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MEDECINE/SCIENCES 2003 ; 19 : 327-36

Identifier et
comprendre
les allergies
> Les allergies médicamenteuses représentent une
médicamenteuses

REVUES
Pascal Demoly, Dominique Hillaire-Buys,
part non négligeable de la pathologie iatrogène. Nadia Raison-Peyron, Philippe Godard,
Leurs manifestations sont multiples, allant d’une François-Bernard Michel, Jean Bousquet
urticaire localisée au grand choc anaphylactique
ou au décollement cutané parfois mortels. Leurs
mécanismes sont variés et leurs diagnostics trop
rarement confirmés. Les réactions immédiates, de
type urticaire/angiœdème, par exemple, sont

SYNTHÈSE
souvent de mécanisme dépendant des Ige lors-
qu’elles sont de nature allergique. Les réactions
non immédiates, de type érythème maculo-papu-
leux par exemple, impliquent l’activation de lym- P. Demoly, N. Raison-Peyron,
phocytes T spécifiques lorsqu’elles sont de nature P. Godard, F.B. Michel,
J. Bousquet:
allergique. Il n’existe pas de réelles études épidé-
Maladies Respiratoires,
miologiques démonstratives ayant été complétées
Inserm U.454 - IFR3,
par un bilan allergologique. Or, de nombreuses Hôpital Arnaud de Villeneuve,
réactions revêtent les symptômes d’une allergie, Avenue Gaston Giraud,
mais ne sont pas de mécanisme allergique. La réa- 34295 Montpellier Cedex 05,
lisation d’un bilan exhaustif lors de ces réactions France.
permettrait d’améliorer nos connaissances sur férentiels). Les outils demoly@montp.inserm.fr
leur fréquence et leurs mécanismes. Cet article cliniques et biolo- D. Hillaire-Buys:
giques diagnostiques Centre Régional
analyse les études épidémiologiques incluant les
sont rares, et la plu- de Pharmacovigilance,
données d’incidence et de mortalité, et aborde les part non validés. Or, Hôpital Saint-Charles,
avancées récentes concernant la physiopathologie seul un diagnostic for- 34295 Montpellier Cedex 5,
et le diagnostic des allergies médicamenteuses. < mel d’allergie ou d’in- France.
tolérance médicamen-
teuse permet de mettre en place des mesures de préven-
tion et de traitement adaptées [2-4].
Devant l’impossibilité de détailler ici l’ensemble des
Les allergies et les intolérances médicamenteuses connaissances relatives aux allergies et intolérances
représentent un problème fréquent, presque quotidien, médicamenteuses, cet article se limitera à la présenta-
pour le médecin prescripteur. Responsables d’une mor- tion des données essentielles concernant les études épi-
talité, d’une morbidité et de surcoûts mal évalués, elles démiologiques incluant des données d’incidence et de
constituent ainsi un problème de santé publique très mortalité, l’implication des lymphocytes T dans les
mal exploré. Leurs mécanismes, comme leurs manifes- réactions cutanées médicamenteuses, et les méthodes
tations, sont variés, incluant l’ensemble des quatre et stratégies de diagnostic les plus récentes.
réactions immunologiques de la classification de Gell et
Coombs [1]. Par ailleurs, leurs diagnostics ne sont que Épidémiologie des allergies médicamenteuses
trop rarement confirmés. Il n’existe ainsi pas de réelles
études épidémiologiques systématiques, car de nom- Épidémiologie descriptive: incidence et prévalence
breuses réactions revêtent les symptômes d’une allergie Dix à 20 % des patients hospitalisés présentent des effets
sans pour autant posséder de mécanisme allergique secondaires aux médicaments [1-3], les allergies médi-
(réactions « anaphylactoïdes », autres diagnostics dif- camenteuses représentant jusqu’à 30 % de l’ensemble de

