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: Jeune Iranien pointant un faux fusil sur une marionnette de Carter, Téhéran, novembre
1979 © Reza/Getty Images.
Maquette : © SYLVAIN COLLET
ISBN : 978-2-271-14360-0
Couverture
Titre
Copyright
Avant-propos
Introduction
Une deuxième révolution
Premiers échecs
Situation de l'Iran
La version du shah
Ce que disent les Américains
La dépendance
Le pétrole et les « Anglais »
La SAVAK
Khomeyni et les Américains
Le « retour des capitulations »
L'alliance antisoviétique
Les achats d'armement
Armement et dépendance
Carter et le shah
« Penser l'impensable »
Sommet de la Guadeloupe
Mission Huyser, 4 janvier-3 février 1979
De l'empire à la république
Les révolutionnaires et les États-Unis
Le discours anti-impérialiste
Chronologie (1941-1979)
Bibliographie
Remarques
Abréviations
Livres et articles
Liste des personnalités
Index
Avant-propos
*
Je termine ici une enquête (historia) commencée il y a quarante ans
pour comprendre la révolution de 1979 dont j’avais été un témoin direct et
participant. En effet, quand je participais aux grands cortèges
révolutionnaires à Téhéran et que je criais des slogans contre la dictature, je
n’avais pas les repères culturels et historiques pour comprendre d’où venait
cette puissance populaire. D’abord, j’ai cherché dans l’idéologie religieuse
1
de l’islam shi’ite ; puis dans l’histoire politique et sociale . Avec la
dimension internationale qui m’avait manqué, je comprends mieux les
causes et les conséquences dramatiques des bouleversements
révolutionnaires et de la rupture entre l’Iran et les États-Unis. La figure de
l’Américain armé de bons sentiments, celle que les missionnaires et les
experts et conseillers avaient d’abord voulu laisser d’eux-mêmes, s’était
transformée en une figure de dominateur sans scrupule, celle que les
Iraniens ont soudain découverte et rendue visible aux yeux des pays
dépendants. Ils avaient contemplé avec envie la prospérité hollywoodienne
et consumériste. On leur montra la marque du collier qui tenait l’Iran
enchaîné. En brisant ce lien, les révolutionnaires iraniens ont déclenché une
guerre de plus de quarante ans dans tout le Moyen-Orient (Irak, Koweït,
Afghanistan, Tchétchénie, Syrie, Yémen…). Que de morts enrichissant les
producteurs d’armes et les marchands de pétrole et que d’hypocrisie dans
les prêchi-prêcha des mollâs ou les discours lénifiants de nos dirigeants !
Que d’invectives à l’égard des Iraniens !
À l’instar de mes études précédentes sur l’idéologie shi’ite et sur
l’histoire sociale et politique, je cherche moins ici à décrire une vérité
objective sur l’impérialisme américain que le sentiment de dépendance des
Iraniens, une vérité subjective de l’histoire. Je ne sais pas ce qui s’est
vraiment passé pour la plupart des événements relatés. Je m’intéresse à la
manière dont les hommes nous en ont rendu compte.
Leur lien à l’Amérique avait sorti les Iraniens du narcissisme et fait de
leur pays le satellite d’une puissance arrogante. Le phénomène n’était pas
absolument nouveau pour eux qui venaient de mener un combat héroïque
contre l’Empire britannique. Mais il a été rapide et brutal, et nous le
découvrons aujourd’hui avec une grande richesse documentaire. C’est
également, avec des variantes culturelles locales, le sentiment de tous les
peuples qu’on soumet à une puissance étrangère au nom d’une nécessité
difficile à comprendre.
Une comparaison me hante, celle de l’Algérie : dans mon enfance,
l’appartenance à la République de ces départements où vivaient un million
d’Européens et neuf millions d’Algériens musulmans, a été bousculée par
l’indépendance conquise les armes à la main. Sans jamais avoir abandonné
sa souveraineté, l’Iran était tombé sous la domination d’une grande
puissance, une subordination moins claire que la colonisation, et moins
invasive. La dénonciation de ce lien n’en a pas été moins douloureuse.
Ce livre est une relecture de la mésalliance irano-américaine et de sa
rupture brutale le 4 novembre 1979. Le point de vue le moins entendu par
les Occidentaux, celui des Iraniens, est le seul qui puisse nous éclairer sur
les racines de la révolution. Les sources utilisées sont facilement
accessibles ; mais souvent, nos yeux fatigués ne veulent pas voir l’évidence
la plus proche et cherchent des raisons obscures et lointaines aux
bouleversements du monde.
1. Y. RICHARD, L’Islam chi’ite. Croyances et idéologies ; id., L’Iran de 1800 à nos jours.
Introduction
Une deuxième révolution
*
Cette histoire commence par des étapes balbutiantes, pré-impériales,
missionnaires – et ce n’est pas un hasard ! Les bonnes intentions
n’empêchent pas l’implication politique, l’arrivée de l’idéologie
messianique du Nouveau Monde dans les méandres d’une société asiatique
appelée à une grande transformation. Après la Seconde Guerre mondiale,
l’équilibre européen du monde, partagé jusque-là entre les Anglais et les
Français, se recompose. Quelques épisodes passionnants montrant
l’émergence de la superpuissance américaine méritent un examen : la crise
nationaliste et le renversement de Mosaddeq, la révolution post-féodale, et
la suite du gouvernement Amini, le rôle militaire croissant de l’Iran. La
révolution inattendue de 1978-79 dévoile enfin les faiblesses de
l’impérialisme américain. Les analyses qui suivent ne visent donc pas tant à
écrire l’histoire iranienne avant 1979 qu’à mettre en lumière quelques
épisodes significatifs.
Premiers échecs
*
La crise qui se termine par le coup d’État contre Mosaddeq a été
généralement interprétée comme révélatrice du caractère impérialiste des
États-Unis successeurs de la Grande-Bretagne. Il faut apporter des nuances
à ce tableau.
C’est à la demande britannique que les Américains sont intervenus en
Iran pendant la guerre d’abord, contre Mosaddeq plus tard. Depuis 1952, le
Royaume-Uni n’avait plus la représentation diplomatique qui lui aurait
permis d’introduire facilement des agents en Iran. Le complot contre
Mosaddeq est donc le fruit d’une intervention conjointe pour laquelle, pour
diverses raisons, la plupart des dirigeants américains étaient entièrement
d’accord avec les Britanniques.
Il n’est pas sûr que la volonté de juguler le danger communiste en Iran
ait été la première motivation des Américains dans le renversement de
Mosaddeq. En 1944, la fondation de l’ARAMCO et le partage des bénéfices
sur la base de cinquante-cinquante avec les Saoudiens rendaient la région
particulièrement sensible et attractive : d’autres champs pétroliers excitaient
la convoitise américaine mais il fallait les sécuriser. L’Iran était un bouclier
contre les Soviétiques.
Les Américains avaient beaucoup de mépris pour les méthodes
coloniales employées par les Britanniques et notamment dans l’exploitation
du pétrole (répartition très inégale des bénéfices, ségrégation du
personnel…), mais ils redoutaient une nationalisation dure qui aurait pu
créer une dynamique nationaliste dans toute la région. Et même s’ils ne
pouvaient plus s’opposer à la nationalisation elle-même, ils cherchaient à en
retirer la substance, le pouvoir de décision, l’accès au marché extérieur, etc.
Il faut ajouter également que, dans une première phase, les Américains
éprouvaient une sympathie pour la position indépendantiste et
antibritannique de Mosaddeq 63.
Avant d’examiner la responsabilité américaine dans le coup d’État, il
convient de décrire les forces en présence, l’importance grandissante du lien
avec les États-Unis, et de rappeler les grandes lignes de l’événement.
Situation de l’Iran
*
Le Front national (Jebhe-ye melli), une coalition de plusieurs partis
nationalistes, s’est constitué avec pour objectif principal de recouvrer la
pleine souveraineté iranienne sur les richesses du pays, à commencer par le
pétrole. Cette richesse, dont l’importance économique ne faisait que croître,
était exploitée depuis 1908 par l’Anglo-Iranian Oil Company, une société
de droit privé où le Royaume-Uni avait acquis 53 % des parts depuis 1914.
Le Front national fut formellement constitué en août 1949 lors d’une
manifestation pour protester contre les manipulations électorales à Téhéran.
Le « docteur » Mosaddeq (1882-1967), un aristocrate qui s’était opposé
à Rezâ Shâh fut élu au Majles à partir de 1943 et devint leader du Front
national. Orateur exceptionnel, il savait galvaniser les foules en vilipendant
les Britanniques. Juriste de formation, il avait de solides arguments pour
dénoncer l’inconstitutionnalité du remaniement de la loi fondamentale
demandé par le shah en 1949, mais il s’inclinait devant l’autorité du
souverain.
Pour régler à l’amiable la question de la nationalisation du pétrole, en
juin 1951 le shah a d’abord nommé premier ministre le général Ali
Razmârâ, qui réussit à se faire accepter des communistes et des
nationalistes, de l’URSS et des États-Unis. Il proposa notamment de réviser
la concession de l’AIOC avec répartition des royalties à cinquante-
cinquante, à l’exemple de l’ARAMCO. Razmârâ fut assassiné le 7 mars
1951 par un extrémiste musulman ; la semaine suivante le Parlement vota la
loi de nationalisation du pétrole. L’ambiance dramatique de la
nationalisation augmenta progressivement jusqu’au coup d’État
d’août 1953.
1. Th. S. R. FLYNN, The Western Christian Presence in the Russias and Qājār Persia, p. 587.
2. « … the old corrupt, irreformable Church », selon les missionnaires, cité Ibid. p. 672.
3. Voir J. JOSEPH, The Modern Assyrians of the Middle East, pp. 1 sq. et 107 sq. ; Th. S.
R. FLYNN, The Western Christian Presence in the Russias and Qājār Persia, p. 609. Plus
récemment, Adam H. BECKER, Revival and Awakening, American Evangelical Missionaries in Iran
and the Origins of Assyrian Nationalism, Chigaco/Londres, University of Chicago Press, 2015.
4. Th. S. R. FLYNN, The Western Christian Presence in the Russias and Qājār Persia, p. 629.
5. Ibid.
6. Ibid., p. 638.
7. Ibid., pp. 656 sq.
8. Ibid., p. 667.
9. Cf. en 1843 dans l’Empire ottoman, où la situation était similaire, voir J. JOSEPH, The Modern
Assyrians of the Middle East, pp. 82 sq.
10. F. ÂDAMIAT, Amir Kabir va Irân, pp. 573-579.
11. J. JOSEPH, The Modern Assyrians of the Middle East, p. 122.
12. FRUS, Papers Relating to the Foreign Relations of the United States…, 1906, Part II,
document 137, le ministre Pearson au secrétariat d’État, 12 août 1906.
13. W. M. SHUSTER, The Strangling of Persia, p. 6.
14. « It is in the pursuit of Russian interests or British trade that innocent people have been
slaughtered wholesale » (ibid., p. 331).
15. Ibid., p. 333.
16. A. KASRAVI, Târikh-e hejdah sâla-ye Âzarbâyjân, pp. 23 sq.
17. A. C. MILLSPAUGH, The American Task in Persia, pp. 40-41.
18. Ibid., p. 239.
19. Ibid., p. 18.
20. Ibid., p. 318.
21. G. JONES, Banking & Empire in Iran. The History of the British Bank of the Middle East,
p. 199.
22. A. C. MILLSPAUGH, Americans in Persia, p. 253.
23. A. EBTEHÂJ, Xâterât, I, p. 116. Voir également p. 123.
24. Ibid., p. 122.
25. Ibid., p. 134.
26. A. C. MILLSPAUGH, The New York Times, 30 janvier 1946, p. 24.
27. Ibid.
28. Ibid.
29. A. C. MILLSPAUGH, Americans in Persia, pp. 46-48
30. A. EBTEHÂJ, Xâterât, I, pp. 119-129 ; FRUS : Diplomatic Papers, 1944, The Near East, South
Asia, and Africa, The Far East, vol. V, document 461, le Secrétaire d’État par intérim au chargé
d’affaires à Téhéran, 31 juillet 1944. La lettre du shah (17 juillet 1944), au même volume, est le
document 340.
31. FRUS : Diplomatic Papers, 1944, The Near East, South Asia, and Africa, The Far East, vol. V,
document 462, télégramme du Secrétaire d’État par intérim au chargé d’affaires à Téhéran du
31 juillet 1944.
32. Y. ALEXANDER et A. NANES (éd.), The United States and Iran, pp. 77-80. Voir également
L. FAWCETT, Iran and the Cold War, pp. 110 sq.
33. B. R. KUNIHOLM, The Origins of the Cold War in the Near East, p. 143.
34. FRUS, 1941. The British Commonwealth ; the Near East and Africa, vol. III, document 474 :
Dreyfus au secrétaire d’État, 5 novembre 1941.
35. FRUS, 1941, The British Commonwealth ; The Near East and Africa, vol. III, document 350 :
Dreyfus au secrétaire d’État, 15 octobre 1941.
36. B. R. KUNIHOLM, The Origins of the Cold War in the Near East, p. 145.
37. FRUS : Diplomatic Papers, 1942, The Near East and Africa, vol. IV, document 225 : Dreyfus au
secrétaire d’État, Téhéran, 9 décembre 1942.
38. F. D. Roosevelt, 10 mars 1942, FRUS : Diplomatic Papers, 1942, The Near East and Africa,
vol. IV, document 326.
39. Memorandum by the Adviser on Political Relations (Wallace Murray), 3 août 1942, FRUS :
Diplomatic Papers, 1942, The Near East and Africa, vol. IV, document 268.
40. FRUS : Diplomatic Papers, 1943, The Near East and Africa, vol. IV, document 484, télégramme
de Dreyfus au secrétaire d’État, 8 janvier 1943.
41. General Patrick J. Hurley, représentant personnel du président Roosevelt, au président, daté
du Caire, 13 mai 1943 (Franklin D. Roosevelt Library, Hyde Park, N. Y.), FRUS : Diplomatic
Papers, 1943, The Near East and Africa, vol. IV, document 369.
42. P. J. Hurley, Ibid.
43. FRUS : Diplomatic Papers, 1943, The Near East and Africa, vol. IV, document 432 :
er
« Declaration regarding Iran », 1 décembre 1943 ; The Tehran Conference, The Three-Power
Declaration Concerning Iran… publié par le ministère iranien des Affaires étrangères.
44. F. D. Roosevelt au secrétaire d’État, 12 janvier 1944, cité en note du rapport de Hurley.
45. F. D. Roosevelt, ibid.
46. Cité par L. FAWCETT, Iran and the Cold War, p. 114.
47. Rapport de Hurley, première partie.
48. B. R. KUNIHOLM, The Origins of the Cold War in the Near East, p. 170.
49. A. C. MILLSPAUGH, Americans in Persia, pp. 8 sq.
50. FRUS : Diplomatic Papers, 1943, The Near East and Africa, vol. IV, document 667, télégramme
de Dreyfus au secrétaire d’État, 15 novembre 1943.
51. Voir par exemple FRUS : Diplomatic Papers, 1944, vol. V, document 472, du chargé d’affaires
en Iran (Ford), au secrétaire d’État Washington, 3 avril 1944.
52. Y. ALEXANDER et A. NANES (éd.), The United States and Iran, pp. 133-140.
53. B. R. KUNIHOLM, The Origins of the Cold War in the Near East, p. 284.
54. L. FAWCETT, Iran and the Cold War, p. 122.
55. Y. ALEXANDER et A. NANES (éd.), The United States and Iran, p. 165. Texte complet in
FRUS : Diplomatic Papers, 1946, vol. VII, document 259 : Murray à Washington, 11 mars 1946.
56. Cité par L. FAWCETT, Iran and the Cold War, p. 153.
57. Voir ibid., p. 171 sq. ; QAVÂM OS-SALTANA, Xâterât-e siâsi, p. 271 sq.
58. Ibid., p. 280 sq. Couramment appelé Qavâm, cet homme issu de l’aristocratie qâjâr (1873-1955)
avait commencé sa carrière bien avant l’avènement des Pahlavi. Il était craint par le shah qui fut
cependant contraint, exceptionnellement, de lui conférer un titre nobiliaire, Jenâb-e Ašraf. Sur son
activité à cette période, voir Ralph KAUZ, Politische Parteien und Bevölkerung in Iran : Die hezb-e
Demûkrât-e Irân und ihr Führer Qavâmo s-Saltanä, Berlin, Klaus Schwarz, 1995.
59. Accord connu sous le nom des deux négociateurs, Qavâm-Sadchikov. Y. ALEXANDER et
A. NANES (éd.), The United States and Iran, p 172. Détail sur toute la procédure dans
B. R. KUNIHOLM, The Origins of the Cold War in the Near East, pp. 304 sq. ;
P. HOMAYOUNPOUR, L’Affaire d’Azarbaïdjan, pp. 116 sq.
60. FRUS : Diplomatic Papers, 1946, vol. VII, document 404 : l’ambassadeur Allen au secrétaire
d’État, 19 octobre 1946 ; B. R. KUNIHOLM, The Origins of the Cold War in the Near East, p. 389.
Sur les relations de Qavâm avec les Américains, voir ibid., pp. 344 et 384.
61. Ibid., p. 392.
62. QAVÂM OS-SALTANA, Xâterât-e siâsi, p. 276.
63. E. R. ONEY, Interview, p. 6.
64. FRUS : Diplomatic papers, 1939, The Far East, The Near East and Africa, vol. IV,
document 607, mémorandum du 25 septembre 1939.
er
65. Mémorandum d’une conversation avec le ministre iranien à Washington, Schayesteh, 1 mars
1940 ; télégramme du chargé d’affaires à Téhéran Engert, 6 mai 1940 ; FRUS : Diplomatic Papers,
1940, The British Commonwealth, The Soviet Union, The Near East and Africa, vol. III,
document 568.
66. FRUS, 1949, The Near East, South Asia, And Africa, vol. VI, document 328, mémorandum de
G. McGhee au secrétariat d’État, 17 novembre 1949 ; Gh. R. AFKHAMI, The Life and Times of the
Shah (aucune mention) ; A. MILANI, The Shah, p. 145 (à peine une ligne avec une date fausse).
Dans ses Mémoires, McGhee reprend les dépêches et mémorandums des archives diplomatiques :
voir G. MCGHEE, Envoy to the Middle World, pp. 61-79.
67. A. MILANI, The Shah, p. 135.
68. FRUS, 1949, « The Near East, the Far East and Africa », vol. VI, document 295, télégramme de
l’ambassadeur en Iran (Wiley) au secrétaire d’État, du 26 avril 1949, et document 309, télégramme
de Wiley au secrétaire d’État, du 8 juin 1949.
69. Rapport d’une conversation avec Ebtehâj envoyé par le shah auprès de l’ambassadeur américain,
FRUS, 1949, « The Near East, the Far East and Africa », vol. VI, document 312, télégramme du
7 juillet 1949.
70. « They are not without talent or ability, but they disdain the past and ignore the future. » FRUS,
1949, « The Near East, the Far East and Africa », vol. VI, document 310, télégramme du 22 juin
1949.
71. L’ambassadeur américain Wiley l’avait appris de son collègue britannique à Téhéran. FRUS,
1949, « The Near East, the Far East and Africa », vol. VI, document 324, télégramme du 22 octobre
1949.
Le coup d’État « américain »
La version du shah
*
Les contradictions multiples des acteurs principaux de ce non-
événement nous font mieux comprendre à quel point le degré d’ingérence
des Américains est difficile à déterminer. Aujourd’hui, la publication de
nombreux documents diplomatiques et extra-diplomatiques nous permet de
démêler partiellement l’écheveau. Mais que pouvait-on percevoir, en 1953,
de l’implication de Washington dans la politique iranienne ? L’épisode
suivant, au mois d’août, n’est pas plus évident, de ce point de vue, que celui
de février. Et c’est pourtant sur son interprétation et ses conséquences que le
sentiment antiaméricain va se développer en Iran dans la période
révolutionnaire.
Ce que disent les Américains
Au lieu de diaboliser Mosaddeq comme l’ont fait les Anglais, Grady fait
de lui le portrait d’un gentleman oriental qu’on pourrait comparer à Gandhi.
Mais, écrit encore Grady, sans le vouloir, inconsciemment, il fait le jeu des
Soviétiques en pensant que son combat véritable est dirigé contre ce qu’il
pense être l’agression économique britannique. Les Américains,
heureusement, ont réussi à dissuader les Britanniques d’attaquer
militairement l’Iran, ce qui aurait provoqué le retour des Soviétiques et
probablement un conflit généralisé. La dégradation constante de l’économie
iranienne depuis la fin des royalties versées à l’Iran est une autre manière de
faire avancer la cause communiste dans ce pays. Américains et Britanniques
ont en commun la détermination de conjurer ce malheur. Mais les
Britanniques ne veulent pas, dit encore Grady, qu’un prêt américain à l’Iran
introduise une concurrence économique dans ce pays sur lequel ils estiment
avoir un droit historique.
Cette analyse décrit assez bien le dialogue de sourds. Mais elle reste
superficielle. À la logique économique d’expansion industrielle et d’un
capitalisme international, Mosaddeq opposait une logique plus humaniste,
sur laquelle s’est greffé un nationalisme exacerbé. Il n’est pas certain que
les relations internationales, notamment dans le cas de l’Iran, soient sorties
de cette impasse.
En reprenant la rhétorique de la lutte du monde libre contre la dictature
soviétique, les historiens ont longtemps négligé le ressort véritable de la
politique étrangère américaine. Les anciens empires coloniaux exportaient
la civilisation et la vraie foi, mais exploitaient la main-d’œuvre indigène et
les matières premières ; l’impérialisme moderne se cache derrière un
paravent humaniste et libéral et impose sa logique du profit maximal.
Az mâ-st ke bar mâ-st
« Ce qui nous tombe dessus vient de nous ! »
(adage persan)
On peut rêver d’un récit direct, objectif, neutre et fiable de ce qui s’est
vraiment passé entre le 16 et le 19 août 1953 à Téhéran. Côté iranien, il n’y
a que des récits partisans. Venant du parti Toudeh et des intellectuels de sa
mouvance, on rapporte la quasi-certitude de l’implication américaine, ou le
soupçon de la participation des Britanniques. On invoque comme preuve les
voyages de la princesse Ashraf et du général Schwarzkopf, mais ils ne sont
explicitement liés au coup d’État que dans les sources iraniennes tardives,
et documentés seulement en 1979 par le récit de l’un des agents de la CIA,
Kermit Roosevelt 58.
Le témoignage de Loy Henderson, ambassadeur américain à Téhéran
(1951-53), a été souvent commenté. Il est à la fois direct et différé, puisque
lors d’interviews variées, il a eu l’occasion de revenir sur son rôle et sur
l’attitude de son gouvernement dans la crise iranienne. À partir de
juin 1953, l’ambassadeur avait été rappelé en consultation à Washington
puis il avait pris ses congés en Europe. Bien qu’informé des projets de la
CIA, il n’a donc pas participé directement à la préparation du renversement
de Mosaddeq. On a ainsi une situation assez semblable à la préparation du
coup d’État de 1921 : le ministre britannique, Herman Norman, avait alors
feint à merveille de ne rien savoir des agissements des officiers de la North
Persian force à Qazvin.
Les dénégations tardives de l’échec du 16 août pour inverser le sens du
départ du shah, non plus une fuite, mais un appel au peuple iranien… sont
démenties par tous les documents diplomatiques. Un télégramme de
Bagdad au Foreign Office rend compte de la confusion totale qui règne
lorsque le shah arrive dans la capitale irakienne et des conseils qu’il
sollicite auprès des diplomates américains et britanniques avant de repartir
59
pour Rome . L’ambassadeur américain à Bagdad, qui rencontre le
souverain en fuite, écrit : « Le shah disait qu’il était absolument incapable
de comprendre pourquoi le plan avait échoué. […] J’ai essayé de lui
60
remonter le moral en disant qu’il retrouverait bientôt son trône … » Les
Américains n’arrivent pas à convaincre Mohammad-Rezâ Pahlavi de rentrer
immédiatement à Téhéran. Ils lui demandent au moins, « pour son prestige
en Iran », de ne jamais mentionner une quelconque intervention étrangère
61
dans les récents événements. Ce qu’il accepta .
Alors qu’il est à Beyrouth, Henderson reçoit les nouvelles d’Iran :
l’échec du coup d’État, le shah parti et les manifestations communistes
menaçant l’avenir du pays. Il rentre d’urgence le 17 août et rend visite à
Mosaddeq le jour suivant. On peut distinguer son témoignage immédiat
(dans les dépêches diplomatiques) de ses souvenirs racontés vingt ans plus
tard en réponse à un historien.
Le 18 août à 22 heures, Henderson rend compte en détail de la visite
qu’il vient de faire à Mosaddeq et en fait envoyer également le rapport à
62
Londres . Il ne fait pas allusion au rôle qu’il aurait eu pour faire cesser les
manifestations hostiles au shah.
Le lendemain du coup d’État, à midi, l’ambassadeur fait un récit
complet et circonstancié des événements dans un télégramme envoyé à
chaud à Washington 63. Il ne mentionne bien sûr à aucun titre une
quelconque participation américaine et insiste au contraire sur
l’enthousiasme et la spontanéité des manifestants (bel exemple de non-
fiabilité des correspondances diplomatiques dans l’écriture de l’histoire…).
Pour expliquer la relative facilité de ce renversement de tendance politique,
Henderson évoque la réaction de dégoût suscitée par les manifestations
communistes de la veille, le déboulonnage des statues des deux Pahlavi et la
violence du ton de l’éditorial de Fâtemi, le ministre des Affaires étrangères
de Mosaddeq, dans son propre journal, Bâkhtar-e emruz, où il dénonce de
manière outrancière la corruption de Rezâ Shâh et de son fils et leur
illégitimité. Henderson évoque également l’absence de toute manifestation
mosaddeqiste pour expliquer le « haut degré de spontanéité » des
manifestations pro-monarchistes. « Il est possible que les dirigeants du
Toudeh aient attendu avec confiance le moment opportun de cette journée
où ils seraient invités par le régime de Mosaddeq à lui venir en aide. Mais à
mesure que la manifestation [monarchiste] se déroulait, le régime de
64
Mosaddeq [n’était] plus en position de demander une telle aide . »
L’emploi du mot « régime » est significatif : jusqu’à maintenant Mosaddeq
était le chef du gouvernement, donc légitime. Il est devenu chef de
subversion.
Dans un télégramme écrit à Washington et de date incertaine (18 ou
19 août, l’original est perdu), la CIA insiste pour que le shah soit ramené au
plus vite à Téhéran et critique vivement son départ :
Si le shah était resté sur place et ne s’était pas enfui, s’il avait soutenu
Zâhedi par sa présence et avec conviction, le changement de gouvernement
se serait passé sans délai. L’échec venait en grande partie du fait que le shah
est parti subitement en laissant derrière lui deux morceaux de papier [les
deux firmans] dont la validité n’est pas très efficace en Iran, surtout quand
65
elle résulte de compromis .
Alors qu’il y avait eu, les jours précédents, des gestes hostiles ou des
violences contre des Américains et des étrangers suspectés de l’être, cette
fois, note Henderson à la fin de sa dépêche, aucun cri de « Yankees, go
home ! », aucune violence. La voiture de l’attaché naval de l’ambassade a
été arrêtée par la foule parce qu’elle n’avait pas la photo du shah sur son
pare-brise… il a suffi que le diplomate affiche un billet à l’effigie du
souverain pour que tout le monde l’applaudisse et lui ouvre la route.
Un point controversé du témoignage de l’ambassadeur américain
concerne l’arrêt des manifestations communistes dans les rues de Téhéran
le 18 août. Dans l’interview donnée en 1973, Loy Henderson laisse
entendre que c’est lui qui a exigé de Mosaddeq qu’il fasse cesser ces
66
agissements dont les Américains étaient parfois la cible . Le premier
ministre aurait téléphoné devant lui au ministre de l’Intérieur et obtenu le
retrait et le silence des communistes et des partisans du Front national… qui
avaient désormais laissé la rue aux monarchistes. Pourquoi Henderson
l’aurait-il dit si tard, et n’aurait-il pas mis en valeur l’effet de sa visite dans
la dépêche du 18 août ? Cette version (Mosaddeq aurait téléphoné devant
lui) est celle que les communistes ont eux-mêmes répandue et dont les
journaux iraniens de l’époque ont fait état. Elle a été démentie par
Mosaddeq lui-même (mais cette dénégation n’est pas totalement
67
convaincante) . Henderson en a fait plus tard sa version.
Les agents américains, repartis dès que possible, se retrouvent à
Washington après un passage à Londres. Ils délivrent à leurs supérieurs le
récit qui devient le récit officiel, mais top secret, où ils s’attribuaient le rôle
essentiel dans le succès du coup.
Après avoir écouté la version de Kermit Roosevelt à son retour de
Téhéran, le président Eisenhower écrit dans son journal : « Son récit
ressemblait plus à un roman d’aventure (a dime novel) qu’à un fait
historique. Quand nous réalisons que dans les premières heures du putsch
avorté tous les éléments de surprise avaient disparu du fait d’une trahison,
que le shah avait fui à Bagdad et que Mosaddeq semblait encore plus
solidement au pouvoir qu’avant, nous pouvons comprendre plus justement
combien notre agent a été courageux en restant correctement à son poste et
68
en continuant à travailler jusqu’à ce qu’il puisse inverser la situation . » La
satisfaction, à Washington, est totale. Le Directeur de la CIA parle d’une
opération exécutée « avec succès, de manière superbe », et félicite
personnellement Kermit Roosevelt pour « sa ténacité, son extrême
69
compétence et son courage »… après un « découragement temporaire ».
Un rapport mensuel du département d’État en septembre se termine par
cette profession de foi sur l’avenir des relations avec l’Iran : « … le
changement de gouvernement a permis d’améliorer considérablement les
contacts de la CIA dans les milieux politiques et militaires. Les capacités de
la CIA ont beaucoup progressé tant pour les programmes d’action politique
immédiate afin de soutenir le gouvernement actuel que pour les
programmes à long terme pour promouvoir la stabilité intérieure, le bien-
70
être général et l’orientation fermement pro-occidentale du pays . » Ce
triomphalisme n’a plus rien à voir avec les grandes déclarations anti-
impérialistes sur la domination britannique en Iran quelques mois
auparavant.
Même si, globalement, la population est plutôt rassurée par le retour du
shah et par une perspective de normalisation économique, il est clair que la
situation ne s’est pas rétablie toute seule. De la même manière qu’en 1921,
on avait immédiatement vu la main de Londres dans le coup d’État de Rezâ
Khân et de Seyyed Ziâ, cette fois on sait que les Américains – sinon les
Anglais eux-mêmes – sont intervenus. On raconte que des dollars circulent
dans le Bâzâr, les Behbahâni dollars, du nom d’un âyatollâh pro-
britannique 71. En tout cas, lorsque Mosaddeq rencontre l’ambassadeur
américain le soir du 18 août, il lui dit clairement qu’il tient les États-Unis
72
pour responsables du putsch manqué de l’avant-veille . Le lendemain,
Le Monde publie un reportage d’Édouard Sablier qui écrit notamment : « La
presse et l’opinion iraniennes désignent ouvertement l’Amérique comme
l’instigatrice du récent complot. Les murs de Téhéran se couvrent
d’inscriptions : “Yankees, go home !” ». La désignation des Américains
comme agitateurs derrière le soulèvement, précise-t-il, vient des
Soviétiques. Au même moment la presse américaine, à l’exemple du New
York Times, se plait à relater le risque de prise du pouvoir par les
73
communistes . Après la réussite du coup, le même journal suggère que
l’opération est contraire à ce que les Américains auraient souhaité : l’arrivée
de Zâhedi au pouvoir c’est un autre courant du nationalisme iranien qui
chasse Mosaddeq, une tendance tout aussi radicale, ce qui montre l’erreur
des diplomates américains quand ils disaient que la seule alternative au
communisme était le gouvernement de Mosaddeq.
Le 21 août, le ton du New York Times change totalement : c’est un
dictateur qui est renversé, et le shah, magnanime, exige qu’il soit traité avec
dignité. Zâhedi reçoit la démission de Mosaddeq et l’arrête avec respect,
malgré son accoutrement, souligné par le journal : le premier ministre
déchu est en pyjama (p. 1) ! Quant au souverain, pas encore rentré au pays,
il est présenté non plus comme un roi détrôné fuyant après l’échec de son
coup de force, mais comme un « ami de l’Occident, qui a donné la plus
grande partie de la fortune qu’il a héritée de son père pour aider son
peuple » (p. 3). « L’opposé de son père, Mohammad-Rezâ Shâh a mis en
place des réformes sociales et économiques comprenant un plan septennal
de développement commencé en 1949 avec l’aide des États-Unis, et a joué
le rôle d’un monarque constitutionnel. Sa philosophie est contenue dans une
déclaration faite avant le début de ce plan : “Nos tâches prioritaires,
aujourd’hui, consistent à défendre notre indépendance, garantir la justice et
les libertés et élever notre niveau de vie et le niveau d’alphabétisation.” »
(p. 3)
Le discours officiel, celui du shah, désigne l’événement non comme un
coup d’État, mais comme une insurrection loyaliste pour conjurer la dérive
dictatoriale et politiquement dangereuse de Mosaddeq. Son départ pour
Rome – loin selon lui d’être une lâche fuite – n’aurait eu pour but que de
dévoiler à l’opinion iranienne les ambitions démesurées du premier ministre
félon. La réaction « spontanée » de la population vient donc confirmer ce
pacte indestructible du souverain avec son peuple. Rien, dans son récit,
n’évoque le rôle qu’auraient pu jouer des services étrangers, britanniques ou
américains 74. (De manière semblable, le récit officiel du « sursaut
patriotique » de février 1921 omettait l’aide apportée par l’armée
britannique.)
Pourtant la version du shah n’est sans doute pas totalement fausse. Le
chercheur américain Richard Cottam, qui connait bien le Front national et
qui a constamment plaidé à Washington et à Téhéran pour l’intégrer dans la
construction d’une vie démocratique en Iran, demande aux nationalistes
iraniens d’ouvrir les yeux sur cet aspect du coup d’État : « C’est la
spontanéité du 19 août que les nationalistes iraniens doivent reconnaître
s’ils veulent jamais comprendre la signification du 28 mordâd [nom de
l’événement dans le calendrier persan]. Indépendamment du rôle
d’éléments étrangers, Mosaddeq n’aurait pas pu être renversé si des
éléments significatifs de la population n’avaient pas perdu confiance en ses
75
qualités de leader . » Interrogé vingt ans après l’événement sur le rôle qu’y
avait eu la CIA, l’ambassadeur Henderson ne nie pas que la CIA a pu
intervenir à un moment ou à un autre, mais, ajoute-t-il : « Aussi habile que
soit la CIA, elle n’aurait pu organiser le renversement de Mosaddeq si le
76
peuple iranien n’avait pas été massivement en faveur du retour du shah . »
Il est difficile de trouver un discours historique iranien avant 1979 qui
documente l’implication américaine dans le coup d’État. Après la
Révolution, un manuel destiné aux élèves officiers de la République
islamique s’attarde lourdement sur l’aveuglement de Mosaddeq après la
rupture avec l’âyatollâh Kâshâni. Il insiste sur la fameuse lettre datée du
18 août 1953 (27 mordâd, la veille du coup d’État) où Kâshâni, après avoir
rappelé à Mosaddeq tous ses griefs contre lui, lui aurait proposé son aide
pour contrer le coup d’État imminent. Si l’authenticité de cette lettre était
confirmée, ce dont je suis moins sûr aujourd’hui, elle contient une phrase
intéressante montrant le sentiment qui prévaut alors : « … comme je l’ai fait
remarquer à Henderson [l’ambassadeur américain], l’Amérique nous aura
aidés à reprendre le pétrole des mains des Anglais et maintenant avec
l’apparence de la nationalisation et d’une structure plus acceptable dans
l’opinion mondiale, elle veut reprendre de vos mains (il s’adresse à
Mosaddeq) cette richesse qui nous appartient et si vous ne voulez
absolument pas vous effacer dans les formes diplomatiques… [ils agiront
par un coup d’État dont je vous aurai prévenu] 77. »
La présentation assez réaliste de Henderson, qui relève la conjonction
d’intérêts entre certains Iraniens (guidés par le clergé ou monarchistes) et
les Occidentaux, contredit l’explication complotiste généralement donnée
par les Iraniens, qui se résume en une simple phrase : « Ils ont orchestré un
coup d’État ». « Ils », ce sont les étrangers, en l’occurrence les Américains.
Cette explication paranoïaque est reprise par les preneurs d’otages en 1979.
Un complotisme, après tout, assez naturel : quand on veut fermer les yeux
sur sa propre faiblesse, en Iran comme ailleurs, on accuse les autres, une
attitude alimentée en l’occurrence par les Américains eux-mêmes.
Un rapport ultra-secret, interne à la CIA, a en effet été rédigé par
Donald Wilber après le retour en Amérique de tous les agents qui avaient
participé à l’opération AJAX. Ce rapport, publié d’abord en 2000 dans une
version caviardée, pour que les noms des Iraniens ayant aidé la CIA ne
soient pas révélés, a été par la suite publié intégralement. Il est à la source
du discours du Caire où, le 4 juin 2009, le président Obama a publiquement
reconnu le rôle des Américains dans le renversement de Mosaddeq :
« Pendant de nombreuses années, l’Iran s’est défini en partie par son
opposition à mon pays et il existe en effet un passé tumultueux entre nos
deux pays. En pleine guerre froide, les États-Unis ont joué un rôle dans le
renversement d’un gouvernement iranien démocratiquement élu 78. » Ce
rapport donne la structure de l’événement tel que des historiens comme
Mark Gasiorowski ou Ali Rahnema l’exposent aujourd’hui.
