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PROCHE OU MOYEN-ORIENT ?

GÉOHISTOIRE DE LA NOTION DE MIDDLE


EAST

Vincent Capdepuy

Belin | « L’Espace géographique »

2008/3 Tome 37 | pages 225 à 238


ISSN 0046-2497
ISBN 2701149738
DOI 10.3917/eg.373.0225
Article disponible en ligne à l'adresse :
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EG
2008-3
p. 225-238

Proche ou Moyen-Orient ?
Géohistoire de la notion de
Middle East

Vincent Capdepuy
UMR 8504 Géographie-cités, équipe E.H.GO
v_capdepuy@yahoo.com

RÉSUMÉ.— L’usage souvent indistinct ABSTRACT.— Near East or Middle East? Introduction
des notions françaises de Proche-Orient et Geohistory of the concept of Middle East—
de Moyen-Orient crée un trouble qui peut The fact that the two French concepts of
être considéré comme gênant à propos Proche-Orient (Near East) and Moyen-Orient Aujourd’hui, les expressions
d’une région par ailleurs instable. Il est sans (Middle East) are often used de Proche-Orient et de Moyen-
doute vain de vouloir imposer interchangeably causes further confusion
Orient 1 pourraient passer pour
des normes d’usage, mais on peut du moins about an already complex, unstable region.
espérer en éclaircir les règles. Ce sont While is probably impossible to enforce interchangeables. Ainsi, dans un
elles qu’on a cherché à établir ici par rules of usage, these could be better récent numéro de la revue
une analyse géohistorique de la notion de defined. This paper attempts to do Hérodote, on pouvait lire en couver-
Middle East. Cette dernière paraît en effet that through a geohistoric analysis of
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ture : « Proche-Orient, géopolitique
être au cœur du système notionnel anglais the English concept of Middle East.
et français, cette centralité toponymique The Middle East seems to be central to both de la crise », et en tête de
du Moyen-Orient pouvant être considérée the English and the French conceptual l’éditorial : « Au Moyen-Orient, des
comme le reflet de la centralité systems, a central toponym, which could be conflits qui s’aggravent en n’évo-
géographique de la région du Moyen-Orient seen as a reflection of the geographically
luant guère » (Lacoste, 2007). Aussi
au sein de l’espace de l’Ancien Monde. central position of the Middle East region
in the Old World. peut-on comprendre que la Direc-
GEOHISTOIRE, MOYEN-ORIENT, tion générale de l’enseignement
PROCHE-ORIENT GEOHISTORY, MIDDLE EAST, scolaire tente de clarifier les
NEAR EAST
choses : « La terminologie souffre
ici d’une imprécision à cause des
différences de tradition culturelle.
Dans les pays anglo-saxons et en
Amérique, on parle de Moyen-
Orient. En France, et notamment
1. Dans cet article, on désignera par Proche-Orient, en italique, la notion (référentiel), et par
au ministère des Affaires étrangères
Proche-Orient, sans italique la région (référent) ; de même pour Moyen-Orient et Levant. ou dans la presse, on distingue

@ EG
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2. Document Proche et Moyen-Orient. L’intitulé du programme a choisi de conserver l’usage français.
d’accompagnement – Il faut donc entendre par Proche-Orient l’ensemble des pays qui s’étend de la
histoire et géographie –
série STG, classe Méditerranée orientale à la Mésopotamie : Turquie, Égypte, Liban, Syrie, Jordanie,
terminale. Direction Israël, Arabie Saoudite, émirats, Irak, Iran »2. Toutefois cette injonction a de quoi
générale de
l’enseignement scolaire – surprendre par l’acception très large donnée à l’expression Proche-Orient et par
Bureau des programmes l’exagération donnée à la divergence culturelle entre diplomatie française et diplomatie
d’enseignement,
mars 2007 :
étatsunienne. Le Bureau of Near Eastern Affairs du Pentagone ne couvre-t-il pas la
http://eduscol.education.fr/ même zone géographique que la Direction Afrique du Nord et Moyen-Orient du Quai
D0012/Hist-Geo-STGT- d’Orsay ? On a le sentiment, en France, que l’expression Proche-Orient exprimerait un
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point de vue plus français et que celle de Moyen-Orient serait plutôt porteuse d’un
point de vue américain : « La notion de Moyen-Orient s’est récemment imposée ; elle
correspond à une vision stratégique contemporaine et englobe tous les pays s’étendant
de la Libye à l’Afghanistan et de la péninsule Arabique à l’Iran. Les auteurs américains
ont coutume de désigner sous le terme de Middle East cet ensemble, dont l’unité n’est
pas de façade » (Mutin, 1995).
Faut-il parler de Proche ou de Moyen-Orient ? La question n’est pas seulement
révélatrice d’une certaine confusion, elle pourrait aussi être considérée comme le
signe d’un enjeu impérialiste entre puissances rivales… ou plus simplement comme
celui d’une crispation française face à l’hégémonie américaine. Reste que les deux
notions ne sont pas synonymes. On pressent plus ou moins qu’il existe une distinction
entre elles, sans que l’on sache vraiment s’il s’agit d’une question d’usage, de sens ou
de point de vue. C’est pour préciser ce flou géographique que nous avons tâché de
reprendre la géohistoire de ces deux notions, et surtout celle de Middle East dans la
mesure où c’est elle qui paraît cristalliser les tensions et que les notions françaises de
Proche et de Moyen-Orient ont été empruntées au monde anglophone.
De façon générale, la recherche géohistorique combine l’étude spatiale de l’histoire
et l’étude temporelle de la géographie (Grataloup, 1996, 2007). Ici, notre approche
s’inscrit dans cette deuxième branche de la géohistoire, qui « oblige à remettre en
question, en les historicisant, les découpages du Monde » (Grataloup, 2003). En cela,
elle se rapproche de la métagéographie, qui a pour objet l’étude « des structures spatiales
à travers lesquelles les individus et les groupes d’individus ordonnent leur connaissance
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géographique du monde » (Lefort, Pelletier, 2006). Pour répondre à notre interro-
gation, comme dans beaucoup d’études lexicologiques, nous nous sommes appuyé
essentiellement sur les publications écrites, ce qui ne permet pas toujours la datation
précise de l’apparition d’une expression. En effet, il y a souvent un décalage temporel
entre l’usage oral et l’usage écrit. C’est notamment le cas pour la notion de Middle
East, pour laquelle on peut distinguer deux « naissances » : le moment où l’expression
commence à être employée dans le langage commun, au cours de la seconde moitié
du XIXe siècle, et la date où la notion géostratégique a été inventée, ou reconnue, à
savoir en 1902.
Enfin, nous soulignerons que cette étude ne peut pas avoir de fonction normative.
Il ne dépend pas de nous de dire ce qu’on doit appeler Moyen-Orient ou ce qu’on ne
doit pas appeler Proche-Orient. Au moment où la notion de Middle East s’était déjà
imposée dans l’usage au détriment de celle de Near East, mais qu’elle continuait de
faire débat, l’historien américain Roderic H. Davidson (1960) appelait à ne plus utiliser
la notion de Middle East ce qui apparaît avec le recul assez vain. En reprenant l’évolution
de ces notions, nous chercherons donc seulement à en cerner les définitions, leurs

