3,40 € samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro - N° 24 427 - www.lefigaro.

fr - France métropolitaine uniquement Première édition

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PyraMIdE dE KHEOPS CMa CgM

l’ExtraOrdINaIrE déCOUvErtE l’INSOlENtE réUSSItE
d’UN COUlOIr CaCHé dEPUIS dU géaNt FraNçaIS
4 500 aNS PAGE 13 dU FrEt MarItIME PAGES 22 Et 23

Énergie nucléaire : histoire

pARLEmENT
débats sur les
retraites : le Sénat,

d’un scandale politique

miroir inversé
de l’assemblée
nationale PAGE 2
ukRAiNE
le poing russe
se ferme Au fil de ses auditions, la commission d’enquête parlementaire met au jour les errements et les
sur Bakhmout PAGE 8 calculs qui ont conduit à plafonner à 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité.
SANTé Il aura fallu attendre près l’accord électoral passé en- Une commission d’enquête de Damoclès sur la filière actuelle change la donne
l’inquiétant boom de treize ans. Les parle- tre le PS et les écologistes constituée à l’Assemblée na- nucléaire pendant plus avec la relance d’un pro-
de la chirurgie mentaires s’apprêtent à en 2011, inscrit dans la loi tionale sur les raisons de la d’une décennie. Sans trou- gramme de construction de
esthétique chez rayer de la loi le plafonne- par Ségolène Royal avec perte de souveraineté éner- ver d’explication satisfai- nouveaux réacteurs pour
ment à 50 % de la part du une échéance en 2025, re- gétique du pays tente depuis sante à ce stade. Le 50 % de que la France n’ait plus,
les jeunes PAGE 12 nucléaire dans la capacité culée à 2035 par Nicolas plusieurs mois de reconsti- nucléaire est devenu le sym- dixit Emmanuel Macron, « le
de production d’électricité Hulot sous le quinquennat tuer l’itinéraire de cette me- bole d’une politique de nucléaire honteux ».
FORmuLE 1 en France. Un objectif né de d’Emmanuel Macron. sure qui a fait peser une épée l’énergie sans cap. La crise PAGES 6, 7, 24 Et l’éditoriAl
la saison 2023
en dix questions
PAGES 14 Et 15

EuROpE
Fin de vie :
l’allemagne bloque malaise
la fin du moteur
thermique PAGE 24 et soupçons
ENchèRES au sein de la
Commissaire-
priseur :
convention
une profession
qui rajeunit PAGE 30
citoyenne
Alors que se poursuit, ce
la maRine - david RichaRd - SaRah

le Stade week-end, le débat national

chaMps lIbRes

sur la fin de vie auquel pren-

de France nent part 184 Français tirés au
à l’heure sort, la contestation apparaît
du choix chez certains participants.
Dans une lettre adressée au
Un entretien comité de gouvernance de la
Gastronomie : « Le Figaro » décerne ses étoiles
n
cagliOne

avec Sabine convention citoyenne, une

quarantaine d’entre eux s’in-
Prokhoris quiètent de la communica-
n
Un appel Trois étoiles pour Alexandre Couillon à La Marine (Noirmoutier), deux pour Amélie Darvas chez Äponem (Vailhan), tion autour de leurs travaux.
une pour Camille Saint-M’Leux à la Villa9Trois (Montreuil) : découvrez le palmarès idéal de la rédaction, deux jours Les plus mécontents s’esti-
à l’UE pour avant la sortie du Guide Michelin. PAGES 32 Et 33 ment manipulés. PAGE 11
lutter contre
les actes
antichrétiens édItOrIal par Jacques-Olivier Martin jomartin@lefigaro.fr
n
la chronique
de Mathieu
Bock-Côté Sabotage politique

L
n
la tribune a souveraineté et l’indépendance Et quelle galère, en effet ! Pendant deux
d’arthur énergétique tiennent à peu de cho- quinquennats, notre pays est resté prison-
se. Il aura suffi, il y a douze ans, nier de cet accord idéologique « de coin de
Chevallier d’un petit marchandage politique table ». Avec les dégâts que l’on sait : la fer-
PAGES 17 à 19
sur fond d’élection présidentielle meture de Fessenheim, les atermoiements

@
pour briser quatre décennies d’une stratégie coupables sur l’avenir du parc nucléaire, et
nucléaire qui ont permis à la France, pays la chute d’EDF, privé d’une stratégie claire,
FIGARO OUI sans gaz ni pétrole, de se doter d’une électri- de ses revenus, captés par l’État pour faire
FIGARO NON cité abondante et décarbonnée. Quel gâchis ! face à la flambée des prix de l’électricité, et
Réponses à la question En s’engageant à réduire la part du nucléaire aux prises avec des
de vendredi : de 75 % à 50 % de la production d’électricité François réacteurs vieillissants.
Y a-t-il une convergence d’ici à 2025, François Hollande, otage des
Verts, a préféré la lutte des classes écolo au
Hollande Aujourd’hui, le chef
de l’État n’a de cesse
possible entre LR,
Reconquête ! et le RN ? pragmatisme énergétique, quitte à sacrifier a plongé de vouloir s’ériger en
OUI NON
cette filière d’excellence. Quel avenir pour
le nucléaire français, pour EDF, pour Areva,
le nucléaire chantre de la relance
de l’atome civil et de
64 % 36 % pour les réacteurs de nouvelle génération, en pleine l’indépendance élec-
TOTAL DE VOTANTS : 133 342 pour les prix et les volumes d’électricité ?
Autant de questions alors restées sans ré-
tourmente trique retrouvée. L’in-
tention est louable,
Votez aujourd’hui ponses. Et pour cause : « On s’est mis d’ac- mais, soyons lucides : si la souveraineté
sur lefigaro.fr cord sur un marqueur politique, de manière à énergétique peut se briser sur « un coin de ta-
3’:HIKKLA=]UXYU]:?k@d@a@e@k";

Faut-il abandonner marquer les esprits. (…) Et après, vogue la ga- ble » politique, elle ne se reconstruit pas avec
l’objectif de réduire à 50 % lère ! », a résumé Arnaud Montebourg, mi- de belles promesses ou d’un coup de baguet-
la part du nucléaire nistre de l’Économie du président socialiste, te magique. Pour l’heure, Emmanuel Ma-
M 00108 - 304 - F: 3,40 E

dans la production devant la commission d’enquête de l’As- cron, bien long à rompre avec la ligne Hol-
d’électricité en France ? semblée qui planche actuellement sur « les lande, est aux yeux des Français le président
raisons de la perte de souveraineté et d’in- qui a fermé deux réacteurs nucléaires remis
PhiliPPe BOURSeilleR - OliveR dépendance énergétique de la France ». à neuf ! ■
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 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro

2 Politique
Débats sur les retraites : le Sénat,
miroir inversé de l’Assemblée nationale
Après deux jours de discussions, les sénateurs se sont distingués de leurs homologues du Palais Bourbon.
cHristoPHe arcHaMBauLt/aFP

WALLy BORdAS £@wallybordas
Parlement Sourire vissé aux lè-
vres, Olivier Dussopt descend éner-
giquement l’escalier d’honneur du
Sénat. Il est environ 19 heures jeudi
soir. Le ministre du Travail, en char-
ge de la réforme des retraites, vient
de vivre ses premières heures de dé-
bat à la Chambre haute. Sa mine
apaisée contraste avec celle, froide
et fermée, qu’il affichait encore il y a
à peine plus d’une semaine, à la fin
des discussions à l’Assemblée natio-
nale. Diminué et aphone à cause
d’une laryngite, l’ancien socialiste
avait quitté les travées du Palais
Bourbon exténué. Le plus dur est
passé. Il le sait, ici, la donne politique
est bien plus favorable au gouverne-
ment. La majorité sénatoriale, à
droite et au centre, approuve très
largement le report de l’âge légal de
la retraite à 64 ans, qu’elle vote
d’ailleurs depuis quatre années dans
un amendement au projet de loi de la
Sécurité sociale. Surtout, même
lorsqu’ils sont fermement opposés à
une réforme, les parlementaires du
Palais du Luxembourg ont pour ré-
putation de débattre sans heurts,
dans le respect des divergences poli-
tiques.
Un constat qu’Olivier Dussopt a
pu faire jeudi et vendredi… Depuis
deux jours, les confortables fauteuils
rouges du Palais du Luxembourg ont
remplacé les bancs souvent étriqués
de la Chambre basse. Les cliquetis
des appareils photos et les lumières
parfois aveuglantes des caméras
sont toujours là. Mais les hurle-
ments, noms d’oiseaux et figures
écarlates ont cédé leur place aux dis-
cours de fond, tapes dans le dos et
sourires taquins. Le contraste est ab-
solu, tel un miroir inversé. Une par-
faite antithèse. Lorsque Olivier Dus-
sopt prend la parole à la tribune pour
sa réforme, le calme est intégral. À
l’Assemblée, il avait dû s’y repren-
dre à cinq fois avant de pouvoir tenir
son discours, gêné par les rugisse-
ments incessants et claquements de
pupitres des Insoumis, dans une
séance ponctuée par de nombreuses
interruptions. Au Sénat, pas d’ani-
croche. « C’est étrange, on arrive
même à entendre la voix des minis-
tres », plaisante une journaliste en
tribune de presse.
« On se respecte »
À la tribune, Gabriel Attal lâche ses
coups, faisant référence à l’exa-
men - raté - du texte au Palais
Bourbon, largement entravé par la
massive obstruction de l’alliance
de gauche Nupes. « Je sais qu’ici,
par-delà les divergences politiques,
on s’écoute, on débat, on se respec-
te. Je sais qu’ici il n’y a pas de ZAD,
il n’y a que la République », lance-
t-il, provocateur. Avant d’ajouter :
« Je serais tenté d’espérer qu’après
À gauche :
Olivier Dussopt, ministre
du Travail, s’adresse
aux sénateurs lors
d’une séance d’examen
du projet de réforme
des retraites, jeudi.
À droite :
Yaël Braun-Pivet,
présidente de
l’Assemblée nationale,
est applaudie par des
députés lors de son
discours à l’Assemblée
nationale, le 17 février.
le vacarme des extrêmes s’ouvre à
cet instant le temps de la sagesse et
de la raison ». Vives protestations
dans les rangs de la gauche, qui
malgré cet éloge, voient derrière
cette comparaison une volonté
« malsaine » de l’exécutif d’oppo-
ser les deux chambres. Le prési-
dent du groupe écologiste,
Guillaume Gontard, rétorque
d’ailleurs quelques minutes plus
tard : « On n’est pas là pour faire le
match retour de l’Assemblée. Ici, on
est au Sénat donc il faut arrêter avec
ces provocations si vous souhaitez
que le débat se passe bien. »
Les trois motions déposées par la
gauche pour tenter de repousser le
texte sont largement rejetées. Mais
elles permettent aux trois leaders
de faire passer un message : l’exa-
men du texte au Palais du Luxem-
bourg ne sera pas un parcours de
santé pour le gouvernement. Et les
rangs communistes, socialistes et
écologistes comptent bien combat-
tre fermement cette réforme, com-
me le prouvent les prises de parole
très offensives de leurs représen-
tants. « Vous violez la Constitution
et vous faites planer une menace
contre le régime même de retrai-
tes », lance notamment la prési-
dente des communistes, Éliane As-
sassi. « Avec ce texte, vous vous
attaquez à un pan de notre histoi-
re », critique quant à lui le patron
des socialistes, Patrick Kanner.
saraH Meyssonnier/reuters
À droite comme au centre, l’on nombreuses dans l’impression-
prévient également : les sénateurs nante salle des Conférences du Pa-
n’ont nullement l’intention d’offrir lais du Luxembourg, l’on se félicite
un chèque en blanc au gouverne- de voir revenir la Chambre haute
ment pour cette réforme. « Nous al- au cœur de l’attention médiatique
lons voter un texte qui sera notre tex- et politique. « C’est plus que jamais
te, une réforme modifiée, que nous LE moment du Sénat. Heureusement
allons amender. Nous ne sommes pas que nous sommes là pour tempérer,
des girouettes ; notre boussole, ce réfléchir, faire la loi. Imaginez qu’il
n’est pas Emmanuel Macron, c’est n’y ait qu’une seule chambre, celle
l’intérêt national », avertit dans une du tumulte, de la température du
intervention très applaudie le prési- jour, de l’immédiateté… », savoure
dent des sénateurs LR, Bruno Re- un sénateur centriste.
tailleau. Pendant ces allocutions Ces dernières heures, certaines
comme lors des votes, les tribunes rumeurs sont toutefois venues
sont largement clairsemées. doucher l’enthousiasme de cer-
Contrairement à l’Assemblée natio- tains parlementaires de la Chambre
nale, où les députés de tous bords haute : celles d’un accord entre sé-
avaient fait preuve d’une présence nateurs de droite et de gauche afin
accrue à chaque moment de l’exa- que les débats aillent à leur terme
men du texte, la Chambre haute n’a avant la fin du temps imparti. Des
pas fait le plein de parlementaires « mensonges », démentent cer-
lors des premières heures de débat. tains, à gauche. « Nous voterons
Et nombre de sénateurs ne comptent contre l’article 7 mais ferons tout
d’ailleurs pas s’épuiser par un pré- pour que le texte ne soit pas étudié en
sentéisme de tous les instants. « Il y entier », plaide Éliane Assassi, après
aura des roulements. Lors des scrutins que certains députés Insoumis,
publics, un seul sénateur chef de file comme Aurélien Saintoul, ont dé-
suffit pour voter pour l’ensemble de noncé l’« à-plat-ventrisme » de
son groupe », décrypte le patron de leurs homologues du Luxembourg.
l’Union centriste, Hervé Marseille. Dans tous les cas, le règlement du
Sénat permet au président d’accé-
Coup d’envoi réussi lérer l’examen du texte s’il voit que
En coulisses, après ce coup d’envoi les discussions patinent. Gérard
réussi, sénateurs de toutes tendan- Larcher l’a d’ailleurs promis il y a
ces affichent un sourire satisfait. Et quelques jours, dans les colonnes
si l’on fuit parfois la lumière des ca- du Figaro : « Le Sénat ira au bout du
méras, exceptionnellement très débat sur les retraites. » ■

Gérald Darmanin se frotte à l’imbroglio calédonien

Le ministre de l’Intérieur espère convaincre les indépendantistes de revenir à la table des discussions institutionnelles.
nelle kanake, a reçu des mains du pendant la crise sanitaire. Depuis, le Kanaks face aux métropolitains ve-
TRISTAN QUINAULT-MAUPOIL ministre une petite brouette de FLNKS campe sur ses positions nus s’installer dans l’archipel. Près
£@TristanQM
Tourcoing en bois, symbole de la alors que le gouvernement presse de 17 % des électeurs de Nouvelle-
D. Mayeur/Hans Lucas via reuters connect

ENVOYÉ SPÉCIAL A KONE (NOuVELLE-CALÉdONIE)

outre-mer Les nuances de tur-
quoise du lagon se fondaient avec
celles, vertes, des montagnes
quand le Casa de l’armée de l’air a
entamé sa descente vers Koné.
C’est dans le chef-lieu de la provin-
ce Nord, dirigée par le leader indé-
pendantiste kanak Paul Néaoutyi-
ne, que Gérald Darmanin a entamé
vendredi sa deuxième visite en
Nouvelle-Calédonie en trois mois.
« Par respect pour son parcours,
pour écouter ses conseils et sa vision
du dossier calédonien », a souligné le
ministre de l’Intérieur et des Outre-
mer à l’issue de deux heures de dis-
cussion. Témoin des « événe-
ments », l’ancien directeur de
cabinet de Jean-Marie Tjibaou (fi-
gure historique du Front de libéra-
tion nationale kanak et socialiste
- FLNKS -, signataire des accords
de Matignon) est perçu par l’État
comme un interlocuteur à même de
pouvoir trouver des compromis. Le
A
ville dont il a été le maire. Ce cadeau
et trois jours sur place ne seront pas
de trop – sûrement même insuffi-
sants - pour dénouer l’imbroglio
dans lequel se trouve le Caillou.
“ On va parier sur
la confiance, mais l’État
saura prendre ses
responsabilités en cas
de procrastination
GÉrALd dArmANIN, EN AmONt
”
dE SES ENtrEtIENS AVEC LE FLNKS
Depuis le troisième référendum
d’autodétermination du 12 décem-
bre 2021, l’avenir institutionnel de
l’archipel du Pacifique reste bru-
meux. Et ce malgré la victoire du
non à l’indépendance comme lors
des deux premières consultations
de 2018 (56,7 %) et 2020 (53,3 %).
Les indépendantistes n’ont jamais
reconnu le résultat de ce dernier
scrutin (96,50 % contre la pleine
indépendantistes et loyalistes de se
mettre autour de la table pour défi-
nir la place qu’occupera la Nouvel-
le-Calédonie au sein de la Républi-
que. « On tourne la page du troisième
référendum », proclame Gérald
Darmanin en aparté, décidé à ren-
trer dans l’Hexagone lundi avec un
calendrier éclairci. Il espère réunir
les différentes forces politiques à
Paris le mois prochain, au plus tard
en mai, avant de revenir à Nouméa
en juin. Le ministre rendra compte
de son déplacement dès ce mardi au
président de la République. Lequel
envisage de se rendre en Nouvelle-
Calédonie l’été prochain, cinq ans
après sa dernière visite.
Mais, d’ici là, les impasses à éviter
sont nombreuses. Preuve de la dé-
fiance persistante, Louis Mapou, le
président indépendantiste du gou-
vernement de la Nouvelle-Calédo-
nie, a pour l’heure refusé d’accorder
une audience au ministre. Lequel a
toutefois rencontré en fin d’après-
midi une délégation du FLNKS, qui a
Calédonie sont ainsi privés de parti-
cipation aux élections provinciales.
Ce qui ulcère Sonia Backès, la se-
crétaire d’État chargée de la Ci-
toyenneté et présidente (loyaliste)
de la province Sud. Gérald Darma-
nin, qui ne veut « humilier et ignorer
personne » pousse les indépendan-
tistes à accepter de chercher un ac-
cord. « On va parier sur la confiance,
mais l’État saura prendre ses res-
ponsabilités en cas de procrastina-
tion », a-t-il confié en amont de ses
Gérald Darmanin, Au menu des échanges tenus au
entretiens avec le FLNKS. En agi-
tant la menace qu’un recours de-
vant la justice - à défaut d’une né-
ministre de l’Intérieur sein du haut-commissariat à Nou- gociation aboutie - permette
et des Outre-mer, méa, s’est trouvé en bonne place l’ouverture du scrutin à l’intégralité
lors d’une rencontre l’épineux dossier des élections pro- du corps électoral.
bilatérale où était vinciales de 2024. Les loyalistes, Outre le Meccano institutionnel,
présente une délégation avec l’assentiment du gouverne- le ministre consacrera sa journée
du Front de libération ment, considèrent que les résultats de samedi aux questions économi-
nationale kanak
et socialiste (FLNKS), des référendums ouvrent la voie au ques. En premier lieu desquelles le
à Nouméa, vendredi. dégel du corps électoral, qui a été nickel, dont le sol calédonien est
restreint en 2007 aux seules per- gorgé. Une ressource encore trop
sonnes présentes sur le territoire mal exploitée mais indissociable
pouvant prouver dix ans de rési- des revendications indépendantis-

président de la province, épaisse souveraineté) qu’ils ont boycotté, su unir ses différentes composantes dence à la date de 1998. Une façon tes comme des luttes d’influences
barbe blanche et chemise tradition- en désaccord avec son organisation à l’issue de son récent congrès. de préserver le poids électoral des géostratégiques dans la région. ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
4 POLITIqUE
Bardella en chef de parti
au Salon de l’agriculture
Pour sa première visite du Salon en autonomie, le président du RN
s’offre un marathon de 48 heures à la conquête du vote paysan.
maryLou magaL £@marylou_magal
rAssEmblEmEnt nAtionAl Quand le
chat n’est pas là, la souris danse. Début
de marathon, ce vendredi, pour Jordan
Bardella au Salon de l’agriculture. Bles-
sée à la jambe, Marine Le Pen ne pourra
pas assurer le rendez-vous annuel.
Alors, pour son premier salon en tant
que chef de parti, le président du Ras-
semblement national s’offre 48 heures
en immersion dans le monde agricole.
Le pavillon 1, où séjourne la sélection
des bovins les plus prometteurs, se
remplit peu à peu. La délégation RN,
quant à elle, arrive au compte-goutte.
Autour de Jordan Bardella, les eurodé-
putés Mathilde Androuët, Gilles Lebre-
ton et France Jamet, les députés Edwige
Diaz, Laurent Jacobelli et Julien Odoul,
et le maire de Bruay-la-Buissière, Lu-
dovic Pajot. 9 h 45, le président frontis-
te s’élance vers un premier stand. Sous
les flashs de son équipe, il serre les
mains des éleveurs laitiers de Haute-
Savoie et entonne le traditionnel re-
frain : « Bon, ça se passe bien ? Ah, en
voilà une belle vache rustique ! »
Les stands se suivent et se ressem-
blent. Face aux éleveurs, Jordan Bar-
della l’assure : « Ceux qui ne veulent pas
manger de viande n’ont jamais eu faim. »
Enjambant les bottes de foin, il s’efforce
de caresser chaque animal qu’on lui
présente, et de croquer dans tout pro-
duit régional qui croise son chemin. Al-
Matthias Fekl, l’ex-ministre devenu lobbyiste de la bière
Président des Brasseurs de France et avocat, l’ancien espoir de la hollandie, 45 ans, a reçu les politiques au Salon de l’agriculture.
Loris Boichot £@lboichot
GAUCHE Il faut le voir dans son costu-
me, devant les tireuses à bière, recevoir
tout ce que le pays compte de respon-
sables politiques de premier plan. Em-
manuel Macron, François Hollande, le
ministre de l’Économie, Bruno Le Mai-
re, le communiste Fabien Roussel, la
socialiste Carole Delga... Au Salon de
l’Agriculture, à Paris, tous se sont arrê-
tés ces derniers jours au stand des
Brasseurs de France, où ils ont été reçus
avec égards par Matthias Fekl.
�/�
Dans les allées du Parc des expositions,
plusieurs se sont étonnés de voir l’ancien
Le
MATHILDE
MUNOS
5H / 7H
TOUS LES LUNDIS À 6H44,
HISTOIRES POLITIQUES
AVEC ARTHUR BERDAH,
JOURNALISTE POLITIQUE
A
AU
pagué par des jeunes lycéennes d’un
établissement agricole, il est sommé de
répondre à un questionnaire sur les va-
ches de France. Mais identifier laquelle
est une normande, une limousine ou
une blonde d’Aquitaine n’est pas chose
aisée. Gilles Pennelle, responsable bre-
ton chargé des fédérations est donc ap-
pelé à la rescousse. N’est pas Chirac qui
veut. Mais au Salon de l’agriculture, le
frontiste fait partie de ceux qu’on ap-
précie. Entre deux rencontres avec les
éleveurs de porcs ou le lobby laitier, il
multiplie les selfies. Sur son passage,
Justine, agricultrice d’une vingtaine
d’années s’exclame : « Il est beau, il a de
la prestance, du charisme. Je l’aime. »
« Prendre le temps
de rencontrer les agriculteurs »
C’est parti pour 48 heures. Aux journa-
listes qui l’accompagnent, il justifie la
durée de sa visite : « C’est mon premier
salon seul, je ne veux pas donner le senti-
ment de venir seulement pour prendre des
photos, je veux prendre le temps de ren-
contrer les agriculteurs et de parler des
sujets de fond. Car dans un an se tiendront
les élections européennes, et la question
de l’alimentation, de la souveraineté ali-
mentaire, aura une place prépondéran-
te. » Dans le programme de Marine
Le Pen, on retrouve les propositions
destinées au monde paysan. Parmi elles,
garantir aux agriculteurs « des prix res-
pectueux de leur travail et mettre un
terme aux marges abusives de la grande
ministre de François Hollande, 45 ans,
reconverti depuis trois ans à la tête du
syndicat professionnel de la brasserie
française. « Je n’ai jamais voulu faire de la
politique mon métier, explique Matthias
Fekl. Mais ce n’est pas un renoncement,
c’est un autre engagement : je suis aujour-
d’hui très impliqué dans mes activités éco-
nomiques. »
Une nouvelle vie
C’est une nouvelle vie pour cet ancien es-
poir de la hollandie. Ex-membre des ré-
seaux strauss-kahnniens, secrétaire
d’État au Commerce extérieur puis éphé-
mère ministre de l’Intérieur, Matthias
Fekl a fait partie du club des «quadras»
du Parti socialiste (PS), promis à incarner
l’avenir de la gauche. Depuis qu’il a été
balayé du pouvoir avec ses camarades so-
cialistes, cet énarque et normalien se
tient à distance de la vie politique, qu’il
juge « de plus en plus réduite aux polémi-
ques et aux attaques personnelles ». Victi-
me de la « vague Macron » dans son fief
du Lot-et-Garonne, après l’arrivée à
l’Élysée du fondateur d’En marche !, il a
tourné la page, loin des soubresauts de la
Nupes et du congrès houleux du PS. « Ma
vie politique est derrière moi », dit-il, deux
CONTRE-POINT
PAR GUILLAUME TABARD £@GTabard
Macron ou Le Pen :
qui doit redouter Bardella ?
J
ordan Bardella ? Ce sont
les macronistes qui en disent
le plus de bien. Ministres,
élus ou conseillers insistent
sur sa jeunesse, son talent,
sa popularité rapidement acquise,
CHRISTOPHE ARCHAMBAULT/AFP
sa maîtrise des sujets et sa prise
d’autonomie, comme en témoigne
sa sortie sur « l’aveuglement
collectif » face à Poutine, il y a
quelques jours dans L’Opinion.
Jordan Bardella, président « Pour les années à venir, il représente
du Rassemblement national, un très grand danger pour nous,
lors de sa visite
s’alarme un proche du chef de l’État.
au Salon de l’agriculture,
vendredi, à Paris. Il sera difficile à buter. » « Il colle bien
à l’époque, souligne un ministre.
Avoir Jordan pour prénom, et ne pas
avoir Le Pen pour nom est un sacré
atout. » Un maire PS de grande ville
raconte qu’un de ses enfants, élève
à Sciences Po, « ne sait même pas qui
est Jean-Marie Le Pen » et identifie
le RN « à Bardella sur TikTok ». Et
tous en chœur concluent : « Marine
Le Pen ferait bien de se méfier. »
Tant d’éloges interrogent
de la part d’adversaires politiques.
Et si valoriser les atouts du nouveau
président du Rassemblement
national était en fait un moyen
de déstabiliser la candidate naturelle
du parti ? Semer la discorde chez
l’ennemi, surtout au sommet,
distribution », ce qui n’empêche pas les n’est-ce pas l’arme la plus classique,
parlementaires frontistes de rencontrer et souvent la plus efficace, contre
les patrons de la grande distribution. Ou un opposant difficile à battre ?
encore exclure l’agriculture des traités Ce qui inquiète en effet le camp
multilatéraux de libre-échange et stop- présidentiel, c’est moins l’identité
per l’interdiction de produits phytosa- du porte-drapeau de 2027
nitaires « sans alternatives efficaces ». que la possibilité d’une victoire
Un sujet porteur, donc, mais surtout du représentant du RN. Pour
un électorat à conquérir. Historique- un Macron hanté par l’exemple
ment ancré à droite, le vote agricole re- de deux mandats Obama - censé être
présente un vivier potentiel pour le RN, l’homme de tous les renouveaux -,
qui entend chasser sur les terres des Ré- qui se sont soldés par une victoire
publicains dans les mois à venir. « Der- de Donald Trump, ce serait
rière les agriculteurs, il y a la question du le cauchemar absolu.
monde rural, et des électeurs à aller cher- Or c’est un fait que Marine Le Pen a
cher », concède le président lepéniste. le vent dans le dos. Après ses 41,45 %
L’occasion, aussi, pour Jordan Bar-
della de s’affirmer comme une figure
du 24 avril, l’élection de 89 députés
a été pour elle une divine surprise.
politique à part entière, plutôt que Cette force parlementaire lui a permis
de s’inscrire pleinement dans le jeu
comme le seul affidé de Marine Le Pen.
« Je n’ai pas été conçu dans un laboratoi- institutionnel. Mieux, d’y gagner
re, revendique-t-il, interrogé sur sa ré-
cente prise de position dans L’Opinion
une respectabilité qui a d’emblée
tranché avec le comportement
sur la « naïveté collective » vis-à-vis de de la Nupes. Son soutien à Olivier
Vladimir Poutine, interprétée par cer-
tains comme une entorse à la ligne ma-
Dussopt, qualifié de « républicain »
par le ministre du Travail
riniste. Il se peut que je m’exprime avec après qu’un député LFI l’a traité
des mots différents. On n’est pas des clo- d’« assassin », est le point culminant
nes, mais on partage l’essentiel. » Mais de ce retournement d’image.
s’empresse, aussitôt, de balayer le su-
jet : « De toute façon, on me prête tou-
La gauche a beau ériger
la « rediabolisation » du RN
jours des intentions. Quand je ne dis rien, en impératif national, plus grand
je suis le perroquet sous tutelle, et dès que monde ne croit au plafond de verre
j’ai le malheur d’ouvrir la bouche, on dit tandis que Marine Le Pen parie
que je cherche mon indépendance… », re- que l’hypothèse de sa victoire
grette-t-il, avant d’emboîter le pas vers
le pavillon 3 et ses produits régionaux. ■
la crédibilise plus encore. Face
à cette perspective reste l’espoir
Matthias Fekl, à la tête du syndicat professionnel de la brasserie française, au côté
de Bruno Le Maire, jeudi, au Salon de l’agriculture. TwiTTer @BrasseursFrance
ans après avoir abandonné son dernier dre les intérêts des brasseurs - dont
mandat de conseiller régional de Nouvel- ceux des multinationales Heineken et
le-Aquitaine. Tout comme il n’a pas re- Kronenbourg -, son syndicat représen-
nouvelé son adhésion au PS, ni rejoint le tant 98 % de la production française de
parti d’Emmanuel Macron, trop libéral à bière. Au Salon de l’agriculture, il a
son goût. alerté ses visiteurs sur ses inquiétudes :
Dans ses nouvelles fonctions, Mat- la hausse du prix du verre et de l’éner-
thias Fekl s’efforce désormais de défen- gie. Une difficulté pour ce secteur au
d’une guerre interne qui ferait
vaciller le RN. Après tout, l’ambition
et l’impatience du cadet promu,
au départ, pour sécuriser la place
de l’aîné, est un classique
en politique. François Holland
n’avait-il pas cherché à préserver
ses chances en propulsant à Bercy
un certain Emmanuel Macron ?…
Alors, Bardella voulant prendre dès
2027 la place de Le Pen ? L’épisode
Ukraine a frappé les esprits. En
ciblant aussi nettement le régime de
Poutine, le patron du RN a
incontestablement fait évoluer
la position de son parti. Et, semble-
t-il, sans solliciter l’aval préalable
de sa marraine. De même, il ferme
moins ostensiblement la porte
que sa prédécesseur à la recherche
d’alliés à droite (lire nos éditions du
3 mars). Il serait erroné ou anticipé
d’en faire déjà un acte de rébellion. À
27 ans - tout juste la moitié de Marine
Le Pen -, Jordan Bardella n’a aucun
intérêt à brusquer les échéances. Mais
ces gestes d’autonomie ont été
repérés. À l’intérieur du RN comme
à l’extérieur. Une manière pour lui
d’afficher son autorité. Et de rappeler
à tout le monde, amis et adversaires,
qu’être loyal ne signifie pas jouer
les prête-noms.
Ce qui
inquiète en
effet le camp
présidentiel,
c’est moins
l’identité
du porte-
drapeau
de 2027
que la
possibilité
d’une victoire
du
représentant
du RN »
chiffre d’affaires de 4 milliards d’euros
par an. Mais ce social-démocrate re-
vendiqué n’a pas pour autant renoncé
au débat d’idées - il tient une chronique
régulière dans L’Opinion. Il entretient
aussi ses réseaux politiques, y compris
dans la majorité. À gauche, il s’est lié
avec l’ancien socialiste Clément Beaune,
désormais ministre des Transports, qui
loue « un mec bien », « social-démocrate
et Européen convaincu ». À droite, ce
Franco-Allemand apprécie aussi bien
Bruno Le Maire, germanophone comme
lui, qu’Édouard Philippe, son ancien
professeur de droit à Sciences Po. L’ex-
premier ministre n’a-t-il pas songé à
créer un cabinet d’avocats avec lui en
2017, avant sa nomination à Matignon ?
Matthias Fekl a finalement fondé le
sien à Paris, Audit Duprey Fekl, tout en
gérant sa société de médiation économi-
que, Equanim, au sein de laquelle il a trai-
té le contentieux opposant Suez et Veolia.
Italie, Égypte, Allemagne, Maroc... Entre
plusieurs virées dans les brasseries de
France, l’ancien secrétaire d’État au
Commerce extérieur savoure ses dépla-
cements à l’étranger. Il s’en réjouit : « Le
terrain et l’international : les deux me rap-
pellent un peu ma vie d’avant...» ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
l'événement
6
2022, année maudite
En 2022, la production du parc nucléaire
français a été historiquement basse du fait
des maintenances et de la corrosion sous
contrainte. Cela a mis les comptes d’EDF
dans le rouge, a amené la France à
importer du courant, et a réduit la part du
nucléaire ordinairement de 70 % à 75 % de
la production totale d’électricité à 62,7 %.
Nucléaire : la commission d’enquête parle
Décidé dans l’accord électoral entre les socialistes et les écologistes en 2011, le plafonnement à 50 % de la part de
Bertille Bayart £@BertilleBayart
Énergie Les uns biffent, les autres
autopsient. En commission, les députés
qui examinent le projet de loi d’accélé-
ration du nucléaire ont voté mercredi,
comme les sénateurs avant eux, la sup-
pression dans la loi de deux objectifs qui
y avaient été inscrits en 2015 : la réduc-
tion à 50 % de la part du nucléaire dans
la production d’électricité en France et
le plafonnement à 63,2 GW de la puis-
sance nucléaire installée. « La filière a
besoin, après des années de signaux né-
gatifs et contradictoires, d’un signal de
confiance », a justifié la rapporteur Re-
naissance du texte, Maud Bregeon.
Dans une autre salle du Palais Bour-
bon, depuis l’automne, dans le cadre
d’une commission d’enquête sur « les
raisons de la perte de souveraineté éner-
gétique » de la France, d’autres députés
enchaînent les interrogatoires du ban et
de l’arrière-ban de la politique énergéti-
que du pays depuis vingt ans. Ironie des
carrières : beaucoup de ceux qui sont en
responsabilité aujourd’hui et président à
la relance du nucléaire ont leurs em-
preintes digitales partout dans l’histoire
de son désamour.
Cette commission d’enquête, dont le
sérieux et la pertinence sont salués,
constitue une plongée dans le marigot
énergétique tricolore, avec ses crocodi-
les, ses anguilles, et ses spécimens à mé-
moire de poisson rouge. Un exercice ca-
thartique, surtout, pour les élus d’un
pays qui a redouté de manquer d’élec-
trons pendant l’hiver. Comment la
France s’est-elle résolue à brider voire à
démanteler sa capacité de production
nucléaire, ce parc unique au monde,
dont la construction a été décidée dans
la foulée du premier choc pétrolier, et
qui lui a assuré pendant des décennies
un approvisionnement fiable, décarbo-
né et bon marché en électricité ?
L’histoire commence en 2011. L’acci-
dent de Fukushima a transformé le pay-
sage politique. Il conforte les écologistes
dans leurs convictions et conduit une
partie des socialistes à tourner le dos à
leur credo nucléaire, assumé bon an mal
an sous Mitterrand, un peu moins sous
Jospin (fermeture de Superphénix). Le
16 novembre 2011, le Parti socialiste et
Europe Écologie-Les Verts (EELV), sous
la plume de leurs dirigeantes respecti-
ves, Martine Aubry et Cécile Duflot, si-
gnent un accord électoral pour 2012 - les
Verts décrochant la candidature dans
60 circonscriptions. « Nous réduirons la
part du nucléaire dans la production élec-
trique de 75 % aujourd’hui à 50 % en 2025
et engagerons un plan d’évolution du parc
nucléaire existant prévoyant la réduction
A
d’un tiers de la puissance nucléaire instal-
lée par la fermeture progressive de
8,5 %
Éolien
En 2012, Martine
Aubry (PS) et Cécile
Duflot (EELV) signent
un accord : « Nous
Hydraulique
réduirons la part
du nucléaire dans la
production électrique
de 75 % aujourd’hui
à 50 % en 2025. »
24 réacteurs, en commençant par l’arrêt
immédiat de Fessenheim » écrivent les
deux partis.
« Cet accord, je ne l’ai pas repris à mon
compte », rappelle aujourd’hui (au
« Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI » du
19 février) François Hollande, qui avait
remporté la primaire socialiste un mois
plus tôt. Plus précisément, le candidat
retient la promesse de fermeture des
deux réacteurs de Fessenheim (sur 58 en
fonctionnement), mais occulte la ferme-
ture anticipée de 24 autres. Surtout, il
endosse l’objectif des 50 %, censé être
atteint par la croissance du dénomina-
teur avec le développement des renou-
velables. « Cela ne repose à ce moment-là
sur aucune estimation technique ou scien-
tifique », écrira plus tard Cécile Duflot
(De l’intérieur, Fayard, 2014), François
Hollande « n’est pas fondamentalement
convaincu, mais il comprend, avec son
instinct politique, qu’après Fukushima, on
ne peut plus défendre le nucléaire comme
avant ».
“ Personne n’a jamais
su d’où provenaient
les autres 50 %
”
henri proglio, ancien pdg d’edf
C’est une imposture. Et ce sont d’an-
ciens responsables socialistes qui en
parlent le mieux. Avec « cet accord (PS-
EELV) de coin de table », a dit Arnaud
Montebourg, ministre de l’Industrie de
2012 à 2014, « on s’est retrouvé avec un
programme qui annonçait la fermeture de
24 réacteurs, et vogue la galère ! ». « La
décision des 50 % était imposée par l’ac-
cord avec les Verts. Pour autant, aucune
étude d’impact ou analyse de besoin ne
justifiait le passage de 75 % à 50 % de nu-
cléaire dans la consommation énergéti-
que, a expliqué à la commission d’en-
quête Manuel Valls, ancien ministre et
premier ministre de François Hollande.
Personne n’imaginait réellement fermer
vingt réacteurs en dix ans ».
« Il s’agissait d’un accord politique.
Certains étaient pour la sortie du nucléai-
re, d’autres pour l’accélération du dé-
ploiement des énergies renouvelables,
sans pour autant abandonner le nucléaire.
Il a donc été décidé de trancher au mi-
lieu », a expliqué François Brottes, char-
gé de l’énergie dans l’équipe de campa-
gne de François Hollande, puis député,
et patron de RTE, le réseau de transport
d’électricité (2015-2020).
« On a décrété que le tout-nucléaire ne
serait pas ; que l’on allait baisser la part
du nucléaire, qui se situait un peu au-
dessus de 75 %, et qu’il fallait faire une
ristourne. Tout cela au doigt mouillé ! », a
tempêté l’ex-PDG d’EDF (2009-2014)
Henri Proglio.
3,6%
Autres
9,9 %
Gaz
4,2 %
Solaire
Répartition
de la production
62,7%
d'électricité en France
Nucléaire
en 2022 en %
11,1 %
Source : RTE
« J’ai le sentiment à travers les audi-
tions successives de la commission
qu’une explication a posteriori s’est
construite sur ces “fameux 50 %” », a dit
le président de la commission d’enquê-
te Raphaël Schellenberger (LR). « Le
50 %, c’est la conclusion arithmétique de
l’intention des écologistes non seulement
de sortir du nucléaire à moyen terme,
mais surtout de tuer immédiatement la
filière du MOX, c’est-à-dire du recycla-
ge du combustible, utilisé dans 24 réac-
teurs, en les fermant les premiers », ana-
lyse un industriel.
À l’époque, en tout cas, les alertes ne
manquent pas. L’Union française de
l’électricité (UFE) fait passer une étude
détaillée à horizon 2030 à François Brot-
tes. « Dans les scénarios de réduction de la
production d’énergie nucléaire (à 50 %, et
à 20 % en cas de fermeture de chaque
réacteur parvenu à 40 ans), les énergies
renouvelables ne peuvent se substituer
complètement à l’énergie nucléaire. À
l’horizon 2030, il est impossible de sortir,
même partiellement, du nucléaire sans
augmenter les émissions de CO2 », est-il
argumenté.
Après l’élection aussi, les drapeaux
rouges se hissent, comme le prouve cet
échange lors de l’audition de Pierre-
Marie Abadie, directeur de l’énergie au
ministère de 2007 à 2014 et actuel patron
de l’Agence de gestion des déchets ra-
dioactifs (Andra). « Si je résume vos pro-
pos, développe le rapporteur Antoine
Armand (Renaissance), en 2015, vous
avez eu des discussions techniques avec
les ministres. Vous leur avez expliqué que
l’objectif de 50 % en 2025 imposait de fer-
mer une vingtaine de réacteurs. Vous leur
avez indiqué que cette perspective était
préoccupante. Les responsables politiques
ont entendu ce point, mais ont tout de
même décidé de le mettre dans la loi. Vous
avez alors considéré que cette démarche
n’était pas suffisamment grave pour en-
traîner par exemple la démission collecti-
ve de la direction générale de l’énergie. »
Pierre-Marie Abadie confirme : « Les
événements se sont effectivement passés
de cette façon avec les autorités en place.
Tout le monde savait. » Laurent Michel,
le patron de la direction énergie climat
du ministère depuis fin 2012, maintient
cependant que « les nombreuses projec-
tions sur lesquelles nous nous appuyions
(au moment de la rédaction de la loi,
NDLR) nous laissaient penser que l’hori-
zon 2025, ou une date approchante, était
tenable. »
La ministre de l’Écologie (2012-2013)
Delphine Batho, pourtant convaincue de
l’objectif - « Depuis quand faut-il s’ex-
cuser de vouloir mettre en œuvre le pro-
gramme sur lequel on a été élu ? » -, le sait
la première : « Les études que j’avais de-
mandées aux services montraient qu’il
était réaliste d’envisager l’atteinte de
l’objectif de 50 % entre 2028 et 2030, mais
qu’il n’était pas souhaitable de retenir la
date de 2025 – même si c’était possible –,
car cela obligerait à recourir aux énergies
fossiles pour remplacer le nucléaire. »
En 2013, l’Autorité de sûreté nucléaire
émet une alerte, rétrospectivement pré-
monitoire. « Je ne suis pas sûr que nous
ayons été parfaitement entendus », a
euphémisé l’ancien patron de l’ASN
(Autorité de sûreté nucléaire), Pierre-
Franck Chevet, devant la commission
d’enquête. L’ASN rappelait « l’impor-
tance de disposer de marges suffisantes
dans le système électrique pour faire face
à la nécessité de suspendre simultanément
le fonctionnement de plusieurs réacteurs
qui présenteraient un défaut générique
grave ». Curieusement, ce risque de dé-
faut générique, qui a toujours été le
meilleur argument en faveur de la di-
versification du mix énergétique pour le
désensibiliser du seul nucléaire, a rare-
ment passé le mur du son dans le débat
public. Du moins jusqu’à l’apparition en
2021 de la corrosion sous contrainte sur
une quinzaine de réacteurs parmi les
plus récents.
Dans une note du 30 mai 2014,
l’Agence des participations de l’État, le
Trésor et la direction de l’industrie met-
tent encore en garde : « La réduction à
50 % de la part de la production nucléaire
à l’horizon 2025 implique, compte tenu
des prévisions de consommation sur la
prochaine décennie, la fermeture de 20 à
25 réacteurs (2 à 3 par an entre 2017 et
2025). » Pendant la première partie du
quinquennat Hollande, le discours offi-
ciel ne bouge pourtant pas d’un iota.
« Vous connaissez l’engagement que j’ai
pris : réduire à 50 % la part du nucléaire
dans la production d’électricité à l’horizon
2025. Cela commence donc aujourd’hui.
Je rappelle que la centrale de Fessenheim
sera fermée d’ici fin 2016 », dit le prési-
dent en ouverture de la conférence en-
vironnementale, en septembre 2013. En
coulisses, tout le monde cherche com-
ment sortir de l’impasse créée par une
promesse intenable devant le mur de la
réalité. « Le président voulait mais ne
voulait pas. Il était empêtré dans ses com-
promis de synthèse, de guingois », rap-
pelle Arnaud Montebourg.
Il faut plus de deux ans pour que le
projet de loi de transition énergétique
pour la croissance verte (LTECV) soit
présenté, le 18 juin 2014, par Ségolène
Royal, quatrième ministre en charge de
l’Écologie du quinquennat. Un mo-
nument d’habiletés. Les dispositions les
plus radicales ont été expurgées. Exit la
fin de vie des réacteurs à 40 ans - le
« grand carénage », l’opération géante
de maintenance à 55 milliards d’euros
pour que le parc atteigne 50 ans au
moins, sera d’ailleurs validé en 2015.
Arnaud Montebourg, ministre jusqu’en
août 2014, raconte sa « bataille de l’in-
térieur » et met en garde par écrit le
premier ministre Manuel Valls le 6 juin
2014 contre un texte dur qui serait
« particulièrement dangereux sur le plan
de la sécurité d’approvisionnement, de la
compétitivité, des finances publiques et
de l’emploi ». « Il faut réagir vite, je
compte sur toi », conclut-il. Selon lui,
en interministérielle, la directrice de
cabinet de Ségolène Royal arrivait
« avec une liste de réacteurs à fermer ».
Propos contestés par l’intéressée,
Élisabeth Borne, aujourd’hui première
ministre.
“ Sortir du nucléaire
en quarante ans me paraît
curieux. Je ne me souviens
pas avoir dit cela
ségolène royal,
”
ancienne ministre de l’environnement
Le 50 %, c’était donc « un enjeu pro-
grammatique du président de la Républi-
que » à l’époque, a rappelé Élisabeth
Borne. Les promesses présidentielles
sont tenues, mais de sorte que personne
n’ait à les respecter. Ainsi le fameux ra-
tio de 50 % de nucléaire à l’horizon 2025
est-il transcrit sous la forme d’une dé-
claration d’intention dans le titre pre-
mier. « La formulation, qui mentionne un
“horizon” 2025, est révélatrice de la di-
mension très peu normative de cette pro-
position », a expliqué aux députés leur
ancien collègue François Brottes. « Je ne
souhaitais pas que figure dans la loi l’ob-
jectif d’abaisser la part du nucléaire dans
la production d’électricité de 75 % à 50 %,
car j’estimais que nous devions au préala-
ble nous assurer d’économiser de l’énergie
et de développer les énergies renouvela-
bles. J’ai donc cherché à extraire cet ob-
jectif de 50 % de la loi, en proposant de le
placer dans la programmation plurian-
nuelle de l’énergie (PPE) », a affirmé en
commission d’enquête Ségolène Royal.
L’ex-ministre dit même avoir voulu re-
porter l’échéance à 2030. « Les écologis-
tes sont alors montés au créneau, à Mati-
gnon comme à l’Élysée, et ont insisté pour
maintenir l’échéance de 2025, mais je l’ai
refusé. J’ai proposé d’écrire “l’horizon
2025”, en menaçant de retirer cet objectif
de la loi si cette formulation n’était pas re-
tenue. » La mémoire joue bien des tours à
l’ancienne candidate à l’élection de 2007
et à la primaire de 2011, qui, dans ce der-
nier cadre, lui a rappelé Antoine Ar-
mand, avait déclaré être pour une sortie
du nucléaire « à 40 ans maximum ». « Je
ne sais pas dans quelles conditions j’ai
donné cette interview. Sortir du nucléaire
en 40 ans me paraît curieux. Je ne me sou-
viens pas avoir dit cela », réagit Ségolène
Royal.

