous seing privé un contrat de
bail à usage d’habitation d’une durée de 5 ans. Le montant du loyer mensuel est fixé par les
deux parties à 290 000 frs/ mois
Le 15 juin 2005, le législateur qui a voulu mettre fin aux prix prohibitif des bailleurs, a fixé un
plafond à 150 000 frs/ mois pour un bail de cette nature. Dans la même loi figure une nouvelle
disposition selon laquelle « tout bail à usage d’habitation dont le montant dépasse 100 000frs
/mois doit faire l’objet d’un acte notarié à peine de nullité ».
1°/ A quel montant le locataire Ousmane doit il payer les loyers qui restent à courir après
l’entrée en vigueur de la nouvelle loi ?
2°/ Le bail liant Birane à Ousmane est il valable après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi ?

Cas n°2
La semaine dernière Demba a brulé un feu rouge et le policier qui l’a interpellé et a dressé un
constat l’a prévenu qu’il serait convoqué au tribunal et qu’une telle infraction était passible
dune amende et d’un retrait de permis de conduire. Mai il a entendu dire que le gouvernement
envisageait de supprimer la sanction lorsqu’il n’y avait pas de récidive et qu’il s’agissait donc
de la première infraction de ce genre.

1°/ Il vous demande si il pourrait bénéficier de cette reforme si celle-ci était votée avant
qu’elle ne soit jugée.

2°/ que se passerait-il si cette reforme était votée après sa condamnation définitive ?

Cas n°3
En 1993 M. Sommeil est victime d’un grave accident de la circulation qui lui a provoqué une
commotion cérébrale. Ce qui nécessite une greffe de la moelle épinière. C’est ainsi que son
médecin conseil à sa famille d’acquérir ledit organe auprès de M. Bonnemort qui était atteint
d’un cancer irréversible. Ce dernier qui avait besoin d’argent pour subvenir aux besoins de sa
famille vient vous demander si la conclusion d’un tel contrat est juridiquement possible ?

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La preuve des droits subjectifs


Exercice : Faire les cas pratiques

Cas n° 1
Pour venir en aide à son voisin qui est menacé d’expulsion pour des arriérés de loyers, Mr
baldé l’interpelle discrètement et lui prête, en espèce, une somme de 300 000 F CFA. Au bout
de 3 mois, voyant que son voisin a acheté de nouveaux meubles, il lui réclame son argent. Ce
dernier, de très mauvaise foi, dit ne pas se souvenir d’une quelconque dette à l’égard de Mr
Baldé. Très déçu, mais aussi remonté contre son voisin, Mr Baldé l’assigne en justice et
propose à son avocat d’invoquer l’impossibilité morale.
Cet argument peut-il prospérer ?

Cas n° 2
Fatou Ndiaye est une grande commerçante qui rencontre ces derniers temps des difficultés
financières. Sa fille a obtenu le baccalauréat, et elle veut l’emmener au Canada poursuivre ses
études. Elle s’en ouvre à un autre grand commerçant, Abdoulaye qui consent à lui prêter 3
millions de francs CFA ; une reconnaissance de dette est établie par cette dernière. A
l’échéance du prêt, Fatou Ndiaye refuse de payer, car, dit-elle, Abdoulaye lui avait une fois
vendu de la mauvaise marchandise. Elle est poursuivie en justice par ce dernier. Un ami du
commerçant, juriste de formation lui fait comprendre qu’il n’a pas à apporter de preuve écrite
car il était lié à une commerçante. Cet ami a-t-il raison ?
Un des voisins, avocat, lui conseille de se servir de la reconnaissance de dette de sa débitrice.
A quel titre peut-il s’en servir ?

