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LES RELATIONS DE POUVOIR DANS LES ORGANISATIONS

Cette fiche présente trois approches pour appréhender les phénomènes de pouvoir dans l’organisation :

1. Les approches du leader et du leadership

• Le leader recouvre les notions de : popularité, antipathie, chef, responsable, directeur, investigateur, etc.

• Le leadership définit la capacité d'un individu à mener ou conduire d'autres individus ou organisations dans
le but d'atteindre certains objectifs. On dira alors qu'un leader est quelqu'un qui est capable de guider,
d'influencer et d'inspirer.

• Le leadership que le responsable d'un groupe exerce résulte de l'ensemble des communications
interpersonnelles par lequel il influence le comportement de ses subordonnés en les orientant vers la
réalisation de l'objectif de groupe et de l'organisation.

• Dans toutes les organisations, il y a des leaders formels, choisis par la hiérarchie, qui occupent des postes de
responsabilité. Il y a aussi des leaders informels qui jouent un rôle plus ou moins important dans le
fonctionnement des groupes de travail auxquels ils participent. L’organisation doit canaliser la participation
de ces leaders informels pour accroître la cohésion, l’efficacité des groupes de travail (ce qui peut aussi tendre
à laisser s’organiser un contre-pouvoir).

1.1. Les styles de leadership d’après les expériences de Lewin

Kurt Lewin distingue trois formes de leadership :

 En premier lieu, le leadership autoritaire qui se tient à distance du groupe et use des ordres pour
diriger les activités du groupe.

 En second lieu, le leadership démocratique qui s’appuie sur des méthodes semi-directives visant à
encourager les membres du groupe à faire des suggestions, à participer à une discussion ou encore à
faire preuve de créativité.

 Enfin, le leadership laisser-faire qui ne s’implique pas dans la vie du groupe et qui participe au strict
minimum aux différentes activités.

Des expériences en psychologie sociale ont montré les liens qui existent entre le style managérial (les
« chefs », la direction les cadres), le climat relationnel et la productivité de l’organisation.

Styles de leadership « Climat » Productivité

Autoritaire Tendu et individualiste avec alternance Elevée quantitativement mais


(directif) d'inertie et d’agressivité uniforme, banale et dépendante du
leader

Démocratique Positif et cohésif, coopération interne, Elevée qualitativement mais


(semi-directif) coopération-compétition externe hétérogène, originale et peu
dépendante du leader

Laisser-faire Agité, peu cohésif, facilement agressif Mauvaise et irrégulière en quantité


(non-directif) en externe comme en interne et qualité

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1.2. Les styles de leader selon Tannebaum et Schmidt

Robert Tannenbaum et Warren Schmidt reprennent le schéma de Kurt Lewin et établissent un continuum de
sept types de commandement des groupes entre le leadership laisser-faire et autoritaire.

1. Le responsable prend des décisions et les fait appliquer (style autoritaire).

2. Le responsable cherche à "vendre" ses décisions à ses subordonnés.

3. Le responsable présente ses idées et demande à chacun de présenter les siennes.

4. Le responsable présente une décision conditionnelle qu’il se déclare prêt à changer.

5. Le responsable présente les problèmes, recueille des suggestions et prend sa décision.

6. Le responsable définit les limites dans lesquelles la décision doit s’insérer et laisse le groupe arrêter la
décision à l’intérieur de ces limites.

7. Le responsable laisse le groupe libre de décider tant que certaines règles sont respectées : temporelles,
quantitatives, financières... Le responsable n’exerce plus d’autorité (autogestion par le groupe lui-même).

2. Les treize jeux de pouvoir selon Mintzberg

Nature du jeu Forme du jeu

Jeux pour contrer l’autorité Jeux de l’insoumission

Jeux pour contrer l’opposition à l’autorité Jeux pour combattre l’insoumission

Jeux pour construire les assises du pouvoir Le jeu du parrainage

Le jeu de la construction d’alliances

Le jeu de la construction d’empires

Le jeu de la budgétisation

Le jeu des compétences spécialisées

Le jeu de l’autoritarisme

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Jeux pour vaincre les rivaux Le jeu de bataille entre les directeurs de la ligne
hiérarchique et de ceux des fonctions de support logistique
ou de la technostructure

Le jeu de la rivalité entre deux camps

Jeux pour mettre en place des changements Le jeu des candidats à un poste stratégique
organisationnels
Le jeu du coup de sifflet

Les jeux des jeunes Turcs.

