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La Symétrie Moléculaire

Une boîte à outils très puissants


Romuald Poteau
Laboratoire de Physique Quantique, IRSAMC, UPS, Toulouse
romuald.poteau@irsamc.ups-tlse.fr
www.ressources-pedagogiques.ups-tlse.fr/cpm

Licence de Chimie, 3eme annee, UE1

La Symetrie Moleculaire – p. 1/23


Objectifs

Comment classer une molécule d’après sa


symétrie ?
Pourquoi procéder à ce classement ? → il
existe un lien entre la symétrie d’une molécule
et ses propriétés moléculaires
structure électronique
structure géométrique
réactivité
signature spectrale (IR, UV-Visible, RMN)
L’analyse de la symétrie se fait à l’aide de la
théorie des groupes.
On va apprendre à :
identifier les éléments de symétrie d’une
molécule
en déduire à quel GPS elle appartient
analyser comment se transforment des
entités associées aux molécules (OM,
modes de vibration)
analyser si des transitions spectrosco-
chiralité - carbones asymétriques
piques peuvent se produire ou pas

La Symetrie Moleculaire – p. 2/23


Opérations et éléments de symétrie : introduction

axe
45°

4 opérations de symétrie

90°
180°
axe =
270°
élément de symétrie 360°

1 × 90◦ → C41 3 × 90◦ → C43


2 × 90◦ → C42 4 × 90◦ → C44
Axe principal d’ordre n : Cn
360◦ m
Opération de symétrie : m × n → Cn

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Définition des éléments et des OS (1)

 L’opération identité E élément de symétrie associé = objet lui-même


consiste à ne rien faire chaque objet possède au moins une OS : E

m
 Opération de rotation Cn autour d’un axe Cn

rotation de m × 360
autour d’un axe d’ordre il existe un axe principal Cn tq n est le plus
n
n (Cn ) élevé
une molécule hautement symétrique (tétra-
il faut définir un axe de rotation >0 (arbitraire)
èdre, octaèdre, icosaèdre) possède plusieurs
lorsqu’une molécule possède plusieurs axes, axes principaux

O C5

C2
Hb Ha
1
C2
°:
180
Fe
O
O
Ha Hb
360
°:
C22=
E Ha Hb

l’axe C2 engendre une seule OS : C21 ferrocène


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Définition des éléments et des OS (2)
m
 Opération de rotation Cn autour d’un axe Cn

Hc Hb

C3 C13 C3
a c
H H

C3
Hb Ha
σv C33=E
σv C13
Cl C13 C23=C-1
3
σv
Ha
C
C3
b
H

Hc

Vue en projection
L’élément C3 engendre 2 OS : C31 et C32 (= C3−1 )

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Définition des éléments et des OS (3)

 Opération de réflexion par rapport à un plan σ


σv C2
échange de 2 moitiés d’objets, plan de découpe = plan σ
σ
réflexion par
rapport au plan

plan ⊥ axe principal = σh


plan contenant l’axe principal : σv

vertical = σv
vertical et dièdre = σd (bisecteur de 2 axes C2 consécutifs)

O σ1 = σ O σ2 = Ε O

Ha Hb Hb Ha Ha Hb

! Une molécule plane possède au moins un élément de symétrie : le plan qui la contient

σm = σ m impair ; σ m = E m pair ⇒ chaque plan engendre une seule OS


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Définition des éléments et des OS (4)

 Opération d’inversion im par rapport à un centre d’inversion i


un point de coordonnées (x, y, z) inversé par rapport au centre O du reprère cartésien se retrouve
en (−x, −y, −z)
H2 O, CH3 Cl n’ont pas de i

i1=i i2=E
Ha Hb Hb Ha Ha Hb

im = i m impair ; im = E m pair ⇒ chaque centre engendre une seule OS

m
 Opération de rotation impropre Sn autour d’un axe Sn
m
Sn se décompose en deux opérations successives :
m
une rotation Cn
suivie d’une réflexion par rapport à un plan σ ⊥ à l’axe Cn
Rq : l’axe Cn et le plan σ ne sont pas obligatoirement des éléments de symétrie

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Définition des éléments et des OS (5)
m
 Opération de rotation impropre Sn autour d’un axe Sn