Cas n° 3
Dame Sarr, un père de famille est inquiet. La semaine dernière il a été victime d’un
cambriolage et le sac dans lequel étaient contenus tous ses reçus de loyers a été emporté.
Au courant de cette situation, son bailleur, un grand escroc, en profite pour le pousser à la
porte et lui réclame paiement des trois derniers mois de loyers.
Traduit devant le juge par son bailleur, Dame Sarr soutient avoir déjà payé.
Qu’en pensez-vous

Cas n° 4
Par l’intermédiaire de sa sœur qui fait ses études à Saint-Louis, Coumba fait la connaissance
de Aïta une Saint-Louisienne. Elles finissent par nouer des relations cordiales et Aïta la
sollicite pour un prêt de 7 millions. Coumba accepte et l’opération se fait par voie
électronique. Six mois après, à l’échéance du prêt, sa débitrice reste introuvable et refuse de
répondre à ses appels. Sa colère atteint le comble lorsqu’au détour d’une conversation, sa
soeur lui apprend qu’Aïta est en réalité une femme malhonnête qui a eu par le passé, à rouler
beaucoup de personnes. Elle s’en ouvre à un de ses amis avocat.
Dans quelle mesure peut-elle espérer rentrer dans ses fonds ?

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COURS DE RENFORCEMENT BADJI ET LO

DE RENFORCEMENT BADJI ET LO
REVISION DE DROIT CIVIL
CAS PRATIQUES

Cas n° 1

Bari sagne sagne achète à son voisin Bari Auto une voiture d’occasion pour la somme de
deux millions de francs. Apres avoir remis un chèque de deux millions de francs en paiement
de la voiture, Bari sagne sagne persuade son homonyme de se rendre chez un notaire afin de
faire constater la transaction par acte authentique. Chez le notaire, il est dressé un acte de
vente de la voiture de Bari Auto à Bari sagne sagne pour la somme de deux millions déjà
remise au vendeur. Quand Bari Auto se présente devant la banque pour se faire payer, le
caissier lui déclare que le compte de Bari sagne sagne est vide. Prétendant que c4est la
banque qui a fait une erreur sagne sagne qui fait le « taxi clando » avec la voiture, lui assure
qu’il va lui verser, tous les mois, 50% de ses recettes jusqu’à extinction de sa dette. Pour
apaiser son voisin, sagne sagne accepte même de coucher cet engagement par écrit et de le
signer. Harcelé par Bari Auto qui, au bout de deux paiements estime que le montant des
recettes est trop faible, sagne sagne le menace de ne plus rien lui verser car après tout il
dispose d’un acte notarié établissant qu’il a déjà payé la voiture. Bari Auto vous consulte sur
ses possibilités de contester le de l’acte authentique en cause.

Cas n° 2

Modou Modou ne sait ni lire ni écrire mais il a le sens des affaires, avec ses économies et
l’argent qu’il a emprunté à la Banque Sénégalaise de Développement (B.S.D) en donnant
son champ de mangues en garantie, il loue une cantine au marché de la capitale, où il vend
des marchandises d’importation. Au bout de quelques années, non seulement Modou Modou
a remboursé toutes ses dettes mais il est devenu un homme immensément riche et considéré.
Quand le frère de sa quatrième femme, Ka ndaw, un jeune homme entreprenant et bardé de
diplômes lui demande de l’accompagner à la B.S.D. pour l’appuyer dans sa demande de prêt,
c’est tout naturellement que Modou Modou accepte. Sur place, Modou Modou et Ka ndaw
sont introduits dans le bureau du banquier. Apres avoir expliqué le motif de leur visite,
Modou Modou signe en faveur de son beau frère un engagement de se porter caution, c'est-à-
dire de garantir personnellement le prêt de trente millions de francs que la banque consent à
Ka ndaw, pour qu’il se lance dans les affaires. A l’échéance de la dette, Ka ndaw qui n’a pas
le talent pour faire fructifier l’argent de son beau frère s’avère insolvable. La banque somme
alors Modou Modou de payer en sa qualité de caution. Mais Modou Modou refuse de
s’exécuter en arguant du fait qu’étant illettré, il ne pouvait savoir que l’accord qu’il avait
signé l’engageait à titre de caution. Il croyait juste avoir attesté que Ka ndaw était un garçon
honnête à qui la banque pouvait faire confiance car en vérité, il n’aurait jamais signé un
engagement de se porter caution si le banquier lui en avait précisé la signification, autrement
dit qu’en cas de défaillance du débiteur principal Ka ndaw, il aurait l’obligation de
rembourser à sa place. Sur de son bon droit mais néanmoins inquiet, il vous consulte afin de
savoir si la banque a des chances de gagner contre lui si l’affaire va devant les tribunaux.

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