On cherche, depuis la Révolution islamique, à montrer du doigt
l’intervention américaine dans le renversement d’un gouvernement
rétrospectivement idéalisé et tout indice devient immédiatement une preuve.
Le clergé khomeyniste qui a pris le pouvoir tente en effet de donner une
image négative de Mosaddeq. Sa diabolisation permet de s’opposer, en
1979, aux derniers nostalgiques du Front national, Bâzargân ou Banisadr,
qui contestent le monopole du pouvoir clérical sur la République islamique
au nom d’une idéologie nationaliste laïque et libérale. Mais pour les contrer
efficacement, il faut aussi lutter contre la référence constante de leur
discours : Mosaddeq peut-il servir de modèle politique pour remplacer le
régime impérial ? Quelle est la réalité historique du personnage et quelle est
79
la nature de sa relation au clergé ? Les khomeynistes ne l’appellent plus
que Mosaddeq os-Saltana (litt. « celui qui confirme la royauté »), lui
restituant par dérision le titre nobiliaire dont il a tiré son patronyme quand,
au début de la dynastie Pahlavi, tous les anciens titres de l’époque qâjâr ont
été supprimés. Mosaddeq est pour eux coupable d’avoir combattu la
dictature des Pahlavi au nom d’un idéal encore plus occidental, celui des
libertés démocratiques, celui de l’homme débarrassé de l’empreinte du
divin. Pour marquer leur réprobation du culte voué par les nationalistes à
Mosaddeq, les religieux font remplacer les noms de rues ou lieux publics
qui, au lendemain de la révolution, avaient été renommés en référence à
Mosaddeq.
Que reprochent-ils précisément à l’ancien leader nationaliste ? La
rupture d’une alliance. L’âyatollâh Kâshâni avait soutenu efficacement le
premier ministre et avait même galvanisé les foules lors des manifestations
du 21 juillet 1952 qui contraignirent le shah à rappeler Mosaddeq après un
court intermède. Depuis la Révolution constitutionaliste de 1906-1909,
c’était la première fois que les libéraux nationalistes s’étaient alliés avec les
religieux. Mais Mosaddeq, aristocrate laïc formé en Europe, n’admet pas les
pressions de Kâshâni pour islamiser l’Iran, encore moins son insistance
pour choisir lui-même certains ministres. La rupture entre les deux
hommes, on l’a vu, est exploitée par les services britanniques puis
américains. Kâshâni a l’avantage d’avoir d’excellentes relations avec les
négociants du Bâzâr et également avec les jeunes militants islamistes
radicaux, les Fedâ’iân-e eslâm, responsables de plusieurs attentats
meurtriers. Ruhollâh Khomeyni compte parmi les proches de Kâshâni. Le
soutien personnel de Kâshâni au général Zâhedi et à certains des acteurs
iraniens du coup d’État, et son insistance, immédiatement après le
renversement du premier ministre, pour qu’il soit jugé et condamné à mort
pour trahison d’État restent dans les mémoires, faisant de Kâshâni la bête
noire des mosaddeqistes : la haine entre nationalistes libéraux et islamistes
est mutuelle et réciproque.
De manière corollaire, pouvoir rejeter sur les Américains toute la
responsabilité du coup d’État anti-Mosaddeq est utile au clergé
khomeyniste de 1979 pour faire oublier le rôle des mollâs dans le retour
triomphal du shah, un sujet devenu hautement tabou dans la révolution.
Tous les religieux iraniens n’avaient pas suivi cette ligne hostile à
Mosaddeq. Le plus élevé alors dans la hiérarchie cléricale shi’ite,
l’âyatollâh Hoseyn Borujerdi (1875-1961), se donnait comme ligne de
conduite de ne jamais prendre position dans le domaine politique. Il fit
quelques exceptions à cette règle vers la fin de sa vie, quand il s’opposa à la
réforme agraire. Mais à l’époque de Mosaddeq, sauf peut-être au moment
du coup d’État comme on le verra, il resta neutre.
Beaucoup de musulmans, clercs ou non, continuaient de rester fidèles à
l’islam sans renier leur soutien actif à Mosaddeq, et désavouaient Kâshâni.
Parmi les clercs, on peut citer ici les deux frères Abo-l’Fazl et Rezâ Zanjâni
et le célèbre âyatollâh Mahmud Tâleqâni. Parmi les non-clercs, outre
Bâzargân et Banisadr qui joueront un rôle politique majeur après la
révolution, on peut également citer Ali Shariati (m. 1977), un intellectuel
musulman qui n’a jamais caché son admiration pour Mosaddeq.
Il est nécessaire de rappeler ces divergences pour comprendre l’audace
d’une interprétation récente de l’événement. Après les révélations des
rapports de la CIA en 2000 et les publications américaines assumant la
responsabilité du putsch, il était devenu monnaie courante pour les
khomeynistes, de critiquer Mosaddeq et de décharger le clergé de la
responsabilité du coup d’État. Un historien a pourtant osé mettre en
question cette version des faits, à la suite d’une analyse minutieuse.
Darioush Bayandor comprend, en lisant le document de la CIA, que
80
Donald Wilber donne un rapport déformé sur l’événement . D’une part,
contrairement à l’ordre qu’on leur notifie de Washington (et de Nicosie où
était la base-relais de l’équipe du projet TPAJAX), les agents impliqués
dans la préparation du coup d’État ne peuvent pas quitter Téhéran après le
16 août en raison de la complète désorganisation du pays. Or, deux jours
après leur échec, une mobilisation populaire assistée par l’armée vient à
bout du gouvernement Mosaddeq. Peuvent-ils raconter à tout le monde
qu’ils n’y sont pour rien ? Passant par Londres quelques jours plus tard sur
le chemin du retour, ils s’empressent de construire un récit où leur présence
obstinée – malgré l’échec apparent de l’opération le 16 août – aboutit au
succès du coup d’État. (Il est naturel qu’en de telles circonstances on
s’attribue le mérite principal d’un événement qui a réussi ; en 1921, de la
même manière trois acteurs, Seyyed Ziâ, Rezâ Khân et le général Ironside
s’attribuent chacun le rôle déterminant dans le succès du coup d’État, dans
des récits incompatibles les uns avec les autres et en occultant chacun
complètement le rôle de l’un des trois.) Le récit, uniquement destiné à une
lecture interne, de Donald Wilber, écrit en 1954, ne fait qu’amplifier et
officialiser cette reconstruction de l’événement : pour la toute nouvelle
agence de renseignement et d’intervention, la CIA, il faut absolument
montrer son rôle déterminant dans le rétablissement de l’ordre à Téhéran
pour justifier la poursuite de son financement.
On comprend l’autojustification des agents américains. L’opinion
iranienne, avide d’attribuer à des interventions extérieures un événement
qu’elle a beaucoup de mal à digérer, n’attend pas la publication du rapport
de Wilber pour pointer du doigt Londres et Washington. Mais que des
chercheurs et universitaires américains reprennent le récit falsifié comme
une source inébranlable sans l’analyser, c’est déjà moins facile à accepter. Il
est aussi regrettable qu’un chercheur iranien travaillant à la fois sur des
sources iraniennes et occidentales restitue à la lettre toutes les sources
occidentales sans les questionner et dénie aux Iraniens la moindre parcelle
d’initiative dans un événement qui va dominer la vie politique de leur pays
pendant un quart de siècle. L’idéalisation du leader suprême conduit ainsi à
des affirmations qui font sourire : « Mosaddeq avait de nombreux défauts,
mais durant son exercice du pouvoir, il était devenu le seul politicien avec
lequel autant d’Iraniens étaient entrés dans une relation mi-affective mi-
rationnelle basée sur l’amour et le respect 81. » Le portrait du bon prince
aimé de son peuple, un chevalier généreux et saint, est l’exact opposé du
portrait, selon les sources britanniques, d’un être démoniaque animé
exclusivement par la haine, le ressentiment et la xénophobie. N’est-il pas
étonnant d’imaginer qu’un peuple qui se serait donné un tel leader aurait
ainsi accepté de se laisser manipuler par une puissance étrangère jusqu’à se
trouver dépossédé de son trésor. Il est fort possible que le shah, Kâshâni et
d’autres Iraniens aient eu, très tôt, la même intention que les Britanniques :
en finir le plus tôt possible avec celui qui gênait le règlement de la crise… Il
est excessif de rejeter sur les Britanniques la responsabilité exclusive de
l’échec des tentatives de négociation, quand Mosaddeq, d’une méfiance
maladive devant les sorties de crise qu’on lui présente, se contredisait
souvent et revenait sur sa propre parole. D’autre part, les affirmations
péremptoires selon lesquelles le premier et le second coup d’État (celui
manqué du 16 août et celui du 19) auraient été exclusivement organisés et
programmés par la CIA et le SIS ne tiennent pas compte des impondérables
de l’histoire, des responsabilités historiques invisibles, des réactions
imprévisibles de la foule aux erreurs du parti Toudeh, en un mot ne
mesurent pas l’événement avec assez de distance.
Il est intéressant de noter la prudence de l’ambassadeur Henderson,
deux jours après le succès final, quand il prie le département d’État de ne
pas pavoiser concernant le rôle de ses compatriotes dans la victoire de
Zâhedi. En effet, écrit-il :
a) Il n’est pas dans l’intérêt des États-Unis sur le long terme d’être crédités
pour avoir eu un rôle dans l’évolution de la politique intérieure de l’Iran,
même si ces développements sont à l’avantage de l’Iran ; b) le
gouvernement Zâhedi sera embarrassé si le sentiment qu’il est une création
des étrangers se généralise ; c) le gouvernement Zâhedi va, comme c’est
habituel en Iran, devenir très vite impopulaire et alors on blâmera les États-
82
Unis de l’avoir fait exister .
De ce télégramme, Ali Rahnema tire un argument en faveur du complot
dans lequel les Iraniens seraient doublement instrumentalisés, puisqu’on va
leur prêter une responsabilité usurpée pour un putsch qui se serait fait
contre leur volonté. Dans une explication complotiste, il réfute tout partage
des responsabilités :
*
Le renversement de Mosaddeq, attribué généralement aux Américains,
est une blessure au cœur de l’unité nationale, même si le soutien à
Mosaddeq s’était beaucoup étiolé en août 1953. En Iran, le discours qui
diabolise la puissance impériale américaine comme seule responsable du
coup d’État est un dogme sur lequel il est utile de s’appuyer, en particulier
aujourd’hui pour faire oublier les compromissions du clergé. On entend
encore dans les milieux monarchistes des interprétations très divergentes
qui tendent à minimiser l’intervention américaine, souvent comme
plaidoyer pour faire oublier les erreurs du passé 88.
Le basculement américain qui s’achève le 19 août 1953 est
remarquable : en 1942, Washington n’avait pas de mots assez durs pour
caractériser l’impérialisme britannique et le cynisme avec lequel, aidés par
des élites locales corrompues, les Anglais ont pillé les ressources et
manipulé la vie politique. C’est à la demande britannique et avec le
concours du MI6 que la CIA a préparé un coup d’État. Désormais, avec une
certaine modernisation des méthodes, l’impérialisme américain a pris le
relais.
Dès le mois de septembre 1953, il devient clair que le pétrole iranien
restera nationalisé et que c’est un consortium, officiellement créé le 9 avril
1954, qui va partager l’exploitation. Les Britanniques gardent 40 % pour
une société qui ne s’appelle plus AIOC mais British Petroleum Company,
les Américains gagnent 40 % répartis entre cinq compagnies, les Hollandais
(Royal Dutch-Shell) 14 %, et les Français (Compagnie française des
pétroles) 6 %. L’internationalisation de l’exploitation du pétrole maintenait
aux mains des étrangers les décisions importantes sur les investissements et
les niveaux de production.
Mais ce n’était pas la seule conséquence du coup d’État. Les
Américains ont consolidé leur influence dans l’armée, formant les pilotes,
encadrant les officiers, vendant du matériel toujours plus massivement. Ils
ont entraîné l’Iran dans une alliance protégeant la région contre l’influence
soviétique, grâce au pacte de Bagdad (devenu plus tard CENTO : Turquie,
Iran et Pakistan). La police politique, appelée SAVAK (Organisation du
renseignement et de la sécurité du pays), est formée à partir de 1957 avec
l’aide des services américain et israélien, dans une orientation
anticommuniste. L’État iranien est resté formellement indépendant, mais la
protection américaine a progressivement pris la forme d’une vassalisation.
La vie politique iranienne, qui reste en apparence réglée par la
Constitution de 1906-07, est plombée par l’illégitimité du shah. Aucun des
opposants politiques ne peut véritablement dialoguer avec celui qui doit son
pouvoir à un coup de force orchestré par une puissance étrangère. D’ailleurs
ni le Parlement ni aucun média ne peut désormais leur offrir une tribune. La
répression empêche l’opposition nationaliste libérale (le Front national), la
gauche communiste (le Toudeh) et les religieux de participer au débat
démocratique, ce qui ouvre la voie à la clandestinité, aux groupes radicaux,
à la violence politique.
L’image d’une Amérique modèle de modernité et de réussite
industrielle, défenseur des libertés et de la légitimité démocratique apparaît
progressivement comme le masque cachant le visage hideux de
l’impérialisme.
Â
38. F. RUHÂNI, Târix-e melli shodan-e san’at-e naft-e Irân, pp. 169, 228 et 235. Sur l’insistance
américaine auprès des Britanniques pour un règlement amiable, dès mai 1951, voir J. H. BAMBERG,
The History of the British Petroleum Company, vol. 2, pp. 422 sq. Voir également H. GRADY,
« What went wrong in Iran ? ».
39. « You do not know how crafty they are. You do not know how evil they are. You do not know
how they sully everything they touch. » in V. Walters, Silent Missions, p. 247. Walters accompagnait
Harriman à Téhéran comme traducteur. Voir aussi M. ELM, Oil, Power, and Principle, p. 129.
40. M. ELM, Ibid., chap. Sur la mission Harriman, voir FRUS 1952–1954, Iran, 1951–1954,
Volume X, documents 41 à 91.
41. Voir FRUS, 1952-1954, Iran, 1951-1954, vol. X, document 197, lettre de l’ambassade
britannique à Washington au département d’État, 9 août 1952.
42. Télégramme au Foreign Office du 28 juillet 1952, in J. H. BAMBERG, The History of the
British Petroleum Company, vol. 2, p. 473.
43. Voir FRUS, 1952-1954, Iran, 1951-1954, vol. X, document 211 : l’ambassadeur en Iran
(Henderson) au département d’État, 27 août 1952. Le rapport envoyé à Londres par Middleton est
nettement plus négatif, cf. J. H. BAMBERG, The History of the British Petroleum Company, vol. 2,
pp. 475 sq. Bamberg, en écho aux diplomates britanniques, donne un portrait systématiquement
noirci de Mosaddeq et de ses humeurs imprévisibles.
44. Texte in Y. ALEXANDER et A. NANES (éd.), The United States and Iran, pp. 227-228 ; FRUS,
1951-1954, Iran 1951-1954, vol. X, document 214, l’ambassadeur en Iran (Henderson) au
département d’État, 30 août 1952 (sans le texte de la proposition).
45. FRUS, 1951-1954, Iran 1951-1954, vol. X, document 211 : télégramme de l’ambassadeur en
Iran (Henderson) au secrétaire d’État, 27 août 1952 ; J. H. BAMBERG, The History of the British
er
Petroleum Company, vol. 2, p. 476. La livre valait 2,8 dollars (The New York Times, 1 octobre 1952,
p. 51).
46. J. H. BAMBERG, The History of the British Petroleum Company, vol. 2, pp. 479 sq. ; FRUS,
1951-1954, Iran 1951-1954, vol. X, document 256 : le secrétaire d’État à l’ambassade américaine au
Royaume-Uni, 29 décembre 1952.
47. Department of State Bulletin, 20 juillet 1953, p. 75 (dans un dossier contenant la correspondance
Eisenhower-Mosaddeq également repris dans Y. ALEXANDER et A. NANES (éd.), The United
States and Iran, pp. 230 sq.).
48. M. ELM, Oil, Power, and Principle, p. 271.
49. Ibid., p. 282 ; FRUS, 1951-1954, pdf, p. 480 sq., réunion du NSC du 4 mars 1953. Même
position exprimée devant Anthony Eden, ministre britannique des affaires étrangères en visite à
Washington, 6 mars 1953, FRUS, 1952–1954, Western Europe and Canada, Volume VI, Part 1,
document 381.
50. Md-R. PAHLAVI, Ma’muriat barâ-ye vatan-am, p. 159.
51. FRUS, 1951-1954, Iran 1951-1954, vol. X, document 191 ; FRUS, 1951-1954, pdf, p. 305
(l’ambassadeur en Iran, Henderson, au département d’État, 31 juillet 1952) ; Middleton, télégramme
du 28 juillet 1952, Royaume-Uni, National Archives, FO 371/Persia 1952/34-98602.
52. M. J. GASIOROWSKI, « The 1953 Coup d’État against Mosaddeq », pp. 235 sq. TP fait
référence au parti Toudeh.
53. Y. ALEXANDER et A. NANES (éd.), The United States and Iran, p. 211.
54. E. R. ONEY, Interview, p. 13.
55. Sur la corruption de Qavâm, voir le discours au Sénat de Mahdi Farrox, 22 âbân
1330/14 novembre 1951, relaté par Henderson, FRUS, 1951-1954, p. 153 ; Henderson, télégramme
du 31 mars 1952, FRUS, 1951-1954, pdf, p. 225 ; télégramme du 12 juin 1952, FRUS, 1951-1954,
p. 246. Les discussions sur le choix d’un premier ministre font intervenir un spécialiste britannique,
voir FRUS, 1951-1954, pdf., pp. 232 sq.
56. FRUS, 1951-1954, pdf, pp. 258 sq.
57. Télégramme de la CIA (Washington) au poste à Téhéran, 18 août 1953, FRUS, 1951-1954, pdf,
document 278, p. 690.
58. K. ROOSEVELT, Countercoup, pp. 145 sq. Récit par la princesse elle-même, A. PAHLAVI,
Visages dans un miroir, pp. 148 sq.
59. Télégramme 488, Bagdad au Foreign Office, 17 août 1953, reproduit in A. ZÂHEDI, Xâterât, I,
pp. 452-453.
60. Télégramme de l’ambassadeur américain en Irak (Berry) au département d’État, 17 août 1953,
FRUS, 1951-1954, pdf, document 271, p. 679.
61. Télégramme de l’ambassade américaine en Irak au département d’État, 17 août 1953, FRUS,
1951-1954, pdf, document 271, p. 678.
62. Télégramme de l’ambassade à Téhéran au département d’État, 18 août 1953, FRUS, 1951-1954,
pdf, p. 691.
63. Télégramme de l’ambassade à Téhéran au département d’État, 20 août 1953, FRUS, 1951-1954,
pdf, pp. 699 sq.
64. FRUS, 1951-1954, pdf, p. 702. Movahhed remarque l’importance de ce point. Voir infra.
65. Télégramme de la CIA (Washington), « 19 août 1953 », retranscrit d’un microfilm qui a été
détruit, FRUS, 1951-1954, pdf, pp. 699 sq.
66. L. W. HENDERSON, Oral History Interview, p. 212 ; K. ROOSEVELT, Countercoup, p. 185 ;
A. RAHNEMA, Behind the 1953 Coup in Iran, p. 149. Dans le télégramme du 20 août 1953,
Henderson se contente de dire laconiquement : « Mosaddeq ordered streets cleared and cessation of
demonstrations » (FRUS, 1951-1954, pdf, p. 700). Voir également D. BAYANDOR, Iran and the
CIA, pp. 107 et 135, qui pointe la contradiction des deux récits de Henderson.
67. Voir Md-A. MOVAHHED, Xâb-hâ-ye âšofta-ye naft, II, p. 837.
68. Eisenhower Library, Whitman File, DDE Diary Series, Box 1, en date du 8 octobre 1953, cité in
FRUS, 1951-1954, Note de synthèse, pdf, p. 787.
69. FRUS, 1951-1954, pdf, document 292, p. 709, télégramme de la CIA (Washington) au poste en
Iran, 20 août 1953.
70. FRUS, 1951-1954, pdf, document 326, p. 785, rapport mensuel septembre 1953, § 6.
71. R. W. COTTAM, Nationalism in Iran, p. 226.
72. L. W. HENDERSON, Oral History Interview, p. 210 de la transcription.
73. Voir par exemple The New York Times, 18 août 1953, pp. 1 et 5, « Statues of Shahs torn down in
Iran. » ; 19 août, pp. 1 et 6, « Extremist rioters in Tehran fought by police and army ».
74. Md-R. PAHLAVI, Ma’muriat barâ-ye vatan-am, pp. 189 sq.
75. R. W. COTTAM, Nationalism in Iran, p. 229. Sur Cottam, voir M. J. GASIOROWSKI,
« Obituaries : Richard W. Cottam (1924-1997) », Iranian Studies, 30 (3-4), 1997, pp. 415-417 ;
E. R. ONEY, Interview, p. 20.
76. « No matter how skilled the CIA might be, it could not have engineered the overthrow of
Mossadegh if the people of Iran had not overwhelmingly been in favor of the return of the Shah »
(L. W. HENDERSON, Oral History Interview, p. 217 de la transcription).
77. Sd J. MADANI, Târix-e siâsi-e mo’âser-e Irân, I, p. 280. Voir aussi Y. RICHARD, « Ayatollah
Kashani : Precursor of the Islamic Republic ? », pp. 114 sq. L’authenticité du document a été
contestée par différents historiens iraniens. S’il est authentique, cela ne serait qu’une copie puisque
les archives de Mosaddeq ont disparu dans sa maison le 19 août.
78. Barack Obama, « A new beginning », Université du Caire, 4 juin 2009,
https://obamawhitehouse.archives.gov.
79. Y. RICHARD, « Base idéologique du conflit entre Mosaddeq et l’âyatollâh Kâshâni ». Il n’y a
pas lieu ici de décrire la littérature haineuse du Parti de la République islamique contre Mosaddeq,
notamment les livres de Mahmud KŠÂNI (fils de l’âyatollâh), Qiâm-e mellat-e mosalmân-e Irân,
si-e tir 1331, [Tehrân, Xuša, 1359/1981], ou de Hasan ÂYAT, Čehra-ye haqiqi-e Mosaddeq os-
Saltana, Qom, Eslâmi, 1360/1982.
80. D. BAYANDOR, Iran and the CIA. Deux versions du rapport existent, celle rédigée par
D. WILBER, Clandestine Service History, et le compte rendu du ‘debriefing’ à Wawhington par les
cadres de la CIA le 28 août 1953, FRUS, 1951-1954, pdf, document 307, pp. 733 sq. R. HELMS,
Interview, p. 4 ; A. ZÂHEDI, Xâterât, I, p. 269.
81. A. RAHNEMA, Behind the 1953 Coup in Iran, p. 289.
82. FRUS, 1951-1954, document 351, Henderson au département d’État, 22 août 1953. Voir
A. RAHNEMA, Behind the 1953 Coup in Iran, p. 296.
83. Ibid., p. 297. Rahnema écrit « Making 28 Mordad a legal and Iranian event… demonizes the
target of the coup… » ; j’ai traduit « demonetizes the target of the coup ».
84. H. MONTAZERI, Xâterât-e âyatollâh Montazeri, p. 66 ; D. BAYANDOR, Iran and the CIA,
p. 151.
85. H. MONTAZERI, Xâterât-e âyatollâh Montazeri, p. 65.
86. « Religious leaders now desperate. Will attempt anything. Will try save Islam and Shah of Iran »
o
(télégramme du poste à Téhéran à la CIA, n 273, 17 août 1953, FRUS, 1951-1954, pdf, p. 683).
87. D. BAYANDOR, Iran and the CIA, p. 153.
88. Cf. A. ZÂHEDI, Xâterât, I, p. 165 insiste pour minimiser le rôle de la CIA et suggère même que
l’initiative du coup viendrait d’une conversation de son père avec le shah et la reine Sorayâ.
La dépendance
Le pétrole et les « Anglais »
16
C’était un recul, mais en bon ordre, non une débandade . Amini avait
auparavant dirigé, pendant la guerre, une mission commerciale aux États-
Unis et il avait participé au gouvernement Qavâm os-Saltana comme
conseiller, puis comme ministre des Finances dans le deuxième
gouvernement Mosaddeq (octobre 1951-juillet 1952), et il fut pressenti pour
17
le même poste dans le gouvernement Zâhedi au lendemain du coup d’État .
Les relations de confiance établies par Amini avec les Américains ne sont
sans doute pas étrangères à sa nomination, en janvier 1956, comme
ambassadeur à Washington. C’est une sorte de récompense qu’il aurait
18
obtenue pour son rôle dans la négociation . (On retrouvera le Dr Amini
plus tard quand j’aborderai la vie politique, il est à la charnière de
l’ingérence politique américaine et son rôle met en lumière les
débordements constitutionnels du shah.)
Les cinq sociétés américaines participant au consortium abandonnèrent
plus tard chacune 1 % du total afin de faire entrer une nouvelle société,
appelée Iricon, qui rassemblait des petites compagnies indépendantes, une
manière de ménager les apparences de la libre concurrence 19. Globalement,
on peut dire que cette première année après le renversement de Mosaddeq a
été plus que bénéfique pour les Américains.
Malgré le net recul des Britanniques et leur marginalisation à la fois
politique et économique dans tout ce processus, ils continueront, jusqu’à la
République islamique, à porter le poids de leur conduite du passé et une
grande partie de l’opinion iranienne leur attribue d’emblée la responsabilité
de tout ce qui arrive de mal dans le pays. On continue à les y appeler Englis
(dans le langage populaire, Ingilis ou même Ingiriz), comme si une seule
ethnie du Royaume-Uni portait le fardeau de cet héritage impérial. Le flou
historique qu’ont répandu les Anglais autour de leur royaume en voie de
désunion dans les îles Britanniques et au-delà, cette Grande-Bretagne
insaisissable gouvernée sans Constitution par un souverain dénué de tout
pouvoir, n’a pas d’équivalent dans le monde. Les États-Unis ont également
leur glissement trompeur : ce n’est qu’une fédération de cinquante États
qui, en se faisant appeler « Amérique », « Américains », entretiennent aussi
le flou sur leurs frontières et leur réelle identité politique. Les Iraniens,
depuis la chute de Mosaddeq, sont fascinés par ces Américains, leur sens de
l’efficacité, leurs faibles scrupules quand il s’agit de gagner des marchés, de
faire fructifier la Bourse et d’imposer au monde leur modèle par le cinéma
et la publicité. Ils ne rêvent que d’envoyer leurs enfants dans leurs
universités somptueusement dotées où les meilleurs vont enrichir encore
une économie arrogante. Et la détestation hystérique de l’Amérique s’est
d’autant plus développée qu’on avait d’abord été séduit par l’humanisme de
façade, la défense des libertés et des droits de l’homme, autant de valeurs
dont les Iraniens ont trop souvent été privés.
… nous traitons dans ce pays avec un individu, le shah, d’une qualité très
incertaine (of very uncertain quality). Or, de toute évidence, le shah, malgré
ses liens avec la classe des grands propriétaires terriens, évolue
actuellement dans la bonne direction (a new and desirable direction). C’est
le résultat d’incitations amicales des États-Unis plus que de pressions et de
harcèlement sur le shah. Ce dernier est tellement capricieux
(temperamental) que le département d’État a eu peur que, si on avait mis la
pression sur lui, il ait bien pu nous envoyer au diable et se mettre à jouer
51
avec l’autre camp .
Les buts que nous visons et qui sont à long terme dans l’intérêt des Iraniens
sont globalement compatibles et presque identiques avec ceux que le
nouveau premier ministre a déclarés publiquement comme son programme.
Nous devons donc lui donner tous nos encouragements et notre soutien.
Aucun diplomate ne sera assez fort pour lui redonner confiance. C’est
une rencontre en tête à tête avec le président Kennedy que demande le shah,
avant l’échéance envisagée d’octobre. En cédant à ce caprice, les
Américains anticipent l’échec de leur politique avec Amini. La décision de
renvoyer ce premier ministre trop nettement soutenu par Washington
semble prise dès le début mars 1962, c’est une manière pour le shah de
montrer son indépendance.
Il fallait d’urgence rééquilibrer le sentiment que le président Kennedy
aurait en Amini son protégé à Téhéran, et montrer au shah que lui seul
incarnait la permanence de l’État et des liens stratégiques. La visite fut
fixée, pour complaire au souverain, du 10 au 18 avril 1962.
Concernant les crédits militaires, l’ambassadeur à Téhéran réagit
vivement en faisant valoir que, si l’intention de Washington était de faire
réduire la taille de l’armée iranienne de 205 000 hommes à 150 000…, il
fallait que la modernisation du matériel et la concrétisation de l’assistance
militaire en cas d’attaque extérieure soient à la hauteur, et non pas un
125
simple appât (bait, glamor) pour tromper le shah .
On pourrait conclure que sur les points essentiels du programme
américain pour soutenir Amini les résultats n’ont pas été atteints. Et
pourtant, près d’un an après la mise en place de l’Iran Task Force, il semble
que les mots d’ordre soient inchangés. Les grandes réformes (distribution
des terres aux paysans) stagnent, la collecte de l’impôt sur le revenu reste
inefficace, l’armée reste pléthorique, et surtout le shah continue d’être
omniprésent, et autour de lui la corruption impossible à démanteler.
L’absence de parlement n’a pas donné plus d’efficacité au gouvernement.
Or l’ITF continue de délivrer ses directives impériales. Le résumé des
consignes politiques du 15 mars 1962, qui ne fait qu’amplifier les lignes
directrices, est intitulé : « Pour le renforcement de l’unité politique, la
modernisation économique et sociale et l’intégrité nationale de l’Iran ». Cet
intitulé fourre-tout indique combien les Américains ont pris à cœur de
défendre l’Iran, en présupposant que les Iraniens ne le font pas. Il y est
question de :
Oui, nous avons essayé d’offrir notre contribution de deux sous afin de le
conseiller sur les choses que nous estimions dangereuses ou peu
judicieuses. Mais fondamentalement, c’était son programme. Et ses
problèmes concernaient d’abord ses relations avec le shah. Le shah n’aimait
pas que nous donnions des avis non sollicités (gratuitous) à ses hommes.
Nous étions généralement attentifs à ça. Il y a des pays où nous dirigeons le
premier ministre, nous écrivons ses discours, etc. L’Iran n’était pas de ces
128
pays .
Il n’était pas par nature un dictateur, mais si l’Iran doit réussir, son
gouvernement devra agir avec fermeté pour un temps ; et il savait bien que
les États-Unis n’insisteraient pas pour que l’Iran fasse tout dans des formes
134
absolument légales .
Comme il l’a dit au président, son caractère personnel n’a rien de celui d’un
dictateur, car à la longue les dictateurs ne peuvent pas durer. Mais il doit
donner à son peuple la base sur laquelle il pourra construire.
Le shah commence à réaliser que son rôle, de plus en plus celui d’un
monarque absolu, ne lui attire pas dans la population le bénéfice d’espoir,
de confiance ou de soutien qu’il aurait aimé. Sa première réaction est
d’intensifier la politique du “diviser pour régner”. Et, jusqu’à un certain
138
point, d’encourager ce qui peut contrebalancer l’influence américaine .
En Iran, nous devons accepter le shah, malgré ses défauts, comme un acquis
positif. Nous devons coopérer avec lui et l’influencer du mieux que nous
pouvons, car nous n’avons pas d’alternative acceptable. Nous devons
continuer à l’inciter aux réformes sociales pour l’empêcher de perdre
154
l’affection des masses populaires .
[…] mais en le poussant bien plus fort dans la direction que nous pensons
qu’il doit prendre, lui donner une solide orientation (a strong lead), au lieu
de nous courber devant ses fantaisies. Faire pression sur lui au moment
opportun pour qu’il nomme un autre premier ministre réformiste. Le
meilleur serait encore Amini : « peut-être devrions-nous le remettre à jour »
(perhaps we should start re-grooming him). Nous ferons pression sur ce
type également, en le conseillant et là où c’est nécessaire, avec de l’aide 157.
La SAVAK
Le lien du shah avec les officiers de l’armée et de la sécurité passe par l’un
de ses plus vieux amis, le général Hoseyn Fardust. Il est l’un de ceux qui
avaient été choisis pour être élevés avec Mohammad-Rezâ [le futur shah]
dans l’école élémentaire spéciale qui avait été fondée dans ce but. On sait
peu de choses sur le contexte familial de Fardust : son père était un sergent,
plus tard promu capitaine, qui a probablement été associé avec Rezâ
[Pahlavi] avant le couronnement de ce dernier : il aurait été l’ordonnance de
Rezâ Shâh. Hoseyn Fardust accompagna le [futur] shah à l’école du Rosey
en Suisse et à l’École militaire à Téhéran. Sauf pendant une brève période,
il a toujours eu des postes importants et jouissait d’une grande autorité
même si ses promotions militaires n’ont été obtenues qu’au rythme normal.
Mohammad-Rezâ a pu l’utiliser dès 1941 pour faire la liaison avec
l’ambassade allemande. Fardust a depuis le début dirigé le Bureau spécial
de renseignement du shah, et a été parallèlement sous-directeur de la
SAVAK. Présentement [1976] il dirige également l’Inspection impériale qui
fonctionne comme le chien de garde du shah pour surveiller les activités du
gouvernement. Il est calme, sans prétention et très méticuleux dans
l’accomplissement de ses missions. Fardust est à l’aise financièrement, mais
on le dit personnellement honnête. Il dit lui-même : « Tout ce que j’ai, je
168
l’ai par la grâce du Palais . »
— Sire, diverses autres sources soutiennent que des tortures sont infligées
dans les prisons iraniennes…
— Le malheur avec nos adversaires est qu’ils nous sous-estiment. L’Iran a
accompli d’immenses progrès dans tous les domaines, y compris celui des
interrogatoires. Croyez-moi, la torture n’est plus nécessaire pour obliger des
coupables à passer aux aveux…
— À quelles méthodes faites-vous allusion ?
— Il y en a plusieurs, très sophistiquées, comme par exemple les pressions
morales… Non, M. Sartre et ses amis qui nous accusent d’atrocités feraient
mieux de s’occuper de ce qui les regarde. On ne sait plus d’ailleurs dans
quel camp se situe M. Sartre. Il y a quelque temps, il s’est mis à défendre
contre nous le général Bakhtyâr, l’ancien chef de la sécurité iranienne que
173
beaucoup avaient surnommé le « Bourreau du peuple » …
Bien sûr que oui. Je pense que tout ce que faisait la SAVAK intéressait la
CIA. Après tout, ce que faisait la SAVAK et la manière dont ils agissaient
avait un impact sur la sécurité intérieure de l’Iran lui-même, et nous étions
naturellement attentifs à suivre cela. Je pense que la dégradation de la
SAVAK s’est faite progressivement. Quand c’était un organisme tout
nouveau, c’était réellement une institution d’élite, capable d’attirer la crème
des officiers et des diplomates pour en faire l’organisme créé au début. Puis,
petit à petit, quand le rôle de police intérieure de la SAVAK (FBI type
responsibilities) s’est accru, je pense qu’ils ont attiré des gens différents.
Et pour terminer sur les mises en garde à Ehsân, Shariati lui rappelle les
valeurs de base du pacte social… non pas iranien ni musulman, mais bien
français, la liberté, l’égalité et la fraternité, opposant les contre-valeurs de la
société américaine telles qu’il les voit depuis l’Iran aux valeurs du pacte
démocratique européen. La comparaison de la culture païenne américaine
avec la culture arabe préislamique que le prophète Mahomet a fini par
renverser suggère le souhait profond d’en finir avec cette force
insupportable, la culture matérialiste et idolâtre, la nécessité d’une
révolution semblable à ce que fut la naissance de l’islam en Arabie.
Cette lettre qu’on trouve depuis la période de la Révolution dans le
premier volume des œuvres complètes de Shariati était restée bloquée,
comme la plupart des écrits de l’agitateur idéologique, par la censure. Elle
fut à nouveau interdite de publication avec les lettres de ce volume dans les
premières années de la République islamique du fait du ton très anticlérical
de certaines autres lettres de Shariati.
La censure n’était pas très habile, et surveillait moins
l’antiaméricanisme que tout ce qui pouvait délégitimer le régime et la
dynastie Pahlavi. Le communisme, banni, refaisait surface sous la forme
d’un marxisme social et historique à la fois intellectualisé et simplifié, qui
dominait insensiblement le discours des sciences humaines sans dire son
nom. Ainsi la réaction anti-occidentale mettait dans le même sac la
dénonciation de l’impérialisme européen et américain, du rationalisme, du
machinisme, de l’idéologie du progrès, de la collectivisation de l’éducation,
du nivellement culturel, de la mondialisation (dont la critique a germé en
Iran depuis les années 1960), de sorte que la censure a laissé passer un
discours qui semblait critiquer le collectivisme soviétique et qui en réalité
sapait les bases de toute culture importée, en particulier des États-Unis. Et
avant de disparaître, le régime impérial s’était fait le point de ralliement
d’une critique systématique de l’Occident. Un des penseurs très bien intégré
de cette critique était le sociologue Ehsân Narâqi (Ehsan Naraghi, 1926-
2012), chercheur issu d’un milieu clérical ouvert, passé par le marxisme,
formé en France et en Suisse, ami aussi bien de l’impératrice Farah que du
futur premier président iranien Banisadr.