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ces réactions. Lazarou et al. [2] ont récemment analysé sonnes) sont décédés des suites de l’administration de
trente-trois études prospectives américaines réalisées médicaments, la mortalité d’origine iatrogène consti-
entre 1966 et 1996, et rapporté que 15,1 % des sujets tuant, selon l’âge et le sexe, la 4e ou 6e cause de morta-
hospitalisés ont présenté un effet secondaire à des lité dans le pays. La part de l’allergie médicamenteuse
médicaments, 6,7 % présentant un effet sévère. était estimée à 23,8 % des effets secondaires (toutes
Toutefois, on observe à la fois une sous-déclaration des sévérités confondues) des patients hospitalisés.
effets indésirables des médicaments (même à l’hôpital, Bien que relativement rare, le choc anaphylactique est
6 % à 12 % au maximum sont notifiés) [1] et une sures- la réaction immunologique la plus redoutée des méde-
timation de ce type de réactions en raison de l’absence cins et des patients, du fait de l’installation extrême-
de précision des diagnostics portés [1]. ment rapide des symptômes et de sa possible issue
La revue de Bigby et al. [4], retraçant un travail du fatale (moins de 5 % des cas). Il n’est toutefois pas la
Boston collaborative drug surveillance program, fournit seule cause de mortalité des réactions allergiques médi-
la majorité des données d’incidence des réactions aller- camenteuses: il faut aussi y ajouter celle de certaines
giques médicamenteuses régulièrement reprises. Les formes de toxidermies [10] telles que les syndromes de
auteurs ont recensé le nombre de cas de réactions cuta- Lyell (30 % de mortalité), de Stevens-Johnson (5 %) et
nées allergiques chez 15438 patients hospitalisés sur d’hypersensibilité avec des atteintes multi-organes
une période de sept ans: 358 réactions, concernant donc (DRESS, drug reaction with eosinophilia and systemic
2,3 % des administrations, ont été colligées et confir- symptoms) (10 %).
mées par un dermatologue. Les incidences ont été L’incidence du choc anaphylactique a été analysée dans
ensuite calculées en fonction de chacun des cinquante différentes études de cohorte. L’Agence du médicament
et un médicaments à l’origine de la réaction: 5,1 % pour danoise a ainsi recensé, entre 1968 et 1990, 30 cas de
l’amoxicilline, 3,4 % pour le cotrimoxazole, 3,3 % pour chocs anaphylactiques mortels après injection de pro-
l’ampicilline, 2,2 % pour les produits sanguins, 2,1 % duits de contraste iodés (8 cas), de pénicillines (6 cas),
pour les céphalosporines, 2 % pour l’érythromycine, d’extraits allergéniques (5 cas), d’anti-inflammatoires
1,8 % pour la pénicilline G, 0,4 % pour la gentamycine… non-stéroïdiens (2 cas) et de curare (1 cas) [11], soit
Des études de cohorte ont elles aussi rapporté des taux une incidence estimée à 0,3 cas par million d’habitants et
de réactions allergiques en réponse à l’administration par année. Une enquête, réalisée entre 1991 et 1995 dans
de médicaments, en particulier d’antibiotiques: 0,7 % à les services d’urgences en Grande-Bretagne, a démontré
10 % pour les allergies aux β-lactamines (cause la plus que l’incidence des chocs anaphylactiques était en aug-
fréquente d’allergies médicamenteuses) [5], 7,3 % mentation, passant de 56 par million d’admissions en
d’éruptions cutanées (12,3 % pour le Céfaclor®, 8,5 % 1991 à 102 en 1995, la première cause identifiable (62 %)
pour les sulfamides et 7,4 % pour les pénicillines) pour étant médicamenteuse [12] (cependant, seule la moitié
près de 6000 prescriptions d’antibiotiques à des enfants des causes a été identifiée dans ce travail). L’enquête de
[6]. Dans une cohorte d’étudiants traités par cipro- Katayama et al. [8] relève une incidence de 6 décès pour
floxacine pour prévenir le portage du méningocoque, un million d’injections de produits de contraste iodés,
une incidence de 3/3 200 réactions anaphylactiques a ioniques et non ioniques. Dans un travail réalisé chez des
été observée [7]. Un autre exemple d’allergie médica- patients recevant des injections mensuelles de pénicilline
menteuse concerne l’injection de produits de contraste G dans le cadre d’un rhumatisme articulaire aigu [13], 4
iodés. Dans une enquête de Katayama et al. [8], por- épisodes anaphylactiques ont été décrits (soit une inci-
tant sur le suivi de 337647 injections, l’incidence des dence de 0,2 % des patients et 0,01 % des injections) et 1
réactions était de 12,6 %, avec 0,22 % de réactions décès (soit une incidence de 0,05 % des patients et
sévères pour les produits ioniques et 0,04 % pour les 0,003 % des injections). Dans notre série de 2150 patients
produits non ioniques. Un dernier exemple est celui du pour lesquels est suspectée une allergie médicamenteuse
registre français sur les allergies peropératoires (Groupe et venus en consultation depuis 5 ans, il y avait 6 % de
national d’études épidémiologiques des réactions ana- chocs anaphylactiques, 10,4 % d’œdèmes laryngés et
phylactoïdes per-anesthésiques): la quatrième enquête 0,2 % de toxidermies graves. Plusieurs de ces cas étaient
[9] a relevé 1303 cas de réactions (692 anaphylaxies et gravissimes, un cas s’est révélé mortel.
611 réactions « anaphylactoïdes »), soit une incidence
de 1/13000 anesthésies générales et 1/6 500 utilisa- Épidémiologie analytique: facteurs liés
tions de curares. au médicament, facteurs liés à l’hôte
Aux États-Unis, Lazarou et al. [2] (voir plus haut) rap- Les données d’épidémiologie analytique sont dans l’en-
portent que 0,32 % des sujets hospitalisés (106000 per- semble peu nombreuses [2-4]. Les facteurs les mieux

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connus sont ceux liés à la nature du médicament. Pour dantes des IgE pour les sujets allergiques aux pénicil-
être immunogène à l’état natif, une substance doit avoir lines, a été décrit [20] puis décrié [21]. Ce syndrome,
un poids moléculaire suffisant (> 1000 daltons), ce qui qui pourrait faire intervenir des contrôles génétiques,
est le cas des sérums hétérologues et de certaines notamment HLA, ne doit toutefois pas être confondu
enzymes (chymopapaïne…) ou hormones (insuline…). avec les réactions à divers médicaments de structure
La plupart des autres médicaments ont un poids molé- identique (réactivité croisée). Il n’est pas encore pos-

