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Caravelle

Cahiers du monde hispanique et luso-brésilien

102 | 2014

Citoyenneté et formes de violence


Citoyenneté et formes de violence. La violence de genre en Amérique latine

Penser et montrer la violence :


catégories et modalités
Introduction

Maria Luisa Femenías


Translated by Michèle Soriano and Annick Mangin

p. 21-36
https://doi.org/10.4000/caravelle.735

Editor's notes
Traduction Michèle Soriano et Annick Mangin

Full text
1 Une réflexion générale s’avère toujours opportune au sujet de la violence et, en
particulier, de la violence de genre. En effet, la violence de genre et la violence
contre les femmes (nous verrons la différence) est le produit de mécanismes
complexes dont la brutalité quotidienne, subie par certaines personnes, n’est
qu’un exemple émergeant d’une trame d’autant plus difficile à démonter qu’elle
est extrêmement sophistiquée. Depuis les formes les plus habituelles de la
violence domestique jusqu’aux invisibilisations et complaisances les plus
complexes, les modalités dans lesquelles s’est tissée peu à peu la trame
idéologique de l’inégalité, de l’oppression, de la violence physique et du silence –
en tant que système structurel – ont été interprétées et légitimées de diverses
manières.
2 Ceci étant, pour pouvoir aborder la violence en tant que phénomène structurel
– davantage que comme le problème d’un ou plusieurs individus – il est
nécessaire de travailler à partir de cadres théoriques et méthodologiques qui
permettent d’analyser et de mettre en lumière les modalités systématiques selon
lesquelles elle est produite, articulée et masquée. Son occultation est opérée
grâce à une trame dense de conceptualisations élaborées au long des siècles et
dont la construction n’est étrangère ni à la philosophie ni à la science. Ces
construits systématiques – que nous appellerons mégarécits de légitimation
patriarcale – ont donné leur fondement et leur légitimité aux rapports de
hiérarchie et d’inégalité entre hommes et femmes  ; en général, en les
interprétant comme un sous-produit nécessaire des caractéristiques naturelles
de chaque sexe.
3 Il a fallu un travail d’analyse de grande envergure et la récupération de la
mémoire historique des femmes (dans des travaux qui ont transcendé les
frontières et les positions politiques) pour mettre en lumière les mécanismes
d’exclusion et les trames de la discrimination dont la violence physique est – si
l’on veut – la face la plus crûment et cruellement visible. Pour désarticuler ces
mécanismes et les arguments qui les soutiennent, il a fallu construire un
ensemble de théories qui méthodologiquement permettent l’approche d’une
série de phénomènes (plus ou moins graves) que, pour le moment, nous
appellerons sexisme. Donc, le sexisme est tout type de discrimination qui prend
comme base le sexe de la personne. Bien qu’en principe le sexisme puisse se
produire à l’égard de n’importe quel sexe, historiquement et de façon écrasante,
il a été mené contre les femmes.
4 Pour rendre compte du sexisme contre les femmes, dans presque toutes les
époques, des théories explicatives basées sur les philosophies en usage ont été
développées, dans un effort pour désactiver les présupposés sexistes ou racistes.
Nous voulons ainsi attirer l’attention sur le fait – invisibilisé de façon récurrente
– qu’il y a toujours eu, sous diverses formes, des revendications liées aux droits
des femmes et des dénonciations des formes de violence exercées à leur
encontre. Cependant ce n’est qu’au xxe siècle, par suite de l’entrée massive des
femmes dans les universités qu’a été réuni un corpus significatif de travaux
interdisciplinaires. Il s’agit en vérité d’un corpus visible d’argumentaires
explicatifs et de termes théoriques qui aident à analyser, à partir d’un autre
point de vue, le phénomène de la violence ainsi que les modalités et les niveaux
dans lesquels elle est produite.
5 Pour mieux poser le questionnement qui nous intéresse, nous ferons
brièvement référence à quelques termes théoriques grâce auxquels ont été
rendues visibles les modalités d’exclusion des femmes, ce qui permettra ensuite
le questionnement, la critique, l’analyse et l’approche générale de ce que nous
avons appelé «  violence de genre et violence contre les femmes  », phénomènes
qui se produisent – c’est bien connu – dans toutes les couches socio-culturelles et
économiques.

Quelques concepts préalables


6 Comme on le sait, il incombe à la Théorie du genre d’investiguer sur les modes
structurels d’invisibilisation, d’occultation et de délégitimation des femmes. Il
s’agit d’une discipline transversale qui montre comment est produite et comment
est légitimée – très souvent par forclusion – la discrimination de sexe-genre : pas
nécessairement dans ses manifestations les plus immédiates mais dans ses
formes structurelles, légales, philosophiques, scientifiques, en explorant des
modalités d’analyses, de réparation, de changement, d’inversion. En tant que
transdiscipline, elle reconnaît (i) un plan factuel, « l’expérience des femmes » ou
univers expérientiel, comme source de réflexion au sujet de leur condition
passée et présente ; (ii) un plan théorique de réflexion et de conceptualisation qui
développe des questions liées à des disciplines qui, comme la psychologie ou la
sociolinguistique, ouvrent leurs analyses à la catégorie du genre  ; (iii) un plan
éthico-politique où circulent les injonctions, les stéréotypes, les normes, etc.,
tissés dans la trame sociale et dans les pratiques quotidiennes ; et enfin, (iv) un
plan méta-théorique ou philosophique qui révise de façon critique et génère des
concepts ainsi que des termes théoriques explicatifs et analyse les interactions
entre les plans mentionnés ci-dessus. La révision critique de notions comme
«  rationalité  », «  pouvoir  », «  systèmes de domination  », la resignification de
concepts comme «  patriarcat  » ou «  genre  », l’invention de notions comme
« invisibilisation systématique » ou « harcèlement sexuel » renvoient à ce plan1.