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évolutions, leurs logiques. Au risque de décevoir le lecteur, nous n’aborderons pas ici
les enjeux actuels que pourraient susciter ces notions de Proche et de Moyen-Orient,
mais qui nous apparaissent relativement limités, sans commune mesure du moins avec
ceux, par exemple, portées par la notion d’Europe. La seule polémique majeure
récente est celle créée par l’utilisation de la notion de Greater Middle East (Grand
Moyen-Orient) par le gouvernement George W. Bush en 2004, mais nous ne l’abordons
ici que rapidement.

Proche-Orient et Moyen-Orient, des notions empruntées


En France, ces deux notions se sont diffusées à deux moments différents : celle de
Proche-Orient après la Première Guerre mondiale, celle de Moyen-Orient après la
Seconde Guerre mondiale.
Si les premières occurrences françaises de « proche Orient » remontent aux années
1910 (Cvijie, 1909 ; Sarrou, 1912 ; Bareilles, 1917), l’expression apparaît à chaque fois
sous cette forme inaboutie où proche garde sa fonction d’adjectif qualificatif et n’est
pas intégré dans un nom composé qui exprimerait une notion définie renvoyant à un
espace clairement délimité. En outre, l’expression est utilisée en rapport avec la question
des Balkans.
L’apparition en français d’une notion de Proche-Orient pleinement constituée
date de l’immédiat après-guerre, avec par exemple la parution à partir de
septembre 1919, et jusqu’en 1922, d’une revue économique et financière portant ce
titre. La notion renvoie désormais à un Proche-Orient arabe, et non plus ottoman.
Cependant son usage reste relativement rare (de Morgan, 1923 ; Pic, 1924), sans
doute en raison de la prégnance de celle de Levant, héritée du vocabulaire commercial
et diplomatique du début du XVIe siècle3 et redevenue d’actualité avec les mandats
français sur le Liban et la Syrie : « les États du Levant ».
Après la Seconde Guerre mondiale, surtout à partir de 1950, c’est la notion de
Moyen-Orient qui s’impose rapidement, comme l’attestent le nombre et la diversité
des ouvrages parus dans ces années-là (Beaujeu-Garnier, 1951 ; Birot, Dresch, 1953 ;
Boulanger, 1956 ; Gottmann, 1959). La publication d’un Que sais-je ? intitulé Le
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Moyen-Orient, par Jean-Pierre Alem en 1959, est sans doute un bon indicateur de la
popularité du terme en France à la fin des années 1950, en liaison avec les événements
récents, notamment l’irruption du Moyen-Orient sur la scène de la guerre froide à
partir de 1955. Pourtant, parallèlement à la diffusion de la notion de Moyen-Orient,
celle de Proche-Orient devient elle aussi de plus en plus employée et à partir des
années 1960 c’est cette dernière qui est la plus utilisée. On peut ainsi noter que le
Que sais-je ? de J.-P. Alem, est réédité en 1964 sous le titre Le Proche-Orient arabe.
Une certaine confusion semble alors s’installer entre deux notions apparemment
synonymiques, et concurrentes. On peut discerner une autre rupture au début des
années 1990 : le Moyen-Orient l’emporte de nouveau sur le Proche-Orient, tendance
dont le choix des auteurs de la Géographie universelle se fait l’écho (Mutin, 1995). 3. La première occurrence
Dans l’embarras, on tendrait aujourd’hui à parler de Proche-Orient pour tout ce du terme de Levant, en
français, remonterait
qui touche à l’histoire ancienne et de Moyen-Orient pour la période contemporaine à 1526, dans une lettre de
(Margueron, Pfirsch, 1996 ; Cloarec, Laurens, 2000). Ceci est d’ailleurs vrai aussi bien Villers de l’Isle-Adam
au Maréchal de
en français qu’en anglais. Mais il s’agit d’une distinction d’usage liée à des champs Montmorency (Charrière,
disciplinaires et non d’une distinction de sens. 1848, p. 137).