mentaire traque une imposture politique
l’atome dans l’électricité en France a fait peser une épée de Damoclès sur la filière.
Dans sa loi, beaucoup est en fait dis-
crètement renvoyé à la PPE, qui elle-
même renverra les décisions difficiles à
plus tard. « Pardonnez la boutade, mais
vous nous dites que la loi de 2015 a eu le
mérite de créer la PPE et que la PPE a eu le
mérite de défaire une partie de la loi de
2015 », s’amuse d’ailleurs le rapporteur
Antoine Armand devant Antoine Pel-
lion, conseiller de Ségolène Royal en
2014-2016 puis d’Emmanuel Macron à
l’Élysée et aujourd’hui secrétaire géné-
ral à la Planification écologique.
Seul le plafond de 63,2 GW est une me-
sure véritablement « mordante », selon le
mot de ce dernier. Le plafonnement im-
plique la fermeture d’une capacité équi-
valente à celle de l’EPR de Flamanville
que l’on pense voir entrer en service pen-
dant le quinquennat. « Finalement, il n’est
resté qu’un seul symbole, un martyr, de
cette politique : Fessenheim. C’est tombé
sur vous », a lâché Arnaud Montebourg à
l’attention de Raphaël Schellenberger,
élu de la circonscription alsacienne.
L’opération de « damage control » a fait
une victime collatérale. Le 6 avril 2017,
deux semaines seulement avant le pre-
mier tour de l’élection présidentielle, Sé-
golène Royal signe le décret d’abrogation
de l’autorisation d’exploitation des réac-
teurs de Fessenheim, dont chacun sait ce
jour-là qu’il ne tiendra pas au Conseil
d’État. « C’est dit, c’est fait », tweete la
ministre. Le mandat est terminé. Fran-
çois Hollande, qui en 2013 rappelait que
les décisions de politique énergétique en-
gagent pour « les décennies à venir », ar-
rête à la mi-2017 le compteur de ses sou-
venirs. « Est-ce que j’ai supprimé des
centrales ? Aucune n’a fermé pendant mon
quinquennat », rappelait-il au « Grand
Jury » mi-février. « La France a assumé
de conserver son nucléaire », a affirmé de-
vant les députés son ancien conseiller et
actuel patron de RTE, Xavier Piechaczyk.
Trois ans après le vrai-faux décret de
Ségolène Royal, c’est son ancienne di-
rectrice de cabinet et troisième ministre
de la Transition écologique d’Emmanuel
Macron, Élisabeth Borne, qui met en
œuvre la vieille promesse de François
Hollande et préside à la fermeture, le
30 juin 2020, du second réacteur de Fes-
senheim. « Il y a ceux qui en parlent, et
puis il y a ceux qui le font. Nous, on le
fait », se félicite-t-elle.
Dans l’intervalle, le 50 % inscrit dans
la loi promulguée le 18 août 2015 a pour-
suivi son parcours traumatique. Emma-
nuel Macron, candidat inattendu et
vainqueur improbable de l’élection de
2017, a repris à son compte l’objectif. Un
choc pour la filière. « Nous avions quitté
un ministre de l’Économie (2014-2016)
productiviste. Nous avons retrouvé un
président de la République qui nomme Ni-
colas Hulot à l’Écologie ! », raconte un
ponte du secteur.
La centrale nucléaire
de Fessenheim.
L’administrateur général (2015-2018)
du Commissariat à l’énergie atomique,
Daniel Verwaerde, s’en souvient :
« Monsieur Nicolas Hulot, qui assurait la
principale tutelle du CEA, était l’un des
trois ministres d’État du gouvernement.
Lors de notre première rencontre, il m’a
invité à parler “de tout ce que faisait le
CEA, mais pas du nucléaire”. »
Qu’était allé faire dans cette galère
l’ex-égérie de l’écologie et star du petit
écran ? « Probablement, le président de la
République avait plus d’enthousiasme que
moi pour le nucléaire, mais il m’avait as-
suré que le ministre ne serait pas seul. J’ai
dit chiche. » Chiche pour « la décision la
plus difficile » : à l’automne 2017, Nicolas
Hulot endosse le constat d’impasse et
reporte de 2025 à 2035 le cap des 50 % de
nucléaire. La faute à ses prédécesseurs,
affirme-t-il, qui n’avait rien préparé.
Son ex-directrice de cabinet enfonce le
clou : « 50 % en 2025, c’est facile sur le
papier. Mais ça ne tenait pas la route une
seconde en termes de réalisation. » « Cette
échéance a été décalée à 2035 car on n’a
pas été fichus de tenir collectivement nos
objectifs », a regretté Barbara Pompili,
ministre de 2020 à 2022.
« La PPE de 2016 ne précisait pas com-
ment atteindre le seuil de 50 %, et exécu-
tait le sujet en un paragraphe, en indi-
quant que certains réacteurs seront
prolongés et d’autres fermés. Il n’existait
donc pas de trajectoire, et nul n’a cherché
à sortir de cette ambiguïté », raconte
François Brottes. « Édouard Philippe ne
voulait pas faire semblant de croire que ce
qui était écrit dans cette loi votée par le
gouvernement précédent était applica-
ble », dit son ancien directeur de cabinet
Benoît Ribadeau-Dumas. L’ancien pre-
mier ministre est revenu sur la saga des
50 % devant son parti Horizons le
16 septembre 2022 : « D’abord il a été dit
qu’il fallait baisser la part du nucléaire –
et c’était une bonne idée. Ensuite, qu’il
fallait baisser à 50 %. Et ensuite encore,
qu’il fallait baisser la part à 50 % en 2025.
Dire ça, c’était une énorme absurdité. Ce
faisant, on a totalement décrédibilisé la
parole politique parce qu’on l’a écrit dans
la loi. (En 2017), on a corrigé un certain
nombre de choses : on a dit : “2025, ça n’a
aucune espèce de crédibilité.” On a repor-
té à 2035 – je vais vous dire, ça ne me pa-
raît pas beaucoup plus crédible mais c’est
quand même nettement plus crédible. »
Provocateur, mais aussi en colère, Yves
Bréchet, haut-commissaire à l’Énergie
atomique de 2012 à 2018, a dressé à sa fa-
çon le bilan de ces errements : « La poli-
tique énergétique du pays a été décidée
par un canard sans tête. La chaîne de dé-
cision publique est désastreuse. »
Le 50 % est-il le produit, non seule-
ment d’une écologie antinucléaire, mais
aussi d’une promotion insidieuse de la
décroissance ? Certains en sont
63,2 GW
Plafond de capacité
de production nucléaire
inscrit dans la loi de 2015,
qui correspond
à la capacité existante
à l’époque.
Le ministre Nicolas
Hulot reportera
de 2025 à 2035
le cap des 50 %.
convaincus. « J’ai assisté avec grand dé-
sespoir à la mise au point de la théorie ab-
surde de la décroissance électrique, qui
m’a été imposée à l’époque avec beaucoup
d’insistance par les pouvoirs publics », af-
firme par exemple Henri Proglio. En ap-
pui des PPE de 2016 et de 2020 (pour la
période 2019-2023), avant et après
l’élection d’Emmanuel Macron, donc,
les analyses de RTE, gestionnaire du ré-
seau et garant de la sécurité d’approvi-
sionnement, sont très conservatrices sur
l’évolution de la consommation d’élec-
tricité. S’agissant de la PPE de 2016, Da-
niel Verwaerde « avoue avoir éprouvé
quelques difficultés à comprendre : alors
que, dans la LTECV, l’électricité devait
remplacer l’énergie fossile pour de nom-
breux usages, la PPE prévoyait une sta-
gnation voire une légère diminution de la
consommation d’électricité ». « En 2012,
2013 et 2014, par ailleurs, les consomma-
tions de la France sont à la baisse et au
mieux stables. Le parc nucléaire, à l’épo-
que, produit beaucoup, au point d’expor-
ter de l’électricité », résume Xavier Pie-
chaczyk qui, face à Olivier Marleix (LR),
qui suggère des analyses construites
pour justifier le seuil de 50 %, défend son
entreprise : « Nous (ne) travaillons (pas)
sous la dictée de quiconque. »
“ Il y a ceux qui
en parlent, et puis
il y a ceux qui le font.
Nous, on le fait
éLisabeth borne, en 2020
” est plus que recevable.
Jusqu’ici, tout va bien, semblent indi-
quer avec constance les expertises du
ministère et de RTE. Les hypothèses
donnent un confort relatif à l’exécutif, y
compris pour engager la fermeture de
moyens de production thermique. Les
années passant, un éléphant devient ce-
pendant de plus en plus encombrant
dans la pièce énergétique : l’effet falaise
que connaîtra le parc nucléaire français,
mis en service en un temps record dans
les années 1980 et 1990. Que ce soit à 40,
50 ou 60 ans, voire au-delà, les réacteurs
finiront par fermer. Il est temps de re-
prendre les chantiers.
L’idée d’un nouveau programme nu-
cléaire est rapidement dans l’air. À l’été
2018, Yannick d’Escatha (ancien admi-
nistrateur général du CEA) et Laurent
Collet-Billon (ancien délégué général
pour l’armement) rendent un rapport sur
le maintien des compétences dans la filiè-
re. Rapport classé secret-défense mais
dont Les Échos avaient révélé qu’il prônait
la construction de six EPR. « Il fallait donc
construire, et c’est ce que nous avons dit »,
se borne à indiquer Yannick d’Escatha.
« Ce rapport ne m’est pas parvenu », a réa-
le figaro
l'événement
Vous connaissez
l’engagement que j’ai pris :
réduire à 50 % la part du nucléaire
dans la production d’électricité
à l’horizon 2025. Cela commence
aujourd’hui
Le président françois hoLLande, en septembre 2013
gi Nicolas Hulot devant les députés, pro-
voquant l’hilarité de Michèle Pappalardo.
« Nicolas Hulot s’opposait à porter le
nouveau nucléaire, mais nous voulions
préparer le terrain en faisant passer un
certain nombre de décisions, car ni la ma-
jorité ni le pays lui-même n’étaient prêts
pour celles-ci », se remémore devant les
députés Benoît Ribadeau-Dumas. Fin
août 2018, Nicolas Hulot claque la porte.
En novembre, Emmanuel Macron pré-
sente les grandes lignes de la PPE, mo-
nument de « en même temps » : « Qua-
torze réacteurs de 900 mégawatts seront
arrêtés d’ici à 2035. Ce mouvement com-
mencera à l’été 2020 avec l’arrêt définitif
des deux réacteurs de Fessenheim », dé-
clare le président de la République, qui,
de plus, « demande à EDF de travailler à
l’élaboration d’un programme nucléaire.
Tout doit être prêt en 2021 pour que le
choix qui sera proposé aux Français puis-
se être un choix transparent et éclairé ».
L’électricien public et la filière ont
donné aux opposants à l’atome tous les
bâtons pour se faire battre. Sous Nicolas
Sarkozy, avec la rivalité insensée entre
Areva et EDF, sous François Hollande,
avec la quasi-faillite d’Areva provoquée
par l’hémorragie financière et indus-
trielle du chantier de l’EPR finlandais
d’Olkiluoto, sous Emmanuel Macron,
avec la déroute du chantier de l’EPR de
Flamanville. « On était tous surpris par
les malédictions qui s’abattaient sur les
EPR, a témoigné Nicolas Hulot. Il aurait
fallu qu’on soit un peu rassurés, que Fla-
manville soit démonstratif. » L’argument
À qui la faute ? La filière accuse l’ab-
sence de projets, l’avenir obéré par une
politique énergétique de courte vue, ex-
pliquant la démobilisation des troupes.
« Je ne crois pas à la thèse d’une défaillan-
ce de maintenance ou de vigilance résul-
tant d’une trajectoire de diminution po-
tentielle du parc », a affirmé François
Brottes. « Nous avons eu vingt ans sans
projets qui ont été fatals pour la transmis-
sion des savoirs techniques », avait pour-
tant écrit Pierre-Franck Chevet en 2018.
« De toute évidence, l’arrêt de toute
construction neuve en France une premiè-
re fois après celles de Civaux, lancées au
milieu de la décennie 1990, et à nouveau
l’absence de nouvelle construction après le
cas singulier du réacteur de Flamanville 3,
qui n’a pas été suivi d’autre lancement de
projet depuis plus de quinze ans, amènent
à s’interroger sur leurs effets directs et in-
directs quant à la performance vécue par
EDF sur Flamanville 3 », a affirmé Jean-
Bernard Lévy, ex-PDG d’EDF (2014-
2022).
« J’ai dit à des collègues que s’il n’y avait
pas de programmes, nous ferions, avec nos
pièces, un musée du maintien des compé-
tences. Nous monterons peut-être ce mu-
sée, mais j’espère qu’il sera dépourvu de
samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
7
»
La ministre de l’Écologie
Ségolène Royal, en visite
à la centrale nuclaire de
Civaux (Vienne), en 2014.
pièces parce qu’elles seront dans des réac-
teurs nucléaires », a plaisanté le patron
de Framatome, Bernard Fontana. La fi-
lière nucléaire a besoin de projets. Pour
Yves Bréchet, « la procrastination dans le
domaine du nucléaire et la politique d’an-
nonces, dans l’attente de décisions
concrètes de mise en chantier, démontrent
une ignorance stupéfiante de l’inertie in-
trinsèque des industries lourdes ».
Esquissé dans le plan France 2030, le
signal tant attendu sera donné pour de
bon par Emmanuel Macron à Belfort le
10 février 2022 avec la commande de
trois paires d’EPR 2 et quatre autres à
l’étude. Entre l’engagement de 2017
d’un plafonnement à 50 % du nucléaire
dès 2025 et l’engagement d’un nouveau
plan Messmer, le rapport signé par RTE
sur les « futurs énergétiques » à 2050,
tout a changé, paraît-il. La bascule rési-
PHILIPPE HUGUEN/AFP ; PHILIPP voN DItFUrtH/DPA / PIctUrE ALLIANcE vIA rEUtErs ; BErtrAND GUAY/AFP ; cHArLEs PLAtIAU/rEUtErs ; XAvIEr LEotY/AFP
de pour l’essentiel dans l’anticipation
d’une consommation d’électricité en
hausse. « En 2018-2019, la volonté
d’électrifier le parc roulant français et
d’accélérer la décarbonation de l’industrie
autour de l’électrification des procédés,
puis l’apparition de l’hydrogène, ont
contribué à une augmentation de la
consommation », justifie Laurent Michel.
« On ne raisonne plus de la même façon
puisqu’on a maintenant une vision beau-
coup plus ambitieuse sur la réduction de
nos émissions de gaz à effet de serre et
donc sur les besoins de production en élec-
tricité », a souligné Élisabeth Borne,
ajoutant : « Ça rend modeste sur les pré-
visions. »
Certains pensent d’ailleurs que les es-
timations réévaluées sont encore trop ti-
morées. « Une stratégie énergétique na-
tionale se fondant sur une fourchette de
consommation domestique annuelle
d’électricité de 750 à 800 térawattheures
en 2050 ferait courir à notre pays nette-
ment moins de risques que le point moyen
de 645 TWh qui a été retenu fin 2021 », a
ainsi déclaré Jean-Bernard Lévy.
À 650 TWh, 750 TWh ou 800 TWh,
l’explosion maintenant attendue des
besoins exige un développement de
toutes les productions possibles. Pour ce
qui concerne le nucléaire, tous les
moyens sont bons. Le scénario haut re-
tenu dans le rapport RTE sur la base du
« maximum industriel » communiqué
par la filière selon Xavier Piechaczyk
- quatorze tranches d’EPR mises en ser-
vice en 2050 - serait-il déjà obsolète ? La
ministre Agnès Pannier-Runacher,
dans la foulée du conseil de politique
nucléaire réuni le 3 février, appelle à dé-
brider la puissance des réacteurs exis-
tants, à envisager leur prolongation au-
delà de 60 ans, et à s’interroger sur la
possibilité d’aller au-delà de 14 EPR à
construire. Le ratio de 50 % est pulvéri-
A
sé, au numérateur et au dénominateur,
par la crise énergétique. ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
8 InternatIonal
Le poing russe se ferme sur Bakhmout
Seule une route relie encore les soldats ukrainiens, qui défendent la ville depuis huit mois, à leurs arrières.
Ukraine Les forces russes ont
lancé, depuis jeudi, une attaque sur
trois axes au nord de Bakhmout.
Cette poussée cherche à couper
l’unique route qui relie encore les
défenseurs de la ville à leurs
arrières, une route étroite qui
mène au gros bourg de Tchassiv
Yar, quatre kilomètres plus à
l’ouest.
La ville, totalement ruinée et
presque déserte – il resterait
4 500 habitants sur 70 000 avant la
guerre – serait, selon des rumeurs,
sur le point d’être abandonnée par
ses derniers défenseurs. L’hypo-
thèse a pris de l’ampleur alors que
l’approvisionnement se fait délicat
et que les forces ukrainiennes ont
dynamité l’un des rares ponts
encore praticable. Vendredi, le
patron de Wagner, Evgueni
Prigogine, a diffusé une vidéo sur
Telegram où il affirme que ces
hommes « ont pratiquement
encerclé Bakhmout », appelant le
président Volodymyr Zelensky à
sonner la retraite de ses troupes.
Selon l’agence Reuters, la vidéo a
été enregistrée à Paraskoviivka, un
village à 7 kilomètres au nord de
Bakhmout pris par Wagner en
février.
Le commandement militaire
ukrainien garde, lui, le silence sur
la situation dans la cité. Mardi, il
avait admis une situation « extrê-
mement tendue » à Bakhmout face
Ces jeunes Ukrainiens
qui s’organisent
pour fuir la mobilisation
pierre polard £@PierrePolard
kiev
LE JOUR se lève et déjà les
messages se multiplient sur
« Convocations Kiev », une boucle
Telegram : « 7 h 35. Un minibus a
été arrêté au checkpoint sur l’auto-
route Jytomyr, à l’entrée de Kiev.
Toutes les voitures avec des hom-
mes sont arrêtées. (…) 7 h 47. Des
convocations sont directement
distribuées à domicile, au 2, rue
Myloslavska, par des recruteurs en
civil. (…) 8 h 02. La voie est libre au
checkpoint de Novi Petrivtsi. »
Comme chaque jour, une centaine
de ces messages défilent jusqu’au
soir. Pour la seule ville de Kiev,
plus de 110 000 anonymes se font
savoir, photos ou vidéos à l’appui,
où des militaires et des policiers
distribuent les « billets gagnants »
– surnom donné ironiquement à
ces convocations qui peuvent
amener tout Ukrainien à être
mobilisé pour l’armée. Des
conseils sont aussi prodigués sur la
boucle : « Ne peuvent délivrer une
convocation que ceux qui
travaillent directement pour un
centre de recrutement, pas le soldat
lambda. » « Convocations Lviv »,
« Convocations Mykolaïv »… Les
boucles Telegram de ce genre se
déclinent aujourd’hui partout en
Ukraine, cumulant des centaines
de milliers de membres.
“ Si je ne me suis pas
engagé, c’est que
je suis incapable
de tuer
anatoly
” nienne son déménagement. « Le
Anatoly* modère une de ces
boucles. À condition que son nom
soit changé, comme le demandent
presque tous ceux qui s’opposent
à la mobilisation, il accepte de
raconter : « Je ne suis pourtant pas
directement concerné par la mobi-
lisation : j’ai 24 ans, et ne peuvent
être mobilisés que les plus de
27 ans. Mais il arrive que certains
policiers fassent mine d’ignorer
cette loi … » Anatoly ajoute : « Je
crois que la mobilisation est impro-
A
ductive. Beaucoup sont incapables,
physiquement ou mentalement,
à une tentative de percée russe. Le
président ukrainien avait pour sa
part constaté le même jour une
augmentation de « l’intensité des
combats » autour de la ville. Mais
vendredi, l’état-major ukrainien
n’a donné aucune précision sur
la situation à Bakhmout, se
contentant de signaler que l’armée
avait repoussé 85 attaques russes
sur l’ensemble du front ces
dernières 24 heures. À Kiev, un
membre de l’état-major a affirmé
que les rumeurs de chute n’avaient
pour but que de décourager les
forces ukrainiennes.
Épicentre des combats
Ces derniers mois, la guerre,
largement figée sur la plupart des
fronts, s’est focalisée sur
Bakhmout. Cette ville industrielle
dont l’importance stratégique est
contestée est néanmoins devenue
un symbole, car elle est l’épicentre
des combats entre Ukrainiens et
Russes. Ces derniers ont fait de
l’offensive contre la ville le cœur
de leur politique, sans regarder au
sacrifice. À la recherche d’une
victoire annoncer depuis la fin
juin, Moscou a lancé de sanglants
assauts, et plus encore Wagner
alors qu’Evgueni Prigogine pense
voir dans la prise de Bakhmout le
moyen de faire la preuve de la
supériorité de sa milice sur les
troupes régulières.
de se battre. Cette guerre est
moderne, c’est la qualité qui
compte, pas la quantité. Des
militaires m’ont dit : nous n’avons
pas besoin de recrues mobilisées,
qui manquent de motivation, qui
craignent la mort. » Comme beau-
coup de jeunes hommes restés à
l’arrière, Anatoly s’empresse de
répondre à une question qui ne
vient pourtant pas de lui être
posée : « Moi, si je ne me suis pas
engagé, c’est que je suis incapable
de tuer. Je viens du Donbass, de
Sievierodonetsk (actuellement
occupée). Dès 2014, j’ai connu les
soi-disant séparatistes qui pen-
saient que la Russie leur donnerait
tout… Mais pour moi, cette guerre
est moins leur faute, que celle de la
propagande russe. Cette guerre est
moins entre les peuples que de
l’impérialisme russe qui nous fait
face. »
Alexeï* a travaillé dans un
centre de recrutement. Il en
explique le fonctionnement :
« Avant leurs 18 ans, tous les jeunes
hommes ukrainiens doivent aller au
centre de recrutement. Ils passent
des examens médicaux, ils donnent
leurs coordonnées… S’ils sont
déclarés aptes, ils sont sur la liste
des mobilisables. » Alexeï ajoute :
« Aujourd’hui, la mobilisation cible
principalement les quarantenaires,
car ce sont les moins réticents. Le
problème c’est que nos listes de
mobilisables ne sont plus valides.
L’un peut avoir changé son numéro
de téléphone, un autre a peut-être
déménagé… » Afin de pallier cette
désorganisation, tout mobilisable
doit aujourd’hui déclarer à
l’administration militaire ukrai-
recrutement fonctionne par files
d’attente, explique Alexeï. En
haut, on a des vétérans ou des
hommes qui ont une formation
militaire. Puis ceux qui ont fait leur
service, ou quelques entraînements
sinon. Enfin, les non volontaires
inexpérimentés. » À demi-mot,
Alexeï reconnaît néanmoins que
ce système peut être amené à être
brusqué et que des novices
peuvent être mobilisés, notam-
ment si « une situation urgente se
présente ».
Andrii*, petite trentaine, est un
de ces novices qui a été convoqué
à un centre de recrutement. Il
Dans les faits, des dizaines de
milliers d’hommes sont déjà
tombés dans l’immense « hachoir
à viande » qu’est devenue la ville.
La stratégie de combats russe
- des assauts d’infanterie sans
presque aucune protection et donc
aucune chance de percer -
Une seule route pour sortir de Bakhmout
vers Sloviansk
Can
al D Zone contrôlée
Don onetsk
bas
s
- par l’armée
ukrainienne
Kalynivka
Bohdanivka
Artemivske
Tchassiv Yar Ivanivske
Avancée des troupes
russes au 2 mars
Sources : @Pouletvolant3 ; Openstreetmap
seule route menant
à Bakhmout sous contrôle
Klischiivka
de l’armée ukrainienne
Des soldats ukrainiens raconte : « La convocation était à
participent à un exercice 9 heures. Une vingtaine de gars
d’entraînement dans attendaient avec moi dehors. À
la région de Kherson 9 h 10, les portes s’ouvrent : entrent
(Ukraine), le 1er février. d’abord les volontaires, puis ceux
avec une expérience militaire et
enfin nous, le reste. » Chacune de
ces catégories doit se présenter à
un bureau bien spécifique. Au sein
du « reste », ceux qui ne sont ni
volontaires ni expérimentés, les
« serveur
Ivan était
profils varient : « Un homme avait
reçu une convocation après avoir
été trouvé ivre, dehors, en plein
dans un café couvre-feu, détaille Ivan. L’un
était un déplacé, l’autre n’avait
mais il avait plus ses papiers et voulait les
peur d’être refaire … » Un sergent se présente
mobilisé.
Alors,
pour sortir
à Andrii et l’amène devant une
commission. « Il m’a été demandé
comment et pourquoi la convo-
cation m’avait été remise, dit Ivan.
d’Ukraine,
il a falsifié
un document,
Puis on m’a interrogé sur ma santé,
mon travail et ma famille. Tout cela
très conformément, très poliment.
racontant Il m’a surtout été demandé si je
voulais vraiment m’engager. Une
qu’il avait autre convocation m’a été remise
un problème pour la caserne près de chez moi.
au niveau Là-bas, le commandant a pris mes
des jambes. coordonnés. Puis il m’a dit qu’ils
n’avaient pas besoin de moi. Pour
Avec ça, il a l’instant. »
pu franchir la D’autres ont bien été appelés
frontière avec mais ont refusé de se présenter.
la Pologne C’est le cas de Kostya. Actuelle-
et aller ment caché quelque part en
à Varsovie » Ukraine, son témoignage parvient
par l’intermédiaire de son fils.
l’amie d’ivan « Mon père n’est pas prorusse !,
a entraîné une progression aussi
lente que coûteuse en vies. Selon le
compte Twitter @Pouletvolant3,
les forces russes ne sont parvenues
à gagner, depuis le 1er janvier,
que 560 km², soit 10 km² par jour.
Depuis le début de la guerre en
février 2022, les services de ren-
Krasna Hora
Bakhmoutske
Paraskoviivka
Pidhorne
Yahidne
M-
03
Bakhm
outa
Bakhmout
Ivanhrad
Opytne
vers Horlivka
et Donetsk 2 km
commence le fils. Quand il a été
convoqué, mon père s’est présenté
et il a été déclaré apte à servir : il a
la quarantaine, il est en bonne santé
et, surtout, il a reçu une formation
militaire. Depuis, il se cache dans
un appartement dont il ne sort plus.
Il dit que cette guerre n’est pas la
sienne, que ce n’est pas un homme
de pays, mais d’âme. Il dit qu’il doit
rester pour aider ma mère et mon
petit frère toujours mineur. Il dit
que la famille c’est tout ce qui
importe. Mais mon père n’est pas
prorusse ! », répète une dernière
fois le fils.
Pour ne pas servir, certains
fuient même le pays - alors qu’en
théorie aucun homme entre 18 et
60 ans ne peut quitter l’Ukraine.
Ivan est un de ces exilés. À nou-
veau, son témoignage parvient
par un intermédiaire. Son amie
raconte : « Si Ivan refuse de parler
c’est moins qu’il a peur des
autorités et plutôt qu’il a un peu
honte … Il était serveur dans un
café mais il avait peur d’être
mobilisé. Alors, pour sortir
d’Ukraine, il a falsifié un document,
racontant qu’il avait un problème
au niveau des jambes. Avec ça, il a
pu franchir la frontière avec la
Pologne et aller à Varsovie. »
L’amie ne peut s’empêcher
d’ajouter : « Mais il ne profite pas
de l’aide aux réfugiés ! Là-bas, il vit
avec son propre argent. »
C’est à la frontière avec la
Moldavie que les franchissements
seignements occidentaux estiment
que les forces russes ont subi
60 000 à 70 000 morts. Les pertes
totales, en y ajoutant les blessés
et les prisonniers, s’élèveraient à
plus de 200 000. ■
T. B.
(avec afp)
vers Severodonetsk
Pokrovske
vers Popasna
Zone contrôlée
par l’armée russe…
… le 1er janvier 2023
… le 2 mars 2023
Kiev
UKRAINE
vers Debalttseve
GENYA SAVILOV/AFP
illégaux seraient les plus nom-
breux, permis par la corruption de
quelques policiers moldaves et
ukrainiens, au prix de quelques
milliers d’euros. Le 28 décembre,
trois Moldaves étaient arrêtés
par la police moldave : pour
4 500 euros par personne, ils
faisaient passer le Dniestr aux
Ukrainiens désireux de quitter le
pays.
Dans une société ukrainienne
qui a fait de l’héroïsme sa vertu
cardinale, le sujet de ceux qui
refusent la mobilisation est tabou.
Le phénomène est d’autant plus
difficilement estimable qu’il est
intimement lié à pire tabou
encore : la réalité des pertes mili-
taires ukrainiennes. Il est néan-
moins observable que, contrai-
rement à Poutine, Zelensky n’a
jamais déclaré de conscription
massive. En février 2023, le
gouvernement ukrainien a même
assoupli les règles encadrant les
sorties du territoire pour les hom-
mes – lorsque ceux-ci s’avèrent
être le seul parent ou tuteur d’un
enfant. Dans le même mois, un
projet de loi déposé à la Rada pro-
posait d’allonger à trois mois la
durée minimale de l’entraînement
avant qu’un mobilisé sans expé-
rience militaire puisse être envoyé
au front. Pour l’instant, l’excep-
tionnel élan des engagés volon-
taires d’il y a un an semble encore
tenir l’arrière. ■
* Les prénoms ont été modifiés.
 le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023

INTERNATIONAL 9

Macron exhorte
les entreprises
à investir plus
en Afrique
Les acteurs français se battent sur leur
ex-pré carré face à une concurrence de plus
en plus agressive de la Chine ou de l’Inde.
clara GalTier £@GaltierClara
Afrique La phrase s’est retrouvée dans
la plupart des médias internationaux.
« L’âge de la Françafrique est révolu », a
martelé jeudi Emmanuel Macron au Ga-
bon, lors d’une tournée de quatre jours
en Afrique qui s’achève dimanche. Pen-
dant de cette annonce diplomatique, il a
appelé à un « réveil économique français
en Afrique », devant la délégation d’en-
trepreneurs qui l’accompagne.
Le chef de l’État n’a pas été tendre à
l’endroit des entreprises françaises.
« L’Afrique est devenue une terre de
compétition », a-t-il martelé, invitant
les patrons de l’Hexagone à « aller s’y
battre ». Il fustige de mauvaises habitu-
des : une approche rentière, une négli-
gence dans l’exécution des contrats ou
un manque de considération à l’égard
des interlocuteurs locaux.
Des critiques qui font s’étrangler les
responsables patronaux. « Cela ne cor-
respond pas à la réalité, dénonce le vi-
ce-président du Medef international,
Fabrice Le Saché, selon lequel ces prati-
ques appartiennent au passé de la Fran-
çafrique. Ce changement de paradigme
prôné par le président est intégré depuis
longtemps. Les entreprises françaises se
battent sur les marchés africains tous les
jours. Si elles ne sont pas les meilleures,
elles sont éliminées. »
L’enjeu est crucial. Sur le continent le
plus jeune de la planète, considéré com-
me le futur épicentre de la croissance
mondiale, la France risque de se laisser
marginaliser. « Après les indépendances,
les relations d’affaires étaient tournées
logiquement vers les anciennes puissan-
ces coloniales comme la France, rappelle
le président du Conseil des investisseurs
français en Afrique (Cian), Étienne Gi-
ros. Puis le marché s’est ouvert à de nou-
Emmanuel Macron, jeudi, lors du One Forest Summit au Palais présidentiel de Libreville, au Gabon.
veaux acteurs. » Avec la mondialisation,
les appétits des Américains, des Chinois,
des Indiens ou des Turcs, sont venus
concurrencer les fleurons français sur
leurs anciens prés carrés. Sans parler de
la montée de l’influence russe et ses mi-
lices de Wagner déployées dans plu-
sieurs pays du continent.
Parts de marché en recul
Emmanuel Macron « ne veut plus que la
France soit le pigeon sécuritaire de
l’Afrique », commente un chef d’entre-
prise investisseur en Afrique. D’où la
nécessité de remettre l’économie au
cœur des relations franco-africaines.
Sur place, la concurrence devient de
plus en plus agressive. La montée du
sentiment antifrançais en Afrique de
l’Ouest n’arrange pas les choses. « Cela
ne gêne pas trop les entreprises déjà pré-
sentes sur le continent, mais il est vrai
que cela crée en France une atmosphère
peu favorable à l’investissement », affir-
me Étienne Giros.
Résultat, la France perd du terrain
depuis vingt ans dans ses échanges
commerciaux avec l’Afrique. Sa part de
marché a décliné de 10,6 % à 4,4 %, se-
lon l’assureur crédit Coface. Dans le
même temps, la Chine, est passée de
3 % à 18,8 %. Partenaire dominant his-
torique, l’Hexagone a donc perdu sa
place privilégiée. « Mais sur un marché
africain qui a quadruplé », nuance Fa-
brice Le Saché. Sur la même période,
l’activité de la France a progressé en
valeur absolue de 10 %.
« Face à une concurrence, qui plus est,
moins soumise aux réglementations que
les Français, rappelle Fabrice Le Saché.
LUDOVIC MARIN/AFP
Paris et Bangui
renouent
le dialogue
Le président français Emmanuel
Macron a rencontré son homologue
centrafricain, Faustin-Archange
Touadéra, jeudi à Libreville en marge
d’un sommet sur la préservation
des forêts tropicales. « Ce rendez-
vous s’est tenu à demande des
Centrafricains », insiste une source
diplomatique française. Ce dialogue
peut passer pour surprenant
alors que les relations entre Paris
et Bangui sont très froides
depuis l’installation en Centrafrique
des mercenaires de Wagner, fin 2018.
Selon cette même source, une partie

Au Cambodge, l’opposant Kem

Vous croyez que les Russes s’inquiètent de l’entourage de Faustin-Archange
de la responsabilité sociale et environne- Touadéra chercherait à renouer
mentale dans les mines africaines ? » Les avec la France pour limiter l’influence
Chinois, eux aussi, ont moins de pu- russe, qu’il considère comme un peu

Sokha écope de 27 ans de prison

Le régime du premier ministre, Hun Sen, au pouvoir depuis trente ans,
resserre l’étau à quatre mois des élections législatives.
François camps £@FrancoisCamps
Phnom Penh
Asie C’est par une porte dérobée de la
cour municipale de Phnom Penh que
Kem Sokha a été écarté de l’arène politi-
que cambodgienne. Après trois ans d’un
procès-fleuve ponctué de 66 audiences,
l’opposant de 69 ans a été condamné,
vendredi, à 27 ans de réclusion pour
« trahison ».
À la suite d’une courte audience, Kem
terminée. La cour lui a interdit de com-
muniquer avec qui que ce soit, en dehors
des quelques membres de sa famille et
de ses avocats. Le tribunal lui reproche
d’avoir fomenté une « révolution de cou-
leur dans le but de renverser le gouverne-
ment », en collusion « avec des pays
étrangers ».
Figure de l’opposition politique au
Cambodge, Kem Sokha incarne désor-
mais le musellement des voix critiques
orchestré par le premier ministre, Hun
Sen, au pouvoir depuis trente-huit ans.
même pas cité les pays qui auraient soi-di-
sant soutenu (mon client). On ne peut pas
accepter cette décision », a-t-il déclaré,
précisant qu’il comptait faire appel.
Les chancelleries occidentales ont fait
part de leurs inquiétudes face au dur-
cissement du régime cambodgien. Après
l’audience, l’ambassadeur américain
Patrick Murphy a dénoncé devant le
tribunal une « conspiration fabriquée
de toutes pièces » visant à réduire Kem
Sokha au « silence ». Dans un commu-
niqué, l’Union européenne a quant à elle
deurs pour s’approprier les ressources
locales. « Ils arrivent avec des finance-
ments à 100 %, ajoute Étienne Giros.
Nous, on propose des financements mul-
tilatéraux avec des bailleurs de fonds ou
la Banque mondiale. Cela complexifie les
choses. »
Les entreprises françaises, elles, pri-
vilégient les implantations locales.
« Quand une société comme Orange a
plusieurs millions de clients en Afrique
via ses filiales locales, ces chiffres ne
rentrent pas dans les statistiques doua-
nières sur lesquelles on se base pour me-
surer la présence française. » De même,
le groupe de distribution CFAO réalise
88 % de son chiffre d’affaires en Afri-
que à travers ses succursales sur le
continent. ■
envahissante. La République
centrafricaine veut « retisser
les liens de confiance » avec la
France, avait confirmé en janvier
son nouvel ambassadeur à Paris,
Flavien Mbata. Rien n’a officiellement
filtré de cet entretien. Mais la France,
qui réfléchit avec les États-Unis
et le Rwanda à une stratégie
pour endiguer Wagner en Afrique,
souhaiterait un geste concret
de la part des Centrafricains.
Les trois États voudraient voir
des troupes rwandaises s’installer
sur l’aéroport de Bangui, sur le site
déserté en décembre dernier
par les 47 derniers militaires français
déployés. T. B.

Sokha a été tenu à bonne distance du
parterre de journalistes et de soutiens
rassemblés devant le tribunal, coupant
court à toute possibilité de prise de paro-
le. Un véhicule l’a emmené à son domici-
le, où il est désormais assigné à résidence
et placé sous contrôle judiciaire. « Je suis
choquée et j’ai de la pitié pour lui, soupirait
une sympathisante devant la cour à la
suite du verdict. S’il est un jour libéré et s’il
crée un nouveau parti, je le soutiendrai
sans hésiter. »
Quelques minutes plus tôt, le juge Koy
Sao annonçait la lourde peine retenue
contre l’ancien dirigeant du Parti du sau-
vetage national du Cambodge (PSNC), la
principale formation d’opposition de
l’histoire récente cambodgienne, qui a
été dissoute en 2017.
Kem Sokha a également été privé de
l’ensemble de ses droits civiques et banni
de la vie politique pour une durée indé-
Il avait été arrêté en septembre 2017,
quelques mois avant les législatives de
2018, pour soupçon de trahison et placé
en détention provisoire, puis assigné à
résidence.
« Ni juste ni équitable »
Deux mois après son arrestation, le parti
qu’il avait cocréé avec l’opposant
Sam Rainsy (en exil en France depuis
2015) était dissous par la Cour suprême.
Le PSNC rassemblait pourtant 44,7 %
des sièges à l’Assemblée nationale. Sans
réelle opposition, le Parti du peuple cam-
bodgien d’Hun Sen avait alors remporté
l’ensemble des sièges aux élections de
2018 faisant de facto du Cambodge un
pays à parti unique.
Après le verdict, Ang Udom, l’un des
avocats de Kem Sokha, a dénoncé un
procès « ni juste ni équitable » ainsi qu’un
manque criant de preuves. « Ils n’ont
RTCURIAL
partagé sa « grave préoccupation » et re-
grette « l’utilisation de la justice pour li-
miter la marge de manœuvre des oppo-
sants politiques ».
Mais Hun Sen « n’entend même pas »
ces critiques occidentales, note Sophie
Boisseau du Rocher, spécialiste de l’Asie
du Sud-Est à l’Institut français des rela-
tions internationales. « Son régime est
HERMÈS
soutenu par le parrain chinois, qui exporte Sac Birkin 30, 2016
sans réserve ses propres méthodes politi- Vendu 41 984 €
ques, et notamment la traque des oppo-
sants », note-t-elle, soulignant la perte
d’influence occidentale dans cette partie
du globe.
Le verdict du procès Sokha intervient
quatre mois seulement avant les prochai-
nes législatives, et permet au régime de
restreindre encore davantage les libertés
civiles. Mi-février déjà, le principal mé-
dia indépendant du pays, Voice of Demo-
cracy, était fermé en quelques jours sur
décision expresse de l’homme fort.
Pour les petits partis politiques cam-
bodgiens, ce verdict sévère donne le ton
de la campagne à venir lors de laquelle ils
vont peiner à faire entendre leur voix.
« Ce n’est vraiment pas un bon signe, c’est
très préoccupant », commente Yeng Vi-
rak, président du Grassroot Democratic
Party. Plus timide, le Parti de la bougie, la
nouvelle force d’opposition montante ESTIMATIONS GRATUITES
& CONFIDENTIELLES
dont les dirigeants sont dans le collima-
teur de la justice, s’est simplement dit
« très attristé » dans un communiqué.
« Cette condamnation montre la crainte
du pouvoir face à une opposition construi-
Hermès & Luxury bags
te, sa capacité à dépasser des lignes rou-
ges et à ignorer superbement le droit et les Vente aux enchères à Monaco en préparation
libertés fondamentales comme la liberté Juillet 2023 - Clôture du catalogue fin mai
d’expression, conclut Sophie Boisseau du
Rocher. Hun Sen se comporte comme un
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A

Kem Sokha quitte son domicile, vendredi, pour se rendre au tribunal municipal souverain de droit divin qui estime ne pas
de Phnom Penh pour le verdict de son procès. CINDY LIU/REUTERS avoir à se justifier. » ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
10 InternatIonal
Cette « affaire
médiateur »
qui fait tanguer
le PS espagnol
Pots-de-vin, soirées avec prostituées, alcool
et drogues… Le scandale fragilise le PSOE
à cent jours des municipales et régionales.
Mathieu de taillac £@mdetaillac
Madrid
espagne Visite guidée du Congrès des
députés - la Chambre basse du Parle-
ment espagnol -, passage au quartier
général de la Garde civile, dîner dans
un grand restaurant, puis soirée à
l’hôtel ou dans une maison close avec
prostituées de luxe, alcool, cocaïne et
Viagra… Voilà le programme des jour-
nées préparées en 2020 et 2021 par une
organisation qui, selon les enquêteurs,
négociait des pots-de-vin contre des
traitements de faveur à des chefs
d’entreprise et proposait à des parle-
mentaires de profiter des largesses de
ces derniers.
Ce scandale éclabousse aujourd’hui le
Parti socialiste (PSOE), la formation du
président du gouvernement espagnol,
Pedro Sanchez, en pleine année élec-
torale. La fine équipe était menée par
un chef d’entreprise condamné par le
passé pour escroquerie et dont la fonc-
tion au sein de l’organisation a donné
son nom au dossier - « l’affaire média-
teur » - ; un général de la Garde civile,
surnommé « Papa », qui cachait
60 000 euros dans des boîtes à chaus-
sures ; et un député socialiste des îles
Canaries, Juan Bernardo Fuentes
Curbelo, dit « Tito Berni », ou encore
« Oncle Berni », photographié à demi
nu en compagnie de prostituées. Les in-
vités étaient aussi ceux qui régalaient :
les chefs d’entreprise, essentiellement
liés à l’élevage et à la production de fro-
mages des Canaries. Des dirigeants
prêts à se délester de quelques milliers
d’euros pourvu que l’on les aide, en
échange, à décrocher une subvention, à
faire disparaître une amende ou à pous-
ser leur dossier sur un marché public.
L’arrestation, le 14 février dernier,
d’une douzaine de suspects accusés de
corruption, de trafic d’influence et
d’appartenance à une organisation de
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A
malfaiteurs, a donné lieu à un enchaî-
nement de révélations, « feuilleton-
nées » dans la presse au gré des témoi-
gnages et des indiscrétions des parties
ayant accès au dossier. « Les chefs d’en-
treprise payaient tout. Les prostituées,
les repas, l’alcool », a déclaré le « mé-
diateur », Antonio Navarro Tacoronte,
lors d’une interview diffusée jeudi par
okdiario.com, un média on line
condamné par le passé pour publication
de fausses informations. Il ajoute que
« les filles » étaient aussi chargées d’ap-
porter les commandes particulières des
participants à ces rencontres : cocaïne,
marihuana ou Viagra. Des photos com-
“ J’espère que Sanchez
a la possibilité de
démontrer qu’il n’a jamais
rien eu à voir avec les
affaires de « Tito Berni »
et présidente de la région de Madrid
”
isaBel diaz ayuso, MeMBre du parti populaire
promettantes apparaissent jour après
jour dans les médias. On y voit les diri-
geants de la bande avachis dans les ca-
napés d’un club de strip-tease, un indi-
vidu en peignoir et en chemise blanche
collant son nez, une narine bouchée, à
une table à chevet, ou deux ou trois
hommes torse nu accompagnant une
jeune femme en sous-vêtements…
Le système était bien rodé. Pour ac-
céder aux bénéfices promis par l’orga-
nisation, il fallait d’abord effectuer un
versement de 5 000 euros à une asso-
ciation sportive présidée par le député
socialiste aujourd’hui démis de ses
fonctions, Juan Bernardo Fuentes
Curbelo. Les chefs d’entreprise de-
vaient ensuite payer sans sourciller de
nouveaux pots-de-vin. Argent liquide,
additions salées de soirées festives ou
cadeaux matériels, les options de paie-
ment étaient nombreuses…
oberman@artcurial.com
Accusé de corruption, l’ancien député socialiste des îles Canaries, Juan Bernardo Fuentes Curbelo, dit « Tito Berni » (ici, avec son avocat),
quitte le tribunal de Santa Cruz de Tenerife, le 22 février. ramón de la rocha/eFe
Le « médiateur » a notamment
contacté l’un des financiers habituels
de ce cercle sulfureux pour se plaindre
de l’annulation d’une carte bancaire
préchargée : « Tu me prends pour un
con, tu as bloqué la carte du “Papa” ! ».
Selon la juge qui a décidé l’envoi en
détention préventive du général
Francisco Espinosa Navas, ce dernier
s’est assuré personnellement que les
contrats qu’il avait négociés au profit de
ce chef d’entreprise n’arrivent pas à
bon port. Lors de l’entretien à
okdiario.com, Antonio Navarro brandit
des photos de députés socialistes,
hommes et femmes, et indique qu’ils
étaient présents lors de repas dans des
restaurants de luxe pour les uns ou aux
rencontres avec les prostituées pour les
autres. À El Mundo, il parle d’une
« organisation mafieuse » présente au
Olaf Scholz à Washington
en allié modèle de l’Amérique
Le chancelier allemand, contraint par la guerre en Ukraine d’évoluer,
comme son pays, tient aussi à rappeler le rôle des États-Unis en Europe.
david PhiliPPot
Berlin
Diplomatie Le message d’unité a été
délivré dans le huis clos de la Maison-
Blanche. Sans honneurs militaires,
sans délégation de journalistes, sans
conférence de presse et même sans
conseillers, la deuxième rencontre en-
tre le président Biden et le chancelier
Scholz, vendredi à Washington, s’est
cantonnée à une « réunion de travail »
de deux heures. « Une discussion de
fond en face-à-face, écrit Der Spiegel
pour savoir à quelles conditions un ces-
sez-le-feu et, éventuellement, des né-
gociations de paix pourraient être envi-
sagées, les prochaines étapes sur
l’approvisionnement de l’Ukraine en ar-
mes et en munitions. Avec la perspective
à long terme de son éventuelle adhésion
à l’Otan. » À la tribune du Bundestag,
jeudi, Olaf Scholz a loué une « relation
transatlantique plus étroite et plus
confiante que jamais ». La une du ma-
gazine Stern salue « le grand frère amé-
ricain sur lequel on peut compter », sous
un dessin de Joe Biden tenant un Olaf
Scholz à taille d’enfant par la main.
Des tensions récentes sont toutefois
venues parasiter le partenariat. Sur
l’Inflation Reduction Act, le gigantesque
programme de subventions des Améri-
cains pour les technologies vertes, ou
les crispations autour de l’envoi en
Ukraine des panzers Leopard et des
chars américains Abrams. Le conseiller
à la défense de la Maison-Blanche, Jake
Sullivan, a annoncé que ces tanks, « mal
adaptés au terrain ukrainien », ne seront
finalement pas envoyés cette année, et
que Biden n’avait approuvé leur livrai-
son « que dans l’intérêt de l’unité de
l’Alliance et pour s’assurer que l’Ukraine
obtienne ce qu’elle voulait ». Une version
démentie par l’entourage de Scholz. « Il
y a un besoin de discussion », commente
la présidente de la commission défense
au Bundestag, Marie-Agnès Strack
Zimmermann. « C’est un message
sein du gouvernement régional des
Canaries et du gouvernement central.
« Juan Bernardo pouvait appeler un
secrétaire d’État et lui demander ce qu’il
voulait », affirme-t-il.
L’exécutif fait valoir la réaction
rapide du PSOE. Le journal El Pais, pro-
che des socialistes, a ainsi reconstitué le
dialogue musclé entre les responsables
du groupe parlementaire et Juan
Bernardo Fuentes Curbelo (« Tito
Berni ») visant à le forcer à abandonner
son siège, dès les arrestations du
14 février, auxquelles il échappe par la
grâce de son immunité parlementaire.
Le Parti populaire (PP, droite), prin-
cipale formation de l’opposition, voit
dans le scandale une autoroute vers
de prochains triomphes électoraux.
L’Espagne est à cent jours des élections
municipales et régionales programmées
destiné à l’électorat américain », analyse
Ronja Kempin, experte à l’Institut alle-
mand pour la politique internationale
(SWP), « pour répondre aux critiques,
même au sein des démocrates, sur un en-
gagement trop important en Europe alors
que la principale menace, vue des USA,
est chinoise ». Le chancelier a d’ailleurs
donné des gages devant le Parlement
allemand en demandant à Pékin « de ne
pas livrer d’armes à l’agresseur russe ».
« Changement d’époque »
Cette deuxième visite de Scholz à
Washington coïncide avec le premier
anniversaire de la première, rendue
juste avant le discours du changement
d’époque, un « Zeitenwende » porteur
de promesses qui n’ont pas toujours
été tenues. Le conservateur Friedrich
Merz reproche à Olaf Scholz de ne
« faire que le minimum » au soutien de
l’Ukraine. « Le chancelier hésite, tergi-
verse et ne prend des décisions que sous
la pression », ajoute le chef de l’oppo-
sition. Des reproches rejetés par le
social-démocrate Nils Schmid : « Il y a
un an, on a livré 5 000 casques à
Le chancelier allemand, Olaf Scholz (à gauche), et le président américain Joe Biden,
en conférence de presse à la Maison-Blanche (Washington), le 7 février 2022.
pour le 28 mai, et à huit ou neuf mois
des législatives, prévues pour la fin de
l’année. « J’espère que Sanchez a la
possibilité de démontrer qu’il n’a jamais
rien eu à voir avec les affaires de “Tito
Berni” », a ainsi lancé Isabel Diaz
Ayuso. La va-t-en-guerre présidente
de la région de Madrid, candidate à sa
réélection, s’est même risquée à un
pronostic : « “Tito Berni” va faire
tomber ce gouvernement. » Une source
au sein du parti de droite se réjouissait
en ces termes auprès du journal
Elconfidencial.com : « Quoi qu’ils
fassent, ils vont faire notre campagne.
Avec “Tito Berni”, ça va être un raz-de-
marée pour nous. »
Pour l’heure, le Parti populaire (PP)
espère convaincre d’autres groupes de
voter la mise en place d’une commis-
sion d’enquête parlementaire. ■
l’armée ukrainienne. Aujourd’hui, nous
sommes le deuxième contributeur aux
livraisons d’armes. Cela montre le
chemin parcouru par notre gouverne-
ment et par la société allemande ». « Un
tabou a été brisé », confirme Ronja
Kempin.
Sous l’effet des coups de boutoir de
la guerre à 1 500 kilomètres de ses
frontières, l’Allemagne, longtemps
paralysée par sa responsabilité histo-
rique, opère sa mue. À son rythme. Le
fonds spécial de 100 milliards, ajouté
au budget courant du ministère de la
Défense, lui permet seulement de se
rapprocher de l’objectif des dépenses
militaires de 2 % fixé par l’Otan. Selon
un sondage ARD, la moitié des Alle-
mands (47 %) soutient la livraison
d’armes à l’Ukraine. Mais la meilleure
preuve du « changement d’époque » se
traduit par la popularité de Boris
Pistorius caracolant en tête des sonda-
ges de satisfaction, devant les écologis-
tes Baerbock et Habeck. La popularité
du ministre de la Défense, souvent
considéré comme un poste ingrat en
Allemagne, est plus qu’un symbole. ■
Brendan SmIaloWSKI/aFP

