Vous êtes sur la page 1sur 11

Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

Chapitre 4 : Dynamique des fluides réels incompressibles


I- Le phénomène de pertes de charge :

La pression d'un liquide réel diminue tout au long d'une canalisation dans
laquelle il s'écoule, même si elle est horizontale et de section uniforme.
Contrairement au théorème de Bernoulli qu’on a vu au chapitre précédent, la
pression d'un fluide réel diminue après le passage àtravers un coude, une vanne,
un rétrécissement…Un fluide réel en mouvement, subit des pertes de charge
dues aux frottements entre les couches voisines du fluide ou entre le fluide et la
paroi de la canalisation (pertes de charge systématiques ou linéaires) ou aux
"accidents" de parcours (pertes de charge singulières ou accidentelles).

II - Les différents régimes d'écoulement : nombre de Reynolds

Les expériences réalisées par Reynolds en 1883, lors de l'écoulement d'un


liquide dans une conduite cylindrique rectiligne dans laquelle arrive également
un filet de liquide coloré, ont montrél'existence de deux régimes d'écoulement :
laminaire et turbulent.

(a) laminaire b) transitoire c) turbulent

(a) : Aux faibles vitesses, le filet coloré conserve son individualité jusqu’à
l’extrémité. Le fluide s’écoule en couches cylindriques coaxiales. On dit que le
fluide s’écoule en régime laminaire
(b) : A partir d’une certaine vitesse de l’écoulement, le filet coloré se mélange
brusquement dans le fluide après avoir parcouru une certaine distance. C’est une
transition entre le régime laminaire et celui turbulent (transitoire ou
intermédiaire)
(c) : Si on augmente encore la vitesse, le filet coloré se mélange à l’écoulement
presque aussitôt après son introduction. On a formation de mouvement
tourbillonnant dans le fluide. On dit que le fluide s’écoule en régime turbulent.

Mécanique des fluides Page 1


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

En utilisant des fluides divers (viscositédifférente), en faisant varier le débit et


les paramètres de la canalisation, Reynolds a montré que le paramètre qui
permet de déterminer si l'écoulement est laminaire ou turbulent est un nombre
sans dimension appelénombre de Reynolds et donnépar :
𝜌𝑈𝐷 𝑈𝐷
𝑅𝑒 = ou 𝑅𝑒 =
𝜇 𝜈

avec : = masse volumique du fluide

U = vitesse moyenne d’écoulement

D = diamètre de la conduite

μ= viscositédynamique du fluide

 = viscositécinématique du fluide

Les expériences ont montréque :

- si Re ≤ 2000 : le régime est laminaire


- si 2000 < Re ≤ 3000 le régime est intermédiaire ou transitoire
- si Re > 3000 le régime est turbulent

Ces valeurs doivent être considérées comme des ordres de grandeur. Le passage
d'un type d'écoulement àun autre se fait progressivement.

Remarque : si la section d’écoulement n’est pas circulaire, on définit le diamètre


équivalent ou diamètre hydraulique DH tel que :

4 ∗ 𝑠𝑒𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑚𝑜𝑢𝑖𝑙𝑙é𝑒 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑐𝑎𝑛𝑎𝑙𝑖𝑠𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛


𝐷𝐻 =
𝑝é𝑟𝑖𝑚è𝑡𝑟𝑒 𝑚𝑜𝑢𝑖𝑙𝑙é 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑐𝑎𝑛𝑎𝑙𝑖𝑠𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑝𝑎𝑟 𝑙𝑒 𝑓𝑙𝑢𝑖𝑑𝑒
𝜌𝑈𝐷𝐻 𝑈𝐷𝐻
Et donc : 𝑅𝑒 = ou 𝑅𝑒 =
𝜇 𝜈

Exemples :

 Section circulaire (buse) :

4∗𝜋∗𝑅 2
𝐷𝐻 = = 2*R =D
2∗𝜋∗𝑅
D

Mécanique des fluides Page 2


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

 Section carrée :

4∗𝑎2
a
𝐷𝐻 = =a
4∗𝑎

 Section rectangulaire (dalot) :

4∗𝑎∗𝑏 2∗𝑎∗𝑏
𝐷𝐻 = =
a b 2∗(𝑎+𝑏) (𝑎+𝑏)

 Canal rectangulaire :

