Vous êtes sur la page 1sur 28

Chapitre 1:

Fondements théoriques
de la gestion de
portefeuille
INTRODUCTION

⚫ Les investisseurs peuvent rarement faire des prévisions


assez précises concernant les revenus futurs d’une option
de placement.
⚫ Lors de la formulation de ses prévisions, un investisseur
peut être dans l’une des situations suivantes:
 Certitude : les revenus futurs des options de
placement sont connus avec certitude,
 Critère de décision: le revenu maximum
Option 1 Option 2
Revenu Proba Revenu Proba
8 1 10 1
2
INTRODUCTION

Risque : L’investisseur ne peut pas connaitre avec une


certitude absolue les revenus futurs des options de
placement, par contre, il peut associer une distribution
de probabilités objectives aux différents revenus
possibles.
Incertitude : L’investisseur ne peut associer aucune
distribution de probabilité ou bien il ne peut associer
qu’une distribution de probabilités subjectives aux
différents revenus possibles.
 Critère de décision: Le revenu maximum espéré
(espérance mathématique)

3
1. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE

⚫ Le revenu espéré d’une situation risquée (incertaine) est


la moyenne pondérée des résultats possibles (Ri), les
poids étant les probabilités associées à chacun des
résultats (pi).
n
E ( R ) =  pi Ri
i =1

⚫ Ce critère, qui a le mérite d’être simple, prend-il en


compte tous les éléments essentiels en matière de choix
des investisseurs en situation de risque ?

4
1. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE

Illustration :
1D 2 000 D

Jeu 1 Jeu 2
-1 D -2 000 D

⚫ E(R1) = 0,5 × 1 + 0,5 × (-1) = 0


⚫ E(R2) = 0,5 × 2 000 + 0,5 × (-2 000) = 0
⚫ Les deux jeux ont le même revenu espéré, i.e. 0.
⚫ Etes-vous vraiment indifférents entre les deux jeux ?
⚫ Les individus basent-ils leur décision uniquement sur
5
la base de la valeur espérée ?
1. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE

⚫ Les individus tiennent compte du revenu espéré mais


aussi du risque associé à la variabilité des résultats.

Mesuré par la variance (² ) ou par l’écart-type ()


𝑛 ²(R1) = 1
𝜎 2 𝑅 = ෍ 𝑝𝑖 𝑅𝑖 − 𝐸(𝑅) ²
²(R2) = 4 000 000
𝑖=1
⚫ Les limites de ce critère ont été illustrées par le problème
classique connu sous le nom du « Paradoxe de Saint
Petersbourg » formulé par Nicolas Bernoulli au 18ème
siècle .
6
1. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE

Paradoxe de Saint Petersbourg


Il s'agit d'un jeu qui consiste à lancer une pièce en l'air et à
observer le résultat.
⚫ Si la pièce tombe sur "face" , le joueur gagne 21=2 et le
jeu s'arrête. Si la pièce tombe sur "pile", on rejoue.
⚫ Si la pièce tombe sur "face" au 2ème jet, le joueur gagne
22=4 et le jeu s'arrête. Si la pièce tombe sur "pile", on
rejoue.
⚫ Si la pièce tombe sur "face" au 3ème jet, le joueur gagne
23=8 et le jeu s'arrête. Si la pièce tombe sur pile, on
rejoue.
⚫ Le jeu continue indéfiniment tant que la pièce tombe
sur pile. On arrive ainsi au nème jet. 7
1. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE

Paradoxe de Saint Petersbourg


⚫ Le tableau suivant résume tous les résultats possibles:

Nb Jet Résultat Proba Gain ⚫ Quelle somme payer pour


1 F 1/2 2 jouer à ce jeu?
2 PF 1/4 4 ⚫ Selon le critère de
3 PPF 1/8 8 l’espérance mathématique
. . . . du gain, le joueur devrait
. . . . être prêt à payer une
n (n-1)PF 1/2n 2n somme élevée pour jouer
à ce jeu.
⚫ E(G)=1/2 × 2 + 1/4 × 4+…+1/2n × 2n = 1 + 1+….+1
8
⚫ Lorsque n → ∞, E(G) → ∞ .
1. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE

