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Biochimie Alimentaire

Chap. Les composés lipidiques

Master I Biochimie Appliquée

Université Akli Mohand Oulhadj de


Bouira.
Faculté SNV – Département de
Biologie.

Présenté par : Dr. CHERGUI Achour.

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Introduction

Les matières premières mises en œuvre par la lipochimie (industrie de transformation des
composés lipidiques) sont les graisses animales et les huiles végétales. Les produits
intermédiaires concernés sont les acides gras, les esters, les alcools gras, les amines
grasses,…etc. distingués selon leur état physique à 20°C, les graisses solides et les huiles
liquides portent le nom commun de graisses ou de corps gras, voir encore de composés
lipidiques.

Une matière grasse comestible ou alimentaire est le plus souvent un mélange de graisses
animales et/ou végétales. Les graisses alimentaires sont essentiellement composées de
triglycérides, qui représentent, de loi, la fraction dominante. Ces lipides apolaires sont
accompagnés de phospholipides et de stérols. La composition en acides gras varie beaucoup
selon l’origine des graisses mises en œuvre et selon les traitements de modifications qu’elles
ont subis.

Les domaines d’application couverts par la lipochimie sont très vastes ; on peut énumérer :

-les détergents qui valorisent les savons, les sulfates et les sulfonates d’alcools gras et les
amines grasses ;

-les cosmétiques utilisant les dérivés d’acides gras comme émulsifiants, agents tensioactifs ;

-les peintures dans lesquelles on retrouve des produits comme les résines alkydes à base de
glycérol et d’acides gras ;

-les plastifiants utilisant également les propriétés d’acides gras insaturés et d’huiles
époxydées.

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Rappels

Les différentes classes de lipides

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Le métabolisme cellulaire des lipides

Les acides gras

Ils sont monoacides, linéaires, à nombre pair de carbone, soit saturés, soit insaturés.

Les acides gras saturés [CH3 -(CH2)n - COOH]

Acide butyrique (C4) ; acide palmitique (C16) ; acide stéarique (C18) ; acide
lignocérique (C24).

Le premier carbone est le carboxyle. Exemple :

Acide palmitique CH3 - (CH2)14 - COOH

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Les acides gras monoinsaturés

Dans les acides gras insaturés, la position de la première double liaison peut
s’exprimer :

 soit en partant du carboxyle (1er carbone) ; le symbole est Δ


 soit en partant du Méthyl (dernier carbone) ; le symbole est oméga ω. En
médecine clinique et en biologie, la désignation des acides gras insaturés la
plus courante est celle qui fait appel au symbole oméga (ω).

Exemple :

L’acide oléique C18 : 1 ω9

L’acide oléique possède 18C, une double liaison en oméga 9 (ω 9) ce qui s’écrit C18 :1 ω9.

C’est un acide gras très abondant dans les graisses végétales et animales.

La présence d’une double liaison dans un acide gras entraîne une isomérie cis-trans.

Les acides gras naturels sont cis :

Les acides gras polyinsaturés

1. Famille linoléique (ω6)

-Acide linoléique C18 :2 ω6

L’acide linoléique est un acide gras indispensable (besoins quotidiens : 3-4 g).
C’est un acide gras en C18 avec 2 doubles liaisons (ω 6, 9)

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Il conduit par voie enzymatique à l’acide arachidonique dans l’organisme.

-Acide arachidonique C20 : 4 ω6

Il possède 4 doubles liaisons en ω6, 9, 12, 15


L’acide linoléique donne naissance dans l’organisme à l’acide arachidonique à 20
C et 4 doubles liaisons. En l’absence d’acide linoléique dans l’alimentation, l’acide
arachidonique devient indispensable.

2. Famille linolénique (ω3)

Acide α linolénique C18 : 3 ω3

Il possède 3 doubles liaisons en ω3, 6, 9

Propriétés des acides gras

A. Propriétés physiques

1-Solubilité

-L’acide butyrique à 4C est soluble dans l’eau, puis la solubilité des acides gras diminue
progressivement avec l’augmentation de la longueur de la chaîne carbonée : et ils sont
insolubles dans l’eau à partir de 10°C.

-Ils sont solubles dans les solvants organiques apolaires : benzène, chloroforme, …

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2-Le point de fusion

-Augmente avec la longueur de la chaîne carbonée.

-Diminue quand le nombre de doubles liaisons augmente.

-Ils se présentent à l’état liquide à 20° C, si le nombre de C < 10 et solide si ce nombre = 10.

B. Propriétés chimiques

Oxydation des doubles liaisons

-L’oxydation par l’oxygène de l’air conduit au rancissement des graisses

-L’oxydation enzymatique intracellulaire de l’acide arachidonique par la cyclooxygénase


(COX) (cyclisation + oxydation) conduit aux prostaglandines qui sont des médiateurs
inflammatoires très actifs et rapidement dégradés.

Les prostaglandines interviennent dans :

-La contraction des muscles lisses (intestin, utérus, vaisseaux) ;


-La régulation métabolique.
-L’agrégation plaquettaire. L’inhibition de la cyclooxygénase des plaquettes par l’aspirine est
utile en thérapeutique (antiagrégant plaquettaire).

Formation de sels de sodium ou potassium

Ce sont des savons à propriétés moussantes, mouillantes et émulsionnantes.


Les savons se dissocient en milieu aqueux pour donner : Na+ + R-COO-
L’anion a 2 pôles :

Plus de 60% d'AGT consommés proviennent des aliments transformés tels que les
produits de boulangerie et les repas rapides. Les AGT d'origine naturelle proviennent de la
bio-hydrogénation ruminale des acides gras polyinsaturés. Les AGT concernés par la
réglementation sont seulement les AGT industriels monoinsaturés alors que la définition
donnée auparavant par les institutions canadiennes, américaines et danoises incluait les
monoinsaturés et les polyinsaturés contenant au moins une double liaison en position trans.

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La différence entre les AGT naturels et industriels réside essentiellement dans la position de
la double liaison sur la chaîne carbonée. Dans le cas des AGT naturels, la double liaison est
située majoritairement sur le carbone 11, alors que dans le cas des AGT industriels, le produit
majoritaire est l'acide élaïdique C18 :1 trans-9 (figure 1.2). Cette différence dans la
distribution des AGT est illustrée sur la figure 1.3. Dans les huiles partiellement hydrogénées,
13.7% de l'acide gras trans total est l'acide vaccenique trans-\\ (Precht et Molkentin, 1995) ;
alors que dans le gras du lait, c'est 46.6% de l'acide gras trans total (Precht et Molkentin,
1996). D'après Willet et al. (1993), l'acide élaïdique présent en quantité plus élevée dans les
huiles végétales hydrogénées, pourrait être à l'origine des effets nocifs de ces acides gras trans
industriels.

Applications industrielles

Le raffinage est pratiqué dans le but d’éliminer les constituants gênants des matières grasses
brutes : acides gras libres, phospholipides, mucilages (polysaccharide ou gommes), cires,
produits d’oxydation, odeurs et saveurs trop prononcées, pigments, métaux lourds, pesticides
et mycotoxines, considérés comme des résidus contaminants issus de la matrice utilisée
comme matière première pour l’extraction et qui peut être d’origine animale et végétale. Le
raffinage ne modifie pas notablement la composition globale des corps gras.

Après le raffinage, plusieurs procédés de transformation sont appliqués aux matières grasses,
notamment les huiles végétales, dans le but de modifier leurs caractéristiques physico-
chimiques. Ces transformations permettent de créer des produits adaptés aux besoins
culinaires et industriels ainsi que des produits « nouveaux » à teneur en lipides réduite. Les
différents procédés sont :

Hydrogénation

L’hydrogénation, selon qu’elle est sélective ou non sélective consiste à saturer en partie ou en
totalité les doubles liaisons des acides gras insaturés par de l’hydrogène. L’hydrogénation
conduit à la formation d’isomères trans (acide élaïdique : C18:1 trans) dont le métabolisme
est proche de celui des acides gras saturés. Ces transformations permettent de modifier le
point de fusion d’un corps gras et d’améliorer sa stabilité à la chaleur. Cette technique permet
de fabriquer des margarines spéciales pour la pâtisserie, des margarines à partir d’huiles de
tournesol ou de maïs et des pâtes à tartiner à teneur réduite en lipides.

Selon Kemache (2010), l'hydrogénation catalytique des huiles végétales est un procédé
indispensable en industrie agroalimentaire. Il confère aux huiles modifiées une meilleure
stabilité oxydative en ayant la plasticité désirée. Le catalyseur à base de nickel, utilisé en
industrie, n'est actif qu'à haute température et il est non sélectif. Par conséquent, des teneurs
très élevées en acides gras trans (AGT) et en acides gras saturés (AGS) sont obtenues à la fin
de la réaction. Ces acides sont considérés nocifs pour la santé en favorisant les maladies
cardiovasculaires.

