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Méthodologie de recherche

Partie I : Buts, types et qualités d’une recherche en


éducation
La recherche en éducation poursuit deux ordres principaux de buts, à savoir d’une
part, contribuer à la construction de modèles théoriques qui permettent de comprendre
différents aspects de l’éducation et, d’autre part, améliorer les pratiques éducatives
en s’appuyant sur un corpus de connaissances solidement étayé.

Compte tenu de ces buts, on peut considérer que la recherche concerne tous les
acteurs du processus éducatifs non seulement le chercheur patenté mais aussi
l’enseignant de terrain qui, soucieux de développer une attitude réflexive par rapport
à sa pratique, sera un jour confronté à la nécessité d’analyser les résultats de son
action et d’ajuster sa pratique en fonction de ces résultats.

Si on accepte l’idée que tous les acteurs éducatifs sont concernés par la recherche, il
est essentiel de les former aux principes et aux méthodologies propres à ce processus
qui permet d’appréhender le monde qui nous entoure en respectant les principes de
la démarche scientifique.

Comme nous le montrerons par la suite, la recherche en éducation peut emprunter


des chemins multiples et diversifiés avec toutefois une volonté commune qui est de
rassembler des données pour pouvoir tirer des conclusions à propos de certains
phénomènes qui relèvent des sciences humaines en général et de l’éducation en
particulier. Lorsque nous parlerons de recherche dans ce texte c’est de recherche
empirique qu’il s’agira c’est-à-dire d’une recherche qui est marquée par la volonté de
mettre les concepts, les modèles ou les théories à l’épreuve des faits pour les
confirmer, les infirmer ou les préciser.

1. Démarche scientifique et recherche en éducation

La démarche scientifique est une méthode très efficace et très largement éprouvée
pour acquérir de nouvelles connaissances. C’est grâce à ce type d’approche que la
plupart des disciplines relevant des sciences exactes ont construit le corpus de
connaissances sur lequel repose la recherche dans des domaines aussi divers que la
physique, la chimie, la médecine ou la biologie.

En matière d’éducation, il est aussi très fréquent de faire référence à la méthode


scientifique pour guider les processus de recherche à travers une série d’étapes
clairement définies : formulation de questions ou d’hypothèses, recueil et analyse des
données, interprétation des données et discussion des résultats. Toutefois, alors que
l’application stricte et rigoureuse de ces principes en sciences exactes constitue une
garantie absolue de la valeur scientifique des résultats, il est loin d’en être de même

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en ce qui concerne les sciences sociales et humaines (ou encore les « sciences molles »
par opposition aux « sciences dures ») dont fait partie l’éducation.

Plusieurs difficultés apparaissent à ce niveau en ce qui concerne les sciences humaines


et sociales.

L’application de la méthode scientifique ne permet pas toujours d’appréhender la


complexité des individus concernés et de l’environnement dans lequel ils agissent
même si un effort est souvent réalisé à ce niveau par les chercheurs pour décrire le
contexte dans lequel les données ont été collectées.

La méthode scientifique repose sur la quantification des observations à travers des


instruments de mesure (des épreuves pédagogiques, des tests psychologiques, des
questionnaires d’opinion) qui ne fournissent qu’une vue approximative de la réalité
qu’ils sont censés mesurer. C’est ce qu’on appelle l’erreur de mesure qui peut exister
en sciences exactes (un thermomètre peut fournir une valeur erronée de la
température), mais qu’il est beaucoup plus facile à contrôler qu’en sciences humaines
et sociales.

Comme leur nom l’indique les sciences humaines et sociales font intervenir des
individus ce qui implique un certain nombre de considérations éthiques par rapport
aux sujets impliqués dans une expérience. Ainsi, il est généralement admis que les
sujets doivent non seulement être consentants mais qu’ils doivent aussi être informés
des buts de l’expérience ce qui, dans certains cas, peut influencer les résultats.

La démarche scientifique implique souvent qu’on puisse contrôler très strictement le


déroulement d’une expérience. Or, la plupart des recherches en éducation implique
des individus dont le comportement n’est pas toujours aisé à contrôler comme c’est le
cas, par exemple, d’un enseignant dans sa classe à qui on demande d’appliquer une
méthode pédagogique particulière.

L’application de la démarche scientifique à la recherche en éducation est souvent


désignée par l’expression recherche quantitative insistant en cela sur le fait qu’elle
repose sur le recueil de données numériques. Ce type de recherche qu’on oppose
souvent à la recherche qualitative, sur laquelle nous reviendrons plus avant, est aussi
qualifiée de recherche déductive puisqu’elle part de questions ou d’hypothèses
clairement formulées pour tenter d’apporter des réponses qui feront progresser les
connaissances dans le domaine. On parle aussi de recherche nomothétique à propos
de la recherche quantitative en faisant référence à l’ambition de la démarche
scientifique de mettre en évidence des connaissances qui soient généralisables à un
grand nombre de situations ou de contextes différents.

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2. Recherche qualitative ou quantitative, faut-il choisir ?

Pour différencier recherche quantitative et qualitative on a l’habitude de mettre en


évidence la nature des données : des données numériques pour la recherche
quantitative et des données sous forme d’énoncés verbaux ou d’images vidéos pour la
recherche qualitative. En vérité, cette différenciation de surface en cache bien d’autres.

En fait, le paradigme initial de ceux qui se revendiquent des approches qualitatives


est fondamentalement différent de celui mis en évidence par la recherche quantitative.
La recherche qualitative vise avant tout à comprendre (paradigme d’intelligibilité) alors
que la recherche quantitative a pour ambition de dégager des lois et des principes à
portée générale pour expliquer et prédire (paradigme nomothétique). Ces ambitions,
de nature fort dissemblable, conduisent chacune des formes de recherches
(quantitative et qualitative) à mobiliser un arsenal méthodologique qui soit adapté non
seulement aux données traitées, mais aussi à la nature des résultats attendus.

Ainsi, le point de départ d’une recherche qui a des visées nomothétiques est
généralement la formulation d’hypothèses et de questions de recherche qu’il s’agit de
vérifier. Comme nous l’avons déjà souligné, la démarche basée sur la formulation
d’hypothèses et leur vérification à partir des données recueillies est fondamentalement
de nature déductive alors que les tenants des approches qualitatives s’inscrivent
davantage dans un cheminement inductif. Dans les ouvrages anglo-saxons, on parle
de « Theory-driven research » (Recherche orientée par la théorie) pour l’approche
déductive et de « Theory-building research » (Recherche visant à construire une
théorie) pour les recherches inductives.

L’approche inductive en matière de recherche implique une appréhension directe des


phénomènes et des acteurs impliqués sans représentation préalable de ceux-ci par le
chercheur. Plutôt que d’aborder les choses à partir d’instruments de récolte et
d’analyse des données préstructurés, l’ambition du chercheur sera plutôt de rester
ouvert à l’ensemble des manifestations d’une réalité afin de l’appréhender sous ses
différentes facettes. Ainsi, alors que pour une recherche quantitative, le chercheur se
dotera d’outils d’observations finement calibrés (questionnaire d’opinion, grille
d’observation…), une approche qualitative privilégiera la capacité du chercheur à saisir
la dynamique des acteurs et la variabilité des contextes étudiés. C’est pour ces raisons
que le chercheur, qui se réfère à la recherche qualitative, évitera d’établir des
hypothèses avant de collecter ses données de manière à éviter d’aborder les
phénomènes étudiés avec une représentation déjà préconstituée de ceux-ci.