Société
À la convention citoyenne sur la fin
de vie, le malaise s’installe
Une partie des citoyens tirés au sort s’inquiète du tour que prend la consultation et s’estime manipulée.
agnès leclair £@AgnesLeclaire
et Paul sugy £@PaulSugy
fin de vie 50 nuances d’opinions
sur la fin de vie réduites à quelques
chiffres… Les votes sur l’aide active
à mourir, effectués lors de la der-
nière session de la convention ci-
toyenne, ont semé le trouble chez
une partie des participants. D’après
les résultats, diffusés en direct par
le Conseil économique social et en-
vironnemental (Cese) le 19 février,
une écrasante majorité des citoyens
se sont prononcés en faveur de
l’ouverture du suicide assisté (72 %)
ou de l’euthanasie (66 %). Les votes
ont également fait ressortir un avis
globalement favorable à l’ouvertu-
re d’une aide active aux mineurs,
sujet pour le moins polémique.
Alors que ces résultats ont sans
surprise été repris par les médias,
plus d’une quarantaine de citoyens
(environ un quart des 184 qui ont
été tirés au sort) s’en sont émus
dans une lettre adressée au comité
de gouvernance de la convention
citoyenne et à sa présidente, Claire
Thoury, membre du Cese. Dans
une première version de ce docu-
ment, consulté par Le Figaro, les si-
gnataires expriment notamment
leur regret de voir publiés les résul-
tats de ce vote provisoire. Ils sont,
selon eux, « à prendre avec beau-
coup de précautions », compte tenu
de maladresses et de biais ayant
entraîné des « erreurs de vote ». La
version finale de cette lettre insiste :
« Il s’agissait d’un vote sur les idées
et non sur l’écriture précise de pro-
positions. Les questions ont pu évo-
luer pendant la session, pouvant en-
traîner de la confusion parfois, mais
cela n’enlève en rien la valeur et la
solidité de nos travaux. »
“
Il y a eu une
confusion entre les
personnes qui estiment
qu’il faudrait faire
évoluer le cadre légal
sur la fin de vie et les
personnes favorables
à l’ouverture à l’aide
active à mourir
Soline
” évoquer une instrumentalisation.
Le compte rendu publié par le
Cese dans la foulée n’évoque par
ailleurs pas le consensus qui s’est
dégagé parmi les citoyens pour
renforcer l’offre des soins palliatifs
en France, déplorent des partici-
pants. Un sujet auquel ils ont
pourtant accordé « autant d’im-
portance qu’à l’aide médicale à
mourir ». Une omission qu’ils ont
demandée au comité de gouver-
nance de rectifier via un commu-
niqué de presse. Pour l’heure, leur
demande est restée lettre morte.
« Cela a été très dur d’entendre
dans les médias que les citoyens
avaient tranché sur l’aide active à
mourir alors que les travaux ne sont
pas terminés. On se retrouve à por-
ter le poids de la responsabilité d’un
changement de la loi mais ce n’est
pas le travail qu’on nous a confié,
explique Soline, une des signatai-
res. Des chiffres faux ont aussi été
repris : il y a eu une confusion entre
les personnes qui estiment qu’il fau-
drait faire évoluer le cadre légal sur
la fin de vie et les personnes favora-
bles à l’ouverture à l’aide active à
mourir. »
Claire Thoury, qui défend ces
votes « de travail » intermédiaires,
reconnaît cependant que leur mé-
diatisation a pu être « déstabilisan-
te » pour les citoyens. « C’était un
point d’étape mais il y a eu des rac-
courcis. Les travaux ne sont pas ter-
minés du tout… », dit-elle. Une ex-
plication de texte avec les citoyens
était au menu de la nouvelle session
de ce week-end. « Ce qui a créé une
tension, c’est la reprise médiatique
de ces résultats. Il y a des mécon-
tents mais on ne peut pas générali-
ser », estime pour sa part Blaise, ar-
rivé à la convention sans avis figé
sur la fin de vie.
Alors qu’une grande partie des
citoyens communiquent entre eux
sur un groupe WhatsApp, certains
ont créé un groupe « dissident »
pour organiser la contestation
après cet émoi sur les votes. « Pour
le moment, on essaie de faire enten-
dre nos doutes sur certaines des mo-
dalités de la consultation. Si ça ne
suffit pas, il faudra que l’on prenne
les devants », résume Volcy, un ci-
toyen « inquiet » du « manque
d’équilibre » du comité de gouver-
nance de la convention.
D’autres vont plus loin, jusqu’à
« J’ai l’impression que les dés sont
pipés, confie au Figaro l’une des
participantes de la convention
sur la fin de vie. Et je ne suis pas la
seule : depuis quelques sessions, di-
sons qu’il y a une gêne qui s’est ins-
tallée… Alors, à présent, on va réflé-
chir à se faire entendre autrement. »
Initialement, cette citoyenne était
pourtant favorable à l’ouverture
du suicide assisté, du moins dans
certains cas : « Je faisais confiance
au libre arbitre des gens », expli-
que-t-elle, confessant n’apparte-
nir à aucune école philosophique
ou spirituelle qui lui donnerait un
avis tranché sur la fin de vie. Mais
petit à petit, des « couacs » et des
« incompréhensions » se sont ins-
tallés dans les échanges, dit-elle.
Au point de semer un doute : « Par
moments, j’ai l’impression que c’est
de la manipulation. »
Plusieurs de ces citoyens
confient au Figaro un sentiment si-
milaire : tout se passe comme si
l’orientation des débats et des déli-
bérations devait tendre vers un
changement de la loi à tout prix. Et
ce, dès la question posée aux ci-
toyens par la première ministre
pour guider leurs travaux : « Le ca-
dre d’accompagnement de la fin de
vie répond-il aux différentes situa-
tions rencontrées ? » Naturelle-
ment, la plupart d’entre eux (140
sur les 167 qui ont participé au
vote) ont répondu par la négative.
« Nous avons demandé que la ques-
tion soit précisée, ce qui nous a été
refusé : pour tout un tas de raisons, il
est difficile de soutenir qu’un cadre
existant constitue une réponse par-
faite à toutes les situations, donc on
ne pouvait que répondre “non” à
cette question », ajoute Volcy qui,
Des citoyens désireux jusqu’ici, se disait favorable à l’aide
d’être mieux renseignés active à mourir « comme une possi-
sur l’offre de soins bilité laissée ouverte, mais pas com-
palliatifs, sont allés me une solution ».
à la rencontre d’équipes Le déroulé de la convention l’a
soignantes sur le terrain
lentement poussé dans le camp des
pour se confronter à la
« anti ». « Les votes ont donné une
réalité de la prise en
charge de la fin de vie. impression manichéenne, qui ne
Aurélien lAudy/ rend pas justice à la qualité de nos
débats », poursuit Volcy. « Les
PHOTOPQr/l’uniOn
de reiMS/MAXPPP possibilités ont été schématisées en
arbre, qui prévoyait d’ouvrir la pos-
sibilité de l’aide active à mourir ou
de ne pas le faire. Soit c’était la so-
lution, soit ça ne l’était pas, mais
nous ne pouvions pas la restreindre
à certains cas exceptionnels »,
s’agace-t-il. « Des citoyens se de-
mandent s’ils ne sont pas manipulés
par le Cese, se posent des questions
sur l’orientation imposée, confirme
Pierre (le prénom a été modifié à sa
demande). Certains d’entre nous
pensent que les votes sont conçus
pour nous orienter vers l’aide active
à mourir. Cela fait passer sous si-
lence tout le travail qui a été fait jus-
qu’à maintenant pour améliorer la
loi actuelle. Il ne reste plus que trois
séances et on va encore beaucoup
travailler sur l’euthanasie et le sui-
cide assisté, notamment pour des
personnes qui n’ont plus la possibi-
lité de s’exprimer… Ces sujets pren-
nent le dessus. »
Les débats ont-ils trop porté sur
l’euthanasie et le suicide assisté ?
Lors du dernier week-end de tra-
vail, les organisateurs ont en tout
cas été pris de court par un afflux de
citoyens désireux de travailler sur
la montée en puissance des soins
palliatifs. Le samedi, alors que les
participants devaient se diviser en
deux groupes - l’un sur l’aide acti-
ve à mourir et l’autre sur les propo-
sitions pour améliorer le cadre ac-
tuel de la loi – le second groupe a
réuni bien plus de citoyens que
prévu. Une cinquantaine environ.
« Le Cese n’avait pas prévu que
nous serions si nombreux et aucune
salle n’était assez grande pour nous
accueillir. Nous sommes donc allés
travailler dans l’amphithéâtre puis il
a fallu le libérer. Nous nous sommes
retrouvés à discuter sur un palier, ce
qui n’était pas évident avec autant
de monde », raconte Pierre. Le vote
du lendemain sur l’aide active à
mourir a été d’autant plus mal vécu
que l’amélioration de la loi actuelle
a suscité un vif intérêt…
Malgré des « erreurs » et des
« boulettes », Soline refuse pour sa
le figaro
part de « rentrer dans une théorie du
complot ». Cette jeune femme, qui
s’est forgé une opinion défavorable
à l’aide active à mourir au fil des
échanges, reconnaît qu’il est « très
complexe de composer un débat avec
autant de participants ». Elle note
aussi la bonne volonté des organi-
sateurs pour « prendre en compte
nos remarques ». « Nos échanges
sont très riches et respectueux, dit-
elle. C’est aussi pour cela qu’il est
difficile de les voir caricaturés. »
« Nous ne sommes pas dans une
quête de consensus à tout prix, ex-
plique la présidente du comité de
gouvernance Claire Thoury, mais
nous préférons permettre, sur cha-
que sujet, de donner les arguments
pour et contre, plutôt que d’isoler
dans une explication à part les argu-
ments des citoyens hostiles à toute
évolution du droit. »
“ Certains d’entre nous
pensent que les votes
sont conçus pour nous
orienter vers l’aide
active à mourir. Cela fait
passer sous silence tout
le travail qui a été fait
jusqu’à maintenant
pour améliorer
la loi actuelle
Pierre
” fectués à mi-parcours, pour « cali-
À plusieurs reprises, des citoyens
ont également demandé d’être
mieux renseignés sur l’offre de
soins palliatifs. Faute d’obtenir une
visite groupée dans un centre, cer-
tains s’y sont rendus de leur côté ou
par petits groupes. Cette semaine
encore, des citoyens sont allés à la
rencontre d’équipes soignantes sur
le terrain pour se confronter à la
réalité de la prise en charge de la fin
de vie. Une démarche à mille lieues
des votes binaires semblant figer
les points de vue. D’autres ont de-
mandé d’auditionner l’avocat
Erwan Le Morhedec, auteur de Fin
de vie en République (Éditions du
Cerf) et partisan du statu quo et
d’un renforcement des soins pallia-
tifs. Sans succès. Le comité de gou-
vernance a décliné la proposition
d’entendre cet intellectuel engagé
notoirement contre l’ouverture de
l’aide active à mourir et dans le mi-
lieu des soins palliatifs.
samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
11
Au sein du collège des garants,
désignés par le Cese pour attester
de la bonne tenue des échanges et
de leurs retranscriptions, l’im-
pression que les réflexions des ci-
toyens sur l’offre de soins palliatifs
n’ont pas été assez soulignées
transparaît aussi. « Le compte ren-
du médiatique qui a été fait jusqu’ici
de ces débats ne restitue pas toute
l’importance accordée à cette di-
mension de la question », suggère
l’un d’entre eux, le professeur de
philosophie politique Bernard Re-
ber, directeur de recherche au
CNRS. Le mécontentement de cer-
tains des citoyens n’a pas totale-
ment échappé à la vigilance du col-
lège des garants, qui soulignait
dans un avis rendu le 18 janvier
qu’un premier vote à l’issue de la
troisième session avait « été pré-
senté de façon prêtant à confusion et
sur une question mal formulée ».
« Cet incident met en jeu les princi-
pes de sincérité, de transparence et
de respect de la parole des ci-
toyens », ajoutent-ils. En l’espèce,
ce premier vote avait été présenté
aux citoyens comme purement ex-
périmental, afin de tester le méca-
nisme. À l’issue, plusieurs partici-
pants ont tenté sans succès de
demander qu’il soit annulé ou que
l’on revote.
Bernard Reber justifie néan-
moins le principe de ces votes ef-
brer » l’importance accordée à
chaque piste de réflexion, et adap-
ter ainsi en fonction le programme
des sessions suivantes et l’architec-
ture générale du rapport final que
devra remettre la convention ci-
toyenne. Le collège des garants
souligne néanmoins dans un nou-
vel avis publié cette semaine que
« la production des arguments (et) la
formulation des questions de vote ont
parfois été perfectibles ».
Ce week-end déjà, de nouveaux
votes sont au programme, notam-
ment sur les modalités d’une
éventuelle aide active à mourir.
Mais cette fois, les citoyens seront
davantage consultés sur leur or-
ganisation. La neuvième et der-
nière session de travail de la
convention citoyenne verra enfin
un vote final figer le pourcentage
des pour et des contre sur les dif-
férentes propositions. Reste à sa-
voir comment ces nuances trou-
A
veront leur place dans le message
délivré au grand public. ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
12 Société
L’inquiétant boom
de la chirurgie
et de la médecine
esthétiques
chez les jeunes
Sur les réseaux sociaux, influenceurs et filtres
donnent envie aux moins de 35 ans de céder
au bistouri ou à l’aiguille. À leurs risques et périls.
aude bariéty £@AudeBariety
jeunesse Liposuccions, rhinoplas-
ties, augmentations mammaires…
Les moins de 35 ans sont désormais
les champions de la chirurgie esthé-
tique. Autrefois associées dans
l’imaginaire collectif aux personnes
souhaitant lutter contre les signes du
vieillissement, ces pratiques sédui-
sent de plus en plus de jeunes. « Une
génération bistouri est en train de
naître », assure Elsa Mari, journaliste
au Parisien et coauteur, avec sa
consœur Ariane Riou, d’un édifiant
livre sur le sujet (Génération bistouri.
Enquête sur les ravages de la chirur-
gie esthétique chez les jeunes, JC Lat-
tès). Au-delà de la chirurgie, c’est
aussi et surtout la médecine esthéti-
que qui prend son envol chez les
moins de 35 ans, comme en témoi-
gne le succès des injections de Botox
ou d’acide hyaluronique.
« Depuis quelques années, la
chirurgie et la médecine esthétiques
n’ont plus de frontières sociales. Elles
se sont immiscées dans tous les mi-
lieux. Avant, c’était plutôt réservé à
une classe aisée. Désormais, le bis-
touri s’est popularisé dans les ban-
lieues, notamment parce qu’on met
des solutions à disposition de ceux qui
ont moins de moyens, par exemple
avec la chirurgie low cost en Turquie
ou en Tunisie, souligne Elsa Mari. Les
femmes ne sont plus les seules concer-
nées, les hommes s’y mettent aussi :
greffe de cheveux, liposuccion, élar-
gissement du pénis… » Les praticiens
interrogés par Le Figaro le confir-
ment : ils voient défiler de plus en
plus de jeunes. « C’est indéniable »,
abonde le Dr Jacques Saboye, secré-
taire général de la Société française
de chirurgie plastique, reconstruc-
trice et esthétique (SoFCPRE).
« Il y a celles et ceux qui ont un
complexe extrêmement profond, qui
les empêche de s’aimer, de s’accepter,
et qui évoquent un “besoin”. Et les
autres, qui ont des complexes provo-
qués par les normes tyrannisantes de
beauté en vogue actuellement, et qui
parlent d’“envie” », résume Elsa
Mari. « La caricature est facile. Mais
nous avons des patients qui ont de
vraies souffrances morales et qui, en
sortant de chez nous, sont beaucoup
mieux dans leur peau », insiste le
Dr Saboye. Et de citer en exemple la
réduction mammaire d’une lycéen-
ne surnommée au quotidien « Air-
bag » en raison de sa forte poitrine et
qui avait arrêté d’aller en cours. « À
l’inverse, parfois, je fais face à des de-
mandes délirantes, des patients psy-
chologiquement fragiles ou qui ne
réalisent pas bien ce qui est en jeu.
Dans ce cas, je leur dis non. Mais ce
n’est pas toujours simple. »
Les profils de ceux qui optent pour
le bistouri sont très divers. Après
plus de dix ans à « y songer », Char-
lène, 32 ans, a rendez-vous lundi
pour une rhinoplastie dans une cli-
nique montpelliéraine. « Mon nez
n’est pas un gros complexe, mais il
m’a toujours dérangée. Je me suis dit
que je me sentirais mieux si j’enlevais
la bosse et qu’il était un peu plus
court », explique la jeune femme.
Après avoir « épluché la liste des
chirurgiens de Montpellier », elle opte
pour un praticien spécialisé dans les
rhinoplasties. Son site et son compte
Instagram, très fournis, la « rassu-
A
rent ». Une première consultation en
décembre, un temps de réflexion,
une deuxième consultation en jan-
vier, et rendez-vous est pris pour
début mars. « Je dois y être à 7 heures
du matin, et je sortirai le soir-même.
Il faudra que je porte un pansement
pendant une semaine. On a choisi ex-
près cette date parce qu’en ce moment
je ne travaille pas, donc c’est par-
fait ! » Le projet de Charlène a ce-
pendant un coût, loin d’être anodin :
6 500 euros. Une somme qu’elle a
pour moitié économisée pendant
plusieurs années, pour moitié em-
pruntée à la banque.
Ninon, 20 ans, s’est quant à elle
fait opérer de la poitrine à 18 ans et
demi. « C’était un complexe que je
traînais depuis l’adolescence. Je suis
un peu enveloppée, j’avais des formes
partout sauf en haut. Je trouvais ça
difforme, je n’aimais pas quand je me
regardais », raconte l’étudiante. À sa
majorité, elle se lance dans des re-
cherches, contacte un chirurgien, le
voit à deux reprises en avril et juin
2021. « On a fixé une date et c’est là
que mes parents ont pris les choses au
sérieux. Avant, ils me disaient : “Tu es
trop jeune, tu ne vas pas faire ça !” Ils
ne comprenaient pas que j’avais un
vrai mal-être. » En septembre 2021,
Ninon pousse la porte d’une clinique
parisienne. Elle en sort le lende-
main, 3 800 euros en moins, deux
tailles de bonnet en plus. « J’en suis
très contente, je ne regrette pas du
tout », souligne la jeune fille.
L’opposition ferme
de certains parents
Charlène et Ninon ont franchi le cap.
Mais combien sont-ils, ceux qui en
rêvent sans aller jusqu’au bout ? Ali-
ce, 30 ans, « y a pensé pour ses ri-
des », mais elle a « l’impression
qu’une fois qu’on commence, on ne
peut plus s’arrêter, et qu’on change
de plus en plus de choses ». Son amie
Margot, 31 ans, « n’aime pas » ses
« sillons nasaux » qui « se creusent
avec l’âge », mais soulève l’argu-
ment du prix des injections. Clé-
ment, 32 ans, est complexé par sa
calvitie, mais il sait que cette derniè-
re est évolutive et « doute donc de
l’intérêt » d’une greffe dans l’immé-
diat. Certains jeunes font par ailleurs
face à un refus de leurs parents.
« C’est un non ferme », déclare Char-
lotte, mère de deux adolescentes qui
« s’interrogent ». « Je n’ai rien
contre la chirurgie et la médecine es-
thétiques, mais ce n’est pas de leur
âge. Elles ont la beauté de la jeunes-
se, elles ne sont pas parfaites, mais
elles sont très jolies , estime la quin-
quagénaire, qui pointe du doigt le
rôle des réseaux sociaux. Ça vient de
la dictature des modèles avec les lè-
vres pulpeuses, les pommettes hau-
tes, les grosses poitrines, qu’on voit
partout sur Instagram et autres. Ça
rentre dans la tête des ados qui se
cherchent. Pour eux c’est une vérita-
ble tentation. »
Les réseaux sociaux, leurs filtres et
leurs stars – notamment les candi-
dats de téléréalité - occupent en ef-
fet une large partie du banc des ac-
cusés. La nouvelle appétence des
jeunes pour la chirurgie et la méde-
cine esthétiques leur est « très clai-
rement due », estime le Dr Adel
Louafi, président du Syndicat natio-
nal de chirurgie plastique, recons-
tructrice et esthétique (SNCPRE).
« Les influenceurs ont une importance
majeure dans le développement de ce
phénomène. À coups de stories Insta-
gram et de vidéos TikTok, ils – et sur-
Les coûteuses
injections de Botox
ou d’acide hyaluronique
rencontrent
un vif succès chez
les moins de 35 ans.
De faux médecins
les proposent à prix
cassés avec, parfois,
des conséquences
dramatiques,
comme des nécroses,
des gangrènes, voire
des septicémies.
AlekSAndr rybAlko -
Stock.Adobe.com
tout elles – ont remplacé les modèles
sur papier glacé. Par ailleurs, les fil-
tres ont perturbé l’image que les ado-
lescents et jeunes adultes ont d’eux-
mêmes en imposant des standards de
beauté. » Il n’est ainsi pas rare que le
Dr Louafi ou le Dr Saboye reçoivent
des patients leur demandant de les
aider à ressembler à tel filtre ou à
telle influenceuse aux millions
d’abonnés…
Les stars des réseaux sociaux
n’hésitent pas à recommander en li-
gne leur praticien. Dans leur sillage,
de très nombreux jeunes cèdent aux
« laÇadictature
vient de
sirènes des comptes qui mettent en
avant des « russian lips », des cor-
rections de « bosse sur le nez » ou de
« cernes creux » à l’aide d’acide hya-
des modèles luronique, à grand renfort de photos
avec les « avant/après ». Et qui, parfois, ne
lèvres sont absolument pas tenus par des
médecins, mais par des « fake injec-
pulpeuses, tors » qui proposent leurs services à
les prix cassés. « Ce sont quasi exclusi-
pommettes vement des jeunes femmes, de tous
profils mais notamment des esthéti-
hautes, les ciennes, des masseuses, des coiffeu-
grosses ses, explique le Dr Adel Louafi. Elles
poitrines, instaurent une espèce de lien de
confiance, tutoient leurs proies, les
qu’on voit appellent “ma chérie”. Elles ont un
partout sur aplomb incroyable, n’hésitent pas à
Instagram tromper les gens avec de faux certifi-
cats. Elles exercent à domicile, dans
et autres. des Airbnb loués pour l’occasion, dans
Ça rentre leurs instituts de beauté… »
dans la tête
Une esthéticienne
des ados qui condamnée
se cherchent. Ninon a vécu cette expérience.
Pour eux « L’an dernier, j’ai fait des injections
dans les lèvres dans un salon, pour
c’est une ressembler à tout le monde. C’était
véritable bien fait, mais par des gens qui
tentation »
Charlotte, mère de
n’avaient pas de diplômes. Et, avec
du recul, je trouve que ce n’était plus
moi, ça faisait trop “fake”… Je ne
deux adolesCentes
pense pas que je le referais, mais, si
c’était le cas, ce serait avec un méde-
cin. Parce qu’on ne sait jamais. » La
situation peut en effet virer au cau-
chemar. « On a soudainement vu
apparaître de façon alarmante une
explosion de complications graves
liées à des injections d’acide hyaluro-
nique », raconte le Dr Adel Louafi,
qui a lui-même reçu plusieurs pa-
tientes venues après des injections
illégales – et a dû en envoyer certai-
nes dans des services hospitaliers
spécialisés « pour essayer de sauver
ce qui était encore possible de sau-
ver ». « On n’avait jamais vu ça en
vingt ans d’utilisation de cet acide :
des nécroses au niveau de la face, des
gangrènes, des septicémies, des am-
putations de morceaux de nez ou de
lèvres… »
Face à ces dérives, la justice tente
d’agir. En décembre dernier, une
esthéticienne de 29 ans a ainsi été
condamnée à neuf mois de prison
avec sursis, notamment pour
« exercice illégal de la médecine »,
« blessures involontaires », « prati-
que commerciale trompeuse »,
« exécution d’un travail dissimulé »
et « importation, acquisition, em-
ploi illicite de médicaments et dis-
positifs médicaux ». Une enquête
menée par la brigade de gendarme-
rie de Valras-Plage (Hérault) et
l’Office central de lutte contre les
atteintes à l’environnement et à la
santé publique (OCLAESP) a permis
d’établir que la jeune femme « pro-
posait divers actes réservés au corps
médical sans en avoir les qualifica-
tions et diplômes requis », comme
« des injections de Botox et d’acide
hyaluronique, la pose de fils tenseurs
en polydioxanone avec anesthésie lo-
cale, des injections d’Aqualyx ainsi
que des blanchiments dentaires à
base de peroxyde d’hydrogène », se-
lon le parquet de Béziers. Cette vic-
toire n’est que l’arbre qui cache la
forêt. « L’autorité judiciaire ne pour-
suit que si une victime porte plain-
te », déplore le Dr Adel Louafi, qui
regrette également que les autorités
sanitaires ne mettent pas un frein à
la vente libre d’acide hyaluronique.
Reste un autre risque, plus insi-
dieux : celui de devenir « accro » à
l’aiguille ou au bistouri. Les très
appréciées injections d’acide hya-
luronique dans les lèvres ne font
ainsi effet que quelques mois, et
doivent donc être renouvelées ré-
gulièrement. Quant à la chirurgie,
« quand on y a goûté, c’est compli-
qué de ne pas envisager de recom-
mencer », confesse Ninon. De son
côté, avant même de passer sur le
billard, Charlène s’est demandé si
elle allait avoir ensuite envie
d’autres changements. « Je n’en
sais rien encore. Mais, si je vois que
ça se passe bien et que j’ai les finan-
ces, pourquoi pas me refaire la poi-
trine ? J’aurai moins peur de sauter
le pas après ma première opéra-
tion ! » Ce qui inquiète fortement
Elsa Mari, la coauteur de Généra-
tion bistouri : « Les jeunes n’ont ja-
mais fait autant de chirurgie esthé-
tique. Dans cinq-dix ans, qu’est-ce
qu’on fera de tous ces corps ? »
Aujourd’hui, la mode est aux lèvres
pulpeuses, aux nez affinés et aux
fesses bombées. Mais que se passe-
ra-t-il quand les tendances auront
changé ? « Autant la médecine es-
thétique a un effet limité dans le
temps, autant ce qui est modifié par
chirurgie ne pourra être modifié à
nouveau que par chirurgie », pré-
vient le Dr Saboye. « C’est une vraie
dérive d’inscrire la mode dans sa
chair, conclut Elsa Mari. Lorsqu’un
jean n’est plus à la mode, on peut le
jeter. Mais pas un corps ! » ■
zoom
Gérald Darmanin recadre
la réforme de la police
Le ministre de l’Intérieur,
Gérald Darmanin, a écrit à ses
troupes vendredi pour recadrer
la réforme de l’organisation
de la police nationale. Il le fait
au lendemain de la remise
d’un rapport du Sénat l’invitant
à redéfinir son projet et à se
donner plus de temps pour
le mener à bien. Afin de tenir
compte des « craintes » et des
« recommandations » faites,
l’hôte de Beauvau renonce
à l’architecture de sa réforme
limitée au strict échelon
départemental pour pousser
à la création de directions
interdépartementales de la
police nationale, plus en phase
avec l’organisation de la police
judiciaire (PJ) et de la police aux
frontières (PAF) notamment.
Pour parfaire la concertation,
il a nommé un certain nombre
de « préfigurateurs » issus des
diverses spécialités de la Grande
Maison. La préfecture de police
de Paris va aussi entrer
dans le champ de la réflexion.
« Rien ne devrait donc changer
vraiment avant les JO de 2024,
pour ne pas chambouler l’édifice
policier au moment où il sera
particulièrement sollicité ;
c’est la sagesse qui l’emporte »,
estime un sénateur LR
qui suit de près ce dossier.
en bref
Le joueur du PsG Achraf
Hakimi mis en examen
pour viol
Le défenseur marocain du Paris
Saint-Germain, Achraf Hakimi,
a été mis en examen pour viol
après les accusations
d’une jeune femme de 24 ans.
Celle-ci accuse le footballeur,
également âgé de 24 ans,
de l’avoir agressée, samedi
25 février, chez lui, à Boulogne-
Billancourt. Elle s’était rendue
le lendemain dans un
commissariat du Val-de-Marne,
où elle avait déclaré avoir été
violée, sans porter plainte.
Selon une source policière,
la jeune femme a raconté avoir
fait la connaissance d’Achraf
Hakimi en janvier sur Instagram
et s’être rendue samedi dernier
chez lui dans un VTC commandé
par le joueur.
 le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023

ScienceS 13

Pyramide de Kheops : extraordinaire

découverte d’un couloir caché
La mission ScanPyramids a réussi à filmer
l’intérieur d’un mystérieux corridor, identifié
en 2016, au-dessus de l’entrée principale.

Simon Cherner
scherner@lefigaro.fr

archéologie Il y a du nouveau
derrière les blocs épais et quatre
fois millénaires de la tombe du roi
Kheops. Sept ans après avoir dé-
couvert l’existence de cavités in-
connues cachées dans les profon-
deurs de la plus grande des
pyramides de Gizeh, face au Caire,
les scientifiques du projet interna-
tional ScanPyramids livrent un
premier aperçu de l’un de ces es-
paces tant fantasmé. Situé derrière
l’entrée de la face nord du monu-
ment, le corridor en question ne
dissimulait rien d’inattendu. Des
murs nus. Pas de momie en em-
buscade ni de trésors insoupçon-
nés. Elle n’en reste pas moins fa-
buleuse aux yeux des spécialistes.
Cet espace de 2 mètres de large,
sous chevrons, s’étire sur près de
9 mètres. Il a pu être inspecté le
24 février grâce à une minuscule
ouverture détectée au radar dans
la jointure des chevrons de l’en-
trée. Faute d’y passer une tête, les
chercheurs ont glissé une minus-
cule caméra - un endoscope d’un
diamètre de 5 millimètres - dans
un tuyau en cuivre pour obtenir
un aperçu de cet espace dissimulé
depuis la construction du monu-
ment.
De quelle utilité était ce corridor
aveugle, aménagé à l’extrémité
nord de l’immense tombeau de
Kheops ? Si la piste d’un espace de
décharge censé répartir la masse
au-dessus de l’entrée principale
de la pyramide est avancée par les
autorités égyptiennes, les scienti-
fiques du projet ScanPyramids,
eux, se gardent bien de trancher.
Leur intérêt est ailleurs : l’existen-
ce désormais avérée de ce lieu
prouve ce que leurs instruments
avaient détecté en 2016, grâce au
principe de la radiographie par
muons. « Ces images confirment la
présence de cette cavité dont nous
soupçonnions déjà l’existence à
99,99 %. Elles achèvent également
de prouver l’efficacité de nos mé-
thodes non destructives et non in-
vasives », souligne Mehdi Tayou-
bi, codirecteur de la mission
ScanPyramids et vice-président
de Dassault Systèmes.
Les dernières énigmes
de la pyramide
Adapté au contexte de la pyrami-
de par l’université de Nagoya et le
Commissariat à l’énergie atomi-
que et aux énergies alternatives
(CEA), la muographie consiste en
la captation de particules élémen-
taires sensibles aux corps qu’elles
traversent. Cette technique a per-
mis d’identifier, depuis 2016, deux
espaces jusqu’alors inconnus à
l’intérieur de la grande pyramide :
le corridor de la face nord (NFC),
situé près de l’entrée, ainsi qu’un
« grand vide » (surnommé SP-
BV), de 40 mètres de long et qui se
trouverait environ 10 mètres au-
dessus de la grande galerie.
D’après les images de l’endosco-
pe, le corridor inspecté ne paraît
pas être relié au « grand vide »,
dont le rôle architectural reste
totalement mystérieux. « Un cou-
loir plus petit, de moins de 1 mètre,
entre ces deux structures ne peut
pas être complètement exclu à partir
de ces mesures », notent cependant
grâce à des détecteurs
de rayons cosmiques
Chambre
du Roi
Conduits d’aération
Situé derrière
l’entrée de la face
nord du monument, Chambre de la Reine
le corridor ne dissimule
rien d’inattendu mais
cette découverte
n’en reste pas moins
fabuleuse aux yeux
des spécialistes.
ScanpyraMiDS
Chambre souterraine
Source : ScanPyramids
les 36 chercheurs associés à la mis-
sion ScanPyramids dans un article
paru jeudi dans la revue scientifi-
que Nature Communications. La
piste d’un couloir qui aurait été
comblé n’est pas non plus à écar-
ter, note Mehdi Tayoubi.
Le charismatique archéologue
égyptien Zahi Hawass rêve d’ores
et déjà de retrouver « la vraie
chambre funéraire du roi Kheops ».
Les travaux, décidément, ne sont
pas près de s’achever. « Nous allons
poursuivre notre campagne de
scans », a confirmé jeudi le res-
ponsable du Conseil suprême des
antiquités, Mostafa Waziri, aux
pieds des pyramides.
Lancée en 2015 sous l’égide du
Cavité découverte
en 2017
Environ 40 m
Grande Galerie
Passage
ascendant
Puits de service
Percée d’Al-Mamoun
Passage descendant
ministère égyptien des Antiquités
nationales, la mission scientifique
ScanPyramids associe l’Université
du Caire avec l’institut français
HIP. Soutenue par Dassault Systè-
mes*, l’association coordonne la
palette d’acteurs impliqués dans le
projet et pilotés, côté égyptien, par
un comité scientifique dirigé par
Zahi Hawass. Parmi les derniers
partenaires de l’aventure, l’Uni-
versité technique de Munich a
mené des examens radars complé-
mentaires sur la face nord de la py-
ramide, entre 2020 et 2022, pour
affiner les contours de la cavité.
À terme, l’identification et
l’étude de ces nouveaux espaces
de la grande pyramide pourraient
Premières images à
l’intérieur d’un corridor
(2 m de large et 9 m de
long) dont la présence
est suspectée depuis
2016
Entrée d’origine
E
Entrée visiteurs
E
Infographie
permettre de mieux saisir les der-
nières énigmes de sa construc-
tion. Plusieurs hypothèses
concurrentes existent sur ce
problème architectural, qui
pourrait avoir été résolu par des
systèmes de rampes externes ou
internes, voire par un mélange
des deux. Le monument, édifié
vers 2560 avant notre ère, du
temps de l’Ancien Empire, est
resté plusieurs millénaires la
structure humaine la plus h aute
jamais construite. Et les mystères
irrésolus de cette merveille du
monde ne laissent toujours pas de
fasciner. ■
*Le groupe Dassault est
propriétaire du « Figaro»

Les athlètes sont aussi performantes, “ Ce n’est pas simple

de reprendre la
compétition à un

voire plus, après leur grossesse niveau international,

Une étude menée sur 42 coureuses de classe mondiale montre qu’elles peuvent retrouver
leur meilleur niveau après un accouchement.
de sa première fille. « Quand j’ai
Stéphany Gardier annoncé ma première grossesse en
sgardier@lefigaro.fr
2010, plusieurs personnes m’ont
répondu “ah alors tu arrêtes la
sport La récente mésaventure compétition”, c’est encore très an-
de la navigatrice Clarisse Crémer, cré dans les mentalités. Heureuse-
évincée par son sponsor Banque ment j’ai été très soutenue par mon
populaire après sa maternité, est staff technique qui a plutôt vu cela
venue rappeler que le monde comme un nouveau challenge à re-
sportif n’est pas tendre avec les lever », explique l’athlète, qui
athlètes qui veulent revenir à la s’est exprimée sur les réseaux so-
compétition après leur grossesse. ciaux pour apporter son soutien à
Pour beaucoup, la réalité consiste Clarisse Crémer. « J’ai choisi de
encore à choisir entre famille et parler de mes grossesses pour
carrière. Une étude canadien- montrer aux femmes qu’il y avait
ne, publiée en janvier dans la re- une possibilité. On ne va pas se
vue scientifique Medicine and mentir, ce n’est pas simple de re-
Science in Sport and Exercise prendre la compétition à un niveau
(MSSE) pourrait donner à réflé- international, mais c’est faisable et
chir aux différentes instances en tout cas, c’est un choix que les
sportives et aux sponsors. Les athlètes doivent avoir », martèle la
ternational, quand sa femme a
voulu revenir à la compétition
après sa grossesse. « J’ai creusé la
littérature. Il y avait des recom-
mandations “générales” sur
l’exercice, mais rien de vraiment
spécifique pour les athlètes d’endu-
rance de haut niveau », explique
ce chercheur de l’université de
Victoria, conseiller au Canadian
Sport Institute Pacific. En 2012,
alors qu’il accompagnait sa fem-
me aux JO de Londres, il avait
croisé une autre scientifique,
Francine Darroch, chercheuse à
l’université Carleton (Ottawa,
Canada) qui elle accompagnait
son mari marathonien. « Ma colo-
cataire à l’université participait à
la course de steeple-chase et elle
avait un jeune fils à l’époque. Je me
mais (…) c’est un choix
que les athlètes
doivent avoir
Mélina RobeRt-Michon
”
sur le sujet, mais se distingue Le chercheur souligne que le
surtout par le sérieux de sa projet personnel des coureuses
méthodologie. Trouver plus de semble jouer un rôle important
quarante athlètes de très haut dans leurs performances post-
niveau n’a pas été chose facile, partum. En effet, seules les athlè-
mais toutes se sont montrées très tes qui avaient l’intention de re-
enthousiastes à l’idée d’intégrer venir à un niveau élite ont pu
l’étude qui a donc évalué les per- maintenir leurs performances
formances de chacune avant, après la grossesse et 56 % d’entre
pendant et jusqu’à trois ans elles ont même couru légè-
après leur grossesse. rement plus vite. Par-
mi celles qui ne
Un entraînement modifié s’étaient pas
Les données montrent qu’après fixées d’objec-
l’accouchement, les athlètes ont tif, ce chiffre baisse à
eu tendance à réduire la durée 39 %. « La plupart des ath-
mais pas le nombre de leurs séan- lètes ont mis un certain temps à re-
ces d’entraînement. Leur vitesse trouver leurs performances après
de course a aussi significative- la naissance de leur enfant, souvent
ment diminué dans les semaines un à deux ans, il faut donc être pa-
qui ont suivi. Mais les auteurs tient », plaide Trent Stellingwerff.

chercheurs y montrent en effet
que non seulement les athlètes qui
souhaitaient revenir à la compéti-
tion après leur accouchement
avaient retrouvé leur niveau de
performance, mais pour plus de la
sportive, vice-championne aux
championnats du monde de Mos-
cou en 2013 puis médaillée d’ar-
gent aux Jeux olympiques de Rio
en 2016.
souviens avoir vu la puissante pu-
blicité de Procter & Gamble
« Thank You Mom » (merci ma-
man) remerciant les mères des
athlètes olympiques, mais il n’était
jamais fait mention des mères par-
2013
soulignent que des différences
importantes existaient entre cha-
que participante. Certaines fem-
mes ont repris des exercices lé-
gers quelques semaines après
l’accouchement alors que
Les deux scientifiques espèrent
que des études comme la leur
pourront contribuer au change-
ment des mentalités parmi les
décideurs. C’est une question
Médaille d’équité. Nous ne pouvons plus
Dylan Martinez/reUterS

moitié, avaient même réalisé des
performances meilleures
qu’avant de devenir mère.
Des résultats qui n’étonnent pas
vraiment Mélina Robert-Michon,
lanceuse de disque française mul-
timédaillée qui rappelle avoir réa-
« Une question d’équité »
C’est l’histoire d’une autre athlète
olympique, Hilary Stellingwerff,
qui est à l’origine de l’étude ré-
cente parue dans MSSE. Son mari,
Trent Stellingwerff raconte avoir
eu l’idée de ce projet, mené sur
ticipant aux Jeux olympiques - et
des luttes qu’elles ont dû mener
pour rester dans le sport. C’est une
question d’équité dont personne ne
parlait à l’époque », contextualise
Francine Darroch.
L’étude longitudinale menée
d’autres sont restées au repos dix d’argent pour la accepter que les politiques et les
voire quinze semaines. « Tout lanceuse de disque pratiques puissent être appliquées
comme il n’existe pas vraiment une Mélina Robert-Michon de la même manière aux corps
seule façon d’entraîner un athlète, (ci-dessus) aux masculins et féminins - nous
il n’y a pas vraiment une façon championnats du devons financer beaucoup plus de
spécifique d’entraîner les femmes monde de Moscou, recherches pour examiner les
pendant et après une grossesse - trois ans après sa résultats spécifiques des athlètes
A

lisé ses meilleures performances 42 femmes coureuses de fond ou par Francine Darroch et Trent c’est très individuel », résume grossesse féminines, conclut Francine
en compétition après la naissance demi-fond, toutes de niveau in- Stellingwerff est l’une des rares Trent Stellingwerff. Darroch. ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
14 Sport
Max Verstappen
est-il le grand
favori ?
1 3
❚ OUI. Après une saison 2022 qu’il
a littéralement survolée de la tête
et des épaules pour décrocher son
deuxième titre mondial, le
Néerlandais apparaît plus fort,
et plus serein, que jamais. À 25 ans, le
tempétueux « Max la menace » des dé-
buts a laissé place à « Verstappen le zen »
même si, chassez le naturel, celui-ci
peut revenir au galop. Toujours est-il
que, au moment d’aborder cette nou-
velle saison, le Batave ne peut pas être
présenté autrement que comme le grand
favori, de par son talent, les qualités de
sa RB19, la capacité de son équipe à se
mettre entièrement à son service… Rien
ne garantit qu’il sera plus fort lors de
l’exercice à venir. Mais tout laisse à pen-
ser qu’il ne le sera pas moins. Et, même
si la concurrence progresse, Verstappen
a été sacré il y a quelques mois avec
146 points d’avance. Ce qui donne une
idée pour le moins précise de la marge
dont il dispose sur ses concurrents, et
qui ne va pas s’être envolée comme par
enchantement. ■
Un nouveau
pilote brillera-t-il
aux avant-postes ?
5
❚ OUI. Il n’y aura que deux
rookies cette saison en For-
mule 1, étant donné que le
Néerlandais Nyck De Vries
(28 ans) a déjà vécu un
Grand Prix la saison dernière, au vo-
lant de la Williams. Une belle réussite
puisqu’il avait fini dans les points, à la
8e place du Grand Prix d’Italie. Ce qui
explique en grande partie sa titularisa-
tion au sein d’AlphaTauri cette saison.
Néanmoins, il devrait avoir moins de
possibilités de briller qu’un certain
Oscar Piastri, qui, après avoir claqué la
porte au nez à Alpine, roulera à
bord d’une McLaren. Un pari
osé de la part de l’Australien,
âgé de 21 ans, qui reste sur
trois titres consécutifs en
Renault Eurocup, puis en
Formule 3 et en For-
mule 2, signe que le
talent et le potentiel
sont là. Reste à voir
ce que cela donnera
à l’échelon supé-
rieur, face à un
Lando Norris re-
doutable. De son
côté, Logan Sar-
geant (22 ans)
sera le premier Améri-
cain titulaire depuis
Alexander Rossi, en
2015. À lui de prouver, au
volant d’une Williams en difficulté et
alors même qu’il n’a jamais fait
mieux en catégorie jeunes qu’une
3e place au championnat de For-
mule 3 en 2020, qu’il n’est pas juste là
pour remplir le quota américain. de la
Formule 1. ■
Le GP de Las Vegas
sera-t-il l’attraction
du calendrier ?
7 10
❚ OUI. La capitale mondiale
du jeu accueillera le 18 no-
vembre prochain l’avant-
dernière manche de la saison
dans le Nevada. Un rendez-
vous de la démesure, des paillettes et
du bling-bling qui méritera forcément
le coup d’œil. Avouons-le, si le tracé
urbain (6,1 km) rectiligne n’est pas très
enthousiasmant sportivement à vue
d’œil (mais comment faire pire que
l’édition 1981 organisée sur le parking
géant de l’hôtel-casino Caesars Pala-
ce ?), le cadre sera, lui, hors du com-
mun. L’épreuve se déroulera de nuit le
samedi soir (22 heures, heure locale),
empruntera le Strip, la célèbre artère
des palaces, des centres commerciaux
géants aux mille lumières et des casi-
nos devant lesquels les voitures fileront
à 345 km/h. Les billets, dont les tarifs
débutaient autour de 500 dollars, se
sont arrachés mais il reste encore des
places VIP à près de 8 000 dollars
pièce. On attend environ 170 000 per-
sonnes autour du tracé avec des
A
retombées économiques estimées à
1 milliard de dollars. ■
Lewis Hamilton Le calendrier Frédéric Vasseur
peut-il faire de l’ombre de la Formule 1 va-t-il permettre
au Néerlandais ? est-il trop chargé ? à Ferrari de viser
❚ NON. Soyons clairs, hormis médiatiquement, il ❚ OUI. Entre le Grand Prix de Bahreïn (16 heures, le titre mondial ?
4
semble impossible de voir le Britannique de 38 ans Canal+) ce dimanche et celui à Abu Dhabi le 26 no-
rejeter dans l’ombre le Néerlandais, comme cela vembre qui clôturera la saison, l’amateur de For- ❚ NON. Tout comme Rome ne
avait pu être le cas il y a trois ou quatre saisons, mule 1 n’aura pas moins de vingt-trois épreuves à s’est pas faite en un jour, il est
une période correspondant à l’apogée du couple se mettre sous la dent. Un record qui pourrait probable que Ferrari ne
Hamilton-Mercedes. À cette période, les Flèches d’argent conduire à une véritable indigestion. Un calendrier si chargé renaîtra pas de ses cendres
avaient mis au pas la concurrence et Hamilton régnait en a évidemment des conséquences. Sur le plan humain, tout en une saison. Alors que le
maître au sein de son équipe face à un Valtteri Bottas se d’abord, pour les mécaniciens et membres des différentes début de saison dernière pouvait laisser
satisfaisant amplement du rôle de lieutenant du septuple écuries, contraints de voyager quasiment toute l’année, avec penser que Charles Leclerc aurait les
champion du monde. Sans la moindre victoire en 2022, le juste une pause estivale entre la Belgique (30 juillet) et les moyens de défier Verstappen, plusieurs
pilote anglais, avant d’imaginer reprendre le pouvoir et Pays-Bas (27 août). Éreintante, la saison se mariera qui plus erreurs stratégiques et/ou de pilotage,
stopper l’hégémonie Verstappen, devra donc déjà s’efforcer est très mal avec les préoccupations environnementales ainsi qu’une fiabilité pas forcément au
de prendre l’ascendant sur son brillant coéquipier George actuelles. Ainsi, on peut s’étonner que les trois étapes amé- rendez-vous sont venues dérouler le
Russell (25 ans). Sa bonne fin de dernier exercice et les ricaines se retrouvent disséminées aux quatre coins du tapis rouge sous les roues de la Red Bull
progrès de sa Mercedes peuvent inciter à l’optimisme le calendrier, plutôt que de s’enchaîner avec également le du Néerlandais. Mais le potentiel était
concernant. Maintenant, entre être de nouveau compétitif Canada pour former un bloc nord-américain. Au lieu de ça, là. L’arrivée de Frédéric Vasseur
pour s’imposer ici ou là et briguer un 8e titre de champion du la F1, déjà vivement critiquée pour son caractère très (54 ans, ex-Renault, Sauber/Alfa Ro-
monde, il risque cependant d’y avoir un (grand) écart… ■ polluant, va multiplier les longs voyages. Une aberration meo) peut-elle permettre à celui-ci de
écologique, humaine et même sportive. ■ s’exprimer pleinement ? Sans aucun
doute. Mais le Cheval cabré a des lon-
gueurs de retard sur ses rivaux, princi-
f1
palement vis-à-vis
de Red Bull, et il
La saison 2023
semble peu proba-
ble qu’il revienne
dans la course d’un
en dix questions
simple coup de ba-
guette magique du
Français. Cette sai-
son pourrait être
celle de la recons-
truction, avant de
DPPI vIA AFP
Avant le premier Grand Prix, dimanche, partir à la conquête
Frédéric
du titre en 2024.
à Bahreïn, passage en revue du nouveau
À moins que… ■ Vasseur.
millésime. DOSSIER RÉALISÉ PAR GILLES FESTOR ET CÉDRIC CALLIER
La F1 va-t-elle passer
sous pavillon
saoudien ?
❚ PAS DANS L’IMMÉDIAT. Le
groupe Liberty Media a ac-
quis les droits commerciaux
du championnat du monde
de Formule 1 en 2017 pour
8,5 milliards d’euros. Depuis, la valeur
de la discipline aurait été multipliée
par deux selon le magazine
Forbes. L’agence Bloom-
berg a révélé que les
Américains avaient été
approchés en début
d’année 2022 par l’Ara-
bie saoudite prête à met-
tre 20 milliards d’euros
sur la table via le fonds
public d’investissement
(PIF) pour devenir pro-
priétaire. Un positionne-
ment qui a du sens, deux
ans après avoir organisé
un premier Grand Prix de
F1 sur son sol à Djeddah et
au moment où le royaume
multiplie l’organisation d’évé-
Max Verstappen avec la Red Bull.
nements sportifs (Dakar, combats de
mARkUS BeRgeR / ReD BULL Content
vIA ReUteRS ; ISSeI kAto/ReUteRS
boxe, matchs de football), le dernier in-
vestissement en date étant le rachat du
club de football de Newcastle en 2021.
La cohabitation Pierre Gasly- Y a-t-il un projet quant
Liberty Media a décliné la proposition,
conscient que le championnat dispose
Esteban Ocon peut-elle à un éventuel retour du d’un fort potentiel d’accroissement de
valeur dans les années à venir. ■
tourner au conflit chez Alpine ? Grand Prix de France ?
9
❚ OUI. Ils sont de la même génération (1996), tous ❚ NON. Contrairement à la saison passée, le Grand Doit-on s’attendre
les deux normands, ont fait leurs gammes ensem-
ble sur les pistes de karting en développant, au fil
Prix de France ne sera pas au programme du calen-
drier 2023. Après cinq éditions sur le circuit Paul à un resserrement
des années et de leur avancement dans leur car-
rière, une rivalité faite de hauts mais aussi de (très)
Ricard, au Castellet (Var), la manche tricolore est
passée à la trappe. Elle a entraîné la dissolution du des performances ?
bas. Une opposition qui a parfois fait des étincelles sur les cir- Groupement d’intérêt public (GIP) qui gérait cet événement,
cuits mais aussi en dehors avec des piques lancées par médias avec un déficit estimé à 27 millions d’euros. Il n’y a, à l’heure ❚ OUI. À quelques dé-
interposés. Après le recrutement de Pierre Gasly en prove- actuelle, aucun dossier avancé pour une future édition dans tails près concernant
nance d’AlphaTauri, les voilà désormais réunis sous la même l’Hexagone. Et pour cause, organiser un Grand Prix en France notamment le fond
bannière d’Alpine. Les deux équipiers n’ont cessé de répéter est un vrai parcours du combattant. Déficitaire par nature, plat des monoplaces,
cet hiver qu’ils étaient, à l’approche de la trentaine, assez l’événement ne pourra voir le jour sans un soutien poussé des le règlement techni-
matures et intelligents pour enterrer la hache de guerre. Le collectivités et/ou de l’État. Le contexte actuel ne plaide pas en que est identique à celui de 2022. Ajoutée
succès de la marque au A fléché cette saison dépendra aussi faveur d’investissements publics. D’autant plus que les tarifs au plafonnement des budgets limitant
de leur collaboration pour faire progresser une voiture qui demandés par Liberty Media pour inviter le plateau de F1 dans les écarts géants qu’il pouvait y avoir
n’est pas encore une un pays ne cessent dans le développement des monoplaces
des meilleures du d’augmenter. Grâce lors des saisons précédentes, cette sta-
plateau. Les dis- à son statut de bilité devrait permettre un rétrécisse-
cours apaisés et de grand prix « histo- ment des écarts. Même si trois écuries
bonne volonté ré- rique » en Europe, semblent encore au-dessus du lot (Red
sisteront-ils aux la France bénéficiait Bull, Mercedes et Ferrari), la meute des
premiers accrocs en d’un tarif avan- poursuivants pourrait se tenir dans un
course - et il y en
PAUL CHILDS/ACtIon ImAgeS vIA ReUteRS
tageux (20 M€ en- mouchoir de poche. Les candidats à la
aura forcément au viron) mais d’autres quatrième place sont nombreux. On
cours d’une très candidats, comme devrait retrouver notamment Alpine,
longue saison de l’Arabie saoudite, mais aussi McLaren – en quête de
23 rendez-vous - ont mis sur la table redressement - ou encore Aston Martin,
entre le taulier 50 millions d’euros. que beaucoup imaginent créer la sur-
Ocon et le vorace Des rendez-vous prise avec l’arrivée de Fernando Alonso.
Gasly qui doit enco- beaucoup plus lu- À 41 ans, le double champion du monde
re prendre ses mar- cratifs pour les espagnol a démontré en avant-saison
ques ? Pas sûr. Lau- propriétaires amé- qu’il n’avait rien perdu de son coup de
rent Rossi, le patron ricains, surtout que volant, et son ambition de briller de-
d’écurie, devra te- Pierre Gasly et les prétendants ne meure intacte malgré un passage délicat
Esteban Ocon.
nir ses troupes. ■ manquent pas. ■ chez Alpine. ■