Les jeux de l’insoumission


Joueurs : centre opérationnel.
Raisons : résister aux autres.
Moyen : révolte, contestation. Les acteurs qui mènent ce jeu refusent d’obéir à l’autorité, s’opposent aux
compétences spécialisées, ne suivent pas l’idéologie de l’organisation.

Les jeux pour combattre l’insoumission


Joueurs : les niveaux hiérarchiques supérieurs.
Raisons : contrer l’insoumission.
Moyens : renforcer l’autorité, améliorer le système de contrôle, imposer des règles plus strictes, et infliger des
sanctions plus lourdes.

Le jeu du parrainage
Joueurs : tous les types d’acteurs.
Moyens : se rapprocher de son supérieur hiérarchique. Cette relation repose sur un contrat implicite de loyauté
entre ces deux membres. Souvent, il y a échange d’un service en contrepartie d’un transfert de pouvoir.

Le jeu de la construction d’alliances


Joueurs : entre pairs (managers, centre opérationnel).
Moyens : il consiste à mettre en place des contrats implicites de soutiens mutuels.

Le jeu de la construction d’empires


Joueurs : managers de la ligne hiérarchique
Moyens : se joue individuellement. Ce jeu est développé par un individu isolé qui cherche à étendre son
pouvoir sur d’autres membres de l’organisation en dehors de son champ de compétence ou de responsabilité.
Cette recherche du pouvoir s’accompagne de la volonté de contrôle sur différentes unités de l’organisation.

Le jeu de la budgétisation
Joueurs : managers de la ligne hiérarchique.
Moyens : les responsables d’unités cherchent à augmenter les budgets qui leur sont alloués. Du budget dépend
le nombre de postes créés, et donc la zone de pouvoir du responsable.

Les jeux de la compétence spécialisée


Joueurs : les experts
Moyens : les membres de l’organisation s’appuient sur leur savoir et connaissances spécifiques pour asseoir
leur pouvoir sur les subordonnés. L’objectif est d’être reconnu par les autres membres de l’organisation
comme un spécialiste. Ils s’efforcent pour cela de rendre leur compétence mythique et inaccessible aux autres
membres de l’organisation d’un niveau inférieur.

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Le jeu de l’autoritarisme
Joueurs : managers-experts-hierarchie.
Moyens : exercice de l’autorité sur des personnes qui n’en ont pas. Le comportement des joueurs consiste à
considérer avec condescendance les autres membres de l’organisation soumis à leur influence. Le pouvoir
légitime est alors utilisé de manière illégitime.

Le jeu de bataille entre les directeurs de la ligne hiérarchique et ceux des fonctions du support
logistiques ou de la technostructure
Joueurs : ligne hiérarchique contre personnels du support logistique ou technostructure.
Moyens : le but du jeu est de renforcer le pouvoir des cadres d’une partie spécifique de la structure. L’objectif
n’est pas d’augmenter le pouvoir personnel d’un individu, mais de conforter la position d’un ensemble de
personnes ou d’une fonction au sein de la structure. Utilisation du pouvoir légitime d’une manière illégitime.

Le jeu de la rivalité entre deux camps


Joueurs : 2 unités, 2 personnes, 2 missions, etc.
Moyens : jeu en deux temps, un premier temps de construction d’empires et d’alliances. Un second temps
d’affrontements. L’objectif est de prendre le contrôle du pouvoir sur l’autre camp.

Le jeu des candidats à un poste stratégique


Joueurs : toutes les parties des bases de l’organisation
Moyens : c’est une combinaison des autres jeux tels que les jeux d’alliances, de camps rivaux. C’est
l’ensemble des actions développé par un individu ou un groupe pour promouvoir un changement stratégique
de l’organisation en s’appuyant sur d’autres jeux. Untel et untel s’affrontent et ont chacun leurs défenseurs, si
un troisième se présente au milieu, il sera aimé de tous et tire ainsi partie des autres jeux.

