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Compte tenu de ces buts, on peut considérer que la recherche concerne tous les
acteurs du processus éducatifs non seulement le chercheur patenté mais aussi
l’enseignant de terrain qui, soucieux de développer une attitude réflexive par rapport
à sa pratique, sera un jour confronté à la nécessité d’analyser les résultats de son
action et d’ajuster sa pratique en fonction de ces résultats.
Si on accepte l’idée que tous les acteurs éducatifs sont concernés par la recherche, il
est essentiel de les former aux principes et aux méthodologies propres à ce processus
qui permet d’appréhender le monde qui nous entoure en respectant les principes de
la démarche scientifique.
La démarche scientifique est une méthode très efficace et très largement éprouvée
pour acquérir de nouvelles connaissances. C’est grâce à ce type d’approche que la
plupart des disciplines relevant des sciences exactes ont construit le corpus de
connaissances sur lequel repose la recherche dans des domaines aussi divers que la
physique, la chimie, la médecine ou la biologie.
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en ce qui concerne les sciences sociales et humaines (ou encore les « sciences molles »
par opposition aux « sciences dures ») dont fait partie l’éducation.
Comme leur nom l’indique les sciences humaines et sociales font intervenir des
individus ce qui implique un certain nombre de considérations éthiques par rapport
aux sujets impliqués dans une expérience. Ainsi, il est généralement admis que les
sujets doivent non seulement être consentants mais qu’ils doivent aussi être informés
des buts de l’expérience ce qui, dans certains cas, peut influencer les résultats.
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2. Recherche qualitative ou quantitative, faut-il choisir ?
Ainsi, le point de départ d’une recherche qui a des visées nomothétiques est
généralement la formulation d’hypothèses et de questions de recherche qu’il s’agit de
vérifier. Comme nous l’avons déjà souligné, la démarche basée sur la formulation
d’hypothèses et leur vérification à partir des données recueillies est fondamentalement
de nature déductive alors que les tenants des approches qualitatives s’inscrivent
davantage dans un cheminement inductif. Dans les ouvrages anglo-saxons, on parle
de « Theory-driven research » (Recherche orientée par la théorie) pour l’approche
déductive et de « Theory-building research » (Recherche visant à construire une
théorie) pour les recherches inductives.
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leur forme originale alors que la recherche quantitative transforme les données, qui
sont très souvent de nature qualitative au départ, en nombres pour satisfaire aux
exigences des traitements qu’elle a l’habitude de mettre en œuvre. En fait, la
différenciation entre quantitatif et qualitatif relève souvent d’un choix au moment du
codage des données plutôt que de la nature intrinsèque des données.
Le contexte dans lequel se déroulera l’étude joue un rôle important dans les deux types
de recherche si ce n’est que la recherche quantitative va manipuler ces contextes pour
les standardiser au maximum (pour contrôler les variables parasites) alors que la
recherche qualitative s’efforcera de préserver et de comprendre ces contextes dans
leur variété originale. Il s’agit avant tout pour cette dernière forme de recherche de
collecter, d’analyser et de comprendre les données en fonction de leur contexte naturel
d’apparition.
Au vu des éléments que nous venons de mettre en avant, on perçoit aisément que la
complémentarité souvent recherchée entre approche qualitative et quantitative ne
tient pas uniquement au fait d’utiliser, dans le cadre d’une recherche, des données de
nature différente. Il s’agit véritablement d’articuler deux paradigmes d’investigation
dont les fondements sont épistémologiquement fort éloignés.
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But Créer des lois et des principes Comprendre les phénomènes
généralisables (approche (approche compréhensive)
nomothétique)
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On parlera de recherche expérimentale ou de recherche de laboratoire lorsque les
conditions résumées ci-avant seront totalement remplies. Lorsque ces conditions ne
seront que partiellement rencontrées on qualifiera ces recherches de quasi-
expérimentales ou de recherches de terrain.
