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«Bisou», «poutou», «bécot»...

C'est la journée mondiale des câlins !

En cette journée mondiale des câlins, «hug day», la rédaction vous propose de redécouvrir
les significations et les histoires qui se cachent derrière nos petits mots doux.

Sept minutes. C'est le temps de câlins dont nous aurions besoin chaque jour pour être
heureux. Et qu'importe leur forme -bisous, bécots ou poutous- pourvu qu'il y ait de l'amour!
Plus que de simples échanges, les caresses et baisers sont aussi vitaux pour les mortels que
nous sommes, que le soleil pour nos os ou l'eau, pour notre peau. Alors, toi, lecteur qui lis ce
papier dans le métro, seul à ton bureau ou dans ton lit prêt à faire dodo, rappelle-toi qu'un
simple sourire peut changer une vie. A fortiori aujourd'hui, jour mondial du câlin!

À l'occasion de cette journée du «Hug Day», créée par le révérend Kevin Zaborney en 1986,
la rédaction vous propose de redécouvrir les significations et les historiettes qui se cachent
derrière nos petits mots doux. Attention aux rageurs et autres coléreux, cet article dégouline
d'amour...

● Alors d'où viennent donc nos «câlins»?

On ne mentira pas en affirmant que lorsqu'on en reçoit, nos joues se mettent à brûler et nos
cœurs, à chauffer. Car cela ne s'invente pas! Le mot «câlin» serait emprunté au normand
caline «chaleur étouffante, lourde». Un terme, lui-même issu de l'ancien et moyen français
«chaline», du latin vulgaire calere «être chaud»!

Si cette origine n'est pas établie avec sûreté -d'aucuns ont pensé que le mot «câlin» devait
remonter à l'ancien français chadeler «conduire, mener quelqu'un»- il est en tout cas -à peu
près- certain que l'accent circonflexe de notre petit mot, lui, n'a rien d'étymologique. Il serait
dû à une prononciation dialectale, indique le Trésor de la langue française.

Éclair de chaleur, candeur et séducteur

Attesté dès le XVIe siècle sous la forme «calin», le mot ainsi orthographié, désigna tout
d'abord un «éclair de chaleur» avant de prendre le sens de «gueux, mendiant». Ce n'est qu'à
partir du XVIIIe siècle que notre terme obtint son accent circonflexe, et avec lui, le sens de
«niais et indolent». Georges Sand le nota, par exemple, en 1853 dans Les Maîtres sonneurs :
«Et pour marquer à Thérence que je n'étais pas si câlin qu'elle le pensait peut-être, je
m'exerçais à coucher sur la dure, à vivre sobrement...» Mais ne nous arrêtons pas en si bon
chemin!

Car loin de se cantonner à la candeur de l'enfant ou à la crédulité du simplet, le câlin opérera


une jolie pirouette sémantique au XIXe siècle pour prendre le sens de «séducteur». On se
souvient notamment de cette signification quelque peu péjorative sous la plume de Zola pour
décrire le personnage de Saccard dans L'Argent : «Oh! toi, tu es un câlin. Je te connais…
Demain, quand tu nous auras quittés, tu ne t'inquiéteras guère de savoir ce qui se passe ici.»
Qu'en est-il alors de notre «câlin» synonyme de «douceur»? En réalité, ce dernier sens est
très récent. Ainsi que l'indique le CNRTL, il remonterait au XXe siècle. On le retrouve dans
l'expression «faire câlin», qui signifie «se blottir contre une personne aimée pour se faire
cajoler ou consoler» et plus couramment, comme adjectif pour qualifier «l'affection d'un
enfant». Enfin un peu de tendresse!

● Et nos «bisous» dans tout cela?

Attesté dans le lexique argotique depuis 1901, le «bisou» dérive du mot «bise» et du suffixe
provençal en «-ou». Rien à voir toutefois avec la couleur «grisâtre» ou le vent froid soufflant
dans le grand Nord! La «bise» que l'on donne à autrui est issue de l'ancien verbe «biser»,
«baiser». Terme lui-même tiré du latin basiare qui signifia dès son premier usage «donner un
baiser».

Un orgasme très proche de la mort

Précisons toutefois que le verbe «baiser» n'eut pas toujours ce sens exclusif. On notera par
exemple la formule ironique «baiser la main» pour «signifier un refus» et «baiser la terre»
comme synonyme de «se prosterner» au XIXe siècle ; la curieuse définition «attoucher,
comme en témoignage de tendresse» au XXe siècle ou encore l'expression «baiser la
camarde» qui signifie «mourir». Étrange n'est-ce pas? Mais ne parle-t-on pas parfois de
«petite mort» pour désigner «l'orgasme masculin»?

Notons d'ailleurs pour l'anecdote que le décès subit après l'orgasme se résume en un mot:
«épectase». Mais ne nous éloignons pas de notre sujet! Nous parlions ici d'amour...

● Alors qu'en est-il de nos «bécots», «papouilles» et «poutous»?

Attesté depuis la fin du XVIIIe siècle, le «becquau» ou «béquot», orthographié ainsi chez
Verlaine et Jules Vallès, a tout d'abord désigné la «bouche» en argot. En effet, le mot est
dérivé du mot «bec». N'y voyons pas là toutefois un lien de parenté avec le «béquot», petit
de la bécassine! Car, le bécot que l'on fait, n'est pas une «bécquée» mais un «baiser».

Pelotage et grosse lèvre

La «papouille» pour sa part demeure plus obscure. Le mot dériverait, selon les sources, du
verbe «chatouiller», du normand «papoter» signifiant «donner un baiser bruyant» ou de
«palper», «palpouille» qualifiant le «pelotage» dans le jargon de Mâcon. De nos jours, la
«papouille» signifie selon le Trésor de la langue française «un chatouillement», «une
caresse» et même... «un attouchement indiscret».

Le «poutou» enfin, nous vient du radical occitan «pott-» signifiant «grosse lèvre». Il est né
en 1784 dans la région du Sud-Ouest et désigne depuis lors, un «baiser affectueux».

Vous savez tout! Plus d'excuses pour ne pas faire de bisous, poutous et autres câlineries à vos
amours!

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