Cette différenciation assez fondamentale au niveau des approches va entraîner des


choix spécifiques en ce qui concerne la nature des données qui seront traitées. Ainsi,
l’exigence de vérification statistique des hypothèses amènera les tenants de la
recherche déductive à privilégier les données quantitatives alors que les autres
choisiront généralement de préserver la nature qualitative des données. En agissant
de la sorte, la recherche qualitative choisit délibérément de conserver les données sous

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leur forme originale alors que la recherche quantitative transforme les données, qui
sont très souvent de nature qualitative au départ, en nombres pour satisfaire aux
exigences des traitements qu’elle a l’habitude de mettre en œuvre. En fait, la
différenciation entre quantitatif et qualitatif relève souvent d’un choix au moment du
codage des données plutôt que de la nature intrinsèque des données.

Le contexte dans lequel se déroulera l’étude joue un rôle important dans les deux types
de recherche si ce n’est que la recherche quantitative va manipuler ces contextes pour
les standardiser au maximum (pour contrôler les variables parasites) alors que la
recherche qualitative s’efforcera de préserver et de comprendre ces contextes dans
leur variété originale. Il s’agit avant tout pour cette dernière forme de recherche de
collecter, d’analyser et de comprendre les données en fonction de leur contexte naturel
d’apparition.

Au vu des éléments que nous venons de mettre en avant, on perçoit aisément que la
complémentarité souvent recherchée entre approche qualitative et quantitative ne
tient pas uniquement au fait d’utiliser, dans le cadre d’une recherche, des données de
nature différente. Il s’agit véritablement d’articuler deux paradigmes d’investigation
dont les fondements sont épistémologiquement fort éloignés.

Même si la conjugaison des paradigmes quantitatif et qualitatif peut paraître difficile,


en pratique beaucoup de chercheurs oscillent souvent entre ces deux approches
(approche mixte). Ainsi, on peut très bien aborder une recherche avec un certain
nombre de questions ou d’hypothèses, mais rester ouvert à la formulation de nouvelles
questions en cours de travail, on peut coder certaines données sous forme numérique
tout en préservant la forme narrative originelle pour d’autres données, on peut
s’intéresser aux comportements observés tout en complétant son information par une
enquête sur l’interprétation de ces comportements par les acteurs. Dans le même ordre
d’idées, il est parfaitement légitime de mener une étude de cas pour défricher une
problématique et dégager des hypothèses qui seront ensuite vérifiées à partir d’un
plan expérimental basé sur des variables quantitatives.

Recherche quantitative Recherche qualitative


Types de données recueillies Données essentiellement Données sous des formes
en priorité numériques, rigoureuses et diverses (narratives,
réplicables visuelles…), riches et « en
profondeur »
Approche Basée sur des questions et des Basée sur une appréhension
hypothèses préconstituées compréhensive des
S’appuie sur une démarche phénomènes
hypothético-déductive Ancrée dans le milieu, orientée
vers la découverte et
l’exploration (inductive)
Contexte A manipuler et à contrôler A appréhender dans leur
Le chercheur est extérieur à la diversité
situation analysée Le chercheur est impliqué dans
la situation

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But Créer des lois et des principes Comprendre les phénomènes
généralisables (approche (approche compréhensive)
nomothétique)

Tableau 1.1 : Comparaison des approches quantitatives et qualitatives en recherche

3. Les types de recherches en éducation

La différenciation entre recherche quantitative et qualitative donne lieu en pratique à


différents types de recherches qui s’apparenteront tantôt à l’une ou à l’autre de ces
deux approches.

Ainsi, du côté de la recherche quantitative, on trouvera les recherches qualifiées


d’expérimentales ou de quasi expérimentales et les enquêtes à grande échelle
(survey). Dans le giron de la recherche qualitative, on regroupera les recherches
actions et les études de cas. A côté des quatre types de recherche que nous retiendrons
ici, il en existe bien d’autres comme la recherche évaluative ou encore la recherche
centrée sur le design et le développement qui peuvent jouer un rôle important lorsqu’il
s’agit d’inscrire la conception d’une environnement d’apprentissage dans une approche
systématique (voir à ce propos le cours « Méthodologie de conception des
environnements d’apprentissage multimédia »).

3.1 Les recherches expérimentales ou quasi-expérimentales

Il s’agit ici d’études menées selon le schéma classique de la démarche scientifique en


ce sens que l’expérimentateur va délibérément manipuler le phénomène (la variable
indépendante) qu’il souhaite étudier afin de mesurer l’effet de ce phénomène sur
d’autres variables appelées variables dépendantes.

Exemple : On étudie l’effet de trois types de regroupements des apprenants : imposé


par le professeur, aléatoire (par tirage au sort) et choisi par les apprenants. Ces trois
types de regroupements constituent la variable indépendante qui fait l’objet de l’étude
et dont on observera l’effet sur les résultats à un test passé à l’issue d’un apprentissage
en groupe (variable dépendante).

Encadré 1.1 : Exemple de recherche expérimentale

L’une des principales difficultés de ce type de recherche réside dans la nécessité


d’identifier et de contrôler un grand nombre de variables afin de s’assurer que les
différents groupes constitués seront équivalents et soumis au même traitement à
l’exception des éléments définis par la ou les variables indépendantes définies.

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On parlera de recherche expérimentale ou de recherche de laboratoire lorsque les
conditions résumées ci-avant seront totalement remplies. Lorsque ces conditions ne
seront que partiellement rencontrées on qualifiera ces recherches de quasi-
expérimentales ou de recherches de terrain.

3.2 Les enquêtes à grande échelle ou survey

Ce type d’études a généralement pour ambition de rassembler des données sur un


certain nombre de caractéristiques d’un dispositif pédagogique. Ce dispositif peut
être limité (une école) mais le plus souvent il s’agit d’étudier des dispositifs de
grande ampleur comme le système éducatif d’une région ou d’un pays ou de
comparer des systèmes éducatifs entre eux par référence à certaines caractéristiques
(le niveau de performance en langue maternelle à 15 ans).

Ces enquêtes peuvent aussi porter sur des études longitudinales où il s’agit d’étudier
l’évolution de certaines caractéristiques dans le temps en prenant des mesures
répétées sur les mêmes échantillons de sujets ou sur des échantillons équivalents.

Exemple : L’enquête PISA menée en 2006 dans une soixantaine de pays de l’OCDE
a touché plus d’un million d’élèves. Elle vise à évaluer le niveau de maîtrise des
élèves de 15 ans dans trois domaines spécifiques : lecture, mathématique et
sciences. Elle comportait aussi un questionnaire d’opinion qui a permis d’engranger
un grand nombre de résultats intéressants en ce qui concerne la motivation des
élèves à l’idée d’apprendre, leur perception d’eux-mêmes et leurs stratégies
d’apprentissage, et de déterminer dans quelle mesure les performances des élèves
varient selon le sexe et le niveau socio-économique.

Encadré 1.2 : Exemple d’enquête à grande échelle

Ces enquêtes peuvent être réalisées, comme dans l’enquête PISA, en s’appuyant sur
des expérimentateurs spécialement formés mais aussi par l’envoi postal de
questionnaires, par téléphone ou par Internet.

3.3 Les recherches action

Il s’agit d’un type de recherche qui valorise la participation directe du chercheur à


l’action. Il ne s’agit plus de préserver la neutralité de l’expérimentateur comme dans
les recherches expérimentales, mais plutôt d’accéder aux représentations des acteurs
en pénétrant la pensée de l’autre.

On utilise également pour caractériser ce type de recherche l’expression observation


participante pour mettre en évidence le fait que le chercheur s’intègre à la
communauté en tant qu’acteur de celle-ci. Ce type de méthodologie est apparu dans
le champ de l’éducation notamment pour répondre aux limitations de l’approche

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expérimentale lorsqu’il s’agit de comprendre des phénomènes dans leur contexte
naturel.

