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la revue des

microbiotes
JANVIER 2021

HORS-SÉRIE
COVID-19 ET MICROBIOTES

w w w. l a rev u e d e s m i c ro b i o te s .f r
Hors-série
COVID-19
Microbiotes

éditorial
B ien au-delà de l’opportunité, un hors-
série sur la COVID-19 s’imposait à nous.
La littérature médicale et scientifique s’est
transfigurée avec cette pandémie et le mot-
virus, les microbiotes et leurs conséquences
sur le système cardio-vasculaire, le tube
digestif ou l’appareil respiratoire. Les
aspects pratiques ne sont pas oubliés dans
clef « microbiote » y a fait, aussi, une entrée des domaines moins abordés comme la
remarquée. Ce numéro fournit les données périnatalité ou la pédiatrie. Ces éléments ont
essentielles pour comprendre le lien fort conduit des auteurs à proposer le traitement
entre microbiotes, immunité et SARS-CoV-2.
de la dysbiose comme un traitement adjuvant
Quelques connaissances microbiologiques
de la COVID-19.
pourront satisfaire les curieux. Des données
sont présentées sur les interactions entre le Patrick Vermersch

sommaire
COVID-19, IMMUNITÉ ET MICROBIOTES .......PAGE 2 COVID-19 ET PÉRINATALITÉ ..........................PAGE 9
Cyrille Hoarau Jean-Marc Bohbot

COVID-19 : UN MICROBIOTE INTESTINAL MICROBIOTE, PATHOLOGIE


MODIFIÉ ET DES MANIFESTATIONS CARDIO-MÉTABOLIQUE ET COVID-19 ......... PAGE 10
DIGESTIVES FRÉQUENTES ..................................PAGE 3 Jacques Amar
Stanislas Bruley des Varannes et Philippe Gérard

L’UTILISATION RÉGULIÈRE D’UN GEL


LE MICROBIOTE PULMONAIRE, AU CŒUR HYDRO-ALCOOLIQUE EST-ELLE
DE L’INFECTION COVID-19 ...........................PAGE 4 DANGEREUSE ? ...................................................PAGE 11
Geneviève Héry-Arnaud Jean-Marc Bohbot

DES CORONAVIRUS À LA COVID-19.............PAGE 5 PRO-, PRÉ-, PARABIOTIQUES ET


COVID-19.......................................................PAGE 12
SARS-COV-2, MICROBIOTES ET Bruno Pot
PHYSIOPATHOLOGIE DE LA COVID-19...........PAGE 6

EFFET DU CONFINEMENT SUR L’IMMUNITÉ


CHEZ L’ENFANT ..................................................PAGE 8
Alexis Mosca

Édité par LARENA – 1 ZI du Taillis – 49270 Champtoceaux.

Directeur de la publication : Christian Leclerc ISSN : 2428-4688


Comité de rédaction : Dr Christian Schoen, Achevé d’imprimer : Janvier 2021
Dr Emmanuelle Bocandé Pour toute correspondance, s’adresser à : contact@microbiotes.com
Comité de lecture : Claude Blondeau, PhD,
Sophie Holowacz, PhD. La Revue des Microbiotes est publiée grâce à l’initiative et au concours de PiLeJe
Production : Isabelle Méjean-Plé Laboratoire. Les points de vue et opinions exprimés sont ceux des auteurs.
Réalisation : Terra Firma La responsabilité de PiLeJe ne saurait en rien être engagée par ceux-ci.
Maquette : Lise Delattre
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REPÈRE
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Domaine 4 Phylum 4 Classe 4 Ordre 4 Famille 4 Genre 4 Espèce 4 Sous-espèce


