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MODULE DE PHYSIOPATHOLOGIE

PHYSIOPATHOLOGIE DE L’INSUFFISANCE
RESPIRATOIRE AIGUE

DR. S . OUCHERIF

Réanimation Médicale
CHU BAB EL OUED
DEFINITION
L’insuffisance respiratoire aiguë se définit comme l’impossibilité
de maintenir une hématose normale. Le trouble de l’hématose est
caractérisé par une altération des gaz du sang (GDS) avec :

– une hypoxémie : la pression partielle du sang artériel en


oxygène (PaO2) est inférieure à 60 mm Hg et la saturation de
l’hémoglobine en oxygène (SaO2) est inférieure à 95 %
Hypoxémie : pression partielle en oxygène dans le sang artériel
basse (PaO2).
Hypoxie : insuffisance d’oxygénation des tissus.

– associée ou non à une hypercapnie : la pression partielle du


sang artériel en gaz carbonique (PaCO2) est supérieure à
45 mm Hg.
Selon l’étiologie, l’hypercapnie peut être absente ou remplacée
par une hypocapnie
RAPPELS PHYSIOLOGIQUES

Les échanges gazeux:

ECHANGES : à 2 niveaux
Cycle Respiratoire (respiration calme):

• inspiration = phénomène actif (volume CT )

• expiration = phénomène passif (grâce à Energie


élastique stockée dans paroi et poumons (volume CT )

Si respiration forcée :


• expiration = phénomène actif
POUMON : Système ventilatoire + Lieu d’échanges gazeux
(Alvéole - Sang)

ECHANGES EFFICACES SI :
Bonne Ventilation Alvéolaire (VA) - Bonne Perfusion sanguine (PS)
Valeurs Palv-cap CO2 et Palv-capO2 : dépendent du Rapport VA/PS

Distribution du rapport VA / PS ?
Notions de gravité et d’élasticité
Distributions régionales et locales
Pas de valeur uniforme du rapport VA / PS (moyenne calculée)
Hétérogénéité VA et PS dans les poumons
5
Hétérogénéité rapport : dépend de la Hauteur du poumon (gravité)

Gravité et Distribution de la Ventilation


Alvéolaire ?

POUMON : Structure élastique suspendue à la trachée


Poids supporté par un niveau d’autant + faible en se dirigeant vers
la base

Structures pulmonaires les + étirées : sommet

CONSEQUENCES :
Compliance alvéolaire (V / P) + basse au sommet
- Sujet normal : Adéquation globale entre VA et Q (rapport  1)
- Pathologies : Inadéquation
- 2 cas extrêmes :
- Obstruction bronchique : VA / Q = 0 (Zone Perfusée et Non Ventilée)

- Obstruction vasculaire : VA / Q =  (Zone Ventilée et Non


Perfusée)
PHYSIOPATHOLOGIE DE L’INSUFFISANCE
RESPIRATOIRE AIGUË

Une IRA peut résulter :

• soit d’une atteinte de la fonction neuromusculaire


pulmonaire (fonction pompe du poumon),= Hypoventilation
alvéolaire, DRA Hypercapniante
• soit d’une atteinte de la fonction d’échange pulmonaire
=Hyperventilation alvéolaire, DRA hypoxémiante
• soit d’une atteinte de la fonction de transport,
•et parfois de plusieurs de ces mécanismes
a- atteinte des voies aériennes extra et intra-
thoraciques

B- maladies pulmonaires ou autres maladies


retentissant sur la fonction respiratoire (ex :
myopathies ou maladies neuro-musculaires)

C- perturbation de la circulation artérielle


pulmonaire (embolie, HTAP)

D- maladie de la pompe cardiaque

E- perturbation de la grande circulation (états


de choc), ou du transport de l’O2 (anémie,
hémoglobinopathies)

F- anomalies de l’utilisation de l’O2 par la


cellule musculaire (déconditionnement, états
de choc, certaines intoxications, myopathies)
A. Atteinte de la fonction pompe

parfois primitive et liée à une maladie neuromusculaire


(polyradiculonévrites aiguës, myasthénie grave), dépression des
centres respiratoires, à des maladies du SNC ou un traumatisme
thoracique grave.

souvent secondaire et consécutive à la fatigue des muscles


respiratoires qu’engendre l’augmentation du travail respiratoire, à
laquelle le malade ne peut faire face durablement.
B. Atteinte de la fonction d’échange pulmonaire