REVUES
culaire insuffisant et devront donc, pour induire une sible à l’heure actuelle d’identifier les patients suscep-
réponse immune spécifique, se comporter comme des tibles de développer une allergie médicamenteuse.
haptènes et se coupler à une protéine porteuse (le plus
souvent autologue, comme l’albumine plasmatique) Physiopathologie des allergies médicamenteuses
[14]. La posologie du médicament et ses modalités
d’administration influencent la fréquence des réac- Réactivité chimique des médicaments
tions. Ainsi, dans les cas d’allergie aux pénicillines ou à La plupart des médicaments ne sont pas réactifs chimi-
l’insuline, il est depuis longtemps rapporté que les quement. C’est classiquement au cours de leur métabo-

SYNTHÈSE
administrations intermittentes et répétées sont plus lisme qu’apparaissent des composés intermédiaires
sensibilisantes qu’un traitement ininterrompu. Le réactifs, dits métabolites réactifs, capables de se fixer
patient sensibilisé réagit alors à des doses minimes. La sur des protéines, d’en changer la structure et de deve-
voie parentérale est la plus immunogène, devant les nir ainsi immunogènes (c’est-à-dire de se comporter
voies locales (pommades, crèmes, collyres…), égale- comme des haptènes). Les β-lactamines natives [22] et
ment très immunogènes du fait, probablement, de l’in- les métabolites des sulfamides [23, 24] constituent
flammation locale. deux exemples fréquents, et bien étudiés, de cet aspect.
La plupart des études démontrent que les femmes sont Dans les liquides biologiques, le noyau β-lactame (azé-
plus souvent atteintes que les hommes (65 %-70 % ver- tidine-2-one) s’ouvre spontanément, exposant son
sus 30 %-35 %) [15]. Il est par ailleurs souvent rapporté groupement carbonyl, capable de réagir avec le groupe-
que les enfants sont moins concernés par ce type de ment ε-amine d’une lysine ou d’une histidine portées
réactions que les adultes. Toutefois, des études systé- par une protéine, pour former une liaison covalente ε-
matiques bien conduites font encore défaut. Les amide (Figure 1). Le groupement pénicilloyl ainsi formé
patients atopiques ne semblent pas prédisposés [15], est le principal produit de dégradation immunogène
mais leurs réactions pourraient être plus sévères. Cette (95 %), les autres molécules de pénicilline étant dégra-
notion est cependant régulièrement controversée et dées par d’autres voies en divers déterminants antigé-
l’atopie pourrait jouer un rôle dans le cas de réactions à niques mineurs, dont l’acide pénicillénique (ou pénicil-
certains médicaments tels que la chymopapaïne. Dans loïque) et les pénicillamines, qui forment des ponts
le travail de Haddi et al. [15], les auteurs ont démontré disulfures avec les groupements sulfhydryles des cys-
que le pourcentage de sujets porteurs d’immunoglobu- téines protéiques [22].
lines E spécifiquement dirigées contre les principaux Le sulfaméthoxazole (SMX) n’est semble-t-il pas réactif
aéro-allergènes, évalués globalement par la positivité spontanément, non plus que son principal métabolite
du Phadiatop®, n’est pas plus élevé chez des sujets pré- issu de l’action de la N-acétyltransférase. Les métabo-
sentant un antécédent de réactions allergiques aux lites réactifs du sulfaméthoxazole sont issus de sa bio-
médicaments (17,6 %) que chez des sujets dénués d’an- transformation par le cytochrome P450-2C9 en SMX-
técédent (19,5 %). La littérature fait parfois état d’une hydroxylamine, qui subit ensuite une auto-oxydation en
concentration familiale de certains cas, et des haplo- nitroso-SMX, chimiquement très réactif. Les métabo-
types HLA particuliers semblent impliqués dans les réac- lites réactifs du sulfaméthoxazole peuvent non seule-
tions retardées aux aminopénicillines [16] et à la pyra- ment se comporter comme des haptènes, mais aussi
zolone [17], mais pas aux anti-convulsivants [18]. Les participer à des mécanismes toxiques non allergiques
patients infectés par le virus de l’immunodéficience [23]. Ils sont fabriqués en quantité plus importante
humaine (VIH) souffrent plus que d’autres de réactions chez les sujets VIH positifs [23]: cela s’explique pour
cutanées aux médicaments (10 à 50 fois plus concernant certains auteurs par l’effet combiné de la fréquence
le cotrimoxazole) ou de syndromes de Lyell et de accrue du profil lent d’acétylation [25, 26] chez les
Stevens-Johnson (1000 fois plus que les sujets VIH sujets séropositifs, qui implique une dérivation de leur
négatifs) [19]; ces réactions ne sont toutefois proba- métabolisme de l’acétylation vers la voie des cyto-
blement pas toutes de nature immunologique. Un syn- chromes P450 et de la myéloperoxydase, et d’un certain
drome d’allergies médicamenteuses multiples, dépen- déficit des processus de détoxification (déficit en cys-