Sport
Alpine, la nouvelle « équipe de France » sur les grilles de F1
Gilles FesTOR gfestor@lefigaro.fr
FORMULE 1 Au début des années 2000
lorsque les pilotes français brillaient par
leur absence sur les grilles, on repro-
chait à Renault de ne pas miser sur un
pilote tricolore. La réponse du patron de
l’Alliance Renault-Nissan, Carlos
Ghosn, tombait comme un couperet à
chaque début de saison : le Losange
avait pour vocation première de deve-
nir champion du monde, pas d’offrir un
baquet à un Français. La promotion
d’Alpine, marque sportive du groupe
choisie pour défendre le programme en
F1 à la place de Renault en 2021 a redis-
tribué les cartes. Le constructeur diep-
pois, à l’image de l’imposant bandeau
tricolore collé sur le museau de sa mo-
noplace (A523), assume et revendique
désormais haut et fort ses gènes fran-
çais. Un enracinement 100 % normand,
puisque après l’Ébroïcien (Évreux)
Esteban Ocon, recruté en 2020, le
Rouennais Pierre Gasly a renforcé cet
hiver les rangs des Bleus en provenance
de l’écurie AlphaTauri. Il remplacera
Fernando Alonso parti chez Aston
Martin. « Nous avons recruté Pierre
d’abord sur des critères sportifs avec le
souhait d’avoir un pilote capable de
scorer des points et sans penser à
appuyer sur le côté français, même si
nous en profitons. Nous n’avons pas
l’intention de tartiner là-dessus », nuan-
ce Laurent Rossi, le PDG d’Alpine.
0
podium pour l’écurie
Alpine en 2022
Il aura fallu attendre trente ans pour
assister de nouveau à l’association de
deux tricolores dans une même écurie
française. En 1994, Olivier Panis avait
été associé à Éric Bernard chez Ligier
avec des résultats très mitigés. Jacques
Laffite et Didier Pironi ont, eux, fait les
beaux jours de l’écurie fondée par le
proche de François Mitterrand en 1981
avec la deuxième place du classement
constructeur à la clé. La saison suivante,
Renault était grimpé sur la troisième
marche du championnat grâce à l’atte-
lage René Arnoux-Alain Prost, futur
quadruple champion du monde.
Alpine signerait volontiers pour un
résultat identique à l’issue de la saison
après avoir terminé au quatrième rang
l’an dernier, la place très convoitée der-
rière l’intouchable trio Red Bull, Ferrari
et Mercedes. « Il y a deux ans, lorsqu’on
a commencé l’histoire d’Alpine en F1, on
avait affiché notre ambition de monter au
sommet. Nous nous sommes engagés
dans un marathon, pas un sprint, en nous
donnant cinq ans pour y parvenir. Nous
étions cinquièmes en 2021, quatrièmes en
2022, naturellement on visera un peu plus
haut cette année », pose le patron de
cette « équipe de France » qui a aussi
embauché Zinédine Zidane en ambas-
sadeur. « Zidane, c’est très français dans
une écurie française, ça ne peut pas faire
de mal à notre équipe d’avoir une telle lé-
gende à nos côtés, sourit Rossi. L’ADN
français est très fort au sein de cette équi-
pe même si celle-ci se partage entre Viry-
le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
15
esteban ocon sur l’Alpine A523
lors des essais du Grand Prix
de bahreïn, à sakhir, le 3 mars.
MOHAMMED HAMAD/REUTERS
calenDrier 23 juillet
2023 Hongrie
30 juillet
5 mars Belgique
Bahreïn
19 mars 27 août
Arabie saoudite Pays-Bas
2 avril 3 septembre
Australie Italie
30 avril 17 septembre
Azerbaïdjan Singapour
24 septembre
7 mai Japon
Miami
8 octobre
21 mai
Qatar
Émilie-Romagne
22 octobre
28 mai
États-Unis
Monaco
4 juin
Espagne
29 octobre
Mexique
18 juin 5 novembre
Châtillon (partie moteur, NDLR) et Ens- découvrir l’équipe mais s’affirme très sions… Il va y avoir des frictions et c’est Canada Brésil
tone (construction du châssis, NDLR). » vite », souffle un proche de l’écurie. normal, lâche-t-il. J’attends qu’ils se
Pour remplir ses objectifs, Alpine at- Laurent Rossi suit de très près la co- comportent comme des adultes, comme 2 juillet 19 novembre
tend surtout davantage de fiabilité, le habitation de ses deux coqs lâchés dans cela se passe dans d’autres grandes écu- Autriche Las Vegas
talon d’Achille de l’équipe en 2022, an- la basse-cour. Une chose est sûre, ils ries. » S’inspirer des géants de la disci-
née terminée sans aucun podium. partiront sur un pied d’égalité à Bahreïn pline, encore et toujours, pour grandir 9 juillet 26 novembre
« L’idée est d’avoir plus de voitures à ce week-end. « Je ne me fais pas d’illu- et se rapprocher des sommets. ■ Grande-Bretagne Abu Dhabi
l’arrivée et surtout moins d’abandons
pour viser des podiums », annonce le di-
rigeant, très attendu sur la gestion de
ses deux pilotes.
Deux coqs dans la basse-cour
Nés à quelques mois d’intervalle en
1996, Esteban Ocon et Pierre Gasly (une
DAMIEN
victoire chacun en F1) ont croisé le fer
dès l’âge de sept ans sur les pistes de
karting. Au tout début des années 2000,
les deux familles font vite connaissance
puis s’entraident pour permettre aux
bambins de progresser. Mais derrière
TRAVAILLE
un volant, Ocon et Gasly se rendent
coup pour coup. Avec une rivalité de
chaque instant. En 2009, Gasly a obtenu
le soutien de la Fédération française du
sport automobile, au contraire de son
ami de jeunesse. L’année suivante, leur
Mutuelle soumise aux dispositions du livre II du Code de la mutualité, n° SIREN 538 518 473, n° LEI 969500JLU5ZH89G4TD57. Crédit Photo Nicolas Prado, Crédit Circle Sportswear —
MIEUX
concurrence exacerbée met à rude
épreuve cette longue complicité. Cer-
taines escarmouches derrière le volant
tournent mal et les mots fusent par mé-
dias interposés. L’amitié n’est alors plus
qu’un souvenir. Parvenus au pinacle de
la F1, les deux hommes continuent de
s’estimer mais l’heure n’est plus à la
franche rigolade. « Pierre aime bien
s’exprimer dans les médias, Je préfère
garder les choses privées », avouera
même le discret Ocon après une
brouille.
Cet hiver, les deux Français ont dû
réapprendre à se connaître en enterrant
les rancœurs passées. Mais le sujet reste
sensible. « Il faut faire parler dans les ca-
fés. Ça fait écrire beaucoup de pa-
piers… », tranche Gasly qui se décrit
comme étant « beaucoup plus mature »
désormais. « C’était vraiment bien de
pouvoir passer l’hiver avec Esteban. Sur
les deux derniers mois, on a passé plus de
temps que sur les dix dernières années. Ça
nous a rapprochés. » « L’important, c’est
que l’on parvienne à travailler ensemble
pour pouvoir développer cette voiture,
appuie Ocon, taulier de l’écurie. Nous ne
sommes pas en position de nous battre
pour gagner toutes les courses ou être sur
le podium tout le temps. C’est en commu-
niquant qu’on trouvera des solutions. »
« Esteban est un vrai gentil mais cela ne
l’a pas empêché de tenir tête à Fernando
Alonso qui a un sacré tempérament. Pier-
re a un caractère différent. Il continue de
Programme 26e journée Ligue 1
Nice (7) ven. 21 h Auxerre (16)
LeNs (4) sam. 17 h LiLLe (6)
PAris sG (1) 21 h NANtes (13)
troyes (19) dim. 13 h MoNAco (3)
reiMs (10) 15 h Ac AjAccio (17)
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MoNtPeLLier (10) sam. 15 h cLerMoNt (9)
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cAstres (11) - LyoN (3)
PAu (12) - LA rocheLLe (4)
PerPiGNAN (13) - bAyoNNe (5)
touLoN (8) 21 h 05 stAde FrANçAis (2)
A
dim.
rAciNG 92 (7) touLouse (1)
21 h 05
saMeDi 4 - DiManche 5 Mars 2023 le figaro
16 LE CARNET DU JOUR
fiançailles
Nous sommes priés d'annoncer
les fiançailles du
comte Martin
LE COURT de BÉRU
fils du comte et la comtesse
Antoine Le Court de Béru,
et de
Mlle Anne-Sophie DROUIN
fille de
M. et Mme Emmanuel Drouin.
naissances
M. et Mme Xavier de COINCY
M. et Mme
Guillaume LIBAUDIÈRE
ont la joie d'annoncer
la naissance de
Albane
le 25 février 2023,
petite sœur de Melchior, chez
Maylis et Hugues LIBAUDIÈRE
M. Jacques MOTET
et Mme, née Emma Bazbaze,
ont la joie d'annoncer
la naissance de
James
le mardi 14 février 2023,
à Orsay, chez
Stéphane et Judith FLAUGER
90, avenue des Hirondelles,
91400 Orsay.
M. Lionel WOLFF
et Mme, née
Tiphaine Ménager,
ont la grande joie d'annoncer
la naissance de leur petite-fille
Aliénor
le mardi 21 février 2023,
à Levallois-Perret, chez
Baudoin et Aude WOLFF
distinctions
Le 21 février 2023,
les insignes de chevalier
de la Légion d'honneur
ont été remis
par le président du Sénat,
Gérard Larcher,
en présence de
Mme Charlotte Caubel,
secrétaire d'État chargée
de l'Enfance, à
Thérèse HANNIER LE COQ
fondatrice,
présidente d'honneur
de PHARE Enfants-Parents,
association de prévention
du mal-être et du suicide
des jeunes.
hommages
La Fondation Long-Thibaud
rend hommage à
Roland FAURE
son ancien président
de 1991 à 2006.
32, avenue Matignon,
75008 Paris.
commémorations
Commémoration de la
déportation des Juifs de France
par l'association
Les Fils et Filles
des Déportés Juifs de France
et le Mémorial de la Shoah,
avec le soutien de la Fondation
pour la Mémoire de la Shoah.
Une cérémonie rappellera
la mémoire des déportés du
convoi n° 51
partis, il y a 80 ans,
du camp de Drancy
pour le camp d'extermination
d'Auschwitz-Birkenau,
le lundi 6 mars 2023,
à 12 heures,
au Mémorial de la Shoah,
17, rue Geoffroy-l'Asnier,
Paris (4e).
Les noms des 1000 déportés,
dont 3 enfants,
du convoi n° 51 seront lus
à cette occasion.
Seuls 10 déportés sont revenus.
Renseignements :
téléphone : 01 53 01 17 99
courriel :
wendy.schando
@memorialdela shoah.org
deuils
Sa famille, ses proches
vous informent du décès,
le 23 février 2023, de
M. Roger BERTHELET
architecte urbaniste,
1934-2023.
Roger s'en est allé rejoindre
Anne.
Le vicomte Daniel
de Bazelaire de Ruppierre,
son époux,
Pascal et Marie-Noëlle
de Bazelaire de Ruppierre,
Véronique et Xavier Riant,
ses enfants,
Brice et Charlotte
de Bazelaire de Ruppierre,
Maxime et Marta
de Bazelaire de Ruppierre,
Valentine et Luc Chevalier,
Maylis
de Bazelaire de Ruppierre,
Théodore Riant,
Servane Riant,
ses petits-enfants,
Valentin, Ariane, Ephrem
et Alexandre
de Bazelaire de Ruppierre,
ses arrière-petits-enfants,
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu de la
vicomtesse Daniel
de BAZELAIRE de RUPPIERRE
née Marie-Josèphe
Choury de Lavigerie,
le 1er mars 2023,
dans sa 88e année.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Saint-Joseph d'Angers,
le lundi 6 mars, à 14 h 30.
25, rue Châteaugonthier,
49100 Angers.
Lisieux (Calvados).
Anne-Marie Beguin,
née Grenier, son épouse,
Guillaume Beguin,
Alexis et Anja Beguin,
ses fils et sa belle-fille,
Laetitia et Hélèna,
ses petites-filles,
les familles Beguin, Grenier,
Marchand, Billet
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
M. Jean BEGUIN
ancien combattant,
docteur en droit,
chevalier
de l'ordre national du Mérite,
survenu
le samedi 25 février 2023,
à l'âge de 87 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le lundi 6 mars, à 10 h 30,
en l'église Saint-Michel
de Pont-l'Évêque, suivie
de l'inhumation au cimetière
de Saint-Gatien-des-Bois.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Londres. Paris.
Jean-Philippe et Elisabeth
Bouchaud,
Benoit et Amanda Bouchaud,
ses fils et belles-filles,
Mélodie et Johannes,
Gabriel et Alice,
Alexandre, Nicolas, Amélie,
ses petits-enfants,
Cléo et Nola,
ses arrière-petites-filles,
Jérôme et Michèle Fouan,
son frère et sa belle-sœur,
Elisabeth Fouan,
sa belle-sœur, en union avec
Thierry Fouan (†),
Charles-Arnaud et Florence,
Dorothée et Gerald,
Sabine, Sébastien,
ses neveux et nièces,
Marine, Roxane, Enora,
ses petites-nièces,
Aida Fontes,
sa très chère amie
et soutien au quotidien,
les familles parentes et alliées
ont la grande tristesse
de vous faire part du décès de
Brigitte BOUCHAUD
née Fouan,
survenu le lundi 13 février,
à l'âge de 87 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 10 mars, à 10 h 30,
en l'église Saint-Honest,
à Yerres (Essonne),
suivie de l'inhumation
au cimetière de Yerres.
Mme Marie Joseph
Capdecomme,
son épouse,
ses enfants et sa famille
ont la douleur
de vous faire part du décès de
M. Michel CAPDECOMME
survenu à l'âge de 85 ans,
le 1er mars 2023.
La cérémonie religieuse aura
lieu en l'église Sainte-Anne-
de-la-Butte-aux-Cailles,
Paris (13e),
le jeudi 9 mars, à 15 heures.
28, rue des Peupliers,
75013 Paris.
Le Seigneur a accueilli
dans Sa Paix,
Michel CATILLON
avocat honoraire
au barreau de Paris,
ancien secrétaire
de la Conférence,
le 2 mars 2023,
à l'âge de 74 ans.
De la part de
Florian et Raphaële,
ses enfants,
Alba, sa petite-fille,
Matteo, son gendre,
Sophie,
et tous ceux qu'il a aimés.
La cérémonie religieuse
aura lieu le lundi 6 mars,
à 10 h 30, en l'église
Saint-Ferdinand-des-Ternes,
Paris (17e),
suivie de l'inhumation
dans l'intimité familiale,
au cimetière du Père-Lachaise.
Stéphane Clergerie,
son fils,
Jeannine Clergerie Fourrière,
sa sœur,
Mathilde Clergerie,
Julia Clergerie,
ses petites-filles,
Antoine Fourrière,
Sandrine Fourrière,
ses neveu et nièce,
ont la tristesse
de faire part du décès de
Bernard CLERGERIE
officier de la Légion d'honneur,
officier
de l'ordre national du Mérite,
croix de guerre 1939-1945
avec étoile,
croix de guerre des TOE,
médaille de la Résistance,
officier
des Palmes académiques,
agrégé de philosophie,
ancien inspecteur d'Académie,
ancien conseiller culturel
au Caire et à New Delhi,
ancien professeur
à Sciences Po,
ancien directeur de l'Audecam
(Association universitaire pour
le développement, l'éducation
et la communication
en Afrique et dans le monde),
ancien consultant
auprès de l'Unesco,
résistant,
engagé volontaire
dans la 2e DB,
ancien combattant
d'Indochine,
survenu le 23 février 2023,
dans sa 101e année.
La cérémonie civile,
accompagnée des honneurs
militaires, sera célébrée
le lundi 6 mars 2023, à 12 h 30,
au funérarium du Bugue,
suivie de la crémation
à 14 heures, au crématorium
de Notre-Dame-de-Sanilhac
(Dordogne).
390, route de Bessade,
24260 Le Bugue.
stephane.clergerie@gmail.com
Saint-Cloud (Hauts-de-Seine).
Dominique et Catherine Esway,
ses filles,
Eric Nizard,
son gendre,
Nicolas, Paul, Samuel, Saskia,
ses petits-enfants,
ont la tristesse
de faire part du décès de
Anne-Marie ESWAY
née Copper-Royer,
veuve de
Paul Esway
survenu le 28 février 2023,
à l'âge de 91 ans, à Meudon.
Les obsèques auront lieu
au cimetière du Père-Lachaise,
71, rue des Rondeaux,
à Paris (20e),
le vendredi 10 mars, à 10 h 30.
Un registre à signatures
tiendra lieu de condoléances.
La famille tient à remercier
l'équipe du Châtelet, à Meudon,
pour son accompagnement
attentionné.
Cet avis tient lieu de faire-part.
nanie.esway@gmail.com
La baronne Henry de Domecy,
née Jacqueline Tran,
son épouse,
ses enfants, son gendre
et ses petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu du
baron Henry de DOMECY
le samedi 25 février 2023,
dans sa 76e année.
La cérémonie religieuse
sera célébrée par l'abbé
Renaud Joubert de la Motte,
le mercredi 8 mars,
à 11 heures, en l'église
Notre-Dame-des-Armées,
4, impasse des Gendarmes,
à Versailles,
suivie de l'inhumation
dans l'intimité familiale,
au cimetière
de Croissy-sur-Seine.
Ses frères, sœurs et neveux,
la fraternité
des Petites Sœurs de Jésus
vous font part
du rappel à Dieu de
Jeanne Marie de CUGNAC
en religion
petite sœur Chantal de Jésus
le vendredi 24 février 2023.
La messe de funérailles
a eu lieu le mardi 28 février,
en l'église de Lambesc
(Bouches-du-Rhône),
suivie de l'inhumation.
Paris (16e).
Montfort-l'Amaury.
Son épouse Frédérique,
ses enfants,
Laurent, Pascale et Frédéric,
ses petits-enfants
et arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
M. Jean-François DUBOURG
survenu à Montfort-l'Amaury,
le 20 février 2023,
à l'âge de 92 ans.
Selon ses dernières volontés,
la messe d'enterrement
a eu lieu le 28 février,
dans la plus stricte intimité.
Il a été inhumé le 2 mars
dans le caveau familial,
au cimetière du Montparnasse,
à Paris (14e).
Mme Gilles Gatelais,
son épouse,
Hélène Gatelais (†),
Brigitte de Guibert (†),
Denis Gatelais,
ses enfants,
Arnaud, Geoffroy, Clémence,
Antoine, Philippine et Hortense,
ses petits-enfants,
leurs conjoints
et ses arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de faire part du décès de
M. Gilles GATELAIS
survenu le 28 février 2023,
à l'âge de 93 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Saint-Pierre-du-Gros-Caillou,
Paris (7e),
le mercredi 8 mars, à 14 h 30.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Les familles Hervieu et Millant
font part du rappel à Dieu de
Jean-Paul HERVIEU
archiviste émérite,
officier de la Légion d'honneur,
commandeur
de l'ordre national du Mérite,
le 26 février 2023.
Grégory et Helga Liyanage
ont la douleur
de faire part du décès de
M. Milroy LIYANAGE
survenu le 1er mars 2023.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Notre-Dame-de-la-Gare,
Paris (13e), le jeudi 9 mars,
à 14 h 30.
Jusqu'à cette date, vous pouvez
venir lui rendre hommage
au funérarium
de Ménilmontant, Paris (11e)
sur rendez-vous par téléphone :
01 55 25 22 11.
Reims.
Alain (†) et Juana Maes,
Pascale et Christian Pérouse,
Bruno et Véronique Maes,
Martine et Jacques Waquet,
Muriel et Yves Dargent,
Benoît et Marie-Noëlle Maes,
Vincent et Nathalie Maes,
Sophie Maes,
ses enfants,
Ludovic et Claire, Alexandre,
Violaine et Adrien,
Sébastien et Anne,
Caroline et Guillaume,
Jean-Baptiste et Emmanuelle,
Paul et Roxane,
Guillaume et Anne-Laure,
Julien et Elodie,
Timothée et Céline,
Magali et Bertrand,
François et Charlotte,
Adrien et Emmanuelle,
Clément et Christelle,
Romane et Grégoire,
Gabrielle,
Victoire,
ses petits-enfants,
et ses 29 arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu de
Mme Suzanne MAES
née Ernoult,
le mardi 28 février 2023,
dans sa 99e année.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le mercredi 8 mars, à 14 h 30,
en l'église Saint-André
de Reims.
Elle a rejoint dans la Paix
du Seigneur son époux Henri
et son fils Alain.
Fondettes,
Saint-Étienne-de-Chigny
(Indre-et-Loire).
Héléna Martini,
son épouse,
Thibault et Gatienne Martini,
Marie-Caroline et Cyril
Venière,
Amaury, Marie-Bénédicte
et Victoire Martini,
ses enfants,
Louis-Marie, Gabriel,
Jean-Bosco, Albéric, Pierre,
Louis, Joséphine et Grégoire,
ses petits-enfants,
Etienne et Gatienne Rouxel,
François (†) et Brigitte
de Rendinger,
Jean-Luc et Catherine Martini,
Agnès de Parscau,
Eric Martini,
Olivier Martini
et Laurence Aloin,
ses frères, sœurs,
beaux-frères et belles-sœurs,
ainsi que toute la famille
vous font part
du rappel à Dieu de
Me François MARTINI
notaire honoraire,
à l'âge de 67 ans.
La messe d'À-Dieu sera
célébrée le jeudi 9 mars 2023,
à 10 heures,
en l'église de Fondettes,
2, route de Pernay,
suivie de l'inhumation
au cimetière du cœur
historique de Fondettes.
La famille remercie à l'avance
toutes les personnes
qui s'associeront à sa peine.
M. et Mme
Jean-François de Mourgues,
Mme Marie-Christine
de Mourgues,
ses enfants,
M. et Mme
Théophile de Mourgues,
M. et Mme
Quentin de Mourgues,
ses petits-enfants,
M. et Mme
Jean-Michel de Mourgues,
M. et Mme
Jean-Louis de Mourgues,
ses frères et belles-sœurs,
parents et amis
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu de
M. Jean-Marc de MOURGUES
« aux Croisettes »,
à Joncy (Saône-et-Loire),
le jeudi 2 mars 2023,
dans sa 91e année, muni
des sacrements de l'Église.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église de Joncy,
le jeudi 9 mars 2023, à 14 h 30.
Lyon.
Alain Nicolet,
son époux,
Anne Nicolet,
Sabine Nicolet,
Bénédicte et Jean-Claude
Vidal,
Clotilde et Marc Leroy,
l'abbé Thibault Nicolet,
ses enfants et leurs conjoints,
ses douze petits-enfants
et leurs conjoints,
ses huit arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Mme Alain NICOLET
née Martine Simonot,
chevalier
de l'ordre national du Mérite,
qui s'est paisiblement endormie
le 2 mars 2023, à Lyon,
à l'âge de 88 ans.
La messe d'A-Dieu
sera célébrée le lundi 6 mars,
à 10 h 30, en l'église
Saint-Joseph-des-Brotteaux,
Lyon (6e).
L'inhumation aura lieu
au cimetière de Laffrey (Isère).
Denise Porte,
Pierre et Annie Porte,
Anne-Marie et Alain Pinaud,
ses sœurs, frère,
belle-sœur et beau-frère,
Olivier et Cécile,
Claire et Christopher,
Bertrand et Carine, Pierre,
Philippe et Sophie,
ses neveux et nièces,
ainsi que ses petits-neveux
et petites-nièces,
les familles Porte, Jeannequin,
Toublet, Camus, Brochard
et Habert
ont la douleur
de vous faire part du décès de
Jacqueline PORTE
le mercredi 1 mars 2023,
er
à l'âge de 79 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée le jeudi 9 mars,
à 10 h 30, en l'église
Notre-Dame-de-la-Salette,
à Paris (15e).
L'inhumation aura lieu le même
jour à Honfleur au cimetière
Saint-Léonard, à 16 heures.
39, boulevard de la République,
95210 Saint-Gratien.
Versailles.
Catherine et Jean-Claude
Willig,
Martine et Xavier Robert,
Anne et Henri-Patrice
de Carné Carnavalet,
ses filles et gendres,
Anne-Laure Willig (†),
Marie et Jean-Baptiste Prache,
Claire et Edouard Bouthors,
Camille et Pierre
Levesque du Rostu,
Mathilde et Axel Beluche,
Laetitia et Augustin Poncelet,
Ludovic de Carné Carnavalet,
Aymeric et Sophie
de Carné Carnavalet,
ses petits-enfants,
et ses 20 arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Mme Yves POIRIER
née Christiane Walter,
survenu le 1er mars 2023,
dans sa 98e année.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le jeudi 9 mars, à 10 h 30,
en l'église Saint-Symphorien
de Versailles.
Louis-Charles
et Philippe Ramin,
ses enfants,
Typhaine, Audrey et Baptiste,
ses petits-enfants,
et toute la famille
ont la douleur
de vous faire part du décès de
M. Marcel RAMIN
le dimanche 26 février 2023,
à l'âge de 92 ans.
La cérémonie religieuse
aura lieu
le mercredi 8 mars, à 10 h 30,
en l'église Saint-Augustin,
Paris (8e).
Au nom de toute sa famille
et de ses amis partout
dans le monde,
Abdul Rahman al Sai
a l'immense douleur
de faire part du décès
de son épouse,
Ingeborg SAI
née Wengner,
à Berlin le 21 mars 1941,
et décédée à Paris
le 21 février 2023.
Il adresse
ses plus vifs remerciements
à toute l'équipe soignante
de la Résidence du Trocadéro,
à Paris (16e) et à sa directrice,
Mme Fabienne Gracchus,
pour leur soutien infaillible
et leurs soins constants qui ont
adouci ses dernières années
sur cette terre.
28, boulevard Maillot,
92200 Neuilly-sur-Seine.
Mme Marie-Claude
Salnel-Corrieras,
son épouse,
a la douleur
de vous faire part du décès de
M. Guy SALNEL
survenu subitement,
le mardi 21 février 2023.
Ses obsèques ont eu lieu
dans la plus stricte intimité.
144, rue Perronet,
92200 Neuilly-sur-Seine.
10, rue de l'Ermitage,
19270 Donzenac.
Neuilly-sur-Seine.
La comtesse Bernard
de Senneville-Grave,
son épouse,
le comte et la comtesse
Armand de Senneville-Grave,
Victoire, Adhémar, Arthus,
le comte et la comtesse
Raphaël
de Mougins-Roquefort,
Alixane, Edouard,
ses enfants et petits-enfants,
font part du rappel à Dieu du
comte Bernard
de SENNEVILLE-GRAVE
X 55,
MBA Harvard 1961,
le 1 mars 2023,
er
à l'âge de 87 ans,
à Neuilly-sur-Seine.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église Saint-Pierre,
90, avenue du Roule,
à Neuilly-sur-Seine,
le mercredi 8 mars, à 10 h 30,
suivie de l'inhumation
dans l'intimité familiale,
au cimetière de Picpus,
Paris (12e).
M. Édouard Silvy,
son époux,
le comte et la comtesse
de Quincerot,
Mlle Laetitia Silvy
et le comte Éric de Compiègne,
ses enfants,
Gabriel, Athénaïs, Alexandre,
ses petits-enfants,
le comte de Vissec,
son frère,
M. et Mme Philippe Rebois,
sa sœur et son beau-frère,
Mme Marina Deduwwa,
qui l'a accompagnée
avec dévouement,
ont la douleur de faire part
du rappel à Dieu de
Béatrice SILVY
née de Vissec,
avocat honoraire,
le 1er mars 2023, munie
des sacrements de l'Église.
La cérémonie religieuse
sera célébrée le jeudi 9 mars,
à 10 h 30, en l'église
Saint-Pierre-de-Chaillot,
à Paris (16e).
L'inhumation aura lieu le même
jour, à 16 h 45, dans la plus
stricte intimité, au cimetière
de Gonneville-sur-Mer
(Calvados).
Polminhac (Cantal).
Jean-Marie Vianney de Sonis,
son père,
Tanguy et Erwoan de Sonis,
ses frères,
Edouard et Géraud de Sonis,
ses neveux,
Jean-Marc Baugier,
son oncle et parrain,
ont la tristesse
de faire part du décès de
Christophe de SONIS
survenu le 15 février 2023,
à l'âge de 50 ans, à Paris.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Saint-Victor, à Polminhac,
ce samedi 4 mars 2023, à 14 h 30.
Christophe sera inhumé
auprès de sa mère,
Marie-France de Sonis
décédée le 25 décembre 2018.
remerciements
Tous nos remerciements
pour votre présence
aux obsèques, vos pensées,
vos prières suite au décès
à Cabriès (Bouches-du-Rhône),
le 22 février 2023, de
Paul CHAMPENOIS
et Marie-Antoinette,
née Dory.
De la part de
leurs enfants et petits-enfants,
et des frères et sœurs
de Marie-Antoinette.
messes
Une messe à l'intention de la
comtesse de TOURNEMIRE
née Hélène de Gourcuff,
rappelée à Dieu
le 23 février 2023,
sera célébrée en l'église
Saint-Ferdinand-des-Ternes,
à Paris (17e),
le lundi 6 mars, à 19 heures.
messes
et anniversaires
En souvenir de
Hubert
TAFFIN de GIVENCHY
et de
Philippe VENET
Nos pensées sont toujours
avec eux.
Ils nous manquent.
Les familles Givenchy et Venet.
Une messe sera célébrée
à leur intention,
le vendredi 10 mars 2023,
à 12 h 15,
en la basilique Sainte-Clotilde,
Paris (7e).
souvenirs
Le 5 mars 2014,
M. Jacques FOURNIER
chevalier
de la Légion d'honneur,
ancien président de Carrefour,
ancien élève de l'École
des mines de Saint-Etienne,
nous quittait.
Françoise, Pascal, Isa et Jean
vous remercient
d'avoir une pensée pour lui.
Il y a huit ans, le 2 mars 2015,
Alain TERRAIL
nous quittait.
Que ceux qui l'ont connu
et aimé aient
une pieuse pensée pour lui
en ce jour anniversaire.
Françoise et Lucile Terrail.

Depuis son inauguration le 28 janvier 1998,
le stade de France a accueilli 550 événements
et plus de 35 millions de spectateurs
(ici le 26 février, lors de France-Écosse
dans le Tournoi des six nations.)
Vente ou concession, le Stade
de France à l’heure des choix
Gilles Festor
gfestor@lefigaro.fr
I
l a vibré sur les deux coups de tête de
Zinédine Zidane un soir d’été en finale du
Mondial 1998 face au Brésil, vu Johnny
Hallyday descendre comme par magie du ciel
depuis un hélicoptère avant un concert his-
torique devant plus de 80 000 spectateurs,
prêté sa piste à la foulée du plus grand sprin-
teur de l’histoire Usain Bolt et plus récemment abrité
les exploits d’Antoine Dupont and co avec le XV de
France lors du Grand Chelem dans le Tournoi des six
nations 2022. Depuis son inauguration lors d’un
match de football France-Espagne le 28 janvier 1998
dans un froid polaire et sur une pelouse râpée, le
Stade de France a accueilli 550 événements, et plus
de 35 millions de spectateurs ont garni ses tribunes.
Théâtre des rêves, l’enceinte en forme de soucoupe
volante géante posée au bord l’autoroute A1 à Saint-
Denis, aux portes de Paris, est entrée depuis des an-
nées dans la mémoire collective des Français. Ceux-
ci sont farouchement attachés à ce qui est devenu la
maison des Bleus du football et du XV de France. Mais
l’avenir de cet écrin sportif et culturel à l’issue de
l’actuelle concession confiée à Vinci et Bouygues jus-
qu’à la fin juin 2025 est incertain. Près de trois décen-
nies après avoir financé sa construction, l’État a
accepté de briser le tabou de la vente et n’exclut dé-
sormais plus de céder l’édifice qui accueillera la Cou-
pe du monde de rugby (du 8 septembre au 28 octobre
2023) et quelques mois plus tard, les Jeux olympiques
de Paris 2024 (du 26 juillet au 11 août), couronnement
ultime pour un stade bientôt olympique.
« Nous souhaitons étudier toutes les options : à la
fois la poursuite sous un modèle de concession réactua-
lisé mais également la cession de l’équipement si des
investisseurs ou des groupements sont intéressés par
cette deuxième option », confirme l’entourage de la
ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, insis-
tant sur le caractère hautement symbolique de ce
dossier. « Il s’agit d’un équipement particulièrement
important sur un plan immobilier et sportif et pour le
territoire de la Seine-Saint-Denis, tout comme dans
l’histoire du sport français, ajoute notre source. Nous
sommes très soucieux d’organiser la prochaine phase
qui va s’ouvrir à partir de l’été 2025 de façon très
méthodique, anticipée avec deux impératifs : conserver
la vocation sportive de l’équipement et préserver les
intérêts économiques et financiers de l’État. »
Patrimoine national
En début de semaine prochaine seront rendus public
les avis de concession et de session du Stade de France.
L’objectif du gouvernement est d’avoir une vision sur
les candidatures qui pourraient arriver sur le bureau
du ministère des Sports dès la fin du mois d’avril. Le
rendu final des offres est attendu à l’automne. Au sein
du ministère, on assure que l’hypothèse d’une cession
n’est « absolument pas privilégiée ou préférentielle » par
rapport à celle d’un renouvellement de concession
champs libres
EnquêtE
Propriétaire de l’enceinte
dionysienne, l’État ouvre
le dossier de l’avenir
du Stade de France avant
la fin de la concession
accordée au duo
Vinci-Bouygues jusqu’en
juin 2025. Deux options
sont sur la table
de l’exécutif : la poursuite
du modèle actuel ou
la cession de l’enceinte
mythique. Un sujet
hautement symbolique
et sensible, auquel
le chef de l’État
Emmanuel Macron porte
une grande attention.
L’État aurait tout intérêt à prolonger
la concession. S’il vend, il ne pourra plus
rien imposer, notamment dans l’optique
d’accueillir des grands événements sportifs
un obsErvatEur au sEin du consortium vinci-bouyguEs
renégocié. Selon nos informations, le sujet fait l’objet
de débats animés au sommet de l’État. La première so-
lution aurait la faveur d’Emmanuel Macron alors que
les précédents gouvernements Jean Castex et Édouard
Philippe n’imaginaient pas la vente d’un stade consi-
déré comme un patrimoine national à préserver. Et ce,
même si en 2018, un rapport de la Cour des comptes
avait épinglé le coût de la gestion du stade pour le
contribuable, suggérant un désengagement de l’État.
Une conclusion sans doute un peu précipitée car la
donne a changé depuis une décennie. Jusqu’en 2013,
l’État propriétaire versait effectivement au consor-
tium Vinci-Bouygues une indemnité pour absence de
club résident. Celle-ci représentait 120 millions
d’euros sur quinze ans d’exploitation, avant d’être
supprimée. À ces dépenses se sont ajoutés 50 millions
d’euros de travaux de modernisation dans l’optique
des JO (éclairage, écrans géants…). « L’État ne met plus
un seul euro dans le fonctionnement du stade et n’inter-
vient financièrement qu’en cas de force majeure, comme
ce fut le cas lors de l’épisode du Covid ou s’il y a des
perturbations liées à la SNCF empêchant l’exploitation
du stade par exemple. Mais s’il laisse le Stade de France
travailler, ce modèle est vertueux. Il lui rapporte même
de l’argent puisque 25 % des bénéfices lui sont
reversés », éclaire un connaisseur du dossier.
Quels pourraient être les candidats au rachat du
Stade de France ? L’Équipe a révélé mercredi que la
Fifa envisageait de prendre le contrôle de l’enceinte
afin d’y organiser des rencontres de football de gala
ou des compétitions récurrentes comme la Coupe du
monde des clubs. « Tout acteur pourra candidater.
Concernant la Fifa, il n’y a eu aucun contact particulier
et concret au préalable sur ce sujet », balaie l’entoura-
ge ministériel. À la tête de ce projet, on retrouve le
tandem Gianni Infantino, président de l’institution
internationale et… Noël Le Graët, très proche du diri-
geant de 52 ans. Le timing est parfait pour le président
démissionnaire de la Fédération française de football
(le 28 février) qui va pouvoir se consacrer pleinement
à la gestion du bureau parisien de la Fifa dont il avait
déjà la charge. Contacté par Le Figaro, le dirigeant
breton n’a toutefois pas souhaité s’exprimer sur le
sujet. « Des discussions ont déjà eu lieu avec l’Élysée qui
voit ce projet d’un bon œil », assure une source proche
du dossier s’interrogeant tout de même sur la solidité
de l’offre : « Infantino a lancé ce projet un peu seul dans
son coin à la Fifa et il n’est pas forcément suivi là-bas. »
Le chemin menant à des organisateurs privés de
spectacle existe. Sur le principe, l’État n’est d’ailleurs
pas opposé à la candidature d’investisseurs étrangers
mais il observera avec attention la structure capitalis-
tique des prétendants. Car ceux-ci devront avoir les
reins particulièrement solides. Selon nos infor-
mations, la valeur du Stade de France est estimée
»
samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
le figaro
17
DAVID ROGERS/GEtty ImAGES VIA AFP
entre 400 et 600 millions d’euros. « Le prix sera fixé
en fonction du projet. On ne se fixe a priori aucun prix
minimum ni maximum, l’État tiendra compte de l’éva-
luation des domaines et on ne sera sans doute pas sur un
euro symbolique, c’est un euphémisme », indique-t-on
en interne. À cette somme devront s’ajouter de très
lourds investissements à prévoir pour un stade de
bientôt trente ans et vieillissant. Ceux-ci sont évalués
à plusieurs centaines de millions d’euros. « À ce prix-
là, on voit peu d’acheteurs et l’hypothèse d’une cession
semble peu réaliste », confie un observateur au sein du
consortium Vinci-Bouygues qui pourrait être inté-
ressé par le renouvellement de la concession. Le mo-
dèle économique mis en place par l’actuel gestion-
naire, un tabouret à trois pieds (concerts, matchs de
football et de rugby) est désormais bien rodé et a fait
ses preuves selon lui : « L’État aurait tout intérêt à
prolonger la concession. S’il vend, il ne pourra plus rien
imposer, notamment dans l’optique d’accueillir des
grands événements sportifs. »
Enjeu financier important
« Dans l’hypothèse d’une cession, on ne bradera rien
pour cet équipement iconique, répond-on dans les
couloirs du ministère des Sports. Nous veillerons à ce
que chaque option, vente ou concession préserve au
mieux les intérêts économiques et financiers de l’État
mais aussi à ce que les conditions d’utilisation soient
respectées dans le cahier des charges. Nous avons in-
sisté sur la vocation sportive et il y aura des contraintes
très fortes qui seront posées. » Ces négociations impli-
queront notamment les deux fédérations françaises
de football et de rugby, directement concernées.
Contactés par nos soins, la FFF et son président inté-
rimaire, Philippe Diallo, n’ont pas souhaité s’expri-
mer. Le sujet est sensible et l’enjeu financier impor-
tant pour la plus puissante des fédérations sportives
de France plongée dans une tempête médiatique ces
dernières semaines. Mais Noël Le Graët, son désor-
mais ex-patron, a souvent répété qu’il était mécon-
tent du loyer actuel versé au consortium (7,5 millions
d’euros nets pour quatre matchs par an des Bleus et la
finale de Coupe de France). Et comptait bien rené-
gocier le contrat. « C’est un engagement que je ne re-
nouvellerai jamais de ma vie, avouait-il en 2021. On a
signé ce contrat parce qu’il fallait un stade pour la Cou-
pe du monde 1998, mais cela suffit. On a assez payé.
Nous ne renouvellerons ce contrat qu’à des conditions
économiques acceptables pour la FFF. » Reste à savoir
si la future gouvernance adoptera la même ligne.
En conflit ouvert avec la mairie de Paris qui refuse
de lui vendre le Parc des Princes, le PSG pourrait-il
s’inviter dans ce dossier en projetant de s’installer à
Saint-Denis ? « Nous faisons une étude de marché qui
inclut le Stade de France. Celle-ci comprend une éven-
tuelle rénovation », répond-on au sein du club qui
estime le coût de rénovation à environ 500 millions
d’euros. « Le stade est grand, bien connecté au niveau
des transports, proche de Paris. Bien rénové, ce serait
une solution viable », ajoute l’interlocuteur. Le prési-
dent Nasser al-Khelaïfi pilote lui-même ce dossier
prioritaire. Réelle volonté de déménagement ou coup
de bluff pour faire pression sur la municipalité
d’Anne Hidalgo ? Le PSG a bien l’intention d’être un
A
acteur de plus à la grande table d’une partie de poker
qui ne fait que débuter. ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
18 champs libres
Débats
« Le #MeToo-féminisme est une idéologie
de la table rase »
PROPOS RECUEILLIS PAR
AZILIZ LE CORRE-DURGET
alecorre@lefigaro.fr
LE FIGARO. - Le #MeToo-féminisme
se considère comme « la première mise
en cause sérieuse du patriarcat »,
écrivez-vous. Que font ces féministes
des combats de celles qui les ont
précédées ?
Sabine PROKHORIS. - Pareille assertion,
qui n’est pas simplement naïve, veut voir
dans #MeToo une « révolution culturel-
le » : table rase pour l’avènement d’un
monde dont le « patriarcat » aura enfin
été éradiqué. Elle ne repose pas sur une
analyse historique et/ou sociologique des
rapports entre les sexes – comme c’est le
cas chez Simone de Beauvoir dans Le
Deuxième Sexe, ou chez le sociologue
Erving Goffman dans L’Arrangement des
sexes –, mais sur un double postulat
(pseudo) théorique : la domination mas-
culine est « systémique » ; et elle est en-
gendrée par un « récit » – le récit « pa-
triarcal ».
Dans cette optique, le « récit » est ce qui fa-
brique la réalité, dans toutes ses dimen-
sions. Il faut donc substituer un « récit fé-
ministe » au « récit patriarcal »,
moyennant toutes sortes d’entreprises de
rééducation mentale et politique.
Des combats féministes du XXe siècle, qui
ont permis des conquêtes majeures –
concrètes, et pas seulement « formelles »
comme on l’entend trop souvent – en
matière d’égalité juridique, politique,
fabien clairefond
sexuelle, le #MeToo-féminisme a récupéré
certains thèmes et slogans, tout en consi-
dérant qu’au fond, il ne s’était rien passé de
décisif, parce que les féministes d’antan se-
raient à leur insu demeurées captives de
l’oppression « systémique » (la preuve : le
dernier mot du
Deuxième Sexe est
« fraternité » !).
Sabine ProkhoriS C’est à peu près aussi
Dans un nouvel essai percutant, paru ce vendredi, absurde que si les
agriculteurs fon-
Les Habits neufs du féminisme (Éditions intervalles),
daient leurs revendi-
la psychanalyste et philosophe analyse cations aujourd’hui
les conséquences du mouvement #MeToo. sur un « servage sys-
elle y voit un dévoiement des combats féministes. témique ».
L’Union européenne doit accepter de voir
en face la montée des actes antichrétiens !
L’
actualité récente avec
les religieuses
contraintes de quitter
leur quartier à Nantes
en raison de
l’insécurité tout
comme la lecture du dernier rapport
parlementaire des députés Isabelle
Florennes et Ludovic Mendes sur les
actes antireligieux et antichrétiens dans
notre pays nous rappellent que la haine
ne connaît pas de trêve. Si la montée
inquiétante de la violence contre
les religions touche l’ensemble
des croyants, le christianisme demeure
la première cible des actes antireligieux
en France comme en Europe, selon le
ministère de l’Intérieur et l’OSCE.
L’évaluation précise de ces derniers,
tant quantitative que qualitative,est
certes complexe, mais il est en revanche
une certitude : ce phénomène gagne
en amplitude, en gravité et en visibilité.
Ainsi, ce début d’année assombri par
la fusillade dans une église londonienne,
les dégradations des calvaires,
les actes de vandalisme et les tentatives
d’incendie des églises à Champagne-
au-Mont-d’Or et à Paris n’est, hélas,
que le reflet d’une violence persistante.
Face à cette
Tribune CoLLeCTive
résurgence de la
haine, qui demeure
toutefois sans
Deux religieuses du quartier bouffay, à nantes, commune mesure
avec les crimes et
vont quitter la ville, épuisées par l’insécurité. les persécutions
Si la montée inquiétante de la violence contre commis ailleurs
les religions touche l’ensemble des croyants, dans le monde,
le christianisme demeure la première cible l’heure n’est plus
des actes antireligieux en France comme en aux demi-mesures
et aux effets
europe. Dans une tribune collective, une vingtaine
d’annonce
de personnalités appellent l’union européenne à convenus et
A
réagir et rappellent que tous les actes antireligieux répétitifs. Tous les
doivent être combattus avec la même force. actes antireligieux
Vous reliez dans votre ouvrage, Dès le début de la révolution islamique,
la révolution #MeToo et la révolution l’absolutisme religieux s’est attaqué à la li-
morale qu’accomplirait « l’éthique berté de tous, et dans une obsession mal-
du care ». De quoi s’agit-il et en quoi saine de la sexualité, en premier lieu à celle
se rejoignent-elles ? des femmes, contraignant les filles dès
Elles se rejoignent parce qu’elles partici- l’école primaire à empaqueter leurs corps
pent conjointement à l’édification du nou- de gamines dans des tissus qui les escamo-
veau « récit féministe », dans une logique teraient, et entraveraient toute liberté de
de rupture avec le « patriarcat systémi- mouvement. Contre le voilement des filles
que ». L’« éthique du care » se présente et des femmes, Simone de Beauvoir s’était
ainsi comme une « éthique » spécifique- élevée à l’époque. Or les féministes qui se
ment « féministe », remettant « radicale- disent « inclusives » ne trouvent rien à re-
ment en cause l’éthique dominante » (pa- dire par exemple à l’instauration d’un « hi-
triarcale). Un tag tel que « Dénonce tes djab day » à Sciences Po…
potes ! » sur les murs d’une université sera Mais le plus choquant à mes yeux, c’est la
alors sans doute considéré comme répon- récupération par un certain nombre de ces
dant aux critères de bonne morale « fémi- « inclusivistes », qui pataugent dans la plus
niste ». Car cette « éthique du care », veut grande confusion intellectuelle et politi-
se fonder sur « le point de vue des domi- que, de la révolution des Iraniennes, les-
nés » – femmes, « racisés », et autres « mi- quelles savent très bien, elles, ce que signi-
fie le voilement. Ce
« Contre le voilement des filles et des qu’elles
femmes, Simone de beauvoir s’était voir religieux. Cette ré-
récusent, c’est
très précisément le pou-
élevée à l’époque. or les féministes qui cupération insultante a
été jusqu’à vouloir attri-
se disent « inclusives » ne trouvent rien buer cette révolution
à redire par exemple à l’instauration féministe à #MeToo,
d’un « hidjab day » à Sciences Po… » dont les activistes veu-
lent en finir avec le
« patriarcat », mais re-
norités » – pour faire droit à, voire refonder fusent que l’on pointe la signification du
le droit sur – ces « voix silenciées ». À cha- voilement, qui ne disparaît pas magique-
que « section » sa « charia », en somme… ment parce qu’une femme ici choisit de fai-
re en se voilant la démonstration de son
Alors que les femmes iraniennes appartenance (ou de sa piété) religieuse.
manifestent depuis des mois dans la rue,
comment expliquez-vous le silence Au nom des « discriminations » supposées
d’une partie des féministes à ce sujet ? à l’égard des trans, cette minorité
Les femmes iraniennes, avec un courage prend de plus en plus de place au sein
qui force l’admiration, combattent la ty- des combats féministes. Quel regard
rannie de la théocratie islamique qui sévit portez-vous à ce sujet ?
depuis quarante-quatre ans, et elles ont été Ces discriminations ne sont pas niables, et
immédiatement rejointes par les hommes. les avanies auxquelles exposent les situa-
En termes de morts et de pendaisons à tions de transsexuation – terme que je pré-
l’aube, ceux-ci payent un très lourd tribut fère à ceux de transgenrisme ou de trans-
dans ce soulèvement stupéfiant contre le sexualisme, je m’en explique dans mon
pouvoir des mollahs, il convient de ne pas livre – peuvent être très cruelles. Pour une
l’oublier – et pourtant ce fait est passé sous infime minorité de personnes, passer sur
silence, particulièrement dans les médias l’autre rive de la sexuation peut représen-
qui revendiquent un engagement « fémi- ter une issue psychiquement salvatrice
niste ». Femmes et hommes, ils « combat- dans la relation à ce que Robert Musil appe-
tent ensemble », accomplissant un vœu lait « la complication réaliste » – la matéria-
formé jadis par Virginia Woolf. lité du sexe. Cela dit, l’activisme trans est
doivent être combattus avec la même Pourquoi refuse-t-elle ainsi d’ouvrir les
force, car ils menacent non seulement yeux sur une réalité certes déplaisante,
l’ensemble des croyants, mais mais dont attestent les statistiques et
également les principes fondateurs l’expérience quotidienne de nombreux
de notre civilisation, au premier rang Français ? Que justifie ce « deux poids,
desquels la liberté de conscience. deux mesures » dont on doit
Endiguer ce fléau des violences bien reconnaître qu’il constitue
antireligieuses qui ont quitté le terrain une discrimination à l’égard de
du droit légitime à la critique pour la communauté chrétienne ? L’Union
rejoindre celui des délits et des crimes européenne ne doit pas oublier que
implique une action coordonnée à les valeurs communes qui la fondent
l’échelle européenne. Dans la mise en sont l’égale protection des individus.
œuvre de sa stratégie contre le racisme L’Europe serait-elle à ce point mal
et les actes de haine, l’Union européenne à l’aise avec la protection de l’identité
a adopté la décision-cadre du Conseil héritée de son histoire qu’elle refuserait
du 28 novembre 2008 et, dans le de voir en face la montée des actes
prolongement, a créé des fonctions antichrétiens ?
de coordinateurs en charge de la lutte Ce qui se joue ici, c’est l’égale garantie
contre l’antisémitisme et la haine des libertés fondamentales de pensée et
antimusulmane. Si un tel combat s’avère de croyance en Europe. Mais c’est aussi,
dans l’indifférence
coupable des
« Pourquoi, dans un courrier
du 11 novembre 2022 en réponse
pouvoirs publics,
le maintien du lien
avec ce qui
à une demande formulée à ce propos a fondé la culture
par l’association La France en partage, européenne
la Commission européenne a-t-elle elle-même,
du monachisme
explicitement confirmé son refus des origines
de désigner un coordinateur en charge de aux douze étoiles
la lutte contre les actes antichrétiens ? » de son drapeau.
Et, avec elle,
la pérennité d’un
indispensable, ce que nul ne conteste, ne élément essentiel de notre civilisation.
serait-il pas juste de l’étendre à la lutte Si nous voulons vivre en harmonie,
contre ce qu’il faut bien appeler il faut lutter de façon égale contre toutes
l’antichristianisme ? les idéologies de destruction. C’est
Pourquoi, dans un courrier du pourquoi nous prions avec insistance
11 novembre 2022 en réponse à une la Commission européenne de
demande formulée à ce propos par reconsidérer sa réponse et de nommer
l’association La France en partage, la un coordinateur en charge de la lutte
Commission européenne a-t-elle contre les actes antichrétiens, visant les
explicitement confirmé son refus de personnes et les biens. La Commission
désigner un coordinateur en charge de la doit faire ce pas pour confirmer
lutte contre les actes antichrétiens ? son attachement à l’égale liberté de
aujourd’hui piégé – comme le féminisme
new-look – par la revendication du stig-
mate comme « identité », et par le néodis-
cours sur le « genre ».
Le « genre » non au sens sociologique, his-
torique, ou même freudien, d’un concept
qui permet de décrire les façons dont les
sociétés, et la psyché traitent la réalité ana-
tomo-physiologique. Le gender des élucu-
brations butlero-queer : un « récit » inté-
gralement « performatif ». Position qui
frise le délire, comme le démontre le
« Lexique trans » du planning familial, se-
lon lequel le sexe est « assigné à la naissan-
ce » par décision des médecins « en fonc-
tion de “normes de longueur du pénis ou
du clitoris” ». Le « récit » donc générerait
la réalité matérielle. Or si vous considérez
que la loi de la chute des corps est un « ré-
cit », et que votre (nouveau) « récit » dit :
« je peux voler », vous vous écraserez
quand même au sol si vous vous « envolez »
depuis le cinquième étage…
Mal pensée, la controverse trans brouille le
débat féministe. Soit en donnant l’excep-
tion « trans » en modèle de « déconstruc-
tion » du « récit patriarcal » ; soit, inverse-
ment, en entraînant une fraction du
féminisme ulcéré sur la pente, à mes yeux
désolante et tout aussi séparatiste, du « fe-
mellisme ». De tous côtés, en complète
méconnaissance de la dimension incons-
ciente, chez tous, du trajet de sexuation.
Le féminisme a-t-il encore lieu
d’être aujourd’hui ?
Bien sûr. Mais à rebours de la direction vic-
timaire du rapport biaisé du HCE, qui nous
présente la France comme un enfer sexiste.
Un féminisme conséquent ne permet pas
aux femmes d’oublier qu’elles sont des su-
jets responsables, et non des « victimes
systémiques ». ■
■ Les Habits
neufs
du féminisme
édition intervalles,
11 €, 96 p.,
parution le 3 mars 2023
conscience pour tous. Nous ne pouvons
plus nous payer de mots et nous
contenter de répéter sans y croire que
l’ensemble des croyants bénéficie
de la même protection européenne.
Pour qu’une telle protection existe,
elle doit être instituée. Si les instances
européennes devaient persister dans
leur refus de prendre en compte cette
demande, il sera alors impératif de
mobiliser l’ensemble des voies politiques
et juridiques pour la faire aboutir.
Signataires : Carine Chaix, avocate
à la cour, présidente de l’association
La France en partage ; Alban du Rostu,
directeur général du Fonds du bien
commun ; Jérôme Bascher, sénateur, vice-
président du groupe France Saint-Siège
au Sénat ; Henri de Beauregard, avocat à
la cour ; Jérôme Besnard, juriste et
essayiste ; Olivier Bonassies, auteur,
directeur de l’association Marie de
Nazareth ; Loris Chavanette, historien ;
Typhanie Degois, ancienne députée
LREM ; Denis Duverne, président
de l’association Saint-Jean de Passy ;
Maxime Bonassies, responsable
de l’association M de Marie ; Michel
Degoffe, professeur de droit public ;
Thomas Delenda, directeur de
l’association Hozana ; Jean-Michel
Fauvergue, romancier, ancien député
LREM ; Julien Le Page, président de SOS
Calvaires ; Charles Prats, vice-président
de l’Association professionnelle
des magistrats ; Gregor Puppinck, juriste,
directeur du think-tank ECLJ ; Jean-
Bernard Prim, délégué général
de l’Alliance Siméon ; Thierry Rambaud,
professeur de droit public, avocat à
la cour ; Frédéric Rouvillois, professeur
de droit public, délégué général de la
Fondation du Pont-Neuf ; Joseph Macé-
scaron, écrivain ; Nicola Speranza,
secrétaire général de la FAFCE.
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023