L'hydrogénation est une réaction chimique qui correspond à une addition moléculaire de
l'hydrogène sur les doubles liaisons des composés organiques insaturés, en particulier les
acides gras qui composent les huiles végétales. La diminution du nombre de doubles liaisons
lors de la réaction d'hydrogénation permet l'amélioration des propriétés physico-chimiques
telles que l'augmentation du point de fusion et de leur stabilité à l'oxydation et par conséquent,

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la diminution de leur dégradation et de leur rancissement. Les huiles végétales partiellement
ou complètement hydrogénées sont essentielles à la fonctionnalité des aliments: elles facilitent
la manipulation de la pâte à pain ; elles donnent des caractéristiques fonctionnelles aux
produits de la boulangerie comme la tendreté, la légèreté et une aération améliorée pour le
levage et la structure; la bonne stabilité oxydative permet d'augmenter la durée de
conservation du produit.

Cependant, lors de la réaction d'hydrogénation, il n'y a pas seulement une diminution de


doubles liaisons, mais il y a également une formation de ce qu'on appelle communément les
acides gras trans (AGT) par opposition aux acides gras cis présents naturellement dans les
huiles végétales. Les notations « trans » et « cis » correspondent à la position des
groupements portés par les carbones doublement liés.

Plusieurs études ont montré qu'une consommation élevée des aliments contenants des huiles
hydrogénées peut conduire à des maladies cardiovasculaires. En effet, il a été trouvé que les
acides gras trans (AGT) présents dans ces huiles augmentent le mauvais cholestérol (LDL)
tout en diminuant le bon cholestérol (HDL) ce qui n'est pas le cas des acides gras saturés
(AGS). Cette particularité rend les AGT plus nocifs que les AGS.

Mécanisme réactionnel de l’hydrogénation conventionnelle

L'hydrogénation par catalyse hétérogène est le procédé le plus répandu, probablement pour la
facilité de la séparation du catalyseur à la fin de la réaction. Le catalyseur couramment utilisé
en industrie pour l'hydrogénation des huiles végétales est le nickel Raney, développé en 1926
par l'ingénieur américain Murray Raney (US. Patent 1628190, 1927).

La réaction d'hydrogénation est une réaction d'addition; dans un premier temps, l'hydrogène
est adsorbé (à la surface) par le catalyseur. L'acide gras insaturé vient faire de même et la
proximité de l'hydrogène et de la double liaison permet l'addition d'un atome d'hydrogène sur
un des deux atomes de carbone de la double liaison. Puis, l'addition d'un deuxième atome
d'hydrogène vient compléter la réaction et l'acide gras saturé se détache du catalyseur. On
comprendra mieux que lorsqu'une réaction d'hydrogénation est arrêtée avant que toutes les
molécules d'acides gras insaturés aient toutes réagies, donc une hydrogénation partielle, il
puisse y avoir isomérisation de la double liaison. En effet, si l'akène de départ est en
configuration cis, le mécanisme illustré ci-après montre qu'il peut y avoir isomérisation de cis
en trans.

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Mécanisme de la réaction d'hydrogénation d'un alcène en présence du catalyseur à base de nickel (Horiuti
et Polanyi., 1934) In : Nassima Kemache, 2010 (Thèse de Doctorat).

Selon l'AOCS (American Oil Chemists Society, 1989), l'activité du catalyseur lors de la
réaction d'hydrogénation des huiles végétales est déterminée par le nombre de doubles
liaisons saturées par unité de temps par site actif du catalyseur. Cette activité dite globale est
déterminée en mesurant la diminution de l'indice d'iode. Ce dernier indique le degré
d'insaturation des huiles et il correspond à la quantité d'iode adsorbé par 100 g d'huile.
Cependant, cette méthode manque de précision car d'autres composés chimiques, autres que
les acides gras peuvent être hydrogénés.

Outre la saturation des doubles liaisons, d'autres réactions comme l'isomérisation et la


migration cis-trans peuvent avoir lieu lors du processus d'hydrogénation, ce qui conduit à la
formation de divers produits. Dans ces conditions, la notion de sélectivité devient très
importante. La sélectivité a été définie par Albright (1965) comme étant le taux
d'hydrogénation de l'acide linoléique pour se transformer en acide oléique par rapport à
l'hydrogénation des acides oléiques pour donner les acides gras saturés. Pour déterminer cette
sélectivité, Coenen (1986) et par la suite Veldinsk et al. (1997) ont défini les sélectivités Si et
Su à partir du schéma réactionnel ci-après.

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Cependant cette sélectivité ne prend pas en considération les réactions d'isomérisation. En
effet, les c/s-monoènes peuvent provenir d'une hydrogénation directe de C18 :2cis, et
éventuellement de l'hydrogénation de C18 \2trans. En outre, les acides stéariques ne
proviennent pas seulement de l'hydrogénation de C18 Acis mais également de celle de C18 :1
trans. Par conséquent, un schéma réactionnel plus détaillé a été proposé par Plourde et al.
(2004). Les auteurs ont pris en considération toutes les réactions d'isomérisation qui peuvent
avoir lieu parallèlement avec celles d'hydrogénation.

A partir de ce schéma réactionnel, deux nouvelles sélectivités ont été définies (équations 1.3
et 1.4).

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(Si) représente la sélectivité envers l'isomérisation cis-trans par rapport au taux
d'hydrogénation ou de saturation et St réfère à la production des acides gras saturés par rapport
à la formation des acides c/s-monoènes.

L'augmentation de l'activité par l'augmentation de la température conduit à la formation des


teneurs élevées en acides gras trans. Cependant, une température plus élevée diminuerait la
viscosité de l'huile végétale et augmenterait la diffusion d'hydrogène. Cela favoriserait
l'hydrogénation des acides gras insaturés. Malgré cette optimisation, les teneurs en AGT et en
AGS obtenues avec le catalyseur de nickel restent élevées et loin de répondre à la législation.
Certaines études ont complètement délaissé le procédé d'hydrogénation conventionnel pour
expérimenter de nouvelles voies telles que l'hydrogénation électrocatalytique, l'hydrogénation
en présence de fluides supercritiques, l'hydrogénation en utilisant des réacteurs monolithiques
ou tout simplement remplacer le catalyseur de nickel. Une grande partie de cette revue sera
consacrée au dernier point.

Hydrogénation électrocatalytique (électrochimique)

Contrairement à l'hydrogénation conventionnelle qui se déroule à des températures de 150-


225°C et à des pressions d'hydrogène de 10-60 psi, l'hydrogénation électrochimique s'effectue
à basse température (<80°C) et pression atmosphérique. Ces conditions opératoires douces,
permettent de diminuer les teneurs en isomères trans. Par exemple, l'hydrogénation
industrielle dans un réacteur Slurry (Pd/C, 60°C, 145 psi) de l'huile de soya (soja) donne 20%
d'acides gras trans pour un indice d'iode (TV) de 102, alors que l'hydrogénation dans un
réacteur électrochimique en présence de catalyseur de Pd ne donne que 8.5% pour le même
IV.

La première étape concerne l'oxydation de l'eau à travers l'anode pour donner une molécule
d'oxygène et deux protons. Sous l'influence d'un champ électrique, les protons générés vont
migrer à travers la membrane échangeuse d'ions pour être réduits en hydrogène atomique et
moléculaire. Cet hydrogène est par la suite utilisé pour la saturation des doubles liaisons des
acides gras de l'huile végétale.

Inter-estérification (chimique et enzymatique)

C’est le réarrangement moléculaire des acides gras sur le glycérol qui permet d’améliorer les
propriétés physiques et plastiques des corps gras. L’inter-estérification est en général associée
à l’hydrogénation. Cette technique permet de modifier le comportement à la fusion de l'huile
sans modifier la composition des acides gras. La réaction nécessite la présence d'un catalyseur
et se fait à des températures élevées (100-240°C). La vitesse de la réaction est proportionnelle
à la concentration du catalyseur et à la température. Les premiers catalyseurs utilisés étaient
des hydroxydes alcalins. Cependant, La réaction est lente malgré la haute température
(200°C).

Mélange des huiles de base

Cette méthode consiste à mélanger des huiles liquides qui ont une teneur élevée en acides gras
insaturés avec des huiles hautement saturées. Cela permet d'avoir par exemple, des margarines

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molles ou semi-dures. Cependant, il est difficile de contrôler le point de fusion et la plasticité
de ces mélanges.

Fractionnement

Le fractionnement consiste à séparer un corps gras en fractions de caractéristiques physiques


différentes. Un corps gras (par exemple l’huile de palme) peut ainsi être séparé en une huile et
une fraction solide dont le point de fusion est plus élevé que le corps gras de départ. Chacune
des fractions obtenues est utilisée pour des usages différents.

Cristallisation fractionnée

Le but principal de cette technique est de réaliser une séparation entre les composants qui ont
un point de fusion élevé (glycérides riches en acides gras saturés) de ceux qui ont un point de
fusion faible (glycérides riches en acides gras mono ou poly insaturés). Selon le but
recherché, cette méthode permet soit d'obtenir de nouveaux produits entièrement différents de
produit initial, soit d'éliminer les composants à haut point de fusion.

La cristallisation fractionnée qui consiste à cristalliser une partie de la fraction solide et à


réaliser la séparation solide/liquide par décantation, filtration, ou centrifugation. À cause de la
délicatesse des séparations, cette méthode est limitée à quelques produits simples et faciles à
séparer tels que l'huile de palme, la graisse de bœuf et certaines huiles hydrogénées. Dans le
cas de ces dernières, la séparation des AGT des autres acides gras est quasiment impossible.