L’atteinte de la fonction d’échange pulmonaire est


principalement la conséquence d’une altération des
rapports entre la ventilation alvéolaire et la perfusion
pulmonaire (VA/Q), plus rarement d’un trouble de la
diffusion. L’altération des rapports VA/Q réalise soit un
effet shunt veinoartériel intra pulmonaire, soit au contraire
un effet espace mort.
• effet shunt intra pulmonaire

il résulte de zones où la ventilation est faible ou absente


par rapport à la perfusion avec rapports ventilation-
perfusion < 1 et proches de 0 (VA/Q < 1).
Les atélectasies, les pneumopathies, les œdèmes
pulmonaires sont responsables de zones étendues à bas
rapport VA/Q.
L’hypoxémie n’est pas ou que partiellement corrigée par
l’oxygénothérapie. L’hypoxémie est responsable d’une
hyperventilation réactionnelle qui empêche l’installation
d’une hypercapnie
• effet espace mort

il résulte de zones où la perfusion est faible ou nulle par


rapport à la ventilation avec rapports ventilation-perfusion
> 1 (VA/Q > 1).
L’hypovolémie, l’embolie pulmonaire, l’insuffisance
cardiaque, la tachypnée sont les causes principales de cet
effet espace mort.
L’hypoxémie est responsable d’une hyperventilation
réactionnelle qui empêche l’installation d’une hypercapnie.
• trouble de la diffusion :

il résulte d’une altération de la capacité de diffusion de


l’oxygène à travers l’interstitium pulmonaire : l’oedème
interstitiel, les pneumonies infectieuses interstitielles,
les fibroses et les carcinomateuses pulmonaires en sont
les causes principales.
L’hypoxémie sans hypercapnie est toujours corrigée par
l’oxygénothérapie à FiO2 élevée.
En pratique, les pathologies pulmonaires sont
responsables le plus souvent d’une hypoventilation
alvéolaire inhomogène associant des zones à effet
shunt et des zones à effet espace mort. L’hypoxémie
entraîne une hyperventilation réactionnelle
responsable d’abord d’une hypocapnie ; puis les
muscles respiratoires s’épuisent avec installation d’une
hypercapnie culminant en un arrêt respiratoire, qui
précède l’arrêt circulatoire
DIAGNOSTIC, BILAN ET RECHERCHE
D’UNE ÉTIOLOGIE

A. Examen clinique

Lors de l’examen clinique, il est essentiel de regarder respirer le


malade. Il faut qualifier le type de dyspnée, rechercher
l’existence d’un tirage, chiffrer la tachypnée, rechercher une
déformation ou une asymétrie d’ampliation de la cage
thoracique, une bascule thoracoabdominale, apprécier la qualité
de la sangle abdominale, l’existence d’une diastasis des muscles
grands droits, d’une hernie à la toux. L’examen clinique met en
évidence des signes qui peuvent être rattachés à l’hypoxémie, à
l’hypercapnie, à la cause de l’insuffisance respiratoire aiguë ou au
retentissement viscéral
a. Signes de détresse respiratoire

La dyspnée
Les types de dyspnée.
Orthopnée : apparaît ou s’aggrave en position couchée. Origine
cardiaque (insuffisance ventriculaire gauche)
Polypnée : augmentation de la ventilation minute
Hypopnée : diminution de la ventilation minute
Tachypnée : augmentation de la fréquence respiratoire > 25
c/min
Bradypnée : diminution de la fréquence respiratoire < 15 c/min
Dyspnée de Cheyne-Stockes : rythme périodique et alternance
de respirations profondes et d’apnée. Origine métabolique ou
centrale
Dyspnée de Kussmaul : rythme lent, ample avec égalisation des
deux temps. Origine métabolique (acidose)
La dyspnée peut être inspiratoire : elle évoque une
origine haute,
ou expiratoire : elle évoque une origine bronchique.

Signes associés, de gravité :

-tirage = utilisation des muscles inspiratoires accessoires

-contraction expiratoire des muscles abdominaux

-pouls paradoxal
diminution inspiratoire de la pression artérielle de plus
de 20 mmHg, traduisant les variations de pression
intra-thoracique liées aux efforts respiratoire
-respiration paradoxale (asynchronisme thoraco-
abdominal : à l’inspiration, expansion thoracique et
dépression abdominale).
- Encombrement, bronchospasme

b-Signes d’hypoxémie

Le principal est la cyanose : coloration bleutée des


téguments particulièrement visible aux extrémités :
doigts, lèvres (signe de gravité).
C-Signes d’hypercapnie (signes de
gravité)
Il s’agit de :
Troubles de la conscience précoces, flapping,
Hypertension, Hypercrinie (sueurs, hypersialorrhée,
encombrement) variations tensionnelles (hypertension)
Céphalées ,asthénie,
d-Signes associés liés au retentissement de la
DRA (signes de gravité)

