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La phrase emphatique

Définition
L’emphase désigne les procédés
d’insistance et de mise en relief.
C’est un terme, issu de la rhétorique;
Il vient du mot anglais «emphasis», =
« accentuation, insistance ».
La mise en relief (emphase) est le fait
d’attirer particulièrement l’attention sur
un des éléments de la phrase.
Les procédés de l’emphase
Le français dispose de 3 procédés :
 L’accent d’insistance : procédé employé
à l’oral
L’accent est placé par le locuteur sur le
terme à mettre en valeur.
Ce terme peut être : un sujet, un verbe, un
nom-tête du complément d’objet ou un
complément de nom.
Pierre connaît la sœur de Julie.
A l’écrit, ce procédé peut être reproduit
par le choix des caractères (italique, gras,
etc.)
 Ladislocation de la phrase (détachement
d’un constituant)
détachement d’un constituant hors du
cadre de la phrase :
Détaché à gauche de la phrase = on parle
d’un détachement en prolepse
Détaché à droite de la phrase = on parle
d’un détachement en rappel
L’élément détaché reçoit un accent
d’insistance
Il se trouve séparé du reste de la phrase
par une pause, qui est marquée à l’écrit
par la virgule.
Il est repris ou annoncé par un pronom
personnel ou démonstratif.
Cette découverte, elle allait révolutionner la
physique moderne.(Détachement en prolepse)
Elle allait révolutionner la physique moderne,
cette découverte. (Détachement en rappel)
Ces photos, je les ai prises à Paris
Je les ai prises à Paris, ces photos.
1. Détachement d’un groupe
nominal défini

Lorsque l’élément détaché est un GN, la


reprise s’effectue à l’aide d’un pronom
personnel qui peut exercer toutes les
fonctions primaires.
Fonction sujet

Nos voisins, ils ont déménagé.


Il a tué le canari, ce chat.
Ils sont magnifiques, ces tableaux.
Fonction complément du verbe
Cette salade, je la trouve bonne.
Tu l’auras, ton diplôme.
Des informations, on en trouve partout.
Tes conseils, je m’en souviendrai.
Je n’y crois pas, aux histoire des
extraterrestres.
Détachement affectant plusieurs
éléments

 Le détachement peut affecter plusieurs


éléments en même temps, notamment le
sujet et l’objet.
La sœur de Marie, Pierre, il la connaît.
Lui, ses paroles, ses mensonges, je les ai
oubliés.
A l’oral, un constituant peut être détaché sans
être repris par un pronom.
Le mensonge, je déteste.
Le voyage, j’adore.
Détachement d’un complément
circonstanciel (complément de phrase)
Un groupe complément circonstanciel, en
raison de sa mobilité, n’a pas besoin
d’être associé à un pronom pour être
détaché.
Seul le complément circonstanciel de lieu
peut être repris à l’aide du pronom « y ».
En quelques années seulement, tu as pu
réussir.
Sur la commode, tu (y) trouveras les clés
de la voiture.
Dans les îles Canaries, on (y) trouve l’un
des plus grands volcans au monde.
Détachement de l’adjectif attribut

L’adjectif attribut peut être repris dans les


mêmes conditions que le GN.
Le pronom de reprise est toujours « le »
invariable.
Le renforcement peut s’effectuer à l’aide de
« pour » suivi de « être ».
Courageux, je le suis.
Utiles, ils le sont.
Pour être folle, elle l’est.
Utilisation des pronoms démonstratifs
En plus des pronoms personnels, les
pronoms démonstratifs « cela/ça/ce » sont
également utilisés pour rappeler ou
annoncer un G.N.
Le pronom neutre « ce » s’emploie
uniquement comme sujet de « être ».
Les vacances, c’est ennuyeux.
Les vacances, cela/ça me semble
ennuyeux.
On préfère également « ce » avec un GN
indéfini.

Un chat, c’est doux et affectueux.


Pronom personnel ou pronom
démonstratif ?

Le pronom personnel individualise le


référent et donne à l’énoncé un sens
spécifique.
Le chien, il a encore mordu le facteur.
Le démonstratif donne à l’énoncé une
valeur générique.

Le/un chien, c’est un animal fidèle.


2. Détachement des groupes infinitifs
(GI)et des complétives (fonction sujet)
Le détachement des groupes infinitifs et
des complétives s’effectue dans les
mêmes conditions que le GN.
Lorsque les GI ou les complétives sont
détachés, ils sont associés aux pronoms
personnels ou démonstratifs dont la
répartition dépend de la fonction
syntaxique du groupe de mots mis en
relief.
Voyager en train, cela (ça) me fatigue.
Voyager en train, c’est fatigant.