champs libres
le figaro

OpiniOns 19

chrOnique
Mathieu Bock-Côté
Quand la pseudoscience entend confisquer
le débat sur l’immigration

L
undi paraissait dans Le Monde Leur propos se veut sans appel. Plus encore, « contrairement aux idées Nos scientifiques ajoutent même que
une étonnante tribune « Les chercheurs de toutes les disciplines reçues, il n’y a pas davantage d’arrivées « davantage qu’un référendum, un débat
de signataires se déclarant sont d’accord : il n’y a pas de submersion dans les pays développés ; les flux citoyen a un rôle à jouer pour guider
« scientifiques » et exigeant migratoire, les régularisations et les migratoires vers les pays du Sud global l’action publique ». On retrouve alors
justement qu’au nom sauvetages en mer n’ont jamais provoqué sont équivalents quantitativement ». un vieux réflexe de la gauche
de la « science », les termes d’“appel d’air” et le grand remplacement Autrement dit, le Sud ne remonterait pas idéologique : elle hurle au dévoiement
du débat sur l’immigration soient de la population française est un mythe. davantage vers le nord que ce dernier de la démocratie dès lors qu’elle ne
intégralement reformulés. Sociologues, politistes, économistes, ne migrerait vers le sud. Au pays de maîtrise plus intégralement les termes
On trouvait parmi les signataires la fine juristes, démographes, géographes, l’immigration massive qui n’existe pas, du débat public.
fleur du progressisme mondain historiens et philosophes sont unanimes sur tout va bien, ce qui n’empêchera pas Mais d’où vient le sentiment
et une masse de figures appartenant ces questions. Malgré leurs efforts pour se demain les idéologues immigrationnistes qu’ont plusieurs de devenir étrangers
à ce qu’on pourrait appeler la faire entendre, les scientifiques se désolent de chanter la diversité d’une France et minoritaires en leur propre pays ?
« lumpenintelligentsia », mais réclamant de voir les résultats de la recherche ignorés n’ayant plus rien à voir avec la France Du fait qu’ils seraient enfermés dans
néanmoins qu’on les écoute ou détournés dans les débats publics d’hier, sans qu’on sache, selon leur une conception périmée de l’identité,
religieusement. Le titre de la tribune et les discours politiques. » Rassurante raisonnement, d’où cette diversité associée à l’existence d’un peuple
témoignait d’un esprit de sérieux unanimité ! Circulez, il n’y a rien à voir. nouvelle provient. historique, auquel les immigrés seraient
quelque peu lyssenkiste : « Il est urgent Le commun des mortels serait victime Cela n’empêche pas plusieurs de appelés à s’assimiler. Dès lors qu’on
de remettre de la raison et du débat d’un système médiatique laissant croire ces « scientifiques », qui sont en fait des explique que ce peuple n’a jamais existé,
démocratique dans le traitement partout à l’existence d’une mutation idéologues immigrationnistes, d’affirmer que la majorité d’accueil est un concept
des questions de migration ». démographique à l’échelle occidentale. au même moment, mais dans d’autres fantasmé dont la définition a tellement
lieux, que les mouvements migratoires changé au fil de l’histoire qu’elle

@
de masse sont inévitables, qu’il est vain est insaisissable, la possibilité d’une
de vouloir les contenir, et qu’il vaudrait submersion migratoire vient de se
100 000 citations
et proverbes sur evene.fr ENTRE GUILLEMETS mieux « faire avec ». Pour reprendre les dissoudre conceptuellement. Il suffit
mots d’un des signataires de cette tribune apparemment d’expliquer au peuple
4 mars 1832 : mort à 41 ans de Jean-François Champollion, qui s’exprimait ailleurs dans la presse qu’il n’existe pas pour calmer sa peur
qui déchiffra les hiéroglyphes. cette semaine, « mener une politique de la disparition. Il arrive toutefois
rationnelle (…) demande du courage au peuple de ne pas croire à la théorie
de son inexistence.
Lettre à son frère, en juin 1814 politique pour considérer la migration
comme une donnée structurelle qu’il faut On pourrait se moquer longtemps,

Je couche deux ou trois fois organiser plutôt que lui résister ». je le disais plus haut, du lyssenkisme
ArtmediA / AlAmy viA reuters ConneCt

Un autre signataire dira que la meilleure de ces « scientifiques » auxquels font

manière d’éviter d’avoir des immigrés écho sur un autre sujet ceux qui nient
par semaine sur l’inscription irréguliers sur le territoire consiste
à les régulariser. Il fallait y penser.
l’existence des sexes et qui entendent les
ramener exclusivement dans le domaine
de Rosette. Je n’ai jusqu’ici Pour l’instant, nos « scientifiques »
ont une proposition : ils souhaiteraient
du genre. Leur manifeste ressemble
à celui qu’on aurait pu produire à

gagné que des maux de tête l’organisation d’une convention

citoyenne sur la migration, qu’ils
l’Académie des sciences morales de
l’URSS, en 1988, pour expliquer la valeur
pourraient encadrer, éclairer, scientifique insurmontable du marxisme
et deux ou trois mots ! « paramétrer. « Une convention citoyenne
repose sur la montée en compétence
et le caractère impérissable du socialisme
réel. C’est le propre des idéologies qui
des citoyens tirés au sort. Ces derniers se prennent pour la science : plus le réel
écoutent et débattent avec des scientifiques les dément, plus elles se radicalisent
et des experts de la société civile. » et se fâchent à l’idée qu’on les contredise.

De Catherine II à Vladimir Poutine :

comment la Russie justifie ses annexions

L
+ » Lire aussi page 8
a Russie n’a jamais manqué
d’imagination pour justifier
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais
Vladimir Poutine se livre à cette
entreprise dans le domaine de la guerre.
sur le territoire ottoman avec
Constantinople pour capitale ». Si la
elle n’avait ni le temps ni l’argent pour
intervenir. Ce déplacement de frontière,
ses conquêtes. Ce pays Il renoue de façon consciente avec protection des chrétiens paraissait un des plus importants depuis le traité
préoccupé par l’éternité, qui une dialectique fondée sur l’ambiguïté être un motif vertueux, resté d’ailleurs de Paris (1763), relevait d’une audace
a fait de la métaphysique un des responsabilités et sur le prétendu un fantasme, l’impératrice l’employa remarquable, laquelle profitait aussi
art de vivre, voire un art tout manichéisme de l’Occident. Passant par surtout pour accroître son territoire d’une conjoncture favorable.
court, parfois exceptionnel, se méfie pertes et profits les mains tendues depuisau mépris des traités. Au terme À l’image des individus, les nations
de la rationalité. Cette dernière serait plus de vingt ans, il n’en retient que la d’une énième guerre (1768-1774), ont des aspérités, et parfois les qualités
d’autant plus suspecte que l’Occident la prétention des États-Unis, comme si qui verra au passage la Pologne de leurs défauts. En elles coexistent
détournerait à son profit, en l’invoquant lui-même était d’ailleurs connu pour sa démembrée, l’impératrice obtint des passions contradictoires qu’il suffit
pour justifier, dans tous les domaines, sa modestie. À l’histoire politique il opposele droit de « protéger » les chrétiens de stimuler pour parvenir à un résultat
suprématie ; et l’Ouest n’aurait, au fond, orthodoxes, ce qui ou à un autre, chacune cherchant,
aucun sens de l’altérité. Dans son était une manière de comme l’écrivait Paul Valéry du monde
discours prononcé à Harvard en 1978,
connu depuis sous le titre Le Déclin du
courage, Alexandre Soljenitsyne
déclarait : «Toute culture originale (…)
« Vladimir Poutine renoue de façon
consciente avec une dialectique
fondée sur l’ambiguïté des
s’immiscer en Crimée.
La justification
à la fois vertueuse
et opportuniste
moderne, « une économie, une politique,
une morale, une esthétique, et même
une religion – et même… une logique,
peut-être ? ». Voilà le tour de force
constitue déjà un monde à part, plein responsabilités et sur le prétendu de l’extension de Poutine : proposer une rationalité
de mystère et d’inattendu pour la pensée
occidentale. (…) Tel a été, durant mille
ans, le cas de la Russie, bien que la pensée
manichéisme de l’Occident » des frontières était
trouvée. Mieux
encore, en un même
alternative à une Russie déclassée, au
terme de laquelle la faute en reviendrait
à ses ennemis soi-disant naturels.
occidentale ait systématiquement refusé une anthropologie douteuse, au terme mouvement, l’impératrice passait Sa puissance tient à la négation
de reconnaître son originalité ». Cette de laquelle les Ukrainiens seraient du statut de conquérant à celui de des évidences, et à l’inversion de toutes
assertion a sa part de vrai, et le génie autant de Russes qui s’ignorent. protecteur. En 1783, elle annexe les définitions : qui attaque défend,
de la Russie, de sa littérature, par De là une évidence : Moscou serait unilatéralement la Crimée, et se qui résiste provoque, qui tue souffre.
fAbien ClAirefond

exemple, vient de ce qu’elle parvient dans son droit en les réunissant. Quant à contente, dans la proclamation Si la Russie n’est pas l’Occident,
à tirer, du chaos, beauté, grâce, et même l’Occident, son arrogance disqualifierait officielle, de déclarer « la soumission si elle préfère la vérité à la réalité,
parfois harmonie. d’emblée ses récriminations. à la puissance russe de la presqu’île si elle n’envisage pas la vie sans
Cette rhétorique détournée de son La méthode n’est pas nouvelle. de Crimée ». Inutile de pleurer sur le perspective de la mort, si elle dédaigne
objet peut devenir Catherine II tenait à donner à la Russie sort d’un Empire ottoman loin d’être le confort et chérit l’épreuve, elle ne se
le prétexte à la un accès à la mer Noire. La Crimée était exemplaire à l’égard des chrétiens. Il ne conçoit, pour autant, ni sans générosité
Arthur cheVAllier destruction de toute
forme de logique
la proie idéale. Ce khanat dépendant
de l’Empire ottoman était délaissé par
sert pas ici de modèle, mais d’exemple.
Cette épopée solitaire de Moscou n’a pas
ni sans humanité. En quoi elle se
distingue du sort auquel voudrait
Pour justifier l’invasion russe en ukraine, et, par conséquent, Constantinople, dont l’administration beaucoup plu aux Occidentaux, sauf à la vouer Vladimir Poutine.
Vladimir Poutine accuse l’Otan de velléités de toute forme de et l’armée tombaient alors en pleine l’Autriche, son principal allié. La plupart * Arthur Chevallier est éditeur et auteur de
morale, puisque déliquescence. Dans le même temps, d’entre eux étaient, en cette fin de siècle plusieurs ouvrages sur Napoléon. Il a été
expansionnistes, tout en prétendant que l’indistinction entre l’impératrice menait un « projet grec », des révolutions, occupés à leurs propres commissaire de l’exposition « Napoléon »
les ukrainiens sont des russes qui s’ignorent, le bien et le mal est à savoir, écrit l’historien géorgien guerres ou à leurs propres crises. Même (la Villette/Grand Palais). Il vient de publier
explique l’essayiste*. Au regard de l’histoire, une des définitions Alexander Mikaberidze, la France, pourtant alliée historique « Napoléon et le bonapartisme »
la méthode n’est pas nouvelle, analyse-t-il. du nihilisme. « le rétablissement d’un État byzantin du sultan, s’est contentée de protester ; (« Que sais-je ?», janvier 2021).

Dassault Médias SOCIÉTÉ DU FIGARO SAS Directeur des rédactions Jacques-Olivier Martin (directeur Directeur artistique FIGAROMEDIAS Impression L’Imprimerie, 79, rue de Roissy FR

ce journal
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“Sans la liberté de blâmer il n’est point d’éloge flatteur” Beaumarchais

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 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro - N° 24 427 - Cahier N° 2 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

> Focus
lefigaro.fr/economie PizzaS
CoNtamiNéeS :
l’uSiNe buitoNi
automobile graNd témoiN à l’arrêt
l’allemagNe bloque « SaNS agriCulture durable, Un an après le scandale sanitaire lié à la
la fiN du moteur Ce SièCle fiNira trèS mal » consommation de pizzas Fraîch’Up, de
thermique eN 2035 Page 24 Sébastien
Sébastien Abis,
de
Abis, spécialiste
spécialiste Page 26 la marque Buitoni, contaminées à la
bactérie E. coli, qui a causé le décès de
de la
la géopolitique
géopolitique agricole.
agricole.
deux enfants et des dizaines d’intoxi-
cations, le site produisant les produits
incriminés est en sursis. Nestlé France,

Nouvelle année de profits

propriétaire de la marque, a annoncé
aux salariés la suspension de l’activité
de l’usine de Caudry (Nord), en raison
d’une chute des ventes. Après neuf

records pour CMA CGM

mois d’arrêt, le site avait rouvert par-
tiellement mi-décembre, la ligne de
production mise en cause n’ayant ja-
mais repris son activité. « Le marché
de la pizza surgelée a chuté de 20 % en
François BoUCHon/VinCent Boisot/Le Figaro, eyewaVe/LaUrenCesoULez/stoCk adoBe

un an et a d’autant plus impacté la

marque Buitoni, a expliqué à l’AFP un
porte-parole de Nestlé France. Malgré
tous les efforts déployés pour assurer
un redémarrage de l’usine dans les
meilleures conditions en décembre
2022, la dégradation des perspectives
de commandes a contraint Nestlé
France à réagir. »
L’entreprise n’a annoncé aux salariés
qu’une « suspension temporaire » de
l’usine de Caudry. Mais certains crai-
gnent qu’il ne s’agisse d’une première
étape avant une fermeture définitive.
« Je pense qu’on va vers une fermetu-
re, sans aucun doute, s’est alarmé le
maire de Caudry, Frédéric Bricout. Ce
qu’on demande au groupe Nestlé, un
groupe mondial qui fait des milliards de
bénéfices, c’est de substituer un autre
produit à la production de pizzas à
L’armateur marseillais a gagné l’an passé plus de 23 milliards d’euros. Caudry. »
C’est l’entreprise française la plus profitable, devant Total et Stellantis. Pages 22 et 23 Le scandale alimentaire a éclaté en fé-
vrier 2022. Santé publique France
(SPF) et la Direction de la répression
des fraudes (DGCCRF) ont été alertées
par une recrudescence de cas d’insuffi-

Paris et rome affichent un front commun industriel
Le ministre de l’Économie, Bruno
Le Maire, s’est rendu vendredi à
Rome pour réchauffer la coopéra-
tion économique franco-italienne.
Face aux vents contraires pour
l’industrie européenne que sont les
subventions massives et le protec-
tionnisme américain, la France
avait porté tous ses efforts, à la fin
de l’année dernière, à ramener
l’Allemagne à ses côtés pour es-
quisser une réponse commune.
Cet axe Paris-Berlin, ressuscité à
grand-peine face à ce péril écono-
mique, avait entraîné l’inquiétude,
voire la frustration, de Rome. Le
gouvernement de Giorgia Meloni a
affiché son scepticisme face aux
velléités du couple franco-alle-
mand d’assouplir le régime euro-
péen des aides d’État aux entrepri-
ses, craignant d’être laissé pour
compte des largesses des deux
premières économies du conti-
nent. La première ministre d’ex-
trême droite avait aussi critiqué le
déplacement de Le Maire avec son
homologue allemand, Robert Ha-
beck à Washington pour défendre
la position de l’Europe.
Cette visite romaine de Le Maire
visait aussi à raviver la flamme du
traité bilatéral du Quirinal, signé
en grande pompe en novembre
2021 par Emmanuel Macron et Ma-
rio Draghi, prédécesseur de Gior-
gia Meloni, avec qui l’entente était
parfaite. Son déplacement a été
« fructueux », selon l’hôte de Ber-
cy, qui promet un « tournant » dans
la coopération économique entre
les deux pays. Avec ses homolo-
gues de l’industrie, Adolfo Urso, et
de l’économie, Giancarlo Giorgetti,
ils ont signé une feuille de route in-
dustrielle qui prévoit de renforcer
la coopération en matière de nu-
cléaire, de panneaux solaires,
d’hydrogène vert ou de spatial. Par
ailleurs, l’Italie apporte désormais
son soutien à la réforme des aides
d’État de Bruxelles et à la création
d’un « fonds de souveraineté »
européen pour l’industrie, puisant
« en premier lieu » dans les fonds
disponibles existants. F. C.
sance rénale chez des enfants, liés à
une contamination par la bactérie
E. coli. Le 18 mars, Nestlé rappelait ses
pizzas et fermait les deux lignes de
production. Le 1er avril, la préfecture y
interdisait toute activité. Une informa-
tion judiciaire a été ouverte mi-mai,
pour homicide involontaire à l’égard
d’une personne et blessures involon-
taires concernant quatorze autres. En
juillet, le patron de Nestlé France,
Christophe Cornu, a présenté ses « ex-
cuses » aux familles des enfants tou-
chés et a annoncé la création d’un
« fonds de soutien aux victimes ». D. G.

le PLUS du L'hiSToire microprocesseurs :

FIGARO écO
les députés votent l’allongement arm préfère Wall Street
Presse
intelligence du congé pour décès d’un enfant à la bourse de londres

L’
artificielle : la bataille Assemblée nationale a des Solidarités, Jean-Christophe Combe, Le fabricant britannique de site à Bristol et des embau-
des droits d’auteur unanimement voté jeudi soir a souligné qu’« on ne peut qu’être d’accord microprocesseurs Arm, filia- ches.
Page 28 en faveur d’un allongement du sur ce sujet » du congé deuil, et s’en est remis le du groupe japonais Soft- « Le Royaume-Uni poursuit les
congé minimum pour le décès à la « sagesse » de l’Assemblée. bank, a annoncé jeudi soir réformes ambitieuses des rè-
d’un enfant, en le portant de Les députés ont adopté cet amendement LFI, avoir choisi de s’introduire gles régissant ses marchés de
LA SÉANCE cinq à douze jours dans le code du travail. dans le cadre de l’examen d’une proposition en Bourse à Wall Street. Un capitaux » en s’appuyant sur
DU VENDREDI 03 MARS 2023 Le code du travail prévoit actuellement de loi plus large du groupe Horizons, visant à camouflet pour le gouverne- sa place de « premier centre
CAC 40 cinq jours pour le décès améliorer l’accompagnement ment britannique, qui ba- d’investissement en Europe et
7348,12 +0,88% d’un enfant, ou sept jours des familles d’enfants taillait depuis des mois pour deuxième au monde », a fait
ouvrés s’il a moins de gravement malades. que ce fleuron technologique valoir le gouvernement dans
DOW JONES 25 ans. Pour le décès d’un Ce texte a lui aussi été choisisse plutôt la Bourse de un communiqué.
33247,25 +0,74% enfant de moins de 25 ans, adopté à l’unanimité et doit Londres, en perte d’attracti- Depuis l’entrée en vigueur
un « congé de deuil maintenant passer au Sénat. vité depuis le Brexit. Le effective du Brexit début
ONCE D’OR parental » de huit jours Il prévoit de porter de deux même jour, le géant des ma- 2021, les places européennes
1845,55 (1831,75) tériaux de construction CRH ont déjà commencé à dispu-
supplémentaires à cinq jours la durée, pour
a annoncé son intention de ter la pole position de Lon-
fractionnable, pour partie les parents, du congé pour
PÉTROLE (lond) transférer sa cotation princi- dres en Europe : Amsterdam
pris en charge par la annonce de la survenue d’un pale vers les États-Unis.
85,370 (84,350) en termes de valeur d’échan-
Sécurité sociale, avait handicap ou d’une pathologie La décision d’Arm « est un ge et Paris pour la valeur des
EUROSTOXX 50 été ajouté en 2020. chronique d’un enfant. coup pour l’attractivité (de la actions des entreprises co-
4297,90 +1,35% Il y a deux ans, le rejet Le texte prévoit en outre City) auprès des investisseurs tées. Pour tenter de répondre
initial par l’Assemblée d’un d’interdire le licenciement de internationaux en tant que à la concurrence européen-
FOOTSIE allongement de ce congé tout parent salarié concerné, destination de choix pour les ne, le régulateur financier
7947,11 +0,04% avait suscité une vague de faciliter l’accès au géants de la technologie », a britannique (FCA) a déjà as-
d’indignation, et la ministre télétravail ou encore le commenté Victoria Scholar, soupli les règles d’introduc-
NASDAQ du Travail de l’époque, maintien dans le logement, analyste à Interactive Inves- tion en Bourse, notamment
12204,58 +1,33% Muriel Pénicaud, s’était sous conditions, en cas de tor. Arm a annoncé jeudi de en réduisant fin 2021 de 25 %
retrouvée sur la sellette. renouvellement de bail. ■ nouveaux plans pour accroî- à 10 % la proportion d’ac-
NIKKEI Cette fois, le ministre J. R. P. tre sa présence au Royaume- tions devant être mises à dis-
A

27927,47 +1,56% Uni, avec l’ouverture d’un position du public.

 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
22 l'événement
CMA CGM,
le nouveau géant
du capitalisme
français
Pour la deuxième année, l’entreprise dirigée par
Rodolphe Saadé est la plus profitable de l’Hexagone.
jean-yves guérin £@jyguerin
transport C’est une tradition.
Sans tambour ni trompette, CMA
CGM a fait part de ses résultats an-
nuels via un communiqué envoyé
vendredi en fin d’après-midi. La
marque de fabrique d’un groupe qui
préfère rester sous les radars. Jus-
qu’ici, cela ne suscitait aucun com-
mentaire. Après tout, le troisième
armateur mondial n’a de comptes à
rendre à personne : cette société
contrôlée à 73 % par la famille Saadé
n’est pas cotée en Bourse. Mais, cette
fois, bon gré mal gré, le roi des porte-
conteneurs qui a son QG à Marseille
va se retrouver sous le feu de projec-
teurs. Avec 24,9 milliards de dollars
de bénéfices (23,5 milliards d’euros)
dégagés en 2022, le transporteur est
pour la deuxième année consécutive
l’entreprise la plus profitable de
France. Loin devant TotalEnergies
(19,5 milliards d’euros) ou Stellantis
(16,8 milliards d’euros).
De quoi surprendre car CMA CGM
est une belle inconnue. « Personne ne
l’a vue venir : le transport maritime
n’est pas un enjeu politique dans
l’Hexagone. Son activité centrée sur le
fret ne fait pas rêver et l’entreprise
n’est pas basée à Paris », explique
l’ex-ministre des Transports, Domi-
nique Bussereau qui siège au conseil
d’administration du groupe. Ceux
qui s’y intéressent racontent une
autre histoire : celle d’un entrepre-
neur, Jacques Saadé, débarqué à
Marseille dans les années 1970 pour
fuir la guerre du Liban. Persuadé que
le conteneur va changer la donne du
fret, il crée en 1978 la CMA (Compa-
gnie Maritime d’Affrètement) avec
quatre salariés qui, au départ, pro-
pose un seul trajet (Beyrouth-Mar-
seille). Aujourd’hui, le groupe
compte 155 000 salariés et exploite
plus de 250 lignes. Une montée en
puissance à l’image d’une navigation
en haute mer : chahutée, tempé-
tueuse, pleine de hauts… mais aussi
de bas.
« En 2019, CMA CGM perdait de
l’argent car il y avait trop de bateaux
sur le marché. Au printemps 2020, le
groupe a même obtenu un prêt garanti
par l’État (PGE) de 1 milliard d’euros
car il ne savait pas à quoi s’attendre
avec la pandémie », rappelle Paul
Tourret, directeur de l’Isemar (Insti-
tut supérieur d’économie maritime).
Divine surprise, les consommateurs
occidentaux confinés chez eux se
sont mis à commander frénétique-
ment sur internet des produits fabri-
qués en Chine. Les prix du transport
maritime pour rapatrier ces mar-
chandises ont alors flambé. Une
manne qui a fait grimper en flèche le
résultat net de CMA CGM et consorts
(Maersk, MSC…) en 2021, et encore
plus en 2022 : avec la fin des confine-
ments, la demande a ralenti l’année
dernière, entraînant une baisse des
tarifs du transport maritime au
deuxième semestre. Mais les arma-
teurs ont bénéficié d’un phénomène
À l’assaut du port de los angeles
Fin 2021, CMA CGM a acheté 90 % du terminal
de conteneurs dans le port de Los Angeles pour 1,8 milliard
de dollars.
A
de deux phénomènes : ils ont réalisé
en 2022 la majorité de leurs ventes
avec des contrats annuels négociés
plus tôt, alors que les cours étaient au
plus haut. Et la congestion dans les
ports qui immobilisait beaucoup de
navires a longtemps freiné le recul
des prix du fret.
Face à ce cadeau du ciel, Rodolphe
Saadé qui a succédé à son père Jac-
ques en 2017 garde la tête froide
même s’il fait désormais partie de
l’establishment : l’année dernière, il a
effectué deux déplacements prési-
dentiels (en Algérie et aux États-
Unis) avec Emmanuel Macron. En
2020, il était aux côtés du président
de la République à Beyrouth, la ville
de son enfance, pour apporter vivres
et matériels après l’explosion du
port. Et on le voit de plus en plus sou-
vent à Paris. En novembre, il était au
dîner de la French American Foun-
dation où intervenait Jamie Dimon,
le PDG de la banque JPMorgan.
Aujourd’hui, il est suffisamment ins-
tallé pour attirer les meilleurs profils
du CAC 40. Ainsi, l’ex-directeur fi-
nancier d’Orange, Ramon Fernan-
dez, va rejoindre en avril CMA CGM
avec la même casquette.
Depuis quelque temps, Rodolphe
Saadé investit aussi dans les médias.
Il a racheté le quotidien de sa ville, La
Provence, mais surtout pris 8 % de
M6. La touche finale pour jouer dans
la cour des grands du capitalisme
français. « Francis Bouygues et Vin-
cent Bolloré ont montré la voie, estime
Dominique Bussereau. Être présent
dans la sphère médiatique donne une
onction supplémentaire à un grand
patron. » A priori, Rodolphe Saadé
fait donc le contraire de son père Jac-
ques qui fuyait Paris et se concentrait
sur le transport.
En réalité, le patriarche haut en
couleur disparu en 2018 et le quin-
quagénaire avenant mais tout en
contrôle partagent la même obses-
sion : pérenniser le groupe. La fuite du
Liban et son arrivée à 11 ans à Mar-
seille avec sa famille ont appris à Ro-
dolphe Saadé que rien n’était acquis.
Le vieux lion lui a laissé un géant des
mers. Son fils veut se faire un prénom
en réduisant son exposition à cette
activité qui fait constamment le
yoyo : d’ailleurs, la vague qui a porté
les porte-conteneurs au pinacle est
déjà retombée depuis quelques mois.
« Les armateurs ont mangé leur pain
blanc, souligne Denis Choumert, pré-
sident de l’AUTF (Association des uti-
lisateurs de transport de fret). Les
taux de fret sont retombés au niveau
d’avant la pandémie. Leurs profits vont
se dégonfler cette année. » Rodolphe
Saadé qui a tout vu chez CMA CGM en
presque trente ans de carrière, n’a pas
attendu que le vent tourne. Il avait
amorcé cette révolution en achetant
en 2019 le Suisse Ceva qui propose aux
entreprises le mode le plus adapté
pour leur fret (avion, train, bateau…).
Le PDG a utilisé les milliards de profits
engrangés en 2020 et en 2021 pour
mener à bien cette stratégie de diver-
sification et multiplier les rachats.
le sauveur du logisticien français gefco
CMA CGM a repris en avril 2022 le spécialiste tricolore
de la logistique automobile, Gefco, qui était paralysé à cause de
son propriétaire russe frappé par les sanctions internationales.
CMA CGM en Chiffres
74,5
milliards de dollars
(70,2 milliards d’euros).
le chiffre d’affaires
du groupe en 2022.
en hausse de 33,1 % Plutôt dans des activités complémen-
par rapport à 2021
taires au transport maritime.
La liste de ses acquisitions au cours
155 000
salariés dont près
des 18 derniers moins donne le tour-
nis : des terminaux portuaires (un à
Los Angeles en novembre 2021 et
de 4 000 à Marseille deux à New York fin 2022), Ingram
Micro CLS qui a des entrepôts aux
160
États-Unis et en Europe, le spécialis-
te de la logistique automobile Gefco,
le transporteur de colis à domicile
nombre de pays
où le groupe est actif Colis Privé… Sans oublier l’entrée au
au travers d’un réseau capital d’Air France à hauteur de 9 %
de 400 bureaux pour développer le fret aérien, le
partenariat avec Brittany Ferries et le
rachat de La Méridionale qui relie
Marseille à la Corse, à l’Algérie et au
Maroc par voie maritime.
Un changement progressif de cap
pour le paquebot CMA CGM qu’il ex-
pliquait au Figaro mi-2022 : « Le
transport maritime est sujet aux hauts
et aux bas de l’économie mondiale
alors que la logistique est moins cycli-
que et permet d’équilibrer ses résultats
quand les performances du shipping
sont moins bonnes. Il y a donc une lo-
gique commerciale mais aussi finan-
cière. » Rodolphe Saadé fait aussi
prendre ce tournant à son groupe car
il a une conviction : l’avenir appar-
tient à celui qui sera capable d’ache-
miner les marchandises des clients
quel que soit le mode (bateau, avion,
camion…). « Je souhaite continuer à
grandir dans notre cœur de métier, le
transport maritime, tout en dévelop-
pant une activité logistique complé-
mentaire qui réponde aux besoins
d’acheminement de nos clients de bout
en bout », résumait-il pour Le Figaro.
Pour réaliser son dessein, CMA CGM
a déboursé six milliards de dollars en
acquisitions rien qu’en 2022.
Et le roi des océans n’a pas l’inten-
tion de s’arrêter. Selon Bloomberg, il
aurait très envie de racheter la bran-
che logistique de Bolloré qui, pour
l’instant, n’est pas à vendre. Ses
concurrents jouent aussi la carte de
la diversification. Mais c’est CMA
CGM qui fait le plus dans ce domaine.
Et le groupe commence à en récolter
les fruits : en 2022, son chiffre d’af-
faires hors transport maritime a
grimpé à plus de quinze milliards de
dollars contre 7 milliards en 2019.
Ceva qui perdait de l’argent en 2019,
est désormais profitable. De quoi
voir venir avec sérénité les années à
venir. Et notamment 2023, où le ra-
lentissement du transport maritime
va se confirmer.
« J’ai compris que Rodolphe Saadé
serait un grand en 2008 lors de la pri-
se d’otages au large de la Somalie
d’un voilier de la compagnie du Po-
nant (NDLR à l’époque filiale de CMA
CGM). Son père l’avait laissé gérer le
dossier. Rodolphe faisait l’intermé-
diaire avec les ravisseurs. Il a été ex-
l’actionnaire d’air france-KlM
Au printemps 2022, CMA CGM est devenu le premier
actionnaire privé de la compagnie aérienne en prenant 9 %
de son capital. Ensemble, ils vendront leurs capacités cargo.
Deux années consécutives
de profits hors normes
Résultat net de CMA CGM en millards de dollars
0,6 0,7
-0,5
2015 2016 2017
*
soit 23,5 milliards d'euros
Source : Société
ceptionnel de sang-froid » raconte le
président de la région Sud, Renaud
Muselier, très proche de la famille
Saadé. Aujourd’hui, en tout cas,
ceux qui se demandaient s’il aurait
l’étoffe pour diriger un groupe de di-
mension mondiale ne se posent plus
la question.
Toutes les opérations de croissance
externe n’ont pas la même significa-
tion. Quand Rodolphe Saadé fait ses
courses à l’international, la logique
saute aux yeux. « Acquérir des termi-
naux portuaires aux États-Unis per-
met d’avoir un accès plus simple aux
transporteurs routiers locaux et de
proposer à l’entreprise cliente une
prestation de livraison de ses mar-
chandises de la porte à la porte, analy-
se Jérôme de Ricqlès, expert du
transport maritime au sein de la pla-
teforme Upply. Et, en cas de besoin,
ces actifs sont assez faciles à vendre. »
De même, acheter une société de lo-
gistique comme Ingram Micro CLS a
du sens. La désorganisation des chaî-
nes d’approvisionnement qui plom-
be le concept de zéro stock a redonné
ses lettres de noblesse aux entrepôts.
Les rachats d’entreprises françai-
ses ou l’entrée au capital de groupes
tricolores semblent plus opportunis-
tes. Prendre 9 % d’Air France-KLM
va-t-il vraiment significativement
accélérer le développement dans le
fret aérien de CMA CGM qui venait
de créer sa compagnie aérienne ?
Était-il indispensable pour le groupe
de reprendre Gefco pour faire décol-
ler sa filiale, Ceva ? L’avenir le dira.
Mais on a l’impression que, dans ces
affaires, le groupe rend d’abord ser-
vice à l’État.
Au printemps 2022, en jouant les
sauveurs de Gefco qui voyait toutes
les portes se fermer à cause de son
propriétaire russe frappé par les
24,9
17,9
1,8
0,03
-0,2
2018 2019 2020 2021 2022*
Infographie
sanctions internationales, le patron
marseillais a enlevé une épine dans le
pied du gouvernement qui voulait un
repreneur français. Rebelote dans le
dossier Air France-KLM qui avait
besoin d’argent frais pour se désen-
detter au printemps 2022. L’État qui
avait 28,6 % du transporteur aérien
ne voulait pas aller plus haut car en
passant la barre des 30 %, il aurait été
obligé de lancer une OPA. Opportu-
nément, Rodolphe Saadé a répondu
présent, apportant quelques centai-
nes de millions au groupe franco-
hollandais.
“ Personne ne l’a vu
venir : le transport
maritime n’est pas
un enjeu politique
dans l’Hexagone. Son
activité centrée sur
le fret ne fait pas rêver
et l’entreprise n’est pas
basée à Paris
Des transports, aDministrateur
Du groupe cma cgm
”
Dominique Bussereau, ex-ministre
Selon lui, ces mouvements ont
leur logique. « Toutes ces opérations
sont intéressantes et importantes pour
nous. Le fait de sécuriser notre inves-
tissement dans la joint-venture com-
merciale avec Air France-KLM en
prenant une participation est un mou-
vement stratégique. En rachetant Ge-
fco, nous avons sauvé des milliers
d’emplois, et cela nous permet de nous
développer dans la logistique automo-
bile », expliquait-il au Figaro. Mais il
n’oubliait pas d’ajouter : « J’ai le sens
patriotique. C’est normal qu’à un mo-
ment donné, si je peux aider, j’aide
sponsor de l’oM
À partir de juillet, CMA CGM sera le
maillot du club de football marseillais
du site de vente en ligne de voitures