Les recherches actions constituent des études systématiques qui associent action et
réflexion dans le but d’améliorer certaines pratiques ou de favoriser certaines
innovations. Elles combinent intervention en situation réelle et évaluation systématique
des résultats de cette intervention.

Les recherches action sont apparentées aux approches ethnographiques en ce sens


qu’elles conduisent le chercheur à observer une communauté à la manière d’un
ethnologue essayant de comprendre une civilisation primitive toutefois, contrairement
à la recherche action, une approche ethnographique exclut toute intervention directe
de l’observateur sur le milieu.

Exemple : Une recherche action menée auprès d’une centaine d’enseignants en vue
d’améliorer leur professionnalisme a permis de développer chez eux une attitude plus
réflexive dans l’interprétation des situations sociales qu’ils sont amenés à gérer en
classe. Pour agir sur leur comportement en classe, des réunions hebdomadaires ont
été organisées par le chercheur au cours desquelles les enseignants ont eu l’occasion
de discuter des situations conflictuelles qu’ils ont été amenés à gérer au sein de leur
classe.
Après une année de pratiques, des progrès significatifs ont pu être observés chez les
élèves sur la base d’un questionnaire d’opinion relatif à leur perception du climat de
la classe.

Encadré 1.3 : Exemple de recherche action

3.4 Les études de cas

Les études de cas s’apparentent par certains aspects à l’approche ethnographique en


ce sens qu’elles privilégient l’étude en profondeur d’un objet de recherche particulier
(un élève, un groupe, une classe, une école) dans son contexte naturel. L’ambition des
études de cas est avant tout de décrire la dynamique d’un système particulier pour le
comprendre et éventuellement le comparer à d’autres systèmes afin d’en dégager des
généralités.

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Exemple 1: Depover & Strebelle (1997) ont validé, sur la base d’études de cas portant sur
sept écoles primaires dans lesquelles du matériel informatique avait été introduit, un modèle
de l’innovation pédagogique en matière d’intégration des TIC. Les cas ont été décrits, dans
un premier temps, sous la forme de matrices selon une méthodologie reprise à Huberman
pour ensuite, à partir de ces matrices, dégager un certain nombre de constantes puis de
chaînes relationnelles articulant les différentes variables du modèle.
Exemple 2 : Une étude a été réalisée sous l’égide de l’IEA (International Association for the
Evaluation of Educational Achievement). Le but de cette étude, qui a porté sur 175 cas à
travers 28 pays, est d’identifier les conditions d’une intégration réussie des technologies en
fonction d’un certain nombre de variables contextuelles telles que le domaine d’étude, le
niveau scolaire, l’approche pédagogique, la culture de l’école… (Kozma, 2003).

Encadré 1.4 : Exemples d’étude de cas

Les études de cas concernent généralement sur l’observation de plusieurs cas mais il
est possible, dans certaines circonstances, de faire porter l’étude sur un cas unique
que celui-ci soit un individu ou un groupe. Les études sur cas unique porte
généralement sur des périodes temporelles assez longues et impliquent l’analyse en
profondeur d’un grand nombre de données issues du sujet investigué. Les analyses
portent le plus souvent sur des séries temporelles qui permettent de mettre en
évidence l’évolution d’un comportement sur la base d’observations répétées.

4. Qu’est-ce qu’une recherche de qualité ?

4.1 Les qualités d’une recherche en éducation et les facteurs qui y


contribuent

Il est difficile de répondre à cette question et plus particulièrement lorsqu’il s’agit de


sciences humaines car, comme nous l’avons souligné, il existe plusieurs approches en
matière de recherche qui accordent plus ou moins d’importance à certains critères de
qualité. Par exemple, la recherche qualitative insistera sur des critères tels que
l’honnêteté, la richesse et la profondeur des données récoltées ou encore l’étendue de
la triangulation (voir partie III, point 4) alors que la recherche quantitative mettra
l’accent sur les qualités de l’échantillonnage, la pertinence de l’instrumentation et des
traitements statistiques mis en œuvre.

En pratique, on se réfère généralement à deux notions pour caractériser la qualité


d’une recherche. Il s’agit d’une part, de la validité et d’autre part, de la fidélité. D’une
manière générale, on peut considérer que ces deux notions concernent, même si
certaines nuances sont à apporter, à la fois la recherche quantitative et la recherche
qualitative.

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Outre ces critères à caractère technique, la qualité d’une recherche dépend aussi
d’autres critères et notamment de la pertinence du sujet. Le choix d’un sujet est
particulièrement délicat car il conditionnera dans une large mesure l’impact que la
recherche pourra avoir auprès du public concerné et donc la notoriété du chercheur.

Tout d’abord, il est important qu’une recherche pose une question ou émette une
hypothèse à laquelle il n’existe pas encore de réponse clairement tranchée. Pour arriver
à ce type de question ou d’hypothèse, il est indispensable de bien connaître la
littérature scientifique dans le domaine de manière à mettre clairement en évidence
comment les conclusions issues de la recherche permettront de faire progresser la
réflexion par rapport au champ de connaissances considéré. Il ne s’agit pas à ce niveau
de rechercher à tout prix l’originalité mais plutôt de s’informer de manière approfondie
sur les études déjà réalisées pour inscrire sa propre recherche dans la continuité de
celles-ci. Bien entendu, cela n’exclut pas la possibilité de proposer des voies nouvelles
ou des approches qui sortent de l’ordinaire, mais il faut aussi rester réaliste et savoir
que pour espérer proposer des avenues de recherches innovantes, il faut d’abord bien
connaître le domaine qu’on a choisi d’investiguer et que cela exige souvent de
nombreuses années d’expérience.

Une fois la ou les questions de recherche clairement posées, il s’agira d’identifier une
méthodologie de recherche appropriée. A ce niveau, il existe un certain nombre de
principes généraux sur lesquels la plupart des chercheurs pourront facilement
s’accorder et sur lesquels nous reviendrons plus avant dans ce texte. A côté de
considérations méthodologiques à caractère général, il est important de prendre en
compte les spécificités des différents types de recherches que nous avons distingués.
En effet, ces types de recherches reposent sur des conceptions parfois fort différentes
de la manière de réaliser une recherche de qualité. Ainsi, par exemple, dans une
recherche expérimentale on exigera que les hypothèses soient définies de manière
exhaustive avant d’entamer la collecte des données alors que dans une recherche
action on sera souvent beaucoup plus accommodant par rapport à ce principe et on
acceptera de s’engager dans la prise d’information à partir de quelques questions assez
générales quitte à les formaliser dans un second temps

Il est illusoire aujourd’hui de considérer qu’une recherche de qualité peut être réalisée
par un chercheur isolé dans sa tour d’ivoire. Certes, dans un premier temps, le
chercheur débutant sera généralement encadré par un directeur de recherche qui le
guidera et l’orientera mais rapidement le besoin de rencontrer d’autres chercheurs et
de partager ses préoccupations avec ses pairs se fera sentir. C’est en effet avant tout
à travers la confrontation avec la communauté professionnelle que le chercheur
néophyte développera les compétences qui lui permettront de produire une recherche
de qualité et qu’il pourra à terme espérer voir celle-ci reconnue par ses pairs.

La productivité du chercheur mais aussi la qualité de ses productions peuvent aussi


être favorablement influencées par l’usage d’outils informatiques adéquats.
Particulièrement en sciences humaines et sociales, on constate encore souvent que les
chercheurs hésitent à se lancer dans un usage des logiciels spécialisés qui dépasse le
recours au traitement de texte ou l’utilisation du courrier électronique. Or il existe

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aujourd’hui en grand nombre de logiciels qui ont été conçus pour faciliter le travail du
chercheur à toutes les étapes de la réalisation d’une recherche.

