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MÉCANIQUE

Ti574 - Frottement, usure et lubrification

Lubrification

Réf. Internet : 42465 | 2nde édition

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Frottement, usure et lubrification
(Réf. Internet ti574)
composé de  :

Surfaces Réf. Internet : 42463

Frottement et usure Réf. Internet : 42464

Lubrification Réf. Internet : 42465

Travail des matériaux, mise en forme et tribologie Réf. Internet : 42466

Matériaux et tribologie Réf. Internet : 42467

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Frottement, usure et lubrification
(Réf. Internet ti574)

dont les exper ts scientifiques sont  :

Éric FELDER
Ingénieur civil des Mines de Paris, docteur ès sciences, maître de recherches
à l'École des Mines de Paris, responsable adjoint du groupe «Surfaces et
tribologie» au CEMEF (Centre de mise en forme des matériaux)

Pascal GUAY
Ingénieur INSA Lyon, Docteur ès Sciences, Expert en Tribologie chez Airbus
Defence and Space

Caroline RICHARD
Professeur des Universités

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Mihai ARGHIR Jean-Louis LIGIER


Pour l’article : BM5335 Pour l’article : B5330

Jean AYEL François MARTIN


Pour les articles : B5340 – BM5341 – Pour l’article : IN74
BM5343 – BM5344 – BM2750 – BM2751 –
BM2752 Daniel NICOLAS
Pour l’article : B5325
Jean FRÊNE
Pour les articles : B5320 – BM5335 Robert PROGRI
Pour l’article : TRI1520
Roger GOJON
Pour les articles : B5300 – B5310 François ROBBE-VALLOIRE
Pour l’article : TRI1520
Pascal GUAY
Pour les articles : TRI1500 – TRI1540 Mathias WOYDT
Pour l’article : TRI1800
Sébastien LE LEZ
Pour l’article : BM5335

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VI
Lubrification
(Réf. Internet 42465)

SOMMAIRE

1– Théorie de la lubrification Réf. Internet page

Principes de base de la lubrification TRI1500 11

Régime de lubrification mixte TRI1520 17

Lubrification élastohydrodynamique TRI1540 23

2– Butées et paliers lubrifiés Réf. Internet page

Critères de choix d'un palier. Présélection B5300 31

Critères de choix d'un palier. Validation B5310 35

Matériaux pour paliers lisses B5330 43

Butées et paliers hydrodynamiques B5320 51

Butées et paliers hydrodynamiques. Caratéristiques statiques et dynamiques B5321 59

Butées et paliers hydrostatiques B5325 61

Butées et paliers aérodynamiques BM5335 67

3– Lubrifiants liquides, solides et additifs Réf. Internet page

Lubrifiants. Propriétés et caractéristiques B5340 75

Lubrifiants. Constitution BM5341 85

Lubrifiants. Additifs à action chimique BM5343 91

Lubrifiants. Additifs à action physique ou physiologique BM5344 95

Biolubrifiants. Réglementations, familles d'huiles de base, propriétés "éco" et TRI1800 99


applications
Nanotalcs synthétiques : des nanoparticules argileuses à l'assaut de l'industrie IN74 103

4– Lubrifiants pour moteurs Réf. Internet page

Lubrifiants pour moteurs thermiques. Normes générales BM2750 107

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VII
Lubrifiants pour moteurs thermiques. Spécifications des constructeurs BM2751 111

Lubrifiants pour moteurs thermiques. Marché et consommation BM2752 113

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Lubrification
(Réf. Internet 42465)

1
1– Théorie de la lubrification Réf. Internet page

Principes de base de la lubrification TRI1500 11

Régime de lubrification mixte TRI1520 17

Lubrification élastohydrodynamique TRI1540 23

2– Butées et paliers lubrifiés

3– Lubrifiants liquides, solides et additifs

4– Lubrifiants pour moteurs

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9
1

10
Référence Internet
TRI1500

Principes de base de la lubrification

par Pascal GUAY


1
Ingénieur INSA Lyon
Docteur ès Sciences
Expert en Tribologie chez Airbus Defence and Space, Toulouse

1. Lubrification fluide. Lubrification solide.......................................... TRI 1 500 - 3


1.1 Lubrification fluide ...................................................................................... — 3
1.2 Lubrification solide (ou sèche)................................................................... — 4
1.3 Quelle lubrification choisir : fluide ou solide ? ......................................... — 4
2. Les différents types de paliers ............................................................ — 5
2.1 Définition du palier ..................................................................................... — 5
2.2 Surfaces conformes – surfaces non conformes ....................................... — 5
3. La viscosité ............................................................................................... — 5
3.1 Fluide newtonien......................................................................................... — 5
3.2 Fluide non newtonien ................................................................................. — 6
3.3 Viscosité cinématique................................................................................. — 6
3.4 Quelques données sur la viscosité ............................................................ — 6
3.5 La formule de Petroff .................................................................................. — 7
4. L’équation de Reynolds ......................................................................... — 8
4.1 Écoulement 1D d’un fluide incompressible .............................................. — 8
4.2 Écoulement 2D d’un fluide incompressible .............................................. — 11
4.3 Cas d’un fluide compressible..................................................................... — 12
4.4 Formes courantes de l’équation de Reynolds .......................................... — 13
4.5 Paramètres du palier obtenus à partir de l’équation de Reynolds ......... — 14
5. Régimes de lubrification ....................................................................... — 14
5.1 Rugosité des surfaces................................................................................. — 14
5.2 La courbe de Stribeck ................................................................................. — 15
5.3 Le paramètre de Tallian.............................................................................. — 15
5.4 Le régime limite .......................................................................................... — 16
5.5 Le régime mixte .......................................................................................... — 17
5.6 Le régime élastohydrodynamique (EHD).................................................. — 17
5.7 Le régime hydrodynamique....................................................................... — 18
5.8 Rodage des surfaces................................................................................... — 18
6. Conclusion................................................................................................. — 18
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. TRI 1 500

e rôle de la lubrification est multiple. Elle permet de réduire le frottement


L et l’usure, mais aussi de dissiper la chaleur produite dans le contact, de
protéger contre la corrosion et d’empêcher le grippage. Cette introduction à la
théorie de la lubrification présente l’équation de Reynolds, la courbe de Stri-
beck et les différents régimes de lubrification.
L’équation de Reynolds fut établie par le mathématicien irlandais O. Reynolds en
1886 à partir des équations de la mécanique des fluides, appliquées à un film
lubrifiant mince et visqueux. Les développements théoriques qui permettent de
Parution : septembre 2014

l’obtenir dans sa forme générale sont complexes. Une approche simplifiée est pro-
posée ici, avant de présenter les formes courantes de cette équation.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. TRI 1 500 – 1

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Référence Internet
TRI1500

PRINCIPES DE BASE DE LA LUBRIFICATION ______________________________________________________________________________________________

L’existence de différents régimes de lubrification fut mise en évidence en


1902 par la courbe de Stribeck. Cette courbe montre que l’évolution du coeffi-
cient de frottement des paliers lubrifiés suit toujours une même loi en fonction
du coefficient de similitude (vitesse × viscosité / charge). L’épaisseur réduite
(Λ = épaisseur du film d’huile / rugosité des surfaces) proposée par Tallian en
1967 permet de connaître le régime de lubrification. La connaissance de ce
paramètre permet d’utiliser la théorie appropriée pour calculer l’épaisseur

1 exacte du film d’huile, paramètre d’entrée indispensable pour prédire la durée


de vie d’un palier.
Cet article a pour but de présenter les bases théoriques de la lubrification,
bases qui permettront par la suite d’étudier et d’améliorer la lubrification des
paliers hydrodynamiques, des paliers à gaz, des roulements, des engrenages,
des butées hydrostatiques, ainsi que la lubrification pour la mise en forme ou
celle des prothèses de hanche, en biomécanique.

Notations
Encadré – Historique
f Coefficient de frottement
L’usage des lubrifiants remonte à l’Antiquité. Les essieux
h Épaisseur du film lubrifiant des chars et des charrettes étaient lubrifiés avec du suif (lard
hm Épaisseur du film lubrifiant pour laquelle la pression est ou graisse animale) ou avec de l’huile d’olive mélangée avec
maximale de la poudre de calcaire, pour l’épaissir et obtenir la consis-
tance d’une graisse. D’autres lubrifiants étaient aussi utilisés,
h0 Épaisseur du film d’huile au centre du contact mais plus rarement :
L Longueur du contact linéaire – les lubrifiants secs (ou solides) : le graphite et le talc
(figure 1a) ;
p Pression dans le contact – le « bitume de Judée », substance noire composée d’un
qx, qy Débit de lubrifiant dans le contact dans la direction x, ou y mélange d’hydrocarbures qui existait à l’état naturel sur les
bords de la mer Morte et de la mer Caspienne ;
Ra Rugosité moyenne arithmétique – l’huile de ricin (castor oil ou ricinus communis), qui est
Rq Rugosité moyenne quadratique probablement le meilleur lubrifiant naturel en vente libre
(figure 1b). L’huile de ricin à grande graine fut très utilisée
u Vitesse de la particule de lubrifiant fluide avant la seconde guerre mondiale pour lubrifier les moteurs à
explosion, et jusque dans les années 1980 en compétition,
u0, uh Vitesse des surfaces délimitant le contact, selon x direction
avant d’être détrônée par les huiles de synthèse. Elle offre une
de l’écoulement
excellente tenue à haute température et une onctuosité excep-
w 0, w h Vitesse des surfaces délimitant le contact, selon z direction tionnelle (voir tableau 4). La variante à petite graine était
de l’écrasement réservée à l’usage médical.
W Charge normale exercée sur le contact À la fin du XIXe siècle, la gamme des huiles et graisses ani-
males s’est élargie, en intégrant l’huile de pied de bœuf et les
Λ Paramètre de Tallian (épaisseur réduite) Λ = hmin / Rq lubrifiants issus des produits de la pêche : graisse de mar-
µ Viscosité dynamique du lubrifiant souin, graisse de dauphin et huile de baleine.
En 1855, le chimiste américain B. Silliman retrouve un cer-
ν Viscosité cinématique du lubrifiant tain nombre de produits naturels par distillation du pétrole :
ρ Masse volumique du lubrifiant les goudrons, les lubrifiants, les solvants pour les peintures et
l’essence, produit mineur à l’époque utilisé comme détachant.
τ Contrainte de cisaillement du lubrifiant Quatre ans plus tard, le premier puits de pétrole américain est
ω Vitesse de rotation creusé à Titusville en Pennsylvanie. Le pétrole commence à
être exploité aux États-Unis, en Écosse, au Canada et en Rus-
sie. La découverte et l’exploitation des champs pétroliers
Acronymes offrent des bases minérales abondantes et bon marché. Dispo-
nibles en grandes quantités, les huiles minérales supplantent
EHD Élastohydrodynamique rapidement les huiles végétales et animales.
ISO International Standard Organisation Ainsi, l’industrie du raffinage du pétrole n’est pas née,
comme on le croit généralement, du besoin de carburants
MoS2 Bisulfure de molybdène (essence, gazole et fiouls), mais du besoin de lubrifiants et de
kérosène pour les lampes à pétrole.
PTFE Polytetrafluoréthylène
Après la première guerre mondiale, les progrès techniques
PVD Dépôt physique en phase vapeur (Physical Vapor nécessitent des lubrifiants plus performants capables de
Deposition) s’adapter à des conditions de fonctionnement sévères avec
des pressions, vitesses et températures élevées.
SAE Society of Automotive Engineers

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TRI 1 500 – 2 est strictement interdite. – © Editions T.I.

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Référence Internet
TRI1500

______________________________________________________________________________________________ PRINCIPES DE BASE DE LA LUBRIFICATION

Encadré – Historique Tableau 1 – Contacts secs et contacts lubrifiés


Contacts « gras » Contacts « secs »
La mise au point des additifs devient effective dans les
années 1930-1940, avec l’apparition des correcteurs de l’indice Lubrification Lubrification Absence
de viscosité, du point d’écoulement, des antioxydants, des fluide solide de lubrifiant
inhibiteurs de corrosion, et des additifs extrême-pression.

1
Parallèlement, les premières huiles de synthèse font leur – Gaz – Métaux mous : – Traitements
apparition, induite par les contraintes extrêmes dues aux tem- – Huiles plomb, argent, or, de surface
pératures élevées et maximales. – Graisses indium, étain, – Débris d’usure
Dans les années 1950, la lubrification solide est développée – Émulsion aqueuse laiton…
pour les besoins de l’industrie spatiale. (eau + huile, – Poudres : graphite,
par exemple) MoS2, talc, savons …
– Polymères : PTFE,
vernis…

1.1 Lubrification fluide


La lubrification fluide consiste généralement à utiliser une huile
ou une graisse pour lubrifier un contact mécanique. On utilise égale-
ment la lubrification au gaz pour les applications à haute vitesse au-
delà de 50 000 tr/min, notamment dans les paliers aérodynamiques
et dans les systèmes à sustentation magnétique [B5335]. Une parti-
cularité de la lubrification au gaz est que la viscosité du gaz aug-
mente avec la température, contrairement aux huiles et graisses.
a carrière de talc de Luzenac (Ariège)
1.1.1 Lubrification à l’huile
Le grand avantage de la lubrification à l’huile est l’existence d’un
ménisque d’huile qui se forme autour du contact par capillarité, et qui
le suit dans son mouvement. Le ménisque favorise également l’éva-
cuation de la chaleur : il dilue les points chauds et améliore la conduc-
tance thermique à travers les billes des roulements. En lubrification
fluide, on peut calculer l’épaisseur du film d’huile dans le contact, à
partir des équations de la mécanique des fluides. On en déduit
ensuite la capacité de charge du contact et la force de frottement.
La quasi-totalité de la production mondiale d’huile et de graisse
est obtenue à partir du raffinage du pétrole brut. Ces huiles sont
dites « minérales » par opposition aux lubrifiants « synthétiques »,
développés dans les années 1960 et 1970.
Le pétrole brut résulte de la décomposition d’animaux et de
végétaux aquatiques. Il est composé essentiellement de carbone et
d’hydrogène, le reste étant de l’oxygène, de l’azote, du soufre, et
divers composés métalliques, ce qui permet plusieurs centaines de
combinaisons moléculaires, d’où le nombre élevé de produits déri-
vés du pétrole : paraffines, isoparaffines, oléfines, produits aroma-
tiques, naphtalènes, etc. C’est pourquoi les huiles minérales ont
b fleur du ricin des caractéristiques de viscosité variables, car elles dépendent de
la nature et de la quantité relative des différents composés.
Les huiles synthétiques proviennent de la combinaison, par des
Figure 1 – Lubrifiants naturels (Pethrus Creative et Pancrat creative procédés chimiques, de dérivés gazeux du pétrole facilement isola-
commons) bles en produits purs. Le résultat est un lubrifiant comportant pra-
tiquement une seule structure moléculaire et dont les propriétés
sont plus constantes. On recense les huiles PAO, PIO, les esthers et
les polyglycols.
À ces produits de base, on ajoute des additifs destinés à amélio-
1. Lubrification fluide. rer les propriétés naturelles de l’huile et qui peuvent constituer de
Lubrification solide 10 à 15 % du volume du produit final.

La tribologie (science du frottement, de la lubrification et de


1.1.2 Lubrification à la graisse
l’usure) se subdivise en deux grands domaines : Une graisse est obtenue par saponification d’une huile de base.
– les contacts « gras », lubrifiés par une huile ou une graisse, et Par abus de langage, on désigne aussi par graisses, les huiles qui
– les contacts dits « secs », lesquels sont soit sans lubrifiant, soit sont épaissies avec une poudre de lubrifiant solide : polytétrafluo-
revêtus d’un lubrifiant sec (tableau 1). réthylène (PTFE), bisulfure de molybdène (MoS2)…

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PRINCIPES DE BASE DE LA LUBRIFICATION ______________________________________________________________________________________________

À basse vitesse, lors des démarrages et des arrêts, la graisse


offre l’avantage d’augmenter l’épaisseur du film et de fournir un
tapis de lubrifiant solide dans le cas des huiles épaissies. Dès
que la vitesse est suffisante pour sortir du régime limite,
l’épaisseur du film lubrifiant dans le contact est régie par la vis-
cosité de l’huile de base. La graisse est utilisée dans 90 % des
roulements, car la maintenance des roulements est plus simple.
Il faut cependant bien choisir le type de graisse le mieux

1 adapté aux conditions de fonctionnement (vitesse de glissement


et charge).
a coussinet en bronze

1.2 Lubrification solide (ou sèche)


Lorsque les conditions de fonctionnement ne permettent pas la
lubrification fluide (températures extrêmes, radiations, vide…), on
peut recourir à la lubrification sèche, à condition que la vitesse de
glissement reste modérée. Les lubrifiants solides ont une structure
qui offre une faible résistance au cisaillement dans un plan paral-
lèle au glissement.

Pour recourir à la lubrification solide, on peut : b bagues à collerette en alliage massif comportant
des inserts autolubrifiants :
– soit déposer sur le contact une poudre solide : MoS2, talc (sili- sous l’effet du frottement, les pastilles libèrent des
cate de magnésium), graphite… molécules autolubrifiantes solides
– soit revêtir la surface de contact avec un métal mou : argent,
plomb, indium, étain… Figure 2 – Le coussinet en bronze (Coussinets Graphites Industrie)

Il existe aussi dans le commerce des paliers et rotules qui com-


portent un revêtement autolubrifiant (PTFE, bronze au plomb…,
voir [B5530]).
1.3 Quelle lubrification choisir :
Le palier autolubrifiant le plus commun est le coussinet en fluide ou solide ?
bronze, apparu dès le XVe siècle (figure 2). De nos jours, les bron-
zes utilisés pour les pièces de frottement peuvent contenir jusqu’à Le tableau 2 résume les différentes limitations et possibilités
30 % de plomb. Ils sont très indiqués en face d’aciers inoxydables. inhérentes aux deux types de lubrification.
Les bronzes au plomb supportent assez bien le frottement à
Les différents systèmes de lubrification (par bain d’huile, par bar-
grande vitesse sous forte charge, à condition de ne pas dépasser
botage, par brouillard d’huile…) sont présentés dans les catalogues
180 °C.
de roulements. On y trouve aussi le calcul des intervalles de grais-
Pour connaître les caractéristiques détaillées des lubrifiants, on sage à respecter en fonction des conditions de fonctionnement.
peut se reporter à [BM5341] et [BM5340]. Voir la brochure FAG [7] et les catalogues SNR [14] ou SKF [15]).

Tableau 2 – Guide de sélection du type de lubrification


Lubrification fluide Lubrification solide

Vitesse Compatible avec des vitesses élevées Limitée aux vitesses faibles, notamment à cause
de la dissipation thermique créée par les frottements
dans le contact

Capacité de charge Élevée (non limitée par le lubrifiant) Une pression de contact trop élevée finit par repousser
le lubrifiant en dehors du contact (effet chasse-neige).
Dans les roulements et les engrenages, la pression
de Hertz admissible est divisée par 2.

Nombre de cycles Non limitée par le lubrifiant Nécessite des essais.


(1 cycle = 1 tour ou 1 changement
de sens) Des roulements avec lubrifiant solide atteignent
généralement 1 million de tours, si on limite la pres-
sion de Hertz à 1 000 MPa.

Environnement thermique Non compatible avec le froid. L’huile Le graphite est utilisable dans l’air dans la plage
devient épaisse, puis solide en dessous de – 240 °C à 450 °C. Le MoS2 est utilisable dans l’air
du point de goutte. de – 180 °C à + 300 °C.

Dissipation thermique Le ménisque d’huile autour du contact offre Forte résistance de contact, qui engendre un échauffe-
une bonne conductance thermique à travers ment du contact.
le contact.

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______________________________________________________________________________________________ PRINCIPES DE BASE DE LA LUBRIFICATION

2. Les différents types La pression de contact est très élevée (de 200 à 4 000 MPa). Pen-
dant la courte durée de traversée du contact (de l’ordre de 1 µs à
de paliers 1 ms), la viscosité du lubrifiant devient instantanément très
grande, et le film lubrifiant se comporte comme une mince feuille
d’acier passant dans un laminoir. Ce cas est traité par la théorie de
la lubrification élastohydrodynamique (EHD).
2.1 Définition du palier

1
Nous définirons ici le palier comme étant « tout sous-ensemble
mécanique qui réalise la fonction rotation : roulements, paliers lis-
ses, rotules… » (figure 3). 3. La viscosité
La norme ISO 4378/1 définit le palier comme étant tout « support
ou guide déterminant la position d’une pièce mobile par rapport Soient deux plaques horizontales séparées par un film lubrifiant
aux autres pièces du mécanisme », ce qui permet d’y inclure les fluide incompressible (huile ou graisse) d’épaisseur h (figure 5). Le
paliers linéaires, qui assurent un guidage en translation. film adhère aux parois. Les différentes couches du liquide se
déplacent parallèlement aux surfaces des plaques selon une direc-
L’essor de la tribologie coïncide avec celui du développement tion qu’on appelle x. Ce type d’écoulement est dit « laminaire ».
industriel des paliers et des roulements de 1880 à 1940. Le palier
est le composant de base indispensable à toute machine. Sans
palier, on ne pourrait construire ni roue, ni poulie, ni machine. 3.1 Fluide newtonien
Le palier lisse (journal bearing) comporte un arbre cylindrique
(ou axe) qui tourne dans un moyeu (ou coussinet) sans éléments La plupart des huiles minérales et synthétiques ont un compor-
roulants. Lorsqu’un palier lisse est lubrifié et conçu pour les gran- tement newtonien. Dans ce cas, la contrainte de cisaillement τ est
des vitesses, on l’appelle palier hydrodynamique. proportionnelle au taux de cisaillement du/dz.
La vitesse u d’une couche est fonction de sa distance z au plan
mobile. Le glissement des couches les unes sur les autres engen-
2.2 Surfaces conformes – surfaces non dre une contrainte de cisaillement τ dans le lubrifiant (figure 5) :
conformes
Dans le cas des surfaces conformes (paliers lisses, patins et (1)
butées hydrodynamiques), la surface de contact est importante,
d’où une pression dans le contact qui reste modérée sans excéder
avec µ viscosité dynamique, en Pa.s,
les 100 MPa (figure 4a).
u (z ) vitesse de la couche fluide située à la cote z.
La lubrification du palier lisse est traitée par la théorie de la
lubrification hydrodynamique. La viscosité dynamique µ du lubrifiant traduit la résistance au
cisaillement du film d’huile et crée une force de frottement vis-
Dans le cas des surfaces non conformes (roulements, engrena-
queux qui augmente avec la vitesse.
ges et cames), la faible surface de contact engendre un effet de
poinçonnement dans le contact qui s’accompagne d’une déforma- La viscosité crée un effet de portance qui permet de séparer les
tion élastique donnée par la théorie de Hertz (figure 4b). deux surfaces du contact au-delà d’un certain seuil de vitesse.

a gond de portail b palier à semelle c roulements

Figure 3 – Les différents types de palier

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15
1

16
Référence Internet
TRI1520

Régime de lubrification mixte

1
par François ROBBE-VALLOIRE
Professeur des universités
Responsable de l’axe Dynamique, Matériaux et Structures du laboratoire Quartz
Institut supérieur de mécanique de Paris (SUPMECA)
Cet article est la réédition actualisée de l’article TRI1520 intitulé « Régime de lubrification
mixte » paru en 2010, rédigé par Robert Progri et François Robbe-Valloire.

1. Contexte ...................................................................................................... TRI 1 520v2 - 2


1.1 Mode local de lubrification en film mince continu................................... — 3
1.2 Mode local de lubrification en film limite ................................................. — 4
1.3 Rugosité des surfaces et lubrification ....................................................... — 4
1.4 Les quatre régimes de lubrification........................................................... — 5
2. Aspects phénoménologiques de la lubrification mixte........................... — 6
2.1 Description du frottement .......................................................................... — 6
2.2 Description de l’usure................................................................................. — 7
2.3 Description des écoulements..................................................................... — 7
2.4 Rodage ......................................................................................................... — 8
3. Influence des paramètres........................................................................... — 9
3.1 Groupement des paramètres viscosité, vitesse et pression moyenne... — 9
3.2 Surface apparente de contact .................................................................... — 10
3.3 Rugosité des pièces .................................................................................... — 10
3.4 Matériaux..................................................................................................... — 11
4. Applications................................................................................................. — 11
4.1 Utilisation volontaire de la lubrification mixte ......................................... — 11
4.2 Contacts fonctionnant de manière occasionnelle en lubrification mixte — 12
4.3 Perte d’adhérence d’un véhicule sur chaussée humide .......................... — 12
4.4 Cas de lubrification en régime mixte ........................................................ — 13
5. Choix des matériaux pour application en régime
de lubrification mixte ........................................................................ — 13
5.1 Matériaux des pièces .................................................................................. — 13
5.2 Huile ............................................................................................................. — 15
6. Caractérisation expérimentale .................................................................. — 15
6.1 Tribomètres utilisés pour les caractérisations
en régime de lubrification mixte ou limite................................................ — 15
6.2 Quelques limitations à l’utilisation d’autres types de tribomètres
ou d’autres protocoles................................................................................ — 17
7. Modélisation théorique .............................................................................. — 17
7.1 Modèles déterministes basés sur une discrétisation du contact ............ — 17
7.2 Modèles stochastiques ............................................................................... — 18
7.3 Cas du contact entre surfaces parallèles................................................... — 19
8. Conclusion ................................................................................................... — 21
9. Glossaire ...................................................................................................... — 21
Pour en savoir plus .............................................................................................. Doc. TRI 1 520v2
Parution : juin 2016

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TRI 1 520v2 – 1

17
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RÉGIME DE LUBRIFICATION MIXTE _____________________________________________________________________________________________________

L a lubrification intervient non seulement dans un grand nombre d’applications indus-


trielles où le fluide lubrifiant est généralement l’huile, mais aussi dans le domaine
biomédical avec l’ensemble de nos articulations lubrifiées par le liquide synovial. En général,
pour la plupart de ces applications, les faibles niveaux d’usure et de frottement sont obtenus
grâce à l’absence totale de contact en raison de la présence d’un film séparant complètement
les deux pièces antagonistes. En revanche, dans certains cas particuliers, ce film continu entre
les deux pièces ne peut pas être maintenu et les interactions directes entre les deux pièces

1 prennent alors place. La morphologie du film fluide doit être analysée à l’échelle de la
microgéométrie.
Même si elle présente une certaine aptitude à la déformation, la microgéométrie des deux
pièces ne permet pas d’assurer, dans la zone de contact, l’absence d’interpénétrations. Elle
conduit donc à un morcellement du film d’huile au niveau des aspérités de l’une ou l’autre
pièce les plus saillantes, les creux restant remplis par le film d’huile. La discontinuité du film
d’huile est la caractéristique principale de la lubrification en régime mixte. Le contact est ainsi
le siège de deux types de comportement, l’un similaire au film mince continu et l’autre proche
d’un contact direct au niveau des aspérités les plus hautes.
Après une première partie destinée à présenter les généralités de la lubrification mixte (son
positionnement dans le contexte de la lubrification, puis une description phénoménologique),
cet article détaillera les aspects pratiques liés à l’utilisation de la lubrification mixte (influence
des paramètres, cas d’utilisation et choix des matériaux). La dernière partie du document pré-
sentera les différentes méthodes permettant l’étude de la lubrification mixte. Dans un premier
temps, nous détaillerons les techniques expérimentales. Nous terminerons par une revue des
différentes méthodes permettant de modéliser le comportement en présence de lubrification
mixte.

1. Contexte

Notations et symboles Notations et symboles

Symbole Unité Définition Symbole Unité Définition

d m Longueur parcourue en glissement NM, L N Effort normal agissant sur l’ensemble


des zones travaillant en régime de
Ei Pa Module d’élasticité du matériau i lubrification en film mince continu (M),
ou limite (L)
E’ Pa Module combiné de deux matériaux
N (z, hm) N Effort agissant sur une aspérité dont le
F N Effort normal sur l’ensemble du sommet est à l’altitude z, et qui est
contact comprimée à l’altitude hm
f Coefficient de frottement du contact p Pa Pression dans le contact

fM,L Coefficient de frottement moyen du p(z) Fonction de densité de probabilité


régime de lubrification en film mince Ra m Moyenne arithmétique des hauteurs
continu, limite
de la rugosité
k mm3/Nm Coefficient d’usure du contact Rpm m Profondeur moyenne d’aplanissement
KM,L 3
mm /Nm Coefficient moyenne d’usure du maté- du profil
riau en travaillant en régime de lubrifi- T N Effort de frottement du contact
cation en film mince continu (M), ou
limite (L) TMi, L j N Effort de frottement obtenu dans les
zones i, j travaillant respectivement en
h(x) m Épaisseur locale du film mode local de régime de lubrification
avec un film mince continu (M), ou
hm m Épaisseur moyenne du film limite (L)
No Nombre d’aspérités dans le contact TM, L N Effort de frottement obtenu sur
l’ensemble des zones travaillant en
NMi ; L j N Effort normal agissant sur les zones i, j
régime de lubrification en film mince
travaillant en mode local de régime de
continu (M), ou limite (L)
lubrification en film mince continu (M),
ou limite (L) t s Temps

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_____________________________________________________________________________________________________ RÉGIME DE LUBRIFICATION MIXTE

Notations et symboles 1.1 Mode local de lubrification en film mince


Symbole Unité Définition
continu
U m/s Vitesse de glissement D’une manière générale, la lubrification en film mince continu
est obtenue lorsque localement l’épaisseur du film lubrifiant est
U1, 2 m/s Vitesse suivant la direction Ox du telle que l’on peut avoir un grand nombre de molécules de lubri-
solide 1, ou du solide 2 fiant dans l’épaisseur, cette dernière restant néanmoins très faible

1
u m/s Vitesse suivant la direction Ox à un devant les dimensions du contact.
point du film de cordonnées : x, y, z
En particulier, sachant que l’ordre de grandeur des dimensions
V mm3 Volume usé du contact d’une molécule de lubrifiant est le centième de micromètre pour la
longueur, le nanomètre pour le diamètre, et compte-tenu de l’orga-
VMi, Lj mm3 Volume usé dans les zones i, j travail- nisation des molécules dans le contact (figure 1), ce mode d’action
lant en mode local de régime de lubri- est généralement attribué à une épaisseur de film lubrifiant locale
fication avec un film mince continu supérieure ou égale à 0,1 μm environ [1].
(M), ou limite (L)
Ce mode de lubrification donne des frottements extrêmement
VM, L mm3 Volume usé sur l’ensemble des zones
faibles (coefficient de frottement de Coulomb de l’ordre de 0,01
travaillant en lubrification avec un film
voire moins), ce qui est attribué à la facilité de glissement des
mince continu (M), ou limite (L)
molécules de lubrifiant les unes sur les autres et à l’effet de frac-
x, y, z m Coordonnées courante (y suivant la tionnement des glissements compte-tenu du grand nombre de
hauteur du film) molécules dans le film [B5340]. Ces sauts de vitesse peuvent être
Fraction de la force normale transmise approximés par une évolution continue des vitesses u(y) à tra-
ϕ
par les zones travaillant en mode de vers l’épaisseur du film (figure 2) et le comportement est bien
lubrification en film limite décrit par la loi de Newton qui donne l’expression de la
contrainte de cisaillement régnant à un endroit donné dans un
ϕx, z, s Facteur d’écoulement dans l’équation tel contact :
de Patir-Cheng
δ m Diamètre de la molécule d’huile (1)
γ Facteur de forme des zones de contact
η Pa.s Viscosité dynamique de l’huile où η est la viscosité dynamique du lubrifiant : c’est la propriété
essentielle du lubrifiant dans ce régime de lubrification.
ν Coefficient de Poisson
Une huile ou un lubrifiant disposant d’une telle loi de comporte-
σ1,2 m Écart type de la hauteur de la rugosité ment est nommé fluide newtonien, mais, dans la pratique, des
des surfaces 1,2

Le mécanisme de lubrification mixte traduit une phénoménolo-


Pièce 2
gie d’interaction entre deux pièces en contact dans un milieu
fluide. Cette interaction est basée sur la coexistence dans le h > 0,1 µm Film lubrifiant
contact de deux modes locaux de lubrification qui vont avoir des
comportements différents. Ainsi, la répartition entre ces deux Pièce 1
modes de lubrification va directement influencer le comportement
global du contact. La rugosité joue un rôle important car elle est à
l’origine des variations géométriques de la morphologie de l’inter- Molécules de lubrifiant
face entre les deux pièces en contact, ce qui conduit à la coexis-
tence dans des zones voisines de ces deux modes locaux de
lubrification. Cette section va détailler ces deux modes locaux de
lubrification et la rugosité qui constituent les principaux phéno-
mènes à l’origine de la lubrification mixte. Figure 1 – Mode local de lubrification en film mince continu

Pièce 2

U2 Molécules de lubrifiant
h (épaisseur locale

Film
de film lubrifiant)

lubrifiant
u (y)
u (y + δ)
u (y)
u (y – δ)
y y

U1

Pièce 1

Figure 2 – Description du film mince continu

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TRI 1 520v2 – 3

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RÉGIME DE LUBRIFICATION MIXTE _____________________________________________________________________________________________________

écarts à cette loi se rencontrent avec certaines huiles, en particu- fluides conventionnelles (équation de Reynolds) ne peuvent
lier, si elles présentent des éléments d’addition tels que les additifs décrire ce mode de lubrification car l’accommodation des vitesses
modificateur d’index de viscosité. Le principe de ces additifs sera entre les deux pièces par succession de microglissements (caracté-
développé dans la sous-section 5.2 mais des informations plus ristique du film mince continu) est remplacée, dans ce cas, par un
complètes figurent dans [B5340] et [B5344]. macroglissement correspondant à la vitesse de glissement entre
Cette loi, donnée par l’équation (1) décrivant le comportement les deux pièces. Le formalisme le plus adapté à ce mode de lubrifi-
local, peut être généralisée à l’ensemble de l’épaisseur du film cation reste le modèle de type frottement sec de type Coulomb
avec un coefficient de frottement f L relativement constant [3] :

1
lubrifiant. En associant la propriété d’incompressibilité, une pres-
sion constante dans l’épaisseur du film, et la présence d’un écoule-
L
ment laminaire, on obtient la classique équation de Reynolds dont (3)
la construction est parfaitement détaillée par ailleurs [2]. En utili-
sant les notations de la figure 2, si p est la pression régnant dans La présence des molécules de lubrifiant modifie la valeur du
le film d’huile d’épaisseur h, l’équation de Reynolds s’écrit : coefficient de frottement par rapport au frottement sec. En général,
la valeur de fL est de l’ordre de 0,1, plus faible que celle que l’on
aurait en l’absence de lubrifiant car les molécules de lubrifiant
(2) même en faible nombre suffisent à faire écran aux interactions
fortes pouvant exister entre des antagonistes métalliques. Atten-
La résolution de cette équation différentielle (2) permet de détermi- tion, ce mode de fonctionnement reste fragile en raison du faible
ner la pression en chaque point du contact, le champ des vitesses nombre de molécules de lubrifiant dans l’interface. Dans les condi-
dans le film lubrifiant, les forces normale et tangentielle sur le tions sévères, l’arrachement des molécules de lubrifiant dans
contact et enfin de déduire la valeur du coefficient de frottement l’interface va entraîner localement un contact direct (ou sec) entre
du système lubrifié considéré. les deux pièces qui conduira à des dégradations rapides des sur-
faces et des forces de frottement plus élevées. Dans certains cas,
en particulier si le choix des matériaux n’est pas assez soigné, le
grippage peut apparaître.
1.2 Mode local de lubrification en film limite
D’une manière générale, la lubrification en film limite est obte-
nue avec localement un nombre de molécules de lubrifiant nette- 1.3 Rugosité des surfaces et lubrification
ment plus faible, pouvant aller jusqu’à une monocouche. Dans ce
cas, une propriété essentielle est l’aptitude du fluide à établir une Il ne faut pas perdre de vue qu’à l’échelle de résolution adoptée
liaison avec la surface des pièces en contact. En effet, c’est de pour la description des deux modes locaux de lubrification (fraction
l’intensité de cette liaison que dépend la stabilité du film limite de micromètres), les pièces industrielles n’ont pas des surfaces lisses,
protecteur, sous l’action des sollicitations mécaniques de contact. mais présentent des défauts microgéométriques notés rugosité. Sans
trop rentrer dans le détail des aspects microgéométriques [B7010],
Dans le cas de la lubrification par l’huile, en raison de la réacti-
les surfaces techniques vont présenter généralement des amplitudes
vité plus importante à l’extrémité de la molécule d’huile comparée
de rugosité voisines de quelques microns pour des surfaces recti-
à celle sur le reste de la molécule, la morphologie du film d’huile
fiées, pouvant descendre à 0,5 micron dans le cas de rectifications
mince continu correspond, en première approche, à un réseau de
fines, et en dessous (0,1 à 0,5 micron) après polissage ou rodage.
molécules, disposées normalement à la surface et solidaires de
chacune des surfaces (figure 3). Ce comportement est la caractéris- Même avec les procédés d’usinage les plus poussés, il est fon-
tique intrinsèque des corps gras, et donc ce phénomène sera pré- damental de retenir pour la suite que la rugosité a une amplitude
sent déjà avec les hydrocarbures purs (la base de tout lubrifiant qui sera toujours nettement plus grande que l’épaisseur nécessaire
industriel). L’utilisation d’additifs, dits modificateurs de frottement pour établir un film mince continu soit 0,1 μm (section 2.1), si bien
ou d’onctuosité, permet de renforcer cette propriété. Ainsi des que dans un contact peuvent coexister, côte à côte, des zones
alcools gras permettent d’intensifier la liaison en gardant sa nature fonctionnant en film limite et en film mince continu. À ce titre, la
physico-chimique, tandis que les meilleures performances sont quantification de l’épaisseur de film d’huile dans un contact pose
obtenues en favorisant la chimisorption entre les molécules et le une réelle difficulté. En effet, celle-ci varie de manière significative,
substrat (c’est le cas, par exemple, des acides gras). Le comporte- car elle est modulée par la rugosité (figure 4). En conséquence, les
ment de ces additifs sera explicité plus en détail dans la section 5.2 auteurs conviennent généralement de quantifier l’épaisseur du film
mais le lecteur pourra trouver les informations les plus complètes lubrifiant par son épaisseur moyenne hm, qui correspond à la dis-
dans [B5343]. tance séparant les deux plans moyens de chacune des deux micro-
Ce mode de lubrification donne un frottement, de l’ordre de 0,1, géométries. Ces derniers peuvent être obtenus, par exemple, au
intermédiaire entre l’absence de lubrification et la lubrification en moyen de la technique des moindres carrés.
film mince continu. En raison du faible nombre de molécules de La conséquence de la variation d’épaisseur locale du film lubri-
lubrifiant dans le contact, les équations de la mécanique des fiant est la possible cohabitation à différents endroits du même
contact des différents modes locaux de lubrification. À certains
endroits, nous pourrons avoir un mode de lubrification en film

Pièce 2
Film lubrifiant

Pièce 1
hmin
Hauteur moyenne : hm
h (x)

h ⬇ 0,01 µm Molécules de lubrifiant

Figure 3 – Mode local de lubrification en film limite Figure 4 – Définition de l’épaisseur (moyenne) du film lubrifiant

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TRI 1 520v2 – 4

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_____________________________________________________________________________________________________ RÉGIME DE LUBRIFICATION MIXTE

0,25
Coefficient de frottement

Apparition de
contact sec

0,2

0,15
Régime limite 1
Régime mixte
0,1
Film mince

0,05

0
Épaisseur

Figure 5 – Enchaînement des différents régimes de lubrification

mince continu (systématiquement au niveau des creux et des som- comportement bascule vers un second régime de lubrification qui
mets les plus bas) tandis qu’au niveau des sommets les plus éle- se nomme le régime de lubrification mixte.
vés n’existera que le régime de lubrification en film limite (et
éventuellement le contact sec). Au total, quatre types de combinai-
sons sont envisageables, elles vont être détaillées dans le para- 1.4.2 Régime de lubrification mixte
graphe suivant.
La zone de transition entre les deux modes d’action élémentaire
correspond au régime de lubrification mixte caractérisé par une
partie du contact travaillant avec un mécanisme de lubrification en
1.4 Les quatre régimes de lubrification film mince continu tandis que le reste travaille en film limite
(figure 6). La principale particularité de ce régime de lubrification
À partir des deux modes locaux de lubrification (et éventuelle-
est de présenter une large plage de variation du coefficient de frot-
ment l’absence locale de lubrification), il est possible de construire
tement tout en conservant un comportement fiable et durable
l’enchaînement des différents régimes de lubrification en les para-
s’expliquant par une lubrification du contact par la base lubrifiante
métrant en fonction de l’épaisseur moyenne du film d’huile
et ses additifs (figure 5).
(figure 5). On dénombre quatre régimes de fonctionnement que
nous allons décrire successivement en allant des épaisseurs de C’est ce mécanisme de lubrification que nous allons présenter
film d’huile les plus élevées vers les épaisseurs les plus faibles. plus en détail dans cet article. Nous pouvons observer à ce stade
de l’analyse que toutes les surfaces usuelles peuvent générer ce
régime de lubrification. En effet, quel que soit le procédé d’usinage
1.4.1 Lubrification en film mince continu utilisé, si le sommet des aspérités les plus hautes travaille en film
Pour que le régime de lubrification en film mince continu soit limite alors la majorité des creux et des aspérités les plus basses
établi sur l’ensemble de la surface de contact, il ne suffit pas que va pouvoir respecter la condition locale de film mince continu.
l’épaisseur moyenne dépasse 0,1 micromètres (section 2.1), mais il
faut aussi que l’épaisseur minimale du contact soit plus grande
que 0,1 microns (figure 4). Ceci conduit, pour l’épaisseur moyenne,
à une condition incluant, au moins partiellement, les rugosités Film mince Film limite
existantes sur l’une et l’autre des pièces en contact. Le mode de
lubrification en film mince continu est observé pour les plus fortes
épaisseurs de film lubrifiant (figure 5). La lubrification en film
mince continu conduit aux frottements les plus faibles (le coeffi-
cient de frottement fM est de l’ordre de quelques millièmes à
quelques centièmes), ainsi qu’à des niveaux d’usures quasi négli-
geables. Ces performances prédisposent naturellement ce régime
de lubrification aux fonctions guidages (rotation ou translation), et
sa mise en œuvre fait appel aux deux grands principes que sont
l’hydrodynamique [B5320] et l’hydrostatique [B5325].
La lubrification en film mince continu s’arrête lorsque l’épaisseur
du film lubrifiant, en diminuant, atteint une épaisseur critique à Film discontinu
partir de laquelle le film limite commence à apparaître dans des
proportions significatives. En deçà de cette épaisseur critique, le Figure 6 – Régime de lubrification mixte

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TRI 1 520v2 – 5

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1

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Lubrification élastohydrodynamique

par Pascal GUAY


1
Ingénieur de l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon
Docteur ès Sciences
Expert en tribologie chez Airbus Defence and Space

1. Le régime élastohydrodynamique (EHD)........................................... TRI 1 540 - 3


1.1 Le contact hertzien lubrifié ......................................................................... — 3
1.2 Le régime élastohydrodynamique (EHD).................................................. — 3
1.3 Lubrification à la graisse ............................................................................ — 3
2. L’équation de Reynolds ......................................................................... — 3
2.1 Cas du contact cylindre / plan .................................................................... — 4
2.2 Vitesse d’entraînement............................................................................... — 4
3. Lubrification hydrodynamique du cylindre rigide ......................... — 5
3.1 Régime isovisqueux – théorie de Martin (1916) ....................................... — 5
3.2 Régime piézovisqueux – approche de Gatcombe .................................... — 7
4. Lubrification EHD du contact linéaire............................................... — 9
4.1 Déformation élastique des massifs en contact......................................... — 9
4.2 Solution analytique de Ertel-Grubin (1949) .............................................. — 10
4.3 Paramètres adimensionnés........................................................................ — 11
4.4 Constriction de sortie.................................................................................. — 12
4.5 Solution numérique de Pan et Hamrock (1989)........................................ — 12
5. Lubrification EHD du contact ponctuel ............................................ — 13
5.1 Dimensions de l’ellipse de contact ............................................................ — 13
5.2 Déformation élastique des massifs ........................................................... — 14
5.3 Solution exacte de Hamrock et Dowson (1977)........................................ — 14
6. Formulaire de calcul de l’épaisseur du film en régime
permanent ................................................................................................. — 15
6.1 Les quatre régimes RI, RP, EI et EP............................................................ — 15
6.2 L’école anglo-américaine : Hamrock et Dowson ...................................... — 15
6.3 L’école hollandaise : Moes et Venner........................................................ — 16
6.4 Cas des très fortes pressions de contact................................................... — 17
7. Prise en compte des effets thermiques et des conditions
d’alimentation .......................................................................................... — 17
7.1 Effets thermiques ........................................................................................ — 17
7.2 Effet des conditions d’alimentation........................................................... — 18
8. Conclusion................................................................................................. — 19
9. Glossaire .................................................................................................... — 20
Pour en savoir plus ................................................................................. Doc. TRI 1 540

’élaboration de la théorie de la lubrification élastohydrodynamique, avec la


L compréhension des phénomènes complexes qu’elle met en jeu, est une des
avancées majeures dans le domaine de la tribologie au cours du xx e siècle.
La révélation de l’existence d’un film lubrifiant insoupçonné jusque-là a
bouleversé cette science, en expliquant la remarquable efficacité de la lubri-
Parution : mars 2015

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LUBRIFICATION ÉLASTOHYDRODYNAMIQUE _____________________________________________________________________________________________

fication dans les contacts hertziens. La lubrification élastohydrodynamique


(EHD) se produit dans les contacts soumis à un effet de poinçonnement (sur-
faces non conformes), avec des pressions locales très élevées,
essentiellement dans les roulements, les engrenages et les dispositifs à
came.
Dans ces contacts soumis à une forte charge, la déformation élastique locale

1
des surfaces en regard modifie la géométrie des pièces au voisinage du
contact. L’équilibre hydrodynamique est alors régi non seulement par l’équa-
tion de Reynolds, mais également par la piézoviscosité de l’huile et par la
théorie de Hertz, ce qui permet d’engendrer des films d’épaisseur suffisante
pour séparer les pièces et limiter leur frottement et leur usure. Il s‘agit donc
d’un domaine très important pour ses applications pratiques : la théorie EHD
permet maintenant de concevoir rationnellement les roulements, les engre-
nages et les dispositifs à came, en optimisant la géométrie du contact et les
conditions de fonctionnement pour maximiser l’épaisseur du film d’huile.
Il se produit cependant deux phénomènes qui contribuent à réduire l’épais-
seur du film lubrifiant et qui sont localisés à l’entrée du contact : les effets
thermiques et les conditions d’alimentation. Les modèles actuels proposent
des facteurs correctifs qui traduisent la diminution de l’épaisseur du film lubri-
fiant causés par ces deux phénomènes.
Cet article présente le développement de cette théorie et ses avancées
récentes au début des années 2000.