mon pays. Cela fait partie aussi de nos
valeurs familiales. » D’autant plus
qu’en jouant les chevaliers blancs,
Rodolphe Saadé ne néglige pas ses
intérêts. Gefco qui était valorisé mi-
2021 près de 1,5 milliard d’euros, il l’a
remporté pour 450 à 500 millions se-
lon les experts. « On peut rendre de
services à l’État en faisant de bonnes
affaires », sourit Renaud Muselier.
Si la famille Saadé répond aux ap-
pels du pied du Château, c’est qu’elle
sait ce qu’elle doit à la France. Le ra-
chat en 1996 du bœuf CGM par la gre-
nouille CMA de Jacques Saadé n’avait
rien d’évident. « Jacques Chirac
(NDLR alors président de la Républi-
que) a fait en sorte que l’opération se
fasse. Il a été séduit par le projet indus-
triel de Jacques Saadé », raconte Re-
naud Muselier. Asphyxié par une
dette astronomique pendant la crise
financière en 2009, CMA CGM a évité
le démantèlement grâce au soutien
de l’État. Certes, c’est Jacques Saadé
qui a convaincu le groupe turc Yildi-
rim de devenir actionnaire à hauteur
de 24 % de l’armateur marseillais, en
apportant 500 millions de dollars en
2010. La reprise du commerce inter-
national la même année a aussi joué
en faveur des Saadé. Mais l’entrée au
capital du FSI (Fonds stratégique
d’investissement), qui a pris en 2012
6 % de CMA CGM pour 150 millions
de dollars, a solidifié l’entreprise. La
BPI (Banque publique d’investisse-
ment), qui a succédé au FSI, n’est
aujourd’hui plus qu’à 3 % du capital
de l’armateur.
Aujourd’hui, la proximité de Ro-
dolphe Saadé avec Emmanuel Ma-
cron, qui voit dans CMA CGM un
outil de souveraineté économique,
est bien utile. L’Élysée a tué les dans
l’œuf les velléités de quelques dépu-
tés à l’automne dernier de taxer les
superprofits. À l’échelle locale, à
Marseille, CMA CGM joue aussi les
bons samaritains. Ainsi, l’armateur a
accepté de devenir maillot de l’OM à
compter de juillet 2023 après le
retrait précipité du site de ven-
te en ligne de voitures, Cazoo.
On n’en attend pas moins du
premier employeur de la ville.
Accessoirement, cela permet
de s’attirer les bonnes grâces
du peuple marseillais.
Et après, quand l’heure de
passer le gouvernail aura
sonné ? « Je souhaite qu’un
des enfants de la famille me
succède », expliquait mi-
janvier dans Le Point ce
père de deux enfants enco-
re adolescents. Devenir un
groupe de dimension
mondiale n’empêche pas
de vouloir rester une en-
treprise familiale. ■
avec coliS privé, il découvre le b to c
partenaire Début 2022, CMA CGM a acheté 51 % de Colis privé,
à la place un spécialiste de la livraison de colis aux particuliers basé
Cazoo. à Aix-en-Provence.
le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
économie l'événement 23
Les médecins menacent
de se déconventionner
Après l’échec des négociations conventionnelles, certains praticiens
pourraient être tentés de rompre tout lien avec l’Assurance-maladie.
obstacle à l’accès aux soins. Un et de valoriser l’expertise médica-
Marie-CéCile renault pas que nombre de médecins ne le », veut croire le Dr Marty. Les
£@Firenault
veulent pas franchir, car il ne cor- pouvoirs publics pensent que nous
respond pas à leur éthique et n’oserons jamais sortir de la Sécu.
oto-SELECt - StoCk.ADobE.Com, CmA CGm Santé Le bras de fer se durcit ouvrirait la voie à une médecine à Mais les ostéopathes facturent bien
entre les médecins et la Sécu, deux vitesses. En outre, si le mé- 60 à 70 euros non remboursés, et
après l’échec des négociations decin peut pratiquer les tarifs de leur nombre ne cesse d’augmen-
conventionnelles. Alors que les son choix, il perd l’avantage de la ter », poursuit-il.
syndicats médicaux ont tous refu- prise en charge d’une partie de ses Plutôt que de franchir le pas,
sé le projet de l’Assurance-mala- cotisations par la Sécu prévue par pourquoi ne pas simplement pra-
die d’augmenter le tarif de la le système conventionnel. Le pra- tiquer des dépassements d’hono-
consultation de 1,50 euro (ou da- ticien bascule alors en « secteur raires ? Le « secteur 2 » n’est pas
vantage mais en contrepartie de 3 » à honoraire libres, par opposi- ouvert à tous les médecins. Ne
contraintes nouvelles), certains tion au « secteur 1 » à tarif Sécu et peuvent y accéder que les an-
brandissent la menace du décon- au « secteur 2 » à dépassements ciens chefs de clinique ou assis-
ventionnement. C’est le cas du vi- d’honoraires. Aujourd’hui, le tants des hôpitaux. « Nous avons
brionnant syndicat UFMLS, qui « secteur 3 » reste extrêmement demandé à l’Assurance-maladie
Le groupe CMA CGM organise vendredi et samedi à Pa- marginal : l’Assurance-maladie d’ouvrir le secteur 2 à tous les
exploite 250 lignes ris les premières « assises du dé- recense 796 praticiens non praticiens, mais cela a été refusé,
de transport maritime conventionnement ». conventionnés en France, pour affirme le Dr Marty. Nous avons
dans le monde (à gauche, Une mesure à double tranchant. l’essentiel des généralistes (572), demandé qu’un médecin qui pas-
à Hambourg). Si un médecin décide de se décon- des chirurgiens (64) ou des psy- serait une journée à l’hôpital ou
ventionner, il rompt tout lien avec chiatres (50). Un chiffre très faible dans un territoire en pénurie puis-
Ci-dessus, Emmanuel
Macron et Rodolphe Saadé l’Assurance-maladie et peut pra- au regard des 111 381 médecins gé- se bénéficier du secteur 2 dans son
lors d’une visite au siège tiquer les tarifs de son choix. Mais néralistes et spécialistes conven- activité quotidienne. Et qu’au bout
du groupe marseillais avec le gros inconvénient que ses tionnés, le gros des troupes étant de sept ans, il puisse basculer dé-
en septembre 2021. Le déconventionnement patients ne sont plus remboursés au tarif Sécu (80 032 praticiens), le finitivement en secteur 2. Cela a
pénalise les plus par la Sécu : la consultation chez reste (31 349) avec des dépasse- été refusé ».
modestes et constitue un médecin non conventionné est ments d’honoraires. De son côté, l’Assurance-mala-
un obstacle à l’accès prise en charge sur la base de die dénonce une attitude irres-
aux soins. Un pas que 0,61 euro ; en revanche les presta- Bras de fer en vue ponsable. « Le déconventionne-
nombre de médecins ne avec la Sécu
tions qu’il prescrit (soins paramé- ment est un choix qui restreint
veulent pas franchir, car
il ne correspond pas à dicaux, médicaments, transports) Mais, la tentation grandit auprès l’accès aux soins et qui est contrai-
leur éthique et ouvrirait restent remboursées dans les d’une frange de praticiens, qui se re aux fondamentaux de notre sys-
CMA CGM plus rentable la voie à une médecine conditions habituelles. disent « méprisés », « excédés tème de santé », alerte son direc-
que les fleurons à deux vitesses. Pour autant, cela pénalise les d’être traités de nantis » et ulcérés teur général Thomas Fatôme,
PASCAL LACHENAUD/AFP plus modestes et constitue un « d’être injustement tenus respon- convaincu que « les médecins libé-
du CAC 40 sables des déserts médicaux ». raux ne veulent pas d’un système
Résultat net en millards d'euros L’amphi de 700 places réservé par qui fait reposer l’accès au soin sur
l’UFMLS pour ses assises du dé- les moyens financiers du patient ou
CMA CGM conventionnement était « plein à sur son contrat de complémentaire
23,5 craquer », sans compter plus de santé ».
« 1 000 inscrits en ligne », se félici- Quant aux autres syndicats mé-
Totalenergies te son président le Dr Jérôme Mar- dicaux, ils regardent avec méfian-
19,53 ty. Ce malgré une inscription de ce cette initiative ou s’en désoli-
100 euros en présentiel ou 50 en darisent totalement. C’est le cas
Stellantis distanciel, signe, selon lui, « d’un de MG France, aux antipodes de
vrai engagement ». cette démarche. « Les profession-
16,78
L’UFMLS se donne 12 à 18 mois nels sont tellement en colère que
LVMH pour réunir 15 000 médecins prêts certains veulent prendre des che-
à sauter le pas, avec formulaires mins sans peser les conséquences,
14,08 d’engagement signés et déposés prévient sa présidente, le
chez un huissier. Le syndicat en- Dr Agnès Giannotti. Mais le décon-
Source : Société gagera alors le bras de fer avec la ventionnement revient à ne soigner
Infographie
Sécu. « Collectivement nous aurons que ceux qui ont les moyens, ou à se
du poids et l’Assurance-maladie mettre dans les mains des assuran-
sera bien obligée de nous entendre ces », met-elle ne garde. ■
Record pour l’apprentissage, qui séduit
propriétaire
de « la provence »
À l’automne 2022, Rodolphe
de plus en plus de diplômés du supérieur
Saadé a gagné la bataille qui
RobERt HANASHiRo/USA toDAy/SPUS/AbACA, GEFCo, FoURmy / ANDiA.FR, mAttHiEU miRViLLE/DPPi ViA AFP, CoLiS PRiVé, LA PRoVENCE
l’opposait au fondateur de
Free, Xavier Niel, pour
reprendre le quotidien de
Marseille.
837 000 contrats ont été signés en 2022, en hausse de 14 % sur un an.
connaissent de très fortes hausses », majeur, devenu une prime de
thoMas engrand poursuit la ministre. Autre point de 6 000 euros pour tous depuis le
£@EngrandThomas
satisfaction, cette forme d’embau- 1er janvier. De quoi rendre l’ap-
che a pu progressivement s’ouvrir prenti quasi gratuit durant la pre-
apprentiSSage De record en aux handicapés, qui franchissent le mière année.
record. Une nouvelle fois, l’année cap des 10 000 contrats l’an der- Le taux de satisfaction est élevé,
« tissages
Les appren-
sont
2022 a vu le nombre d’apprentis
s’envoler pour atteindre le chiffre
de 837 000 contrats signés, selon le
nier, en hausse de 21 %, mieux que
la croissance moyenne.
Ouverture à
tant du côté des entreprises que des
jeunes. C’est le cas de Violette,
25 ans, qui a fait sa deuxième année
bilan du ministère du Travail pu- de master en marché de l’art en al-
le reflet blié vendredi. C’est 14 % de plus l’enseignement supérieur ternance au sein d’une galerie.
de l’économie qu’en 2021. Une hypercroissance Le changement le plus important « Ma motivation première était de
française : qui fait suite déjà à une envolée de reste malgré tout celui des profils pouvoir financer mes études et ma
46 % en 2020 et de 38 % en 2021. De du supérieur. Longtemps cantonné vie étudiante », explique la jeune
dans tous quoi permettre au gouvernement aux métiers manuels ou peu quali- femme. Ce que ne lui permettait
les secteurs d’atteindre sans difficulté son ob- fiés, l’apprentissage a aussi fait une pas un simple stage. Mais, surtout,
d’activité, aux jectif du million de contrats avant percée en attirant un nombre elle a apprécié de pouvoir « décou-
la fin du quinquennat. croissant de bac + 3 et même vrir pas à pas le monde de l’entre-
trois quarts Si la croissance reste toujours à bac + 5. Les contrats de l’enseigne- prise et ses contraintes ». Le tout
dans les TPE deux chiffres, l’année 2022 sonne ment supérieur connaissent ainsi jouant le rôle de période d’essai.
PME et toutefois comme celle de l’entrée une hausse de 63 % sur l’année. Elle a ainsi pu être embauchée en
dans la maturité pour le marché de « L’image de l’apprentissage est CDI dans la foulée.
sur tous les l’apprentissage, explique-t-on du transformée et valorisée. On peut Ces bons chiffres ne masquent
niveaux côté du ministère chargé de l’En- maintenant réaliser tous niveaux de toutefois pas les enjeux est
de diplômes
Carole Grandjean,
» seignement et de la Formation
professionnels. « Les apprentissa-
ges sont le reflet de l’économie fran-
diplômes en alternance: du CAP à
l’ingénieur», se réjouit la ministre.
Ce virage a été grandement faci-
confronté le monde de l’apprentis-
sage. Après avoir été dans une ap-
proche quantitative, il doit main-
ministre déléGuée
CharGée de çaise : dans tous les secteurs d’acti- lité par la réforme de 2018, qui a li- tenant passer à une vision plus
l’enseiGnement vité, aux trois quarts dans les TPE béralisé l’apprentissage à la fois en qualitative. Un chantier, lancé de-
et de la Formation PME et sur tous les niveaux de diplô- termes de conditions d’entrée et puis l’automne, vise à améliorer
proFessionnels
mes», explique Carole Grandjean. d’offre de formation. Mais aussi par l’accompagnement et la qualité de
«Partout en France, nous pouvons les aides exceptionnelles décidées l’apprentissage donné par les en-
valoriser cette hausse exceptionnelle pendant la crise - une prime de treprises. Une vigilance accrue qui
A
de l’apprentissage : les territoires 5 000 euros pour l’embauche d’un se traduit déjà par une augmenta-
comme la Corse ou l’Outre-mer mineur et de 8 000 euros pour un tion du nombre de contrôles. ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
24
Relance du nucléaire : Framatome mise sur Le Creusot
Le groupe va investir 100 millions d’euros pour rapatrier en France la production de cuves nucléaires.
« La France
renoue avec
son destin
industriel
nucléaire
Agnès PAnnier-
runAcher, ministre
de lA trAnsition
énergétique
+ » Lire aussi
pages 6 et 7
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais
L’Allemagne bloque la fin du moteur thermique
Le vote des États membres de l’UE, prévu mardi, pour entériner l’interdiction en 2035 est reporté sine die.
Solenn Paulic £@SolPaulic
Bruxelles
EUROPE Cela devait être une simple
formalité. Il faudra pourtant encore
attendre un peu pour annoncer offi-
ciellement la fin dans l’Union euro-
péenne des moteurs thermiques
d’ici à 2035 et le passage au tout-
électrique. Les États membres de-
vaient en effet officiellement entéri-
ner cette décision âprement
négociée mardi 7 mars. Le dossier,
bouclé également avec le Parlement
européen fin 2022, ne devait plus
passer que cette petite étape de pro-
cédure.
Mais la coalition allemande est
venue jouer les trouble-fêtes ces
derniers jours, faute d’une position
commune sur cet accord. Et, sans la
voix de Berlin, c’est toute la méca-
nique de ce grand texte du paquet
climat européen qui se retrouve re-
mise en cause.
L’Italie de Giorgia Meloni a aussi
déjà annoncé qu’elle voterait
contre, prenant le contre-pied de
son prédécesseur, Mario Draghi,
tout comme la Pologne et la Bulga-
rie, qui préfère, elle, s’abstenir. Ma-
thématiquement, une simple abs-
tention du gouvernement allemand
ferait donc tout capoter.
La Suède, qui préside actuelle-
ment le Conseil de l’UE, l’a bien
compris et a décidé vendredi de ne
pas courir le risque, tout en se gar-
dant bien d’avancer une nouvelle
date. Du rarement vu à Bruxelles à
cette étape du processus, où tout est
censé avoir déjà été réglé dans les
moindres détails, commentaient
vendredi plusieurs sources, par
ailleurs assez surprises de ce coup
de théâtre.
C’est que la coalition allemande
n’est plus au clair sur ce dossier.
Alors que « tous les signaux étaient
L’explosion de l’inflation place le Pakistan au bord du gouffre
La Banque centrale relève son taux à 20 %. Le pays s’enfonce dans une crise économique et sociale durable.
emmanuel Derville £@e_derville
new delhi
aSiE Le Pakistan n’avait pas vu ça
depuis vingt-sept ans. Mercredi,
la Banque centrale (State Bank of
Pakistan, SBP) a porté son taux di-
recteur à 20 % avec une hausse de
3 points d’un coup. L’institution
estime ne pas avoir d’autres choix
vu l’explosion de l’inflation qui a
atteint 31,5 % le mois dernier. Et
ce n’est pas fini. La SBP « s’attend
à ce que l’inflation se poursuive
dans les prochains mois », précise
le communiqué de politique mo-
nétaire qui pointe deux facteurs.
D’abord, le gouvernement fé-
déral a fait voter des hausses des
taxes indirectes le 20 février. Car-
burants, cigarettes, boissons, pro-
A
duits importés, billets d’avion… La
liste est longue et doit rapporter
EntrEprisEs
« La France renoue avec son des- en réaliser davantage que les 6 nuel Macron prononçait le discours ront le 13 mars, ni du vote des dé-
elSa BemBaron £@ElsaBembaron
NUcléaiRE La ministre de la
tin industriel nucléaire », a salué la
ministre. Les pièces dites « inter-
nes », qui seront fabriquées dans
plus 8 évoqués. « Le chiffre de 14
nouveaux EPR n’est pas un To-
tem », précise-t-elle au Figaro.
de Belfort », acte fondateur de la
relance du nucléaire français.
L’occasion pour Agnès Pannier-
putés, mais bien « de se préparer »
à la relance de la filière.
« Nous allons augmenter de 30 %
Transition énergétique, Agnès Pan- le nouvel atelier, devraient être Runacher de vanter « les avancées notre production d’électricité nu-
nier-Runacher a fait le déplace- destinées à la construction des fu- Compétitivité majeures faites en un an » dans le cléaire dans les prochaines années,
retrouvée
» ment au Creusot pour annoncer la
bonne nouvelle. Framatome va in-
vestir 100 millions d’euros dans son
turs réacteurs nucléaires EPR 2,
« à un rythme de 1,5 par an ». Les
premières livraisons seront effec-
Après des décennies de vache
maigre, ce retour au bercail d’une
domaine du nucléaire, notam-
ment pour le développement des
compétences. « La filière va recru-
avec le seul programme d’excellen-
ce d’EDF et la connexion de Fla-
manville, pour fournir aux Français
usine de Saône-et-Loire d’ici 2026. tuées « mi-2026 », soit à temps partie de la production sonne ter 10 000 personnes cette année », une énergie bas carbone, compéti-
Le groupe s’apprête à relocaliser pour la livraison les six prochains comme un renouveau, symbole a-t-elle rappelé. Autre volet clé tive et disponible à chaque ins-
une partie de la fabrication des cu- EPR 2, dont les premières mises en d’une compétitivité retrouvée et de cette relance, le projet de loi tant », a-t-elle ajouté, rappelant
ves nucléaires, jusqu’alors réalisée services doivent avoir lieu d’ici à conséquence directe de la nouvel- portant sur l’accélération d’ins- que dans le même temps, le déve-
en Europe de l’Est. Une centaine 2035. En début de semaine, la mi- le politique énergétique française. tallations nucléaires et de prolon- loppement des nouvelles capaci-
d’emplois seront créés sur ce site, nistre confiait aux Échos avoir in- C’est aussi un élément « de souve- gation des existantes. Pour la mi- tés de production d’énergie re-
berceau des ambitions nucléaires
françaises dans les années 1970.
terrogé les industriels, dont EDF,
sur leur capacité à éventuellement
raineté », a souligné la ministre
rappelant qu’« il y a un an, Emma-
nistre, il ne s’agit pas de présumer
de l’issue des débats, qui débute-
nouvelables se poursuit. L’un
n’étant pas exclusif de l’autre. ■
la production de voitures avec des
moteurs à combustion utilisant des
carburants alternatifs, comme les
carburants synthétiques (e-fuels).
Rome avait aussi obtenu son
amendement Ferrari, les voitures
de luxe et de niche (moins de
10 000 véhicules par an) bénéficiant
d’un léger délai.
Mais le FDP a jugé ces derniers
jours qu’il fallait encore davantage
bétonner cette possibilité de recours
aux carburants alternatifs. « On es-
père que cela pourra être réglé rapi-
dement pour débloquer le dossier, car
les autres membres du gouvernement
allemand veulent eux vraiment avan-
cer sur cette législation », indique un
autre familier du sujet.
Pas de quoi paniquer ? À Bruxel-
les, vendredi, certains préféraient
temporiser et s’en tenir à un simple
accident de parcours, notant qu’il
n’y avait pas d’urgence à organiser
ce vote. Mais le report n’est pas pas-
sé inaperçu, en particulier au sein
des eurodéputés du groupe PPE, la
droite européenne, qui se sont tout
simplement réjouis de cette nou-
velle et engouffré dans la brèche en
appelant davantage de gouverne-
ments à voter contre cette législa-
tion. Cette interdiction des moteurs
thermiques « empêchera l’innova-
Selon Berlin, au vert ces dernières semaines et aucun effort pour examiner sérieuse- et diesel, y compris les moteurs tion, coûtera des milliers d’emplois et
les constructeurs qu’aucun problème n’avait été re- ment, dans ses projets d’interdiction, hybrides. conduira au déclin d’une industrie
allemands (ici, dans monté » à Bruxelles, reprend une les exceptions pour certains moteurs Un projet qui n’avait pas fait que européenne essentielle », a réagi
une usine Mercedes source, le parti libéral FDP et son à combustion qui fonctionnent exclu- des heureux, le groupe Stellantis l’Allemand Jens Gieseke.
à Sindelfingen) ministre allemand des Transports, sivement avec du carburant écologi- ayant lui-même à l’époque pointé Un peu plus discrète, une autre
et leur savoir-faire Volker Wissing, ont repris le com- que. » source parlementaire se demandait,
le coût du tout-électrique pour les
technologique ne sont
pas assez protégés bat ces derniers jours contre un consommateurs et l’inadéquation elle aussi, vendredi si ce report ne
en cas d’interdiction projet qui ne protège toujours pas « Retournement de veste » des aides pour acheter ces nou- préfigure pas malgré tout « un re-
des moteurs assez selon eux les constructeurs al- La Commission a donc été sommée veaux véhicules. Se posaient aussi tournement de veste ». Dans un
thermiques dans l’Union lemands et leur savoir-faire tech- de proposer de nouveaux aménage- les problèmes d’accès aux bornes de contexte économique très morose
européenne en 2035. nologique. ments. Sa proposition, initialement rechargement. en Europe, entre coûts de l’énergie
BERND WEISSBROD/Dpa « De nouvelles garanties sont né- présentée en juillet 2021, prévoit de Opposée dès le départ à cette me- et nouvelles rivalités commerciales,
pIctuRE-allIaNcE vIa aFp cessaires, a également demandé réduire à zéro les émissions de CO2 sure, l’Allemagne avait pourtant sur fond de technologies propres, le
jeudi le ministre des Finances, des voitures neuves en Europe à fini par obtenir des dérogations coût du passage au tout-électrique
Christian Lindner, membre du partir de 2035 et donc à stopper les pendant les négociations, notam- reste un vrai « catalyseur de mé-
même parti. La Commission n’a fait ventes de véhicules neufs à essence ment sur la poursuite après 2035 de contentement ». ■
170 milliards de roupies (609 mil- vaillait avec moi à PTV, la chaîne ferts d’argent de la diaspora, est des réserves de change, tombées à
lions d’euros) d’ici la fin de l’exer- d’information publique, est parti un filet de protection. » 2,9 milliards de dollars le 3 février,
cice fiscal 2022-2023 qui se termi- aux États-Unis travailler dans une Le gouvernement de Shehbaz la Banque centrale bloque les im-
ne le 30 juin. Islamabad espère épicerie. Même avec cet emploi, il Sharif n’a pas convaincu le FMI, portations de matières premières
satisfaire le FMI, auprès de qui elle gagne plus d’argent qu’ici », ra- alors que les pourparlers durent et de pièces détachées. Ces res-
sollicite un prêt de 1,1 milliard de conte Aoun Sahi, un journaliste depuis janvier pour le déblocage trictions ont stabilisé les réserves
dollars. basé à Islamabad. des fonds attendus. L’ancien pre- qui sont remontées à 3,8 milliards
31,5 %
Ensuite, la Banque centrale mier ministre Imran Khan accuse le 24 février. Mais elles pénalisent
pointe la chute de la roupie par « Nous pourrions avoir le parti au pouvoir, la Ligue mu- l’industrie comme le textile, la si-
rapport au dollar. Celle-ci a perdu des émeutes » sulmane du Pakistan-Nawaz dérurgie et la pharmacie.
près de 20 % depuis que la SBP a « Le riz, le sucre, le lait, les légu- (PML-N), de l’avoir renversé en Conjugués à la hausse des taux
cédé à une exigence du FMI le
26 janvier. Le Fonds lui demandait
mes… Tout augmente. Mes dépen-
ses de nourriture ont doublé en six
achetant des députés de sa majo-
rité l’an dernier. Il guette le moin-
Taux qui renchérit le crédit, les freins à
l’importation risquent de détruire
d’arrêter de soutenir la monnaie mois. Les gens évitent de prendre dre faux pas pour déstabiliser She- d’inflation une partie de l’appareil de produc-
nationale. Cette dépréciation a leur voiture et je vois de moins en hbaz Sharif à quelques mois des au Pakistan en février tion et de plomber les exportations.
renchéri les prix des produits im- moins de monde sur les marchés », législatives. Le textile représente 60 % des ven-
portés, comme l’essence et le gaz. constate Aoun qui ajoute : « L’ex- Certains dirigeants ne cachent tes pakistanaises à l’étranger. « Des
La spirale inflationniste rend plosion des prix des aliments de pas leur rancœur à l’égard du FMI. entreprises ont recours au chômage
l’existence des Pakistanais de plus base et l’incurie de la classe politi- « Nous sommes membre du FMI, partiel. Des chaînes d’assemblage
en plus difficile et ils sont nom- que engendrent beaucoup de frus- pas des mendiants », pestait une de Toyota et Honda ont, ou vont
breux à vouloir quitter le pays. tration. Nous pourrions bien avoir source gouvernementale dans le stopper parce que leur stock de piè-
Les expatriations ont plus que tri- des émeutes dans les prochains quotidien Dawn mercredi. La len- ces s’épuise », prévient Ehsan Ma-
plé en 2022 avec 765 000 départs. mois même si la solidarité familia- teur des négociations pèse sur les lik, président du Pakistan Business
« Un ancien collègue, qui tra- le, qui se manifeste par les trans- entreprises. Pour enrayer la baisse Council, un syndicat patronal. ■

La RATP paie
au prix fort
son annus
horribilis 2022
La Régie, fragilisée par une pénurie
de conducteurs de bus et de métro,
est lourdement tombée dans le rouge.
amÉLie rUHLmann
transports Incidents d’exploi-
tations, attentes interminables sur
les quais du métro, retards à répé-
tition, bus supprimés… Jamais la
RATP n’avait autant fait parler
d’elle qu’en 2022. Incapable de dé-
livrer le niveau d’offre de trans-
port que requièrent ses obligations
contractuelles à l’égard d’Île-de-
France Mobilités, la régie parisien-
ne a vu ses comptes plonger dans
le rouge, avec une perte nette de
26 millions d’euros, alors qu’elle
avait gagné 207 millions en 2021.
Un « bilan contrasté », commente
prudemment, dans une litote, la
direction de l’entreprise, en marge
de la présentation de ses résultats
annuels.
Novembre 2022. Dans la plupart
des stations de métro de la capita-
le, les voyageurs tentent de péné-
trer dans les rames bondées, après
de longues minutes d’attente. Sur
un autre quai (celui de la Râpée, où
se situe le siège de la RATP), l’am-
biance est toute aussi tendue. Cela
fait deux mois que Catherine
Guillouard, PDG de la Régie depuis
2017, a quitté son poste. Une dé-
mission surprise, alors que se pro-
filent d’importances échéances,
tels les Jeux olympiques de 2024 et
l’ouverture du réseau à la concur-
rence, dès 2025 pour les bus.
Seul maître à bord, le DG par in-
térim, Jean-Yves Leclercq, hérite
d’une Régie affaiblie par deux ans
de pandémie. Depuis la rentrée,
rien ne va plus dans les transports
Le gouvernement incite les PME de l’agroalimentaire à se marier
Il crée un fonds public-privé doté de 500 millions d’euros afin de soutenir la filière industrielle en difficulté.
marie bartnik £@mariebartnik
agroalimentaire Samedi der-
nir, le président de la République
incitait les distributeurs à prendre
sur leurs marges pour absorber
l’inflation. Une manière de mettre
la pression sur les enseignes, alors
sur le point de boucler, dans la nuit
de mercredi à jeudi, leurs négocia-
tions tarifaires annuelles avec les
industriels de l’agroalimentaire.
Maintenant que la plupart des
contrats ont été signés, le gouver-
nement vole au secours des indus-
triels, fragilisés par la flambée des
coûts des matières premières agri-
coles et de l’énergie
Craignant « une année noire pour
l’agroalimentaire » et des faillites
d’entreprises, Roland Lescure, le
ministre délégué à l’Industrie, a
présenté vendredi un plan de sou-
tien au secteur, doté d’un fond pu-
blic-privé de 500 millions d’euros.
« C’est un enjeu pour la souveraine-
té alimentaire du pays ; c’est un en-
jeu pour l’emploi sur notre territoi-
re », explique-t-il à Agra Presse.
L’arrêt temporaire de production
de Cofigeo (William Saurin) en
raison de la hausse des coûts de
l’énergie, début janvier, a contri-
bué à faire prendre conscience de
la vulnérabilité de cette industrie
qui emploie 437 000 personnes et
réalise 200 milliards d’euros de
chiffre d’affaires.
Depuis que les coûts de produc-
tion se sont mis à grimper, « le vrai
parisiens. La crise est patente dans
le réseau de bus. 26 % d’entre eux
ne circulent plus dans Paris. La
raison ? Une pénurie historique de
conducteurs.
L’entreprise avait misé sur 1 500
recrutements dans l’année, mais
les candidats ne se bousculent pas.
La Régie a beau prétexter une si-
tuation « exceptionnelle » touchant
« l’ensemble des opérateurs de
transport », son autorité organisa-
trice, Île-de-France Mobilités,
n’est pas dupe. Les performances
des autres opérateurs de transport
francilien (Transdev, Keolis…)
sont bien meilleures. Le souci
viendrait plutôt de la RATP elle-
même, et de sa piètre gestion des
ressources humaines. « Les plans
de recrutement ont été trop faibles
et tardifs, retardés par le Covid »
argue Michel Babut, représentant
de la Fnaut (Fédération nationale
des associations d’usagers de
transport) à la RATP. Dès 2020, la
Cour des comptes avait pourtant
alerté sur les « réelles difficultés de
recrutement sur certains métiers
d’opérateurs ».
La Régie peine à la fois à attirer
les candidats et à retenir ses sala-
riés. Au cours de l’année, l’entre-
prise a enregistré 170 démissions
rien que sur les postes de conduc-
teurs. De même, l’absentéisme a
atteint des niveaux records depuis
la rentrée 2022. Un trafic d’arrêts
médicaux frauduleux est même
démantelé, impliquant une cen-
taine de salariés.
Jusqu’ici, pourtant, l’opérateur
public était plutôt bon élève en la
bouclier anti-inflation en France, ce
(sont) les marges de l’industrie
agroalimentaire », déplore le mi-
nistre. Entre 2019 et mi-2022, ces
dernières ont baissé de 16 %, selon
un rapport de l’Inspection généra-
le des finances. Sur l’ensemble de
l’année, elles sont finalement res-
tées stables, grâce aux renégocia-
tions successives de tarifs soute-
nues par le gouvernement. Mais le
secteur est particulièrement expo-
“
Nous avons un sujet
de taille critique de nos
entreprises pour faire
face aux chocs
et conquérir des parts
de marché à
l’étranger
”
Roland lescuRe, ministRe délégué
chaRgé de l’industRie
sé à la hausse des prix de l’énergie
car il en est un gros consommateur
: il engloutit 25 % du gaz consom-
mé par l’industrie alors qu’il ne
représente que 15 % de sa valeur
ajoutée.
Surtout, l’industrie agroalimen-
taire française souffre depuis plu-
sieurs années d’un déficit de com-
pétitivité, qui la rend plus
vulnérable aux chocs exogènes.
Alors qu’elle était la deuxième ex-
portatrice au monde il y a quelques
années, elle est passée au sixième
rang, et s’avère même déficitaire
Des voyageurs matière… Mais la perspective
attendent le métro d’ouverture du réseau à la
sur le quai bondé concurrence semble avoir changé
d’une station de la ligne la donne. En 2025, 18 000 machi-
12, le 25 février 2023. nistes et mécaniciens seront sus-
Le quotidien de milliers ceptibles de changer d’em-
d’usagers à Paris.
vALéRIE DUBOIS/
ployeur, en fonction des appels
HAnS LUcAS vIA AFP d’offres. De quoi démotiver les
troupes… Pour mettre toutes les
chances de son côté, la RATP a
joué la carte de la productivité, en
augmentant le temps de travail
des machinistes de vingt heures
par an.
Dans le même temps, la direc-
tion instaure une prime d’assidui-
26
té pouvant aller jusqu’à 450 euros.
Un cocktail managérial détonnant
qui a le don de provoquer l’ire des
syndicats… mais pas seulement.
« C’est un manuel de tout ce qu’il ne
millions faut pas faire en termes de dialogue
d’euros social » s’insurge Pascal Auzan-
net, ex-patron de la filiale RATP
Perte nette Smart Systems devenu consul-
de la Régie en 2022 tant. Lui qui a passé trente-six an-
nées dans le giron de la Régie parle
d’une « démotivation des agents
jamais vue ». Symptôme de ce
« malaise social », les grèves per-
lées de cinquante-neuf minutes,
vieilles ficelles syndicales, font
leur grand retour.
La pénurie de conducteurs ga-
gne le métro. Accusée de ne pas
avoir adapté l’offre de transport au
retour du trafic, la présidente
d’Île-de-France Mobilités, Valérie
si l’on exclut les vins et spiritueux.
Le fond public-privé de
500 millions d’euros vise à re-
trouver cette compétitivité per- Marc Fesneau
due. Ces sommes alimenteront les (à gauche), ministre
entreprises agroalimentaires en de l’Agriculture
fonds propres et serviront à favo- et de la Souveraineté
riser la consolidation d’un secteur alimentaire, et Roland
beaucoup trop éclaté. Elles per- Lescure, ministre
mettront aussi d’accompagner les délégué chargé
entreprises désireuses d’investir de l’Industrie,
lors d’un comité
pour se moderniser.
stratégique de la filière
« On parle souvent de champions agroalimentaire,
internationaux, mais nous avons
vendredi, au Salon
98 % de PME et de TPE, précise international de
Roland Lescure. Nous avons un su- l’agriculture à Paris.
jet de taille critique de nos entrepri-
ses pour faire face aux chocs et
XAvIER REmOngIn/
AgRIcULtURE.gOUv.FR
le figaro
EntREPRISES 25
Pécresse, hausse le ton : « La per-
formance de plusieurs lignes s’est
significativement dégradée, avec
des régularités inférieures à 91 %, ce
qui est bien en deçà de vos obliga-
tions contractuelles » écrit-elle
dans une lettre adressée à Jean-
Yves Leclercq début novembre.
Pendant de longs mois, la RATP
et Île-de-France Mobilités
n’auront de cesse de se renvoyer la
balle, en prenant à témoin les usa-
gers excédés. Pour Pascal Auzan-
net, la dyarchie instaurée en 2021
est « vecteur de crise, surtout quand
les dissensions politiques sont for-
tes ». Car derrière la RATP, il y a
l’État, unique actionnaire de la Ré-
gie. Régie, région, État… La valse
des responsabilités semble sans fin.
« Renouer le dialogue
social »
Quelle que soit l’origine de ses
problèmes en cascade, la RATP en
paie le prix fort, et pas seulement
en replongeant dans le rouge. Le
trafic des voyageurs en Île-de-
France est resté en moyenne en
deçà de son niveau d’avant-crise
(-14 %), en dépit de la reprise tou-
ristique et alors que l’épidémie de
Covid-19 s’éloigne. Difficile de ne
pas y voir les conséquences des
perturbations de l’automne, à côté
de causes plus structurelles com-
me le développement du télétra-
vail et l’essor des mobilités douces.
conquérir des parts de marché à
l’étranger. » Une partie des fonds
permettra à des entreprises de
l’agroalimentaire de grossir, voire
de racheter leur concurrente pour
« créer des champions, à la fois sur
le marché domestique et à l’inter-
national », explique le ministre.
« Il est aujourd’hui très difficile,
pour une PME française de
l’agroalimentaire, de devenir une
ETI », approuve Léonard Prunier,
président de la Feef.
Ce coup de pouce de l’État est
rendu nécessaire par la frilosité
des investisseurs de long terme
lorsqu’il s’agit de l’industrie, esti-
me le gouvernement. L’État n’a
samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
Comme attendu, la RATP a payé
un lourd tribut à Île-de-France
Mobilités pour non-réalisation de
l’offre contractuelle. Les réfac-
tions et autres pénalités ont atteint
36 millions d’euros de plus que
l’an passé. Autre facteur de dégra-
dation des comptes : l’absentéis-
me, qui a malmené le résultat du
régime d’assurance-maladie de la
Régie. « Ces évolutions viennent
absorber les effets positifs de la re-
prise de l’activité et de la poursuite
des plans de performances », re-
connaît la RATP, tout en souli-
gnant une dynamique de croissan-
ce de 10 %, essentiellement portée
par le développement des filiales
RATP Transdev.
Désireuse de tourner la page de
cette annus horribilis, la régie veut
se projeter vers l’avenir. En plus
des difficultés susdites, Jean Cas-
tex devra jongler avec l’inflation
des prix de l’énergie, qui n’épar-
gnera pas la RATP en 2023. Mais
l’ancien premier ministre a déjà
marqué des points. Depuis janvier,
le trafic s’est sensiblement amélio-
ré. Surtout, le nouveau dirigeant a
su, selon Pascal Auzannet, « re-
nouer le dialogue social » au sein de
la Régie. Celui-ci veut croire que la
perspective d’une reprise à 100 %
du service d’ici avril, promise par
le PDG, est « faisable », en dépit
des tensions latentes liées à
l’ouverture à la concurrence. ■
cependant pas vocation à investir
tout seul, sans quoi « cela revien-
drait à nationaliser » des entrepri-
ses de l’agroalimentaire. Il devrait
ainsi rester minoritaire au sein du
fonds, qui sera complété par des
investisseurs spécialisés ou de
grands industriels du secteur.
Parmi les investisseurs, le gouver-
nement sollicitera Idia capital-in-
vestissement, une filiale du Crédit
agricole, Unigrains, Sofiprotéol,
Cerea, FrenchFood Capital ou FnB
Capital. Le gouvernement espère
réunir ces fonds dans les prochai-
nes semaines ou les prochains
mois.
Le fonds servira, par ailleurs, à
accompagner la modernisation
des PME agroalimentaires dési-
reuses de numériser leurs usines
ou de faire leur transition écologi-
que. Le gouvernement encoura-
gera enfin la robotisation, très in-
suffisante en France, via les fonds
de France 2030. « Cette industrie
est assez innovante dans les pro-
duits ou les emballages. En revan-
che (elle l’est peu) en matière de
process. On a l’industrie agroali-
mentaire la moins robotisée d’Eu-
rope», déplore encore Roland
Lescure dans Agra Presse.
Le gouvernement satisfait une
demande formulée de longue date
par le secteur. L’Adepale, qui re-
présente les PME et les ETI de
l’agroalimentaire, « salue le lance-
ment de ce plan historique, très at-
A
tendu dans un contexte particuliè-
rement compliqué pour la filière ». ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro

26 EntrEprisEs

LE GRAND sébAstiEN
ABIS
TÉMOIN SPéCIALIStE dE LA géOPOLItIqUE
AgRICOLE

PROPOS RECUEILLIS PAR

Anne CheyviAlle
l’instabilité économique, qui tou-
che aussi les marchés agricoles. Sur
« estLa Chine
le blé, elle est le premier produc-
£@AnneCheyvialle
teur mondial et le troisième impor-
devenue le
Sébastien Abis, spécialiste de la tateur. Le nord-ouest du pays, an- moteur de
géopolitique agricole, analyse les cien grenier aujourd’hui très l’instabilité
effets de la guerre en Ukraine. urbanisé, a des sols très dégradés et
se trouve en situation d’insoutena-
économique
LE FIGARO. - La flambée des prix bilité agricole. La Chine a mis en qui touche
des céréales, suite au conflit en place une stratégie agricole offen- aussi les
Ukraine, a mis en péril la sécurité sive, misant sur l’innovation, le
marchés
alimentaire. Les prix sont depuis
retombés. Le pire est-il passé ?
L’insécurité numérique, les nouvelles techni-
ques génomiques (NGT) Le grand agricoles »
Sébastien ABIS. - L’année 2022
aurait pu être pire. Elle a été extrê-
alimentaire conglomérat ChemChina a racheté
Syngenta, l’un des leaders semen-
SébAStIEn AbIS

mement agitée sur le plan agricole

et alimentaire avec des prix très
élevés, pas plus de récoltes dans le
monde, et des importateurs encore
davantage en souffrance en raison
de ce contexte difficile. La bonne
reste un risque ciers européens. Cofco, plus grand
groupe de négoce agricole de la
majeur. planète, a des silos et des bateaux
partout. Il participe à la politique de
Sébastien Abis stockage. Les chiffres ne sont pas
très fiables mais on estime que près

VinCEnt BOisOt/LE FigarO

nouvelle, c’est qu’aucun accident
climatique majeur ne s’est produit
dans les grands pays exportateurs.
Autre point positif, la mise en place
de corridors sous la tutelle de
l’ONU et par l’entremise turque a
permis à l’Ukraine d’exporter par
la mer et aussi par la route, via les
corridors de solidarité mis en place
plaide pour plus des deux tiers des stocks mondiaux
de céréales sont en Chine. Sans elle,
la planète ne dispose que d’un mois
d’innovation et et demi de stock pour le blé.
de coopération Peut-on avoir une agriculture plus
résiliente au choc climatique ?
entre les pays. On n’a juste pas le choix ! Si de-
main, on ne fait pas une agriculture

« Sans agriculture Bio

par l’UE. La situation reste cepen- plus résiliente, plus durable pour
dant très préoccupante car le les écosystèmes, ce siècle finira très
conflit perdure, les prix sont plus mal. Est-ce à dire qu’on doit moins
élevés qu’il y a un an, et l’insécurité produire ? Surtout pas. Il faut faire exPreSS
alimentaire toujours vive dans plu- autant, ou plus dans certaines zo-

plus durable, ce siècle

sieurs régions. 2005-2016
nes, mais partout beaucoup mieux !
Fonctionnaire
Moins de gaspillage, plus de par-
au CIHEAM
En quoi la Russie et l’Ukraine tage, des innovations à tous les ni-
(Centre international
sont-elles des acteurs clés ? veaux et des interdépendances as-
de hautes études

finira très mal »

Ces deux pays ont développé la
même stratégie depuis vingt ans en
misant sur le secteur agricole pour
renforcer leur économie et leur
présence à l’international. Ils sont
les seuls États à avoir augmenté leur
production de blé, qui est de bonne
qualité et très compétitive. Le mar-
ché mondial s’est polarisé autour de
la mer Noire. Outre le blé, l’Ukraine
produit et exporte énormément de
maïs et de tournesol.
Globalement, huit pays font 80 %
des exportations mondiales de blé,
dont le commerce transite à 80 %
par la mer. Le grand défi, c’est donc
sa bonne mobilité : elle est très
contrariée depuis un an, par le
conflit en mer Noire, les perturba-
tions logistiques et les mesures pro-
tectionnistes de certains États.
Pourquoi la crise alimentaire
se cristallise-t-elle sur le blé ?
Le blé est déterminant pour nourrir
la planète. C’est un produit peu
cher, qui se produit et se transporte
facilement. Il est consommé plu-
sieurs fois par jour, sous différentes
formes, par 4 milliards de per-
sonnes. Il couvre 20 % des calories
consommées dans le monde. De-
puis le début du siècle, la produc-
tion annuelle est passée de 600 mil-
lions à 800 millions de tonnes, et,
en même temps, il y a eu un dou-
blement du commerce (200 mil-
lions de tonnes désormais par an).
Une année sur deux, la consomma-
tion dépasse la production. Autre
chiffre qui peut surprendre : les su-
perficies mondiales de blé couvrent
220 millions d’hectares, soit 1/8 de
toutes les terres cultivées. C’est
impressionnant, comparé par
exemple aux 165 millions pour le
riz ; mais cela n’équivaut qu’à qua-
tre fois la France et les surfaces
n’ont pas augmenté depuis cin-
quante ans. Ce sont les rendements
qui ont progressé.
Le risque alimentaire n’est-il pas
surtout une crise du pouvoir
d’achat ?
Il est multifactoriel. Pour avoir du
développement agricole et de la sé-
curité alimentaire, il faut de la paix
et de la stabilité, bref de la
confiance. C’est crucial pour que les
agriculteurs puissent se projeter,
investir. En agriculture, on rai-
sonne et on ne peut agir que sur le
temps long. Le changement clima-
tique a un impact majeur. S’ajoute à
cela la situation économique. Beau-
surément. Si le climat géopolitique
agronomiques
semble nous pousser les uns contre
méditerranéennes).
les autres, l’adaptation au climat et
Depuis 2012
l’exigence de sécurité alimentaire
Chercheur associé
nous invitent à travailler ensemble
à l’Iris (Institut
pour réduire les risques.
de relations
coup de pays font face à une double
internationales
problématique : un manque d’ar- On a plutôt vu ces derniers mois le
et stratégiques).
gent des populations pour acheter renforcement du protectionnisme…
2017
de la nourriture et des pénuries ali- Nous assistons à une hyperfrag-
directeur général
mentaires localisées. On le voit au mentation de la planète et un affai-
du club demeter.
sud de la Méditerranée. En Tunisie, blissement du multilatéralisme. Les
2023
des boulangeries ont fermé faute de concurrences sont exacerbées face
Vient de publier
blé, à cause des coûts d’approvi- aux enjeux de souveraineté. La
Géopolitique du blé,
sionnement et des dysfonctionne- guerre du climat pousse elle-même
chez dunod-Armand
ments de gouvernance. La zone sa- parfois aux mesures protection-
Colin, et Agriculture
hélienne connaît de très fortes nistes. On l’a vu en Inde. L’UE et la
et alimentation.
tensions alimentaires, sans parler France se distinguent par leur ca-
La durabilité
de cas extrêmes comme la Somalie, pacité à proposer de la solidarité et
à l’épreuve des faits,
l’Afghanistan ou le Liban… de la confiance sur cette scène agri-
chez Iris éditions.
cole internationale. Elles doivent
La Chine est-elle déterminante ? faire en sorte de cultiver ces valeurs
Après avoir été pendant vingt à fortes avec la défense de leurs in-
trente ans le moteur du développe- térêts. Soyons déterminés sur le
ment économique mondial, la volet géopolitique comme nous le
Chine est devenue le moteur de sommes sur celui du climat ! ■

LES DÉCIDEURS nominations@lefigaro.fr

â Anthony VAlentini catherine choquet, de la fourche â SABrinA SouSSAn

CCI France Boeing
à la fourchette chez Mccain
CCI France, que préside Alain Di Crescenzo, Présidente-directrice générale de
désigne Anthony Valentini directeur général, « Je tiens à intervenir à des cultivateur de Champagne peut indirectement Suez, Sabrina Soussan devrait in-
après qu’il a dirigé la CCI de Vendée et celle de moments clés dans l’en- fournir le fast-food », souligne-t-elle. À son tégrer le conseil d’administration de
Nantes-Saint-Nazaire. Emma Delfau devient treprise pour œuvrer à initiative, le géant américain a décidé en Boeing. Si les actionnaires valident sa
piErrE-OLiViEr/Capa piCturEs/L’OrEaL ; antOinE VErDE-DELisLE ; COLLECtiOn partiCuLièrE

directrice générale adjointe, après avoir passé
quinze ans au ministère de l’Économie à Ber-
cy.
â MArie Julie Monnot
L’Oréal
Arrivée dans le groupe L’Oréal en
2010 comme chef de produit Garnier
Skincare, Marie Julie Monnot prend
les rênes de L’Oréal Paris pour la
France. Barbara Abitbol lui succède à
la direction générale des marques américaines
de la division grand public France (Maybelline
New York, NYX Professional Makeup et Essie).
â richArd Bouligny
Leasys-Free2move Lease
Stellantis et le Crédit agricole créent une
coentreprise de leasing, née de la fusion entre
Leasys et Free2move Lease. Ils en confient la
présidence à Richard Bouligny, actuel direc-
teur général adjoint de Crédit agricole Consu-
A
l’innovation, avec en toile
de fond la coordination
d’acteurs que nous avons souvent tendance à
opposer », résume Catherine Choquet. La
nouvelle directrice de l’agronomie pour
l’Europe continentale de McCain a embrassé
une carrière qui l’a menée auparavant de
McDonald’s à Bonduelle.
Originaire de la campagne arrageoise, dans
le Pas-de-Calais, elle a grandi entourée
d’exploitations, ce qui a nourri son envie de
s’orienter vers le vivant. Diplômée d’Agro-
ParisTech en 1994, elle a enchaîné plusieurs
missions, au ministère de l’Agriculture
notamment, pour appréhender les enjeux
du secteur. En 1998, elle a rallié Les Cru-
dettes, société de salades en sachet. « Cela
me permettait d’accéder à la position d’inter-
médiaire, que je convoitais, entre l’éleveur et
le consommateur », explique-t-elle. Elle
réfléchissait à des passerelles entre agricul-
tures biologique et traditionnelle, en établis-
sant un cahier des charges et en auditant les
producteurs.
En 2000, McDonald’s l’a recrutée avec
comme objectif de pacifier ses relations avec
le monde agricole. « Il fallait briser la glace,
2001 de participer au Salon de l’agriculture.
Premières amours
Neuf ans plus tard, ne trouvant plus les
fonctions proposées assez « impactantes »,
elle a intégré la coopérative agricole Terrena
pour diriger la recherche des filières ali-
mentaires. En 2013, en quête d’une perspec-
tive plus européenne, elle a poursuivi chez
Agrial (Florette, Priméale, Créaline). « Le
patron de l’époque jugeait que les gammes
manquaient d’originalité, raconte-t-elle.
Nous avons travaillé à la différenciation dans
les produits, en introduisant le chou kale ou la
patate douce, ainsi que dans les pratiques. »
Arrivée aux limites du défi qu’elle s’était
fixées, elle a effectué un bref passage chez
Bonduelle. Une « belle » opportunité s’est
présentée chez Saint-Hubert, pour déployer
le végétal. À la fin de 2022, elle choisit
de revenir à ses premières amours, les
pommes de terre, chez McCain. « Là encore,
il s’agit d’un tournant, estime-t-elle. Avec
le changement climatique, il devient urgent
de repenser la production et de miser sur la
régénération. »
MAud KenigswAld
nomination en avril, elle deviendrait
la première administratrice indépendante du
géant de l’aéronautique basée hors des États-
Unis. Auparavant, l’ingénieur a officié vingt
ans chez Siemens, où elle a occupé des postes
de direction.
â PhiliPPe Bénet
MAE
Président de la MAE depuis 2017, Philippe
Bénet est réélu à la tête de la mutuelle d’assu-
rance de risques scolaires. Celle-ci a aussi re-
nouvelé partiellement son conseil d’adminis-
tration avec l’arrivée de Laure Braconnier,
Fabienne Enderli, Géraldine Girard, Anne
Prochocki et Michael Cadon.
â Benoît SAux
Suzuki
Directeur des solutions CRM d’Izmocars
France, Benoît Saux rejoint Suzuki à la direc-
tion après-vente des activités auto et moto en
France, intégrant le comité exécutif. Il succè-

mer Finance, et la direction générale revient à dépasser les préjugés en montrant qu’un mkenigswald@lefigaro.fr de à Luc Malnoury, qui a fait valoir ses droits à
Rolando D’Arco, DG de Leasys. la retraite après seize ans à ce poste. M. K.
 le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023

