Vous êtes sur la page 1sur 50

Jérémy Morvan

Maître de conférences en sciences de gestion


Version 04/20

1
 Plan
I. Introduction à la gestion des risques
a) Définir le risque
b) Mesurer le risque
c) Gérer le risque
II. Gestion de portefeuille
III. Gestion obligataire
IV. Gestion du risque de change

2
 Bibliographie générale

3
4
Est-il possible de gérer les risques ?

5
 Pourquoi est-ce
important sur les
marchés financiers ?
 La source de la
performance pour les
porteurs
 Les émetteurs déversent
des risques sur les marchés
 Les marchés répartissent
les risques

6
 Les marchés financiers
sont-ils trop volatils ?
 Pour Shiller (1981), les
marchés sur-réagissent
▪ La volatilité des
actions US est
excessive (5 à 13 fois)

▪ Les investisseurs sont Data : http://www.econ.yale.edu/~shiller/data.htm

trop optimistes

7
 Les marchés financiers
sont-ils trop volatils ?

Depuis 1980, les marchés


financiers ont connu de
multiples krachs

8
 Objectifs
 Introduction à la gestion des risques financiers
▪ Définir le risque
▪ Présenter et expliquer la notion de risque
▪ Mesurer le risque
▪ Evaluer la prise de risque
▪ Gérer le risque
▪ Définir la notion de couverture

9
 Plan
1. Définir le risque
▪ Définition(s)
▪ Représentation statistique
2. Mesurer le risque
▪ Typologies du risque
▪ Mesures statistiques
3. Gérer le risque
▪ Stratégies de marché
▪ Stratégie de couverture

10
11
 Définition
 Le risque est une
notion très utilisée
mais…
Définition
stabilisée et
consensuelle

Caractérisation, typologie,
indicateurs et mesure du
risque sont devenus les
sujets essentiels

12
 Définition
 Bernouilli (1713)
▪ Paradoxe de Saint
Petersbourg Pile : -10 €
▪ Un jeu dont l’espérance de Jeu A
gain est infinie devrait amener Face : +10 €
Deux jeux
les joueurs à miser tout leur
Pile : -∞€
argent… mais ils ne le font pas Jeu B
▪ Le risque a une dimension Face : +∞ €

psychologique

13
 Définition
 Bachelier (1900)
▪ A tout moment sur les marchés Upside risk

financiers, il y a équiprobabilité de
hausse et de baisse des prix
▪ En finance, le risque est une
notion qui peut être positive car il
est source de valeur : le risque
peut être équilibré
Downside risk

14
 Définition
 Franck Knight (1921)

Situation où les états du monde


Il est possible de
Risque possibles sont connus et donc
maximiser l’utilité
probabilisables

Situation où les états du monde


Il est impossible de
Incertitude possibles sont inconnus et donc
maximiser l’utilité
non probabilisables

Frank Knight
(1885-1972)

15
 Définition
« Puis donc que la crainte du mal doit être proportionnée, non seulement à la
grandeur du mal, mais aussi à la probabilité de l'évènement »
Arnauld Antoine et Pierre Nicole (1662), Logique de Port-Royal, p.325

« Le risque se définit comme la possibilité qu’un événement survienne et dont les


conséquences (ou effets de l’incertitude) seraient susceptibles d’affecter les
personnes, les actifs de l'entreprise, son environnement, les objectifs de la société
ou sa réputation. »
ISO 31000 : 2009

16
 Définition
 Pour résumer, quatre notions essentielles

Probabilité Le risque a une probabilité de survenance (P<1)

Utilité Le risque a une utilité qui a un sens et une intensité

Le risque peut être équilibré : les rentabilités


Equilibre
peuvent être positives ou négatives

Appétence Les acteurs sont diversement averses au risque

17
 Représentation statistique
 Loi normale
▪ Représente souvent le hasard pur
▪ Définit l’aléatoire soumis à une structure causale qui produit une
distribution des rentabilités centrée sur la moyenne et peu étalée

Toutes les informations utiles impactent


Infinité de causes
les prix sur les marchés
Structure causale Indépendance des causes Les informations ne sont pas corrélées
Les informations sont souvent de nature
Caractère additif des causes
microéconomique

18
 Représentation statistique
 Loi normale
Des occurrences
0,45 nombreuses
0,4 autour de la
moyenne
0,35
0,3
0,25
0,2
0,15 Des
0,1 occurrences
extrêmes rares
0,05 P(x>2,33σ )=1%
0
-3,0 -2,0 -1,0 0,0 1,0 2,0 3,0
19
 Représentation statistique
 Loi normale
-25,63%
-24,71%
-23,79%
-22,86%
-21,94%
-21,02%
-20,10%
-19,17%
-18,25%

théorique
-17,33%
-16,41%
La loi normale est
une représentation

02/01/1900-03/04/2020
-15,48%
-14,56%

Rentabilités quotidiennes du DJIA


-13,64%
-12,71%
-11,79%
-10,87%
-9,95%
-9,02%
-8,10%
-7,18%
-6,26%
-5,33%
-4,41%
-3,49%
-2,57%
-1,64%
1000
4000