Notations W Paramètre charge, défini au § 4.3 pour le contact


linéaire et § 5.3 pour le contact ponctuel
a Demi petit axe de l’ellipse, ou demi largeur du
contact linéaire, défini au § 5.1 X Compressibilité du lubrifiant, adimensionnée, défi-
nie au § 7.2
b Demi grand axe de l’ellipse de contact, défini au
§ 5.1 x Axe des abscisses selon la direction principale de
l’écoulement
cT Facteur thermique
z Axe orienté selon la normale au contact
cs Facteur de sous-alimentation (starvation factor)
αo Angle de contact oblique des roulements à billes
E’ Module d’élasticité composé, défini au § 4.1
α Coefficient de piézoviscosité de l’huile, défini au
G G = α E’ Paramètre matériau § 3.2.1
hm Épaisseur du film lubrifiant pour laquelle la pres- γ γ = D cosαo/dm Paramètre sans dimension utilisé
sion est maximale dans les roulements
ho Épaisseur du film d’huile au centre du contact κ Élongation de l’ellipse de contact κ = b /a
hmin Épaisseur minimale du film d’huile dans le contact λ λ = Rx / Ry Rapport des rayons de courbure au
H, L, M, N Paramètres de Moes, définis au § 6.3 contact (λ< 1 dans les roulements)
Lo Longueur du contact linéaire Λ Épaisseur réduite (ou paramètre de Tallian)
p Pression dans le contact μ Viscosité dynamique du lubrifiant
pH Pression de Hertz maximale dans le contact ν1,ν2 Coefficient de Poisson des solides en contact
q Pression réduite ω Vitesse de rotation
Ra Rugosité arithmétique des surfaces en contact
Rx Rayon de courbure équivalent dans le sens du
roulement, défini au § 3.1
Ry Rayon de courbure équivalent dans le sens trans- Acronymes
versal
EHD Élastohydrodynamique
U Paramètre vitesse, défini au § 4.3
u1, u2 Vitesses linéaires tangentielles des surfaces EHL ElastoHydrodynamicLubrication

w Charge normale exercée sur le contact ISO International Standard Organisation

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_____________________________________________________________________________________________ LUBRIFICATION ÉLASTOHYDRODYNAMIQUE

Historique
1
Sans
L’avancée la plus remarquable dans le domaine de la lubrifi- Coeff. de lubrifiant
cation élastohydrodynamique fut sans conteste la théorie éla- frottement
borée dans l’ombre en 1939 par le Russe Ertel et publiée
10 ans plus tard par Grubin. En effet, cette théorie donne une 0.1
épaisseur de film confortée par les résultats d’essais, et qui est
10 à 100 fois plus importante que celle obtenue avec la théorie
hydrodynamique publiée par Martin en 1916 en considérant
des corps rigides et un lubrifiant isovisqueux. Dans les années 0.01
Élastohydrodynamique
(surfaces non conformes) 1
qui suivirent, de nombreux modèles semi-empiriques ont été
élaborés et améliorés pour calculer l’épaisseur du film lubri-
fiant. Les paramètres du contact sont groupés pour former des
paramètres adimensionnés, utilisés par la suite pour trouver 0.001 Limite Mixte Hydrodynamique
une expression analytique des épaisseurs de film minimale et
centrale. La distinction claire des différents régimes de lubrifi- 1 5 Λ
cation est due aux travaux de Johnson et de Hamrock et
Dowson : rigide isovisqueux, rigide piézovisqueux, élastique
Figure 1 – La courbe de Stribeck, tracée en fonction de l’épaisseur
isovisqueux et élastique piézovisqueux. réduite Λ du film lubrifiant
L’école hollandaise avec Moes et Venner a défini d’autres
paramètres adimensionnés qui ont permis de développer les
L’épaisseur du film augmente avec la vitesse. Il existe un seuil
résolutions analytiques pour aboutir à une synthèse des diffé-
de vitesse au-delà duquel le film lubrifiant commence à assurer la
rentes théories élaborées au cours du xxe siècle, ce qui per-
portance et à séparer les aspérités des surfaces. Ce seuil corres-
met aujourd’hui en 2014 de traiter des cas plus complexes.
pond à une épaisseur réduite Λ = 1. On passe alors du régime
Ainsi, de nombreuses recherches actuelles en élastohydrody-
limite au régime mixte.
namique portent sur la caractérisation et la modélisation des
fluides lubrifiants non newtoniens. La courbe de Stribeck originale donne l’évolution du coefficient
de frottement en fonction de la vitesse de rotation d’un palier
lubrifié (voir [TRI 1500]).
On peut adapter cette courbe en portant en abscisse non plus la
1. Le régime vitesse mais l’épaisseur réduite Λ du film lubrifiant (voir figure 1).
L’allure de la courbe est la même, mais on constate que c’est en
élastohydrodynamique régime EHD que le coefficient de frottement est minimal.
(EHD) Un contact lubrifié fonctionne en régime EHD lorsque :
– les surfaces du contact sont non conformes ;
– l’épaisseur réduite vérifie la relation 3 < Λ < 10.
1.1 Le contact hertzien lubrifié
Le film lubrifiant est mince (ordre de grandeur 0,1 μm), mais
On appelle contacts hertziens les contacts soumis à de fortes suffisant pour séparer les aspérités des surfaces.
pressions de Hertz supérieures à 200 MPa. La pression dans le film lubrifiant est alors suffisamment élevée
La lubrification EHD se produit dans les contacts entre surfaces non pour déformer élastiquement les surfaces et modifier le comporte-
conformes, lesquels sont soumis à un effet de poinçonnement : prin- ment du lubrifiant (figure 2). Sous forte pression, la viscosité du
cipalement entre les dents des engrenages, dans les roulements au lubrifiant devient très grande. Le lubrifiant se comporte comme un
contact piste /élément roulant, et dans les contacts came /poussoir. solide élastique pendant la fraction de seconde où il traverse le
contact, pour retrouver immédiatement après son comportement
On la rencontre aussi en biomécanique, dans les articulations newtonien de fluide visqueux.
des membres inférieurs. La pression de contact est très faible (de
l’ordre du mégapascal) mais les cartilages poreux et riches en eau La résolution du contact EHD nécessite le couplage des équa-
ont un module de Young très bas de l’ordre de 10 à 100 MPa ([39] tions de Reynolds et des équations de l’élasticité.
chapitre 22.5). La théorie EHD doit être utilisée pour prendre en Lorsque Λ devient supérieur à 10, le film d’huile s’épaissit et ne
compte la déformation élastique des cartilages. sollicite plus la déformation élastique des massifs en contact. Le
régime de lubrification devient hydrodynamique.

1.2 Le régime élastohydrodynamique


(EHD) 1.3 Lubrification à la graisse
Le coefficient de frottement du contact lubrifié varie avec la Quand le contact hertzien est lubrifié à la graisse, l’écoulement
vitesse et suit plusieurs régimes de fonctionnement successifs qui est non newtonien. Ce cas n’est pas traité ici mais la théorie parti-
sont décrits par la courbe de Stribeck. L’article [TRI 1500] présente culière développée par Greenwood et Kanzlarich en 1972 pourra
cette courbe ainsi que les différents régimes de lubrification. être utilisée [17].
On définit l’épaisseur réduite (ou paramètre de Tallian) :

(1) 2. L’équation de Reynolds


où hmin épaisseur minimale du film lubrifiant dans le L’article [TRI 1500] présente l’équation de Reynolds établie en
contact, 1886 par l’irlandais Osborne Reynolds, à partir des équations de la
Ra1 et Ra2 rugosité moyenne arithmétique des surfaces. mécanique des fluides adaptée au cas du film mince [3]. En lubri-

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est strictement interdite. – © Editions T.I. TRI 1 540 – 3

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TRI1540

LUBRIFICATION ÉLASTOHYDRODYNAMIQUE _____________________________________________________________________________________________

Charge

ω
z

1
u2
ω2 hm x

u1
Film p(x)
hmin
lubrifiant

ω1 x

Pression de Figure 3 – Cas du contact cylindre/plan


contact p(x)

2.2 Vitesse d’entraînement


Figure 2 – Profil du contact et champ de pression en régime EHD Une difficulté rencontrée lorsqu’on utilise l’équation de Rey-
nolds est la bonne traduction de la vitesse d’entraînement u1 ± u2.
■ Cas des roulements
fication EHD, les surfaces du contact sont généralement en rota-
tion, et l’équation de Reynolds s’écrit : La vitesse d’entraînement s’exprime :
– pour un contact linéaire (par exemple un cylindre long sur un (5)
plan) :
avec ω vitesse angulaire de la partie tournante (arbre ou
(2) moyeu),
dm diamètre primitif dm = (di + de)/2,
avec x direction de l’écoulement du lubrifiant, di et de diamètre du fond de gorge piste interne / piste
externe,
h(x) épaisseur du film lubrifiant entre les surfaces
γ paramètre géométrique utilisé pour les
déformées,
roulements γ = D cosαo/dm,
p(x) pression locale dans le contact, D diamètre de bille,
μ viscosité dynamique du lubrifiant. Elle dépend de αo angle de contact oblique. Il est nul pour les
p donc de x, roulements à contact radial.
u1 et u2 vitesses tangentielles des surfaces 1 et 2 selon la La vitesse est la même pour les deux contacts élément roulant /
direction x. piste interne et élément roulant /piste externe, tant qu’il n’y a pas
– pour un contact elliptique (par exemple le contact bille/piste de glissement, ce qui est le cas pour un roulement opérant dans
dans un roulement) : des conditions normales.
■ Cas des engrenages
(3) La vitesse d’entraînement s’exprime :
(6)
Connaissant la géométrie h(x) du contact, l’équation de Rey-
avec β angle de pression,
nolds permet de connaître le champ de pression p(x) dans le
contact. On peut ensuite intégrer ce champ sur l’aire de contact ωj et rj vitesse angulaire et rayon primitif du pignon j.
pour calculer la capacité de charge du contact.
Exemple 1 : roulement à billes à contact oblique
Un roulement à billes à contact oblique de type 7004 tourne à 5000
2.1 Cas du contact cylindre / plan tr/min. Ses caractéristiques sont : diamètre de bille D = 6 mm, angle
de contact αo = 25°,
Dans le cas d’un cylindre long lubrifié par un fluide isovisqueux, diamètres de fond de gorge di = 24,972 mm et de = 37,028 mm
(viscosité indépendante de la pression), la première intégration de
On calcule la vitesse d’entraînement.
l’équation de Reynolds (2) s’effectue sans difficulté. On obtient
l’équation de Reynolds intégrée : On obtient :
– diamètre primitif : dm = (de + di) / 2 = 31,0 mm
(4) – paramètre γ : γ = D cosα /dm = 0,1754
– vitesse de rotation : ω = 5 000 × 2π/60 = 523,6 rad/s
L’épaisseur hm est une constante d’intégration, déterminée par les
conditions aux limites sur le champ de pression p(x) (figure 3). – vitesse d’entraînement :

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TRI1540

_____________________________________________________________________________________________ LUBRIFICATION ÉLASTOHYDRODYNAMIQUE

Lorsque le contact est concave :


3. Lubrification
avec R1 < 0 et R2 > 0.
hydrodynamique
du cylindre rigide Dans la zone de contact, x << Rx d’où x 2/Rx2 << 1. Le développe-
ment à l’ordre 1 suffit.
On reprend l’équation de Reynolds intégrée (4) :

1
3.1 Régime isovisqueux – théorie
de Martin (1916)
Après avoir étudié la lubrification des engrenages, H.M Martin
présente en 1916 l’étude du contact entre un cylindre long et un
plan, en supposant les surfaces indéformables et la viscosité du
fluide constante [5].
On considère deux cylindres longs de longueur Lo, à axe paral- Pour calculer cette intégrale, on effectue un changement de
lèles et de rayon R1 et R2, entraînés en rotation et qui ont dans la variable :
zone de contact les vitesses linéaires tangentielles u1 et u2 (voir
figure 4a). (9)
Hypothèses :
– cylindres longs (soit Lo > 4 R1 avec R1 rayon du cylindre le plus avec
grand) ;
– surfaces indéformables ;
– régime permanent laminaire et isotherme ;
– lubrifiant newtonien incompressible et de viscosité constante
μ = μ o. On a :

On suppose ici que la viscosité ne dépend pas de la pression


(lubrifiant équivisqueux), ce qui n’est vrai que dans les contacts
faiblement chargés.
Les cylindres étant considérés indéformables, l’épaisseur du
film épouse les contours circulaires (voir figure 4b). Lorsque les
deux cylindres sont en contact, elle vaut :
h = h1 + h2

avec

avec .

Il vient :
D’où

Lorsque les cylindres sont séparés, l’épaisseur du film au voisi-


nage du contact s’écrit :

(7)
On passe aux arcs doubles et quadruples :
avec

(8)

Rx rayon du cylindre dans le contact cylindre /plan


équivalent, (figure 4)
D’où
ho épaisseur du film d’huile au centre du contact,
R1 etR2 rayons algébriques.
On adopte la convention de signe suivante : le rayon Rj est posi-
tif quand le centre de courbure est situé à l’intérieur du solide j.
Sinon, il est négatif (figure 4d) .
On en déduit :
Lorsque le contact est convexe :

avec R1 et R2 > 0.

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27
1

28
Lubrification
(Réf. Internet 42465)

1– Théorie de la lubrification 2
2– Butées et paliers lubrifiés Réf. Internet page

Critères de choix d'un palier. Présélection B5300 31

Critères de choix d'un palier. Validation B5310 35

Matériaux pour paliers lisses B5330 43

Butées et paliers hydrodynamiques B5320 51

Butées et paliers hydrodynamiques. Caratéristiques statiques et dynamiques B5321 59

Butées et paliers hydrostatiques B5325 61

Butées et paliers aérodynamiques BM5335 67

3– Lubrifiants liquides, solides et additifs

4– Lubrifiants pour moteurs

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29
2

30
Référence Internet
B5300

Critères de choix d’un palier.


Présélection

par Roger GOJON


Ingénieur de l’École nationale supérieure d’électricité et de mécanique de Nancy
Ancien directeur technique de la Société industrielle des coussinets
2

1. Différents types de paliers.................................................................... B 5 300 - 2


2. Conditions d’ambiance, mouvement et charge .............................. — 3
2.1 Ambiance ..................................................................................................... — 3
2.2 Type de mouvement et charge................................................................... — 3
2.3 Pression-vitesse. Coefficient de frottement............................................... — 3
3. Aspects annexes ...................................................................................... — 3
4. Méthodologie de sélection.................................................................... — 4

onfronté au problème de connexion de deux pièces en mouvement relatif,


C le concepteur doit choisir entre les diverses possibilités constituées par les
nombreuses formes de paliers glissants, les différents types de roulements,
voire même, si le mouvement est alternatif, les éléments déformables.
Ce choix doit être effectué sur une base technique qui prend en compte les
caractéristiques du mouvement, l’intensité de la charge, les conditions
d’ambiance et de nombreux autres aspects quelquefois moins contraignants
mais pouvant en d’autres occasions se révéler décisifs. Par ailleurs, ce choix ne
doit pas omettre l’aspect économique et donc correspondre à la solution
globalement la moins coûteuse.
L’objectif de ce document est de présélectionner rapidement la plus écono-
mique de toutes les solutions techniquement possibles. Des calculs ultérieurs
seront nécessaires pour valider ce choix, mais compte tenu de cette présélection
ils se limiteront à un nombre restreint de solutions. L’article [B 5 310] traite ces
Parution : août 1996 - Dernière validation : décembre 2017

calculs de validation dans un ordre chronologique correspondant aux numéros


de lignes des tableaux 2, 3, 4, 5 et 6 de sélection. Pour une même ligne, les
particularités correspondant aux diverses ambiances possibles sont également
considérées. Un choix de solution étant effectué dans le présent article, le
concepteur pourra se contenter de la lecture du paragraphe correspondant de
l’article [B 5 310] pour disposer d’une documentation suffisante.

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B5300

CRITÈRES DE CHOIX D’UN PALIER. PRÉSÉLECTION ____________________________________________________________________________________________

1. Différents types de paliers Tableau 1 – Différents types de paliers avec leur désignation
en charges radiales (paliers) et axiales (butées)
Tout mouvement relatif entre deux surfaces est freiné par une force A – Paliers (ou butées) glissants à contact direct
résistante qui a pour effet de : A1 – À graissage onctueux à l’huile ou à la graisse
— provoquer de l’usure ; A2 – À base de lubrifiant solide
— consommer de l’énergie ; B – Paliers (ou butées) sans contact à film fluide (+ paliers
— engendrer des échauffements pouvant conduire à des sou- ou butées magnétiques)
dures entre les surfaces. B1 – Paliers (ou butées) à film fluide créé par le mouvement
Le guidage d’une pièce par une autre est assujetti aux difficultés B11 – Hydrodynamiques
ci-dessus. En fait, le problème du guidage en rotation est fort ancien 
puisqu’il remonte à l’histoire de la roue. B111 –  Paliers à alésage circulaire

2
 ou Butées à profil fixe
La solution a consisté : 
B112 –  Paliers à alésage multilobes (1)
a ) tout d’abord, à réduire la friction entre les deux surfaces grâce  ou Butées à patins oscillants
à l’emploi de lubrifiants et de matériaux de guidage adaptés au pro- B113 – Paliers à patins oscillants
blème et dits matériaux antifriction. Ces lubrifiants ont été initiale- B12 – Aérodynamiques
ment des huiles ou des graisses et correspondent à un régime dit

onctueux ; plus récemment, des lubrifiants solides sont également B121 –  Paliers à alésage circulaire
utilisés ;  ou Butées à profil fixe

b ) ensuite, à supprimer tout contact entre les deux surfaces grâce B122 –  Paliers à alésage multilobes (1)
à la présence d’un film fluide dont la pérennité doit être assurée sous  ou Butées à patins oscillants
la charge à supporter : B123 – Paliers à patins oscillants
— dans le cas où le film fluide est généré par le mouvement relatif B2 – Paliers (ou butées) à film fluide créé par injection du film
des deux surfaces, on est en présence de paliers : hydrodynamiques sous haute pression
si le film est liquide, aérodynamiques si le film est gazeux ; B21 – Hydrostatiques
— dans le cas où le film est créé par l’injection sous haute pres- B22 – Aérostatiques
sion de fluide, on est en présence de paliers : hydrostatiques si le B3 – Paliers (ou butées) mixtes
film est liquide, aérostatiques si le film est gazeux ; B31 – Hydrostatique au départ, puis hydrodynamique
— pour réduire le coefficient de frottement statique puis dyna- en régime
mique durant la mise en vitesse, on réalise des paliers dits mixtes B32 – Aérostatique au départ, puis aérodynamique
fonctionnant en hydro- ou aérostatique au départ puis en hydro- ou en régime
B4 – Paliers magnétiques
aérodynamique lorsqu’ils ont atteint leur vitesse de régime.
Depuis quelques décennies, la suppression de contacts entre les C – Roulements (ou butées à éléments roulants)
deux surfaces peut être obtenue par l’effet de champs magnétiques D – Silent-blocs
centrant le rotor à l’intérieur d’un palier dit magnétique ;
(1) Pour effet de précision de guidage ou pour stabilité.
c ) à insérer entre les surfaces des éléments roulants (billes,
aiguilles, galets). Cela correspond aux différentes formes de roule-
ments ;
Le choix de la nature des surfaces est également essentiel mais
d ) enfin, dans le cas de mouvements alternatifs d’amplitude il ne peut intervenir qu’à la phase ultime de la conception. Ce n’est,
modérée, à remplacer le glissement par la déformation élastique en fait, que lorsque l’on a choisi un principe de fonctionnement que
d’éléments de liaison dits silent-blocs. le choix des matériaux peut être effectué.
Ces différentes solutions à la disposition du concepteur sont réca- Les conditions d’ambiance, de nature de mouvement et de type
pitulées sur le tableau 1 pour charges radiales et axiales. Compte de charge dont découlent les possibilités de lubrification vont donc
tenu de la multiplicité des solutions, il est évident que le choix n’est jouer un rôle primordial dans le choix des solutions acceptables.
pas toujours facile. (0) Étant en général imposées par le cahier des charges, ce sont elles
La lubrification dont le rôle est d’abaisser la friction joue un rôle qui doivent être considérées en priorité dans la méthodologie de
essentiel dans les paliers du type a ) et b ) (sauf magnétiques) et reste sélection.
nécessaire pour les roulements c ). Il y a lieu de bien distinguer les Ultérieurement, ce choix étant fait, l’intensité des charges et
lubrifiants qui agissent par leurs propriétés de surface et qui sont vitesses qui vont intervenir sur l’efficacité de la lubrification, les
nécessaires aux paliers du type a ) et c ), de ceux qui autorisent le possibilités de création de film fluide, les risques d’échauffement
glissement fluide dans les paliers du type b ). permettront une seconde sélection qui prendra également en
On peut ainsi considérer trois classes de lubrifiants : compte l’intensité des coefficients de frottement statique et
— ceux autorisant le régime fluide mais n’agissant pas par leurs dynamique.
propriétés de surface, par exemple l’air ou l’eau ; Enfin, les différents types de paliers n’offrent pas tous au même
— ceux agissant par leurs propriétés de surface mais n’autorisant degré un certain nombre de propriétés annexes, mais en certains
pas le régime fluide : ce sont les lubrifiants solides et les graisses ; cas déterminantes, telles que précision de guidage, aptitude au
— ceux autorisant le régime fluide mais pouvant également agir désalignement, silence ou encombrement. Une troisième sélection
par leurs propriétés de surface : c’est le cas des huiles. pourra être effectuée selon ces critères.
Nota : quand, dans la suite de ce document, nous emploierons le terme liquide non
lubrifiant, cela signifiera sans propriétés lubrifiantes de surface. Les conditions acceptables pour charges radiales (paliers) et
axiales (butées) étant fondamentalement différentes, nous
Il faut par ailleurs noter que les lubrifiants fluides qui circulent dans proposons pour chacune de ces deux hypothèses un procédé de
le palier peuvent jouer un rôle caloporteur favorable à un abaisse- sélection basé sur les trois grandes classes de propriétés qui
ment de la température d’équilibre thermique du palier. Indépen- viennent d’être exposées.
damment de cette circulation, des échanges thermiques se font entre
le palier et le fluide ambiant. À ces points de vue, les liquides sont
préférables aux gaz.

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B 5 300 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique

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B5300

___________________________________________________________________________________________ CRITÈRES DE CHOIX D’UN PALIER. PRÉSÉLECTION

2. Conditions d’ambiance, — la translation continue avec ou sans rotation simultanée (ne


s’appliquant évidemment qu’aux charges radiales).
mouvement et charge La marche intermittente n’est pas prise en compte à ce niveau.
Pour les paliers types a ), une première indication des possibilités
de marche peut être obtenue en remplaçant la vitesse instantanée,
2.1 Ambiance correspondant à la vitesse en période de marche, par la vitesse
moyenne prenant en compte les périodes d’arrêt. La réalité sera
Nous distinguons : intermédiaire entre les possibilités correspondant à la vitesse ins-
— le vide ; tantanée et la vitesse moyenne, et d’autant plus proche de celles
— l’ambiance gaz : graissage prohibé ou graissage admis, avec, correspondant à cette vitesse moyenne que les périodes de fonc-
pour chaque cas, les basses températures, les températures usuelles tionnement seront courtes.
et les hautes températures ;
Pour les paliers types b ), c ) et d ), les possibilités de marche en

2
— l’ambiance liquide sans propriété lubrifiante de surface, par
mouvement intermittent sont identiques à celles en mouvement
exemple l’eau ou l’essence ;
continu.
— l’ambiance carter formant réceptacle à huile et donc autorisant
sans complication toute forme de lubrification, par projections, par
bains d’huile ou sous pression ;
— le palier sous carter créé spécifiquement pour lui-même. 2.3 Pression-vitesse.
Pour plus de clarté, on désignera ces ambiances par les numéros Coefficient de frottement
suivants. (0)

Ces critères fondamentaux pression-vitesse interviennent par


1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 leurs valeurs extrêmes et aussi par leur combinaison que l’on peut
Ambiance gazeuse relier aux risques d’échauffement et au taux d’usure.
Ambiance carter La présentation dans un diagramme pv [ou exceptionnellement
Présence huile ou graisse formant réceptacle
pression-fréquence des inversions de charge] des limites autorisées
Sous carter huile spécifique

à huile
sans propriétés lubrifiantes

prohibée admise nous paraît la plus parlante. Les limites ne sont pas rigoureuses.
Vide – 200 oC < θ < 500 oC

Faute d’une autre solution, on ne devra pas rejeter avant des calculs
Hors projection d’huile

plus précis une solution proche du domaine acceptable. Réciproque-


Soumis à projection
150°C
180°C

150°C
180°C

ment, des calculs plus précis seront nécessaires pour juger des pos-
Passage cyclique
Ambiance liquide

Alimenté en huile

sibilités à l’intérieur du domaine acceptable mais au voisinage de


en bain d’huile
En bain d’huile

sous pression
<θ<

<θ<

ses limites.
– 30°C
θ < – 40°C

30°C
θ < –– 40°C
150°C
θ > 180°C

150°C
θ > 180°C

au palier

Les coefficients de frottement statique et dynamique sont éga-


– 30°C
– 40°C

– 30°C
– 40°C

d’huile

lement à considérer. Ce n’est qu’après le choix du matériau de palier


et du type de lubrifiant que l’on pourra affiner ces valeurs.

L’ambiance naturellement imposée pouvant laisser la porte


ouverte à d’autres possibilités mieux adaptées, il importe de bien
réfléchir aux diverses alternatives possibles.
3. Aspects annexes
En particulier :
— l’ambiance 3 (température usuelle, graisse prohibée) laisse la ■ Précision de guidage : elle est exprimée en 10–4 D, c’est-à-dire
possibilité d’un carter spécifique 14 parfaitement étanche ; que, pour un arbre de diamètre 10 mm dont la précision de guidage
— de même, l’ambiance 6 autorise la création d’un carter 14 avec est de 1, la liberté de mouvement radial de l’arbre est de 1 µm. De
moins de précautions en ce qui concerne l’étanchéité ; même, pour une butée, elle exprime le jeu axial en 10–4 D.
— les ambiances 9-10-11 sous carter formant réceptacle à huile ■ Aptitude à accepter des désalignements : compte tenu des prin-
autorisent souvent à peu de frais l’ambiance 13 (alimentation en cipes de construction ou de mouvements de flexion, certains arbres
huile sous pression). peuvent présenter des désalignements par rapport aux paliers.
Toutes ces ambiances optionnelles correspondent à des per- Si cette aptitude pour un roulement ou une butée à galets sphé-
formances majorées. Parallèlement à l’ambiance naturellement riques peut être qualifiée d’excellente, celle d’un palier aérostatique
imposée X, il pourra être intéressant de considérer les ambiances qui fonctionne avec des jeux de quelques micromètres peut être qua-
optionnelles X1 ainsi définies, voire même X 2 , les alternatives ne lifiée de très faible.
se limitant pas obligatoirement à celles qui viennent d’être citées.
Entre ces extrêmes, nous distinguons des aptitudes faibles,
moyennes et bonnes, mais ce classement ne prend pas en compte
l’effet de dispositifs spéciaux d’alignement.
2.2 Type de mouvement et charge ■ Encombrement : pour les paliers, le chiffre cité correspond au
rapport entre le diamètre extérieur de l’élément de glissement ou
La sélection charge radiale/charge axiale étant déjà effectuée, on roulement et le diamètre d’arbre. Pour les butées, il exprime le rap-
distinguera : port épaisseur d’une direction de poussée/diamètre d’arbre, hors
épaisseur collet de poussée.
— la rotation continue : charge statique ou dynamique ;
— l’oscillation continue : charge statique ou charge alternative ■ Silence : on peut distinguer entre excellent donc très silencieux,
selon sensiblement la même direction par rapport au palier ; moyen et faible donc assez bruyant.

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Critères de choix d’un palier.


Validation

par Roger GOJON


Ingénieur de l’École nationale d’électricité et de mécanique de Nancy
Ancien directeur technique de la Société industrielle des coussinets
2
1. Préliminaire ............................................................................................... B 5 310 - 2
2. Matériaux pour paliers lisses................................................................ — 2
3. Charge radiale. Rotation continue ...................................................... — 3
4. Charge radiale. Mouvement oscillant ................................................ — 16
5. Charge radiale. Translation avec ou sans rotation simultanée... — 21
6. Charge axiale. Rotation continue........................................................ — 22
7. Charge axiale. Mouvement oscillant .................................................. — 27
8. Aspects généraux .................................................................................... — 27
9. Conditions particulières d’emploi....................................................... — 30
10. Aspects divers .......................................................................................... — 31

article [B 5 300] « Critères de choix d’un palier. Présélection » a permis la défi-


L nition d’un type de palier qui a priori s’accommode des conditions ambiantes
imposées et pour lequel :
— le coefficients de frottement statique et dynamique ;
— les capacités de charge et vitesse ;
— les aptitudes annexes, telles que précision de guidage, capacité à accepter
les défauts d’alignement, encombrement, silence,
semblent acceptables.
Il y a lieu maintenant de valider cette solution, en principe la plus avantageuse
financièrement. Il pourra néanmoins se faire que des solutions voisines soient
finalement plus attractives et il sera toujours préférable d’essayer de confirmer
son choix par référence à des mécanismes semblables existants ou par une
analyse de la valeur portant sur les quelques solutions en balance.
Ainsi que le lecteur s’en rendra compte, cet article constitue un complément
indispensable à l’article [B 5 300] pour affiner rapidement la validité des choix
initiaux. Se voulant d’usage aisé, il s’en tient largement aux principes et à des
formules de calcul simplifiées. Les renvois aux articles de la collection traitant
du même sujet permettront des calculs de validation encore plus exacts. Comme
cela sera dit maintes fois, ces calculs devront finalement être confirmés par le
fournisseur de paliers qui est le seul à connaître certaines caractéristiques
indispensables à une bonne approche du problème (coefficient de frottement,
conductivité thermique, etc.).
Parution : janvier 1997

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 310 − 1

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B5310

CRITÈRES DE CHOIX D’UN PALIER. VALIDATION ______________________________________________________________________________________________

1. Préliminaire 2.1 Matériaux à base de lubrifiant solide


Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 330], § 3 Matériaux M1.
La validation technique implique le choix du matériau du frotte-
ment ou du type de roulement. Cela permet d’affiner la valeur des Ils présentent les caractéristiques suivantes :
coefficients de frottement, de prévoir la durée de vie et les fréquences — ils sont, en général, les plus coûteux ;
d’opérations d’entretien, de définir les caractéristiques de l’arbre et — ils ont un coefficient de frottement statique voisin du coefficient
des accessoires éventuels tels que la pompe à huile, le filtre, les joints dynamique, très variable selon la charge : le coefficient statique est
de protection, etc., et finalement de calculer avec précision le coût en général plus faible que celui des matériaux lubrifiés ; en revanche,
relatif des diverses solutions. le coefficient dynamique est plus élevé que celui de ces mêmes
matériaux ;
À ce sujet, il y a lieu de bien considérer l’ensemble des éléments — lorsqu’ils sont utilisés à sec, ils s’usent et ont donc une durée
entrant dans le coût global et non celui de la seule pièce de frotte- de vie limitée ;

2
ment, roulement ou silent-bloc. Il y a donc lieu de ne pas omettre — ils exigent des arbres de haute qualité de finition, à défaut de
les coûts : quoi l’usure est encore plus rapide ;
— de la matière, du traitement éventuel et de l’usinage finition — la plupart des versions composites multicouches ne sont pas
de l’arbre et du logement ; réusinables, mais les produits massifs le sont ;
— des joints de protection éventuelle ; — ils peuvent être utilisés en présence d’huile et de graisse en
— du système de lubrification ; régime onctueux et fluide.
puis au-delà de la manière dont on pense qu’ils pourront être perçus On peut distinguer :
par le client, les coûts : • (M1)1 produits massifs : graphite, PTFE et composites
— d’entretien (fréquence des graissages, des vidanges, des [[B 5 330], § 3.1.2 ; 3.1.3]
changements de filtres) ; • (M1)2 films lubrifiants, principalement MoS2 [[B 5 330],
— de l’interchangeabilité ; § 3.1.1]
— de l’énergie de frottement. • (M1)3 composites multicouches [[B 5 330], § 3.1.4 ; 3.1.5].
Le bilan comparatif entre deux solutions peut donc être une
opération très longue et difficile et cela justifie l’intérêt d’un choix
préliminaire aussi fin que possible. 2.2 Matériaux métalliques
Cet article s’intéresse prioritairement aux paliers lisses à contact pour régime onctueux
direct ou à régime fluide et n’évoque pas dans le détail la
constitution et le choix des types de roulements (cf. articles Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 330], § 4 Matériaux M2.
spécialisés [B 5 370] et [B 5 380] de ce traité). En les dimensionnant
de façon satisfaisante, ces pièces sont adaptées à toutes les Ils présentent les caractéristiques suivantes :
possibilités de charges et présentent une gamme de vitesses accep- — ils sont, en général, les moins coûteux ;
tables étendue et encore récemment améliorée par la mise au point — ils ont un coefficient de frottement dynamique inférieur au coef-
de roulements à billes ou à galets creux. ficient statique, avec un coefficient dynamique inférieur à celui des
L’essentiel de cet article (§ 3, 4, 5, 6 et 7) traite ligne par ligne des matériaux M1 utilisés à sec et un coefficient statique supérieur à celui
diverses solutions techniques envisagées dans l’article [B 5 300] des matériaux M1 ;
Critères de choix. Présélection. Chacun des paragraphes se compose — s’ils sont bien graissés, ils s’usent peu, mais les graissages
de divisions : doivent être fréquents ;
— ils sont modérément exigeants en qualité d’arbre ;
— Références à l’article de ce traité spécialisé sur ce sujet ;
— ils peuvent être usinés mais aussi calibrés par olivage après
— Généralités, permettant au lecteur non spécialiste de se faire
leur mise en place (procédé très économique) ;
rapidement une première idée de ce mode de fonctionnement ;
— ils ne sont en général ni adaptés au régime fluide ni au régime
— Capacités, donnant des précisions un peu plus affinées qu’à
à sec.
l’article [B 5 300] mais ne constituant encore pas un calcul de
validation ; On peut distinguer :
— Calculs, précisant le ou les paragraphes du document de réfé- • (M2A)M produits sans réserve de lubrifiant : bronze, alliages
rence auxquels il y a lieu de se reporter, et qui éventuellement le d’aluminium en massif ou bicouches [[B 5 330],
ou les complète par des exemples chiffrés. § 4.1.3]
Restant à l’intérieur de cette division Calculs et passant ensuite • (M2B)M produits avec réserve de lubrifiant ;
aux diverses conditions ambiantes, nous considérerons, si cela (M2B)M1 bronzes poreux imprégnés d’huile
apparaît nécessaire, la technologie de construction du palier [[B 5 330], § 4.1.3 ; 4.2.2 (capillarité)],
(principalement le système de lubrification) et le choix des maté- (M2B)M2 bronzes alvéolés [[B 5 330], § 4.1.3 ; 4.2.2
riaux, et illustrerons ces aspects par des exemples pratiques (indentations)].
d’utilisation. Dans bien des cas, ce ne sera qu’après avoir fait un choix
des matériaux arbre/lubrifiant et surtout palier que l’on pourra
revenir au processus de calcul en y introduisant les valeurs 2.3 Matériaux plastiques
caractéristiques de frottement, conductivité thermique, etc.) corres-
pondant à la solution envisagée. pour régime onctueux
Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 330], § 4 Matériaux M2.
Ils présentent les caractéristiques suivantes :
2. Matériaux pour paliers — ils sont, en général, d’un coût intermédiaire entre les matériaux
M1 et (M2)M (§ 2.1 et 2.2) ;
lisses — ils ont un coefficient de frottement dynamique inférieur à leur
coefficient statique et inférieur au coefficient dynamique des
Ce paragraphe n’a pour but que de mettre en évidence les aspects matériaux (M2)M ;
qui vont influer sur le choix des matériaux. — s’ils sont bien graissés, ils ne s’usent pratiquement pas ; ils
acceptent de très longs intervalles entre les graissages ;
— ils sont aussi exigeants que M1 en qualité d’arbre ;

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— en général, ils peuvent être usinés ; Nota : les produits massifs sont peu cités dans les exemples d’application. Hormis le
fait d’autoriser la fabrication de pièces spéciales de forme compliquée, parfois par moulage
— ils sont sujets à des attaques par les lubrifiants oxydés ; certains donc à des coûts très intéressants, ils ne présentent plutôt que des désavantages par rapport
n’acceptent que des domaines de température limités ; aux autres produits.
— les matériaux thermoplastiques sont adaptés au régime fluide ; Il ne faut pas perdre de vue toutefois qu’ils peuvent apporter des solutions intéressantes
— avec une usure plus ou moins intense, ils peuvent éventuel- à certains problèmes comme, par exemple, le montage de bagues à l’azote liquide.
lement fonctionner à sec sans soudures dangereuses avec l’arbre
mais avec un coefficient de frottement élevé.
On peut distinguer :
• (M2A)P produits sans réserve de lubrifiant 3. Charge radiale.
(M2A)P1 produits massifs [[B 5 330], § 4.1.2] Rotation continue
(M2A)P2 multicouches [[B 5 330], § 4.1.2]
• (M2B)P produits avec réserve de lubrifiant. Il s’agit en général

2
de produits multicouches présentant des indenta-
3.1 Lubrification onctueuse
tions en surface formant la réserve de graisse. à l’huile ou à la graisse
Remarque : certains matériaux plastiques ([B 5 330], § 4.1.1) sont modérément chargés
en lubrifiant solide. Ils conjuguent ainsi les avantages de M1 en termes de coefficient de Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 300] tableau 2 ligne 1.
frottement statique à ceux de (M2)P en termes de coefficient de frottement dynamique et
absence d’usure en régime onctueux. En cas de problème difficile, il est nécessaire de
consulter les fournisseurs pour connaître ce dont ils disposent car l’évolution dans ce
■ Références : [B 5 330].
domaine est assez rapide.
■ Généralités : par régime onctueux, on entend régime de fonction-
nement sans séparation des surfaces par un film fluide mais avec
l’utilisation de lubrifiants qui réduisent la friction. Ce régime de
2.4 Matériaux pour régime fluide marche est désigné « boundary » par les anglo-saxons. Il est aussi
appelé régime mixte, mais cela sous-entend qu’une partie de la
Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 330], § 5 Matériaux M3. charge est supportée par un film sous pression, ce qui n’est pas
Ils présentent les caractéristiques suivantes : toujours le cas.
— ils sont peu coûteux en bicouches, beaucoup plus en Le régime onctueux est le plus ancien mode de fonctionnement
multicouches ; des paliers. Il est limité à la gamme de températures acceptables
— ils ont un coefficient de frottement statique du même ordre que par le lubrifiant, soit sensiblement – 40 oC à + 180 oC. L’adhérence
celui des matériaux (M2)M et un coefficient dynamique donné par du film onctueux est fonction de la température et des pressions qu’il
le régime fluide ; y a lieu de limiter en conséquence.
— ils ne s’usent en principe pas en régime fluide mais, en régime Moyennant des lubrifications à des intervalles assez rapprochés,
mixte (§ 8.2) leur usure dépend de leur aptitude à roder l’arbre ; on peut éviter les usures. Ces intervalles dépendent largement de
— ils ne sont ni adaptés au régime onctueux ni au régime à sec. l’affinité du lubrifiant pour la surface du palier. Cette adhérence étant
Par capacité de charge croissante, on distingue en particulier : bien meilleure sur les matériaux plastiques que sur les matériaux
• (M3)1 bicouches métaux blancs [[B 5 330], § 5.1.1] métalliques, des pressions beaucoup plus élevées et des intervalles
de lubrification beaucoup plus espacés peuvent être acceptés par
• (M3)2 bicouches base aluminium [[B 5 330], § 5.1.3]
les matériaux plastiques.
• (M3)3 multicouches base aluminium [[B 5 330], § 5.1.3 et 5.1.4]
multicouches base cuproplomb [[B 5 330], § 5.1.2 et ■ Capacités (dégrossissage des possibilités d’emploi) :
5.1.4]. ● p max = 10 à 20 MPa pour les matériaux métalliques,
En conclusion, les possibilités d’utilisation des différentes classes 50 MPa pour les plastiques.
de matériaux peuvent se résumer par le tableau suivant : (0) ● v max = généralement 2 à 3 m/s, voire 5 m/s en lubrification à
la graisse, 10 à 20 m/s en lubrification à l’huile.
Matériau
● pv (MPa · m/s) en marche continue :
Régime
M1 M2B M2A M3 — ambiance gazeuse, conditions moyennes de ventilation de
1 à 2 m/s :
À sec conçu pour pv max = 0,1 k D · k T1 / f
Onctueux, avec kDcoefficient de dimension (figure 1a ),
graissage possible (1) conçu pour
à vie k T1 coefficient de température (figure 1b ),
Onctueux, f coefficient de frottement dynamique ;
alimenté — ambiance liquide :
périodique-
ment possible (1) possible (2) conçu pour pv max = 0,5 k D · k T1 / f
ou de façon
permanente En marche intermittente, se reporter au paragraphe 8.1.
en lubrifiant ● Coefficient de frottement :
possible — statique ≈ 0,15 ;
Régime fluide possible (1) possible (4) conçu pour — dynamique : avec de la graisse ou de l’huile en petite quantité,
(2) (3)
0,03 à 0,12 ;
(1) M1 est choisi en cas de pressions élevées pouvant rompre le film
onctueux (mais il y a alors risque d’usure rapide), ou surtout pour
en bain d’huile, 0,02 à 0,08 (0,12 avec produits
abaisser le coefficient de frottement statique. métalliques).
(2) M2B peut être choisi si le mode de lubrification est tel qu’il faut un certain o
● Température : – 40 à + 180 C pour une bonne tenue du lubri-
temps de marche pour voir arriver le lubrifiant (en graissage par fi a n t , g a m m e p l u s l i m i t é e p o u r c e r t a i n s
projection) ou si l’on est en graissage périodique. plastiques.
(3) M2B n’est toutefois pas un bon choix car les alvéoles augmentent la
friction. Il ne peut être justifié que par la conjonction du cas (4) et d’une ● Durée de vie : peu d’usure si le graissage reste effectif, usure
possibilité de mise en route sans lubrification immédiate [cas (2)]. forte si manque de lubrifiant, en conséquence,
(4) M2A peut être choisi si, dans la plage d’utilisation, on trouve des marches durée de vue très variable.
en régime mixte très sévères et des marches en pur régime fluide.

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●Fréquence du graissage :
— produits métalliques : de 1 h à 1 jour ;
— produits plastiques : d’une semaine à quelques mois, voire une
année ou à vie.
■ Calculs de confirmation (après choix du matériau) : [B 5 330] § 4.3.

3.1.1 Ambiance gazeuse, graissage admis.


Sous carter mais hors projections d’huile

Le graissage peut être à l’huile ou à la graisse et être effectué à


vie, de façon périodique ou en continu, cela conduit à différentes

2 technologies et différents matériaux correspondant aux cas A, B, C


et D suivants. (0)

Graissage
Mode
Graisse Huile
À vie A B
Périodique C très rare
En continu D

■ Cas A - Graissage à vie


Figure 1 – Coefficients correcteurs de dimension K D
Les différentes possibilités sont :
et de température K T1
• A1 matériau (M2B)P (figure 2a ) ;
• A2 matériau (M2A)P2 avec des gorges formant réserves de
graisse (figure 2b ) ;
• A3 matériau (M2B)M2 également possible avec des perfor-
mances réduites mais demande moins d’exigence du point
de vue de la qualité de l’arbre ;
• A4 matériau (M1)3 utilisé avec un succès relatif (figure 2c )
ayant le développement des matériaux (M2A)P et (M2B)P.
Dans tous les cas A1 à A4, il est avantageux de prévoir des joints
de protection.
Exemples :
• A4 sur des paliers de tambour de machine à laver à axe horizontal,
vitesse d’essorage 300 tr/min (figure 2d ) ;
• A1 et A2 même application mais avec une vitesse d’essorage de
400 tr/min ; au-delà de 400 tr/min, il est nécessaire de passer aux
roulements ;
• A3 sur des paliers de démarreurs de moteurs de voiture (rotor
et pignon). Le faible temps effectif d’utilisation permet l’emploi de
bagues en bronze alvéolées et graissées à vie à la graisse graphitée.
■ Cas B - Huilage à vie
On choisira le (M2B)M1, bronze fritté poreux imprégné d’huile. Ce
matériau présente la possibilité d’être calibré au montage par défor-
mation (olivage) et donc de posséder une très bonne capacité de
guidage.
Exemples :
● Paliers de dynamos de moteurs automobiles, v ≈ 5 m/s,

pv ≈ 1 MPa · m/s. La solution n’a pas pu être reconduite sur alternateurs


suite à des pv plus élevés et compte tenu de l’ambiance chaude sous
le capot moteur.
● Paliers d’appareils électroménagers, par exemple des aspirateurs,

20 000 tr/min, bagues ∅ 8 mm, v ≈ 8 m/s, pv ≈ 0,5 MPa · m/s. Dans la


même application, les bagues cas A ne donnent pas satisfaction.
■ Cas C - Graissages périodiques
On choisira : Figure 2 – Différents détails de lubrification des bagues

— le (M2A)M si l’arbre est de qualité moyenne et des graissages


fréquents admis ; — le (M2A)P si l’espacement des graissages est souhaité ; il faut
alors un arbre d’un état de surface de très haute qualité.