4.2 Les critères techniques qui permettent d’apprécier la qualité d’une


recherche

4.2.1 La validité

La validité est un critère important pour apprécier la qualité d’une recherche car
lorsque ce critère n’est pas rencontré la recherche est sans valeur. La validité est donc
une exigence à la fois pour la recherche quantitative et qualitative.

Dans sa conception classique, la validité fait référence au fait qu’un instrument mesure
bien ce qu’il est censé évaluer. Par exemple, qu’un test d’intelligence verbale mesure
bien l’intelligence des sujets avec lesquels il est utilisé.

Par la suite, le développement de multiples modalités de recherches en sciences


humaines a conduit à distinguer plusieurs formes de validité dont nous ne reprendrons
ici que les plus utilisées :

o Validité interne : désigne l’aptitude des données collectées à représenter


réellement le phénomène étudié. Ceci concerne aussi bien la pertinence du
choix des catégories utilisées pour coder les données issues d’une observation
systématique que le fait de s’assurer que les traitements appliqués dans
une étude expérimentale expliquent bien les changements de comportement
manifestés par les sujets (si on peut les expliquer autrement la validité interne
n’est pas bonne).
o Validité externe : désigne le degré selon lequel les résultats d’une étude
peuvent être généralisés à une population plus large. Cette définition a une
signification différente selon qu’on s’inscrit dans le paradigme quantitatif ou
qualitatif. Ainsi, dans une recherche quantitative, c’est la conception même de
la recherche basée sur un échantillonnage représentatif des sujets qui va
assurer, dans une mesure plus ou moins grande, cette validité externe. Dans le
cadre d’une recherche qualitative, par contre, on parlera plutôt de comparabilité
ou de transférabilité des données d’un contexte à un autre pour caractériser la
mesure selon laquelle les résultats observés dans une situation particulière sont
valides pour une autre situation.
o Validité de contenu : fait référence à la capacité, des instruments utilisés
pour mesurer un phénomène ou une caractéristique, à cerner ce phénomène
ou cette caractéristique dans l’ensemble des aspects qui sont concernés par la
recherche. Par exemple, si on utilise pour mesurer le style d’apprentissage un
instrument comportant une dizaine d’items, il convient de s’assurer que cet
instrument cerne bien tous les aspects du style d’apprentissage qui sont
importants pour la recherche considérée.
o Validité écologique : concerne avant tout la recherche qualitative qui accorde
une grande importance au caractère naturel des situations étudiées ce qui
exclut toute manipulation de cette situation par l’expérimentateur. Pour
rencontrer cette exigence, il est important que la situation étudiée soit la plus

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proche possible de la situation réelle à laquelle s’appliqueront les conclusions
de la recherche.

4.2.2 La fidélité

La fidélité d’une recherche se définit classiquement comme la possibilité de répliquer


la recherche en obtenant les mêmes résultats. Il s’agit d’un critère essentiel dans toute
recherche mais qui, sous la forme où nous l’avons défini, s’applique particulièrement
bien à la recherche quantitative dans le cadre de laquelle on dispose d’outils
statistiques permettant de mesurer le niveau de fidélité (par exemple : le coefficient
de fidélité entre deux passations d’une épreuve sur deux groupes équivalents). En
effet, dans le cadre d’une approche quantitative, on accepte l’idée que la situation peut
être manipulée pour être représentée au même groupe de sujets ou à un groupe
équivalent alors que l’approche qualitative insiste sur le caractère unique
et idiosyncratique des situations de sorte qu’une étude ne peut jamais être répliquée
dans les mêmes conditions (validité écologique).

Certains auteurs utilisent néanmoins le terme fidélité à propos de la recherche


qualitative pour caractériser la cohérence qui existe entre les observations réalisées et
les phénomènes étudiés. Une fidélité faible signifierait que l’observation a été biaisée
en raison de la mauvaise qualité de l’instrument d’évaluation (un questionnaire, une
grille d’observation) ou par le manque d’objectivité des observateurs (les attentes du
chercheur le conduisent à voir les choses différemment de ce qu’elles sont réellement).
Pour contrôler ce type de difficulté, la recherche qualitative fait appel à la notion de
triangulation (voir partie III, point 4).

Plutôt que le terme fidélité, certains auteurs utilisent le terme fiabilité ce qui correspond
à la traduction de « reliability » utilisé dans la littérature anglo-saxonne.

5. La démarche de recherche

Dans la suite de ce texte, nous organiserons la présentation des principaux concepts


et principes qui régissent la recherche en éducation en fonction d’un certain nombre
d’étapes qui traduisent la chronologie naturelle d’une recherche. Cela correspond à la
fois à un souhait de clarification et à une volonté d’épauler le futur chercheur dans un
parcours initiatique semé d’embûches et de pièges qu’il s’agira d’éviter pour se
conformer aux principes de validité que nous venons d’évoquer.

L’aspect linéaire que prendra la succession d’étapes à laquelle nous nous référerons
pour décrire le parcours du chercheur ne doit pas nous faire croire que la réalité de la
recherche est aussi tranquille. Bien au contraire, le quotidien du chercheur est fait de
progrès souvent très lents, de retours en arrière fréquents et de remises en questions
permanentes. Plutôt que de s’inscrire dans une linéarité strictement planifiée, la
démarche s’apparente davantage à la marche des pénitents qui progressent de cinq

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pas vers l’avant puis de trois vers l’arrière pour repartir ensuite à nouveau vers le but
à atteindre. En recherche, comme dans toute activité qui a pour objet de créer du
savoir, il faut accepter de reconsidérer en permanence les résultats auxquels on a
abouti pour les relire selon de nouvelles perspectives ou pour les recadrer en les situant
dans un contexte plus riche.

Partie II : La conception d’une recherche

Dans cette partie, nous nous proposons de traiter le processus qui conduit à
l’élaboration de la problématique d’une recherche et des hypothèses et/ou
questions de recherche qui y sont associées.

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C’est au cours de cette phase préparatoire que le chercheur s’efforcera de préciser les
objectifs qu’il poursuit, de réunir et de traiter la littérature scientifique en rapport avec
son sujet de recherche et, par une analyse critique de la littérature, de définir la
problématique dans laquelle s’inscriront les hypothèses et les questions qui lui
permettront de piloter sa recherche.

Cette phase de conception, même si elle garde le chercheur éloigné du terrain à partir
duquel il collectera les données nécessaires à son travail d’investigation, est néanmoins
importante car elle conditionnera la qualité et la pertinence des opérations qui seront
menées par la suite. Trop souvent des chercheurs, parce qu’ils sont pressés par le
temps ou pas suffisamment formés à la rigueur de la démarche scientifique, négligent
cette étape.

1. La revue de la littérature

1.1 Avant d’entamer la revue de la littérature, choisir une thématique de


recherche

Même si la plupart des auteurs s’accordent sur le fait que la revue de la littérature
constitue le point d’entrée d’une recherche menée de manière systématique, il est clair
qu’avant de se lancer dans celle-ci il faut déjà avoir une première idée, même assez
vague, de ce qu’on veut faire. Sans cela, on serait vite débordé par l’étendue des
ressources documentaires disponibles.

Bien entendu, on peut se lancer dans une recherche pour répondre à un problème qui
nous tient à cœur depuis longtemps, auquel nous avons été confronté à de
nombreuses reprises dans la vie de tous les jours mais c’est loin d’être le cas le plus
fréquent. Heureusement d’ailleurs car, dans ce type de situation souvent très
fortement investie affectivement, il est rare que le chercheur puisse garder l’objectivité
nécessaire à une recherche de qualité.