Parmi tous ces procédés de transformation des huiles végétales, l’hydrogénation reste le
meilleur moyen de valorisation industrielle de ces huiles, et forme même l’une des passerelles
importantes, vers l’obtention de produits alimentaires de seconde génération.

Néanmoins, la qualité des produits obtenus lors de la réaction d'hydrogénation dépend de


plusieurs facteurs tels que les conditions opératoires (température, pression d'hydrogène, type
d'agitation et sa puissance) et le type de catalyseur. Actuellement, la réaction s'effectue avec le
catalyseur nickel Ranay qui est remis en cause depuis quelques années suite aux problèmes
de santé causés par les huiles hydrogénées. En effet, ce catalyseur pourrait être rendu
responsable des teneurs élevées en AGT et en AGS présents dans l'huile hydrogénée. Par
ailleurs, l'optimisation des conditions opératoires n'a pas suffit à diminuer ces teneurs. Par
conséquent, plusieurs études ont été consacrées au développement de nouveaux catalyseurs
susceptibles de remplacer le catalyseur à base de Ni. Les catalyseurs à base de métaux nobles,
particulièrement le Pd et le Pt, ont suscité un grand intérêt à cause de leurs propriétés
catalytiques supérieures.

Le nickel de Raney est obtenu par attaque basique, le plus souvent avec l’hydroxyde de
sodium, d’une poudre d’un alliage nickel-aluminium.

Ni/Al(s) + OH- (aq) + H2 O(l) → NiRaney + 3/2 H2(g) + AlO2 - (aq)

L’attaque basique doit être réalisée avec une solution concentrée et un excès de l’hydroxyde
alcalin (20 à 30 % en poids pour la soude). En effet, aux faibles pH, les aluminates précipitent
sous forme de bayérite qui bloque l’accès aux pores et recouvre la surface du nickel.

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2 AlO2 - + 4 H2 O(l) → Al2 O3(s) + 3 H2 O(l) + 2 OH- (aq)

La dissolution de l’aluminium de l’alliage initial, produit un nickel à grande surface (40 à 100
m2/g) possédant une microstructure poreuse rappelant celle d’une éponge. L’activité et la
sélectivité des catalyseurs Ni Raney dépendent largement des conditions de température et de
concentration lors de l’attaque basique ainsi que de la nature de l’alliage Ni-Al.

Utilisation des matières grasses

Il est souhaitable d’utiliser plusieurs types de matières grasses. Leurs apports nutritionnels
(acides gras, vitamines) diffèrent et ils se prêtent plus ou moins bien aux divers usages
culinaires.

Le beurre sera de préférence consommé cru ou fondu. On estime généralement qu’il


commence à se décomposer à 120 °C. Les beurres et les margarines allégées, à 40 % ou 27 %
de lipides, supportent mal la cuisson du fait de leur richesse en eau.

Les margarines au tournesol ou au maïs peuvent être utilisées en remplacement du beurre.


Pour la réalisation de cuissons à feu vif et de fritures, il est préférable d’utiliser
les huiles d’arachide ou d’olive ou encore l’huile de palme ou de coprah (végétaline). Du fait
de leur teneur élevée en acides gras saturés, ces deux dernières huiles supportent des
températures de 200 °C. Une huile de friture ne doit jamais fumer. Il est souhaitable de la
filtrer après chaque usage et de la remplacer après 7 ou 8 cuissons.

Les huiles de soja, colza et noix sont préférentiellement utilisées pour les assaisonnements à
froid.

Les autres huiles (tournesol, maïs, pépin de raisin) peuvent indifféremment servir aux
assaisonnements et aux cuissons.

Transestérification et production de mono glycérides et dérivés

Selon Richard (2011), les esters d’acides gras peuvent être préparés à partir d’huile végétale,
contenant majoritairement des triglycérides, selon deux voies de production : l’estérification
d’acides gras obtenus par hydrolyse des triglycérides ou la transestérification directe de
l’huile végétale, qui est la voie de synthèse la plus largement employée dans l’industrie. Les
matières premières utilisées dans les deux cas sont principalement des huiles végétales de
tournesol, de colza, de soja, de jatropha ou de palme. D’autres matières riches en triglycérides
peuvent être également employées comme les graisses animales ou même les huiles de
fritures usagées qui sont ainsi recyclées avec la réaction de transestérification.

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La figure ci-après montre une réaction générale de transestérification.

C’est une réaction en chaîne qui se déroule en trois réactions successives et réversibles :
1-Conversion des triglycérides (TG) en diglycérides (DG) ; 2-Conversion des diglycérides en
monoglycérides (MG), 3-Transformation des monoglycérides en glycérol (GL). A chaque
étape, une molécule d’esters d’acide gras est libérée.

A température et pression normales, cette réaction se déroule en milieu diphasique : au début


de réaction, une phase « huile » et une phase « alcool » sont présentes tandis qu’en fin de
réaction, une phase est enrichie en ester et une autre en glycérol. Pour cette réaction dans les
proportions stœchiométriques (rapport molaire alcool/huile de 3), en raisonnant en quantités
massiques, environ 1 tonne d’huile et 0,1 tonne d’alcool peuvent donner jusqu’à 1 tonne
d’ester d’acides gras et 0,1 tonne de glycérol.

De plus, à partir des monoglycérides distillés, il est possible d’obtenir des dérivés acides de
monoglycérides. Les plus courants sont les dérivés obtenus à partir de différents acides
organiques : citrique, lactique, acétique, tartrique diacétylé (DATEM : Esters mono- et
diacétyltartriques de mono- et diglycérides : émulsifiant).

Ces dérivés monoglycériques sont utilisés à des fins technologiques pour améliorer la stabilité
des émulsions. Les DATEM sont connus pour leurs propriétés intéressantes dans les produits
de panification où ils agissent comme des agents conditionnants des pâtes et comme agents de
contrôle de la texture du produit fini. Les citroglycérides sont employés en margarinerie
comme agents antiéclaboussant. Ces dérivés citriques permettent également de solubiliser les
agents antioxydants dans les corps gras et augmente ainsi leur efficacité antioxydante. Les

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dérivés succinylés sont employés dans les corps gras et comme agents conditionnants des
pâtes dans les produits céréaliers de cuisson. Les acétoglycérides sont des émulsifiants
particulièrement intéressants pour la stabilisation des mousses. Quand ils sont totalement
hydrogénés, les acétoglycérides ont la particularité de former des solides plastiques très
flexibles ou des films transparents. Ils peuvent ainsi être utilisés comme agents d’enrobage de
différents produits alimentaires (fruits, produits carnés) permettant de les protéger de
l’oxygène et de l’humidité atmosphérique.

Les sucroesters sont des esters d’acides gras obtenus par estérification directe du saccharose
par des esters méthyliques d’acides gras alors que les sucroglycérides sont des mélanges
constitués de monoglycérides et de sucroesters obtenus par transestérification du saccharose et
des triglycérides. Il existe une large gamme de sucroesters présentant différents degré
d’estérification et différentes propriétés émulsifiantes. Ils sont des mélanges relativement
hydrophiles donc faciles à disperser dans l’eau. Leur goût est moins prononcé que celui des
monoglycérides, et de surcroît, ils sont facilement hydrolysables sous l’action de la chaleur.
Les possibilités théoriques d’emploi sont assez nombreuses : crèmes glacées, produits de
cuisson, margarines, sauces émulsionnées,…

Les esters de propylène-glycol sont souvent utilisés en mélange avec des monoglycérides
distillés et en particulier comme produits foisonnant en biscuiterie – pâtisserie. Ces esters
consistent en mélanges de mono- et di-esters de propane 1,2 diol d’acides gras obtenus à
partir d’huiles et de graisses alimentaires. Comme la structure chimique du polyol comporte
deux fonctions alcool au lieu de trois dans le glycérol, ces molécules sont moins hydrophiles
que les monoglycérides d’acides gras.

La production d’esters alkyliques par transestérification d’huile végétale génère un autre


coproduit, le glycérol (propan-1,2,3-triol) appelé aussi glycérine. En effet, la stoechiométrie
de la réaction donne une mole de glycérol pour chaque mole de triglycéride consommée. Le
glycérol se présente sous la forme d'un liquide transparent, visqueux, incolore, inodore, non
toxique et au goût sucré. Il peut se dissoudre dans les solvants polaires grâce à ses trois
groupes hydroxyles. Il est notamment miscible dans l'eau et l'éthanol.