Hors-série Hors-série
COVID-19 COVID-19
Microbiotes Microbiotes

COVID-19, immunité et microbiotes COVID-19 : un microbiote intestinal modifié


et des manifestations digestives fréquentes

Quel rapport entre le microbiote intestinal et


Ce que dit la littérature l’inflammation délétère liée à l’orage cytokinique De façon intéressante, l’abondance de certaines bactéries
observé dans le poumon des formes sévères de la
Ce que nous apprend la semble corrélée à la gravité de la maladie suggérant un
Le SARS-CoV-2 responsable de la
COVID-19 est un virus à ARN qui
COVID-19 ? littérature rôle potentiel de la composition du microbiote dans
Un élément de réponse repose sur l’existence de l’axe celle-ci. Un lien entre microbiote et prédisposition à la
cible des protéines exprimées à la
intestin-poumon où il existe une influence réciproque Si la COVID-19 est essentiellement COVID-19 a par ailleurs été proposé, les microbiotes
surface des cellules des épithéliums
des microbiotes digestif et pulmonaire, tout comme une infection des muqueuses nasales riches en LactobacillusG s’associant à un rôle protecteur
respiratoire, ORL et digestif. Bien qu’il
soit moins virulent qu’un virus de type l’immunité digestive (elle-même dépendante du et du système respiratoire, le système tandis qu’une abondance élevée de KlebsiellaG et de
Cyrille Hoarau
MD, PhD. Ebola, le SARS-CoV-2 est responsable microbiote digestif) est intrinsèquement liée à l’immunité Stanislas digestif peut également être atteint. Ruminococcus gnavusE serait liée à la sévérité de la
Immunologiste d’une forte mortalité en lien avec sa pulmonaire. Il est donc pertinent de déterminer si les Bruley des On sait que le SARS-CoV-2 infecte pathologie5.
et allergologue, formes sévères de la COVID-19 sont la conséquence Varannes
Service transversal forte contagiosité. Les décès sont le MD, PhD. les cellules dotées à leur surface du
d’allergologie et plus souvent la conséquence d’une d’une dysbiose et si les anomalies de la régulation dans Gastro- récepteur ACE2, très présent dans
immunologie
clinique, CHRU,
détresse respiratoire aigüe associée la COVID-19 pourraient être corrigées ou prévenues par entérologue,
Institut des
les cellules intestinales, et il a même Qu’en penser en pratique ?
Tours à une défaillance multiviscérale. La un traitement de type pro-, pré- ou postbiotique. maladies de été démontré que le virus pouvait se
physiopathologie de cette atteinte Plusieurs auteurs ont mis en évidence des altérations l’appareil digestif,
répliquer dans les colonocytes1. Lors de l’infection par le virus SARS-CoV-2, des
respiratoire n’est pas complètement élucidée mais semble significatives des microbiotes pulmonaire et intestinal Nantes
Cette présence intestinale du virus manifestations digestives, peu spécifiques mais parfois
liée à un emballement de la réponse immunitaire avec une chez des patients atteints de la COVID-196,7. D’autres inaugurales, comme une anorexie, une diarrhée ou
et les troubles digestifs associés
signature cytokinique pro-inflammatoire excessive au niveau ont montré une réduction de la diversité habituellement des nausées peuvent être observées, et ce dans une
laissent penser que le microbiote
pulmonaire associée en périphérie à une lymphopénie et à retrouvée dans le microbiote intestinal d’une population
intestinal pourrait être impacté par proportion pouvant atteindre jusqu’à la moitié des
une neutrophilie1. L’inflammation qui découle de cet orage saine (EubacteriumG, Faecalibacterium prausnitziiE ou
cette infection. C’est ce qui a d’abord patients. La plupart de ces manifestations ne requièrent
cytokinique conduit à un dysfonctionnement majeur du LachnospiraceaeF) et une augmentation de germes
poumon2. La mortalité liée à la COVID-19 semble donc été observé dans une cohorte de pas de traitement spécifique, mais doivent faire l’objet
potentiellement pathogènes (StreptococcusG, RothiaG,
prioritairement dépendre d’une réponse immune inadaptée 30 patients atteints de la COVID-19 d’une vigilance accrue en cas de comorbidités et
VeillonellaG et ActinomycesG), particulièrement dans les
où des systèmes de régulation n’ont pu se mettre en chez qui l’infection était associée à notamment d’immunodépression.
formes sévères8,9. Il existe donc bien une dysbiose qui
place. En effet, la réponse antivirale repose initialement une diminution de la diversité et de la Il est important de noter que de l’ARN viral, ainsi que
semble être plus marquée chez les patients plus sévères
sur l’immunité innée et notamment sur la capacité à Philippe richesse bactériennes2. L’abondance des virus vivants, peuvent être retrouvés dans les selles
ou chez les patients qui décèdent de la COVID-199. Il est Gérard PhD.
produire de fortes quantités de cytokines inflammatoires Microbiologiste, de bactéries productrices de butyrate des patients6, et vraisemblablement, avec une fréquence
cependant difficile à ce stade, sans modèle expérimental
telles que l’interféron γ, qui vont permettre le recrutement Institut MICALIS, était par ailleurs diminuée tandis que plus grande lorsque des manifestations digestives sont
ou transplantation fécale, de déterminer un lien de
des cellules immunitaires innées 3. Après quelques Jouy-en-Josas
présentes. Même en l’absence de symptômes digestifs, la
causalité entre la dysbiose observée et les formes sévères. celle de bactéries potentiellement
jours ou lors de nouvelles expositions à ce même virus,
Une étude pilote a confirmé la dysbiose chez 15 patients pathogènes appartenant aux genres présence du virus dans les selles peut s’observer plusieurs
l’immunité adaptative permet la production d’effecteurs
infectés par le SARS-CoV-2, comparativement à des sujets StreptococcusG, RothiaG, VeillonellaG et ActinomycesG semaines après sa négativation respiratoire, donc avec
spécifiques humoraux et cellulaires. Ces effecteurs, en
plus des médiateurs et des cellules de l’immunité innée, sains ou atteints de pneumopathie communautaire10. Mais, était augmentée. Des modifications du microbiote, un risque prolongé de transmission oro-fécale7. S’il est
vont permettre, via l’inflammation qui en découle, la dans cette étude, il semble que la dysbiose persistait persistantes après la disparition du SARS-CoV-2 et encore trop tôt pour le dire, les probiotiques, surtout à
neutralisation et la destruction de l’agent pathogène ou de après guérison, ce qui laisserait à penser qu’elle était des symptômes associés, ont également été mises effet anti-inflammatoire, pourraient avoir un intérêt pour
la cellule infectée. Mais toute réponse immunitaire induit déjà présente avant l’infection au SARS-CoV-2. Dans une en évidence dans une autre étude3. Enfin, les patients restaurer l’écologie microbienne et réduire d’éventuelles
également une réponse immune suppressive qui permet autre étude, Gou et al. ont mis en évidence un lien entre atteints de la COVID-19 présenteraient des altérations surinfections bactériennes. Cette démarche, à bien
de limiter ou d’arrêter l’inflammation qui, si elle se poursuit, dysbiose intestinale et orage cytokinique11. La présence de leurs mycobiomes fécaux, caractérisées par un sûr évaluer, serait d’autant plus pertinente que certains
devient délétère comme cela semble être le cas dans les de BacteroidesG, StreptococcusG et ClostridialesO était enrichissement en Candida albicansE et par la présence travaux associent une prophylaxie par probiotiques à
formes sévères de patients infectés par le SARS-CoV-2. inversement corrélée aux cytokines les plus inflammatoires. de champignons pathogènes habituellement associés à une réduction des complications pulmonaires chez des
En effet, dans les formes sévères de la COVID-19, une la sphère respiratoire4. patients sous assistance respiratoire8.
réduction significative des lymphocytes T suppresseurs a Qu’en penser en pratique ?
été mise en évidence4,5. Le microbiote intestinal, essentiel au Références
développement de l’immunité, l’est également pour induire L’ensemble de ces données permet ainsi de confirmer le 1. Lamers MM, et al. SARS-CoV-2 productively infects human gut enterocytes. Science 2020 ;369:50-4.
les réponses immunes régulatrices. Il apparaît ainsi légitime, lien fort entre microbiote, immunité et SARS-CoV-2, ce 2. Gu S, et al. Alterations of the gut microbiota in patients with COVID-19 or H1N1 Influenza. Clin. Infect. Dis. 2020. Jun 4;ciaa709.
dans une maladie où il existe une anomalie de la régulation qui a conduit certains auteurs à proposer le traitement 3. Zuo T, et al. Alterations in Gut Microbiota of Patients With COVID-19 During Time of Hospitalization. Gastroenterology. 2020;159:944-55.
des réponses immunitaires, de s’interroger sur un lien entre de la dysbiose comme un traitement adjuvant de la 4. Zuo T, et al. Alterations in Fecal Fungal Microbiome of Patients With COVID-19 During Time of Hospitalization until Discharge. Gastroenterology.
microbiote, immunité et COVID-19. COVID-1912,13. 2020;159:1302-10.
Voir aussi pages 3 et 12 5. Gou W, et al. Gut microbiota may underlie the predisposition of healthy individuals to COVID-19. medRxiv April 25,2020.
Références 6. Xiao F, et al. Evidence for Gastrointestinal Infection of SARS-CoV-2. Gastroenterology. 2020;158:1831-3.
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REPÈRE
D P C O F G E S
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Hors-série Hors-série
COVID-19
Microbiotes
COVID-19
Microbiotes Des coronavirus à la COVID-19