227 Vincent Capdepuy


Aussi certains auteurs cherchent-ils plutôt deux délimitations spatiales différentes.
Ainsi, pour Georges Corm (2003), « ce qui en réalité fait la différence essentielle entre
l’Orient proche et l’Orient moyen, c’est la présence de la Méditerranée où convergent les
rivages d’Orient et d’Occident. La notion de Moyen-Orient inclut, certes, une frontière
méditerranéenne importante, mais la Méditerranée ne saurait être le rivage autour
duquel se structure le récit, comme c’est le cas lorsque l’on adopte la notion de
Proche-Orient au sens du Levant comme cadre du récit ». Pour Alexandre Defay (2003),
c’est plutôt l’importance du conflit israëlo-palestinien qui a remis à l’ordre du jour la
notion de Proche-Orient : « au sein de l’ensemble géopolitique du Moyen-Orient, le
sous-ensemble Proche-Orient justifie, à nouveau, d’être distingué, à cause, cette fois,
des tensions et des conflits dont il est le théâtre ». Le Proche-Orient apparaît ainsi non
pas comme une région distincte du Moyen-Orient mais comme une partie de celui-ci.
La différence entre les deux tient à la fois au centrage : le Proche-Orient sur la région
libano-israélienne, le Moyen-Orient sur le golfe Persique ; et au cadrage : le Proche-
Orient est un espace restreint, tandis que le Moyen-Orient un espace étendu, allant de la
Libye à l’Hindu Kuch si l’on s’en tient au découpage de la dernière Géographie universelle
(Mutin, 1995). Le Proche-Orient aurait ainsi été subsumé par le Moyen-Orient.
Enfin, à côté d’une distinction d’usage et d’une distinction de sens, on trouve
la distinction de point de vue déjà évoquée. La notion de Moyen-Orient exprimerait
un point de vue étatsunien, plus lointain et plus englobant ; celle de Proche-Orient
un point de vue français caractérisé par une certaine proximité culturelle héritée
d’alliances anciennes. En ce sens, le Proche-Orient serait un avatar du Levant,
notion disparue du vocabulaire de la diplomatie française depuis la fin des
mandats 4 . Pourtant les notions de Proche-Orient et de Moyen-Orient ont été
empruntées toutes deux à la langue anglaise et rien au départ ne permet d’affirmer
que l’une plutôt que l’autre est porteuse d’un point de vue étatsunien. Toutes deux
sont « occidentalocentrées » et ont été inventées dans le cadre d’un même système
mondial.

La tripartition de l’Orient
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L’invention des notions de Near et de Middle East, ainsi que celle de Far East, à la
fin du XIXe siècle, résulte de la mainmise de l’Europe sur l’ensemble de l’Asie.
Des trois, c’est celle de Middle East qui a été la plus étudiée, notamment par
Roderic H. Davidson (1960), dont l’article constitue la référence le plus souvent citée.
On considère généralement que l’historien militaire américain Alfred T. Mahan est
l’inventeur de l’expression Middle East dans un article datant de 1902. Pourtant
l’expression semble en fait avoir déjà été en usage au sein du British India Office, ce
dont on trouve trace dans un article du New York Times de 1898 à propos de la parution
de la biographie d’Alexander Gardner, ancien colonel d’artillerie au service du
Maharajah Ranjit Singh, et dans l’article « The Problem of the Middle East » publié
4. Paradoxalement, en 1900 dans Nineteenth Century par le général britannique Sir Thomas E. Gordon.
la notion de Levant Cependant, c’est bien Alfred T. Mahan qui a fait passer l’expression Middle East au
perdure dans
le vocabulaire rang de notion toponymique, étayée par une vision géostratégique de cette région du
géopolitique américain globe. La notion a ensuite été popularisée grâce à une série d’articles écrits en 1902
pour désigner ce que
nous entendons souvent
par le correspondant du Times à Téhéran, Valentine Chirol, et repris ensuite sous
par Proche-Orient. forme d’ouvrage (Chirol, 1903).

© L’Espace géographique 228


Alfred T. Mahan (1902), historien et stratège naval américain, centre le Moyen-
Orient sur l’espace maritime : « Le Moyen-Orient, si je puis adopter un terme que je
n’ai pas vu ailleurs, aura un jour besoin de son île de Malte, aussi bien que de son
détroit de Gibraltar, mais ceci ne veut pas dire pour autant que l’un ou l’autre devra
se trouver dans le golfe Persique. La force navale a l’avantage de la mobilité, ce qui lui
permet de ne pas devoir toujours être sur place. En revanche, elle a besoin de trouver
sur chaque terrain d’opération des bases de réarmement, de ravitaillement et, si
nécessaire, de protection. La marine britannique devrait avoir la possibilité de
concentrer ses forces si l’occasion surgit, aux environs d’Aden, de l’Inde et du golfe
Persique ». Le Moyen-Orient est ainsi conçu comme le pendant oriental de l’espace
méditerranéen et correspondrait à peu près aux pays riverains du Nord-Ouest de
l’océan Indien attenant au golfe Persique. Dans les deux cas, il s’agit pour l’empire
britannique de pouvoir protéger la route des Indes face à l’avancée russe vers le
Caucase et la pénétration allemande dans l’Empire ottoman. Mais c’est peut-être
Valentine Chirol, plus que A.T. Mahan, qui a véritablement fait du Moyen-Orient
une partie de l’Asie : « ces régions d’Asie qui s’étendent au-delà de la frontière de
l’Inde ou qui commandent l’approche de l’Inde ». En effet, pour V. Chirol (1903),
Proche-Orient, Moyen-Orient, Extrême-Orient forment trois maillons d’une chaîne
qui s’étend d’ouest en est à travers le continent asiatique, une chaîne menacée par
l’avancée des Russes vers le sud.
Les trois notions sont donc liées entre elles. Pour R.H. Davidson (1960), c’est
d’ailleurs de l’Extrême-Orient que provient ce redécoupage de l’Orient, désormais
étendu à l’Asie in extenso. Au XIXe siècle, la « question orientale » est celle posée par
l’Empire ottoman, mais à partir des années 1890, il y aurait un glissement dans les
termes lié à la guerre sino-japonaise de 1894-1895 et à la compétition entre grandes
puissances à propos de la Chine. Par répercussion, le terme de Near East serait devenu
courant vers la fin des années 1890 pour désigner les Balkans. Si la notion de Near
East apparaît effectivement à ce moment-là, par exemple dans l’ouvrage de
William Miller, Travels and Politics in the Near East, paru en 1898, on objectera toutefois
que la notion de Far East est en réalité utilisée depuis les années 1840 (Davidson,
1846 ; MacKinnon, 1849). Le Far East désigne alors un espace vaste, flou, qui s’étend
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de l’Australie à la Chine et à l’Afghanistan, en passant par l’Inde. Il s’agit donc d’un
très grand Far East, qu’il faut opposer au vieil East. Il apparaît ainsi que lors d’une
première phase, durant les années 1840-1890, l’Orient a été divisé en deux : East - Far
East ; et ce n’est que lors d’une deuxième phase, à partir des années 1890, que l’Orient
est divisé en trois : Near East - Middle East - Far East (fig. 1).
Les trois régions ainsi découpées apparaissent chacune centrée sur un pays clé: la
Turquie pour le Proche-Orient, la Perse pour le Moyen-Orient et la Chine pour l’Extrême-
Orient. Au tournant du XIXe et du XXe siècle, tous trois sont des États encore indépendants
mais sont au cœur des tensions géopolitiques de l’avant-guerre ; ils cristallisent ainsi de 5. En revanche, d’un point
de vue français, l’Inde
nouveaux découpages spatiaux qui apparaissent plus définis par leur centre que par britannique fait
leurs limites. D’un côté, le Moyen-Orient semble séparé de l’Extrême-Orient par l’Inde, pleinement partie de
qui n’apparaît alors comme ne faisant partie ni de l’un ni de l’autre, sans doute en l’Extrême-Orient tel qu’il
est défini par l’École
raison de sa sujétion à l’empire britannique5. De l’autre côté, aucune limite précise ne française d’Extrême-
sépare clairement le Moyen-Orient du Proche-Orient. Il peut s’agir de la frontière entre Orient dès le numéro un
de son Bulletin paru
l’Empire ottoman et l’empire perse si l’on s’en tient au découpage politique, ou bien de en 1901 (Lefort, Pelletier
l’entre-deux syro-mésopotamien si l’on adopte une perspective plus géopolitique. 2006).