Patriarcat
7 Depuis la décennie des années 1960, on appelle «  idéologie patriarcale  » ou
«  patriarcat  » le système de domination sexe-genre qui exprime et reproduit
l’inégalité, l’invisibilisation et l’imposition de modèles ou stéréotypes socio-
culturels naturalisés, en délimitant les espaces significativement valorisés en tant
qu’espaces des hommes, aussi bien dans la sphère symbolique que dans la
sphère physique ; aussi bien dans la sphère publique que dans la sphère privée.
En outre, l’idéologie patriarcale invisibilise l’exclusion et la violence et promeut
l’omission ou le silence des femmes elles-mêmes y compris au sein des sociétés
hautement démocratisées.
8 Le nom même de “patriarcat”, resignifié par le féminisme, a gardé sa validité
même si dans les dernières décennies les lectures post-structuralistes lui ont
retiré de l’importance. Attaché à des organisations politiques, économiques,
religieuses ou sociales, il est relié structurellement, pour beaucoup d’auteurs, à la
croyance d’autorité naturelle et de supériorité hiérarchique associée aux
hommes. En ce sens, Cèlia Amorós considère que, au moins depuis la modernité,
on peut l’identifier en termes de pactes entre hommes dont les caractéristiques
sont la métastabilité et l’alliance entre classes sociales2. L’existence de ce pacte
est démontrée par l’exclusion historique des femmes aussi bien de la théorie du
Contrat (Hobbes, Rousseau, etc.) que de leur citoyenneté dans les États Modernes
constitués sur cette base jusqu’à une époque avancée du xxe siècle. Si finalement
les femmes ont accédé aux droits civils et de citoyenneté, cela a été seulement
par surcroît et après de longues luttes souvent oubliées et méprisées3.
9 Le patriarcat en tant que structure établit les cadres de compréhension qui
comportent une certaine forme de violence symbolique  : l’invisibilisation
historique des femmes dans la sphère publique et leur confinement dans la
sphère privée. Cette stratégie structurelle les a reléguées dans l’espace privé  :
espace privé de citoyenneté, privé de reconnaissance, privé de droits, privé de
voix juridique propre, privé de majorité légale, privé de salaire, etc.4 Il convient
de ne pas oublier cette délégitimation historique, car seulement dans certains
pays, et dans des temps historiques très récents, les femmes occidentales se sont
approchées d’une égalité qu’elles détiennent toujours de façon précaire.

Genre
10 Liée à une certaine tradition biologiste en Amérique du Nord, la notion de
« genre » apparaît à partir des travaux de John Money même si le concept ne s’est
pas généralisé avant la fin des années 1970. On entend généralement par
«  genre  » la forme des modalités possibles d’assignation de propriétés et de
fonctions aux êtres humains, dans les relations duales, familiales ou sociales, et
liées au sexe5 dans l’imaginaire. Dans sa version plus canonique, le « sexe » fait
référence à ce qui est « donné » (la donnée biologique) et le « genre » au construit
socio-historique que chacun de nous est. Lors de débats plus récents, il a été
soutenu que le sexe est déjà un construit culturel et que la dissociation sexe-
genre obéit à la distinction du dix-neuvième siècle entre inné et acquis. Quoi qu’il
en soit, ce qui est certain c’est que la notion de « genre » est apparue pour mettre
en lumière le degré de dépendance culturelle des rôles sexuels ainsi que les
modalités d’occultation des injonctions de genre, attachées en général au
contrôle disciplinaire du désir, et pour mettre en lumière leur puissance dans les
processus de socialisation des individus.
11 Nous sommes maintenant en mesure de pouvoir faire la distinction, comme
nous le signalions plus haut, entre la violence contre les femmes et la violence de
genre. En d’autres termes, si toute violence contre les femmes est une violence de
genre, la violence de genre ne se réduit pas à la violence contre les femmes.