Avant 2019, 6 coronavirus à l’origine d’infections chez l’Homme1


Les coronavirus humains (HCoV) ont été décrits pour la première fois dans les années 1960 chez des patients enrhumés. Ils sont
principalement disséminés par des réservoirs animaux, éventuellement via une espèce hôte intermédiaire.
Virus Réservoirs
Le microbiote pulmonaire, au cœur de l’infection COVID-19 Animal Humain Symptômes Zone d’endémie
Virus bien adaptés à l’Homme
• 10 à 20% des patients atteints de rhume.
HCoV-299E • Malaise, maux de tête, écoulement nasal, éternuements et mal
de gorge +/- fièvre et toux.
Circulation à l’échelle
• 10 à 20% des patients atteints de rhume.
la prévalence de Bacteroides G et l’expression des HCoV-OC43 planétaire sans nécessité de
• Même symptômes que HCoV-299E.
Ce que nous apprend la glycosidases dans le LBA étaient plus faibles chez les maintien dans un réservoir
HCoV-HKU1 • Fièvre, écoulement nasal et toux. animal.
littérature adultes atteints de COVID-19 que chez les témoins4.
• Principalement associé aux jeunes enfants, aux personnes
Autopsie du microbiote respiratoire Une boucle d’amplification entre poumon et intestin ? HCoV-NL63 âgées et aux patients immunodéprimés avec des maladies
La physiopathologie du SARS-CoV-2 peut être vue à la respiratoires, maladie respiratoire légère semblable au rhume.
lors de la COVID-19
Le SARS-CoV-2 modifie le microbiote lueur de l’axe intestin-poumon : la tempête cytokinique Virus moins bien adaptés pour se maintenir chez l’Homme principalement disséminés via des réservoirs zoonotiques