229 Vincent Capdepuy


De ce point de vue, l’importance accordée
par l’analyse de A.T. Mahan à l’approche
maritime de ces régions apparaît pertinente. Si
europe les marchands européens se sont installés dans
Russie
la majeure partie de l’Empire ottoman à partir
Near East de la Méditerranée (Salonique, Constantinople,
Smyrne, Beyrouth…), c’est à partir du golfe
Far East Persique qu’ils ont pris pied en Mésopotamie.
L’East India Company crée une résidence à
Basra en 1764 et une à Bagdad en 1798. Par la
Middle East suite, après la disparition de l’EIC au profit
de la Couronne, c’est encore d’Inde que les
opérations militaires en Mésopotamie sont
gérées durant la Première Guerre mondiale.
L'Orient traditionnel de l’Europe Pourtant des changements géostratégiques
importants s’opèrent alors, comme l’atteste le
europe Foyer européen : l’Occident Logique terrestre (jusqu'au XVIIIe siècle)
rôle grandissant du Bureau Arabe du Caire à
Logique maritime (à partir du XIXe siècle) partir de sa création en 1916 (Fromkin, 1990).

Structuration tripolaire de l’Orient, assimilé à l’Asie,


à partir de têtes de pont maritimes
L’absorption du Near East
par le Middle East
Expansion de l’empire tsariste
Les événements des années 1910 ont
Fig. 1/ La tripartition européenne de l’Orient à la fin du profondément modifié la donne géopolitique
xixe siècle et toponymique. Les guerres balkaniques de
Le passage au XIXe siècle d’une logique « terrestre » à une logique 1912-1913 se sont terminées par un fort recul
« maritime » a fait l’objet de nombreux débats géopolitiques de l’Empire ottoman en Europe, voire son
(notamment de la part d’Alfred T. Mahan et de Halford J. MacKinder).
quasi-retrait, tandis que la Première Guerre
L’Europe, le Proche-Orient, le Moyen-Orient et l’Extrême-Orient
mondiale s’est conclue par sa disparition et par
peuvent ainsi apparaître comme une quadripartition du Rimland
l’émergence des pays arabes. La notion de Near
de MacKinder.
East, qui était fortement liée à la question
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ottomane et notamment aux Balkans, semble
alors se réduire comme une peau de chagrin tandis que celle de Middle East semble au
contraire s’accroître depuis que la Mésopotamie et la Palestine sont passées sous
mandat britannique, et que celle de Turquie d’Asie, prédominante depuis le XVIIe siècle,
n’a plus lieu d’être. Le 21 mars 1921, Winston Churchill, alors secrétaire d’État aux
colonies, crée un « département du Moyen-Orient » pour superviser la Palestine, la
Transjordanie et l’Irak. Avant cela, il a pris soin de consulter la Royal Geographical
Society, dont la commission permanente des noms géographiques a décidé l’année
précédente que Near East devait renvoyer uniquement aux Balkans et que les terres
allant du Bosphore à la frontière orientale de l’Inde devaient être appelées Middle East.
En 1932, la Royal Air Force regroupe les deux centres de commandement de la région,
le Middle Eastern Command, basé en Irak, et le Near Eastern Command, basé en
Égypte, au profit du Middle Eastern Command dont le quartier général est installé
au Caire. En 1939, c’est l’armée britannique qui opère la fusion de ses commandements.
Le général Wavell en poste au Caire contrôle l’Égypte, le Soudan, la Palestine, la
Transjordanie, Chypre, l’Irak, Aden, le Soudan et le golfe Persique. Le Moyen-Orient