Que tu sois arrivé à l’heure, cela me


remplit de joie / c’est encourageant.
Cela devant être (insister sur le sujet):

 Voyager en train, cela est fatigant.

 Emploi obligatoire de « ce » lorsque


« c’est » est suivi d’un infinitif :
Partir, c’est mourir un peu.
Pour les groupes infinitifs et les
complétives ayant la fonction « sujet »,
seuls les pronoms démonstratifs sont
possibles.
2. Détachement des groupes infinitifs
(GI)et des complétives
(les autres fonctions)
On utilise les formes invariables des
pronoms « le », « y » et les démonstratifs
« cela » et « ça » pour détacher les GI ou
les complétives ayant d’autres fonctions à
part celle de sujet.
Le choix du pronom est déterminé par sa
valeur propre :
 Le pronom cela (ça) est plus générique et
plus marqué que le pronom personnel.
Formules de détachement

Le détachement peut également se réaliser à


l’aide de quelques formules :
 Pour moi, la nature me fascine.
Quant à Flaubert, c’est mon écrivain
favoris.
En ce qui concerne ta voiture, je ne sais
pas où elle est.
Pour ce qui est intéressant, je l’ai noté.
III. L’extraction d’un constituant

Quel est l’élément sur lequel porte


l’emphase?

C’est le mot ou le groupe de mots encadré


par le présentatif « c’est » et le pronom
relatif (qui; que)
C’est le père qui a construit cette maison.
C’est la maison que le père a construite?
NB. Une phrase impérative ne peut pas
subir une transformation emphatique avec
extraction;
Impossible de mettre cette phrase à la
forme emphatique parce qu’elle est
impérative :
Construis cette maison!
L’extraction se réalise par l’association
d’une locution identifiante et d’une
relative pour extraire un élément de la
phrase.
Le résultat de cette opération est une
phrase clivée.
Un constituant est placé au début de la
phrase clivée, encadré par c’est et le
pronom relatif qui, que…
Sémantiquement, l’information apportée
par la phrase se dissocie en posé et
présupposé :
La séquence qui suit le relatif est
présupposée : elle n’est pas affectée par la
négation ni par la question.
Ce n’est pas claire qui aime le chocolat.
L’élément extrait est posé : c’est la seule
information nouvelle apportée par la phrase
clivée.
Il s’oppose à un autre élément spécifique,
qu’il exclut et que l’on peut expliciter:
C’est claire qui aime le chocolat, et non pas
Régine.
L’élément extrait est appelé focus ou foyer
=> l’extraction est une opération de
focalisation.
L’extraction peut affecter des constituants
divers, qui exercent différentes fonctions
dans la phrase.
Fonction sujet : (utilisation du présentatif
c’est et du relatif qui)
C’est…qui introduit une explication par
rapport à un autre fait.
Quel est ce bruit ? C’est ma sœur qui se lève.
Dans d’autres circonstances, « c’est…
qui » concerne un fait d’expérience,
éventuellement très général.
C’est toujours ma sœur qui se lève la
première.
Chez certains animaux, c’est le mâle qui
s’occupe des petits.
 Un GN sujet :
- Un nom propre : C’est claire qui aime le
chocolat.
- un nom commun : C’est le soliste qui a
fait une fausse note.
- Un pronom : c’est moi qui ai commandé
ce livre.
 Un infinitif sujet :
- C’est travailler qui est agréable.
Fonction objet : utilisation du présentatif
c’est et du relatif que
« C’est que » met en évidence une
phrase :
Pour indiquer qu’on prend une menace au
sérieux : C’est qu’il le ferait.
Pour introduire une explication, une cause
Je n’ai pas assisté à la réunion, c’est que
je n’étais pas au courant.
« Ce n’est pas que » introduit une
explication, une cause rejetées.
Ce n’est pas que je préfère le lait, je peux
prendre une autre boisson.
C’est le livre de Balzac que j’ai
commandé.
C’est lui que j’ai rencontré.
C’est à vous que ce discours s’adresse.
 Fonction complément circonstanciel
(complément de phrase) : utilisation du
présentatif c’est et du relatif que :
- Un GN ou GP complément circonstanciel:
C’est au Louvre que l’on peut admirer la
Joconde.
C’est sur ce chemin, c’est à cette heure que je
prenais conscience de mon prix (Colette).
- Un adverbe CC : C’est demain que le
concours aura lieu.
- Un gérondif CC : C’est en forgeant qu’on
devient forgeron.
- Une subordonnée circonstancielle : C’est
quand (après/parce que) il a vu
Esméralda que Claude Frollo a perdu la
tête.
Limitations de l’extraction
L’extraction n’est pas possible avec tous les
adverbes : * C’est toujours qu’il travaille.
Ni avec toutes les circonstancielles :
* C’est quoiqu’il soit venu (puisqu’il est venu)
qu’elle s’est fâchée.