Il est très fréquent que l’idée de départ d’une recherche soit issue d’un échange avec
une personne disposant d’une expérience significative dans le domaine considéré. En
contexte académique, c’est souvent le superviseur ou le directeur de thèse qui joue ce
rôle mais d’autres personnes peuvent aussi intervenir pour orienter le choix du
chercheur (bibliothécaires, documentalistes, professionnels du domaine,
doctorants…).

Pour le chercheur professionnel, les discussions avec d’autres chercheurs lors de


colloques, symposiums ou d’échanges sur Internet constitueront souvent une source
importante pour alimenter sa recherche. Les diverses communautés auxquelles
appartient habituellement un chercheur jouent en effet un rôle important non
seulement dans le choix des orientations de recherche mais aussi dans la
reconnaissance de celles-ci. Sans l’aval des communautés qui dominent un secteur de
recherche, il est difficile pour un chercheur de faire reconnaître la qualité de ses
travaux.
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Il arrive aussi que le choix du sujet de recherche soit imposé. C’est le cas par exemple
des recherches financées par un commanditaire qui définissent généralement les
problèmes qui devront être traités, les résultats attendus et parfois même le type de
méthodologie qui devra être mise en œuvre.

Quel que soit le contexte dans lequel le thème d’une recherche a été défini, il est
important que celui-ci soit correctement dimensionné. Trop large, il conduirait le
chercheur à se voir rapidement dépassé par les ressources qu’il aura à consulter. Trop
étroit, il laissera le chercheur désemparé parce qu’il peine à trouver des travaux qui lui
permettront de documenter son sujet.

1.2 Pourquoi réaliser une revue de la littérature ?

Pour construire sa recherche le chercheur doit s’appuyer sur les épaules de ceux qui
l’ont précédé, cela lui permettra non seulement de gagner beaucoup de temps mais
cela fondera aussi la légitimité de sa recherche. En effet, pour faire progresser les
connaissances dans un domaine, il est essentiel de bien connaître ce domaine de
manière à lier étroitement ses propres résultats avec ceux déjà acquis sur le sujet
étudié.

A l’heure actuelle, il n’est plus possible d’envisager une recherche qui s’élabore en vase
clos. La prise en compte de la littérature spécialisée doit aussi permettre de s’inscrire
dans une communauté de chercheurs, d’appréhender progressivement ses règles de
fonctionnement et ses pratiques. En effet, en sciences humaines et sociales, la valeur
des connaissances acquises n’est jamais indépendante du jugement des pairs, qu’ils
s’agissent de collègues ou de personnes exerçant un contrôle direct sur la recherche
réalisée. Pour se donner toutes les chances de choisir un sujet de recherche qui soit
pertinent, il ne faut pas hésiter à se soumettre au jugement des autres pour légitimer
son projet.

En la matière, un usage intelligent de l’Internet ouvre des perspectives nouvelles en


permettant de créer très rapidement un contact direct entre le chercheur et la
personne à l’origine des connaissances qu’il se propose d’exploiter. Même le chercheur
le plus néophyte peut désormais s’entretenir directement avec les meilleurs spécialistes
d’un domaine dans une relation où les barrières géographiques mais aussi celles liées
au statut des personnes s’estompent derrière une volonté commune de faire
progresser les connaissances.

L’étendue de la revue de la littérature pourra être très variable selon la nature du sujet
investigué mais aussi en fonction de l’expérience du chercheur dans le domaine. Ainsi,
un chercheur déjà très averti par rapport au domaine pourra très rapidement cerner
les éléments les plus pertinents à prendre en considération pour les besoins de sa
recherche alors que le néophyte aura à réaliser un tour d’horizon beaucoup plus large
avant d’en arriver à se focaliser sur la littérature en lien direct avec son sujet.

L’encadré 2.1 reprend en synthèse les principales raisons qui sont les plus souvent
avancées pour justifier la nécessité de réaliser une étude de la littérature avant
d’entreprendre une recherche.

14
o Cela permet d’avoir des idées sur les orientations à donner à sa recherche

o Cela permet d’éviter de recommencer des recherches qui ont déjà été menées

o Cela permet d’élargir les perspectives du chercheur par rapport à un domaine et de


placer son travail dans un contexte pertinent

o Cela permet d’établir la problématique qui va fonder la recherche et d’élaborer des


hypothèses et/ou des questions de recherche

o Cela donne des idées par rapport aux méthodes d’investigations qui sont généralement
mises en œuvre dans le domaine étudié

o Cela prépare la discussion au cours de laquelle les résultats de la recherche seront mis
en perspectives par rapport aux recherches antérieures

Encadré 2.1 : Les raisons qui justifient la nécessité de réaliser une étude de la
littérature

Les raisons évoquées dans l’encadré 2.1 montrent clairement le caractère déterminant
de la revue de la littérature par rapport à la qualité et à la pertinence de la recherche
qui sera réalisée par la suite.

Tout d’abord, la revue de la littérature va donner lieu à une mise en perspective des
travaux antérieurs qui aboutira à ce que nous appellerons la problématique de la
recherche. Cette dernière constituera le véritable point de départ de la recherche
puisque c’est à partir de celle-ci que s’élaboreront les hypothèses et les questions
de recherche.

La portée de l’analyse de la littérature ne s’arrête pas là. En effet, celle-ci permettra


aussi au chercheur de s’informer sur les méthodes de recherche les plus souvent
pratiquées dans le domaine qui a retenu son intérêt. Il s’agit non seulement de
vérifier quelles sont les approches qui sont privilégiées (approches quantitatives
versus qualitatives) mais aussi de voir comment les données sont généralement
collectées et traitées dans le cadre de ces approches. Toutes ces informations seront
fort précieuses par la suite pour définir en détail comment et avec quels outils la
recherche sera menée.

Enfin, la revue de la littérature sera également fort précieuse lors des phases ultimes
de la recherche que constituent la discussion et la conclusion. En effet, il s’agira à ce
moment pour le chercheur de placer ses propres résultats dans la perspective des
recherches antérieures pour montrer comment ceux-ci pourraient permettre de faire
avancer les idées par rapport au sujet considéré.

15
1.3 Comment réaliser une revue de la littérature ?

Traditionnellement, le premier pourvoyeur d’informations en matière de recherche ce


sont les bibliothèques et plus précisément les bibliothèques universitaires où il est
généralement utile de se rendre pour prendre connaissance des publications à partir
d’ouvrages ou de revues spécialisées. Depuis une dizaine d’années, les choses ont
considérablement changé avec l’avènement d’Internet et des bibliothèques en ligne.
Avec l’arrivée de ce nouveau moyen de mise à disposition de l’information, l’accès à
l’information est devenu beaucoup plus aisé et surtout plus rapide mais cela a aussi
engendré certains problèmes comme celui de la valeur des informations disponibles
sur Internet ou encore le développement du plagiat qui est beaucoup plus tentant
sur le Web puisque celui-ci facilite la recopie directe des informations par « copier-
coller ». Bien entendu le plagiat n’est pas limité à la recopie à partir du Web puisqu’il
concerne tout emprunt d’un texte ou d’une partie d’un texte sans citer le ou les auteurs
de celui-ci. Pour mener une revue efficace de la littérature, il faut bien connaître les
différents types de supports d’information et ce qu’ils peuvent apporter, leurs
avantages et leurs limites.

