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ARCHITECTURE ET DURABILITE DANS LA REGLEMENTATION

ALGERIENNE. SITUATION ACTUELLE ET PERSPECTIVES

TIBERMACINE-BOURICHE Souheila, BELAKEHAL Azeddine et MAZOUZ Said


LACOMOFA (Laboratoire de Conception et de Modélisation des Formes et des
Ambiances Architecturales et Urbaines), Département d’Architecture, Université
KHIDER Mohamed Biskra
BP 145 RP 07000 Biskra, Algérie
Email: belakehal@yahoo.fr

INTRODUCTION

Dans la pratique, le processus de la conception architecturale couvre l’ensemble des


étapes de la production d’un bâtiment allant du premier contact entre l’architecte et le
client jusqu'à l’établissement des plans d'exécution. Ce processus est considéré comme
un acte de création en soi. Cependant, et contrairement à d'autres domaines artistiques, le
processus de conception architecturale fait face, tout au long de son parcours, à un
ensemble de contraintes à savoir (Parant et Mazaud, 1988):
 La contrainte sociale : les modes de vie, l’organisation et les institutions sociales,
les rapports de classes.
 La contrainte culturelle / intellectuelle : les aspirations, les rêves, les mythes, les
croyances religieuses et philosophiques, les concepts, la mémoire collective.
 La contrainte physique / naturelle : la nature, les grandes lois physiques, le site, le
terrain, le site.
 La contrainte technique / scientifique : les conceptions mathématiques et
géométriques, les techniques constructives.
 La contrainte économique : l’organisation de la production et des échanges, les
coûts.
 La contrainte politique : les modes de décision, les lieux l’exercice du pouvoir.
 La contrainte énergétique : les ressource énergétiques, les modes
d’approvisionnement de production, de captage, de stockage, de distribution et de
consommation.

Au cours du développement de son projet architectural, l’architecte doit réfléchir et


décider des solutions à prendre en compte vis-à-vis de l'ensemble de ces contraintes en
vue de produire un projet architectural le plus parfaitement intégré dans son
environnement. Néanmoins, ce souci semble être une question assez complexe allant de
l'ordre personnel à celui des savoirs en passant par l'ordre réglementaire.

En raison de l’importance de ces contraintes environnementales et du négatif impact qui


pourrait être engendré suite à leur ignorance au cours du processus de la conception
architecturale, il est stipulé dans cette recherche que, pour le cas de l'Algérie,
l'établissement d'un cadre réglementaire pourrait favoriser l'accroissement d'attitudes 'pro-

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environnementales', dira-t-on, chez les architectes et promouvoir, par la suite, la
production d'une architecture respectueuse de son environnement.

A cet effet, il serait nécessaire de situer auparavant les moments d'interaction entre la
réglementation et le processus de conception et d'explorer ensuite les avantages de la
durabilité comme concept global insérant l'architecture environnementale.

DES INTERACTIONS ENTRE RÉGLEMENTATION ET PROCESSUS DE


CONCEPTION ARCHITECTURALE

L’analyse du processus de conception architecturale est une première étape nécessaire


pour pouvoir situer les temps d'interaction entre réglementation et processus de
conception architecturale. Les différentes étapes de ce dernier sont à définir selon leur
phasage dans la logique d’élaboration du projet architectural. Et c'est au cours de ce
phasage que seront situées les impératifs issus du cadre réglementaire. L'illustration, dans
ce qui suit, relèvera particulièrement des aspects environnementaux pouvant être inscrits
dans un cadre règlementaire.

La Formulation de la Commande (Phase 1):


Dans son premier entretien avec un architecte, le commanditaire, fournit des
informations concernant ses désirs , ses besoins élémentaires, le budget destiné au projet,
certaines exigences particulières, les caractéristiques du site d’implantation, et le temps
alloué pour l'étude architecturale. La bonne conduite de la conception architecturale ne se
base pas seulement sur les informations que porte le programme génériques et la visite du
site, ou une simple discussion avec le commanditaire, il doit choisir une équipe d’acteurs
de travail (Conan, 1990 ; Conan, 1989). Il doit hiérarchiser et structurer la somme
d’informations, de demandes, d’impératifs, qui viennent de tous horizons, pour les
assimiler à sa vision du bâtiment à venir. La réglementation se limite dans cette première
phase du processus au statut d'un simple énoncé définissant une ou un ensemble
d'exigences.