Geneviève du nasopharynx, sa voie d’entrée, augmente la perméabilité pulmonaire, permettant au virus • Pneumonie asymptomatique à sévère avec détresse respiratoire
Héry-Arnaud en provoquant une baisse de la de prendre la voie systémique et se lier aux récepteurs aiguë, choc septique et insuffisance rénale entraînant la mort. Péninsule arabique.
MERS-CoV
PharmD, PhD. • Environ un tiers des patients présentent des symptômes gastro- Épidémie en 2012.
Microbiologiste, biodiversité, une augmentation ACE2 des entérocytes5. La dysbiose intestinale qui en intestinaux, comme la diarrhée et les vomissements.
INSERM UMR de Propionibacteriaceae F et une résulte, augmente la perméabilité épithéliale et entraîne
1078, Université de • Fièvre, myalgie, maux de tête, malaise, frissons, suivis
Brest, CHRU Brest
réduction de Corynebacterium la fuite des bactéries intestinales et de leurs métabolites d’une toux non productive, d’une dyspnée et d’une détresse Épidémie mondiale fin
accolensE,1. dans la circulation et leur accès à d’autres organes, créant SARS-CoV respiratoire pouvant être fatale. 2002 – début 2003 au
La dysbiose gagne ensuite les voies • Diarrhée observée dans environ 30 à 40% des cas, atteintes départ de la Chine.
une boucle d’amplification des symptômes pulmonaires hépatique, rénale et cérébrale possibles.
pulmonaires. L’analyse métagénomique du liquide de de l’infection.
lavage bronchoalvéolaire (LBA) de patients COVID-
19 a ainsi montré une différence significative dans Qu’en conclure en pratique ?
la composition de leur microbiote pulmonaire par oo
Z
sur
m Sars-CoV-2
L’analyse phylogénétique des CoV a été construite sur la base du génome complet et distingue 4 grands groupes. En général,
comparaison avec des sujets non infectés. Néanmoins, L’analyse du microbiote respiratoire lors de la COVID-
les alpha et bêta-CoV sont principalement des CoV de mammifères, tandis que les gamma et delta-CoV sont principalement
cette dysbiose pulmonaire n’avait pas de spécificité 19 suggère l’intérêt de surveiller le microbiote des voies
des CoV d’origine aviaire. Tous les CoV humains actuellement connus, dont le SARS-CoV-2, appartiennent à des genres alpha
et était conforme à celle observée chez des patients respiratoires inférieures pour un traitement adapté. ou bêtacoronavirus, qui correspondent également aux CoV des chauve-souris1.
atteints de pneumonie communautaire2. L’étude du Les bactéries modifiant le HS influeraient sur l’infection Domaine 4 Phylum Classe Ordre Famille Genre Espèce
microbiote pulmonaire à partir de biopsies post- 4 4 4 4 4
à SARS-CoV-2. Sachant que leur abondance diminue en Riboviria Riboviria Pisoniviricetes Nidovirales Coronaviridae Bêtacoronavirus SARS-CoV-2
mortem de 20 patients COVID-19 a souligné le rôle vieillissant, ce mécanisme expliquerait l’aggravation du
des co-infections bactériennes et fongiques 3. Les risque de COVID-19 liée à l’âge.
taxons les plus représentés étaient Acinetobacter G, SARS-CoV-2 : mode de transmission à l’Homme2 Durée de vie
La compréhension des changements du microbiote
ChryseobacteriumG, BurkholderiaG, BrevundimonasG, du SARS-CoV-2
pulmonaire pourrait mener à de nouvelles thérapies et à Alimentaire ?
Sphingobium G et Enterobacteriaceae F. Les genres sur les surfaces3,4
un meilleur pronostic du risque d’infection. Contact direct ?
fongiques étaient dominés par CryptococcusG avec une
Durée moyenne
grande biodiversité, variable selon les sujets. Le « cross-talk » intestin-poumon offre des perspectives 6,4 jours d’incubation
Jusqu’à
de traitement et de prévention des formes graves de la
(2,1 à 11,1 jours)
72 heures
SARS- sur les plastiques
Quel rôle du microbiote spécifique à l’infection par COVID-19 6.
CoV-2 Âge médian des
SARS-CoV-2 ? Vu le rôle des probiotiques et des fibres alimentaires
Postillons 59 ans sujets infectés
Jusqu’à
L’infection débute par la liaison de la protéine spike prébiotiques dans la modulation des fonctions Contact direct 72 heures
du virus au sulfate d’héparane (HS) et au récepteur de immunitaires, il est légitime de penser que ces options Surfaces infectées sur l’acier inoxydable
l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2). Or, thérapeutiques offriront des pistes intéressantes. > (¤ après 48 heures )

certaines bactéries pulmonaires (Bacteroides G) sont Dix essais cliniques sont actuellement en phase de
capables de moduler le HS par leurs glycosidases, recrutement pour évaluer l’apport des probiotiques par
12 heures
La COVID-19 : une pandémie mondiale2 sur le carton
bloquant la fixation de spike. Une étude a montré que voie nasale ou orale dans la COVID-19 (clinicaltrials.gov). La maladie causée par le SARS-CoV-2 a été baptisée COVID-19 par l’OMS en février 2020. Sa grande
contagiosité a provoqué une pandémie mondiale. Les symptômes de la COVID-19 comprennent la
Voir aussi pages 4 et 12 fièvre, la toux, les myalgies ou la fatigue et, moins fréquemment, des maux de tête, une hémoptysie 9 heures
et la diarrhée. Cette infection peut également entrainer une pneumonie voire un syndrome de détresse sur la peau
Références
respiratoire aiguë pouvant être fatal. Les patients d’âge moyen et âgés atteints de maladies chroniques,
1. Mostafa HH, et al. Metagenomic Next-Generation Sequencing of Nasopharyngeal Specimens Collected from Confirmed and Suspect COVID-19
et en particulier d’hypertension artérielle, d’obésité et de diabète, se sont révélés plus susceptibles de 4 heures
Patients. mBio. 2020;11:e01969-20. sur le cuivre
développer ces formes graves de plus mauvais pronostic.
2. Shen Z, et al. Genomic Diversity of Severe Acute Respiratory Syndrome-Coronavirus 2 in Patients With Coronavirus Disease 2019. Clin Infect Dis.
2020 ;Mar9:ciaa203.
3. Fan J, et al. The lung tissue microbiota features of 20 deceased patients with COVID-19. J Infect. 2020;S0163-4453:30429-31. Références
4. Martino C, et al. Bacterial modification of the host glycosaminoglycan heparan sulfate modulates SARS-CoV-2 infectivity. bioRxiv [Preprint]. 1. Su S, et al. Epidemiology, Genetic,Recombination, and Pathogenesis of Coronaviruses. Trends Microbiol. 2016;24:490-502. 2.
2020:2020.08.17.238444. Dhama K, et al. Coronavirus disease 2019–COVID-19. Clin Microbiol Rev 2020;33:e00028-20. 3. van Doremalen N, et al. Aerosol and
Surface Stability of SARS-CoV-2 as Compared with SARS-CoV-1. N Engl J Med 2020;382:1564-7. 4. Hirose R, et al. Survival of SARS-CoV-2
5. Ahlawat S, et al. Immunological co-ordination between gut and lungs in SARS-CoV-2 infection. Virus Res. 2020;286:198103. and influenza virus on the human skin: Importance of hand hygiene in COVID-19. Clin Infect Dis. 2020: ciaa1517.
6. He LH, et al. Intestinal Flora as a Potential Strategy to Fight SARS-CoV-2 Infection. Front Microbiol. 2020 Jun 9;11:1388.