Naraghi avait, pendant plusieurs années, étudié et dénoncé, en tant que
directeur de la Division de la jeunesse à l’UNESCO, l’exploitation
systématique par les pays riches, en particulier par les États-Unis, des
jeunes talents recrutés dans les universités du tiers-monde : la fuite des
cerveaux. Rien de tel en effet pour enrichir un pays que d’attirer dans des
laboratoires et centres de recherche bien équipés les plus brillants des
universitaires que les pays comme l’Iran ont formés à grand renfort
d’investissement éducatif et qui arrivent à Harvard ou à UCLA à l’âge où
ils commencent à produire le meilleur de leur recherche.
Dans un ouvrage publié en Iran à la veille de la révolution, Naraghi
réfléchit à l’éducation supérieure et remarque que la domination de la
culture occidentale, accélérée par le cinéma et la télévision, aboutit à
préformater les jeunes pour qu’ils se préparent à abandonner leur pays et à
s’expatrier. Les écoles des missions chrétiennes avaient commencé en
imposant le français et l’anglais comme langues des élites. Ceux qui
revenaient des universités européennes ou américaines étaient en parfait
décalage avec leur société d’origine où ils n’aspiraient qu’à importer des
modes de vie et de consommation étrangers. Que dire de l’université
Pahlavi de Chiraz, financée par les Américains, et entièrement organisée
avec un enseignement en anglais pour que les étudiants puissent se
préadapter à une entrée dans les établissements américains ? Le premier
article que Naraghi a publié sur la fuite des cerveaux date de 1967. Il y
remarque que l’ampleur de cet exode, pas seulement des pays pauvres, mais
des pays européens eux-mêmes, vers les États-Unis, appauvrit leurs
universités d’origine alors que les grandes facultés américaines ne cessent
201
de se développer et d’attirer les élites mondiales .
Pourfendre l’occidentalisation au nom d’une authenticité de l’identité
iranienne comme l’a brillamment fait Naraghi était parfaitement compatible
avec le régime monarchique iranien, tant que la collusion du pouvoir avec
l’impérialisme américain n’était pas dénoncée. Plus sophistiqué encore que
Naraghi, Dâryush Shâyegân (1935-2018), éblouissant philosophe
polyglotte, reprenant les concepts forgés par Fardid, a développé l’idée que
l’invasion de la culture occidentale fondée sur la tyrannie de l’histoire
linéaire, sur l’idée d’un salut chrétien incompatible avec les archétypes de
la mythologie, allait détruire les cultures traditionnelles de l’Asie, à
commencer par la culture islamique iranienne traditionnelle. Shâyegân,
comme d’autres intellectuels formés en Europe, était choyé par le régime
qui en faisait une vitrine destinée à montrer aux Occidentaux que les
Iraniens n’avaient pas peur de les affronter sur le terrain des idées, sans
remettre en question la dépendance 202.
Khomeyni et les Américains
les réformes semblent donner [au shah] un regain de popularité parmi les
paysans et une partie du prolétariat urbain, mais lui ont aliéné les élites
traditionnelles religieuses, les propriétaires fonciers et les classes aisées,
sans lui gagner l’appui des éléments urbains dotés d’un haut niveau
d’instruction. [Le shah] peut probablement compter sur le soutien de
l’armée et des forces de sécurité qui peuvent probablement contrôler tout
problème de sécurité interne dont la survenue est envisageable 209.
Le « retour des capitulations »
Peu de temps après, début juin, le shah est invité aux États-Unis pour
une visite semi-officielle comprenant une remise de doctorat honoris causa
à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), où l’attendent de
nombreux étudiants hostiles. L’expulsion d’Ali Shâyegân, « le plus
220
fanatique et anti-occidental des proches de Mosaddeq » est demandée .
L’ambassadeur Holmes rappelle que le shah, est dans une phase euphorique,
que sa popularité remonte et qu’il faut le flatter pour continuer à l’avoir
221
dans le camp américain . C’est dans cet esprit que les relations américano-
iraniennes se renforcent et que se prépare l’épisode crucial suivant.
Le 9 septembre 1964, le ton monte encore dans les propos de
Khomeyni. Un long discours s’adressant aux habitants de Qom dénonce les
complots de l’Occident contre les pays musulmans, contre les Palestiniens.
La dépêche qui en fait état, rédigée par le conseiller politique de
l’ambassade américaine, est encore partiellement caviardée en 2022.
Khomeyni attaque les États-Unis et mentionne Israël. Il dénonce le RCD
(volet économique du CENTO) et l’attitude des Occidentaux en général, qui
cherchent à diviser les musulmans pour mieux les dominer. Bien que le
conseiller politique de l’ambassade américaine ait compris la radicalisation
du discours et son absence totale de soutien au gouvernement iranien, il
s’efforce de le présenter sous un jour lénifiant : ce ne serait plus
222
l’opposition frontale du printemps 1963 . La version persane de ce long
discours d’ouverture des enseignements annuels du centre théologique de
Qom est intégralement publiée 223.
D’emblée, Khomeyni élargit la perspective à tout le monde islamique, à
tous les pays musulmans. Il parle dans le style qu’on connaîtra plus tard
dans les grands moments de la Révolution, avec de l’émotion dans la voix :
Dans l’urgence, avec une joue qui s’est un peu inclinée sur ma poitrine, il
m’est impossible de vous livrer tous les sujets auxquels j’avais pensé, mais
je vais parler à l’oreille de votre nation, à votre oreille, messieurs. Je suis
vraiment désolé de la situation générale des pays musulmans. Je suis très
attristé de la situation générale des pays musulmans, de la situation de l’Iran
en particulier. Les États islamiques, que ce soient les souverains, les
présidents de la république ou les Premiers ministres de ces États, subissent
la pression du colonialisme et oublient les exigences de la religion
musulmane, ils ne réalisent pas les problèmes de l’islam, ils ne veulent pas
prendre conscience des lois de l’islam, ils ne peuvent pas être conscients,
dans la situation où ils sont, de tout ce que l’islam a apporté à l’humanité et
de ce à quoi parvient l’humanité quand elle se soumet à l’islam.
Les pays colonialistes, les pays qui veulent s’emparer des richesses des
musulmans, par des moyens divers, détournent l’attention des pays
musulmans, des dirigeants islamiques par des ruses multiples, ils divisent
les musulmans en utilisant les dénominations de « shi’ite » et de
« sunnite », et même en Orient, ceux qui ne sont pas musulmans sont
trompés. On dit qu’en Inde, au moment de la fête du Sacrifice, on apporte
un grand nombre de vaches sacrées vers ceux qui les vénèrent pour les
vendre à des musulmans à prix très bas pour les obliger à sacrifier ces
animaux sacrés devant ces croyants pour leur dire : regardez, ils sacrifient
224
vos vaches sacrées !
Car nous sommes de Dieu et vers Lui nous retournons… (sourate al-Baqara,
156)
Je n’arrive pas à exprimer l’émotion qui m’étreint le cœur. Mon cœur est
sous pression. Depuis le jour où j’ai entendu les dernières nouvelles d’Iran,
je n’arrive plus à dormir (pleurs des gens). Je suis inquiet, mon cœur est
sous pression. Sous le coup de l’émotion, je compte les jours : combien
reste-t-il avant la mort ? (Redoublement de pleurs dans la foule.)
L’Iran n’a plus de fête, ils ont fait de la fête de l’Iran un deuil (encore des
pleurs), ils ont fait un deuil et l’ont décoré de lampions, ils en ont fait un
deuil et tous ensemble ils ont dansé. Ils nous ont vendus, ils ont vendu notre
indépendance, ils ont à nouveau mis des lampions et ont frappé le sol en
cadence.
Si j’avais été à leur place, j’aurais interdit les lampions, j’aurais dit de
mettre des drapeaux noirs sur nos marchés couverts, sur la porte de nos
maisons, de hisser des voiles noirs !
Notre grandeur a été piétinée, la gloire de l’Iran a disparu (pleurs des gens),
ils ont piétiné la gloire de l’armée iranienne !
Ils ont présenté une loi au Parlement dans laquelle d’abord ils nous ont
rattachés à la convention de Vienne, et ensuite ils ont ajouté que tous les
conseillers militaires américains, avec leur famille, avec les techniciens,
avec le personnel administratif, avec les domestiques et toutes les personnes
qui sont avec eux ont l’immunité pour tout crime qu’ils commettraient en
Iran.
Si un domestique américain, ou un cuisinier américain assassine votre chef
religieux au milieu du marché couvert, qu’il l’écrase sous ses pieds, la
police iranienne n’a pas le droit de l’en empêcher ! les tribunaux iraniens
n’ont pas le droit de le mettre en accusation ! l’affaire doit être transmise à
l’Amérique ! et c’est là que nos maîtres prendront toute décision.
Le précédent gouvernement avait approuvé ce projet de loi et ne l’avait dit à
personne, il y a quelque temps, le présent gouvernement a transmis ce
projet au Sénat. D’un vote unanime ils l’ont adopté et une nouvelle fois ils
ont retenu leur souffle et il y a quelques jours le projet de loi a été présenté
à l’Assemblée parlementaire ; là il y a eu un débat, et certains députés se
sont déclarés opposés à cette loi, mais elle a été adoptée, ils l’ont approuvée
avec un total cynisme ; le gouvernement a appuyé cette loi honteuse avec
un total cynisme, il a rendu la nation (mellat) de l’Iran plus vile que des
chiens américains ! Si quelqu’un écrase un chien américain avec sa voiture,
il sera arrêté. Même si c’est le shah d’Iran qui écrase un chien américain, il
sera poursuivi. Mais si un cuisinier américain écrase le shah d’Iran, ou l’un
des plus hauts dirigeants, personne n’a le droit d’intervenir.
Pourquoi ?
Parce qu’ils voulaient faire un emprunt, l’Amérique a voulu qu’ils fassent
comme ça.
Après quelques jours, ils ont demandé un prêt de 200 millions de dollars à
l’Amérique, il leur a été accordé, et pendant cinq ans, la somme sera versée
au gouvernement iranien ; et après en dix ans ils recevront les
remboursements de 300 millions de dollars* 236.
Vous comprenez ce que cela veut dire ?
200 millions de dollars, et chaque dollar vaut 8 tomans, seront prêtés au
gouvernement de l’Iran pour payer des dépenses militaires. Et en dix ans ils
récupèrent 300 millions de dollars. Ainsi ils gagnent 100 millions de
dollars, c’est-à-dire 800 millions de tomans, sur l’Iran comme bénéfice de
ce prêt. Ainsi, pour ces dollars, l’Iran s’est vendu, il a vendu notre
indépendance, on nous prend pour un des pays colonisés. Le peuple
musulman iranien (mellat-e moslem-e Irân) va passer dans le monde pour
plus retardé que des sauvages !
Qu’allons-nous faire de cette calamité ? Avec ces souffrances, que va faire
le clergé (ruhâniun). À quel pays vont-ils pouvoir se plaindre ? Tous les
autres États s’imaginent que c’est le peuple (mellat) d’Iran qui s’est avili à
ce point, ils ne savent pas que c’est le gouvernement (dowlat) de l’Iran, que
c’est le Parlement de l’Iran, ce Parlement qui n’a aucun lien avec le peuple
(mellat), c’est ce Parlement des baïonnettes, quel est son rapport au
peuple ? Le peuple iranien n’a pas élu ces députés, beaucoup d’ulémas de
haut rang et de guides religieux ont boycotté ces élections et le peuple les a
suivis, il n’a pas voté, mais par la force des baïonnettes on a amené ces gens
et on les a mis sur leur siège de député.
Ils ont vu qu’on ne peut pas faire ce qu’on veut de l’influence du clergé. Ils
voudraient anéantir l’influence du clergé !
Dans un des manuels d’histoire qu’on a imprimés cette année, qui est
enseigné dans nos écoles à nos enfants, après des mensonges et des contre-
vérités, on a écrit que la suppression de l’influence du clergé a été obtenue
pour l’intérêt et pour le bien-être du peuple !
Ils ont compris à juste raison qu’avec l’influence du clergé, cela ne passe
pas, que le peuple ne peut pas être un jour prisonnier des Anglais, et un
autre des Américains.
Avec l’influence du clergé, cela ne passe pas qu’Israël confisque l’économie
iranienne, que les marchandises israéliennes, sans taxes d’importation,
puissent être vendues en Iran.
Avec l’influence du clergé, cela ne passe pas qu’ils puissent ainsi, d’eux-
mêmes, imposer au peuple iranien une telle dette.
S’il y a l’influence du clergé, on ne peut pas instaurer un tel désordre dans
les relations internationales.
S’il y a l’influence du clergé, un État ne pourra plus faire tout ce qu’il veut,
tout ce qui est à cent pour cent contraire au peuple iranien.
S’il y a l’influence du clergé, le Parlement ne pourra plus être ainsi
ridiculisé, on ne pourra plus convoquer un Parlement par la force des
baïonnettes afin de produire des choses aussi honteuses.
S’il y a l’influence du clergé, ça ne peut plus arriver qu’une fille et un
garçon s’enlacent [en public] pour pratiquer ensemble la lutte, comme on
l’a vu à Chiraz.
S’il y a l’influence du clergé, on ne verra plus les filles innocentes des gens
être livrées aux jeunes gens dans les écoles, ni les femmes enseigner aux
garçons ou les hommes dans les écoles de filles pour répandre la corruption.
S’il y a l’influence du clergé, on donnera un coup dans la gueule de ce
gouvernement, dans la gueule de ce Parlement, et [ces] députés seront
expulsés des deux chambres.
S’il y a l’influence du clergé, on ne laissera plus ces gens nommés députés,
imposés au peuple, dominer le destin du peuple de ce pays.
S’il y a l’influence du clergé, celui qui est imposé par l’Amérique pour
accomplir de tels forfaits sera expulsé d’Iran.
L’influence du clergé est-elle nuisible au peuple (mellat) ? Pas du tout !
c’est à vous qu’elle fait du tort ! Elle vous fait du tort, traîtres, non pas au
peuple. Vous savez que face à l’influence du clergé vous ne pouvez pas
faire tout ce que vous voulez, toutes les bêtises, et c’est pourquoi vous
voulez supprimer l’influence du clergé. Vous pensez qu’en arrangeant la
réalité vous pourrez introduire la zizanie au sein du clergé ? c’est un
fantasme que vous obtiendrez dans la mort : vous ne pourrez pas faire ça,
les clercs sont unis.
Je m’incline devant tous les ulémas, je baise la main de tous les ulémas. Ce
jour-là, j’ai baisé la main des « guides à imiter » (marâje’), mais
aujourd’hui je baise également la main du commerçant (pleurs et sanglots
forts).
Messieurs ! je sonne l’alarme.
Ô armée de l’Iran ! je sonne l’alarme.
Ô dirigeants politiques de l’Iran ! je sonne l’alarme.
Ô commerçants d’Iran ! je sonne l’alarme.
Ô ulémas d’Iran et vous, guides religieux de l’islam ! je sonne l’alarme.
Ô vous les élites ! vous les étudiants en théologie, les centres d’études
religieuses, vous Najaf, vous Qom, vous Mashhad, vous Téhéran, vous
Chiraz ! je sonne l’alarme.
Il y a danger, on va le voir, on a caché quelque chose, nous ne savons pas
quoi. Au Parlement on a dit qu’il ne fallait pas dévoiler les choses. On
verra. Ils ont fait des rêves pour nous. Que peut-il arriver de pire ? qu’y a-t-
il de pire que l’emprisonnement ? de pire que la honte ? Que veulent-ils
faire ? Qu’est-ce qu’ils sont allés imaginer ? Cet emprunt en dollars, quel
malheur va-t-il apporter à ce peuple ? Faut-il que ce pauvre peuple verse en
dix ans un intérêt de 100 millions de dollars à l’Amérique, 800 millions de
tomans ? et qu’en même temps, pour un tel emprunt vous nous vendiez.
Les militaires américains et les conseillers militaires américains, quelle
utilité ont-ils pour vous ? Si ce pays est occupé par l’Amérique, alors
pourquoi est-ce que vous hurlez ? Pourquoi parlez-vous tant de progrès ? Si
ces conseillers sont vos serviteurs, pourquoi les traitez-vous plus haut que
leurs maîtres ? S’ils sont des serviteurs, faites avec eux comme avec les
autres serviteurs. S’ils sont vos employés, vous aussi, faites comme les
autres pays vis-à-vis de leurs employés. Si notre pays est sous l’occupation
américaine, dites-le, et renvoyez-nous de notre pays** 237.
Que veulent-ils faire ? Ce gouvernement, que nous dit-il ? Ce Parlement,
qu’a-t-il fait avec nous ? Ce Parlement illégal, ce Parlement illégitime, ce
Parlement qui a été boycotté par le décret des plus hautes instances
religieuses (be-hokm-e marâje’-e taqlid tahrim shoda-ast), ce Parlement qui
prétend parler d’indépendance et de révolution et dit qu’il est l’émanation
de la « Révolution blanche » !
Moi, je ne sais pas où est cette révolution blanche sur laquelle on a fait tant
de déclarations tonitruantes. Dieu sait que je suis bien informé et que je
souffre, je suis informé sur ces villages et ces provinces éloignés et sur
Qom, cette ville si sous-développée, je suis informé sur la sous-alimentation
des gens, sur les désordres de l’agriculture et du monde agricole. Vous
devriez penser à ce pays, penser à ce peuple, ne pas multiplier les
endettements, ne pas devenir des serviteurs. Bien sûr, le dollar entraîne
aussi la servitude ! Prenez donc les dollars, utilisez-les ! C’est nous qui
allons faire les serviteurs ! Si nous passons sous la voiture d’un Américain,
personne n’aura le droit de faire la moindre remarque à cet Américain !
Ces gens qui nous disent de nous taire et de ne rien manifester, est-ce qu’ils
nous disent aussi de la fermer dans ce cas ? Il nous faut, ici encore, garder
le silence et ne rien dire. Ils nous vendent et nous ne dirions rien ? ils
bradent notre indépendance et nous resterions silencieux ?
Par Dieu, le pécheur, c’est celui qui ne proteste pas. Par Dieu, il commet un
péché grave, celui qui ne crie pas (forte émotion dans la foule).
Ô responsables de l’islam ! venez au secours de l’islam !
Ô, ulémas de Najaf ! venez au secours de l’islam !
Ô, ulémas de Qom ! venez au secours de l’islam ! L’islam a disparu (pleurs
intenses des gens présents).
L’Iran constitue une position d’où on peut contrer toute opération lancée à
travers le Caucase pour encercler la Turquie, attaquer le canal de Suez ou
s’emparer de la zone du golfe Persique. Du fait de sa position géographique
à la périphérie de l’URSS et de sa situation clé par rapport aux autres pays
du Moyen-Orient, l’Iran peut offrir des sites militaires appréciables, avec un
support logistique apporté depuis le golfe Persique pour toute attaque alliée
qu’on pourrait monter contre l’URSS depuis le Moyen-Orient.
L’Iran peut offrir une position de blocage pour contrer toute opération
soviétique visant à priver le monde libre des ressources du Moyen-Orient.
À l’heure actuelle, nos alliés en Europe de l’Ouest dépendent des ressources
pétrolières du Moyen-Orient. Si elle ne dispose plus des
approvisionnements adéquats en produits pétroliers, l’Europe de l’Ouest est
sans défense, nos investissements pour sa reconstruction seront gaspillés, ils
seront perdus et nous en serons redevables devant le monde libre. On a
estimé que vers 1975 l’Europe sera dépendante du Moyen-Orient pour 90 %
de son pétrole brut en période de paix et devra importer 3,7 millions de
barils par jour. De même, en période de paix, les États-Unis auront besoin
d’importer 1,2 million de barils par jour du Moyen-Orient (8,8 % du total
de leurs besoins en période de paix). C’est pourquoi tant que les besoins
essentiels et principaux des alliés – y compris les États-Unis – ne sont pas
pourvus par d’autres sources, il faut garantir des réserves pour un
approvisionnement en temps de guerre des ressources pétrolières du sud-
ouest du golfe Persique. […] Les alliés doivent donc interdire aux
Soviétiques les zones de l’Iran d’où l’URSS pourrait lancer des attaques
aériennes ou terrestres en vue d’empêcher la production pétrolière au
Koweït et en Arabie Saoudite.
C’est pourquoi l’Iran est d’une grande importance stratégique pour défendre
254
les régions de la Méditerranée occidentale et du golfe Persique .
Les achats d’armement
Ce qui a retenu les Soviétiques de commettre des agressions contre des pays
du monde libre, c’est qu’ils savaient qu’ils ne pouvaient attaquer aucun
pays sans se retrouver impliqués dans un conflit avec les États-Unis.
Comme le ministre des Affaires étrangères [iranien] le sait bien, le Congrès
américain a voté une résolution autorisant le président à utiliser les forces
armées des États-Unis pour défendre des pays du Moyen-Orient contre
toute agression soviétique, en conséquence de quoi les États-Unis ont
rejoint le comité militaire du pacte de Bagdad. […] Les États-Unis sont
confrontés à un problème difficile, car tous leurs alliés du monde libre
veulent construire leurs forces armées et demandent l’aide américaine. Mais
le problème est compliqué par l’action du Congrès qui réduit les fonds de
l’assistance militaire 258.
En résumé, les Américains veulent rester indispensables pour la sécurité
de la région. Et la seule puissance face à l’URSS. À cette logique du
président Eisenhower le shah rétorque que, en cas d’intrusion intempestive
des Soviétiques, il faudrait un certain temps pour que les forces américaines
arrivent sur le terrain prêtes au combat… alors que l’armée iranienne, si elle
259
est correctement équipée, est directement sur place . Ces propos
s’adressent à Henry Cabot-Lodge, ambassadeur à l’ONU et futur co-listier
de Nixon… une manière pour le shah de court-circuiter l’ambassadeur
américain à Téhéran qui se montrait très critique à l’égard des demandes
« extrêmes » du shah en matière d’armement. Quelques jours plus tôt en
effet, le secrétaire d’État Dulles, qui avait obtenu une mesure favorable à la
demande iranienne, venait lui-même en visite à Téhéran. Dans son
télégramme au président Eisenhower, il fait état de ses contacts avec le shah
avec une ironie cinglante : « Le shah, qui se prend pour un génie militaire,
est déterminé à reconstruire les forces militaires de l’Iran et à accéder à la
place dominante au sein du pacte de Bagdad. […] Ceci ajouterait
évidemment une charge économique au pays et déséquilibrerait encore plus
le budget de l’État. […] Les ministres iraniens sont très inquiets des
problèmes économiques, mais ils sont incapables de les gérer face aux
obsessions militaires du shah 260. » Le shah n’a-t-il par clairement menacé le
secrétaire d’État de se retirer du pacte de Bagdad s’il n’obtenait pas
satisfaction ? Pour finir, le shah est invité, lors du voyage privé qu’il prévoit
aux États-Unis, à discuter en tête à tête avec le président et avec les
généraux du Pentagone. Aucune décision ne fut prise alors, mais la
campagne psychologique menée par le shah fait son effet sur les dirigeants
américains.
L’élément déterminant fut le coup d’État irakien le 14 juillet 1958, au
cours duquel le roi et le premier ministre furent exécutés. En effet, ni le
basculement de l’Égypte et de la Syrie vers le camp soviétique, ni la fusion
des deux pays arabes en une éphémère République arabe unie, ni la
popularité de Nasser dans le monde arabe n’avaient touché aussi près
l’appareil sécuritaire illusoire du pacte de Bagdad. (L’alliance, amputée de
son centre, fut obligée de déménager à Ankara et de s’appeler CENTO.) Le
shah utilise immédiatement l’exemple irakien : « Pour nous, dit-il au chargé
d’affaires américain, c’est désormais une question de vie ou de mort… » Et
Eisenhower, sensibilisé par la récente visite du shah, lui écrit :
Avec à l’esprit ce qui vient de se passer, nous croyons qu’il est important de
commencer maintenant à reconsidérer notre plan de sécurité collective.
C’est aussi notre conviction que vos forces armées, telles qu’elles sont
actuellement maintenues, doivent être promues pour une puissance
opérationnelle convenue et à un haut degré d’efficacité. C’est pourquoi j’ai
déjà donné des directives pour qu’on accélère la livraison d’un grand
éventail d’équipements et je suis prêt pour qu’on fournisse à vos forces
armées actuelles de manière accélérée une assistance d’entraînement
supplémentaire sur une base sélectionnée mais intensifiée. Dans la mesure
où, avec notre appui, vous êtes capable de présenter un personnel préparé
par une formation adéquate, mon gouvernement est prêt à considérer avec
vous l’opportunité d’activer des unités supplémentaires ainsi que la
261
possibilité de vous assister pour équiper de telles unités .
En Iran, nous devons accepter le shah, avec ses défauts, comme un atout de
valeur. Nous devons coopérer avec lui et l’influencer aussi bien que nous
pouvons, car nous n’avons pas d’autre solution. Nous devons continuer à le
pousser dans la direction des réformes sociales pour l’empêcher de perdre
l’affection des masses de son peuple. Il a accepté le gel du soutien à la
défense et nous devons rester fermes contre toute demande de reprise. Nous
devons examiner attentivement le potentiel militaire réel, présent et futur,
des forces armées du shah et leur accorder le Programme d’assistance
militaire (MAP) dans le contexte des intérêts mondiaux de sécurité des
269
États-Unis, sans considérer les contrats d’alliance .
Pour échapper à un tel traité qui les lierait à l’URSS, les Iraniens font
connaître, avec l’accord préalable de l’ambassadeur soviétique, leur
engagement unilatéral stipulant qu’aucune base de missiles ne serait jamais
concédée à une puissance étrangère (les États-Unis) sur son sol. L’Iran
sortait d’une période de quatre ans de tension avec son voisin du Nord,
conséquence de son adhésion au pacte de Bagdad. Le gouvernement Amini
avait accentué l’alignement sur Washington. Par une note verbale du
15 septembre 1962, Téhéran faisait donc un geste de bonne volonté envers
l’ambassade soviétique. Le communiqué officiel de cette décision mettait
fin au refroidissement des relations avec Moscou qui n’exigeait plus de
Téhéran l’interdiction de toute installation de base militaire d’un pays tiers.
Le shah considère le règlement de cette question comme une victoire
273
diplomatique .
La négociation sur les missiles en Iran était liée à la négociation
parallèle avec la Turquie qui a demandé à Washington de démanteler les
bases de lancement des fusées Jupiter de son sol. Le développement et le
déploiement, à la même époque, des fusées Polaris et des sous-marins
équipés d’ogives nucléaires rendaient d’ailleurs obsolète le maintien de la
stratégie des missiles dirigés vers l’URSS.
Le 19 septembre 1962, une réunion a lieu au palais impérial entre le
shah, l’ambassadeur américain Holmes et deux généraux dont l’un venu de
Washington, pour définir l’aide militaire qui sera accordée par les États-
Unis à l’Iran dans les cinq prochaines années. Il est significatif que, du côté
iranien, aucun ministre ni aucun général ne participe à la discussion. Le
shah essaie de négocier le nombre total de militaires exigé par Washington,
réduit à 160 000 hommes : oui, si ce chiffre ne concerne que l’armée de
terre… Mais les Américains demandent que les 12 000 hommes des forces
aériennes et les 3 000 de la marine soient inclus, ce qui fait
145 000 hommes pour l’armée de terre. Sur différents points, sur l’ajout de
tanks (pour équiper trois bataillons supplémentaires), de camions de
transport de troupes, les points de vue divergent. Une concertation semble
en cours pour l’installation de stations de contrôle aérien (Aircraft Control
and Warning) couvrant le nord de l’Iran, détectant tout passage soviétique
vers Téhéran et la frontière avec l’Irak ; mais le financement n’est pas
assuré. Le shah revient sur l’avion F-5A que les Américains s’apprêtent à
livrer à l’Iran, et dont ils vantent les mérites tant opérationnels
qu’économiques. Mais le shah s’enquiert des F-110 ; ils sont, lui répond-on,
trop chers et trop sophistiqués, et la production est réservée en priorité à
l’US Air Force.
Le rapport envoyé à Washington par l’ambassadeur à Téhéran a
indisposé Komer qui en fait part à Kennedy : Holmes a outrepassé ses
instructions en laissant entendre que des aménagements étaient
envisageables. Les demandes du shah sont passées sous silence une fois
acquises les deux frégates, « mais nous pouvons nous attendre à ce que le
shah revienne à nous avec plus de demandes très bientôt 274 ». Un peu plus
tard, dans son rapport de synthèse du 20 octobre 1962 déjà cité plus haut, le
même Komer évalue l’argent dépensé en un an par les États-Unis en Iran à
environ 300 millions de dollars, c’est-à-dire l’équivalent de ce qui est
envisagé pour cinq ans. Et l’incertitude est telle qu’il plaide pour une
véritable « révolution », mais une révolution « contrôlée ». « Nous sommes
conscients, écrit-il, que les États-Unis devraient faire plus, mais nous nous
méfions des solutions trop radicales comme pousser pour convoquer des
élections parlementaires ou écarter le shah en organisant un conseil de
régence. » Ce qu’il faut, c’est une solution militaire. Teymur Bakhtyâr
pourrait être une bonne solution bien que nous l’ayons écarté il y a deux ans
au profit d’Amini. Le danger de durcir le régime serait de tomber sur un
homme comme Kassem (en Irak), plus enclin à se rapprocher de l’URSS…
Le shah, lui, a le mérite d’exister déjà et de s’appuyer sur deux bases
solides, les paysans et l’armée. Il reste peu de choix aux Américains s’ils ne
veulent pas prendre de risques, ajoute Komer : continuer à faire pression
pour des réformes et se préparer à débourser encore plus pour l’armée « en
espérant en tirer plus de profit » (we could reasonably expect to get more
for it too) 275 !
Soutenir le shah comme un mal nécessaire dont les Américains se sont
rendus prisonniers implique également de soutenir les forces armées
iraniennes, et, sur le plan intérieur, maintenir la SAVAK en état de contrôler
les activités du parti Toudeh et de juguler toutes les tentatives de
subversion, avec, dans chaque ville, des forces de police antiémeute
efficaces encadrées par un personnel américain spécifiquement formé 276.
L’auteur du rapport ajoute :
À la place de l’attitude « Papa sait mieux que toi ce qui te convient », dont
l’usage excessif est à mon avis largement responsable de
l’antiaméricanisme dans cette partie du monde, je crois qu’il serait plus
avantageux de traiter le shah en adulte 297.
Nixon connaissait déjà le shah du temps où il avait été pendant huit ans
vice-président d’Eisenhower (1953-61), depuis sa visite à Téhéran en
décembre 1953. Il décrit alors un jeune souverain « pas très sûr de lui »,
mais auditeur attentif et très conscient des problèmes non seulement de
l’Iran mais du monde entier. Pendant les huit années Kennedy-Johnson,
Nixon est allé quatre fois en Iran pour voir un dirigeant mûri par
l’expérience et par sa révolution sociale et culturelle, même si les droits de
314
l’homme avaient peu progressé dans son pays . Désormais, lui est
président, et le shah semble lui faire totalement confiance. L’ambassadeur
Douglas MacArthur rapporte des propos du shah sur Nixon :
J’aimerais bien qu’il y ait tout autour du monde quelques dirigeants de plus
qui aient une vision aussi prévoyante (foresight)… et sa faculté d’aller vite,
on peut le voir comme une dictature virtuelle, dans un sens bienveillant
(benign)… Parce que, quand vous parlez d’avoir une démocratie de notre
genre dans cette partie du monde, mon Dieu, cela ne marcherait pas, bien
315
sûr .
Quelles qu’aient été les erreurs du shah, engagé probablement contre des
forces au-delà du contrôle d’un homme, il était pour nous le plus rare de
tous les dirigeants, un allié inconditionnel, et dont la compréhension de la
situation mondiale faisait progresser la nôtre. Au fil des ans, j’ai eu de
nombreuses discussions avec lui. Dans sa compréhension des courants
internationaux, il était l’un des dirigeants les plus impressionnants que j’aie
rencontrés 325.
Nous sommes venus rendre visite à l’Iran parce que nous considérons que
cela symbolise la force du soutien à nos amis. Nous ne laissons pas tomber
nos amis (We would not let down our friends) 330.
Suite à cette libération, le marché des armes a battu tous les records :
pour plus de 2 milliards de dollars furent commandés des équipements tels
que 175 chasseurs-bombardiers, 500 hélicoptères, de nombreux missiles air-
sol. D’après l’historien iranien Mahdavi, les dépenses militaires de l’Iran
entre 1972 et la révolution se présentent ainsi (source : département de la
Défense, Washington) :
… mais en réalité je crois bien pour faire du lèche-cul (kun-lisi) ! Car il sait
bien que les Américains le soutiennent. Ces gens-là [les proches
d’Hoveydâ] sont de la bande de traîtres de Mansur [premier ministre
assassiné, 1964-65] qui sont venus au pouvoir grâce au soutien et aux
directives des Américains. Comme le shah a mené la discussion en tête à
tête avec Nixon – en présence de Kissinger, mais sans y admettre
Hoveydâ – et que le premier ministre s’en était inquiété, il a emmené
Kissinger surtout pour s’informer et se montrer servile. À 3 heures du matin
j’étais dans mes bureaux à travailler et j’ai vu rentrer Kissinger dans la
résidence à côté du palais de Sa’d-âbâd. Ils étaient allés dans un cabaret et
de là ont rejoint la réception donnée au ministère de l’Information pour les
343
journalistes .
Quant à l’achat des F-14 ou F-15 vers lequel le shah manifestait une
envie pressante, si on le lui avait refusé, il se serait tourné vers le Mirage
français, moins avancé technologiquement. Et pour le décret de Nixon
exemptant l’Iran de tout barrage parlementaire pour ses acquisitions
d’armes, il s’agissait, toujours selon Kissinger, d’une simple mesure de bon
sens. « Notre amitié avec l’Iran nous a été bien utile dans les crises qui
353
allaient s’abattre sur nous », conclut Kissinger . Le résumé de la
conversation du dernier tête-à-tête le 31 mai est encore plus surprenant.
Nixon revient en conclusion sur sa doctrine et va jusqu’à sa conséquence
paradoxale :
Le président accepta de fournir à l’Iran des bombes à laser, des F-14 et des
F-15. Il demanda au shah de comprendre le but poursuivi par la politique
américaine. « Protégez-moi ! (Protect me ! ), déclara-t-il, ne voyez pas dans
la détente quelque chose qui va vous affaiblir mais comme un moyen, pour
les États-Unis, d’accroître leur influence » La Doctrine Nixon est un moyen
pour les États-Unis de construire une politique de long terme pour soutenir
leurs alliés. Telle est la vision du président : l’intelligentsia américaine ne
reflète pas la politique américaine : qui est bon, qui est mauvais ? demande
le président de manière rhétorique. C’est difficile à dire. La majorité, c’était
354
des échecs (The majority were failures) .
Je suis prêt à répéter ce que j’ai proposé déjà plusieurs fois, c’est-à-dire à
déclarer notre zone – une zone géographique dont on pourrait préciser
évidemment les frontières – non nucléaire. Parce que, honnêtement, je crois
que cette course aux armements nucléaires est ridicule. Que veut-on en
faire ? S’en servir contre les grandes puissances ? On ne pourra jamais avoir
la parité. Nous en servir pour nous entre-tuer ? Un pays qui se procurerait
ce moyen pour attaquer n’attendrait pas longtemps avant de se faire écraser
par un autre pays qui prendrait aussi les devants. Mais s’il n’y a pas assez
de vision, si dans cette région chaque petit pays essaie de s’armer avec des
armements même précaires, même élémentaires, mais nucléaires, alors
peut-être les intérêts nationaux de n’importe quel pays exigeraient qu’il
379
fasse de même, mais je trouverais cela tout à fait ridicule .
*
Les deux commandes récemment passées pour trois cents F-16 et deux
cent cinquante F-18L étaient devenues problématiques avec l’élection de
Carter. Le shah s’est empressé (fin novembre) de signer un contrat pour
cinq cents véhicules blindés de transport de troupes et un ensemble de
missiles et d’artillerie antiaérienne. Dès le début de la présidence effective
de Carter, l’ambassadeur iranien à Washington rappelle à Zbigniew
Brzezinski, nouveau Conseiller à la sécurité du président, les commandes
confirmées par le président Ford, pour un montant « entre 15 et 50 milliards
de dollars ». Le chiffre supérieur supposerait que le nucléaire soit
contractualisé et inclus. Le chiffre inférieur supposerait que l’échange (troc)
pétrole contre armement soit confirmé.
Le shah avait peur que la nouvelle présidence porte atteinte à la
politique étrangère de l’Iran et à ses intérêts de sécurité. Carter envoya le
secrétaire d’État Cyrus Vance à Téhéran pour lui expliquer que les contrats
passés (du temps de Ford) seraient honorés, avec cette réserve : « Nous
devons développer un meilleur moyen de déterminer les besoins futurs de
l’Iran en matière militaire et comment on pourrait y répondre 382 ». Ce genre
de position paternaliste était le contraire de ce que le shah pouvait accepter,
car lui seul avait jusqu’ici correctement (selon lui) le jugement de
l’opportunité des achats d’armements et il avait même réussi à convertir à
ses vues les derniers présidents.