Etude de Conception (Phase 2):


C’est une phase qui commence par un temps de formation par l’architecte d’une capacité
de production de propositions architecturales fragmentaires en réponse aux problèmes les
plus divers qu’il serait amené à se poser (Conan, 1989). A partir de l’énoncé préliminaire
du problème, l’architecte peut faire l’inventaire de domaine de réflexion qu’il lui parait
pertinent de prendre en considération dans son projet et en établira la liste englobant entre
autres:

 Le processus technique de construction,


 L’économie d’énergie,
 Fonction du bâtiment,
 Règlement et norme en vigueur,
 Le budget,
 Prospective des usages,

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 Prospective culturelle,
 Economie de gestion, et
 Extension ultérieure.

Chacun des domaines cités ci-dessus, participe à la création et le développement de


l’imaginaire de l’architecte, ce qui va alimenter le travail de conception qui commencera
après. A ce stade du processus, il est possible de considérer la réglementation comme non
seulement une référence législative pour le bon déroulement du travail de conception
mais également en tant que source pour le développement de l’imaginaire de l’architecte.

Ce travail de développement consiste, encore à prendre les problèmes du projet comme


point de départ pour schématiser des intentions de solutions possibles, dans le cadre de la
règlementation destinée à éviter, ou résoudre ces problèmes, d’un point de vue
architectural. C'est sur cette base que l’architecte notera les propositions d’adaptation qui
lui viennent à l’esprit (Conan, 1989). La phase de conception consiste à produire le projet
selon le programme préalablement défini. Au cours de cette étape, plusieurs documents
administratifs et techniques sont rédigés

L’Esquisse (Phase 3)
Élaborée par l’architecte en collaboration avec les acteurs et le client, sur un plan à
l’échelle 1/200, C’est la phase principale de la création architecturale. L'étape d'esquisse
est une étape de créativité où l'architecte propose des principes de représentation
géométrique sans grande précision dimensionnelle mais en respectant toutefois le
planning spatial. Elle est le résultat de l’articulation entre la modélisation logique
(planning spatial) et la modélisation géométrique dont le dessin est le principal support.

Dans cette étape la règlementation exige la prise en compte des particularités du site : la
végétation, la hauteur des bâtiments voisins, la forme du terrain et ses caractéristiques
topographiques, de plus le respect des conditions climatiques de la zone pour fixer la
forme du bâtiment, son orientation, la taille et le positionnement des ouvertures, ainsi que
la nécessité de fournir des fenêtres assurant l’éclairage naturel, l’ensoleillement, la
ventilation naturelle selon des normes qualitatives et quantitatives bien déterminées tel
que le choix des dispositifs architecturaux conformes à un confort d’été sans recours à la
climatisation.

L’Avant Projet (Phase 4)


Cette étape de représentation synthétique a pour objectif l’élaboration d’une esquisse
sommaire du travail. Cette solution peut être obtenue par la superposition de propositions
élaborées sur le calque, ou par déformations successives d’une proposition estimée
comme valable pour l’élaboration du projet architectural (Conan, 1990). L’avant projet
précise l’esquisse en développant ce qui concerne l’implantation générale. Cette phase se
traduit par le document 'AP' (avant-projet) sous la forme de plans à l’échelle 1/100.

La réglementation dans cette étape consisterait dans le choix d’un système de


construction écologique en associant des produits isolants naturels résistants aux charges

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climatiques extrêmes et peu consommateurs d’énergie, la nécessité de l’absence de
contamination chimique ou biologique et de pollution électromagnétique ou radioactive.

Le Projet Final (Phase 5)


Ce document précise les solutions retenues lors de l’avant projet. Il sert de base pour
déposer le permis de construire pour un nouveau bâtiment ou pour un bâtiment existant
modifié. Il définit de manière plus fine l’implantation détaillée à l’intérieur des espaces,
dimensionnement des allées intérieures de circulation. Il se traduit par le document final
avec des plans à l’échelle 1/50. Ce dossier doit identifier le contexte topographique et
territorial, le contexte bâti, l’orientation…etc. La représentation se fait en plans, coupes,
façades perspectives intérieures et extérieures, et maquettes. Les divers documents livrés
en cette phase permettent le passage direct au chantier de réalisation.

La réglementation est, en cette étape du processus, source d'informations contribuant à


l'achèvement du projet dans ses moindres détails et en particuliers constructifs. La
composition constructive des parois extérieures est un exemple illustrant un des détails
architecturaux accomplis lors de cette phase.