500
3500

1500
2000
4500

0
2500
3000

-0,72%
0,20%
1,13%
2,05%
2,97%
3,89%
4,82%
DJIA returns distribution vs std distribution

5,74%
6,66%
7,58%
8,51%
9,43%
10,35%
11,27%
12,20%
Std dist

13,12%
20
DJIA returns

14,04%
 Représentation statistique
 Loi normale
▪ Critiques
Les évènements sont dépendants
Structure causale
non confirmée Certains événements sont prépondérants
Les évènements peuvent être multiplicatifs

Risque Les évènements extrêmes sont plus fréquents


sous-estimé Les évènements extrêmes sont plus sévères

▪ Les modèles financiers sont de plus en fréquemment adossés à


des lois statistiques plus complexes

21
22
 Définition
 De manière pragmatique, le débat en finance a
dérivé de la définition du risque à la mesure du
risque (Holton, 2004)

▪ Le risque est l’objet de plusieurs typologies de nature


académiques ou non

▪ Le risque est l’objet d’un très grand nombre de mesures


qui sont parfois devenues des produits commerciaux

23
 Typologie des risques financiers
 Les risques liés aux marchés et aux émetteurs

Risque de taux (interest rate risk)


dont risque d’inflation (inflation risk)
Risque de marché Risque de change (currency risk)
(market risk) dont risque pays (political risk)
Risque de volatilité (volatility risk)
Risque de matières premières (commodity risk)
Risque action (equity risk)

Risque de crédit Risque de défaut (default risk)


(credit risk) Risque de dégradation (downgrading (rating) risk)

24
 Typologie des risques financiers
 Les risques liés aux opérations
Risque de fraude (fraud risk)
Risque technologique (technologic risk)
Risque opérationnel Risque humain (people risk)
(operational risk) Risque juridique (legal and complicance risk)
Risque de règlement (settlement risk)
Risque de contrepartie (counterparty risk)

Risque systémique (systemic risk)


Risque de liquidité (liquidity risk)
Risque souverain (sovereign risk)
Autres risques Risque de modèle (model risk)
Risque d’image (reputational risk)
Risque climatique (climate risk)
Risque pandémique (pandemic risk)

25
 Mesures statistiques
 Principaux indicateurs

Mesure la variation maximale des prix d’un actif au cours d’une


Etendue
séance d’échange

𝑛
Mesure du risque moyen à travers l’écart-type des rentabilités 1 2
Volatilité 𝜎= 𝑥𝑖 − 𝑥
𝑛−1
d’un actif sur une période définie 𝑖=1

𝑛 4
Mesure du risque extrême à travers l’aplatissement d'une 1 𝑥𝑖 − 𝑥
Kurtosis 𝛾2 =
distribution 𝑛 𝜎
𝑖=1

Value at Mesure du risque extrême à travers la perte simulée sur un actif


𝑉𝑎𝑅𝑖,𝑡 = −𝛼 ∙ 𝜎𝑖 ∙ 𝑛
risk en cas d’évolution défavorable au cours d’une période définie

26
 Mesures statistiques
 Etendue

Mesure utilisée pour


caractériser une séance sur
le marché d’actions

Le cours de clôture (close)


est le prix le plus
représentatif de la séance
(cf. EMH)

27
 Mesures statistiques
 Volatilité
Indicateur phare sur le marché VIX est la volatilité implicite des options
des actions (mesure du risque sur le S&P 500 échangée sur le Chicago
total) Board Options Exchange (CBOE)

Paramètre dans l’évaluation


des options

La volatilité historique est


calculée sur une période,
tendant à lui donner une inertie

Pour disposer d’une mesure


immédiate, des indices de
volatilité instantanée sont
calculés sur la base de la
volatilité implicite des options
Source : cboe.com
28
 Mesures statistiques
 Kurtosis (moment centré d’ordre 4)
▪ Mesure de l'aplatissement d'une distribution (Pearson,
1905)

γ2 = 3 La distribution est normale : les valeurs extrêmes sont rares

La distribution est leptokurtique : les queues de distribution sont « épaisses ».


γ2 > 3
Les observations extrêmes sont plus fréquentes que la distribution normale

La distribution est platikurtique : les queues de la distribution sont fines.


