JIDI 27 No.
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Journal d'imagerie diagnostique et interventionnelle 2018;xx:1–4
Verre dépoli pulmonaire en
tomodensitométrie thoracique
Ground glass opacities of the lung on computed
tomography
A. Fabry a
J.G. Cohen a,b
E. Reymond a
A. Jankowski a
G. Ferretti a,b
COMMENT LE RECONNAÎTRE
Par définition, le verre dépoli en tomo-
densitométrie (TDM) correspond à une hyper-
densité modérée du parenchyme pulmonaire,
qui laisse persister le dessin des scissures,
des bronches et des vaisseaux, ce qui le dis-
tingue de la condensation pulmonaire qui
efface ces structures anatomiques [1] (Fig. 1).
La définition du verre dépoli est purement
subjective, imposant de respecter des critères
techniques adéquats afin d'assurer une repro-
ductibilité et une fiabilité de ce diagnostic.
L'acquisition TDM sera réalisée en coupes
millimétriques, en inspiration forcée et blo-
quée, en décubitus parfois complétée par
une acquisition en procubitus, avec des fenê-
tres pulmonaires larges (1200–1700 (UH)) et
un niveau d'environ 600 UH. L'utilisation de
fenêtres serrées et d'un niveau trop bas peut
majorer le contraste et conduire à diagnosti-
quer à tort un verre dépoli diffus. Les recon-
structions en mode minimal intensity
projection (minIP) sur un empilement de 5 à
7 coupes millimétriques facilitent la détection
des nodules en verre dépoli et la recherche
d'un bronchogramme aérique au sein du
nodule.
Parfois, le verre dépoli peut être difficile
à reconnaître lorsque l'augmentation de den-
sité est minime et l'atteinte diffuse. Il est alors
possible de s'aider du contraste anormale-
ment élevé entre les lumières bronchiques
et le parenchyme adjacent, de densité aug-
mentée, responsable d'un aspect des lumiè-
res bronchiques anormalement « sombres »
(« dark bronchus sign » des Anglo-Saxons).
https://doi.org/10.1016/j.jidi.2017.09.004
© 2018 Société française de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Pour citer cet article : Fabry A, et al. Verre dépoli pulmonaire en tomodensitométrie thoracique. Journal d'imagerie
diagnostique et interventionnelle (2018), https://doi.org/10.1016/j.jidi.2017.09.004
La girafe
a
Service de radiologie diagnostique et thérapeutique,
CHU Grenoble-Alpes, CS 10217, 38043 Grenoble
cedex 9, France
b
Université de Grenoble-Alpes, 38000 Grenoble,
France
Reçu le 7 septembre 2017 ; accepté le 25 septembre
2017
Disponible en ligne sur ScienceDirect le xxx
MOTS CLÉS
PHYSIOPATHOLOGIE
Tomodensitométrie
La densité du parenchyme pulmonaire en Maladie pulmonaire
TDM est le reflet de la proportion relative interstitielle
d'air et de tissu présents dans le voxel consi- Imagerie diagnostique
déré ; ainsi, le verre dépoli apparaît lorsque la
composante tissulaire s'accroît et/ou que la KEYWORDS
composante aérique se réduit. Dans le cas Computed tomography
d'une augmentation de la composante tissu- Interstitial lung disease
laire avec disparition complète de la compo- Diagnostic imaging
sante aérique, le verre dépoli disparaît,
remplacé par une condensation.
Ainsi, la densité pulmonaire peut être aug-
mentée en cas de :
 diminution de l'air intra-alvéolaire (syn-
drome alvéolaire) par comblement des