Approche de la notion de violence


12 Il est admis que la notion de «  violence  » signifie «  coercition  » ou
« intimidation ». Alors qu’originairement celle-ci fut associée à la force physique,
dès la décennie des années quatre-vingt Iris Marion Young releva le défi
conceptuel de distinguer la violence structurelle et symbolique de la violence
physique6. Un peu plus tard, Bourdieu alla plus loin dans la conceptualisation de
cette notion en montrant comment le pouvoir symbolique littéralement
« construit un monde », en imposant un ordre à la réalité (nous n’aborderons pas
ici la question métaphysique de ce qu’est la réalité) ; la violence symbolique est la
violence qui s’exerce en imposant des formes, généralement en présupposant
que celles-ci sont uniques. En effet, la stratégie qui fonde l’imposition symbolique
des formes ou des catégories consiste à les comprendre comme les seules
légitimes, appropriées, convenables. De telle sorte que, ou bien on efface toute
trace des alternatives possibles, ou bien on représente ces alternatives comme
inacceptables, que ce soit pour des raisons d’éthique ou des questions de goût. La
violence symbolique s’exerce dans le champ de la croyance (ou dans le système
de croyances d’un individu) et sa forme la plus prégnante est l’ « idéologie », qu’il
s’agisse de celle qui est implicite dans le langage, ou de celle qui est explicitement
manipulée.
13 Ceci signifie que la violence symbolique isole, discrimine, enferme, engendre
des marginalités, divise, condamne et même anéantit ou extermine ; quand elle
n’agit pas directement, elle le fait au moins indirectement, sous la forme d’une
justification ou d’une légitimation de la violence physique, en général dans les
termes d’un discours pseudo argumentatif. Tout système de domination (le
patriarcat inclus) implique une violence symbolique en disqualifiant, niant,
invisibilisant, fragmentant les autres ou en utilisant de façon arbitraire le
pouvoir sur eux. La création de stéréotypes dont la généralisation est excessive,
car ils ne laissent pas de place à la manifestation des caractères individuels, peut
elle-même être comprise comme une forme de violence symbolique. Il s’agit là de
formules rigides qui empêchent la manifestation de changements, en galvanisant
ou en solidifiant un certain trait, ou une caractéristique fonctionnelle au système
de pouvoir qui l’a engendrée  : elles constituent dans une large mesure la base
matérielle des plaisanteries, des moqueries et des persécutions. Ces
simplifications aux traits figés, qui ne souffrent aucune modification ni
n’admettent aucun changement, fonctionnent comme de véritables «  camisoles
de force » sur les individus. C’est-à-dire, à la manière dont Foucault le conçoit en
inversant la formule platonicienne, les idéaux de l’âme sont la prison du corps.
Et ces idéaux sont en général des injonctions fortes, socialement instituées.

