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Dégénérescence du papillome inversé nasosinusien en carcinome épidermoïde

H.OULD CHEIKH, M.ZALAGH, S.OUARAINI, N.ERRAMI, G.EL AMRI, M.MOUMNI, M.BAHALOU,


M.KETTANI, B.HAMMAOUI, A.JAHIDI, F.BENARIBA EP1
Service d’ORL et Chirurgie cervico-faciale. Hôpital Militaire d'Instruction Mohammed-V

INTRODUCTION
le papillome inversé nasosinusien (PINS) représente 0 , 5 % à 4 % de l’ensemble des tumeurs des fosses nasales . Cette rare tumeur des
fosses nasales se caractérise par sa capacité de destruction osseuse, la survenue de récidives, et l’association possible à un carcinome
épidermoïde. Dans ce travail, nous rapportons un cas de transformation maligne d’un PINS. Nous avons exploité les données
épidémiologiques, cliniques, radiologiques, histologiques et thérapeutiques du dossier médical de ce patient.
CAS CLINIQUE:
Il s’agit d’un patient âgé de 46 ans tabagique à raison de 29 paquet-
année sans antécédents pathologiques particuliers qui a consulté L’IRM du massif facial a été
pour une obstruction nasale unilatéral, rhinorrhée, épistaxis demandée montrant un
unilatérale et des céphalées, à l’examen il a présenté une tuméfaction processus qui infiltre les
au niveau de la fosse nasale droite d’aspect polypoide comblant la cellules ethmoïdales droites,
quasi-totalité de la fosse nasale et une légère exophtalmie le muscle ptérygoïdien médial,
homolatérale. L’endoscopie nasale avait retrouvé une formation bombe en intra orbitaire,
polypoïde, saignant au contact dont l’émergence n’a pu être précisée. arrive au choane.. (figure 3 )
figure 3 :IRM en coupe axiale : comblement
Un examen tomodensitométrique en coupes axiales et coronales, tissulaire en hyposignal T1de la fosse nasale
droite
avec injection de produit de contraste, était réalisé en préopératoire
montrant un processus lésionnel rehaussé après injection de produit
La biopsie a montré l’aspect d’un papillome inversé avec foyer de
de contraste, agressif centré sur la fosse nasale droite avec extension
carcinome épidermoïde in situ.
intra-orbitaire droit et ethmoïdale avec lyse de la paroi antérieure du
sinus sphénoïdal et de la paroi interne du sinus maxillaire. (figure 1,
figure2). Le traitement était chirurgical par voie endonasale et a consisté en :
• Une maxillectomie droite élargie
• Une éthmoïdectomie antérieure et postérieure droite
• Dissection de la masse du globe oculaire
• Mise en évidence d’une extension vers la base du crane
avec une brèche visualisé
• Reconstruction par de la graisse abdominale, septum osseux
nasal et colle biologique.
figure 1 :TDM en coupe figure 2 :TDM en coupe
coronale . L’étude anatomo-pathologique a confirmé le diagnostic de Papillome
coronale .
inversé dégénéré en carcinome épidermoïde moyennement
différencié infiltrant et kératinisant, une radiothérapie post-opératoire
a été indiquée et elle est en cours.
DISCUSSION
Le papillome inversé est une tumeur rare. L’incidence maximale se situe entre la cinquième et la septième décennie (3). La prédominance
masculine semble faire l’unanimité dans la littérature (2). Le virus HPV est retrouvé dans le PINS à des fréquences variant entre 10 et 75 %
dans la littérature (4). Les virus HPV de type 6/11 sont considérés comme étant à faible risque au vu de leur faible potentiel de
transformation, alors que le HPV 16/18 et les autres sont considérés comme étant à haut risque (4). L’obstruction nasale est le symptôme
clinique le plus fréquemment retrouvé ; elle reste la plupart du temps unilatérale et peut se bilatéraliser. Ce signe est retrouvé à des
pourcentages divers dans la littérature, variant de 64 % à 98 % (3). La rhinorrhée antérieure séreuse ou mucopurulente unilatérale est moins
fréquente : de 14 à 29 % (2). L’épistaxis serait en faveur d’une transformation maligne. Les céphalées sont discrètes, dues à des sinusites
maxillaires et frontales (2). L’extension tumorale se traduit par des signes otologiques, ophtalmologiques, olfactifs (diplopie,
exophtalmie,dacryocystite, troubles de l’odorat, rhinolalie fermée,déformation de la paroi orbitaire interne et de la joue…), etc. Les troubles