Hc Hd Ha Hb

S14

Ha Hb Hd Hc

1
C5
S14 S14
S44=E
S24=C12

S34=S-14
Hb Ha Hd Hc
Ru σ Ru Ru

S14
Hc Hd Hb Ha

Décomposition de l’OS S51 (ruthénocène) OS S4m (méthane)


n
Sn = E si n pair
2n
Sn = E si n impair

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Recherche du GPS d’une molécule
Groupe Ponctuel de Symétrie = GPS
Molécule Ponctuel ? Les OS laissent au moins un point commun inchangé
Classification en GPS déduite des éléments de symétrie

linéaire

i plusieurs
Cn (n > 2)
D h C v
Td
Oh
Ih Cn

nC2⊥Cn i
Cs
σh σh
Ci
nσd nσv
Dnh C nh C1
S2n
Dnd C nv

Dn S 2n

Cn

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Recherche du GPS d’une molécule. Chlorométhane.

CH3Cl

linéaire

i plusieurs
Cn (n > 2)
D h C v
Td
Oh
C3 Ih Cn
n=3
σ
σv
nC2⊥Cn
σv i
Cl 3C2⊥C3 Cs
σv σh σh
Ci
nσv
nσd
C Dnh C nh
3σv
C1
S2n
Dnd C nv
C 3v
Dn S 2n

Cn

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Recherche du GPS d’une molécule. Méthane.

C2 S4
C2
H CH4
S4
H
C2 linéaire

C S4 i plusieurs
Cn (n > 2)
H D h C v
Td
Oh
H Ih

C3 σd
C3
C3 σd σd
C3

σd C3 : C31 , C32 → 8 C3


σd
S4 : S41 , S43 → 6 S4


C2 : C21 → 3 C2


σd 6 σd


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Un peu de formalisme (1)

 Les OS d’une molécule forment un groupe


groupe = ensemble d’éléments qui satisfont à certaines conditions : l’ensemble G = {A, , B, C, ...}, où
A, B, C, ... sont ici des OS, forme un groupe si :
il existe une loi de multiplication entre deux éléments du groupe G qui a pour résultat un autre élément
du groupe G :

AB = C

la multiplication est associative :

(AB)C = A(BC)

il existe un élément neutre de l’opération multiplication (ici E=identité) :

EA = AE = A

tout élément du groupe admet un inverse :

−1 −1
A A = AA =E

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Un peu de formalisme (2)

 Les OS peuvent être représentées par des matrices


z

y soit u = ux ex + uy ey + uz ez
O quelle est l’action de C2 sur u ?
H H C 2 u = u x C 2 ex + u y C 2 ey + u z C 2 ez
9
C2 ex = −ex >
>
=
C2 ey = −ey d’où C2 u = −ux ex − uy ey + uz ez (1)
>
>
C2 ez = +ez ;
0 1 0 1 0 1
ux −ux −1 0 0
B C B C B C
@ uy A = @ −uy A avec D(C2 ) = @ 0
(1) ⇔ D(C2 ) B C B C B −1 0 C
A
uz uz 0 0 1
D(C2 ) représente l’OS C2 dans la base {ex , ey , ez } → matrice représentative de l’OS C2
Autres matrices représentatives :
0 1 0 1 0 1
1 0 0 1 0 0 −1 0 0
B C B C B C
D(E) = B
@ 0 1 A ; D(σv (xz)) = @ 0 −1 0 A ; D(σv (yz)) = @ 0
0 C B C B 1 0 C
A
0 0 1 0 0 1 0 0 1
Les 4 matrices constituent une représentation (qu’on notera Γe )
du GPS C2v dans la base {ex , ey , ez }

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Un peu de formalisme (3)
0 1 0 1
1 0 0 −1 0 0
B C B C
D(E) = B @ 0 A ; D(C2 ) = @ 0
1 0 C B −1 0 C
A
0 0 1 0 0 1
0 1 0 1
1 0 0 −1 0 0
B C B C
D(σv (xz)) = B
@ 0 −1 0 CA ; D(σv (yz)) = @ 0
B 1 0 C
A
0 0 1 0 0 1
 La trace des matrices représentatives des OS R est appelée caractère