Langage, légitimation et violence structurelle


14 Nous avons déjà signalé que, en principe, la violence symbolique s’exerce à
partir du langage, et nous ne faisons pas référence à des expressions plus ou
moins triviales qui servent à ridiculiser un individu, en usage dans des groupes
générationnels et adressées à telle ou telle personne en particulier. Nous faisons
référence à des expressions qui, parce qu’elles catégorisent des stéréotypes,
instituent une norme d’évaluation. Dans ce sens, le langage instaure non
seulement une façon de voir le monde mais le monde lui-même. En effet, les
stéréotypes constituent des généralisations excessives, figées, schématiques et
simples qui renvoient à des systèmes de valeur dissimulés  dont la charge
émotionnelle est forte, dont les présupposés non examinés demeurent
hypercodés et naturalisés. Par conséquent, ils constituent l’  «  évidence  », ils ne
sont pas remis en question, ils sont acceptés d’emblée. Il s’agit là des modalités
propres aux stéréotypes raciaux et sexuels (ou aux combinaisons des deux), qui
se renforcent dans leur fonctionnalité. Des affirmations du type  : «  Toutes les
femmes (noirs, homosexuels, juifs, indiens, etc.) sont… p », dans lesquelles « p »
occupe la position de n’importe quel prédicat injurieux ou discriminatoire, sont
entendues quotidiennement. Et elles discriminent parce que, d’un énoncé
universel il résulte que, pour chaque cas singulier, ce prédicat se vérifie
nécessairement, sauf en cas d’exception à la norme. C’est-à-dire, excepté pour
l’anormalité.
15 Il est admis, en espagnol comme en français, que le masculin est utilisé comme
le genre non marqué, autrement dit celui qui constitue les réalisations
prévisibles, fondamentales de la langue, alors que le genre marqué (le féminin),
son contraire, constitue les cas non-prévisibles, secondaires. S’il est difficile de
tracer la ligne de partage entre l’invisibilité, le manque de valeur et le rejet,
chacun de ces phénomènes nie aux femmes leur appartenance à l’humanité, car
— comme dans le syllogisme pars pro toto que nous avons signalé plus haut —
les cas de sexisme linguistique doivent toujours être compris comme un reflet de
la présence généralisée du sexisme dans la culture.
16 Diviser les êtres humains en deux genres, ou plus, selon lesquels, grâce a un
stéréotype fonctionnel (non ingénu), l’un est considéré comme supérieur et
l’autre/ les autres comme inférieur-s, engendre une norme, hiérarchise et exclut.
Ou bien inclut seulement à travers l’exceptionnalité et l’exotisme. Ceci signifie
que nous pouvons reconnaître au minimum trois modalités fondamentales de
l’exclusion symbolique, aussi bien dans le langage populaire que dans les
pratiques philosophiques et scientifiques, qui ont des conséquences matérielles
pour les femmes : (i) lorsque l’on en appelle à leur infériorité ; au contraire, (ii)
lorsqu’on les distingue pour leur excellence  ; en dernier lieu (iii), lorsque
simplement on les élimine en concevant l’humain en termes de masculin institué
en universel, et dans le même mouvement, en instituant ce que l’on a désigné
comme l’archétype viril protagoniste de l’histoire.
17 Margrit Eichler, de son côté, observe que cette façon d’aborder la réalité à
partir d’une dimension sexuée unique devient naturalisée, non seulement en
forgeant la norme du masculin, avec les conséquences d’invisibilisation que nous
avons déjà signalées, mais en engendrant en outre des sur-généralisations ou des
infra-généralisations, suivant les cas,  dont le discours scientifico-philosophique
est truffé7. Pire encore, les manœuvres d’exclusion restent le plus souvent
masquées parce qu’elle se solidifient dans un langage hypercodé qui forclos la
stratégie originale de leur constitution historique. La conséquence la plus
habituelle ce sont les essences sexuelles ou genrées, ces naturalisations qui, en
rendant invisible le processus historique qui les a créées, engendrent une fausse
a-historicité fondée sur un ensemble de présupposés métaphysiques implicites,
recueillis dans un mouvement acritique et institués par la tradition.
18 Ceci étant, ce sont les usages analogiques et métaphoriques de ces
naturalisations — y compris celles qui sont liées à la mère/nature — qui
structurent certains des principaux aspects de l’ordre symbolique occidental,
conformant et transmettant ainsi, subrepticement, des stéréotypes et des valeurs.
Il est difficile de savoir si le langage quotidien peut se passer de ces usages
métaphoriques et analogiques, mais il est certain que les langages philosophique,
scientifique, les livres scolaires, etc. sont truffés de références sexistes dans
lesquelles les stéréotypes ou tout simplement l’infériorité naturelle des femmes
apparaissent comme légitimes. C’est ainsi que sont produites les formes
constitutives de la violence symbolique dans la langue dans laquelle s’expriment
les hommes et les femmes. À titre d’exemple, je prendrai un passage de Platon
qui illustre ce que nous venons de signaler. Socrate raconte comment sa mère,
Phénarète, qui exerçait la profession de sage-femme, aidait les femmes enceintes
à accoucher de leur enfant (Théétète 148 e-151 d). De la même manière —
soutient le Socrate de Platon— les hommes qui accouchent «  d’idées  » (qu’ils
portent eux aussi en leur sein), souffriront dans le processus de la connaissance
« les douleurs de l’accouchement ». Socrate lui-même explique au jeune Théétète
qui dialogue avec lui que, si enfanter avec l’âme est une fonction analogue à celle
d’enfanter avec le corps, enfanter avec l’âme a plus de valeur, puisque, comme le
remarque Platon dans Phédon, l’âme est toujours supérieure au corps. En effet,
les femmes peuvent seulement concevoir des enfants de chair corruptible et de
matière périssable, alors que les hommes conçoivent avec l’âme rationnelle des
idées atemporelles, immatérielles, incorruptibles, absolues.
19 Si nous examinons ces affirmations, dans une première lecture nous observons
déjà que, suivant son champ sémantique originel, l’utilisation que fait Platon (et
pas seulement lui), des mots comme « concevoir » ou « gestation » supposent une
appropriation masquée et forclose d’une fonction biologique propre aux femmes
qui est convertie, sur un registre intelligible, en la fonction propre aux hommes,
compris traditionnellement comme les porteurs paradigmatiques de la
rationalité. Ceci est un exemple simple de violence symbolique hypercodée de
telle sorte qu’elle passe inaperçue. Qui plus est, nous ne disposons pas d’autres
mots pour les remplacer. Dans une seconde lecture, nous pourrions remarquer
qu’il ne s’agit pas seulement de faire apparaître le genre masculin comme doté
d’une plus grande valeur per se, mais en outre que le passage présuppose
qu’étant donnée la capacité naturelle des femmes pour la gestation et
l’accouchement d’enfants, elles sont exclues de la possibilité de « concevoir » des
idées ; elles se trouvent ainsi dépossédées d’une capacité définie comme humaine
en termes universels. Eichler nomme ce mécanisme la « sur-spécification ».