γ2 < 3
les observations extrêmes sont moins fréquentes que la distribution normale

29
 Mesures statistiques
 Value at risk (VaR)
▪ Indicateur financier reposant sur la statistique
𝑉𝑎𝑅𝑖,𝑡 = −𝑡 × 𝜎𝑖 × 𝑛

t Fractile de la loi normale (à 99%, t = 2,3263)

Volatilité quotidienne (historique ou analytique) des


σ
rentabilités de l’actif sur une période considérée

Nombre de jours de pertes cumulées considéré dans le


n
scénario ( 1 ou 10)

▪ La VaR peut être exprimée en % ou en unités monétaires

30
 Mesures statistiques
 Value at risk (VaR)

31
La gestion du risque systématique : la couverture

32
 Stratégies de marché

Investissement

Spéculation

Stratégies

Arbitrage

Couverture

33
 Stratégies de marché
 Stratégies directionnelles

Stratégie directionnelle longue (achat de titres), risquée, Activisme éventuel au sein


réalisée sur les marchés financiers au comptant (actions, de l’entreprise émettrice
Investissement obligations), à moyen et long terme (plusieurs années) (exercice des droits de vote,
pour capter une rentabilité économique (dividende ou proxy, siège au conseil
intérêt) d’administration…)

Stratégie directionnelle longue ou courte (achat ou vente


Généralement pas
de titres au comptant/à terme), risquée réalisée sur tous
Spéculation d’activisme au sein de
types de marchés, à court terme (quelques semaines au
l’entreprise émettrice
plus) pour capter une rentabilité financière (plus-value)

34
 Stratégies de marché
 Stratégies directionnelles
▪ Spéculation
« La spéculation peut se définir comme l’achat (ou la vente) de marchandises en vue d’une revente
(ou d’un rachat) à une date ultérieure, là où le mobile d’une telle action est l’anticipation d’un
changement des prix en vigueur, et non un avantage résultant de leur emploi, ou une
transformation ou un transfert d’un marché à un autre. […] Ce qui distingue achats et ventes
spéculatifs des autres achats et ventes est que leur seul motif est l’anticipation d’un changement
imminent du prix en vigueur. Ainsi, tout "stock spéculatif " peut être défini comme la différence
entre le montant réellement détenu et celui qui serait détenu si, toutes choses égales par ailleurs, le
prix de ce bien devait rester constant; ce "stock spéculatif" peut être positif ou négatif. »
Kaldor N. (1939), Speculation and Economic Stability, Review of Economic Studies, (7)1, 1–27

35
 Stratégies de marché
 Stratégies non-directionnelles
Stratégie non directionnelle, théoriquement non
risquée, réalisée sur tous types de marchés à très court
Pas d’activisme au sein de
Arbitrage terme (dans l’idéal instantanéité), pour capter une
l’entreprise émettrice
rentabilité financière fondée sur le différentiel de prix
entre instruments financiers identiques ou équivalents

Stratégie non directionnelle, théoriquement non


risquée, réalisée sur tous types de marchés, à court
terme (quelques semaines ou mois) afin d’’immuniser Pas d’activisme au sein de
Couverture
une position risquée en prenant une position inverse sur l’entreprise émettrice
un actif fictif (notionnel sous-jacent) identique ou
équivalent. Les gains et les pertes se compensent

36
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
Contrat financier dérivé qui donne l’obligation à l’acheteur d’acheter et au vendeur
de vendre une quantité d’actif sous-jacent à un prix et à une date d’échéance
Contrat à terme déterminés à la signature du contrat
Les futures sont négociés sur des marchés réglementés
Les forwards sont négociés de gré à gré

Contrat financier dérivé qui donne la possibilité mais non l’obligation d’acheter
(call) ou de vendre (put) une quantité d’actif sous-jacent à un prix d’exercice (strike)
et à une date déterminés à la signature du contrat moyennant le versement d’une
Option
prime (premium)
Les options à l’américaine sont exerçables à tout moment lors de la vie de l’option
Les options à l’européenne sont exerçables à l’échéance de l’option

37
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
▪ En fonction du prix du sous-jacent

38
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
▪ En fonction de la position sur le sous-jacent
Position
Anticipation Couverture Définition
ouverte
Position courte sur la même
Hausse de la valeur de Permet de fixer un prix
Longue variable ou sur une variable
l’actif/variable de vente
équivalente
Position longue sur la même
Baisse de la valeur de Permet de fixer un prix
Courte variable ou sur une variable
l’actif/variable d’achat
équivalente

39
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
▪ En fonction de la nature du sous-jacent
Actif à couvrir Sous-jacent de couverture

Portefeuille gestion passive Indice de référence

Portefeuille gestion active Indice de référence

Actions, groupe d’actions Indice sectoriel

Obligations souveraines zone euro Bund

Production agricole Sous-jacent, météo

Energies renouvelables Pétrole (!)