LA RÉGLEMENTATION, CONTRAINTE OU LIBERTÉ POUR


L'ARCHITECTE

Comme il vient d'être présenté, la multitude de textes réglementaires à considérer tout au


long du processus de conception architecturale détaillent précisément toute cette
conception depuis l’implantation des bâtiments en passant par l’aménagement,
l’ambiance des espaces et la future maintenance des équipements. En raison de
l’exigence de respecter le contenu des textes réglementaires en architecture, une question
se poserait d'elle–même: la réglementation est elle une contrainte restrictive pour le
travail créatif de l'architecte ou bien une liberté qui lui servira lors du développement de
son projet architectural.

La réglementation se présente à l'architecte comme contrainte pour le cas de textes


réglementaires rédigés sous forme conditionnelle (Raynaud, 2004). Il s'agit notamment
des exigences de respect des surfaces précises, des ratios, des tailles. Dans ce genre de
situation, l’architecte se trouve contraint à ne pas dépasser les valeurs prédéterminées. Il
en est de même pour la qualité d’éclairage nécessaire destinée à éclairer un espace, ou
bien l’exigence de faire éclairer, ensoleiller et ventiler naturellement tous les espaces
d’un bâtiment ayant une seule façade. D’un autre côté, et lorsque les textes sont trop
nombreux, la réglementation crée une autre contrainte pour l(architecte mais d'un autre
ordre. En effet, le budget temps consacré à l’étude de ces textes nombreux va
automatiquement s'accroître et, inversement, celui consacré à l’élaboration des
propositions architecturales décroîtra en conséquence. Il en ressortira que la prolifération
des textes met l’architecte en situation de devoir rendre des propositions moins élaborées,
ce qui induit une baisse tendancielle de la qualité architecturale.

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Néanmoins, si la réglementation peut être une contrainte dans quelques cas, cela
n’empêche pas qu’elle octroie à l’architecte un espace de liberté réel, car c’est à lui de
choisir la forme qu’il trouve convenable à son futur projet, tout en respectant les
contraintes énergétique et environnementale. Il est à rappeler que la réglementation a
comme objectif principal d’orienter l’architecte vers un travail créatif respectueux de son
environnement et non pas vers un travail d’application sur le terrain. L’excellent
architecte serait celui qui respecte la réglementation et la rendre à son service dans le
cadre de la création architecturale et non pas celui qui s'y soumettra à elle comme si elle
était une source de contraintes qui baisse considérablement le taux de sa liberté
intellectuelle.

En dehors du fait de pouvoir être une contrainte ou liberté dans la pratique


professionnelle d’un architecte, la réglementation pourrait être un guide duquel
l’architecte peut se ressourcer afin de respecter les contraintes environnementales
prégnantes dans la région où son futur bâtiment devra s’implanter. En effet, quelque soit
la situation de la règlementation dans le processus de la conception architecturale,
contrainte ou liberté, son importance dans le travail de production architecturale est
incontestable car elle guide l’architecte vers des solutions optimales respectant
l’environnement, rendant service l’humanité et offrant un cadre de vie durable.
Cependant, cette réglementation doit s'inscrire dans un visée de réflexion plus globale et
générale soucieuse des mêmes thématiques environnementales. La durabilité semble être
le contexte intellectuel approprié pour mener à bien cette tâche.

LA DURABILITÉ COMME CADRE D’UNE ARCHITECTURE


RESPECTUEUSE DE SON ENVIRONNEMENT

La notion de développement durable telle qu’elle a été énoncée dans le rapport


Brundtland (1987) est fondée sur un rapport d’équilibre entre environnement, société, et
économie. A l'échelle du cadre bâti, cette notion se traduit par des soucis portés à
l'efficacité énergétique et à la qualité environnementale des projets urbains ou
architecturaux. Les aspects socio-économiques constituent également une dimension
intégrée à cette notion relativement aux domaines de l'architecture et de l'urbanisme.

L'établissement d'une réglementation associée au développement durable se réclame de


plus en plus et se voit de plus en plus présente dans plusieurs pays et sous formes de
codes règlementaires préalables à la conception architecturale et de standards de
certifications qui lui sont postérieurs. Le premier cas est, par exemple, celui de la
réglementation française tel que manifeste dans le décret n° 2007-363 du 19/03/2007
(JORF n° 68, 2007) tandis que le second est illustré par le certificat LEED initié aux
Etats-Unis et connaissant une foisonnement de plus en plus international.