Le premier contact avec un domaine se fera souvent à travers la


consultation d’ouvrages spécialisés qui dressent un panorama plus ou moins large
du domaine. Pour choisir ces ouvrages qui constitueront une porte d’entrée pour la
revue de la littérature, il sera souvent utile d’être conseillé non seulement pour
sélectionner les publications centrées sur le sujet d’étude mais aussi pour identifier
celles qui sont considérées comme des références dans le domaine.

Un autre point d’entrée intéressant ce sont les index de référencement


bibliographique (abstract) qui proposent très régulièrement des résumés des
principales publications dans un domaine. Les revues les plus importantes sont
compilées et certains ouvrages sont également référenciés.

Les revues scientifiques constituent la source d’information la plus à jour et


généralement la plus valide. Il s’agit de publications qui sont soumises à l’arbitrage des
pairs ce qui, même s’il peut exister des différences de niveau entre les revues, garantit
la qualité des informations qu’on peut y trouver (voir partie V, point 2).

Il existe plusieurs manières de rechercher des informations sur Internet en vue


d’une revue de la littérature. Tout d’abord, la plus pratiquée mais aussi la plus
hasardeuse consiste à utiliser un moteur de recherche « grand public » comme Google
ou Yahoo avec le risque de trouver des documents de qualité très variable parmi
lesquels il sera difficile, surtout si on n’est pas encore un chercheur très averti, de faire
la part entre le bon grain et l’ivraie. Complémentairement aux moteurs génériques, un
moteur appelé Google Scholar (www.scholar.google.com) propose l’accès à des
documents spécialisés qui relèvent de la recherche universitaire et constitue dès lors
une source d’information plus fiable. De plus, pour chaque document identifié, Google
Scholar mentionne le nombre de fois que le document est cité sur le Web ce qui donne
une idée de son importance pour le domaine de recherche considéré.

16
A côté de ces moteurs de recherche qui explorent de manière systématique le net, il
existe des bases de données spécialisées qui mettent à la disposition des chercheurs
un grand nombre de références bibliographiques mais souvent aussi des documents
complets (Full text data base). La plus utilisée en éducation est certainement la base
ERIC gérée par l’Educational Resources Information
Center (http://www.eric.ed.gov/) qui donne accès à un très grand nombre de
documents en texte complet remontant jusqu’en 1966. D’autres bases de données à
plein texte existent dans le domaine de l’éducation :

o Firstsearch (http://firstsearch.oclc.org/fsip?dbname=ArticleFirst);
o Wilson OmniFile Full Text ( http://www.hwwilson.com/Databases/omnifile.htm);
o HighBeam Research (http://www.highbeam.com/).

Types de ressources sur lesquelles on peut s’appuyer pour réaliser une revue de la
littérature :

o Les ouvrages scientifiques ;

o Les index bibliographiques (abstract) ;

o Les dictionnaires et encyclopédies ;

o Les articles scientifiques ;

o Les moteurs de recherche « grand public » ou spécialisés ;

o Les bases de données spécialisées ;

o Certains documents non publiés comme les thèses de doctorat, les publications internes
ou les preprints qui circulent sur internet.

Encadré 2.2 : Types de ressources utilisées pour réaliser une revue de la littérature

Un autre apport des logiciels spécialisés à la réalisation d’une revue de la littérature


concerne non plus la recherche de références bibliographique, mais l’organisation des
références en vue de la production du texte proprement dit. Ainsi, des logiciels comme
EndNote ou Zotero permettent de formater les références bibliographiques selon les
normes les plus habituellement admises par la communauté scientifique comme, par
exemple la norme APA de l’American Psychology Association.

1.4 Qu’est-ce qu’une revue de la littérature réussie ?

Une bonne revue de la littérature va au-delà de la simple énumération des références


pour proposer une revue analytique du domaine à travers laquelle le chercheur

17
développera sa propre position. A travers l’analyse et la critique de la littérature
spécialisée, il développera et justifiera un point de vue personnel. Il placera le projet
de recherche dans son contexte en montrant les apports possibles de celui-ci à
l’évolution des connaissances dans le domaine. La revue de la littérature devra
également orienter la suite de la recherche et en particulier le choix
des hypothèses ou des questions de recherche.

La revue de la littérature doit être rédigée de manière à s’intégrer dans le rapport de


recherche proprement dit que celui-ci prenne la forme d’un article dans une revue
scientifique, une thèse de doctorat ou une monographie spécialisée. Son style devra
donc correspondre à celui attendu par le type de publication dans lequel il est destiné
à prendre place.

Généralement la revue de la littérature se situera dans la partie introductive d’un


rapport de recherche de manière à fournir un cadre de référence pour le problème à
l’étude, à justifier l’intérêt porté à celui-ci et à mettre en évidence les apports possibles
de la recherche à l’évolution des idées dans le domaine. Toutefois, il peut aussi arriver
que la revue de la littérature soit scindée en plusieurs parties et distillée dans
l’ensemble du rapport de recherche. C’est notamment le cas dans certaines approches
qualitatives ou mixtes à l’occasion desquelles plusieurs méthodologies de recherche
sont mises en œuvre et que chacune convoque un aspect particulier de la littérature
scientifique.

L’étendue à donner à l’étude de la littérature pourra être très variable selon la nature
du sujet à traiter mais aussi selon l’approche méthodologique mise en œuvre. Une
étude quantitative exige généralement une revue de la littérature exhaustive de
manière à fonder la validité des hypothèses ou des questions de recherche qui
seront proposées. Par contre, elle concernera généralement un domaine déjà bien
étudié et relativement aisé à circonscrire. Dans le cas d’une approche qualitative, les
choses seront différentes puisque le domaine sera généralement moins structuré au
départ et il s’agira, au sein de celui-ci, d’explorer des pistes nouvelles pour dégager
des thématiques de recherche encore peu exploitées.

2. L’élaboration de la problématique, le choix des


hypothèses et des questions de recherche

2.1 Qu’est-ce qu’une problématique de recherche ?

L’élaboration de la problématique de recherche consiste à synthétiser la revue de la


littérature réalisée à l’étape précédente en vue de mettre en évidence les débats, les
divergences de points de vue ou d’interprétation qui existent au sein du champ
conceptuel considéré afin de dégager précisément les éléments qui justifient la
recherche que le chercheur se propose de réaliser.

18
Ces divergences peuvent porter sur des désaccords relatifs au modèle théorique de
référence. Par exemple, un auteur interprétera les résultats d’une recherche sur la
motivation au travail en fonction de la théorie de la hiérarchie des besoins de Maslow
alors qu’un autre s’appuiera sur la théorie de deux facteurs d’Herzberg. Pour régler ce
conflit d’interprétation, l’auteur pourra proposer soit de se référer à un autre modèle
interprétatif soit d’élaborer un modèle original en mettant au point une expérience ou
une série d’expériences pour valider ce modèle.

Les divergences peuvent également porter sur les méthodes d’investigation mises en
œuvre. On pourra critiquer les outils statistiques utilisés ou encore les techniques
d’enquêtes utilisées en considérant que les questionnaires ont été mal conçus parce
qu’ils favorisent trop la désirabilité sociale (voir partie III, point 3.1.3) ou que les
intervieweurs ont été mal préparés.

La problématique peut également se situer dans le prolongement de recherches


antérieures dont il s’agit par exemple de préciser les résultats ou pour lesquelles on
souhaite proposer un modèle plus complet comme dans l’encadré 2.3.