Ces enquêtes peuvent aussi porter sur des études longitudinales où il s’agit d’étudier
l’évolution de certaines caractéristiques dans le temps en prenant des mesures
répétées sur les mêmes échantillons de sujets ou sur des échantillons équivalents.
Exemple : L’enquête PISA menée en 2006 dans une soixantaine de pays de l’OCDE
a touché plus d’un million d’élèves. Elle vise à évaluer le niveau de maîtrise des
élèves de 15 ans dans trois domaines spécifiques : lecture, mathématique et
sciences. Elle comportait aussi un questionnaire d’opinion qui a permis d’engranger
un grand nombre de résultats intéressants en ce qui concerne la motivation des
élèves à l’idée d’apprendre, leur perception d’eux-mêmes et leurs stratégies
d’apprentissage, et de déterminer dans quelle mesure les performances des élèves
varient selon le sexe et le niveau socio-économique.
Ces enquêtes peuvent être réalisées, comme dans l’enquête PISA, en s’appuyant sur
des expérimentateurs spécialement formés mais aussi par l’envoi postal de
questionnaires, par téléphone ou par Internet.
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expérimentale lorsqu’il s’agit de comprendre des phénomènes dans leur contexte
naturel.
Les recherches actions constituent des études systématiques qui associent action et
réflexion dans le but d’améliorer certaines pratiques ou de favoriser certaines
innovations. Elles combinent intervention en situation réelle et évaluation systématique
des résultats de cette intervention.
Exemple : Une recherche action menée auprès d’une centaine d’enseignants en vue
d’améliorer leur professionnalisme a permis de développer chez eux une attitude plus
réflexive dans l’interprétation des situations sociales qu’ils sont amenés à gérer en
classe. Pour agir sur leur comportement en classe, des réunions hebdomadaires ont
été organisées par le chercheur au cours desquelles les enseignants ont eu l’occasion
de discuter des situations conflictuelles qu’ils ont été amenés à gérer au sein de leur
classe.
Après une année de pratiques, des progrès significatifs ont pu être observés chez les
élèves sur la base d’un questionnaire d’opinion relatif à leur perception du climat de
la classe.
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Exemple 1: Depover & Strebelle (1997) ont validé, sur la base d’études de cas portant sur
sept écoles primaires dans lesquelles du matériel informatique avait été introduit, un modèle
de l’innovation pédagogique en matière d’intégration des TIC. Les cas ont été décrits, dans
un premier temps, sous la forme de matrices selon une méthodologie reprise à Huberman
pour ensuite, à partir de ces matrices, dégager un certain nombre de constantes puis de
chaînes relationnelles articulant les différentes variables du modèle.
Exemple 2 : Une étude a été réalisée sous l’égide de l’IEA (International Association for the
Evaluation of Educational Achievement). Le but de cette étude, qui a porté sur 175 cas à
travers 28 pays, est d’identifier les conditions d’une intégration réussie des technologies en
fonction d’un certain nombre de variables contextuelles telles que le domaine d’étude, le
niveau scolaire, l’approche pédagogique, la culture de l’école… (Kozma, 2003).
Les études de cas concernent généralement sur l’observation de plusieurs cas mais il
est possible, dans certaines circonstances, de faire porter l’étude sur un cas unique
que celui-ci soit un individu ou un groupe. Les études sur cas unique porte
généralement sur des périodes temporelles assez longues et impliquent l’analyse en
profondeur d’un grand nombre de données issues du sujet investigué. Les analyses
portent le plus souvent sur des séries temporelles qui permettent de mettre en
évidence l’évolution d’un comportement sur la base d’observations répétées.
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Outre ces critères à caractère technique, la qualité d’une recherche dépend aussi
d’autres critères et notamment de la pertinence du sujet. Le choix d’un sujet est
particulièrement délicat car il conditionnera dans une large mesure l’impact que la
recherche pourra avoir auprès du public concerné et donc la notoriété du chercheur.