neurologiques traduisent essentiellement la pénétration du processus dans l’endocrâne (2). L’endoscopie des cavités nasales constitue
l’examen majeur complétant la simple rhinoscopie antérieure, surtout quand la lésion est profondément située. Les biopsies multiples et
profondes à visée diagnostique peuvent être réalisées. Le PINS se caractérise par une large base d’implantation dont il est difficile de
déterminer le point de départ exact (2). Les tumeurs primitivement sinusiennes sont rares (5). L’imagerie est fondamentale ; elle permet de
mieux préciser l’étendue de la tumeur, afin de choisir la voie d’abord la plus adaptée à son exérèse complète. La radiographie des sinus est
actuellement remplacée par la TDM et/ou l’imagerie par résonance magnétique (IRM).
La TDM en coupes axiales et coronales avec ou sans injection de produit de contraste permet une excellente analyse des structures
osseuses à la recherche d’une déformation ou d’une lyse osseuse signe d’atteinte tumorale. La lyse osseuse n’est pas un signe spécifique
de malignité (1,2). L’IRM offre une meilleure définition des tissus mous. En outre, elle permet de délimiter avec précision l’extension de la
tumeur, surtout au niveau de l’endocrâne et de l’orbite (2). L’IRM ne fournit aucun argument en faveur d’une dégénérescence maligne (1). Le
diagnostic positif de cette tumeur est exclusivement anatomopathologique. La cancérisation du PINS est une réalité bien établie ;
l’association du PINS à un PID varie, selon les auteurs, de 0 % à 56 % (3). La majorité des PID sont des carcinomes épidermoïdes. L’étude
en totalité de la pièce opératoire est nécessaire à la recherche de microfoyers carcinomateux. Le caractère récidivant d’un PINS ne préjuge
en rien d’une éventuelle transformation maligne (4). Le facteur essentiel de récidive du PINS résulte de l’exérèse incomplète de la tumeur
(2). En l’absence de critères cliniques, histologiques et radiologiques formels permettant d’évoquer la possible dégénérescence des PINS,
l’exérèse chirurgicale de ces lésions doit répondre aux impératifs de la carcinologie (2). La voie endonasale permet un parfait contrôle
nasosphénoethmoïdal, mais trouve ses limites en cas d’extension aux sinus frontaux (5). Pour Laraqui et al. (5), la rhinotomie latéronasale
est l’indication idéale pour toute récidive de papillomatose. La radiothérapie proposée en complément de l’exérèse du PINS est actuellement
abandonnée par tous, hormis pour le PID (5). Actuellement, la radiothérapie n’est proposée que chez les patients avec une résection
tumorale incomplète, des localisations multifocales et récurrentes, et pour les PID (5). L’évolution du PINS est dominée par le risque de
récidive et de dégénérescence sous forme de carcinome épidermoïde. Pour Weissler, 97 % des récidives surviennent dans les 5 premières
années postopératoires (1). Les récidives dans le cadre de la chirurgie endonasale sont aux alentours de 70 % (2). Le pourcentage de
récidive des PINS non dégénérés traités par rhinotomie latéronasale est relativement inférieur : il varie de 0 à 29 % selon les séries (1, 2).

CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE
1. Hans S et al. Papillomes inversés nasosinusiens et rhinotomie latéronasale.
Le PINS est une tumeur bénigne rare à malignité potentielle. Le traitement Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 1994;111:270-5.
du PINS doit être le plus radical possible, vu le risque de récidive et de 2. Luceno V. Papillome inversé naso-sinusien : à propos d’un cas. Rev Laryngol
Otol Rhinol 1999;120(2):103-10.
transformation maligne. La surveillance à long terme s’impose quelle que 3. Thorp MA et al. Inverted papilloma: a review of 53 cases. Laryngoscope
2001;111:1401-5.
soit l’attitude thérapeutique, surtout en cas de PINS récidivant. 4. Buchwald C et al. Carcinomas occuring in papillomas of the nasal septum
associated with Human Papilloma Virus (HPV). Rhinology 1997;35:74-8.
5. Yiotakis I et al. Isolated inverted papilloma of the sphenoid sinus. J Laryngol
Otol 2001;115:227-30.

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