X
χ(R) = tr[D(R)] = dii (R)
i

(trace d’une matrice = somme des éléments diagonaux)

E C2 σv (xz) σv (yz)
Γe 3 -1 1 1

caractère = effet de l’OS sur la base dans une représentation donnée


χ(E) = 3 : dimension de la représentation Γe

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Représentations irréductibles. Cas des OM de H2 O

σv C2

 Analyse de la transformation de deux OM de H2 O

OM E C2 σv (xz) σv (yz)
A

B
ϕ1
σv Γϕ 1 +1 +1 +1 +1
z

y ϕ2
x
Γϕ 2 +1 -1 +1 -1
GPS : C2v
OS : E, C2 , σv (xz),
χ(E) = +1 : ces représentations sont
σv (yz)
chacune de dimension 1

 Commentaires
Les quatres caractères (+1,+1,+1,+1) obtenus pour ϕ 1 définissent la représentation Γϕ1
Les quatres caractères (+1,-1,+1,-1) obtenus pour ϕ 2 définissent la représentation Γϕ2
Γϕ1 6= Γϕ1 → les 2 OM n’ont pas les mêmes propriétés de symétrie
Représentation de dimension 1 : + petite représentation possible ⇒ il s’agit de représentations
irréductibles (RI)
Il y a un nombre fini de RI dans un GPS (sauf groupes infinis)
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Tables des caractères (1)
Pour un GPS donné, les RI, les caractères qui définissent ces RI, les OS
σv C2 sont recensés dans la table des caractères de ce groupe

 Analyse de la transformation de deux OM de H2 O

A OM E C2 σv (xz) σv (yz)
B
ϕ1
σv Γϕ 1 +1 +1 +1 +1 A1
z

y
x ϕ2
GPS : C2v Γϕ 2 +1 -1 +1 -1 B1
OS : E, C2 , σv (xz), identification de Γϕ1 et Γϕ2 dans la table des caractères :
σv (yz)
Γϕ 1 = A 1 ; Γ ϕ 2 = B 1

 Table des caractères


C2v E C2 σv (xz) σv (yz)
A1 1 1 1 1 z x2 ,y 2 ,z 2
A2 1 1 -1 -1 Rz xy
B1 1 -1 1 -1 x, Ry xz
B2 1 -1 -1 1 y, Rx yz
Table des caractères du groupe C2v
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Table de caractères (2)

 Exemple du groupe C3v

C3v E 2C3 3σv


A1 1 1 1 z x2 + y 2 ,z 2
A2 1 1 -1 Rz
E 2 -1 0 (x, y) (Rx , Ry ) (x2 − y 2 , xy) (xz, yz)

1ère ligne : OS (R) regroupées en classes (3 classes ; K = 3) ; ordre h = 6 (nbre d’OS du groupe)
1ère colonne : nom des représentations irréductibles (RI)
Caractères χ(R)
pour la RI A1 (RI de dimension 1)
pour la RI A2 (RI de dimension 1)
pour la RI E (RI de dimension 2 = RI dégénérée)
χ(E) pour une RI Γj = dimension de la RI = dj
Fonctions qui constituent une base pour les RI (fonctions linéaires x, y, z et fonctions quadratiques
x2 ,y 2 ,z 2 ,xy,yz,xz)
! ! Vrai uniquement pour les fonctions situées à l’endroit totalement invariant par toute OS (càd
intersection de toutes les OS) ! !

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Construction et réduction d’une représentation (1)

 Quelques relations mathématiques


1. Relation entre l’ordre du GPS et les dimensions des RI. Cas d’une
C3v E 2C3 3σv RI Γj (dj = dimension de la RI Γj ; N = nombre de RI) :
A1 1 1 1
N
A2 1 1 -1 X 2
dj = h
E 2 -1 0 j=1

2. Relation d’orthogonalité entre 2 RI quel- 4. Relation générale :


conques Γi et Γj :
P
Relation 2 : αµ χi (µ)χj (µ) = 0

K P
X Relation 3 : αµ χi (µ)χi (µ) = h
αµ χi (µ)χj (µ) = 0 i 6= j
µ=1

Une seule relation qui résume les deux :