Les cent quarante F-16 additionnels n’étaient, du point de vue de
Washington, plus à l’ordre du jour, car l’obstacle du Congrès pour les
premiers cent soixante n’était pas encore gagné. Quant aux F-18, l’armée
américaine elle-même les avait jugés inadaptés et avait exclu leur
acquisition, il était donc plus sage que l’Iran y renonce. Et l’autre élément,
l’avion-radar AWACS (Airborne Warning & Control System) venait de
sortir des usines. Les décisions finales devaient être discutées lors d’une
invitation officielle à Washington en novembre 1977. Le shah ne fit pas
d’objection aux principes des droits de l’homme, pour autant que la sécurité
de l’Iran n’était pas menacée. Il s’arrangea pour faire libérer des prisonniers
politiques avant d’y être contraint par des remontrances de Washington 383.
La nouvelle philosophie politique démocrate est progressivement
définie par des directives présidentielles (presidential directives). La
treizième directive, émise le 13 mai 1977, au retour de Cyrus Vance de
Téhéran, est absolument incompatible avec les pratiques antérieures que le
shah voulait prolonger. Elle concerne l’exportation des armes
conventionnelles pour tous les pays excepté les membres de l’OTAN, le
Japon, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Pour la sécurité d’Israël, Carter
se contenta de confirmer qu’il honorerait les « engagements historiques »
américains (historic responsibilities regarding Israel’s security). L’Iran ni le
CENTO n’étaient mentionnés. Le but était de réduire la prolifération des
armes conventionnelles et de « promouvoir le respect pour les droits de
l’homme » dans les pays importateurs. Chaque année le montant total en
dollars des ventes d’armes et des livraisons d’armes au titre du programme
d’assistance militaire (MAP, Military Assistance Program) devaient
diminuer. Les Américains s’abstiendraient dorénavant d’introduire dans une
région des armes d’un type nouveau qui susciteraient le besoin des autres
pays voisins d’acquérir des équipements équivalents. En particulier ils
éviteraient d’exporter des armes qui exigeaient la présence d’un personnel
de maintenance américain pour une longue période 384.
À l’ambassadeur iranien Ardeshir Zâhedi venu lui objecter le peu de
considération pour l’Iran dans cette directive, le secrétaire d’État Vance
répondit en citant le passage où Carter a évoqué les pays amis qui « doivent
dépendre de l’armement le plus moderne pour contrebalancer un
désavantage quantitatif ou qualitatif et maintenir l’équilibre régional » 385.
La question des AWACS, qui entrait précisément dans cette catégorie,
fut notifiée le 7 juillet au Congrès : l’Iran en commandait sept exemplaires,
pour un total de 1,2 milliard de dollars. Toutes les objections furent
soulevées : le retard iranien pour le respect des droits de l’homme,
l’énormité de la dépense, la nécessité de prévoir un grand nombre
d’Américains en Iran pour assurer la maintenance et former les militaires
iraniens ; et enfin la question de la stabilité de l’Iran après le shah. Le
gouvernement américain décida de retirer la question de l’ordre du jour du
Sénat à titre temporaire le 28 juillet 1977, afin d’obtenir du shah de
nouvelles garanties pour lever les objections des sénateurs. Le shah trouva
cette demande humiliante et menaça d’annuler sa commande, il l’aurait
remplacée par un avion-radar britannique, le Nimrod. La presse iranienne –
qui d’ordinaire restait très discrète sur les Américains – signala à la une, le
31 juillet, que l’Iran retirait sa commande de sept avions AWACS.
L’explication donnée par l’Ettelâ’ât (« les informations »), grand journal du
soir, décrivait les fortes dissensions au sein du Congrès, et insistait sur la
volonté de Carter de trouver une solution pour obtenir une majorité
favorable après les vacances parlementaires. La relative liberté de ton
s’explique sans doute par les débuts de l’influence de Carter pour faire
desserrer la censure. L’article ne mentionne jamais cependant que la
question des droits de l’homme bafoués en Iran était un des arguments
avancés par les sénateurs américains : il insiste sur le danger, évoqué au
Congrès, qu’un avion AWACS tombé entre des mains soviétiques livrerait à
l’URSS de précieux secrets technologiques 386.
Le shah ressentait avec amertume les attaques dirigées contre son
régime dans la presse américaine. Quant à Carter, qui voyait cela avec
détachement, il note laconiquement dans son journal : « Je me moque qu’il
nous les achète ou non (I don’t care whether he buys them from us or
not) 387. » Même avec de nouvelles assurances, les critiques du Congrès se
concentraient sur les droits de l’homme et sur le risque d’interception d’un
appareil par les Soviétiques. L’intervention personnelle du président Carter
était nécessaire pour obtenir l’assentiment des membres du Congrès à
l’achat des AWACS. D’après l’ambassadeur Sullivan, ce débat a dégénéré à
cause de maladresses commises par le nouveau gouvernement dans ses
relations avec le Congrès, et a permis aux parlementaires américains de
répéter des attaques personnelles contre le shah et de dénoncer la violence
388
du régime iranien . Dans ses mémoires, Cyrus Vance écrit :
Armement et dépendance
[…]
L’histoire semble montrer que notre diplomatie tranquille de l’époque
Johnson a trop bien réussi. Après la politique de redressement dans les
années Kennedy, la politique américaine est passée sous l’administration
Nixon à un soutien inconditionnel. En 1972, Nixon lui-même, dans une
note en marge d’un rapport du NSC, donnait la consigne qu’il n’y ait pas de
réévaluations des demandes d’armement présentées par le shah. Le résultat
fut le gonflement des fournitures d’équipement militaire jusqu’à trente fois,
passant de 100 millions de dollars par an dans la période 1965-69 à
3 milliards dans les années 1970. À Téhéran, une mégalomanie se
développa et les ministres de Sa Majesté devenaient de plus en plus
flagorneurs 391.
Que le shah n’ait pu anticiper l’effondrement, aveuglé qu’il était par son
pouvoir et par les flatteries de ses courtisans comme de ses « alliés »
américains, c’est compréhensible. Mais comment les États-Unis ont-ils
poussé leur avantage si loin sans s’inquiéter qu’un tel échafaudage reposait
principalement sur la présence d’un homme et un seul à la tête de l’État
iranien ?
Le résultat militaire pour l’Iran est assez mitigé : certes, quand l’Irak
attaqua en septembre 1980, la République islamique pouvait compter sur
une aviation bien équipée avec d’excellents pilotes (la majorité étaient
restés). Mais seuls les Américains avaient l’inventaire des stocks de pièces
détachées accumulés dans les hangars. La diversification limitée des
acquisitions a permis d’harmoniser l’adaptation des militaires, mais les a
paralysés après la rupture.
On s’est posé la question de l’élément déterminant dans la décision de
donner carte blanche au shah pour ses achats d’armes aux États-Unis : est-
ce une décision du président Nixon qui voyait dans ce souverain un allié
fidèle et sûr auquel il fallait faire entièrement confiance pour régler les
conflits locaux, ou bien une opération bien préparée du shah pour obtenir de
ce politicien ami ce qu’aucun autre président n’aurait voulu lui accorder
auparavant ? Dans les deux cas, ce sont deux individus (auxquels il faut
certes ajouter Kissinger) qui ont agi en dehors de tout contrôle
parlementaire, et sans le contrôle d’aucun contre-pouvoir, ni la presse, ni le
système constitutionnel, ni même d’un gouvernement ayant le soutien d’un
Parlement 392.
Il semble qu’il y ait peu de chance qu’une trêve s’installe entre le régime et
la communauté religieuse. Ceux parmi les clercs qui suivent une politique
de silence – et ils sont probablement la majorité – ne semblent pas être
désireux ni capables de dissuader les Mojâhédines [du peuple] d’avoir
recours à la violence. Et même si les forces de l’ordre balayaient
entièrement les Mojâhédines, l’opposition religieuse resterait, bien que
moins violente. Le caractère laïc (secularism) du gouvernement et le
conservatisme religieux du clergé semblent irréconciliables et il n’y a aucun
esprit de conciliation (accommodation) d’un côté ni de l’autre (p. 55).
1. Ce cylindre d’argile est conservé au British Museum. Il a été prêté une deuxième fois à l’Iran pour
une exposition qui remporta un immense succès dans la République islamique. À cette occasion, le
18 septembre 2010, le président Ahmadi-Nežâd en fit un éloge surprenant, semblable au discours du
shah qui fondait son idéologie sur une réinterprétation de l’histoire antique en écartant toute influence
occidentale. Une recherche sur internet en persan sur « Ahmadinežâd » et « Kuroš » renvoie à des
louanges inattendues du président iranien (2005-2013) sur Cyrus le Grand que le shah n’aurait pas
reniées.
2. M. ELM, Oil, Power, and Principle, p. 310.
3. FO 371/104684, Samuel Falle (agent consulaire britannique) à Baker, cité par M. ELM, Oil,
Power, and Principle, p. 310.
4. FRUS, 1952-1954, vol. X, Iran 1951-1954, document 366, télégramme de Henderson au
département d’État, 11 septembre 1953 (omis dans la version pdf) ; FRUS, 1951-1954, 2 janvier
1954, pdf, p. 874.
5. US National Archives, Record Group 59, Box 5511A, télégramme de Henderson, 25 septembre
1953, cité par M. ELM, Oil, Power, and Principle, p. 311.
6. Télégramme du secrétaire d’État Dulles à l’ambassadeur Henderson, 9 novembre 1953, FRUS,
1952-1954, vol. X, Iran 1951-1954, document 383 (omis dans la version pdf).
7. Note de synthèse FRUS, 1951-1954, pdf, p. 791 ; télégramme de l’ambassadeur Henderson au
département d’État, 2 novembre 1953, FRUS, 1952-1954, vol. X, Iran 1951-1954, document 378.
8. M. ELM, Oil, Power, and Principle, p. 314.
9. Ibid., p. 316.
10. Ibid., p. 319.
11. En anglais : National Iranian Oil Company, NIOC ; en persan : Sherkat-e melli-e naft-e Irân.
12. Télégramme de l’ambassadeur Henderson au département d’État, 28 mai 1954, FRUS, 1952-
1954, vol. X, Iran 1951-1954, document 466 (omis dans la version pdf).
13. US National Archives, Record Group 59, Box 5509, « Oil controversy », vol. III, appendice D8,
lettre du président au shah, 5 août 1954, cité par M. ELM, Oil, Power, and Principle, p. 311.
14. Je résume ici M. ELM, Oil, Power and Principle, pp. 324 sq.
e
15. Cité par B. ÂQELI, « Pišgoftâr », p. 17 ; Mozâkerât-e Majles-e melli, 18 législature, séance 58,
28 mehr 1333/20 octobre 1954.
16. A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, pp. 75 sq.
17. B. ÂQELI, « Pišgoftâr », pp. 13-14 ; A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini,
pp. 79 sq.
18. B. ÂQELI, « Pišgoftâr », p. 18.
19. M. ELM, Oil, Power, and Principle, p. 328.
20. A. MILANI, The Shah, p. 190.
Â
21. A. ZÂHEDI, Xâterât, I, p. 341.
22. FRUS, 1952-1954, vol. X, Iran 1951-1954, document 368, télégramme du 18 septembre 1953
(omis dans la version pdf).
23. CIA, « A study of electoral methods in Iran » (13 novembre 1953), FRUS, 1951-1954, pdf,
p. 839 (le caviardage est maintenu jusqu’à nos jours…).
24. FRUS, 1952-1954, vol. X, Iran 1951-1954, document 353, télégramme de l’ambassadeur
Henderson au département d’État, 23 août 1953 (omis dans la version pdf).
25. A. ZÂHEDI, Xâterât, I, p. 336.
26. Note du diplomate Christopher Gandy (1917-2009) au FO, 27 août 1953, reproduite par
A. ZÂHEDI, Xâterât, I, p. 459.
27. L’ambassadeur Henderson au département d’État, 27 août 1953, FRUS, 1952-1954, vol. X, Iran
1951-1954, document 357 ; ibid., document 359, Henderson au département d’État, 31 août (omis
dans la version pdf).
28. Télégramme de Henderson à Washington, 31 août 1953, FRUS, 1952-1954, vol. X, Iran 1951-
1954, document 359 (omis dans la version pdf).
29. Transmis par la CIA. FRUS, 1951-1954, pdf, document 318, p. 765.
30. FRUS, 1951-1954, pdf, p. 750 sq.
31. FRUS, 1952-1954, vol. X, Iran 1951-1954, document 396, l’ambassadeur Henderson au
département d’État, 17 décembre 1953 (omis dans la version pdf).
32. A. ZÂHEDI, Xâterât, I, pp. 287 sq.
33. Gh. R. AFKHAMI, The Life and Times of the Shah, pp. 202 sq.
34. A. ZÂHEDI, Xâterât, I, p. 333.
35. Ibid., p. 335.
36. FRUS, 1955-1957, Near East Region ; Iran ; Iraq, vol. XII, document 378, mémorandum sur la
politique américaine vis-à-vis de l’Iran, 11 janvier 1957.
37. FRUS, 1955-1957, Near East Region ; Iran ; Iraq, vol. XII, document 348, département d’État à
l’ambassade en Iran, 8 février 1956.
38. Rapport de la CIA (Téhéran), 14 septembre 1953, FRUS, 1951-1954, pdf, p. 764.
39. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, 1, c, compte-rendu d’une discussion avec W. Averell Harriman
(vice-Secrétaire d’État), Washington, 27 mars 1961.
40. FRUS, 1955-1957, Near East Region ; Iran ; Iraq, vol. XII, document 393, 11 mars 1957, « The
Shah of Iran – A revised study » par J. H. Stutesman et Th. A. Cassilly.
41. FRUS, 1955-1957, Near East Region ; Iran ; Iraq, vol. XII, document 356, mémorandum du
17 mai 1956.
42. A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, p. 159.
43. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 281, mémorandum d’une conversation, 18 décembre
1959.
44. FRUS, 1955-1957, vol. XII, document 381, National Intelligence Estimate 23 janvier 1957.
45. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 248, note de synthèse, fin août 1958.
46. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 249 National Intelligence Estimate (CIA) 26 août 1958.
47. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 251, 9 septembre 1958.
48. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 252, 18 septembre 1958.
49. A. MEYER, Interview, p. 54.
50. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 255 (CIA), 10 novembre 1958.
51. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 256, mémorandum du NSC, 13 novembre 1958.
Remarquer l’expression « desirable direction ».
52. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 256, document 257, NSC, 5 novembre 1958, § 7.
53. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 256, document 257, NSC, 5 novembre 1958, § 11. Voir
ibid., document 293, NSC, 6 juillet 1960.
54. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 287, NSC, 10 mars 1960.
55. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 293, rapport NSC, 6 juillet 1960 ; sur les élections, ibid.,
document 296, ambassade au département d’État, 4 août 1960.
56. E. R. ONEY, Interview, p. 103.
57. Ibid., p. 109.
58. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 297, l’ambassadeur. à département d’État, 18 août 1960.
59. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 298, mémorandum du 26 août 1960.
60. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 299, note de synthèse, mi-septembre 1960.
61. FRUS, 1949, « The Near East, the Far East and Africa », vol. VI, mémorandum d’une discussion
avec le shah, l’ambassadeur iranien Alâ et le secrétaire d’État, document 331, Washington,
18 novembre 1949.
62. FRUS, 1955-1957, vol. XII, document 360, annexe au mémorandum du 24 juillet 1956.
63. G. YATSEVITCH, Interview, pp. 73 et 75.
64. A. al-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, pp. 319-325.
o
65. NATIONS UNIES, Treaty Series/Recueil des traités, vol. 284, p. 111, n 4132 : le texte officiel
est en anglais et en persan. N° 4132 : Treaty of Amity, Economic Relations, and Consular Rights,
signed at Tehran on 15 August 1955.
66. Arrêt de la Cour internationale de justice, 6 novembre 2003.
67. Le shah à Kennedy, 26 janvier 1961 (4 pages), https://www.jfklibrary.org/. Document JFKPOF-
119-008. Cf. A. MILANI, The Shah, p. 248.
68. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 4, mémorandum du 26 janvier 1961, § 4.
69. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 4, mémorandum du 26 janvier 1961, § 6.
70. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 21, ambassadeur Wailes au département d’État, 14 mars
1961 et document 26, mémorandum, Washington, 26 mars 1961.
71. Rapport du 11 février 1961 annexé à FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 27, mémorandum
du 27 mars 1961 ; sur la corruption dans l’entourage du shah, cf. G. YATSEVITCH, Interview,
pp. 166 sq.
72. Rapport du 11 février 1961 annexé à FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 27, mémorandum
du 27 mars 1961.
73. Ibid., fin de l’annexe I au rapport.
74. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 37, Ankara, 28 avril 1961.
75. R. W. KOMER, « Reminiscences of R.W. Komer », p. 14.
76. FRUS, 1955-1957, vol. XII, document 354, télégramme de Washington à l’ambassadeur à
Téhéran, 16 mars 1956 ; FRUS, 1955-1957, vol. XII, document 410, de l’ambassadeur (Chapin) au
secrétaire d’État, 7 novembre 1957, § 8 ; FRUS, 1958-1960, vol. XII, télégramme du département
d’État à l’ambassadeur. à Téhéran, 16 janvier 1959 ; FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 263,
lettre d’Eisenhower, 30 janvier 1959, et le même jour, télégramme de l’ambassadeur (Walles) au
secrétaire d’État ; G. YATSEVITCH, Interview, p. 46.
77. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 27, toute fin du deuxième rapport annexé au
mémorandum du 27 mars 1961. Voir également G. YATSEVITCH, Interview, p. 57.
78. Ibid., p. 42.
79. B. ÂQELI, « Pišgoftâr », p. 23.
80. Voir A. K. S. LAMBTON, The Persian Land Reform, pp. 50 sq. et 61 sq.
81. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 29, mémorandum du 31 mars.
82. FRUS, 1955-1957, vol. XII, document 339, télégramme de Chapin au secrétaire d’État, 8 octobre
1955.
83. A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, p. 131.
84. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 229, télégramme du département d’État à l’ambassade en
Iran, 28 février 1958. Sur le complot, voir M. J. GASIOROWSKI, « The Qarani affairs and Iranian
politics ».
85. Cf. R. COTTAM, Iran and the United States. A Cold War Case Study, p. 128.
86. H. Fardust in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…, p. 253.
87. A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. II, Jostâr-hâ-i…, pp. 290 sq.
88. https://www.bartleby.com/124/pres56.html, J. F. Kennedy, discours inaugural, 20 janvier 1961.
89. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 41, note de synthèse 10 mai 1961 ; lettre de René de
Chochor (agent littéraire, ami d’Amini) à l’économiste W. Rostow, 10 octobre 1961, JFKL.
90. B. ÂQELI, « Pišgoftâr », p. 19.
91. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 41, note de synthèse, sans date ; G. YATSEVITCH,
Interview, p. 76.
92. A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. II, Jostâr-hâ-i…, p. 296 ;
B. ÂQELI, « Pišgoftâr », p. 18.
93. Ibid., p. 26 ; A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, pp. 47 sq. ; A. AMINI,
H. Lâjvardi (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, pp. 160 sq.
94. (Anonyme, éd.) Dr ‘Ali Amini be-revâyat-e asnâd-e Sâvâk, p. 19.
95. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 46, Wailes, ambassadeur en Iran, au département d’État,
10 mai 1961.
96. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 46, Wailes, ambassadeur en Iran, au département d’État,
10 mai 1961, § 4.
97. Komer à McGeorge Bundy (NSC), rapport préliminaire de l’Iran Task Force, 15 mai 1961,
JFKL.
98. Cabinet du président, NSC, « A review of problems in Iran and recommandations for the NSC, A
report of the Task Force on Iran », 15 mai 1961, https://www.jfklibrary.org/asset-
viewer/archives/JFKNSF/115/JFKNSF-115-011.
99. A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, pp. 29 sq.
É
100. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 64, note sans date (1965) du département d’État.
101. Télégramme, document 1689 du 10 mai 1954, Henderson au secrétaire d’État, accessible sur le
site de la Fondation Eisenhower :
https://www.eisenhowerlibrary.gov/sites/default/files/research/online-documents/declassified/fy-
2012/1954-03-10.pdf.
102. A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, pp. 160 et 214 sq. ; R. HELMS, Interview,
p. 9.
103. A. AMINI, Y. Tavakkoli (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, p. 168.
104. Ibid., p. 159 ; A. AMINI, H. Lâjvardi (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, pp. 133 sq.
105. A. AMINI, H. Lâjvardi (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, pp. 135 sq. et 140 ; A. MILANI, The Shah,
p. 261.
106. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 256, mémorandum du 13 novembre 1958.
107. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 62, mémorandum de Talbot au secrétaire d’État
Rusk, 19 décembre 1964 ; FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 92, télégramme du
département d’État à l’ambassade à Téhéran, 24 juin 1965 ; FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran,
document 106, télégramme de l’ambassade au département d’État, 18 novembre 1965 ;
G. YATSEVITCH, Interview, p. 47.
108. W. M. FLOOR, « The revolutionary character of the ulama… »
109. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 90, session de l’Iran Task Force, 2 août 1961.
110. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 93, mémorandum de F. W. Kromer au président
Kennedy, 4 août 1961.
111. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 97, annexe, lettre de A. Meyer, 11 août 1961, à
l’ambassadeur américain à Téhéran ; FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 98, mémorandum de
R. W. Komer, 11 août 1961.
112. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 105, réunion de l’ITF, 7 septembre 1961.
113. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 127, rapport de l’ITF (Ph. Talbot), 14 octobre 1961.
114. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 129, note relatant une dépêche de Téhéran, fin
octobre 1961.
115. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 134, ambassadeur en Iran au département d’État,
30 octobre 1961.
116. Holmes à Washington, 18 octobre 1961, § 5, https://www.jfklibrary.org/asset-viewer/archives/.
117. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 134, ambassadeur en Iran au département d’État,
30 octobre 1961.
118. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 135, Washington à ambassadeur. en Iran, 31 octobre
1961.
119. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 168, rapport de l’ITF, 18 janvier 1962.
120. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 170, mémorandum de R. W. Komer, 19 janvier 1962
121. Ibid.
122. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 207, l’ambassadeur Holmes au département d’État,
7 mars 1962,
123. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 168, rapport de l’Iran Task Force (Ph. Talbot),
18 janvier 1962 ; ibid., document 170, mémorandum du 19 janvier ; ibid., document 181,
mémorandum du 30 janvier ; ibid., document 209, mémorandum du 8 mars.
124. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 207, ambassadeur Holmes au département d’État,
7 mars 1962.
125. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 172, l’ambassadeur au secrétaire d’État Rusk,
22 janvier 1962.
126. Département d’Etat, instruction politique, 16 mars 1962, https://www.jfklibrary.org/asset-
viewer/archives/.
127. Ibid.
128. R. W. KOMER, « The Reminiscences of R.W. Komer », p. 40.
129. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 218, rapport d’une réunion d’information du NSC,
23 mars 1962.
130. FRUS, ibid., document 224, mémorandum de R. W. Komer au président Kennedy, 28 mars
1962.
131. FRUS, ibid., document 228, mémorandum pour le secrétariat d’État à la Défense, 29 mars
1962. G. YATSEVITCH, Interview, p. 58 dément que le shah ait eu de l’aversion pour Kennedy.
132. FRUS, ibid., document 238, mémorandum pour le président Kennedy, 7 avril 1962.
133. FRUS, ibid., documents 243 et 244, mémorandum de conversations avec le shah, 12 avril 1962.
134. FRUS, ibid., document 246, mémorandum d’une conversation à Washington, 13 avril 1962.
135. Md-R. PAHLAVI, Ma’muriat barâ-ye vatan-am, pp. 231 sq.
136. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 247, mémorandum d’une conversation, Washington,
13 avril 1962.
137. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 108, §§ 2 et 16, télégramme de l’ambassade au
département d’État, 25 novembre 1965.
138. FRUS, 1955-1957, vol. XII, document 410, de l’ambassade au secrétaire d’État, 7 novembre
1957.
139. Mémorandum de G. M. Yatsevitch à l’ambassadeur à Téhéran, 18 septembre 1962, § 1d, JFKL.
140. Ibid., § 1j, JFKL.
141. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 292, le conseiller diplomatique en Iran Stuart
Rockwell au secrétariat d’État, 12 juin 1962.
142. FRUS, ibid., document 294, mémorandum de R. W. Komer, 15 juin 1962 ; ibid., document 295,
télégramme de D. Rusk à l’ambassadeur à Téhéran, 15 juin 1962.
143. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 4, R. W. Komer à Kennedy, 16 juillet 1962.
144. FRUS, ibid., document 5, R. W. Komer à Kennedy, 18 juillet 1962.
145. Mémorandum de la CIA, 16 août 1962, p. 3, JFKL.
146. G. YATSEVITCH, Interview, p. 84.
147. L’ambassadeur à Téhéran, J. C. Holmes, au Département d’État, airgram du 25 juillet 1962,
p. 4, jfklibraryJFKNSF-424-001-p0118
148. Ettelâ’ât, mercredi 27 tir 1341/18 juillet 1962, p. 17 ; note de la CIA, 18 juillet 1962, JFKL,
§ 5.
149. G. YATSEVITCH, Interview, p. 85 ; E. R. ONEY, Interview, p. 46.
150. Rapport confidentiel de Charles D. Jackson (éditeur de Life Magazine), 7 août 1962, relatant
une longue conversation avec le shah ; rapport de la CIA, 16 août 1962, JFKL. Ce rapport de la CIA
est repris, parfois mot pour mot, par un rapport des services de renseignement du 7 septembre intitulé
« Political prospects for Iran », FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 35.
151. G. YATSEVITCH, Interview, pp. 106 sq.
152. Mémorandum d’une conversation avec Robert M Macy, directeur de USAID à Téhéran,
13 septembre 1962 ; divergences de vues à l’ambassade américaine sur le ministère Amini,
17 septembre 1962, JFKL.
153. G. YATSEVITCH, Interview, pp. 119 et 154 ; M. RAFIZADEH, Witness, p. 124 ; J. BILL, The
Eagle and the Lion, p. 137 ; A. al-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi,
pp. 342 sq.
154. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 29, note de synthèse relatant un rapport du
28 septembre 1962. Sur ce voyage, voir R. W. KOMER, « The Reminiscences of R.W. Komer »,
p. 29.
155. Ibid., pp. 12 sq. et 40 ; A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. II, Jostâr-
hâ-i…, pp. 302 sq.
156. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 85, note de synthèse par R. W. Komer, Washington,
20 octobre 1962.
157. FRUS, ibid., p. 194, « Recommendations », § 2.
158. Lettre de l’ancien ambassadeur à Téhéran John C. Wiley au juge Douglas, 12 décembre 1962 ;
R. W. Komer, « Memorandum for record », 15 décembre 1962, JFKL.
159. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
p. 590.
160. A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. II, Jostâr-hâ-i…, pp. 307 et
320 sq. ; MARKAZ-E BARRESI-E ASNÂD-E TÂRIXI (éd.), Doktor Ali Amini be-revâyat-e asnâd-
e Sâvâk ; E. R. ONEY, Interview, p. 45.
161. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
pp. 381 sq.
162. Ibid., p. 387 ; E. R. ONEY, Interview, p. 54.
163. Persécution encouragée par le général T. Bakhtyâr, voir E. R. ONEY, Interview, p. 19.
164. SAVAK, sigle persan de l’« Organisation pour la surveillance et la sécurité du pays », Sâzemân-
e Ettelâ’ât Va Amniat-e Keshvar. Un des formateurs, lui-même analyste de la CIA, était Earnest
R. Oney, cf. E. R. ONEY, Interview, pp. 42 et 49 sq.
165. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
p. 289.
166. FRUS, 1958-1960, vol. XII, document 246, télégramme de l’ambassadeur Wailes au
er
département d’État, 1 août 1958 ; G. YATSEVITCH, Interview, pp. 38 sq. et 60 ; R. COTTAM,
Iran and the United States. A Cold War Case Study, p. 128 ; M. J. GASIOROWSKI, « Obituaries :
Richard W. Cottam (1924-1997) » ; H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e
Pahlavi, vol. I, Xâterât…, p. 330 sq. ; E. R. ONEY, Interview, p. 44.
167. Sur les mémoires de Fardust, voir E. ABRAHAMIAN, Tortured Confessions, pp. 159-162 ;
H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…, p. 292
et 340 sq. ; W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, pp. 76-77 ; A. PAHLAVI, Visages dans un miroir,
p. 210 ; excellent portrait in A. MILANI, Eminent Persians, I, pp. 438-444.
168. E. R. ONEY, Elites and the Distribution of Power in Iran, p. 32. Oney semble penser que
l’aisance financière est liée en général à la corruption.
169. H. FARDUST, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
pp. 409 sq. ; R. HELMS, Interview, p. 6 ; E. R. ONEY, Interview, p. 51.
170. « Memorandum for General Maxwell D. Taylor », JFKL, 17 avril 1962.
171. R. W. KOMER, « The Reminiscences of R.W. Komer », p. 42.
172. Voir https://nsarchive2.gwu.edu//NSAEBB/NSAEBB122/index.htm#kubark ;
Gh. R. AFKHAMI, The Life and Times of the Shah, pp. 384 sq. ; sur le caractère contre-productif de
la torture, voir E. R. ONEY, Interview, pp. 57 sq.
173. Le Monde, 8 octobre 1971.
174. H. FARDUST, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
p. 417.
175. Ibid., p. 424.
176. G. YATSEVITCH, Interview, pp. 24-25 et 68 sq.
177. E. R. ONEY, Interview, pp. 38-40 ; M. RAFIZADEH, Witness, chap. X.
178. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
pp. 420 sq.
179. Ibid., p. 413.
180. Gh. R. AFKHAMI, The Life and Times of the Shah, p. 384 ; E. R. ONEY, Interview, p. 60.
181. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
pp. 389 sq.
182. Ibid., p. 393.
183. Ibid., p. 395 ; Mémoires d’Ardeširji Riporter cités en persan par ŠAHBÂZI, ibid., II, Jostâr-hâ-
i…, pp. 145-159 (aucune référence sur l’existence de l’original anglais/gujarati). Sur la qualité du
renseignement donné par la SAVAK, voir G. YATSEVITCH, Interview, p. 165.
184. A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. II, Jostâr-hâ-i…, p. 151 (récit
autobiographique d’Ardeširji Riporter).
185. Wikipedia (anglais et persan), « Riporter » ; H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-
e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…, pp. 293 sq.
186. Ibid., pp. 293 sq.
187. G. YATSEVITCH, Interview, passim ; H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e
saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…, pp. 337 sq. Sur les activités commerciales de Yatsevitch en Iran
après la fin de sa mission, voir A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. II,
Jostâr-hâ-i…, pp. 226 sq.
188. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
pp. 367 sq. et 443 ; G. YATSEVITCH, Interview, p. 116.
189. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
pp. 342-343 ; E. R. ONEY, Interview, pp. 95-97.
190. W. SHAWCROSS, The Shah’s Last Ride, p. 206.
191. H. Fardust, in A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. I, Xâterât…,
p. 340 ; vol. II, Jostâr-hâ-i…, pp. 210 sq. et 213 ; R. HELMS, Interview, p. 1.
Š Â
192. R. HELMS, Interview, p. 2 ; A. ŠAHBÂZI (éd.), Zohur va soqut-e saltanat-e Pahlavi, vol. II,
Jostâr-hâ-i…, p. 211.
193. R. HELMS, Interview, pp. 7 et 13.
194. Ibid., p. 32.
195. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 99 ; cf. aussi J. GIL GUERRERO, The Carter
Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty, p. 81.
196. Gh. R. AFKHAMI, The Life and Times of the Shah, pp. 389 sq. ; A. MILANI, Eminent
Persians, I, pp. 254-260 ; E. ABRAHAMIAN, Tortured Confessions, pp. 114 sq.
197. Jalâl ÂL-E AHMAD, Xasi dar miqât (« Brin de paille » au lieu de la rencontre), Tehrân,
1345/1966.
198. Sâl-hâ del talab-e Jâm-e Jam az mâ mi-kard / ânče xod dâšt ze bigâna tamannâ mi-kard,
HÂFEZ, Divân, P. N. Xânlari, éd., qazal 136.
199. J. ÂL-E AHMAD, Qarb-zadagi, p. 129 ; trad. fr., p. 103.
200. A. ŠARIATI, Bâ moxâteb-hâ-ye âšenâ, p. 73.
201. E. NARÂQI, Jâme’a, javânân, dânešgâh, pp. 243 sq.
202. Voir D. ŠÂYEGÂN, Bot-hâ-ye zehni va xâtera-hâ-ye azali.. Pour connaître mieux Shayegan,
lire D. SHAYEGAN, Sous les ciels du monde.
203. N.R. KEDDIE, « The roots of the ulama’s power in modern Iran », p. 229.
204. W. M. FLOOR, « The revolutionary character of the ulama… ».
205. Version khomeyniste des événements : Sd H. RUHÂNI, Bar-resi-e tahlili az : nahzat-e Emâm
Xomeyni, I, pp. 329 sq. ; version américaine : FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, Near East, 1962-1963,
document 263, mémorandum de Talbot au secrétaire d’État Rusk, Washington, 6 juin 1963 ; The New
o
York Times, n 38484, jeudi 6 juin 1963, pp. 1 et 8 (probablement la première fois que le nom de
Khomeyni paraît dans le journal).
206. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 249, mémorandum de R. W. Komer, 16 mai 1963.
207. H. ALGAR, « Khomeini », p. 550a.
208. FRUS, 1961-1963, vol. XXII, document 12, 6 avril, document 13 du 8 avril et document 18 du
25 avril 1964, Holmes, ambassadeur en Iran, au département d’État.
209. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 212, « Special national intelligence estimate »,
Washington, 10 avril 1963.
210. FRUS, ibid., document 263, mémorandum, Washington, 6 juin 1963.
211. FRUS, ibid., document 271, mémorandum, Washington, 13 juin 1963.
212. XOMEYNI, Sahifa-ye nur, vol. 1, p. 380 (9 septembre 1964).
213. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 279, télégramme de Téhéran au département d’État,
24 juin 1963.
214. G. YATSEVITCH, Interview, p. 160.
215. NATIONS UNIES, Recueil des traités, vol. 776, p. 289.
216. La convention de Vienne sur les relations diplomatiques (1961), Nations unies, Recueil des
traités, vol. 500, p. 95, art. 1, c et f, n’évoque pas le personnel militaire. [YR]
217. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, document 210, lettre du 9 mars 1962, Talbot (vice-secrétaire
d’État) à William Bundy (assistant au département de la Défense).
218. NATIONS UNIES, Recueil des traités, vol. 776, p. 298 (persan), p. 299 (anglais).
219. FRUS, 1961-1963, vol. XXII, document 18 du 25 avril 1964, Holmes, ambassadeur en Iran, au
département d’État.
220. FRUS, 1961-1963, vol. XXII, document 21, mémorandum du département d’État, 13 mai 1964.
221. FRUS, ibid., document 27, mémorandum du département d’État, 28 mai 1964.
222. FRUS, ibid., document 51, de l’ambassade en Iran au département d’État, 22 septembre 1964.
223. « Bayânât-e Emâm Xomeyni dar mowred-e naqša-hâ-ye este’mâr barâ-ye qârat-e mamâlek-e
eslâmi » [Déclaration de l’imam Khomeyni au sujet des plans des colonialistes pour piller les pays
islamiques], Sahifa-ye Emâm, vol. 1, pp. 373-396, 18 šahrivar 1343 / 9 septembre 1964. Description
de l’événement du point de vue khomeyniste : Sd H. RUHÂNI, Bar-resi-e tahlili az : nahzat-e Emâm
Xomeyni, I, p. 696 sq.
224. Ibid.
o
225. Ettelâ’ât (n 11511) lundi 20 mehr 1343/12 octobre 1964, p. 14.
e
226. Débats du Parlement iranien, séance 104 de la 21 législature (internet) ; FRUS, 1961-1963,
vol. XXII, document 52, de l’ambassade en Iran au département d’État, 14 octobre 1964.
227. E. R. ONEY, Interview, p. 67.
228. A. al-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, pp. 317 sq. ; Ḥ. –
‘A. MONTAẒERI, Xâterât, pp. 112 sq.
229. M. BAQÂ’I-KERMÂNI, Šenâxt-e haqiqat, pp. 424-425.
230. M. BAQÂ’I-KERMÂNI, Interview en persan recueillie par H. Ladjevardi, New York, 24 juin
1986, transcription de la bande magnétique 21, p. 9.
231. A. MILANI, Eminent Persians, I, p. 116.
232. Voir https://mashruteh.org/wiki/index.php?title =قرارداد_وین_درباره_روابط_سیاسی ; Sd
H. RUHÂNI, Bar-resi-e tahlili az : nahzat-e Emâm Xomeyni, I, p. 708.
233. J. ÂL-E AHMAD, Dar xedmat va xiânat-e rowšanfekrân, II, pp. 84-90.
234. Sd H. RUHÂNI, Bar-resi-e tahlili az : nahzat-e Emâm Xomeyni, I, p. 711.
235. Je traduis d’après la version de Ruhâni. Celle de Jalâl Âl-e Ahmad est légèrement différente
(autre transcription de l’enregistrement, avec une incise intéressante d’Âl-e Ahmad à propos de
l’éducation des filles, voir infra). Sd H. RUHÂNI, Bar-resi-e tahlili az : nahzat-e Emâm Xomeyni, I,
pp. 716-726 ; R. XOMEYNI, « Payâm » et « Soxanrâni dar jam’-e mardom (moxâlefat bâ lâyeha-ye
kâpitulâsion va e’lâm-e azâ-ye omumi) », Sahifa-ye Emâm, vol. 1, pp. 409-413 et 415-424.