Interpellation et hétérodésignation
20 Considérons un autre exemple. Un passant entend dans son dos «  Eh, toi, le
Noir ! » et se retourne. Nous devons à Louis Althusser cet exemple grâce auquel
nous prenons conscience de la capacité d’interpellation du langage et de son
pouvoir performatif8. En effet, l’interpellation au passant s’est produite en
faisant préalablement appel à l’autorité —qu’Althusser entend en termes
d’autorité d’État— et dans ce cas, la réponse présuppose non seulement que le
« Toi, le Noir » ait été inculqué précédemment dans la conscience de cet individu,
mais qu’il s’agit là en outre d’une opération régulée normativement. De façon
analogue, lorsque historiquement les interpellations adressées aux femmes ont
été du type : « Eh, toi, la bonne/ la déesse/ la petite fille frivole/ l’inconsciente/ la
vulnérable/ l’incapable/ la geignarde/ la folle  », etc., nous devons supposer que
l’efficacité interpellative et performative du discours a également déjà eu lieu
précédemment. Nous nommons cette forme de violence symbolique le pouvoir
d’hétérodésignation du langage.
21 Mais il existe d’autres formes paradigmatiques d’interpellation
discriminatoire, par exemple la blague qui jouit de surcroît de la complaisance
avec laquelle on doit recevoir les plaisanteries, qui ne sont quasiment jamais
vues comme insultantes ou discriminatoires, excepté par celle qui la subit. Dans
ce cas, si elle se plaint, on va lui reprocher son «  manque d’humour  ».
Singulièrement, les blagues de l’idéologie patriarcale — tout comme celles de
l’idéologie raciste— ne connaissent ni les frontières ni les langues, elles
parcourent le monde et se meuvent commodément dans tous les milieux et
toutes les classes sociales. Une autre forme plus subtile encore est le compliment,
qui interpelle l’excellence (la beauté, les formes, etc.) et sert de moyen de
contrôle de l’usage que font de l’espace public les jeunes femmes seules. Les
exemples que nous venons de présenter constituent les moyens idéologiques
d’affecter l’image que le/ la sujet a de lui/ d’elle-même, et par conséquent a une
incidence sur son système de croyance. Un dernier exemple est constitué par
l’insulte qui suppose également un exercice de domination hiérarchique, et
l’usage excessif et arbitraire du pouvoir avec l’intention de sanctionner la
transgression de la limite de que l’autre considère comme «  adéquat  ». Ainsi,
l’insulte marque une limite, signale une transgression et assume la dimension
spécifique d’un stéréotype considéré normativement. L’insulte est la première
forme d’agression linguistique que nous apprenons. Cependant ce ne sont pas les
paroles en elles-mêmes qui blessent, leur impact correspond aux conventions
d’un contexte historique. La véritable insulte procède davantage de la façon,
l’intonation, l’emphase avec lesquelles certains mots sont prononcés et adressés
à quelqu’un, que des mots en eux-mêmes. Autrement dit, un certain nom
injurieux discrédite et dégrade à partir de l’emphase physique avec laquelle il est
émis : dans ce cas-là, les dimensions symbolique et physique se conjuguent.
22 Une fois abandonnée toute illusion d’une langue qui serait sexuellement
neutre, nous considérons qu’une double tâche s’impose à nous  : a) examiner et
visibiliser les formes masquées de violence symbolique dont la gamme est
étendue et nuancée  ; b) demeurer attentifs, si nous ne voulons pas faire partie
d’une majorité ingénument discriminatoire.

Un ordre naturel
23 Dans les paragraphes antérieurs, nous avons mentionné à plusieurs reprises la
notion de « nature ». De fait, cette notion a été l’une des sources de légitimité les
plus importantes des discriminations symboliques tout au long de l’histoire, qu’il
s’agisse de sexisme ou de racisme. En effet, les modèles politiques traditionnels
en appellent souvent —comme nous l’avons dit— à un ordre naturel fondé sur
divers présupposés de type métaphysique explicites ou implicites. Le renvoi à un
ordre naturel qui prescrit des lieux symboliques et réels — entendus eux aussi
comme naturels— aux femmes et aux hommes, aux blancs et aux noirs, aux
chrétiens et aux juifs, manifeste le mode de fonctionnement le plus habituel de
ce mécanisme de légitimation. Dans le cas spécifique des femmes, étant donné
qu’elles sont encore socialement indispensables pour la reproduction du corps
social, leur marginalité et leur situation d’exclusion acquièrent des
caractéristiques propres, bien que les études qui rendent compte de leur
élimination systématique soient nombreuses et montrent un plus grand nombre
d’infanticides féminins, une alimentation plus précaire et par conséquent une
vulnérabilité accrue aux maladies, une scolarisation plus réduite, etc.