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(➜) m/s téine [27] et en glutathion [28]). L’hypothèse des éotaxine et IL-4 (dans les formes cliniques avec hyper-
1995, n° 1, métabolites réactifs dans le cas du sulfaméthoxazole, éosinophilie) ou IL-8 (dans les pustuloses exanthéma-
p. 99 proposée il y a une quinzaine d’années par Shear [24] et tiques aiguës généralisées) [33]. Enfin, quelques clones
et 2001,
n° 3, portée au rang de véritable dogme, est cependant CD4 et les rares clones CD8 sont clairement de type Th1,
p. 382 remise en question [29] depuis la mise en évidence par sécrétant de l’interféron γ (IFNγ) et peu, ou pas, d’IL-5 ou
l’équipe de Pichler de très nombreux clones de lympho- d’IL-4 [31, 32, 34]. Toujours ex vivo et après stimulation
cytes T réagissant avec le médicament lui-même, plutôt avec l’allergène médicamenteux, les lymphocytes T se
qu’avec ses métabolites réactifs [22, 30], et l’absence révèlent cytotoxiques pour les kératinocytes, mais seule-
de constance dans la découverte d’anomalies phénoty- ment après l’incubation de ces derniers avec de l’IFNγ. La
piques ou génotypiques des enzymes du métabolisme cytotoxicité est en effet en partie assurée par le système
des médicaments. perforine-granzyme B [30] (➜). Dans une autre étude,
l’apoptose des kératinocytes au sein des lésions de syn-
Implication des lymphocytes T spécifiques drome de Lyell était induite via le système Fas-ligand de
des médicaments Fas: les sérums et les kératinocytes de 5 patients sur 7
L’allergie médicamenteuse est toujours associée à un contenaient des concentrations élevées de ligand de Fas,
mécanisme immunologique où peuvent être mis en évi- contrairement à ceux de 5 patients atteints d’éruption
dence des anticorps (en général, mais pas toujours, de maculopapuleuse extensive et de 5 sujets sains [35].
type IgE) et/ou des lymphocytes T activés dirigés contre In vivo, les lymphocytes isolés du sang périphérique de
les médicaments. Le rôle des lymphocytes T, par défini- patients allergiques expriment les marqueurs d’activa-
tion certain, n’est pas encore totalement élucidé. Il a été clairement tion lymphocytaire HLA-DR [36, 37], mais pas CD25
démontré qu’il était possible d’identifier, d’isoler et de cloner à partir (chaîne α du récepteur de l’IL-2) [36]. En cas d’exan-
du sang périphérique de sujets allergiques aux pénicillines, au sulfamé- thèmes médicamenteux, ils expriment fréquemment des
thoxazole, à la lidocaïne, à la carbamazépine ou à la phénytoïne des marqueurs de domiciliation cutanée (CLA, cutaneous
lymphocytes T spécifiques du médicament [30-32]. Ceux-ci ont égale- lymphocyte-associated antigen, notamment) se liant
ment été isolés à partir de prélèvements de peau lésée. aux molécules d’E-sélectine exprimées à la surface des
La caractérisation ex vivo
de lymphocytes T spéci-
fiques d’allergènes médi-
camenteux a permis de PÉNICILLINE ACIDE PÉNICILLÉNIQUE
montrer qu’ils étaient en
S S
général CD4 positifs, dans NH R C NH
l’ensemble restreints à Isomérisation
R C
certains allèles HLA et N O N
exprimaient en très grande O O O
COOH COOH
majorité (> 99 %) le récep-
teur T (TCR) α et β. Pour un
même allergène médica- S Protéine-SH
menteux, la réponse peut NH
être hétérogène d’un pa- R C SH
tient à l’autre, mais égale- R C NH
N
ment chez un même pa- O O
COOH
NH O NH
tient, avec la production Liaison ε-amide O
de clones de TCRαβ diffé- COOH
Protéine - (Lys ou Histidine) - protéine
rents, présentant soit une
faible affinité et un faible PÉNICILLOYL-PROTÉINE DÉTERMINANTS MINEURS
pouvoir de synthèse de
cytokines et de présenta- Figure 1. Déterminants antigéniques des pénicillines. Le noyau β-lactame (azétidine-2-one) s’ouvre spontané-
tion antigénique, soit une ment (A), exposant son groupement carbonyl à l’attaque d’une protéine (d’une lysine ou d’une histidine) pour
forte affinité et une pro- former une liaison covalente ε-amide au sein d’une pénicilloyl-protéine (B). Divers autres déterminants, dits
duction importante de mineurs (D, pénicillamines), sont également formés: l’acide pénicillénique, produit de l’isomérisation de la péni-
cytokines dites de profil cilline (C), peut ainsi réagir, par l’intermédiaire de son groupement sulfhydryle, avec des résidus cystéines de
Th2: interleukine-5 (IL-5), chaînes protéiques. Les attaques protéiques sont indiquées par des flèches rouges.