236. * L’ambassade américaine note, le 27 octobre (lendemain du discours), que le 25 (la veille du
discours), le Majles a voté à l’unanimité l’approbation du prêt de 200 millions de dollars (FRUS,
o
1964-68, Iran, vol. XXII, n 54, télégramme de l’ambassade au département d’État, 27 octobre 1964,
sans aucune allusion au discours de Khomeyni). Au sujet de cet emprunt, voir infra la partie
consacrée au programme d’achat d’armement.
237. ** Et, en envoyant Khomeyni en exil en Turquie quelques jours après ce discours, le
gouvernement iranien répond par l’affirmative, il est bien sous l’occupation des Américains (note de
Sd H. RUHÂNI, Bar-resi-e tahlili az : nahzat-e Emâm Xomeyni, p. 721).
238. *** Dans la traduction persane de la convention de Vienne ratifiée peu avant par le Majles, cet
article avait été – accidentellement – omis. La discussion du Parlement pour l’extension de cette
convention au personnel militaire américain a soulevé l’objection : avons-nous ratifié de manière
valide une convention internationale et pouvons-nous par la suite étendre cette convention dont nous
ne connaissons pas tous les termes à des catégories nouvelles de bénéficiaires ? L’article 32 prévoit
que les bénéficiaires de l’immunité diplomatique peuvent renoncer à l’immunité de juridiction sans
perdre leur droit à l’immunité d’exécution de jugement ou à l’exemption de taxes douanières. Il est
donc pertinent de mettre en question la validité d’une ratification où cet article n’est pas repris. Les
juristes du Parlement ont trouvé une parade : la ratification ne portait pas sur les articles séparés, mais
sur la totalité de la convention.
239. **** Il s’agit de l’annulation de la mission Shuster en 1911.
240. ***** Khomeyni dit : les « Soviétiques ».
241. ****** Voici cet article, résultat d’une longue négociation entre les islamistes cléricaux et les
modernistes laïcs : « La vénérée Assemblée consultative nationale – instituée grâce à la bienveillante
assistance de l’imam du Temps, grâce à la généreuse attention de Sa Majesté le Roi des Rois de
l’islam, sous la surveillance des théologiens et de toute la nation de l’Iran – ne doit en aucun moment
adopter un article de loi qui s’écarte des préceptes vénérés de l’islam et des lois édictées par le
Prophète. Il est décidé que les ulémas les plus savants auront la responsabilité de distinguer si les lois
proposées sont contraires aux préceptes de l’islam. C’est pourquoi un aréopage d’au moins cinq
théologiens de haut rang et de pieux docteurs de la loi instruits des nécessités du temps présent sera
institué en permanence de manière officielle : ainsi [les dignitaires islamiques] présenteront à
l’Assemblée les noms de vingt ulémas qui possèdent les qualités requises ; les députés en choisiront
cinq ou plus selon les circonstances, à l’unanimité ou par tirage au sort, et les reconnaîtront comme
membres de leur Assemblée, pour qu’ils examinent avec soin les articles présentés aux deux
chambres, qu’ils exposent et rejettent les articles contraires aux préceptes vénérés de l’islam afin
qu’ils ne deviennent pas articles de loi. L’avis de cet aréopage sera obéi et suivi. Cet article ne pourra
être changé jusqu’au retour de [l’imam] garant de notre temps » (voir Y. RICHARD, L’Iran de 1800
à nos jours, p. 132).
242. Y. RICHARD, L’Iran de 1800 à nos jours, p. 128.
243. Ḥ. – ‘A. MONTAẒERI, Xâterât, p. 120.
244. J. ÂL-E AHMAD, Dar xedmat va xiânat-e rowšanfekrân, II, pp. 86.
245. Y. RICHARD, « Clercs et intellectuels dans la République islamique d’Iran ».
e
246. Mašruh-e mozâkerât-e Majles-e Senâ, 4 législature, séance 75, samedi 9 âbân 1343/31 octobre
o
1964 ; Ettelâ’ât, n 11527, 9 âbân 1343, pp. 1 et 13 ; FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran,
document 55, télégramme du chargé d’affaires Rockwell au département d’État, 3 novembre 1964.
247. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 56, télégramme du conseiller Rockwell au
département d’État, 4 novembre 1964.
248. FRUS, ibid., Iran, document 58, télégramme du conseiller Rockwell au département d’État,
5 novembre 1964.
249. A. al-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, p. 317.
250. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 64, note sans date (1965) du département d’État.
251. E. R. ONEY, Interview, p. 73.
252. L. FOCSANEANU, « La “Doctrine Eisenhower” pour le Proche-Orient », p. 42.
253. Ibid., pp. 86 sq.
254. FRUS, 1951-1954, pdf, pp. 890 sq., NSC, « United States policy toward Iran… Part 3, strategic
significance of Iran », 2 janvier 1954.
255. Rapport de la CIA du 20 octobre 1947, cité par S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards
the Shah’s Iran, p. 8. J’ai utilisé le livre de McGlinchey pour cette section sur l’armement.
256. La « doctrine Eisenhower » a été exposée lors d’un discours au Congrès le 5 janvier 1957. Voir
A. AMINI, Y. TAVAKKOLI (éd.), Xâṭerât-e ‘Ali Amini, p. 129.
257. FRUS, 1958-1960, vol XII, document 241, mémorandum d’une conversation téléphonique
entre Eisenhower et Foster Dulles, 30 juin 1958.
258. FRUS, 1955-1957, Near East Region, Iran, Iraq, vol. XII, document 406, mémorandum d’une
conversation entre Dulles et Ardalân, New York, 17 septembre 1957.
259. FRUS, 1958-1960, Near East Region, Iraq, Iran, Arabian Peninsula, vol. XII, document 226,
mémorandum d’une conversation entre le shah et l’ambassadeur Cabot Lodge, Téhéran, 2 février
1958.
260. FRUS, 1958-1960, Near East Region, Iraq, Iran, Arabian Peninsula, vol. XII, document 225,
télégramme de H. Cabot Lodge au département d’État, Téhéran, 25 janvier 1958.
261. FRUS, ibid., document 243, message du président Eisenhower au shah, télégraphié du
département d’État le 19 juillet 1958.
262. FRUS, 1958-1960, Near East Region, Iraq, Iran, Arabian Peninsula, vol. XII, document 245,
mémorandum intergouvernemental (Défense-Secrétariat d’État), Washington, 24 juillet 1958, § I, 1,
a : « Military assistance ».
263. R. W. KOMER, « The Reminiscences of R.W. Komer », p. 32.
264. FRUS, 1962-1963, vol. XVIII, document 43, télégramme du département d’État à
l’ambassadeur à Téhéran, 18 septembre 1962 ; ibid., document 44, mémorandum d’une conversation
avec le shah, 19 septembre 1962.
265. FRUS, 1958-1960, Near East Region, Iraq, Iran, Arabian Peninsula, vol. XII, document 259,
mémorandum de conversation, BIRD, Washington, 9 décembre 1958.
266. FRUS, 1958-1960, Near East Region, Iraq, Iran, Arabian Peninsula, vol. XII, document 260,
télégramme du département d’État à l’ambassade à Téhéran, 16 janvier 1959.
267. FRUS, ibid., document 235, l’ambassadeur Chapin au département d’État, 29 mai 1958.
268. FRUS, 1961-1963, vol. XVII, Near East, 1961-1962, document 224, mémorandum de
R. W. Komer au président Kennedy, 28 mars 1962.
269. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, Near East, 1962-1963, document 29, note de synthèse relatant le
rapport de Johnson daté du 28 septembre 1962.
270. FRUS, ibid., Near East, 1962-1963, document 43, télégramme du département d’État à
l’ambassade en Iran, 18 septembre 1962.
271. FRUS, ibid., Near East, 1962-1963, document 42, mémorandum de R. W. Komer, 14 septembre
1962. Mémorandum de G. Yatsevitch (CIA) à l’ambassadeur, 18 septembre 1962, jfklibrary
JFKNSF-424-001-p0076, § g ; A. al-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi,
pp. 299 sq.
272. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, document 42, mémorandum de R. W. Komer au conseiller du
président, 14 septembre 1962.
273. A. al-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, pp. 299-300 ;
mémorandum d’une conversation avec le shah de G. Yatsevitch, le 17 septembre 1962, Jfklibrary
JFKNSF-424-001-p0076.
274. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, Near East, 1962-1963, document 43 (supra) ; id., document 44,
mémorandum d’une conversation entre le shah, Holmes, le général John C. Hayden et le général
H. A. Twitchell, 19 septembre 1962 : voir en particulier la dernière note.
275. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, Near East, 1962-1963, document 85, note de synthèse par
R. W. Komer, Washington, 20 octobre 1962.
276. Jfklibrary (JFKNSF-424-001-p0040), « Outline of country defense plan – Iran », 30 octobre
1962.
277. Ibid., p. 11, volet militaire.
278. S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, pp. 32-33.
279. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 23, « National Intelligence Estimate », 20 mai
1964.
280. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 24, lettre de Holmes à Rusk, 20 mai 1964 et la
note 3.
281. FRUS, ibid., document 27, télégramme de l’ambassade au département d’État, 28 mai 1964.
282. FRUS, ibid., document 42, compte rendu d’une conversation, Washington, 12 juin 1964.
283. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 46, mémorandum de H. Saunders (National
Security Council) au conseiller du président, Washington, 2 juillet 1964.
284. FRUS, ibid., document 49, ambassadeur Holmes au département d’État, Téhéran, 4 juillet 1964.
285. FRUS, ibid., document 79, mémorandum de la CIA, Washington, 23 avril 1965.
286. FRUS, ibid., document 80, mémorandum d’une réunion au Pentagone avec des représentants du
département d’État, Washington, 23 avril 1965.
287. FRUS, ibid., document 110, § C, télégramme de l’ambassadeur Meyer au département d’État,
28 novembre 1965.
288. FRUS, ibid., document 77, mémorandum de R. W. Komer pour le président Johnson, 15 avril
1965.
289. FRUS, ibid., document 102, télégramme de l’ambassadeurMeyer au département d’État,
24 septembre 1965 ; A. MEYER, Quiet Diplomacy, p. 142.
290. FRUS, ibid., 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 110, télégramme de l’ambassade au
département d’État, 28 novembre 1965.
291. R. NIXON, The Real War, p. 84 ; H. PRECHT, Interview, p. 42.
292. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 122, lettre du shah au président Johnson, 7 mars
1966 ; ibid., document 123, ambassade en Iran au département d’État, 14 mars 1966.
293. FRUS, ibid., document 135, mémorandum de la CIA, Washington, 6 mai 1966.
294. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 141, W. Rostow au président Johnson, 21 mai
1966.
295. The New York Times, 24 août 1967, p. 13.
296. Lettre du 14 mai 1966 [Digital National Security Archive, IR00581] citée par
S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, p. 45 ; A. MEYER, Quiet Diplomacy,
p. 143.
297. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 143, pièce jointe, Meyer au président Johnson,
23 mai 1966 ; A. MEYER, Quiet Diplomacy, pp. 141-142.
298. FRUS, ibid., document 151, l’ambassadeur au département d’État, 7 juillet 1966, § 15.
299. FRUS, ibid., document 165, W. Rostow au président Johnson, 29 juillet 1966.
er
300. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 166, mémorandum du 1 août 1966 des chefs
d’état-major au secrétaire à la Défense ; FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 167,
mémorandum du 2 août de W. Wriggins à W. Rostow ; A. MEYER, Quiet Diplomacy, p. 145 ;
S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, pp. 46-48, qui utilise d’autres
archives américaines auxquelles je n’ai pas eu accès.
301. FRUS, ibid., document 167, W. Rostow à D. Rusk (Dép. d’État) et R. McNamara (Défense),
2 août 1966.
302. FRUS, ibid., document 173, lettre du shah au président Johnson, 15 août 1966.
303. S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, pp. 48-49.
304. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 237, télégramme du département d’État à
l’ambassade à Téhéran, 26 août 1967 ; S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s
Iran, p. 50.
305. FRUS, ibid., document 241, A. Meyer au département d’État, 3 novembre 1967.
306. FRUS, ibid., document 242, le shah au président Johnson, 15 novembre 1967.
307. A. MEYER, Interview, p. 28.
308. Ibid., p. 22.
309. S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, p. 52.
310. A. MEYER, Quiet Diplomacy, p. 146.
311. R. NIXON, discours radiodiffusé, 3 novembre 1969, http://www.nixonlibrary.gov/. Cette
« doctrine » a été énoncée la première fois dans l’île de Guam en juillet 1969. Voir A. ol-R. H.
MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, pp. 400 sq.
312. Le Monde, 15 mai 1973 : « Le chah se pose en “gardien et protecteur” du golfe Persique ».
313. Md-R. PAHLAVI, discours devant les commissionnaires du Cinquième plan quinquennal (en
persan), Persépolis, 6 novembre 1972 (15 âbân 1351), https://mashruteh.org/wiki/.
314. R. NIXON, The Real War, pp. 272 sq.
315. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 122,
conversation entre Nixon, MacArthur et le général Haig, 8 avril 1971.
316. A. MEYER, Quiet Diplomacy, p. 140.
317. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, n. 180, A. Meyer au département d’État, 2 novembre 1966,
§ 9.
318. R. NIXON, The Memoirs of Richard Nixon.
319. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 121,
mémorandum de Kissinger à Nixon, 6 avril 1971.
320. R. NIXON, The Real War, p. 296.
o
321. Ettelâ’ât, n 13809, 9 et 10 xordâd 1351/30 et 31 mai 1972.
322. Md-R. PAHLAVI, Be-su-ye tamaddon-e bozorg, p. 209 ; A. MEYER, Interview, p. 36.
323. G. C. HERRING, From Colony to Superpower, p. 799.
324. Le Monde, 8 octobre 1971 : « L’absence de M. Pompidou aux fêtes de Persépolis… » ;
12 octobre 1971, « Persépolis accueille avec un faste sans précédent des dizaines de chefs d’État et
de gouvernement », par Éric Rouleau.
325. H. KISSINGER, White House Years, « XXIX, Summit Aftermath, A Visit to the Shah of Iran »,
p. 1480.
326. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 158, Kissinger
à Nixon, 11 janvier 2012.
327. A. ol-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, p. 402.
328. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 182,
er
télégramme de L. Douglas Heck (Téhéran) au département d’État, 1 mai 1972.
329. FRUS, ibid., document 185, mémorandum de Helms à Kissinger, 4 mai 1972 ; id.,
document 188, Heck au département d’État, 6 mai 1972.
330. FRUS, ibid., document 200, mémorandum de conversation entre le shah, Nixon et Kissinger,
Téhéran, 30 mai 1972.
331. A. ‘ALAM, Yâddâšthâ-ye ‘Alam, II, p. 283 (9 et 10 xordâd 1351/30 et 31 mai 1972).
er er
332. The New York Times, jeudi 1 juin 1972, p. 16 ; Le Monde, 1 juin 1972, « Téhéran, attentats
contre des Américains… ».
er
333. The Washington Post, 1 juin 1972, p. 3.
334. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 168, rapport
non signé, Téhéran, 28 février 1972 ; E. ABRAHAMIAN, The Iranian Mojahedin, p. 140.
o er
335. Ettelâ’ât, n 13811, jeudi 11 xordâd 1351/1 juin 1972, p. 29.
336. A. ‘ALAM, Yâddâšthâ-ye ‘Alam, II, p. 286 (10 xordâd 1351/31 mai 1972). La version anglaise
est déficiente.
er
337. Ibid., p. 287 (11 xordâd 1351/1 juin 1972).
er
338. The New York Times, 1 juin 1972, p. 16.
339. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 202,
o
communiqué irano-américain commun, Téhéran, 31 mai 1972 ; Ettelâ’ât, n 13811, jeudi 11 xordâd
er
1351/1 juin 1972, p. 4.
340. G. BALL, The Past Has another Pattern, pp. 454 sq.
341. S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, p. 82 ; J. GHAZVINIAN,
America and Iran, chap. 17, « The final emperor » ; A. ol-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân
dar dowrân-e Pahlavi, p. 405.
342. Ibid., pp. 404-406 ; pour le montant des dépenses, voir aussi S. MCGLINCHEY, US Arms
Policies towards the Shah’s Iran, p. 80.
343. A. ‘ALAM, Yâddâšthâ-ye ‘Alam (9 et 10 xordâd 1351/30 et 31 mai 1972). The Washington
er
Post, 1 juin 1972, p. 3.
er o er
344. The New York Times, 1 juin 1972, p. 16 ; Ettelâ’ât, n 13811, jeudi 11 xordâd 1351/1 juin
1972, p. 4.
345. 3. H. KISSINGER, White House Years, p. 1259.
346. 4. Ibid., p. 1260.
347. 5. Ibid., p. 1261.
348. Ibid., p. 1261.
349. Ibid., p. 1262.
350. Ibid., p. 1262.
351. Ibid., p. 1263.
352. Ibid., p. 1264.
353. Ibid., p. 1265.
354. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 201,
mémorandum d’une conversation entre Nixon, le shah et Kissinger, 31 mai 1972.
355. Le shah renonçait à l’accompagner parce que Mao, malade, n’aurait pas pu le recevoir.
356. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 201,
mémorandum d’une conversation entre Nixon, le shah et Kissinger, 31 mai 1972.
357. H. H. SAUNDERS, Interview, p. 56.
358. FRUS, 1964-1968, vol. XXII, Iran, document 285, J. Foster (NSC) à W. Rostow, 21 mai 1968 ;
FRUS, 1964-1968, vol. XXI, Near East Region, Arabian Peninsula, document 155, mémorandum du
département d’État avant l’envoi d’une commission d’experts militaires en Iran, 28 août 1968.
359. A. MEYER, Interview, pp. 53 sq.
360. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 7, Saunders
er
(NSC) à Kissinger, 1 avril 1969.
361. R. ALVANDI, Nixon, Kissinger and the Shah, p. 30.
362. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 1, tableau
estimatif (CIA), 10 janvier 1969, §§ 15 et 16.
363. A. ‘ALAM, Yâddâšthâ-ye ‘Alam, 17 avril 1969 (28 farvardin 1348).
364. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 11,
l’ambassadeur Meyer au département d’État, 18 avril 1969 ; A. ‘ALAM, Yâddâšthâ-ye ‘Alam,
19 avril 1969 (30 farvardin 1348) ; R. ALVANDI, Nixon, Kissinger and the Shah, p. 44.
365. FRUS, ibid., document 12, Bureau renseignement et recherche (Washington) au Secrétaire
d’État Rogers, 22 avril 1969.
366. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 93, secrétaire
à la Défense (Laird) au secrétaire d’État, Washington, 27 octobre 1970.
367. FRUS, ibid., document 97, mémorandum de National Security Decision, Washington,
7 novembre 1970.
368. FRUS, ibid., document 33, mémorandum d’une conversation du shah avec plusieurs ministres
américains, Washington, 22 octobre 1969 ; R. ALVANDI, Nixon, Kissinger and the Shah, p. 55.
369. FRUS, 1969-1976, vol. E-4, Documents on Iran and Iraq, 1969-1972, document 55,
l’ambassadeur (relatant une audience avec le shah) au département d’État, 19 mars 1970.
370. FRUS, 1969-1976, vol. XXII, Iran-Iraq, 1973-1976, document 29, mémorandum d’une
conversation, Washington, 26 juillet 1973.
371. R. ALVANDI, Nixon, Kissinger and the Shah, pp. 114-119.
372. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, pp. 29 et 31 ; H. PRECHT, Interview, p. 43, estime leur
nombre à 50 000 en 1975.
373. FRUS, 1969-1976, vol. XXVII, Iran-Iraq, 1973-1976, document 99, mémorandum de Leonard
Sullivan Jr, analyste du Dépaetement de la Défense au Secrétaire à la Défense James R. Schlesinger
et au vice-secrétaire à la Défense William P. Clements, 23 janvier 1975 ; W. H. SULLIVAN, Mission
to Iran, p. 28. Voir aussi A. MEYER, Interview, pp. 24 et 51.
374. A. QARABÂQI, Xâterât-e Ženerâl, p. 99 (fr. A. GHARABAGHI, Vérités sur la crise
iranienne, p. 81).
375. M. EBTEKAR, Takeover in Tehran, p. 61 ; dénonciation virulente de l’impérialisme culturel et
de la morbidité de l’Occident chez les Iraniens par R. XOMEYNI, Sahifa-ye emâm, vol. X,
pp. 387 sq., discours aux étudiants d’une école d’interprétariat, 7 âbân 1358 (29 octobre 1979).
376. H. KISSINGER, Years of Upheaval, chap. XIV, « Persian Gulf Interlude », pdf, p. 481.
377. S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, p. 112.
378. Ibid., p. 97 ; W. BURR, « A brief history of U.S.-Iranian nuclear negotiations ».
379. Interview du shah par André Fontaine, Le Monde, 25 juin 1974 ; W. BURR, « A brief history of
U.S.-Iranian nuclear negotiations », n. 3.
380. FRUS, 1969-1976, vol. XXVII, Iran ; Iraq, 1973-1976, documents 159 et 160, mémorandum
du 26 et du 30 janvier 1976, NSC au président Ford ; document 162, mémorandum de B. Snowcroft,
4 février 1976, etc. ; W. BURR, « A brief history of U.S.-Iranian nuclear negotiations », n. 2 à 5 ;
W. BURR, contribution au site Nuclear Vault,
https://nsarchive2.gwu.edu//nukevault/ebb268/index.htm ; ُE. R. ONEY, Interview, p. 78.
381. A. ‘ALAM, Yâddâšthâ-ye ‘Alam, 8 âzar 1354 / 29 novembre 1975.
382. C. VANCE, Hard Choices, p. 318.
383. Ḥ. – ‘A. MONTAẒERI, Xâterât, p. 188.
384. https://fas.org/irp/offdocs/pd/pd13.pdf : Federation of American Scientists, Intelligence
Resource Program, Presidential Directives (PD), Carter Administration, 1977-1981.
385. C. VANCE, Hard Choices, p. 319.
o
386. A. MILANI, The Shah, p. 330 ; Ettelâ’ât, n 15376, dimanche 9 amordâd 2536/31 juillet 1977,
pp. 1 et 4.
387. C. VANCE, Hard Choices, p. 320 ; J. CARTER, Keeping Faith, p. 434.
388. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 115. Voir aussi C. VANCE, Hard Choices, pp. 319 sq.
389. Ibid., p. 321.
390. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 117.
391. A. MEYER, Quiet Diplomacy, pp. 148 et 155.
392. S. MCGLINCHEY, US Arms Policies towards the Shah’s Iran, p. 62.
393. FRUS, 1955-1957, Near East Region ; Iran ; Iraq, vol. XII, document 393, dépêche de
l’ambassade au département d’État, Téhéran, 11 mars 1957, p. 910.
394. 1. Ibid., p. 912.
395. 2. Ibid., p. 914.
396. 3. Ibid., p. 914.
397. Ibid., p. 915.
398. Ibid., p. 916.
399. 3. Ibid., p. 916.
400. 1. Ibid., p. 916.
401. 2. Ibid., p. 918.
402. 3. Ibid., p. 918.
403. Ibid., p. 918.
404. FRUS, 1961-1963, vol. XVIII, Near East 1962-1963, document 382, mémorandum du
département d’État, 6 décembre 1963.
405. E. R. ONEY, Elites and the Distribution of Power in Iran (désormais accessible librement sur
un site de la CIA : Documents from the US Espionage Den, Iran Embassy, CIA Station, 1979, pp. 2-
83). FRUS, 1969-1976, vol. XXVII, Iran ; Iraq, 1973-1976, doc. 161, Research study, CIA,
Washington, février 1976.
406. E. R. ONEY, Elites and the Distribution of Power in Iran, p. 74, qui reprend ici l’interview du
shah à l’île de Kish, telle qu’elle est publiée dans le New York Times, dimanche 31 mars 1974 p. 16.
Les propos cités sont rapportés du shah lui-même. La fameuse phrase du shah disant « arranger les
choses pour que son successeur ne fasse aucun mal » figurait déjà dans le rapport Oney (p. 15).
407. Documents from the US Espionage Den, Iran Embassy, CIA Station, 1979, vol. 7, p. 98. Le
e
texte parle du « VII siècle » (seventh century, manifestement un lapsus pour seventeenth).
408. E. R. ONEY, Interview, pp. 8-9.
409. T. McDANIEL, Autocracy, Modernization and Revolution in Russia and Iran, p. 89.
410. Rapport émanant de l’ambassade de Téhéran (E.O. = Earnest Oney ?), 28 janvier 1975,
Documents from the US Espionage Den, Iran Embassy, CIA Station, 1979, vol. 7, p. 136.
411. FRUS, 1969-1976, vol. XXVII, Iran ; Iraq, 1973-1976, doc. 180, Téhéran au secrétariat d’État,
er
1 août 1976.
412. FRUS, ibid., doc. 184, Téhéran au Secrétariat d’État, 18 août 1976 ; ibid., doc. 185,
mémorandum de Frank Huddle Jr, Washington, 20 août 1986.
413. FRUS, 1969-1976, vol. XXVII, Iran ; Iraq, 1973-1976, doc. 188, mémorandum de
conversation entre Gromyko, Kissinger et des diplomates soviétiques et américains, New York,
29 septembre 1976.
414. The New York Times, 7 octobre 1976, p. 38. Le texte intégral du débat est publié pp. 36-38.
415. Dr Sd J. MADANI, Târix-e siâsi-e mo‘âṣer-e Irân, II, pp. 234-239.
Carter et le shah
Entre la défense des droits de l’homme et la vente, déjà actée par ses
prédécesseurs, d’un arsenal impressionnant à l’Iran, Carter était prisonnier
des contradictions récurrentes des dirigeants de son pays. Le shah, qui se
disait allié et admirateur de la démocratie américaine, ne pouvait pas
ignorer cette tension et, après chaque alternance politique, devait séduire
des interlocuteurs rétifs pour continuer à en obtenir le soutien 1.
Dès la prise de fonction du nouveau président, le shah lui envoya un
télégramme amical de félicitations. Du fait de l’inexpérience des nouveaux
responsables démocrates, une coupable négligence fit attendre deux mois la
lettre de remerciement au shah, alourdissant inutilement le climat de ce
nouveau départ. Conformément à l’« espace politique ouvert » qu’il avait
défini, le shah fit acquitter ou élargir un certain nombre de prisonniers
politiques à l’occasion du nouvel an iranien (21 mars). Il se confia
sarcastiquement au nouvel ambassadeur américain William Sullivan pour
lui montrer son manque de conviction dans l’application des droits de
l’homme : « Ce ne sont que des criminels, mais j’espère que cela réjouira
Washington » 2 !
« Penser l’impensable »
Mais que disait Sullivan dans cette fameuse dépêche qui a tant
déstabilisé le soutien de Carter au shah ? En attendant la publication des
documents d’archives pour cette période très sensible et si prolixe en
correspondances diplomatiques multiples et confuses, on doit se référer à ce
que les acteurs nous livrent eux-mêmes.
Je remarque tout d’abord que la relation des deux ambassadeurs
impériaux avec le shah est très perverse. Le shah, en perte progressive de sa
superbe, n’arrête pas de les convoquer au palais pour solliciter leur avis,
comme si le soulèvement ayant été fomenté depuis Londres ou Washington,
l’ordre ne serait rétabli que par Londres ou Washington. Et le Britannique
ose raconter sans aucune gêne, alors que l’effondrement du régime est
encore récent, qu’il donnait alors au shah – certes à titre personnel, sans
mandat particulier du Foreign Office, mais sans être désavoué non plus –
des conseils, on a presque envie de lire des directives, en vue de telle ou
telle solution, que, en contradiction avec son collègue américain, il lui
déconseillait formellement la solution militaire : elle ne manquerait pas de
provoquer un blocage généralisé du pays. En recevant un représentant du
clergé shi’ite à son ambassade, Parsons se trouve, bien qu’il s’en défende,
dans la position du négociateur entre le shah et les opposants, un peu
comme les diplomates de l’été 1906 qui transmettaient à Mozaffaroddin
Shâh les demandes des révolutionnaires réfugiés dans les jardins de la
chancellerie britannique.
L’envoyé de Washington a une position plus délicate encore en raison
des trente-cinq ou quarante mille ressortissants qu’il doit protéger et des
intérêts militaires et stratégiques qu’il doit défendre. Le 9 novembre 1978,
Sullivan change de discours.
Le gouvernement militaire du général Azhâri est à peine installé et les
Téhéranais sont à peine remis des troubles du 5 novembre qui ont mis la
capitale en état d’émeute généralisée. L’origine réelle de ces mises à sac de
banques, de cinémas et de débits de boissons n’est pas vraiment élucidée, et
l’ambassadeur britannique accuse indirectement les forces de l’ordre
d’avoir provoqué des destructions pour faire accepter plus facilement
26
l’option du gouvernement militaire .
Sullivan distingue Mahmud Tâleqâni et Mohammad Beheshti, parmi les
clercs en vue, tous deux ont une expérience de type universitaire. Cette
appréciation est intéressante : en effet, ils peuvent être qualifiés
d’« intellectuels » au sens où ils ont reçu, en plus de leur cursus clérical
traditionnel (feqh, connaissance du Coran, de la tradition islamique et des
rituels), une ouverture vers le monde extérieur. Pour Tâleqâni,
l’« université » serait plutôt la prison où, côtoyant des militants de gauche,
il s’est intéressé aux mouvements sociaux et au marxisme, une démarche
originale pour un clerc. Il a également milité dans le Front national autour
de Mosaddeq, et plus tard dans le Mouvement pour la liberté en Iran
(Nahzat-e âzâdi) avec son ami Mahdi Bâzargân. Ses enfants étaient engagés
dans des mouvements de gauche, marxistes ou islamo-marxistes. Tâleqâni,
qui était très populaire, venait d’être libéré de prison (avec des dizaines de
prisonniers politiques) et suscitait un regain d’enthousiasme
révolutionnaire. Quant à Beheshti, qui avait séjourné longtemps à
Hambourg comme recteur de la mosquée shi’ite, sa connaissance des
langues européennes (surtout l’anglais et l’allemand) et de l’Europe lui
permettait de concevoir plus clairement que les autres ce que pourrait être
une république inspirée par l’islam. En plus de ces deux clercs, Sullivan
prend conscience que des universitaires ou cadres supérieurs restés fidèles à
la foi musulmane sont capables d’assurer la relève du pays, et que donc
Khomeyni, réputé à tort ou à raison n’avoir aucune expérience dans le
domaine de la gestion et de la politique, est déjà virtuellement entouré de
gens capables de prendre en main les affaires de l’Iran. J’ai tenté ailleurs de
montrer que notre concept d’« intellectuel » laïc et rationaliste pouvait être
étendu à des catégories plus larges incluant des clercs : un intellectuel est un
créateur de valeurs centrales dans la société, et on peut être attaché à des
valeurs absolues, à une foi, tout en promouvant une vision neuve des
rapports sociaux et politiques 27.
Autour de Tâleqâni et de Beheshti, des figures d’intellectuels non
enturbannés viennent conforter cette image : outre l’ingénieur Bâzargân,
Sullivan cite Amir-Entezâm, Nâser Minâči, Ebrâhim Yazdi… Ce dernier,
non seulement “docteur” (en biologie), mais devenu citoyen américain en
1971, est parfaitement bilingue.
La considération, même quelque peu obscure, que Sullivan manifeste
pour des figures de l’opposition khomeyniste le conduit à ne plus voir
l’avenir de l’Iran en termes aussi catastrophistes que précédemment. Si le
shah tombe, c’est-à-dire si le gouvernement militaire échoue, certes les
Américains perdront un allié avantageux, mais on peut entrevoir une relève
par des gens compétents et ouverts au dialogue. C’est ainsi je crois qu’il
faut voir le sens de la fameuse dépêche du 9 novembre qui va changer le
regard de Washington 28.
La vitalité de la tendance religieuse, shi’ite, de la nation iranienne,
analyse l’ambassadeur américain, est frappante au moment où la popularité
du shah s’épuise. Son soutien principal, c’est l’armée. Or, même si les
militaires réussissent à remettre l’économie iranienne sur les rails, « il y
aura, écrit Sullivan, une persistance de la tension et une augmentation du
terrorisme ». Si les militaires échouent, il faudra réexaminer les
conséquences pour les États-Unis et faire en sorte que l’armée et le clergé
puissent coexister pacifiquement « selon les lignes qu’il a exposées pour
examen à Washington ». Quels politiciens modérés ? Bâzargân et Minâči,
bien différents de l’Égyptien Nasser ou du Libyen Qaddafi,
deux personnages emblématiques que Khomeyni aurait tendance à prendre
comme modèle. Et bien sûr les plus haut gradés seraient partis avec le shah,
laissant l’autorité militaire aux mains de plus jeunes officiers. L’avantage
pour les dirigeants religieux et pour Khomeyni lui-même serait de
débarrasser l’Iran du shah et d’éviter un bain de sang, tout en préservant les
forces armées nécessaires pour maintenir la loi et l’ordre pour le nouveau
régime. Pour les Américains, une telle solution éviterait le chaos, en
garantissant le maintien de l’intégrité territoriale et bloquerait les tentatives
de contrôle du golfe Persique par les Soviétiques. Sullivan ajoute, à
l’attention du président Carter :
Dans ces circonstances, les pertes les plus graves, telles que je les vois,
seraient une réduction de notre proximité (intimacy) dans les relations
militaires et sécuritaires, un passage de l’Iran du camp pro-israélien vers
des positions antisionistes et une certaine réserve dans nos négociations en
général.
Quand bien même cette situation serait certainement moins attrayante que
les arrangements dont nous avons profité sous le règne du shah, elle serait
certainement meilleure que celle où une révolution à peine ébauchée
l’emporterait et où l’intégrité des forces armées serait détruite. C’est
pourquoi j’ai suggéré que nous commencions à « penser l’impensable »
(think the unthinkable) et que nous nous préparions pour cette éventualité 29.
Sommet de la Guadeloupe
Comme le dit Brzezinski dans ses mémoires, Carter était partagé entre
la sécurité des Américains en Iran (plus de 35 000 en 1977) et la continuité
de la stratégie américaine dans la région en utilisant ces mêmes Américains
pour maintenir coûte que coûte les objectifs de sécurité militaire et
économique. Brzezinski, lui, n’aurait pas hésité à utiliser la manière forte,
mais l’autre conseiller, le secrétaire d’État Cyrus Vance, jouait les droits de
l’homme jusqu’au bout. « Ainsi, conclut Brzezinski, le président était
écartelé dans des directions opposées par ses conseillers et sans doute même
par un conflit entre sa raison et ses émotions 42. »
Les tergiversations au plus haut niveau de décision de la puissance
dominante et le retour à la faiblesse physique et psychologique
(procrastination morbide) du shah ont certainement accentué l’éclatement
de la ferveur révolutionnaire. C’est le shah qui devait garantir en Asie la
base de l’hégémonie des États-Unis, et l’alimenter en énergie et en
financement militaire. Contre cette stratégie impériale, les Iraniens ont
découvert dans l’ivresse un pouvoir que, depuis 1953, ni les Américains ni
leur souverain ne leur avaient permis d’exercer, celui de la rue. Ils voyaient
avec méfiance, qu’ils fussent favorables ou non à la révolution, tout ce qui
se passait loin d’eux, à Londres, à Moscou ou à Washington. Beaucoup de
fantasmes, hélas documentés par de douloureuses expériences historiques,
enrichissaient cette paranoïa : Londres ni Moscou n’avaient probablement
aucun rôle dans les événements, mais les évoquer permettait d’oublier le
rôle de Washington. C’est là que devait, dans leur conscience complotiste,
tout se jouer.
Le tropisme pro-américain, c’était Washington, mais également Harvard
ou Los Angeles ; l’excellence de la tradition scientifique, la fascination pour
l’idéologie libertaire, pour la réussite économique, pour le modèle
consumériste, pour la modernité technologique et clinquante ; les États-
Unis, c’était une laïcité molle où Dieu était même sur les billets de banque,
compensant la répulsion qu’éprouvaient les Iraniens pour les mœurs
permissives, pour la grossièreté et la violence des Américains, leur guerre
au Vietnam et leur soutien à l’État sioniste. Pour conjurer cette
ambivalence, on exagérait la condamnation de son hégémonie, mais on se
référait à ses succès dans les domaines économiques et culturels.
Y a-t-il eu un déclencheur qui aurait fait basculer la position américaine
vis-à-vis de la révolution iranienne ? Les milieux monarchistes iraniens
disent qu’on a décidé d’abandonner le shah et de chercher une nouvelle
alliance avec le camp révolutionnaire lors d’une conférence d’un genre
inédit que convoqua à la Guadeloupe le président français Valéry Giscard
d’Estaing. Pour eux, c’est une deuxième Soufrière qui provoqua l’éruption
redoutée, c’est à ce moment-là que Carter aurait vraiment changé sa
position. Car malgré l’évidence que j’ai essayé de montrer, malgré
l’indécision permanente de la présidence américaine depuis l’avènement de
Carter, l’opinion iranienne, surtout chez les nostalgiques de l’ancien
régime, pense que Carter, indécis jusqu’alors, a pris sa décision en parlant
avec le président français.
Il y a aussi des auteurs iraniens qui – volontairement ou non ? –
omettent de parler de la conférence de la Guadeloupe, comme Abd or-
Rezâ-Hushang Mahdavi qui tente pourtant d’expliquer le changement de
l’attitude américaine en la situant peu avant, au cours des négociations de
43
Camp David (décembre 1978) . Le shah, dans sa Réponse à l’Histoire ne
44
parle pas non plus du sommet de la Guadeloupe . Pour lui, il n’était pas
opportun alors d’accuser les Américains de l’avoir trahi, il pensait sans
doute, quelques mois seulement après son renversement, avoir à nouveau
besoin de leur aide pour retrouver son trône ; c’est l’Union soviétique qu’il
accuse, tout au long de ce livre chargé de ressentiment, d’avoir sapé la
popularité dont il pensait jouir naturellement dans le peuple iranien.