Paradoxe de Saint Petersbourg


⚫ L’espérance mathématique du gain est infinie, pourtant
d’après une étude réalisée par Nicolas Bernoulli,
personne n’est prêt à dépenser plus de 4 pour y jouer !!!!
⚫ Le critère de l'espérance mathématique des gains n'est
pas celui qu’il faut employer dans des situations de ce
type.
⚫ Daniel Bernouilli: L'individu ne prend pas en compte
directement la richesse dans son choix, mais l'utilité –
au sens de satisfaction – qu’il retire d'une certaine
richesse.
⚫ Il ne maximise pas l'espérance mathématique des gains,
mais l'espérance mathématique de l'utilité de ces gains. 9
2. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE
DE L’UTILITÉ
⚫ L’espérance mathématique et la variance, données
objectives, s’avèrent insuffisantes en matière de prise de
décision, puisqu'elles n’intègrent pas une composante
subjective importante : l’attitude du décideur face au
risque.
⚫ La théorie de l’utilité espérée de Von Neumann et
Morgenstern (1947) a permis de formaliser cette attitude
face au risque :
- Chaque individu possède une fonction d’utilité qui
traduit son comportement réel vis-à-vis du risque.
- Confronté à un ensemble de loteries, l’individu choisira
celle dont l’utilité espérée est la plus élevée, pour autant
que son attitude respecte un certain nombre d’axiomes. 10
2. CRITÈRE DE L’ESPÉRANCE MATHÉMATIQUE
DE L’UTILITÉ
⚫ La notion de loterie, appelée également Prospect, occupe
un rôle clé dans l’axiomatique de l’utilité de Von
Neumann et Morgenstern.
Il s’agit d’une liste de n résultats ou conséquences Ri
affectés chacun d’une probabilité pi. En théorie
financière, ces conséquences sont purement monétaires .
⚫ Un investissement risqué dont le rendement peut
prendre les valeurs possibles R1…..Rn affectées des
probabilités p1……pn peut être assimilé à une loterie et le
choix entre investissements revient à un choix entre
loteries.

11
3. LA FONCTION D’UTILITÉ ET SES AXIOMES

Les axiomes de la fonction d’utilité


Axiome 1 : Axiome de comparabilité
Entre deux loteries l1 et l2, le décideur peut toujours
définir un ordre de préférence complet: l1 > l2 , l2 > l1 ou
l1 ~ l2
Axiome 2: Axiome de transitivité
Si l1 > l2 et l2 > l3 alors l1 > l3
Si l1 ~ l2 et l2 ~ l3 alors l1 ~ l3
Axiome 3: Axiome d'indépendance forte
Soit l(x, z; p; (1-p)), si pour l’individu considéré:
x ~ y alors l(x, z; p, (1-p)) ~ l(y, z; p, (1-p))
x > y alors l(x, z; p, (1-p)) > l(y, z; p, (1-p)) 12
3. LA FONCTION D’UTILITÉ ET SES AXIOMES

Les axiomes de la fonction d’utilité


Axiome 4 : Axiome de continuité
Si x > y et y > z alors il existe une probabilité unique p telle
que y ~ l(x, z; p, (1-p))
y représente l’équivalent certain de la loterie l(x, z; p, (1-p))
Axiome 5: Axiome des classements composés
Si x  y  z, alors il  p1 tq y ~ l(x, z; p1, (1- p1))
Si x  u  z, alors il  p2 tq u ~ l(x, z; p2, (1- p2))
Lorsque p1 > p2 , y > u et lorsque p1 = p2 , y ~ u
Axiome 6: Axiome de non-satiété
L’individu préfère toujours plus de gains à moins de gains
13
3. LA FONCTION D’UTILITÉ ET SES AXIOMES

