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A-5 Le GN et ses expansions

Ce chapitre vous propose une synthèse sur les expansions du nom. Après quelques généralités sur le
groupe nominal et ses expansions, nous examinerons tour à tour les trois formes d’expansion du nom :
les épithètes, les groupes prépositionnels compléments du nom, les propositions subordonnées
(essentiellement relatives). Le dernier point sera consacré à la question complexe et discutée de
l’apposition et des constructions détachées.

1. Le groupe nominal
Un groupe de mots est une unité syntaxique non autonome à laquelle on attribue une classe et une
fonction. Il est organisé autour d'un noyau qui peut être accompagné d'une ou de plusieurs
expansions.
J’adore / manger des fraises /.
Groupe infinitif, COD du verbe adore. Le noyau du groupe est : manger

/Le bateau de mon grand père/ est un voilier


Groupe nominal, sujet du verbe est

Un groupe nominal (abréviation GN), est formé d'un nom noyau qui peut être accompagné d'une ou
de plusieurs expansions. Dans un groupe nominal, le noyau toujours un nom (propre ou commun).
Constance / mange / sa soupe.
GN GN

2. Les expansions du nom : de quoi s’agit-il ?

a. Les groupes de mots qui permettent d’enrichir un nom en apportant des précisions à ce nom sont
appelés les expansions du nom.
Elles sont généralement facultatives d’un point de vue grammatical mais on peut constater qu’ils
apportent des informations essentielles, notamment pour la description et pour préciser la référence
(= ce dont on parle).

L’expansion du nom désigne une classe syntaxique, qui peut regrouper plusieurs catégories :
les épithètes (notamment les adjectifs épithètes) ; les compléments du nom ; les propositions
subordonnées relatives (et parfois complétives).

b. Manipulations syntaxiques :
Les expansions peuvent théoriquement être définies par effacement et substitution (notamment les
unes aux autres). Mais comme elles sont souvent nécessaires pour le sens, il est parfois difficile
d’utiliser l’effacement pour les identifier.
Les différentes expansions sont cumulables :
La petite fille
La petite fille de la maison d’à côté
La petite fille de la maison d’à côté qui adore le chocolat
c. Expansions déterminatives et explicatives
On présente parfois les expansions du nom comme facultatives. Mais certaines sont indispensables, et
leur effacement provoque une phrase agrammaticale :
Ex : Le voyageur franchit les derniers mètres avec l’enthousiasme d’un bestiau qu’on mène à l’abattoir.
Les expansions qui sont indispensables pour identifier le nom ou le GN sont appelées déterminatives
(certaines grammaires les nomment aussi identifiantes).
On ne peut pas les effacer : si on les supprime, on perd la référence effective.
Ex : la carte grise ; la maison de ma grand-tante ; la ville de Londres ; les piétons qui ne respectent pas
les feux sont imprudents.

Les expansions qui ne modifient pas l’interprétation du sens du GN et qui se contentent d’apporter
une information complémentaire sont des expansions explicatives (certaines grammaires les
nomment caractérisantes). On peut les effacer : leur effacement ne rend pas la phrase agrammaticale
et n’empêche pas l’identification du référent.
La leçon, qui avait l’air simple, se complique déjà.

3. Les différentes expansions du nom

a. Les épithètes

Quand l’expansion ne peut être séparée du nom ni par un complément du nom, ni par une proposition
subordonnée relative, on parle d’une « épithète ».
La plupart des épithètes sont des adjectifs. Mais des participes (présents ou passés) peuvent aussi être
employés comme épithètes, ainsi que des noms sans déterminants (on parle alors d’un « emploi
adjectival »).
- Les participes présents employés comme épithètes avec leur valeur verbale sont invariables et
toujours postposés : les étudiants aimant la grammaire sont rares.
- Les adjectifs verbaux, qui s’emploient aussi comme attributs, sont variables : C’est une petite fille
aimante, très affectueuse. Je trouve cette leçon très amusante.

• La place de l’adjectif épithète


En français, la place des adjectifs n’est pas toujours fixe. Statistiquement parlant, un adjectif sur trois
est antéposé au nom en français parlé, mais seulement un sur deux dans les textes littéraires (cf.
Riegel, Pellat et Rioul, Grammaire méthodique du français, PUF, 2002, p. 181).
Certains adjectifs sont toujours postposés (par exemple les participes passés ou les adjectifs suivis d’un
complément ou précédés d’un adverbe long, autre que si, très, bien… (une place noire de monde ; un
café exceptionnellement fort), d’autres toujours antéposés (les ordinaux, beaucoup d’adjectifs
descriptifs d’une ou deux syllabes très fréquents comme beau, grand, joli, … mais certains ont une
place variable (qui peut modifier leur sens : un brave homme / un homme brave ou non : un travail
remarquable / un remarquable travail).