Le glycérol végétal est utilisé dans de nombreux domaines d’applications, principalement :

· La pharmacie : utilisé comme hydratant, il améliore l'onctuosité et la lubrification des


préparations pharmaceutiques (ex : suppositoires, sirops contre la toux).
· La cosmétique : il sert d’agent hydratant, solvant et additif de lubrification. Il a meilleur goût
et est plus soluble que le sorbitol qu’il remplace souvent (ex : dentifrices, rouges à lèvres,
bains de bouche, crèmes hydratantes, produits capillaires et savons à la glycérine comme les
savons de Marseille).
· L’alimentation : il est utilisé comme humectant (pour retenir l’humidité), solvant (support
d’arôme), émulsifiant, stabilisant et épaississant dans une large variété de produits
alimentaires. En Europe, il est utilisé comme additif alimentaire sous le numéro E422.
· L’industrie chimique : c’est un synthon à la base de synthèses de nombreux produits
chimiques comme le gaz de synthèse (CO, H2), le carbonate de glycérol, des polymères
(polyéthers, polyesters) ramifiés…

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Les esters éthyliques d’huile végétale (EEHV)

La réaction de transestérification peut également être conduite avec de l’éthanol, et plus


particulièrement du bioéthanol. La production d’EEHV augmente sans cesse du fait de ses
multiples applications dans le domaine alimentaire et cosmétique. En effet, ces molécules sont
à 100% d’origine biomasse grâce à l’utilisation d’huiles végétales et de bioéthanol. Le préfixe
bio indique que l'éthanol est produit à partir de la biomasse et n'a pas de lien avec le terme «
bio » parfois utilisé pour désigner l'agriculture biologique. Le bioéthanol est produit soit par
fermentation de sucres (glucose ou fructose C6H12O6) extraits de plantes sucrières
(betterave, canne à sucre…) à l’aide de levures ou bien par hydrolyse enzymatique (amylase)
de l’amidon contenu dans les céréales (blé, maïs,…) précédant l’étape de fermentation.

Les esters méthyliques d’huile végétale (EMHV)

Beaucoup de procédés actuels de synthèse d’esters alkyliques utilisent le méthanol comme


alcool dans les réactions d’estérification d’acides gras ou de transestérification de
triglycérides. Les taux de conversion ainsi que les rendements sont très satisfaisants avec cet
alcool, ce qui s’explique par son pouvoir solvant, son faible encombrement stérique et son
caractère acide plus élevé par rapport aux autres alcools linéaires ou ramifiés. Cependant, le
méthanol est aujourd’hui essentiellement produit à partir de ressources fossiles. En effet,
industriellement, le méthanol est obtenu à partir d’un gaz de synthèse contenant du monoxyde
de carbone (CO), du dihydrogène (H2) et de faibles quantités de dioxyde de carbone (CO2).
Le procédé est conduit en phase gazeuse à des pressions et températures élevées, à l’aide de
catalyseurs cuivrés tels que Cu/ZnO/Al2O3 et Cu/ZnO/Cr2O3 [5]. Le gaz de synthèse est,
quant à lui, produit majoritairement par reformage à la vapeur d’eau (ou d’hydrocarbures
liquides) ou par oxydation partielle du gaz naturel. Il peut aussi être obtenu par gazéification
du charbon.

Les esters de Sorbitane

Les esters de Sorbitane (Ex. Tween 20, Tween 80) sont d’autres molécules issues de
l’estérification des acides gras, et connaissent de vastes applications. Ils forment une classe
de tensioactifs non ioniques dérivés du Sorbitane par estérification d'une ou plusieurs de ses
fonctions alcool ou phénol. Ils sont utilisés comme émulsifiants dans la préparation
d'émulsions et de crèmes à usage pharmaceutique et cosmétique. Certains d'entre eux sont
également utilisés comme additifs alimentaires. Lorsqu'ils sont utilisés seuls, ils produisent
des émulsions stables de type w/O (Water/Œil : Eau dans huile : les plus courants ont
une HLB (Hydrophilic Lipophilic Balance) comprise entre 1,8 et 8,6), mais ils sont
fréquemment utilisés avec un polysorbates dans des proportions variables pour produire des
émulsions w/O ou o/W à volonté avec différentes textures et consistances.
Les esters de Sorbitane sont parfois désignés par le nom de marque Span. Six d'entre eux sont
utilisés comme additifs alimentaires.

17
Numéro E Nom chimique Formule topologique HLB

E491 Monostéarate de sorbitane (Span 60) 4,7

E492 Tristéarate de sorbitane (Span 65) 2,1

E493 Monolaurate de sorbitane (Span 20) 8,6

E494 Monooléate de sorbitane (Span 80) 4,3

E495 Monopalmitate de sorbitane (Span 6,7


40)

E496 Trioléate de sorbitane (Span 85) 1,8

Toxicologie

Le monopalmitate de Sorbitane est un émulsifiant. Il est employé dans le même type de


denrées alimentaires que le monostéarate de Sorbitane (E491). Peu de données relatives à cet
additif sont disponibles. Néanmoins, plus globalement, différentes études réalisées sur des
souris suggèrent que la consommation d’émulsifiants pourrait occasionner une augmentation
de la perméabilité de la barrière intestinale et favoriser ainsi les maladies inflammatoires
chroniques de l'intestin, une adiposité accrue (syndrome métabolique) et le développement de
diabètes. Ces additifs pourraient également perturber l'équilibre de la flore intestinale,
favorisant les réactions auto-immunes. Enfin, l'inflammation intestinale chronique
occasionnée par ces émulsifiants pourrait promouvoir l'apparition d'un cancer du côlon.
18
Les lécithines

La lécithine naturelle est présente dans toutes les cellules vivantes et est un constituant
important des cellules nerveuses et cérébrales. La lécithine commerciale provient
principalement de l'huile de soja, qui peut être génétiquement modifiée. D'autres sources sont
le jaune d'œuf, et les graines de légumineuses, notamment les arachides et le maïs, qui
peuvent également être transgéniques.

Selon la définition de l’extrait du dossier de l’UE 231/2012, les lécithines sont des mélanges
ou des fractions de phosphatides obtenus au moyen de procédés physiques à partir de
substances alimentaires animales ou végétales; elles comprennent également les produits
hydrolysés obtenus par l’utilisation d’enzymes inoffensives appropriées. Le produit final ne
doit présenter aucune activité enzymatique résiduelle. Les lécithines peuvent être légèrement
blanchies en milieu aqueux au moyen de peroxyde d’hydrogène. Cette oxydation ne peut
modifier la structure chimique des phosphatides des lécithines.

Selon la définition données par la commission JECFA : Joint FAO/WHO (Food and
Agriculture Organization / World Heath Organization : Organisation mondiale de la santé)
Experts Committee on Food additives : Comité international mixte FAO/OMS d’experts sur
les additifs alimentaires : Habituellement préparé à partir de graines oléagineuses utilisées
pour l'alimentation, en particulier le soja ; peut également être préparé à partir de sources
animales ; un mélange complexe de phosphatides insolubles dans l'acétone, constitué
principalement de phosphatidylcholine (P.C), de Phosphatidyléthanolamine (P.E) et de
phosphatidyl-inositol (P.I), combinés avec diverses quantités d'autres substances telles que
des triglycérides, des acides gras et des hydrates de carbone ; les catégories raffinées peuvent
contenir n'importe lequel de ces composants dans des proportions et des combinaisons
variables selon le type de fractionnement utilisé ; ses formes sans huile, la prépondérance des
triglycérides et des acides gras est éliminée et le produit contient 90 % ou plus de
phosphatides représentant toutes ou certaines fractions du complexe phosphatidique total.

Selon la FDA/USA : Food and Drugs Administration : Agence Américaine gouvernementale


responsable de la régulation des aliments, des compléments alimentaires et des médicaments :
La lécithine commerciale est un mélange naturel de phosphatides de choline, d'éthanolamine
et d'inositol, avec de plus petites quantités d'autres lipides. Elle est isolée comme gomme
après hydratation d'huiles de soja, de carthame ou de maïs extraits par solvant. La lécithine est
décolorée, si on le désire, par du peroxyde d'hydrogène et du peroxyde de benzoyle et séchée
par chauffage.

La lécithine est une molécule dite amphiphile, c'est a dire composée de deux parties. Son nom
dérive du grec Lekithos, qui signifie jaune d’œuf car le pharmacien français Théodore Gobley
l'a initialement extrait de l’œuf, au XIXe siècle. La lécithine est un lipide formé à partir d'une
choline, d'un phosphate, d'un glycérol et de deux acides gras.

L’image suivante illustre la structure chimique des différentes fractions composant les
lécithines.

19
Le tableau ci-après montre la composition en mélange de lécithines, de certaines huiles
végétales et graisses animales.

En présence d'eau, les molécules de lécithine vont s'orienter selon leur affinité avec l'eau : la
lécithine est un type de composé tensioactif. Dans l'eau et en présence d'huile, les molécules
de lécithine se regroupent pour former de structures sphériques que l’on appelle des micelles.
On retrouvera les têtes hydrophiles à la surface de ces sphères et les queues hydrophobes à
l'intérieur pour fuir l'eau.

20
Les micelles ainsi formées se dispersent dans l'eau. Leurs surfaces hydrophiles forment des
liaisons hydrogène avec les molécules d'eau, ce qui leur évite de se réunir ou par contacte de
former de micelles plus grosses. Grâce à leur double affinité, les lécithines diminuent l'énergie
libre présente à l'interface entre l'huile et l'eau et augmentent la rigidité du film interfacial.
Ces différentes interactions assurent en partie la stabilité de la mayonnaise.