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Il faut prévoir des gorges permettant la distribution de graisse à en régime mixte. L’évacuation thermique notablement accrue auto-
partir d’un graisseur central (figure 2e ). Si des joints sont prévus, rise les produits pv majorés comme indiqués au début du
ils doivent être tels qu’ils laissent sortir la graisse. paragraphe 3.1.
● Matériau : aux basses pressions, on préférera (M2A)M et aux
Exemple : arbres de transmission sur matériel agricole.
pressions élevées (M2A)P2 mais, si la pression moyenne est faible
■ Cas D - graissage permanent à l’huile (au goutte à goutte avec des pointes élevées, on pourra adopter (M2A)M pour éviter les
ou par graissage centralisé) risques de fatigue.
On choisira les (M2A)M ou (M2A)P suivant la figure 2e ou avec ● Dessin : prévoir une gorge débouchante à l’opposé de la charge

une seule gorge axiale de distribution de lubrifiant. (figure 2g ). Cependant, si le mouvement est très lent, on peut se
passer de gorge. C’est une question de débit d’entrée de l’huile dans
Exemples :
le palier qui, indépendamment de la gorge, se fait aussi par le jeu.
● Paliers de vilebrequin de presse mécanique ≈ 2 tr/s, ∅ ≈ 100 mm,

2
pv moy ≈ 0,5 MPa · m/s, p de pointe > 50 MPa justifiant le matériau
(M2A)M pour des questions de fatigue. 3.1.5 Régime onctueux, alimentation par pompe
● Paliers de laminoir v ≈ 0,2 m/s (∅ 300 mm), p = 5 à 7 MPa, le maté-

riau (M2A)P est préféré pour non-rupture du film d’huile avec un Comme au paragraphe 3.1.4 , la vitesse est très faible
refroidissement amélioré par une circulation d’eau dans l’arbre et la puisqu’au-delà on serait en régime mixte. La chaleur évacuée par
palier. la circulation d’huile dans le film est donc très modérée. Pour p supé-
rieure à 1 MPa, elle devient insuffisante pour maintenir une tempé-
rature assez basse et, pour pv supérieur à 2 fois celui acceptable
3.1.2 Sous carter, soumis à des projections d’huile en ambiance gazeuse, il faut prévoir des gorges axiales débou-
chantes dans la zone de charge pour assurer le refroidissement
Ces projections en faible quantité peuvent assurer la pérennité de (figure 2h ). Mais attention, ces gorges nuisibles à l’établissement
la lubrification mais, sauf dispositions particulières, elles ne peuvent d’un régime mixte et ne doivent être adoptées que pour les très
ni permettre l’établissement d’un régime hydrodynamique, ni activer faibles vitesses.
de façon notable l’évacuation calorifique. Ce cas reste donc sensi-
Même à vitesse très faible avec des gorges débouchantes, il peut
blement identique à celui du paragraphe 3.1.1.
y avoir un problème d’évacuation thermique. Il faut donc limiter pv
■ Matériau (M2B)M2 à 3 fois celui autorisé en ambiance gazeuse.
La réserve du lubrifiant set souhaitable pour assurer la lubrification Matériau : comme dans § 3.1.4, (M2A)M ou (M2A)P2.
au démarrage avant que les projections aient pu réalimenter le
lubrifiant (figure 2a ).
■ Matériaux (M2A)P2 ou (M2B)P 3.2 Lubrification à base
Ils peuvent aussi être envisagés mais sont rarement justifiés car de lubrifiants solides
le graissage permanent et les pressions souvent faibles rendent les
produits métalliques parfaitement compatibles. En contrepartie, il
est fréquent que les huiles du bain acidifiés par les hautes tempé- Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 300] tableau 2 ligne 2.
ratures puissent attaquer les revêtements plastiques.
■ Références : [B 5 330]
La figure 2f montre une à trois gorges débouchantes pour faire
circuler l’huile. ■ Généralités : l’emploi d’un matériau à base de lubrifiants solides
conduit au transfert sur l’arbre d’une pellicule de ce lubrifiant et à un
Exemple : bagues de pignons fous de boîtes de vitesses des fonctionnement lubrifiant solide/lubrifiant solide. Cela :
voitures et camions, v jusqu’à 10 à 15 m/s avec p faible de l’ordre de
— évite la nécessité de présence d’huile ou de graisse et donc les
0,1 MPa ; en position crabotée, vitesse nulle et pression élevée.
risques de pollution ou de contamination ;
Souvent, le léger mouvement autorisé par le jeu conduit en position — étend les possibilités d’utilisation à des domaines de tempé-
crabotée à du fretting et à la reproduction des alvéoles dans l’arbre. Pour ratures qui sont inacceptables pour les huiles ou graisses ;
cela et pour réduire le jeu, les paliers lisses sont dans cette application — autorise des ambiances inacceptables pour les huiles ou
de plus en plus remplacés par des aiguilles. graisses (vides, liquides tels que solvants, eau, etc.) ;
— permet des pressions très élevées car les films lubrifiants
solides sont en général très adhérents ;
3.1.3 Sous carter, passage cyclique en bain d’huile — évite le phénomène de stick-slip (avance par saccades) du fait
de l’égalité entre coefficients de frottement statique et dynamique ;
Le passage en bain d’huile favorise l’évacuation thermique et — favorise les possibilités de départ sous charge, car le coefficient
assure une bonne lubrification. de frottement statique est en général plus faible que celui des
Pour le calcul, on pourra admettre : produits pour régime onctueux. En contrepartie, le coefficient de
frottement dynamique, supérieur à celui de ces mêmes matériaux,
pv = pv autorisé en ambiance gazeuse correspond à davantage de perte de puissance ;
+ (pv autorisé en bain d’huile · x ) — implique une usure du palier du fait de la réalimentation du
x représentant le pourcentage de temps passé en bain d’huile. film transféré sur l’arbre, donc une augmentation progressive du jeu,
donc une limitation de la durée de vie.
● Matériau : (M2A)M ou (M2A)P2
● Dessin : idem § 3.1.2 (figure 2f ). ■ Capacités (dégrossissage des possibilités d’emploi)
● p max = 100, voire 300 MPa en terme de tenue de film, mais il faut
choisir un matériau résistant en fatigue.
3.1.4 Régime onctueux en bain d’huile ● v max = 2 à 3 m/s sauf cas du graphite pour lequel v max peut aller
jusqu’à 10 à 15 m/s.
Cette situation ne correspond qu’à des mouvements de rotation ● pv max (MPa · m/s), en marche continue :
très lents puisque dès qu’il y a une vitesse appréciable, on passe

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— ambiance gazeuse, conditions moyennes de ventilation de 1 Le coefficient de frottement statique, meilleur qu’avec le matériau
à 2 m/s : M2, constitue en fait la seule véritable raison de préférer un matériau
pv max = 0,15 k D · k T2 /f à base de lubrifiants solides à un matériau pour graissage onctueux.
avec kD coefficient de dimension (figure 1a ), Exemples : bagues de galets de pistons de moteurs hydrauliques
à pistons radiaux. Le matériau M1 est préféré pour des facilités de
k T2 coefficient de température tel que :
démarrage sous couple résistant et le matériau M2 pour sa tenue à
k T2 = (θmax admise par matériau – θambiante )/100 long terme. Mais on est alors dans le cas du § 3.1.1 (dans cette dernière
à limiter à 1 pour éviter des risques de déformation application, le lubrifiant est de l’huile).
thermique,
f coefficient de frottement dynamique ;
— ambiance liquide : on peut autoriser des pv 3 à 4 fois plus
3.2.4 Ambiance liquide sans propriétés
élevés que ceux admis pour l’ambiance gazeuse. lubrifiantes de surface

2 En marche intermittente, se reporter au paragraphe 8.1.


● Coefficient de frottement : dépendant largement du type de
Le mélange d’un lubrifiant à propriétés de surface avec les liquides
divers étant impossible, il faut impérativement un matériau de type
matériau, des pressions et des vitesses (il varie de 0,03 à 0,30). M1.
o
● Températures acceptables : de – 250 C à + 500 C, voire
o
Les principes de calcul restent inchangés :
au-delà. — le bilan thermique favorisé par la meilleure convection donc
● Durée de vie : le taux d’usure est sensiblement proportionnel au pv plus élevé qu’en ambiance gazeuse ;
produit pv et s’accroît en général avec la température. Des durées de — taux d’usure modifié.
vie maximales de l’ordre de 1 000 h pour 1 MPa · m/s correspondent
aux meilleures matériaux disponibles et supposent des arbres de Exemples :
haute qualité. • montage de roues de vannes wagons (ouvrages hydroélectriques)
sur (M1)3, ambiance eau ;
■ Calculs de confirmation (après choix du matériau) : se reporter en • paliers (M1)3 dans pompes à essence ;
[B 5 330], § 3.2.4. • paliers (M1)3 fonctionnant dans l’azote liquide.

3.2.1 Ambiance vide 3.2.5 Au contact de l’huile, sous carter


formant réceptacle à huile
Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 330], § 6.1.
● Matériau : M1. Comme au § 3.2.3, le choix d’un matériau M1 dans ce cas de figure
● Dessin : alésage lisse (figure 2c ), pas de graisse. ne peut résulter que de la volonté de se garantir contre les ruptures
de film onctueux ou par le désir de réduire le coefficient de frottement
Exemple : palier de moteur électrique 1 500 tr/min, v ≈ 1,5 m/s, statique.
p ≈ 0,1 MPa, refroidissement par circulation d’eau, durée de vie
Deux cas extrêmes peuvent se présenter avec des possibilités de
obtenue de quelques centaines d’heures.
mixage :
— on fonctionne en régime onctueux sur le matériau M1 qui
3.2.2 Ambiance gazeuse, graissage prohibé apporte une sécurité que l’on utilise que très rarement. On est alors
amené au cas des § 3.1.2, 3.1.3, 3.1.4 et 3.1.5 ;
● Matériau : M1. — on fonctionne grâce aux propriétés à sec du matériau M1,
l’usure est alors plutôt plus rapide que sans huile.
● Dessin : alésage lisse (figure 2c ), pas de graisse. Attention à la
corrosion donc à la nature des arbres et logements. Attention aux
abrasifs, prévoir des chicanes de protection, mais laisser la place
pour des débris d’usure (figure 2i ). 3.3 Paliers hydrodynamiques
Exemples : à alésage cylindrique
● Paliers pour machines alimentaires, textile, matériel d’imprimerie,

à des températures usuelles.


Le lecteur pourra se référer à l’article [B 5 300] tableau 2 ligne 3.
● Bague de rotation de rouleaux de convoyage dans des fours tunnels

de séchage de peinture, à des températures élevées. ■ Références : [B 5 320] [B 5 330].


■ Généralités : sous condition d’une alimentation en huile ou liquide
en quantité suffisante, la rotation de l’arbre et la convergence du film
3.2.3 Ambiance gazeuse, températures usuelles,
font naître une pression dans ce dernier. Celle-ci crée une portance
graissage admis. qui tend à séparer l’arbre du palier.
Sous carter mais hors projections d’huile
Si la séparation est totale et que donc tout contact est évité entre
● On fait le choix de ne pas graisser : se reporter au § 3.2.2. les deux pièces en mouvement relatif, on passe en régime fluide.
Ce dernier étant créé par la rotation de l’arbre, on le qualifie
● On choisit de graisser : cela résout les problèmes de corrosion
d’« hydrodynamique ».
et de pénétration d’abrasifs mais à long terme, à défaut de joint, il y
a un risque d’élimination de la graisse. Par ailleurs il y a une possi- Si la séparation n’est qu’imparfaite, on sera en régime mixte. Ce
bilité de dessèchement de la graisse. mode de fonctionnement assez fréquent est traité au paragraphe 8.2.
Sous haute pression (p > 50 MPa), le matériau M1 apporte une La transition entre le régime hydrodynamique et le régime fluide
sécurité en terme de rupture de film lubrifiant adsorbé, mais il faut dépend de la relation existant entre l’épaisseur de film théorique et
pour cela des vitesses extrêmement faibles puisque pv est limité. les défauts de forme de l’arbre rugosité comprise.

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Pour des arbres d’un haut standard de qualité, type vilebrequin Avant d’entrer dans les détails du calcul, il y a lieu de bien se
de moteur thermique, la relation : situer en terme de type de charge d’où découlent aussi des tech-
nologies différentes de construction du palier. (0)
épaisseur h mini film (µm) = 5 Ra (µm)+ 0,02 D arbre (mm)
avec Ra rugosité CLA,
constitue une limite qui donne en général satisfaction. Direction charge
Mode calcul Technologie
par rapport au logement
Exemple : D = 50 mm ; Ra = 0,15 mm,
Fixe Intensité constante A M
donc l’épaisseur limite de film est de : 0,75 + 1 = 1,75 µm et, pour des variable C M
épaisseurs inférieures à cette limite, on passe en régime mixte.
Tournant Intensité constante A N
L’article [B 5 330] § 2 fournit par ailleurs des règles plus complètes. à la vitesse
de l’arbre variable C N

2
■ Capacités
● p max : pour des arbres de haute qualité avec Tournant
à vitesse
Ra (µm) ≈ 0,006 D (mm), des paliers de rapport L /D = 0,5 peuvent constante
Intensité constante B P
accepter des pressions de l’ordre de 30 µN (avec µ viscosité dyna- variable C P
différente de
mique en Pa · s, N vitesse de rotation en tr/s). µN étant limité à celle de l’arbre
environ 1 pour une question d’élévation de température, on en déduit
p max ≈ 30 MPa. Cela correspond à un film acceptable en marche Autres cas Toutes formes C P
normale, mais la sécurité en cas d’incident pourra conduire à
abaisser cette pression.
●Calcul méthode A
Pour les rapports L /D plus faibles, il y a lieu d’abaisser cette
Supposant donnés :
pression.
W charge totale Ex : 20 000 N
Pour les rapports L /D plus forts, la capacité de charge est théo- D diamètre de l’arbre Ex : 50 · 10 –3 m
riquement augmentée. Mais les défauts d’alignement prenant de R = D /2 Ex : 25 · 10 –3 m
plus en plus d’importance, la pression admissible a effectivement N vitesse de rotation Ex : 50 tr/s
tendance à diminuer. L largeur du palier Ex : 25 · 10 –3 m
● v : jusqu’à 80 m/s, au-delà consulter un spécialiste. C jeu radial Ex : 25 · 10–6 m
● pv : ce produit n’a théoriquement pas d’importance mais néan- deux cas peuvent se présenter en terme de viscosité (µ en Pa · s,
moins il donne une bonne idée de la chaleur produite si l’on quitte avec 1 Pa · s = 10 Po) :
pour quelques instants le régime hydrodynamique.
— ou bien on a le choix de la viscosité, on la choisit alors comprise
Exemple : palier ∅ 200 mm, L = 100 mm, p = 20 MPa, v = 15 m/s. entre :
pv = 300 MPa · m/s si f monte à 0,05 ; la puissance dissipée est de µ = W / 30 N · LD (mm2) et µ = 1/N
300 × 0,05 × 200 × 100 = 300 kW.
la deuxième valeur donnant plus de friction mais une épaisseur de
● Coefficient de frottement statique : 0,15, variable suivant le film plus forte.
matériau de palier.
On choisit :
dynamique : de l’ordre de 0,001 à 0,002
à charge maximale. 20 000 1
µ = --------------------------------------------- = 0,010 6 sans aller à ----- = 0,02
● Durée de vie : si réellement le régime est fluide et si la filtration 30 × 50 × 25 × 50 N
est de bonne qualité, des durées de vie de 20 000 à 50 000, voire
L’élévation de température de l’huile dans le palier peut être
100 000 h peuvent être atteintes.
estimée en première approximation à ∆ θ = 50 µN soit environ 25 oC.
■ Calculs Si la température de la machine est de 50 oC, il faudra donc choisir
Les calculs nécessaires pour s’assurer d’un bon comportement en une huile de viscosité 0,01 Pa · s à 75 oC ;
régime hydrodynamique sont de natures diverses et peuvent être — ou bien l’huile est imposée. On peut alors effectuer une
scindés dans les catégories suivantes : première estimation de l’élévation de température ∆ θ = 50 µN et en
a ) vérification de la bonne épaisseur de film en marche normale ; déduire la viscosité de calcul à θm = θe + ∆ θ avec θm température
b ) vérification de la stabilité en vibration ; moyenne du palier et θe température d’entrée d’huile.
c ) vérification de la possibilité de retour à la marche normale en La viscosité étant ainsi déterminée, on peut calculer le nombre
cas d’incident ; de Sommerfeld :
d ) aspect mise en route et arrêt ; 2
e ) aspects annexes : jeu, fatigue, corrosion, cavitation, adaptabi-
lité, incrustabilité, usure.
µ NDL R
W  
S = ------------------- ----
C
= 0,033 125

Les catégories c ) d ) e ) font appel à des considérations de régime. d’où, en admettant S = 0,030 9 ([B 5 320] tableau 4), on obtient :
Par ailleurs, les mécanismes modernes étant de plus en plus conçus • angle d’attitude ([B 5 320], figure 17) Φ = 23,5o
à la limite des possibilités, il peut advenir que l’épaisseur de film • coefficient de frottement dynamique : on a (R /C ) f a = 1,27
calculée en a ) soit insuffisante pour assurer un parfait régime fluide. soit f a = 1,27 × 10 –3
Cela ramène également au régime mixte traité au paragraphe 8.2. d’où une consommation de puissance de :
a ) Vérification de la bonne épaisseur de film en marche normale. 20 000 × 1,27 × 10–3 × 50 × 50 × 10 –3 × π = 199,49 W
Calcul de l’échauffement, du débit d’huile, de la friction
• débit d’huile Q /(LCV ) = 0,845
soit Q = 0,845 × 25 × 10 –3 × 25 × 10 –6 × 50 × 50 × 10 –3 × π
= 4,14 × 10 –6 m3/s = 4,14 cm3/s
• coefficient de couple résistant Ꮿ a = 41,1

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2

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Matériaux pour paliers lisses


par Jean-Louis LIGIER
Ingénieur de l’École Nationale Supérieure de Mécanique et Microtechnique
Docteur de l’Université de Franche-Comté
Responsable de Recherches et Développement de la Société Glacier Vandervell Europe

1.
1.1
1.2
Généralités.................................................................................................
Différents modes de frottement .................................................................
Phénomènes thermiques en lubrification .................................................
B 5 330 - 2


2
4
2
1.3 Phénomènes d’avarie en lubrification ....................................................... — 6
1.4 Propriétés des matériaux antifriction......................................................... — 8
1.5 Lubrifiants .................................................................................................... — 10
2. Arbres et logements................................................................................ — 14
2.1 Arbres ........................................................................................................... — 14
2.2 Logements.................................................................................................... — 15
3. Matériaux antifriction pour fonctionnement à sec (M1) .............. — 16
3.1 Structure des matériaux.............................................................................. — 16
3.2 Détermination du palier à sec..................................................................... — 18
3.3 Conclusion.................................................................................................... — 20
4. Matériaux antifriction pour régime mixte (M2)............................... — 20
4.1 Structure des matériaux.............................................................................. — 20
4.2 Dispositifs de lubrification .......................................................................... — 21
4.3 Détermination d’un palier en régime mixte .............................................. — 22
4.4 Conclusion.................................................................................................... — 24
5. Matériaux antifriction pour régime hydrodynamique (M3) ......... — 24
5.1 Matériaux de base ....................................................................................... — 24
5.2 Détermination d’un palier en régime hydrodynamique........................... — 26
6. Matériaux pour conditions particulières........................................... — 26
6.1 Applications sous vide ................................................................................ — 26
6.2 Basses températures ................................................................................... — 27
6.3 Hautes températures ................................................................................... — 27
6.4 Applications fonctionnant dans l’eau ........................................................ — 27
6.5 Applications supportant des matériaux durs ............................................ — 27
7. Conclusion ................................................................................................. — 27
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. B 5 347

e principal objectif de cet article est de fournir les idées directrices qui doivent
L motiver l’utilisateur de paliers dans le choix d’un matériau antifriction. Du
fait de la complexité et de la diversité des problèmes de palier, il n’est pas possible
de traiter le sujet de façon exhaustive. Toutefois si, à la lecture de cet article,
l’utilisateur potentiel possède les principales clefs pour définir la famille de pro-
duit antifriction qu’il doit utiliser, alors nous estimerions l’objectif que nous nous
étions fixé comme atteint. Pour des problèmes délicats, il y aura lieu de contacter
des spécialistes.
Suivant les auteurs, le terme palier peut avoir différentes définitions. Nous uti-
liserons la définition de la norme ISO 4378/1 qui est : support ou guide déter-
minant la position d’une pièce mobile par rapport aux autres pièces du
mécanisme. Du fait de la liberté laissée par cette définition, nous considérerons
que le palier est constitué par l’ensemble de l’arbre, du logement, du matériau
Parution : novembre 1995

antifriction et de son support, et du lubrifiant, car ce sont ces quatre éléments


qui donnent les performances de l’organe palier.

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De façon intentionnelle, nous avons limité la présentation des matériaux anti-


friction pour paliers lisses au cas des paliers cylindriques soumis à des charges
radiales. Cependant, la majorité des remarques peuvent s’appliquer à d’autres
types de paliers qui utilisent les mêmes types de matériaux comme, par exemple,
les patins de glissières, les butées sphériques, les flasques de butée d’embrayage,
etc. Toutefois, certaines précautions doivent être prises pour extrapoler les résul-
tats obtenus pour les paliers cylindriques.
On peut distinguer deux familles de paliers : les paliers à charges radiales et
les paliers à charges axiales ou butées.
— Les paliers à charges radiales sont généralement constitués par deux élé-
ments de 180o d’arc, appelés plus communément demi-coussinets, et un élément
2 de 360o d’arc, appelé bague.
— Les paliers à charges axiales sont généralement constitués de demi-flasques
(demi-flasques de vilebrequin) ou de rondelles complètes.
Quel que soit le type de palier considéré, il est monocouche (exemple d’un
palier en bronze massif) ou multicouche (exemple d’un cuproplomb sur un
support acier). Pour des applications sévères, les propriétés nécessaires au bon
fonctionnement du palier sont bien souvent antagonistes et le moyen le plus
élégant de contourner cette difficulté est d’utiliser des matériaux multicouches
qui apportent à cœur ou en surface les propriétés recherchées.
Il nous a semblé intéressant pour parfaitement appréhender les problèmes liés
au matériau antifriction de consacrer plusieurs paragraphes aux notions de base
que nous considérons comme fondamentales qui sont :
— les régimes de fonctionnement des paliers, car ces régimes sont parmi les
paramètres les plus importants dans la définition d’un matériau ;
— les aspects thermiques dans les paliers, qui conditionnent un certain nombre
de limites de fonctionnement du palier ;
— les principaux types d’avaries rencontrés et les propriétés du matériau
antifriction nécessaire pour éviter ces dommages ;
— les lubrifiants (esquissés), afin de mettre en évidence les mécanismes phy-
siques qui justifient la réduction du frottement. Le rappel de ces mécanismes
permettra au lecteur de mieux appréhender les liens qui existent entre ces pro-
priétés et les limites d’existence des différents régimes de fonctionnement du
palier, et de percevoir ainsi la fragilité et la stabilité de ceux-ci.
La suite de cet article sera consacrée aux qualités géométriques et mécaniques
que doivent posséder l’arbre et le logement du palier, ainsi qu’aux matériaux
antifriction à utiliser vis-à-vis des différents régimes de lubrification. Une atten-
tion particulière a été portée sur la structure de ces matériaux et leurs conditions
d’utilisation.

1. Généralités vitesse de déplacement relatif entre les deux surfaces antagonistes,


la viscosité et la température du lubrifiant, la charge appliquée au
palier, l’épaisseur du film de lubrifiant fluide.
Historiquement, c’est Richard Stribeck qui, le premier, obtint ce
1.1 Différents modes de frottement type de courbe en 1902 ; ce graphe est toujours utilisé et a pris le
nom de courbe de Stribeck. Il semble que celle-ci ait été initialement
établie pour définir la relation qui existe entre le coefficient de friction
Depuis les travaux de Stribeck on classe les régimes possibles de d’un palier et l’épaisseur de film, puis ultérieurement le coefficient
fonctionnement d’un palier en quatre types principaux, à savoir : de friction f vis-à-vis de la variable µN /p variable de Hershey
— le régime de frottement sans interposition de lubrifiant liquide ; (figure 1), avec µ viscosité dynamique, N vitesse de rotation et p pres-
— le régime de lubrification limite ; sion diamétrale, pour un palier soumis à une charge fixe en intensité
— le régime de lubrification mixte ; et direction.
Nota : dans les conditions d’obtention de cette courbe, il faut noter que le lubrifiant
— le régime de lubrification hydrodynamique. est supposé sans débris. Il n’y a donc pas de frottement ou d’usure générée par l’érosion
Dans la pratique, la caractérisation la plus fréquemment adoptée due à des particules dures. Cette hypothèse n’est bien entendu pas vérifiée dans le cas
d’un palier de moteur mais peut cependant l’être dans des conditions de laboratoire.
pour différencier les différents régimes de fonctionnement des
paliers est fondée sur l’étude de la courbe donnant le coefficient de
friction global du système en fonction des paramètres suivants : la

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La transition entre ces modes est fonction du degré d’inter-


pénétration des aspérités. Les premiers contacts s’effectuent sous
le régime a ) pour ensuite évoluer vers le régime b ). Dans ce régime,
il existe des sous-régimes qui sont : le labourage des aspérités, la
formation en avant de l’aspérité d’un coin de matière (équivalent à
une vague d’étrave) et, finalement, la coupe avec rejet de la matière
sur les bords des sillons formés le long du parcours des aspérités.
Dans le cas d’aspérités ayant des profils sphériques, ces sous-
régimes ont été parfaitement décrits par les travaux de différents
auteurs, en particulier ceux de Hokkirigawa et Kato [55].
Pour le régime c ), les interactions atomiques sont au contraire
déterminantes. De manière très schématique, l’explication courante
donnée pour la première fois par Bowden et Tabor [46] peut se
résumer de la manière suivante : une soudure de surface s (prise
dans un plan parallèle au plan de glissement) supporte une charge
égale à s fois la résistance en compression du matériau antifriction.
2
Pour rompre cette soudure, il faut appliquer un effort tangentiel égal
à s fois la résistance au cisaillement de la soudure. Pour la quantité
de charge ainsi supportée, on obtient un coefficient de friction f égal
à:
Figure 1 – Évolution du coefficient de friction
en fonction de la variable ␮ N ⁄ p (courbe de Stribeck) s × résistance au cisaillement de la soudure
f = --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
s × résistance en compression du matériau
Cette courbe a permis de différencier les quatre principaux
régimes de lubrification d’un palier. Ceux-ci sont identifiés en fonc- Du fait des relations existant entre la résistance au cisaillement
tion du type de contact qui survient entre la surface du matériau anti- et la résistance à la compression, le coefficient de friction se situe
friction et la surface antagoniste. La figure 1 illustre ces quatre entre 0,5 et 1.
grandes familles de contact : Lors de la rupture des microsoudures, deux cas sont à nouveau
— la région ➀ correspondant à la région où le contact s’effectue à considérer :
sans interposition de lubrifiant liquide ou frottement sec (indépen- — la microsoudure formée est moins résistante que le matériau
dant de µ ) ; le moins résistant mécaniquement et, dans ce cas, les soudures se
— la région ➁ est définie comme étant un régime de lubrification détruisent immédiatement ;
limite ; — la soudure formée est plus résistante que le matériau le plus
— la région ➂ correspond à un régime de lubrification dit mixte ; tendre, il y a alors transfert de matière du matériau antifriction sur
— la région ➃ correspond à un régime de lubrification hydro- le matériau de l’arbre, ce qui conduit à terme à un grippage total.
dynamique. Bien que cette théorie explique les transferts de matière, elle pos-
sède des limitations dont J.J. Caubet [48] a donné une présentation
synthétique, en particulier la nécessité d’une rupture des manteaux
1.1.1 Frottement sec d’oxydes sur les surfaces antagonistes permettant la formation des
microsoudures.
Ce régime existe seulement lorsque le palier est très peu chargé Afin d’éviter les problèmes de frottement mentionnés ci-dessus,
( pv  1 MPa ⋅ m ⁄ s, 1.2). Les limites de§ ce mode de frottement sont on introduit un lubrifiant solide à l’interface des pièces en contact ;
intéressantes à considérer, car elles sont produites par des méca- la fonction de celui-ci est de supprimer les contacts directs entre
nismes présents dans les autres modes de frottement. l’arbre et le logement. Les lubrifiants solides se caractérisent par une
À l’échelle microgéométrique, même les surfaces les mieux très faible résistance au cisaillement ou par une très grande inertie
usinées ne sont pas parfaitement planes. Le contact entre deux sur- chimique, d’où résultent un très bas coefficient de friction. Le bon
faces réelles se fait donc par un nombre limité d’aspérités. Lorsqu’il fonctionnement tribologique d’un lubrifiant solide ne peut survenir
n’y a pas de déplacement, il est intéressant de connaître comment que si les deux surfaces sont couvertes d’une couche de lubrifiant
les aspérités des surfaces antagonistes sont en contact. Ainsi, solide. Les rugosités des surfaces antagonistes sont alors réduites,
lorsque l’on évalue le ratio entre l’aire de la surface réelle de contact de même que les pressions locales de contact, et les déplacements
et l’aire de la surface apparente ou surface nominale, on obtient des relatifs s’effectuent au sein d’un matériau à très bas coefficient de
valeurs qui oscillent entre 1/10 000 et quelques centièmes en fonction friction. Le dépôt sur l’arbre est obtenu, pendant la phase de rodage,
de la pression de contact [57]. Il existe différentes approches pour par un transfert d’une partie du lubrifiant solide du matériau anti-
modéliser cet aspect du contact, en particulier lorsque l’on désire friction sur l’arbre. On devine aisément que, pendant la phase de
connaître si les microcontacts d’aspérités génèrent de la plasticité rodage du palier, l’usure du matériau peut être importante et cela
dans celles-ci (critère de Greenwood-Williamson) [54]. De même, d’autant plus si l’arbre présente un mauvais état de surface (voir
McWaid et Marshall [60] ont proposé un modèle pour estimer la encadré État de surface ).
résistance thermique que créent ces microcontacts au passage d’un
flux thermique entre deux corps en contact. Dans certaines appli-
cations où le contact entre l’élément antifriction et son logement est 1.1.2 Lubrification limite
faible, la modélisation précédente prend toute son importance
puisqu’elle permet d’évaluer rapidement la chute de flux provoquée Ce régime est habituellement caractérisé par le fait que la charge
par cette discontinuité géométrique d’interface. appliquée sur le palier est totalement supportée par les aspérités
Lorsque l’on déplace deux surfaces en contact l’une par rapport en contact, ces aspérités étant recouvertes d’un film complet ou par-
à l’autre, les tribologues ont établi que les différents modes d’inter- tiellement rompu de lubrifiant adsorbé.
action suivants peuvent survenir : Lorsque le film adsorbé est rompu, voire inexistant sur les aires
a ) déformation élastique des aspérités ; de contact, cette non-continuité donne dans la représentation de la
b ) déformation plastique des aspérités ; courbe de Stribeck un coefficient de friction plus élevé
c ) soudure. conformément au tracé en pointillé de la figure 1. Physiquement,

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celui-ci traduit le fait que les aspérités des deux surfaces antagonistes centre du logement ; le second résulte d’un déplacement rapide du
viennent s’entrechoquer et rompre, sous l’intensité du contact, le film centre de l’arbre sans rotation propre de celui-ci, cas rencontré dans
adsorbé. L’accroissement de friction et d’usure peut alors être pro- les paliers de pied de bielle de moteurs thermiques.
voqué par adhérence des matériaux en contact qui peut entraîner À titre indicatif, le coefficient de friction varie le plus souvent de
le transfert de matériau selon le mécanisme de rupture, de Bowden 0,001 à 0,005.
et Tabor [46], décrit précédemment.
Ce mode de lubrification a fait et fait encore l’objet de nombreuses
À titre indicatif, le coefficient de friction entre deux pièces en acier études. On trouve ainsi un grand nombre d’ouvrages qui traitent de
est de l’ordre de 0,15 lorsque le film adsorbé est non rompu et de l’équation aux dérivées partielles (ou équation de Reynolds) qui régit
0,3 à 0,5 lorsque le film adsorbé est rompu. localement dans le palier l’évolution spatiale temporelle de la pres-
sion hydrodynamique (cf. article Butées et paliers hydrodynamiques
[B 5 320] dans ce traité, [47] [53]).
1.1.3 Lubrification mixte Remarque : lorsque la vitesse relative entre les deux surfaces est trop faible pour générer

2
une pression dans le fluide susceptible de séparer les surfaces en contact, on peut introduire
En lubrification mixte, le mouvement relatif entre les deux sur- une pression dans le fluide par un système extérieur au palier, d’où la lubrification dite
hydrostatique (cf. article Butées et paliers hydrostatiques [B 5 325] dans ce traité). Lorsque
faces n’est pas encore suffisant pour engendrer une pression hydro- cette vitesse génère une pression hydrodynamique mais qu’il existe toujours une source
dynamique assurant complètement la portance de la charge qui tend de pression extérieure pour parfaire la portance de la charge appliquée sur le palier, on
à mettre en contact les deux surfaces antagonistes. La partie de la parle de lubrification hybride.
charge supportée par les aspérités en contact ne donne pas lieu au
niveau de celles-ci à des ruptures du film de lubrifiant adsorbé.
La position intermédiaire de ce régime par rapport à la lubrification 1.2 Phénomènes thermiques
limite et la lubrification hydrodynamique rend celui-ci difficilement
représentable de manière précise sur le diagramme de Stribeck
en lubrification
(figure 1), surtout en ce qui concerne le passage entre lubrification
limite et mixte. Pour la limite entre les régimes mixte et hydro-
Indépendamment des problèmes d’avaries qui peuvent survenir
dynamique, on considère le plus souvent que le régime mixte
dans un palier, son fonctionnement est régis par des phénomènes
commence (à partir du régime hydrodynamique) lorsque le para-
thermiques et ce quel que soit le régime de lubrification. Une des
mètre λ est inférieur à 3 [50], λ étant le rapport entre l’épaisseur mini-
difficultés qui pénalise la qualité de l’approche thermique ou de la
male de film de lubrifiant et la valeur de l’écart-type des rugosités
prédiction de fonctionnement est que l’évaluation fine de la tem-
cumulées de chaque surface.
pérature en tout point du palier est conditionnée par la précision des
À titre indicatif, le coefficient de friction varie de 0,20 à 0,001. coefficients thermiques employés, en particulier des coefficients
La construction de cette partie de la courbe peut être effectuée d’échanges thermiques entre paroi et milieu ambiant qui sont établis
en considérant que le coefficient de friction f est égal à : à partir de formules semi-empiriques (cf. article Notions de transfert
thermique par convection [A 1 540], dans le traité Génie éner-
f = α fm + (1 – α ) f h gétique). L’importance de ces coefficients est liée au fait que, dans
les systèmes thermiques examinés, ce sont eux qui imposent la plus
avec f m coefficient de friction en régime mixte,
importante restriction de flux thermique entre la zone chaude (zone
f h coefficient de friction en régime hydrodynamique, de portance dans le palier) et la zone froide (milieu ambiant).
α coefficient de répartition en fonction de la charge
supportée par le film hydrodynamique vis-à-vis de celle
supportée par les aspérités. 1.2.1 Aspect thermique
La stabilité de ce régime au niveau des aspérités est fonction des en régime non hydrodynamique
différents phénomènes suivants :
— l’élasticité des contacts concentrés ; Lorsque l’on considère un palier fonctionnant en régime non
— la présence dans le lubrifiant de film de polymères produit hydrodynamique (frottement sec et lubrification mixte), soumis à des
lorsque la température au sein de celui-ci est supérieure à sa tem- conditions de charge et de vitesse constantes dans le temps, le frot-
pérature d’oxydation ; tement dans le palier engendre une production d’énergie thermique
— l’adsorption de l’huile à la surface du matériau ; d’une puissance Pp telle que :
— la formation d’oxydes par l’oxygène présent dans le milieu ou Pp = Wvf = pLDvf
dissous dans le lubrifiant.
Dans la suite du texte, nous ne différencierons plus le régime de avec D diamètre du palier,
lubrification limite du régime mixte car, en pratique, il est difficile L longueur axiale du palier,
de les distinguer ; seul le régime mixte sera mentionné. W charge appliquée sur le palier,
v vitesse de déplacement.
1.1.4 Lubrification hydrodynamique Lorsque le palier présente un fonctionnement quasi stable dans
le temps, c’est-à-dire que les phénomènes d’usure ne modifient
Lorsqu’un fluide lubrifiant présent entre deux surfaces en mou- quasiment pas la géométrie du palier, on admet qu’il y a égalité entre
vement relatif l’une par rapport à l’autre (glissement ou rotation) la puissance thermique produite par frottement et la puissance ther-
engendre une pression en son sein et maintient ainsi distantes les mique évacuée, cette évacuation s’effectuant à l’extérieur du loge-
deux surfaces antagonistes, on dit qu’il y a lubrification hydro- ment et de l’arbre par convection et rayonnement. Pour déterminer
dynamique. Dans certains cas, pour mieux la différencier de la lubri- cette puissance, on peut considérer, en première approximation,
fication mixte, on parle de lubrification hydrodynamique parfaite ou que :
totale. — l’aire de la surface d’échange est proportionnelle au produit LD ;
Il existe deux modes d’actions pour engendrer ce phénomène de — les phénomènes thermiques peuvent être linéarisés en fonction
portance : l’effet de coin convergent et l’effet d’écrasement de film. de l’écart de température ∆θ entre la zone chaude et la zone froide,
Ces deux effets peuvent survenir dans un palier. Le premier est le hypothèse justifiable par le fait que les écarts thermiques et la tem-
résultat du décalage du centre de rotation de l’arbre vis-à-vis du pérature absolue la plus élevée sont faibles.

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Il résulte de ces simplifications que la puissance thermique Pour les différents cas possibles de situation du palier, K peut
évacuée peut s’exprimer sous la forme : prendre les valeurs suivantes :
Pe = hLD ∆ θ — pour un palier situé dans l’air :
• avec un échange thermique par l’arbre seul : 0,15 W/K,
avec h (W/m2 · K) coefficient d’échange thermique par unité de sur- • avec un échange thermique par l’arbre et le logement :
face, tenant compte de : 0,4 W/K ;
— l’aire de la surface d’échange par l’intermédiaire du produit LD ; — pour un palier baigné par de l’huile :
— la conductivité des milieux entre la zone chaude et la zone • avec un échange thermique par l’arbre seul : 1,2 W/K,
froide ; • avec un échange thermique par l’arbre et le logement : 2,2 W/K.
— l’intensité par unité de surface des échanges thermiques, Nota : une pratique courante de contrôle de la température dans un palier est de pla-
dépendant elle-même de la nature du fluide dans lequel baigne cer un couple thermoélectrique au dos du matériau antifriction, c’est-à-dire contre le sup-
le palier. port. Le point de contact du couple thermoélectrique est décalé d’un angle égal à

2
l’arctangente du coefficient de friction par rapport à la direction de la charge, de façon à
Dans l’hypothèse de fonctionnement stable du palier, l’écriture de se situer au point d’échauffement maximal. Pour affiner la précision de la mesure, on
l’équilibre entre les puissances thermiques conduit à l’égalité peut utiliser un microcapteur de flux afin de défalquer la chute de température survenue
entre la zone de frottement et la zone de mesure. Lors d’un fonctionnement instationnaire
suivante : du palier, la correction de température précédente devient plus importante et doit être
pvf = h ∆ θ augmentée de l’atténuation thermique que subit le flux thermique en utilisant en premier
lieu un modèle monodimensionnel de transfert thermique.
soit encore, si l’on admet que l’écart de température est imposé par
le niveau de température maximale supportée par le matériau
antifriction : 1.2.2 Aspect thermique
h∆θ en régime hydrodynamique
( pv ) max = ------------
f

Ce terme de pv maximal admissible est très souvent mentionné ■ En régime purement hydrodynamique et lorsque celui-ci est
dans les plaquettes commerciales décrivant les performances des stable, une grande partie de l’énergie thermique générée au sein du
matériaux antifriction pour régimes sec et mixte. L’emploi de ce palier par cisaillement du film de lubrifiant est évacuée par celui-ci.
terme pv traduit de façon indirecte les limites du palier vis-à-vis des Même dans les applications les plus sévères en termes d’échauffe-
phénomènes thermiques. ment, comme par exemple dans les paliers de moteurs automobiles
de compétition (30 à 40 m/s), les paliers de turbines (largement supé-
En pratique, lorsque l’on désire une estimation plus fine de la puis- rieur à 30 m/s), l’élévation de température du palier ne dépasse pas
sance thermique évacuée par un palier fonctionnant à une certaine 30 oC. Cependant, la majorité des fluides employés dans les applica-
température θ1 et baignant dans un fluide à une température θ 2 , on tions hydrodynamiques présentent une très forte variation de leur
peut utiliser la relation suivante : viscosité vis-à-vis de la température. Il s’ensuit que, bien que les
élévations de température de l’arbre et indirectement du fluide soient
Pe = K ( ∆ θ )
 1 + ---41-  de faibles amplitudes, les variations de viscosité qu’elles occa-
sionnent ne peuvent être négligées.
avec K (W/K) coefficient d’échange thermique. Pour plus de commodité d’analyse, il est intéressant de modifier
la courbe de Stribeck pour lier entre elles des variables telles que
Cette relation est écrite pour un palier type dont le logement et
les puissances thermiques produite et évacuée avec la
l’arbre sont en acier ordinaire et dont la géométrie est décrite sur
température.
la figure 2. Pour tout autre palier de longueur L1 et de diamètre D1
supérieurs respectivement aux dimensions L 0 = 20 mm et En fixant les variables N et p du nombre de Hershey et en utilisant
D 0 = 20 mm du palier de référence, on effectuera la correction sui- une loi de viscosité fonction de la température, la courbe de Stribeck
vante pour obtenir la nouvelle valeur de K, telle que : peut alors être tracée en fonction de la température du fluide dans
le palier, portée sur l’axe des abscisses au lieu du nombre de
D1 L Hershey ; l’axe des ordonnées peut représenter la densité de puis-

K corrigée = K 1 + 0,07 --------
D0
  1 + 0,1 ------
L0
1
- sance thermique produite car, lorsque l’on multiplie le coefficient de
friction f par le terme pv, on obtient celle-ci. Sur ce même graphe,
il est possible de tracer, en fonction de la température, la puissance
thermique évacuée. Ces modifications étant faites, on peut alors se
livrer à l’analyse thermique du palier.
■ Sur la figure 3, on peut observer trois courbes de type Stribeck,
notées de ➀ à ➂, représentant différents modes de fonctionnement
du palier lorsque celui-ci subit ou non des aléas de fonctionnement,
et une courbe d’évacuation de chaleur, notée ➃ , permettant de
rechercher les points d’équilibres thermiques du palier.
La courbe ① caractérise le flux thermique produit en fonction de
la viscosité du fluide lorsque le palier fonctionne dans des conditions
idéales (alignement, lubrification, formes géométriques parfaites,
état de surface). Le point d’équilibre thermique noté A se trouve à
l’intersection des courbes ➀ et ➃.
La courbe ② prend en compte le passage d’une impureté qui aug-
mente le coefficient de friction, donc l’énergie thermique produite.
Cela se traduit par une translation de la courbe ➀. Le point d’équilibre
thermique initial avant le passage de l’impureté se trouve déplacé
sur cette deuxième courbe.
Pour retrouver l’équilibre, la température du palier s’élève
Figure 2 – Géométrie d’un palier type
jusqu’au point d’équilibre A1 . Après le passage de l’impureté, la
courbe ➁ revient sur la courbe ➀ laissant le point d’équilibre

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Généralement pour s’assurer de l’adéquation entre le risque de


grippage et la température de fusion du matériau, on impose à
celui-ci d’avoir une température de fusion inférieure à la température
critique (figure 3).
Remarque : bien que cette approche ait été simplifiée par souci de clarté, on conçoit
bien l’importance de la fusibilité des matériaux de paliers hydrodynamiques fortement
chargés. À titre d’exemple, un palier de moteur automobile fonctionnant à 300 MPa·m/s
et ayant un diamètre de 45 mm et une longueur de 20 mm peut dégager en cas de pro-
blème de lubrification une puissance thermique de l’ordre 27 kW.