• Attention : des fonctions à ne pas confondre


ð adjectif épithète et adjectif attribut
adjectif épithète adjectif attribut
Remplissez ce formulaire pour recevoir une facture La facture n’est pas assez détaillée.
détaillée. Marie devint blanche de peur, puis rouge de
Une étoffe à rayures blanches, rouges, jaunes et noires. colère.
Un enfant malade ne doit pas venir à l’école. L’enfant tomba malade.

ð adjectif épithète et attribut du COD

adjectif épithète ( Il fait partie du GN) adjectif attribut du COD


Tom entra dans le bâtiment abandonné à Tom y entra. Lara trouva le bâtiment abandonné à Elle le
Un enfant malade ne doit pas venir à l’école. à Il ne trouva abandonné.
doit pas venir à l’école. Sa mère crut l’enfant malade à Elle le crut
malade.
La pronominalisation du COD permet de repérer
l’attribue de l’objet.

Les adjectifs (ou les groupes adjectivaux) épithètes sont des expansions du nom.
Pour la question de l’apposition, voir point d.

b. Le complément du nom

ð Généralités
Les compléments du nom sont généralement postposés : l’antéposition, très courante par exemple
dans le théâtre classique (ex. De l’amour j’ai toutes les fureurs, Racine, Phèdre), est très littéraire.
Ils sont souvent introduits par les prépositions de, à ou en, mais pas seulement. Selon la préposition,
ils peuvent indiquer différentes nuances (temps, lieu, but, cause, manière, qualité, possession,
accompagnement, etc.).

ð Ne pas confondre…
• Le complément du nom et les autres compléments introduits par des prépositions, notamment le
complément d’objet indirect et le complément d’objet second du verbe :
C’est le cadeau de ses amis. [complément du nom ; non déplaçable]
Ce cadeau d’anniversaire lui vient de ses amis. [complément du nom ; non déplaçable]
Elle profite de son cadeau [complément d’objet indirect] ( pronominalisation : elle en profite)
Elle a reçu un cadeau de ses amis pour son anniversaire. [complément d’objet second ; déplaçable : de
ses amis, elle a reçu un cadeau d’anniversaire]
• Le complément du nom et les locutions prépositionnelles
Le bateau a jeté l’ancre au large de Camaret = Le bateau a jeté l’ancre à Camaret [au large de = locution
prépositionnelle]

c. Les propositions subordonnées compléments d’un nom


L’expansion du nom peut aussi être une subordonnée relative (le cas le plus fréquent) ou complétive
(emplois rares, mais à savoir identifier).
• Les propositions subordonnées relatives
Le nom peut être suivi d’une proposition subordonnée relative, qui est alors complément du nom.
Traditionnellement, on dit que le nom que reprend le pronom est son antécédent.
Le pronom relatif a un double rôle :
- il introduit la proposition subordonnée
- il a une fonction syntaxique dans sa proposition.
Ex. : La leçon que je vous propose est assez longue [que = COD du verbe propose]
La connexion qui accompagnera cette leçon devra éclaircir tous les points demeurés obscurs [qui = sujet
du verbe accompagnera].

• Exemples d’analyse :
Le petit chaperon rouge partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre
village.
« qui demeurait dans un autre village »: proposition subordonnée relative, complément du nom
« mère-grand » (qui est l’antécédent du pronom « qui »).
« qui » : pronom relatif, a pour antécédent « sa mère grand », sujet du verbe « demeurait ».

C'est par delà le moulin que vous voyez tout là-bas, là-bas, à la première maison du village."
« que vous voyez tout là-bas, là-bas, à la première maison du village » : proposition subordonnée
relative, complément du nom « moulin » qui est l’antécédent du pronom « que».
« que » : pronom relatif, a pour antécédent « le moulin », COD du verbe « voyez »

Attention en particulier à la construction et à la fonction du pronom dont. Il remplace toujours un


groupe nominal prépositionnel introduit par la préposition de, qui peut avoir différentes fonctions :
Par exemple :
Je ne connais pas le film dont tu parles.
-Tu parles d’un film = COI
- Je ne connais pas ce film
è dont : pronom relatif, COI du verbe « parles »
dont tu parles : PSR proposition subordonnée relative, complément du nom « film ».