Le jeu du coup de sifflet


Joueur : une personne en bas de la hiérarchie (centre opérationnel).
Moyens : le joueur va alors porter une information sur un comportement illégal ou amoral d’autres membres
de l’organisation à des détenteurs d’influence extérieure, et il remet en cause la légitimité de ceux dont les
comportements sont déviants.

Le jeu des jeunes « Turcs »


Joueurs : petit groupe proche du pouvoir central.
Moyens : les protagonistes de ce jeu visent un changement radical de l’organisation et de sa structure. En fait
il s’agit d’une forme de rébellion contre le pouvoir établi au sein de l’organisation. Par jeunes « Turcs » on
entend en général des cadres de niveau intermédiaire qui désirent accéder au niveau le plus élevé de pouvoir.
L’objectif est ici d’isoler le leadership et de remettre en question le pouvoir légitime.

3. L’analyse stratégique de Crozier et Friedberg

3.1. Les postulats

Cette analyse considère que :


 Tout membre de l’organisation est un acteur social détenteur d’un certain pouvoir.
 L’organisation est vue comme un lieu où les relations de pouvoir sont primordiales.

L’organisation sociale n’est pas considérée ici comme une donnée naturelle, comme elle l’est comprise dans
l’approche de Mintzberg au travers de l’influence de la structure, mais plutôt comme un construit social.

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Les auteurs partent de trois postulats :

1. Les êtres humains n’acceptent jamais d’être traités comme des moyens au service de buts fixés par les
dirigeants pour une organisation.

2. Tous les acteurs d’une organisation sont relativement libres, capables de décision et disposent d’une marge
d’autonomie mais ils sont tous interdépendants et sont soumis à des contraintes.

3. Dans les jeux de pouvoir, les stratégies sont toujours rationnelles mais l'acteur dispose d'une rationalité
limitée. La stratégie se définit quant à elle selon d’autres postulats :

a. L'acteur n'a que rarement des objectifs clairs et encore moins des projets cohérents.

b. Même si l’acteur est toujours contraint et limité, il ne l’est jamais totalement.

c. Ce comportement a toujours un sens. Cette rationalité est liée, non à des objectifs clairs et
explicites, mais s'organise par rapport à des opportunités (contexte) et par rapport aux
comportements des autres acteurs.

d. Ce comportement présente un double aspect : un aspect offensif, (la saisie d'opportunités en vue
d'améliorer sa situation) et un aspect défensif (le maintien et l'élargissement de sa marge de
manœuvre).

e. Il n'y a donc plus de comportement irrationnel : c'est là l'utilité du concept de stratégie. Derrière les
humeurs et les réactions affectives, il est en effet possible à l'analyste de découvrir des régularités, qui
n'ont de sens que par rapport à une stratégie.

3.2. Concepts clés de l’analyse


3.2.1. Le pouvoir et la marge de manœuvre

L’organisation est ici le royaume des relations de pouvoir, de l’influence, du marchandage et du calcul et
comme un construit humain qui n’a pas de sens en dehors des rapports de ses membres. Les auteurs cherchent
à comprendre les possibilités de certains individus à agir sur d’autres individus ou groupes. Dans ces relations
de pouvoir les contraintes cohabitent avec une part de liberté, une marge de manœuvre, qui est à défendre, à
gagner, à élargir au moyen de la négociation. Le pouvoir de chacun est sa capacité à faire régner l’incertitude
sur le fait qu’il va exécuter ou non une action ou fournir ou non l’information et s’il va le faire correctement.
Plus l’individu sera perçu comme libre de faire ou de ne pas faire, par les autres, plus l’incertitude qu’il fait
régner est importante, plus il est libre et plus il peut obtenir des autres des conduites conformes à ses objectifs
et plus il a donc de pouvoir. Le pouvoir maximum va à ceux qui contrôlent les incertitudes les plus cruciales
pour l’organisation.