4∗𝑏∗ℎ
𝐷𝐻 =
𝑏+2∗ℎ
h

III - Théorème de Bernoulli appliquéàun fluide réel avec pertes de charge


sans échange de travail (pas de machine hydraulique)

Lors d'un écoulement d'un fluide réel il peut y avoir des pertes de charge entre
les points (1) et (2) : dans le cas d’une installation hydraulique ne comportant
pas de machine hydraulique (pompe ou turbine), on écrit la relation de Bernoulli
sous la forme suivante:
1
𝜌 ∗ (𝑈22 − 𝑈12 ) + 𝜌 ∗ 𝑔 ∗ (𝑧2 − 𝑧1 ) + (𝑝2 − 𝑝1 ) = -Δp
2
1 (𝑝2 − 𝑝1 )
∗ (𝑈22 − 𝑈12 ) + (𝑧2 − 𝑧1 ) + = -ΔH
2∗𝑔 𝜌∗𝑔

Avec : p représente l’ensemble des pertes de charge en terme de pression


entre (1) et (2) exprimées en Pa (pertes de pression)

ΔH représente l’ensemble des pertes de charge entre (1) et (2) exprimées


en m.c.f

Mécanique des fluides Page 3


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

p = pl + ps

Avec pl : pertes de pression systématiques ou linéaires

ps : pertes de pression singulières ou accidentelles

H = Hl + Hs

Hl : pertes de charge systématiques ou linéaires

Hs : pertes de charge singulières ou accidentelles

IV - Expressions des pertes de charge

IV.1 - Influence des différentes grandeurs

Lorsqu'on considère un fluide réel, les pertes de charge dépendent de la forme,


des dimensions et de la rugositéde la canalisation, de la vitesse d'écoulement et
de la viscositédu liquide.

La différence de pression Δp (respectivement aussi ΔH) entre deux points (1) et


(2) d'un circuit hydraulique a pour origine :

 Les frottements internes du fluide et aussi sur la paroi interne de la


canalisation ; on les appelle pertes de pression (de charge) linéaires ou
systématiques.

 La résistance à l'écoulement provoquée par les accidents de parcours


(coudes, élargissements ou rétrécissement de la section, organes de réglage,
etc.) ; ce sont les pertes de pression (de charge) accidentelles ou
singulières.

Le problème du calcul de ces pertes de charge fait intervenir les principales


grandeurs suivantes :

 Le fluide caractérisé par : sa masse volumique  et sa viscosité


cinématique .
 La canalisation caractérisée par : sa section (forme et dimension), sa
longueur L et sa rugositéks (hauteur moyenne des aspérités de la paroi de
la canalisation).

Ces éléments sont liés par des grandeurs comme la vitesse moyenne
d'écoulement U ou le débit Qv et le nombre de Reynolds Re qui joue un rôle très
important dans le calcul des pertes de charge.

Mécanique des fluides Page 4


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

IV.2 - Pertes de charge linaires (systématiques) :Hl

Ce genre de perte est causépar le frottement interne entre les couches voisines
du fluide et aussi entre le fluide et la paroi de la canalisation.

Entre deux points séparés par une longueur L, dans une conduite de diamètre D
apparaît une perte de pression pl (respectivement une perte de charge ΔHl)
exprimée sous la forme suivante :

𝜌𝑈 2 𝐿
𝛥𝑝𝑙 = 𝜆 : perte de pression (Pa)
2 𝐷

𝑈2 𝐿
𝛥𝐻𝑙 = 𝜆 : perte de charge (m.c.f)
2𝑔 𝐷

λ est un coefficient sans dimension appelé coefficient de perte de charge


linéaire.

Le calcul des pertes de charge linéaires repose entièrement sur la détermination


de ce coefficient .

a - Cas de l'écoulement laminaire : Re ≤ 2000

Dans ce cas, le coefficient dépend uniquement du nombre de Reynolds Re; et


ne dépend pas de l'état de la surface (la rugosité ks), ni de la nature de la
canalisation :
64
𝜆= : loi de Poiseuille
𝑅𝑒

𝑈𝐷
avec 𝑅𝑒 =
𝜈

b - Cas de l'écoulement turbulent : Re > 3000 :

L'écoulement est beaucoup plus complexe (agité) et la détermination du


coefficient de pertes de charge λ résulte de mesures expérimentales. C'est ce qui
explique la diversité des formules anciennes qui ont été proposées pour sa
détermination.