Définition de la problématique : En considérant les recherches (Garrison & al., 2000 ;


Rovai, 2000, 2002 ; Na Ubon, 2005) qui ont conduit à mettre en évidence, dans un
dispositif de formation à distance, les effets du tuteur sur le développement d’un
climat relationnel propice au travail en groupe restreint et à l’acquisition des
connaissances, nous nous proposons dans cette étude de tenter d’identifier, par
une méthodologie à la fois quantitative et qualitative, les variables qui, dans le
fonctionnement des groupes, permettent d’expliquer les gains en termes
d’apprentissage enregistrés à l’occasion des études précédentes.
Analyse : Dans la rédaction de cette problématique, l’auteur a mis en évidence de
manière synthétique les éléments pertinents issus des recherches antérieures sur
lesquels il s’appuie pour fonder son projet de recherche. La formulation retenue
permet d’identifier les éléments sur lesquels la recherche s’appuie et qui sont détaillés
dans la revue de la littérature ainsi que les lacunes dans la compréhension du
phénomène que le projet de recherche se propose de combler. L’auteur a également
précisé qu’il se propose, pour rencontrer ses objectifs de recherche, de s’appuyer sur
une approche mixte à la fois quantitative et qualitative.

Encadré 2.3 : Exemple commenté de problématique de recherche

Dans la définition de la problématique, le chercheur doit être capable de dire en quoi


sa recherche apporte quelque chose de nouveau c’est-à-dire de justifier l’intérêt de sa
recherche.

Le travail d’analyse, de confrontation et de critique sur lequel repose l’élaboration de


la problématique doit bien entendu être préparé dans la revue de la littérature de
manière à ce que les éléments mis en évidence dans le cadre de la problématique

19
apparaissent comme le prolongement naturel de la revue de la littérature. Ce qui est
réellement nouveau au niveau de la problématique, c’est que le chercheur annonce ce
qu’il se propose de réaliser et préfigure ainsi les hypothèses et les questions de
recherche qui seront formulées par la suite.

Comme l’illustre l’encadré 2.4, la formulation de la problématique pourra prendre des


formes différentes selon le type d’approche méthodologique envisagée. Ainsi, dans cet
exemple, il s’agit d’une méthodologie qualitative de type étude de cas à l’occasion de
laquelle une revue de la littérature assez complète a été réalisée ; toutefois, cette
dernière ne conduit pas, contrairement à l’exemple présenté dans l’encadré 2.3, de
manière directe à la définition de la problématique. Par contre, la revue de la littérature
réalisée a permis de déterminer très précisément la méthodologie qui sera retenue et
d’identifier une série de facteurs susceptibles d’influencer les processus d’appropriation
qui font l’objet de l’étude.

Définition de la problématique : A partir de l’étude de 10 situations contrastées,


cette recherche se propose d’explorer les facteurs qui permettent d’expliquer les
modalités d’appropriation des technologies dans les différents établissements
concernés. L’étude s’appuiera sur une méthodologie qualitative de comparaisons
inter-cas proposée par Huberman et Miles.
Analyse : La formulation de la problématique met l’accent sur une approche
exploratoire qui n’est pas à proprement parlé fondée sur une revue de la littérature
mais qui s’appuie sur une méthodologie légitimée par celle-ci.

Encadré 2.4 : Exemple commenté de problématique de recherche

2.2 L’élaboration des hypothèses et des questions de recherche

2.2.1 Quelques définitions

Variable : Une variable est une caractéristique qui peut changer. Une variable peut
donc prendre plusieurs valeurs (variable quantitative) ou plusieurs aspects (variable
qualitative).

Variable quantitative: Une variable quantitative est une variable qui peut prendre
diverses valeurs. Par exemple, les résultats à un test de français est une variable
quantitative. Parmi les variables quantitatives, on peut en distinguer de trois types :
les variables ordinales, les variables à intervalles et les variables métriques.

Variable ordinale : C’est une variable quantitative dont les valeurs peuvent être
hiérarchisées mais sans que l’écart qui sépare deux valeurs consécutives soit égal tout
au long de l’échelle. Les réponses à un questionnaire de Likert comportant 5 catégories
(totalement en désaccord, plutôt en désaccord, neutre, plutôt en accord, totalement
en accord) peuvent être considérées comme une variable ordinale.

20
Variable à intervalles : Comme dans une variable ordinale les valeurs peuvent être
hiérarchisées mais de plus les écarts entre deux valeurs consécutives sont égaux.
L’échelle des QI peut être considérée comme une variable à intervalles en ce sens
qu’un intervalle de 10 points est comparable à tous les niveaux de l’échelle.

Variable métrique (scale) : En plus des caractéristiques des deux types de variables
précédents, une variable métrique se caractérise par le fait que l’origine de l’échelle
c’est-à-dire le zéro est non arbitraire. Ainsi, si on comptabilise le nombre de fautes à
une dictée, le zéro signifie que l’élève n’a commis aucune faute. Ce type de variable
permet aussi d’établir des rapports de proportion entre différentes valeurs ce qui n’est
pas le cas des variables à intervalle : entre 5 et 10 fautes à la dictée, il y a le même
rapport qu’entre 15 et 20 fautes.

Variable qualitative : une variable qualitative peut prendre divers aspects. Par
exemple, la variable sexe prendra deux aspects : féminin ou masculin. On parle aussi
de variable nominale à ce propos.

Variable indépendante versus dépendante : Dans une expérience où l’on


compare l’efficacité de deux méthodes d’enseignement afin d’évaluer leur efficacité
respective à l’aide d’un test présenté à l’issue de la leçon, on peut identifier deux types
de variables : la variable « méthode d’enseignement » qui est appelée « variable
indépendante » et la variable « résultat au test » qui est appelée « variable
dépendante ». Les variables indépendantes vont donc définir le traitement qui sera
appliqué à chacun des groupes lors de l’expérience et les variables dépendantes sont
celles qui subissent les effets des variables indépendantes.

Hypothèse : est une prédiction que le chercheur fait à propos de la relation qui est
attendue entre des variables (exemple : la présence de feedbacks discriminatifs dans
un cours sur ordinateur augmente les performances des élèves mesurées par un test
proposé à l’issue de l’apprentissage).

Question : c’est une interrogation à propos de la relation qui peut exister entre des
variables (exemple : La présence de feedbacks discriminatifs influence-t-elle les
performances des élèves ?).

2.2.2 Qu’est-ce qu’une bonne hypothèse ?

Une bonne hypothèse doit être directement issue de la revue de la littérature et


constituer une formalisation de la problématique de recherche. La principale qualité
d’une hypothèse est d’être cohérente par rapport aux études antérieures mais aussi
de préciser les options de recherche dégagées à l’occasion de la problématique.

Une hypothèse doit proposer une explication raisonnable au modèle étudié basée sur
une étude détaillée de la littérature. Par exemple, il parait raisonnable d’attribuer dans
le cadre d’une hypothèse le faible intérêt pour l’usage de l’ordinateur dans certaines
écoles au manque de formation des enseignants alors que ce serait beaucoup moins
raisonnable de l’attribuer au manque de motivation des élèves.

21
Une hypothèse doit établir le plus clairement possible la relation qui est attendue entre
plusieurs variables et définir ces variables de manière opérationnelle. Par exemple, une
hypothèse portant sur l’effet d’un tutorat proactif versus réactif dans un enseignement
à distance précisera le sens de la relation (proactif supérieur à réactif) ainsi que la
variable dépendante (indice de satisfaction mesuré par un questionnaire d’opinion) qui
permettra d’évaluer l’effet du traitement auquel sera soumis chacun des deux groupes
d’élèves : « Les élèves bénéficiant d’un tutorat proactif seront caractérisés par un
indice de satisfaction vis-à-vis du cours plus élevé que les élèves bénéficiant d’un
tutorat réactif ».