Toujours à l'échelle internationale, la démonstration menée au moyen de projets


architecturaux et urbains ne fait qu'encourager de telles actions de règlementations.
Embrassant les diversités régionales et géographiques, les projets environnementaux

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attestent d'une rationalisation de la consommation énergétique et de préservation
environnementale convergeant parfaitement avec les visées du développement durable.

ARCHITECTURE ET DURABILITÉ DANS LA RÉGLEMENTATION


ALGÉRIENNE: SITUATION ACTUELLE

Malgré les différents efforts menés dans le passé, tel que les expériences du solaire passif,
et les volontés actuelles dans le domaine des énergies renouvelables, la situation en
Algérie, du point de vue règlementaire devient de plus en plus incitative mais ans pour
autant être facile à concrétiser quant à la promotion d'une architecture environnementale
qui pourrait répondre aux soucis d'un développement durable.

L'examen des textes actuellement en vigueur renseignera sur l'état de fait et révèlera les
carences en matière d'enjeux environnementaux. Deux types de textes ont constitué la
principale ressource des règlements : i) ceux relatifs au cadre bâti et, ii) ceux reflétant les
préoccupations énergétiques. Il s'agit de : i) la loi n° 90-29 du 01/12/1990 relative à
l’aménagement et l’urbanisme (JORA n°52, 1990), et ii) le décret exécutif n° 91-175 du
28/05/1991 définissant les règles générales d’aménagement, d’urbanisme et de
construction (JORA n° 26, 1991) pour le premier type de textes. Pour le second type, il a
été question d’examiner : i) la loi n° 99-09 du 28/07/1999 relative à la maîtrise de
l’énergie (JORA n° 51, 1999), ii) la loi n° 04-09 du 14/08/2004 relative à la promotion
des énergies renouvelables dans le cadre du développement durable (JORA n° 52, 2004),
et iii) le décret exécutif n° 2000-90 du 24/04/2000 portant réglementation thermique dans
les bâtiments neufs. Ce sont les textes règlementaires auxquels se réfèrent le plus souvent
les professionnels dans le domaine du bâtiment, de l'urbanisme et de l'énergie.

A ces textes, une analyse thématique du contenu manifeste et latent a été appliquée. Les
thèmes à relever dans ces textes sont ceux qui renvoient aux dimensions
environnementales interférant avec le cadre bâti en l'occurrence tout ce qui est relatif au
soleil, lumière, vent, air, bruit, éclairage, thermique, confort, énergie, environnement…
etc. Au niveau des textes, ces thèmes peuvent se présenter de manière manifeste très
explicite, ouvertement déclarée et précisant des dimensions urbaines et / ou
architecturales précises, ou bien sont exprimées de façon latente et implicite, restant à
l’échelle très globale des volontés politiques et qui exige une lecture entre les lignes
(Tableau 1).

Les Textes Relatifs au Cadre Bâti


La lecture des textes de la loi n° 90-29 du 01/12/1990 révèle le caractère latent des
énoncés relatifs aux aspects environnementaux interférant avec le cadre bâti. L’article 4,
par exemple, exprime l’attention portée à la sauvegarde des équilibres écologiques
lorsque l’acte de construire est envisagé ; comme c’est le cas également de l’article 47
qui attire l’attention sur les spécificités des territoires à caractère naturel et culturel
marqué mais sans pour autant donner de directives, sous n’importe quel format,
applicables à l’échelle de l’urbain ou de l’architecture.

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Règlement Articles à contenu manifeste Articles à contenu latent
loi n° 90-29 du
01/12/1990 relative à
l’aménagement et Néant 4 et 47
l’urbanisme (JORA
n°52, 1990)
décret exécutif n° 91-
175 du 28/05/1991
définissant les règles
générales 21, 22, 24, 35, 36, 37, 38, 39, 42 2, 4, 5, 23, 26, 30 et 41
d’aménagement, et 45
d’urbanisme et de
construction (JORA n°
26, 1991)
loi n° 99-09 du
28/07/1999 relative à la
maîtrise de l’énergie 3, 6, 10, 11, 12, 18 et 20 4 et 5
(JORA n° 51, 1999)
la loi n° 04-09 du
14/08/2004 relative à la
promotion des énergies
renouvelables dans le 3 et 5 2 et 10
cadre du
développement durable
(JORA n° 52, 2004)
décret exécutif n° 2000-
90 du 24/04/2000
portant réglementation
thermique dans les Tous
bâtiments neufs .