1.2.3 Conséquence des phénomènes thermiques


sur le choix des paliers

2 Sous réserve de calculs plus poussés correspondant à chaque


condition particulière de dissipation thermique et prenant en compte
les propriétés spécifiques des éléments constitutifs des paliers, les
possibilités de fonctionnement telles qu’elles découlent de l’équi-
libre thermique établi pour les régimes non hydrodynamiques sont
déterminées dans le tableau 1.
Toutes ces valeurs constituent les limites approximatives des
diverses solutions classées dans un ordre croissant de sophistication
Figure 3 – Cheminement à suivre pour prédire le risque d’un palier et d’impératifs d’entretien (relubrification). Elles correspondent de
vis-à-vis du phénomène de grippage plus à un palier de 20 mm de diamètre et de 20 mm de longueur
et sont donc sujettes, pour des pièces de dimensions différentes, à
révision en fonction des calculs thermiques mentionnés au para-
redescendre le long de la courbe d’évacuation de chaleur jusqu’au graphe 1.2.1.
point A. On peut donc conclure, suite à cet aléa de fonctionnement,
à une bonne stabilité du système. En régime hydrodynamique, la limitation de fonctionnement n’est
plus fournie par le produit pv mais par la nécessité de l’existence
La courbe ③ prend en compte un aléa plus conséquent tel que d’un film dont l’épaisseur est liée à la variable adimensionnelle µN /p,
l’arrêt de la lubrification ou une contamination soudaine du sous réserve que le matériau antifriction du palier possède de bonnes
lubrifiant. caractéristiques antigrippage. Toutefois, lorsque le palier est étudié
Comme précédemment, le point A se déplace et se retrouve en de façon sommaire, on limite le produit pv aux alentours de
B. Par contre, la recherche de l’équilibre thermique entre puissance 300 MPa · m/s pour des questions d’échauffement d’huile dans la
produite et puissance évacuée est stoppée par la fusion superficielle zone d’épaisseur minimale de film. Ce régime suppose par ailleurs
du matériau au point B1 . Cette fusion redonne des conditions de une rotation continue de l’arbre ou de la charge. Or, les mouvements
régime quasi fluide au palier. Ce phénomène est particulièrement oscillants assez fréquents dans les applications mécaniques n’auto-
important car il explique pourquoi il est nécessaire en hydrodyna- risent pas ce régime. Ainsi, les applications à mouvements oscillants
mique d’avoir une phase fusible dans les matériaux antifriction (§ 5). ne peuvent au mieux fonctionner qu’en régime mixte (excepté pour
Succinctement, on estime que les mécanismes mis en jeu par la les paliers hybrides ou hydrostatiques) et sont ainsi limités par les
fusion et qui vont permettre un retour à l’équilibre sont les suivants : phénomènes thermiques. En pratique, le produit pv est, en première
— suppression des contacts par retrait du matériau antifriction évaluation, limité à 8 MPa · m/s. Dans le cas où le chargement
lorsque celui-ci commence à fluer sous l’effet de la chaleur. Cette cyclique du palier n’autorise qu’un fonctionnement temporaire en
modification de géométrie permet dans certains cas au palier de régime hydrodynamique, on limite la phase non hydrodynamique
s’adapter à l’arbre et à ses conditions de fonctionnement, comme à cette précédente valeur. Toutefois, le produit pv global moyenné
c’est par exemple le cas pour les paliers soumis à des charges peut être plus élevé ; c’est, par exemple, le cas pour les bagues de
d’angles (zone préférentielle de pression vers l’un des bords du palier pied de bielle où le produit pv peut atteindre 25 MPa · m/s. (0)
qui peut être créée par un défaut angulaire d’alignement ou par un
couple de basculement) ;
— création d’un film liquide par le métal fondu lors de forts échauf- 1.3 Phénomènes d’avarie en lubrification
fements et réduction de la friction du fait que le régime est à nouveau
de type hydrodynamique ; L’étude des avaries qui peuvent survenir dans un palier et en par-
— incrustation complète des particules, qui ont généré la friction ticulier au niveau de l’antifriction a permis d’établir des propriétés
supplémentaire, par la chute de dureté de la phase fusible, résultant spécifiques du matériau antifriction. Ainsi, de nouveaux matériaux
de l’échauffement. sont développés pour répondre aux nouvelles exigences d’une appli-
Ainsi, après fusion de la phase fusible et suppression de l’aléa de cation où l’ensemble des matériaux disponibles n’ont pas donné
fonctionnement, la courbe de Stribeck se rapproche de la courbe ➀ satisfaction.
(des sillons peuvent avoir être formés, la courbe de friction minimale Il existe de multiples mécanismes élémentaires d’avarie dans les
est alors légèrement modifiée), tandis que le point de température paliers qui, en réalité, sont combinés entre eux et deviennent de ce
du palier revient plus lentement à l’équilibre A en suivant la courbe fait plus délicats à analyser, en particulier dans le cas de l’usure.
d’évacuation de chaleur. Le bon positionnement de la température Toutefois, au niveau des utilisateurs, il existe trois grands types
de fusion du matériau antifriction permet au phénomène de fusion d’avarie à savoir le grippage, l’usure et la fatigue.
d’assurer la stabilité du palier. En effet, dans le cas où cette tem-
pérature de fusion se trouve à gauche de la zone de régime mixte
sur la courbe de Stribeck, on n’obtient jamais l’égalité entre la puis-
1.3.1 Grippage
sance produite et la puissance évacuée pour un palier fonctionnant
avec un coefficient de friction modéré. Le grippage survient alors,
Le grippage d’un palier survient lorsque, pour une augmentation
courbe en traits mixtes parallèle à la courbe ➂.
de la puissance thermique due au frottement dans le palier, celui-ci
n’a pu évacuer ce supplément de puissance que ce soit par

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Tableau 1 – pv limite admissible en fonction des matériaux et des conditions ambiantes


  admis h  f pv
Matériau
(oC) (MW/m2) (MPa · m/s)
Matériau à base de lubrifiant solide à sec dans l’air 100 0,15 0,15 1
Matériau fonctionnant à la graisse 60 0,10 0,07 1,5
Matériau à base de lubrifiant solide dans un liquide non lubrifiant 60 0,45 0,15 3
Matériau dans un liquide lubrifiant sans régime hydrodynamique 60 0,48 0,06 8
Matériau dans un liquide lubrifiant avec régime hydrodynamique (1) 30 10,50 0,0015 700
(1) En régime hydrodynamique, la relation pvf = h ∆ θ ne s’applique pas.

conduction, convection ou par l’écoulement du fluide lubrifiant calo- En général, les modifications effectuées sur les propriétés du maté-
2
porteur. Cela conduit alors à un processus thermique qui diverge : riau antifriction pour réduire l’usure sont suivant les régimes de
en quelques secondes, le palier atteint des températures égales à fonctionnement :
la température de fusion de l’élément constituant le plus fusible. — l’accroissement de dureté, qui va à l’encontre de l’incrustabilité;
En pratique, il donne lieu à la destruction du coussinet qui peut — l’introduction de particules à forte résistance à l’usure, dont
soit être détruit complètement, soit avoir fluer de façon très impor- l’une des principales actions est de réduire l’agressivité des surfaces
tante. Sur certains gros moteurs, il n’est pas rare de voir un coussinet en contact ;
avec un support acier de quelques millimètres d’épaisseur se trans- — l’augmentation de l’adhérence du lubrifiant en surface, en
former en quelques secondes en une feuille de papier à cigarettes améliorant par exemple l’affinité du matériau antifriction avec le
qui épouse les formes du vilebrequin. C’est sans doute l’un des lubrifiant ;
modes d’avarie le plus craint par les utilisateurs. — l’épaississement de la couche antifriction pour obtenir, après
Du fait de la multitude de phénomènes qui peuvent produire le adaptation des deux surfaces antagonistes, une pression de contact
grippage, il est impossible de définir un critère de risque de grippage (régime non hydrodynamique) ou un champ de pression plus
pour les paliers en général. Toutefois, pour les paliers hydrodyna- étendus et plus uniformes.
miques, il a été possible d’établir un critère de risque de grippage
relativement précis [59].
1.3.3 Fatigue
La façon la plus répandue pour retarder le risque de grippage est
soit d’utiliser des matériaux fusibles, soit d’avoir dans le matériau
Dès qu’un solide est sollicité de manière cyclique, les phénomènes
antifriction des réserves de lubrifiant solide ou liquide.
de fatigue surviennent, c’est-à-dire que la résistance mécanique du
matériau antifriction n’est plus liée à sa limite de rupture mais à une
certaine limite, dite de fatigue, qui est notamment fonction du
1.3.2 Usure nombre de cycles de sollicitations. En pratique, la limite de fatigue
est inférieure à la limite d’élasticité du matériau.
L’usure que l’on considère en tant que praticien est celle que l’on
Au niveau du matériau, les solutions les plus souvent adoptées
observe après test sur la pièce. Elle est donc le résultat de tous les
pour atténuer les contraintes de fatigue sont :
mécanismes élémentaires qui conduisent à une perte de matière.
— l’optimisation des épaisseurs de couches constituant le maté-
Les principaux inconvénients que présente l’usure dans le palier
riau antrifriction, en particulier en cherchant à avoir, selon l’épais-
sont :
seur, des variations monotones et les plus régulières possibles des
— pour tous les régimes de lubrification, la perte du matériau anti- modules d’Young des couches constituantes ;
friction et donc la possibilité de risquer le grippage dès la disparition — l’accroissement des propriétés mécaniques des couches qui
du matériau ; cette perte revient aussi à réduire la durée de vie du peut, dans certains cas, impliquer un accroissement de dureté allant
palier ; à l’encontre de certaines propriétés, comme, par exemple, la capacité
— pour les régimes à sec, l’échauffement notoire et/ou la modi- à incruster des particules. Ce dernier point est en partie contourné
fication de la position de l’arbre qui, dans le cas d’ajustement soigné, lorsque l’on dispose d’un matériau biphasique, car c’est la phase
peut être préjudiciable au mécanisme intégrant le palier. Dans ce dure que l’on renforce tout en gardant à la phase fusible sa capacité
cas, l’usure résulte du fonctionnement imparfait des surfaces anta- d’exsudation par phénomène thermique ou déformation plastique
gonistes du palier vis-à-vis du film de lubrifiant solide ; et sa capacité d’incrustation par déformation plastique.
— pour les régimes mixtes, ne plus posséder un matériau anti-
friction et donc s’exposer au risque de grippage ; du fait du méca-
nisme d’usure mis en jeu, il y aura surconsommation d’énergie. Ce 1.3.4 Autres avaries
mécanisme est lié à la perte d’affinité du lubrifiant adsorbé par les
surfaces antagonistes, ce qui augmente ainsi le frottement ;
Il existe d’autres types d’avarie qui peuvent être des combinaisons
— pour les régimes hydrodynamiques, un accroissement du jeu
de mécanismes élémentaires d’avaries. Pour mémoire, citons :
de fonctionnement. Si le palier fonctionnait avant avaries dans des
conditions optimales, il fonctionne après avaries avec : — la cavitation, qui peut survenir dans tous les systèmes lubrifiés
par un fluide ;
• une pression maximale dans le film plus élevée, donc un risque
— le flow-érosion, qui délamine le matériau antifriction de son
de fatigue plus grand,
support ;
• une épaisseur minimale de film d’huile plus faible, se tradui-
— les phénomènes de corrosion induits par des microdébatte-
sant par un risque de contact entre l’arbre et le matériau antifriction
ments (fretting-corrosion), qui surviennent dans les mécanismes
plus élevé donc un risque de grippage plus élevé,
fonctionnant avec de très faibles oscillations et un lubrifiant inter-
• une durée de vie diminuée du fait de la perte du matériau anti-
stitiel oxydant (ou pouvant comporter des éléments oxydants) ;
friction.
— le fluage, qui provoque l’écoulement du matériau lorsque la
température de fusion du matériau antifriction est trop basse alors
que la palier fonctionne dans des conditions normales.

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2

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Butées et paliers hydrodynamiques

par Jean FRÊNE


Ingénieur de l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

2
Docteur-Ingénieur, Docteur ès Sciences
Professeur à l’Université de Poitiers

1. Lubrification hydrodynamique ............................................................. B 5 320 - 3


1.1 Équations de Reynolds................................................................................ — 3
1.2 Application de l’équation de Reynolds à des cas élémentaires de
portance........................................................................................................ — 5
2. Butées hydrodynamiques ...................................................................... — 7
2.1 Plan incliné de géométrie fixe .................................................................... — 7
2.2 Butée de géométrie fixe .............................................................................. — 10
2.3 Butée à patins oscillants ............................................................................. — 12
3. Paliers lisses cylindriques ..................................................................... — 13
3.1 Palier infiniment long .................................................................................. — 14
3.2 Palier infiniment court................................................................................. — 16
3.3 Palier de longueur finie ............................................................................... — 16
3.4 Alimentation des paliers lisses................................................................... — 17
3.5 Influence du mésalignement ...................................................................... — 17
3.6 Effets dynamiques ....................................................................................... — 18
4. Paliers non cylindriques et paliers à patins oscillants.................. — 25
4.1 Caractéristiques statiques et dynamiques des paliers de géométrie fixe — 25
4.2 Caractéristiques statiques et dynamiques des paliers à patins oscillants — 28
4.3 Comportement dynamique de différents types de palier ........................ — 29
5. Effets thermiques .................................................................................... — 32
5.1 Température moyenne du lubrifiant .......................................................... — 32
5.2 Étude thermo-élasto-hydrodynamique des paliers .................................. — 33
6. Régime non laminaire ............................................................................. — 33
6.1 Forces d’inertie dans les paliers en régime laminaire.............................. — 33
6.2 Définition des différentes transitions......................................................... — 34
6.3 Théorie des paliers et des butées en régime non laminaire.................... — 36
6.4 Paliers et labyrinthes lisses fonctionnant à très hauts nombres de
Reynolds....................................................................................................... — 36
Formulaire ........................................................................................................... Form. B 5 320
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. B 5 347

es paliers sont des organes de machines utilisés pour guider les arbres
L en rotation. Deux grandes familles de paliers existent : les paliers lisses et
les paliers à roulements. Dans les premiers, l’arbre prend appui sur un coussinet
et est séparé de celui-ci par un film lubrifiant ; dans les seconds, des corps
roulants (billes ou rouleaux) séparent la bague en rotation de l’alésage extérieur.
Selon la direction de la charge par rapport à l’arbre en rotation, on distingue
les paliers porteurs pour lesquels la charge est radiale, généralement appelés
paliers, des paliers de butée ou butées pour lesquels la charge est axiale. Nous
ne parlerons que des paliers fluides et plus particulièrement des paliers et des
butées hydrodynamiques dans lesquels un film mince de fluide sépare
les surfaces en mouvement relatif.
Parution : août 1995

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BUTÉES ET PALIERS HYDRODYNAMIQUES __________________________________________________________________________________________________

Le comportement, la durée de vie et la tenue des paliers hydrodynamiques


dépendent de nombreux paramètres, parmi lesquels les paramètres géo-
métriques (dimensions et formes du palier), cinématiques et dynamiques (vitesse
de rotation et charge appliquée), les caractéristiques du lubrifiant (essentielle-
ment sa viscosité et dans certains cas sa masse volumique) et la nature des maté-
riaux formant le palier.
Ainsi la détermination des paliers hydrodynamiques ne dépend pas seulement
de la théorie de la lubrification mais aussi d’un ensemble de conditions liées à
l’environnement des mécanismes. Il est cependant possible de présenter
succinctement leurs principales caractéristiques de fonctionnement. Tout
d’abord, l’épaisseur minimale du film lubrifiant doit toujours être nettement

2 supérieure à la somme des hauteurs des rugosités des surfaces, sinon l’usure
rapide du coussinet sera due soit à l’abrasion, soit plus rapidement encore au
grippage des surfaces. Cette épaisseur minimale dépend bien sûr de l’aspect
dynamique du système et en particulier des vibrations de l’arbre en rotation.
Le palier hydrodynamique pouvant être lui-même source de vibrations, les
aspects dynamiques devront être examinés en détail. Ils sont analysés de façon
très différente selon qu’il s’agit des paliers de ligne d’arbre (charges relativement
constantes) ou des paliers de moteurs ou de compresseurs alternatifs (charges
de module et direction variant beaucoup avec le temps).
Par ailleurs, sous l’effet de ces charges dynamiques, des phénomènes de cavi-
tation dans le film lubrifiant du palier peuvent conduire à la destruction du
coussinet par fatigue.
Enfin, la puissance dissipée par cisaillement dans le fluide lubrifiant du palier
entraîne une élévation de la température du mécanisme. Cette augmentation de
température peut être responsable de la fusion ou du fluage du régule, matériau
mou à bas point de fusion, qui recouvre généralement la surface du coussinet.
La température maximale du palier peut être évaluée de façon approchée à
l’aide d’un bilan thermique global du palier ; elle peut aussi être calculée avec
une excellente précision en effectuant une analyse fine du problème thermo-
élastohydrodynamique de l’ensemble du palier.
Comme la plus grande partie de la chaleur est évacuée par le fluide, la connais-
sance du débit de lubrifiant nécessaire au bon fonctionnement du palier est
importante.
Dans la plupart des paliers et des butées hydrodynamiques, l’écoulement du
fluide dans le film lubrifiant s’effectue en régime laminaire ; cependant l’emploi
de fluides de très faible viscosité, de l’eau par exemple, ou la nécessité d’utiliser
des paliers de grandes dimensions fonctionnant à vitesses élevées entraînent
des changements de régime dans le fluide dont l’écoulement peut devenir
turbulent. Le calcul des caractéristiques du palier s’effectue alors en tenant
compte des changements de régime dans le fluide.
Cet article présente, dans un premier paragraphe (§ 1), les équations de base
en lubrification hydrodynamique et quelques exemples simples de calcul de
portance. Le paragraphe 2 porte sur les butées hydrodynamiques de forme fixe
et à patins oscillants. Les paragraphes 3 et 4 traitent le cas des paliers lisses,
des paliers non cylindriques et des paliers à patins oscillants ; les caractéristiques
statiques puis dynamiques linéaires sont présentées ainsi que le comportement
non linéaire de ces mécanismes. Le paragraphe 5 aborde les aspects thermiques,
tout d’abord dans le cas simple d’un bilan thermique global, puis dans le cas
général. Enfin le dernier paragraphe (§ 6) décrit les effets non laminaires et
l’influence des forces d’inertie en lubrification hydrodynamique.

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__________________________________________________________________________________________________ BUTÉES ET PALIERS HYDRODYNAMIQUES

1. Lubrification — Il n’y a pas de glissement entre le fluide et les parois du


contact : ainsi, sur les parois, la vitesse du fluide est égale à celle
hydrodynamique des parois.
— La courbure générale du film est négligée. On peut démontrer
qu’en film mince, dans un palier par exemple, l’effet de courbure
La lubrification hydrodynamique est un chapitre de la tribologie est du second ordre.
qui concerne les contacts pour lesquels un fluide visqueux est inter- — La vitesse d’une des parois du contact est toujours tangente
calé entre les surfaces en présence. Ce fluide peut être un liquide, à cette paroi, ce qui permet de placer le système d’axes sur la paroi.
pratiquement incompressible, tel que de l’huile, de l’eau ou même Cette hypothèse exclut l’emploi de l’équation de Reynolds pour
un métal fondu : c’est le cas des paliers et des butées hydro- l’étude des contacts rugueux ou comportant des défauts de forme.
dynamiques. Ce fluide peut aussi être un gaz compressible, le plus L’étude de ce type de contact peut être cependant effectuée à partir
souvent de l’air : c’est le cas des paliers et des butées à gaz (cf. article d’une équation plus générale dite équation de la mécanique des films

2
Butées et paliers aérodynamiques [B 5 335] dans ce traité). minces visqueux.
En lubrification hydrodynamique, le film de fluide sépare totale- — La viscosité du fluide ne varie pas selon l’épaisseur du contact ;
ment les surfaces en présence, ce qui suppose que les aspérités et cela correspond à une température constante à travers l’épaisseur
les défauts de forme des surfaces aient des dimensions inférieures du film. Cette hypothèse n’est généralement pas vérifiée ; elle est
à l’épaisseur du film. Dans le cas contraire, il y aura contact en cependant très utilisée, car la résolution de l’équation de Reynolds
différents points des deux surfaces ; on parlera alors soit de lubrifi- généralisée qui tient compte de l’effet thermique est très difficile.
cation mixte, soit de lubrification limite.
— La masse volumique du fluide est constante, ce qui, en lubri-
La formation et le maintien d’un film de fluide imposent l’existence fication hydrodynamique, est pratiquement le cas pour tous les
d’une pression dans ce film afin d’équilibrer la charge appliquée liquides.
entre les deux surfaces du mécanisme. Cette pression qui, en lubri-
— L’épaisseur du film est très faible devant la largeur et la
fication hydrostatique, est engendrée par un système extérieur au
longueur du contact ; le rapport entre ces grandeurs doit être de
contact (pompe ou compresseur) est, dans le cas hydrodynamique,
l’ordre de 10–3. C’est l’hypothèse fondamentale de la lubrification
créée par le déplacement relatif des surfaces. Le calcul de cette pres-
hydrodynamique. Si cette hypothèse n’est pas vérifiée, l’équation
sion permet de déterminer la charge que peut supporter le contact,
de Reynolds ne peut s’appliquer.
le couple ou la force de frottement et le débit de fluide dans le méca-
nisme. Ainsi, pour déterminer les caractéristiques de fonctionne-
ment d’un palier ou d’une butée, il faudra tout d’abord calculer la
pression dans le film. Cette pression est obtenue par la résolution
1.1.2 Formes de l’équation
de l’équation de Reynolds qui, sous une forme simplifiée, a été
démontrée par ce dernier en 1886 [1] dans le but d’expliquer les L’équation de Reynolds traduit la loi de conservation du débit dans
résultats expérimentaux donnés, dans le cas d’un palier, par Beau- le contact. Selon le système d’axes, elle prend différentes formes [3].
champ Tower en 1885 [2].
■ En coordonnées cartésiennes (figure 1), où l’épaisseur du film
h est mesurée selon Y, les conditions aux limites sur les vitesses du
fluide sont :
1.1 Équations de Reynolds — sur la paroi 1, pour y = 0 : u = U1 ; v = 0 ; w = W1 ;
— sur la paroi 2, pour y = h : u = U 2 ; v = V 2 ; w = W2 .
Dans ces relations, u, v et w sont respectivement les vitesses du
L’équation de Reynolds en lubrification peut être déduite des équa- fluide dans les directions X, Y, Z et U1 , U2 , V2 , W1 et W2 sont les
tions de la mécanique des milieux continus et de la loi de compor- vitesses des surfaces 1 et 2 dans les directions X, Y et Z. La vitesse
tement des fluides newtoniens, en tenant compte de la forme V1 de la surface 1 dans la direction Y est nulle d’après les hypo-
particulière du film lubrifiant pour lequel l’épaisseur est très faible thèses retenues.
devant la largeur et la longueur du contact. Il existe différentes
formes de cette équation qui permettent de tenir compte de l’effet
thermique et de la rugosité des surfaces. La démonstration de ces
équations a été effectuée par ailleurs [3], aussi ne présenterons-nous
ici que les hypothèses effectuées et les équations de Reynolds pour
un fluide incompressible en régime isotherme dans le cas d’un
système d’axes en coordonnées cartésiennes et en coordonnées
cylindriques.

1.1.1 Hypothèses

— Le milieu est continu : l’équation de Reynolds ne s’applique


pas dans les zones où il y a rupture du film.
— Le fluide est newtonien : les contraintes de cisaillement sont
proportionnelles aux taux de cisaillement.
— L’écoulement est laminaire : dans le cas contraire, il faudra
utiliser une équation autre que l’équation de Reynolds.
— Les forces massiques extérieures dans le fluide sont négli-
geables, ce qui est très généralement vérifié sauf en magnéto-
hydrodynamique.
— Les forces d’inertie dans le fluide sont négligeables devant les Figure 1 – Système d’axes en coordonnées cartésiennes
forces de viscosité et de pression ; cela est vérifié dans le cas des et cylindriques
films minces tant que l’écoulement est laminaire.

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BUTÉES ET PALIERS HYDRODYNAMIQUES __________________________________________________________________________________________________

Si p est la pression dans le film et µ la viscosité dynamique du — on ne connaît qu’une partie de la frontière du domaine d’inté-
fluide, l’équation de Reynolds s’écrit : gration et, sur cette partie de la frontière, la valeur de la pression
est connue en tous points. Le reste de la frontière, qui limite souvent
∂ h 3 ∂p ∂ h 3 ∂p ∂h ∂h
   
------- ------- -------- + ------- ------- -------- = 6 ( U 1 – U 2 ) -------- + 6 ( W 1 – W 2 ) --------
∂x µ ∂x ∂z µ ∂z ∂x ∂z
le domaine où le film est rompu, sera déterminé par une condition
supplémentaire sur la pression. On pose généralement, pour la
(1)
∂ ∂ continuité du débit, ∂p /∂n = 0 et p = p s sur la frontière inconnue, n
+6 h ------- ( U 1 + U 2 ) + 6 h ------- ( W 1 + W 2 ) + 12 V 2
∂x ∂z étant la normale à cette frontière et ps la pression de vapeur saturante
Les composantes de la vitesse du fluide u et w respectivement du fluide (souvent, pour simplifier les calculs, on pose ps égale à
dans les directions X et Z sont : la pression atmosphérique). Ces conditions, dites conditions de
Reynolds, sont généralement utilisées dans le cas des paliers hydro-
1 ∂p h–y y dynamiques, car dans la zone divergente du palier le film est rompu.
u = -------- -------- y ( y – h ) + ------------- U 1 + ---- U 2 
2µ ∂x h h 

2  (2) ■ Remarque
1 ∂p h–y y
w = ------- -------- y ( y – h ) + ------------- W 1 + ---- W 2  Le second membre de l’équation de Reynolds [équation (1)] fait
2µ ∂z h h 
apparaître la différence des composantes des vitesses des surfaces
De ces relations, on déduit les contraintes de cisaillement dans selon X et Z ; il en est de même dans l’équation (4) pour les
le fluide : composantes de vitesse selon θ et r. Ainsi on pourrait conclure, de
façon erronée, que la vitesse de glissement U1 – U2 crée la portance,
∂u 1 ∂p µ alors que la portance est directement proportionnelle, en régime
τ XY = µ -------- = ---- -------- ( 2 y – h ) + ( U 2 – U 1 ) ----  isotherme, à la somme des vitesses des surfaces du contact. L’expli-
∂y 2 ∂x h 
 (3) cation de cette contradiction apparente est que, même en régime
∂w 1 ∂p µ
τ YZ = µ --------- = ---- -------- ( 2 y – h ) + ( W 2 – W 1 ) ----  stationnaire, la vitesse d’écrasement, V2 dans l’équation (1) et W2
∂y 2 ∂z h dans l’équation (4), n’est pas nulle et contient des termes de la
forme :
■ En coordonnées cylindriques r, ␪ , Z (figure 1), pour une
épaisseur de film h mesurée dans la direction OZ, et avec les ∂h ∂h ∂h ∂h
U 2 -------- , W 2 -------- ou U 2 -------- et V 2 -------
conditions aux limites suivantes sur la vitesse : ∂x ∂z ∂r ∂θ
— sur la paroi 1, pour z = 0 : u = U1; v = V1; w = 0 L’exemple suivant illustre cet effet.
— sur la paroi 2, pour z = h : u = U2 ; v = V2 ; w = W 2 Considérons le cas d’un cylindre en rotation autour de son axe
à la vitesse angulaire ω, en regard d’une plaque plane animée, paral-
l’équation de Reynolds s’écrit : lèlement à elle-même, de la vitesse U (figure 2). Dans le cas d’un
∂ rh 3 ∂ p ∂ h 3 ∂p écoulement plan, l’équation de Reynolds se réduit à :
  
------ ---------- -------- + ------- ------- --------
∂r µ ∂r ∂θ µr ∂θ  ∂ h 3 ∂p ∂h
∂h ∂h ∂
 
------- ------- -------- = 6 ( U 1 – U 2 ) -------- + 12 V 2
∂x µ ∂x ∂x
= 6 r ( U 1 – U 2 ) -------- + 6 ( V 1 – V 2 ) ------- + 6 rh ----- ( U 1 + U 2 )
∂r ∂θ ∂r Dans le système d’axes choisi, les vitesses des surfaces sont :
(4)
U1 = U

+ 6 h ------- ( V 1 + V 2 ) + 6 h ( U 1 + U 2 ) + 12 r W 2 U2 = ω R cos α, V2 = ω R sin α
∂θ
Dans la zone de contact, α donné par tan α = ∂h /∂x est très petit
Les composantes u et v de la vitesse du fluide dans les directions
(de l’ordre de 10–3), aussi peut-on écrire : tan α ≈ sin α ≈ α ≈ ∂h /∂x
radiales et tangentielles sont :
et cos α = 1, soit :
1 ∂p h–z z ∂h
u = ------- -------- z ( z – h ) + ------------- U 1 + ---- U 2  U 2 = ω R et V 2 = ω R --------
2µ ∂r h h  ∂x
 (5)
1 ∂p h–z z
v = ----------- ------- z ( z – h ) + ------------- V 1 + ---- V 2 
2µr ∂θ h h 

On en déduit les contraintes de cisaillement dans le fluide :

∂u 1 ∂p µ
τ rZ = µ -------- = ---- ------- ( 2 z – h ) + ( U 2 – U 1 ) ---- 
∂z 2 ∂r h 
 (6)
∂v 1 ∂p µ
τ θ Z = µ ------- = ------- ------- ( 2 z – h ) + ( V 2 – V 1 ) ---- 
∂z 2r ∂θ h

■ L’équation de Reynolds est une équation aux dérivées partielles du


second ordre de type elliptique dont l’inconnue principale est la
pression. La valeur de la pression dans le film dépend non seulement
de la géométrie du contact et de sa cinématique, mais aussi des
conditions aux limites sur la pression retenue lors de la résolution de
l’équation de Reynolds. Deux types de conditions sont généralement
employés :
— on connaît la frontière du domaine d’intégration et, sur cette
frontière, la valeur de la pression est connue en tous points. Ces
Figure 2 – Cylindre en rotation
conditions sont utilisées dans le cas des butées hydrodynamiques
où il existe généralement un film complet ;

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Dans ces conditions, l’équation de Reynolds s’écrit : 1.2 Application de l’équation de Reynolds
∂ h h3 ∂ p ∂h à des cas élémentaires de portance
 
-------- ------ ------- = 6 ( U + ω R ) --------
∂x µ ∂x ∂x
Ainsi, la vitesse de roulement (U + ωR ) crée la portance et, même L’équation de Reynolds sous sa forme générale permet de prendre
en régime permanent, la vitesse d’approche ou d’écrasement joue en compte tous les phénomènes de portance rencontrés en lubrifi-
un rôle très important. cation. Il est cependant utile d’étudier séparément les différents types
de portance.

1.1.3 Calcul des différents paramètres


dans le contact 1.2.1 Contact à faces parallèles :
portance hydrostatique
■ Charge supportée par le contact
La valeur de la charge W que peut supporter le contact est obtenue
par intégration de la pression dans le film. Dans le cas d’un contact
Soit l’écoulement entre deux plaques parallèles de largeur infinie
selon OZ. La plaque supérieure de longueur B est fixe ; la plaque
2
plan, l’intégration est directe : inférieure est animée d’un mouvement de translation uniforme de
vitesse U 1 = U (figure 3a ). Dans ces conditions, et compte tenu des

p
relations établies précédemment, la vitesse du fluide s’écrit :
W = ds
S 1 dp h–y
u = -------- -------- y ( y – h ) + ------------- U
2µ dx h
avec S surface du contact et ds élément d’aire.
Dans les autres cas, il faut, avant intégration, projeter la pression d2 p
et l’équation de Reynolds : ----------2- = 0
sur trois axes perpendiculaires. Les composantes Wi de la charge dx
sont ainsi données par :
car la vitesse U et l’épaisseur h sont constantes ; ainsi dp /dx = Cte.

Wi =  pn
S
⋅ e ds
i

avec n vecteur unitaire normal à la surface,

e vecteur unitaire porté par l’axe i.


i
On obtient ainsi le module et la direction de la charge.
■ Débit
Le débit volumique est utilisé pour les fluides incompressibles ;
il est donné par le flux du vecteur vitesse à travers une surface
perpendiculaire au film.
On a ainsi :

Qj = Sj
uj d s

Dans cette relation, uj et Qj sont respectivement la composante


de la vitesse et le débit volumique dans la direction j et Sj la section,
normale à l’axe j, à travers laquelle est calculé le débit.
■ Force ou couple de frottement
Le calcul de la force ou du couple de frottement s’effectue, sur
l’une ou l’autre des parois du contact, par intégration de la contrainte
de cisaillement ou du couple élémentaire correspondant à la direc-
tion considérée. Ainsi, dans le cas d’un contact en coordonnées
cartésiennes, les composantes FX et FZ de la force de frottement sur
la surface 1 et dans les directions X et Z s’écrivent :

FX 1 =  S
( τ XY ) y = 0 d s

FZ 1 =  S
( τ YZ ) y = 0 d s

Les composantes de la force de frottement FX 2 et FZ 2 sur la surface


2 se calculent de la même façon à partir des contraintes de cisaille-
ment sur la paroi 2, c’est-à-dire pour y = h.
Figure 3 – Types d’écoulement entre deux plaques parallèles
(cas hydrostatique)

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Deux cas peuvent se présenter : Il vient, après intégration :


— la pression est identique à l’entrée et à la sortie. Dans ce cas
6 µU 1 h*
dp /dx = 0 ; il n’y a pas de portance dans le contact et la répartition
de vitesse suivant l’épaisseur du film est linéaire (figure 3b, cas I).

p = ------------- ---- – ---------2- + C 1
tan α h 2 h 
C’est l’écoulement de Couette ; Si l’entrée et la sortie du film sont à la pression atmosphérique
— la pression est différente à l’entrée et à la sortie. Dans ce cas : et si celle-ci est prise comme référence, les conditions aux limites
p2 – p1 sur la pression s’écrivent :
dp
-------- = ------------------
dx L p = 0 pour x = 0 ou h = h1
p = 0 pour x = B ou h = h 2
avec p1 et p2 pressions respectivement à l’entrée et à la sortie du
contact, distantes de L. Ces conditions permettent de calculer les deux constantes h* et
C1 ; il vient ainsi :

2
Le champ de vitesse dans le film est fonction des pressions impo-
sées aux extrémités du contact (figure 3b, cas II, III et IV). Ainsi, la
2 h1 h2 1
vitesse du fluide est généralement due à deux effets différents : h * = ------------------- et C 1 = – -------------------
— l’écoulement de Couette, c’est le terme de vitesse : h1 + h 2 h1 + h 2

h–y Soit :
------------- U
h 6 µU 1 1 h1 h 2 1
p = -------------- ---- – ------2- ------------------------ – -------------------
tan α h h ( h 1 + h 2 ) h 1 + h 2
— l’écoulement de Poiseuille, c’est le terme de vitesse :
1 dp ce qui s’écrit encore, si l’on pose a = h1 /h 2 et h = h / h 2 :
------- -------- y ( y – h )
2µ dx 6 µ UB 1 1 a 1
p = ------------------------- ----- – ------2- ----------------- – ------------- (8)
h2 ( a – 1 ) h h ( 1 + a ) 1 + a
2
Dans les cas II, III et IV, il y a portance, mais il faut remarquer
que celle-ci est indépendante de la vitesse et de l’épaisseur du film :
c’est une portance hydrostatique. La figure 4 présente les variations de la pression sans dimension
2
p = h 2 p / ( µ UB ) pour différents rapports a = h1 /h2 . La valeur du
1.2.2 Cas de deux surfaces non parallèles : maximum de pression est fonction du rapport a ; son point d’appli-
coin d’huile cation se déplace vers la sortie de l’écoulement lorsque a augmente.
La pression maximale atteint sa plus grande valeur pour a ≈ 2,2.
Soit l’écoulement entre deux plaques planes non parallèles de lar- La charge est obtenue par intégration du champ de pression : pour
geur infinie suivant OZ et de longueur B suivant OX. La plaque infé- une largeur L, il vient :
rieure est animée d’un mouvement de translation uniforme de

p 
B h2
vitesse U1 = U, la plaque supérieure est immobile et inclinée dans L
le plan XOY d’un angle constant α très petit (figure 4). W = L d x = – --------------
tan α h1
pdh
0
L’équation de Reynolds s’écrit :
6 µ UL h h1 – h 2
d dp dh
d’où : W = -----------------
tan 2 α h2 
- ln ------1- – 2 ------------------
h1 + h2
- 
dx  dx 
-------- h 3 -------- = 6 µ U --------
dx
6 µ ULB 2 a–1
avec h = h1 – x tan α et tan α = (h1 – h 2)/B ou encore : 2
h2 ( a – 1 ) 2

- ln a – 2 -------------
W = --------------------------
a+1  (9)

dp h – h*
-------- = 6 µ U ----------------
- (7) La courbe en trait continu de la figure 5 présente les variations
dx h3 2
de la charge sans dimension W = h 2 W / ( µ ULB 2 ) en fonction du
avec h* épaisseur du film au point d’abscisse x* pour lequel le
rapport a = h1 /h2 . Cette charge est nulle lorsque a = 1 (plaques paral-
gradient de pression s’annule.
lèles), elle est maximale pour un rapport d’épaisseur entre l’entrée
et la sortie très voisin de 2,2.

1.2.3 Cas d’une discontinuité

Soit un patin échelon, dit patin de Rayleigh (figure 6), de largeur


infinie selon OZ. Il est constitué de deux régions : une région d’entrée
où l’épaisseur du film est constante et égale à h1 , une région de
sortie où l’épaisseur est également constante et égale à h 2 . Ces deux
régions sont donc séparées par une discontinuité dans l’épaisseur
du film située au point x = B 0 . Pour étudier ce problème, il faut isoler
la discontinuité et résoudre l’équation de Reynolds séparément dans
les régions d’entrée et de sortie.
Dans la région d’entrée définie par 0 < x < B0 , l’équation de
Reynolds s’écrit :
d2 p
----------- = 0
Figure 4 – Coin d’huile et les variations de pression dx 2

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Le débit pour une largeur L s’écrit à l’entrée ou à la sortie :

u
hi
Qi = L i dy
0
1 d pi hi – y
avec u i = ------- ---------- y ( y – h i ) + -------------
-U
2µ dx hi

où i prend les valeurs 1 à l’entrée et 2 à la sortie. Il vient ainsi :


3
L h i d p i LUh
Q i = – ------------ ---------- + -------------i-
12 µ d x 2

2
d p1 pm dp – pm
avec ---------- = -------- et ---------2- = ---------------
-
dx B0 dx B – B0

L’égalité des débits Q1 et Q2 permet d’écrire :


h1 – h2
p m = 6 µ U --------------------------------
3 3
h1 h2
------- + --------------- -
B0 B – B0
6 µ UB s ( 1 – s ) ( a – 1 )
Figure 5 – Variation de la charge W en fonction du rapport h1 / h2 soit encore p m = ---------------
2
- --------------------------------------
3
-
h2 a (1 – s) + s

avec a = h1 /h2 et s = B0 /B.


Pour une largeur L, la charge s’écrit :
pm
W = LB --------
2
Les valeurs de a et s qui rendent la charge maximale sont :
a = 1,866 et s = 0,718
La courbe en trait discontinu de la figure 5 donne les variations
2
de la charge sans dimension W = h 2W ⁄ ( µ ULB 2 ) en fonction de a
Figure 6 – Patin échelon ou patin de Rayleigh,
avec sa répartition de pression pour s = 0,718. On remarquera que, pour un encombrement égal et
pour les conditions optimales, la charge portante de ce système est
plus grande que celle d’un patin incliné. Cela n’est plus vérifié dès
soit : p = C1 x + C 2 qu’on s’écarte du rapport d’épaisseur optimal. Par ailleurs, les effets
d’inertie, lorsqu’ils existent, ont tendance à diminuer la portance du
C1 et C2 sont calculés à partir des conditions aux limites :
patin échelon.
p=0 pour x=0
p = pm pour x = B0
avec pm pression maximale inconnue qui existe au niveau de la dis-
continuité. 2. Butées hydrodynamiques
pm
Il vient ainsi : p = -------- x
B0
Le système hydrodynamique le plus simple est le plan incliné ou
De même, dans la zone de sortie définie par B 0 < x < B, l’équa- blochet utilisé dans les butées. Dans le cas de butées circulaires, le
tion de Reynolds s’écrit : grain mobile porté par l’arbre de rotation est en face de secteurs
d 2p fixes ou oscillants. Étudions ces différents cas.
----------2- = 0
dx
soit : p = C3 x + C 4
2.1 Plan incliné de géométrie fixe
Les conditions aux limites :
p = pm pour x = B0 Le plan incliné est constitué de deux surfaces planes non parallèles
p=0 pour x=B (figure 7) : la face inférieure horizontale animée d’une vitesse de
permettent de calculer C3 et C4 ; il vient : translation U et la face supérieure inclinée d’un angle α très petit
par rapport à l’horizontale. Par son mouvement de translation, la
pm plaque inférieure entraîne du lubrifiant dans l’espace convergent, ce
p = ----------------- ( B – x ) qui produit un champ de pression permettant de supporter une
B – B0
charge. Il faut préciser que, dans le cas général, les épaisseurs de
Ainsi la courbe de variation de pression est linéaire (figure 6) ; elle film h1 et h 2 sont très petites (de l’ordre de 0,005 à 0,5 mm) devant
présente une discontinuité au point B0 . la longueur du palier B (≈ 30 à 500 mm).
La pression inconnue p m est calculée en écrivant l’égalité des
débits à l’entrée et à la sortie.

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2.1.1 Cas bidimensionnel En reportant dans cette expression la valeur de la charge W [cf.
relation (9)], il vient :
Dans un premier temps, on négligera les fuites normales à la
µ UL h1 h1 – h 2
vitesse de translation U, ce qui conduit à étudier un problème plan.
Cependant, tous les calculs seront présentés pour une largeur L du tan α h2 
F m = – -------------- 4 ln ------- – 6 -------------------
h1 + h2 
blochet dans la direction perpendiculaire à la direction de la vitesse.
soit encore :
■ Pression et charge µ UBL a–1
Les calculs de la pression p et de la charge portante W de ce blochet h2 ( a – 1 ) 
F m = – ------------------------- 4 ln a – 6 -------------
a+1  (11)
ont été présentés au paragraphe 1.2.2 et sont donnés par les
relations (8) et (9). Le signe moins indique que la direction de la force exercée par
le fluide sur la paroi est de sens contraire à celui de la vitesse de
■ Force de frottement cette paroi.

2 La force de frottement Fm qui agit sur le plan mobile est obtenue


par l’intégration des taux de cisaillement sur ce plan :
Le coefficient de frottement relatif à la surface mobile est donné
par la relation :

Fm = τ ( XY ) y = 0 d s Fm h 2 ( a – 1 ) 4 ln a – 6 ------------
a–1
a+1
-
- = ------------------------- ⋅ ----------------------------------------
f m = --------- (12)
W 6B a–1
1 ∂p µU ln a – 2 -------------
avec (§ 1.1.2) τ XY = ---- -------- ( 2 y – h ) – --------- a+1
2 ∂x h
Le coefficient de frottement est peu utilisé en lubrification hydro-

h  µhU dynamique, on lui préfère généralement le nombre de frottement


B B
∂p
soit encore Fm = – L ---- ------- d x – L -------- d x
0 2 ∂x 0 f = fm B /h 2

Dans le cas du blochet unidirectionnel examiné ici, le calcul de La figure 8 donne les variations de la force de frottement sans
ces deux intégrales ne présente pas de difficultés. Cependant, dans dimension F m = F m h 2 / ( µ UBL ) et du nombre de frottement f en
le cas général et quel que soit le type de contact, il est commode
d’intégrer par partie la première de ces intégrales, car le gradient fonction du rapport a. On remarque que le nombre de frottement
de pression n’est généralement pas connu. Dans ces conditions, il passe par un minimum pour a ≈ 2,6. Il faut noter que la force de frot-
vient : tement relative à la face fixe Ff est différente de celle calculée sur

h p
B B la face mobile. Cette différence assure l’équilibre des forces qui
∂p h B ∂h agissent sur le blochet.
–L ---- ------- d x = – L ---- p +L ---- ------- d x (10)
0 2 ∂x 2 0 0 2 ∂x
La puissance dissipée par le cisaillement dans le fluide est égale
Le premier terme ne dépend que des conditions aux limites ; il à la puissance mécanique fournie au système. Elle s’écrit :
est nul dans le cas considéré ici car p = 0 pour x = 0 et x = B. Le second Pc = U |Fm|
terme s’exprime directement en fonction de la charge supportée par
le contact ; il vient : ■ Débit

p p
B B Le débit est obtenu en intégrant le champ de vitesse à travers
∂h tan α W tan α une section droite :
L ---- ------- d x = – -------------- L d x = – ---------------------
2 ∂x
u
0 2 0 2 h

Ainsi, la force de frottement s’exprime par : Q = L dy


0

 1 dp h–y dp
B
W tan α µU avec u = ------- -------- y ( y – h ) + ------------- U et -------- donné par la relation (7)
F m = – --------------------- – L --------- d x 2µ dx h dx
2 0 h
W tan α µ UL h1 h1 h2
soit encore : F m = – -------------------- – ------------- ln ------ d’où : Q = LU -------------------
2 tan α h2 h1 + h 2
a
soit encore : Q = LU h 2 ------------- (13)
1+a
La courbe de variation du débit sans dimension Q = Q  ( LU h 2)
est donnée sur la figure 8.

2.1.2 Patin de dimension finie


Dans tout ce qui précède nous avons supposé la largeur du blochet
infinie ; ce n’est pas le cas en pratique, car le rapport L /B est très
souvent voisin de 1. Dans ces conditions, il existe un écoulement
axial qui entraîne une chute de pression dans le film et toutes les
caractéristiques calculées précédemment sont modifiées. L’équation
de Reynolds s’écrit alors :
Figure 7 – Blochet : schéma de principe
∂ 3 ∂p ∂ 3 ∂p ∂h
∂x  ∂x ∂z  ∂z 
------- h ------- + ------ h -------- = 6 µ U -------
∂x  (14)

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Butées et paliers hydrodynamiques


Caractéristiques statiques et dynamiques
par Jean FRÊNE
Ingénieur de l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

2
Docteur-Ingénieur, Docteur ès Sciences
Professeur à l’Université de Poitiers

1. Caractéristiques statiques et dynamiques d’un palier à deux


lobes avec L/D = 0,5 (tableau 1)..................................................... Form. B 5 320 — 2
2. Caractéristiques statiques et dynamiques d’un palier à deux
lobes avec L/D = 1 (tableau 2) ........................................................ — 3
3. Caractéristiques statiques et dynamiques d’un palier à trois
lobes avec la charge au milieu d’un lobe et L/D = 0,5
(tableau 3) ............................................................................................ — 4
4. Caractéristiques statiques et dynamiques d’un palier à trois
lobes avec la charge entre deux lobes et L/D = 0,5 (tableau 4) — 4
5. Caractéristiques statiques et dynamiques d’un palier à trois
lobes avec la charge au milieu d’un lobe et L/D = 1
(tableau 5) ............................................................................................ — 6
6. Caractéristiques statiques et dynamiques d’un palier à trois
lobes avec la charge entre deux lobes et L/D = 1 (tableau 6) — 6

n rappelle les définitions des différents paramètres de ces


O tableaux :

µ NDL R
2 Qe QZ Q R CM c ω 2
W 冢 冣
S = ---------------- -----
C
; Q e = ----------------
NDLC
; Q Z = ----------------
NDLC
; Q = ---------------- ; f = ----- f a ; M c = -------------------- ;
NDLC C W .
ν Ca XX Ca XY Ca YX Ca YY C ω b XX
ν c = ----c- ; a XX = ------------ ; a XY = ------------ ; a YX = ------------ ; a YY = ------------ ; b XX = -------------------- ;
ω W W W W W
C ω b XY C ω b YY
b XY = -------------------
- ; b YY = -------------------- .
W W
Parution : août 1995

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1. Caractéristiques statiques deux lobes avec L/D = 0,5


et dynamiques d’un palier à (tableau 1)
(0)

Tableau 1 – Caractéristiques statiques et dynamiques d’un palier à deux lobes avec L /D = 0,5
hmin/C
a /C ⑀ cos ⌽ ⑀ ⌽ S Qe QZ Q f
lobe 1 lobe 2

2 0 0,01 0,075 3
(degrés)
82,36 0,925 0,926 5,870 0 3,128 0,215 0,215 114,93
0,10 0,259 4 67,33 0,741 0,762 0,502 0 3,071 0,685 0,685 30,463
0,30 0,489 6 52,21 0,510 0,618 0,539 0 4,311 1,193 1,444 12,252
0,50 0,662 4 40,99 0,338 0,574 0,231 9 4,526 1,509 1,929 6,249
0,70 0,810 9 30,32 0,189 0,603 0,083 3 4,590 1,747 2,335 2,993
0,5 10 – 5 0,15 × 10 –4 85,01 0,500 0,500 1,327 3 2,672 0,999 0,999 4,06 × 104
0,05 0,273 0 79,45 0,388 0,476 0,391 0 2,663 1,199 1,199 12,878
0,10 0,372 3 74,42 0,301 0,462 0,201 2 2,654 1,344 1,344 7,210
0,15 0,413 9 68,75 0,244 0,479 0,132 0 2,648 1,398 1,398 5,066
0,20 0,440 3 62,99 0,198 0,506 0,090 5 2,640 1,415 1,415 3,745
0,25 0,457 8 56,90 0,158 0,542 0,062 3 2,631 1,408 1,408 2,821
0,30 0,469 5 50,28 0,122 0,587 0,041 8 2,620 1,381 1,381 2,111
0,35 0,480 3 43,22 0,089 0,639 0,025 6 2,609 1,340 1,340 1,507
0,40 0,488 4 35,02 0,057 0,702 0,013 8 2,598 1,273 1,273 1,011
0,43 0,493 9 29,47 0,039 0,747 0,008 2 2,557 1,224 1,224 0,743
0,75 10 –4 4,28 × 10 –4 76,51 0,249 0,250 68,963 0 2,363 1,416 1,416 3 332
0,10 0,279 7 69,06 0,111 0,299 0,040 1 2,348 1,544 1,544 2,484
0,15 0,304 9 60,53 0,062 0,344 0,015 8 2,344 1,542 1,542 1,247
0,20 0,293 7 47,09 0,026 0,409 0,005 0 2,344 1,486 1,486 0,603

a /C ⑀ cos ⌽ Mc ␯c a XX a XY a YX a YY b XX b XY b YY
0 0,01 6,243 0,501 1,381 1,359 – 7,921 2,119 27,1 2,148 15,98
0,10 5,967 0,512 1,546 4,821 – 2,600 2,134 9,37 2,408 7,172
0,30 5,821 0,503 2,660 3,649 – 0,791 1,866 6,706 1,988 2,574
0,50 8,529 0,404 4,249 3,757 – 0,067 1,719 6,701 1,824 1,585
0,70 ∞ .. 7,624 4,454 0,594 1,624 7,831 1,715 0,997
0,5 10 –5 1,10 × 104 0,580 17 963 7 137 – 11 974 1 048 30,17 – 12,66 10,02
0,05 20,679 0,379 7,445 3,765 – 3,517 1,357 11,48 – 2,07 4,04
0,10 52,954 0,217 6,284 3,645 – 1,382 1,419 8,43 0,161 2,485
0,15 ∞ .. 6,675 3,840 – 0,449 1,427 7,76 0,857 1,732
0,20 ∞ .. 7,604 4,257 0,119 1,518 8,03 1,351 1,361
0,25 ∞ .. 9,133 4,690 0,560 1,591 8,52 1,609 1,079
0,30 ∞ .. 11,503 5,182 0,949 1,621 9,15 1,621 0,847
0,35 ∞ .. 15,623 5,816 1,354 1,493 10,27 1,592 0,641
0,40 ∞ .. 24,022 6,883 2,091 1,454 11,71 1,452 0,476
0,43 ∞ .. 33,807 8,349 2,612 1,526 14,55 1,690 0,45
0,75 10 –4 8 121 0,357 6 551 778 – 2 961 715 7 080 – 2 200 1 281
0,10 ∞ .. 15,489 4,477 – 0,956 1,413 11,65 0,044 1,149
0,15 ∞ .. 22,692 6,032 0,931 1,274 12,01 0,945 0,601
0,20 ∞ .. 47,473 7,435 2,292 0,952 14,22 1,088 0,321

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60
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B5325

Butées et paliers hydrostatiques


par Daniel NICOLAS
Docteur ès Sciences
Professeur à l’Université de Poitiers

1. Principes de la lubrification hydrostatique ...................................... B 5 325 - 3


1.1 Butée à simple effet.....................................................................................
1.1.1 Calcul de la portance ..........................................................................
1.1.2 Calcul du débit ....................................................................................