Efficacité symbolique
24 La violence symbolique trouve son efficacité dans la violence physique. D’où le
chemin sinueux entrepris. En effet, les individus jouent, représentent
dramatiquement un ordre symbolique pré-donné, se l’appropriant tout en le
resignifiant, en termes de conduites plus ou moins discriminatoires, plus ou
moins tolérantes. Si, comme nous venons de le voir, même la langue supposée
neutre contient des niveaux d’exclusion et de sexisme, ceci est d’autant plus vrai
lorsque sont construits des discours sexistes ad hoc  ; c’est-à-dire
intentionnellement. En général l’efficacité de tels discours dépend de la
valorisation et/ ou du pouvoir qu’ont les institutions (science, états, médias, etc.).
Leur efficacité dépend aussi en partie de la façon dont un certain capital
symbolique s’ancre dans une réalité sociale nouvelle pour rendre compte des
attentes et des désirs d’un groupe social émergeant. De telle sorte que, si nommer
c’est faire exister, c’est aussi imposer un sens  : c’est la raison pour laquelle ce
type de discours opère comme une grille qui discipline la société, et impose aux
sujets —par la force ou la persuasion— certaines pratiques. Afin qu’il en soit
ainsi, des associations causales obligées, difficiles à défaire, sont soutenues
jusque dans les pratiques les plus triviales (les annonceurs connaissent très bien
ce type de techniques).
25 Une violence symbolique qui s’exerce directement sur le corps des jeunes
femmes de façon hautement efficace est celle qui agit sur la représentation du
propre corps, en tant qu’injonction esthétique : dans les problèmes de boulimie
et d’anorexie, cet aspect joue un rôle extrêmement important (bien qu’il ne soit
pas le seul). Aussi banales que nous apparaissent ces maladies, rappelons
néanmoins qu’elles tuent : violence subtile et puissante des médias qui modèlent
les corps de la majeure partie des adolescentes ainsi que le regard qu’elles
portent sur elles-mêmes. Des dispositifs disciplinaires de ce type servent en outre
d’ancrage pour d’autres, dans la mesure où ce qui est ainsi construit et développé
est la dépendance vis-à-vis du « regard » approbateur des autres.
26 De façon analogue, l’inscription des femmes dans le champ sémantique de la
nature (comme l’opposé de la culture), ne se limite pas à leur caractère
nourricier (mère/terre), mais leur prescrit plutôt, au moment où elle les décrit
ainsi, le standard normatif du contrôle de leur « irrationalité émotive » et de la
nécessaire tutelle. Dans le même champ sémantique, elles sont définies comme
« fertiles » ou « en friche » ; leur ventre porte des « fruits » ou est « stérile ». Avec
les nouvelles technologies de reproduction assistée, dont le succès statistique est
minime, le corps des femmes devient un champ propice aux expériences
scientifiques dans le but de répondre au commandement de la nature de
fructifier, recueilli et élaboré par les discours religieux, scientifiques, politiques,
etc. Ces idéaux, ou d’autres, construits historiquement par une culture
déterminée, disciplinent le désir des individus, mais se projettent en même
temps comme naturels, devenant ainsi des injonctions auxquelles on ne peut se
soustraire, excepté par anormalité.
27 La plupart du temps, les injonctions sociales en appellent à l’amour (d’une
mère, d’une épouse, d’une fille) afin de sceller des relations disciplinées dans
lesquelles l’oppression psychologique est masquée, invisibilisée ou escamotée.
Depuis les premières décennies du xviiie siècle, une bonne partie de la littérature
qui exalte l’amour romantique utilise l’amour en tant que dispositif disciplinaire
qui produit un modèle de femme pétrie «  d’abnégation  », qui «  s’oublie  » elle-
même et est capable de «  tout  »  donner pour son époux et ses enfants  : c’est la
construction de la femme domestique, de la famille nucléaire et de l’espace privé.
Comme on l’a souvent remarqué, « espace privé » signifie « privé de droit pour
les femmes  », dans lequel la violence symbolique et la violence physique
pouvaient être exercées, jusqu’à très récemment, sans limites.

Violence physique / violence dans le corps


28 Délimiter les champs de la violence symbolique et de la violence physique est
difficile voire impossible ou absurde car, si nous avons été en mesure de suivre
avec attention le chemin parcouru, nous avons compris que la violence physique
est l’excès qui émerge d’une violence structurelle plus profonde, et qui la rend en
partie invisible, tant qu’il ne dépasse pas un certain seuil, faiblement défini par
la culture, la classe, la base culturelle et religieuse de ses membres. Quoi qu’il en
soit, dans les cas de violence concrète, la grande majorité des victimes sont des
femmes alors que l’écrasante majorité des agresseurs sont des hommes, chefs,
époux ou pères. Dans tous les cas, ce mode de violence a pour but de maintenir le
schéma de l’autorité patriarcale que nous avons décrit plus haut, et suppose
l’agression matérielle de l’une ou de plusieurs des femmes du groupe de travail
ou familial (employée subalterne, épouse, fille, dans une moindre mesure, jeunes
enfants ou personnes âgées) et, moins fréquemment, l’agression de femmes
étrangères au cercle immédiat de l’agresseur.
29 Dans ce sens, on considère comme violence sexuelle tout acte de caractère
sexuel exercé par une personne — généralement un homme — contre le désir et
la volonté d’une autre personne — généralement une femme ou un homme
féminisé — qui se manifeste comme une menace, une intrusion, une intimidation
et/ou une attaque, et qui peut être exprimée sous une forme physique, verbale ou
émotionnelle.
30 Elle constitue une pratique de domination qui s’exerce en termes d’attaque
et/ou de dommage matériel qui, s’il est caractérisé par la loi, peut constituer un
délit. En accord avec ce qui précède, on appelle «  géographie de la peur  » les
limites qui sont imposées à la circulation des femmes dans l’espace public, à
leurs horaires, à leurs vêtements, etc., en tant qu’effets d’autocensure physique et
psychologique, car elles se voient ainsi obligées à s’auto-limiter dans l’exercice de
leurs libertés.