3. Le “module” d’une RI Γi correspond à l’ordre
du groupe :
K
X
αµ χi (µ)χj (µ) = hδij
K
X µ=1
αµ [χi (µ)]2 = h
µ=1

où δij = symbole de Kronecker


δij = 0 i 6= j ; δij = 1 i = j
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Construction et réduction d’une représentation (2)

 Vers l’élaboration de recettes

on va considérer des problèmes physico- obtenir des fonctions de symétrie


chimiques de molécules qui possèdent une on veut éviter de passer par la représentation
symétrie matricielle des OS ⇒ il faut une formule de
ce problème va être exprimé dans une base réduction, telle que :
de fonctions élémentaires (par exemple une
base d’OA) N
X
Γ= ai Γi
l’application des OS sur cette base va
i=1
donner une représentation Γ, générablement
réductible
càd une formule qui permette de trouver les
on va souhaiter réduire cette représentation
coefficients ai
en RI Γi , étape indispensable pour ensuite

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Construction et réduction d’une représentation (3)

 Vers l’élaboration de recettes : recherche de la relation de réduction


On peut exprimer une RR comme une
combinaison linéaire de RI
P
Γ= ai Γi doit être vérifiée ∀ la classe d’OS µ :
N
X
N
X Γ= aj Γj
χ(µ) = ai χi (µ) i=1
i=1

On fait la somme sur toutes les classes, sans oublier le K


1 X
nombre d’OS de chacune des classes (αµ ) : aj = αµ χ(µ)χj (µ)
h µ=1

K
X N
X K
X
αµ χ(µ) = ai αµ χi (µ)
µ=1 i=1 µ=1
avec
puis on multiplie par χj (µ), le caractère d’une RI Γj : χ : caractère qui définit la représentation à
réduire Γ ; χj : caractère de la RI Γj
K
X N
X K
X si les caractères des RI ∈ C :
αµ χ(µ)χj (µ) = ai αµ χi (µ)χj (µ)
µ=1 i=1 µ=1
K
hδij 1 X ∗
aj = αµ χ(µ)χj (µ)
aj h h µ=1

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Les recettes pour construire et réduire

1. Chercher les éléments de symétrie et les OS


2. En déduire le GPS
3. Définir la base {u1 , u2 , u3 , ...uM }, pertinente vis-à-vis du problème physico-chimique
4. Construire la représentation des OS dans cette base. Recette pour éviter de construire les matrices
représentatives des OS :
Soit une OS R̂, on va considérer l’application de R̂ à chaque fonction de base :
si R̂ui = ±ui alors χi = ±1
si R̂ui = ±uj (càd une autre fonction de la base) alors χi = 0

Bilan :

M
X
χ(R̂) = χi
i=1

5. Il ne reste plus qu’à réduire la représentation à l’aide de l’expression :

K
1 X
aj = αµ χ(µ)χ∗
j (µ)
h µ=1

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application de la TG au calcul d’intégrales :

une intégrale :

Z
I= g1 f g2 dτ

est différente de zéro si le produit direct Γg1 ⊗ Γf ⊗ Γg2 contient la RI totalement symétrique
Le symbole ⊗ est un produit direct
 Exemple de produit direct
C2v E C2 σv (xz) σv (yz)
A2


× × × ×
B1


A2 ⊗ B 1


B2


A2 ⊗ B 1 = B 2

La Symetrie Moleculaire – p. 22/23


Exemple

 Application de recettes. Cas de H2 O en base d’OA de valence

base : {2s, 2px , 2py , 2pz , 1sA , 1sB } Transformation des OA de la base :
C2v E C2 σv (xz) σv (yz)
σv C2
2s 2s 2s 2s 2s





2px 2px −2px 2px −2px








2py 2py −2py −2py 2py








2pz 2pz 2pz 2pz 2pz





1sA 1sA 1sB 1sB 1sA





1sB 1sB 1sA 1sA 1sB





A
Γ


B
Réduction de Γ :
aA 1 = 3
σv
z aA 2 = 0
y a B1 = 1
x
a B2 = 2
Γ = 3A1 ⊕ B1 ⊕ 2B2
on en déduit la symétrie des OM de valence
de H2 O :
3 OM de symétrie A1
1 OM de symétrie B1
2 OM de symétrie B2

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