D’autres, comme Jalâl od-Din Madani, dans un cours qu’il professait au
début de la République islamique pour les élèves officiers, avouent n’avoir
pas beaucoup d’informations sur ce qui s’est dit au sommet de
janvier 1979 :
Tufâniân était très heureux des garanties exprimées par le président Carter,
mais il mit en garde contre le fait que trop de soutien exprimé pour le
gouvernement Bakhtyâr par les États-Unis pourrait être contre-productif.
Khomeyni avait développé un syndrome de haine à l’égard de l’Occident,
avec les États-Unis au centre de la cible. Bakhtyâr souffrirait s’il héritait des
liens étroits du shah avec ce pays 74.
Le général Rabi’i est encore plus explicite dans son amertume vis-à-vis
des Américains, et surtout de Sullivan. Il fustige la BBC qui répand de
fausses nouvelles : pourquoi les Américains n’en viennent-ils pas à bout ?
Si le soutien de Carter apporté par Huyser est réel, pourquoi l’ambassadeur
a-t-il tant insisté pour que le shah s’en aille ? Pourquoi pas plutôt faire
« quelque chose » (something) avec Khomeyni 75 ? Quand Qarabâqi parle de
la mission du général américain, il évoque surtout la suspension des
contrats de vente d’armement, ce qui veut dire que pour Washington le
changement de régime est inéluctable, et il est nécessaire pour le personnel
américain basé en Iran de protéger les équipements extrêmement sensibles
comme les avions F-14 ou les missiles Phoenix, dont la technologie
avancée ne doit à aucun prix tomber dans les mains des Soviétiques. De
plus, la présence de douze mille techniciens militaires américains sur le sol
iranien, après le départ de quarante mille civils depuis le mois d’octobre,
nécessite de prévoir un rapatriement d’urgence au cas où la situation se
détériorerait. Le message de Huyser était clair : nous, Américains, ni nos
alliés occidentaux ne soutenons plus le shah, mais Bakhtyâr, la seule chance
de maintenir un minimum de stabilité et de cohésion dans l’armée, au
service de la nation.
Concernant un projet de coup de force, oui, Rabi’i confirme à Huyser
qu’un comité secret existe, et que le shah en est informé. L’envoyé du
président américain et le général Philip C. Gast, commandant en chef de la
MAAG, ont beaucoup de mal à le convaincre, ainsi que les autres généraux
qu’ils rencontrent un par un puis en réunion commune, de transférer sur
Bakhtyâr la fidélité qu’ils ont jurée au shah et à les inciter à rester à leur
poste même après le départ du souverain. Mais ils craignent que Bakhtyâr,
ayant eu vent de leur conjuration, ne les arrête aussitôt après le départ de
76
leur empereur et commandant suprême . Pour cette raison peut-être,
Qarabâqi, au nom des généraux, exprime le souhait que le shah parte en
vacances, mais seulement pour l’île de Kish, dans le golfe Persique, d’où, si
nécessaire plus tard il s’en irait à l’étranger ; c’était une manière de garantir
que le régime reste en place 77. En réalité la communication passe mal entre
les officiers et Bakhtyâr : il avait été un opposant au shah depuis la chute de
Mosaddeq, il ne peut pas, à leurs yeux, représenter aujourd’hui la légitimité.
De plus, quand la presse a recommencé à paraître après deux mois de grève,
Bakhtyâr n’a rien fait pour empêcher les attaques – à leurs yeux
mensongères – contre les haut gradés, contraires à la cohésion demandée
par Washington entre le nouveau gouvernement et l’armée 78.
Les dissensions et les jalousies rendent fragiles les actions des
militaires. Le gouverneur militaire de Téhéran, le général Oveysi, après
avoir transféré tout ce qu’il pouvait à l’étranger, avait pris, contrairement à
l’interdiction formelle qu’il avait reçue, le chemin de l’exil avant tous les
autres. Il était honni de beaucoup de ses collègues généraux 79. À part ces
trahisons des officiers supérieurs, le moral de l’armée était au plus bas. Tout
manquait dans les casernes, à commencer par le carburant, les défections de
soldats, atteints par la contagion révolutionnaire, étaient nombreuses. Le
rôle répressif convenait de moins en moins à ceux qui restaient, gagnés au
mouvement quand les manifestants venaient mettre une fleur dans le canon
de leur arme et les invitaient à se joindre à eux. La perspective du départ du
shah plongeait tout le monde dans l’incertitude et l’angoisse. C’est à ce
moment que Sullivan, n’ayant reçu aucun contrordre de Washington, prit
l’initiative de rencontrer Bâzargân et ses amis et tenta d’organiser la
rencontre avec eux du général Qarabâqi, un militaire ambigu, ami de
l’ambassadeur et ne cachant ni ses sentiments religieux ni son respect pour
80
Bâzargân .
Les généraux donnent trois conditions à Huyser pour collaborer avec
lui : obtenir que Khomeyni cesse de faire parvenir des cassettes de ses
propos séditieux en Iran ; retarder ou rendre impossible son retour en Iran
depuis Paris ; faire taire les programmes en persan de la BBC. En échange,
Qarabâqi accepterait de rencontrer Mahdi Bâzargân (futur premier ministre
de Khomeyni) et l’âyatollâh Beheshti, représentant de Khomeyni et le
penseur et théoricien de la République islamique. Consulté, le shah voit
cette rencontre d’un mauvais œil. La rencontre entre Bâzargân et Qarabâqi
eut bien lieu le 29 janvier, mais sans résultat concret 81. Pour les trois
conditions, Huyser se défilait en disant attendre la réponse du
gouvernement américain, et que la BBC, de toute façon, n’était pas un
organe dépendant de Washington. Mais les généraux étaient persuadés que
Carter pourrait faire pression sur Londres pour faire taire cette radio
ouvertement favorable à la révolution.
Vue de Washington, la mission Huyser confirmait la nécessité de
soutenir Bakhtyâr et d’obtenir que l’armée collabore avec lui pour éviter un
bain de sang et une « république islamique » qui ne serait que la première
étape vers un régime communiste. Le 12 janvier 1979, Huyser pensait qu’il
était indispensable de contacter Khomeyni pour obtenir son soutien et
surtout empêcher son retour prématuré en Iran. Mais il constata que les
officiers supérieurs étaient soit tellement corrompus qu’ils étaient prêts à
partir même avant le shah, soit tellement attachés à la personne du shah
qu’ils n’arrivaient pas à envisager de continuer leur mission sans lui. La
réponse de Brzezinski, soumise au président Carter le 13 janvier, force
l’interprétation du message de Huyser vers le soutien à un coup de force
militaire : « Si Bakhtyâr échoue, écrit-il à Carter, [un coup d’État doit être
lancé] avec le soutien des États-Unis, en accord avec vos instructions. »
C’est pourquoi, ajoute le conseiller, il faut soutenir Bakhtyâr pour éviter
82
d’avoir recours à cette solution .
L’accord rêvé par Carter entre l’armée et Khomeyni se révéla
impossible à réaliser par le haut, du fait de la divergence profonde sur les
buts poursuivis : d’un côté préserver l’ordre du régime et de l’autre en faire
er
table rase. En revanche, au matin du 1 février, dès le retour de Khomeyni
que Bakhtyâr contre son gré finit par autoriser, c’est l’adhésion au
mouvement révolutionnaire par secteurs des militaires de la base puis des
techniciens de l’armée de l’air (homâfarân) qui dissuada les hauts gradés
d’entretenir la perspective d’une opération violente pour juguler la
révolution. Les dissensions entre Sullivan, qui n’était pas vraiment arrêté
par le département d’État, et Huyser empêchaient les Américains
d’intervenir dans un sens ou dans l’autre. Le général Huyser écrit dans ses
mémoires :
Tout cela semble bien naïf. Ça l’est, mais c’est aussi profondément senti.
J’avais l’impression que l’organisation de Khomeyni était très amateur dans
sa gestion des relations personnelles et dans les contacts avec les étrangers.
Mais de toute évidence ils ont, pour opérer en Iran, un art que les gens du
97
shah ont oublié .
*
Le shah avait tenté parallèlement, pendant l’été 1978, de s’adresser à
des responsables religieux, à l’intérieur même du clergé shi’ite, pour briser
l’unanimité qui se soudait autour de Khomeyni. Il contacta à plusieurs
reprises l’âyatollâh Mohammad-Kâzem Shariat-Madâri (1906-1986), dont
les positions méfiantes vis-à-vis de l’engagement politique des clercs
étaient connues. Il n’est pas innocent que cette information nous soit
connue par les mêmes diplomates américains qui avaient contacté le MLI et
par les mêmes révélations des Étudiants dans la ligne de l’imam. Là aussi,
l’efficacité de la lutte contre le danger communiste était le terrain commun
entre l’âyatollâh rival de Khomeyni et le shah. Mais Shariat-Madâri ne se
désolidarisait pas ouvertement du mouvement khomeyniste et ne démordait
pas des demandes de moralisation de la vie publique et de libération des
clercs emprisonnés. La démarche du shah ne donna aucun résultat 123.
Cependant le 11 octobre 1978, à partir d’un contact avec un familier de
l’âyatollâh Shariat-Madâri, Sullivan faisait état dans une dépêche des
dispositions de cet âyatollâh à collaborer avec le gouvernement de Sharif-
Emâmi et d’un assouplissement possible de Khomeyni que Bâzargân et ses
amis voulaient obtenir en se rendant à Paris ; on a vu que c’était un vain
espoir, mais le voyage de Bâzargân en France était étroitement suivi par les
Américains.
Shariat-Madâri, il est vrai, n’était pas un révolutionnaire et il fut
directement impliqué dans un complot contre Khomeyni en 1982, accusé en
plus d’avoir collaboré avec la SAVAK 124. Il a expié ce crime en étant
confiné chez lui à Qom, interdit de visites jusqu’à sa mort quatre ans plus
tard.
Quels que soient les partisans du compromis, deux positions extrêmes
ont continué à s’affronter : Khomeyni et le shah. Le shah a fini par accepter
l’abandon de sa prérogative extra-constitutionnelle de chef des forces
armées et sa défaite en quittant l’Iran. L’âyatollâh, depuis le pavillon de
Neauphle-le-Château où il s’est installé début octobre 1978, recevait des
politiciens ou des émissaires qui s’étaient promis de l’entraîner à une
conciliation : accepter une transition constitutionnelle avant d’envisager un
changement de régime. Bâzargân, quand il lui rend visite en octobre 1978,
était porteur du message de Shariat-Madâri, mais il finit par faire allégeance
sans pouvoir infléchir la position. Karim Sanjâbi n’obtint pas plus et fit
aussi allégeance. Bakhtyâr, en janvier, tenta l’opération avec des alliés de
poids : Bâzargân depuis Téhéran et Yazdi à Paris. La rigidité de Khomeyni
semblait mettre en péril ses propres chances de succès, l’armée en viendrait
à bout. Mais l’armée elle-même, lâchée par ses généraux qui se disputaient
entre eux s’ils n’avaient pas déjà fui en Europe, par le personnel de l’armée
de l’air et de nombreux sous-officiers qui se rallièrent en uniforme et par les
nombreux soldats du contingent qui se mutinèrent, cessa de protéger le
régime impérial. Le seul homme qui finalement pouvait rassembler assez
largement et les partisans de Khomeyni et ceux d’une alliance avec les
Américains, Bâzargân, a précisément été nommé premier ministre par
Khomeyni le 5 février 1979 avant même la victoire de l’insurrection et
d’avoir le contrôle des lieux de pouvoir, radio-télévision, état-major de
l’armée et de la police, Banque centrale, etc.
1. Excellente présentation du problème dans le chapitre 3, « Human rights and arms exports », de
J. GIL GUERRERO, The Carter Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty.
2. A. MEYER, Interview, pp. 51 sq.
3. C. VANCE, Hard Choices, p. 321 ; J. CARTER, Keeping Faith, p. 433 ; W. H. SULLIVAN,
Mission to Iran, p. 128 ; The New York Times, 16 novembre 1977, p. 1.
4. Citée par J. GIL GUERRERO, The Carter Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty,
p. 52.
5. Ettelâ’ât, 25 âbân 2536/16 novembre 1977, pp. 1 et 3 ; A. PARSONS, The Pride and the Fall,
p. 56.
6. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 133.
7. « Tehran, Iran toasts of the President and the Shah at a State dinner », Téhéran, 31 décembre 1977,
https://www.presidency.ucsb.edu/documents/tehran-iran-toasts-the-president-and-the-shah-state-
dinner ; J. CARTER, Keeping Faith, p. 437. Voir aussi A. PARSONS, The Pride and the Fall, p. 58.
8. Ibid., p. 435.
o
9. Ettelâ’ât, n 15506, 17 dey 2536/7 janvier 1978, p. 7 : « Irân va este’mâr-e sorx va siyâh » par
Ahmad Rašidi-Motlaq. (= « L’Iran et le colonialisme rouge et noir »). Sur le lien avec le soutien de
Carter, voir A. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, p. 474.
10. A. PARSONS, The Pride and the Fall, p. 65.
11. J. CARTER, Keeping Faith, p. 433.
12. Ibid., p. 438.
13. E. NARAGHI, « Dans les prisons de Téhéran », propos recueillis par Philippe Simonnot, Esprit,
août-septembre 1987, p. 61 ; A. PARSONS, The Pride and the Fall, pp. 16, 24 et 34 ; sur le complot
britannique ou américain, ibid., p. 74 ; sur l’interdiction faite aux diplomates de contacter
l’opposition, voir le rapport de Stanley T. Escudero, « What went wrong in Iran ? », été 1979,
Documents from the U.S. Espionnage Den, vol. 63, p. 72b.
14. A. PARSONS, The Pride and the Fall, p. 67.
15. J. CARTER, Keeping Faith, pp. 438-439.
16. Interview avec Arnaud de Borchgrave, cité sans référence in J. CARTER, Keeping Faith, p. 436.
17. Ibid., p. 436.
18. Ibid.
19. Ibid., p. 439 ; A. PARSONS, The Pride and the Fall, pp. 90 sq.
20. A.-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, pp. 479-480.
21. A. PARSONS, The Pride and the Fall, pp. 85-86.
22. Ibid., p. 49. À Saint-Moritz, pendant l’hiver 1975, le président français a reçu du shah des
confidences sur le peu de temps que les médecins lui laissaient : « Mon intention est de partir dans
sept ou huit ans », lui dit-il. Il mourut cinq ans plus tard. « Ce qu’il veut faire est irréalisable, note
philosophiquement Giscard…, la dangereuse irréalité a déjà pris le pas sur le réel » (V. GISCARD
D’ESTAING, Le Pouvoir et la Vie, I, p. 104).
23. J. CARTER, Keeping Faith, p. 440.
24. Ibid., p. 441.
25. Ibid., p. 443.
26. A. PARSONS, The Pride and the Fall, p. 97.
27. Y. RICHARD, « Clercs et intellectuels dans la République islamique d’Iran ».
28. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 201 ; texte (moins quelques lignes indéchiffrables)
disponible sur le site : https://nsarchive.gwu.edu/dc.html?doc= 5734181-National-Security-Archive-
Doc-07-U-S-Embassy.
29. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 202.
30. Ibid., p. 204.
31. C. VANCE, Hard Choices, p. 328.
32. J. CARTER, Keeping Faith, p. 440.
33. Ibid., p. 440 ; J. CARTER, White House Diary, p. 259.
34. D’après une dépêche au Foreign and Commonwealth Office de l’ambassadeur Parsons,
21 décembre 1978, citée par D. BAYANDOR, The Shah, the Islamic Revolution and the United
States, p. 285 ; W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 212 ; J. CARTER, White House Diary, p. 268.
35. J. CARTER, Keeping Faith, p. 443.
36. « Cottam on Khomeini, Liberation Movement (LM), and National Front (INF) », Stempel
(Téhéran) au secrétaire d’État, 2 janvier 1979, dépêche reprise dans Documents of the U.S. Espionage
Den, vol. 24, p. 44 ; Md AYATOLLAHI TABAAR, Religious Statecraft, p. 76.
37. Transcription de l’échange entre R. Cottam et Khomeyni : R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm, V,
pp. 285 sq., daté du 7 dey 1357 (28 décembre 1978).
38. C. VANCE, Hard Choices, p. 328 ; G. BALL, The Past Has another Pattern, p. 458 ;
Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, pp. 370 et 372 ; H. PRECHT, Interview, p. 65.
39. C. VANCE, Hard Choices, p. 331.
40. G. BALL, The Past Has another Pattern, p. 459.
41. Ibid., p. 461 ; Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, p. 373 ; J. GIL GUERRERO, The Carter
Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty, pp. 148-149 ; E. YAZDI, Âxarin talâš-hâ dar
âxarin ruz-hâ, pp. 62 sq.
42. Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, p. 355.
43. A.-R. H. MAHDAVI, Siâsat-e xâreji-e Irân dar dowrân-e Pahlavi, pp. 475-482.
44. Md-R. PAHLAVI, Réponse à l’Histoire.
45. Dr Sd J. MADANI, Târix-e siâsi-e mo‘âṣer-e Irân, pp. 308 et 314-315.
46. V. GISCARD D’ESTAING, Le Pouvoir et la Vie, I, p. 111.
47. M. PONIATOWSKI, « Note confidentielle de Michel Poniatowski au président », p. 396.
48. Propos du shah rapportés par Poniatowski, ibid.
49. Ibid., p. 398.
50. Ibid., p. 399.
51. J. CARTER, White House Diary, p. 271.
52. V. GISCARD D’ESTAING, Le Pouvoir et la Vie, I, p. 112.
53. Ibid., p. 113 ; voir aussi J. CARTER, White House Diary, p. 275.
54. V. GISCARD D’ESTAING, Le Pouvoir et la Vie, II, p. 238.
55. Le Monde, 9 janvier 1979.
56. (Anonyme), Islam in Iran, p. 67.
57. J. CARTER, Keeping Faith, p. 443.
58. J. CARTER, White House Diary, p. 277.
59. J. CARTER, Keeping Faith, p. 445.
60. Rapport du consul d’Ispahan au département d’État, 6 janvier 1979, Documents of the U.S.
Espionage Den, vol. 63, pp. 41-42.
61. Ibid.
62. H. H. SAUNDERS, Interview, p. 124.
63. J. CARTER, Keeping Faith, p. 446.
64. A. QARABÂQI, Xâterât-e Ženerâl, p. 140 (fr. A. GHARABAGHI, Vérités sur la crise
iranienne, p. 111).
65. E. YAZDI, Âxarin talâš-hâ dar âxarin ruz-hâ, p. 89.
66. Ibid., p. 91.
67. J. CARTER, Keeping Faith, p. 447.
68. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, pp. 227-229.
69. R. E. HUYSER, Mission to Tehran, p. 24.
70. Md-R. PAHLAVI, Réponse à l’Histoire, p. 246 ; W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 232.
71. Ibid., p. 233.
72. A. QARABÂQI, Xâterât-e Ženerâl (fr. A. GHARABAGHI, Vérités sur la crise iranienne).
73. R. E. HUYSER, Mission to Tehran, p. 31.
74. Ibid., p. 34.
75. Ibid., p. 35 (6 janvier 1979).
76. Ibid., p. 41.
77. Ibid., p. 45 ; A. QARABÂQI, Xâterât-e Ženerâl, p. 137 (fr. A. GHARABAGHI, Vérités sur la
crise iranienne, pp. 110 sq.).
78. Ibid., pp. 125-126 (fr. ibid., pp. 100 sq.).
79. Ibid., pp. 35 et 76 (fr. ibid., pp. 46, 64 et 68) ; W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 238.
80. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran., pp. 236 sq. ; D. BAYANDOR, The Shah, the Islamic
Revolution and the United States, p. 376.
81. A. QARABÂQI, Xâterât-e Ženerâl, p. 146 (fr. A. GHARABAGHI, Vérités sur la crise
iranienne, p. 114) ; Md-R. PAHLAVI, Réponse à l’Histoire, p. 246.
82. Mémorandum de Z. Brzezinski au président, le 13 janvier 1979, reprenant la dépêche de Huyser
envoyée le jour même de Téhéran, National Security Archive (internet).
83. R. E. HUYSER, Mission to Tehran, p. 232.
84. Ibid., p. 235.
85. R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm, V, pp. 499 ; R. E. HUYSER, Mission to Tehran, p. 236.
o
86. Ettelâ’ât, 27 dey 1357 (17 janvier 1979), n 15762, p. 2. Une erreur matérielle fait porter à cette
page du journal la date de la veille, mais il s’agit bien du lendemain du départ du shah.
87. W. Sullivan, document du 2 février 1979, Z. Brzezinski Collection, Jimmy Carter Presidential
Library, cité par J. GIL GUERRERO, The Carter Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi
Dynasty, p. 180.
er
88. « Notes, Iran-Meetings », dossier du 1 au 17 février 1979, Z. Brzezinski Collection, Jimmy
Carter Presidential Library, cité par Md AYATOLLAHI TABAAR, Religious Statecraft, p. 80.
o
89. Ou « légal » (qânuni). Ettelâ’ât, 19 bahman 1357 (8 février 1979), n 15780, p. 8.
o
90. Ettelâ’ât, 19 bahman 1357 (8 février 1979), n 15780, p. 2 ; A. QARABÂQI, Xâterât-e Ženerâl,
pp 305 sq. (fr. A. GHARABAGHI, Vérités sur la crise iranienne, pp. 203 sq.)
91. H. E. CHEHABI, Iranian Politics and Religious Modernism, pp. 230 sq.
92. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 24, pp. 2 sq., rapports de conversations des 8, 25 et
30 mai et 18 juillet 1978, rédigés par John D. Stempel.
93. * Ibid.
Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 25, p. 65, conversation de Stempel et deux autres
diplomates avec Cyrus Elahi (cadre de la SAVAK), Téhéran, 3 octobre 1978.
94. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 24, p. 18 ; J. GIL GUERRERO, The Carter
Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty, p. 85.
95. Sur le projet des Américains de faire revenir Amini au gouvernement en été 1978, voir
E. YAZDI, Âxarin talâš-hâ dar âxarin ruz-hâ, pp. 56 sq.
96. Sullivan au secrétaire d’État, Téhéran, 14 décembre 1978, Documents of the U.S. Espionage
Den, vol. 24, p. 20.
97. Mémorandum d’Henry Precht sur la conversation avec Ebrâhim Yazdi (Washington),
12 décembre 1978, Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 18, pp. 117-121 ; H. PRECHT,
Interview, p. 57 ; E. YAZDI, Šast sâl saburi va šokuri, III, p. 379. Dans le troisième volume de ses
mémoires, Yazdi consacre un chapitre aux contacts américains avec le mouvement révolutionnaire,
ibid., pp. 255 sq. ; détails sur la rencontre manquée dans Ch. BAKHTIAR, Ma fidélité, pp. 139 et
154 sq.
98. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, pp. 222 sq.
99. C. VANCE, Hard Choices, p. 343. Sullivan semble situer cette rencontre entre Warren
Zimmerman et Ebrâhim Yazdi, dans un restaurant proche de Neauphle-le-Château, plus tôt début
janvier…
É
100. Dépêche de Chapman, ambassade américaine à Paris, au secrétaire d’État et à l’ambassade à
Téhéran, 28 janvier 1979, in Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 18, p. 120 ; E. YAZDI,
Âxarin talâš-hâ dar âxarin ruz-hâ, pp. 137 sq. ; récit par Bakhtiar : Š. BAXTYÂR, Si-o haft ruz,
pp. 23 sq.
101. E. YAZDI, Âxarin talâš-hâ dar âxarin ruz-hâ, pp. 128-136, 149 et 153.
102. E. YAZDI, Âxarin talâš-hâ dar âxarin ruz-hâ, pp. 154 sq.
103. Ibid., p. 160.
104. Ibid., p. 172.
105. Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, p. 388.
106. Ibid., p. 387.
107. Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, pp. 387-388.
108. Ibid., pp. 387-389.
109. D. BAYANDOR, The Shah, the Islamic Revolution and the United States, p. 358.
110. M. BÂZARGÂN, Enqelâb-e Irân dar do harakat, p. 89.
111. E. YAZDI, Âxarin talâš-hâ dar âxarin ruz-hâ, p. 317.
112. M. BÂZARGÂN, Enqelâb-e Irân dar do harakat, p. 71.
113. « Message to the USG from Khomeini », ambassade américaine à Paris au secrétaire d’État,
27 janvier 1979, NLC-16-25-4-9-9, Jimmy Carter Presidential Library, cité par Md AYATOLLAHI
TABAAR, Religious Statecraft, pp. 81-82.
114. J. CARTER, Keeping Faith, p. 449 ; H. PRECHT, Interview, p. 61.
115. Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, p. 390. Carter s’attribue l’initiative d’avoir différé le
retour de Huyser, J. CARTER, Keeping Faith, p. 448.
116. Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, p. 391.
117. J. CARTER, White House Diary, p. 290, entrées du 12 et du 14 février 1979 ; id., Keeping
Faith, p. 450.
118. Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, p. 392.
119. Ibid., p. 393.
120. Ibid., p. 394 ; sur la faiblesse du shah, ibid., p. 396.
121. Ibid., p. 395.
122. J. CARTER, White House Diary, p. 288.
123. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 25, pp. 23 sq. ; J. GIL GUERRERO, The Carter
Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty, pp. 85 sq.
124. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 25, pp. 67-71.
Les révolutionnaires et les États-Unis
Kissinger avait donné ce conseil : « Si nous ne protégeons pas les vassaux
qui nous ont servis pendant des années, nous effraierons nos nouveaux
vassaux et cela nuira aux intérêts de l’Amérique dans les pays qui sont
dépendants d’elle. » Cette attitude n’est pas propre à Kissinger, c’est celle
qui caractérise la politique d’oppression de l’impérialisme américain qui
regarde les pays faibles comme ses domaines réservés, s’empare de leurs
richesses et manipule leurs institutions. […] La caractéristique de la
domination corruptrice de l’Amérique envers des pays comme le nôtre n’a
pas besoin qu’on en fasse à nouveau l’expérience pour la connaître ; par
exemple quand elle envoie sa flotte dans le golfe Persique ou qu’elle
dénonce les batailles fratricides du Kurdistan, qu’elle protège le shah
criminel, ce sont des signes de l’assombrissement des relations entre l’Iran
et l’Amérique après la Révolution. Rien n’a changé dans l’attitude inique
des États-Unis envers nous. Que pouvons-nous espérer de plus que des
destructions et de la corruption ? […] Non seulement l’impérialisme
américain n’a pas cessé de s’imaginer remettre la main sur l’Iran, il
s’imagine qu’en prolongeant les soulèvements et les désordres dans nos
provinces, en semant la discorde entre nos dirigeants nationaux et religieux
(rahbarân-e melli va dini), en attaquant sur le front sioniste des médias
occidentaux, il obligera l’Iran révolutionnaire à plier devant les alliances
militaires et politiques pour perpétuer la dépendance qui existait
précédemment 23…
er
La rencontre d’Alger du 1 novembre 1979
Le discours anti-impérialiste
Pour dominer les pays riches et piller les richesses nationales, il emploie
tous les moyens possibles. Il se fait passer pour pacifique et utilise les
armes de la philanthropie, il lance un programme de Peace Corps, devient
partisan des droits de l’homme et enfin si tous ces moyens ne réussissent
pas à l’emporter, il utilise un coup d’État et la contrainte. Notre patrie, avant
cette Révolution islamique historique, notre nation héroïque, comme les
autres pays colonisés a été le domaine de l’hégémonie et le terrain de chasse
gardée de ce démon agressif qui fait couler, avec ses griffes, le sang des
peuples opprimés, démunis (mostaz’af) et sans refuge du monde. Un démon
qui avec ses ruses sataniques s’empare des richesses et des cerveaux de ces
contrées, qui utilise des éléments corrompus et traîtres comme Mansur,
Hoveydâ, Majidi, Nahâvandi, Homâyun et Bakhtyâr et les amène sur la
scène à des moments différents, les manipule comme des marionnettes et
empoche les bénéfices et met en place les plus corrompues des dictatures
mondiales, celle du shah criminel en lui donnant asile et entreprenant une
nouvelle étape dans le combat contre la révolution de notre peuple
49
musulman pour l’obliger à subir ce complot anti-iranien .
Cette logorrhée insipide n’a pas une grande originalité, mais elle révèle
la conscience d’avoir été dominé par une puissance étrangère qui ne s’en
prend pas qu’aux richesses matérielles, qui attire à elle les cerveaux, en se
présentant comme une mission philanthropique. Les missionnaires chrétiens
qu’on a vus s’installer au Kurdistan iranien dans des conditions héroïques
e
au XIX siècle sont les précurseurs des militaires et des financiers et des
sélectionneurs de boursiers pour drainer vers les États-Unis tout ce qui
apporte de la valeur. L’auteur est conscient que l’impérialisme n’agit pas
uniquement sur l’économie et la politique, mais qu’il détourne la culture
même des peuples asservis pour imposer son style de films, de littérature,
de représentation du monde. Indépendamment de la sexualité « libérée » qui
heurtait les consciences traditionnelles, le consumérisme et l’introduction
d’habitudes alimentaires tendaient à valoriser tout ce qui venait d’outre-
Atlantique plutôt que ce qu’on produisait sur place.
Prenons maintenant un texte tout à fait contemporain de l’occupation de
l’ambassade américaine de Téhéran, et servant officiellement de référence
pour le nouveau régime, le préambule de la Constitution de 1979 50. Dès les
premières phrases le combat de Khomeyni contre le « complot américain »
de la Révolution blanche est évoqué :
Bien qu’il s’agisse d’un texte officiel destiné à être lu et compris par
tout le monde, les longues phrases ampoulées, la logorrhée révolutionnaire
s’accumulent. Je retiens la référence à un combat mondial contre
l’impérialisme américain clairement désigné, l’utilisation de néologismes
abstraits empruntés au langage de la sociologie politique et au marxisme.
Au lieu de limiter la rétrospective sur la révolution au désir de pouvoir
populaire, de liberté, de restituer aux ulémas leur rôle directeur dans la
société, les auteurs de la Constitution ont cherché à marquer la conscience
d’avoir deux ennemis à combattre, le shah à l’intérieur et l’impérialisme à
l’extérieur. Il y a un messianisme de libération des peuples musulmans,
mais aussi de tous les peuples opprimés en aidant « les mouvements
islamiques et populaires » (jombesh-hâ-ye eslâmi va mardomi) (p. 55).
Cette lutte est un impératif religieux, et nécessite la direction générale de la
société par un (ou plusieurs) juriste(s)-théologien(s). La subordination des
institutions à l’imam Khomeyni et à son futur successeur est clairement
justifiée, ainsi que le caractère transnational des futures institutions qui,
bien que provisoirement limitées à l’Iran, ont vocation à servir d’avant-
garde pour la libération de tous les peuples.
1. CIA, « Imam Khomeini’s prospects and views », Washington, 19 janvier 1979 DNSA, cité par
J. GIL GUERRERO, The Carter Administration & the Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty, p. 179.
2. E. F. von Marbod et J. T. Tavakoli, « Revisions of foreign military sales (FMS) letters of offer and
acceptance », 3 février 1979, DNSA, cité par J. GIL GUERRERO, The Carter Administration & the
Fall of Iran’s Pahlavi Dynasty, p. 182.
3. C. VANCE, Hard Choices, pp. 342 sq. ; W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 253.
4. J. D. STEMPEL, Inside the Iranian Revolution, p. 162.
5. Sur le 5 novembre, A PARSONS, The Pride and the Fall, pp. 92 sq. ; discussion dans
D. BAYANDOR, The Shah, the Islamic Revolution and the United States, pp. 252 sq. ; sur le
24 décembre, W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 179 ; J. D. STEMPEL, Inside the Iranian
Revolution, p. 155.
6. Récit de Charles Naas, premier conseiller à l’ambassade américaine, 1978-79, recueilli par un
journaliste de la BBC : http://www.bbc.com/persian/iran/2014/11/141101_u01-beheshti-main. Yazdi,
dans une interview à la BBC le 9 novembre 2015 dit qu’il n’était pas accompagné par Behešti, mais
par Mahdavi Kermâni. Voir aussi G. SICK, All Fall Down, p. 155.
7. Pour ce récit, J. D. STEMPEL, Inside the Iranian Revolution, pp. 183 sq. ; W. H. SULLIVAN,
Mission to Iran, pp. 258 sq.
8. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 262.
9. B. LAINGEN, Yellow Ribbon, p. 5.
10. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 267.
o o
11. Ettelâ’ât, n 15785 et n 15786, 25 et 28 bahman 1357 (14 et 17 février 1979). L’édition spéciale
non numérotée du vendredi 16 février ne contenait que les premières exécutions de notables de
l’ancien régime.
12. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 24, pp. 38-39 (paginé 74-75).
13. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 14, pp. 42-52 ; W. H. SULLIVAN, Mission to Iran,
p. 271.
14. A. MILANI, The Shah, p. 393.
15. Y. RICHARD, L’Iran de 1800 à nos jours, pp. 303 sq.
16. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 34, p. 185.
17. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 7, pp. 274-275.
18. Ibid., vol. 7, pp. 272 sq. ; pp. 323 sq. ; H. PRECHT, Interview, p. 74.
19. Compte-rendu d’une conversation à Washington entre Henry Precht et l’ambassadeur iranien
Mahmud Foruqi, 17 septembre 1979, Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 28, p. 79.
20. H. Precht à Laingen, 2 août 1979, Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 1, pp. 8 sq. ;
H. PRECHT, Interview, p. 79.
21. Gh. R. AFKHAMI, The Life and Times of the Shah, pp. 560 sq. ; voir pour toute cette partie le
chapitre 9, « Pahlavism in America : The informal politics of foreign policy-making », in J. A. BILL,
The Eagle and the Lion, pp. 319 sq.
22. R. XOMEYNI, Sahifa-ye emâm, vol. 10, p. 335, allocution au personnel municipal de Qâemšahr,
er er o
1 âbân 1358 ; H. PRECHT, Interview, p. 76 ; Ettelâ’ât, 1 âbân 1358 (23 octobre 1979), n 15984,
p. 15 ; J. LIMBERT, in http://lobelog.com/death-to-america-or-a-life-sentence/.
o
23. Ettelâ’ât, 2 âbân 1358 (24 octobre 1979), n 15985, p. 1.
24. R. XOMEYNI, Sahifa-ye emâm, vol. 10, p. 338, message du 3 âbân (3 ze’l-hejja 1399,) /
o
25 octobre 1979 ; Ettelâ’ât, 9 âbân (31 octobre 1979), n 15991, pp. 1 et 2.
o
25. Ettelâ’ât, 12 âbân (3 novembre 1979), n 15992, p. 10.
26. Le chargé d’affaires Laingen (Téhéran) au département d’État, 31 octobre 1979, Documents of
the U.S. Espionage Den, vol. 7, pp. 289 sq.
27. C. VANCE, Hard Choices, p. 371 ; J. A. BILL, The Eagle and the Lion, p. 327 interprète
noncommittal comme « très inquiet » (deeply concerned).
28. H. PRECHT, Interview, p. 74.
29. Laingen à David Newsom, 29 octobre 1979, Documents of the U.S. Espionage Den, 34, p. 202.
30. M. BÂZARGÂN, « Mosâheba bâ xabar-gozâri-e Pârs qabl az safar be ah-Jazâ’er » ; « Molâqât-e
bâ Berežinski », Moškelât va masâ’el-e avvalin sâl-e Enqelâb, pp. 62-65.
31. M. BÂZARGÂN, « Xodâ-hâfezi bâ mellat », 7 novembre 1979, Moškelât va masâ’el-e avvalin
sâl-e Enqelâb, p. 290.
32. Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 10, p. 26 [et même document vol. 34, p. 203],
dépêche de l’ambassade américaine à Alger, 30 octobre 1979 ; Z. BRZEZINSKI, Power and
Principle, pp. 474 et 476.
33. Z. BRZEZINSKI, Power and Principle, pp. 475 sq.
34. C. Vance à l’ambassadeur Sullivan, 12 mai 1979, Documents of the U.S. Espionage Den, vol. 15,
p. 15.
35. H. PRECHT, Interview, p. 73.
36. M. BÂZARGÂN, Enqelâb-e Irân dar do harakat, pp. 93-94.
o
37. M. BÂZARGÂN, Moškelât va masâ’el-e avvalin sâl-e Enqelâb, p. 218 ; Ettelâ’ât, n 15931, 27
mordâd 1358 (18 août 1979), p. 12.
38. M. BÂZARGÂN, Moškelât va masâ’el-e avvalin sâl-e Enqelâb, p. 69.
39. M. BÂZARGÂN, « Xodâ-hâfezi bâ mellat », 7 novembre 1979, Moškelât va masâ’el-e avvalin
sâl-e Enqelâb, pp. 285-295.
40. M. BÂZARGÂN, Enqelâb-e Irân dar do harakat, pp. 92-93, en note.
41. Ibid., p. 111.
42. Ibid., pp 121 sq. ; Y. RICHARD, « Clercs et intellectuels dans la République islamique d’Iran ».
43. Xomeyni, d’après M. BÂZARGÂN, Enqelâb-e Irân dar do harakat, p. 123.
44. Ibid., p. 124.
45. Ibid., pp. 170 sq.
46. Ibid., p. 174.
47. Ibid., p. 183.
48. Interview en décembre 1979 avec Hamid Algar, Nasr, organe des Muslim Student Associations,
er
publié le 1 février 1981, cité par H. E. CHEHABI, Iranian Politics and Religious Modernism,
p. 276.