© L’Espace géographique 230


s’étend vers l’ouest et le sud-ouest. Au cours de la guerre, les combats conduisent à
son étirement jusqu’aux Balkans (Davidson, 1960).
Pourtant, ce glissement du Moyen-Orient et son extension au détriment du
Proche-Orient ne va pas sans créer de malaise. W. Churchill (1950), dans ses
mémoires, rapporte ses doutes : « J’ai toujours senti que le nom de ‘‘Moyen-Orient’’
pour l’Égypte, le Levant, la Syrie et la Turquie était mal choisi. C’était le Proche-
Orient. La Perse et l’Irak étaient le Moyen-Orient ; l’Inde, la Birmanie et la Malaisie
l’Orient ; et la Chine et le Japon l’Extrême-Orient. ». La question de l’usage croissant de
l’expression Middle East est posée à plusieurs reprises durant les années 1940 : à
W. Churchill en 1941, à Clement Attlee en 1946, au secrétariat d’État aux Affaires
étrangères étatsunien en 1946. La réponse de C. Attlee est révélatrice d’un processus
qui échappe à la décision politique : la pratique est désormais d’appeler Middle East «le
monde arabe et certains pays voisins» et il ne voit pas de raison de la changer. De même,
Ernest Davies, le sous-secrétaire d’État étatsunien, répond que le terme de Near East, qui
était lié à l’Empire ottoman, est désormais démodé et qu’il est remplacé par celui de
Middle East. Il inclut l’Égypte, la Turquie, l’Irak, la Perse, la Syrie, le Liban, la Jordanie,
Israël, l’Arabie Saoudite, les Émirats du Golfe, le Koweït, Bahreïn, le Qatar, Aden et le
Yémen. En 1948, lorsque est créée à l’ONU, à l’initiative de l’Égypte, une «commission
économique pour le Moyen-Orient», le terme ne semble pas faire problème. Son action
s’étend sur une aire très vaste et englobe des pays qui ne sont ni arabes ni musulmans:
l’Afghanistan, l’Iran, l’Irak, la Syrie, le Liban, la Turquie, l’Arabie Saoudite, le Yémen,
l’Égypte, l’Éthiopie, la Grèce (Davidson, 1960).
Toutefois, on peut penser que, de façon générale, lorsque l’on étudie la notion
de Middle East, il y a une sorte d’obnubilation militaire qui oblitère le fait que cette
notion est rapidement passée dans le langage commun. L’article de R.H. Davidson
(1960) est révélateur de cette tendance. Celui-ci, comme W.B. Fisher (1947) auparavant
ou Henry Laurens récemment (1999), lie étroitement l’évolution de la notion de Middle
East à celle de la présence militaire britannique puis étatsunienne dans la région. Ceci
s’explique en partie par le contexte de l’époque. R.H. Davidson publie son article
dans Foreign Affairs et introduit sa réflexion par la doctrine Eisenhower, formulée
par le président étatsunien devant le congrès du 5 janvier 1957 et qui consiste à
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limiter la déstabilisation du Moyen-Orient par le communisme grâce à des aides
économiques militaires. Il adopte donc d’emblée un point de vue géopolitique.
Pourtant, c’est oublier que la notion de Middle East n’est pas l’apanage des militaires
et que les gens se la sont assez vite appropriée, comme par exemple dans l’ouvrage de
Sir Frederic G. Kenyon (1929), directeur du British Museum : How to Observe in
Archaeology, Suggestions for Travellers in the Near and Middle East.
On constatera au passage qu’il y a eu très vite une contraction des deux notions
Near East et Middle East. L’expression the Near and Middle East est utilisée dès 1920
dans les articles du New York Times. Ce qui sépare Near East et Middle East semble pour
certains moins important que ce qui fait l’unité de l’ensemble, et confirme l’absence de
séparation nette entre les deux. Il est révélateur qu’en 1931 le livre de René Grousset,
Les Civilisations de l’Orient, paru en France en 1929, a été publié aux États-Unis sous le
titre The Civilizations of the East, et que le titre du premier volume, L’Orient, a été traduit
par The Near and Middle East. Par ailleurs, l’invention de la notion de « Croissant fertile »
par James H. Breasted en 1914 est elle aussi le signe de l’unité nouvelle donnée à cet
espace et de la centralité qu’on lui redécouvre dans l’histoire (Capdepuy, 2008).