Grâce à leur positionnement au niveau des interfaces Phase hydrophile/Phase hydrophobe, les
phospholipides des lécithines permettent de diminuer les forces interfaciales, ce qui assure la
stabilité des émulsions. L’image ci-après montre ce phénomène physique :

Extraction des lécithines à partir des huiles végétales (huile de soja)

21
La lécithine végétale est un sous-produit de l’industrie des huileries. Les huiles brutes
obtenues par pressage ou extraites par solvant organique (généralement l’hexane) peuvent être
raffinées pour éliminer un certain nombre de composants considérés comme délétères vis-à-
vis de la qualité de l’huile, dont font partie les phospholipides. En effet, la présence de
phospholipides dans les huiles brutes entraîne une acidification de l’huile, une oxydation des
acides gras due à l’affinité des têtes polaires pour les métaux lourds, une diminution du
rendement du procédé due aux propriétés tensioactives, une désactivation des terres
décolorantes utilisées en fin de raffinage et un colmatage rapide des filtres. Ainsi, les
phospholipides sont éliminés au début du raffinage lors de l’étape de démucilagination ou
dégommage.

Le dégommage consiste à disperser dans l’huile brute chauffée à 60°C, 1 à 3‰ d’acide


phosphorique commercial à 75%. La présence de l’acide va rendre hydratables certains
phospholipides peu polaires (notamment l’acide phosphatidique) par la formation de sels
monovalents. Après une phase de mélange de quelques dizaines de minutes, l’émulsion est
chauffée à 90°C et hydratée avec 2 à 3% d’eau avant d’être brassée à nouveau pendant une
vingtaine de minutes pour permettre l’hydratation de l’ensemble des phospholipides. Le
mélange est ensuite refroidi jusqu’à 50°C pour insolubiliser les phosphatides avant leur
séparation par centrifugation. La « gomme » obtenue est séchée par évaporation via un
évaporateur à couche mince. Cet appareil, utilisé dans l’industrie alimentaire ou chimique,
permet une séparation entre les produits d’intérêt et le solvant à partir de solutions de viscosité
variable. La lécithine est, par la suite, conservée au froid.

La lécithine brute peut encore contenir jusqu’à 33% d’huile. Ainsi, suivant le degré de pureté
souhaité, une étape de déshuilage peut être réalisée par de l’acétone à froid (0°C à 4°C) qui
solubilise les triglycérides et précipite les phospholipides. Pour augmenter davantage la pureté
de la lécithine en phospholipides, il est possible de réaliser plusieurs étapes de lavage mais
cela conduit à utiliser des quantités importantes de solvant (la quantité d’acétone utilisée à
chaque lavage est 5 fois supérieure à la quantité de phospholipides présents). Les lécithines
industrielles trouvées sur le marché peuvent ensuite subir diverses transformations en fonction
des applications visées : purification (pour enrichir le mélange de phospholipides en une
classe particulière) ou hydrolyse partielle (pour augmenter les propriétés fonctionnelles de la
lécithine).

Extraction de la lécithine d’œuf

L’extraction industrielle de la lécithine d’œuf se fait à partir du jaune d’œuf lyophilisé. Deux
protocoles peuvent être appliqués. Le premier consiste à déshuiler le jaune d’œuf par
l’utilisation d’acétone à froid (comme pour déshuiler la lécithine végétale), puis à extraire les
phospholipides à l’aide d’éthanol. Deux produits sont obtenus : une fraction phospholipidique
contenant majoritairement de la phosphatidylcholine, et un précipité protéique. Le second
protocole consiste à réaliser l’extraction des phospholipides par l’éthanol en premier lieu.
Cela permet d’obtenir une fraction enrichie en PC en une seule étape. Le choix d’un protocole
ou d’un autre dépend de la pureté recherchée en PC.

22
Les deux méthodes extraient de façon préférentielle la phosphatidylcholine. La récupération
des autres phospholipides nécessite des étapes d’extraction supplémentaires.

Extraction de la lécithine marine

La lécithine marine est obtenue suite au dégommage de l’huile brute de poisson. Ce


dégommage se fait en présence d’eau acidifiée ou non. Une suite de lavages est effectuée afin
de récupérer la majorité des phospholipides.

Applications

Selon ce qui a été rapporté par Bardeau (2015), pour l’industrie agroalimentaire, une lécithine,
correspond à un additif alimentaire (E322) composé d’un mélange de phospholipides (teneur
supérieure à 50 ou 60% suivant les législations), de cholestérol et de triglycérides (TAG). En
2008, la production de lécithines se situait entre 150.103 et 170.103 tonnes. Si l’on se base sur
un prix de vente moyen de 9,25 euros.kg-1, on peut estimer que le chiffre d’affaire du marché
des lécithines se situe entre 1,4 et 1,6 milliard d’euros. A l’heure actuelle, la source principale
de lécithines est le soja. Cependant, à cause de la législation concernant la vente de produits
issus d’organismes génétiquement modifiés (OGM) et du fait que le soja produit est
principalement d’origine OGM, de nouvelles sources de lécithines végétales sont apparues,
issues du tournesol et du colza. Parallèlement, des lécithines d’origine animale issues du jaune
d’œuf et de divers organismes marins (krill, œufs de poisson) sont aussi produites et
commercialisées. Dans la suite de cette introduction bibliographique, le terme de lécithine
sera assimilé à un mélange naturel de phospholipides.
23
En fonction de leur origine, les lécithines sont différenciées par la proportion des différentes
classes de phospholipides. La phosphatidylcholine (PC) est le phospholipide le plus abondant
dans les membranes des cellules eucaryotes, ce qui explique sa forte proportion dans la
plupart des lécithines. La PC représente entre 29 et 41% des phospholipides totaux des
sources végétales et entre 26 et 76% des phospholipides dans les matrices animales. La
Phosphatidyléthanolamine (PE) est une classe présente entre 15 et 30% selon les sources. Le
phosphatidylinositol (PI) est surtout présent dans les sources végétales, et représente entre 13
et 23% des phospholipides totaux. La phosphatidylsérine (PS) et l’acide phosphatidique (PA),
quant à eux, sont généralement peu présents (moins de 10%). Dans les sources animales, on
note la présence de sphingolipides, lipides phosphorés basés sur un squelette sphingosine au
lieu du glycérol, représentés essentiellement par la sphingomyéline (SM) avec une tête polaire
choline
.
Les différentes lécithines se distinguent aussi par leur composition en acides gras. Les sources
végétales terrestres sont caractérisées par des chaînes d’acides gras contenant, généralement,
au plus 18 atomes de carbone. Les lécithines de soja et de tournesol sont riches en acides gras
polyinsaturés n-6. La lécithine de colza contient principalement de l’acide oléique (18:1 n-9)
et de l’acide linoléique (LA, 18:2 n-6). Cependant, ces trois sources végétales se caractérisent
par une faible présence d’AGPI n-3 (inférieure à 10%) représentés par l’acide α-linolénique
(ALA, 18:3 n-3) chez les espèces végétales. Pour les sources animales, les acides gras
présents peuvent être à plus longues chaînes, notamment pour les phospholipides extraits
d’organismes marins qui se caractérisent par une présence importante d’AGPI n-3 : acide
éicosapentaénoïque (EPA, 20:5 n-3) et acide docosahexaénoïque (DHA, 22:6 n-3).

Les lécithines, de par leur teneur en phospholipides, sont utilisées dans de nombreux secteurs
industriels tels que l’agroalimentaire (produits de boulangerie, margarines, chocolat), la
cosmétique ou la pharmacie. En agroalimentaire, les phospholipides sont utilisés pour leurs
propriétés technologiques.

En effet, grâce à leur caractère amphiphile, ces molécules ont des propriétés émulsifiantes en
se positionnant à l’interface huile/eau d’une émulsion et en stabilisant ainsi les globules de
gras. Les phospholipides sont aussi utilisés comme agent épaississant, dans la préparation de
crèmes par exemple ou pour leurs propriétés antioxydantes. En pharmacie et cosmétique, les
phospholipides sont utilisés, soit pour leurs propriétés émulsifiantes, soit pour leurs propriétés
d’auto-assemblage leur permettant d’encapsuler des molécules thérapeutiques. En
cosmétique, les phospholipides sont aussi utilisés pour leur effet mouillant qui Les
phospholipides jouent aussi un rôle important au niveau nutritionnel, soit comme vecteurs de
choline (via la PC) ou de sérine (via la PS), soit comme vecteurs d’acides gras indispensables
ou essentiels. Par exemple, dans la PC, la choline limite les dépôts adipeux hépatiques et
améliore le métabolisme des triglycérides en s’incorporant dans des lipoprotéines
responsables du transport des triglycérides hépatiques vers le foie. Ainsi, chez des patients
traités avec de la lécithine de soja (3,5 g de lécithine, 3 fois par jour), les taux de cholestérol et
de triglycérides sanguins diminuent après 30 jours de traitement.

24
Les phospholipides participent donc à la prévention des risques cardiovasculaires. La PS
cérébrale semble jouer un rôle important dans les phénomènes de neuro-protection en
modulant l’apoptose cellulaire (même si le mécanisme exact reste encore à élucider) et en
régulant un certain nombre d’activités enzymatiques. Plusieurs études d’intervention évaluent
l’effet de l’ingestion de PS sur les fonctions cognitives, que ce soit dans la survenue de la
démence ou sur l’évolution (et possiblement la réduction) des symptômes cognitifs chez des
patients diagnostiqués comme déments.