Tout d’abord, il est important qu’une recherche pose une question ou émette une
hypothèse à laquelle il n’existe pas encore de réponse clairement tranchée. Pour arriver
à ce type de question ou d’hypothèse, il est indispensable de bien connaître la
littérature scientifique dans le domaine de manière à mettre clairement en évidence
comment les conclusions issues de la recherche permettront de faire progresser la
réflexion par rapport au champ de connaissances considéré. Il ne s’agit pas à ce niveau
de rechercher à tout prix l’originalité mais plutôt de s’informer de manière approfondie
sur les études déjà réalisées pour inscrire sa propre recherche dans la continuité de
celles-ci. Bien entendu, cela n’exclut pas la possibilité de proposer des voies nouvelles
ou des approches qui sortent de l’ordinaire, mais il faut aussi rester réaliste et savoir
que pour espérer proposer des avenues de recherches innovantes, il faut d’abord bien
connaître le domaine qu’on a choisi d’investiguer et que cela exige souvent de
nombreuses années d’expérience.
Une fois la ou les questions de recherche clairement posées, il s’agira d’identifier une
méthodologie de recherche appropriée. A ce niveau, il existe un certain nombre de
principes généraux sur lesquels la plupart des chercheurs pourront facilement
s’accorder et sur lesquels nous reviendrons plus avant dans ce texte. A côté de
considérations méthodologiques à caractère général, il est important de prendre en
compte les spécificités des différents types de recherches que nous avons distingués.
En effet, ces types de recherches reposent sur des conceptions parfois fort différentes
de la manière de réaliser une recherche de qualité. Ainsi, par exemple, dans une
recherche expérimentale on exigera que les hypothèses soient définies de manière
exhaustive avant d’entamer la collecte des données alors que dans une recherche
action on sera souvent beaucoup plus accommodant par rapport à ce principe et on
acceptera de s’engager dans la prise d’information à partir de quelques questions assez
générales quitte à les formaliser dans un second temps
Il est illusoire aujourd’hui de considérer qu’une recherche de qualité peut être réalisée
par un chercheur isolé dans sa tour d’ivoire. Certes, dans un premier temps, le
chercheur débutant sera généralement encadré par un directeur de recherche qui le
guidera et l’orientera mais rapidement le besoin de rencontrer d’autres chercheurs et
de partager ses préoccupations avec ses pairs se fera sentir. C’est en effet avant tout
à travers la confrontation avec la communauté professionnelle que le chercheur
néophyte développera les compétences qui lui permettront de produire une recherche
de qualité et qu’il pourra à terme espérer voir celle-ci reconnue par ses pairs.
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aujourd’hui en grand nombre de logiciels qui ont été conçus pour faciliter le travail du
chercheur à toutes les étapes de la réalisation d’une recherche.
4.2.1 La validité
La validité est un critère important pour apprécier la qualité d’une recherche car
lorsque ce critère n’est pas rencontré la recherche est sans valeur. La validité est donc
une exigence à la fois pour la recherche quantitative et qualitative.
Dans sa conception classique, la validité fait référence au fait qu’un instrument mesure
bien ce qu’il est censé évaluer. Par exemple, qu’un test d’intelligence verbale mesure
bien l’intelligence des sujets avec lesquels il est utilisé.
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proche possible de la situation réelle à laquelle s’appliqueront les conclusions
de la recherche.
4.2.2 La fidélité
Plutôt que le terme fidélité, certains auteurs utilisent le terme fiabilité ce qui correspond
à la traduction de « reliability » utilisé dans la littérature anglo-saxonne.