Quelques précisions
31 Nous ne devons pas, cependant, considérer que toute forme de violence du
désir est en soi négative. Comme le signale Piera Aulagnier, le discours maternel,
dans la mesure où il précède toute compréhension possible de la part de l’enfant,
parle à sa place et institue un sens à ses pleurs9. De cette façon, elle lui permet
l’accès à l’ordre de l’humain, en investissant son corps de sens : c’est la « mise en
récit de sa vie somatique ». Grâce à cela, l’enfant devient un sujet et transforme
ses sensations somatiques en sensations significatives. À ce moment-là, les
besoins de l’infans sont ce que la mère désire que soient ses besoins, elle est son
porte parole primaire et l’organisatrice de sa psyché en tant que porteuse des
significations du monde extérieur. Tout en disciplinant les besoins de l’enfant, la
mère exerce une sorte de violence nécessaire et subjectivante. Si au-delà de cette
première phase la mère continue à se considérer comme la seule capable de lui
donner de l’amour, elle exercera sur lui une violence secondaire. La violence
secondaire est l’impossibilité pour la mère d’abandonner le savoir qu’elle a sur
son enfant et l’incapacité à accepter les pensées propres à l’enfant.
32 Par cette simplification plus que schématique des aspects psychanalytiques,
que je ne peux développer ici, je souhaite seulement souligner que l’une des
façons d’exercer la violence est de ne pas accepter les pensées de l’autre. La
disqualification constante, l’imposition d’une opinion ou la réduction au silence,
l’interruption, la banalisation, le refus de reconnaissance des activités, des
intérêts et des besoins de l’autre, etc., sont des modes d’exercice de la violence
secondaire. C’est-à-dire que, avant que la violence physique ne devienne une
agression violente contre le corps de la femme ou de la fillette, il est probable
qu’il y a eu des épisodes de violence secondaire qui n’ont pas été reconnus
comme tels, très vraisemblablement parce qu’ils constituent la norme dans
laquelle de nombreuses relations domestiques se développent.

Des victimes et des bourreaux


33 À première vue, il est surprenant que la plupart des abus, viols ou mauvais
traitements soient commis par les hommes les plus proches (en incluant les
patrons, les pères, les époux, les oncles, les grands pères, demi-frères, etc.) du
cercle intime de la victime10. Cependant, ceci s’explique  : on doit prendre en
compte avant tout le modèle hiérarchique et autoritaire de la famille patriarcale
naturalisée, l’instabilité du lieu de l’autorité, que certaines personnalités
instables vivent comme constamment menacé par la liberté des autres, et
l’existence potentielle de facteurs matériels ou symboliques qui induisent la
violence.
34 Historiquement, le discours judiciaire autant que le discours médical autour de
la violence exercée contre les femmes, par exemple dans l’espace domestique,
montrent d’importants niveaux d’invisibilisation (négation du délit, non
reconnaissance de son caractère délictueux, non caractérisation ou
caractérisation tardive, etc.) et d’occultation (justification ou minimisation de
l’agression). Jusqu’à une période relativement récente, on a accepté une
conception naturalisée de la famille renforcée par des conceptions
philosophiques telles que celle de Jean Jacques Rousseau à laquelle correspond,
par exemple, la définition de Lévi-Strauss  : «  … union plus ou moins durable et
socialement approuvée d’un homme, une femme et leurs enfants  ». En ce sens,
on conçoit la famille patriarcale comme naturelle et normative  ; autrement dit
tout autre type de famille est ignoré ou considéré comme «  primitif  »  ; ceci
implique une méconnaissance des modalités alternatives de constitution des
relations humaines primaires11. Les formes les plus récentes de liens familiaux
«  en désordre  », comme les désigne la psychanalyste Elizabeth Roudinesco, ne
font que montrer la grande richesse et variabilité humaine.
35 En conséquence, dans sa fonction de reproductrice des corps et des rôles, la
famille traditionnelle a éduqué majoritairement ses filles en termes identitaires
primaires d’épouse-mère et, seulement beaucoup plus tard, commença à
renforcer (ou est en train de le faire), les identités secondaires liées aux notions
de « personne de droits » et de « citoyenne ». Précisément, pour de nombreuses
femmes, exiger des droits et des garanties personnelles au sein de leur propre
famille reste encore une demande problématique qu’elles vivent avec la peur
non seulement d’y perdre leur propre identité mais également de braver ainsi
leur conception incorporée de l’autorité patriarcale. Par conséquent, dans le sens
où nous sommes en train de l’examiner, ce n’est que très récemment qu’une
certaine lumière a été faite sur la violence physique, l’abus, le viol, les mauvais
traitements, au sein des familles, opérant ainsi une rupture des «  pactes de
silence » tacites et défiant —à partir de plusieurs perspectives— le lieu d’exercice
arbitraire de l’autorité, avec la terreur que cela peut engendrer. La violence
sexuelle au travail, les rituels ataviques de viol dans certaines cultures, la
mutilation génitale, ou l’usage de viols systématiques, avec leurs séquelles de
grossesses et de risques réels de contamination par le VIH), comme stratégie
concertée (arme de guerre), afin de déshonorer les hommes considérés comme
ennemis en attaquant leurs propriété la plus précieuse —leurs épouses, filles et
sœurs—, sont autant de formes de violence sexuelle qui n’ont été reconnues
comme telles que très récemment et dont la portée est encore minimisée à cause
des mécanismes de justification, légitimation ou invisibilisation qui continuent
d’opérer. Néanmoins, il y a eu d’importantes avancées grâce aux contributions
théoriques de femmes et d’hommes, aux campagnes de prise de conscience et au
plus grand taux de scolarisation des femmes.