40
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
Principale entreprise au monde de bourse qui gère gère quatre
des plus grands marchés financiers du monde: le Chicago
Mercantile Exchange (CME), le CBOT, le New York Mercantile
Exchange (NYMEX) et le Commodity Exchange (COMEX)

Principale place boursière de la zone euro ayant notamment


intégré le LIFFE, ex-marché à terme de Londres

Société de gestion du marché officiel des actions au Japon.


Deuxième place boursière au monde, après le New York Stock
Exchange

41
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
▪ Exemples

▪ CBOE S&P500 index option

▪ Futures and options on Euronext's indices

42
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
▪ Exemple
▪ Couverture d’un portefeuille d’actions avec un future

Spot 3900 3950 4000 4050 4100

P&L (long) -100 -50 0 +50 +100

future +100 +50 0 -50 -100

Future price -5 -5 -5 -5 -5

Net -5 -5 -5 -5 -5

43
 Stratégie de couverture
 Instruments financiers dérivés
▪ Exemple
▪ Couverture d’un portefeuille d’actions avec une option put

Spot 3900 3950 4000 4050 4100

P&L (long) -100 -50 0 +50 +100

Put buyer +100 +50 0 0 0

Put premium -16 -16 -16 -16 -16

TOTAL -16 -16 -16 +34 +84

44
 Stratégie de couverture
 Critiques
Intérêts Limites

Seule solution Contrats non divisibles


d’assurance de plusieurs Sur ou sous-couverture
risques Corrélation <1 entre le sous-
jacent et l’actif couvert
Compétences de marché
Coût direct réduit
nécessaires Différence entre le spot et le
cours à terme (base)
Déversement de risques
Spéculation
possiblement importants
46
 En bref
 La gestion des risques continue de se développer
Les typologies du risque
Risque systémique (2008), pandémique (2020)
s’enrichissent

La représentation du risque Utilisation de lois statistiques plus pertinentes et plus complexes


évolue (loi de Lévy, simulation…)

La mesure du risque
Modèles multivariés, big data et IA en finance
évolue

Les solutions de marché se


Obligations indexées, CDS, cat bonds, coronabonds…
développent

47
 Une histoire mouvementée du risque
Risque perçu, Risque de taux, de
mesuré, géré change, action…

Risque perçu Risque immobilier La crise du subprime (2008)


mais pas accepté Risque souverain La crise de la dette européenne (2012)

Le risque non
Risque pandémique La crise du Covid-19 (2020)
perçu

Le risque écologique ?

48
 What else ?
 Les trois chapitres suivant sont dédiés à deux
principales classes d’actifs et au risque de change
né de la première source de diversification
financière : l’international
▪ Gestion du portefeuille d’actions
▪ Gestion du risque obligataire
▪ Gestion du risque de change

49
Articles
Bachelier L. (1900), Théorie de la spéculation, Annales scientifiques de l’ENS, (17)3, 21-86
Bernouilli D. (1713), Specimen theoriae novae de mensura sortis, Commentarii Academiae Scientiarum
Imperialis Petropolitanae, Tomus V, (In Classe Mathematica), 1738, 175-192
Holton G. A. (2004), Defining risk, Financial Analysts Journal, (60)6, 19-25
Kaldor N. (1939), Speculation and Economic Stability, Review of Economic Studies, (7)1, 1–27
Pearson K. (1905), "Das Fehlergesetz und Seine Verallgemeinerungen Durch Fechner und Pearson" A
Rejoinder, Biometrika, 4(1/2), 169-212, doi: 10.2307/2331536
Rowell D. et Connelly L. B. (2012), A history of the term “moral hazard”, Journal of Risk and Insurance, (79)4,
1051-107
Shiller R. J. (1981), Do Stock Prices Move Too Much to be Justified by Subsequent Changes in Dividends?,
American Economic Review, (71)3 ,421-436

Livres
Antoine A. et Nicole P. (1662), Logique de Port-Royal, suivie des trois fragments de Pascal sur l'autorité en
matière de philosophie, l'esprit géométrique et l'art de persuader, Hachette, Paris, 1854
Bernstein P. L. (1998), Against the Gods: The Remarkable Story of Risk, John Wileys & Sons, 385 p.
Knight F. (1921), Risk, Uncertainty and Profit, Houghton Mifflin Company Boston
Lowenstein R.(2001), When Genius Failed :The Rise and Fall of Long-Term Capital Management, Random
House, 272 p.
Taleb N. N.(2008), The Black Swan: The Impact of the Highly Improbable, Penguin, 480 p.

50

Vous aimerez peut-être aussi