Tableau 1 : Synthèse de l’analyse de contenu thématique des textes réglementaires algériens
relatifs au cadre bâti et à l’énergie (Source : Auteurs)

Une seconde analyse thématique a été menée sur le texte du décret exécutif n° 91-175 du
28 mai 1991 définissant les règles générales d'aménagement d'urbanisme et de
construction. Cette analyse a permis de dégager dix (10) articles désignant de manière
manifeste des règles relevant d'aspects environnementaux comme cet extrait de l'article
21 : 'la moitié, au moins, des façades percées de baies, servant à l'éclairage des pièces
d'habitation, doit bénéficier d'un ensoleillement de deux heures par jour pendant, au
moins, deux cents jours par année. Chaque logement doit être disposé de telle sorte que
la moitié au moins de ses pièces habitables prennent jour sur les façades répondant à ces
conditions' (JORA n° 26, 1991, p.791). L'analyse a également permis de relever sept (07)
autres articles l'indiquant de façon latente comme par exemple cet extrait du décret n° 23
'lorsqu'un bâtiment doit être édifié en bordure d'une voie publique, sa hauteur ne
dépassera pas la distance comptée horizontalement entre tout point de celui-ci et le point
le plus proche de l'alignement opposé' (JORA n° 26, 1991, p.791).

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Il est à souligner que tous les articles de ce décret sont restreints aux bâtiments à usage
d'habitations et que ceux au contenu thématique manifeste précisent des données relatives
à la ventilation et de l'éclairage naturel de ces locaux tandis que les autres traitent
beaucoup plus d'aspects généraux tels que l'hygiène et la salubrité, les nuisances
environnementales, avec des indications relatives à des dimensions urbaines (densité et
prospect) et architecturales (ventilation naturelle). Il est également facile de constater
qu'il est souvent précisé que certaines normes ne concernent pas les zones du sud algérien
et qu'une réglementation complémentaire remédiera à ces carences tel que c'est énoncé
dans les articles 25 et 35.

Les Textes Relatifs à l’Energie


Les lois et le décret étudiés attestent d’un degré manifeste remarquable en matière
d’énoncé de réglementation. Suite aux énoncés correspondants à la rationalisation de la
consommation énergétique et à l’efficacité énergétique, l’isolation thermique et
l’architecture bioclimatique sont les aspects des plus concrets à mettre en œuvre qui sont
cités dans ces lois. La réglementation thermique des bâtiments neufs est mise en avant
par un décret exécutif en vue de mettre en application ces lois.

A travers ces textes, il est facile de constater que l’aspect thermique est le seul à
constituer le point focal de l’ensemble des articles de la règlementation algérienne en
matière de maîtrise de l’énergie. Il va de soi que cet aspect n’est qu’un élément parmi
d’autres et qui ne pourra malheureusement se suffire à lui-même. A cela, s’ajoute
également le fait que cet aspect a été restreint à sa dimension architecturale sans pour
autant les impacts relevant de la dimension urbaine du projet architectural (prospect,
densité…) dont les impacts ne sont pas négligeables.

Les textes relatifs à l’énergie renvoient à des méthodes de calcul que l’architecte ne
pourra appliquer qu’en aval de sa conception, donc, une fois que ses décisions et ses
choix formels sont pris. Ceci va à l’encontre de la démarche créative du processus de
conception architecturale. L’architecte a plutôt besoin de normes incitatives à la création
et qui ne lui sont pas limitatives. Ces normes doivent l’inspirer lors des premières phases
de sa conception et lui permettre de se ressourcer continuellement. Egalement, ces textes
devraient englober tous les aspects énergétiques et environnementaux car le projet
architectural ne peut se prêter à une vision à sens unique mais se doit être une synergie
de contraintes multiples.

Cependant, il est utile de souligner que les efforts menés jusque là dans le contexte
règlementaire algérien sont à féliciter, à encourager et surtout à développer. Il demeure,
toutefois, nécessaire de penser à insérer, au sein des règlements des instruments
d’urbanisme par exemple, des textes complémentaires à ceux déjà énoncés dans la
réglementation actuelle afin de combler les vides constatés. Cela pourrait constituer une
perspective valable pour la situation actuelle en attendant l’édition de lois
complémentaires et décrets exécutifs encore plus achevés.