3
4
4
2
1.1.3 Stabilité................................................................................................ — 4
1.1.4 Comportement au voisinage d’un point de fonctionnement.......... — 5
1.1.5 Influence de la vitesse de déplacement de la face supérieure ....... — 5
1.1.6 Puissance dissipée.............................................................................. — 6
1.2 Butée à double effet .................................................................................... — 7
1.2.1 Butée double symétrique................................................................... — 7
1.2.2 Butée double asymétrique................................................................. — 8
1.3 Régulation des résistances hydrauliques .................................................. — 8
2. Principaux types de butées................................................................... — 9
3. Avant-projet d’une butée plane à quatre alvéoles.......................... — 13
4. Paliers hybrides en régime laminaire................................................. — 14
4.1 Approche analytique des caractéristiques statiques ................................ — 15
4.1.1 Cas du palier hybride non chargé ..................................................... — 15
4.1.2 Cas du palier hybride chargé............................................................. — 16
4.2 Approche analytique des caractéristiques dynamiques .......................... — 16
4.2.1 Cas général.......................................................................................... — 16
4.2.2 Cas du palier hybride non chargé ..................................................... — 17
4.2.3 Remarques .......................................................................................... — 17
4.3 Approche numérique .................................................................................. — 18
4.4 Comparaison des résultats analytique et numérique : influence de la
vitesse de rotation ....................................................................................... — 18
4.5 Exemple de calcul d’un palier hybride....................................................... — 18
5. Paliers hybrides en régime turbulent................................................. — 20
5.1 Relations de base......................................................................................... — 20
5.2 Effets d’inertie à la sortie des alvéoles ...................................................... — 21
5.3 Caractéristiques de fonctionnement .......................................................... — 21
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. B 5 347

n lubrification par film complet, il est d’usage d’attribuer le qualificatif


E hydrostatique à tous les systèmes pour lesquels la charge est trans-
mise à travers un film lubrifiant où la pression est maintenue par l’inter-
médiaire d’une pompe. Lorsque les surfaces en regard sont en mouvement
mais que la géométrie du contact ou les vitesses ne permettent pas de fonctionner
sans l’existence d’un générateur extérieur de pression, le mécanisme est dit
hybride (superposition d’un effet hydrostatique et d’un effet hydrodynamique).
En pratique, le terme hybride est très peu utilisé, et on désigne indif-
féremment par palier (ou butée) hydrostatique un mécanisme dont les
surfaces sont immobiles ou en mouvement. Il ne faut toutefois pas en
conclure que ses performances (portance, débit, etc.) sont indépendantes de la
vitesse : nous verrons que celle-ci joue parfois un rôle déterminant.
Parution : novembre 1995

Bien que le fluide lubrifiant puisse être un gaz ou un liquide, nous nous
limiterons dans cette présentation au cas des liquides newtoniens. Pour les
gaz, on se reportera à l’article Butées et paliers aérodynamiques [B 5 335] dans
ce traité.

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B5325

BUTÉES ET PALIERS HYDROSTATIQUES ____________________________________________________________________________________________________

Par rapport aux autres types de support, la différence essentielle est qu’il n’y
a jamais de contact entre les deux surfaces puisqu’une pompe extérieure permet
l’introduction de liquide sous pression à l’intérieur de la zone de contact et assure
donc l’existence permanente d’un film lubrifiant même à vitesse nulle. Cela
entraîne les avantages suivants :
— l’absence d’usure ;
— un coefficient de frottement très faible ;
— pas de frottement saccadé (stick-slip) ;
— une très grande raideur, permettant de conserver un positionnement précis
malgré des fluctuations de charge importantes ;
— l’inexistence de concentrations de contraintes car, la pression étant

2 sensiblement constante dans l’alvéole, la charge est supportée par une grande
surface ;
— les défauts de forme des surfaces en présence ayant moins d’importance
qu’en régime hydrodynamique, car la pression dans l’alvéole est fonction du
débit global, c’est-à-dire de la distribution d’épaisseur de film et non pas de
l’épaisseur en un point ;
— des problèmes thermiques au sein du film lubrifiant très souvent
secondaires, car on est en présence d’un écoulement forcé à débit important ;
ainsi, l’hypothèse d’un régime d’écoulement isotherme est justifiée.
Les inconvénients majeurs des dispositifs hydrostatiques sont leur coût, car
ils nécessitent une pompe, des filtres, des régulateurs de pression, etc., et leur
fiabilité, car le moindre incident dans le système d’alimentation peut entraîner
la destruction des surfaces.
Du fait de l’environnement important que nécessite un dispositif hydrostatique,
du coût de sa réalisation et de l’absence de standardisation, on a recours à un
système hydrostatique lorsqu’un roulement ou un palier hydrodynamique ne
permet pas un fonctionnement correct. Les avantages énumérés précédemment
montrent que le domaine d’utilisation des butées et paliers hydrostatiques
est très vaste. Citons quelques applications particulières :
— les télescopes et grandes antennes radars, qui doivent se déplacer très
lentement et de façon régulière ;
— les cylindres pour broyeurs de minerai, dans lesquels les températures
ambiantes sont très élevées ;
— les machines-outils de précision et les machines de contrôle, où une grande
précision de centrage et une grande rigidité sont nécessaires ;
— les turbopompes, utilisées pour véhiculer des fluides cryogéniques à très
basse température et animées de grandes vitesses de rotation ;
— les dispositifs de mesure sur machines d’essai, qui nécessitent d’isoler des
éléments afin de mesurer précisément les efforts.
Un grand nombre d’études ont été consacrées à la lubrification hydrostatique ;
la plupart d’entre elles traitent de problèmes spécifiques et ont été publiées dans
des revues spécialisées ; nous ne donnerons en référence que les ouvrages à
caractère général. Au cours des années 1980 à 1990, les publications ont été
principalement axées sur le fonctionnement en régime non laminaire, avec
comme principale application les turbopompes utilisées dans le domaine spatial.
Il faut également noter une série d’articles liés aux dispositifs de régulation afin
de contrôler les raideurs et les amortissements en fonction des fluctuations de
charge par exemple.
Les équations de base utilisées en lubrification hydrostatique laminaire étant
identiques à celles utilisées en lubrification hydrodynamique, nous renvoyons
le lecteur à l’article Butées et paliers hydrodynamiques [B 5 320] de ce traité.
Rappelons simplement que ces équations sont bien évidement déduites des
équations de la mécanique des milieux continus et valables lorsque l’épaisseur
du film lubrifiant est très petite par rapport à son étendue.
Tout au long de cet article, nous supposerons le régime d’écoulement
isotherme et les forces d’inertie négligeables.

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62
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____________________________________________________________________________________________________ BUTÉES ET PALIERS HYDROSTATIQUES

1. Principes de la lubrification
hydrostatique
Dans tout dispositif hydrostatique, une des deux surfaces en
regard est lisse tandis que l’autre comporte une ou plusieurs cavités
(ou alvéoles) reliées à un générateur de pression (figure 1a ). On dis-
tingue deux régions :
— une zone représentée par les portées AB et CD de largeur a
où l’épaisseur h du film lubrifiant est mince ( h / a 1 ) ; l’évolution
de la pression dans cette région est décrite par l’équation de

2
Reynolds (cf. article Butées et paliers hydrodynamiques [B 5 320]) ;
on suppose que la pression ne varie pas selon l’épaisseur du film ;
— une zone BC constituée par la cavité où l’épaisseur du film lubri-
fiant e est grande : e /h >20 ; dans cette région, la pression est
supposée être constante : p = pa ; cette hypothèse est très souvent
vérifiée expérimentalement.
Les deux principales méthodes utilisées pour introduire le liquide
à l’intérieur de la butée sont l’alimentation à débit constant et celle
à pression constante (figure 1b ).
Dans les systèmes à débit constant, on place une pompe à débit
constant entre le réservoir et l’alvéole. Ce système est peu employé
car, lorsque le mécanisme comporte plusieurs alvéoles (ce qui est
pratiquement toujours le cas), il faut soit alimenter chacun d’entre
eux par une pompe individuelle, soit utiliser des régulateurs à débit
constant. Cette solution, qui assure une grande raideur, est complexe
et coûteuse. On lui préfère le système à pression constante.
Dans les mécanismes à pression constante, on place une
résistance hydraulique immédiatement en amont de l’alvéole. Le rôle
de cette résistance est de créer une perte de charge, c’est-à-dire
d’asservir le débit à la chute de pression. Ce système, simple à mettre
en œuvre, permet d’alimenter plusieurs alvéoles avec une seule
pompe à condition, bien évidemment, que le débit de celle-ci soit
suffisant.
Dans la pratique, le système hydraulique est plus complexe. La
figure 1c donne le schéma du circuit pour l’alimentation à pression
constante d’un palier à quatre alvéoles. Une pompe alimente le palier
à un débit supérieur d’environ 30 % à celui nécessaire ; le surplus
de liquide retourne au réservoir par l’intermédiaire d’un régulateur
de pression. Un capteur de pression permet d’arrêter l’entraînement
du rotor si la pression atteint une valeur trop faible. Le clapet
anti-retour et l’accumulateur hydraulique assurent l’alimentation du
palier jusqu’à l’arrêt complet de l’arbre (on peut aussi prévoir une
pompe de secours). L’écoulement est ensuite dérivé vers chaque
alvéole ; sur chaque portion de circuit, on peut prévoir un clapet
anti-retour en cas de surpression dans un alvéole. La résistance
hydraulique R H doit être placée au plus près de l’alvéole afin d’éviter
les instabilités de type pneumatique dues à la compressibilité du
lubrifiant. Une pompe peut être nécessaire pour assurer le retour
du lubrifiant vers le réservoir. Une prise de température T permet
de contrôler la température du liquide à la sortie du palier et
déclencher l’arrêt si la température devient trop importante. Enfin,
un système de refroidissement assure une température constante
au niveau de l’alimentation.

1.1 Butée à simple effet

Nous allons, sur un exemple très simple, montrer les principes


de fonctionnement et de calcul d’une butée hydrostatique lubrifiée.
Considérons une butée plane infiniment longue à un alvéole central ;
on notera p a la pression dans l’alvéole. La butée étant supposée infi-
niment longue, les calculs seront effectués pour une longueur L
(figure 2).
Figure 1 – Principe de fonctionnement d’une butée hydrostatique

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B5325

BUTÉES ET PALIERS HYDROSTATIQUES ____________________________________________________________________________________________________

ou encore d’après la relation (1) :


3
W h KQ
Q = ------ -------- -----------
S µ KW

Le débit est donc fonction de la géométrie de la butée, propor-


tionnel à la pression dans l’alvéole ainsi qu’au cube de l’épaisseur
et inversement proportionnel à la viscosité dynamique du lubrifiant.

1.1.3 Stabilité
Pour que le système soit stable, il est nécessaire que, à la suite

2
Figure 2 – Butée plane infiniment longue
d’un déplacement à partir de la position d’équilibre, il y ait génération
d’une force qui tende à ramener la butée à sa position initiale. La
relation (1) montre que cela est possible si l’on asservit la pression
1.1.1 Calcul de la portance pa dans l’alvéole à l’épaisseur h : cela pourra se faire à partir du
débit (2), en plaçant une résistance hydraulique R H entre une source
Ici l’équation de Reynolds (cf. article Butées et paliers hydro-
à pression constante ps et l’alvéole (figure 1c ). Le débit à travers
dynamiques [B 5 320]) se réduit à :
la résistance peut, de façon générale, s’écrire :
2
d p Q R = f (p s – p a ) (3)
- = 0
-----------
2
dx et l’égalité de ce débit à celui de la butée permet d’exprimer h en
fonction de pa . La raideur λ de la butée s’écrit alors :
avec p pression dans le film lubrifiant d’épaisseur h.
Les variations de pression sont donc linéaires et, compte tenu des ∂W ∂W ∂p a 3W 1
conditions aux limites : λ = – ----------- = – ----------- ----------- = – ----------- ------------------------------------ (4)
∂h ∂p a ∂h h p a ∂Q R
1 – -------- --------------
p (0) = pa et p (a ) = 0 Q ∂ pa
x
on obtient : 
p = p a 1 – -----
a  si x ∈ [ 0, a ] cette raideur dépend de la résistance choisie.
Par une conception appropriée, on peut obtenir une très grande
La portance de l’écoulement (effort exercé par le fluide sur les raideur. Nous distinguerons les résistances hydrauliques fixes,
surfaces) est telle que : simples à réaliser, des résistances à régulation, souvent de véritables
servomécanismes, qui peuvent parfois se comporter comme des
W = p a L ( a + 2 c ) = p a L  [ 1 – ( a / ) ]
générateurs de vibrations. Le tableau 1 donne les lois de perte de
charge des principales résistances hydrauliques fixes ; le cas des
expression que l’on écrit généralement sous la forme :
résistances à régulation est considéré dans le paragraphe 1.3.
W = pa S K W (1) (0)
avec S = L , Le comportement de la fente étroite est très semblable à celui du
K W = 1 – ( a / ) . tube capillaire ; on ne parlera donc plus que de tube capillaire par
la suite pour ces deux types.
K W est appelé coefficient de surface effective ou encore coefficient
de charge. On remarque que la portance est fonction des dimensions Compte tenu des relations (1) et (4), la raideur s’écrit :
de la butée, proportionnelle à la pression dans l’alvéole mais 3 S K W ps
indépendante de l’épaisseur h du film lubrifiant. — pour un capillaire : λ c = ---------------------------- β  1 – β 
h
(5)
6 S K W ps  1 – β 
1.1.2 Calcul du débit — pour un orifice : λ o = ---------------------------- β ----------------
h 2 – β

Le débit sortant de la butée est obtenu par intégration de la vitesse avec β = p a /p s (6)
axiale qui s’écrit ici (cf. article Butées et paliers hydrodynamiques La figure 3 montre que la raideur adimensionnée
[B 5 320]) :
1 dp λ = λ h / SK W p s
u = --------- y ( y – h ) ----------
2µ dx
est maximale pour β = 0,5 dans le cas d’un capillaire et pour β = 0,586
avec µ viscosité dynamique, dans le cas de l’orifice, et que le maximum est supérieur dans ce
d’où le débit-volume : dernier cas.
Ainsi, vis-à-vis des capillaires, les orifices présentent deux
u
h 3
Lh p avantages : une plus grande raideur et un encombrement réduit. En
Q = 2L (x = 0) dy = -------------------a-
0
6µ a revanche, le capillaire permet d’obtenir une raideur indépendante
de la viscosité du fluide, la viscosité étant liée au débit ; il est aussi
soit, en introduisant le coefficient de débit K Q : plus facile à étalonner. Ces propriétés restent vraies tant que le
régime d’écoulement dans le capillaire reste laminaire ; l’encombre-
3
pa h ment du capillaire peut être réduit en utilisant des capillaires en
Q = --------------- K Q (2) forme de spirale [22]. La perte de charge au travers d’un orifice en
µ
paroi mince, caractérisée par le coefficient empirique cd , est très
avec KQ = L /(6a ) sensible à la géométrie de l’orifice et, dans le cas des paliers et butées
hybrides, à la proximité d’une surface en mouvement (ou non) en
aval du jet. Ainsi, l’étalonnage d’un orifice devrait se faire dans des
conditions aussi proches que possible des conditions de fonctionne-
ment réelles [23].

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64
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____________________________________________________________________________________________________ BUTÉES ET PALIERS HYDROSTATIQUES

Tableau 1 – Principales résistances hydrauliques fixes


Type de résistance Schéma Débit Coefficient de perte de charge

4
Tube cylindrique ou capillaire Kc πd c
(écoulement laminaire) Q R = -------- ( p s – pa ) K c = ------------------
µ 128  c

2
3
e 
Fente étroite Kf K f = -------------
(écoulement laminaire, 12 L
QR = ------- ( p s – pa )
viscosité importante) µ
e /  1

Ko = cd So 2/ ρ
Orifice en paroi mince
(viscosité très faible) Q R = K o p s – pa
cd ≈ 0,6 ; S o = πd 2/4

Ces courbes confirment qu’au point de fonctionnement (X = 1) la


raideur maximale est obtenue pour une valeur de β voisine de 0,5.
Il est préférable de retenir une valeur inférieure plutôt que supérieure
car, alors, la raideur croît lorsque l’épaisseur de film diminue [la pente
de la courbe λ = f ( X ) est négative].

1.1.5 Influence de la vitesse de déplacement


de la face supérieure

Lorsque la plaque supérieure est animée d’un mouvement de


translation à vitesse constante U, la distribution de vitesse se trouve
modifiée à la fois dans l’alvéole, où il y a recirculation du fluide, et
sur les portées (figure 5).
■ Alvéole
Si l’on suppose que la profondeur e de l’alvéole est à la fois petite
par rapport à la longueur 2c ( 2 c / e  1 ) et grande par rapport à
l’épaisseur h du film sur les portées ( e / h  1 ) , on peut montrer, à
partir de la conservation du débit [24] que la vitesse de translation
Figure 3 – Variation de la raideur adimensionnée ␭ en fonction U entraîne une variation de pression ∆p dans l’alvéole (figure 5) telle
du rapport des pressions ␤ que :
∆p = p 2 – p 1 = 12 µ Uc /e 2
1.1.4 Comportement au voisinage d’un point Si cette variation est supérieure à deux fois la pression moyenne
de fonctionnement p a , il y aura cavitation au début de l’alvéole et donc apparition
d’instabilités.
Il est souvent intéressant de savoir comment varient les caractéris- Pour une géométrie et une pression pa données, la vitesse critique
tiques de la butée lorsque l’on s’éloigne du point de fonctionnement s’écrit :
caractérisé par l’épaisseur de film h 0 . Les courbes de la figure 4
U * = p e /(6µc)
2
1 a (7)
représentent les variations de la portance W , du débit Q et de la
raideur λ en fonction de l’épaisseur relative X = h /h 0 dans le cas Cette vitesse est en général très élevée (§ 3) et dans ces conditions,
d’une régulation par capillaire et par orifice. Ces courbes sont le régime d’écoulement dans l’alvéole n’étant plus laminaire, les
déduites des relations (1), (2), (4) et (5) ; β représente le rapport des calculs précédents ne constituent plus qu’une approximation très
pressions pa /ps au point de fonctionnement h = h 0 . grossière du phénomène.

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2

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BM5335

Butées et paliers aérodynamiques

par Mihai ARGHIR


Laboratoire de Mécanique des Solides. Université de Poitiers
2
Sébastien LE LEZ
Laboratoire de Mécanique des Solides. Université de Poitiers
et Jean FRENE
Laboratoire de Mécanique des Solides. Université de Poitiers

1. Contexte................................................................................................... BM 5 335 - 2
2. Lubrification aérodynamique. Viscosité de l’air........................... — 3
2.1 Modélisation mathématique. Équation de Reynolds ............................. — 3
2.2 Particularités issues de la compressibilité du lubrifiant ........................ — 4
3. Butées aérodynamiques ...................................................................... — 5
3.1 Dimensionnement de la butée ................................................................. — 6
3.2 Butée à patins oscillants ........................................................................... — 8
3.3 Double butée ............................................................................................. — 8
3.4 Analyse dynamique linéaire. Coefficients dynamiques de la butée ..... — 8
4. Paliers aérodynamiques ...................................................................... — 10
4.1 Paliers circulaires ...................................................................................... — 10
4.2 Paliers à lobes ........................................................................................... — 15
4.3 Paliers à patins oscillants ......................................................................... — 15
5. Butées et paliers à feuilles ................................................................. — 17
5.1 Analyse du palier à feuilles ...................................................................... — 19
5.2 Analyse non linéaire du palier à feuilles ................................................. — 19
6. Modèle du rotor à quatre degrés de liberté ................................... — 20
7. Conclusion............................................................................................... — 22
Pour en savoir plus ........................................................................................ Doc. BM 5 335

es butées et les paliers aérodynamiques fonctionnent sur les mêmes prin-


L cipes que ceux lubrifiés avec de l’huile ou de l’eau (voir Nota). Leur
particularité vient de la très faible viscosité des gaz lubrifiants, à la fois avan-
tage et inconvénient, à laquelle s’ajoutent les spécificités apportées par la
compressibilité. Ils sont donc utilisés dans des machines de grande précision
et de petite taille où se trouvent réunis de grandes vitesses de rotation avec de
très faibles jeux (appareils de mesure, industrie médicale).
L’article présente les principales caractéristiques statiques (capacité de
charge, couple) et dynamiques (coefficients dynamiques, stabilité, réponse au
balourd) des butées et des paliers aérodynamiques, ainsi que les problèmes
soulevés lors de leur intégration dans une machine tournante. Les particularités
Parution : juillet 2009

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est strictement interdite. – © Editions T.I. BM 5 335 – 1

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BM5335

BUTÉES ET PALIERS AÉRODYNAMIQUES ________________________________________________________________________________________________

issues de la compressibilité du lubrifiant sont discutées pour l’air, mais les


conclusions s’appliquent pour tout autre gaz parfait.
L’article est orienté vers des considérations d’ordre physiques et technologi-
ques nécessaires à être connues lorsque le concepteur envisage l’utilisation
des butées ou des paliers aérodynamiques. L’intégration de ces composants
dans une machine tournante est présentée en supposant un rotor rigide.

Nota : Le lecteur peut se reporter aux principes familiers largement abordés dans les
références [1] et [14].

2
Notations et symboles Notations et symboles
Notation Désignation Unité Notation Désignation Unité
B, B1 Largeur du blochet et position m ω Pulsation d’excitation rad/s
de la discontinuité ρ Masse volumique kg/m3
C Jeu m Λ Paramètre (nombre)
de compressibilité
Ca Couple sur l’arbre N·m
σ Pulsation d’excitation adimension-
Cij = (∂Fi /∂xW j )0 Amortissement Ns/m née ou nombre d’écrasement
D Diamètre m Δ Variation
e Excentricité m Π Puissance W
f Coefficient de frottement Φ, Θ Rotations autour de X et Y
Fi Force N
Indices
Hij Impédance N/m
h Épaisseur du film m b Butée, balourd
h1,2 Épaisseur du film max./min. m
pour blochet et butée
Jt , J p Moment d’inertie transversal kg · m2
et polaire
Kij = (∂Fi /∂xj)0 Raideur N/m
L, z Longueur m 1. Contexte
M Masse kg
Mi Moment N.m Souvent, le fonctionnement en milieu contaminé ou des
conditions qui interdisent l’utilisation de l’huile sont un important
Np Nombre de patins facteur de choix (machines cryogéniques). Des ouvrages publiés
p Pression du gaz Pa depuis plus de quatre décennies couvrent ces aspects ([2], [3], [4]).
P Pression moyennée suivant Pa L’utilisation des paliers et des butées aérodynamiques ne s’arrête
l’épaisseur du film pas ici. Il est maintenant reconnu que le moyen le plus efficace
Pa Pression ambiante Pa pour diminuer le poids des petites et des moyennes turboma-
chines (< 400 kW) est de réduire leur taille. Afin de préserver leurs
R Rayon m performances, la diminution du diamètre nécessite une augmenta-
R1,2 Rayon intérieur/extérieur m tion de la vitesse de rotation. Les vitesses de rotations visées sont
de la butée de l’ordre de plusieurs dizaines de milliers de tours par minute,
Re Nombre de Reynolds pouvant atteindre, et même dépasser, 105 tr/min.
r Constante des gaz parfaits m2/s2/K Tenant compte des dimensions actuelles des machines, cela cor-
S Nombre de Sommerfeld respond à des vitesses linéaires de l’ordre de quelques centaines
de m/s. Pour ces machines tournantes, caractérisées par une très
T Température K grande densité de puissance, les paliers et les butées aérodyna-
U, V Vitesses linéaires d’une paroi m/s miques sont de bons candidats au remplacement des guidages
W Charge portante N classiques. Afin de répondre à ce besoin, le palier ne doit pas seu-
lement supporter une charge statique, mais le fonctionnement
X, Y, Z Axes du système de coordonnées
dynamique du rotor doit être stable et la réponse aux perturba-
β, β1 Amplitude angulaire du patin rad tions (balourds, chocs, etc.) doit être limitée à des valeurs impo-
ε Excentricité relative sées par le cahier des charges. L’intégration du palier et de la
Ω Vitesse de rotation rad/s butée dans le rotor devient alors le point validant de la conception.
µ Viscosité dynamique Pa · s Un inconvénient lié à l’utilisation des gaz comme lubrifiants est
que l’onctuosité inhérente à un lubrifiant liquide, comme par
ϕ Angle de calage rad
exemple l’huile, est maintenant absente, et le contact qui a lieu au

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démarrage et à l’arrêt est caractérisé par un régime de frottement


sec et/ou mixte pouvant mener à une usure rapide.
3,6 · 10–5

Viscosité dynamique (Pa.s)


Cet article ne traite pas ces aspects tribologiques et présente
uniquement les problèmes liés au fonctionnement en régime de
lubrification fluide, quand le film de gaz est bien établi. 3 · 10–5
Cette limite de l’épaisseur du film doit être reliée à l’hypothèse
de milieu continu tacitement adoptée. En effet, les valeurs des jeux 2,4 · 10–5
en lubrification aérodynamique sont inférieures à 30 µm, et il se
peut que, sous chargement, l’épaisseur du film devienne inférieure
au micromètre. En dessous de cette valeur, l’air ne peut plus être 1,8 · 10–5
considéré comme un milieu continu, et il faut tenir compte de son
caractère moléculaire. Ceci est le cas de certaines applications 1,2 · 10–5
liées à l’industrie électronique, telles que les têtes de lecture des
disques durs, qui ne sont pas abordées dans cet article.
0 100 200 300 400 500
Température (˚C) 2
Loi de Sutherland :
Avantages : µ/µ 0 = (T/T0) (1 + 110/T0)/(1 + 110/T)
– vitesse de rotation élevée ; T0 = 20 ˚C
– puissance dissipée réduite ; µ0 = 1,82 · 10–5 Pa.s
– fonctionnement isotherme ;
– absence de système de lubrification ;
Figure 1 – Courbe de viscosité dynamique de l’air
– précision de guidage ;
– usure uniquement au démarrage et à l’arrêt.
Inconvénients :
– faible capacité de charge ;
– amortissement limité ;
– jeu réduit et sensibilité aux tolérances de forme ; Y
B
– frottement sec au démarrage et à l’arrêt. L

2. Lubrification h (x
, z)
aérodynamique.
Viscosité de l’air
Z
L’air est le principal lubrifiant considéré dans cet article, bien Axe de l’arbre
X
que d’autres fluides compressibles puissent être utilisés (hydro-
gène, oxygène, azote, etc.). Pour les besoins de la lubrification
aérodynamique, l’air est considéré comme un gaz idéal qui obéit à
l’équation d’état : Figure 2 – Système d’axes

p = ρ rT
où r = 287,03 m2/s2/K souligner que, même si les vitesses de rotation sont très élevées,
le régime d’écoulement en lubrification aérodynamique est géné-
et qui subit une évolution isotherme.
ralement laminaire et caractérisé par Re < 1 000.
Dans ces conditions, la propriété principale de l’air est sa
compressibilité (∂ρ /∂P )T /ρ qui est de l’ordre de 10–6...10–5 Pa–1
pour des pressions dans le film fluide de l’ordre de quelques bars.
2.1 Modélisation mathématique.
Du point de vue de la lubrification, la plus importante caractéris-
tique du fluide lubrifiant est sa viscosité.
Équation de Reynolds
En lubrification, hydrodynamique ou aérodynamique, la réparti-
L’air a une viscosité dynamique de cent à mille fois infé- tion du champ de pression est déterminée à partir de l’équation de
rieure aux lubrifiants liquides. Les faibles valeurs de la visco- Reynolds [1]. En supposant que la masse volumique ρ ne varie pas
sité sont, à la fois un avantage (très faibles valeurs de la suivant l’épaisseur du film, l’équation de Reynolds compressible
puissance dissipée), et un désavantage (faibles capacités de s’écrit (figure 2) :
charge, de raideur et d’amortissement).
Un avantage complémentaire vient du fait que la viscosité ∂  ρ h 3 ∂P  ∂  ρ h 3 ∂P  ∂  ρ Uh  ∂
de l’air est très peu sensible aux variations de température.  +  =  + (ρ h ) (1)
∂x  12 µ ∂x  ∂z  12 µ ∂z  ∂x  2  ∂t

Il existe plusieurs méthodes pour déterminer la solution numé-


Ainsi, la figure 1 montre que, pour des températures de 500 oC, rique de cette équation, mais les auteurs se sont principalement
la viscosité dynamique est le double de sa valeur à 20 oC. Donc, servis de la méthode des volumes finis sur un maillage structuré et
non seulement les butées et les paliers à air dissipent peu d’éner- régulier, le traitement numérique adopté étant emprunté aux techni-
gie, mais leur fonctionnement a lieu à viscosité constante. Il reste à ques employées pour des écoulements fortement compressibles [5].

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B
B B1
2 2
P = P/Pa

P = P/Pa
Λ Λ
1,9 1,9
Λ Λ
1,8 1,8
Λ Λ
1,7 1,7
Λ Λ
1,6 1,6
1,5 1,5
1,4 1,4

2
1,3 1,3
1,2 1,2
h1 h1
1,1 h2 1,1 h2
0 0
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
X = x/B X = x/B

a blochet incliné b blochet de Rayleigh

Figure 3 – Pression dans le blochet monodimensionnel

2.2 Particularités issues Charge adimensionnée (W/PaBL)


de la compressibilité du lubrifiant
0,6
Les mécanismes de portance de la lubrification aérodynamique
ne sont pas différents de ceux mis en évidence pour la lubrification
utilisant de l’huile ou de l’eau.

■ Néanmoins, la compressibilité du gaz apporte une particularité 0,4


importante qu’il faut d’abord mettre en évidence pour les deux
modèles monodimensionnels de blochets décrits sur la figure 3.
L’équation de Reynolds pour ces modèles s’écrit, après adimen-
sionnement (x = x /B , P = P /Pa , h = h /h 2 , t = ω t ) : 0,2

∂  ∂P  ∂ ∂ 6 µV B 12 µω B 2
P h 3 =Λ (P h ) + σ (P h ), Λ = ,σ = (2)
∂x  ∂x  ∂x ∂t Pa h 22 Pa h 22 0
1 10 102 103 104
Pour un fonctionnement stationnaire σ = ω = 0, la variation de la
pression est présentée sur la figure 3. Si, pour un lubrifiant
Blochet de Rayleigh, cas du fluide compressible
incompressible, la solution ne dépend que de x /B, h1/h2 et B1/B, la
variation de P = P /Pa dépend maintenant aussi de Λ. Pour Y → 0 , Blochet incliné fluide compressible
la variation de la pression correspond à la solution incompressible, Fluides incompressibles, comportement linéaire
mais, pour des valeurs très élevées de Λ, la pression tend vers une
solution asymptotique. Cette solution est issue du fait que la partie Figure 4 – Capacité de charge statique du blochet monodimension-
droite de l’équation de Reynolds, Λ∂ (P h ) /∂x , doit avoir une valeur nel (effet du « coin d’huile »)
finie pour des grandes valeurs de Λ ; il résulte que Ph = const. pour
Y → 0.
Les caractéristiques non stationnaires du blochet sont égale-
Le résultat est cohérent avec l’hypothèse d’une évolution iso- ment modifiées par la compressibilité du lubrifiant. Ainsi, la
therme du gaz, car il peut également s’écrire : figure 5 montre la capacité de charge dynamique d’un blochet 1D
avec h1 = h2 , deux plaques planes animées uniquement d’une
P d ϑ = P /ρ = const . vibration transversale (Λ = 0 et σ ≠ 0). Tout comme Λ pour le cas
stationnaire, l’augmentation de σ mène à une valeur asymptotique
avec dϑ = hdxL volume de fluide pour une longueur L du blochet. du module de la charge adimensionnée. La droite en bleu
(figure 5) correspond à la solution obtenue pour un fluide incom-
pressible en absence de la cavitation.
Ceci explique le fait que la capacité de charge adimension- Ceci n’est pas le seul effet lié à la fréquence d’excitation. La
née W/Pa BL du blochet compressible atteint une valeur
figure 6 montre que, sous l’effet de la fréquence d’excitation, le
asymptotique constante pour Λ → ∞ (figure 4). La droite en blochet compressible possède une raideur non nulle (afin de souli-
pointillés (figure 4), correspond à la solution obtenue pour un gner l’effet de σ, cette raideur est appelée « raideur dynamique »).
fluide incompressible quand la capacité de charge augmente
Plus généralement, dû à la compressibilité du lubrifiant, les coeffi-
linéairement avec la vitesse V. En revanche, pour un fluide
cients dynamiques du blochet dépendent de la fréquence d’excita-
compressible, l’augmentation de Λ mène vers une valeur
tion. La figure 6 montre que, pour des valeurs σ > 1, ces variations
asymptotique constante de la capacité de charge. doivent être prises en compte.

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________________________________________________________________________________________________ BUTÉES ET PALIERS AÉRODYNAMIQUES

Raideur adimensionnée (Kh2/PaBL)

Amortissement adimensionné (Ch23/12µB 3L)


Charge adimensionnée (W/PaBL)

10 Lubrifiant
incompressible 1 Amortissement 0,1
sans cavitation
0,8
1 0,08
Lubrifiant
compressible 0,6
(air)
0,06
0,1
0,4
y 0,04

2
h1 = h2 = h
0,2
0,01 Raideur
h (t) = h0 + Δh eiωt
h0 = const., i 2 = – 1, Δh << h0 0
0,02

0,001
0,1 1 10 100 1 000 – 0,2 0
0,1 1 10 100 1 000
Pulsation d'excitation adimensionnée (σ)

Figure 5 – Capacité de charge dynamique du blochet monodimen-


sionnel (écrasement) Figure 6 – Raideur et amortissement du blochet monodimensionnel

X
P/Pa P/Pa
1,4 1,2

1,2 1
0,8
1
30 30 30 30
)
Dir 25 25 = Pa
25
Dir 25 P a)
ect 20
ion 20 e (P ect 20 20 ( P=
c ion 15 c e
rad 15 15 en 15 en
iale 10 fér rad fér
(P
10
i r con iale 10 10
irc
on
5 c (P c
= P )
5
ion =P 5 5
ion
a 0 ect a) 0 ect
Dir Dir

a b

Figure 7 – Deux types de butées aérodynamiques fixes

Deux types de butées fixes issues directement du blochet de


3. Butées aérodynamiques Rayleigh (figure 3b) sont présentés sur la figure 7. L’une
(figure 7a) fonctionne dans un seul sens de rotation, tandis que
La butée aérodynamique est destinée à supporter une charge l’autre (figure 7b) permet de fonctionner dans les deux sens.
axiale selon l’axe de l’arbre Z. Elle peut être employée, soit pour Les deux butées diffèrent seulement par la présence des
supporter un arbre vertical, soit pour éliminer le degré de liberté rainures placées en amont de chaque patin (figure 7a). L’ampli-
axial d’un rotor guidé par des paliers aérodynamiques et, dans ce tude de la rainure est fixée à une faible valeur, par exemple
cas, une double butée est généralement prévue. βrainure = 2o et sa profondeur est supérieure de plusieurs ordres de

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71
2

72
Lubrification
(Réf. Internet 42465)

1– Théorie de la lubrification

2– Butées et paliers lubrifiés


3
3– Lubrifiants liquides, solides et additifs Réf. Internet page

Lubrifiants. Propriétés et caractéristiques B5340 75

Lubrifiants. Constitution BM5341 85

Lubrifiants. Additifs à action chimique BM5343 91

Lubrifiants. Additifs à action physique ou physiologique BM5344 95

Biolubrifiants. Réglementations, familles d'huiles de base, propriétés "éco" et TRI1800 99


applications
Nanotalcs synthétiques : des nanoparticules argileuses à l'assaut de l'industrie IN74 103

4– Lubrifiants pour moteurs

 Sur www.techniques-ingenieur.fr
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• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires

73
3

74
Référence Internet
B5340

Lubrifiants
Propriétés et caractéristiques
par Jean AYEL
Ingénieur de l’École nationale supérieure des arts et industries de Strasbourg
et de l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs
Docteur-Ingénieur
Responsable du cycle Applications des produits pétroliers et énergétiques
à l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs

1. Propriétés massiques.............................................................................. B 5 340 - 2


3
2. Couleur........................................................................................................ — 4
3. Caractéristiques rhéologiques ............................................................. — 4
4. Caractéristiques superficielles............................................................. — 12
5. Caractéristiques solvantes.................................................................... — 15
6. Caractéristiques thermiques et d’inflammabilité ........................... — 15
7. Résistance à l’oxydation ........................................................................ — 16
8. Résistance à la corrosion....................................................................... — 17
9. Résistance à l’hydrolyse ........................................................................ — 18
10. Filtrabilité................................................................................................... — 18
11. Propriétés et caractéristiques mécaniques...................................... — 18
12. Caractéristiques chimiques et analyses............................................ — 20
13. Caractéristiques spécifiques des graisses........................................ — 25
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. B 5 344

n lubrifiant se qualifie pour une application déterminée par les propriétés


U requises pour cet emploi. Ces propriétés sont consignées dans un cahier
des charges, une norme ou une spécification. Certaines sont reprises, sous forme
résumée, dans les fiches techniques destinées aux utilisateurs. Celles-ci ne
donnent jamais la composition des produits. Dans certains cas, il est signalé la
présence dans la formule de constituants valorisants ou originaux (bases de
synthèse, bases hydrotraitées à très haut VI, nouveaux additifs, etc.) permettant
de mieux promouvoir le produit, mais l’indication reste toujours assez vague
quant à la nature exacte des composants et en aucun cas ne renseigne sur leurs
concentrations.
Les propriétés se classent en deux groupes : les caractéristiques d’identification
et d’utilisation et les caractéristiques de performances.
Les caractéristiques d’identification (masse volumique, indice de réfraction,
point d’écoulement, etc.) et d’utilisation sont des propriétés physiques et/ou
chimiques, habituellement désignées « propriétés physico-chimiques », éva-
luées par des essais simples de laboratoires. Certaines de ces caractéristiques
sont véritablement des propriétés fonctionnelles (caractéristiques d’utilisation) ;
c’est le cas, par exemple, de la compressibilité ou de la viscosité dynamique.
Parution : août 1996

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B5340

LUBRIFIANTS _________________________________________________________________________________________________________________________

Les caractéristiques de performances physico-chimiques, mécaniques ou


complexes sont évaluées par des essais effectués au laboratoire, en cellule sur
bancs d’essai ou en service réel.
Ne seront décrites dans cet article que les propriétés et les caractéristiques
les plus utilisées aussi bien pour les lubrifiants liquides que pour les graisses.
La liste complète de toutes les méthodes d’essais et d’analyses est donnée dans
la documentation en fin d’étude avec les équivalences entre les différents orga-
nismes de normalisation nationaux et internationaux.

1. Propriétés massiques La masse volumique diminue assez sensiblement lorsque la tem-


pérature s’élève. La dilatation d’une huile minérale est d’environ 10

3
à 20 fois plus grande que celle du métal (acier, fonte ou alliage
d’aluminium) constituant l’enveloppe (bidons, fûts, carters ou
À titre d’exemple, le tableau 1 donne une fiche technique de fluide réservoirs). Elle varie selon la relation suivante, si θ r est la tempé-
hydraulique (doc. ESSO) où sont rassemblées toutes les caractéris- rature de référence (souvent θ r = 15 oC) :
tiques du lubrifiant liquide en question destinées aux utilisateurs.
ρ θ = ρθr – a ( θ – θ r )

ou ρθ = ρ 15 – a (θ – 15)
1.1 Masse volumique
si ρ 15 est la masse volumique de l’huile à 15 oC (en kg/dm3 ), le coef-
ficient de dilatation volumique a varie de 0,000 60 pour les huiles
La masse volumique d’un liquide à une température donnée est visqueuses à 0,000 70 pour les huiles minérales les plus fluides. Pour
la masse de l’unité de volume ; elle était autrefois désignée masse un calcul approché, on prendra : a = 0,000 65. (0)
spécifique.
Pour les produits pétroliers, elle est mesurée à 15 o C et est
exprimée en kg/m3 ou encore en kg /dm3 ou g /cm3 .
1.2 Compressibilité
Sa mesure fait appel à différentes méthodes :
(ou élasticité volumique)
— mesure directe à l’aréomètre par application du principe
d’Archimède. Le volume immergé est inversement proportionnel à
la masse volumique (méthodes NF T60-101/ISO 3675/ D’une manière générale, les huiles non aérées sont très peu
ASTM D 1298) ; compressibles.
— mesure au pycnomètre consistant à peser un volume donné
dans une ampoule calibrée appelée pycnomètre (méthodes Aux faibles pressions, on peut considérer l’huile comme un fluide
ASTM D 941 pour les liquides fluides et D 1481 pour les liquides incompressible ; cependant, sous haute pression, sa compressibilité
visqueux) ; devient non négligeable à cause de l’air dissous qu’elle renferme
— mesure au densimètre digital déterminant la masse volumique naturellement ; ainsi par exemple, une huile minérale perd 1,5 à 2 %
par calcul à partir de la mesure de la fréquence propre d’un volume de volume sous 250 bar, 3 % sous 500 bar et environ 5 % sous 1 000
calibré de liquide (méthode ASTM D 4052). bar, mais la diminution de volume en fonction de la pression dépend
aussi de la température. Ainsi, pour 1 000 bar, la variation de volume
La densité d’une huile, souvent donnée dans les documents tech- passe de 4 % à 10 oC à 6 % à 110 oC (figure 1). En revanche, l’inclu-
niques, est le rapport de la masse d’un certain volume de cette huile sion d’air sous forme de bulles dans l’huile (aération) augmente nota-
à une température donnée (généralement 15 ou 20 oC) à celle du blement sa compressibilité même aux faibles pressions comme le
même volume d’eau à 4 oC. Elle est désignée par d 15 20
4 ou d 4 et est montre la figure 2.
sans dimension.
La propriété de compressibilité est évidemment primordiale dans
Les masses volumiques des lubrifiants varient de 0,8 kg /dm3 à les systèmes hydrauliques (circuits de relevage, transmissions
près de 2 kg /dm3 , entre 0,85 et 0,92 kg /dm3 pour les huiles à base hydrostatiques, directions assistées, commandes hydrauliques des
minérale, semi-synthétique et synthétique classiques, alors qu’elle boîtes de vitesses automatiques, circuits de freinage, etc.) mais aussi
tourne autour de 1 kg /dm3 pour les huiles de synthèse de type dans les moteurs équipés de poussoirs hydrauliques.
polyglycol. (0)

Masse volumique
Bases lubrifiantes et de synthèse
(kg /dm3)
Bases minérales paraffiniques .............. 0,85 à 0,90
Bases minérales naphténiques ............. 0,88 à 0,92
Polyalphaoléfines (PAO) ........................ 0,80 à 0,85
Diesters et esters de néopolyols ........... 0,90 à 1,00
Polyglycols (éthers de) (PAG)................ 1,00 à 1,10
Esters phosphates .................................. 1,10 à 1,20
Fluides silicones ..................................... 0,90 à 1,10
Perfluoroalkyléthers (Krytox, Fomblin ) 1,82 à 1,95

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B 5 340 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique

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B5340

_________________________________________________________________________________________________________________________ LUBRIFIANTS

Tableau 1 – Exemple de fiche technique de fluide hydraulique type ISO-L-HV 22 et 46


(d’après fiche ESSO UNIVIS HP, juillet 1992)
Caractéristiques
Méthodes Unités UNIVIS HP 22 UNIVIS HP 46
(selon NF E 48-603/HV)
Viscosité cinématique ............................................... NF T 60-100
— à 40 oC ................................................................... mm2/s 20,9 43,7
— à 100 oC ................................................................. mm2/s 4,94 8,40
Indice de viscosité ..................................................... NF T 60-136 – 172 172
Indice de neutralisation ............................................ NF T 60-112 mg KOH/g 0,19 0,19
Teneur en eau ............................................................ NF T 60-113 % masse 0,005 0,005
Point d’éclair VO ........................................................ NF T 60-118 oC 196 210
Masse volumique à 15 oC ......................................... NF T 60-101 kg/m3 873 879
Couleur ....................................................................... NF T 60-104 – 0,5 1
Taux de cendres ........................................................ NF M 07-045 % masse < 0,01 < 0,01
Moussage................................................................... NF T 60-129
— à 24 oC ...................................................................
— à 93 oC ...................................................................
— à 24 oC après essai à 93 oC ..................................
ml
ml
ml
10/0
20/0
10/0
10/0
20/0
10/0
3
Désaération à 50 oC................................................... NF T 60-149 min. 3 5
Désémulsion d’eau.................................................... NF T 60-125
— Temps pour 40 ml/37 ml/3 ml.............................. min. 15 20
Point d’aniline ............................................................ NF M 07-021 oC 98 100
Corrosion du cuivre (3 h à 100 oC) ........................... NF M 07-015 Indice 1 1
Pouvoir antirouille ..................................................... NF T 60-151
— Méthode A ............................................................. Indice PASSE PASSE
— Méthode B ............................................................. Indice PASSE PASSE
Point d’écoulement ................................................... NF T 60-105 oC – 45 – 42
Plage de température d’utilisation........................... oC – 27/+ 54 – 12/+ 80
Pour 13 mm2/s mini et 860 mm2/s maxi
Résistance au cisaillement ....................................... DIN 51382
(250 cycles)
— Variation de viscosité à 40 oC .............................. % 3 7
Stabilité à l’oxydation ............................................... NF T 60-150
— Temps pour IA = 2 mg KOH/g.............................. h 4 200 4 350
Filtrabilité, IF1
— Sans eau ................................................................ NF E 48-690 – 1,6 1,6
— Avec eau ................................................................ NF E 48-691 – 1,5 1,5
Stabilité à l’hydrolyse ............................................... ASTM D 2619
— Acidité totale de la phase aqueuse ..................... mg KOH/g 1,0 1,0
— Variation de masse de la plaque de cuivre mg/cm2 0,05 0,06
Stabilité thermique (Cincinnati Milacron) ............... CM 10-SP-7989
Procédure A/168 h à 135 oC
— Dépôts.................................................................... mg 10 10
Stabilité à l’oxydation ............................................... NF T 60-150
Après 1 000 heures d’essai ....................................... Modif. DENISON
— Dépôts.................................................................... mg 7 7
Essai FZG A/8.3/90 .................................................... DIN 51354
— Palier de détérioration .......................................... 10 11
Essai 4 billes usure .................................................... ASTM D 4172
— Diamètre d’empreinte .......................................... mm 0,55 0,50
Essai 4 billes extrême-pression
— Charge de Hertz .................................................... daN 40 43
— Charge de grippage .............................................. daN 126 126
Essai Vickers 35VQ25 ................................................ M-2952-S
— Usure Bague.......................................................... mg – 24
— Usure Palettes ....................................................... mg – 8
Essai Vickers V104C .................................................. I-286-S
— Usure Bague + Palettes ........................................ mg 25 25
Essai Denison P 46 .................................................... HF-0 – – PASSE
Pompe à Pistons Axiaux
Essai Denison T5D-42 ............................................... HF-0 – – PASSE
Pompe à Palettes

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2. Couleur
C’est par transparence que l’on évalue la couleur d’une huile en
la comparant à celles de verres étalons. Il existe plusieurs méthodes
d’évaluation mais la couleur ASTM (NF T 60-104 /ASTM
D 1500/ISO 2049) est de loin la plus utilisée. Elle est obtenue en
comparant l’huile par transparence sous épaisseur donnée à l’un des
16 verres étalons de l’échelle ASTM graduée de 0,5 en 0,5 depuis
0,5 (clair) à 8 (foncé = rouge brun). Pour les couleurs trop foncées,
l’échantillon peut être dilué (Dil).
La couleur d’une huile de base est d’autant plus claire qu’elle est
mieux raffinée mais les additifs assombrissent pratiquement
toujours les huiles de base. Certains même les noircissent complè-
tement (graphite, bisulfure de molybdène, etc.).
La couleur de l’huile évolue en cours d’utilisation. Cela est évident
pour les huiles moteurs qui deviennent rapidement noires en se char-

3
geant en suies de combustion, mais cela est aussi vrai pour les huiles
claires (fluides hydrauliques, huiles turbines, etc.) qui se colorent par
oxydation ou en raison de la pollution.
Pour certaines applications, afin d’éviter les erreurs de mélange
lors des remplissages ou des appoints, le lubrifiant est coloré. C’est
ainsi que les fluides de transmissions automatiques (ATF) sont
Figure 1 – Diminution de volume d’une huile minérale paraffinique colorés en rouge, le liquide minéral LHM de Citroën en vert et les
de viscosité égale à 55 mm 2/s à 40 oC en compression adiabatique liquides de freins destinés à certains véhicules de l’armée française
pour différentes températures initiales d’huile en violet.