Von Neumann et Morgenstern (VNM) ont établi que pour


toute relation de préférence, définie sur l'ensemble des
loteries L et qui satisfait les axiomes 1 à 6, il existe une
fonction d'utilité (f.u.) U définie sur L et à valeur dans R
telle que:
⚫ Cette f.u. est une fonction croissante de la richesse (W)
 U’(W) > 0 (l’utilité marginale des gains est toujours > 0)
⚫ U maintient l'ordre de préférence, càd U(x) > U(y)
implique x préféré à y et U(x) = U(y) implique x ~ y.
⚫ L’utilité d’une loterie l(x, y; p, (1-p)) est égale à
E[U(l)] = p U(x) + (1-p) U(y)
⚫ Pour chaque loterie, l’individu calcule son utilité espérée
de la richesse et choisira celle qui maximise cette 14

dernière.
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

⚫ On distingue 3 attitudes différentes face au risque :


- Aversion au risque (risquophobie)
- Préférence pour le risque (risquophilie)
- Indifférence au risque (neutralité)
⚫ Pour comprendre la différence entre les 3 types de
comportement, considérons un investisseur disposant
d’une richesse initiale W0 pouvant participer,
gratuitement, à une loterie lui offrant la possibilité de
gagner ou perdre, avec la même probabilité, une somme S.
⚫ L’investisseur a le choix entre ne pas jouer ou jouer

15
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

⚫ S’il décide de "ne pas jouer" (situation 1) :


W0 W0 ; E(R1) = W0 ; ²(R1) = 0

⚫ S’il décide "de jouer" (situation 2):


W0 + S
W0
W0 - S
~
E(R2) = E(W) = 0,5 (W0 + S) + 0,5(W0 - S) = W0
²(R2) = S²

⚫ Le choix entre "ne pas jouer" et "jouer" dépend de son


16
comportement face au risque
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

4.1 Aversion au risque


⚫ Un individu a de l’aversion pour le risque si entre 2
loteries de même espérance de gain, il choisira la loterie la
moins risquée.
⚫ Dans notre exemple, l’individu préférera "ne pas jouer".
⚫ Utilité richesse initiale > Utilité de la richesse aléatoire
~
⚫ U(W0) > 0,5 U(W0 + S) + 0,5 U(W0 – S)  E[U(W)]
⚫ U(W0) – U(W0 – S) > U(W0 + S) – U(W0)
La perte d’utilité associée à la perte S est, en valeur
absolue, supérieure au gain d’utilité associé au gain S.
f.u. concave et utilité marginale décroissante 17
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

4.1 Aversion au risque


f.u. concave
U(W)
U"(W) < 0
U(W0+S)
U(W0) Gain

Perte
U(W0-S)

Richesse (W)
0 W0-S W0 W0+S 18
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

4.2 Préférence pour le risque


⚫ Un individu préfère le risque si entre 2 loteries de même
espérance de gain, il choisira la loterie la plus risquée.
⚫ Dans notre exemple, l’individu préférera "jouer".
⚫ Utilité richesse initiale < Utilité de la richesse aléatoire
~
⚫ U(W0) < 0,5 U(W0 + S) + 0,5 U(W0 – S)  E[U(W)]
⚫ U(W0) – U(W0 – S) < U(W0 + S) – U(W0)
La perte d’utilité associée à la perte S est, en valeur
absolue, inférieure au gain d’utilité associé au gain S.
f.u. convexe et utilité marginale croissante
19
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

4.2 Préférence pour le risque


f.u. convexe
U(W)
U"(W) > 0

U(W0+S)

Gain

U(W0)
Perte
U(W0-S) Richesse (W)
0 W0-S W0 W0+S 20
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