5. La démarche de recherche
L’aspect linéaire que prendra la succession d’étapes à laquelle nous nous référerons
pour décrire le parcours du chercheur ne doit pas nous faire croire que la réalité de la
recherche est aussi tranquille. Bien au contraire, le quotidien du chercheur est fait de
progrès souvent très lents, de retours en arrière fréquents et de remises en questions
permanentes. Plutôt que de s’inscrire dans une linéarité strictement planifiée, la
démarche s’apparente davantage à la marche des pénitents qui progressent de cinq
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pas vers l’avant puis de trois vers l’arrière pour repartir ensuite à nouveau vers le but
à atteindre. En recherche, comme dans toute activité qui a pour objet de créer du
savoir, il faut accepter de reconsidérer en permanence les résultats auxquels on a
abouti pour les relire selon de nouvelles perspectives ou pour les recadrer en les situant
dans un contexte plus riche.
Dans cette partie, nous nous proposons de traiter le processus qui conduit à
l’élaboration de la problématique d’une recherche et des hypothèses et/ou
questions de recherche qui y sont associées.
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C’est au cours de cette phase préparatoire que le chercheur s’efforcera de préciser les
objectifs qu’il poursuit, de réunir et de traiter la littérature scientifique en rapport avec
son sujet de recherche et, par une analyse critique de la littérature, de définir la
problématique dans laquelle s’inscriront les hypothèses et les questions qui lui
permettront de piloter sa recherche.
Cette phase de conception, même si elle garde le chercheur éloigné du terrain à partir
duquel il collectera les données nécessaires à son travail d’investigation, est néanmoins
importante car elle conditionnera la qualité et la pertinence des opérations qui seront
menées par la suite. Trop souvent des chercheurs, parce qu’ils sont pressés par le
temps ou pas suffisamment formés à la rigueur de la démarche scientifique, négligent
cette étape.
1. La revue de la littérature
Même si la plupart des auteurs s’accordent sur le fait que la revue de la littérature
constitue le point d’entrée d’une recherche menée de manière systématique, il est clair
qu’avant de se lancer dans celle-ci il faut déjà avoir une première idée, même assez
vague, de ce qu’on veut faire. Sans cela, on serait vite débordé par l’étendue des
ressources documentaires disponibles.
Bien entendu, on peut se lancer dans une recherche pour répondre à un problème qui
nous tient à cœur depuis longtemps, auquel nous avons été confronté à de
nombreuses reprises dans la vie de tous les jours mais c’est loin d’être le cas le plus
fréquent. Heureusement d’ailleurs car, dans ce type de situation souvent très
fortement investie affectivement, il est rare que le chercheur puisse garder l’objectivité
nécessaire à une recherche de qualité.
Il est très fréquent que l’idée de départ d’une recherche soit issue d’un échange avec
une personne disposant d’une expérience significative dans le domaine considéré. En
contexte académique, c’est souvent le superviseur ou le directeur de thèse qui joue ce
rôle mais d’autres personnes peuvent aussi intervenir pour orienter le choix du
chercheur (bibliothécaires, documentalistes, professionnels du domaine,
doctorants…).
Quel que soit le contexte dans lequel le thème d’une recherche a été défini, il est
important que celui-ci soit correctement dimensionné. Trop large, il conduirait le
chercheur à se voir rapidement dépassé par les ressources qu’il aura à consulter. Trop
étroit, il laissera le chercheur désemparé parce qu’il peine à trouver des travaux qui lui
permettront de documenter son sujet.
Pour construire sa recherche le chercheur doit s’appuyer sur les épaules de ceux qui
l’ont précédé, cela lui permettra non seulement de gagner beaucoup de temps mais
cela fondera aussi la légitimité de sa recherche. En effet, pour faire progresser les
connaissances dans un domaine, il est essentiel de bien connaître ce domaine de
manière à lier étroitement ses propres résultats avec ceux déjà acquis sur le sujet
étudié.