En régime turbulent l'état de la surface (rugosité) devient sensible et son


influence est d'autant plus grande que le nombre de Reynolds Re est grand.

Mécanique des fluides Page 5


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

La formule de Colebrook est actuellement considérée comme celle qui traduit le


mieux le phénomène d'écoulement en régime turbulent :

1 𝑘𝑠 2.51
= −2log ( + )
√𝜆 3.7𝐷 𝑅𝑒√𝜆

avec D : diamètre de la conduite

ks : rugositéde la paroi interne de la canalisation

ks

ks

* Quelques exemples de valeurs de ks selon la nature de la surface intérieure :

- en acier neuf : ks = 0.05 mm

- en cuivre : ks = 0.001 à0.002 mm

- en ciment bien lissé: ks = 0.3 mm

- en béton ordinaire : ks = 1 mm

Pour une conduite de diamètre D donné, on appelle rugositérelative le rapport


ks/D

L'utilisation directe de cette formule de Colebrook, du fait de sa forme, implicite


un calcul par approximations successives. On emploie aussi en pratique des
représentations graphiques (abaques : Diagramme de Moody).

Pour utiliser cet abaque, on choisit le point d’intersection de la courbe


correspondant au ks/D de la conduite et au nombre de Reynolds Re. On projette
ensuite ce point sur l’ordonnée de gauche du diagramme de Moody pour avoir λ.
Remarque : Si la valeur de ks/D ne correspond pas àune courbe existante dans
ce diagramme, on trace pour cette valeur la courbe correspondante en suivant
parallèlement la courbe existante la plus proche.

Mécanique des fluides Page 6


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

0.0025

1.8*106

λ = 0.026

Mécanique des fluides Page 7


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

Pour simplifier la relation précédente, on peut chercher àsavoir si l'écoulement


est hydrauliquement lisse ou rugueux pour évaluer la prédominance des deux
termes entre parenthèses dans la relation de Colebrook.

Remarque : On fait souvent appel à des formules empiriques plus simples


valables pour des cas particuliers et dans un certain domaine du nombre de
Reynolds. On peut citer ici la formule de Blasius qui est valable pour un
écoulement turbulent hydrauliquement lisse (3000 < Re < 105) et oùλ ne dépend
que de Re.

𝜆 = 0.316 ∗ 𝑅𝑒 −1⁄4

IV.3 - Pertes de charge singulières (accidentelles) :Hs

Les expériences ont montré, dans beaucoup de cas, que les pertes de charge
singulières sont àpeu près proportionnelles au carréde la vitesse :

𝜌𝑈 2
𝛥𝑝𝑠 = 𝑘 : perte de pression (Pa)
2

𝑈2
𝛥𝐻𝑠 = 𝑘 : perte de charge (m.c.f)
2𝑔

k est appelé coefficient de perte de charge singulière ou accidentelles (sans


dimension). La détermination de ce coefficient est principalement du domaine
de l'expérience (voir l’annexe en fin de ce chapitre).

V - Théorème de Bernoulli généralisé(avec échange de travail et pertes de


charge) :

Lors de l’écoulement d'un fluide réel entre les points (1) et (2), il peut y avoir
des échanges d'énergie entre ce fluide et le milieu extérieur :

- par travail à travers une machine, pompe ou turbine; la puissance échangée


étant P

- par pertes de charge dues aux frottements interne du fluide et sur les parois de
la canalisation ou aux accidents de parcours :

la perte de pression étant Δp = pl + ps

la perte de charge étant ΔH = Hl + Hs

Mécanique des fluides Page 8


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

Le théorème de Bernoulli s'écrit alors sous la forme générale :


1
𝜌 ∗ (𝑈12 − 𝑈22 ) + 𝜌 ∗ 𝑔 ∗ (𝑧1 − 𝑧2 ) + (𝑝1 − 𝑝2 ) = (P/Qv) + Δp
2
1 (𝑝1 − 𝑝2 )
∗ (𝑈12 − 𝑈22 ) + (𝑧1 − 𝑧2 ) + = (P/(Qv*ρ*g)) + ΔH
2∗𝑔 𝜌∗𝑔

Mécanique des fluides Page 9


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

Annexe : Coefficient de pertes de charge singulières k

Mécanique des fluides Page 10


Afef Chebbi (ISSAT de Sousse)

k=1

k=1

Mécanique des fluides Page 11

Vous aimerez peut-être aussi