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PERSPECTIVES POUR UNE RÉGLEMENTATION ENVIRONNEMENTALE
ALGERIENNE

Le PDAU (Plan Directeur et d’Aménagement et d’Urbanisme) et le POS (Plan


d’Occupation des Sols) sont les instruments d’aménagement d’urbanisme définis par la
réglementation algérienne en vigueur. La notion de composition urbaine y est fortement
présente et l’attention aux détails architecturaux ne fait pas état d’absence non plus. Cela
constitue les principaux atouts des ces instruments en tant que règlements s’apparentant
le mieux aux démarches conceptuelles de l’architecte. Le PDAU et le POS offrent la
possibilité d’intégrer des règlements complémentaires, voire spécifiques, qui pourraient
englober des aspects environnementaux et énergétiques.

Dans le décret exécutif n° 91-175 du 28/05/1991 définissant les règles générales


d’aménagement, d’urbanisme et de construction (JORA n° 26, 1991), cette possibilité est
clairement énoncée.
L’article 25, faisant partie du chapitre I consacré aux règles générales d’aménagement et
d’urbanisme (JORA n°26, 1991, p.792) , stipule que ‘des dérogations aux règles édictées
au présent chapitre pourront être accordées par arrêté du ministre chargé de
l’urbanisme après avis ou sur proposition du wali territorialement compétent.
 A titre permanent, pour certaines régions, notamment du sud du territoire
national, ainsi que pour les constructions situées dans des tissus urbains classés
ou ceux présentant un caractère spécifique.
 A titre exceptionnel, notamment pour les constructions présentant un caractère
d’innovation.’.

Ceci est également le cas de l’article 35 du chapitre II dictant les mesures générales de
construction applicables aux bâtiments à usage d’habitation :
‘Chaque pièce doit être éclairée et ventilée au moyen d’une ou plusieurs baies ouvrantes
dont l’ensemble doit présenter une superficie au moins égale au huitième de la surface de
la pièce.

Cette disposition n’est pas applicable aux régions situées à une altitude égale ou
supérieure à huit cents mètres, ni à la zone du sud du territoire national. Un arrêté du
ministre chargé de l’urbanisme précisera les conditions requises’ (JORA n°26, 1991,
p.793).

Le POS : Instrument d'une Conception Urbanistique et Architecturale Durable


Selon la loi N° 90-29 du 01/12/1990 relative à l’aménagement et l’urbanisme et le décret
complémentaire N° 91-178 du 28/05/1991, le Plan d’Occupation des Sols (POS) est
énoncé comme étant un instrument d’urbanisme, dont doit être couverte chaque
commune, et destiné à définir de façon détaillée les droits d’usage des sols et de
construction en respect des dispositions du plan directeur d’aménagement et d’urbanisme
(PDAU) (M.L.P., 1998).

Le processus d’élaboration d’un POS est composé de trois phases successives allant
d’une analyse de la situation actuelle englobant l’aire d’influence territoriale rappelant les

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orientations du PDAU de la commune d’appartenance, jusqu’à l’élaboration d’une
composition urbaine et d’aménagement accompagnée d’un règlement urbanistique et
technique réconciliant les recommandations relatives à trois variantes de cette
composition et du projet de règlement présentées au cours de la deuxième phase de ce
processus. C’est au niveau des deuxièmes et troisièmes phases du POS que pourraient
être intégrés des règlements relevant des aspects environnementaux et énergétiques. Ils
peuvent être exprimés simultanément à travers la composition urbaine et au niveau du
règlement. Le cas des POS spécifiques des nouveaux centres de vie illustre une pareille
expérience menée dans une région du sud algérien et caractérisée par un climat extrême.

L'Exemple du Règlement des POS de Hassi Maâmar et Dzioua (Wilaya de Ouargla)


Pour le cas des POS spécifiques de Hassi Maâmar et de Dzioua, et comme le dicte les
réglementation en vigueur relative à l’élaboration des POS, un règlement a été élaboré
pour chacune des zones homogènes et qui porte généralement sur les points suivants
(ANAT, 2004 a ; ANAT, 2004 b) :
 Nature de l’occupation et d’utilisation du sol ;
 Modalité d’occupation des sols (COS, CES et densité des constructions) ;
 Caractéristiques de la zone (formes et dimensions des parcelles, implantation des
constructions, leurs hauteurs, matériaux des constructions) ;
 Implantation et hauteurs relatives des constructions par rapport à la voirie, aux
autres constructions et aux limites séparatives ;
 Aspects des constructions (Façades) ;
 Accès et stationnement.