3. Caractéristiques
rhéologiques
3.1 Viscosité
Se reporter à l’article Viscosité [R 2 350] dans le traité Mesures et
Contrôle.
De toutes les propriétés des huiles, la viscosité est certainement
la plus importante. Elle détermine en effet l’essentiel des pertes par
frottement et l’épaisseur des films d’huile.
La viscosité caractérise la résistance d’un fluide à l’écoulement.
Celle donnée dans les fiches techniques des fournisseurs est la vis-
cosité cinématique, plus facile à mesurer que la viscosité dynamique.

3.1.1 Viscosité dynamique


La viscosité dynamique ou absolue est la viscosité qui intervient
dans les calculs d’épaisseur de film d’huile et de portance hydro-
dynamique. Elle est déduite de la loi de Newton régissant l’écou-
lement laminaire d’un fluide visqueux entre une surface S mobile
animée d’une vitesse u et une surface fixe distante de la surface
mobile d’une distance h égale à l’épaisseur du film d’huile. Le
déplacement relatif des deux surfaces nécessite un effort F destiné
à vaincre la résistance tangentielle au frottement visqueux du fluide
(figure 3).
Figure 2 – Compressibilité d’huiles minérales paraffiniques Pour la majorité des liquides visqueux, comme les huiles de base
(fluides hydrauliques classiques) en fonction de la teneur en air minérales et la plupart des huiles de synthèse, le rapport F /S est pro-
(d’après Affouard, 1963) portionnel au rapport du /dh (liquides newtoniens), le facteur de pro-
portionalité η étant le coefficient de viscosité dynamique ou
simplement la viscosité dynamique.
F du
----- = η ---------
S dh
F u
où si la variation u (h ) est linéaire, on a : ---- = η -----
S h

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Figure 3 – Écoulement newtonien dans un film d’huile

Nota : l’unité de viscosité dynamique, dans le système SI, est le pascal-seconde (Pa · s).
3
Dans l’ancien système CGS, l’unité était le poise (P) mais l’unité pratique utilisée était le
centipoise (cP), la viscosité dynamique de l’eau à 20 oC étant égale à 1 cP.
Les relations entre les unités SI et CGS sont : 1 Pa · s = 10 P et 1 mPa · s = 1 cP.
Par souci de continuité, actuellement, la viscosité dynamique des lubrifiants est exprimée
en millipascal.seconde (mPa · s).
La viscosité dynamique est mesurée sur appareil à cylindres
coaxiaux : Brookfield, Cold Cranking Simulator (CCS), Mini Rotary
Viscometer (MRV), Ravenfield, etc. dont le prototype fut le viscosi-
mètre de Couette au 19e siècle (figure 4).
Les liquides pour lesquels la viscosité dynamique η n’est pas Figure 4 – Viscosimètre dynamique de Couette : principe
constante en fonction du rapport du /dh , sont dits non newtoniens.
C’est le cas notamment des huiles à indice de viscosité amélioré,
formulées avec une base minérale ou synthétique additionnée de
polymères (additifs améliorant l’indice de viscosité). La plupart des
huiles multigrades pour moteurs, certaines huiles multigrades
pour transmissions, les fluides ATF et les fluides hydrauliques de
type HV sont des liquides non newtoniens.

3.1.2 Viscosité cinématique

La viscosité donnée dans les fiches techniques des lubrifiants est


la viscosité cinématique ν. Elle est déduite de la mesure du temps
d’écoulement d’un certain volume d’huile dans un tube capillaire,
conformément à la loi de Poiseuille.
Il existe une relation entre les deux viscosités cinématique et
dynamique :
η
ν = ----- = kt
ρ
avec ρ (kg/m3 ) masse volumique,
η (Pa · s) viscosité dynamique,
k constante du tube,
t (s) temps d’écoulement de l’huile. Figure 5 – Différents modèles de tubes viscosimétriques
Nota : l’unité de viscosité cinématique, dans le système SI, est le mètre carré par seconde
(m2/s) mais, dans la pratique, c’est le sous-multiple, le millimètre carré par seconde (mm2/ s)
qui est utilisé. C’est donc une unité de surface divisée par une unité de temps. Dans le
techniques des huiles) et de la masse volumique (donnée également
système CGS, l’unité était le cm2/ s , désigné stokes (St) mais, pour des raisons de dans les fiches), mais il faut tenir compte de la variation de la masse
commodité, c’était le sous-multiple, le centistoke (cSt) qui était employé pour les huiles. volumique avec la température (§ 1.1).
À noter que la viscosité cinématique de l’eau à 20 oC est de 1 cSt.
Les relations entre les unités SI et CGS sont : 1 m2/ s = 10 4 St et 1 mm2/ s = 1 cSt .
La mesure de la viscosité cinématique des lubrifiants est faite en 3.1.3 Viscosités empiriques
utilisant un viscosimètre à capillaire, tel qu’un de ceux représentés
sur la figure 5 et un chronomètre ; elle est généralement effectuée Autrefois, les viscosités des huiles lubrifiantes étaient exprimées
aux températures de 40 et de 100 oC. par des unités de viscosités empiriques : le degré Engler (oE) en
En pratique, on détermine facilement la viscosité dynamique à Europe continentale, la seconde Redwood en Grande-Bretagne et
partir de la viscosité cinématique (mesurée ou donnée dans les fiches la Second Saybolt Universal (SSU) aux États-Unis. Ces unités étaient

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liées au temps d’écoulement d’un volume d’huile déterminé, dans mauvaises étant les hydrocarbures aromatiques et les meilleurs les
un orifice calibré, à une température déterminée : à 50 oC pour les fluides silicones (polyméthylsiloxanes en particulier).
degrés Engler et à 37,8 et 98,9 oC pour les unités anglo-saxonnes. La représentation en coordonnées cartésiennes de la variation
Ces unités ne doivent plus être utilisées, le tableau 2 permet de de la viscosité en fonction de la température, telle que tracée sur
traduire les viscosités empiriques données dans des documents la figure 6a, n’est pas pratique. Elle obéit à une loi relativement
anciens en unité SI de viscosité cinématique. complexe dite loi de Walther et Mc Coull :
B
ν + a = A exp -------
-
3.1.4 Relation viscosité/température Tn
et indice de viscosité avec ν (mm2/s) viscosité cinématique,
La viscosité d’une huile décroît fortement lorsque la température a constante égale à 0,7 pour ν > 2 mm2/s,
s’élève. Ainsi, pour une huile minérale paraffinique, elle est divisée A coefficient dépendant des unités choisies (A = 1
par 7 lorsque la température passe de 60 à 120 oC.Toutes les huiles si ν en mm2/s),
voient leur viscosité chuter avec la température, mais de façon plus T (K) température,
ou moins rapide, selon leurs structures chimiques, les plus
B et n coefficients caractérisant un liquide donné. (0)

3 Tableau 2 – Table de conversion des viscosités


Viscosité
Viscosités empiriques
cinématique
Seconds Saybolt Seconds Redwood A
(mm2/s) Degrés Engler
Universal (SSU) (R)
(cSt) (oE)
100 oF 130 oF 210 oF 70 oF 140 oF 200 oF
2 1,14 32,6 32,7 32,8 30,2 31,0 31,2
3 1,22 36,0 36,1 36,3 32,7 33,5 33,7
4 1,31 39,1 39,2 39,4 35,3 36,0 36,3
5 1,40 42,3 42,4 42,6 37,9 38,5 38,9
6 1,48 45,5 45,6 45,8 40,5 41,0 41,5
7 1,56 48,7 48,8 49,0 43,2 43,7 44,2
8 1,65 52,0 52,1 52,4 46,0 46,4 46,9
9 1,75 55,4 55,5 55,8 48,9 49,1 49,7
10 1,84 58,8 58,9 59,2 51,7 52,0 52,6
11 1,93 62,3 62,4 62,7 54,8 55,0 55,6
12 2,02 65,9 66,0 66,4 57,9 58,1 58,8
14 2,22 73,4 73,5 73,9 64,4 64,6 65,3
16 2,43 81,1 81,3 81,7 71,0 71,4 72,2
18 2,64 89,2 89,4 89,8 77,9 78,5 79,4
20 2,87 97,5 97,7 98,2 85,0 85,8 86,9
22 3,10 106,0 106,2 106,7 92,4 93,3 94,5
24 3,34 114,6 114,8 115,4 99,9 100,9 102,2
26 3,58 123,3 123,5 124,2 107,5 108,6 110,0
28 3,82 132,1 132,4 133,0 115,3 116,5 118,0
30 4,07 140,9 141,2 141,9 123,1 124,4 126,0
32 4,32 149,7 150,0 150,8 131,0 132,3 134,1
34 4,57 158,7 159,0 159,8 138,9 140,2 142,2
36 4,83 167,7 168,0 168,9 146,9 148,2 150,3
38 5,08 176,7 177,0 177,9 155,0 156,2 158,3
40 5,34 185,7 186,0 187,0 163,0 164,3 166,7
42 5,59 194,7 195,1 196,1 171,0 172,3 175,0
44 5,85 203,8 204,2 205,2 179,1 180,4 183,3
46 6,11 213,0 213,4 214,5 187,1 188,5 191,7
48 6,37 222,2 222,6 223,8 195,2 196,6 200,0
50 6,63 231,4 231,8 233,0 203,3 204,7 208,3
60 7,90 277,4 277,9 279,3 243,5 245,3 250,0
70 9,21 323,4 324,0 325,7 283,9 286,0 291,7
80 10,53 369,7 370,3 372,2 323,9 326,6 333,4
90 11,84 415,8 416,6 418,7 364,4 367,4 375,0
100 13,16 462,0 462,9 465,2 404,9 408,2 416,7
(1) 0,1316 4,620 4,629 4,652 4,049 4,082 4,167
2
(1) Pour des valeurs supérieures à 100 mm /s multiplier par les coefficients ci-dessus.

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Cette représentation est très pratique à exploiter ; en effet, il suffit


de connaître deux viscosités à deux températures différentes (par
exemple à 40 et à 100 oC, généralement données dans les fiches tech-
niques), de tracer la droite ASTM pour déterminer les viscosités de
l’huile à d’autres températures par interpolation ou par extrapolation
(figure 7).
L’indice de viscosité (Viscosity Index ou VI ) est un nombre
conventionnel qui traduit l’importance de la variation de la visco-
sité avec la température (figure 8). Il est calculé en comparant la
viscosité à 40 oC de l’huile à tester à celle de deux huiles étalons
prises comme référence, l’une affectée d’un VI = 0 et l’autre d’un
VI = 100. De manière pratique, on détermine le VI à partir des
mesures de viscosités cinématiques effectuées respectivement à
40 et à 100 oC soit en utilisant des tables ASTM, soit en utilisant un
programme de calcul spécifique sur calculette ou sur micro-ordina-
teur.
Le tableau 3 donne les valeurs typiques de VI de quelques caté-

3
gories d’huiles de base minérales et de fluides de synthèse. (0)

Tableau 3 – Indice de viscosité des principales huiles


de base et d’huiles moteurs
Famille de lubrifiants VI
Huiles minérales naphténo-aromatiques.... ≈0
Huiles minérales naphténo-paraffiniques... 50 à 60
Huiles minérales paraffiniques .................... 90 à 110
Huiles minérales hydroraffinées 95 à 130
(HVI et VHVI).................................................. (et même 140)
Huiles minérales hydrocraquées ................. 120 à 135
Huiles hydro-isomérisées
(XHVI ou similaires) ...................................... 140 à 150
Polyalphaoléfines (PAO)............................... 120 à 170 (1)
Polyalkylèneglycols (PAG) ........................... 130 à > 250
Diesters .......................................................... 120 à > 200
Esters de néopolyols .................................... 90 à 180
Polydiméthylsiloxanes
(silicones ordinaires) .................................... 80 à > 400
Huiles moteurs monogrades ...................... 90 à 110
Huiles moteurs multigrades :
20W-50 ........................................................... 110 à 150
15W-40 ........................................................... 130 à 170
10W-40 ........................................................... 140 à 200
5W-40 ............................................................. 170 à 215
0W-30 ............................................................. > 185
(1) Pour les PAO, le VI augmente avec la viscosité de l’huile.

Il existe également l’abaque viscosité-température de Groff


(figure 9) constitué de deux échelles concourantes de sens
contraires ; sur l’une d’elles est portée une fonction de la viscosité
et sur l’autre une fonction de la température. En choisissant pour
Figure 6 – Variation viscosité-température d’huiles de base ces deux fonctions, les expressions transformées de celles utilisées
minérales et synthétiques de même grade ISO de viscosité VG 68 dans la relation de Walther-Mac Coull, on peut montrer qu’une
huile représentée par une droite sur l’abaque ASTM se transforme
en un point sur l’abaque de Groff.
Très tôt, les spécialistes ont cherché à obtenir une représentation
linéaire de cette courbe. C’est ainsi qu’est né l’abaque ASTM Le point représentatif M d’une huile est obtenu par l’intersection
(normalisé ASTM D 341 et NF T60-148), qui donne le logarithme du de deux droites passant chacune par la valeur de viscosité et la valeur
logarithme de la viscosité en fonction du logarithme de la tempé- de la température correspondante (ν1 , T1 et ν2 , T2 ) et, à partir de
rature (figure 6b ) :
ν+a
lg lg ------------ = lg B – n lg T
A

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ce point M, il est aisé de connaître la viscosité de l’huile à une autre


température (ν x , T x).

Remarque : l’abaque de Groff, comme l’abaque ASTM, étant basé


sur la formule de Walther-Mac Coull, l’extrapolation aux basses tem-
pératures ne donne qu’une valeur approchée.
Pour les huiles moteurs, il apparaît intéressant de reporter sur

3
l’abaque de Groff les limites des différents grades de viscosité de
la classification SAE (SAE J 300). Ce report permet, lors de la déter-
mination du point caractéristique d’une huile moteur, d’en connaître
le grade SAE pour autant que l’huile ait à basse température un
comportement rhéologique qui ne s’éloigne pas trop de la loi de
Walther-Mac Coull.

Figure 7 – Variation viscosité-température sur abaque ASTM 3.1.5 Relation viscosité/ vitesse de déformation
(chute de viscosité par cisaillement)
Les huiles newtoniennes, c’est-à-dire les huiles minérales et syn-
thétiques ne comportant pas d’additif améliorant l’indice de visco-
sité, sont dites incisaillables, ce qui signifie que leur viscosité ne varie
pas lorsqu’elles sont soumises à un cisaillement dans les organes
mécaniques rapides à faibles jeux de fonctionnement, tels que
paliers, engrenages, segmentations, pompes hydrauliques, injec-
teurs, etc.
En revanche, les huiles à haut VI (huiles moteurs multigrades, ATF,
fluides hydrauliques HV, etc.), formulées avec des polymères
améliorant le VI, sont sensibles au cisaillement mécanique et voient
leur viscosité chuter de deux manières :
— chute permanente lorsque les macromolécules des polymères
sont découpées en tronçons de plus faible masse molaire, ce qui
se traduit par une chute de viscosité irréversible. Cette chute peut
varier de quelques % à plus de 30 % selon la structure chimique et
la distribution moléculaire du polymère et selon la sévérité des
contacts.
Cette propriété de résistance au cisaillement est évaluée en labo-
ratoire sur divers appareils :
• l’injecteur diesel Bosch (appareil Kurt Orbahn) (méthode
CEC-L-14-A-88) (figure 10), où les échantillons d’huiles moteurs sont
soumis à 30 cycles de cisaillement, tandis que les fluides hydrau-
liques sont soumis à 250 cycles,
• le banc à roulement à rouleaux coniques (méthode KRL sur
machine à 4 billes) (méthode CEC-L-45-T-93),
• la machine à engrenages FZG opérant à charge faible, moyenne
et grande vitesses (méthodes LSEA-L-02, IP 351, etc.),
• le moteur au banc d’essai (méthode CRC-L-38) aux États-Unis,
• le Sonic Test (cisaillement par ultrasons), aujourd’hui de
moins en moins utilisé ;
— chute réversible lorsque les macromolécules, pelotonnées sur
elles-mêmes dans le liquide au repos, se déploient et s’alignent dans
Figure 8 – Définition de l’indice de viscosité (VI) le sens de l’écoulement forcé du lubrifiant dans les films d’huile des
organes rapides. La figure 11 montre l’allure du phénomène. Pour
les huiles moteurs multigrades, la viscosité dynamique sous fort
cisaillement (u / h = 106 s–1) et à haute température (150 oC) est
mesurée dans des viscosimètres dynamiques désignés HTHS (High
Temperature , High Shear ) tels que le viscosimètre européen
Ravenfield dont le schéma est représenté sur la figure 12 (méthode
CEC-L-36-A-90 reprise par l’ASTM D 4741) ou le viscosimètre
américain TBS (méthode ASTM D 4683).

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Figure 9 – Abaque viscosité-température de Groff (éd. Technip, Paris 1994)

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3

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Lubrifiants
Constitution
par Jean AYEL
Ingénieur de l’École nationale supérieure des arts et industries de Strasbourg et de l’École
nationale supérieure du pétrole et des moteurs
Docteur-Ingénieur
Responsable du cycle Applications des produits pétroliers et énergétiques
à l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs

1.
1.1
Huiles de base ...........................................................................................
Huiles d’origine végétale ............................................................................
BM 5 341 - 2
— 2
3
1.2 Huiles minérales .......................................................................................... — 3
1.2.1 Hydrocarbures contenus dans les huiles minérales........................ — 3
1.2.2 Chaîne traditionnelle de raffinage des huiles minérales................. — 3
1.2.3 Procédés d’hydrotraitement des huiles minérales .......................... — 3
1.2.4 Reraffinage des huiles usagées......................................................... — 5
1.3 Huiles de synthèse....................................................................................... — 5
1.3.1 Hydrocarbures synthétiques.............................................................. — 6
1.3.2 Esters ................................................................................................... — 6
1.3.3 Polyglycols .......................................................................................... — 7
1.3.4 Esters phosphoriques......................................................................... — 7
1.3.5 Dérivés siliciés .................................................................................... — 8
1.3.6 Polyphényléther(s).............................................................................. — 8
1.3.7 Composés organiques halogénés..................................................... — 8
2. Graisses lubrifiantes ............................................................................... — 9
2.1 Agents épaississants ................................................................................... — 9
2.1.1 Graisses à savons ............................................................................... — 9
2.1.2 Graisses sans savon ........................................................................... — 10
2.2 Huiles de base lubrifiantes.......................................................................... — 10
2.2.1 Huiles minérales ................................................................................. — 11
2.2.2 Huiles de synthèse.............................................................................. — 11
2.3 Additifs ......................................................................................................... — 12
3. Lubrifiants solides ................................................................................... — 12
3.1 Mise en œuvre des lubrifiants solides ....................................................... — 12
3.1.1 Lubrifiants solides en poudre ............................................................ — 12
3.1.2 Dispersions de lubrifiants solides ..................................................... — 12
3.1.3 Vernis de glissement .......................................................................... — 12
3.1.4 Revêtements autolubrifiants préfabriqués sur support .................. — 13
3.1.5 Matériaux autolubrifiants massifs..................................................... — 14
3.2 Caractéristiques des principaux lubrifiants solides .................................. — 14
3.2.1 Lubrifiants solides lamellaires........................................................... — 14
3.2.2 Lubrifiants solides polymériques ...................................................... — 17
3.2.3 Sels et oxydes métalliques ................................................................ — 19
3.2.4 Métaux mous et alliages métalliques ............................................... — 19
3.2.5 Associations synergiques de lubrifiants solides.............................. — 21
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. B 5 344

S elon leur état physique, les lubrifiants peuvent être classés en trois groupes :
— les lubrifiants liquides : d’origines végétale et animale (huiles grasses),
minérales (huiles de pétrole) et synthétiques ;
Parution : juillet 1997

— les lubrifiants semi-solides ou plastiques qui comprennent essentiellement


les graisses lubrifiantes mais aussi les cires, paraffines et vaselines extraites du
pétrole pour applications lubrifiantes ;

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LUBRIFIANTS _________________________________________________________________________________________________________________________

— les lubrifiants solides : lamellaires, polymériques, métaux mous, sels,


oxydes, etc.
Ces différents lubrifiants peuvent être utilisés sous forme de dispersions, émul-
sions ou solutions dans de l’eau chaque fois qu’un pouvoir réfrigérant élevé
(travail des métaux à grande vitesse) ou qu’une grande résistance au feu (fluides
hydrauliques type HF) sont recherchés.
Les deux premières catégories de lubrifiants (huiles et graisses) contiennent
une quantité variable d’additifs (jusqu’à 25 % en masse) selon l’application et
la sévérité du service.
Pour situer l’importance relative de chaque groupe de lubrifiants, il convient
de rappeler que les lubrifiants liquides représentent 96 % du marché, les graisses
3 % et les lubrifiants solides environ 1 %.

3 vaillant en extérieur mais peu sollicités thermiquement, lorsqu’il y


Sigles et Symboles a risque de pollution du milieu naturel par les fuites de fluides, ce
qui est le cas des matériels hydrauliques agricoles et forestiers et
Symbole Définition de certains matériels de travaux publics. (0)

BSS Bright Stock Solvent


CFC chlorofluorocarbure ou chlorofluorocarbone Tableau 1 – Les différents types d’huiles de base
DAB dialkylbenzène 1. Huiles grasses naturelles
HF fluides hydrauliques résistant au feu (symbole ISO) Ce sont des huiles soit d’origine animale, soit d’origine végétale.
HFC hydrofluorocarbure ou hydrofluorocarbone 2. Huiles d’origine minérale (huiles de pétrole)
ou encore désignation ISO de certains fluides
hydrauliques aqueux résistant au feu Raffinage classique au solvant :
NS Neutral Solvent — bases à tendance paraffinique (de loin les plus utilisées) ;
PA polyamide — bases à tendance naphténique (en régression, quelques
applications particulières) ;
PAG polyalkylèneglycol
— bases à tendance aromatique (pour mémoire).
PAO polyalphaoléfine
PEEK polyéther-éther cétone Conversion à l’hydrogène : il s’agit de bases à structure isopa-
raffinique marquée, considérées par certains comme semi-synthé-
PFPE perfluoropolyéther tiques :
PIB polyisobutène — bases minérales hydroraffinées (VI ≈ 100) ;
PIO polyoléfine interne (Poly Internal Olefin ) — bases minérales hydrocraquées (VI = 120 à 130) ;
— bases minérales hydro-isomérisées (VI = 140 à 150).
PPE polyphényléther
Raffinage poussé (incluant, de plus, un traitement à l’hydrogène) :
PTFE polytétrafluoroéthylène
— huiles blanches (huiles de vaseline) soit de qualité conforme
S Solvent à la pharmacopée française et européenne (huiles Codex ),
TCP tricrésylphosphate soit de qualité technique ;
VI indice de viscosité (Viscosity Index) — huiles superraffinées pour aviation et fluides hydrauliques à
très haut VI (en régression) ;
— huiles ultradéparaffinées (naphténiques Wax-free pour
compresseurs frigorifiques).

1. Huiles de base Reraffinage des huiles usagées :


— huiles à tendance paraffinique de qualité variable selon le
procédé utilisé.
Les huiles de base peuvent être d’origine naturelle : végétales, 3. Huiles d’origine synthétique
minérales extraites du pétrole (les plus utilisées), ou synthétique Il existe de nombreuses structures qui sont par ordre d’impor-
(tableau 1). tance décroissante :
— les hydrocarbures synthétiques ;
— les esters organiques ;
1.1 Huiles d’origine végétale — les polyalkylèneglycols ;
— les esters phosphoriques ;
— les produits spéciaux (silicones, perfluoropolyéthers, etc.).
L’utilisation d’huiles végétales, notamment d’huile de colza,
connaît actuellement un regain d’intérêt pour la préparation de 4. Huiles semi-synthétiques ou partiellement synthétiques
certains lubrifiants biodégradables (lubrifiants verts ) destinés soit à (dites à base de synthèse)
des applications de graissage à huile perdue (lubrifiants de chaînes Il s’agit de mélanges d’huiles minérales et d’huiles de synthèse
de tronçonneuses à bois, lubrifiants de chaînes de véhicules à deux telles que PAO/PIO, esters, PAO/PIO + esters, dialkylbenzènes, etc.
roues, etc.), soit à la lubrification de matériels hydrauliques tra-

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Il est à noter que pour des applications à température plus élevée L’extraction au solvant des composés polycycliques
(transmissions hydrauliques sévères, moteurs 2 temps, moteurs contenus dans les distillats sous vide permet d’améliorer la stabilité
4 temps, etc.), les lubrifiants biodégradables, encore rares, sont for- à l’oxydation et la couleur. Le solvant solubilise sélectivement les
mulés avec des esters synthétiques. En effet, la trop faible stabilité composés aromatiques et polycycliques éliminés sous forme
à l’oxydation des huiles végétales les rend pour l’instant impropres d’extraits aromatiques.
à la lubrification de ces mécanismes avec les additivations Le déparaffinage consiste en l’élimination plus ou moins pous-
conventionnelles. Cependant, des huiles moteurs de grades 5W-40 sée, selon le point d’écoulement visé, des cristaux de paraffines indé-
et 10W-40 à base d’huile de tournesol à haute teneur en acide oléique sirables en dissolvant l’huile dans un mélange de solvants
viennent d’être mises sur le marché. spécifiques. Le mélange huile-solvant est refroidi ; les paraffines qui
cristallisent sont séparées par filtration sur tambours.
Le traitement de finition parachève éventuellement le raffinage
1.2 Huiles minérales en éliminant les derniers constituants indésirables (aromatiques rési-
duels, composés soufrés, azotés, oxygénés). Deux méthodes sont
Les huiles minérales d’origine pétrolière sont extraites de coupes employées :
pétrolières provenant de la distillation du pétrole brut. Ces coupes, — le traitement à la terre consiste à filtrer l’huile sur des terres
que l’on nomme des distillats, subissent des opérations de raffinage activées (silicates d’alumine) qui retiennent les impuretés polaires
dont la complexité dépend à la fois de l’origine du brut utilisé et de par adsorption ;

3
la qualité recherchée des produits. — le traitement à l’hydrogène (hydrofinition), plus moderne,
consiste à pratiquer une hydrogénation catalytique des composés
instables qui se transforment en composés saturés ou en composés
1.2.1 Hydrocarbures contenus gazeux que l’on élimine.
dans les huiles minérales
On pratique quelquefois, avant l’hydrogénation, une redistillation
Les huiles minérales sont des mélanges d’un très grand nombre pour étêter certaines bases fluides afin de diminuer leur volatilité.
d’hydrocarbures de structures et de masses molaires différentes et ■ Huiles de base minérales paraffiniques
d’une petite quantité d’impuretés résiduelles oxygénées, azotées et
soufrées. Elles sont désignées par les raffineurs et par les professionnels
des lubrifiants par un symbole comportant un chiffre (60, 100, 150,
Selon que le pétrole brut appartient aux types paraffinique ou 350, etc.) et une ou deux lettres (S pour Solvent ou NS pour Neutral
naphténique, les huiles de base sont dites à tendance paraffinique Solvent ) indiquant le degré de finition de l’huile. Le chiffre représente
ou à tendance naphténique. Les raffineries européennes produisent la viscosité de l’huile exprimée dans l’ancien système d’unité empi-
presque toutes des bases à tendance paraffinique, de sorte que les rique Second Saybolt Universal (SSU), mesurée à 37,8 oC (100 oF).
huiles naphténiques qui, jadis, entraient dans la composition de L’huile paraffinique la plus visqueuse est dénommée Bright Stock
certains lubrifiants ont été, peu à peu, remplacées par les huiles à Solvent (BSS).
tendance paraffinique, essentiellement pour des raisons de prix, de
disponibilité, de moindre toxicité et de meilleur comportement à ■ Huiles de base minérales naphténiques
haute température. Elles sont désignées par un chiffre (60, 90, 750, etc.) ayant la même
Les paraffines sont des hydrocarbures saturés linéaires signification que précédemment, et un qualificatif (Pale, Red, Pale
(n -paraffines) ou ramifiés (isoparaffines) caractérisés par une assez Solvent ) caractérisant le degré de raffinage.
bonne stabilité à l’oxydation, un indice de viscosité élevé (de l’ordre
de 100), une faible agressivité vis-à-vis des élastomères, mais un ■ Huiles blanches ou huiles de vaseline
pouvoir solvant limité et un point de congélation relativement élevé. Elles sont produites en deux qualités :
Les naphtènes, hydrocarbures saturés cycliques et souvent rami- — les huiles blanches de qualité médicinale ou alimentaire (huiles
fiés, sont moins stables à l’oxydation que les précédents, possèdent Codex ) ultrapures ;
des indices de viscosité faibles (0 à 60), sont plus agressifs vis-à-vis — les huiles blanches techniques, un peu moins pures, utilisées
des élastomères, mais ont un bon pouvoir solvant et possèdent de soit comme huiles de procédés, soit comme lubrifiants dans cer-
très bonnes caractéristiques d’écoulement aux basses températures. taines applications industrielles.
Les aromatiques, produits insaturés cycliques, présentent des Elles étaient jadis blanchies par un traitement poussé à l’acide sul-
caractères encore plus accusés que les naphtènes : très denses, furique, maintenant remplacé par un traitement sévère non polluant
généralement peu stables à l’oxydation, ils sont très agressifs à l’hydrogène qui élimine totalement les hydrocarbures aromatiques
vis-à-vis des élastomères, et leurs indices de viscosité sont très bas et naphténiques lourds ainsi que les autres impuretés.
ou même négatifs. Compte tenu de ces mauvaises caractéristiques,
il est nécessaire de les éliminer au maximum par raffinage. De plus,
ces hydrocarbures sont dangereux envers le milieu naturel (toxiques 1.2.3 Procédés d’hydrotraitement
et difficilement biodégradables) et pour la santé des utilisateurs des huiles minérales
(caractères toxiques et mutagènes).
Il ne faut pas confondre les différents procédés d’hydrotraitement
des huiles (hydroraffinage, hydrocraquage, hydro-isomérisation)
1.2.2 Chaîne traditionnelle de raffinage avec l’hydrofinition, car ce sont des traitements beaucoup plus pro-
des huiles minérales fonds d’hydrogénation et d’hydrogénolyse catalytique destinés à
transformer presque complètement les hydrocarbures aromatiques
Elle comporte les étapes suivantes (figure 1). et polycycliques en composés saturés et décyclisés et à éliminer pra-
tiquement toutes les impuretés.
La distillation atmosphérique du pétrole brut pour séparer
Remarque : dans la littérature technique et commerciale, les termes d’huiles hydro-
les produits pétroliers selon leurs points de distillation. craquées, hydroraffinées, hydrotraitées et même hydrosynthétiques sont utilisés pour dési-
La distillation sous vide du résidu de distillation atmosphérique gner, de manière souvent indistincte, les différentes bases obtenues par traitement à
l’hydrogène.
permet d’obtenir différentes coupes appelées distillats sous vide de
viscosités variables, et un produit très lourd, le résidu sous vide Il existe différents procédés d’obtention d’huiles minérales lubri-
destiné à la fabrication des bitumes et des huiles lubrifiantes les plus fiantes par hydrotraitement profond.
visqueuses dans l’unité de désasphaltage au propane.

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Figure 1 – Procédé de fabrication des huiles minérales classiques. Schéma simplifié du procédé aux solvants

■ Bases hydroraffinées BHK ou encore LHC (Lavera Hydrocracked Component ), Total,


Ces bases minérales, obtenues à partir d’un procédé original de DEA/Fuchs en Allemagne, Energoinvest en ex-Yougoslavie. Ces
raffinage sous forte pression d’hydrogène, ont un indice de viscosité bases sont encore désignées VHVI (Very High Viscosity Index ) par
qui peut théoriquement varier de ≈ 100 à 130 mais qui, pour des certains formulateurs, ou encore huiles MC (Molecularly Converted )
raisons économiques, est généralement limité à la plage 95-105. Ces par d’autres.
huiles sont disponibles dans une gamme de viscosité aussi large Mais le nombre d’unités d’hydrocraquage devant augmenter dans
que celle des huiles minérales classiques raffinées au solvant. Elles le futur pour satisfaire la demande croissante en gazoles et carbu-
s’en différencient cependant du fait d’une proportion plus faible en réacteurs à faible teneur en soufre, la production de bases lubri-
composés aromatiques et d’une teneur en soufre et en azote sen- fiantes hydrocraquées va connaître un essor important dans les
siblement réduite. Ce sont par exemple les bases dites HVI (High prochaines années.
Viscosity Index ) que Shell produit en France dans sa raffinerie de
Petit-Couronne. ■ Bases hydro-isomérisées
Le procédé d’obtention de ces bases met aussi en œuvre de
■ Bases hydrocraquées l’hydrogène mais, cette fois, la charge traitée est constituée de paraf-
Les bases lubrifiantes fluides dites hydrocraquées sont préparées fines récupérées lors de l’opération de déparaffinage des huiles
en raffinant sur la chaîne traditionnelle de raffinage des huiles miné- minérales classiques. Les conditions de traitement très sévères à
rales le fond de cuve du procédé d’obtention des gazoles et carbu- l’hydrogène conduisent à un craquage et à un réarrangement des
réacteurs par hydrocraquage catalytique. Elles possèdent des indices n-paraffines en molécules essentiellement isoparaffiniques carac-
de viscosité compris, en général, entre 120 et 130 ; elles sont en térisées par un très bon indice de viscosité (VI = 140 à 150), un bas
moyenne deux fois moins volatiles que les bases minérales clas- point d’écoulement (PE : – 18 oC) et une faible volatilité (du même
siques, mais ne sont disponibles que dans une gamme étroite de ordre que celle des bases hydrocraquées). Les huiles ainsi obtenues
viscosité (3,5 à 6 mm2/s à 100 oC), ce qui les destine à la formulation sont disponibles dans une gamme de viscosité un peu plus large
des huiles moteurs fluides. Pour les grades plus visqueux à froid, que celle des bases hydrocraquées (4 à 8 mm2/s à 100 oC) et, surtout,
il est nécessaire de leur associer des bases plus visqueuses. sont beaucoup plus pures puisqu’elles ne contiennent, au plus, que
Actuellement, les principaux fournisseurs européens de bases 0,1 % d’hydrocarbures aromatiques et moins de 5 mg/kg de soufre.
hydrocraquées sont BP, qui les désigne bases hydrosynthétiques

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Ces bases, d’excellente qualité, sont actuellement produites par 1.3 Huiles de synthèse
Shell, en France à Petit-Couronne, sous la désignation de bases
XHVI  (eXtra High Viscosity Index ) et par Esso, en Grande-Bretagne
à Fawley, sous la désignation EXXSYN . Désignées aussi bases synthétiques, elles sont obtenues par
synthèse chimique telles que l’addition d’un produit sur lui-même
ou polymérisation, ou l’addition d’un produit sur un autre comme
1.2.4 Reraffinage des huiles usagées l’estérification, l’alkylation, la fluoration, etc., de composants pro-
venant de la pétrochimie, la carbochimie, la lipochimie (ou chimie
Les huiles usagées récupérées en stations-service et chez les gros des corps gras) et de la chimie minérale tels que : oléfines,
utilisateurs peuvent être régénérées en éliminant les 15 à 20 % aromatiques, alcools, acides, composés halogénés, phosphorés, sili-
d’impuretés et additifs qu’elles contiennent. Pour des raisons de pro- ciés, etc.
tection de l’environnement, les anciens procédés de régénération Il existe une très grande variété de bases synthétiques dont celles
très polluants faisant appel à l’acide sulfurique cèdent de plus en ayant fait l’objet de développements commerciaux sont données
plus la place à des procédés propres basés sur la distillation sous dans le tableau 2. (0)
vide et un traitement de finition à l’hydrogène. Ces bases minérales
régénérées ont des caractéristiques et des propriétés comparables
à celles des bases minérales conventionnelles lorsque le traitement

3
a été convenablement conduit.

Tableau 2 – Principales bases de synthèse et leurs utilisations


Fréquence d’utilisation

Famille Type de produits Groupe


Automobile Aviation
motopropulseur Industrie
en général et espace
automobile
● PAO et PIO ..................................................... xxx xxx xxx x
● Polybutènes et polyisobutènes (PIB) .......... x x x
Hydrocarbures ● Hydrocarbures aromatiques alkylés :
de synthèse — dialkylbenzènes (DAB) ........................... ........................ ........................ x
— polyphényles alkylés.............................. ........................ ........................ x
● Hydrocarbures cycloaliphatiques ................ ........................ ........................ •
● Diesters (esters de diacides) ........................ x x x xx
Esters ● Esters de néopolyols .................................... xx xx x xxx
● Esters complexes (visqueux) ....................... x x x x
● Monoalkylèneglycol et polyalkylèneglycols xx ........................ x
● Monoéthers de polyalkylèneglycols :
— monoéthers de polyoxyéthylène-
Polyglycols glycols .......................................................... x ........................ xx
— monoéthers de polyoxypropylènegly-
cols................................................................ x • xx
— monoéthers mixtes ................................ x ........................ x
Esters-phosphates ● Phosphates d’alkyles et/ou d’aryles ............ ........................ ........................ x x
● Huiles silicones ou polysiloxanes :
— silicones ordinaires ou
polydiméthylsiloxanes ................................ • ........................ x x
— silicones phénylés ou
Dérivés siliciés polyméthylphénylsiloxanes........................ ........................ ........................ x •
— silicones chlorés ou
polyméthylchlorophénylsiloxanes............. ........................ ........................ • •
— silicones fluorés ou fluorosilicones ...... ........................ ........................ • •
● Esters siliciques ou silicate-esters ............... ........................ ........................ • •
Polyphényléthers ● Polyphényléthers .......................................... ........................ ........................ • •
● Composés chlorés
— polychlorobiphényles (PCB) (pyralène ) ........................ ........................ •➘
Composés ● Composés fluorés
organiques
halogénés — fluorocarbones ....................................... ........................ ........................ • •
— perfluoropolyéthers (PFPE) ................... ........................ ........................ x x
● Composés chlorofluorés .............................. ........................ ........................ •➘ •➘
xxx Très courant ; xx assez courant ; x moins fréquent ; • utilisation marginale ; ➘ en voie de disparition

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Lubrifiants
Additifs à action chimique
par Jean AYEL
Ingénieur de l’École nationale supérieure des arts et industries de Strasbourg
et de l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs
Docteur-Ingénieur
Ancien responsable du cycle Produits pétroliers et moteurs
à l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs

1. Principaux types d’additifs pour lubrifiants .................................... BM 3 343 – 3


3
2. Additifs agissant chimiquement dans la masse du lubrifiant..... — 3
2.1 Additifs antioxydants .................................................................................. — 3
2.2 Additifs antiacides ....................................................................................... — 9
3. Additifs agissant chimiquement au niveau des surfaces............. — 10
3.1 Inhibiteurs de corrosion de types désactivateurs et passivateurs .......... — 10
3.2 Additifs d’onctuosité agissant par chimisorption ..................................... — 10
3.3 Additifs antiusure ........................................................................................ — 12
3.4 Additifs extrême-pression (EP)................................................................... — 15
3.5 Additifs antiencrassement de moteurs à 2 temps .................................... — 18
Références bibliographiques ......................................................................... — 18
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. BM 5 344

algré les progrès continuels du raffinage du pétrole et de la pétrochimie,


M les huiles de base minérales ou synthétiques pures ne possèdent pratique-
ment jamais toutes les propriétés requises pour leurs principales applications
automobiles, industrielles, marines ou aéronautiques. Aussi, est-il nécessaire
d’incorporer aux lubrifiants finis (huiles et graisses) des additifs dont la teneur
peut varier de moins de 1 % pour certaines huiles industrielles à plus de 25 %
pour les dernières huiles pour moteurs Diesel de véhicules industriels très solli-
cités ou pour certains lubrifiants de travail des métaux.
Les additifs sont destinés soit à renforcer certaines propriétés intrinsèques des
huiles de base comme le point d’écoulement, l’indice de viscosité, la résistance
à l’oxydation, les propriétés antiusure et antifriction ou le pouvoir de protection
antirouille, soit à leur apporter des propriétés qu’elles ne possèdent pas (ou peu)
naturellement comme la détergence, le pouvoir dispersif, l’alcalinité en vue de
neutraliser les composés acides, le pouvoir de protection contre la corrosion des
métaux non ferreux, ou les propriétés extrême-pression (EP). Dans certains cas,
ils peuvent aussi combattre des défauts apportés par d’autres additifs. Ainsi, les
additifs antimousse évitent la formation de mousses entraînée par la présence
dans le lubrifiant d’additifs tensioactifs comme les détergents, les dispersants,
les agents émulsifiants des fluides aqueux ou même les additifs d’onctuosité et
les antirouilles.
La formulation d’un lubrifiant contenant de nombreux additifs, parfois jusqu’à
vingt, est une opération généralement longue, qui peut demander deux à trois
ans d’études, qui requiert une grande expérience et un savoir-faire pluridiscipli-
naire et qui est souvent fort coûteuse car reposant sur de nombreux essais en
Parution : octobre 2001

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laboratoire, sur bancs d’essai ou en service. Ainsi, par exemple, le prix d’un seul
essai sur moteur oscille entre 15 000 et 75 000 euros et il faut en réaliser un
grand nombre pour qualifier une formule d’huile moteur.
Il ne faut pas croire qu’un additif donné agit dans n’importe quelle condition.
En réalité, son action dépend de quatre ensembles de facteurs principaux :
— sa nature chimique, son degré de pureté et sa concentration dans l’huile (ou
la graisse) ;
— les interactions avec les autres additifs présents dans la formule. Dans cer-
tains cas, il peut y avoir antagonisme entre deux additifs. Ainsi, un additif anti-
usure peut perdre de son efficacité en présence d’un additif plus polaire que lui
qui, par exemple, va former un film barrière, solidement adsorbé sur les surfa-
ces, s’opposant physiquement à l’adsorption de l’additif antiusure – c’est le cas
d’un additif détergent ou d’un additif antirouille – ou, encore, va le « séquestrer »
au sein du liquide en l’empêchant d’agir au niveau des surfaces ; c’est ce qui se
passe en présence d’additifs dispersants. Naturellement, il convient d’éviter ou
3 de limiter ces antagonismes. Dans d’autres cas, au contraire, il y a synergie,
c’est-à-dire que les effets bénéfiques obtenus par l’association de deux ou de
plusieurs additifs sont supérieurs à ceux obtenus séparément avec chaque pro-
duit. Des effets synergiques bien connus concernent, par exemple, l’association
de deux (ou trois) additifs antioxydants : un inhibiteur radicalaire (phénol et/ou
amine aromatique) et un destructeur d’hydroperoxydes (dithiophosphate de
zinc). D’autres synergies sont relatives aux propriétés antifriction, antiusure et
extrême pression des lubrifiants ; ce sont celles des associations de corps gras
ou de dérivés de corps gras avec des additifs extrême-pression soufrés, d’addi-
tifs EP soufrés avec des additifs antiusure phosphorés, d’additifs EP soufrés avec
des additifs EP chlorés, etc. Bien entendu, le formulateur tire profit de ces syner-
gies ;
— la nature des huiles de base : composition chimique, pureté, degré de raffi-
nage, grade de viscosité, etc. Ainsi, moins les huiles minérales raffinées au sol-
vant ou hydrotraitées contiennent d’hydrocarbures aromatiques et d’impuretés
soufrées, azotées et oxygénées, plus elles sont réceptives aux additifs antioxy-
dants et antiusure. Plus une huile de base présente un pouvoir solvant élevé dû,
par exemple, à une forte aromaticité ou à des fonctions ester ou éther, moins les
additifs à action de surface comme les antiusure et les extrême-pression se mon-
trent efficaces. Ces derniers additifs sont plus actifs, car plus mobiles, dans une
huile de base fluide que dans une huile visqueuse, etc. ;
— les conditions tribologiques de fonctionnement du mécanisme à lubrifier
conditionnant le régime de lubrification : température de contact, pression de
contact, vitesses de glissement et, éventuellement, de roulement, rhéologie du
film d’huile, type d’ambiance (atmosphère neutre, oxydante, corrosive, humide,
poussiéreuse…), présence de vibrations, état de la mécanique (usure, jeux,
rugosité et états de surface, accumulation de dépôts sur les surfaces…) et, natu-
rellement, nature des matériaux des surfaces. Ainsi, tel dialkyldithiophosphate
de zinc à chaîne alkyle courte, très antiusure en présence de métaux ferreux ou
de molybdène, peut être sans effet, ou même avoir un effet néfaste, en présence
d’une surface chromée. Celle-ci, en revanche, appréciera les diaryldithiophos-
phates de zinc à chaîne longue ainsi que les biphénols encombrés et les esters
visqueux.
Il existe des molécules d’additifs ne possédant qu’une seule fonction tandis
que d’autres, à structure souvent plus complexe, sont multifonctionnelles. C’est
ainsi le cas des dialkyldithiophosphates de zinc, à la fois antioxydants, antiusure,
anticorrosifs et légèrement dispersants. C’est aussi le cas des additifs détergents
de type alkylphénate sulfure de calcium ou de magnésium dont la structure phé-
nolique et la présence de soufre leur confèrent des propriétés antioxydantes
intéressantes ; de plus, le soufre leur procure une efficacité antiusure non négli-
geable et si, par ailleurs, ils sont rendus alcalins par dispersion colloïdale de car-
bonate de calcium ou de magnésium, ils sont aussi dotés d’un caractère
antiacide. On utilise aussi la possibilité de greffer sur une molécule ayant une

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action spécifique, par exemple un polymère améliorant l’indice de viscosité, un


motif chimique destiné à lui conférer une autre propriété comme un pouvoir dis-
persif dû au greffage d’un motif polaire azoté, par exemple.
Cet ensemble sur les additifs se compose de deux articles :
— [BM 5 343] Lubrifiants. Additifs à action chimique ;
— [BM 5 344] Lubrifiants. Additifs à action physique ou physiologique,
qui est lui-même complété par :
— [Doc.BM 5 344] Lubrifiants. Additifs. « Pour en savoir plus ».
Le lecteur pourra aussi, avantageusement, consulter les articles parus dans ce traité concer-
nant les lubrifiants :
— [B 5 340] Lubrifiants. Propriétés et caractéristiques ;
— [BM 5 341] Lubrifiants. Constitution.