Parallèlement, les phospholipides sont des vecteurs d’acides gras au même titre que les
triglycérides. On peut donc leur attribuer les fonctions physiologiques associées, notamment
des fonctions dans la prévention d’un certain nombre de pathologies : inflammatoire (fibrose
cystique, l’arthrite rhumatoïde), cardio-vasculaire, voire neuro-dégénérative et psychiatrique.
Enfin, l’intérêt des phospholipides par rapport aux triglycérides est une amélioration de la bio-
accessibilité des acides gras comme l’attestent des études menées sur modèle animal et chez
des enfants prématurés.

Les lipides polaires en cosmétique

Les lipides polaires constituent une classe à part dans les matières grasses puisque comme
leur nom l’indique, ces lipides possèdent une partie hydrophile qui leur permet de jouer un
rôle prépondérant au niveau des interfaces que ce soit dans les organismes vivants ou dans les
systèmes dispersés.

Ces lipides polaires sont également connus par certaines de leurs sous-classes telles que les
lécithines, phospholipides, glycolipides et autres structures plus ou moins complexes. Ces
composés ont fait l’objet d’études importantes tant au niveau de la biologie, de la médecine,
de l’alimentaire et dans le domaine de la cosmétique. Il a été découvert il y a plus d’un siècle
que ces lipides polaires constituent la membrane cellulaire de tout organisme vivant et que par
conséquent ils influencent tous les processus métaboliques. L’industrie alimentaire les utilise
abondamment dans des préparations aussi recherchées que le chocolat, la baguette française
ou les poudres de lait instantanées mettant à profit leurs propriétés mouillantes ou
émulsionnantes.

L’industrie cosmétique tire d’ailleurs partie de celles-ci dans les produits de maquillage pour
disperser efficacement les pigments. Plus récemment, les produits de soin utilisent ces lipides
membranaires comme émulsionnant parfaitement toléré et que le marketing revendique
quelque fois sous le terme de biocompatible.

25
Grâce à leur origine membranaire, la diététique utilise les phospholipides comme complément
nutritionnel pour protéger nos membranes dans la lutte contre le vieillissement. La cosmétique
en fait de même depuis que les liposomes furent découverts et leur intérêt en tant que vecteur
de principe actif ou tout simplement en tant qu’actif hydratant.

La suite présentera donc les deux aspects de ces molécules naturelles complexes c’est-à-dire
leurs propriétés technologiques et physiologiques mais, comme on le verra, ces deux aspects
sont bien souvent utilisés en même temps tant ils sont difficiles à dissocier.

Les phospholipides sont les composants essentiels des membranes cellulaires et sont donc
présents dans tous les organismes vivants. La principale classe de phospholipides naturels est
représentée par les glycérophospholipides qui dérivent du glycérol. Commercialement, les
phospholipides sont principalement extraits du soja. Les phospholipides de soja contiennent
plus de 70 % d’acides gras mono- ou polyinsaturés mais des procédés d’hydrogénation
permettent également d’obtenir des phospholipides aux acides gras saturés suivant le type
d’utilisation.

La nature amphiphile des phospholipides leur permet d’agir comme coémulsifiants dans les
systèmes eau/huile et huile/eau ainsi que comme épaississant, dispersant ou agent mouillant.
Les phospholipides sont une source importante d’acides gras essentiels stables comme les
acides linoléique et linolénique qui jouent un rôle essentiel au niveau de la fonction barrière
de la peau (Prottey, 1977). Les phospholipides lient l’eau et leurs propriétés filmogènes
contribuent à améliorer l’hydratation de la peau. Ce sont des substances non allergéniques,
non irritantes irritantes qui permettent de diminuer l’irritation causée par les autres surfactants
(Billek, 1991).

La lécithine et les phospholipides qu’elle contient confèrent aux produits cosmétiques un


toucher non gras, très agréable. Il existe une classe de phospholipides contenant une structure
« sphingosine » permettant le classement dans les sphingolipides et que l’on trouve
principalement dans les sources d’origine animale telle que le lait et l’œuf. Bien que peu
utilisée aujourd’hui la sphingomyéline présente un potentiel important comme actif puisque
son hydrolyse sur la peau se traduit par un apport de céramide aux acides gras très proches de
ceux de la peau.

26
Moins connus, les glycolipides contiennent une partie polaire sucrée et l’on distingue de la
même façon les glycéro- et sphingoglycolipides. Si les glycéroglycolipides sont
préférentiellement rencontrés dans les plantes, les formes sphingosyl- sont présentes en
quantités minoritaires comme par exemple les cérébrosides ou glycosylcéramide qui
contiennent la précieuse molécule.

Exploration des propriétés physico-chimiques des phospholipides (PL) en industrie


cosmétique
Ces phospholipides possèdent des propriétés structurelles permettant d’obtenir différentes
organisations en phase aqueuse. Les formes « lyso- » ne contenant qu’une chaîne grasse
forment préférentiellement des micelles alors que des structures telles que la
phosphatidylcholine ou la sphingomyéline s’arrangent plutôt en bicouches se refermant sur
elles-mêmes (liposomes). Une autre fraction, la Phosphatidyléthanolamine, forme des
structures lamellaires en présence de calcium.

Toutes ces phases permettent des applications différentes allant des très faibles teneurs en eau
(micelles inverses) en passant par les émulsions lamellaires, les émulsions huile/eau et les
liposomes pour ne citer que les plus connues.

Dans l’industrie cosmétique, les premières applications furent réalisées en maquillage ou la


liaison du groupement phosphate sur les pigments permet de les disperser dans la phase grasse
tout en évitant leur agrégation. Cette propriété s’accompagne d’une baisse de la viscosité
intéressante par exemple lors des coulages des rouges à lèvres.

De nombreuses préparations de soins huile/ eau utilisent comme émulsionnant principal ou


secondaire une fraction de lécithine ou de phospholipides permettant de réduire ou d’éviter la
présence d’émulsionnant de synthèse.

Plusieurs études ont montré que ces émulsions sont généralement parfaitement tolérées et que
des propriétés hydratantes apportent des revendications additionnelles. Très souvent mis en
avant, le toucher de ces formulations est un élément déterminant du choix de ce type
d’émulsionnant. Frais, doux, non gras, sont les termes importants de l’analyse sensorielle de
ce type d’émulsion.

27
La tête polaire constituée par le groupement phosphate des phospholipides, fait des lécithines
de bons acteurs dans les systèmes antioxydants, ce qui explique que ces produits se
conservent beaucoup plus longtemps à température ambiante que les huiles végétales.
D’autres propriétés pourraient encore être décrites mais la capacité de ces molécules à former
des systèmes d’encapsulation est des plus intéressantes. Comme précédemment décrit, des
fractions bien choisies telles que la phosphatidylcholine forment des bicouches se reformant
sur elles-mêmes qui vont pouvoir former des liposomes en présence d’eau. Ces réservoirs de
l’ordre de 200 nm de diamètre peuvent encapsuler des actifs hydrophiles dans leurs espaces
concentriques aqueux ou des molécules lipophiles dans leurs membranes.

Particulièrement proche de la structure de la peau, ces membranes peuvent fusionner avec


celle-ci et transporter les molécules actives plus profondément. Cette technique, qui n’est pas
sans défaut, est une des seules qui permet d’utiliser des ingrédients naturels parfaitement
tolérés.

Émulsions lamellaires

Le principal problème pour l’obtention de crèmes stables est d’éviter la coalescence des
globules gras (crémage) ou la séparation des phases (rupture). La plupart des crèmes
cosmétiques existantes utilisent le principe de monocouches à l’interface huile/eau et
nécessitent donc l’utilisation de surfactants à hauts HLB irritants et/ou d’origine synthétique.
Les surfactants à faibles HLB comme les acides ou alcools gras à longues chaînes sont
incapables de former des films de surface suffisamment résistants pour éviter la rupture des
émulsions.

Les phospholipides sont également caractérisés par des faibles HLB et possèdent donc des
propriétés émulsifiantes théoriques assez faibles. Leur combinaison avec certains acides et
alcools gras permet cependant l’obtention de crèmes parfaitement stables jusqu’à 40 %
d’huile.

28
La figure ci-après représente la structure d’un liposome

Les huiles végétales

L’augmentation de la population mondiale (9-10 milliards d’individus en 2050), du niveau de


vie et des modes d’alimentation dans les principales économies émergentes (Chine, Inde) et a
la raréfaction des ressources pétrolières devraient conduire dans les prochaines années à une
augmentation drastique des besoins alimentaires et industriels en huiles et matières grasses
naturelles.

Il devrait en résulter une compétition accrue au niveau de l’utilisation des terres arables, des
usages alimentaires et non-alimentaires et entre les usages industriels eux-mêmes. Comment
répondre à ce défi majeur sans sacrifier aux contraintes environnementales et sociétales
actuelles et futures ? Nombre d’experts s’accordent sur le fait que l’augmentation des terres
cultivées restera limitée et ne pourra à elle seule constituer une réponse suffisante.