231 Vincent Capdepuy


La réactualisation de la centralité de l’espace syro-irakien
Plusieurs facteurs ont contribué à cette unification du Near East et du Middle East
et à l’émergence d’une nouvelle notion de Middle East centrée sur l’espace syro-irakien.
Tout d’abord, le nationalisme arabe, qui s’est développé au XIXe siècle, s’affirme
durant la Première Guerre mondiale et fait émerger une nouvelle centralité, distincte
de la centralité turque et de la centralité perse qui avaient été au cœur des notions de
Near East et de Middle East avant 1914. En 1916, à l’occasion d’un échange de lettres
entre Sir Henry MacMahon, haut-commissaire en Égypte, et Hussein, le chérif de
La Mecque, ce dernier obtient la promesse mal comprise d’un « grand royaume arabe »
qui engloberait grosso modo toute la péninsule Arabique, la Syrie et la Mésopotamie.
Mais le rêve hachémite se brise à la fin de la guerre lorsque l’Orient arabe est partagé
entre les puissances mandataires et que Faysal, troisième fils de Hussein, est chassé de
Damas par les troupes françaises en 1920. En 1932, l’Irak devient indépendant et entend
alors se mettre à la tête du monde arabe émancipé en jouant le rôle qu’avait tenu la
Prusse au XIXe siècle dans l’unification allemande. Mais les divisions sont trop nom-
breuses. C’est l’Égypte qui finit par jouer le rôle d’unification du monde arabe, à partir
de 1943. Le protocole d’Alexandrie qui donne naissance à la Ligue des États arabes est
signé le 7 octobre 1944 et la Ligue est officiellement proclamée le 22 mars 19456.
Un autre facteur a permis la cristallisation de la nouvelle notion de Middle East
autour de l’espace syro-irakien : l’effacement de la barrière du désert syrien grâce à la
modernisation des moyens de communication (Kirk, 1952). À partir de 1919, plusieurs
traversées en voiture sont tentées à travers le désert, notamment par des contrebandiers.
Leur réussite attire l’attention des Britanniques et des Français. En avril 1923,
Norman Nairm, le consul britannique à Damas, un riche marchand syrien, le consul à
Beyrouth et quelques intéressés se lancent dans la traversée jusqu’à Bagdad par Rutba,
avec succès. Dès octobre 1923 le Nairn Cross-Desert Mail Service fonctionne entre
Beyrouth et Bagdad ; et très vite, une foule de petites entreprises automobiles les imitent
et se mêlent de transporter des voyageurs à travers le désert (Blanchard, 1925). Le
5 juin 1924, le magazine The Near East écrit que les frères Nairn « ont plus fait dans
l’année passée pour unir les royaumes arabes de Syrie et d’Irak, que tous les hommes
politiques d’Europe et d’Arabie ont été capables d’accomplir en une décennie» (cité par
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Munro, 1980). Des bus commencent à circuler à partir de 1926 et la compagnie n’est
démantelée qu’en 1956, après la crise de Suez.
Parallèlement à cela, le développement de l’aéronautique a conduit à mettre en
place rapidement de nouvelles liaisons aériennes, à l’initiative des militaires (Sykes,
1920). À la conférence du Caire de mars 1921, il est décidé que la Royal Air Force
crée un service régulier entre Le Caire et Bagdad. La ligne Le Caire-Bagdad est
ouverte dès l’été 1921 et en octobre un arrangement est trouvé pour transporter du
courrier civil. En 1929, Imperial Airways Ltd. ouvre entre l’Angleterre et l’Inde un
service postal et un service de passagers avec un vol inaugural de Croydon à Karachi.
6. Les États signataires
du protocole d’Alexandrie
Celui-ci emprunte la « route du désert » de la RAF, qui dès lors devient un maillon de
(1944) : Égypte, Irak, la chaîne impériale. En 1929, la compagnie française Air Orient ouvre un service
Liban, Syrie, hebdomadaire entre Marseille et Beyrouth ; l’année suivante, la ligne est prolongée
Transjordanie. Les États
fondateurs de la Ligue jusqu’à Bagdad via Damas. Enfin, en 1931, un service régulier France-Indochine entre
arabe (1945) : Arabie Marseille et Saigon est établi, incorporant la route du désert Damas-Rutba-Bagdad. La
Saoudite, Égypte, Irak,
Liban, Syrie, même année, c’est la compagnie néerlandaise KLM qui inaugure un autre service
Transjordanie. postal et de passagers entre les Pays-Bas et Java via l’Égypte, Gaza, Amman, Rutba et

© L’Espace géographique 232


Bagdad. À la fin des années 1930, l’entre-deux syro-irakien semble avoir pour ainsi
dire disparu : « Le fait significatif aujourd’hui est la facilité avec laquelle on peut traverser
le désert syrien. La sécurité et la brièveté de cette traversée font aussi que le voyageur
d’aujourd’hui peut avoir le sentiment que le légendaire ‘‘tapis volant’’ s’est miraculeu-
sement matérialisé. La Mésopotamie est maintenant à un jour de la Méditerranée au
lieu d’en être séparée par plusieurs semaines de voyage en caravane » (Grant, 1937).
Le Moyen-Orient apparaît alors comme « le pivot de l’Ancien Monde » (« the hub of the
Old World », Glubb, 1957) (fig. 2).
Enfin, un troisième facteur contribue à donner à cet espace une importance
majeure : le pétrole. L’enjeu pétrolier est également apparu au cours de la Première
Guerre mondiale lorsqu’en 1917 la flotte britannique a manqué d’être immobilisée
par manque de pétrole. Aussi, le 1er décembre 1918, lorsque Lloyd George rencontre
Georges Clemenceau à Londres, presse-t-il ce dernier de concéder au Royaume-Uni
la région pétrolifère de Mossoul accordée à la France lors de la signature des
accords Sykes-Picot en 1916 ; ce que Clemenceau accepte sans contrepartie très
explicite. Dans les années 1920, les ressources pétrolières de la région apparaissent
pourtant encore très marginales. En 1924, les États-Unis fournissent 70 % de la
production mondiale de pétrole. L’exploitation du pétrole persan en représente
juste 3 %. Quant au « gîte mésopotamien », sa production est difficile à évaluer, son
exploitation ayant été retardée par la guerre et les événements qui l’ont suivie (Maurette,
1926). Ce n’est qu’à partir du début des années 1930 que le Moyen-Orient révèle ses
richesses et devient l’enjeu des rivalités entre les compagnies britanniques et étatsu-
niennes. En 1935, la région produit environ treize millions de tonnes de pétrole, soit
moins de 6 % de la production mondiale. Mais comme l’écrit Albert de Boucheman
(1937), si « ce chiffre paraît insignifiant, […] les gisements sont neufs et la prospection,
principalement depuis 1932, s’est abattue sur ces contrées avec une violence

The Middle East – Hub of the old world

Sea Routes Air Routes


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Asia

Europe

Africa

South
America

Australia New
Zealand

Through the Middle East pass all the air and sea routes between Europe and South Asia,
the Far East, Australia and East Africa. It is the meeting place of Europe, Asia and
Africa. It is the only land bridge to Africa. The cross-roads of the World.