Une hypothèse doit pouvoir être testée c’est-à-dire qu’on doit pouvoir vérifier sa
véracité en mettant en place un plan d’expérience adéquat, en sélectionnant des sujets
d’observation, en récoltant des données, en mobilisant des outils statistiques
adéquats…. Les efforts et les moyens nécessaires à la vérification d’une hypothèse
doivent aussi être évalués de manière réaliste. Rien ne sert de formuler une hypothèse
qui exigerait de se déplacer dans toute l’Europe alors qu’on sait qu’on n’en aura pas
les moyens ou encore une hypothèse qui porte sur l’évolution d’une population sur les
dix prochaines années alors que les résultats sont attendus endéans les six mois.

2.2.3 Comment formuler une hypothèse ?

Formuler une hypothèse consiste à exprimer une relation entre plusieurs variables,
généralement une ou plusieurs variables indépendantes et une ou plusieurs variables
dépendantes.

La forme la plus courante pour une hypothèse directionnelle est la suivante : Les sujets
S1 soumis au traitement X1 performent mieux à la variable D que les sujets S2 soumis
au traitement X2.

Par exemple, les élèves de 5e année primaire (S1) ayant bénéficié d’un cours
multimédia d’éducation sexuelle et affective (X1) réussissent mieux à un posttest
spécifique (D) que les élèves (S2) ayant suivi un cours classique (X2) avec leur
instituteur.

Cette formulation d’une hypothèse peut présenter des variantes notamment au niveau
du traitement où, au lieu de deux traitements différents, on peut en trouver trois ou
quatre. Dans notre exemple, les élèves peuvent bénéficier d’un cours classique, d’un
cours multimédia mais aussi d’un cours multimédia avec intervention d’un tuteur à
distance. Il s’agira cette fois dans la formulation de l’hypothèse de hiérarchiser les
effets attendus des trois traitements en précisant, par exemple, que le cours
multimédia avec tuteur à distance sera plus efficace que le cours multimédia sans
tuteur et que ce dernier sera plus efficace qu’un cours classique.

Une autre manière de formuler une hypothèse consiste à établir qu’il n’y a pas de
relation significative ou de différence entre des variables (hypothèse nulle). Par
exemple, le niveau de réussite des élèves de 5e année primaire ayant bénéficié d’un
cours multimédia n’est pas significativement différent de celui des élèves ayant
bénéficié d’un cours classique.

22
Les études qui ont recours à des hypothèses exprimées sous la forme d’une hypothèse
nulle sont relativement rares. En effet, le plus souvent le chercheur sera plutôt
préoccupé par la mise en évidence d’une différence pour confirmer ou invalider un
modèle ; toutefois, la vérification d’une hypothèse nulle alors qu’une différence a été
observée dans d’autres recherches peut aussi conduire à remettre en cause un modèle
existant.

Certains ouvrages parlent aussi d’hypothèse non directionnelle pour désigner une
hypothèse où le sens de la relation ne serait pas spécifié. Personnellement, nous
préférons ne pas formuler d’hypothèse pour exprimer une relation ou une différence
dont le sens n’est pas défini mais plutôt faire appel à une question de recherche.

2.2.4 Les questions de recherche

Alors que les hypothèses de recherche sont souvent réservées aux recherches
quantitatives et, plus précisément, aux recherches expérimentales, les questions de
recherche peuvent se retrouver dans tous les types d’étude.

Ainsi, il est parfois utile dans une étude expérimentale de recourir à des questions
de recherche lorsque les résultats fournis dans la littérature ne sont pas suffisamment
précis pour établir le sens de la relation qu’on peut attendre entre deux variables. Le
plus souvent, dans une approche déductive, les questions de recherche seront
formulées pour compléter, élargir ou préciser les hypothèses de recherche.

Classiquement les questions de recherche se retrouvent au point de départ d’une


recherche qualitative où il s’agit d’explorer un domaine encore peu formalisé.
Toutefois, cela n’exclut pas la possibilité de faire appel dans une étude qualitative à
des hypothèses assez générales au départ de l’étude mais surtout il n’est pas rare que
des études qualitatives aboutissent à la formulation d’hypothèses de recherche qu’il
s’agira de vérifier par la suite par des méthodologies appropriées.

Une recherche qualitative s’articule généralement autour d’une question de recherche


principale qui se décline sous la forme d’une série de questions spécifiques (trois dans
l’encadré 2.5). Comme le soulignent Miles et Huberman (1994), les questions
spécifiques permettent de préciser la recherche et d’orienter le chercheur dans le choix
des options méthodologiques qu’il privilégiera. Par exemple, ces questions l’amèneront
à élaborer un guide d’entretien pour l’aider à observer systématiquement le
comportement des sujets ou contribueront au choix des items d’un questionnaire
d’opinion.

Même si les questions spécifiques doivent être plus précises que la question principale,
il convient d’être attentif qu’elles restent suffisamment ouvertes pour prendre en
compte l’ensemble des éléments que la recherche permettra de révéler. Contrairement
aux hypothèses de recherche, il ne s’agit pas ici de spécifier ce à quoi on s’attend mais
de conserver un regard le plus ouvert possible pour ne pas courir le risque de passer
à côté d’une donnée non prévue mais présentant néanmoins un grand intérêt pour la
recherche qu’on a choisi de mener.

23
Question de recherche principale
De quelle manière les processus de co-élaboration à distance sont-ils influencés par
une intervention tutorale en présentiel axée sur l’exploitation des traces des activités
et des interactions épistémiques entre apprenants ? Dans quelle mesure les
performances sont-elles améliorées après le débriefing ?

Questions de recherche spécifiques

Quels éléments de processus sont-ils modifiés après le débriefing?

Des formes d’interaction particulières sont-elles spécifiques à certaines dyades ?

Peut-on lier des éléments de la prise de conscience métacognitive (représentation,


jugement, vécu, autoévaluation, capacité de régulation) du débriefing avec des
stratégies métacognitives développées par la suite ?

Encadré 2.5 : Exemples de questions de recherche

Contrairement à ce qui se passe dans une recherche quantitative, on peut très bien
accepter, dans une recherche qualitative, que les questions soient modifiées durant
l’étude dans le cadre d’une démarche exploratoire où de nouvelles idées et de
nouvelles questions émergent tout au long du processus de recherche. Dans certains
cas, les questions spécifiques peuvent même être considérées comme en révision
permanente pour s’adapter à l’avancement de la réflexion du chercheur au fur et à
mesure qu’il collecte et analyse les données.

3. La sélection d’une approche de recherche

Comme nous l’avons vu dans la première partie, le chercheur qui se prépare à réaliser
une recherche empirique dispose de deux grandes approches de recherche
concurrentes mais aussi complémentaires : l’approche quantitative ou déductive et
l’approche qualitative ou inductive. Jusqu’à présent, pour traiter de la conception d’une
recherche, nous avons envisagé conjointement ces deux approches en évoquant les
spécificités de chacune mais en soulignant aussi les aspects qui les rapprochent.

En pratique, jusqu’à l’étape d’élaboration des hypothèses et des questions de


recherche, le chercheur n’aura généralement pas à opter pour une approche plutôt
qu’une autre. Au contraire, il aura avantage à laisser son cadre de recherche le plus
ouvert possible pour se donner toutes les chances de répondre avec un maximum de
pertinence aux questions qu’il se pose.

24
Au moment de l’élaboration des hypothèses et des questions de recherche les choses
sont différentes puisque, comme nous l’avons vu, le choix d’une approche quantitative
exigera plus de précisions au niveau de la formulation des hypothèses et surtout
d’anticipation par rapport à ce qui est attendu.

A ce niveau, le chercheur peut aussi opter pour une approche mixte dans le cadre de
laquelle il combinera les approches qualitative et quantitative.

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