La voiture dont il est si fier est une affreuse voiture grise


- Il est fier de sa voiture = Compl. de l’adjectif
- Cette voiture est une affreuse voiture grise.
è dont : pr. relatif, compl. de l’adjectif « fier »
dont il est si fier : PSR, compl. du nom « voiture »

La voiture dont les pneus sont crevés est celle qui était garée devant le commissariat de police !
- Les pneus de la voiture sont crevés : compl. du nom
- Cette voiture était garée devant le commissariat de police !
è dont : pr. relatif, compl. du nom « pneus »
dont les pneus sont crevés : PSR, compl. du nom « voiture »

• Les subordonnées complétives


Certains noms abstraits peuvent être expansés par une proposition subordonnée complétive, qui
développe et spécifie leur contenu : La conviction qu’elle avait raison lui donna des forces.
Remarques :
- La plupart de ces noms correspondent à des verbes et/ou à des adjectifs construits avec une
complétive (Elle était convaincue qu’elle avait raison).
- À cette catégorie de mots, il faut ajouter quelques noms abstraits comme idée, hypothèse, fait. (L’idée
que la grammaire puisse être une chose amusante lui échappe un peu).

d. L’apposition et les constructions détachées

• La question des appositions ne fait pas l’unanimité dans les grammaires : pour certaines,
l’apposition est une expansion du nom, pour d’autres non.
Ci-dessous , un résumé des travaux qui conduisent à ne plus considérer l’apposition comme une
expansion du nom (notamment à la suite des travaux de Bernard Combettes, Les constructions
détachées en français, Ophrys, 1998).
Cela dit, pour le master et pour le concours, on accepte généralement une extension – même abusive !
– de la notion d’expansion du nom à l’apposition.

• Apposition et épithète
Dans la tradition scolaire, l’apposition est généralement considérée comme une expansion du nom,
aux côtés de l’épithète, du complément du nom et de la subordonnée relative. C’est par l’apposition
qu’on explique la différence de sens entre deux énoncés comme :
1) Les exercices de grammaire trop compliqués devraient être interdits.
2) Les exercices de grammaire, trop compliqués, devraient être interdits.
Le premier énoncé signifie que seuls les exercices compliqués devraient être interdits ; le second
demande l’interdiction de tous les exercices… Dans le premier cas, la grammaire scolaire parle
d’épithète et dans le second cas d’apposition, mais range les deux dans la catégorie des expansions du
nom.
Pourtant, les manipulations syntaxiques montrent que les deux ne fonctionnent pas de la même
manière :
- l’apposition a une certaine mobilité (Trop compliqués, les exercices de grammaire devraient être
interdits), pas l’épithète.
- La commutation fait apparaitre des paradigmes différents pour l’apposition et l’épithète.
(on peut écrire par exemple : Les exercices de grammaire, de vrais instruments de torture, devraient
être interdits mais non *Les exercices de grammaire de vrais instruments de torture devraient être
interdits)
- La substitution montre que l’apposition ne fait pas partie du groupe nominal :
Les exercices de grammaire trop compliqués devraient être interdits à ils devraient être interdits ;
Trop compliqués, les exercices de grammaire devraient être interdits à Trop compliqués, ils devraient
être interdits.
C’est pourquoi les travaux actuels des grammairiens distinguent apposition et expansion du nom, et
incluent l’apposition dans les constructions détachées (cf. point c. ci-dessous).

• Les constructions détachées


On peut donc distinguer le complément du nom et les constructions détachées, dont fait partie
l’apposition.
On peut répartir les constructions détachées en deux groupes selon que leur rattachement au GN se
fait sur le schéma des constructions du verbe être ou du verbe avoir.
- Sur le schéma du verbe être, les constructions détachées attributives (l’apposition)
Ex. : Il continua de jouer du violon, son seul vrai plaisir ; Paris, la capitale de la France.
(le violon est son vrai plaisir ; Paris est la capitale de la France)
Les constructions détachées suivent toujours leur GN, sauf dans le cas de constructions sans
déterminant et précédant le GN sujet (ex. : Consul, Napoléon élabora le Code Civil).
Elles ont des fonctions diverses : explicatives, circonstancielles, opposition (Chateaubriand,
ambassadeur, retrouve à Londres le souvenir du jeune émigré pauvre qu’il a été).
- Sur le schéma du verbe avoir, les constructions absolues détachées
Ex. Pierre se promène les mains dans les poches. ( Pierre a ses mains dans les poches)
Elles peuvent d’ailleurs se combiner avec d’autres expansions :
Ex. : Blême, les cheveux noirs et marquée de petite vérole, elle s’appuyait sur le bras du militaire
(Flaubert). [blême est apposé]

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