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Hors-série
COVID-19
SARS-CoV-2, microbiotes et physiopathologie de la COVID-19
Microbiotes

Anatomie du SARS-CoV-21,2 Microbiote des voies aériennes5,6,7


ARN à simple brin enveloppé
Les CoV ont les génomes les plus longs de tous les virus à ARN soit 29891 kilobases Au niveau du nasopharynx :
pour le SARS-CoV-2. Ce grand nombre de bases explique la grande capacité de ¤ biodiversité et C. accolensE
mutation de ces virus. En effet, chaque réplication du virus peut entraîner des @ PropionibacteriaceaeF
erreurs de copie qui peuvent conférer au virus de nouvelles propriétés dont la
capacité d’infecter de nouvelles cellules, voire de nouvelles espèces. L’ARN est
entouré de protéines N formant ainsi la nucléocapside virale. Ces protéines Au niveau des voies pulmonaires :
contribuent, entre autres, à moduler la réponse antivirale de l’hôte en agissant d’Acinetobacter G, Chryseobacterium G,
Présence d’
comme un antagoniste des interférons. BurkholderiaG, BrevundimonasG, SphingobiumG et
EnterobacteriaceaeF, CryptococcusG.
Protéine E
BacteroidesG : Modulation du HS bloquant la fixation
C’est la plus petite des principales protéines structurelles et la plus
énigmatique. Son inactivation ou son absence est associée à une modification du virus.
de la virulence des CoV suite à des changements de morphologie et de
tropisme.

Protéine M Impact de la dysbiose intestinale3


C’est la protéine virale la plus abondante qui donne sa forme à l’enveloppe virale.
Axe L’inflammation pulmonaire Inflammation
Glycoprotéine S ou Spike intestin permet au SARS-CoV-2 de systémique Microbiote SARS-CoV-2

Cette protéine transmembranaire donne au virion son aspect de couronne d’où le cerveau rejoindre les entérocytes
TMPRSS2
nom de coronavirus. Elle se lie aux récepteurs ACE2 des cellules hôtes pour les infecter par voie systémique et ACE2r
Axe d’activer les récepteurs ACE2
déterminant ainsi les tissus cibles dont le nasopharynx, les poumons, le foie, les reins, le
cerveau, le côlon ou le grêle. Certaines études ont retrouvé une corrélation positive entre poumon intestinaux ce qui induit une
le niveau d’expression d’ACE2 et le risque de déclarer la COVID-19. La fixation du SARS- intestin inflammation intestinale puis AGCC

estinal
CoV-2 sur ACE2 entraînerait une diminution de l’activité de ce récepteur. la diarrhée.

Epithélium int
Signaux
En parallèle, la dysbiose qui émis par le
microbiote
s’installe impacte le système
immunitaire intestinal et
Modulation du microbiote active le système entérique
qui envoie des signaux
et COVID-193,4 Dysbiose inflammatoires par voie
s y s t é m i q u e à d ’ a u t re s
Plusieurs études ont montré qu’une réponse immunitaire
o rg a n e s , y co m p r i s a u Cellule dendritique
optimale permettant de contrôler l’infection par le cerveau, contribuant ainsi à
SARS-CoV-2 dépendait d’apports nutritionnels adaptés une atteinte multiviscérale. Lymphocyte B
riches en protéines de bonne qualité, en oméga-3, en
vitamines C, D et E, en caroténoïdes et en polyphénols.
Microbiote intestinal
Lymphocyte B
Lymphocyte T
Lymphocyte T
Des faibles niveaux en vitamine A, D ou en zinc
ont également été associés à un risque plus élevé Sujet sain 9 COVID-19 10,11 Neurones
entériques

d’infection. L’apport de fibres pourrait également avoir LactobacillusG : rôle protecteur ⁄ diversité et richesse bactériennes
un effet prébiotique positif sur l’abondance de bactéries Klebsiella et R. gnavus :
G E ⁄ bactéries productrices de butyrate
protectrices comme les lactobacilles et favoriser la ! de la sévérité maladie en cas de présence préalable ! StreptococcusG, RothiaG, VeillonellaG
Macrophages
production de métabolites bénéfiques comme les Présence de Bacteroides , Streptococcus et
G G et ActinomycesG Cellules gliales entériques
Muscle lisse
acides gras à chaîne courte (AGCC). ClostridialesO inversement corrélée aux cytokines les ! Candida albicansE et champignons pathogènes
plus inflammatoires.
Les AGCC comme le butyrate ont des propriétés anti-
inflammatoires. En se liant aux récepteurs des cellules
immunitaires, ils réduisent la production de cytokines
pro-inflammatoires et augmentent la production
de cytokines anti-inflammatoires telles que l’IL-10.
Ils améliorent également l’activité effectrice des Du SARS-CoV-2 a été détecté dans les selles d’individus
atteints de la COVID-19, y compris asymptomatiques.
lymphocytes T CD8 cytotoxiques.
Une étude a même montré la persistance de traces du
En rééquilibrant le microbiote, l’utilisation de virus dans les selles plus de 15 jours après l’apparition des
probiotiques pourrait enfin réduire le risque d’infections symptômes. Pour autant, une propagation du virus pas
cette voie n’a pas encore été établie8.
ou en diminuer la réponse inflammatoire et la gravité.