Le même constat pourrait s’appliquer aux rendements des principales cultures oléagineuses :
proches de leur optimum dans les pays industrialisés, ils ne sauraient être significativement
améliorés dans les autres, sans une irrigation efficace et un apport massif d’intrants avec, en
corolaire, des problèmes environnementaux et de ressources en eau. Que dire enfin des OMG
qui, à ce jour, ont davantage suscité la controverse qu’apporté la démonstration de leur
légitimité, voire de leur utilité ? S’il les solutions qui répondront efficacement à ce défi restent
encore à inventer, deux pistes mériteraient d’être développées dés à présent. La première
concerne la réduction des déchets et des pertes tout au long des filières, qui représentent entre
la récolte au champ et le consommateur prés de 50 %. La deuxième, plus indirecte, concerne
le contrôle des prix et la limitation des phénomènes de spéculation sur les denrées
alimentaires qui ont récemment démontré toute la perversité de leurs effets. D’ailleurs, cette
régulation pourrait être efficacement associée à la substitution d’une partie des cultures de
rente par des cultures vivrières.

Aussi, comment assurer dans ce futur fortement contraint, le développement de la lipochimie


? Vraisemblablement par la mise en place de mesures complémentaires à court, moyen et long
termes, parmi lesquelles on pourrait citer :

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– le basculement progressif des biocarburants de première génération (dont les esters
méthyliques d’acides gras) vers ceux de deuxième génération (éthanol, bio-huiles et biogaz,
d’origine lignocellulosique, obtenus par voies fermentaires ou thermochimiques). Il devrait
ainsi se libérer des volumes considérables d’huiles végétales ;

– le développement de cultures dédiées d’oléagineux non alimentaires, adaptés aux zones à


faibles ressources hydriques ou à sols dégradés, pour limiter la compétition avec les cultures
alimentaires.

Plusieurs candidats sont _a l’étude dont les genres Cuphea (acides gras C10-C12),
Lesquerella (acide lesquerolique), Vernonia (acide vernolique), Brassica et Crambe (acide
erucique) et Vernicia (acides éléostéarique). De nombreux efforts au niveau de la sélection, de
l’amélioration variétale, des pratiques culturales ou encore de la valorisation des coproduits
(toxiques pour certains), sont nécessaires pour entrevoir un développement industriel de ces
plantes, notamment dans les Pays du
Sud.

A ce titre, le Jatropha (Jatropha curcas) est un exemple d’échec particulièrement instructif.


Souvent présentées comme « l’or vert du futur », les griefs qui sont faits _a sa culture
industrielle sont à la mesure des espoirs qu’elle a suscités : détournement de terres cultivables,
faibles rendements, besoins élevées en eau, fertilisants et pesticides. . .

Cependant, l’échec de nombreux projets de grande envergure (associant souvent des


multinationales pétrolières) ne doit pas occulter tout l’intérêt d’une culture du Jatropha a
l’échelle locale (sous forme de haies de séparation par exemple) notamment en termes
d’autonomie énergétique ou de complément de revenu ; l’amélioration des procédés de
transformation et la valorisation complète des matières premières en s’appuyant sur le
potentiel de la bioraffinerie, des technologies blanches (génie microbiologique) et de la
chimie verte. Il faudra également répondre _a l’évolution de la demande des différents
secteurs de marche par un portefeuille de molécules et matériaux innovants, adaptés, et
économiquement compétitifs.

Les huiles végétales sont composées essentiellement de triglycérides composés de différents


types d’acides gras. Les acides gras qui entrent dans la composition des huiles végétales
possèdent généralement un nombre pair d'atomes de carbones à cause de la biosynthèse (ou de
biodégradation) qui se fait par addition (ou par suppression) de deux carbones à la fois. Ils
sont caractérisés par le nombre de doubles liaisons présentes sur la chaîne carbonée et par leur
point de fusion. Les huiles végétales sont essentiellement composées d'acides gras à 18
carbones.

Le tableau ci-après illustre une composition comparée des huiles végétales (fruits et graines)
en acides gras :

30
Il s’agit d’un critère important d’évaluation de la qualité des huiles végétales, qui se mesure
par chromatographie en phase gazeuse (CPG).

L’huile d’olive

Parmi toutes les huiles végétales, l’huile d’olive occupe une place particulières, et ce pour
plusieurs raisons : C’est la plus ancienne connue (plusieurs fois millénaire), de plus sa zone de
production correspond à la civilisation gréco-romaine, à travers laquelle, il y avait
développement et expansion de cette culture de production de l’huile de l’olivier, notamment
le bassin méditerranéen appelé d’ailleurs le Berceau de l’huile d’olive. Il s’agit de la seule
huile consommée à l’état vierge (sans raffinage). L’huile d’olive est utilisée pour
assaisonnement et non pas pour la cuisson (ou fritures). Elle provient du fruit de l’olivier :
Olives contenant 20% d’huile (libérée après trituration (ou broyage) des olives).

31
La photo montrée ci-dessus illustre les différents compartiments de l’olive, en tant que fruit de
l’olivier.

Procédé simplifié de l’extraction de l’huile d’olive

Le retrait des feuilles dans le moulin à huile

Dès lors que les olives sont récoltées, si elles sont sales, elles sont au préalable lavées.
Ensuite, elles sont placées dans un moulin équipé d’un ventilateur qui génère un flux d’air
pour ôter le feuillage. Toujours dans une démarche naturelle et écologique, les feuilles sont
placées de côté pour faire du compost.

Le broyage des olives

Deuxième étape pour la fabrication de l’huile d’olive issue d’une culture biologique sans
pesticides : le broyage. Cela se réalise dans un broyeur à marteaux en métal. Les olives sont
alors écrasées contre une maille de calibre 3 à 5 mm. Selon la taille de la pâte que l’on
souhaite obtenir, ce calibre peut être librement réglé.


32
Le broyage a également pour objectif, d’éclater la drupe pulpeuse (olive égorgée d’eau et
d’huile sous forme d’une émulsion de type Eau/Huile) et de concasser le noyau et écraser
l’amande (plantule) et, au fur et à mesure que le broyage se réalise, l’huile commence à sortir.
Traditionnellement, ce procédé est assuré par une meule faite de granite roulée par une force
animale. Actuellement, par le procédé moderne, ce sont des serpentins hachoirs qui remplacent les
meules. L’image ci-après montre l’équipement muni d’un serpentin hachoir pour le broyage
moderne, des olives.

Le pétrissage de la pâte (ou malaxage)

Le broyage des olives a produit une pâte qui contient entre 15 et 20% d’huile d’olive
naturelle. Les 80 à 85% restants sont de l’eau, des matières végétales solides et des noyaux.
L’huile se retrouve dans la pâte sous forme de minuscules gouttelettes. Ce n’est qu’en
pétrissant la pâte que l’on parvient à regrouper ces gouttelettes pour constituer notre huile
d’olive extra vierge. La cuve dans laquelle est malaxée la pâte est entourée d’une bobine
d’eau chaude qui permet de contrôler la température de la masse. Cette température impacte
fortement la production d’huile d’olive 100% naturelle et BIO. En effet, plus la température
est élevée, plus la viscosité de l’huile est réduite ce qui facilite l’extraction. Toutefois, lorsque
la température est trop élevée, l’huile perd de ses bienfaits et de ses arômes. C’est pourquoi,
sur l’huile d’olive extra vierge haut de gamme, vous pouvez retrouver la mention « extraction
à froid » (entre 18 et 24° C).
L’extraction par centrifugation
Cette nouvelle étape dans la fabrication d’huile olive 100% naturelle et BIO se déroule dans
un décanteur. Il s’agit d’une centrifugeuse dotée d’un corps cylindrique avec un axe
horizontal prenant la forme d’une grande vis. Cette machine va profiter de la densité de
chaque élément constituant la pâte pour les séparer. C’est l’huile d’olive qui est moins dense.
Viennent ensuite l’eau, les matières végétales et les noyaux.

La grande vis de la centrifugeuse réalise 4 000 tours par minute. L’objectif est que la partie la
plus dense de la pâte se retrouve à l’extérieur du cylindre tandis que l’huile d’olive reste dans
la partie centrale. Lorsque la séparation est effectuée, un diaphragme est posé afin de contenir
l’huile tandis que les autres composants sont libérés.

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Dans certains procédés, l’extraction de l’huile à partir de la pâte pétrie est réalisée à l’aide
d’une presse (ou pressoir) exerçant une force sur la pâte préalablement mise dans des sacs en
forme de cercle, faits de liège. L’image suivante montre la photo d’un pressoir.

La centrifugeuse verticale

Cette centrifugeuse vient compléter le travail de la précédente pour fabriquer une huile d’olive
100% naturelle et bio de parfaite qualité. Le diaphragme de contention est un mécanisme qui
manque de précision, l’huile contient encore quelques restes solides. Pour les éliminer, la
centrifugeuse verticale dispose d’un disque au centre duquel on place de l’eau. C’est, une fois
encore, la densité de chaque élément qui fera le travail. L’eau se déplace autour du disque,
emportant avec elle les autres solides.