Divers articles inclus dans ces points, énoncent des règlements émanant de soucis
environnementaux. Les ressources desquelles ont été puisé ces règlements sont
constituées par les nombreux acquis de la recherche dans le domaine de l’architecture
adaptée aux milieux arides et semi-arides à climat chaud et sec (Figure 1). Dans ce qui
suit on énoncera à titre d’exemple des fragments de textes d’articles manifestant
clairement des règlements favorisant la prise en compte de l’aspect climatique dans la
conception urbanistique et architecturale.

La zone d’habitat
Les textes concernent autant les dimensions urbanistiques (prospect, orientation…) que
celles architecturales (aspect extérieur, matériaux de construction…).
‘Les matériaux de construction utilisés pour l’édification des habitations individuelles
seront choisis parmi ceux permettant une adaptation climatique des constructions’.

‘Les constructions doivent aussi s’harmoniser avec l’aspect général de l’agglomération et


les formes du paysage. Les façades doivent impérativement être conçues dépendamment
de leur orientation par rapport au soleil. Dans le but de réfléchir le maximum du
rayonnement solaire, les couleurs des habitations doivent tendre vers le clair tout en
évitant le blanc pur’.

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Rapport espace bâti / environnement naturel Compacité, introversion et orientation
du cadre bâti

Traitement des ouvertures L’enveloppe protectrice performante

La ventilation comme moyen


de rafraîchissement L’utilisation de l’eau et de la végétation

Figure 1 : Principales stratégies urbanistiques et architecturales appropriées aux milieux arides à
climat chaud et sec synthétisant les acquis scientifiques dans ce domaine et ayant ressourcé le
règlement des POS spécifiques de Hassi Maâmar et Dzioua (Source : Belakehal, 2008).

‘La différence d’altitude entre tout point d’une construction (dont l’alignement est
orienté vers le sud) et tout point de d’alignement opposé ne doit pas dépasser la moitié de
la distance horizontale les séparant’.

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‘La différence d’altitude entre tout point d’une construction (dont l’alignement est orienté
vers l’est) et tout point de l’alignement opposé ne doit pas dépasser le quart de la distance
horizontale les séparant’ (Figure 2).

H1 - H2 = H3
H3 L/4

Est

Figure 2 : Schéma inclus au règlement des POS spécifiques de Hassi Maâmar et
Dzioua définissant le prospect à prescrire pour une construction dont la façade
est orientée vers l’est (Source : ANAT, 2004 a)

‘Les saillies au niveau des étages des constructions ne sont autorisées qu’à l’intérieur des
limites des parcelles (façades donnant sur des jardins privés) et ce à des avancées limitées
à un maximum de 1 m 50. Pour le cas des façades donnant sur ruelle pour piétons en vue
d’y favoriser un maximum d’ombrage. Pour ce dernier cas, la distance maximale de la
saillie ne doit pas dépasser 1m20 à partir de la limite de la parcelle. La largeur de la partie
saillante de la construction ne doit pas dépasser le 1/3 de la largeur de la façade. Elle ne
doit pas être en face d’une partie saillante de la construction opposée’ (Figure 3).

Figure 3 : Schéma inclus au


COUPE règlement des POS spécifiques
de Dzioua définissant les
poutre saillante

positions et dimensions des


saillies vouées à l’ombrage des
surfaces des habitations et des
VUE EN PLAN espaces extérieurs (Source :
ANAT, 2004 b)

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La zone d’équipements
Les textes concernant la zone d’équipements étaient similaires à ceux de la zone d’habitat
en matière de rubriques mais différents en matière de contenu.

‘La simplicité du volume est demandée, l’aspect et les matériaux de construction doivent
être compatibles avec l’aspect du quartier, de la ville et du paysage’.
‘Il est recommandé que les constructions présentent une simplicité de volume et d’aspect.
Les constructions doivent aussi, s’harmoniser avec l’aspect général de l’agglomération et
les formes du paysage. Les façades doivent impérativement être conçues dépendamment
de leur orientation par rapport au soleil et s’inspirer des styles architecturaux locaux, tout
en contribuant à leur développement. Dans le but de réfléchir le maximum du
rayonnement solaire, les couleurs des équipements doivent tendre vers le clair, tout en
évitant le blanc pur’.