1. Dhama K, et al. Coronavirus disease 2019–COVID-19. Clin Microbiol Rev 2020;33:e00028-20. 2. Société Française de Pharmacologie et de Thérapeutique, of 20 deceased patients with COVID-19. J Infect. 2020;S0163-4453:30429-31. 7. Martino C, et al. Bacterial modification of the host glycosaminoglycan heparan sulfate
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COVID-19 COVID-19
Microbiotes Microbiotes

Effet du confinement sur l’immunité chez l’enfant COVID-19 et périnatalité

épigénétiques des cellules immunitaires innées comme semblait pas influencer le taux de mortalité fœtale. Le taux
Ce que nous apprend la les monocytes, les macrophages et les cellules NK, Ce que nous apprend la de césariennes chez les femmes infectées a atteint 91% en
définissant ainsi une « immunité entrainée » ou trained
littérature immunity5. L’avantage de cette mémoire immunitaire est
littérature Chine versus 40% aux USA et 38% en Europe.
Transmission verticale et/ou horizontale
Fort heureusement, depuis un an qu’elle est moins spécifique et permet donc à l’individu
Plus de 3 500 publications sur COVID- Le sujet reste débattu. Le taux de nouveau-nés atteints de
que les vagues successives de la de réagir plus vite et mieux à différents microorganismes.
19 et périnatalité depuis le début de la la COVID-19 varie de 0 à 2% selon les études. Un très faible
COVID-19 frappent l’ensemble de Ainsi, il a par exemple été montré que la vaccination
pandémie… taux de transmission in utero a été décrit dans certaines
la planète, les enfants semblent par le BCG protégerait également contre d’autres
Alexis Mosca pathogènes6 voire même contre le SARS-CoV-27. De Jean-Marc Symptômes cliniques études avec de rares identifications du virus dans le
MD, Pédiatre, épargnés. Ils sont en effet peu Bohbot
même, cette mémoire immunitaire peut être stimulée MD, PhD. L’immense majorité des publications placenta. La présence de SARS-CoV-2 dans les sécrétions
Service de gastro- porteurs du SARS-CoV-2, peu
entérologie
contaminateurs1 et développent très par l’exposition à des signaux microbiens comme, par Infectiologue, provient de cohortes chinoises. Les génitales et les selles de mères infectées pourrait induire
et nutrition Institut Alfred
pédiatrique, peu de formes graves2. Néanmoins, exemple, le LPS, qui est un composant majeur de la paroi Fournier, Paris
symptômes chez la femme enceinte une contamination horizontale lors de l’accouchement par
Hôpital Robert une augmentation significative de cellulaire de la majorité des bactéries à Gram négatif8. sont globalement plus modérés que voie basse.
Debré, Paris
formes de pathologies immuno- La dysbiose, un facteur prédisposant au MIS-C ? dans la population générale probablement en raison du Et les microbiotes dans tout ça ?
inflammatoires liées au SARS-CoV-2 Ainsi, une moindre exposition bactérienne des enfants jeune âge des patientes et d’une moindre incidence des Sur les 800 cas publiés de nouveau-nés dont la mère était
regroupées sous le nom de Multisystem Inflammatory pourrait avoir favorisé les MIS-C et, bien que le comorbidités. La comparaison femmes non enceintes infectée, aucune étude de l’impact sur les microbiotes
Syndrome in Children (MIS-C) a été constatée fin avril microbiote intestinal n’ait pas été étudié spécifiquement versus femmes enceintes a montré par ordre de n’a été entreprise. Cependant, aucun des tableaux
chez l’enfant, en France et dans plusieurs autres pays3. dans ce contexte, les MIS-C sont une pathologie fréquence les résultats suivants : fièvre : 83% vs 28%, pathologiques observés chez ces enfants ne laisse
Comment l’expliquer ? apparentée à la maladie de Kawasaki, bien connue toux : 82% vs 51%, dyspnée : 31% vs 21%. A noter que l’un présager une corrélation avec une dysbiose quelconque.
Ces pathologies sont généralement considérées com- des pédiatres. Or, cette maladie est associée à une des symptômes les plus fréquents chez la femme enceinte
me des syndromes réactionnels post-infectieux qui altération du microbiote intestinal avec, en particulier, était la fatigue (54%).
surviennent en moyenne 3 à 4 semaines après l’infection4. une réduction significative de la diversité microbienne
A cause de la fermeture généralisée des écoles, il est donc fécale dans la phase aiguë par rapport aux témoins
En revanche, une méta-analyse a relevé un taux accru Qu’en conclure en pratique ?
d’admissions en soins intensifs et de recours à l’assistance
hautement probable que ce soit leur entourage proche, sains9. De plus, ce microbiote intestinal produit moins de
respiratoire mais essentiellement chez les femmes La grossesse et la période néonatale sont considérées
et notamment leurs parents, qui les ait contaminés. Mais butyrate, acide gras à chaîne courte connu pour réguler
la production de lymphocytes Th17 et T-Reg10. atteintes de comorbidités antérieures (HTA, obésité, comme des périodes à risque en cas d’infection par le
se pose également la question du rôle du confinement en
diabète) et âgées de plus de 40 ans. Une contamination SARS-CoV-2 ce qui a imposé la mise en place de mesures
lui-même dans la genèse de ces syndromes. En effet, le
lors du dernier trimestre de grossesse exposait à un risque préventives parfois drastiques. Les conditions restrictives
confinement a pu entrainer un certain degré de « privation
immunitaire » en diminuant le contact avec d’autres virus
Qu’en penser en pratique ? plus élevé de complications maternelles. d’admission des proches des femmes enceintes dans les
ou bactéries respiratoires voire digestives. L’entraînement de l’immunité innée des enfants par Le taux de mortalité maternelle était en revanche services d’obstétrique et de néonatalogie ont ainsi pu
Les enfants ont naturellement une immunité « entraînée » leurs vaccinations et leur exposition environnementale comparable à celui de la population générale. induire des perturbations psychologiques qu’il faudra
Classiquement, le système immunitaire se divise en répétée aux microorganismes, en particulier en Complications obstétricales évaluer.
immunité innée et adaptative. Comme son nom l’indique, collectivité, pourrait les avoir protégé contre la Il existe un sur-risque de prématurité en cas de COVID-19 Si une transmission de l’infection lors de l’accouchement
le deuxième système, apparu plus récemment au cours COVID-19. A l’inverse, la fermeture des collectivités (OR : 1,16-7,85). Dans une méta-analyse, le pourcentage de a pu être évoquée, aucune étude n’a démontré, à ce
de l’évolution, est celui qui maintient une mémoire a pu favoriser l’émergence des pathologies auto- prématurité dans la population générale se situait entre 5 jour, l’intérêt préventif de la césarienne. D’autant que ce
immunitaire permettant de réagir plus efficacement inflammatoires liées au SARS-CoV-2. Ce serait alors et 18% vs 29% chez les femmes atteintes de la COVID-19. type d’accouchement prive le nouveau-né d’un contact
après une infection, par exemple, par la production un modèle miniature expérimental de l’hypothèse En Europe, on estime ce taux de prématurité à 19% vs 4 à bénéfique avec le microbiote génito-pelvien de la mère,
d’anticorps. Plus récemment, il a été proposé qu’une hygiéniste qui postule que la moindre exposition 7% dans la population générale. Le risque de prématurité élément important dans l’établissement de défenses
certaine mémoire immunitaire serait également portée aux agents infectieux favoriserait l’augmentation de
est plus élevé en cas de contamination survenant avant immunitaires optimales de l’enfant.
par le système inné reposant sur des modifications prévalence des maladies immuno-inflammatoires.
la 35e semaine d’aménorrhée. Par contre, l’infection ne
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COVID-19 COVID-19
Microbiotes Microbiotes