Le stockage de l’huile d’olive

Le stockage de l’huile d’olive est également un procédé de conservation très important qui
garantira la stabilité physico-chimique et microbiologique de l’huile. Ainsi, l’huile d’olive
doit être conditionnée dans un emballage étanche qui joue un rôle primordial dans sa
conservation. L’huile d’olive doit être stockée à l’abri de l’air, l’humidité, la chaleur et la
lumière, afin d’éviter les phénomènes d’oxydation ainsi que les attaques microbiennes,

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notamment les moisissures, qui peuvent, via leur production en lipase, dégrader la qualité
nutritionnelle et organoleptique de l’huile, et ce par l’hydrolyse de la matière grasse contenue
dans l’huile vierge.

L’odeur, la couleur, l’acidité et la viscosité sont autant de paramètres physico-chimiques à


travers lesquels on peut évaluer la qualité de l’huile d’olive.

ci-après des diagrammes d’extraction de l’huile d’olive vierge.

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Composition chimique de l’huile d’olive

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L’huile de soja

Le soja ou soya est une plante oléagineuse et protéagineuse qui constitue dans le monde la
principale source d’huile végétale et de protéines. Il est cultivé à grande échelle aux USA et
en chine. Les graines peuvent être transformées en farines pour l’alimentation humaine ou en
tourteau pour l’alimentation animal. En chine, au Japan et dans les pays d’Asie du sud ouest,
le soja est utilisé principalement pour l’huile et le tourteau.

Le soja [Glycine max (L.) Merrill] appartient à la famille des Fabacées, sous-famille des
Faboideae, tribu des Phaseoleae, sous tribu des Glycininae, genre Glycine.

La plante est annuelle, herbacée, dressée, et peut atteindre une hauteur de 1,5 m. La gousse est
droite ou légèrement courbée, d'une longueur de deux à sept cm. Elle est formée par les deux
moitiés du carpelle, soudées le long de leurs bords dorsal et ventral.

A l'issue de la floraison et de la nouaison, se développe une gousse contenant, selon les cas,
entre 1 et 4 graines. Comme chez les autres légumineuses, la graine se compose
essentiellement d'une enveloppe lisse (la coque) et d'un embryon. Sa taille varie généralement
entre 5 et 10 mm de diamètre et son poids (selon les variétés) oscille entre 50 et 400 mg. La
forme de la graine varie selon les cultivars.

La qualité des protéines est idéale en termes de profil d'acides aminés et de digestibilité. Elles
sont constituées principalement de globuline (90 % des protéines et 36 % du poids de la
graine). La graine de soja contient aussi des glucides non structurels, pour environ 10 % du
poids de la graine, avec principalement des sucres solubles (sucrose, stachyose et raffinose) et
peu d'amidon (moins de 3 % du poids des graines).

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L’huile de soja appelée également soya oïl est l’huile alimentaire la plus consommée a travers
le monde. Onctueuse, légère et de couleur jaunâtre, elle provient de l’extraction de la fève de
soja.

L’huile de soja est ainsi extraite à partir des graines selon les étapes suivantes :

Il est à préciser qu’actuellement, à l’échelle industrielle, des équipements sophistiqués


dénommés souvent huilerie de soja (ou de soya) sont utilisés et sont basés sur l’extraction
par solvant.

1-Nettoyage

Il a pour objectif d’éliminer toutes les impuretés et les graines non saines (non marchandes). Il
est effectué par des nettoyeurs équipés de tamis rotatifs à plusieurs étages assurant
l’élimination des impuretés de grande taille. Ce tamisage est complété par un passage devant
des aimants qui arrêteront les débris métalliques qui risquent d’endommager l’appareillage
industriel.

2-Séchage

Séchage contrôlé est réalisé, permettant de fixer l’humidité des graines à 10%. Ces dernières
sont par la suite, stockées dans des silos pendant quelques jours, afin d’assurer la maturation.

3-Décorticage

C’est l’élimination des enveloppes externes des graines, servant pour l’alimentation animale.
Le procédé de décorticage est aussi contrôlé, permettant d’assurer une quantité minimale de
45 à 50% des matières grasses et protéines végétales. L’opération est assurée par des
décortiqueurs qui brisent les coques afin de libérer les amandes intérieures. Un concassage est
ensuite réalisé à l’aide de cylindres cannelés. Les appareillages de type Rotex De Locker
munis de tamis sont utilisés pour la séparation des amandes et des coques (photo ci-après).

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4-Cuisson

Cette étape se fait dans l’intérêt de fixer une humidité de la graine permettant une extraction
facile de l’huile, avec une stabilité acceptable. La cuisson a donc pour objectif de régler
l’humidité de la graine à 3 à 5% ; accroitre la plasticité des graines, augmenter la fluidité de
l’huile, coaguler la fraction protéique pour faciliter son élimination (et désactiver certaines
enzymes endogènes).

5-pressurage

A travers cette étape, une presse hydraulique est employée, utilisant des pressions allant de
400 à 500 bars. Son rôle est d’extraire la fraction huileuse des amandes écrasées.

6-Extraction

C’est une étape d’optimisation de l’étape précédente où l’extraction mécanique par pression
est accompagnée ici, par une extraction par solvants. Dans le cas de l’huile de soja, on utilise
l’hexane comme solvant d’extraction. Selon les procédés et les équipements employés (où une
optimisation mathématique doit se faire), le ratio souvent appliqué pour l’extraction de l’huile
de soja est 1 à 1,25 L d’hexane / Kg de graines de soja. La température d’extraction doit être
inférieure à 60°C pour garantir une diffusion parfaite du solvant. Après l’ajout du solvant, une
distillation est réalisée afin de séparer l’huile dissoute dans l’hexane, du milieu aqueux. Cette
étape est réalisée par chauffage de l’hexane à sa température d’évaporation, assurant le
passage de ce dernier en phase gazeuse, suivie d’une condensation qui a pour but de récupérer
l’huile séparée dans le solvant, sous forme de gouttelettes isolément du mélange de départ.

7-Raffinage

Contrairement à l’huile d’olive qui se consomme vierge, les huiles végétales (tournesol, colza,
soja,…) nécessitent une étape de raffinage, intervenant après extraction. Le tableau ci-après
résume les étapes de raffinage de l’huile de soja.

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Etapes Conditions opératoires Constituants à éliminer
1-Démucilagination Traitement à l’eau à 70°C + ajout de -mucilages (polysaccharides
(dégommage) H3PO4 suivie d’une centrifugation. végétaux).
-phosphatides.
-glycolipides.
-protéines.
2-Neutralisation a/voie chimique : (ajout de NaOH). -acides gras libres résiduels.
b/voie physique : entrainement à la -déchets d’oxydation.
vapeur. -aflatoxine.
-pesticides organophosphorés.
3-Décoloration Absorption des pigments végétaux sur -pigments caroténoïdes ou
(blanchiment) polymères absorbants (résines de silices, chlorophylliens.
charbon actif,…).
4-Décirage Par filtration ou centrifugation. Cires et substances insilubles à basse
(frigellisation) Cristallisation fractionnée. température.
5-Désodorisation. Injection de vapeur sèche dans l’huile -AG libres.
maintenue sous vide à température -composés volatiles responsables de
élevée (240°C) pendant 180min. mauvaises odeurs.
-stérols et tocophérols.
-insecticides organophosphorés.

Il est ainsi important de préciser que l’huile raffinée doit être conservée dans de bonnes
conditions, à l’abri de l’humidité, de la lumière et de l’aire. Ce qui permettra d’éviter les
processus oxydatifs. Il est aussi intéressant, en utilisant ce modèle industriel d’extraction de
l’huile de soja, de se pencher sur les processus d’extraction et de raffinage des huiles de
tournesol et de colza, importante dans le domaine agroalimentaire.

De plus, à partir des huiles végétales, tel que nous l’avons vu précédemment, il est possible
d’engager des manipulations industrielles secondaires afin de produire d’autres types de
matières grasses, tels que des esters dérivés des acides gras.

Enfin, il est possible de récupérer la fraction légère de la matière grasse végétale, appelée les
essences (huiles essentielles : H.E), représentée par des molécules volatiles à température
ambiante, utilisées notamment en cosmétiques.

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Diagramme d’extraction de l’huile de Colza

Il est aussi important de signaler l’importance de la composition chimique des huiles


végétales en acides gras essentiels, tocophérols, stérol et vitamines liposolubles, dans leur
intérêt nutritionnels et thérapeutique ainsi que leur aptitude à la conservation et à la stabilité
physico-chimique et microbiologique.

D’autre part, se référer au fichier du journal officiel (J.O de la RADP de 2016) : chapitre
Corps gras, afin d’avoir une idée sur les analyses physicochimiques réalisés au vue d’assurer
un contrôle de la qualité des huiles végétales.

Quelques compositions chimiques des corps gras

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AGPI : acides gras polyinsaturés ; AGMI : acides gras monoinsaturés ; AGS : acides gras saturés. La
température de décomposition est la température à partir de laquelle il y a libération de radicaux libre à
partir de l’oxydation thermique des acides gras.

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Composition des huiles végétales en vitamines liposolubles et cholestérol

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Produits alimentaires de deuxième génération issus des huiles végétales et des graisses
animale modifiées ou non modifiées

Fabrication du beurre.

Annexes pour la fabrication des dérivés du lait (Le Yaourt) :

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Annexes pour la fabrication des dérivés du lait (Le fromage)

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Fabrication de la margarine.

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Beurre de cacao et chocolaterie

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