Conclusions
36 Lors de la IIIe Conférence des Nations Unies sur la Femme qui eut lieu à
Nairobi 1985 fut dénoncé pour la première fois le caractère systématique de la
violence contre les femmes. En 1993, à l’Assemblée Générale des nations Unies
fut approuvée la Déclaration pour l’élimination de la violence contre la Femme.
Comme le signale Raquel Osborne, ce ne fut qu’à partir de ce moment là que l’on
commença à considérer que les Etats sont également responsables des violations
des Droits Humains des femmes, soit dans leur espace national, soit à l’extérieur,
et qu’il est donc de leur devoir de légiférer sur la question12. Jusqu’alors, les abus,
viols, mauvais traitements, mutilations, harcèlement sexuel au travail,
discriminations de toutes sortes, etc., étaient rendus invisibles par un paradigme
qui les ignorait en tant que délits et qui ne disposait même pas de termes pour les
nommer. En 1996 la violence domestique (physique et psychologique) fut
assimilée à une forme de torture qui devait être sanctionnée légalement, et
finalement, en 1998, Le Tribunal Pénal International fut créé contre les crimes de
génocide, agression, violations des conventions de guerre et crimes contre
l’humanité, qui inclurent le crime de viol utilisé comme arme de guerre et les
grossesses forcées (néanmoins, cette juridiction ne régit pas l’ensemble des
conflits armés).
37 Ces étapes marquent une avancée régulière dans la reconnaissance et la
punition de la violence contre les femmes comme moyen de contrôle et de
réduction de leurs libertés. Nous pouvons, en ce sens, nourrir un optimisme
modéré et espérer que l’éducation dans la tolérance, la démocratie, l’égalité des
sexes, le respect mutuel et la paix éradiqueront les préjugés et les attitudes qui
conduisent à la violence.

Notes
1 Santa Cruz, M.I. et alii, Mujeres y Filosofía, Buenos Aires, CEAL, 1994, vol. I, pp. 59-66.
2 Sur ce point, à titre d’exemple, Cf. Lerner, G. La creación del patriarcado, Barcelona,
Crítica, 1986; Pateman, C. El contrato sexual, Barcelona, Anthropos, 1995; Delphy, Chr. L
´enemi principal, Paris, Syllepse, 2001.
3 Amorós, C. Tiempo de Feminismo, Madrid, Cátedra, 1997.
4 Collin, F., “El espacio publico / Espacio doméstico” en Madrid, Ciudad y Mujer, 1994.
5 Santa Cruz, M.I. et alii, Mujeres y Filosofía, Buenos Aires, CEAL, 1994. Tomo I, p. 51.
6 Young, I. M., “Is Male Gender Domination the Cause of Male Domination?" en J. Trabilcot
(comp), Mothering: Essays in Feminist Theory, New Jersey, Rowman & Allenheld, 1983.
7 Eichler, M. Non Sexist Research Methods: A Practical Guide, Boston, Allen & Unwin, 1988,
p. 3 y ss.
8 Althusser, L., « Idéologie et appareils idéologiques d’État. (Notes pour une recherche) »,
in Positions (1964-1975), Paris, Les Éditions sociales, 1976, pp. 67-125.
9 Aulagnier, P., La Violence de l'interprétation - Du pictogramme à l'énoncé, Paris, Le fil
rouge - Psychanalyse, PUF, 1975.
10 On se souviendra que Freud développa sa théorie de la « séduction infantile » encore
incrédule malgré l’évidence flagrante des abus sexuels fréquents pratiqués sur les fillettes
par des membres masculins de la famille.
11 C. Levi-Strauss, cité par Roudinesco, E. La familia en desorden, Buenos Aires, F.C.E, 2003.
Héritier, F. Masculino / femenino, Barcelona, Ariel, 1996.
12 Osborne, R. Apuntes sobre violencia de género, Madrid, Bellaterra, 2009, p. 9.

References
Bibliographical reference
Maria Luisa Femenías, “Penser et montrer la violence : catégories et modalités”, Caravelle,
102 | 2014, 21-36.

Electronic reference
Maria Luisa Femenías, “Penser et montrer la violence : catégories et modalités”, Caravelle
[Online], 102 | 2014, Online since 28 August 2014, connection on 03 July 2022. URL:
http://journals.openedition.org/caravelle/735; DOI: https://doi.org/10.4000/caravelle.735

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Maria Luisa Femenías
Universidad Nacional de La Plata

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