Fig. 2/ Le Moyen-Orient, pivot de l’Ancien Monde (d’après Glubb, 1957, modifiée)

233 Vincent Capdepuy


extraordinaire. Les espoirs sont tels que l’Asie antérieure a été qualifiée de ‘‘centre
stratégique mondial des pétroles’’ ».
L’ensemble de ces facteurs a donc contribué à la réactualisation de la centralité
d’un espace qui a joué un rôle majeur dans l’histoire de l’Ancien Monde. « À une
époque où le Moyen-Orient a depuis longtemps cessé d’être la région la plus peuplée
et la plus civilisée de l’Ancien Monde, il a regagné son ancienne position centrale »
(Arnold Toynbee en introduction à Kirk, 1952). Cette centralité serait, pour certains,
liée au fait que cette région est au point de jonction de trois continents : « le pivot tri-
continental de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique » (Held, 2000). On pourrait penser
que ce dernier argument est d’une certaine manière tautologique puisque l’idée même
de division en continents a justement été inventée dans cet espace. En effet, à l’origine
de notre géographie des continents se trouvent deux traditions unies par Jérôme de
Stridon (Ve siècle) : le mythe biblique de la dispersion des trois fils de Noé (Genèse,
10) et la tradition grecque de la division du monde connu en trois continents
(Hérodote, Histoires, IV, p. 42-45). Toutefois, plusieurs faits permettent d’accepter
l’argument. Tout d’abord, les découpages biblique et grec ne correspondent pas aux
limites actuellement acceptées (Lewis, Wigen, 1997 ; Grataloup, 2005). La vision du
Moyen-Orient comme point de jonction des trois continents est une idée moderne.
De plus, on ne peut nier le fait qu’il y a une configuration géographique
particulière : l’isthme afro-eurasiatique, auquel s’ajoutent des isthmes secondaires
dessinés par la mer Noire et la mer Caspienne. Il n’est pas anodin que l’identité
européenne de la Turquie pose question, tout comme l’identité africaine de l’Égypte
et l’identité asiatique de l’Iran. Ceci explique sans doute que les appellations liées à
la notion d’Asie soient passées de mode : Asie antérieure (choisie par Reclus, 1884), Asie
occidentale (choisie par Blanchard 1929) ; ou bien n’aient pas réussi à véritablement
s’imposer : Asie du Sud-Ouest7, Southwest Asia ou Swasia (Cressey 1957, 1960).
Inversement, la notion d’Orient, au sens ancien, a été sévèrement critiquée (Said,
1980) et ce qui aurait pu s’opposer à la diffusion du toponyme de Moyen-Orient.
L’historien américain Marshall Hodgson (1974) avait ainsi proposé la périphrase « du
Nil à l’Oxus » pour éviter d’avoir recours à une notion « européocentrée ». On pourrait
d’ailleurs noter que l’expression de Moyen-Orient a été traduite en arabe dans les
années 1950, al-sharq al-aousat8, qui n’est pas sans rappeler celle de Mashreq.
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L’espace syro-mésopotamien peut être considéré comme le carrefour, le seuil
central de l’Ancien Monde et on pourrait même aller jusqu’à penser que si l’expression
Middle - East - Moyen-Orient l’a emporté c’est au moins en partie en raison de la
connotation introduite par le premier terme. Le Moyen-Orient serait moins le milieu
de l’Orient que le milieu de l’Ancien Monde. Fernand Braudel, dans sa Grammaire des
7. On trouve cette
appellation dans le sous- civilisations (1963), parlait à propos de l’Islam de « continent intermédiaire » ; c’est
titre de la revue exactement l’expression qu’on pourrait aujourd’hui employer pour qualifier le
Paléorient, une revue
pluridisciplinaire de
Moyen-Orient, et a fortiori un Grand Moyen-Orient.
préhistoire et de proto-
histoire d’Asie du Sud-
Ouest qui a été fondée en Grand Moyen-Orient et Greater Middle East
1973 par Jean Perrot et
Bernard Vandermeersch. L’« initiative pour le grand Moyen-Orient » (Greater Middle East Initiative)
8. Asharq al-Awsat est annoncée par l’administration de George W. Bush en janvier 2004 a suscité de
le titre d’un grand
quotidien arabe fondé nombreuses controverses, notamment à propos de cette appellation, Greater Middle
à Londres en 1978. East, qui apparaissait comme nouvelle.