Il s’agit essentiellement de signes cardio-vasculaires


et/ou neuropsychiques :
1. Signes cardio-vasculaires (coeur pulmonaire aigu)
o Hémodynamiques : tachycardie sinusale (dissociée de la température)
(seuil de gravité : >120/min), hypotension artérielle, froideur des
extrémités, augmentation du temps de recoloration cutanée, marbrures,
oligurie ;
o Hypertension artérielle pulmonaire (en faveur d’une hypercapnie) :
éclat de B2 au foyer pulmonaire, souffle systolique sous sternal
d’insuffisance tricuspidienne (signe de Carvalho) ;
o Insuffisance cardiaque droite : galop droit présystolique, reflux
hépato-jugulaire, hépatalgie, hépatomégalie avec pouls hépatique,
turgescence jugulaire avec expansion systolique.
o signe de Harzer = la palpation rétroxyphoïdienne perçoit les
battements du ventricule droit dilaté
o décès par arrêt circulatoire précédé d’un collapsus et d’un arrêt
respiratoire.
2. Signes neuro-psychiques
- Angoisse, agitation, troubles du sommeil, de l’humeur ou du
caractère (irritabilité) jusqu’à l’agressivité ou torpeur jusqu’au coma,
- Sensation d’engourdissement
- Troubles des fonctions supérieures : troubles mnésiques,
ralentissement psycho-moteur, confusion, délire/hallucinations
- Troubles végétatifs
-Parfois déficit focal (si artériopathie associée)
-Convulsions

3 Autres signes
-dysfonction rénale : oligurie
-dysfonction digestive ; dilatation gastro-intestinale aiguë
B. Interrogatoire
L’interrogatoire du malade si possible ou de sa famille précise les
circonstances de survenue de l’IRA et la notion d’un handicap
respiratoire antérieur :
– le début brutal ou rapidement ou lentement progressif
– l’existence d’épisodes antérieurs identiques
– la notion et l’importance d’un handicap respiratoire chronique.
Cela peut être aidé par l’existence d’un bilan fonctionnel
respiratoire antérieur ou par des questions simples concernant
l’activité physique encore possible avant l’IRA (montée d’un
escalier, etc.)
– la profession antérieure ou actuelle (maladie professionnelle)
– les traitements médicamenteux suivis
– l’hygiène de vie (arrêt du tabac, de l’alcool)
– les tares associées (diabète, coronarite, insuffisance
ventriculaire gauche)
– le contexte social et familial.
C. L’examen physique d’une détresse respiratoire aiguë
• qualifie le type de dyspnée
• mesure la fréquence respiratoire,
• recherche une cause anatomique à la détresse
respiratoire
o obstruction des voies aériennes supérieures,
o obstruction bronchique,
o épanchement pleural gazeux ou liquidien ou pleurésie,
o condensation pulmonaire,
o atélectasie,
o emphysème,
o insuffisance cardiaque gauche,
• évalue la fonction neuromusculaire
D Monitorage non invasif
• Oxymétrie de pouls: SpO2 : la SpO2 < 85% à l’air
ambiant confirme le diagnostic de détresse respiratoire
aigue et correspond à une PaO2 < 55 mmHg. Le
traitement symptomatique doit permettre d’obtenir une
SpO2 > 92% qui correspond à une PaO2 > 60 mmHg.
• Electrodes thoraciques pour électrocardioscopie
fréquence cardiaque (batt/min), fréquence respiratoire
(cycles / min) grâce à un module analysant les variations
d’impédance thoracique), température.
• Pression artérielle non invasive automatisée,
E. Bilan paraclinique
Il ne doit pas retarder la prise en charge rapide du patient

Les examens complémentaires devant une détresse respiratoire


aiguë sont ceux du bilan initial d’une urgence vitale
Bilan biologique
– • Gazométrie artérielle
– • Hémoglobine totale
– • Numération sanguine (GR, GB, plaquettes) et formule
leucocytaire,,
•-C-Reactive Proteine (C-RP), , TCA, Taux de prothrombine
,Urée, glycémie, créatininémie, protidémie, bilirubinémie,
– • Ionogramme sanguin et urinaire
– • ASAT, ALAT, Phosphatases alcalines, CPK, Troponine
– • Hémocultures (2) si tableau évocateur d’un sepsis +
Prélèvements trachéaux si suspicion de pneumonie,
– • Groupage sanguin ABO, Rhésus si hémorragie,
– • Lactatémie si suspicion d’acidose métabolique,
– • Lipasémie si suspicion d’atteinte pancréatique
--radiographie du thorax,
– Electrocardiogramme

– Explorations supplémentaires orientées


. Il pourra par exemple s’agir de :

- scanner thoracique
- échographie cardiaque
- prélèvements respiratoires microbiologiques
- endoscopie ORL ou bronchique
- dosages de toxiques, bilan biologique
- scanner cérébral
- echo-doppler des membres inférieur
Etiologie
Etiologie
1 - mécanique ventilatoire

- Centres bulbaires: comas (AVC, traumatismes, intoxications...)