1. Principaux types d’additifs (émulsifiants) ou, au contraire, en cassant les émulsions d’eau dans
l’huile pour éliminer l’eau de pollution des lubrifiants non aqueux
3
pour lubrifiants (désémulsifiants) ou encore, en détruisant les mousses (anti-
mousse) ;
— ceux enfin dont l’action est physiologique (cf. article
[BM 5 344]) soit parce qu’ils présentent une action biostatique vis-à-
Les additifs pour lubrifiants se différencient d’abord d’après le but vis des fluides lubrifiants aqueux en luttant contre la prolifération
recherché : bactérienne (bactéricides) ou contre celle des algues et des moisis-
— pour prévenir des modifications indésirables dues à l’altéra- sures (fongicides), soit parce qu’ils masquent la mauvaise odeur de
tion en service. Ce sont les inhibiteurs ; certains constituants des lubrifiants (parfums).
— pour améliorer les propriétés initiales de l’huile de base. Ce Les additifs doivent être solubles dans les huiles de base. Ils sont
sont les améliorants. préparés en utilisant les huiles minérales comme solvant. Elles
Ils peuvent également être classés selon leur mode d’action très entrent dans le procédé de fabrication des additifs et facilitent leurs
général. On distinguera : manipulations (pompage, circulation dans les tuyauteries) et la sta-
— ceux qui agissent chimiquement dans la masse du lubrifiant bilité au stockage en fluidifiant le produit. En général, les additifs
en limitant son oxydation (inhibiteurs d’oxydation) ou en neutrali- commerciaux contiennent 45 à 90 % de matière active. Les polymè-
sant les polluants acides (détergents surbasiques) ; res utilisés comme améliorants d’indice de viscosité peuvent être
— ceux qui agissent chimiquement au niveau des surfaces en encore plus dilués pour faciliter leur mise en œuvre.
protégeant les métaux non ferreux contre la corrosion acide (anti- La plupart des molécules d’additifs comportent deux parties : une
corrosifs passivateurs et désactivateurs), en évitant l’usure adhésive longue chaîne ou queue lipophile hydrocarbonée, non polaire, et
et sa forme ultime, le grippage des surfaces, en formant des films une extrémité ou tête hydrophile polaire plus courte. Celle-ci pré-
protecteurs tribochimiques à faible résistance au cisaillement sente une affinité pour les solides (surfaces, impuretés insolubles)
(antiusure et extrême-pression) ou en transformant chimiquement et, éventuellement, pour les liquides étrangers comme l’eau, les gly-
les dépôts susceptibles d’obstruer le système d’échappement des cols, etc. La présence dans la même molécule de deux parties de
moteurs 2 temps (antiencrassement ou, en anglais, antifouling) ; solubilité dans l’huile différente fait que, souvent, l’additif se pré-
— ceux qui agissent physiquement dans la masse du lubrifiant sente dans l’huile sous la forme d’un complexe colloïdal ou de
(cf. article [BM 5 344]) en augmentant sa viscosité (épaississants), micelles inverses
son indice de viscosité (améliorants de VI), en abaissant son point
d’écoulement (anticongelants), en modifiant sa couleur (colorants)
ou encore en provoquant un léger gonflement des joints en élasto-
mères pour les rendre étanches (agents de gonflement, en anglais
seal swell agents) ;
2. Additifs agissant
— ceux qui agissent de manière physique ou éventuellement phy-
sico-chimique aux interfaces liquide-solide (cf. article [BM 5 344]),
chimiquement
c’est-à-dire à la surface du métal ou à celles des impuretés solides dans la masse du lubrifiant
présentes dans l’huile, en empêchant les dépôts de carbone et de
vernis d’oxydation d’adhérer aux surfaces (détergents), en mainte-
nant les polluants solides tels que suies et particules diverses en sus-
pension stable dans le liquide (dispersants), en protégeant les 2.1 Additifs antioxydants
métaux ferreux contre la corrosion humide (antirouille) ou les
métaux non ferreux contre la corrosion acide (anticorrosifs à action
filmogène), en améliorant la lubrification en régime limite et mixte L’oxydation des hydrocarbures et autres constituants des lubri-
(agents d’onctuosité), en réduisant les pertes par frottement (réduc- fiants est le phénomène qui détermine leur durée de vie et, dès que
teurs de frottement), en empêchant le frottement saccadé ou stick- la température d’utilisation dépasse 50 à 60 °C en continu et à l’air,
slip (modificateurs de frottement) ou en permettant aux lubrifiants le recours à des additifs antioxydants devient indispensable.
de mieux adhérer aux surfaces (agents d’adhérence) ; Par conséquent, à l’exception de quelques cas rares (lubrifiants pour
— ceux qui agissent de manière physique ou éventuellement graissage perdu, lubrifiants de démoulage, lubrifiants pour très basses
physico-chimique aux interfaces liquide-liquide ou liquide-gaz températures), pratiquement tous les lubrifiants contiennent des addi-
(cf. article [BM 5 344]) en dispersant très finement les polluants tifs antioxydants. Désignés encore « inhibiteurs d’oxydation », ils per-
liquides insolubles tels que l’eau et les liquides de refroidissement mettent de ralentir le processus d’oxydation selon leurs modes
(dispersants), en stabilisant les émulsions et dispersions aqueuses d’action sur les différentes étapes de la réaction d’oxydation.

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BM5343

LUBRIFIANTS _________________________________________________________________________________________________________________________

2.1.1 Mécanisme de l’oxydation Lorsque les radicaux alcoxyles sont secondaires ou tertiaires, les
produits formés sont des aldéhydes ou des cétones :

■ L’oxydation des hydrocarbures en phase liquide est un méca- H


nisme radicalaire en chaîne conduisant à des radicaux libres. Ceux-
ci sont des espèces extrêmement réactives, à durée de vie très R1 C O• R1CHO + R2•
courte, qui proviennent initialement de la coupure homolytique Aldéhyde
d’une liaison carbone-hydrogène covalente et sont désignés par R •. R2
Ils propagent l’oxydation par un processus de réaction en chaîne. R1
Durant sa courte vie, un radical libre provoque l’oxydation d’autant R1
de molécules d’huile qu’il effectue de cycles avant de se désactiver. R2 C O• C O + R•3
Les produits primaires de la réaction en chaîne sont les hydrope- R2
roxydes (ROOH) et le peroxyde d’hydrogène ou eau oxygénée R3
(H2O2). La décomposition spontanée de ces produits, éminemment Cétone
instables et réactifs, donne lieu à de nouveaux radicaux libres indui-
sant de nouvelles réactions en chaîne d’oxydation. Une chaîne De plus, à un stade avancé d’oxydation, deux hydroperoxydes
d’oxydation peut être interrompue par la recombinaison de deux peuvent réagir entre eux, selon un processus réversible, pour for-
radicaux libres donnant naissance à une molécule neutre. mer de nouveaux radicaux libres ROO • et RO • selon le schéma sim-

3 D’une manière très simplifiée, car les mécanismes mis en jeu lors
de l’oxydation sont très complexes, les différentes phases de l’oxy-
dation non catalysée d’un hydrocarbure à des températures n’excé-
plifié :

ROOH + ROOH ROO• + RO• + H2O


dant pas 120 °C en continu sont les suivantes.
● Terminaison de la réaction radicalaire en chaîne : une chaîne
● Amorçage (en anglais initiation) ou période d’induction durant peut être interrompue par la recombinaison de deux radicaux
laquelle se forment les premiers radicaux libres selon un processus libres :
très lent nécessitant une énergie d’activation importante :
R• + R• R R hydrocarbure plus lourd
RH + O2 R• + HOO•
R• + ROO• ROOR dialkylperoxyde :
ROO• + ROO• produit oxygéné inactif
RH symbolise une molécule d’hydrocarbure, R • et HOO • sont les ROOR + O2
radicaux libres résultant de l’attaque de cet hydrocarbure par l’oxy-
gène de l’air. Ces produits inactifs (hydrocarbures lourds R R et dialkylpe-
roxydes ROOR) sont responsables d’une augmentation de viscosité
● Propagation de la réaction en chaîne (chain propagation) : la
de l’huile et peuvent précipiter.
première réaction, très rapide et ayant besoin d’une très faible éner-
gie d’activation conduit à la formation d’un radical peroxyle ROO • : De plus, il se forme des acides par attaque des aldéhydes par des
radicaux R •. Il se forme d’abord des peracides selon les réactions :
R• + O 2 ROO•
R CHO + R• RH + R C•

Celui-ci se combine à une molécule d’hydrocarbure pour donner O


un hydroperoxyde ROOH et un radical alkyle R • avec une vitese plus
ou moins rapide selon la nature de l’hydrocarbure : R C• + O 2 R COO•

ROO• + RH ROOH + R• O O

R COO• + RH R COOH + R•
Avec une molécule d’hydrocarbure, le radical HOO • donne nais-
sance à de l’eau oxygénée H2O2 et à un radical R • :
O O
Peracide
HOO• + RH H2O2 + R•
Les peracides se décomposent à leur tour en un radical acyloxyle
Ces radicaux R • réagissent en transformant n molécules d’hydro- et un radical hydroxyle. Le radical acyloxyle donne, avec une molé-
carbure en n molécules d’hydroperoxyde. cule d’hydrocarbure, un acide et un radical alkyle :
● Branchement des chaînes (chain branching) au cours duquel
l’hydroperoxyde ROOH, élément initiateur, subit une scission de la R COOH R CO• + HO•
liaison O O avec formation de deux radicaux libres, un radical
alcoxyle primaire RO • et un radical hydroxyle HO •, qui réagissent O O
aussi avec des hydrocarbures pour former, le premier, un alcool
ROH et, le second, de l’eau, plus un radical R • dans les deux cas : R CO• + RH R COH + R•

ROOH RO• + HO• O O


RO• + RH ROH + R• Acide
HO• + RH H2O + R•
■ En définitive, l’oxydation non catalysée des hydrocarbures à des
Ces radicaux R • induisent de nouvelles réactions en chaîne qui températures n’excédant pas 120 °C conduit à la formation de pro-
ont pour effet d’accélérer encore l’oxydation, d’où le caractère auto- duits oxygénés relativement légers dont certains sont corrosifs
catalytique de l’oxydation. (alcools, aldéhydes, cétones, peracides, acides…) et de produits

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BM5344

Lubrifiants
Additifs à action physique ou physiologique
par Jean AYEL
Ingénieur de l’École nationale supérieure des arts et industries de Strasbourg
et de l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs
Docteur-Ingénieur
Ex-responsable du cycle Produits pétroliers et moteurs
à l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs

1. Additifs agissant physiquement dans la masse du lubrifiant ..... BM 5 344 – 2


3
1.1 Additifs épaississants.................................................................................. — 2
1.2 Additifs améliorant l’indice de viscosité.................................................... — 2
1.3 Additifs abaisseurs de point d’écoulement ............................................... — 4
1.4 Colorants ...................................................................................................... — 5
1.5 Additifs de gonflement des joints .............................................................. — 6
2. Additifs agissant physiquement aux interfaces liquides-solides — 6
2.1 Additifs détergents organométalliques ..................................................... — 6
2.2 Additifs dispersants sans cendres ............................................................. — 7
2.3 Additifs antirouille ....................................................................................... — 9
2.4 Additifs anticorrosifs à action filmogène................................................... — 10
2.5 Additifs d’onctuosité agissant par physisorption ..................................... — 10
2.6 Additifs réducteurs de frottement .............................................................. — 10
2.7 Additifs modificateurs de frottement......................................................... — 11
2.8 Additifs d’adhérence ................................................................................... — 11
3. Additifs agissant physiquement aux interfaces liquide-liquide
ou liquide-gaz............................................................................................ — 12
3.1 Additifs dispersants..................................................................................... — 12
3.2 Émulsifiants.................................................................................................. — 12
3.3 Désémulsifiants ........................................................................................... — 13
3.4 Additifs antimousse..................................................................................... — 13
4. Additifs à action physiologique ........................................................... — 13
4.1 Biocides ........................................................................................................ — 13
4.2 Masques d’odeurs et parfums.................................................................... — 15
5. Conclusion ................................................................................................. — 15
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc.BM 5 344

es additifs pour lubrifiants sont des composés chimiques, de nature organi-


L que ou organométallique, incorporés aux huiles de graissage ou aux grais-
ses, à des teneurs variant de moins de 1 % à plus de 25 % selon les cas, pour, soit
conférer aux huiles ou graisses de base des propriétés qu’elles ne possèdent pas
naturellement, soit améliorer leurs propriétés naturelles.
Ces additifs, classés selon leur mode d’action très général, se répartissent, en
premier lieu, selon les additifs qui agissent chimiquement dans la masse du
lubrifiant et selon ceux qui agissent chimiquement au niveau des surfaces.
Parution : janvier 2002

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LUBRIFIANTS _________________________________________________________________________________________________________________________

Ces deux catégories de produits ont été examinées dans une première partie
[BM 5 343].
Les autres additifs, étudiés dans cette deuxième partie, sont ceux dont l’action
est physique soit dans la masse du lubrifiant, soit aux interfaces liquide-solide,
liquide-liquide ou liquide-gaz et, enfin, ceux dont l’action est physiologique.
Cette deuxième partie est complétée par quelques données économiques et
commerciales dans l’annexe « Pour en savoir plus » [Doc.BM 5 344].
Le lecteur pourra aussi, avantageusement, consulter les articles parus dans ce traité concer-
nant les lubrifiants :
— [B 5 340] Lubrifiants. Propriétés et caractéristiques ;
— [BM 5 341] Lubrifiants. Constitution.

1. Additifs agissant À froid : interactions faibles À chaud : interactions fortes

3 physiquement polymère/solvant polymère/solvant


Huile de base
dans la masse du lubrifiant

1.1 Additifs épaississants


Macromolécules
Indépendamment des additifs améliorant l’indice de viscosité, de polymère
traités au paragraphe 4.2, qui épaississent les huiles à chaud tout en
les gardant fluides à froid, il existe des produits utilisés surtout en SOLUBILITÉ
Faible Élevée
lubrification industrielle, qui permettent de formuler des lubrifiants
de plus forte viscosité que ce que permettent les gammes disponi- 5 000
bles d’huiles de base minérales et synthétiques. Ces produits, que 2 000
l’on peut considérer soit comme des huiles de base très visqueuses, 1 000
500 SAE 5W-40
Viscosité cinématique (mm2/s)

soit comme des additifs épaississants, sont essentiellement des


200 avec polymère
polyisobutènes (PIB) de haute masse molaire (10 000 à 100 000)
incorporés, par exemple, aux huiles pour réducteurs industriels de 100
grades ISO élevés (ISO VG 1 000 à 3 200), aux huiles pour cylindres 50
les plus visqueuses. On utilise aussi des esters visqueux comme des
esters complexes dont la viscosité peut atteindre 65 mm2/s à 100 °C 20
ou, mieux, des esters polymères, obtenus par copolymérisation
d’un ester insaturé activé (maléate ou méthacrylate) et d’une 10
α-oléfine. Ces produits sont disponibles jusqu’à la viscosité de Huile sans polymère
450 mm2/s à 100 °C. pour SAE 5W-40
5
Il est à noter que les PIB de haute masse molaire sont aussi des 4
additifs d’adhérence (cf. § 2.8) et que les esters visqueux améliorent 3
les propriétés antiusure des lubrifiants. – 20 0 40 100 150
Température (°C)

Figure 1 – Mode d’action des additifs améliorant l’indice


1.2 Additifs améliorant l’indice de viscosité
de viscosité
Les additifs de VI sont incorporés aux huiles lubrifiantes destinées
Ces produits, appelés aussi additifs de VI (AVI), en anglais V.I. à fonctionner dans des conditions très larges de température ; ils
Improver (VII), sont des polymères qui, en solution dans l’huile de permettent le démarrage aisé des mécanismes à froid en diminuant
base, l’épaississent notablement à haute température (forte interac- les pertes par frottement et en améliorant la pompabilité des huiles,
tion huile-polymère) pour éviter le contact des pièces en mouve- tout en assurant une viscosité à chaud suffisante pour prévenir les
ment tout en n’ayant qu’une très faible influence sur la viscosité à ruptures de film d’huile. On les trouve donc dans les huiles multigra-
basse température (faible interaction), ce qui facilite le démarrage à des pour moteurs, dans les lubrifiants de transmissions automobiles
froid des mécanismes en réduisant en même temps les pertes éne- à commande manuelle (huiles « boîtes et ponts ») et surtout dans les
rgétiques par frottement. fluides de transmissions automatiques, dans les fluides hydrauli-
Le mode d’action de ces produits est schématisé figure 1. À froid, ques des catégories ISO-L-HR et HV, dans les fluides de directions
les macromolécules de polymères, peu solubles dans l’huile de assistées, dans les huiles pour amortisseurs, dans les huiles multi-
base, sont pelotonnées sur elles-mêmes ; leur encombrement stéri- fonctionnelles de tracteurs et d’engins de travaux publics, etc.
que est faible, ce qui limite les frottements visqueux entre macro- Ils sont généralement commercialisés sous forme diluée dans
molécules. À chaud, en revanche, la solubilité des macromolécules une huile minérale fluide (130 NS, 150 NS…) (cf. [2] dans ce traité) à
dans l’huile de base augmente notablement, les chaînes polyméri- des teneurs comprises entre 40 et 60 % pour les polyméthacrylates
ques se déploient, les macromolécules « gonflent » et l’écoulement (PMA), entre 10 et 15 % pour les copolymères d’oléfines (OCP), entre
visqueux est ainsi gêné par le frottement entre elles, ce qui se tra- 5 et 15 % pour les polymères hydrocarbonés et à environ 30 % pour
duit par une augmentation sensible de la viscosité. les polymères PMA-OCP.

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BM5344

_________________________________________________________________________________________________________________________ LUBRIFIANTS

Selon l’indice de viscosité recherché, ils sont utilisés à des con- 1.2.2 Polymères hydrocarbonés
centrations de l’ordre de 0,3 % (cas des OCP) à 8 % (cas des PMA),
ce qui correspond à des dosages en produits commerciaux allant de ■ Les polyisobutènes (ou polyisobutylènes) (PIB) ont figuré parmi
3 à 15 %. Les fluides hydrauliques pour l’aviation dont le VI peut les premiers additifs de VI utilisés dans les huiles moteurs mais ils
atteindre 400, ainsi que les fluides hydrauliques LHM pour suspen- ne sont plus utilisés de nos jours en raison d’un pouvoir épaissis-
sions et freins des véhicules Citroën ( VI ≈ 350 ), contiennent environ sant jugé maintenant trop élevé à basse température.
25 % de PMA dilués.
■ Certains polybutadiènes correspondent, après hydrogénation, à
Les composés les plus courants appartiennent aux familles
des copolymères d’oléfines tels que les copolymères éthylène-
chimiques de polyesters, des polymères hydrocarbonés et des
butène. Ces produits sont peu utilisés.
polymères mixtes hydrocarbonés-esters.
■ Les copolymères d’oléfines, en anglais olefin copolymers (OCP),
sont fabriqués à partir d’éthylène et de propylène. Leur masse
1.2.1 Polyesters ou polymères d’esters molaire est comprise entre 50 000 et 100 000, ce qui, associé à un
polymolécularité ou « polydispersité » assez faible, les rend moins
Ce sont les polyfumarates, les polyacrylates et, surtout, les cisaillables que les PMA. Par ailleurs, leur plus faible coût les rend
polyméthacrylates (PMA) d’alcools de longueur de chaîne organi- très attractifs aux yeux des formulateurs.
que variable de C1 à C20 (moyenne C12), répartis statistiquement le Nota : l’indice de polymolécularité (ou de polydispersité) traduit la plus ou moins

3
long de la chaîne principale. Les masses molaires moyennes varient grande répartition statistique des masses molaires des polymères constituant le produit.
de 70 000 à 150 000. Les PMA de relativement faible masse molaire, Cet indice croît avec l’hétérogénéité des masses molaires.
donc peu cisaillables, sont utilisés de préférence pour la formulation Formule chimique des OCP :
d’huiles destinées à des mécanismes sévères en termes de con-
trainte de cisaillement tels que les boîtes de vitesses manuelles et CH 2 CH 2 CH 2 CH
automatiques, les ponts, les circuits hydrauliques, etc. Ceux de mas-
ses molaires plus élevées entrent surtout dans la formulation des CH 3
huiles moteurs mais sont de moins en moins utilisés actuellement m n
(en 2001) pour cet usage à cause de leur coût plus élevé et de leur
stabilité thermique inférieure à celle des autres polymères et cela, Comme les PMA, les OCP peuvent être rendus dispersants par
malgré leurs très bonnes performances à froid (faible pouvoir épais- incorporation de motifs polaires azotés, d’où la notation « OCP-d ».
sissant). ■ Les copolymères diènes-styrènes hydrogénés sont obtenus par
Formule chimique d’un PMA : copolymérisation d’un diène tel que le butadiène ou l’isoprène (ou
2-méthyl-1,3-butadiène) avec le styrène (ou vinylbenzène), suivie
CH 3 d’une hydrogénation.
CH 2 C
Ces produits, de faible polydispersité, ont une masse molaire
s’échelonnant entre 50 000 et 120 000, ce qui les rend peu cisailla-
C O
bles. Leur bon comportement général, notamment sur moteurs Die-
sel, justifie leur fort taux de croissance actuel.
O R n Comme les produits précédents, ces copolymères peuvent être
rendus dispersants.
R = chaîne organique de C1 à C20 Ils ont pour formule chimique :
R R
Durant ces dernières années, en raison notamment de l’espace-
ment des vidanges et de nouvelles conditions de fonctionnement CH2 CH CH2 CH CH2 CH2 CH2 CH CH2 CH
des moteurs (dépollution), le problème de la formation des boues à
froid dans les moteurs à essence (black-sludge) et l’augmentation CH CH3 CH2
de la teneur en suie des huiles pour moteurs Diesel ont conduit les
R CH3
formulateurs à renforcer le pouvoir dispersant de leurs huiles.
À cet effet, deux voies sont possibles : l m n o
— l’augmentation de la quantité d’additifs dispersants spécifi- Motifs diène (hydrogéné) Motif styrène
ques ;
avec R = H pour le polybutadiène-styrène hydrogéné (PBSH)
— l’introduction d’une fonction dispersante dans la chaîne du
et R = CH3 pour le polyisoprène-styrène hydrogéné (PISH)
polymère améliorant l’indice de viscosité, ce dernier venant renfor-
cer l’action de l’additif dispersant utilisé à sa dose habituelle.
Des copolymères dits « étoiles », en anglais star copolymers,
C’est ainsi que les PMA ont été les premiers additifs de VI rendus
particulièrement performants, obtenus par réaction de copolymères
dispersants par greffage d’un motif polaire azoté comme, par exem-
blocs diène/styrène/diène avec le divinylbenzène suivie d’une
ple, la vinylpyridine, la vinylpyrrolidone et la vinylimidazole. Les
hydrogénation, sont également en pleine expansion ; ils répondent
polyméthacrylates dispersants sont, dans la pratique, désignés par
à la formule générale suivante :
le sigle « PMA-d ».
Formule chimique d’un PMA-d à base de vinylpyrrolidione : R1 CH CH 2 R2

CH 3

CH CH 2 C CH 2

N C O
H2 C C O R3 CH CH 2 R4
O R
H2 C CH 2
m n R1 , R2 , R3 , R4 = copolymères diène/styrène/diène (hydrogénés)

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LUBRIFIANTS _________________________________________________________________________________________________________________________

1.2.3 Polymères mixtes esters-oléfines Le processus de cristallisation des paraffines se fait en trois étapes :
— la germination (ou nucléation) caractérisée par l’empilement
Ces produits sont obtenus soit par mélanges physiques de des molécules de paraffines orientées parallèlement à leur axe sous
polyméthacrylates et de copolymères d’oléfines (PMA + OCP), soit l’influence de forces intermoléculaires supérieures aux interactions
par copolymérisation de méthacrylates dans une solution de solvants-paraffines ;
copoly-mères d’oléfines dans une huile (PMA-OCP) ; ces derniers — la croissance des cristaux de paraffines en couches successi-
sont parfois appelés improprement « mélanges chimiques » par ves ;
opposition aux précédents. — l’agglomération de ces couches provoquant la congélation de
l’huile.
Formule des copolymères PMA-OCP :
Les additifs abaisseurs de point d’écoulement, désignés encore
CH 3 additifs anticongelants, en anglais pour point depressant PPD, per-
turbent le processus de cristallisation des paraffines en limitant la
CH 2 C CH 2 CH 2 CH 2 CH croissance des cristaux soit en s’adsorbant sur les chaînes alkyles,
n
soit, plus généralement, en empêchant la formation de réseaux
C O CH 3 intercristallins en cocristallisant avec les paraffines, ce qui favorise
o
la croissance d’une multiplicité de petits cristaux en épaisseur plutôt
O R m qu’en surface. Ils empêchent donc la formation de réseaux structu-

3
rés de paraffines.
R = chaîne organique de C1 à C20
■ Les produits les plus utilisés sont de plusieurs types.
Ils sont aussi obtenus par copolymérisation de méthacrylates ● Polyacrylates et polyméthacrylates d’alcools compris entre C12
avec le styrène (PMA-styrène) : et C24, de faibles masses molaires :
CH 3 CH 3
CH 2 CH
CH 2 C CH CH 2 CH 2 C
C O
C O C O
O R n
O R O R n

m n Polyacrylates Polyméthacrylates
R = chaîne organique de C1 à C20 ● Polystyrènes alkylés :
ou encore par copolymérisation d’un mélange de méthacrylates et CH 2 CH
d’α-oléfines dans une huile de dilution (PMA-α-oléfines) :

CH 3
R
CH 2 C CH CH 2
n
C O R’ n R = chaîne organique

O R m ● Dérivés alkylés du naphtalène obtenus par condensation (réac-


tion de Friedel et Crafts) de naphtalène avec des paraffines chlorées
R' = chaîne organique de C1 à C20 (par exemple, en C8) ou avec des oléfines à longue chaîne :

De telles associations permettent de réaliser de bons compromis


prix-performances rhéologiques à froid et à chaud des huiles formu- R
lées.
D’une manière générale (à chaud comme à froid), à masse n
molaire moyenne égale, les OCP, les copolymères diènes-styrène et
le polybutadiène hydrogéné sont plus épaississants que les PMA. R = C14 à C24
Cela est un avantage à chaud, en termes de coût de traitement de
l’huile, mais est pénalisant pour ce qui concerne le démarrage à ● Produits de condensation de phénol et de paraffines chlorés ou
froid. d’oléfines, tels que (1) ou estérifiés par l’anhydride phtalique (2) :

OH O
R
1.3 Additifs abaisseurs de point C O
d’écoulement
R
Les huiles minérales obtenues par raffinage au solvant ou par
C O
hydrotraitement contiennent des hydrocarbures paraffiniques et, en
particulier, des n-paraffines qui cristallisent à des températures rela- n R
O
tivement hautes (– 6 à – 18 °C) et cela malgré le coûteux traitement
de déparaffinage au solvant de la chaîne de fabrication des huiles. (1) (2)
Au-dessous de ces températures de cristallisation désignées
« points d’écoulement », les huiles sont figées et ne s’écoulent plus. R = chaîne organique

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TRI1800

Biolubrifiants
Réglementations, familles d’huiles
de base, propriétés « éco » et applications

par Mathias WOYDT


Docteur en Sciences des Matériaux de l’Université Technique de Berlin
Directeur de la division « Tribologie et protection contre l’usure » à l’Institut fédéral pour la
recherche et l’essai des matériaux (BAM), Berlin
Associé gérant de MATRILUB – Matériaux, Tribologie, Lubrification, Berlin, Allemagne 3
1. Réglementations...................................................................................... TRI 1 800v3 - 2
1.1 Réglementation européenne...................................................................... — 2
1.2 Normes applicables pour les essais .......................................................... — 3
2. Définition de « biolubrifiant »............................................................. — 5
2.1 « Biolubrifiants » — 5
2.2 Écolabel européen pour les lubrifiants ..................................................... — 5
2.3 Critères......................................................................................................... — 6
2.3.1 Écotoxicité .......................................................................................... — 7
2.3.2 Renouvelabilité................................................................................... — 7
2.4 Protection du milieu marin......................................................................... — 7
2.4.1 Vessel General Permit (VGP)............................................................. — 7
2.4.2 Navires exploités dans les eaux polaires......................................... — 8
2.5 Comparaisons des différentes réglementations ...................................... — 8
3. Propriétés des différentes classes d’huiles de base ..................... — 9
3.1 Biodégradation et formulation des lubrifiants
à base d’hydrocarbures .............................................................................. — 9
3.2 Huiles minérales.......................................................................................... — 9
3.3 Hydrocarbures synthétiques ...................................................................... — 10
3.4 Esters d’origine végétale ............................................................................ — 10
3.5 Esters synthétiques..................................................................................... — 11
3.6 Polyalkylène glycols.................................................................................... — 14
3.7 Stratégie de formulation ............................................................................ — 14
3.8 Biomasse et produits de recyclage............................................................ — 14
4. Applications.............................................................................................. — 16
4.1 Huiles hydrauliques .................................................................................... — 16
4.2 Automobile .................................................................................................. — 16
4.3 Fluides de travail ......................................................................................... — 16
4.4 Huiles lubrifiantes pour turbines ............................................................... — 16
5. Conclusion................................................................................................. — 17
6. Sigles, notations et symboles.............................................................. — 17
Pour en savoir plus ......................................................................................... Doc. TRI 1 800v3

es huiles perdues, les fuites accidentelles et les lubrifiants perdus rejoi-


L gnant les sols et les eaux (comme ce fut le cas pour le lac de Constance par
exemple) sont l’un des points de départ de la mise en route des lubrifiants
« neutres pour l’environnement ». Ils se trouvent dorénavant dans le portfolio
Parution : octobre 2019

de tous les formulateurs et fabricants de lubrifiants.

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TRI1800

BIOLUBRIFIANTS ___________________________________________________________________________________________________________________

Malgré les voies du recyclage, la combustion dans les moteurs et les fuites
connues, environ 30 % (entre 20 % et 40 %, selon les études [1] [2] [3] [4]) du
volume des lubrifiants sont rejetés dans l’environnement par des voies non
maîtrisées ou sont probablement mis en décharge de manière illégale. Ces
rejets non contrôlés posent un problème majeur de suivi et de maîtrise de la
qualité des eaux potables ou non.
Avec de tels chiffres publics, les arguments des lobbyistes de l’industrie
pétrochimique, affirmant que, dans la plupart des applications, les fluides sont
enfermés dans des réservoirs clos et étanches, ne convainquent pas les poli-
tiques. C’est aussi peut-être parce qu’en Allemagne, environ 60 % des
particuliers changent leur huile moteur par eux-mêmes.
Dans une année d’économie normale, environ 4,1 millions de tonnes de
lubrifiants neufs sont consommés dans l’Europe des 27.
Au début des années 1990, un ensemble de lois et décrets sur l’environnement,

3
ainsi que des normes techniques, ont été imposés en Allemagne, Autriche, Suisse,
Suède et ont trouvé entre-temps leurs homologues européennes. La tendance a
été, dans un premier temps, de réduire les risques pour l’environnement et de
protéger les ressources d’eau potable, les forêts et la nature contre des fluides
hasardeux émis en cas de fuites, d’avaries et de vidanges par les industries, les
particuliers et les chantiers de constructions. Le « scope » de la norme ISO 15380
pour huiles hydrauliques souligne au niveau international cette approche.
Les huiles non dommageables pour l’environnement avaient, dès le début,
retenu l’attention des ministères de l’Agriculture plus par la vision « agrolube/
agrilube », ou « biosourcés », que par le souci d’approvisionner le marché en
« biolubrifiants ». Il s’agissait de maintenir une activité économique en agriculture,
de créer et soutenir des emplois ainsi que d’assurer la gestion des territoires. En
conséquence, les esters à base de ressources végétales étaient favorisés, même si
les définitions de « biobasées » incluent les ressources végétales et animales,
ainsi que marines. Les huiles végétales se trouvent en abondance dans la nature
sous formes d’esters gras appelés triglycérides tels que :
– le colza et le tournesol (Europe) ;
– le colza, le tournesol, le soja, le coco, l’olive, la palme (Chine, Malaisie,
Thaïlande, Russie, Argentine, Philippines, Indonésie) ;
– le jatropha (régions semi-arides telles que l’Inde et l’Afrique) ;
– les algues ;
– les huiles alimentaires recyclées.
Les aspects scientifiques et technologiques, ainsi que les relations structure-
propriétés des huiles de base, répondant aux critères des « biolubrifiants »,
sont détaillés dans les références [5] [6] [7] pour les esters, [8] [9] pour les
polyglycols et plus généralement dans [10] [11].

1. Réglementations – la directive 2004/35/CE du 21 avril 2004 sur la responsabilité envi-


ronnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des
dommages environnementaux (principe du « pollueur payeur »).
Jusqu’à présent, la directive 67/548/CE a été modifiée dix fois
1.1 Réglementation européenne (10e amendement directive 2008/1272/CE) et adaptée vingt-huit
fois au progrès technique (28e adaptation au progrès technique –
La réglementation européenne recouvre aujourd’hui les régle- directive 2001/59/CE et 2009/2/CE). Elle a été remplacée le 1er juin
mentations nationales, en particulier : 2015 avec l’entrée en vigueur de la nouvelle directive 2008/1272/
– la directive 67/548/CE du 27 juin 1967 concernant le rapproche- CE (voir le système mondial général harmonisé de classification
ment des dispositions législatives, réglementaires et administra- et d’étiquetage des produits chimiques (SGH) de l’Organisation
tives relatives à la classification, l’emballage et l’étiquetage des des Nations unies). Un des changements concerne le remplace-
substances dangereuses (JOCE L196 du 16 août 1967) ; ment des « phrases de risques » Rxx (systèmes de classification,
– la directive 1999/45/CE du 31 mai 1999 concernant le rappro- d’étiquetage et d’emballage des produits chimiques) par des
chement des dispositions législatives, réglementaires et adminis- « mentions de danger » Hxxx (SGH).
tratives des États membres relatives à la classification, à La mise en œuvre de la directive européenne d’étiquetage de
l’emballage et à l’étiquetage des préparations dangereuses, modi- substances dangereuses entraînera le développement du marché
fiée par la directive 2006/8/CE du 23 janvier 2006 ; des lubrifiants bio-no-tox, si ceux-ci sont favorisés par les autorités

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TRI1800

___________________________________________________________________________________________________________________ BIOLUBRIFIANTS

3
67/548/CE SGH 09

Figure 1 – Pictogramme du symbole « N » (gauche : 67/548/CE ; à droite : nouveau pictogramme « SGH 09 » selon 2008/1272/CE)

nationales, car la législation européenne met l’accent sur les pro- L’effet positif et l’impact sur le marché du bouquet de régle-
priétés écotoxicologiques sans émettre de préconisations sur la mentations, et surtout d’aides financières pour promouvoir les
nature des huiles de base. Cela reste opposé aux intérêts natio- « biolubrifiants » sont fortement discutés. L’Office national des
naux, qui pour la plupart préconisent des esters. Le marquage forêts prescrit des huiles de chaînes biodégradables pour forêts
avec le symbole « N » distingue, lorsqu’il est correctement appli- publiques et zones sensibles (voir chapitre 1.1.5 du Règlement
qué, une formulation dangereuse pour l’environnement d’une national d’exploitation forestière, résolution n° 2007-11).
moins dangereuse (voir figure 1).
La ville hanséatique de Hambourg avait déjà en 1994 appliqué
Le symbole « N », « dangereux pour l’environnement », a été une solution simple en droit civil. Par arrêté du sénateur pour
introduit avec la directive européenne 1999/45/CE. Il a été rem- l’environnement, dès le 1er janvier 1995, les entreprises de
placé par le symbole « SGH 09 » (directive 2008/1272/CE). Les constructions étaient éligibles pour des contrats de la ville concer-
« biolubrifiants » et lubrifiants écolabellisés ne doivent pas être nant des constructions ou des institutions publiques, si toutes les
marqués avec ces symboles « N », ou plus récemment « SGH 09 » machines de constructions travaillant dans le cadre des contrats
(voir figure 1). utilisaient des fluides biodégradables, une liste de fluides recom-
La directive 2004/35/CE (modifiée par les directives 2006/21/CE, mandés étant fournie. L’impact suprarégional est clair.
2009-468 et 2013/30/CE sur la responsabilité environnementale, en Les directives européennes sur les huiles usagées (75/439/CE et
ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages 87/101/CE) se concentrent sur les huiles minérales et à base
environnementaux) transfère (voir article 6) le régime des respon- d’hydrocarbures. Il serait souhaitable de bénéficier pour les biolu-
sabilités pour la prévention et la réparation des dommages envi- brifiants de numéros de décrets séparés. Les statistiques ne dis-
ronnementaux vers l’exploitant (principe du « pollueur payeur »), tinguent à ce jour pas encore suffisamment les biolubrifiants.
qui peut être toute personne physique ou morale, privée ou
publique, qui exerce ou contrôle une activité professionnelle.
L’exploitant doit engager toutes les mesures pratiques afin de
combattre, d’endiguer, d’éliminer ou de traiter immédiatement les 1.2 Normes applicables pour les essais
contaminants concernés et tout autre facteur de dommage. Ici, la
question de l’assurabilité des risques environnementaux se pose Dans le contexte de REACH (règlement de l’Union européenne
ainsi que la contribution des « biolubrifiants » pour réduire les 1907/2006 concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisa-
risques et coûts d’assurance (décret n° 2009-468 du 23 avril 2009 tion des substances chimiques, ainsi que les restrictions appli-
relatif à la prévention et à la réparation de certains dommages cables à ces substances), la directive 440/2007CE clarifie les
causés à l’environnement). méthodes d’essais agréées pour fournir les propriétés écotoxico-
logiques demandées.
Principalement en France et à compter du 1er janvier 2008, la loi
d’orientation agricole (article 44, loi 2006-11 du 5 janvier 2006) Cela représente une garantie importante, y compris pour le
interdit, dans les zones naturelles sensibles (forêts, lacs, captages consommateur et/ou le client final, car par le passé et même
d’eau…), l’utilisation des lubrifiants qui sont substituables par des aujourd’hui, certains industriels sont tentés de choisir des
lubrifiants biodégradables ou satisfaisant aux critères de l’éco- méthodes qui garantissent à leurs produits des résultats favorables.
label européen. Cette prise de conscience environnementale est Les autorités s’adressent d’abord au consommateur ou au client
soutenue par la loi Grenelle 2 ou loi n° 2010-788 du 12 juin 2010, final, qui porte la responsabilité environnementale (voir directive
mais avec des modifications : européenne 2004/35/CE – responsabilité environnementale).
– l’année « 2008 » est remplacée par l’année « 2011 » ; Le tableau 1 résume les méthodes de caractérisation de la bio-
– les mots « biodégradables ou satisfaisant aux critères et exi- dégradation aérobie dans des milieux aqueux prescrites pour les
gences » sont remplacés par « répondant aux critères et exigences « biolubrifiants ». Les diverses méthodes couvrent les biodégrada-
de biodégradabilité et d’absence d’écotoxicité » (il reste à préciser tions biotique et aérobique, d’espèces d’eau douce et récemment
les méthodes et valeurs). aussi d’espèces marines. La « Nature » élimine rapidement de

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TRI1800

BIOLUBRIFIANTS ___________________________________________________________________________________________________________________

Tableau 1 – Équivalences des méthodes de biodégradation aérobie


dans des milieux aqueux prescrites pour « biolubrifiants »

Biolubrifiants Écolabel Écolabel Vessel


Méthodes pour déterminer la biodégradation (EN 16807) (2011/381/UE) (2018/1702/UE) General Permit
2016 2011-2018 2019-2024 (É.-U., 2013) Quantité
mesurée
Essai Essai Essai Essai
ISO OCDE ASTM
sur formulation sur substance sur substance sur substance

7827 301A* E1279 Non Oui Non Oui COD

9439 301B D5864, E1720 Oui Oui Oui Oui ThCO2

– 301C – Non Oui Oui Oui DOB/DThO

10707 301D – Non Oui Oui Oui DOB/DThO

3 7827 301E* – Non Oui Oui Oui COD

9408 301F D6731 Oui Oui Oui Oui DThO

16221 306 – Oui Oui Oui Oui COD

14593 310 E1720 Oui Oui Oui Oui ThCO2


(EN ISO)

ASTM D7373 Non Non Non Oui

CEC-L103-12 Non Non Non Non

CEC-L33-A-93 Non Non Non Non IR CH2-CH3

Contenu en matières renouvelables > 25 % > 50 % Supprimé Non


(ASTM D6866 ou DIN EN 15440)

COD : carbone organique dissous ; ThCO2 : quantité théorique de CO2 évaluée pour la minéralisation totale ; DOB/ThOD : une demande
d’oxygène biochimique liée à la demande théorique de l’oxygène de la minéralisation totale.
Niveaux de passage de 28 jours : > 70 % pour CCOD et > 60 % pour ThCO2 ou DOB/DThO.
D7373 correspond à l’ASTM D6731 (OCDE 301F).
* Les lignes directrices de l’OCDE 301 déterminent uniquement la biodégradation ultime. Par contre, on peut aussi déterminer
la biodégradation primaire avec les OCDE 301A et 301E en utilisant en supplément des méthodes d’analyses spécifiques. ASTM E1720
et E1279 ont été retirées.
Nota : OCDE 302 A-C détermine la biodégradation primaire ou inhérente.

l’environnement les substances, qui se dégradent rapidement. Les – Méthode basée sur le dégagement de CO2 » répond à la critique,
formulations et constituants non dégradables persistent dans que les essais OCDE (301A-F) étaient initialement développées pour
l’environnement et possèdent par conséquent un potentiel d’effets des substances et non pour des formulations.
néfastes à long terme sur le biotope. La biodégradation en milieu Finalement, seules les méthodes des lignes directrices (guide-
aqueux se classe selon deux niveaux : lines) OCDE (301 A-F) et les standards ISO (ISO 9439, ISO 9408, ISO
– la biodégradation dite facile (ou immédiate, voire rapide) par 10707 par exemple), excepté les méthodes ASTM D5864/D6731
des tests spécifiques de biodégradabilité ultime ; considérées homologues, sont agréées pour déterminer la biodé-
– la biodégradation potentielle, qui fait appel à des tests de bio- gradation des biolubrifiants par des eaux douces. La méthode
dégradabilité potentielle (ou inhérente, ou intrinsèque). OCDE 306 permet en outre de déterminer la biodégradabilité en
milieux marins, (voir aussi les tests homologues ISO 16221), car ils
La biodégradation facile peut être déterminée en utilisant les figurent également dans le SGH-2013 (voir tableau 1). Le docu-
essais de biodégradabilité (A-F) de la ligne directrice 301 de l’OCDE, ment SCHER [12] établit l’équivalence entre les méthodes OCDE et
qui se déroulent dans des eaux douces et les méthodes ISO qui sont ISO, puisqu’il existe des différences considérées comme plus ou
basées sur des principes équivalents. Les substances qui atteignent moins déterminantes entre celles-ci. Les méthodes ASTM D6731,
les niveaux de biodégradation requis par ces tests peuvent être D6139 et D5864 se focalisent formellement sur les lubrifiants, par
considérées comme capables de se dégrader rapidement dans la contre les méthodes OCDE visent toutes les substances. La
plupart des milieux, et ont donc peu de chances d’y persister. méthode VGP2013 (voir § 2.3.3) accepte aussi la ASTM D7373
Ces essais mesurent la biodégradation ultime de la substance, « bio-kinetic model ».
c’est-à-dire sa minéralisation complète. La norme européenne NF Même si elles sont jugées comparables ou équivalentes, il faut
EN 17181 « Bio-lubrifiants – Détermination de la biodégradabilité noter qu’il existe entre les méthodes ISO/OCDE/ASTM des différences
aérobie, en solution aqueuse, de lubrifiants complètement formulés dans les détails, les modes opératoires, et dans le résultat obtenu.