Marchés 27

La fièvre des rachats questions

d’argent avec
d’actions gagne les Seniors : comment trouver
une bonne mutuelle ?
sociétés européennes AssurAnce Les cotisations des
complémentaires santé indivi-
besoins en santé. Le tarif annuel
d’une complémentaire dépend de
Ce mode de rémunération des actionnaires, venu des duelles ont augmenté de 7,1 % en- plusieurs paramètres comme son
tre 2022 et 2023, selon l’associa- âge, son lieu de vie et les garanties
États-Unis, s’impose en Europe, et les montants flambent. tion UFC-Que choisir. choisies. Deux stratégies sont envi-
L’explication à cette flambée des sageables : soit accepter de payer
prix ? « Les remboursements des une prime élevée pour privilégier
réduisent le nombre de titres en rémunération des actionnaires ? assurés ont enregistré une forte son confort (consulter des méde-
AnAlyse circulation, ce qui a pour effet Les motivations sont multiples. Dé- progression en raison du rattrapa- cins pratiquant des dépassements
Hervé rousseau d’augmenter leur bénéfice par ac- sormais, en Europe, comme c’est le ge des soins post-confinements, d’honoraires…), soit limiter le
hrousseau@lefigaro.fr tion et, par ricochet, le cours de cas depuis de nombreuses années constate Eugénie Poyet, manager montant de sa cotisation en pre-
Bourse des actions restantes. aux États-Unis, « une part crois- chez Addactis, une société éditant nant une simple garantie hospitali-
MArchés La saison des résultats Contrairement aux entreprises sante de la rémunération des diri- des logiciels dans l’assurance. De sation. Mais il faut alors accepter de
touche à sa fin, et les annonces de américaines, les sociétés européen- geants passe par des stock-options plus, le dispositif du “100 % santé”, mettre la main à la poche pour ré-
programmes de rachats d’actions nes privilégient toujours le divi- et repose donc sur le cours de Bourse qui donne accès à des lunettes et à gler ses restes à charge. Pour ré-
se sont enchaînées à un rythme dende. Mais les rachats d’actions qu’il est facile de stimuler avec des des prothèses dentaires et auditives pondre à cet objectif, des formules
effréné pour des montants jamais gagnent du terrain. « Ils représen- rachats d’actions », explique un sans reste à charge, monte en puis- axées uniquement sur les risques
vus. Les champions du CAC 40 ont tent aujourd’hui environ un tiers des banquier. Pour l’économiste Pa- sance. Les assureurs et les mutuel- lourds fleurissent. « Nous propo-
connu une année particulièrement versements en Europe, contre moins trick Artus, ancien administrateur les ont dû répercuter ces coûts sur le sons un contrat hospitalisation
faste en 2022 et ils en profitent pour de 20 % il y a une dizaine d’années », de TotalEnergies, c’est aussi « une montant des cotisations. » Les se- élargi, qui ne couvre pas les dépen-
soigner leurs actionnaires, dont les notent les spécialistes de Natixis. façon de séduire les investisseurs et niors sont les premiers concernés ses de santé pouvant être anticipées,
nerfs ont été mis à rude épreuve Exane BNP Paribas a mené l’enquê- de renforcer la valorisation de la so- par cette inflation puisqu’ils paient comme une consultation, l’achat de
par les soubresauts des marchés. te auprès de plus de 400 entreprises ciété, ce qui constitue une parade leur complémentaire plus cher médicaments ou encore de lunettes,
Les chiffres donnent le tournis : européennes, appartenant aux contre d’éventuels prédateurs ». que les autres, la dépense moyen- qui sont, à notre avis, non rentables
près de 2 milliards de dollars de ra- grands indices comme le CAC 40, le ne pour les frais de santé s’ac- à assurer. Grâce aux économies réa-
chats de titres pour TotalEnergies Dax allemand ou encore le Footsie Un outil souple croissant avec l’âge. lisées sur sa cotisation, l’assuré peut
rien qu’au premier trimestre, à la britannique. Il en ressort un phéno- Le rachat d’actions a une autre prendre en charge ces frais ou

1
à suivre sur
suite de résultats 2022 dopé par mène en plein boum : les montants vertu appréciée des entreprises : il lefigaro.fr/bourse Faut-il conserver conserver ce qu’il n’a pas dépensé
l’envolée des cours des hydrocar- de rachats d’actions ont pratique- est bien plus souple et manœu- le contrat santé sur un compte », explique Karim
bures ; BNP Paribas qui va rendre à ment doublé l’an dernier, à 161 mil- vrable que le dividende. « Il est en n Les matières de son ex-employeur ? Natouri, directeur général de Mu-
ses actionnaires une grande partie liards d’euros contre 84 milliards effet plus facile de faire varier les premières et les C’est l’une des questions à se poser tuaMea. D’autres initiatives sont
du fruit de la vente de sa filiale en 2021. montants versés aux actionnaires produits dérivés au moment de cesser de travailler. également attractives, comme les
américaine Bank of the West, avec Selon l’étude publiée par La d’une année sur l’autre, tandis que la La loi permet aux nouveaux re- mutuelles locales mises en place
à la clé un pactole de 5 milliards Lettre Vernimmen, en 2022, les en- baisse du dividende est toujours per- n Le crible traités de continuer à bénéficier de dans certaines villes (Toulouse,
d’euros. LVMH, Air liquide, Carre- treprises du CAC 40 ont rendu à çue par les investisseurs comme un des sicav façon individuelle de la complé- Reims…) ou départements (Loi-
four, Pernod Ricard, Sanofi… tous leurs actionnaires 23,7 milliards signe négatif », explique Franck et des fonds mentaire santé de leur entreprise. ret…). Leur intérêt ? Souscrire en
ces grands groupes sont au rendez- d’euros sous forme de rachats d’ac- Ceddaha, associé gérant chez Ainsi, ils restent couverts sans nombre pour négocier de meilleu-
n Les cotations
vous. Certaines sociétés réservent tions. Un montant pratiquement Degroof Petercam Investment interruption ni carence, et profi- res garanties et des tarifs à la baisse.
ces annonces aux assemblées gé- stable par rapport aux 23,8 milliards Banking et professeur à HEC. Pour en direct tent de garanties en général plus

3
nérales des actionnaires, qui ont versés un an auparavant. Mais, en ce spécialiste, « les deux modes de sur iPhone avantageuses que dans le cadre Comment trouver
lieu souvent au printemps. 2021, cette manne avait été gonflée rémunération des actionnaires sont d’un contrat souscrit individuelle- son contrat ?
Ces « share buybacks » sont un par le rachat par L’Oréal de 4 % de en réalité complémentaires ». ment. Mais attention, la contribu- Il est utile de consulter les
puissant moteur pour le CAC 40. Ils son capital auprès de Nestlé, pour Le dividende est un signal fort tion de l’employeur cesse (c’est en comparateurs en ligne (Hyper-
ont largement participé à propulser 8,9 milliards d’euros. Ces deux an- avec lequel la société s’engage sur général 50 % du montant) et le re- assur.com, LeLynx.fr…) qui ana-
l’indice à un nouveau record histo- nées à plus de 20 milliards d’euros la durée et un instrument de fidéli- traité supporte seul la totalité de la lysent les tarifs des assureurs, se-
rique de 7 387,29 points la semaine marquent une rupture. Auparavant, sation des actionnaires. Le rachat cotisation. Après un an, l’assureur lon son profil. Mais ces sites ne
dernière. L’effet sur le cours de les montants en jeu oscillaient plu- d’actions permet d’apporter un peut appliquer une hausse de pri- sont pas exhaustifs et ne compa-
Bourse est quasi mécanique : en ra- tôt entre 5 et 10 milliards d’euros. complément, à l’occasion par me, limitée à 25 % du tarif global la rent qu’un nombre limité de
chetant leurs propres actions pour Pourquoi les sociétés optent-el- exemple d’une année particulière- deuxième année et à 50 % la troi- contrats (ceux des établissements
les annuler ensuite, les entreprises les de plus en plus pour ce mode de ment faste ou de la réalisation sième. Ensuite, le tarif devient li- dont ils sont partenaires). Ils ne
d’une plus-value. Faut-il mieux bre. Il est donc indispensable de précisent pas forcément le pour-
encadrer le phénomène ? Aux faire ses calculs pour comparer le centage moyen de redistribution
Les rachats d’actions s’envolent 23,8 23,7 États-Unis, où les montants en jeu nouveau montant de sa prime avec des assureurs et des mutuelles, qui
sont parfois colossaux (400 mil- celui d’une assurance santé sous- représente pourtant un bon indi-
à la Bourse de Paris depuis deux ans liards en cinq ans pour Apple), Joe crite à titre individuel auprès de cateur des frais de gestion prélevés
RACHATS D’ACTIONS AU SEIN DU CAC40 Biden veut renforcer la fiscalité qui l’organisme de son choix. « Opter par les établissements et des mar-
en milliards d’euros avait été considérablement adoucie pour le contrat de son ancienne en- ges qu’ils peuvent réaliser. Plus il
par Donald Trump. Il a prévu de treprise n’est pas toujours intéres- est élevé, plus il est favorable aux
faire passer la taxation des « share sant, car le niveau de garantie pro- assurés. Pour choisir votre
buybacks » de 1 % à 4 %. Dans sa posé correspond à celui des salariés, contrat, il faut, enfin, regarder de
missive annuelle aux patrons d’en- et met l’accent sur la maternité ou près les services proposés, en véri-
treprises cotées, Larry Fink, le très l’orthodontie, par exemple, remar- fiant, par exemple, si l’organisme
10,9 10,7 écouté patron de BlackRock, s’est que David Trohel, directeur mar- travaille avec des réseaux de soins
10,2
9,5 alarmé des effets néfastes de ces ra- keting produits du courtier Santi- permettant de bénéficier de ré-
7,4 chats massifs de titres sur les inves- ane. Ce n’est donc pas forcément ductions (optique, prothèses den-
6,6 6,6 tissements des sociétés. « Tout est adapté aux seniors. » taires…) et de ne pas avoir à avan-
5,7 5,5 une affaire de dosage », estime cer les frais. Attention, certains

2
4,6
Franck Ceddaha. Pour les entrepri- Quelle formule établissements appliquent une li-
2,0 ses du CAC 40, la menace sur les in- privilégier ? mite d’âge à la souscription ou im-
vestissements semble lointaine, Si son contrat d’entreprise posent un délai de carence avant
- 0,1 « les rachats d’actions représentant ne s’avère pas une bonne affaire, il de prendre en charge certains
2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 environ 1 % de la capitalisation de faut se tourner vers une assurance soins ou l’hospitalisation. ■
Source : La lettre Vernimmen Infographie l’indice ». ■ individuelle et faire le point sur ses Pauline Janicot

la séanCe du vendredi 3 marS la valeur du jour dguinot@lefigaro.fr

LE CAC JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12

Optimiste pour 2023, volkswagen

AIR LIQUIDE ........................... 150,36 +0,53 150,62 149,62 0,107 +13,56 MICHELIN ..............................................
29,71 +0,81 29,955 29,46 0,454 +14,34
AIRBUS ..............................................124,16
ALSTOM ..............................................28,16
ARCELORMITTAL SA ........................... 30,41
+1,03 124,28
+2,1 28,21
+2,77 30,515
123,06
27,63
29,76
0,127
0,303
0,391
+11,84
+23,4
+23,74
ORANGE ..............................................10,746
PERNOD RICARD ...........................
PUBLICIS GROUPE SA .....................
201,2
77,58
-0,04
0
+1,23
10,798
202,6
77,66
10,714
200,8
76,58
0,185
0,165
0,256
+15,78
+9,5
+30,56
s’envole en Bourse
AXA .............................................. 29,89 +0,76 29,955 29,485 0,174 +14,72 RENAULT ..............................................43,125 +1,65 43,675 42,49 0,577 +37,89
BNP PARIBAS ACT.A ........................... 64,26 +1,4 64,5 63,52 0,263 +20,68 SAFRAN ..............................................135,22 +1,08 135,64 134,1 0,117 +15,65 L’horizon est dégagé pour Volkswagen. améliorer ses bénéfices. Il a enregistré
BOUYGUES ..............................................32,61 -0,03 32,75 32,54 0,213 +16,3 SAINT GOBAIN ........................... 58,22 +1,69 58,29 57,56 0,184 +27,54 Le géant de l’automobile allemand s’at- un résultat net de 15,8 milliards d’euros,
CAPGEMINI ..............................................
180,75 +1,46 181,2 179,25 0,161 +15,9 SANOFI ..............................................89,18 -0,02 89,57 88,72 0,101 -0,73
tend à écouler 9,5 millions de véhicules en hausse de 2,6 % sur un an. Quant au
CARREFOUR ..............................................
18,11 -0,11 18,22 17,96 0,283 +15,79 SCHNEIDER ELECTRIC ..................... 154,88 +1,18 154,98 153,58 0,131 +18,48
CREDIT AGRICOLE ...........................11,422 +1,06 11,462 11,336 0,19 +16,18 SOCIETE GENERALE ........................... 26,925 +1,66 26,945 26,485 0,282 +14,67 cette année, soit un bon million de plus résultat opérationnel (avant éléments
qu’en 2022. Cette année devrait en exceptionnels), il a progressé de 12,5 %
CLÔTURE
DANONE ..............................................53,82 +0,3 53,94 53,43 0,153 +9,32 STELLANTIS NV ........................... 17,662 +2,88 17,744 17,31 0,161 +33,1
DASSAULT SYSTEMES ........................... 37,065 +1,59 37,2 36,61 0,082 +10,66 STMICROELECTRONICS ..................... 45,305 +2,44 45,655 44,565 0,223 +37,31 effet voir les goulots d’étranglement en 2022 (à environ 22,5 milliards
ENGIE .............................................. 13,862 +0,71 13,962 13,838 0,207 +3,54 TELEPERFORMANCE ........................... 250,3 +2,16 251,5 245 0,29 +12,39
DU CAC 40 dans la chaîne d’approvisionnement d’euros). « Les résultats témoignent de

+ 0,88%
ESSILORLUXOTTICA ........................... 163,75 +0,55 164,6 163,45 0,097 -3,22 THALES ..............................................132,8 -0,38 134,05 132,4 0,121 +11,32
EUROFINS SCIENT. ...........................62,76 +2,38 62,94 61,6 0,434 -6,41 TOTALENERGIES ...........................59,01 -0,19 59,3 57,73 0,184 +0,61
« s’atténuer progressivement, permet- la solidité de la base financière sur la-
HERMES INTL ........................... 1735,5 +0,43 1739,5 1714 0,058 +20,1 UNIBAIL-RODAMCO-WE ..................... 58,63 +2,55 58,78 57,35 0,428 +20,56 tant d’honorer le carnet de commandes quelle nous pouvons mettre en œuvre
KERING ..............................................577,4 +1 580,8 569,6 0,177 +21,43 VEOLIA ENVIRON. ........................... 28,35 +1,47 28,49 28 0,238 +18,13 bien rempli », a indiqué vendredi Arno notre stratégie », affirme Arno Antlitz.
L'OREAL ..............................................379,85 +0,4 382,35 378,05 0,063 +13,86 VINCI .............................................. 108,68 +0,65 108,72 107,64 0,157 +16,5 à 7 348,12 points Antlitz, le directeur financier du groupe, Celle-ci repose sur l’électrification
LEGRAND ..............................................89,12 +1,25 89,34 88,54 0,132 +19,11 VIVENDI SE ........................... 9,86 +0,51 9,89 9,708 0,192 +10,61 dans un communiqué tombé en avance croissante de sa gamme. En Europe, il
LVMH .............................................. 815,1 +1,34 817,1 804,4 0,06 +19,89 WORLDLINE ..............................................
39,83 +1,53 40,19 39,36 0,245 +9,03
sur le calendrier. talonne Tesla pour les ventes de voi-
LES DEVISES MONNAIE 1 EURO=
LʼOR VEILLE 31/12 En 2022, malgré les ruptures d’ap-
provisionnement en composants et la
tures électriques.
Optimiste, le groupe allemand table
AUSTRALIE ................................................................................
DOLLAR AUSTRALIEN 1,5728 AUD
Cotation quotidienne assurée par Or en Cash
CANADA ................................................................................
DOLLAR CANADIEN 1,4437 CAD https://www.orencash.fr/investissement/ hausse des coûts des matières pre- pour cette année sur un ratio de ren-
GDE BRETAGNE ................................................................................
LIVRE STERLING 0,8853 GBP mières et de l’énergie, le numéro deux tabilité opérationnelle, compris entre
Lingot 1KG ................................. 56 030,33€ +2,2 %
HONG KONG ................................................................................
DOLLAR DE HONG KONG 8,3325 HKD
JAPON ................................................................................
YEN 144,55 JPY
Lingot 100g ................................. 5 614,03€
Lingot 50g ................................. 2 813,02€
-3,06 %
-4,12 %
mondial a vu ses ventes progresser de 7,5 % et 8,5 %, contre 8,1 % en 2022.
SUISSE ................................................................................
FRANC SUISSE 0,9958 CHF 1 754,83€
Lingot ONCE (31,10g) ................................. -4,16 % 12 %, à 279,2 milliards d’euros. Elles ont En Bourse, les investisseurs ont sa-
ETATS-UNIS ................................................................................
DOLLAR 1,0615 USD
TUNISIE ................................................................................
DINAR TUNISIEN 3,341 TND
Lingot 10g .................................
Lingot 2,5g .................................
571,5€
150,8€
-4,44 %
-6,96 %
été tirées par les modèles premium, lué ces annonces. À la Bourse de Franc-
MAROC ................................................................................
DIHRAM 11,103 MAD 2OFr NAPOLÉON .................................349,79€ +1,99 % plus onéreux et aux marges plus éle- fort, le titre Volkswagen s’est envolé de
TURQUIE ................................................................................
NOUVELLE LIVRE TURQUE 20,0628 TRY 20Fr SUISSE ................................. 345,88€ +2,04 % vées. Le constructeur aux dix marques 9,7 %. L’action Porsche (+ 2,3 %) a elle
EGYPTE ................................................................................
LIVRE EGYPTIENNE 32,5785 EGP SOUVERAIN ................................. 436,3€ +2,66 %
KRUGGERAND ................................. 1 864,52€ -0,19 % (Volkswagen, Audi, Porsche, Lam- aussi été recherchée, Volkswagen
A

CHINE ................................................................................
YUAN 7,3326 CNY
50 PESOS ................................. 2 226,01€ +2,06 %
INDE ................................................................................
ROUPIE 86,9185 INR 10 DOLLARS ................................. 910,23€ +1,7 % borghini, Skoda, Bugatti, Seat…) est étant l’actionnaire majoritaire du grou-
ALGERIE ................................................................................
DINAR ALGERIEN 145,1364 DZD 20 DOLLARS ................................. 1 820,46€ +1,82 % également parvenu à légèrement pe de Wolfsburg. ■

VALEURS LIQUIDATIVES EN EUROS (OU EN DEVISES), HORS FRAIS

VALEUR DATE DE
LIQUID. VALORISAT.
Cybèle Asset Management
37 av. des Champs-Elysées
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro

28 médias et publicité
ChatGPT : médias et artistes veulent
faire valoir leurs droits d’auteur
Ces IA se sont entraînées sur du contenu protégé. Alors que des procès guettent, une solution se dessine en France.
Chloé Woitier £@W_Chloe
IntellIgence artIfIcIelle « Qui-
conque veut utiliser le travail des
journalistes du Wall Street Journal
pour entraîner des intelligences arti-
ficielles doit obtenir une autorisation
et payer les droits de licence affé-
rents. » Cette déclaration du groupe
Dow Jones illustre une nouvelle
phase dans le regard des médias
vis-à-vis de l’intelligence artificiel-
le générative, popularisée par le site
ChatGPT. Il y a d’abord eu la fasci-
nation face à une technologie capa-
ble de créer comme par magie du
texte ou des images sur mesure.
Puis la crainte face à un outil qui, en
apportant des réponses aux inter-
rogations des internautes, pourrait
faire reculer l’audience redirigée
par les moteurs de recherche vers
les sites d’information. Vient dé-
sormais l’heure du juridique.
Car, qu’il s’agisse de ChatGPT, de
Bing Chat ou bien des générateurs
d’images Dall-E, Midjourney ou
Stable Diffusion, toutes ces IA géné-
ratives ont d’abord eu besoin d’ap-
prendre à écrire et à dessiner. Cette
capacité ne leur est pas venue de
nulle part : ces modèles ont ingéré
des gigantesques quantités d’ima-
ges ou de textes produits par des
humains durant leur phase d’en-
traînement. C’est ainsi qu’elles ont
« compris » à quoi ressemble un
vélo, une clémentine ou la couleur
vert. Ou qu’elles prédisent quels
sont les mots à mettre les uns à la
suite des autres pour former des
phrases cohérentes.
Ces données d’apprentissage
proviennent d’internet. OpenAI,
créateur de ChatGPT et de Dall-E,
ne cache pas avoir scanné l’ensem-
ble du web, où se trouvent des
contenus protégés par un droit
d’auteur, sans avoir demandé une
quelconque autorisation. C’est ce
que l’on appelle du « crawl », un
travail effectué par des program-
mes informatiques nommés
« crawlers ». « Les crawlers sont des
outils très banals. C’est ce qu’utili-
sent les moteurs de recherche pour
pouvoir indexer les pages web »,
rappelle Me Perrine Pelletier, avo-
cate dédiée aux questions de pro-
priété intellectuelle et numérique.
Les crawlers sont aussi utilisés par
les agences de veille stratégique
pour automatiser leurs revues de
presse. La pratique, mal connue,
n’a jamais vraiment ému les édi-
teurs de presse. « ChatGPT a changé
la donne, car une entreprise a mis à la
disposition du grand public un outil
très performant », souligne l’avoca-
te. Et il a soulevé une question juri-
dique : a-t-on le droit d’entraîner
des IA sur du contenu protégé ?
Aux États-Unis, l’agence photo
Getty Images a déposé plainte
contre l’entreprise Stability AI, qui
a créé l’outil de générations d’ima-
ges Stable Diffusion. D’après la
plainte, Stability AI aurait copié
12 millions d’images issues de Getty
« sans autorisation ni compensation
financière ». Son dossier comprend
des images générées par Stabili-
ty AI, où on voit nettement le logo
de l’agence. L’agence explique
avoir lancé cette action en justice
non pour obtenir des dédommage-
ChatGPT, outil utilisant
l’intelligence artificielle,
est censée améliorer
la productivité
et l’efficacité
de ses utilisateurs,
selon ses concepteurs.
NICOLAS MAETERLINCK/
BELgA vIA AFP
ments ou pour stopper les dévelop-
pements des générateurs d’images,
mais pour fixer des règles du jeu.
Elle prend pour exemple le monde
du streaming musical, qui est passé
du pirate Napster aux services lé-
gaux comme Spotify.
« Soyons proactifs »
Une autre plainte a été déposée en
janvier par trois illustratrices améri-
caines contre Stability AI et Midjour-
ney, accusés d’avoir aspiré leurs
œuvres sans autorisation, au mépris
de leurs droits d’auteur. Ce procès va
permettre de déterminer si le « fair
use » (« usage raisonnable »), soit les
exceptions au droit d’auteur qui ré-
gissent le droit américain, s’applique
ou non à l’entraînement des IA géné-
ratives.
En Europe, les règles sont un peu
plus claires. Selon la directive droit
d’auteur de 2019, la « fouille de textes
et de données », c’est-à-dire le craw-
ling, est légal même pour un usage
commercial mais… les éditeurs de
site ont le droit de s’opposer à cette
extraction. Et l’éditeur peut mani-
fester son opposition en indiquant
dans ses conditions d’utilisation
qu’un accord contractuel est obliga-
toire avant tout scrapping, via des
métadonnées ou des dômes de pro-
tection, rappelle Me Perrine Pelletier.
Il peut s’agir d’une licence signée au
nom des droits voisins.
Le Centre français d’exploitation
du droit de copie (CFC) propose jus-
tement ce type de contrat, qui ciblait
jusqu’à présent les agences de veille.
Il pourrait s’étendre aux concepteurs
d’intelligences artificielles générati-
ves. Ce scénario va être étudié la se-
maine prochaine par le conseil d’ad-
ministration de la Société pour les
droits voisins de la presse (DVP), qui
regroupe les éditeurs et les agences
de presse ayant fait le choix de la
gestion collective. « Plutôt que d’être
sur la défensive, soyons proactifs et
allons proposer à l’industrie de l’intel-
ligence artificielle générative un gui-
chet unique, avec des règles claires et
une grille tarifaire », explique Em-
manuel Parody, secrétaire général
du DVP. « Ces entreprises savent
qu’elles ont besoin des articles des mé-
dias pour avoir des données d’entraî-
nement fiables, de qualité et à jour. Et
elles ont aussi besoin de sécurité juri-
dique. Les éditeurs de presse ont la loi
avec eux, et nous pouvons réussir à
fixer un standard européen. »
La valeur des données
OpenAI ne publie pas ses données
d’entraînement. Mais le CFC sait,
grâce à ses outils techniques de dé-
tection et d’identification des
crawlers, qu’il vient une fois par
mois scanner des sites français.
« Suivre ces crawls est un enjeu pour
les éditeurs de presse » afin de prou-
ver que cette extraction existe, sou-
ligne Perrine Pelletier. Reste ce qui
sera le nœud de ces négociations :
fixer le prix de cette aspiration de
contenus. « Il ne s’agit pas de calcu-
ler un préjudice, mais de définir la
valeur de ces données de qualité qui
serviront à l’entraînement des IA »,
poursuit l’avocate.
Autre interrogation : les éditeurs
pourront-ils faire valoir leurs droits
sur les textes générés par une IA ?
ChatGPT ne cite pas ses sources, ce
qui rend cette demande compli-
quée. A contrario, Bing Chat de Mi-
crosoft précise où il a trouvé ses in-
formations et glisse des liens dans
ses textes. « Il s’agit là d’un cas où les
droits voisins s’appliquent et où l’ex-
ploitation sous forme de communica-
tion au public est apparente, donc
mesurable », estime Me Perrine Pel-
letier. Quant à savoir si la prose de
ChatGPT ou les images de Dall-E
sont protégées par un droit
d’auteur, la question est loin d’être
tranchée. Si une machine ne peut
pas être qualifiée d’auteur, qu’en
est-il des humains derrière ? La per-
sonne ayant tapé la commande pour
générer le texte ou l’image peut-elle
faire valoir un droit d’auteur ? ou
bien le concepteur de l’IA peut-il
s’arroger ce droit ? Aux États-Unis,
le Copyright Office avait attribué à
l’auteur Kris Kashtanova l’intégra-
lité des droits de sa BD Zarya of the
Dawn, avant de lui retirer ceux liés
aux images de l’œuvre, qui ont été
générés par Midjourney. ■

La fréquentation des salles de cinéma reprend des couleurs

En février, 18,2 millions de Français sont allés voir un film sur grand écran, soit 5 millions de plus qu’il y a un an.
Caroline sallé £@carolinesalle
cInéma Dire qu’ils ont essuyé un
tir nourri de critiques relève de
l’euphémisme. Cela n’a pas empê-
ché les super-héros gaulois Astérix
et Obélix de prendre la première
place du box-office hexagonal en fé-
vrier. Un mois après sa sortie,
l’adaptation de la franchise par
Guillaume Canet a attiré 4,2 millions
de spectateurs. Ce qui en fait le pre-
mier film français à dépasser cette
barre symbolique depuis février
2019 et Qu’est-ce qu’on a tous fait au
bon Dieu ?.
Ce n’est pas le seul long-métrage
tricolore à se démarquer. En trois
semaines d’exploitation, Alibi.com 2,
la comédie de Philippe Lacheau, a
séduit 2,9 millions de spectateurs.
Ces deux locomotives ont largement
contribué à dynamiser le marché.
Au total, 18,2 millions de Fran-
çais ont retrouvé le chemin des
salles obscures le mois dernier,
d’après les chiffres du Centre na-
tional du cinéma (CNC). Comparé
à la même période un an plus tôt,
cela représente une hausse de 40 %
des entrées. « La tendance est bon-
ne », assure Marc-Olivier Sebbag,
le secrétaire général de la Fédéra-
tion nationale des cinémas français
(FNCF).
Côté face, les salles obscures ont
vendu 5 millions de billets en plus
que l’an dernier à la même époque.
Mais, côté pile, 5 millions de spec-
tateurs manquent encore à l’appel
si l’on retient comme base de com-
paraison la fréquentation moyenne
des salles entre 2017 et 2019, avant
la crise sanitaire. Depuis le début
de l’année, les ventes de tickets
restent en recul de 18,6 % par rap-
port à la période pré-Covid. Mieux
qu’au début de 2022, lorsque le dé-
ficit d’entrées atteignait - 41 %
comparé à 2019… « Marche après
marche, nous remontons la pente, le
public revient progressivement »,
insiste Marc-Olivier Sebbag. Au-
delà d’Astérix ou d’Alibi.com 2, les
Le film de Guillaume
Canet, Astérix et Obélix :
L’Empire du milieu
a occupé la première
place au box-office
français en février.
PATHé
spectateurs ont aussi plébiscité
Ant-Man et la guêpe : Quantuma-
nia, le dernier opus de la franchise
Marvel, ou encore le dessin animé
Patti et la colère de Poséidon.
« Quand on propose une offre régu-
lière et très diversifiée de films, aussi
bien grand public que classés art et
essai, les spectateurs sont au ren-
dez-vous », constate-t-il. En fé-
vrier, 59 films sont sortis pour la
première fois sur les écrans, contre
54 longs-métrages un an plus tôt.
Ce qui représente en moyenne
15 nouveaux films par semaine.
Valeur de test
En mars, la filière espère que
l’embellie se poursuivra. The Son,
signé Florian Zeller, Sur les che-
mins noirs, adaptation du livre de
Sylvain Tesson avec Jean Dujar-
din, ainsi que les franchises hol-
lywoodiennes Creed III,
Scream VI, John Wick 4 seront no-
tamment à l’affiche.
La situation est certes un peu
meilleure, mais le cinéma n’est pas
encore sorti de l’ornière. La preu-
ve : avec un budget qui s’élève à
66 millions d’euros, sans compter
les coûts marketing, Astérix et
Obélix : L’Empire du milieu a beau
être le numéro un du box-office en
février, le film est encore loin
d’avoir atteint la rentabilité. Pour
rentrer dans ses frais, il lui faudrait
franchir la barre des 6 millions
d’entrées… L’objectif semble diffi-
cile à atteindre, alors que le film
entame sa cinquième semaine
d’exploitation. Or, il a valeur de
test pour le marché. Fin janvier, au
micro de France Inter, Guillaume
Canet lui-même l’avait rappelé :
« Si un film comme ça ne marche
pas, il n’y a plus un financier qui va
mettre de l’argent dans les films. » ■

Olivier BOST
BRUNO RETAILLEAU Jim JARRASSÉ
Président du groupe Les Républicains au Sénat Sehla BOUGRIOU
Marie-Pierre HADDAD
En direct du Grand Studio de RTL
Questions et réactions
DIMANCHE 12H-13H
A

#LeGrandJury PHOTO : © JOEL SAGET/AFP

 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro - N° 24 427 - Cahier N° 3 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

Défilés Télévision
CHez Loewe, JonatHan IntervIew de vInCent amouroux, réaLIsateur
anderson transCende Le réeL du doCumentaIre « notre-dame de parIs,
Page 34 Le CHantIer du sIèCLe » Page 38

Le paLmarès des étoiLés du « fiGaro »

Fr. BOUCHON/Le FigarO - aNtHONy LUONg - NatHaLie CarNet - giL-gONzaLez aLaiN/aBaCa - arte FraNCe/zeD

Fanny Rey,
Alexandre chef de L’Auberge Romain Meder,
Gauthier, chef de Saint-Rémy chef du Domaine
de La Grenouillère de Provence de Primard
(Pas-de-Calais). (Bouches-du-Rhône). (Eure-et-Loir).

Deux jours avanT les annonCes Du guiDe miChelin 2023, nos CriTiques révèlenT leurs Coups De Cœur De l’année.
Pages 32 et 33

commissaires-
priseurs :
une profession
qui rajeunit paGe 30
POtasHev aLex/stOCk.aDOBe.COm

le jazz faiT un reTour en fanfare au ChâTeleT

●
musique le ThéâTre organise pour la première fois un fesTival DéDié au genre. aveC une affiChe éCleCTique, DonT quelques poiDs lourDs.
●

rition du saxophoniste Wayne Shorter, 23 ans. Il n’a cessé, depuis, de prouver rie révélation. S’il est déjà rodé à la scè- ce, le contrebassiste israélien déploie
benjamin puech bpuech@lefigaro.fr
y fait son come-back à la faveur d’un son inventivité. De multiples inspira- ne, il admet qu’« un rêve s’accomplit » un jazz riche et mélodieux. Au Châtelet,

L
es vieux amoureux de jazz,
ceux qui y avaient entendu
Miles Davis jouer avec tant
d’ardeur en mai 1982, avaient
fini par jeter un regard un peu
désabusé vers le Théâtre du Châtelet.
Ces derniers temps, le genre musical
ne passait plus souvent les portes du
bâtiment second Empire. La dernière
venue d’un géant américain remonte,
par exemple, au concert du pianiste
Brad Mehldau (lire nos éditions du
25 février 2023), en 2010. Mais voilà que
festival d’une semaine, Le Châtelet fait
son jazz !. Le programmateur indépen-
dant Serge Kolpa explique avoir imagi-
né une affiche « éclectique » afin qu’elle
« parle au plus grand nombre ». Même
aux enfants. Le Carnaval des animaux
de Saint-Saëns ouvre ainsi la manifes-
tation, dimanche 5 mars, dans l’après-
midi. Un Carnaval revisité par
The Amazing Keystone Big Band, festif
en diable.
Personnalité en vue du jazz, le pia-
niste arménien Tigran Hamasyan sera
sur scène le 9 mars. Il donnait son pre-
tions se fondent dans son jeu survolté.
Il s’emparera, jeudi, de standards
comme All the Things You Are et
De-Dah. Changement radical d’at-
mosphère, le lendemain, avec David
Krakauer. Le clarinettiste new-yor-
kais emmène le klezmer, la musique
traditionnelle ashkénaze, dans des ré-
gions inattendues, vers le funk et le
hip-hop. Jusqu’à atteindre une forme
de folie douce. Étonnant.
On écoutera ensuite le concert, en
trio, d’Arnaud Dolmen. Ce singulier
batteur, qui joue et compose, a rempor-
avec cette invitation au Châtelet. Le
Guadeloupéen le réalisera sans s’an-
goisser : « On fera du mieux qu’on peut,
avec les vibrations du moment. La nature
même du jazz permet de s’accorder à
l’environnement qui nous entoure. »
Rythmes venus d’ailleurs
Deux poids lourds, enfin. Richard Bona,
55 ans, voix suave et groove délicat à la
basse. Dans ses chansons, le Douala ca-
merounais de sa jeunesse épouse des
rythmes afro-cubains, travaillés à New
York. Doit-on encore présenter
il présentera son nouveau disque,
d’inspiration caribéenne.
Joli programme. Nul doute qu’Olivier
Py, placé en février à la tête du théâtre
par Anne Hidalgo à l’issue d’un proces-
sus controversé, portera toute son at-
tention sur cette nouvelle manifesta-
tion. Serge Kolpa, lui, semble voir d’un
bon œil l’arrivée du metteur en scène :
« Je ne l’ai pas encore rencontré, mais je
suis content pour les gens du Châtelet,
qui n’avaient plus de direction. Olivier Py
possède une vraie vision artistique. »
Le Châtelet fait son jazz !, au Théâtre
A

le jazz, tout juste endeuillé de la dispa- mier concert au Châtelet en 2011, à té une Victoire du jazz, en 2022, catégo- Avishai Cohen ? Très apprécié en Fran- du Châtelet (Paris 1er), du 5 au 12 mars.
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
30 Culture
Commissaires-priseurs,
des jeunes de plus en plus marteaux
CVV
La cérémonie de remise des diplômes au ministère de la Culture en présence de la ministre, Rima Abdul Malak (chemisier rouge), le 21 novembre 2022. À cette occasion, une médaille commémorative créée par l’artiste
contemporaine Sabine Pigalle a été remise à chacun des nouveaux commissaires-priseurs. Pour cette promotion, le taux de réussite à l’examen d’accès était de 17 % seulement.
Béatrice de rocheBouët
bderochebouet@lefigaro.fr
E
t si la jeunesse redonnait un sé-
rieux coup de fouet au marché
français ? Dépoussiérer le mé-
tier. Utiliser les nouveaux codes
de sa génération. Donner l’envie
de pousser les gros rideaux rouges des sal-
les de ventes, aux rites trop convention-
nels. Prouver que cette vocation est plus
que jamais d’actualité à l’ère du recyclage,
pour donner une seconde vie aux objets.
Voici l’ambition de cette nouvelle vague
de commissaires-priseurs ultradynami-
ques et inventifs qui arrive à point nommé
pour redorer le blason de la France.
Tous les signaux sont au vert alors que
le produit des ventes aux enchères en
France atteint 4,37 milliards d’euros pour
2022, en consolidation par rapport à 2021
(+ 8 %), avec notamment le développe-
ment des ventes en ligne et les effets du
Brexit qui ont ramené nombre d’œuvres
dans l’Hexagone. Ce sont les derniers
chiffres du Conseil des ventes volontaires
(CVV), organisme de régulation de la pro-
fession, qui viennent d’être divulgués. La
France compte pour plus de 50 % dans
l’Union européenne. Et maintient sa qua-
trième place mondiale.
Jusque-là, nombre de récents diplômés
étaient encore « fils de », comme beau-
coup dans les professions classiques : Léo-
nard Pomez (né en 1987), commissaire-
priseur chez Boisseau-Pomez à Troyes, du
nom de son père Thierry Pomez, Henri
Couton (né en 1986), chez Couton Veyrac
Jamault à Nantes, fils de Bertrand Couton,
ou Étienne Laurent (né en 1982) chez Vi-
chy Enchères, héritier de Guy Laurent.
Mais les plus jeunes poussent derrière. Sur
les 711 commissaires-priseurs habilités à
ce jour par le CVV, 13 % ont moins de
35 ans. Les trentenaires croient dur com-
me fer à la renaissance de Paris mais aussi
de la province où 66 % des maisons de
ventes sont implantées.
La relève vient aussi des femmes. Elles
représentent 62 % de la promotion 2021.
« Je viens de la région lyonnaise, c’est au
cours d’un stage chez Jura Enchères où je
me suis occupée de la succession de Guy
Bardone, artiste peintre peu connu, mort en
2015, que j’ai eu la vocation. Un rêve depuis
toujours. Je n’en dormais plus la nuit !, ra-
conte Margaux Serrano, 30 ans, qui vient
de taper son premier coup de marteau,
chez Alexandre Landre (installé rue de
Bourgogne, à Paris), une vente retransmi-
A
se sur Drouot Enchères. J’ai ensuite fait le
cursus classique, puis deux ans de stage en
salle de ventes à Marseille et à Saint-Étienne
alors qu’une réforme pour le côté judiciaire. De là est née ma pas-
sion pour les bijoux, un passage obligé par le
de leur formation
laboratoire français de gemmologie, près de
est entrée en vigueur, Drouot, pour monter le département joaille-
rie chez Landre », poursuit-elle.
une trentaine « Pour l’instant, c’est trop tôt, il faut que
j’acquière de l’expérience. La seule chose
de trentenaires, dont importante est de me lever avec joie tous les
une majorité de femmes, matins et d’apprendre sans cesse. On ne
devient pas expert du jour au lendemain
ont reçu leur diplôme. comme dans “Affaire conclue”, l’émission
ils croient au marché de France 2 qui a certes popularisé le métier
alors que celui-ci reste très difficile », plai-
français qui consolide sante Margaux Serrano. Sa dernière fier-
té : ce bijou des années 1940 de Suzanne
sa place en 2022, selon Belperron en or, diamant et saphir, qui ne
les derniers chiffres. portait pas de poinçon et dont elle a réussi
à authentifier la signature. La personne
enquête. qui lui a amené allait le faire fondre pour
3 000 euros. Elle l’a vendu 25 000 euros,
avec les frais !
« Passion et déontologie »
Le 21 novembre dernier, ce sont 32 di-
plômés commissaires-priseurs de la pro-
motion 2021 qui ont été reçus dans les sa-
lons du ministère de la Culture pour une
14e cérémonie du genre. « Vous êtes la
relève ! Vous allez contribuer à réinventer,
façonner le nouveau visage du marché de
l’art, avec passion, déontologie, rigueur et
engagement », a déclaré la ministre Rima
Abdul Malak. La soirée marquait le mo-
ment où ces jeunes visages devenaient
officiellement commissaires-priseurs et
recevaient une médaille créée par l’artis-
te contemporaine Sabine Pigalle. Pour
cette promotion, le taux de réussite à
l’examen d’accès était de 17 % seule-
ment. C’est dire à quel point le processus
est sélectif.
« Le critère numéro un est d’avoir un es-
prit curieux, un vrai regard sur une grande
variété d’objets, tout en ayant un bon ba-
gage académique », observe Pierre Mo-
thes, membre du jury à l’écrit et l’oral,
qui termine son mandat de trois ans.
Reçu à l’examen en 1991, il a débuté à
Drouot Estimation, avant d’entrer chez
Christie’s (en 1995), puis Sotheby’s (en
2011). « On ne s’improvise pas commissai-
re-priseur par la filière du droit. Faire ce
métier, comme je le fais depuis trente-huit
ans, reste quasi impossible aujourd’hui.
C’est comme entrer en religion ! Sans pas-
sion et sans l’engagement total d’une vie,
24 heures sur 24, mieux vaut faire autre
Chloé Collin, 27 ans, est la plus jeune chose. Cela vous ronge la nuit, mais on
commissaire-priseur de France. bouillonne de bonheur », justifie Rémy Le
Passionnée par les objets qui ont Fur, reparti de zéro en créant Auction
une âme, elle aime faire parler l’histoire Art, après avoir quitté le navire Artcurial.
avec un grand H. LoLita CharLet Une vraie volonté d’exigence ? Depuis
sa nomination en 2019, Henri Paul, le
président du CVV, travaille d’arrache-
pied à la modernisation et à la profes-
sionnalisation de la formation des com-
missaires-priseurs, bousculé par le
numérique et les nouvelles pratiques de
ventes en ligne. « Dans le décret du 20 fé-
vrier dernier sur l’application de la loi de
modernisation du marché de l’art, il y a
une partie sur la formation des commis-
saires-priseurs », explique Quentin Loi-
seleur, en charge du sujet au CVV. Pour
intégrer la formation qui dure deux ans,
les candidats doivent être titulaires de
deux licences (en droit et en histoire de
l’art). Chaque année, environ 120 candi-
dats se présentent à l’examen écrit, seu-
lement 25 sont retenus. Ils ont une dis-
sertation de quatre heures en droit et
autant en histoire de l’art.
Puis des oraux (4 épreu-
ves). Une fois reçus,
ils suivent des cours
théoriques à et de ce que j’aime,
l’ESCP Business
School (École
supérieure de
commerce de
Paris) et à
l’École du
Louvre et doi-
vent faire des
stages. « La vraie
nouveauté, c’est le
certificat d’aptitude
à la profession (norme
Qualiopi) pour lequel il
faut passer un examen de sor-
tie composé de trois épreuves : inventaire
d’objets, déontologie des ventes aux en-
chères et culture générale et artistique,
ajoute Quentin Loiseleur. Et aussi, dé-
sormais, la formation continue, vingt heu-
res par an, sur des sujets liés au domaine.
Elle se fera tout au long de la vie profes-
sionnelle, comme pour les magistrats,
avocats ou notaires. »
« Génération entrepreneuriale »
La jeune génération déborde d’idées. Les
innovations ne manquent pas pour don-
ner un coup de pied dans la fourmilière de
cette profession jugée parfois d’un autre
siècle. Les commissaires-priseurs ont
longtemps été fiers de faire remonter leur
métier à un édit d’Henri II de France, ins-
tituant, en 1556, les offices de « maîtres
priseurs-vendeurs ». « Quand j’allais en
soirée et que je disais ma profession, on me
répondait : “ça existe encore ?” », se sou-
vient Chloé Collin, 27 ans, la plus jeune
commissaire-priseur de France, habilitée
chez Fauve depuis avril 2022. Passionnée
par les objets qui ont une âme, elle aime
faire parler l’histoire avec un grand H.
« Derrière chaque objet se cachent des
histoires de famille. C’est un métier avant
tout humain, déclare cette battante qui a
fait ses débuts chez Fauve, avant d’y res-
ter en tant que salariée, pour s’attaquer à
la spécialité peu commune des graffitis
(239 000 euros pour sa vente de novem-
bre). J’ai fait un stage courant chez Chris-
tie’s mais je voulais garder ma liberté, tout
organiser de A à Z, des inventaires à la
vente. Seule une petite structure permet
d’avoir toutes les cartes en main et plus de
responsabilités. J’appartiens à cette géné-
ration formidablement entrepreneuriale »,
insiste-t-elle. Entreprendre, elle l’a
prouvé, en créant sa propre chaîne You-
Tube La Saint Glinglin. « Un nom puisé
dans le langage de mes grands-
mères assez farfelues, un clin
d’œil décalé, dit-elle, où
je parle de mon métier
derrière mes coups
de marteau. » Son
compte Insta-
gram compte
déjà plus de
11 800 followers,
dont de nom-
breux jeunes,
18 ans au plus,
voulant se lancer à
leur tour. De quoi sé-
rieusement réveiller les
anciens du métier.
« Je suis de la dernière promo-
tion qui n’a pas à faire un an en plus des
deux ans pour être commissaire de justice
et maîtriser cet autre volet indispensable à
mon activité, explique encore Chloé Col-
lin. Depuis le 1er juillet 2022, huissiers de
justice et commissaires-priseurs judi-
ciaires ne font plus qu’un, sous le titre de
commissaire de justice. Réactivée sous le
quinquennat de François Hollande par
son ministre de l’Économie, Emmanuel
Macron, l’idée de réunir ces deux fa-
milles d’officiers ministériels nommées
par le garde des Sceaux a fini par aboutir.
« Les huissiers, sous réserve de passage
d’un examen, peuvent monter des structu-
res de ventes volontaires et ils ne se gênent
pas pour le faire. C’est totalement révol-
tant car en province, les clients, moins ini-
tiés, ne font pas la différence de compéten-
ce. Or nous avons un bagage artistique
bien plus grand. C’est une garantie inesti-
mable pour les acheteurs », prévient
Louis-Aloïs Goffart. Il y a donc urgence à
déclencher des vocations, à rester unis, à
innover toujours et encore… ■
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro

32 l'événement

Les 35 tables préférées du

Stéphane DuranD-SoufflanD,
emmanuel rubin et alice boSio

L
e Guide Michelin dévoilera
lundi les heureux étoilés de
son millésime 2023. La céré-
monie, initialement prévue à
17 heures au Palais des congrès
et de la musique de Strasbourg, a été
AvAnt lA présentAtion du Guide Michelin 2023, lundi, à strAsbourG, nos critiques se
avancée à 10 heures en raison de la
grève nationale prévue le lendemain.
Qui succédera à Plénitude d’Arnaud
Donckele, à Paris, et à la Villa Madie de
Dimitri Droisneau, à Cassis, intronisés
l’an dernier dans le cercle fermé des
trois étoiles ? Ce dernier est d’ores et
déjà amputé de deux membres, puisque
le « Rouge » a lancé les hostilités en
fanfare dès lundi en rétrogradant -
dans la stupeur générale - Guy Savoy à
la Monnaie de Paris et Christopher
Coutanceau à La Rochelle (mais aussi
la Table de l’Alpaga à Megève, Jean-Luc
Tartarin au Havre et le Restaurant
Michel Sarran à Toulouse, qui passent
de deux à une étoile). Indépendamment
de la sentence clermontoise, nous
avons réuni, comme les années précé-
dentes, les 35 tables qui nous ont émer-
veillés en 2023, et qui mériteraient se-
lon nous d’être primées. Une farandole
de coups de cœur à (re)découvrir par-
tout en France.