4.3 Neutralité au risque


⚫ Un individu est neutre au risque s’il lui est indifférent de
recevoir une loterie ou bien son gain espéré.
⚫ Indifférence entre "jouer" et "ne pas jouer " .
⚫ Utilité richesse initiale = Utilité de la richesse aléatoire
~
⚫ U(W0) = 0,5 U(W0 + S) + 0,5 U(W0 – S)  E[U(W)]
⚫ U(W0) – U(W0 - S) = U(W0 + S) – U(W0)
La perte d’utilité associée à la perte S est, en valeur
absolue, égale au gain d’utilité associé au gain S.
f.u. linéaire et utilité marginale constante
21
4. LES ATTITUDES FACE AU RISQUE

4.3 Neutralité au risque


f.u. linéaire
U(W)
U"(W) = 0
U(W0+S)

Gain

U(W0)

Perte

U(W0-S)

Richesse (W)
0 W0-S W0 W0+S 22
5. LES MESURES D’AVERSION POUR LE RISQUE

5.1 Aversion absolue au risque (AAR)

U"(W)
AAR(W) = -
U(W)

⚫ Etant donné sa f.u., l’individu dont l’AAR est croissante


investira un montant d’autant plus faible en actifs risqués
que sa richesse sera élevée. Un investisseur dont l’AAR est
décroissante aura une attitude opposée et celui dont l’AAR
est constante investira le même montant en actifs risqués
quel que soit son niveau de richesse.

23
5. LES MESURES D’AVERSION POUR LE RISQUE

5.2 Aversion relative au risque (ARR)

U"(W)
ARR(W) = - W
U(W)

⚫ Le pourcentage de la richesse d’un individu investi en


actifs risqués, diminuera, augmentera en fonction de sa
richesse, ou restera constant selon que l’ARR est
croissante, décroissante ou constante.

24
5. LES MESURES D’AVERSION POUR LE RISQUE

5.3 Exemples de f.u.

f.u. exponentielle f.u. logarithmique


• U(w) = - e- aw avec a > 0 • U(w) = ln (w)
• U(w) = a e- aw > 0 • U(w) = 1/w > 0
• U"(w) = - a² e- aw < 0 • U"(w) = -1/w² < 0
aversion au risque aversion au risque
• AAR (w) = a² e- aw / a e- aw • AAR (w) = 1/w² / 1/w
=a = 1/w
• ARR (w) = a w • ARR (w) = 1

25
EXERCICE 1
⚫ Soient deux individus 1 et 2 avec les fonctions
d’utilité suivantes :
U1(W) = ln(W) et U2(W) = W1/2
Ils possèdent le billet de loterie suivant :
~ 1 1 1
𝑥 = 𝑙(1, 10, 100; , , )
Questions : 3 3 3
1. Quelle est l’attitude au risque de chacun des deux
individus ?
2. Calculer l’aversion absolue et relative pour le risque
des deux agents.
3. Calculer l’équivalent certain de cette loterie pour
chacun des deux agents. 26
EXERCICE 2
⚫ Supposez que la fonction d’utilité d’un individu
soit la suivante : U(W) = −e−W.
⚫ Cet individu peut participer à une loterie lui
procurant une richesse W1 ou W2 avec des
probabilités égales.
Questions :
1. Quelle est l’attitude au risque de cet individu ?
2. Calculer son aversion absolue pour le risque.
3. Calculer l’équivalent certain de la loterie à
laquelle il peut participer pour les couples de
richesse suivants : (0, 10), (10, 20), (20, 30). Que
pouvez-vous en conclure ? 27
EXERCICE 2
4. Si ce même individu avait la fonction d’utilité
suivante :
U(W) = 5 − 0.2e−W
a- Quel serait son attitude au risque ?
b- Calculer son aversion absolue pour le risque.
c- Quel serait l’équivalent certain de la loterie à
laquelle il peut participer pour les couples de
richesse citées dans la question 3 ?
d- Que pouvez-vous en conclure ?

28

Vous aimerez peut-être aussi