TRI 1 800v3 – 4 Copyright © – Techniques de l’Ingénieur – Tous droits réservés

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IN74

INNOVATION

Nanotalcs synthétiques :
des nanoparticules argileuses
à l’assaut de l’industrie
par François MARTIN

La course vers les nanomatériaux que se livrent laboratoires privés et labora-


3
toires de recherche publique a permis le développement de nouveaux maté-
riaux de taille nanométrique, conservant les caractéristiques des talcs natu-
rels, avec de nouvelles propriétés physiques et chimiques, qui laissent
présager d’un développement sans précédent dans de nouvelles applications
industrielles dans lesquelles le talc naturel ne pouvait entrer, en particulier en
tant que nanoparticules lubrifiantes résistantes à haute température.

Le professeur François MARTIN est directeur


de l’équipe recherche technologique ERT 1074
Géomatériaux du CNRS, directeur de l’IUP Génie Hydrophobe
de l’Environnement, observatoire Midi-Pyrénées,
université Paul-Sabatier, LMTG-CNRS-UPS-IRD
(Toulouse).

Hydrophile
1. Le talc naturel
Cet article est dédié à François FONTAN, minéralo-
giste systématicien français décédé en juillet 2007.
Sur les
nanoparticules :
Le talc (figure 1) est un silicate de magnésium c*
Les nanoparticules
hydraté Mg3Si4O10(OH)2. C’est le pôle le plus simple inorganiques [NM 200]
de M. Wautelet
des phyllosilicates de type 2:1 qui compte dans ses
rangs les smectites (argiles gonflantes) par exemple. Si tétraédrique
La plupart des talcs naturels comportent des teneurs
très faibles (< 1 %) en Fe, Al, F, Mn, Ti, Cr, Ni, qui vien-
nent se substituer au Si, Mg, et OH. Mais l’électroneu- 9,36 Å Mg octaédrique
tralité de la maille perdure malgré ses substitutions et
on assiste dans le milieu naturel a un ré-équilibrage de
charge dans la structure (exemple : un Si4+ remplacé
par un Al3+ et en parallèle un Mg2+ remplacé par un
Fe3+). La structure est la superposition suivant la
direction c* de feuillets tous identiques distants de
9,36 Å, comportant deux couches de tétraèdres de sili-
cium inversés encadrant une couche d’octaèdres de
magnésium. La surface du feuillet est composée
essentiellement d’atomes d’oxygène qui viennent cou- Groupement OH Oxygène
lisser sur le feuillet sus- ou sous-jacent, conférant au
Parution : juillet 2008

talc son toucher onctueux sous l’effet d’une contrainte


de cisaillement. Cette surface est hydrophobe (ren- Figure 1 – Structure cristallographique du talc
dant très difficile sa dispersion en milieu aqueux). Les (système monoclinique)

7 - 2008 © Editions T.I. IN 74 - 1

103
Référence Internet
IN74

INNOVATION

3
Figure 3 – Image obtenue en microscopie électronique
Figure 2 – Roche constituée uniquement de talc : à balayage (MEB-FEG, TEMSCAN UPS Toulouse III)
stéatite du gisement de Trimouns-Luzenac (Ariège, d’un talc naturel broyé
France). Gisement de Trimouns en arrière-plan

la codéposition du talc dans des matrices métalliques


surfaces latérales quant à elles sont considérées
servant aux dépôts de surface. Le secteur des traite-
hydrophiles (OH de bordures) mais en moins grandes
ments de surface est dans cette région un des pôles
extensions que les surfaces hydrophobes.
d’excellence de l’industrie du fait de l’existence de
Le talc produit à travers la planète est extrait de sociétés importantes du secteur aéronautique
gisements provenant essentiellement de la transfor- (EADS, Turboméca, SNECMA, Mécaprotec…). Le déve-
mation de dolomie (carbonate de calcium et de loppement de la technique de codéposition par voie
magnésium) sous l’effet de fluides géologiques très humide de revêtements composites à matrice métal-
chauds et riches en silicium, en talc. Le calcium et le lique et la recherche de nouvelles formulations pré-
carbone composant la dolomie sont évacués ; restent sente donc pour ce secteur d’activité un intérêt non
en place le silicium et le magnésium qui se recombi- négligeable. Dans le cas particulier des revêtements
nent pour former une roche de talc : la stéatite composites à base de particules « lubrifiantes » et
(figure 2). Il n’existe pas de gisements où le talc est réfractaires comme le talc, les potentialités d’applica-
pur car il est très souvent associé avec d’autres miné- tions sont importantes dans les ensembles mécani-
raux tels que la chlorite, pyrite, carbonates non trans- ques dynamiques fonctionnant à haute température
formés, etc, ces minéraux nuisant à la qualité du (motorisation aéronautique, production énergétique),
minerai et interdisant certaines applications. Le talc le talc étant stable jusqu’à 950  C. Le programme de
est ensuite broyé pour être utiliser dans les diverses recherche « élaboration et caractérisation de revête-
applications industrielles. La taille granulométrique la ments composites nickel-phosphore-talc » offre des
plus fine obtenue après broyage est de l’ordre du perspectives très intéressantes pour l’obtention de
micromètre. En effet, l’aspect lamellaire dû à sa struc- revêtements aux propriétés d’usages originales dont
ture cristalline en feuillets interdit l’obtention de parti- l’intérêt industriel est souligné par la volonté de
cules inférieures au micron quel que soit le type de rechercher des solutions de substitution aux revête-
broyage et quel que soit le temps de broyage ; d’ail- ments polluants (chrome et cadmium). De plus, un
leurs, un temps de broyage trop long « amorphise » le des composites de référence en matière de dépôts
talc qui perd certaines de ses propriétés comme la (Ni-SiC), utilisés par les constructeurs automobiles
blancheur (teinte grise après long broyage) et ses pour revêtir les moteurs à explosion (propriétés anti-
propriétés lubrifiantes interdisant toute application abrasives liées à la dureté des particules de SiC), ainsi
comme en cosmétique. que des revêtements élaborés pour leurs propriétés
De plus, il est très difficile d’obtenir des classes gra- de lubrification (incorporation de MoS2 et de PTFE
nulométriques resserrées (figure 3), ce qui nuit dans des matrices nickel), ne présentent des domai-
notamment à l’insertion et à la bonne cohésion des nes d’utilisation en température que très restreints
matériaux composites dans lesquels il est utilisé en avec un maximum de 250  C. Pour cette raison, il est
tant que charge minérale. Ce problème majeur est le évident, connaissant parfaitement les propriétés lubri-
préambule du travail mené depuis deux ans sur les fiantes du talc et sa solidité structurale en tempéra-
nanoparticules de talc. ture (950  C), qu’une étude de son insertion dans
des revêtements de grande dureté (Ni ou NiP), a été
un enjeu majeur industriel afin d’obtenir des maté-
2. Du talc naturel micronique riaux composites à propriétés lubrifiantes hautes tem-
pératures. Les résultats obtenus ont permis de mettre
au nanotalc synthétique en évidence que l’introduction des particules de talc
Dans un souci d’ouverture vers de nouveaux maté- jusqu’à 40 % dans la matrice Ni-P n’abaisse pas la
riaux composites insérant du talc dans leur formula- dureté de la matrice, améliore les propriétés antiabra-
tion et tenant compte du contexte industriel de la sives des revêtements et abaisse le coefficient de frot-
région Midi-Pyrénées, une étude a été entreprise sur tement avec des valeurs proches de celle de MOS2.

IN 74 - 2 © Editions T.I. 7 - 2008

104
Lubrification
(Réf. Internet 42465)

1– Théorie de la lubrification

2– Butées et paliers lubrifiés

3– Lubrifiants liquides, solides et additifs


4
4– Lubrifiants pour moteurs Réf. Internet page

Lubrifiants pour moteurs thermiques. Normes générales BM2750 107

Lubrifiants pour moteurs thermiques. Spécifications des constructeurs BM2751 111

Lubrifiants pour moteurs thermiques. Marché et consommation BM2752 113

 Sur www.techniques-ingenieur.fr
• Saisissez la référence Internet pour accéder directement aux contenus en ligne
• Retrouvez la liste complète des ressources documentaires

105
4

106
Référence Internet
BM2750

Lubrifiants pour moteurs thermiques


Normes générales
par Jean AYEL
Professeur honoraire à l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs

1. Contraintes imposées aux lubrifiants ................................................ BM 2 750 – 2


2. Organismes de normalisation............................................................... — 3
3. Classification SAE .................................................................................. — 3
4. Spécifications européennes ACEA .................................................... — 6

4
4.1 Spécifications CCMC ................................................................................... — 6
4.2 Spécifications ACEA .................................................................................... — 7
4.2.1 Spécifications ACEA de 1996............................................................. — 7
4.2.2 Codes de pratique ATIEL et ATC........................................................ — 7
4.2.3 Spécifications ACEA de 1998 ............................................................ — 7
4.2.4 Spécifications ACEA de 1999............................................................. — 8
4.2.5 Spécifications ACEA de 2002............................................................. — 8
5. Classifications API................................................................................... — 11
5.1 Classifications API pour les moteurs à essence (catégories « S ») ......... — 12
5.2 Classifications API pour les moteurs Diesel (catégories « C ») ............... — 12
5.3 Système de certification API et code de pratique CMA ........................... — 13
5.4 Labels « économie d’énergie » API ............................................................ — 14
6. Classifications ILSAC.............................................................................. — 16
7. Conclusion ................................................................................................. — 16
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. BM 2 750

’une manière générale, les huiles pour moteurs répondent à des classifica-
D tions, à des spécifications et à des cahiers des charges émanant d’organis-
mes nationaux ou internationaux, de constructeurs de véhicules automobiles ou
de moteurs industriels et, parfois, de grands utilisateurs comme les armées
nationales ou les grandes administrations. Ces documents sont destinés soit à
homologuer (normes), soit à qualifier (classifications) les produits.
On distingue les classifications des spécifications ou cahiers des charges :
— les premières sont données à titre informel et n’ont pas un caractère obliga-
toire ; elles ne constituent que des recommandations d’emploi ;
— les secondes, en revanche, présentent un certain caractère « législatif »
puisque les constructeurs ou les organismes d’utilisateurs les intègrent dans
leurs préconisations.
Dans cet article, nous allons présenter les classifications et les spécifications
des organismes. Celles émanant des constructeurs seront données dans l’article
[BM 2 751].

Cette étude concernant les lubrifiants pour moteurs thermiques se compose de trois parties :
— [BM 2 750] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Normes générales
— [BM 2 751] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Spécifications des constructeurs
— [BM 2 752] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Marché et consommation.
Parution : juillet 2003

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique BM 2 750 − 1

107
Référence Internet
BM2750

LUBRIFIANTS POUR MOTEURS THERMIQUES ________________________________________________________________________________________________

1. Contraintes imposées adhésive des organes de distribution, pour l’usure corrosive des
cylindres et pour la formation de boues capables d’engluer les par-
aux lubrifiants ties les plus froides du moteur.
■ Développement d’huiles dites « économiseuses »
Elles sont de plus en plus fluides, comme des huiles de grades
De tous les mécanismes, les moteurs thermiques alternatifs sont, SAE 0W-30 et même 0W-20 par exemple, qui permettent, par réduc-
sans nul doute, les plus difficiles à lubrifier. En effet, ces machines tion des pertes par frottement, d’économiser un peu de carburant
renferment pratiquement tous les composants mécaniques exis- tout en facilitant les démarrages à froid. En revanche, l’emploi d’hui-
tants : guidages linéaires pistons-cylindres et tiges de soupapes-gui- les trop fluides risque de se traduire par des fragilités de film d’huile
des de soupapes, paliers cylindriques lisses, butée, ensembles pouvant entraîner de l’usure, par des pertes par évaporation des
cames-poussoirs ou cames-patins de basculeurs, engrenages, chaî- fractions volatiles de l’huile de base et par une plus grande sensibi-
nes-roues dentées, roulements à billes ou à rouleaux, systèmes lité à la thermo-oxydation.
hydrauliques de rattrapage de jeu et actionneurs de déphasage
d’arbre à cames, pompes à huile, clapets, etc. De plus, ces divers ■ Réduction des émissions de polluants à l’échappement
organes fonctionnent dans des conditions tribologiques extrême- Cette réduction impose de nouvelles contraintes aux huiles telle
ment variables. Les pressions de contact peuvent atteindre 1 GPa, la réduction de la teneur en éléments susceptibles d’empoisonner
les vitesses de glissement varient de zéro à plusieurs dizaines de les catalyseurs des pots d’échappement : phosphore de l’additif
mètres par seconde et les températures d’huile se situent entre la antiusure, soufre des huiles de base, des additifs antiusure et déter-
température ambiante (pouvant descendre jusqu’à – 35 °C) et des gents, chlore de certains additifs dispersants, etc. De même, la pré-
valeurs pouvant atteindre 300 °C dans les parties les plus chaudes sence de baryum provenant d’additifs détergents de conception
du moteur. On rencontre donc, dans les moteurs, tous les régimes ancienne est interdite. De plus, la dépollution des moteurs impli-
de lubrification (hydrodynamique, élastohydrodynamique, limite et quant une combustion en mélange pauvre, plus chaude et plus riche

4 mixte) entre des surfaces en contact surfacique ou hertzien soumi-


ses à un mouvement alternatif, rotatif continu ou oscillant.
Les conditions d’ambiance sont quelquefois poussiéreuses, donc
en oxydes d’azote, aggrave l’oxydation de l’huile par un mécanisme
de nitro-oxydation.
Les nouveaux systèmes d’injection directe des moteurs Diesel
abrasives (engins de travaux publics, matériels agricoles, pistes non donnent lieu à une modification de la nature et de la structure des
revêtues…) et toujours corrosives à cause de la combustion des particules de suie qui peut entraîner des problèmes de dispersion et
hydrocarbures et autres composés du carburant générant des pro- d’usure. Sur ces mêmes moteurs, la généralisation de la recircula-
duits acides d’oxydation, de l’eau, des oxydes d’azote et autres déri- tion des gaz d’échappement (EGR) accroît la tendance à l’oxydation
vés nitrés, des composés soufrés si le carburant renferme cet de l’huile et à la formation de dépôts.
élément, etc. Une faible partie des gaz brûlés passe de la chambre ■ Simplification et rationalisation du graissage des véhicules
de combustion dans le carter d’huile et dans les parties lubrifiées du
moteur en traversant la segmentation, jamais parfaitement étanche. Ces deux contraintes entraînent le développement d’huiles mix-
Ces gaz, que l’on appelle gaz de blow-by, entrent en contact intime tes essence- Diesel, d’huiles multifonctionnelles pour les matériels
avec l’huile et accélèrent fortement sa dégradation par oxydation, agricoles et de travaux publics. Or, les exigences de lubrification
nitro-oxydation et déplétion d’additifs. aussi différentes – et souvent contradictoires – des moteurs Diesel
suralimentés, des transmissions chargées avec organes de friction
Ce sont bien ces conditions tribologiques difficiles qui font que les immergés et des circuits hydrauliques compliquent sérieusement la
huiles pour moteurs sont des produits de haute technologie, aux tâche du formulateur du fluide unique.
fonctions multiples, qui doivent sans cesse s’adapter aux progrès
techniques et aux évolutions des contraintes environnementales, ■ Recherche d’un meilleur agrément de conduite des véhicules
pour offrir, à leurs utilisateurs, des moteurs plus sobres, moins pol- Cela se traduit par la formulation de produits plus fluides à basses
luants, plus fiables, plus durables tout en étant plus performants en températures, et contenant des additifs réducteurs de frottement
termes de puissance et surtout de couple moteur spécifique et, pour démarrer plus facilement à froid, ou d’huiles multiusages
enfin, plus faciles d’entretien. contenant des additifs modificateurs de frottement pour éviter le
Ces évolutions conduisent toutes à un accroissement des phénomène de stick-slip (ou frottement saccadé), générateur de
contraintes imposées au lubrifiant. bruit et de vibrations.
■ Augmentation sensible des températures d’huile ■ Évolution des carburants
150 °C, voire 170 °C, sont des températures moyennes que l’on La diminution de la teneur en soufre des gazoles, la suppression
rencontre de plus en plus souvent dans les carters et 270 °C, voire du plomb dans les essences, le développement des carburants
300 °C, sont des températures ponctuelles pouvant être atteintes gazeux (GPL, GNV) peuvent donner lieu, dans certains cas, à des
dans des zones critiques comme le fond de première gorge de seg- problèmes aggravés d’usure ou d’oxydation.
ment ou le palier du turbocompresseur côté turbine. Il en résulte, ■ Évolution des matériaux et de la technologie des moteurs
outre une oxydation accélérée de l’huile (la vitesse d’oxydation des
hydrocarbures double tous les 10 K), des risques de défaillance gra- Cette évolution fait apparaître de nouvelles contraintes pour le
ves comme l’usure adhésive sévère (grippage) des segments, des lubrifiant. Ainsi, comme il a été dit précédemment, la recirculation
paliers ou des organes de distribution à cause d’une trop faible vis- des gaz d’échappement augmente la pollution de l’huile. L’injection
cosité du film d’huile. Il peut aussi en résulter l’encrassement directe d'essence provoque un lavage des soupapes et un moindre
d’organes par des dépôts carbonés comme le gommage des seg- refroidissement du mélange carburé. Le montage de plus en plus
ments, le blocage du circuit d’huile des turbocompresseurs, la for- fréquent de poussoirs hydrauliques pose le problème de l’aération
mation de dépôts sur les cordons de feu des moteurs Diesel de l’huile. L’adoption de nouveaux matériaux tels que les métaux
entraînant de l’usure par polissage des cylindres, etc. frittés pour les cames ou les sièges de soupapes ou encore les revê-
tements à base de céramiques déposés par plasma sur les seg-
■ Conditions de circulation des véhicules plus sévères ments de feu peut donner lieu, avec l’huile lubrifiante, à des
Ces conditions sont devenues plus sévères à cause de l’extension comportements tribologiques différents de ceux observés avec les
des réseaux autoroutiers et, surtout, des difficultés croissantes du matériaux traditionnels.
trafic urbain induisant des phases de fonctionnement à froid alter- Malgré toutes ces nouvelles contraintes, sous la pression de la
nant avec des phases de fonctionnement à chaud mais à vitesse concurrence, les constructeurs d’automobiles et de moteurs indus-
modérée. Ces conditions sont d’une extrême sévérité pour l’usure triels allongent sans cesse, souvent exagérément, les intervalles de

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_______________________________________________________________________________________________ LUBRIFIANTS POUR MOTEURS THERMIQUES

vidange qui, au début des années 2 000, atteignaient 30 000 km, ■ Les grandes administrations ont quelquefois établi des spécifica-
voire même 40 000 km pour les moteurs à essence, jusqu’à tions d’huiles moteurs pour leurs propres besoins ; c’est ainsi le cas,
20 000 km pour les moteurs Diesel à injection indirecte, 30 000 km et en France, du Groupement permanent d’étude des marchés (GPEM)
même 50 000 km chez certains constructeurs, pour les moteurs Die- du ministère de l’Économie et des Finances. Mais ces dernières spé-
sel à injection directe de véhicules de tourisme et utilitaires légers. cifications, en vigueur il y a quelques années, ne sont plus guère sui-
Les espacements de vidange des moteurs Diesel de véhicules indus- vies depuis l’apparition des spécifications ACEA (à partir de 1998)
triels suivent la même évolution puisque, à la même période, ils qui semblent satisfaire les exigences de l’administration.
étaient compris entre 40 000 et 160 000 km selon la technologie du Toutes les normes établies par ces organismes sont en constante
moteur et surtout selon la nature du service. Bien sûr, ces espace- évolution du fait, à la fois, des progrès technologiques réalisés dans les
ments sont associés à des améliorations apportées aux circuits de moteurs et de la prise en compte de plus en plus grande des exigences
graissage (filtration plus efficace, capacité d’huile accrue, refroidis- environnementales. Ainsi, il n’est pas rare de voir ces spécifications
sement de l’huile…) ainsi qu’à l’implantation d’indicateurs de remises à jour tous les deux ans et, quelquefois même, tous les ans !
vidange au tableau de bord.
Devant satisfaire toutes ces exigences, souvent contradictoires,
les huiles pour moteurs sont des produits de plus en plus sophisti-
qués dont la mise au point exige des efforts de recherche longs et
coûteux effectués sur du matériel lourd (les bancs d’essais moteurs)
3. Classification SAE
qui doit sans cesse être renouvelé.
Pour une revue générale sur les caractéristiques des lubrifiants, le Cette classification de viscosité, d’usage universel, prend en
lecteur se reportera dans ce traité aux articles [B 5 340] à [BM 5 344], compte différents critères de viscosité à froid et à chaud. Remontant
références [1][2][3][4]. à 1911, elle évolue régulièrement pour s’adapter aux exigences
d’opérabilité à froid et de sécurité à chaud des moteurs.

2. Organismes
La version de fin 1999 (SAE J300 DEC99), en vigueur en 2003, défi-
nit onze grades de viscosité (tableau 1).
■ Grades « hiver »
4
de normalisation Au nombre de six, notés « W » (de l’abréviation anglaise « Winter »),
ils sont caractérisés par deux viscosités mesurées à basse température.
Les huiles pour moteurs sont définies par les classifications et La première représente la viscosité de démarrage à froid. Elle est
spécifications des organismes suivants. mesurée sur un viscosimètre dynamique rotatif appelé « Cold Cran-
king Simulator » (CCS) ou « simulateur de démarrage à froid »
■ L’Association des constructeurs européens d’automobiles (figure 1) qui simule le fort cisaillement de l’huile dans les paliers
(ACEA), pour l’Europe, a remplacé, en 1991, le Comité des construc- lors de la phase d’entraînement du vilebrequin par le démarreur.
teurs du marché commun (CCMC) et promulgue, en moyenne tous Selon la méthode d’essai normalisée ASTM D 5293, la viscosité de
les deux ans, des spécifications comportant des séquences d’essais démarrage à froid est mesurée par comparaison avec celles d’huiles
de laboratoire et sur bancs moteur, pour les moteurs à essence et étalons de viscosités dynamiques connues à des températures sta-
Diesel de véhicules automobiles légers (VT et VUL) et pour les bilisées allant de – 35 °C pour les huiles de grade 0W à – 10 °C pour
moteurs Diesel de véhicules industriels (poids lourds, autobus, les huiles 25W et augmentant de 5 en 5 °C d’un grade à l’autre. Pour
engins de travaux publics et agricoles, moteurs industriels…). chaque grade « W », la viscosité mesurée au CCS ne doit pas excé-
der l’une des valeurs données dans le tableau 1.
■ La Society of Automotive Engineers (SAE), aux États-Unis, propose,
La seconde, ou viscosité de pompabilité à froid, est effectuée sur un
depuis 1911, une classification basée sur les viscosités à froid et à
autre viscosimètre rotatif à cylindres coaxiaux dénommé « Mini Rotary
chaud des huiles. Cette classification est utilisée dans le monde entier.
Viscometer » (MRV) ou « miniviscosimètre rotatif » (figure 2), après un
■ L’American Petroleum Society (API), aux États-Unis, publie, cycle de refroidissement lent de 48 h. Elle donne la valeur maximale de
depuis 1947, des classifications de service qui, au départ, étaient de la viscosité dynamique, sous très faible vitesse de déformation, pour
simples recommandations et qui, par la suite, sont devenues prati- laquelle le lubrifiant peut être véhiculé par la pompe à huile dans toutes
quement de véritables spécifications. Elles concernent les huiles les parties du circuit de graissage pour des températures s’échelonnant
pour moteurs à essence (catégories « Sx ») ainsi que les huiles pour de 5 en 5 °C, depuis – 40 °C pour les huiles de grade 0W, jusqu’à – 15 °C
moteurs Diesel (catégories « Cx »). pour les huiles 25W. Le principe de la mesure est simple : on applique
sur l’axe du rotor du viscosimètre MRV un couple correspondant à la
■ L’International Lubricant Standardization and Approval Commit- viscosité dynamique de 60 000 mPa.s, puis, en partant de la plus basse
tee (ILSAC) ne concerne que des huiles destinées aux moteurs à température prévue par la méthode d’essai ASTM D 4684, on réchauffe
essence. Sa spécification, établie conjointement par les États-Unis l’huile progressivement. On note la température à laquelle le rotor
et le Japon, ne rencontre guère d’échos en Europe. commence à tourner sous l’effet du couple ; elle est appelée
■ Les grands constructeurs d’automobiles et de moteurs indus- « température limite de pompabilité » (TLP). On vérifie également, sur
triels, en Europe, se basent sur les spécifications ACEA en y ajoutant cet appareil, que l’huile ne donne pas lieu à un seuil d’écoulement
des exigences spécifiques sous forme d’essais physico-chimiques, (yield value), qui caractériserait un comportement rhéologique à froid
mécaniques et moteurs complémentaires. Les constructeurs japo- de type plastique. De plus, pour que les huiles « W » monogrades
nais agissent de même à partir des spécifications américaines API (exemple : SAE 10W) ne soient pas formulées avec des huiles de base
et/ou JAMA (Japan Automobile Manufacturers Association) tandis trop fluides à chaud, la classification SAE leur impose une viscosité
que les constructeurs américains, d’une manière générale, adoptent cinématique minimale mesurée selon la méthode ASTM D 445.
les classifications de service de l’API. Seuls certains constructeurs ■ Grades « été »
de véhicules industriels comme Mack possèdent des spécifications
Au nombre de cinq, ils sont désignés par les chiffres symboles 20,
propres.
30, 40, 50 et 60 et caractérisés par deux mesures de viscosité à chaud.
■ Les armées nationales ainsi que l’OTAN établissent des spécifica- L’une, la viscosité cinématique, est effectuée à 100 °C, sous faible
tions dont les plus connues sont celles de l’armée américaine (spé- vitesse de déformation, à l’aide du viscosimètre à tube capillaire de
cifications US Army MIL-L-… ou MIL- PRF-…). L’armée française la méthode ASTM D 445. Pour chaque grade, la viscosité cinémati-
possèdent ses propres spécifications établies par la Direction cen- que doit être comprise entre une valeur minimale et une valeur
trale du service des essences des armées (DCSEA). maximale données dans le tableau 1 (p. 5).

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Moteur à couple constant N = 3 000 tr/min

Thermocouple
Poulies Couplemètre

Fluide
caloporteur

h
Tachymètre

Rotor Arbre flexible


Stator Fluide de refroidissement Film d'huile
Rotor
Stator

Méplats pour former un


« coin » hydrodynamique

4
et centrer le rotor
Arrivée de
l'échantillon
d'huile

Figure 1 – Schéma du principe du viscosimètre CCS


Figure 3 – Principe du viscosimètre rotatif HTHS Ravenfield

Sur le viscosimètre rotatif Ravenfield (figure 3) d’origine euro-


péenne, la mesure de viscosité HTHS est faite conformément à la
méthode européenne CEC L-36-A-90 ou à son équivalente américaine
ASTM D 4741. Sur le viscosimètre rotatif TBS (abréviation de Tapered
Bearing Simulator), d’origine américaine, la mesure est effectuée selon
la méthode ASTM D 4683 tandis que le troisième appareil, également
d’origine américaine, est un viscosimètre multicellulaire à tubes
capillaires sous pression utilisé conformément à la méthode ASTM D
5481. Les viscosités dynamiques HTHS des huiles moteurs doivent être
supérieures ou égales aux valeurs minimales allant de 2,6 mPa.s pour
les huiles de grade SAE 20 à 3,7 mPa.s pour les huiles de grades 40
Rayon de l'axe : 3,18 mm
visqueuses à froid, 50 et 60 en passant par la valeur de 2,9 mPa.s pour
les huiles de grades 30 et 40 fluides à froid (cf. tableau 1). Cette exi-
gence de viscosité à haute température et haut cisaillement a été spé-
cifiée, en premier lieu, par les constructeurs automobiles européens
Huile (Volkswagen notamment), dès le début des années 1980, pour s’assu-
rer que, dans les conditions de fonctionnement les plus sévères ren-
contrées dans les paliers de moteurs, les épaisseurs de film d’huile,
donc les viscosités HTHS, étaient suffisantes pour éviter tous risques
Bloc à
de contact métal-métal pouvant entraîner des usures sévères, voire
température
régulée
des grippages de surfaces frottantes. La viscosité HTHS minimale
Rotor imposée par l’ensemble des constructeurs et des grands utilisateurs
Poids européens étaient alors de 3,5 mPa.s quel que soit le grade de viscosité
SAE. Le CCMC avait d’ailleurs introduit cette exigence, dès décembre
1983, dans sa spécification FL/28/83 concernant les huiles pour
Rayon du rotor : 8,5 mm moteurs à essence G1, G2 et G3. (0)

Hauteur du rotor : 20 mm Le besoin de mesurer la viscosité dynamique sous fort cisaille-


Rayon de la cellule : 9,5 mm ment, c’est-à-dire dans les conditions existant à grande vitesse dans
les films d’huile des organes des moteurs (paliers, contacts pistons-
segments/cylindres, organes de distribution, etc.), a été justifié par le
Figure 2 – Schéma de principe du miniviscosimètre rotatif MRV développement d’huiles multigrades de plus en plus fluides. Or, ces
huiles sont formulées avec des huiles de base fluides additionnées de
L’autre est une mesure de viscosité dynamique effectuée à haute polymères améliorant l’indice de viscosité dont le rôle est d’augmen-
température (150 °C) et sous vitesse de déformation très élevée ter beaucoup plus la viscosité à chaud de l’huile par un effet d’encom-
(U/h = 106 s–1), sur un des trois viscosimètres normalisés HTHS brement stérique que la viscosité à froid. Mais cet épaississement à
(abréviation de l’anglais High Temperature High Shear : haute tem- chaud, effectif lorsque l’huile est au repos ou n’est soumise qu’à de
pérature, haut cisaillement). faibles vitesses de déformation, diminue de façon plus ou moins
importante, selon la structure chimique du polymère, lorsque la
Nota : la vitesse de déformation : (dU/dh) ou (U/h) avec U vitesse, h épaisseur du film
d’huile de la relation de Newton, est souvent désignée, de manière impropre, « taux de vitesse de déformation dépasse 103 ou 104 s–1. La viscosité tend vers
cisaillement » ou encore « gradient de vitesse ». une valeur asymptotique pour des valeurs de U/h atteignant 106 s–1.

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Lubrifiants pour moteurs thermiques


Spécifications des constructeurs
par Jean AYEL
Professeur honoraire à l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs

1. Constructeurs de véhicules automobiles européens..................... BM 2 751 - 2


1.1 Cas des moteurs de véhicules de tourisme et utilitaires légers .............. — 2
1.1.1 Spécifications PSA Peugeot-Citroën ................................................. — 2
1.1.2 Spécifications Renault Automobiles ................................................. — 3
1.1.3 Spécifications VW + Audi................................................................... — 3
1.1.4 Spécifications DaimlerChrysler (ex-Mercedes-Benz)....................... — 4

4
1.1.5 Autres spécifications .......................................................................... — 4
1.2 Cas des moteurs de véhicules utilitaires ................................................... — 4
2. Constructeurs de véhicules automobiles américains.................... — 7
3. Spécifications militaires ........................................................................ — 7
3.1 Spécifications militaires américaines ........................................................ — 7
3.2 Spécifications militaires françaises............................................................ — 7
4. Spécifications des huiles pour moteurs 2 temps ........................... — 7
4.1 Particularités des moteurs 2 temps............................................................ — 7
4.2 Classifications et spécifications des huiles 2 temps ................................. — 8
5. Conclusion ................................................................................................. — 8

es constructeurs de véhicules automobiles de tourisme et utilitaires, ainsi


L que ceux de groupes générateurs d’énergie, établissent pour les huiles des-
tinées soit au premier plein, soit au remplissage en service des carters de leurs
moteurs, des spécifications régulièrement remises à jour. Celles-ci servent, à la
fois, à l’homologation des huiles proposées par l’industrie des lubrifiants
(huiles de « première monte » et huiles de service) et aux préconisations des-
tinées aux utilisateurs de moteurs et contenues dans les livrets ou manuels
d’entretien (huiles de service).
Ces spécifications sont destinées à garantir aux utilisateurs des véhicules et
des matériels des qualités d’huiles satisfaisant, dans toutes les conditions d’uti-
lisation et durant tout l’intervalle de vidange, les diverses exigences de grais-
sage des moteurs : protection contre l’usure et l’encrassement par les dépôts
formés à haute (vernis d’oxydation, dépôts carbonés durs) ou à basse tempé-
rature (boues), facilité de démarrage et bonne pompabilité à froid, réductions
des pertes par frottement, protection contre la rouille et les corrosions acides,
non moussage et désaération rapide, absence d’attaque des matériaux orga-
niques présents dans les moteurs (élastomères des joints, plastomères, pein-
tures, etc.).
Dans leurs normes, les constructeurs demandent, en premier lieu, que les hui-
les satisfassent les spécifications des organismes internationaux tels que l’ACEA
(Association des constructeurs européens d’automobiles) en Europe ou l’API
(American Petroleum Institute) aux États-Unis et que, en second lieu, elles
répondent à des exigences particulières propres à chaque type de matériel. Ces
exigences supplémentaires, surtout imposées par les constructeurs européens
– les constructeurs américains se satisfont, presque toujours, des spécifications
Parution : octobre 2003

de l’API pour tous les moteurs et de l’ILSAC pour les moteurs à essence – se
traduisent par la satisfaction d’essais physico-chimiques et d’essais moteurs

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LUBRIFIANTS POUR MOTEURS THERMIQUES ________________________________________________________________________________________________

spécifiques dont la liste est quelquefois assez impressionnante (cas de


Volkswagen, par exemple).
En plus des normes des constructeurs, le présent article traite aussi de quelques
spécifications militaires américaines et françaises ainsi que des spécifications des
huiles pour moteurs à deux temps à allumage commandé.

Cette étude concernant les lubrifiants pour moteurs thermiques se compose de trois parties :
— [BM 2 750] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Normes générales ;
— [BM 2 751] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Spécifications des constructeurs ;
— [BM 2 752] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Marché et consommation.

1. Constructeurs de véhicules Encadré 1


automobiles européens La formulation des huiles pour moteurs de véhicules légers
européens répond aux besoins suivants :

4
Les normes générales émanant des grands organismes (SAE, — économie de carburant :
ACEA, API, ILSAC) et citées dans cet article ont été traitées dans ● grades de viscosité plus bas : 5W-30 → 0W-30 → 5W-20 ?
l’article [BM 2 750] de ce traité, auquel le lecteur pourra se reporter. ● viscosité HTHS plus faible : ≈ 3 mPa · s (minimum : 2,9 mPa · s)
(cf. [BM 2 750], § 3),
Les constructeurs européens intègrent tous, dans leurs spécifi- ● utilisation plus importante d’additifs réducteurs de
cations ou cahiers des charges d’huiles pour moteurs, les séquen- frottement ;
ces ACEA (cf. article [BM 2 750]). La plupart exige aussi un niveau
— intervalles de vidange allongés :
minimal API, notamment pour les marchés hors Europe. Ils y ajou-
● huiles de base plus stables à l’oxydation,
tent, pratiquement toujours, des exigences spécifiques sous forme
● teneur en additifs détergents-dispersants-antioxydants plus
de performances minimales à satisfaire en essais physico-chimi-
ques, mécaniques et sur moteurs. Dans certains cas (Scania LDF, élevée,
● conservation des performances des additifs antiusure, réduc-
Volvo VDS-3 ), cela peut aller jusqu’à des essais de 240 000 à
300 000 km sur véhicules industriels en service réel. teurs de frottement durant de longues périodes ;
Jusqu’à l’an 2000, les spécifications les plus suivies étaient celles — généralisation des moteurs à injection directe haute pression :
de Volkswagen pour les véhicules légers et celles de DaimlerChrys- ● contrôle des dépôts à chaud : bases et additifs [AVI
ler (ex. Mercedes-Benz), Volvo et MAN pour les véhicules indus- (améliorant d’indice de viscosité VI), RF (additif réducteur de
triels. frottement)...] plus stables thermiquement,
● huiles de base moins volatiles : Noack < 13 % et même
< 11 ou 10 %.
1.1 Cas des moteurs de véhicules
de tourisme et utilitaires légers API CF satisfaisant des essais spécifiques PSA. Auparavant, elles
répondaient à la spécification ACEA B1-98 avec les performances de
Les tendances en matière de performances et de formulation des l’ACEA B3-98, de l’API CF et de PSA.
huiles pour moteurs de véhicules légers européens sont résumées ● Le niveau 1 correspond à des huiles standards à base minérale
en encadré 1. de niveau ACEA A2 + API SJ ou SL + essais PSA pour les moteurs à
essence et de niveau ACEA B2 + API CF + essais PSA pour les
moteurs Diesel.
1.1.1 Spécifications PSA Peugeot-Citroën
● Le niveau 2 est relatif à des huiles à bases améliorées, partielle-
Pratiquement chaque année, PSA Peugeot-Citroën met à jour ses ment synthétiques ou hydrotraitées ACEA A3 + API SJ ou SL +
séquences d’approbation des huiles moteurs. Elles s’appuient sur essais PSA pour les moteurs à essence et ACEA B3 + API CF + essais
les spécifications de l’ACEA et de l’API et imposent des caractéris- PSA pour les moteurs Diesel.
tiques physico-chimiques ainsi que des performances minimales ● Le niveau 3 concerne des huiles à bases entièrement
obtenues sur simulateurs de laboratoire et sur moteurs. synthétiques, de mêmes performances minimales ACEA et API que
■ Pour les huiles de service, elles sont au nombre de huit : quatre les huiles de niveau 2. Cependant, leur tenue à l’oxydation est
pour les moteurs à essence, désignées PSA E-xx et quatre pour les supérieure.
moteurs Diesel de véhicules légers, désignées PSA D-xx (xx est Pour les trois niveaux, les grades de viscosité SAE recommandés
l’année de publication de la séquence d’approbation), suivies de sont donnés en fonction d’un classement climatique des pays : très
« Économie d’énergie », « Niveau 1 », « Niveau 2 », ou « Niveau 3 » froids, froids, tempérés, chauds et très chauds. La figure 1 schéma-
(exemple « PSA E-02 Niveau 2 »). tise ces recommandations.

■ Les huiles « Économie d’énergie » sont, depuis 2002, pour les ■ Il existe, de plus, des spécifications d’huiles mixtes essence et
moteurs à essence, des huiles fluides ACEA A5-02 devant satisfaire, Diesel de premier plein, pour maintenance allégée et économie de
en plus, les exigences de l’API SJ ou SL et d’une séquence d’essais carburant. L’une, désignée MA3/ECO 00, est une 5W-30, possédant
spécifiques PSA. Avant 2002, c’étaient des huiles ACEA A1-98 avec les performances cumulées ACEA A1 + A3 + B1 + B3 et API SJ + CF.
performances de l’ACEA A3, de l’API S ou SL et de PSA. Pour L’autre, désignée MA2, est une 10W-40 de niveaux de performances
les moteurs Diesel, ce sont, depuis 2002, des huiles ACEA B5-02 + ACEA A3 + B3 et API SH/CF.

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BM2752

Lubrifiants pour moteurs thermiques


Marché et consommation
par Jean AYEL
Professeur honoraire à l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs

1. Quelques données statistiques sur les huiles pour moteurs....... BM 2 752 - 2


1.1 Marché français ........................................................................................... — 2
1.2 Union européenne....................................................................................... — 3
1.3 Distribution................................................................................................... — 4
2. Répartition des huiles moteurs selon leurs catégories................. — 4

4
2.1 Cas des huiles pour moteurs de véhicules légers .................................... — 4
2.1.1 Répartition en fonction du grade SAE de viscosité ......................... — 4
2.1.2 Répartition en fonction du niveau de performance ACEA .............. — 5
2.2 Cas des huiles pour moteurs Diesel de véhicules utilitaires.................... — 6
2.2.1 Répartition en fonction du grade SAE de viscosité ......................... — 6
2.2.2 Répartition en fonction du niveau de performance ACEA .............. — 6
3. Consommations comparées d’huiles moteurs et de carburant.. — 7
Conclusion .......................................................................................................... — 7

our situer l’importance économique des lubrifiants pour moteurs ther-


P miques, il convient de préciser que la consommation mondiale annuelle
des lubrifiants toutes catégories représente un peu plus de 1,1 % de la
consommation mondiale de pétrole, soit quelque 38 ou 39 millions de tonnes.
Le plus gros consommateur mondial reste les États-Unis avec environ
8,5 millions de tonnes à la fin des années 1990 et au début des années 2000,
dont environ 4,3 millions de tonnes, soit 49 à 50 % du total, pour les seules huiles
moteurs. L’Union européenne se place en seconde position avec une
consommation totale de près de 5 millions de tonnes dont 40 à 42 % sont des
huiles pour moteurs. Au plan national, la consommation totale annuelle de lubri-
fiants se situait, durant la même période, entre 840 000 et 890 000 tonnes.
Cet article présente essentiellement l’aspect économique et commercial du
marché intérieur français des huiles pour moteurs.

Cette étude concernant les lubrifiants pour moteurs thermiques se compose de trois parties :
— [BM 2 750] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Normes générales ;
— [BM 2 751] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Spécifications des constructeurs ;
— [BM 2 752] Lubrifiants pour moteurs thermiques. Marché et consommation.
Parution : octobre 2003

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© Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique BM 2 752 − 1

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Référence Internet
BM2752

LUBRIFIANTS POUR MOTEURS THERMIQUES ________________________________________________________________________________________________

1. Quelques données d’huile (segmentations et joints plus étanches, refroidissement de


l’huile...) et surtout d’espacement de vidange. Les autres sont à
statistiques sur les huiles mettre au compte des fournisseurs d’huiles et d’additifs pour lubri-
fiants qui mettent sur le marché des lubrifiants de moins en moins
pour moteurs volatils, donc se consommant moins, et de plus en plus perfor-
mants en tenue à l’oxydation, en détergence, en dispersivité et en
pouvoir antiusure, ce qui permet d’allonger les intervalles de
vidanges.
1.1 Marché français Le tableau 1 montre l’évolution de la consommation intérieure
française des différentes catégories de lubrifiants automobiles et
Sur le marché français, les lubrifiants automobiles représen- d’huiles pour moteurs de 1998 à 2002 inclus. Les statistiques pré-
taient, en moyenne, entre 1998 et 2002, 53 % du total des lubri- sentées, provenant du Centre professionnel des lubrifiants (CPL),
fiants (tableau 1). La plus grande partie (43 à 45 %) de l’ensemble excluent les lubrifiants exportés ainsi que ceux destinés à l’avi-
des lubrifiants est celle des huiles pour moteurs, y compris les taillement sur le territoire national des navires et avions se livrant
huiles destinées aux moteurs industriels et aux moteurs d’avions. au transport international. L’ensemble des huiles pour moteurs se
Ayant atteint 60 % du total des lubrifiants au milieu des années stabilise un peu au-dessous de 45 %. Les huiles pour moteurs auto-
1960, la consommation française des huiles pour moteurs s’est mobiles représentent l’essentiel du marché avec 43 à 44 % du total.
longtemps maintenue autour de 50 % de la consommation totale Les moteurs d’avions (moteurs à pistons et turbines à gaz) ne
des lubrifiants. Depuis 1995, ce pourcentage diminue régulière- consomment qu’en moyenne 0,13 % des lubrifiants alors que la
ment pour se situer un peu au-dessous de 45 % à partir de 2000 consommation des huiles pour moteurs industriels fixes, autres
(figure 1). Malgré l’augmentation du trafic routier, cette chute est que les moteurs Diesel, c’est-à-dire essentiellement les moteurs à
due à plusieurs raisons. Les unes sont liées aux progrès réalisés gaz, après une période de croissance, semble se stabiliser un peu

4
par les constructeurs de moteurs en matière de consommation au-dessus de 0,40 %.

Tableau 1 – Marché intérieur français des lubrifiants automobiles et des huiles pour moteurs (en %) (1)
Années 1998 1999 2000 2001 2002
Tonnage tous lubrifiants................................................................(kt) 886 875 889 859 841
Total lubrifiants automobiles ........................................................(%) 54,44 53,79 52,04 53,00 53,55
Total huiles moteurs (automobiles + autres) ..............................(%) 45,92 45,17 43,32 44,47 44,85
Total huiles moteurs automobiles ......................(%) 45,55 44,67 42,79 43,89 44,31
● pour moteurs de VT et VUL (1)
(essence et Diesel)..........................................(%) 24,14 24,71 24,26 24,98 25,71
— pour moteurs à essence 4 temps
et mixte essence-Diesel...............................(%) 16,18 16,94 16,88 18,32 19,10
— pour moteurs Diesel tourisme (2)..............(%) 7,96 7,77 7,38 6,66 6,61
● pour moteurs Diesel utilitaires .....................(%) 17,43 16,21 15,05 15,68 15,25
● huiles multifonctionnelles (3) .......................(%) 2,91 2,72 2,52 2,35 2,47
Lubrifiants
automobiles (Total huiles pour moteurs Diesel (2)) ................(%) 28,30 26,70 24,95 24,69 24,33
● pour moteurs 2 temps ...................................(%) 1,07 1,03 0,96 0,88 0,88
Total lubrifiants de transmissions auto ..............(%) 6,98 7,25 7,52 7,35 7,50
● Huiles pour boîtes et ponts ...........................(%) 4,57 4,45 4,67 4,44 4,46
● Huiles de boîtes de vitesses automatiques
(« ATF ») (1).....................................................(%) 2,41 2,80 2,85 2,91 3,04
Liquides amortisseurs ..........................................(%) 0,74 0,81 0,70 0,75 0,75
Graisses automobiles...........................................(%) 1,17 1,06 1,03 1,01 0,99

Total autres huiles moteurs .................................(%) 0,37 0,50 0,53 0,58 0,54
Huiles ● Huiles pour moteurs d’avions ......................(%) 0,13 0,14 0,11 0,17 0,10
pour autres
moteurs ● Huiles pour moteurs industriels
autres (à gaz, etc) ...........................................(%) 0,24 0,36 0,42 0,41 0,44
(1) VT : véhicules de tourisme ; VUL : véhicules utilitaires légers ;
ATF : Automatic Transmission Fluid.
(2) Les huiles mixtes « essence et Diesel » pour véhicules légers, dont l’utilisation est croissante, sont comptabilisées avec les huiles pour moteurs à essence.
(3) Les huiles multifonctionnelles sont les huiles uniques des moteurs Diesel, transmissions et circuits hydrauliques des tracteurs et matériels agricoles et des
engins de génie civil.
Source : Centre professionnel des lubrifiants.

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