espaces aériens : remplissage partiel par
un liquide (œdème alvéolaire, liquide de
lavage bronchiolo-alvéolaire, exsudat infec-
tieux ou inflammatoire, hémorragie), ou par
une substance de faible densité (graisse
exogène, protéïnose) ou par des cellules
tumorales (adénocarcinome à croissance
lépidique) ;
 majoration de la composante tissulaire (syn-
drome interstitiel) secondaire à un épaissis-
sement de l'interstitium pulmonaire, des
parois alvéolaires ;
 augmentation du flux sanguin capillaire, par
redistribution.
Auteur correspondant :
G. Ferretti,
Service de radiologie diagnostique
PIÈGES DIAGNOSTIQUES et thérapeutique, CHU Grenoble-
Alpes, CS 10217, 38043 Grenoble
Il existe quelques situations pour lesquelles l'aug- cedex 9, France.
mentation de densité du parenchyme ne corres- Adresse e-mail :
pond pas à du verre dépoli « anatomique » : gferretti@chu-grenoble.fr
1
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La girafe
Figure 1. Verre dépoli diffus. Opacité pulmonaire n'effaçant pas les
structures bronchovasculaires (flèche blanche). Contraste
anormalement élevé (dark bronchus sign) entre la bronche et le
parenchyme pulmonaire (flèche noire).
 acquisition en expiration, responsable d'une augmentation
diffuse de la densité du parenchyme liée à la diminution de
l'air intrapulmonaire. Le bombement postérieur de la trachée
et l'augmentation du gradient antéropostérieur de densité du
parenchyme pulmonaire permettent de reconnaître facile-
ment une acquisition réalisée en expiration ;
 opacités déclives par gravitodépendance, se traduisant par
des opacités majoritairement en verre dépoli sous-pleurales
postérieures d'épaisseur variable de quelques millimètres
à plusieurs centimètres, en relation avec des microatélec-
tasies passives et/ou accumulations de fluides, changeant
de topographie sur les coupes en procubitus ;
 la redistribution vasculaire, classiquement décrite chez des
patients emphysémateux sévères, est liée à une redistribu-
tion du flux vasculaire vers les territoires sains, accroissant
le débit vasculaire ainsi que la taille des artères
pulmonaires ;
 des stigmates postlavage bronchoalvéolaire, responsables
classiquement de plages de verre dépoli lobaires moyen-
nes, mais variables en fonction de la topographie des terri-
toires cibles du lavage.
VARIANTES SÉMIOLOGIQUES
Le verre dépoli pur répond à la définition citée ci-dessus, sans
autre anomalie associée du parenchyme. Il est à différencier
des opacités en verre dépoli avec lésions associées, ou verre
dépoli « impur », permettant de guider l'orientation diagnos-
tique : réticulations intra- ou interlobulaires, kystes, bronchec-
tasies de tractions, micronodules.
Distribution et variantes
On distingue deux grands cas de figure pour les opacités en
verre dépoli :
 le verre dépoli en plage ;
 les nodules en verre dépoli (Fig. 2).
Pour citer cet article : Fabry A, et al. Verre dépoli pulmonaire en tomodensitométrie thoracique. Journal d'imagerie
diagnostique et interventionnelle (2018), https://doi.org/10.1016/j.jidi.2017.09.004
A. Fabry et al.
Verre dépoli en plages
Dans le cas des plages de dépoli, il faut apprécier la distribu-
tion et la topographie préférentielle des opacités qui oriente