 * (signe de l’agrammaticalité de la phrase)


Fonction complément d’adjectif
attribut
C’est de Jean que Nelly est amoureuse.
On ne peut pas extraire :
 une expansion du GN (adj. Épithète ou
Comp. Du nom)
L’attribut du sujet , nominal ou
adjectival :
La vie est magnifique.
Ce fleuve est un torrent.
Quand le nom attribut est mis en
évidence, la copule (« est ») disparaît
ordinairement après le sujet.
C’est un serpent doré qu’un anneau
conjugal (« est »).
Les incidences de l’extraction

 L’extraction au moyen de c’est…que


entraîne certaines modifications :
 1- Les pronoms personnels conjoints sont
remplacés par les pronoms disjoints
 Je le ferai => C’est moi qui le ferai
Il t’a critiqué => C’est toi qu’il a critiqué
Formes 1 2 3 4 5 6
conjoint-
es
Sujet je tu Il/elle nous vous Ils/elles
on
Comp. me te Le-la nous vous Les
Lui Leur
Se Se
En En
y y
Formes moi toi Lui/elle nous vous Eux/elles
disjointes soi soi
« Ce » sujet et « le » neutre deviennent
cela (ou ça ).
Je le veux => C’est cela que je veux
C’est insupportable => C’est cela qui est
insupportable
« Il » impersonnel » et « on » ne peuvent
pas être mis en relief par l’introducteur.
Cependant, la langue populaire, tout en
maintenant « on » à sa place, peut le
mettre en relief sous la forme de « nous ».
C’est pas nous qu’on aurait pu en faire
autant !
La préposition reparaît devant le pronom
personnel complément d’objet indirect.
Je te parle => C’est à toi que je parle.
 « en » devient « de lui, d’elle, d’elles,
d’eux » ou « de là » , de cela ou de ça
selon le sens.
« y » devient « à lui, à elle, à elles, à
eux » ou « à cela, à ça » selon le sens.
Ilen parle =>
C’est de lui qu’il parle (en renvoie à un
nom animé humain)
C’est de cela qu’il parle (en renvoie à un
nom inanimé)

Il en est parti => C’est de là qu’il est


parti
( en renvoie à un lieu).
Il y pense (à son père)=>
Il y pense => (à ses études)
C’est à lui qu’il pense (il s’agit de
personne)
C’est à cela qu’il pense (il s’agit de
chose)

Il y va => c’est là qu’il va(il s’agit d’un


lieu)
2. Le verbe est mis à l’infinitif et sa place
primitive est occupée par le verbe
substitut « faire » à la forme qui convient.
Il dort sans cesse =>
C’est dormir qu’il fait sans cesse.
Je ne te pardonnerai jamais
C’est te pardonner que je ne ferai jamais.
Il est possible aussi de trouver des phrases
clivées où l’extraction du verbe
développée par une construction négative
qui explicite le sens.
C’est partir que je veux, pas rester.
 3. La préposition reste normalement
attachée au syntagme prépositionnel mis
en relief.
Je ferai cela pour toi => C’est pour toi
que je ferai cela
Je pense à toi => C’est à toi que je pense
Elle se souvient de son enfance => C’est
de son enfance qu’elle se souvient
 4. La négation peut accompagner
l’élément mis en relief.