A l’heure actuelle, il n’est plus possible d’envisager une recherche qui s’élabore en vase
clos. La prise en compte de la littérature spécialisée doit aussi permettre de s’inscrire
dans une communauté de chercheurs, d’appréhender progressivement ses règles de
fonctionnement et ses pratiques. En effet, en sciences humaines et sociales, la valeur
des connaissances acquises n’est jamais indépendante du jugement des pairs, qu’ils
s’agissent de collègues ou de personnes exerçant un contrôle direct sur la recherche
réalisée. Pour se donner toutes les chances de choisir un sujet de recherche qui soit
pertinent, il ne faut pas hésiter à se soumettre au jugement des autres pour légitimer
son projet.
L’étendue de la revue de la littérature pourra être très variable selon la nature du sujet
investigué mais aussi en fonction de l’expérience du chercheur dans le domaine. Ainsi,
un chercheur déjà très averti par rapport au domaine pourra très rapidement cerner
les éléments les plus pertinents à prendre en considération pour les besoins de sa
recherche alors que le néophyte aura à réaliser un tour d’horizon beaucoup plus large
avant d’en arriver à se focaliser sur la littérature en lien direct avec son sujet.
L’encadré 2.1 reprend en synthèse les principales raisons qui sont les plus souvent
avancées pour justifier la nécessité de réaliser une étude de la littérature avant
d’entreprendre une recherche.
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o Cela permet d’avoir des idées sur les orientations à donner à sa recherche
o Cela permet d’éviter de recommencer des recherches qui ont déjà été menées
o Cela donne des idées par rapport aux méthodes d’investigations qui sont généralement
mises en œuvre dans le domaine étudié
o Cela prépare la discussion au cours de laquelle les résultats de la recherche seront mis
en perspectives par rapport aux recherches antérieures
Encadré 2.1 : Les raisons qui justifient la nécessité de réaliser une étude de la
littérature
Les raisons évoquées dans l’encadré 2.1 montrent clairement le caractère déterminant
de la revue de la littérature par rapport à la qualité et à la pertinence de la recherche
qui sera réalisée par la suite.
Tout d’abord, la revue de la littérature va donner lieu à une mise en perspective des
travaux antérieurs qui aboutira à ce que nous appellerons la problématique de la
recherche. Cette dernière constituera le véritable point de départ de la recherche
puisque c’est à partir de celle-ci que s’élaboreront les hypothèses et les questions
de recherche.
Enfin, la revue de la littérature sera également fort précieuse lors des phases ultimes
de la recherche que constituent la discussion et la conclusion. En effet, il s’agira à ce
moment pour le chercheur de placer ses propres résultats dans la perspective des
recherches antérieures pour montrer comment ceux-ci pourraient permettre de faire
avancer les idées par rapport au sujet considéré.
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1.3 Comment réaliser une revue de la littérature ?
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A côté de ces moteurs de recherche qui explorent de manière systématique le net, il
existe des bases de données spécialisées qui mettent à la disposition des chercheurs
un grand nombre de références bibliographiques mais souvent aussi des documents
complets (Full text data base). La plus utilisée en éducation est certainement la base
ERIC gérée par l’Educational Resources Information
Center (http://www.eric.ed.gov/) qui donne accès à un très grand nombre de
documents en texte complet remontant jusqu’en 1966. D’autres bases de données à
plein texte existent dans le domaine de l’éducation :
o Firstsearch (http://firstsearch.oclc.org/fsip?dbname=ArticleFirst);
o Wilson OmniFile Full Text ( http://www.hwwilson.com/Databases/omnifile.htm);
o HighBeam Research (http://www.highbeam.com/).
Types de ressources sur lesquelles on peut s’appuyer pour réaliser une revue de la
littérature :
o Certains documents non publiés comme les thèses de doctorat, les publications internes
ou les preprints qui circulent sur internet.