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cellules endothéliales du derme [37]. L’expression de famides antibactériens et la lidocaïne, par exemple,
marqueurs d’activation à la phase aiguë de la réaction peuvent directement réactiver les lymphocytes T, sans
allergique concerne les deux types de lymphocytes, CD4 apprêtement ni métabolisme, en se fixant de façon non
et CD8. Elle disparaît à la phase de guérison et, en ce qui covalente sur les molécules HLA de classe II des cellules
concerne les lymphocytes CD8, est corrélée à la sévérité présentatrices de l’antigène [22, 30]. La pénicilline
de la réaction clinique: elle est ainsi plus importante native aussi peut se fixer directement, mais de façon

REVUES
dans les réactions bulleuses et/ou avec cytolyse hépa- covalente, cette fois, sur des protéines telles que les
tique associée [36]. molécules HLA des cellules présentant l’antigène; elle
La présence, dans le sang périphérique, de cytokines de est alors capable d’en modifier la structure et de réacti-
profil Th2 (IL-5, IL-4) dans les réactions médicamen- ver spécifiquement certains clones T spécifiques. Cette
teuses immédiates [38] et de profil Th1 (IFNγ, IL-2) dans activation est directe, c’est-à-dire qu’elle ne nécessite
les réactions non immédiates [38] est un argument sup- pas que la pénicilline subisse l’étape préalable de diges-
plémentaire en faveur de l’implication des lymphocytes tion (processing) siégeant dans le réticulum endoplas-
T. Elle montre également que le concept de dérèglement mique, comme c’est le cas avec les conjugués pénicil-

SYNTHÈSE
de l’équilibre Th1/Th2 en faveur du profil Th2 dans les line-albumine [39]. Comme le font les IgE spécifiques,
allergies immédiates (telles que l’asthme, la rhinite les clones T des patients allergiques aux β-lactamines
allergique et les allergies alimentaires ou aux venins reconnaissent aussi bien le noyau β-lactame que le reste
d’hyménoptères) s’applique aussi à certaines formes cli- de la molécule, c’est-à-dire tout ou partie des chaînes
niques d’allergie médicamenteuse. Cette libération de latérales surtout, mais peut-être également le noyau
cytokines à la phase aiguë de la réaction allergique est thiazolidine pour les pénicillines et le noyau dihydrothia-
éphémère et disparaît en phase de guérison [38]. zine pour les céphalosporines. C’est plus souvent le pep-
tide modifié par l’haptène que l’haptène seul qui est
Bases moléculaires de la reconnaissance cependant reconnu par le TCR.
des allergènes médicamenteux
L’analyse des clones T spécifiques a permis de mettre en Immunopathologie des exanthèmes médicamenteux allergiques
évidence différents types de réactions au cours du phé- Les réactions cutanées sont les effets secondaires allergiques médica-
nomène d’allergie aux médicaments (Figure 2). Les sul- menteux les plus fréquents, dont l’expression clinique est variable. Les
réactions immédiates, de
type urticaire/angiœdème,
par exemple, sont souvent
LyT LyT LyT de mécanisme dépendant
CD4 ou CD8 CD4 ou CD8 CD4 ou CD8
des IgE lorsqu’elles sont de
TCRαβ TCRαβ TCRαβ
nature allergique. Les réac-
tions non immédiates, de
a b a b b b
type exanthème maculo-
Carrier papuleux, par exemple,
HLA impliquent l’activation de
HLA HLA
lymphocytes T spécifiques,
CPA CPA CPA
lorsqu’elles sont de nature
allergique. Des lympho-
Processing Pas de processing Pas de processing
cytes T (CD4 et CD8) spéci-
fiques sont retrouvés non
Médicament Carrier Protéine porteuse seulement dans le sang des
patients allergiques aux
Figure 2. Bases moléculaires de la reconnaissance des médicaments. Selon les travaux des équipes de Weltzien médicaments, mais aussi
[57] et Pichler [56], trois mécanismes peuvent être envisagés: présentation des médicaments aux lymphocytes dans les biopsies de peau
T (LyT) avec (1) ou sans (2, 3) processing, c’est-à-dire avec ou sans digestion du médicament dans le réticulum lésée réalisées en phase
endoplasmique de la cellule présentatrice de l’antigène (CPA); présentation avec (1, 2) ou sans (3) liaisons cova- aiguë de la maladie [36] et
lentes entre le récepteur T (plus souvent TCRαβ) et les molécules HLA de classe II. Les exemples donnés ici sont sur le site de patch tests
ceux des β-lactamines (A, B), du sulfaméthoxazole (SMX) (B, C) et de la lidocaïne (C). L’épaisseur des flèches positifs avec le médica-
schématise la force des liaisons; leur position précise si tout ou partie seulement du médicament et de sa pro- ment. Des lymphocytes T,
téine porteuse sont inclus dans le site de reconnaissance. Allèles HLA: peu restreint (a) ou restreint (b). CD4 surtout mais aussi