vers certains tableaux sémiologiques guidant la démarche
diagnostique. L'atteinte diffuse est polymorphe, pouvant être
systématisée (lobaire, segmentaire, lobulaire) ou non systé-
matisée, à prédominance sous-pleurale ou périphérique.
L'étude des territoires épargnés, comme par exemple la région
sous-pleurale, est également importante. Il existe également
des formes caractéristiques en fonction des anomalies adja-
centes : le verre dépoli au contact d'un nodule majoritairement
solide est appelé « signe du halo », traduisant fréquemment
une hémorragie alvéolaire périlésionnelle, retrouvé dans diver-
ses pathologies comme l'aspergillose angio-invasive ou les
lésions secondaires hémorragiques. À l'inverse, une plage de
verre dépoli bordée d'un liseré de condensation est appelée
signe du halo inversé ou signe de l'atoll, évoquant en première
intention le diagnostic de pneumonie organisée ou de myco-
ses rares comme la mucormycose.
La superposition au verre dépoli de réticulations intralobulaires
et interlobulaires est appelée crazy paving, et oriente vers un
panel de pathologies, dont la plus pathognomonique est la
protéinose alvéolaire.
Nodules en verre dépoli
Par définition, il s'agit d'une opacité ronde ou ovalaire en verre
dépoli dans au moins deux plans de l'espace de 3 à 30 mm [2].
On distingue les nodules en verre dépoli pur et les nodules
mixtes ou partiellement solides, associant verre dépoli et
composante tissulaire solide. La plupart, d'origine infectieuse
ou inflammatoire, régressent totalement après quelques
semaines. En cas de persistance plus de 3 à 6 mois, la pro-
babilité d'adénocarcinome pulmonaire primitif d'évolution lente
est importante, nécessitant soit un suivi TDM, soit une exérèse
d'emblée en fonction des critères morphologiques du nodule
(taille, composante solide). Un suivi est nécessaire afin de ne
pas méconnaître une lésion tumorale et notamment un adé-
nocarcinome pulmonaire in situ ou microinvasif.
Poumon en mosaïque
La coexistence de zones de verre dépoli et de zones de
densité pulmonaire normale ou abaissée donne un aspect
dit de « poumon en mosaïque » [3].
Cet aspect est retrouvé dans trois types de situations :
 la perfusion en mosaïque d'origine bronchiolaire ;
 la perfusion en mosaïque d'origine vasculaire ;
 les pneumopathies interstielles diffuses.
Il convient en premier lieu d'analyser la taille et le nombre des
vaisseaux (intérêt des reformations MIP et minIP) (Fig. 3) :
lorsque les vaisseaux sont petits et peu nombreux dans les
zones hypodenses, il s'agit d'une perfusion en mosaïque, où le
verre dépoli ne correspond pas à une lésion anatomique, mais
au parenchyme pulmonaire sain par opposition aux régions
hypodenses pathologiques. Reste ensuite à différencier ses
deux sous-types :
 la perfusion en mosaïque d'origine bronchique s'accompa-
gne ou non (petites voies aériennes non visibles en scanner)
d'anomalies bronchiques à type d'épaississement ou dilata-
tion et surtout d'une majoration des zones hypodenses en
expiration, permettant de démasquer l'atteinte des petites
voies aériennes ;
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Verre dépoli pulmonaire en tomodensitométrie thoracique