- Commande centrale: Polio, traumatisme du rachis cervical, tétanos, PRN..
- Obstruction des VAS: corps étranger
- Muscles respiratoires: myopathie, myasthénie
- Cage thoracique et diaphragme: traumatisme (volet, hernie
diaphragmatique...), cyphoscoliose, opéré de l ’abdomen..
- Plèvre: pneumothorax, hémothorax, épanchement liquidien, thorax
soufflant
Etiologie

2 - Etiologies responsables d ’une hypoxie


- asthme, décompensation BPCO
- Atteinte parenchymateuse: pneumopathie
- Trouble de la circulation pulmonaire :
modification VA/Q: embolie pulmonaire
Surcharge: OAP hémodynamique
- Atteinte de la membrane alvéolocapillaire: emphysème, OAP lésionnel
CONDUITE À TENIR INITIALE DEVANT UNE
INSUFFISANCE RESPIRATOIRE AIGUË

Dans l’ordre il faut:


– pratiquer les gestes en urgence que réclame l’état clinique ;
–apprécier la gravité
– proposer un traitement.

Conduire conjointement une démarche diagnostique et


thérapeutique.
A. Gestes en urgence
Les gestes d’urgence suivants sont nécessaires :
– laisser le malade dans la position qu’il adopte spontanément, en règle
semi-assise ;
– vérifier la liberté des voies aériennes supérieures : corps étranger,
obstacle laryngé
– Mettre de l’oxygéne
– mettre en place un monitorage du rythme cardiaque et de l’oxymétrie
de pouls (SpO2) Si la SpO2 est inférieure à 92 %, l’oxygénothérapie à la
sonde nasale ou au masque est la première technique à mettre en
oeuvre
– apprécier la nécessité d’une intubation immédiate
– mettre en place une voie veineuse, parfois un cathéter veineux central
pour mesurer la pression veineuse centrale ;
– administrer un bronchodilatateur en aérosol s’il existe un
bronchospasme.
– mettre en place une sonde urinaire si la surveillance de la diurèse est
indispensable (défaillance cardiaque ou état de choc associé).
B. Diagnostic de gravité
C’est un élément important dont découle l’indication du transfert
dans un centre de réanimation. Cette gravité peut être liée au
terrain, à la cause de la décompensation, à l’état clinique du
malade, à l’importance du retentissement viscéral ou à
l’importance des désordres de l’hématose. Les éléments cliniques
l’emportent toujours sur les résultats biologiques
C. Traitement
Le traitement est médical, avec ou non recours à la ventilation
mécanique. Sur le plan médical, le traitement est symptomatique
et étiologique : antibiothérapie adaptée à une pneumonie
communautaire, drainage d’un pneumothorax, traitement d’une
embolie pulmonaire, traitement d’un bronchospasme, etc.
En dehors du traitement étiologique, le traitement
symptomatique comprend une désobstruction bronchique, la
poursuite de l’oxygénothérapie, la correction des troubles hydro
électrolytiques, la correction des troubles cardiovasculaires et les
anticoagulants.
.Il existe des médicaments contre indiqués dans l'IRA. ;

Tous les médicaments, même réputés non dépresseurs


respiratoires, qui diminue la vigilance et/ ou le travail
respiratoire du malade soit :

-tous les sédatifs, anxiolytiques. L'anxiété majeure d'une


dyspnée doit être traitée par O2 !
-tous les hypnogènes, neuroleptiques
-les antalgiques morphiniques, dont l'utilisation pour des
cas très spécifique est réservée aux secteurs de
réanimation
Conclusion
L ’INSUFFISANCE RESPIRATOIRE AIGUE:

• Nombreuses étiologies
• Urgences vitales
• Oxygénation  l ’hypoxie tue !!!
• Attention à l ’épuisement respiratoire et discuter
la nécessité de la ventilation mécanique
• Recherche étiologique  Traitement adéquat

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