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CD8, infiltrent la jonction dermo-épidermique des lésions logie des symptômes (contacts antérieurs, délai d’ap-
cutanées, et sont souvent associés à un infiltrat de polynu- parition après la dernière prise, effet de l’arrêt du médi-
cléaires, éosinophiles ou neutrophiles. Leur caractérisation cament), rechercher la prise d’autres médicaments au
montre qu’ils sont activés (expression des marqueurs HLA- moment de la réaction, et de médicaments de la même
DR et CD25), souvent cytotoxiques (expression de la perfo- classe depuis, et étudier les antécédents du patient
rine et du granzyme B) [36] vis-à-vis des kératinocytes, ce (notion d’incidents allergiques antérieurs, en présence
qui se traduit par une spongiose et une nécrose lors de ou non de toute prise médicamenteuse…) [43].
l’analyse histologique [36] et qu’ils expriment fréquem- L’interrogatoire recherche également tout signe de gra-
ment des molécules d’adhérence, CD11a, CD18, CD62L vité (Tableau I) dont la présence doit faire suspecter,
notamment [40]. L’infiltration de lymphocytes CD8 est explorer et, éventuellement, rapidement traiter un choc
corrélée à la sévérité de la réaction clinique, plus impor- anaphylactique, un œdème laryngé, un syndrome de
tante dans les réactions bulleuses et/ou avec cytolyse Lyell ou de Stevens-Johnson, une vascularite ou un syn-
hépatique associée [36, 41]. L’expression des molécules drome d’hypersensibilité avec atteintes multi-organes
HLA-DR concerne également les cellules de Langerhans et (DRESS). La présence de ces signes de gravité impose le
les kératinocytes, en association avec les molécules d’ad- dosage de différents paramètres biologiques et l’arrêt
hérence ICAM-1 et CD62L [40]. Ces derniers, en présentant immédiat du traitement.
l’allergène médicamenteux aux lymphocytes T activés, sont Les algorithmes de pharmacovigilance [46], principale-
alors la cible de la réaction cytotoxique assurée par le sys- ment fondés sur l’interrogatoire, sont utiles dans de
tème perforine-granzyme B dans le cas des érythèmes nombreux cas de réactions secondaires aux médica-
maculo-papuleux [36] (Figure 3) et le système Fas-ligand ments. Cependant, dans le cas de l’allergie médicamen-
de Fas dans celui des syndromes de Lyell [35]. Il a par ailleurs été montré teuse, l’interrogatoire, aussi minutieux soit-il, ne per-
que les kératinocytes, grâce à l’expression de nombreux cytochromes P450 met que rarement de porter le diagnostic. La symptoma-
et transporteurs de xénobiotiques, sont capables, notamment, de produire tologie est suggestive, mais rarement spécifique, et
des métabolites réactifs du sulfaméthoxazole [42], ce qui pourrait consti- l’effet de l’arrêt du médicament n’est pas toujours
tuer une explication supplémentaire de la fréquence accrue de réactions concluant (possibilité de rebond). Par ailleurs, ces cri-
cutanées au cours des allergies médicamenteuses. tères ne différencient pas les médicaments pris par le

Diagnostic des allergies médicamenteuses

Les sociétés européennes de dermatologie (European


society of contact dermatitis), d’allergologie et d’im- Lymphocyte
munologie clinique (European academy of allergy and spécifique
clinical immunology, www.eaaci.org) ont proposé une d'un médicament
prise en charge diagnostique standardisée. Un question-
LFA-1 TCR Perforine
naire [43] et des recommandations générales [44, 45] Granzyme B
sur la pratique des tests cutanés ont été successivement ICAM-1 HLA
élaborés. De nombreux autres documents sont en cours
de relecture. Au niveau national, les sociétés savantes
se font le relais de ces recommandations européennes
par le biais de leurs représentants français. Elles Kératinocyte
essaient actuellement de rendre accessibles, dans le
cadre de réseaux, des banques de procédures et de
connaissances (www.sfaic.com).
Inflammation basale Inflammation
Démarche diagnostique stéréotypée constante, veille immunitaire allergique, médicament
Les deux étapes menant à un diagnostic de certitude
sont l’interrogatoire et la réalisation de tests, cutanés Figure 3. Conséquence de la reconnaissance spécifique d’un médicament par un
ou, à défaut, de provocation. lymphocyte T au niveau de la peau. Le kératinocyte, présentant naturellement
La première étape prévoit la recherche d’une histoire un certain degré d’inflammation à l’état de base (interaction LFA-1 et ICAM-1),
clinique compatible avec une allergie médicamenteuse. devient, en présentant le médicament à ce lymphocyte T, la cible de la cytotoxi-
L’interrogatoire doit être minutieux, s’attacher à la des- cité par le système perforine-granzyme B. LFA: β2-intégrine; ICAM: intercellular
cription précise de la symptomatologie et de la chrono- adhesion molecule; TCR: récepteur T α et β.