La girafe

Figure 2. a : verre dépoli diffus en carte de géographie : verre dépoli en mosaïque ; b : poumon en « fromage de tête », associant des
lobules hypodenses trappés, des lobules normaux et des lobules de verre dépoli : pneumopathie d'hypersensibilité ; c : Crazy paving,
associant verre dépoli et réticulations ; d : nodule pulmonaire en verre dépoli pur (flèche).

Figure 3. Démarche diagnostique en présence d'un poumon en mosaïque.

Pour citer cet article : Fabry A, et al. Verre dépoli pulmonaire en tomodensitométrie thoracique. Journal d'imagerie
diagnostique et interventionnelle (2018), https://doi.org/10.1016/j.jidi.2017.09.004
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La girafe A. Fabry et al.

Tableau I. Gamme diagnostique des opacités en verre dépoli diffus.

Diagnostic du verre dépoli diffus en fonction de la clinique et de la rapidité d'installation des signes
Clinique Maladie
Immunodéprimé (HIV, corticoïde, Infections opportunistes
transplantation)
Dépression médullaire Infections opportunistes
Comblement alvéolaire brutal
Autres
Dyspnée de progression lente Maladie interstitielle chronique
Autres
Dyspnée aiguë patient interne/externe Comblement alvéolaire brutal
Patient débilité Comblement alvéolaire brutal
Diagnostic différentiel
Pneumocystose, CMC, HSV, VSR, autres virus
Pneumocystose, CMC, HSV, VSR, autres virus
Hémorragie alvéolaire diffuse
Toxicité médicamenteuse
PIC, PINS, AAE, RBILD, sarcoïdose, PIL
PO, protéïnose alvéolaire, ADK
OAP, SDRA, œdème non cardiogénique,
hémorragie alvéolaire diffuse
OAP, SDRA, œdème non cardiogénique

 la perfusion en mosaïque d'origine vasculaire n'est pas
accompagnée de majoration des zones hypodenses en
expiration. On peut retrouver des arguments étiologiques
associés, comme par exemple des signes d'HTAP ou de
maladie thromboembolique chronique.
Lorsque les vaisseaux sont de calibre normal et répartis uni-
formément, il s'agit d'une pneumopathie interstitielle diffuse,
où le verre dépoli correspond cette fois-ci à une lésion ana-
tomique d'étiologie variable selon la pathologie concernée et
les zones hypodenses au poumon sain.
Poumon en « fromage de tête »
Il s'agit d'un cas particulier de pneumopathie interstitielle dif-
fuse avec un poumon en mosaïque associant trois densités
différentes :
 plages hyperdenses en verre dépoli en rapport avec le
parenchyme pathologique ;
 plages de densité intermédiaire en rapport avec le poumon
sain ;
 plages hypodenses en rapport avec une perfusion en
mosaïque d'origine bronchique.
Les causes classiques sont la pneumopathie d'hypersensibi-
lité et la sarcoïdose (Fig. 3).
DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE
S'assurer que l'acquisition a été réalisée en inspiration forcée
est indispensable à la description de verre dépoli. Il est parfois
très difficile d'obtenir une inspiration bloquée, comme dans les
situations d'urgence et chez les patients très dyspnéiques.
Dans ces cas, l'interprétation du « verre dépoli » doit rester
prudente.
Déterminer s'il s'agit d'un tableau aigu ou chronique et connaî-
tre le terrain du patient :
 fumeur ;
 immunodéprimé ;
 pathologie chronique sous-jacente [4] (Tableau I).
Apprécier la distribution du verre dépoli : est-on dans le cas de
nodules en verre dépoli ou bien de verre dépoli en plages.
Dans ce dernier cas, le verre dépoli est-il diffus, patchy, en
foyer lobulaire, centrolobulaire, péribronchovasculaire, péri-
phérique, sous-pleural ?
Différencier verre dépoli pur et impur et identifier les anomalies
adjacentes au verre dépoli.
Reconnaître un poumon en mosaïque et savoir regarder les
vaisseaux pour différencier ces différentes étiologies.
Déclaration de liens d'intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.
RÉFÉRENCES
[1] P. Grenier, A.L. Brun, D. Touitou-Gottenberg, C. Beigelman-
Aubry. Le verre dépoli en scanographie pulmonaire. J Fr Radiol
2009;311–21 [Formation médicale continue].
[2] Okada T, Iwano S, Ishigaki T, Kitasaka T, Hirano Y, Mori K, et al.
Computer-aided diagnosis of lung cancer: definition and detection
of ground-glass opacity type of nodules by high-resolution compu-
ted tomography. Jpn J Radiol 2009;27:91–9. http://dx.doi.org/
10.1007/s11604-008-0306-z.
[3] Ridge CA, Bankier AA, Eisenberg RL. Mosaic attenuation. AJR
Am J Roentgenol 2011;197:W970–7. http://dx.doi.org/10.2214/
AJR.11.7067.
[4] Nowers K, Rasband JD, Berges G, Gosselin M. Approach to
ground-glass opacification of the lung. Semin Ultrasound CT MR
2002;23:302–23.

Pour citer cet article : Fabry A, et al. Verre dépoli pulmonaire en tomodensitométrie thoracique. Journal d'imagerie
diagnostique et interventionnelle (2018), https://doi.org/10.1016/j.jidi.2017.09.004