49. Hoseyn ARŽANGI, Qâratgari dar Irân, Tehrân, chez l’auteur, bahman 1358/février 1980, p. 13.
50. Qânun-e asâsi-e Jomhuri-e eslâmi-e Iran, le texte officiel commence à la page 51.
La prise des otages
(4 novembre 1979)
Cette histoire qui est l’actualité à la “une” dans le monde entier, c’est
l’histoire de l’ambassade d’Amérique, c’est-à-dire non de l’ambassade, le
lieu des complots de l’Amérique, car les jeunes ont trouvé beaucoup de
leurs trucs [dans les documents de l’ambassade]. Dans cette histoire, on
nous a avertis hier qu’à Tabriz et à Téhéran et dans d’autres endroits il y a la
rumeur qu’il y aurait des manifestations pour soutenir l’ingénieur
14
Bâzargân*** . Cette histoire, c’est eux qui la cherchent ; je ne sais pas s’ils
réussiront ou non. Ils ont voulu faire quelque chose comme ça, pour, petit à
petit, arriver à ce que par exemple on s’attaque à l’ambassade d’Irak, à
l’ambassade d’Afghanistan, pour arriver à mettre le pays d’Iran en inimitié
avec tous les pays. Ces diables, voilà ce qu’ils projettent. Que nos jeunes
soient sur leurs gardes pour se protéger de leur influence. Quand ils disent
qu’il faut manifester, mais suggèrent-ils que Bâzargân est dans l’opposition
au Conseil de la révolution ? Comme Bâzargân s’est mis en marge parce
qu’il était fatigué, ne vont-ils pas en trouver un autre pour tenir sa place ?
Car lui [Bâzargân] est une de ces personnalités qui inspire le respect à tout
le monde. Ils s’imaginent qu’on lui aurait manqué de respect ? Non, il est
respecté… [Khomeyni évoque encore les révoltes du Kurdistan comme des
complots pour diviser les Iraniens.]
Ces gens qui s’intitulent eux-mêmes « ceux qui se sacrifient pour le
15
peuple » (Fedâ’i-e khalq)**** , je n’ai pas entendu qu’ils aient déclaré
leur soutien à ce qu’ont fait les jeunes qui ont pris cet endroit-là
[l’ambassade américaine]. S’ils ne sont pas « américains », pourquoi n’ont-
ils pas proclamé leur soutien ? À moins qu’ils ne soient « soviétiques », ou
« nationalistes »… Les gens qui sont patriotes (ou « nationalistes », melli),
il faut qu’ils soient ennemis de l’Amérique. Comme toute notre nation
(mellat). De même que notre peuple (mellat) voit aujourd’hui dans
l’Amérique notre ennemi numéro un, parce qu’elle a pris notre ennemi
numéro un [c’est-à-dire le shah] et l’a gardé. Même quand il [le shah] était
encore là, [l’Amérique] était déjà notre ennemi numéro un. Ces gens [le
shah et les siens] étaient leurs valets. Ils avaient une « mission pour leur
patrie (vatan) ». Leur mission consistait en ceci, que leur patrie n’avance
d’un seul pas. Vous et moi, notre peuple (mellat) considérons l’Amérique
comme notre ennemi numéro un. Il n’est pas arrivé à mes oreilles que ces
Fedâ’iân-e khalq aient manifesté le moindre soutien à ces jeunes. Pour
d’autres groupes, si. Bon, peut-être l’ont-ils fait et que je n’en ai pas
entendu parler, que vous, vous en ayez eu connaissance et pas moi. Si ces
jeunes avaient eu quoi que ce soit contre le gouvernement, ou contre
l’islam, alors on aurait vu [ces militants gauchistes] se précipiter pour les
soutenir. Un des plans, c’est celui-là, que ces gens-là, maintenant, chez moi
j’en ai la preuve, ils les apportent jusqu’ici, avec la signature « Les Dévoués
du peuple (Fedâ’i-e khalq) », ce sont eux qui répandent des mensonges
pour empêcher que le mouvement arrive à son but. Vous avez pu lire vous-
mêmes ces écrits, alors même que ces gens-là ne [nous] laissent pas arriver
à nos buts, alors même que si on veut faire des choses plus fondamentales
un climat serein est nécessaire. Quand il y a la guerre dans une ville, peut-
on envoyer des gens pour asphalter les rues ? Bien sûr que non. Alors vous
en avez assez lu au sujet du Kurdistan et vous avez travaillé, vous les
jeunes, que Dieu vous garde ! Eux, avec tout ça, sans avoir honte, ils disent
16
que rien n’a été fait. Le cœur du problème est là .
On peut admirer ce vieil homme (77 ans) qui n’hésite pas à rappeler,
quand il parle des Pahlavi, qu’il a connu l’arrivée au pouvoir du père et du
fils et qu’il a été témoin des violences de cette dynastie ; en même temps, il
ne cesse de faire l’éloge des « jeunes » (javân-hâ) qui ont osé prendre
l’ambassade d’assaut. Il approuve les jeunes pour leur conduite
révolutionnaire en général, leur amour de la liberté.
À titre de complément, on pourra juger du contraste entre les propos de
l’imam, chargés d’émotion spontanée, et ceux, formatés, du journal
Ettelâ’ât à la une de l’édition du 5 novembre :
C’est une phase nouvelle de notre combat contre les colonialistes du monde
qui a commencé. Et cette fois encore ce sont les talentueux jeunes de notre
nation héroïque… Dans cette nouvelle étape, notre combat doit aller jusqu’à
l’effacement total de toute dépendance. Et n’oublions pas que dans ce
combat nous avons besoin de l’union totale de toutes les forces de la
nation… 18
*
Les Étudiants qui ont mené l’assaut contre l’ambassade n’avaient pas eu
beaucoup de temps pour organiser leur opération. Ils n’étaient pas organisés
par des groupes idéologiques armés et connus. Ils ne prévoyaient pas une
occupation dépassant quarante-huit heures, qui aurait nécessité une
préparation plus complète et un discours plus structuré.
La force de l’habitude et l’illusion que le temps jouait en leur faveur
avaient convaincu les Américains qu’une telle opération était de plus en
plus improbable, car le gouvernement provisoire encore soutenu par
Khomeyni avait manifesté peu d’empressement pour l’extradition du shah.
Les manifestants qui défilaient en criant des slogans hostiles à Carter et à
l’Amérique ne représentaient pas un réel danger et nul n’avait anticipé
qu’un groupe se constituerait parmi des jeunes intellectuels fortement
motivés. L’incapacité du gouvernement à venir au secours des diplomates
était totalement nouvelle pour eux, alors que Bâzargân, Yazdi et Beheshti
avaient manifesté clairement, en février, le désir de protéger les Américains
– dans l’idée sans doute d’en être un jour protégés si les Soviétiques
devenaient menaçants.
Ce qui a suivi n’est pas le sujet de ce livre : la souffrance infligée
directement à quelques dizaines de diplomates qui étaient plus des
prisonniers d’un État irresponsable que les otages d’un groupe d’étudiants
idéalistes. Mais surtout, la souffrance du peuple américain victime d’une
guerre médiatique amplifiant encore plus profondément l’humiliation subie
quelques années auparavant au Vietnam. Ni les gesticulations désordonnées
du président Carter, ni l’opération militaire catastrophique ensablée à Tabas,
ni les déclarations compatissantes et impuissantes, ni les négociations
multiples ne pouvaient calmer l’impatience de retrouver les otages. Ils ont
été finalement libérés à l’heure précise où le président Reagan prêtait
serment à Washington. Le cauchemar du président Carter a été partagé par
tous ses partisans démocrates et par les Américains en général, il a généré
une hostilité durable et profonde à l’égard de l’Iran. Les sanctions
économiques décrétées contre Téhéran n’ont pas réussi à faire fléchir la
République islamique, pas plus que l’intervention des Américains dans le
golfe Persique à la fin de la guerre Iran-Irak. Et on a vu, après que l’accord
de Vienne en 2015 (JCPOA signé au siège de l’Agence internationale de
l’énergie atomique chargée de l’exécution du TNP) a déterminé un cadre de
reprise des échanges entre l’Iran et les pays industrialisés en réduisant les
perspectives d’accéder à l’arme atomique, avec quelle facilité, en 2018,
Donald Trump, soutenu par l’opinion publique américaine, a pu en retirer la
signature américaine et geler toutes les relations renaissantes entre l’Iran et
l’Occident.
Depuis 1981, et sans interruption jusqu’à aujourd’hui (2022), les
Iraniens et les Américains se rencontrent à La Haye à la Cour internationale
de justice, pour démêler les innombrables contentieux juridiques,
économiques et financiers qu’a créés la crise des otages. Les négociations
reprises à l’initiative du président Biden pour permettre aux Américains de
réintégrer le JCPOA piétinent depuis des mois à la date d’achèvement de ce
livre.
o
1. Xomeyni, message pour le jour de arafât, Ettelâ’ât, n 15991, 9 âbân 1358 (31 octobre 1979),
p. 2.
er
2. R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm, vol. X, pp. 412 à 465, période du 10 au 12 âbân 1358 (1 au
3 novembre 1979).
er
3. Xomeyni, message du 10 âbân (1 novembre 1979 pour la commémoration du 13 âbân 1357),
R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm, vol. X, pp. 412-413 ; Ettelâ’ât, n 15992, 12 âbân 1358 (3 novembre
1979), p. 10.
4. Voir par exemple le discours pour les professeurs de pédagogie de Téhéran, Qom, 13 âbân
(4 novembre 1979), R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm, vol. X, pp. 465 sq.
5. Discours pour des écoliers de Qom et de Téhéran, Qom, 13 âbân matin (4 novembre 1979),
R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm, vol. X, pp. 472 sq.
6. Discours aux agents des assurances Markazi, 14 âbân (5 novembre 1979), R. XOMEYNI, Sahifa-
ye Emâm, vol. X, pp. 488 sq.
7. Ibid.
8. H. PRECHT, Interview, p. 78 ; R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm, vol. X, pp. 503 sq.
9. Ibid., vol. X, pp. 515 sq.
10. Mohsen REZÂ’I, Interview à l’agence de presse Fârs, 26 dey 1359 (16 janvier 2011) :
« Bâzargân, bozorgtarin kolâh-i bud ke emâm bar sar-e Âmrikâ gozâšt ».
11. E. ASQARZÂDA, « Gorugân-e ân gorugângiri šodim ».
12. * Il s’agit d’une parole improvisée contenant de nombreuses répétitions, et des formes familières
et parlées, des phrases inachevées ou entrecoupées. L’enregistrement disponible montre bien que
Khomeyni, par ailleurs à l’aise dans une langue très littéraire et truffée de mots arabes, s’adresse dans
la langue de tous les jours à un public réactif. La transcription officielle que j’ai utilisée, à partir du
recueil officiel de toutes les déclarations et tous les écrits de circonstances de l’âyatollâh (disponible
sur internet) a partiellement élevé le discours à un niveau de langue écrite. Khomeyni prononce en
effet, par exemple Emrikâ hič qalati nemitune bokone. Tout lecteur iranien décode automatiquement,
car l’ordre des mots, la répétition de pronoms peu différenciés (inhâ, ânhâ) ou de mots-valises qu’on
peut traduire par « truc », comme čiz, čizâ (čiz-hâ), laisse entendre que le locuteur, probablement
fatigué de ses nombreuses prises de parole, sait que l’auditoire le comprend immédiatement. Les
« jeunes » (javânâ, javân-hâ) est plus expressif et plus expéditif que « les Étudiants musulmans
suivant la ligne de l’imam » (Dâneshjuyân-e mosalmân-e peyrow-e khatt-e emâm).
Pour la première fois, Khomeyni utilise cette formule de défi bien frappée, qui va être recopiée des
milliers de fois sur les murs des villes iraniennes : « L’Amérique n’est pas fichue de faire quoi que ce
soit » (Emrikâ hič qalati nemitavânad bokonad). Non, Khomeyni ne devinait pas qu’à Tabas,
quelques mois plus tard, une armada prétentieuse allait s’ensabler et battre en retraite avant tout
combat en laissant huit morts (opération « Serre d’aigle », Eagle Claw ; 24-26 avril 1980). Mais
pendant l’hiver précédent, Khomeyni avait constaté que malgré les bruits persistants annonçant un
coup d’État militaire avec l’aide américaine, Washington n’avait rien pu faire pour aider le shah à
rester au pouvoir. Il ne pouvait rien faire par la force aujourd’hui non plus contre un peuple en colère.
Une autre formule célèbre est attribuée à Khomeyni au début de la crise des otages : il aurait dit que
l’action des Étudiants à l’ambassade américaine est une « deuxième révolution, plus grande que la
première » (enqelâb-e dovvom, bozorgtar az enqelâb-e avval). On ne retrouve cette phrase très
parlante dans aucun des textes ni aucune des conversations référencés de l’imam. Elle est relatée par
les transmetteurs les plus crédibles, comme son successeur l’âyatollâh Khâmena’i, mais sans date,
sans contexte, sans aucun détail des personnes auxquelles Khomeyni se serait alors adressé. L’imam
n’ayant pas démenti, on peut continuer à lui en attribuer la paternité : l’expression dit bien que la
coupure du lien avec l’Amérique constitue la véritable révolution des Iraniens, celle qui les rend
libres, indépendants, fiers.
13. ** « Le monde entier », cette expression pour Khomeyni ne veut pas dire « les médias du monde
occidental », qui étaient unanimement hostiles à la prise d’otages, puisqu’elle balayait l’ordre
diplomatique, la convention de Vienne et toutes les traditions de coexistence pacifique. Khomeyni
considère ici seulement les nations engagées dans un processus de libération anticolonial ou anti-
impérialiste. En Asie, en Afrique ou en Amérique latine, de nombreux signes de solidarité ont été
envoyés aux preneurs d’otages iraniens. Cet acte plein d’audace et injustifiable du point de vue des
Nations unies ou des institutions étatiques attirait la sympathie des peuples qui n’avaient pas terminé
leur décolonisation.
La même différence fondamentale dans l’appréciation internationale de l’événement peut s’appliquer
pour la fameuse fatvâ contre Salmân Rushdie quelques années plus tard (1989). La réprobation
unanime des médias occidentaux et des dirigeants islamiques n’empêchait pas l’accueil enthousiaste
des masses dans les pays musulmans. Enfin, disaient-ils, un dirigeant qui défend l’islam contre ses
détracteurs. (Je ne justifie pas ici la fatvâ et ses conséquences catastrophiques pour l’Iran, mais
constate simplement que, du point de vue de Khomeyni, elle a été un succès.)
14. *** Les attaques contre les nationalistes (melli) sont moins marquées que celles contre les
Fedâ’iân-e khalq (voir note ****) parce que Khomeyni a encore besoin d’eux. Bâzargân vient de
démissionner, il ne faut pas s’en faire un ennemi. On a vu combien Bâzargân désapprouvait
profondément toute la radicalisation dont Khomeyni se fait ici le chef de file. Au passage, quand il se
moque de ceux qui avaient une mission pour leur patrie, l’imam se moque de l’expression qu’avait
choisie le shah en 1961 pour le titre de son premier livre autobiographique, Mission pour ma patrie
(Ma’muriat barây-e vatan-am).
15. **** Une grande partie du discours attaque les Dévoués du peuple (Fedâ’iân-e khalq), cette
organisation de guérilleros qui avait acquis ses lettres de noblesse dans les dix années qui ont précédé
la révolution, en harcelant la police, en posant des bombes, en tuant des officiers de l’armée du shah.
Un de leurs actes les plus célèbres avait été la prise d’un poste de police du Gilân (province du nord
de l’Iran), à Siyâhkal, en février 1971 [voir A. RAHNEMA, Call to Arms. Iran’s Marxist
Revolutionaries, pp. 240 sq., qui montre l’impréparation et le fiasco final de cette opération].
Khomeyni est conscient que les Étudiants preneurs d’otages qui se réclament idéologiquement de lui
ont en partie mené leur opération pour que ce ne soit pas un groupe gauchiste, comme le 14 février,
qui profite de l’aubaine médiatique d’une telle prise d’otages. L’accusation courante de collusion des
Fedâ’iân avec les Américains semble absurde, mais l’idée est que, dans cette période de compétition
entre les milices, ceux qui se retournent contre le gouvernement révolutionnaire font le jeu des
Américains, qu’ils en soient conscients ou non.
Khomeyni parle ici à des étudiants en sachant très bien l’emprise qu’a sur eux le discours marxiste
des Fedâ’iân-e khalq. Son insistance est destinée à discréditer les soi-disant révolutionnaires qui
n’osent même pas soutenir l’action des preneurs d’otages qui les ont devancés.
On remarque que Khomeyni s’abstient de parler de l’organisation des Mojâhédines du peuple
(Sâzemân-e Mojâhedin-e khalq) comme il parle des Fedâ’iân. En effet, les Mojâhédines
revendiquaient une idéologie inspirée par l’islam révolutionnaire et ils n’avaient pas encore été
chassés de toutes les institutions de la République islamique. Bâzargân avait voulu leur faire une
place officielle dans le ministère de la Croisade de la reconstruction (Jehâd-e sâzandagi). Il y avait
certainement infiltration des Mojâhédines parmi les occupants de l’ambassade, car leur
hebdomadaire, Mojâhed, faisait état des documents dont la publication a été écartée pour ne pas
ternir la réputation du puissant âyatollâh Beheshti [Md MUSAVI XO’EYNIHA, « Vâkoněs-e Musavi
Xo’eynihâ be ed’â-ye hozur-e monâfeqin… », Interview à Târixirâni, 2011.]. Les Mojâhédines ont
d’abord critiqué l’occupation comme un acte antirévolutionnaire puis, voyant les approbations de
Khomeyni et de l’âyatollâh Beheshti (à l’Assemblée constituante), ils ont officiellement exprimé leur
soutien à l’occupation de l’ambassade. Du fait de leur volte-face, l’entrée à l’ambassade fut refusée à
Mas’ud Rajavi et à Musâ Khiâbâni qui voulaient signer le registre pour acter leur geste opportuniste.
16. Xomeyni, discours du 16 âbân 1358/7 novembre 1979, in R. XOMEYNI, Sahifa-ye Emâm,
vol. X, pp. 515 sq.
o
17. Ettelâ’ât, 14 âbân 1358 (5 novembre 1979), n 15994, p. 1.
18. Ibid.
19. Sur les négociations et la résolution de la crise des otages, voir Md BEDJAOUI, F. MERONI et
A. SALAMATIAN, L’Amérique en otage.
20. M. EBTEKAR, Takeover in Tehran, préface de F. A. Reed, p. 21.
21. Ibid., p. 36. Dans le texte « E47 » veut dire « Ebtekar, Takeover in Tehran, p. 47 ».
22. E. ASQARZÂDA, « Gorugân-e ân gorugângiri šodim », p. 3.
23. Ibid., p. 4.
24. A. ABDI, « Az ešqâl-e sefârat-e Emrikâ bâ me’yâr-e emruz-am defâ’ nemi-konam ».
25. E. ASQARZÂDA, « Gorugân-e ân gorugângiri šodim », p. 4.
26. K. NAJI, Ahmadinejad, pp. 18 sq.
27. E. ASQARZÂDA, « Gorugân-e ân gorugângiri šodim », p. 6.
28. Md MUSAVI XO’EYNIHÂ, « Vâ koneš-e Musavi Xo’eynihâ be ed’â-ye hozur-e
monâfeqin… », Interview à Târixirâni, 2011.
Avec combien peu de sagesse
Que s’est-il passé dans la révolution iranienne pour que ce pays, un des
plus opulents de la planète, militairement suréquipé et doté d’une police
redoutable cède aussi rapidement devant le mécontentement populaire ? Les
dirigeants de la République islamique insistent sur sa composante
religieuse, ils n’ont pas tort, car le discours de l’islam militant, l’irruption
sur la scène publique du clergé shi’ite, l’idéologie avant-gardiste et l’attente
du retour de l’imam, entre autres, donnent le ton et la justification de la
révolte. L’aveuglement du shah et du personnel politique, leur insensibilité
à l’attente eschatologique des shi’ites ont permis aux révolutionnaires de
réveiller des forces intérieures symboliques, pour ne pas dire spirituelles,
qui ont profondément déstabilisé le discours et le système politique
iraniens. Il est légitime, en ce sens, de parler de Révolution islamique.
Les intellectuels et les esprits laïcs voudront caractériser la révolution
par sa dimension sociale. Malgré la richesse des transformations de l’Iran
au XXe siècle et l’émergence d’une conscience citoyenne, malgré l’explosion
mal contenue du nationalisme iranien lors de la crise mosaddeqiste, malgré
l’importation de la modernité occidentale, malgré l’extrême opulence de
l’État qui permettait de compenser une très mauvaise répartition des
revenus et des richesses, la société iranienne étouffait sous la pression
policière et les contraintes politiques. Aucune soupape ne permettait à la
population d’exprimer ses désirs et de discuter les décisions du pouvoir
politique, de faire respecter un minimum d’équité économique. L’explosion
était inévitable. Il est légitime de dire qu’il y a véritablement eu une
révolution.
Mais la puissance de la révolution iranienne vient d’ailleurs. Du
nationalisme ? C’est ce que veulent dire les mosaddeqistes qui restent
focalisés sur le grand moment d’émergence de la nation iranienne, quand
elle s’est soudée pour réaliser la nationalisation des pétroles contre les
Britanniques. Mais les mosaddeqistes étaient les Iraniens les plus
occidentalisés, les plus anticléricaux, même quand ils avaient gardé leur
conviction religieuse, et dans la définition de leur identité, ils souhaitaient
d’abord ressembler à ceux, les Européens ou les Américains, dont ils
contestaient la prédation et l’ingérence dans leurs affaires. Pour les
Américains, considérer l’opposition par sa composante nationaliste
induisait une sorte de soulagement : ceux-là nous ressemblent !
Les révoltes ou les révolutions ont toujours une dimension
internationale, les agents du régime contesté cherchant des appuis à
l’étranger, et les insurgés cherchant à restructurer les échanges
commerciaux ou idéologiques, à abolir les alliances ou les traités imposés
par la force. La révolution iranienne a poussé très loin en brisant le lien
avec une grande puissance sans s’assujettir au camp adverse. De toutes les
revendications des manifestants, celle de l’indépendance (esteqlâl) était la
plus inattendue, elle a probablement été la plus nettement conquise.
D’ailleurs quand l’Irak a déclenché la guerre en septembre 1980, l’Iran s’est
trouvé totalement isolé sur la scène internationale ; seule la Syrie, qui
n’avait même pas de frontière commune, l’a soutenu.
La prise d’otages à l’ambassade américaine a été en grande partie
improvisée et elle a été une réussite exemplaire, ralliant la grande majorité
des Iraniens et aboutissant à la rupture totale d’avec la puissance tutélaire.
Elle correspondait à une aspiration profonde que les Américains étaient
incapables de percevoir. Paradoxalement, les Iraniens sont restés fascinés
par le modèle américain. Les mêmes qui cherchaient à retrouver une
inspiration dans leurs traditions nationales et religieuses envoyaient leurs
enfants étudier aux États-Unis. Téhéran et les grandes villes iraniennes se
sont développées après la révolution selon un modèle américain :
Tehrangeles, disait-on pour décrire le tropisme californien, les autoroutes
urbaines, les centres commerciaux, les vitrines clinquantes, les restaurants
perchés sur des tours de télécommunication pivotant sur leur axe. Et quand,
après l’effondrement de l’URSS, l’administration Clinton fait faire des
sondages dans le monde entier pour évaluer le degré de sentiment pro ou
antiaméricain, l’Iran retourne une proportion favorable inattendue : la
rupture n’a fait qu’épurer l’attraction pour le modèle américain.
De son côté, l’arrogance américaine, déjà brisée par la défaite du
Vietnam, fut offensée de manière plus profonde encore par ces jeunes gens
sans armes qui, en occupant leur ambassade, humiliaient le gouvernement
de Jimmy Carter et toute la nation américaine. Les « Étudiants musulmans
suivant la ligne de l’imam » ont renvoyé aux Américains l’image de leurs
contradictions et de leur impuissance. Carter a-t-il voulu promouvoir les
droits de l’homme en Iran ou au contraire – en soutenant aveuglément le
shah – garantir les intérêts à court terme des États-Unis ? A-t-il voulu une
transition sereine vers un nouveau régime ou un coup d’État faisant fi des
désirs du peuple iranien ? A-t-il voulu faire pour le souverain déchu un
geste humain élémentaire ou ne l’a-t-il accueilli que contraint et forcé par
des lobbys trop puissants, en sachant très bien qu’il aurait à affronter la
colère des Iraniens ? Voulait-il prouver qu’il reconnaissait la légitimité du
nouveau régime iranien ou comploter avec les monarchistes ? Voulait-il
préparer le retour sournois vers une forme d’alliance déséquilibrée pour
arrêter l’expansionnisme soviétique ? Carter voulait-il rester fidèle à
l’héritage de la révolution américaine, à l’émancipation conquise contre la
puissance britannique ou obéir à la logique de plus en plus forte, depuis la
Seconde Guerre mondiale, de la construction impériale ? Bien sûr, les
Américains ne voulaient pas explicitement bâtir un empire, ils se sont
retrouvés progressivement à organiser un empire sans l’avoir voulu. Dans
leurs relations avec l’Iran, ils cherchaient d’abord la stabilité, et en sont
venus à oublier qu’ils avaient initialement le projet de promouvoir le
développement et la démocratie 1.
Périodiquement, les diplomates américains en poste à Téhéran avant la
révolution alertaient leur gouvernement sur la fragilité du système politique
iranien où tout passait par une personne et une seule, sans solution de
remplacement. Si on considère les attentats contre le shah, depuis 1949,
c’est un miracle que cet homme ait pu se maintenir au pouvoir pendant plus
de trente-sept ans. Il n’a pu le faire, comme il l’a dit lui-même à des
journalistes ou à des diplomates, qu’en étant sans pitié avec ses ennemis :
ils disent qu’ils veulent ma mort, pourquoi aurai-je pitié d’eux ? On ne
dialogue pas avec des criminels. S’accommoder de cette dureté répressive
dénaturait toute référence aux sacro-saints « droits de l’homme ». Il n’a pu
se maintenir, doit-on ajouter, qu’avec la connivence de ses protecteurs.
Dans la longue aventure irano-américaine, deux systèmes hétérogènes
cherchaient à s’allier : d’un côté une monarchie dont la légitimité était
chancelante, qui ne pouvait se maintenir qu’en s’imposant ; de l’autre une
république dont les dirigeants avaient l’obligation, tous les quatre ans, de
retourner devant les électeurs et acceptaient la douloureuse règle de
l’alternance politique. En schématisant, d’un côté la force, de l’autre la
séduction. D’un côté l’usure, de l’autre le renouvellement.
Cette asymétrie empêchait les deux systèmes de bien se comprendre.
On pourrait argumenter que le fait de tenir le pouvoir des urnes pour
négligeable donnait au shah une philosophie politique plus durable, plus
réaliste et pragmatique – voire cynique –, alors que les responsables
politiques américains étaient obligés de pratiquer tous les quatre ans la
surenchère électorale, les promesses en l’air, la manipulation du rêve
idéologique. Le shah avait beaucoup de mal à s’adapter à la nouvelle
administration lorsqu’il y avait alternance entre républicains et démocrates.
Les présidents américains cherchaient à s’assurer de la pérennité de l’État
iranien avant de s’engager dans de nouveaux contrats. Et finalement, ils y
renonçaient en se contentant de la bonne santé (apparente) du shah. Ainsi,
comme le dit en conclusion de deux voyages un diplomate américain invité
à faire un audit des relations de son pays avec l’Iran après la Révolution :
« Simplement dit, je pense que nous n’étions pas préparés à l’effondrement
du régime pahlavi parce que nous ne voulions pas voir la vérité 2. »
Aristote décrit l’essence du politique dans la relation de dominant à
dominé. On a cherché les meilleures méthodes pour appliquer cette relation
à la gestion de nos affaires publiques en ménageant au mieux les exigences
de citoyens qui veulent participer aux décisions qui les concernent. Les
élections, les équilibres entre le pouvoir politique et les contre-pouvoirs (la
presse, les partis politiques, la justice indépendante, une police s’interposant
devant la violence…) garantissent les limites qui empêchent un pouvoir de
dégénérer en despotisme.
Le schéma dominant-dominé se reproduit également à l’échelle des
peuples : les plus forts imposent leurs règles, leur supériorité militaire ou
commerciale, voire leur suprématie tout court. Le colonialisme écrasait
l’identité des peuples soumis, la domination impériale de l’URSS ou des
États-Unis établissait une relation inégale pour le profit hégémonique de la
grande puissance. L’exemple iranien est éclairant sur la naissance d’une
relation impérialiste dans la seconde moitié du XXe siècle. Auparavant l’Iran
avait été dominé par la Russie et par la Grande-Bretagne, mais plutôt sur un
mode colonial, celui de l’inégalité juridique des personnes (les
capitulations), de l’exploitation des ressources. Le pétrole est vite devenu
un enjeu capital et les Britanniques ne se sont pas gênés pour l’exploiter à
leur profit exclusif. L’arrivée des Américains allait-elle changer le
processus ? En apparence, oui : fidèles aux principes de la Charte de
l’Atlantique, les Américains ont combattu l’hégémonie britannique et
l’avidité conquérante des Soviétiques. Avec ces derniers, la menace était
aussi idéologique que militaire ou économique. Très vite, et surtout après
1953 (déprise britannique), les Américains se sont glissés dans les bottes
des Russes et des Anglais.
La guerre froide a consolidé leur expansion impériale : ils n’étaient pas
venus pour asservir mais pour libérer. Non pour se servir, mais pour aider
au développement. La grande générosité messianique avait des limites. La
défaite américaine en Corée et l’exacerbation de l’anticommunisme ont
entraîné les Américains dans la confusion des intérêts iraniens avec les
leurs. Finalement, entrés dans le jeu de l’exploitation pétrolière, des intérêts
commerciaux (vente d’armes) et des nécessités stratégiques (sécurisation de
l’acheminement du pétrole), ils ont été pris dans l’engrenage de la guerre
invisible. Le shah, dont l’intelligence supérieure était mise au service d’une
immense ambition, sut utiliser les faiblesses des Américains pour se hisser
lui-même au centre de la stratégie.
Je laisse ouverte aux théoriciens du politique la question du
bilatéralisme, de l’affrontement entre l’URSS et les États-Unis et de leur
peur commune de déclencher une guerre nucléaire pour garantir leurs
intérêts impériaux, et celle, concurrente, du multilatéralisme dont la
meilleure illustration est l’Organisation des Nations unies. L’Iran avait été
un des premiers pays à adhérer à la SDN, il fut également un des premiers à
l’ONU. Une partie du succès obtenu pour récupérer l’Azerbaïdjan et le
Kurdistan, en 1946, est à porter au crédit du Conseil de sécurité des Nations
unies. Mais ni le shah ni les Américains n’ont jamais cru que l’ONU
s’interposerait si les Soviétiques reprenaient la conquête territoriale aux
dépens de l’Iran. Il semble, dans la mesure où l’Iran avait une politique
étrangère construite avec une autonomie réelle, que le pays a plutôt opté
pour le bilatéralisme : il fallait être protégé par un parapluie dissuasif. Le
shah, qui a mené les relations extérieures depuis 1953, ne croyait pas au
CENTO, et il se défiait également du mouvement des non-alignés qui
cachait une attraction pro-soviétique. En réalité, il se voyait plutôt comme
une grande puissance militaire émergente dans une région convoitée où il
aurait donc un rôle majeur.
Du reste, multilatéralisme ne veut pas dire qu’on serait protégé des
guerres.
Le rapprochement antiaméricain entre les nationalistes laïcs et les
partisans de l’islam politique avait une limite qui divisait profondément
l’opinion : la peur du communisme. Déjà, en 1953, il est probable que la
chute de Mosaddeq ait été précipitée par la hantise d’une révolution pro-
soviétique dont le parti Toudeh aurait été le principal instigateur. Comme le
montra l’invasion soviétique de l’Afghanistan (décembre 1979),
l’hypothèse, pour expliquer la révolution de 1978-79, d’une opération qui
aurait profité des troubles pour faire avancer les forces russes vers le sud
n’était pas absurde. Mohammad-Rezâ Shâh lui-même, depuis l’épisode de
la sécession éphémère de l’Azerbaïdjan, la redoutait : il voyait se profiler,
derrière Khomeyni, la transformation de l’Iran en Irânestân, c’est-à-dire en
satellite de l’URSS. Les nationalistes libéraux, héritiers de Mosaddeq,
partageaient cette hantise. Parmi eux, certains étaient culturellement et par
conviction proches des âyatollâhs : ils voyaient naturellement dans le
communisme la menace suprême pour le culte et la transmission de la foi,
la confiscation des biens privés et leur redistribution, c’est-à-dire la fin de
l’entrepreneuriat et du négoce tels que l’islam les a toujours protégés.
Les deux dimensions intérieure et extérieure de la politique peuvent
coïncider et permettre à un peuple de s’épanouir sans aliéner son identité. Il
semble que certains peuples, s’ils veulent trouver leur place dans
l’environnement international, doivent passer par le renoncement à certains
droits constitutionnels, à des libertés qu’ailleurs on jugerait inaliénables. Le
shah, qui avait promis l’ouverture de la société iranienne à la consommation
et aux droits démocratiques, avait implicitement renoncé à l’indépendance.
L’exercice solitaire du pouvoir l’a empêché de voir à quel point
l’étouffement des libertés ne faisait qu’exacerber le désir d’émancipation.
Et le sentiment d’injustice gagnait le cœur de ses sujets qui voyaient que la
consommation effrénée et les libertés qui avaient cours dans la classe
dirigeante…, libertés de mœurs et de mouvement plus que d’opinion, les
avaient oubliés.
Khomeyni avait-il une claire vision de la république qu’il était en train
de construire ? Avant d’accepter qu’une « assemblée pour l’étude finale de
la loi fondamentale » élue au suffrage universel soit convoquée, le Guide de
la révolution était prêt à entériner un projet constitutionnel où le pouvoir
clérical n’était pas central et même, pour ne pas perdre de temps, il voulait
le faire avaliser sans assemblée constituante, inutile à ses yeux 3. C’est
Bâzargân et les libéraux qui tenaient à en passer par une procédure
démocratique… Mais dans le message qu’il adresse aux constitutionalistes
avant le début de leurs travaux, Khomeyni insiste bien : « Si certains des
membres de cette assemblée étaient tentés par les idéologies de l’Ouest ou
de l’Est [lire : du capitalisme libéral ou du communisme] ou étaient
influencés par des idées perverses, qu’ils ne fassent pas entrer leurs
4
inclinations dans la loi fondamentale de la République islamique ! »
Khomeyni fait lire ces lignes le 19 août 1979 (28 mordâd 1358), c’est-à-
dire pour le 26e anniversaire du coup d’État contre Mosaddeq, dont la
responsabilité est attribuée aux Américains. La concomitance entre
l’humiliation infligée au nationalisme iranien et le renouveau de l’État
souverain est voulue. C’est déjà une réponse aux manœuvres que
l’ambassade américaine entreprend alors pour circonvenir le gouvernement
provisoire de Bâzargân et contraindre le nouveau régime dans la continuité
de la stratégie antisoviétique.
Or, comme l’écrit un historien de la République islamique, les
Américains avaient pensé que le Shah et ses proches auraient été remplacés
par un gouvernement nationaliste pro-occidental 5. Le peuple serait satisfait,
les organisations des droits de l’homme auraient continué à faciliter la
pénétration d’agents américains, en somme, tout ce que prétendent
dénoncer les étudiants preneurs d’otages en publiant les documents
reconstitués où les diplomates américains, après le 11 février, rendent
compte fidèlement de tous leurs contacts avec les intellectuels et politiciens
libéraux en Iran, la plupart des partisans ou anciens collaborateurs de
Mosaddeq.
Cette chasse aux libéraux a été destructrice et efficace.
Après la victoire de la Révolution et l’attaque manquée contre leur
ambassade en février, les Américains avaient continué à croire à une
alliance avec Bâzargân : « … Je prenais acte que les Iraniens voulaient
continuer des relations amicales avec les États-Unis et qu’ils souhaitaient
continuer à coopérer avec nous dans les domaines économique et militaire.
Bâzargân et ses ministres l’ont confirmé… 6 », écrit l’ambassadeur
américain Sullivan. Après son départ, les mêmes stratégies visant à
consolider le camp nationaliste libéral, plus facilement compréhensibles,
ont conduit les diplomates à rencontrer ceux avec lesquels ils pouvaient
parler. Ils avaient soit la même langue (généralement l’anglais, notamment
parmi les élites qui avaient étudié aux États-Unis), soit les mêmes
références humanistes, le même idéal démocratique. Déjà ces contacts
remettaient en cause les certitudes chancelantes acquises depuis 1953, que
le régime du Shah était invincible, que les libertés individuelles pouvaient
se limiter au glissement culturel vers le modèle américain, que le peuple
était incapable de se diriger, etc. Le sentiment anti-impérialiste était mal
compris. Et la couleur religieuse donnée au nouveau régime avec le pouvoir
clérical envahissant ne constituait pour eux qu’une bizarrerie absurde.