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patient au cours de l’épisode supposé de nature aller- relecture par la Société européenne d’allergologie). En
gique, contrairement au bilan allergologique. Ces effet, les risques de réactivation de la réaction aller-
doutes, qui ne sauraient pourtant guider un diagnostic gique existent, et seuls certains centres sont habilités à
médical, entraînent souvent pour le patient une contre- un tel diagnostic.
indication de prescription des médicaments mis en Les tests cutanés (prick tests et intradermiques) sont
cause, dont les conséquences sont parfois néfastes: particulièrement importants pour les haptènes réactifs,

REVUES
contrainte d’une attention constante et source d’an- afin de mettre en évidence le mécanisme dépendant des
goisse vis-à-vis des substances prescrites, surcoût pos- IgE: en effet, leur positivité démontre la présence d’anti-
sible des alternatives thérapeutiques, voire induction de corps, le plus souvent de type IgE, à la surface des mas-
résistances aux antibiotiques. tocytes cutanés. Ils sont classiquement réalisés 4 à 6
Devant la suspicion d’une réaction de nature allergique semaines après la réaction, en milieu spécialisé associé à
et l’incapacité de trancher sur les seules données issues un secteur de réanimation car ils peuvent, à eux seuls,
de l’interrogatoire, un bilan allergologique s’impose. induire une réaction anaphylactique [44, 45]. Leur sensi-
Cette obligation tient surtout lorsque le médicament bilité et leur valeur prédictive varient selon les médica-

SYNTHÈSE
éventuellement en cause est indispensable, ou fré- ments: d’excellentes (pénicillines, curares, sérums hété-
quemment prescrit (β-lactamines, paracétamol et rologues, enzymes) à mauvaises ou inconnues (quino-
anti-inflammatoires non stéroïdiens, par exemple), lones, opiacés, paracétamol, sulfamides, produits de
c’est-à-dire quand le seul principe d’éviction n’est pas contraste iodés et anti-inflammatoires non stéroïdiens).
envisageable. Seul un diagnostic formel d’allergies Lors des réactions retardées, des patch tests avec le
médicamenteuses, ou d’intolérance pour les anti- médicament suspecté peuvent être réalisés, mais leur
inflammatoires non stéroïdiens, semble en effet pouvoir sensibilité reste inférieure à 70 % [44, 45].
permettre de mettre en place les mesures adaptées de Parfois, lorsque le médicament n’est pas disponible sous
prévention et de traitement. Le bilan allergologique une forme réactive adéquate, c’est-à-dire que seuls ses
repose, dans un premier temps, sur la réalisation de dérivés métaboliques sont immunogènes (anti-inflammatoires non sté-
tests cutanés ou de tests de provocation, ces derniers roïdiens, anesthésiques locaux, antibiotiques autres que les pénicil-
n’étant pratiqués qu’en cas de tests cutanés négatifs et lines…), ou lorsque les tests cutanés sont négatifs (cas des pénicillines,
validés, de tests non validés ou de tests impossibles à notamment), seuls les tests réalistes de provocation permettent de
mettre en œuvre, et uniquement en l’absence de contre- poser le diagnostic. Ils sont réalisés à distance (au moins un mois) de
indications (un document à ce sujet est en cours de l’épisode et utilisent le médicament et la voie d’administration initiale
mis en cause. Ils ne sont
Signes d’alerte Rechercher Diagnostic en urgence pas pratiqués si le médica-
ment responsable est peu
Prurit palmoplantaire Autres signes d’anaphylaxie Choc anaphylactique
Chute tensionnelle (urticaire/angiœdème)
utilisé, si les alternatives à
ce traitement sont nom-
Dysphonie Œdème laryngé breuses, ou lorsque la
Hypersialorrhée
réaction a été grave (dé-
Décollement cutané, Bilan hydro-électrolytique Syndromes de Lyell et collements cutanés, at-
bulles, signe de Nikolski NFS, TGO - TGP de Stevens-Johnson teintes muqueuses faisant
Éruption douloureuse suspecter une dermatose
Érosions muqueuses Complications systémiques
bulleuse, érythème macu-
Fièvre > 40 °C NFS (éosinophiles) DRESS lopapuleux extensif avec
EMP très étendu* TGO - TGP fièvre élevée, hyper-éosi-
Infiltration du visage Créatininémie, protéinurie nophilie, cytolyse hépa-
Polyadénopathies tique faisant suspecter
Purpura infiltré NFS (plaquettes) Vascularite une atteinte sévère de
Nécrose cutanée Complément type DRESS, pustulose
Créatininémie, protéinurie exanthématique aiguë gé-
* Exanthème maculo-papuleux étendu à plus de 60 % de la surface corporelle néralisée et toute atteinte
d’organes, vascularite…).
Tableau I. Signes de gravité à rechercher rapidement devant toute allergie médicamenteuse. DRESS: drug reaction C’est le test ayant la sensi-
with eosinophilia and systemic symptoms ou syndrome d’hypersensibilité; TGO-TGP: transaminase glutamique bilité maximale, mais il ne
oxalo-acétique-transaminase glutamique-pyruvique; NFS: numération-formule sanguine. peut être réalisé que sous