Le pouvoir peut s'inscrire dans un cadre formel : un responsable hiérarchique dispose de pouvoirs formels
dans la mesure où il a l'attribut de la décision ultime. A ce niveau, il possède donc une autonomie de décision.
L'autonomie peut aussi être contenue implicitement dans la définition de la fonction des acteurs. Le pouvoir
n’est plus uniquement à considérer en fonction des leaders, du sommet hiérarchique mais en fonction de ceux
qui maitrisent l’incertitude. L’analyse stratégique part du principe que les acteurs agissent pour améliorer leur
capacité d'action et/ou s'aménager des marges de manœuvre, des zones d’autonomie.

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3.2.2. Les zones d’incertitude


Toute organisation est soumise à des multitudes incertitudes. Les zones d’incertitude sont souvent liées à
l’environnement de l’organisation : changement de techniques de production, de communication, de
distribution, de l’évolution des marchés, du recrutement de nouveaux membres… Certains acteurs vont alors
prendre en compte et maitriser ces relations incertaines entre l'organisation et son environnement.
Selon l'Analyse stratégique, on peut distinguer quatre grandes sources de pouvoir correspondant aux
différents types de source d'incertitude.

 1ère source d’incertitude : liée à la possession d'une compétence ou d'une spécialisation


fonctionnelle difficilement remplaçable.
L'expert possède seul le savoir nécessaire pour surmonter des problèmes cruciaux : il pourra alors négocier
des avantages. Notons que cette expertise est bien sûr relative, mais beaucoup d'acteurs ont un monopole
parce que leur remplacement est trop coûteux pour l'organisation.

 2ème source d’incertitude : liée aux incertitudes venant des relations entre l'organisation et son
(ses) environnement(s).
Il faut prendre en compte ici les environnements pertinents, sources potentielles de perturbations. Individus et
groupes peuvent avoir, au sein de l'organisation un pouvoir considérable par leurs appartenances multiples,
leur capital de relations dans tel ou tel segment de l'environnement. C’est le pouvoir d'un acteur qui est partie
prenante de plusieurs systèmes d'action en relation les uns avec les autres (liens extérieurs avec des
journalistes, des personnages politiques, etc.).

 3ème source d’incertitude : liée à la façon dont l'organisation organise la communication et les flux
d'information entre ses unités et ses membres.
Pour bien faire sa tâche, un individu aura besoin d'informations détenues par d'autres que lui, et dont il
dépend. Cette communication peut être interne ou externe. Selon où l’on se situe sur la chaîne
organisationnelle, on peut court-circuiter, déformer l'information.

 4ème source d’incertitude : liée à la connaissance et à l'utilisation des règles organisationnelles.


Si les règles sont en principe destinées à supprimer les sources d'incertitudes, elles ont, dans le concret, l'effet
d'en créer de nouvelles. Ainsi la règle, vue comme moyen de contrôle par le supérieur peut aussi être utilisée
comme une protection par le subalterne. Les acteurs peuvent utiliser les règles à leur avantage face à ceux qui
les connaissent peu (si on est réputé connaître la règles, c'est nous que l'on vient voir).

Références bibliographiques

BERNOUX, P. (2004). Sociologie du changement dans les entreprises et les organisations. Paris : Seuil

CROZIER, M. & FRIEDBERG, E. (1977). L’acteur et le système. Paris : Seuil

CROZIER, M. (1963). Le phénomène bureaucratique. Paris : Seuil

LEWIN, K. (1975). Field Theory in Social Science. US/Mountain : Greenwood Press, MIT.

LIPPITT, R. & WHITE, R.Une étude expérimentale du commandement et de la vie des groupes. In LEVY, A.
(1978). Psychologie sociale. Paris : Éditions Dunod.

MINTZBERG, H. (1986). Le pouvoir dans les organisations. Paris : Les Éditions d’organisation

TANNENBAUM, R. & SCHMIDT, W. (2011). How to Choose a Leadership Pattern. Ontario : Harvard
Business Review

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