Encadré 2.2 : Types de ressources utilisées pour réaliser une revue de la littérature
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développera sa propre position. A travers l’analyse et la critique de la littérature
spécialisée, il développera et justifiera un point de vue personnel. Il placera le projet
de recherche dans son contexte en montrant les apports possibles de celui-ci à
l’évolution des connaissances dans le domaine. La revue de la littérature devra
également orienter la suite de la recherche et en particulier le choix
des hypothèses ou des questions de recherche.
L’étendue à donner à l’étude de la littérature pourra être très variable selon la nature
du sujet à traiter mais aussi selon l’approche méthodologique mise en œuvre. Une
étude quantitative exige généralement une revue de la littérature exhaustive de
manière à fonder la validité des hypothèses ou des questions de recherche qui
seront proposées. Par contre, elle concernera généralement un domaine déjà bien
étudié et relativement aisé à circonscrire. Dans le cas d’une approche qualitative, les
choses seront différentes puisque le domaine sera généralement moins structuré au
départ et il s’agira, au sein de celui-ci, d’explorer des pistes nouvelles pour dégager
des thématiques de recherche encore peu exploitées.
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Ces divergences peuvent porter sur des désaccords relatifs au modèle théorique de
référence. Par exemple, un auteur interprétera les résultats d’une recherche sur la
motivation au travail en fonction de la théorie de la hiérarchie des besoins de Maslow
alors qu’un autre s’appuiera sur la théorie de deux facteurs d’Herzberg. Pour régler ce
conflit d’interprétation, l’auteur pourra proposer soit de se référer à un autre modèle
interprétatif soit d’élaborer un modèle original en mettant au point une expérience ou
une série d’expériences pour valider ce modèle.
Les divergences peuvent également porter sur les méthodes d’investigation mises en
œuvre. On pourra critiquer les outils statistiques utilisés ou encore les techniques
d’enquêtes utilisées en considérant que les questionnaires ont été mal conçus parce
qu’ils favorisent trop la désirabilité sociale (voir partie III, point 3.1.3) ou que les
intervieweurs ont été mal préparés.
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apparaissent comme le prolongement naturel de la revue de la littérature. Ce qui est
réellement nouveau au niveau de la problématique, c’est que le chercheur annonce ce
qu’il se propose de réaliser et préfigure ainsi les hypothèses et les questions de
recherche qui seront formulées par la suite.
Variable : Une variable est une caractéristique qui peut changer. Une variable peut
donc prendre plusieurs valeurs (variable quantitative) ou plusieurs aspects (variable
qualitative).
Variable quantitative: Une variable quantitative est une variable qui peut prendre
diverses valeurs. Par exemple, les résultats à un test de français est une variable
quantitative. Parmi les variables quantitatives, on peut en distinguer de trois types :
les variables ordinales, les variables à intervalles et les variables métriques.
Variable ordinale : C’est une variable quantitative dont les valeurs peuvent être
hiérarchisées mais sans que l’écart qui sépare deux valeurs consécutives soit égal tout
au long de l’échelle. Les réponses à un questionnaire de Likert comportant 5 catégories
(totalement en désaccord, plutôt en désaccord, neutre, plutôt en accord, totalement
en accord) peuvent être considérées comme une variable ordinale.
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Variable à intervalles : Comme dans une variable ordinale les valeurs peuvent être
hiérarchisées mais de plus les écarts entre deux valeurs consécutives sont égaux.
L’échelle des QI peut être considérée comme une variable à intervalles en ce sens
qu’un intervalle de 10 points est comparable à tous les niveaux de l’échelle.
Variable métrique (scale) : En plus des caractéristiques des deux types de variables
précédents, une variable métrique se caractérise par le fait que l’origine de l’échelle
c’est-à-dire le zéro est non arbitraire. Ainsi, si on comptabilise le nombre de fautes à
une dictée, le zéro signifie que l’élève n’a commis aucune faute. Ce type de variable
permet aussi d’établir des rapports de proportion entre différentes valeurs ce qui n’est
pas le cas des variables à intervalle : entre 5 et 10 fautes à la dictée, il y a le même
rapport qu’entre 15 et 20 fautes.