L’utilisation régulière d’un gel hydro-alcoolique


Microbiote, pathologie cardio-métabolique et COVID-19 est-elle dangereuse ?

la dysfonction endothéliale du syndrome métabolique


Ce que nous apprend la combinée à celle provoquée par le SARS-CoV-2 Ce que nous apprend la Qu’en conclure en pratique ?
littérature contribue au mauvais pronostic des patients hypertendus,
diabétiques ou obèses.
littérature Sur une peau saine, le risque d’irritation ou de lésions
On doit ensuite prendre en compte le tropisme intestinal post-exposition répétée est faible.
La COVID-19 est une pandémie Selon une étude japonaise , le 1

causée par le Severe Acute Respi- du SARS-CoV-2. Il a été observé que 10% des patients lavage des mains avec un savon ou
Sur peau sensible (peau sèche, eczéma, psoriasis,
ratory Syndrome CoronaVirus  2 atteints par la COVID-19 présentaient des diarrhées. un produit antiseptique serait plus
etc.), il est recommandé de privilégier des gels hydro-
Jacques Amar (SARS-CoV-2) qui a déjà provoqué D’autre part, chez la moitié des patients infectés, le virus Jean-Marc efficace pour éliminer des particules
alcooliques « peaux sensibles » contenant en plus
MD, PhD. près de 1 million et demi de morts était retrouvé dans les selles6. Il est vraisemblable que Bohbot de mucus infectées par un virus
Cardiologue, MD, PhD. des ingrédients habituels, des produits émollients et
en 2020. Chez les patients infectés, l’atteinte intestinale par le virus modifie le microbiote influenzae que l’utilisation d’un gel
CHU Toulouse, Infectiologue, apaisants comme l’aloe vera ou les huiles végétales. Il
Consultant les pneumonies et le syndrome de intestinal, l’immunité intestinale et ainsi la translocation Institut Alfred hydro-alcoolique.
scientifique de Fournier, Paris est également conseillé, chez ces sujets, d’appliquer, la
détresse respiratoire aigu (SDRA) bactérienne et le microbiote tissulaire. A cet égard, la
VAIOMER, nuit, une crème hydratante sous un gant de coton.
Labège sont les complications les plus perturbation de la translocation bactérienne pourrait La composition optimale d’un
fréquemment associées au décès. Le jouer un rôle dans l’inflammation induite par le SARS- gel hydro-alcoolique comportant de l’éthanol à au
Il est par ailleurs préconisé de privilégier les gels aux
SDRA est notamment le résultat d’une CoV-2 et dans les co-infections bactériennes associées moins 60°, du peroxyde d’hydrogène et du glycérol,
solutions hydro-alcooliques souvent associées à
production excessive de cytokines pro-inflammatoires. à la maladie virale, deux éléments qui jouent un rôle une équipe italienne2 a étudié la concentration des
des fragrances ou à des conservateurs qui peuvent
Parmi les déterminants du pronostic figurent l’âge, le majeur dans les formes sévères de la COVID-19. L’infection métabolites de l’éthanol dans divers tissus et dans
occasionner des allergies.
surpoids, le diabète et l’hypertension1. intestinale est aussi de nature à perturber l’axe intestin- l’urine après utilisation régulière de gel hydroalcoolique,
Le mécanisme expliquant le mauvais pronostic de poumon7 récemment mis en évidence notamment grâce soit 20 fois par jour pendant 4 semaines, ce qui
Dans tous les cas, il est préférable de se laver
l’infection par le SARS-CoV-2 chez les patients ayant un à l’observation de relations entre microbiote intestinal, correspond à l’utilisation habituelle des professionnels
soigneusement (au moins 30 secondes) à l’eau et
syndrome métabolique n’est pas clairement établi. A ce immunité et allergies respiratoires. de santé. Des concentrations importantes de dérivés de
au savon et de réserver l’utilisation des gels hydro-
stade, on ne peut émettre que des hypothèses. l’éthanol ont été retrouvées dans les urines à un niveau
alcooliques pour les déplacements ou les lieux sans
Parmi les anomalies préexistantes 2-4 du syndrome souvent supérieur aux normes utilisées en médecine
point d’eau disponible.
métabolique qui pourraient interagir avec l’action du Qu’en penser en pratique ? légale. Cette étude n’a pas comporté de mesure de
SARS-CoV-2 figurent la dysbiose intestinale, les troubles l’alcoolémie mais il semble que, même si l’absorption
En résumé, bien que les effets délétères sur peau saine
de l’immunité intestinale, notamment de la voie des Les modifications du microbiote intestinal et de l’immunité dermique (ou l’inhalation) existe, il n’y ait pas de risque
soient faibles, les gels hydro-alcooliques sont à utiliser
lymphocytes Th17, la dysbiose tissulaire et la dysfonction intestinale induites par le SARS-CoV-2 pourraient d’élévation significative de ce taux. Ce ne peut donc pas
avec modération. Le lavage soigneux des mains avec un
de l’endothélium vasculaire. participer à la sévérité de l’infection chez les patients être une excuse pour un alcootest positif…
savon classique demeure la meilleure des préventions
Concernant la dysfonction endothéliale, il a été montré hypertendus, diabétiques et/ou obèses en facilitant
Et le microbiote dans tout ça ? hygiéniques même en période de COVID.
dans des séries autopsiques que l’infection par le SARS- notamment la translocation de bactéries intestinales issues
L’action des gels hydro-alcooliques en utilisation
CoV-2 induisait une atteinte endothéliale sévère5. Or, d’un microbiote dysfonctionnel. L’analyse couplée chez
répétée sur la composition du microbiote cutané a
la réactivité vasculaire régulée par l’endothélium et les patients infectés par le SARS-CoV-2 du microbiote
été très peu étudiée mais il semble que le pouvoir de
l’inflammation joue un rôle important dans le pronostic intestinal et du microbiote sanguin pourrait permettre
résilience de ce microbiote limite l’impact négatif de
des sepsis sévères. Ainsi, on peut émettre l’hypothèse d’étudier cette hypothèse et de dégager de nouvelles
l’éthanol3.
qu’en interaction avec l’inflammation induite par l’infection, pistes thérapeutiques.