Cette mutuelle méconnaissance rendait le dialogue irano-américain
pendant ces quelques mois surréaliste, à l’image de ces militants gauchistes
(membres des Mojâhédines) embrassant l’ambassadeur Sullivan à son
départ d’Iran. L’Iran vivait une période pluraliste, puisque, des maoïstes aux
islamistes les plus radicaux, toutes les tendances pouvaient s’exprimer. Il
n’y eut jamais autant de titres divers et contradictoires dans les kiosques ou
sur les trottoirs pour la vente militante. Mais la logique inverse était plus
forte, elle s’appelait « l’unité de parole » (vahdat-e kalama). Quiconque
mettait en doute le Guide, ou la doxa islamique, ou le bien-fondé des
décisions du Conseil de la révolution était dénoncé comme traître, libéral,
agent de l’Amérique.
La prise en otage des diplomates américains à Téhéran le 4 novembre
1979 a été l’acte fondateur de la nouvelle indépendance de l’Iran. Depuis
lors l’Iran a fasciné le monde entier par son arrogance, et les troupes
iraniennes ont repoussé l’attaque irakienne (1980-88), puis, après 2003,
conquérantes, elles ont attendu la chute de Saddam pour faire de l’Irak leur
tremplin vers la Syrie et ont atteint, pour la première fois depuis les
Sassanides, les rives de la Méditerranée en allant au secours du président
Bachar al-Assad. Aucun cordon ombilical ne relie plus l’Iran à une grande
puissance pour la première fois depuis 1813. L’Iran existait.
Cette nouvelle fierté nationale qui n’ose pas dire son nom a pris la place
de l’ancien nationalisme. Les Américains n’ont pas compris que l’ère de
Mosaddeq était révolue, que l’Iran avait des ambitions plus vastes que la
défense de ses frontières étriquées et que, par étapes, la République
islamique avait pris la posture d’un centre anti-impérialiste, c’est-à-dire
d’un nouveau centre impérial au moins dans sa région. Les Américains ont
compris trop tard que le discours populiste faisait appel à une opinion
populaire puissante, à un peuple qui relevait la tête. Traiter exclusivement
avec le shah pendant si longtemps leur avait fait oublier que ce souverain, si
brillant fût-il, ne pouvait plus parler au nom de son peuple.
Les guerres de cent ans, de trente ans, qu’elles soient en Europe ou au
Moyen-Orient, qu’elles sacrifient des chrétiens (protestants et catholiques)
e e
comme aux XVI et XVII siècles ou des musulmans (sunnites et shi’ites)
comme aux XXe et XXIe siècles, doivent un jour s’arrêter.
Quarante ans après, on peut revenir sur le contexte, sur la réalité des
faits, et évaluer la rupture qui a suivi la crise des otages et la profonde
déstabilisation de tout le Moyen-Orient. Cette crise rappelle hélas encore
une fois la réflexion désabusée du chancelier suédois Axel Oxenstierna, An
nescis, mi fili, quantilla prudentia mundus regatur (« Tu ne sais pas, mon
fils, avec combien peu de sagesse le monde est gouverné ») : c’était en
1648, à l’issue de la terrible guerre de Trente Ans quand le fanatisme
religieux, manipulé par cynisme politique, avait conduit des hommes à
s’entretuer sans fin. Entre l’Iran et l’Amérique, le déchaînement des
passions n’a pas, Dieu merci !, entraîné de guerre ouverte, mais combien de
conflits inutiles ont été attisés !
Joncy, 24 juillet 2022
1. V.V. NEMCHENOK, « “That so fair a thing should be So frail”. The Ford Foundation and the
failure or rural development in Iran, 1953-1964 ».
2. Stanley T. ESCUDERO, « What went wrong in Iran ? », Documents of the U.S. Espionage Den,
vol. 63, p. 72.
3. H. E. CHEHABI, Iranian Politics and Religious Modernism, p. 265.
4. Ṣurat-e mašruḥ-e mozâkerât-e Majles-e bar-rasi-e nahâ’i-e qânun-e asâsi-e Jomhuri-e eslâmi-e
Irân, [Débats de l’Assemblée constituante de 1979], Tehrân, Ravâbeṭ-e ‘omumi-e Majles-e šurâ-ye
eslâmi, 1364/1985, vol. I, p. 6.
5. Dr Sd J. MADANI, Târix-e siâsi-e mo‘âṣer-e Irân, vol. 2, pp. 339 sq.
6. W. H. SULLIVAN, Mission to Iran, p. 274.
Chronologie (1941-1979)
1941
— La Grande-Bretagne et l’URSS exigent de Rezâ Shâh, malgré la
neutralité officielle de l’Iran, qu’il fasse expulser les agents allemands.
Le 25 août les troupes soviétiques au Nord et anglaises au Sud
envahissent l’Iran.
— 14 août : Roosevelt-Churchill, la Charte de l’Atlantique.
— 24 shahrivar 1320/16 septembre : abdication de Rezâ Shâh après
l’arrivée des troupes soviéto-britanniques.
— 7 décembre : Pearl Harbor. Les Américains entrent en guerre.
1942
— janvier : création du parti Toudeh (communiste).
— 26 janvier/6 bahman 1321 : signature de l’Accord tripartite (Grande-
Bretagne, Iran, URSS).
— août : Ahmad Qavâm os-Salṭana premier-ministre.
— 8-9 décembre : émeutes pour le pain à Téhéran.
1943
— 2 février : victoire des Soviétiques à Stalingrad.
— mai : Arrivée de la mission militaire américaine en Iran. Colonel
Norman Schwarzkopf.
— Arrestation de l’âyatollâh Kâshâni. Manifestations du Bâzâr.
— 9 septembre : l’Iran entre officiellement en guerre du côté des Alliés.
— novembre : conférence de Téhéran (Roosevelt, Churchill, Staline).
Declaration of the Three Powers Regarding Iran.
— décembre : après la Conférence de Téhéran, les États-Unis décident
d’élever leur légation à Téhéran au rang d’ambassade (avec réciprocité
pour l’Iran à Washington). Les Britanniques font une démarche
similaire.
1944
— octobre : mobilisation du Toudeh pour faire accepter la concession
pétrolière à l’URSS au Nord de l’Iran.
— 26 novembre : de Gaulle à Téhéran se rendant à Moscou, reçu par le
shah.
— 2 décembre : Loi Mosaddeq : aucune concession pétrolière négociée
sans l’aval du Parlement.
1945
— janvier : Conférence de Yalta.
— 14 février : pacte du Quincy, Roosevelt – Ibn Saoud.
— 12 avril : mort de Roosevelt. Harry S. Truman devient président des
États-Unis.
— 3 septembre : Pishavari fonde le Parti Démocrate d’Azerbaïdjan.
— 12 décembre : Gouvernement général de l’Azerbaïdjan proclamé à
Tabriz.
— 24 décembre : Conférence tripartite de Moscou (USA, UK, URSS) pour
discuter du sort de l’Iran, sans l’Iran.
1946
— 19 janvier : Taqizâda porte plainte contre l’URSS au nom de l’Iran au
Conseil de Sécurité de l’ONU.
— 20 janvier : Qavâm os-Saltana premier ministre.
— 2 mars : retrait des troupes britanniques.
— 10 mai : fin du retrait des troupes russes.
— Qavâm os-Saltana lance son Parti démocrate d’Iran.
— 16 octobre : remaniement ministériel, le Toudeh éliminé du
gouvernement Qavâm.
— (12) décembre : l’armée iranienne reprend Tabriz.
— 15 décembre : les troupes iraniennes du général Homâyuni entrent dans
Mahâbâd. Fin de la République du Kurdistan.
1947
— 13 janvier : sit-in de Moṣaddeq et de ses amis au palais royal pour la
liberté des élections.
— juin : les États-Unis ouvrent un crédit de 25M$ à l’Iran pour équipement
militaire.
— Elections au Majles XV, ouvert le 22 octobre 1947.
— 6 octobre : accord pour la mission militaire permanente américaine.
— 21 octobre/29 mehr 1326 : le Majles repousse le projet de concession
pétrolière pour l’URSS.
1948
— 18 juillet : départ du shah pour l’Europe, y compris la Grande Bretagne.
1949
— 4 février : attentat manqué contre le shah à l’Université de Téhéran.
L’âyatollâh Kâshâni exilé.
— 21 avril-11 mai : révision de la Constitution, création du Sénat.
— 17 juillet : Accord Gass-Golshâ’iân (Supplemental Oil Agreement)
augmentant les royalties de 22 à 33 cents/baril.
— août : élection au Majles XVI. Création du Front national autour de
Mosaddeq.
— 16 novembre – 30 décembre : première visite du shah aux États-Unis.
1950
— farvardin 1329/mars : élections à Téhéran du Majles XVI, annulées
après l’assassinat de Hažir.
— 25 mai : discours remarqué de Mosaddeq au Majles : illégitimité de la
Constituante de 1949, dénonciation de la dictature naissante.
— 10 juin : retour triomphal de Kâshâni après un an d’exil au Liban.
— juin : cabinet Razmârâ.
1951
— 16 esfand 1329/7 mars : assassinat de Razmârâ.
— mars-avril : cabinet Hoseyn Alâ.
— 24 esfand 1329/15 mars : Loi de nationalisation du pétrole.
— 26 mars : grève des ouvriers du pétrole.
— ordibehesht 1330/29 avril : Mosaddeq, premier ministre.
— 25 mai : la Grande-Bretagne soumet la question de l’AIOC au Tribunal
de La Haye.
— juillet : arrivée à Téhéran de Averell Harriman comme médiateur
américain.
— 21 septembre : Henderson ambassadeur américain en Iran, succède à
Henry Grady (juin 1950-51).
— 2 octobre : expulsion du personnel britannique de l’AIOC.
— 8 octobre-18 novembre : Mosaddeq aux États-Unis avec Matin-Daftari
pour défendre la cause iranienne à l’ONU.
1952
— janvier : suspension de l’aide américaine (Point IV)
— fin mars : loi martiale à Téhéran, suite à des manifestations violentes.
— ordibehesht 1331/avril : Majles XVII.
— 28 mai-24 juin : Mosaddeq à La Haye pour défendre le dossier iranien
contre le Royaume-Uni.
— 15 tir 1331/5 juillet : démission du cabinet Mosaddeq devant le nouveau
Majles.
— 21 juillet/30 tir 1331 : insurrection ramenant Mosaddeq au pouvoir.
— 22 octobre/1 âbân 1331 : rupture des relations diplomatiques avec le
Royaume-Uni.
— 4 novembre : élection de Dwight D. Eisenhower (républicain).
1953
— janvier : Eisenhower président des États-Unis.
— 9 esfand 1331/28 février : coup d’État manqué contre Mosaddeq.
— 5 mars : mort de Staline.
— 29 juin : Eisenhower informe Mosaddeq du refus de l’aide américaine.
— 16 août : échec du premier coup d’État ; fuite du shah pour Bagdad et
Rome.
— 17 août : retour de Henderson à Téhéran.
— 18 août : Henderson rencontre Mosaddeq.
— 19 août/28 mordâd : Mosaddeq destitué par le coup d’État.
— 22 août : retour du Shah à Téhéran.
— 7 décembre /16 âzar : violentes manifestations à l’université de Téhéran
à l’occasion de l’arrivée du vice-président Richard Nixon et de la
reprise des relations diplomatiques avec le Royaume-Uni.
1954
— février : élections pour le Majles XVIII et le Sénat.
— 2 avril : traité de sécurité signé par la Turquie et le Pakistan.
— à partir d’août : démantèlement du réseau militaire du Toudeh.
— 2 novembre : mort du prince héritier Ali-Rezâ Pahlavi, demi-frère du
shah, après un accident d’avion.
— 5 décembre-12 mars : voyage du shah aux États-Unis avec Sorayâ.
1955
— avril : Zâhedi exilé en Suisse, Hoseyn Alâ premier ministre.
— juillet : Chapin remplace Henderson comme ambassadeur à Téhéran
— 8 octobre : l’Iran adhère au Pacte de Bagdad, rejoignant la Turquie,
l’Irak, le Pakistan et la Grande-Bretagne.
1956
— 19 janvier : Ali Amini ambassadeur à Washington
— 25 juin : voyage du shah à Moscou
— Pèlerinage du shah à La Mecque.
— Création de la SAVAK.
1957
— 27 mars : mission James P. Richards à Téhéran (le premier Ministre Alâ
affirme l’adhésion de l’Iran à la Doctrine Eisenhower, aide militaire
accrue).
— 20 farvardin/9 avril : Manučehr Eqbâl premier ministre.
1958
— 24-26 janvier : Foster Dulles, Secrétaire d’État, à Téhéran.
— 14 mai : Ali-Qoli Ardalân, ambassadeur à Washington à la place de Ali
Amini.
— 18 juin : Edward T. Wailes, ambassadeur américain à Téhéran.
— 30 juin – 2 juillet : visite du shah aux États-Unis.
— juillet : renversement de la monarchie irakienne. Le Pacte de Bagdad
devient CENTO.
1959
— 7-10 octobre : réunion des ministres des Affaires étrangères du CENTO
à Washington.
— 14 décembre/âzar 1338 : brève visite du président Eisenhower à
Téhéran.
— 21 décembre : mariage de Md-Rezâ Shâh et de Farah Dibâ.
1960
— esfand 1338/16 mars : première loi de réforme agraire.
— 16 mars : Ardeshir Zâhedi, ambassadeur à Washington.
— juillet : l’Égypte rompt ses relations diplomatiques avec l’Iran auquel
elle reproche la reconnaissance de facto d’Israël.
— 27 août/5 shahrivar : démission de Eqbâl. Ja’far Sharif-Emâmi, Premier
ministre. Organisation de nouvelles élections.
— 31 octobre/9 âbân 1339 : naissance du prince héritier Rezâ Pahlavi.
— novembre : élection de J. F. Kennedy
1961
— interdiction du Front national, nouvelles élections au Majles XX.
— destitution du général Teymur Bakhtyâr.
— mars : ambassade extraordinaire de Harriman à Téhéran.
— 29 mars/9 farvardin 1340 : mort de l’âyatollâh Sd Hoseyn Borujerdi.
— 6 mai : Ali Amini, premier ministre.
1962
— 19 dey 1340/9 janvier : loi de Réforme agraire complétée le 27 dey
1341/17 janvier 1963.
— 30 mars 1962 : Hoseyn Qods-Nakha’i, ambassadeur à Washington à la
place d’Ardeshir Zâhedi.
— farvardin 1341/10 avril : le shâh à Washington pour rencontrer Kennedy.
— 26 tir 1341/17 juillet : Amini démissionne, se plaignant d’une aide
américaine insuffisante. Asadollâh Alam, proche du Shâh, premier
ministre.
— 24-26 août : le vice-président Lyndon Johnson à Téhéran.
1963
— 6 bahman 1341/26 janvier : referendum sur la Révolution blanche.
— février : arrestation des principaux leaders du Front national et du MLI.
— 5 avril : Mahmud Foruqi, ambassadeur à Washington.
— 15 khordâd 1342/5 juin : révolte et répression autour de Khomeyni.
— 16-20 octobre : de Gaulle en Iran
— 22 novembre : assassinat de Kennedy. Lyndon Johnson, président
jusqu’au 20 janvier 1969.
1964
— 5 juin : voyage du shah aux États-Unis.
— loi d’immunité juridique au personnel militaire américain en Iran.
— 26 octobre : discours de Khomeyni sur le « retour des capitulations ».
— 4 novembre : arrestation et bannissement de Khomeyni en Turquie.
1965
er
— 1 bahman 1343/27 janvier : assassinat de Hasan-Ali Mansur, premier
ministre.
— 21 farvardin 1344/10 avril : attentat contre le shah au Palais de marbre.
— avril : Armin Meyer, nouvel ambassadeur américain à Téhéran.
— juin : voyage du shah en URSS, aciérie d’Ispahan et contrats
d’armement en discussion.
— 15 septembre/24 shahrivar 1344 : le Majles donne le titre “Âryâmehr” au
shah.
1967
— 22-24 août : le shah aux États-Unis pour 2 jours.
— 26 octobre : couronnement du shah.
1968
— janvier : les Britanniques annoncent leur retrait du golfe Persique dans
les trois ans.
— juin : voyage du shah à Washington, puis à Moscou.
1969
— Richard Nixon président (jusqu’au 9 août 1974).
er
— 1 avril : le shah à Washington pour les obsèques d’Eisenhower.
— 17 avril : incident sur le Shatt ol-Arab, la guerre avec l’Irak évitée de
justesse.
— 23 octobre : le shah en visite officielle à Washington.
1970
— 22 août : assassinat de Teymur Bakhtyâr en Irak.
1971
— 9 février : attaque de la gendarmerie de Siyâhkal par des Fedâ’iân-e
khalq.
— 14 août : l’Iran reconnaît l’indépendance du Bahreïn.
— 17 août : relations diplomatiques entre l’Iran et la Chine.
— 11-17 octobre : fêtes de Persépolis.
— 30 novembre : occupation par l’armée du Shâh des îlots de Tomb et Abu
Musâ.
1972
— 9 avril : traité d’amitié entre l’Irak et l’URSS. Les Kurdes irakiens se
tournent vers l’Iran.
— 30-31 mai : Nixon et Kissinger à Téhéran.
— 18 septembre-2 octobre : l’impératrice Farah en Chine.
— 10-31 octobre : le shah et Farah en URSS. Traité d’amitié entre URSS et
Iran.
— automne : envoi de troupes iraniennes en Oman.
1973
— 7 mars : Ardeshir Zâhedi à nouveau ambassadeur à Washington.
1974
— 9 août : démission de Nixon.
1975
— 5 mars : accords d’Alger entre le shah et Saddam Hussein.
— Parti Rastâkhiz, « La résurrection de l’Iran ».
— 15-16 mai 1975 : le shah à Washington.
1976
— novembre : élection de Carter.
1977
— mai : début des lettres ouvertes d’intellectuels adressées au shah.
— 7 août : Jamshid Âmuzgâr, premier ministre succède à Hoveydâ.
— 14 novembre : voyage du shah aux États-Unis. Le 15 novembre, il
pleure devant la Maison Blanche.
— 31 décembre : J. Carter à Téhéran.
1978
— 7 janvier/17 dey : article insultant sur Khomeyni dans Ettelâât.
— avril : Margaret Thatcher en Iran (Téhéran, Ispahan, Chiraz). Même
chose pour Ronald Reagan et George Bush fin avril .
— avril : voyage de Jamshid Âmuzegâr à Washington.
— 9 août : émeutes et destructions à Ispahan, Hôtel Shah Abbas incendié.
5 morts. Annulation du festival de Shirâz.
— 11 août : loi martiale à Ispahan.
— 27 août/5 shahrivar : Ja’far Sharif-Emâmi, premier ministre.
— 29 août-1er septembre : Hua Gofeng à Téhéran.
— 7 septembre/16 shahrivar : loi martiale à Téhéran.
— 8 septembre/17 shahrivar : l’armée tire sur la foule à la place Žâla
(Jaleh), Vendredi noir.
— 10 septembre : Carter appelle le shah depuis Camp David, pour l’assurer
de son soutien.
— 6 octobre : Khomeyni arrive à Paris. Le 9, transféré à Neauphle-le-
Château.
— 18 octobre : grève générale de la raffinerie d’Âbâdân.
— 2 novembre : Bzrezinski, dans une note, encourage le shah à prendre des
mesures décisives pour rétablir l’ordre et rétablir son autorité. Soutien
américain sans réserve pour utiliser la force.
— 5 novembre (dimanche) : violentes manifestations à Téhéran. Le
général Azhâri devient premier ministre. Discours du shah. Grève
générale.
— 9 novembre : « Thinking the Unthinkable », télégramme de Sullivan à
Washington pour envisager l’arrivée de Khomeyni au pouvoir.
— 7 décembre : Sadiqi pressenti pour diriger un gouvernement.
— 10-11 décembre/9 âzar : immenses manifestations à Téhéran, Tâsu’â-
šurâ.
— 24 décembre : lors d’une manifestation une voiture de l’ambassade
américaine qui cherchait à se faire ouvrir le portail est incendiée, la
foule lance des projectiles. Attaque repoussée sans victime.
— 26-28 décembre : voyage de Michel Poniatowski à Téhéran et rapport à
VGE.
— 31 décembre : démission d’Azhâri. Chapour Bakhtiar devient premier
ministre.
1979
— 4 janvier : conférence de la Guadeloupe.
— 4 janvier-3 février : mission Huyser.
— 6 janvier : Shapour Bakhtiar présente son gouvernement au shah.
— 16 janvier : départ du shah pour l’Égypte.
— 22 janvier : départ du shah pour Marrakech.
er
— 1 février : arrivée de Khomeyni à Téhéran.
— 5 février : Bâzargân nommé premier ministre de Khomeyni.
— 8 février : des militaires en uniforme participent à une manifestation en
faveur de Khomeyni.
— 11 février : insurrection, victoire de la révolution.
— 14 février : première occupation de l’ambassade américaine.
— 30 mars : le shah quitte Marrakech pour les Bahamas.
— 22 octobre : le shah arrive à New York.
— 4 novembre : prise d’otages à l’ambassade américaine.
— 15 novembre : l’assemblée des experts adopte la nouvelle constitution.
— 20 novembre/1 moharram 1400 : prise de la Grande mosquée de La
Mecque.
— 3 décembre : referendum sur la Constitution.
— 27 décembre : invasion de l’Afghanistan par des troupes soviétiques.
Bibliographie
Remarques
Abréviations
https://archive.org/details/DocumentsFromTheU.s.EspionageDen
(Documents from the U.S. Espionnage Den, Asnâd-e lâna-ye
jâsusi)
http://belog.jigaram.com/documents-from-the-u-s-espionage-den/
(Documents from the U.S. Espionnage Den, Asnâd-e lâna-ye
jâsusi) [au 25 mars 2022)
https://www.ghbook.ir/index.php?lang=fa (Asnâd-e lâna-ye jâsusi)
1
http://basij.aut.ac.ir/usemb/farsi/1.pdf (Asnâd-e lâna-ye jâsusi)
https://www.ical.ir/fa/MashroohMozakerat (débats du Parlement
iranien)
https://www.eisenhowerlibrary.gov/ (Bibliothèque D.K. Eisenhower)
https://iranicaonline.org (Encyclopædia Iranica)
https://history.state.gov/historicaldocuments/ (Foreign Relations of the
United States, documents diplomatiques américains déclassifiés)
https://nsarchive.gwu.edu/ (National Security Archive)
https://www.jfklibrary.org/asset-viewer/archives/JFKNSF (J. F.
Kennedy Presidential Library and Museum)
https://mashruteh.org/wiki/ (Journal Ettelâ’ât)
https://mashruteh.org/wiki/ (collection de tous les discours du shah en
persan)
http://tarikhirani.ir/fa (Tarikhirani, site d’histoire contemporaine)
https://fis-iran.org/en/ (Foundation for Iranian Studies – Oral History)
https://library.harvard.edu/collections/iranian-oral-history-project
(Harvard Oral History Project – Habib Ladjevardi)
https://fis-iran.org/en/resources/pahlavi (Foundation for Iranian
Studies, documents sur les Pahlavi.
http://lib.eshia.ir/ (discours de Khomeyni Ṣaḥifa-ye nur)
http://www.imam-khomeini.ir/fa/ (œuvres et discours de Khomeyni,
Ṣaḥifa-ye Emâm)
https://www.radiozamaneh.com/ (radio libre en persan financée par le
parlement des Pays-Bas).
https://www.mashreghnews.ir/news/490732/تسخیرشد-آمریكا-سفارت-چرا
(Enquête sur les causes de l’occupation de l’ambassade américaine,
4 novembre 2016, avec interview des preneurs d’otages)
Livres et articles
1. La traduction persane des documents du nid d’espions donnée par ces deux sites sont peu fiables,
mais c’est ainsi que la plupart des Iraniens en ont connaissance.
2. Documents publiés par les Étudiants suivant la ligne de l’imam, Asnâd-e lâne-ye jâsusi, (1979-
81), vol. 7. Dans la version persane (nouvelle éd.), la traduction se trouve au vol. 1, pp. 242 sq.
Liste des personnalités
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Voir TPAJAX
Alâ, Hoseyn 60, 65, 121-122, 278, N61
Alam, Asadollâh 21, 138, 162, 249, 254-255, 258, 271, 284, 425, 428, N331,
N336, N343, N363, N364, N381
Âl-e Ahmad, Jalâl 188-190, 207, 218-219, N197, N199, N233, N235, N244
Algérie 11, 74, 186, 190, 204, 371-372
Amini, Ali 19, 21-22, 112-113, 122-124, 132, 134-135, 138-153, 156-159, 161-
171, 180, 185, 194-195, 201, 230, 232-233, 280, 292, 306, 316, 340, 428,
N16, N17, N42, N83, N89, N93, N94, N95, N99, N102, N103, N104,
N105, N152, N160, N256
Âmuzegâr, Jamshid 296
Arabie Saoudite 39, 47, 70, 75, 107, 190, 223, 225, 253, 261-262, 265-266, 295
ARAMCO 39, 52, 57, N35
Ardalân, Ali-Qoli 124, 225
Ashraf, princesse 60, 68, 87, 148, 179, 284, 363, 366, N15
Asqarzâda, Ebrâhim 391, 399, 401-404, N11, N22, N27
AWACS (avion radar) 269, 272-275, 298, 301
Azerbaïdjan 9, 26, 29, 47-51, 78, 84, 106, 179, 315, 363, 411-412, N2
Banisadr, Abo'l-Hasan (président de la République islamique) 94-95, 191, 339, 342, 399
Banque impériale de Perse 34-36
Baqâ’i, Dr Mozaffar 134, 205-206, 220, N229, N230
Bâzargân, Mahdi 10, 13, 22, 94-95, 171, 287, 308, 310-311, 333, 338-340, 342-
347, 349-354, 359-360, 362, 366, 371-382, 391-393, 395, 398-400, 405, 413-
414, N10, N14, N15, N30, N31, N36, N37, N38, N39, N40, N43, N110,
N112
Beheshti, âyatollâh Mohammad 195, 309-310, 316, 333, 347, 356, 358, 360, 362,
378, 405, N15
Borujerdi, âyatollâh Hoseyn 95, 99, 149, 193-194
Brzezinski, Zbigniew 22, 250, 271, 306, 312, 315-317, 326, 334, 344-346, 348,
350, 354, 371-373, N82, N87, N88
capitulations 27, 33, 199, 205-206, 220, 323, 411
Carter, Jimmy 9, 13, 18, 21-22, 168, 249-250, 260, 269-275, 289, 292, 294-295,
297-309, 311-320, 322-325, 327-332, 334, 336, 339, 341-342, 344-345, 348-
351, 353, 363-364, 366-367, 369, 372-373, 377, 391, 405-406, 409, 431,
N1, N1, N2, N3, N4, N7, N9, N11, N15, N16, N23, N32, N33, N34,
N35, N41, N51, N53, N57, N58, N59, N63, N67, N87, N88, N94, N113,
N114, N115, N117, N122, N123, N195, N384, N387
Caucase 16, 29, 39, 82, 222, 315
CENTO 101, 117, 129-132, 135-136, 160, 202, 223, 227, 229, 238-239, 243,
272, 276, 353, 412
Chamrân, Mostafâ 371-373
Charte de l’Atlantique 38-40, 43-44, 46, 70, 411
Chiraz 103, 189, 192, 211, 267, 361
CIA 20, 23, 67-70, 74, 84-87, 89-90, 92-93, 95-97, 99-100, 104, 115-116, 121,
123, 126, 129, 138, 142, 157, 162, 165, 167, 169, 173-174, 176-177, 180,
183-186, 190, 196, 198, 221, 224, 235, 241, 245, 253, 256-257, 275, 282,
291-293, 303, 314, 323, 353, 356, 371, 399, 425, 434, N1, N16, N18,
N23, N27, N29, N38, N46, N50, N57, N65, N66, N69, N76, N80, N84,
N86, N87, N88, N145, N148, N150, N164, N255, N271, N285, N293,
N362, N405, N407, N410
clergé shi’ite 285-286, 290
Conférence de Téhéran 40, 44
Conseil de régence 63, 124, 343
Cottam, Richard 20-21, 92, 174, 314, 339, 371, N17, N36, N37, N71, N75,
N85, N166
Eisenhower, président américain 68, 71, 74, 81-83, 90, 109, 111, 116, 122-123,
125-127, 130-131, 137, 139, 142, 147-148, 168, 222, 225-227, 229, 247,
263, 275, N47, N68, N76, N101, N252, N256, N257, N261
Entezâm, Abdollâh 306
Entezâm, Nasrollâh 109, 129, 310, 376
Eqbâl, Manučehr 121-122, 129, 148
espace politique ouvert 296-297, 306, 385
Étudiants dans la ligne de l’imam 13, 283, 351, 361, 366, 376, 378, 390-391, 398,
403
Fardid, Ahmad 189, 192
Fardust, général Hoseyn 140, 172-184, 284, N86, N159, N161, N165, N166, N167,
N169, N174, N178, N181, N185, N187, N188, N189, N191
Fedâ’iân-e eslâm 53, 95, 173, 193-195, 286
Fedâ’iân-e khalq 15, 187, 254, 290, 358-360, 396, 401-402, N2, N14, N15
Ford, Gerald (président américain) 189-190, 269, 271, 292-295, 330, N1, N51,
N380
Front national 56, 64, 89, 92, 94, 101-102, 105, 150, 167, 169-171, 173-174,
201, 216, 306-307, 310, 325
Holmes, Julius C. (ambassadeur américain) 152-153, 155-156, 164-165, 196, 202, 229,
232-233, 235-236, N116, N122, N124, N208, N219, N274, N280, N284
Hoover, Herbert 108-110
Hoveydâ, Amir-Abbâs 178, 184, 239, 258, 284, 296, 377, 384
Hurley, général Patrick 43-46, N41, N42, N44, N47
Huyser, général Robert 317, 319, 323-325, 327-336, 342, 345-346, 348, 354, N69,
N73, N82, N83, N85, N115
Imbrie, major 205
Irak 9, 11, 16, 47, 105, 107, 117, 119, 124, 128-129, 155, 159, 163, 180,
217, 230, 233-235, 239, 256-259, 261-265, 267, 275-277, 287, 294, 327,
377, 391, 395, 406, 415, N2, N60, N61
Iran Task Force 141, 143-145, 149-151, 153-154, 157, 167, N97, N109, N112,
N113, N119, N123
Ispahan 26, 103, 131, 237, 254, 267, 269, 302, 326, 361, 391, 398, 400, N60
Israël 25, 47, 184, 196, 201-203, 210, 217, 235, 243, 246, 253-254, 260, 264,
270, 272, 286, 295, 300, 364, 368, 374, 376, 387-388
Johnson, Lyndon (président américain) 20, 163, 168, 230, 235-238, 240-241, 243-
244, 246-247, 249-251, 277, N269, N288, N292, N294, N297, N299, N302,
N306
Khomeyni, âyatollâh Ruhollâh 9-10, 14-15, 17-18, 20, 95, 140-141, 171, 175, 181,
193-197, 201-208, 216-221, 237, 254, 260, 287-288, 301-304, 307-308, 310-
312, 314-315, 317, 319, 321, 323-325, 327-329, 331-339, 341-349, 351-354,
358-360, 365, 367-369, 372, 374-380, 382, 385, 387-392, 395, 398-399,
401-405, 412-413, 427, N12, N13, N14, N15, N37, N205, N223, N236,
N237, N240
Khouzistan 42, 74, 184, 240, 267
Khrouchtchev, Nikita 155, 219, 231
Kissinger, Henry 21, 249-252, 254, 256, 258-263, 265, 269, 277, 284, 294, 315,
366-367, 432, N319, N325, N326, N329, N330, N354, N356, N360, N361,
N364, N368, N371, N376, N413
Komer, Robert 144-145, 154-155, 165, 169-170, 177, 195-196, 229-230, 233, 238,
N75, N97, N111, N120, N128, N130, N142, N143, N144, N154, N156,
N158, N171, N206, N263, N268, N271, N272, N275, N288
Kubark 177
Kurdistan 9, 48, 51, 84, 125, 167, 322, 359, 362-363, 367-368, 384, 395, 397,
411
Laingen, Bruce 368
Mahdavi, Abd or-Rezâ Hušang 22, 205-206, 220, 257, 319, N9, N20, N43, N64,
N153, N228, N249, N271, N273, N311, N327, N341
Mansur, Ali (premier ministre iranien) 196, 219, 258, 384
Mojâhedin-e khalq 15, 187, 250, 254-255, 285, 287, 290, 294, 339, 347, 358-
360, 392, 402-403, 414, N2, N15
Montazeri, âyatollâh Hoseyn 99, N84, N85
Mosaddeq 9, 16, 19, 23, 52-53, 56, 59-72, 74-76, 78-105, 107-109, 111, 113-
114, 116-120, 129, 133-134, 138, 142, 145-146, 160-161, 172-173, 178, 183,
188, 202, 217, 222, 278, 280-281, 287, 292, 310, 332, 338, 363, 378,
383, 399, 412-415, 425, N8, N15, N43, N47, N52, N77, N79
Mossad 184
mostaz’af 381, 384
Neauphle-le-Château 307-308, 314, 327, 335, 338-339, 342-343, 346, 352, 369,
N99
Nikkhâh, Parviz 186-187
Nixon, Richard (président américain) 21, 118, 133, 184, 226, 245-258, 260-263,
265-266, 269-270, 277, 284, 293, 299, 363, N291, N311, N314, N315,
N318, N319, N320, N326, N330, N354, N356, N361, N364, N368, N371
Nucléaire 232, 246, 270-271, 293, 295, 411
Occidentalite 189
Voir Qarbzadagi
Oney, Earnest R. 282-292, N54, N56, N63, N149, N160, N162, N163, N164,
N166, N168, N169, N172, N177, N180, N189, N227, N251, N380, N405,
N406, N408, N410
ONU 39, 50, 78-79, 117, 226, 263, 294, 339, 370, 411
pacte de Bagdad 47, 101, 117, 119, 129-130, 137, 139, 226-227, 232, 278, 426
Pahlavi, Farah 191, 262, 284, 299, 366
Pahlavi, Mohammad-Rezâ 9, 13, 40, 52, 54, 67, 87, 91, 103, 106, 119, 121,
130, 136, 161, 179, 184, 223, 278, 281, 290, 292, 363-364, 369, 412,
N12, N50, N70, N74, N81, N313, N322
maladie 320, 364, 370, 390
quitte l'Iran 330
voyages aux États-Unis 54
Pahlavi, princesse Shahnâz 119, 122
Pahlavi, Rezâ 36, 40-41, 67
Rezâ Khân 34-35, 91, 96, 101, 103-104, 183, 280
Rezâ Shâh 34
Panama 369
Parsons, Anthony 303, 305-306, 309, N5, N5, N7, N10, N13, N14, N19, N21,
N26, N34
Perron, Ernest 278-280, 363
Persépolis 178, 247
Point Four 71, 83-84, 138
Qarbzadagi 188-189
Qavâm, Ahmad 49-50, 52-53, 59, 78, 85, 113, 121, 138, 145, 292, 363, 381,
N55, N57, N58, N59, N60, N62
Qom 141, 193-194, 202, 205-207, 211, 225, 302, 307, 352, 368, 388, 404, N4,
N5, N79
Rabin, Yitzhak 293
Rahnema, Ali 23, 84, 94, 98, N66, N81, N82, N83
réforme agraire 95, 115, 122-123, 126-127, 135-136, 138, 141, 146-149, 165,
167, 169-170, 194, 198, 238, 281, 284
Révolution blanche 21, 132, 168, 194-195, 212, 235, 239, 281, 299, 304, 385
Roosevelt, président américain 38-40, 42-45, 47, 52, 54, 68, 87, 185, 363, N27,
N38, N41, N44, N45, N66
Rostow, Walt W. 168, 240-242, N89, N294, N299, N300, N301, N358
Rouleau, Eric 178, N324
Rusk, Dean (secrétaire d'État) 197, 235, 242, 245, N107, N125, N142, N205,
N280, N301
Sadate, Anouar 261, 299, 305, 330
Saddam Hussein 180, 217, 267
Stempel, John D. 289, 339-341, 368, N4, N5, N7, N36, N92, N93
Stutesman, John H. 278, 280-281, N31, N40
Sullivan, William (ambassadeur américain) 267, 270, 274, 297-298, 303-306, 308-312,
314-315, 317, 321, 323-331, 333-336, 342, 345-348, 351, 353-355, 357-361,
374, 414, 436, N3, N3, N5, N6, N6, N7, N8, N10, N13, N28, N29,
N34, N34, N68, N70, N79, N80, N87, N96, N98, N99, N167, N195,
N372, N373, N388, N390
Tabriz 27, 32, 48, 103, 302, 349, 361, 395
Tâjbakhsh, Ardeshir 172-173
TPBEDAMN 84
Truman, président américain 39, 47, 49, 54, 68, 71, 74, 79, 81-82, 250, 363
Vance, Cyrus 22, 271-274, 307, 312-313, 315, 317, 325-327, 329, 341-342, 345-
346, 348, 350, 364, 370, 374, N1, N3, N3, N27, N31, N34, N38, N39,
N99, N382, N385, N387, N388
velâyat-e faqih 218
Vietnam 13, 131, 150, 186-187, 204, 235, 237-242, 246, 249, 254-255, 260,
265, 276, 293, 298, 318, 341, 354, 363, 405, 409
Wilber, Donald 69-70, 93, 96, 104, N15, N16, N80
Wright, Denis 109
Zâhedi, général 60, 68-69, 85-86, 91, 95, 97-98, 104, 107, 109, 114-121, 145-
146, 179, 278, 280-281, 292
Ziâ'oddin, Seyyed 67, 85, 91, 96, 101-104
Ziâ, Seyyed 280