Variable qualitative : une variable qualitative peut prendre divers aspects. Par
exemple, la variable sexe prendra deux aspects : féminin ou masculin. On parle aussi
de variable nominale à ce propos.
Hypothèse : est une prédiction que le chercheur fait à propos de la relation qui est
attendue entre des variables (exemple : la présence de feedbacks discriminatifs dans
un cours sur ordinateur augmente les performances des élèves mesurées par un test
proposé à l’issue de l’apprentissage).
Question : c’est une interrogation à propos de la relation qui peut exister entre des
variables (exemple : La présence de feedbacks discriminatifs influence-t-elle les
performances des élèves ?).
Une hypothèse doit proposer une explication raisonnable au modèle étudié basée sur
une étude détaillée de la littérature. Par exemple, il parait raisonnable d’attribuer dans
le cadre d’une hypothèse le faible intérêt pour l’usage de l’ordinateur dans certaines
écoles au manque de formation des enseignants alors que ce serait beaucoup moins
raisonnable de l’attribuer au manque de motivation des élèves.
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Une hypothèse doit établir le plus clairement possible la relation qui est attendue entre
plusieurs variables et définir ces variables de manière opérationnelle. Par exemple, une
hypothèse portant sur l’effet d’un tutorat proactif versus réactif dans un enseignement
à distance précisera le sens de la relation (proactif supérieur à réactif) ainsi que la
variable dépendante (indice de satisfaction mesuré par un questionnaire d’opinion) qui
permettra d’évaluer l’effet du traitement auquel sera soumis chacun des deux groupes
d’élèves : « Les élèves bénéficiant d’un tutorat proactif seront caractérisés par un
indice de satisfaction vis-à-vis du cours plus élevé que les élèves bénéficiant d’un
tutorat réactif ».
Une hypothèse doit pouvoir être testée c’est-à-dire qu’on doit pouvoir vérifier sa
véracité en mettant en place un plan d’expérience adéquat, en sélectionnant des sujets
d’observation, en récoltant des données, en mobilisant des outils statistiques
adéquats…. Les efforts et les moyens nécessaires à la vérification d’une hypothèse
doivent aussi être évalués de manière réaliste. Rien ne sert de formuler une hypothèse
qui exigerait de se déplacer dans toute l’Europe alors qu’on sait qu’on n’en aura pas
les moyens ou encore une hypothèse qui porte sur l’évolution d’une population sur les
dix prochaines années alors que les résultats sont attendus endéans les six mois.
Formuler une hypothèse consiste à exprimer une relation entre plusieurs variables,
généralement une ou plusieurs variables indépendantes et une ou plusieurs variables
dépendantes.
La forme la plus courante pour une hypothèse directionnelle est la suivante : Les sujets
S1 soumis au traitement X1 performent mieux à la variable D que les sujets S2 soumis
au traitement X2.
Par exemple, les élèves de 5e année primaire (S1) ayant bénéficié d’un cours
multimédia d’éducation sexuelle et affective (X1) réussissent mieux à un posttest
spécifique (D) que les élèves (S2) ayant suivi un cours classique (X2) avec leur
instituteur.
Cette formulation d’une hypothèse peut présenter des variantes notamment au niveau
du traitement où, au lieu de deux traitements différents, on peut en trouver trois ou
quatre. Dans notre exemple, les élèves peuvent bénéficier d’un cours classique, d’un
cours multimédia mais aussi d’un cours multimédia avec intervention d’un tuteur à
distance. Il s’agira cette fois dans la formulation de l’hypothèse de hiérarchiser les
effets attendus des trois traitements en précisant, par exemple, que le cours
multimédia avec tuteur à distance sera plus efficace que le cours multimédia sans
tuteur et que ce dernier sera plus efficace qu’un cours classique.
