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Sujet 

: Peut-on devenir étranger à soi-même ?

Il est assez fréquent, lorsque l’on commet une erreur que nous réprouvons, d’utiliser la phrase
« je n’étais pas moi-même ». Nous voulons alors que les autres nous voient comme innocent face à
un problème qui a été commis par une identité que nous revendiquons. L’étymologie latine du mot
étranger, « extraneus » signifie « qui n’est pas de la famille, du pays ». Autrement dit, c’est un mot
qui désigne une personne inconnue et qui ne reflète rien de familial ou de commun en lui. Par
définition l’« étranger » est une personne qui ne possède pas la nationalité du pays dans lequel il se
trouve ; mais cela peut aussi désigner un pays ou un ensemble de pays autre que celui dans lequel on
réside. Pour Karl Marx, c’est une conséquence immédiate au fait que l’homme est rendu étranger au
produit de son travail : l’homme est donc rendu étranger à l’homme lui-même. On définit « soi-
même » comme un pronom utilisé pour parler d’une seule et même personne en excluant les autres.
« Mais l’être soi-même, ce n’est pas l’identité personnelle », dit Claude Romano. Il s’agit d’exister en
conformité à nous-même, comme un idéal à atteindre. On peut donc se demander si nous pouvons
réellement refuser notre idéal ? Nous nous demanderons tout d’abords comment est vu un étranger
sous différents points de vues pour ensuite définir en quoi nous pouvons devenir étranger à soi-
même.

Tout d’abords, il est simple de discerner le fait que, la philosophie, rend «  étranger » celui qui la
pratique à toute forme de savoir. Les personnes que l’on considère comme étrangère à nous, ne le
seront peut-être pas au point de vue d’un autre ; tout ce qui serait extérieur à leur « maison »,
autrement dit, leur pays ou leur patrie, serait pour eux, un signe d’étrangeté, l’étranger est alors
défini négativement. Nous en venons même à rendre, à nos yeux, semblables tous ces étrangers.
Mais ceux-ci nous voient certainement de la même manière, un autre de soi qui n’est commun à
aucune de nos habitudes. C’est d’ailleurs Ben Jelloun qui dans son livre, Le racisme expliqué à ma
fille, il évoqua le fait que nous sommes toujours, tant bien que mal, étranger à quelqu’un. Pour
certains, un étranger sera celui qui ne partage pas son modèle culturel propre, ses manières
habituelles de pensées et de vie. Schutz Alfred dans son écrit l’étranger a dit que l’homme est un
hybride culturel, lors d’un voyage « vers l’étranger » il est alors quasiment marginalisé entre deux
types de vies différentes. Nous avons tous un rapport différent à l’étranger, Monsieur Sarkozy en
2011 a dit « Si ça vous gène d’être français, je ne vous retiens pas, vous pouvez partir » disait-il en
s’adressant aux dealers Français venant d’être arrêtés. Nous pouvons reprendre le titre de la préface
d’Albert Jacquart du livre :  Des monstres aux mythes « l’insupportable étrangeté de l’Autre », il fait
alors référence au fait que l’étranger ne nous est pas proche, qu’il ne fait pas partie de notre maison,
ce que nous trouvons d’étrange dans l’étranger est le fait qu’il ne soit pas moi. Par conséquent, les
visions de l’étranger diffèrent en fonction des lieux de vies et des religions, mais les opinions restent
toujours assez péjoratives, un étranger n’est pas nous, et ne peux pas l’être. Si l’on considère
l’étranger comme quelque chose d’extérieur à moi, qui n’est pas moi, il peut aussi paradoxalement
se trouver à l’intérieur de moi. Cette théorie fut démontrée par Freud dans son texte nommé
L’inquiétante étrangeté, l’étranger en nous ferait donc référence à la partie inconsciente de notre
esprit.
Les philosophes et hommes de pouvoirs en possèdent tous des avis très distingués et des points de
vue différents à propos de cet « étranger », certains se disent être d’une manière inéluctable vus
comme des étrangers, d’autres présentent l’étranger comme quelqu’un qui ne fait seulement pas
parti de notre famille, il est très difficile de trouver des avis non péjoratifs quand à notre rapport à
« l’étranger », le changement et la différence nous effraient, c’est ce qui pourrait expliquer notre
rejet de l’autre, de l’ « étranger ».
Devenir étranger à soi-même, c’est simplement prendre du recul face à nos pensées et nos
sentiments, et les interpréter d’une manière différente. Un étranger nous verra toujours d’une
manière bien différente de nous, avec un regard extérieur. Devenir un étranger à soi, c’est aussi et
surtout se mettre à la place de l’autre, se mettre en quelques sorte à la place de notre propre
étranger. Il faudra alors se voir comme il nous voit, et grâce à cela, nous pourrons alors réaliser qui
nous sommes réellement. Dès lors que nous aurons acquis la compétence de prendre du recul sur
soi, nous serons -capables de se comprendre, de s’expliquer, en d’autres termes, de se connaitre. La
connaissance de soi est une prise de conscience accrue par ce nouveau point de vue que nous
apprivoisons, tout ceci dans un but unique, devenir maitre de son corps et de son esprit, de soi, base
de la psychanalyse. Devenir est un terme vaste qui dans ce cas désigne le changement, ou bien
l’amélioration d’une capacité cérébrale ou psychique. Personne ne nait en acquérant son soi mature,
il faut devenir soi au fil des années, avec des expériences et des échecs, nous n’avons qu’un but dans
notre vie, devenir notre idéal, être ce que l’on souhaite être, et pour cela, il faut prendre conscience
de ce que nous sommes actuellement pour obtenir la capacité d’évoluer et de devenir soi-même, on
peut donc dire que devenir étranger à soi, c’est devenir soi-même. La question n’est donc pas « peut-
on » devenir étranger à soi-même, en effet, c’est ce que l’on cherche tous à faire, la recherche de
l’être parfait en nous. L’atteinte de soi de notre point de vue pourrait être lorsque l’on devient sage
et que la vie ne nous réserve plus de surprise, mais est-ce vraiment ce que l’on cherche à devenir ?

Nous conclurons donc sur la question que nous nous étions posés à propos du refus de notre
idéal. Un étranger comme nous l’avons vu, est un être incertain et extérieur à notre pensée et à
notre façon d’être, malgré le fait que nous partagions la même espèce, personne ne possède la
même représentation de l’étranger, certains y verront un intru ou un être étrange, tandis que
d’autres n’en verrons que de simples voisins, nous sommes tous l’étranger de quelqu’un. Or, un
étranger n’est pas toujours extérieur à nous, il peut aussi se représenter par le soi que nous sommes
actuellement et que nous devons améliorer. Être étranger à soi-même, c’est donc prendre du recul
sur notre personnalité et nos sentiments, pour mieux se comprendre et devenir l’unique maitre de
notre esprit et atteindre notre idéal. Refuser son idéal signifierait donc, ne pas vouloir se connaitre
soi-même, ou bien rester simple d’esprit sans adopter un regard extérieur à soi qui nous permettrait
d’atteindre ce même idéal. Ainsi nous pourrions nous interroger sur la conscience de soi, la
conscience et la connaissance de soi serait-il donc synonymes ?

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