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haute surveillance, et donc uniquement dans certains de la dégranulation. La recherche d’une hyper-éosino-
centres spécialisés associés à un secteur de soins inten- philie et d’une cytolyse hépatique [36] devant un éry-
sifs ou de réanimation. thème maculo-papuleux sévère fébrile permet d’évo-
quer le diagnostic de DRESS. Enfin, l’étude des lympho-
Place de la biologie cytes T (prolifération, activation, clones) reste encore
L’amélioration de la prise en charge des patients aller- du domaine de certains laboratoires spécialisés. Le test
giques à des médicaments doit à terme être accessible à de prolifération lymphocytaire est actuellement le test
tout médecin et nécessite, de ce fait, la mise à disposi- dont la sensibilité et la spécificité sont les meilleures
tion d’outils diagnostiques simples, discriminants et (respectivement 77 % et 85 % dans une série de 923
validés, par exemple biologiques. Pour l’instant, le dia- patients testés) [49].
gnostic d’allergie ou d’intolérance médicamenteuse est
avant tout clinique, puisque la plupart des tests biolo- Conclusions
giques disponibles, peu nombreux et non validés,
connaissent de nombreux faux positifs et faux négatifs: La complexité physiopathologique des allergies et des
ainsi, un test négatif ne permet pas d’exclure la respon- intolérances médicamenteuses, la difficulté de leur dia-
sabilité d’un médicament, tandis qu’un test positif tra- gnostic, leur défaut d’enseignement au cours des études
duit tout au plus une sensibilisation au médicament, médicales et paramédicales et la crainte qu’elles inspirent
sans affirmer sa responsabilité dans la réaction. En au patient et au médecin sont différentes raisons expli-
outre, les mécanismes d’allergie médicamenteuse sont quant leur méconnaissance actuelle, tant d’un point de
multiples et les marqueurs solubles ou cellulaires variés vue épidémiologique que physiopathologique ou diagnos-
(Figure 4). tique. Cependant, les quelques équipes s’y intéressant
La détection d’IgE anti-médicament ne suffit pas à elle aujourd’hui mettent en commun l’ensemble de leurs expé-
seule à porter le diagnostic d’allergie médicamenteuse. Mais elle per- riences cliniques et biologiques, ce qui devrait rapidement
met, dans un contexte clinique évocateur (symptômes typiques et permettre de standardiser les pratiques diagnostiques et
chronologie rapide), de préciser que le mécanisme de la réaction est de faire avancer les connaissances fondamentales. Les
dépendant des IgE (surtout si des tests cutanés au médicament sont sociétés française (SFAIC) et euréopéenne (EAACI) d’aller-
également positifs) et parfois d’explorer les réactivités croisées entre gologie en ont fait un objectif prioritaire. ◊
plusieurs médicaments, par inhibition quantitative. En
revanche, l’absence d’IgE spécifiques circulantes ne
permet pas d’éliminer le diagnostic. Par ailleurs, ces - Tryptase
Mast - LTC4
types de dosages ne sont disponibles en pratique cli- - Histamine
nique que pour certains médicaments allergisants Ac Baso - Marqueurs
(pénicillines, curares, chymopapaïne, thiopenthal, for- membranaires
mol, insuline, protamine, toxine tétanique). LyB - Ig spécifiques
Les tests d’histaminolibération sur sang total en pré-
sence du médicament sont bien corrélés avec les tests - Prolifération
Médicament - Cytokines
cutanés et les IgE spécifiques pour l’allergie aux curares LyT LyT - Molécules
[47], mais ne sont pas assez sensibles pour les autres et d'adhérence
médicaments [48]. Compte tenu du faible nombre de Métabolites
- Souffrance
basophiles circulants, les tests de dégranulation des cellulaire
polynucléaires basophiles ne sont pas fiables. Ils ont été Toxicité Cytotox - Mort cellulaire :
remplacés par l’étude de l’expression à leur surface de • nécrose
• apoptose
marqueurs d’activation, parmi lesquels le CD63. Les
tests de libération de sulfidoleucotriènes, proposés à la Métabolisme : - Polymorphismes
fois dans l’allergie dépendante des IgE et dans les - hépatique enzymatiques
- extrahépatique - Ac anti-CYP
fausses allergies par libération de ces médiateurs
(comme avec l’aspirine, par exemple), ne permettent
pas encore un diagnostic suffisamment fiable [48]. Figure 4. Paramètres biologiques mesurables dans les tests d’hypersensibilité médi-
Devant une réaction clinique aiguë, les dosages san- camenteuse. La multiplicité des cellules et des médiateurs impliqués dans ces
guins d’histamine ou de tryptase et les dosages urinaires réactions rend difficile la validation de ces tests. Ac: anticorps; Baso: polynu-
de méthylhistamine précisent le rôle des polynucléaires cléaires basophiles; CYP: cytochrome P450; cytotox: cytotoxicité; Ig: im-
basophiles et des mastocytes, quelle que soit la cause munoglobuline; LTC4: leucotriène C4; Ly: lymphocyte.

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