Une autre manière de formuler une hypothèse consiste à établir qu’il n’y a pas de
relation significative ou de différence entre des variables (hypothèse nulle). Par
exemple, le niveau de réussite des élèves de 5e année primaire ayant bénéficié d’un
cours multimédia n’est pas significativement différent de celui des élèves ayant
bénéficié d’un cours classique.
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Les études qui ont recours à des hypothèses exprimées sous la forme d’une hypothèse
nulle sont relativement rares. En effet, le plus souvent le chercheur sera plutôt
préoccupé par la mise en évidence d’une différence pour confirmer ou invalider un
modèle ; toutefois, la vérification d’une hypothèse nulle alors qu’une différence a été
observée dans d’autres recherches peut aussi conduire à remettre en cause un modèle
existant.
Certains ouvrages parlent aussi d’hypothèse non directionnelle pour désigner une
hypothèse où le sens de la relation ne serait pas spécifié. Personnellement, nous
préférons ne pas formuler d’hypothèse pour exprimer une relation ou une différence
dont le sens n’est pas défini mais plutôt faire appel à une question de recherche.
Alors que les hypothèses de recherche sont souvent réservées aux recherches
quantitatives et, plus précisément, aux recherches expérimentales, les questions de
recherche peuvent se retrouver dans tous les types d’étude.
Ainsi, il est parfois utile dans une étude expérimentale de recourir à des questions
de recherche lorsque les résultats fournis dans la littérature ne sont pas suffisamment
précis pour établir le sens de la relation qu’on peut attendre entre deux variables. Le
plus souvent, dans une approche déductive, les questions de recherche seront
formulées pour compléter, élargir ou préciser les hypothèses de recherche.
Même si les questions spécifiques doivent être plus précises que la question principale,
il convient d’être attentif qu’elles restent suffisamment ouvertes pour prendre en
compte l’ensemble des éléments que la recherche permettra de révéler. Contrairement
aux hypothèses de recherche, il ne s’agit pas ici de spécifier ce à quoi on s’attend mais
de conserver un regard le plus ouvert possible pour ne pas courir le risque de passer
à côté d’une donnée non prévue mais présentant néanmoins un grand intérêt pour la
recherche qu’on a choisi de mener.
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Question de recherche principale
De quelle manière les processus de co-élaboration à distance sont-ils influencés par
une intervention tutorale en présentiel axée sur l’exploitation des traces des activités
et des interactions épistémiques entre apprenants ? Dans quelle mesure les
performances sont-elles améliorées après le débriefing ?
Contrairement à ce qui se passe dans une recherche quantitative, on peut très bien
accepter, dans une recherche qualitative, que les questions soient modifiées durant
l’étude dans le cadre d’une démarche exploratoire où de nouvelles idées et de
nouvelles questions émergent tout au long du processus de recherche. Dans certains
cas, les questions spécifiques peuvent même être considérées comme en révision
permanente pour s’adapter à l’avancement de la réflexion du chercheur au fur et à
mesure qu’il collecte et analyse les données.
Comme nous l’avons vu dans la première partie, le chercheur qui se prépare à réaliser
une recherche empirique dispose de deux grandes approches de recherche
concurrentes mais aussi complémentaires : l’approche quantitative ou déductive et
l’approche qualitative ou inductive. Jusqu’à présent, pour traiter de la conception d’une
recherche, nous avons envisagé conjointement ces deux approches en évoquant les
spécificités de chacune mais en soulignant aussi les aspects qui les rapprochent.
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Au moment de l’élaboration des hypothèses et des questions de recherche les choses
sont différentes puisque, comme nous l’avons vu, le choix d’une approche quantitative
exigera plus de précisions au niveau de la formulation des hypothèses et surtout
d’anticipation par rapport à ce qui est attendu.
A ce niveau, le chercheur peut aussi opter pour une approche mixte dans le cadre de
laquelle il combinera les approches qualitative et quantitative.
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