Je ne pense pas à toi => Ce n’est pas à


toi que je pense.
La négation elle-même peut être mise en
relief ; le verbe passe alors au subjonctif.
Je ne suis pas malade => Ce n’est pas
que je sois malade.
On préfère déplacer le nom avec le
possessif et expliciter la possession par
« à + pronom personnel ».
C’est son amie à lui qui est malade.
C’est son existence à lui que je nie.
Quand la phrase contient deux objets, un
seul peut être extrait.
C’est à Henri que j’ai donné ce livre.
Les phrases pseudo-clivées (ou semi-
clivées)
Elles combinent l’extraction et le
détachement en tête de phrases.
Ce que j’ai acheté, c’est une péniche.
Ce que je veux, c’est qu’elle travaille.
Celui qui a gagné, c’est Pierre.
Généralement, le premier élément de la
phrase est une relative périphrastique.
Le second élément, introduit par c’est est
(GN, infinitif ou complétive) une
séquence qui entretient une relation de
complément avec le verbe de la relative.
Ce que je sais, c’est que je ne sais rien.
Celui qui a remporté le prix Nobel de la
paix, c’est le premier ministre éthiopien.
Ce que je veux, c’est ne plus te voir.
À la place de la relative périphrastique, on
peut avoir une subordonnée temporelle ou
conditionnelle :
Si je veux quelque chose, c’est qu’elle
travaille.
Quand la différence n’est plus marquée,
c’est la porte ouverte à la perte de
l’identité.
Accord de l’identifiant c’est
C’est est variable en nombre,
essentiellement dans la langue soutenue.
C’est : devant un GN au singulier ou d’une
structure prépositionnelle équivalente.
Ce sont : devant un GN au pluriel ( sauf
les pronoms : nous et vous).
Ce ne sont pas les ennemis naturels qui se
battent (Giraudoux).
C’est est préféré dans certaines
structures : Est-ce eux? Ce n’est pas eux
C’est dix francs.
Serait-ce les remèdes attendus?
Dans l’usage courant, à l’oral surtout,
c’est tend à remplacer ce sont.
Extraction avec IL Y A … QUI /
IL Y A … QUE

« Il y a » met le sujet en relief dans le but


d’attirer l’attention sur un fait constaté.

Tout à coup, il y a la cloche qui sonne.


Il y a tes amis qui arrivent.
Employé avec « ne … que », « il y a » est
l’équivalent de « c’est » + seulement :

Iln’y a que la nuit qui porte conseil.


= C’est seulement la nuit qui porte
conseil.
« il y a + expression de la durée » est
l’équivalent de : « c’est depuis »
Il y a longtemps que j’ai fini de travailler.
= C’est depuis longtemps que j’ai fini de
travailler.
Ou encore :
C’est il y a longtemps que j’ai fini de
travailler.
AUTRES PROCEDES
EMPHATIQUES

Le changement de l’ordre canonique

En français, la phrase doit respecter l’ordre


SVO;
Cet ordre n’est pas toujours respecté, pour
une raison ou pour une autre.
Le changement de l’ordre canonique des
constituants de la phrase permet de mettre en
relief un élément en le plaçant dans une
position qui n’est pas sa position normale ou
habituelle.

◦ Rares sont les femmes aux volons des bus.


◦ Les femmes sont rares aux volons des bus.
La phrase exclamative, notamment avec
un mot exclamatif.
Exemple : Comme tu es belle !
L’hyperbole (l’exagération qui tend vers
l’impossible)
Exemple : Je meurs d’ennui.
La litote ; on atténue l’expression d’une
pensée mais cette atténuation est fausse
ou simulée. La phrase implicite met
mieux les sentiments en évidence.
Ce n’est pas vraiment une mauvaise idée.
Explicitement : C’est une idée qui
pourrait être intéressante.
Implicitement : C’est une très bonne idée.
L’antiphrase : on donne à un mot, à une
formule un sens contraire à leur sens
ordinaire.
Dire à quelqu’un « Ne vous gênez pas! »
alors qu’il fait quelque chose de
dérangeant.
Dire « Quelle générosité! » à quelqu’un
qui refuse de donner quelque chose.
Le redoublement des consonnes.
Exemple : Toujours aussi bête (b-bête).

 Le détachement des syllabes.


Exemple : Soulagé et en même temps
épouvanté (é-pou-van-té).
Comment étudier (analyser ou
commenter) une phrase emphatique?
Pour étudier une phrase emphatique, on peut
suivre les étapes suivantes :
 Définir le procédé (ou les procédés) emphatique utilisé;
 Délimiter le constituant (ou les constituants ) sur lequel
porte l’emphase, donner sa nature et sa fonction.

 En cas de phrase disloquée,


 définir la nature du détachement;
 Repérer le pronom de reprise, donner sa nature en expliquant les
raisons de l’emploi;
◦ dans le cas d’une phrase clivée, relever le focus,
donner sa nature et sa fonction; relever le
présentatif et expliquer la raison de l’emploi du
pronom relatif:
◦ Pour une phrase semi-clivée, expliquer comment
se manifeste la combinaison de deux procédés
emphatiques dans la phrase, en donnant la nature et
la fonction des deux séquences qui la composent.

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