‘Toute construction à usage d’équipement public doit être édifiée en retrait par rapport à
l’alignement de la voie publique. Ce retrait fera fonction de paroi végétale protectrice
contre les effets du rayonnement solaire. La profondeur de cette paroi doit varier entre un
minimum de 4 mètres et un maximum de 10 mètres. Les dernières constructions doivent
respecter l’alignement des constructions antérieures. S’il existe une obligation de
construire selon l’alignement de la voie publique, la limite de ce retrait se substitue à
l’alignement. Toutefois, la conception de la construction en question devra assurer un
contrôle solaire efficient’ (Figure 4).

4m R 10m

Bati

Figure 4: Schéma inclus au règlement des POS spécifiques de Hassi Maâmar et Dzioua définissant le
retrait exigé pour les constructions destinées pour les équipements publics et favorisant une
protection solaire verte (Source : ANAT, 2004 a ; ANAT, 2004 b)

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Zones des places publiques  et des espaces verts
Le règlement portant sur les espaces urbains extérieurs attirait l’attention sur l’ombrage et
sur la performance des revêtements sol.

‘Les parcelles pour places publiques et les espaces verts peuvent prendre des formes
variées permettant ainsi, leur insertion dans la morphologie générale du centre de vie. Ces
places et espaces doivent contenir un nombre d’arbres suffisants, afin de pouvoir assurer
un ombrage satisfaisant essentiellement en période de surchauffe. De même, les sols de
ces espaces doivent être revêtus en matériaux qui résistent aux effets des rayons solaires
et permettant une circulation aisée aux usagers’.

CONCLUSION

Malgré les énormes efforts fournis par l’Algérie en vue de promouvoir l’utilisation des
énergies renouvelables, maîtriser la consommation énergétique et de préserver
l’environnement terrestre, la réglementation algérienne en vigueur relative aux conditions
de la production du cadre bâti s’avère être encore au stade de l’ébauche.

A travers le survol de l’interaction de la réglementation aux différentes phases du


processus de conception architecturale et l’examen des différents textes en vigueur, il a
été proposé qu’une continuité des actions déjà entamées pourrait s’élaborer dans le cadre
d’études relevant des instruments d’aménagement et d’urbanisme et en particulier le
POS.

Ceci a été démontré au moyen d’une modeste expérience consistant en une étude de POS
spécifique menée dans un contexte climatique sévère (sud algérien) et où il a été révélé
que la recherche académique est d’une contribution notoire au développement d’une
réglementation urbanistique et architecturale environnementale algérienne.

BIBILOGRAPHIE

A.N.A.T. (Agence Nationale de l’Aménagement du territoire) (2004 a), Rapport de la


Troisième Phase de l’Etude du POS de Hassi Maâmar, Unité de Biskra (expert
consultant : Dr BELAKEHAL Azeddine).

A.N.A.T. (Agence Nationale de l’Aménagement du territoire) (2004 b), Rapport de la


Troisième Phase de l’Etude du POS de Dzioua, Unité de Biskra (expert consultant : Dr
BELAKEHAL Azeddine).

Belakehal A. (2008), ‘Les nouveaux centres de vie de Hassi Maâmar et Dzioua (Wilaya
de Ouargla). Enjeux, défis et conception urbanistique’, Colloque National ‘la Ville et la
Problématique du Nouvel Urbanisme, 20-21/04/2008, Laghouat, (19 pages).

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Ed. CSTB, Paris.

JORF (Journal Officiel de la République Française) n° 68, (2007), Décret n° 2007-


363, Paris le 19 mars 2007.

JORA (Journal Officiel de la République Algérienne) n°52, (1999), la loi n° 90-29,


Alger le 01/12/1999.

JORA (Journal Officiel de la République Algérienne) n° 26, (1991), le décret exécutif


n°91 -175, Alger le 28/05/1991.

JORA (Journal Officiel de la République Algérienne) n° 51 (1999), la loi n°99-09,


Alger le 28/07/1999.

JORA (Journal Officiel de la République Algérienne) n° 52 (2004), la loi n°04-


09, Alger le 14 / Août / 2004.

M.L.P. (Média-Livres-Plus) (1998). Guide de l’Urbanisme, de la Construction et de la


Promotion Immobilière. Ed. M.L.P., Alger.

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Ed. S’PLOT, Liège.

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