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Microbiotes

Pro-, pré-, parabiotiques et COVID-19

Une petite étude interventionnelle étudiant l’administra-


Ce que nous apprend la tion orale de 8 souches probiotiques semble confirmer
littérature cette hypothèse en rapportant une réduction du risque
d’insuffisance respiratoire, de transfert en réanimation et
Les pro-, pré- et parabiotiques* ont lar- de mortalité dans le groupe traité6. Il est également bien
gement été étudiés pour leurs capacités connu que le SARS-CoV-2 infecte les cellules humaines via
de modulation immunitaire et micro- le récepteur ACE2 dont il perturbe le fonctionnement. Or,
Bruno Pot biologique. Une revue Cochrane a ainsi Cole-Jeffrey et al.7 avaient déjà rapporté en 2015 que l’ACE2
PhD, montré que les probiotiques pouvaient pouvait avoir un impact positif sur la santé cardio-pulmo-
Microbiologiste, réduire le nombre et la durée moyenne
Université de
naire, entre autres via l’amélioration de la fonction endo-
Bruxelles des infections aiguës des voies aé- théliale, ces effets bénéfiques pouvant potentiellement être
riennes supérieures1. Plusieurs hypo- médiés par des changements du microbiote.
thèses mécanistiques ont été évoquées : réduction de la Le système immunitaire
perméabilité intestinale, renforcement de l’immunité innée Il a été démontré que les probiotiques augmentaient la
des muqueuses, action sur l’immunité adaptative, stimula- quantité d’interférons de type I, de cellules présentatrices
tion spécifique des lymphocytes cytotoxiques NK. Beau- d’antigènes, de lymphocytes NK, T et B dans l’intestin et
coup d’entre elles présentent un intérêt dans la prise en
les poumons, minimisant potentiellement les dommages
charge des patients atteints de COVID-19, bien que peu
cellulaires au niveau pulmonaire en contribuant directement
d’études aient été publiées jusqu’à présent2.
ou indirectement à l’élimination du virus ou des cellules
Le microbiote intestinal infectées2. Bozkurt et Quigley ont, en particulier, souligné
Une diminution des LactobacillusG et des BifidobacteriumG le potentiel des bifidobactéries sur l’inflammation8.
ayant été décrite chez certains patients atteints de COVID-
193, une approche nutritionnelle et l’utilisation de pré- et
probiotiques a été suggérée chez ces patients pour éviter Qu’en penser en pratique ?
ou corriger une dysbiose intestinale due aux antibiotiques
et réduire le risque de surinfection secondaire à une translo- Le bénéfice potentiel de ce type d’approche est triple :
cation bactérienne facilitée par l’hyperperméabilité intesti- maintenir l’homéostasie intestinale pour réduire les effets
nale et à un environnement inflammatoire propices à une de l’antibiothérapie, renforcer le système immunitaire et la
atteinte pulmonaire. barrière intestinale pour réduire les surinfections. Cepen-
L’axe intestin-poumon dant, sachant qu’il existe très peu de données disponibles
Gou et al.4 ont émis l’hypothèse que la grande variabili- concernant la COVID-19, il s’agit pour les cliniciens d’adopter
té de la sévérité des symptômes de la COVID-19 pourrait une approche pragmatique, basée sur des recommanda-
être liée à une inflammation systémique et compartimen- tions étayées sur des preuves recueillies dans un autre cadre
tée, influencée par un mécanisme encore non identifié au (infections, septicémies ou soins intensifs)9 et d’évaluer la
niveau de l’axe intestin-poumon. La modulation du micro- balance bénéfice risque pour chaque patient10. En plus des
biote intestinal, par exemple via TMF**, pourrait par consé- probiotiques, d’autres auteurs soulignent l’intérêt d’avoir une
quent à son tour réguler cette inflammation incontrôlée5. alimentation riche en antioxydants et le rôle des vitamines11.
* Bactéries probiotiques inactivées entières ou fragmentées.
** Transplantation de microbiote fécal.
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YREVUE MICRHS

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