© L’Espace géographique 234


En réalité, l’expression «greater Middle East», où greater reste un adjectif comparatif, 9. http://www.centcom.mil/
apparaît de façon épisodique à partir des années 1950, mais n’est véritablement
utilisée qu’à la fin des années 1970, notamment à l’occasion de la chute du Shah
d’Iran en janvier 1979 et de l’intervention soviétique en Afghanistan en décembre
de la même année. Dès le 20 décembre 1978, alors que les troubles se multiplient en Iran,
cet espace est qualifié par Zbigniew Brzezinski, alors conseiller à la sécurité nationale,
d’« arc de crise » (arc of crisis). Elle exprime clairement l’idée qu’il s’agit d’un espace
conjoncturel dont l’unité tient en premier lieu aux événements et à la crainte d’une
avancée soviétique qui menacerait la région pétrolière du golfe Persique.
Depuis le retrait britannique « à l’est de Suez », en 1967 d’Aden et en 1971 des
émirats du Golfe, aucune puissance occidentale n’est directement présente dans la
région. La stratégie américaine dite des « deux piliers », qui reposait sur l’alliance avec
l’Arabie Saoudite et surtout avec l’Iran, a été complètement remise en cause par la
Révolution islamique de 1979, ce qui a précipité le repositionnement stratégique des
États-Unis dans la région. Le 1er mars 1981, une force militaire permanente est déployée
dans le Golfe: la Rapid Deployment Joint Task Force. Le 1er janvier 1983, elle cède la
place à un véritable centre de commandement, le United States Central Command
(USCENTCOM), qui, comme son nom l’indique, couvre « la partie ‘‘centrale’’ du
monde située entre le Commandement européen et le Commandement asiatique »9. La
zone couverte est à cheval sur l’Asie et sur l’Afrique. Il s’agit d’un espace stratégique
centré sur les réserves pétrolières du golfe Persique, mais dont les limites sont
extrêmement variables en fonction des menaces.
En fait, de manière générale, c’est l’appellation de Middle East qui est utilisée,
tout simplement parce qu’elle est plus courte – et celle de Mideast est de plus en plus
fréquente, mais recouvre une extension géographique plus ou moins large. L’aire
géographique ainsi désignée n’équivaut ni au monde arabe ni au monde musulman.
C’est un espace qui peut s’étendre du Maroc à l’Afghanistan, mais qui n’est pas
réduit à une identité, que ce soit l’islam en tant que religion ou l’Islam en tant que
civilisation. L’emploi de l’expression Greater Middle East en 2004 n’a pas l’importance
que lui a souvent attribuée la presse française. Son utilisation à la fin des années 1970,
puis sa réapparition au milieu des années 1990 et dans les années 2000 sont seulement
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les signes qu’un changement géopolitique et géostratégique survient à ces moments-là.
Ainsi, en 2004, l’utilisation de l’expression de Greater Middle East marque un recentrage
de l’analyse stratégique américaine sur les pays arabes. Au début des années 1980, la
notion de Greater Middle East, centrée sur le golfe Persique et plus largement sur le
Nord-Ouest de l’océan Indien, apparaît comme une reprise de la notion de Middle East
telle que l’avait pensée Alfred T. Mahan. Au début des annéees 1990, elle s’étend vers
l’Asie centrale suite à l’éclatement de l’URSS. Au début des années 2000, elle s’étend
vers l’ouest et intègre pleinement l’espace musulman méditerranéen.

Conclusion
On l’a dit en introduction, notre étude ne peut pas avoir de portée normative. La
portée du discours géographique dans notre société est sans doute trop limitée et
l’histoire même des toponymes de Proche-Orient et de Moyen-Orient montre bien que
ceux-ci tendent à échapper à toute tentative de normalisation. En revanche, on peut
s’interroger sur les règles générales d’utilisation de ces notions. Ainsi, au terme de

235 Vincent Capdepuy


notre analyse géohistorique, on peut établir un certain constat d’usage.
1. La notion anglaise de Levant est utilisée pour désigner la frange méditerranéenne
du Moyen-Orient.
2. La notion de Near East est très peu utilisée pour désigner l’espace contemporain.
Elle reste réservée à un usage historique. En outre, l’espace désigné correspond grosso
modo à l’espace central du Middle East.
3. La notion de Middle East est largement prédominante. Elle s’inscrit pleinement
dans l’actualité. Elle permet de désigner un espace aux contours très variables, dont le
cœur est constitué par l’espace syro-irakien, mais qui peut s’étendre jusqu’au Maroc à
l’ouest et jusqu’à l’Afghanistan à l’est. Elle a une forte connotation stratégique, mais
ne se limite pas aux seules questions militaires. Elle est depuis longtemps passée dans
l’usage commun.
4. La notion de Moyen-Orient correspond à peu près à celle de Middle East. Comme
celle-ci, elle s’emploie préférentiellement dans un contexte contemporain. Toutefois,
elle n’est pas aussi extensive. Ainsi, elle n’englobe jamais le Maghreb, considéré
comme un espace bien distinct. Par ailleurs, elle est parfois accusée d’être un vecteur
de l’impérialisme américain. Pourtant, elle peut être considérée comme moins euro-
péocentrée et plus pertinente pour nommer un espace caractérisé par sa centralité au
sein de l’espace afro-eurasiatique.
5. La notion de Proche-Orient, comme celle de Near East, est préférée pour parler
de l’espace historique du Moyen-Orient avant le XXe siècle, en particulier pour les
périodes antiques, mais cela n’exclut pas qu’elle soit aussi utilisée pour la période
contemporaine. Elle reste alors marquée par l’idée qu’il existe une proximité entre
la France et l’Orient arabe, en particulier le Levant, et tend à être opposée à celle
de Moyen-Orient accusée implicitement de faire
disparaître l’idée d’un antique, et quelque peu
mythique, convivium méditerranéen. L’espace
désigné est donc variable. Soit il correspond à la
Turquie partie méditerranéenne du Moyen-Orient, soit il
Syrie
Afghanistan équivaut tout simplement au Moyen-Orient. Dans
Liban
Iran le premier cas, la notion de Proche-Orient refait
Pays du Maghreb Irak
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Jordanie
Pakistan surgir la césure de l’entre-deux syro-irakien, au
Israël-Palestine
Pays du Golfe détriment de l’unité et de la centralité de cet
Égypte
espace telles qu’elles sont affirmées dans la notion
Arabie Saoudite
de Middle East. Dans le second cas, la confusion
Yémen
Soudan entre les deux notions est totale.
6. La notion française de Levant a disparu, hormis
Le Moyen-Orient
et ses variations
Le Proche-Orient
et ses variations
dans les écrits historiques.
On terminera en proposant une représentation
schématique des notions de Proche-Orient et de
Fig. 3/ Le Proche-Orient et le Moyen-Orient,
Moyen-Orient dans leur emploi actuel (fig. 3). Elle
des notions variables
permet de minimiser la question topographique des
L’inclusion du Soudan, peu habituelle dans la définition limites, qui sont nécessairement floues et mouvantes,
française du Moyen-Orient, est au contraire « normale »
et de mettre en valeur la structure concentrique afin de
d’un point de vue américain et correspond à des liens réels
tenir compte de la logique topologique de centralité
anciens et actuels entre le Soudan et des pays comme l’Égypte
qui nous apparaît constitutive de la notion de Moyen-
ou la Syrie.
Orient - Middle-East.

© L’Espace géographique 236


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