NoS TroiS ÉToileS

uLA tAbLe d’oLivier nASti

(KAySerSberg, 68)
À 55 ans, le chef du Chambard a tout
gagné, à part la troisième étoile. Cuisi-
nier de l’année Gault&Millau en titre, le
col tricolore fait partie des prétendants
sérieux à la consécration depuis quel-
ques années : technique irréprochable,
recettes au cordeau mais gourmandes,
culte malin du terroir alsacien, innova-
tion y compris dans la préparation du
gibier, service de grande maison… Que
demander de plus ?

uLA grenouiLLère
(LA mAdeLAine-
SouS-montreuiL, 62)
La Grenouillère est bien plus qu’un res-
taurant, Alexandre Gauthier bien da- La TabLe d’OLivier NasTi auberge de MONTMiN
vantage qu’un cuisinier. Chantre du Le pâté chaud de chamois et fruits noirs La tarte aux tomates de plein champ,
Pas-de-Calais comestible, précurseur d’été fermentés d’Olivier Nasti, chef virtuose du gibier, pour la Table un incontournable du menu estival de l’Auberge de Montmin, tenue
dans bien des domaines, le quadra déli- d’Olivier Nasti, le restaurant gastronomique de son hôtel Le Chambard par le chef Florian Favario et son épouse Sandrine au col de la Forclaz,
vre, avec son équipe, un message fré- à Kaysersberg (68). à Talloires-Montmin (74).
missant dans chacune de ses assiettes.
La beauté formelle du cadre et des dres-
sages fusionne avec les saveurs inédi-
tes. L’exploit vide de sens n’a pas droit Si son Grand Restaurant la mérite taurant avec vue imprenable sur les rieuses pour un sou. Il profite du plus
de cité ici. Cette poésie est radicale mais aujourd’hui très certainement, cette volcans, il travaille, travaille, travaille fantastique pays de Cocagne qui se
ses rimes libres touchent droit au cœur. troisième étoile offrirait surtout comme encore pour tirer le meilleur du plétho- trouve en France (la Bourgogne) pour
Il est plus que temps de la consacrer. un aiguillon à un chef encore loin rique terroir auvergnat. Cela donne des apprêter tout ce qui se mange (et se
d’avoir épuisé toutes ses ressources. plats de niveau stratosphérique, com- boit) dans un rayon de 100 km, fouet-

uLA mArine
(noirmoutier-en-L’ÎLe, 85)
me (exemple parmi cent) cette truite à tant le patrimoine culinaire du vieux

À Noirmoutier, l’océan est chez lui, uLe gAbrieL (PAriS)

évidemment, mais Alexandre Couillon
est aussi un expert ès-potagers. Ses
combinaisons iodées et végétales attei-
gnent des sommets de maîtrise et de fi-
nesse. Le chef, qui a eu la sagesse de ne
pas se laisser enfermer dans le piège du
Dans sa bien nommée Réserve, Jérô-
l’unilatéral, condiment pêche blanche,
bouillon à l’huile d’olive.
duché pour le faire pétarader en ce dé-
but de XXIe siècle. Encore une maison
me Banctel incarne cette force tranquille de famille, de bonheur.
qui pourrait bien séduire un Guide rouge
ucyriL AttrAzic
(Aumont-AubrAc, 48)
souvent sensible à la vie de palace. Une
troisième étoile serait parfaitement légi- Onze ans après la (ré)obtention de sa uL’Auberge de SAint-rémy
(SAint-rémy-de-Provence, 13)
time tant ce discret, chef néoclassique à première étoile, le Lozérien propose, Bourguignonne en exil chez Daudet,
l’instar d’un Frechon au Bristol, a su pa- dans l’affaire familiale qu’il a hissée au Fanny Rey propose une cuisine essen-

« plat signature », et son épouse, Céli-
ne, travaillent sans relâche pour parfai-
re, innover, aller de l’avant. Grandir.
Une maison de famille comme on les
aime, qui a atteint l’âge de raison.
uLe coquiLLAge
(SAint-méLoir-deS-ondeS, 35)
Hugo Roellinger, 35 ans, est un cuisi-
nier semi-autodidacte, au parcours
atypique. Discret, modeste, cet ancien
officier de la marine marchande, fils
d’un grand chef, sert dans un manoir
face à la mer une cuisine iodée, exquise,
tiemment installer un univers culinaire
où la créativité trouve sa belle mesure
dans un sacré savoir-faire.
NoS DeUX ÉToileS
uÄPonem (vAiLhAn, 34)
La singularité ne fait pas tout, mais le
fait est que celle d’Äponem est sans
égale. Un lieu, un cadre, un duo – Amé-
lie Darvas aux fourneaux, Gaby Benicio
en salle et à la cave –, et surtout une
627
niveau de table gastronomique, une
cuisine d’une grande maturité pouvant
prétendre à une plus haute distinction.
Profondément ancré dans son territoi-
re, le quadra magnifie les produits de
l’Aubrac - bœuf en tête - dans des as-
siettes personnelles, téméraires et bien
pensées, à l’image de sa Terre d’Aubrac
(bœuf déshydraté parsemé de fleurs).
étoilés en 2022 unouS (megève, 74)
dont 49 nouveaux
Nous nous entraîne dans l’atypique,
l’intimiste, le sur-mesure. Julien Ga-
tillon, ex-2-étoiles dans un palace de
tiellement marine et végétale, ancrée
dans son terroir mais sans folklore. Les
menus sont parfaitement pensés, cohé-
rents, enlevés. La chef, charismatique
et réservée, n’en fait jamais trop, et
profite des produits qu’offre une région
bénie des dieux pour créer sans relâche
des plats griffés. Son mari, Jonathan
Wahid, se charge d’une carte des des-
serts à la hauteur de son talent.
uLA mirAnde (Avignon, 84)
La deuxième étoile à Florent Pietra-
valle, à peu près aussi timide que sa

digeste, qui ne cherche apparemment
pas à épater les guides mais qui les fait
pourtant chavirer. C’est dans cette sin-
cérité et un certain dépouillement
qu’elle puise sa puissance sensorielle.
Un pilier de la jeune école française.
10 h
cuisine miraculeuse d’inspiration, sans Megève, s’est installé chez lui, c’est le cuisine est expressive, aussi éco-enga-
cesse renouvelée, qui jaillit chaque ma- cas de le dire. Avec son épouse, Sonia gé qu’épatant à pousser les saveurs
tin des potagers du resto. Darvas a fait (Nous, c’est eux), il reçoit sur réserva- provençales vers de neuves dimen-
preuve d’une maturité exceptionnelle tion jusqu’à douze clients dans leur sions, tient désormais de l’évidence si
bien avant d’avoir 30 ans ; elle n’en a chalet, sur les hauteurs de la station. La elle ne relève pas de l’urgence. Une
que 33 et fait partie des chefs qui vont cuisine est renversante et le fait de ne la politesse accordée, au passage, à cet
compter pour les décennies à venir. partager qu’avec des convives qu’on a hôtel particulier, modèle de charme et

udAvid toutAin (PAriS)

Le Normand de la rue Surcouf n’en Auberge À LA bonne idée lundi 6 mars
choisis ajoute à l’excitation de l’expé-
rience. Cave somptueuse. Vive Nous.
de courtoisie.

finit pas de progresser, de perfection-
ner ses sauces, ses jus, ses combinai-
sons. Langoustine, poire, caviar et lait
de noisette ; choux de Bruxelles, cres-
son et câpres ; pigeon, chou romanesco,
curry… Notre dernier repas nous a lais-
sé baba. À noter l’atout d’une cave sen-
sationnelle, qui s’est enrichie de cham-
pagnes rares. On a bien tout regardé : il
ne manque rien.
u (SAint-JeAn-Aux-boiS, 60)
Lancement du Guide Michelin 2023 ugrAnite (PAriS)
Il y a deux ans, Sébastien Tantot frap-
pait un grand coup en reprenant une
à Strasbourg uAuberge de montmin
(tALLoireS-montmin, 74)
À peine installé près de la colonnade
du Louvre, fin 2021, Tom Meyer, 29 ans,
auberge dans la forêt de Compiègne. Il Perchée sur son col de la Forclaz, en s’est fait repérer grâce, notamment, à
en a fait un endroit à part, envoyant des surplomb du lac d’Annecy, cette petite un pigeon à la menthe qui a bluffé la
assiettes époustouflantes de modernité maison dans la prairie a tout d’une critique. Cet ancien poussin de la cou-
dans un cadre vieille école. Saveurs tel- grande, orchestrée par un jeune couple veuse Pic est bourré de talent, d’envie
luriques, idées fulgurantes (pressé de porté par l’élan culinaire et la nature d’apprendre, de faire mieux à chaque
tomates, jus de légumes caviar, par qui l’environne. Dans les compositions service. Il est meilleur ouvrier de Fran-
exemple), perfectionnisme de chaque de Florian Favario, il y a une réelle poé- ce depuis l’an passé et n’entend pas se
instant. Pour l’heure, le jeune prodige a sie à cuisiner les quatre saisons comme reposer sur ses jeunes lauriers. Deux

uLe grAnd reStAurAnt (PAriS)

Attendu que son penchant à ne pas
conservé l’étoile de son prédécesseur. Il
en mérite au moins une de plus.
à déposer tout un paysage dans l’assiet-
te. Mieux qu’un restaurant, le senti-
étoiles, en route vers le triplé.

s’enfermer dans la seule haute gastro- ment d’un phalanstère gourmand.

nomie et que sa virtuosité technique
comme sa facilité à composer semble-
raient ne plus agacer le Michelin, Jean-
A
uAStrAnce (PAriS)
uorigineS (Le broc, 63)
Connaissez-vous Le Broc, dans le mAiSon doucet (chAroLLeS, 71)
Après moult mésaventures, le chef
Pascal Barbot et son associé Christophe
Puy-de-Dôme ? Probablement pas, uFrédéric Doucet fait partie de ces Rohat ont enfin ouvert la nouvelle As-

François Piège pourrait enfin quitter mais vous allez y courir pour découvrir cuisiniers humbles et travailleurs qui trance début 2023, dans un cadre à la
son purgatoire et se gagner le nirvana. le style Adrien Descouls. Dans son res- envoient des assiettes vives et pas labo- mesure de leur talent. La cuisine poé-

« Figaro »
prêtent à l’exercice du pAlMArès Annuel.
Rozo
La pavlova framboise, huile d’olive Nocellara et poudre
d’olive noire de Camille Pailleau, chef pâtissière et copropriétaire
avec son conjoint, Diego Delbecq (en cuisine), de Rozo, récemment
déménagé du Vieux-Lille à Marcq-en-Barœul (59).
tique et sans superflu de Barbot a re-
trouvé d’emblée un souffle puissant ; le
style est intact, mais l’inspiration régé-
nérée par la volonté de se surpasser et,
qui sait, les vicissitudes d’un intermi-
nable déménagement. Le maquereau,
le pigeon, quelques praires frottées
d’agrumes nous ont envoûtés comme
un envol de papillons en hiver.
NoS UNe ÉToile
urozo (Marcq-en-baroeul, 59)
Diego Delbecq et son épouse pâtis-
sière, Camille Pailleau, ont quitté leur
étroit estaminet du Vieux-Lille avec
une étoile promptement conquise pour
s’installer dans une ancienne imprime-
rie, espace immense et magnifiquement
aménagé. Le transfert n’a en rien gri-
gnoté l’inspiration du couple, plus en
verve que jamais, heureux d’avoir vu
grand. Des assiettes pleines de vivacité,
de poivres, d’agrumes : coups de clai-
ron assurés à chaque service. Miam.
uauberGe sauVaGe
(serVon, 50)
Thomas Benady a quitté Paris avec sa
compagne, Jessica. Direction : le Mont-
Saint-Michel, avec un arrêt avec vue
sur l’abbaye dans le village de Servon.
C’est là, en 2021, qu’est née l’Auberge
sauvage. Un restaurant tout en épure
avec légumes et fleurs du jardin, pois-
sons et crustacés venus se faire cuire en
voisins complaisants, fermentations,
boissons maison. L’an passé, Michelin a
décerné une étoile verte. C’est gentil,
mais il serait temps de voir rouge.
auberGe De Monceaux
u (saint-oMer-en-chaussée,
60)
Voilà le genre de restaurant dont l’ap-
parition réjouit les gourmands. Soit
une auberge de bord de route et d’ho-
norable réputation quoiqu’au milieu
de nulle part, reprise par la fille du
propriétaire, son compagnon et un
couple d’amis. Décoration impeccable,
assiettes virevoltantes, techniques
(sauces dignes de grandes maisons)
mais joyeuses, produits sourcés et
le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
l'événement 33
uVilla9trois (Montreuil, 93)
Cornaquée depuis une petite année
printemps, Martino Ruggieri a tout fait
pour, cochant méthodiquement et sa-
par les 26 ans de Camille Saint M’Leux, vamment les cases prévues à cet effet. À
vaillant bretonnant habile à soutenir commencer par cette salle boudoiri-
une cuisine baladeuse, cette étoile sante, adroite à présenter une cuisine
aurait le double mérite de saluer un élan transalpino-parisienne, très joaillière à
et d’offrir un très symbolique premier conjurer le produit précieux, le ciselage
macaron au 9-3. technique et le souci esthétique. La
doublette pourrait même tomber.
ules cheMins (GuainVille, 78)
Récemment installé du côté de l’an-
cienne demeure de Catherine Deneuve, uPercePtion (Paris)
Puisque ces dernières années Biben-
elle-même réenchantée en hôtel cra- dum est peu à peu sorti de son appétit
quant de charme, Romain Meder, dé- léthargique en saluant enfin nouvelle
sormais loin de Ducasse et du Plaza, n’a génération, nouveaux quartiers et ma-
pas tardé à trouver, ici, le terrain de jeu nières bistronomiques, misons une pre-
Jérôme Banctel, chef du restaurant
opportun et bucolique à sa forte cuisine mière étoile à l’attention de cette table Le Gabriel, au sein du palace parisien
de « naturalité ». de poche qui, en lisière de Pigalle, révè- La Réserve (8e).
le une cuisine franco-coréenne, mélan-
uruche (GaMbais, 78)
Une étoile qui serait aussi bien vue
ge de maîtrise et d’alliances inatten-
dues.
qu’emballante à saluer, pour la première
fois, l’énergie d’un chic de table d’hôte,
uortensia (Paris)
Julie limont ; Virginie garnier ; François BouCHon/le Figaro ; ilya Kagan ; xaVierFerrand.Com ; Pierre luCet-Penato
campagne et contemporaine, loquace Cette adresse qui, vingt ans durant, a
et locavore. Celle-ci vivement tenue vu briller une certaine Astrance, mérite
par la très investie Cybèle Idelot. de rester du côté des étoiles par la jolie
grâce de Terumitsu Saito, chef nippon
ule Doyenné (saint-Vrain, 91)
Et pourquoi pas ? Primée par les gui-
portant sa touche impressionniste sur
un répertoire d’inspiration française.
des dans le vent (Fooding, Time Out), la Une rencontre que prolonge la salle pu-
ferme-auberge fraîchement lancée par dique, un service dans les aigus, la cave
James Henry et Shaun Kelly, deux chefs d’envergure, le sens du détail et ce re-
australiens exfiltrés de l’Est parisien, doutable coffret à chocolats maison.
mérite de se transporter jusque dans ce
petit village de l’Essonne. Ne serait-ce
que pour découvrir, dans un cadre uPrunier Par alléno (Paris)
Certes, le chef star collectionne les
champêtre du meilleur effet, les amu- macarons, mais sa reprise, cet hiver, de Cyril Attrazic dans
se-bouches végétaux et canailles réali- la légende Prunier oblige à reconnaître, son restaurant gastronomique,
sés à partir des légumes du potager et une fois encore, un talent certain à ré- à Aumont-Aubrac (48).
des poules et cochons élevés sur place. veiller les belles endormies. Dans ce
frisson de salle Art déco, les assiettes
uoMar Dhiab (Paris)
Ne pas accueillir au palmarès cette
ont retrouvé un vrai chic, ajoutant aux
grands classiques caviar et marins de
fraîche adresse tiendrait de la plus par- l’institution quelques fines composi-
faite faute de goût tant, depuis l’autom- tions contemporaines, portées par les
ne dernier, le trentenaire Dhiab a su désormais fameuses sauces en extrac-
convaincre et charmer par sa maturité. tion chères à Alléno.
Celle d’une cuisine franchement signa-
ture et souvent double culture lors-
qu’elle épate à nourrir le dialogue entre uMallory Gabsi (Paris)
Au sein d’une génération « Top
manière et matière franco-orientales. À Chef » qui prospère sur la scène culi-
elle seule, sa biche de Picardie, frottée naire comme au ciel Michelin, s’il en est
au poivre et genièvre, betteraves, olives un qui mériterait d’intégrer directe-
et sardine fumée suffirait à justifier ment le club des primo-étoilés,
l’étoile comme le talent. avouons le jeune Mallory Gabsi. En à
peine une année, le Belge signe une
La chef Cybèle Idelot et son mari
uMaison ruGGieri (Paris)
Sans risque ni surprise, l’ancien bras
première table de belle allure, habile à
installer une prometteuse identité culi- Franck ont ouvert Ruche au Domaine
droit d’Alléno chez Ledoyen devrait re- naire, mélange d’élégance et d’alliances Les Bruyères, à Gambais (78).
joindre le cercle des étoilés. Depuis le bousculantes. ■
choisis, tarifs serrés… Faut-il conti-
LOMBRAIL - TEUCQUAM
nuer ? Une étoile, et vite !
M A I S O N D E V E N T E S
croMaGnon (borDeaux, 33)
uParlez-vous moldave ? Même si ce
n’est pas le cas, vous adorerez la cuisine
d’Oxana Cretu. En plein centre de Bor- INCROYABLE CAVE FAMILIALE
deaux – ville jadis plan-plan où l’activi-
té gastronomique est devenue vivace –,
cette chef autodidacte assemble algues,
poissons, viandes, saveurs fumées ou
amères, sakés… Ses assiettes sont ex-
plosives et surprenantes, desserts com-
pris. Si elles n’encouragent pas les
audacieux, à quoi servent les étoiles ?
KaiseKi-château De la GauDe
u(aix-en-ProVence, 13)
Dans un château XVIIIe, Matthieu Du-
puis Baumal, formé chez Troisgros et
passionné par le Japon, tient trois ta- Lot 1809 Lot 1199
bles. Une gastronomique, déjà étoilée 6 magnums Petrus 1982 cru exceptionnel Pomerol. Assortiment du Domaine de la Romanée-Conti 1988 GC.
(et qui devrait monter dans la hiérar-
chie), une brasserie et un nippon chic.
Celui-ci, où officie Kazunari Noda, pro-
pose un voyage délicieux au pays du So-
leil-Levant : mémorable bouchée rou- L UNDI 3 AU VENDREDI 7 AVRIL 2023
get-tomate, lapin mi-cuit et oignon,
bœuf wagyu au barbecue, jus concen-
tré, artichaut et morille… Un régal. Exceptionnelle vente aux enchères publiques
auberGe Du bois Prin sur désignation, de 11h à 13h et à partir de 14h15, sur place et en Live
u (chaMonix, 74)
Ne surtout pas imaginer l’annexe pa-
resseuse du Flocon de Sel du déjà triple
étoilé Emmanuel Renaut, mais bien
RITZ PARIS - 15 place Vendôme - 75001 Paris
plutôt la belle verve d’un chalet de pa-
nache et de Mont-Blanc, où la table
L’abus d’alcool nuit gravement à la santé, à consommer avec modération.
emballe à plaider un nouvel oxygène de Près de 30 000 bouteilles conservées dans une cave climatisée.
terroir savoyard. Le soir, en sortant du
consommé de racine aux truffes et du 2 500 lots dont : 350 caisses de premiers grands crus classés de Bordeaux et 1 200 caisses de crus classés
paleron de cerf sauce gibier cacao, la ainsi que de nombreuses caisses de grands crus et premier cru de Bourgogne
nuit est pleine d’étoiles. L’une d’elles et vins du Rhône des plus grands châteaux et domaines.
gagnerait à tomber sur ces fourneaux.
usources (nantes, 44)
Plutôt que de le laisser au seul Foo-
Catalogue sur demande à l’Étude : 40 € ou visible sur
ding (aujourd’hui propriété du Guide), www.lombrail-teucquam.com
Michelin s’aérerait gentiment à saluer
ce bistrot tonique, tenu en double mixte
par le couple Decombat-Vergnault et
surtout très sincèrement symptomati-
Claude MARATIER LOMBRAIL - TEUCQUAM
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vailler les condiments.
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro

34 Style
Hélène Guillaume hguillaume@lefigaro.fr

U
n mois après sa haute couture
Schiaparelli qui lui a valu des
accusations insensées (ses
robes à tête de lion auraient
été, selon certains sur les ré-
seaux sociaux, une apologie du trophée de
chasse), Daniel Roseberry présente dans
les salons de l’hôtel d’Évreux son tout
premier défilé prêt-à-porter. Sur la place
de chaque invité, un texte (très bien) écrit
par le directeur artistique dans lequel il
revient sur les premières années d’Elsa
Schiaparelli : « Ses débuts de carrière ont
été éclatants grâce à ses tricots fantaisie en
trompe-l’œil alors tout à fait révolution-
naires. Purs vêtements de sport, pratiques
et aussi faciles à enfiler qu’à enlever. » Ou
encore : « Cette saison (qui se veut un ves-
tiaire complet) constitue une réponse à no-
tre clientèle mondiale, qui a clairement in-
diqué qu’elle attendait quelque chose de
puissant et de singulier de notre part. “Cal-
me” ne fonctionne pas pour nos clientes. »
Une garde-robe pour la vie de tous les
jours mais destinée à des femmes qui
n’ont rien d’ordinaire… L’exercice est
délicat. L’Américain prend donc le parti
de revisiter les « essentiels » féminins - la
chemise en popeline, le pull en maille, le
tailleur, la parka… - et ses accessoires -
sacs et bijoux - à l’aune des codes surréa-
listes de la maison. Les boutons en émail
comme des sculptures miniatures faites à
la main décorent les vestes à la carrure
taillée en arc de cercle. La serrure signa-
ture d’Elsa apparaît en découpe sur le
nombril d’une robe longue en jersey noir.
Un tailleur en veau verni affiche un mètre
ruban en laiton doré sur les revers de la

Le souffLe

Gil-Gonzalez alain/aBaCa
veste. Les boots dessinent le pied en
trompe-l’œil avec ses orteils comme
moulés dans l’or… Le moment est gra-
cieux et chaque pièce parfaitement exé-

cutée, mais l’allure, démonstrative,
manque parfois de subtilité - la doudoune
en satin matelassé façon hip-hop fait du
gringue à une cliente bling.
Roseberry a réussi l’exploit de faire de
cette maison, longtemps restée dans le
formol des années 1930, une star des tapis
rouges - récemment, Beyoncé en robe-
corset pour les derniers Grammys et Ri-
hanna en bustier de velours drapé aux
Golden Globes. Il lui reste à trouver le ton
pour insuffler une modernité à son prêt-
à-porter. Le Texan y parvient particuliè-
rement bien lorsqu’il revisite le workwear
américain, à l’instar de ce canadian tuxedo
en denim brut japonais avec sa veste de
travail et son jean de cow-boy au cool
chic, Schiap et contemporain.
Attention Vincennes, la caravane de la
mode débarque ! Vendredi matin, la pro-
cession des berlines noires se dirige vers le
château fort qu’a élu Jonathan Anderson,
le directeur artistique de Loewe, pour
dresser dans sa cour une immense boîte
(sur)réaliste
créer un vestiaire blanche. Le designer qui refuse tout pre-
mier degré préfère à la charge de l’histoi-
du quotidien qui sorte re, la fausse neutralité de ce « white
cube ». « J’aime l’intensité de cette boîte qui
de l’ordinaire ? un nouveau me fait penser à Quad de Beckett ou à Mo-
défi pour schiaparelli hamed Ali sur le ring de boxe. Il n’y a pas de
contradiction venue de l’extérieur, vous
qui se lance dans êtes forcés de regarder les vêtements. »
le prêt-à-porter. Une fois de plus, Anderson avance, sur
la ligne de crête, entre le conceptuel et le
une utopie tanGible sensuel, entre le vêtement réduit à sa plus
simple expression (un débardeur, un ber-
chez loewe qui livre muda, une robe rectangle…) et l’ingénie-
une sublime collection rie des matières et de l’impression. Les
couleurs et motifs flous « inspirés par la
d’équilibriste. peinture de Richter » se propagent sur la
soie presque impalpable. Le plumage d’un
pull blanc et d’un bermuda bleu électri-
que (portés avec des bottes avachies - fu-
Loewe Schiaparelli
turs best-sellers !) campe une silhouette
ultracontemporaine mais en même temps
veaux cabas géants et hobo sous influence
des années 1970 car inspirés des archives.
chargée d’une étrangeté arty. Une chasu- « Quand j’ai rejoint Loewe il y a tout juste
ble en cuir est relevée sur le côté par une dix ans, j’ai d’abord rejeté cet héritage,
chaîne ; un manteau en laine polaire a le avoue Jonathan Anderson. Mais aujour-
profil d’une robe à paniers. Les pièces en
tricot sont collées sur la peau comme de
d’hui, j’embrasse l’idée de faire vivre une
maison historique du cuir qui fabrique en
véritables stickers. Une robe jersey en- Espagne. Chose rare dans le luxe… et nous
serre le buste à la manière d’une camisole
molle. Évidemment, les cardigans en
en sommes fiers ! » Ces dernières saisons,
le Nord-Irlandais se perdait de temps en
maille et le sublime pardessus en daim
gratté sont encore plus « solubles » dans
temps dans ses références surréalistes.
Cette fois, en s’appuyant aussi sur le pa-
la vie. Mais le designer sait subtilement trimoine, il ancre ses expérimentations
tordre le réel sans jamais être hors sol. On
se prend à trouver « normale » cette che-
dans un présent plus tangible. « Construi-
re un langage est une épée à double tran-
mise en cuir moulé en trompe-l’œil bleu
lavande, la pureté rend plus proche
chant. Comment renforcer ce langage tout
en évitant d’y être piégé ? » Cette collec-
l’avant-garde. Plus étonnamment, il re- tion de l’hiver prochain est la meilleure
nouvelle l’exercice du sac, avec des nou- réponse. ■

Givenchy, chloé : un classicisme incarné

Valérie Guédon vguedon@lefigaro.fr
L’air du temps sied (enfin) au classicis-
me épuré d’Hubert de Givenchy. Et ça,
Matthew Williams, le directeur artisti-
que de Givenchy, l’a bien compris.
Après des années de maximalisme ef-
fréné et de mode instagrammable, les
femmes reviennent à une garde-robe
plus concrète, sobre, incarnée. Ce
qu’était la fameuse petite robe noire
dans Breakfast at Tiffany. Ce que sont
ces parfaits manteaux, ces vestes à bas-
ques, ces blouses lavallière, ces exqui-
ses robes de cocktail que l’Américain
envoie sur le podium, jeudi après-midi,
aux Invalides.
Les premiers passages sont d’une
précision d’orfèvre (ou de couturier).
Vestes et pardessus sont taillés oversi-
zed juste ce qu’il faut (et cintrés par un
astucieux jeu de boutonnage), les our-
lets des robes sont justes (à la cheville
maîtrisées. Si ce vestiaire est bourgeois,
la dégaine est jeune et cool. Et c’est la
plus-value qu’apporte Williams à la
maison parisienne. Le natif de l’Illinois,
ancien acolyte de Lady Gaga, donne
une désinvolture de pop star à cette Pa-
risienne en escarpins (de poulain fluo),
au maquillage charbonneux. Quelques
silhouettes à la « street crédibilité » af-
firmée, superposition de sweats à capu-
che, peaux lainées et cuirs vieillis, pan-
talons cargo et kilts de punk, le Voyou
Carlo SCarpato / Gorunway.Com - aleSSandro luCioni

griffée « Hubert » d’Audrey Hepburn ou à mi-cuisses), les transparences (it-bag lancé cet hiver) porté à l’épaule,
viennent amplifier le message. Ce
n’était pas forcément nécessaire.

« De toutes mes collections pour

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Chloé, celle-ci est ma préférée, lance
avec un enthousiasme non feint Ga-
briela Hearst, la directrice artistique,
quelques minutes avant son défilé
automne-hiver 2023-2024. Dans les
précédentes saisons que je vois comme
des chapitres, j’ai déjà évoqué les métho-
des de régénération de la planète et les
progrès scientifiques liés à la fusion, une
énergie propre et abondante pouvant
nous sevrer des combustibles fossiles.
Cette fois-ci, je voulais transmettre un Chloé Givenchy
message d’émancipation féminine. Tou-
tes les études le montrent : si nous don-
nons le pouvoir aux femmes, la planète et culier. Sur le podium, le vestiaire est gaucho et costumes à double bouton-
nos sociétés ne s’en porteront que loin d’être littéral malgré un mur d’ins- nage modernisent ce dressing de belle
mieux. » Elle cite aussi un article de The piration couvert des tableaux de cette facture. Une adorable robe à panier bi-
Economist : « Le changement climatique Romaine du XVIIe siècle de l’école de colore passe, un trench à carreaux arle-
multiplie les menaces, mais les femmes Caravage. quin, un fourreau en maille crochet
peuvent multiplier les solutions. » Pour La silhouette est donc Renaissance, noir. Cette héroïne baroque a tout
donner corps à ses revendications éco- avec sa taille marquée et ses manches d’une lady de l’Upper East Side, la
féministes, l’Uruguayenne est allée gigots, mais aussi très épurée. Les man- conscience environnementale en plus.
chercher l’inspiration dans la peinture teaux en shearling, en patchwork de Un étrange chemin pour la griffe de
de la Renaissance italienne - « nous en- cuir velours et nappa (sourcés avec Gaby Aghion, incarnation de la Pari-

Agrément n°2001-006 du 7 novembre 2001

trons dans une nouvelle renaissance », l’organisation écoresponsable Leather sienne depuis sa création en 1952. Mais
celle d’Artemisia Gentileschi en parti- Working Group), bottes plates de pourquoi pas. ■

Vin
RuinaRt lance
la construction
du Pavillon nicolas
Avec cet édifice, lA mArque de chAmpAgne trAnsforme
son site de reims en centre œnotouristique et Artistique.
frédéric dufour, le président de lA mAison, nous éclAire
sur ce projet.
PROPOS RECUEILLIS PAR
StéphAne reynAuD
sreynaud@lefigaro.fr
L
es succès commerciaux de ces
dix dernières années, l’impli-
cation grandissante de la mai-
son dans le monde de l’art
contemporain se traduisent
aujourd’hui par un projet de grande
ampleur. La marque de champagne lan-
ce la construction d’un pavillon baptisé
du nom du fondateur, Nicolas Ruinart,
et dessiné par l’architecte Sou Fujimoto.
LE FIGARO. - À quel besoin correspond
ce projet architectural ?
Frédéric DUFOUR. - Il s’agit d’appor-
ter une immense modernité à notre
site historique de Reims, mais aussi
d’incarner l’univers Ruinart. Nous
avons, dans notre maison, dans nos
flacons, quelque chose qui est complè-
tement ancré dans la modernité, cela
avec une certaine rigueur, mais aussi
avec beaucoup de rondeurs. Ce bâti-
ment y fait écho. Nous arrivons à ex-
primer, par ce geste architectural, cet
équilibre permanent.
“
Nous avons
une vraie
opportunité
de faire partie
de ces destinations
incontournables de
l’œnotourisme culturel
Vous marquez un nouveau départ ?
” route, nous repensons le parc boisé
Nous sommes repartis pour 100 ans,
avec un bâtiment qui nous tourne vers
le futur. C’est un projet de transforma-
tion et d’inspiration du site. Il s’agit
vraiment de canaliser les flux de visi-
teurs pour avoir une expérience qui est
beaucoup plus complète, plus profon-
de, qui finira dans ce bâtiment, que
nous appelons pavillon Nicolas, parce
que c’est le nom du fondateur. Donc,
d’une certaine façon, tout commencera
par l’entrée de ce bâtiment.
GEoRG WEnzEl/dpa-zEntRalbild/dpa pictuRE-alliancE via aFp
Comment avez-vous choisi
l’architecte ?
En 2019, à la suite de l’appel d’offres,
nous avons présélectionné trois archi-
tectes avec le souci d’aller chercher les
représentants d’une génération émer-
gente. Il fallait que leur style soit adap-
té à notre maison, capable d’exprimer
la légèreté, la luminosité, la simplicité
qui est derrière la marque. Nous leur
avons donné comme ligne directrice
cette fameuse phrase de Da Vinci : « La
simplicité est la sophistication ultime. »
Par ailleurs, nous voulions un archi-
tecte qui ait une compréhension de la
France. Parmi les trois présélection-
nés, nous n’avons pas eu l’ombre d’un
doute. Parce que le projet de Sou Fuji-
moto exprimait tout ce que nous vou-
lions dire.
Le RuinaRt 1926 de PauL Bocuse
Combien de flacons oubliés
sommeillent encore en cave dans
le plus grand secret ? Sans doute des
milliers, voire davantage. Mais certains
nous émeuvent plus que d’autres.
C’est au détour d’un innocent
inventaire qu’à l’automne 2021,
Maxime Valéry, chef sommelier du
restaurant Paul Bocuse – institution
de Collonges-au-Mont-d’Or, dans le
Rhône – découvre dix-huit bouteilles
de champagne Ruinart 1926, année
de naissance du célèbre chef, qu’il
se plaisait à collectionner. Maculées
d’une poussière noire à faire passer
l’étiquette pour un tableau
de Soulages, cachant la mention
le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023
35
Quelle est la taille de cet édifice ?
Le bâtiment mesure 12 mètres au point
haut pour une surface totale de
1 200 m², dont 700 m² divisés en diffé-
rents espaces, qui seront accessibles au
public. L’accueil comprendra trois sa-
lons, un espace boutique et un bar avec
une porte baie vitrée pour se sentir à la Le pavillon Nicolas dessiné par l’architecte japonais Sou Fujimoto mesure 12 mètres au point haut pour une surface totale
fois dedans et dehors. On y trouvera du de 1 200 m². Sou Fujimoto
champagne Ruinart et de la « finger
food ». Pour les connaisseurs, il y aura ment travaillé. Notre ambition est aussi d’offrir cela. C’est une vraie opportuni- Taittinger, qui érige son cuvier, chez
une cave secrète dotée d’une collection de devenir une ou plutôt la destination té. Et la ville de Reims concourt pour Charles Heidsieck, qui a construit son
de tous nos Dom Ruinart et tous nos culturelle de Reims. être choisie comme la capitale culturel- hôtel, chez Bollinger aussi. Beaucoup de
vieux millésimes. Nous exposerons le européenne 2028. Nous voulons non nouveaux lieux seront opérationnels
aussi quelques flacons d’exception dont D’autres maisons de champagne seulement faire partie de ce projet, mais avant le rendez-vous 2028.
le fameux 1926 (lire encadré). sont déjà engagées dans cette voie… évidemment en être un chef de file.
Nous avons un grand respect pour Nous avons une vraie opportunité de Quand l’achèvement du pavillon
Ce bâtiment se veut-il durable ? Pommery, qui organise aussi des expo- faire partie de ces destinations incon- est-il prévu ?
Le plus durable possible. Avec le toit sitions. Nous choisissons des axes diffé- tournables de l’œnotourisme culturel. Nous visons le 1er septembre 2024, qui
végétalisé, nous récupérerons toute rents, nous présentons des choses dif- Pour Reims 2028, nous voulons tous est la date anniversaire de la création de
l’eau, qui servira à arroser les jardins férentes. À quarante minutes de Paris, jouer un rôle. Le nombre de projets la société. Pour l’instant, nous sommes
et fera fonctionner les toilettes. Le bâ- nous sommes le seul vignoble capable dans la région est considérable, chez dans les temps. ■
timent est plus bas que la norme basse
exigée pour le carbone. Nous avons
choisi de ne pas faire de béton. Nous
voulons quelque chose de plus propre
et nous avons choisi des charpentes de
bois et de la pierre de la région de
Soissons. Cela constitue le plus gros
gain de dioxyde de carbone. Ensuite,
entre le recours à la géothermie et les
panneaux photovoltaïques qui seront
installés sur un toit qui est dans un
autre bâtiment - parce que le site est
protégé -, nous serons à 80 % d’auto-
consommation.
Ce projet ne s’arrête pas à l’édification
d’un pavillon…
Nous sommes en train de détourner la
classé de 5 000 m², dans une optique à
la fois de biodiversité, de richesse des
paysages et d’intégration. Cette inté-
gration complète entre la végétation
et le bâtiment était quelque chose
d’important dans le projet de Sou Fu-
jimoto. Nous voulons favoriser l’expé-
rience piéton. C’est le sens de l’histoi-
re. Nous créons deux entrées, dont
une publique, avec un chemin expé-
rientiel qui conduit derrière le bâti-
ment. Nul ne verra la cour et tous les
bâtiments avant de rentrer dans le bâ-
timent de Sou. Pour l’architecte, il
s’agit d’arriver là comme dans un
cheminement de crayère. C’est une
mise en condition très importante. Au
début, chacun évolue dans la pierre et
puis arrive dans la transparence, avec
le verre, au moment de découvrir l’in-
tégralité du site.
Le jardin sera-t-il dédié à l’art ?
Dans le parc, au-delà des artistes qui
sont déjà présents, nous installerons
plus d’une dizaine de nouvelles
œuvres, toutes réalisées pour nous,
comme d’habitude. Nous n’achetons
jamais d’œuvres qui existent sur le
marché. Mais il y aura un mélange entre
nos œuvres et des expositions externes
sur des thématiques qui nous sont chè-
res, autour de l’art et de la nature, du
rapport au vivant, avec des artistes
avec lesquels nous n’avons pas forcé-
d’une ville de « Rheims » autrefois
ornée d’un céleste « h », elles sont
aujourd’hui les plus anciennes reliques
de la maison, dont les caves ont été
pillées tout au long de l’Occupation.
Nous aurions pu craindre sur ce vin
quasi-centenaire la cruelle imagination
des ans. De n’être à son contact que
de simples dépositaires d’une émotion
de collectionneur. Une fois n’est pas
coutume, la réalité nous aura donné
tort : sous une robe intensément
ambrée, un éclat d’abricot, quelques
assauts de miel aux agrumes, et
peut-être, en toile de fond, le délicat
fourmillement d’une effervescence
A
passée. AliciA Dorey
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro
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 le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023

Mots fléchés 37
MOTS FLÉCHÉS GÉANTS DU SAMEDI N°3461
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CINÉASTE CONDUITES S’ACQUITTE UNE CHEZ LE TEL UN RELIURE IMMUABLES SORTE DE DU CHEF
DE SES ACTE POPULAIRE CONCES- FACE
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Alignez les lettres,

BOUT DE TEST ANCIENNE BIEN CONNU
TERRAIN DE PSY APPROU- FORME
BIPER VER SANS D’ACCORD ENSEMBLE
IL A FAIT
repérez les chiffres,
UN CODE- MOT DIRE DE LIGNES
BARRE TINTIN TOC
ELLES DÉ-
CLENCHENT
LES
déplacez les cartes… C’EST PAS
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JOURNAUX
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BIEN D’IMPOR- ÊTRE
PRÉCIEUX TANCE INFÂME À CRAN D’IMAGES
ÉTAPE
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VOSGES
PRÉNOM
FÉMININ
INJURIÉ CÂBLE PAN DE
ORNER DE MINE JUPE
DE MAR- TEL UN REPTILE
BRURES PROBLÈME NOTE DU JU-
ARDU DÉSUÈTE RASSIQUE
COMPOSÉE AU PIED DE
AUX L’EVEREST
FLEURS DÉ- ELLE SE
CORATIVES DAME
FIN DE PRINCIPE FORCE
RIEN QUE PHRASE CHINOIS AVEC
LES PUÉRILE LAQUELLE
AFFAIRES BEAUTÉ IL FAUT
SEL D’ACIDE ANTIQUE COMPTER
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CRISTAUX SERPENTS DE MER OCTET ACTIONNE GARAGE
LE PÊNE DEUX
DANS L’EAU MONSIEUR DEVANT GROS CONTI-
CAFARD POINT
RÉDUCTION TRUC UN LITRE OUBLIÉ SAUCISSON NENTS
COULEUR INSTRU- JOLIMENT
DE LA MENT D’OU- BORDÉE
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04_03_23_P1 1 09/02/2023 14:56

 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro

38 Télévision
Vincent Amouroux :
« de la hauteur
pour notre-dame »
Dans sa formiDable série Documentaire « le chantier
Du siècle », le réalisateur a utilisé Des Drones pour filmer
la restauration effectuée notamment par Des scientifiques.
Nous sommes entrés sur le chantier une
PROPOS RECUEILLIS PAR
claire Bommelaer £@claireBommelaer première fois, six mois après l’incendie. À
l’époque, c’était presque comme se rendre

V
incent Amouroux évoque
avec passion, pour Le Figaro,
le tournage, commencé
six mois après l’incendie,
de ce film saisissant en trois
parties diffusées à la suite : Notre-Dame
de Paris, le chantier du siècle. Entretien.
LE FIGARO. - Quel était votre rapport à la
cathédrale avant d’entrer sur le chantier ?
Vincent AMOUROUX. - Comme tout le
monde, je connaissais Notre-Dame de
Paris, que j’avais visitée. Elle faisait partie
de mon décor, je la regardais d’ailleurs
sans doute peu. Mais dès qu’il y a une
catastrophe, on se rend brutalement
compte de ce que l’on a perdu, et on a
tendance à se focaliser sur le manque.
Avant l’incendie, j’avais déjà réalisé plu-
sieurs documentaires scientifiques, et
venais d’achever L’Odyssée interstellaire.
Avec ce projet, je me suis dit que, pour la
première fois, j’allais aussi tourner des
images d’archives. Même les rushs que
nous n’avons pas utilisés seront impor-
tants, par la suite, pour la mémoire du
chantier.
Votre film démarre sur les vues
spectaculaires prises en hauteur…
sur Mars : il fallait s’équiper entièrement
contre un risque de contamination par le
plomb, et porter parfois un respirateur.
Nous avons commencé à filmer avec une
caméra, avant de nous rendre compte qu’il
nous faudrait plus de mouvements pour
restituer les trois dimensions de la cathé-
drale. D’où la fabrication de petits drones,
avec lesquels nous avons pu faire des tra-
vellings. Grâce à cela, le spectateur va là où
personne ne peut se rendre. L’établisse-
ment public nous a par ailleurs autorisés à
grimper sur les grues – dans la limite des
règles de sécurité, bien
sûr - ce qui a donné
d’autres images fortes. La
vision en hauteur du
chœur ou le trou dans la
voûte donnent l’impres-
○○○○
sion d’assister au gouffre de l’enfer.
Votre documentaire se centre
sur le travail de la communauté
scientifique. Les chercheurs ont-ils
compris votre démarche ?
Nous avons suivi les huit groupes de
chercheurs mis en place pour étudier la
cathédrale, jusqu’à la phase de recons-
truction. Au départ, tout le monde, nous
compris, était dans le flou. Nous nous
sommes rendus une bonne centaine de
fois sur le chantier, et notre équipe de
tournage a fini par faire partie du pay-
sage. Au fil du temps, nous avons assisté à
une pensée scientifique
se mettant en œuvre.
Samedi Études des vestiges ou
20.50 des matériaux, hypo-
thèses sur les choix de
construction au Moyen
Âge… Cet incendie est une occasion uni-
que pour étudier en profondeur un bâti-
ment en général peu accessible, ne serait-
ce que parce qu’il est hyper fréquenté. Il
n’y a par ailleurs pas d’écrits sur les tra-
vaux médiévaux, et ce moment de mise à
nu partielle de l’édifice est intéressant,
car il permet de mieux comprendre la
manière dont les bâtisseurs ont agi au
XIIe siècle. J’ai voulu tourner des scènes
dans la cathédrale de Sens, contemporai-
ne à Notre-Dame de Paris, et à la collé-
giale d’Amiens, qui possède une des der- Des chercheurs inspectent
nières charpentes du XIIe siècle, pour les voûtes, désormais accessibles,
permettre au spectateur de revenir à la de la cathédrale.
cathédrale d’avant l’incendie. ARTE FRAncE-ZED
On a l’impression de pénétrer
dans un monde clos.
En deux ans, nous avons vu Notre-Dame
se transformer en chantier, un monde qui
a une vie propre, voire un langage pro-
pre. Compte tenu de la présence de Vous présentez les images inédites
plomb, ce dernier est par ailleurs peu des fouilles…
perméable avec l’extérieur – nous res- La série a été coproduite avec le CNRS,
tions le plus possible toute une journée mais aussi avec l’Inrap. Nous avons suivi
d’affilée pour éviter les douches de les fouilles du chœur, là où ont été
décontamination. À l’intérieur, la pré- trouvés des cercueils en plomb d’anciens
sence d’immenses échafaudages contri- dignitaires religieux, et des fragments du
bue à donner un effet de microcosme, de jubé du XIIe siècle. C’est d’ailleurs nous
ville dans la ville. Une fois sortis, nous qui avons fourni la caméra endoscopique
comprenions que nous étions en plein qui a permis de faire les premiers
cœur de Paris ! sondages à l’intérieur d’un des cercueils.

bernarD loiseau : un génie et sa famille

un beau Documentaire raconte comment la femme et les filles Du chef Disparu en 2002 Dirigent un groupe florissant.
faire pour sauver et même développer le carte, à partir d’un livre de recettes écrit quant son apprentissage à Roanne chez
jacques pessis jpessis@lefigaro.fr groupe qu’il avait fondé en travaillant par Bernard Loiseau quelques mois avant les frères Troisgros, son passage à Paris,

Dominique Loiseau, présidente
du groupe, est l’héritière d’un monument
de la gastronomie française. MAGnETO TV
B
ernard Loiseau a choisi de partir
le 24 février 2002. Vingt ans
après, trois mousquetaires
assurent la relève d’un 3-étoiles
entré dans la légende :
Dominique, sa femme, Bérangère et
Blanche, ses deux filles. « Hôtels et mai-
sons de légende », nouveau rendez-vous
proposé par Laurent Delahousse, raconte
l’histoire d’une famille plus unie que
jamais pour diriger l’hôtel–restaurant de
Saulieu, La Côte d’Or, mais aussi ce qui
est devenu une marque internationale.
Au lendemain de la disparition de son
mari, Dominique a annoncé qu’elle
reprenait le flambeau. Elle a juré de tout
jusqu’à dix-huit heures par jour. Deux
décennies plus tard, le pari est gagné, et
l’heure est à la préparation de la relève.
Bérangère est désormais la vice-
présidente d’un mini-empire auquel
vient de s’ajouter La Tour d’Auxois, un
petit hôtel situé en face
de La Côte d’Or, que
son père avait toujours
rêvé d’acquérir. L’acte
d’achat a été symboli-
quement signé devant
○○○¡
les caméras. Le groupe Bernard Loiseau
s’étend aussi en ouvrant à Besançon,
Loiseau du Temps, un restaurant dont la
cuisine sera dirigée par Blanche. Des
images la montrent en train d’établir la
sa disparition. à La Barrière de Clichy, et son arrivée à
La Côte d’Or, alors à l’abandon. Des
Tout donner pour son métier images familiales inédites, tournées par
Le fondateur est également présent à tra- Dominique avec un Caméscope, ponc-
vers des images d’archives racontant le tuent ses propos passionnés.
parcours d’un homme qui a tout donné, y Que dirait-il aujourd’hui face au
compris sa vie, pour son manque de vocations qui menace la
métier. Il joue les guides restauration ? Il serait sans doute l’exem-
dimanche en faisant découvrir les ple à suivre à l’image de La Barboulotte,
15.05 cuisines mais aussi la
salle de restaurant d’ori-
gine à Saulieu, où Orson
une ferme artisanale du Morvan où les
Loiseau se fournissent en fruits et
légumes. Les employés, d’anciens cadres,
Welles, Édith Piaf et beaucoup d’autres victimes d’un burn-out après leur licen-
ont découvert les plats, alors mitonnés ciement, ont choisi de quitter la ville
par Alexandre Dumaine. Toujours sou- et de s’installer à la campagne. Pour
riant, malgré l’angoisse de devoir mieux y apprendre un nouveau métier et
faire, on retrouve Bernard Loiseau évo- retrouver le goût de la vraie vie.

À fonD la (vieille) caisse sur les routes De la nostalgie !

les voitures anciennes ont
la cote sur le petit écran.
le succès Des multiples
plein écRAn
sionnaire anglais renommé qui, à priétaires rénovent leur voiture
l’aide d’un mécano aussi génial avant de la vendre aux enchères.
qu’efficace, achète de vieilles autos « C’est très riche humainement,
afin de les restaurer et de les reven- raconte l’animateur. Les gens ont un

dre. Avec un bénéfice, bien sûr. Et rapport affectif avec leur vieille voiture
émissions qui leur sont
ETiEnnE JEAnnERET/RMc DécOuVERTE

c’est un carton d’audience sur Disco- car beaucoup de souvenirs y sont

consacrées, en particulier
sur rmc Découverte,
le prouve. analyse.
C’est dans les vieilles marmites que
l’on fait les meilleures soupes. La
télévision applique avec succès cet
adage à l’automobile. Au-delà des
émissions classiques de tests (« Auto-
moto », « Turbo », « Direct Auto »),
la voiture se raconte désormais
autrement, sur le thème de la restau-
ration de véhicules anciens. Inspirées
la plupart du temps de programmes
britanniques ou américains, ces
émissions fleurissent sur la TNT, et en
particulier sur RMC Découverte, qui
propose une dizaine de concepts
autour de l’amour des Français pour
leur vieille guimbarde.
Pionnière du genre, l’émission
« Wheeler Dealers » met en scène le
volubile Mike Brewer, un conces-
A
very Channel depuis déjà 17 saisons !
RMC Découverte
flaire alors le bon
filon et lance en magazines
2016 son adapta-
tion hexagonale, Décryptage
« Wheeler Dea-
lers France » (ce par nicolas vollaire
nvollaire@lefigaro.fr
samedi à 16 h 35).
Le concept est le
même avec une liste de voitures an-
ciennes de rêve : Jaguar Type E, Ford
Mustang, DeLorean DMC-12… Sans
oublier les plus humbles mais tout
aussi mythiques françaises : 2 CV, 4 L,
Renault 5 ou encore Peugeot 504.
Véhicules de collection
Également sur RMC Découverte,
« Vintage Mecanic » (nouvelle saison
à partir du 23 mars à 21 h 10). Le pré-
sentateur François Allain chine des
véhicules de collection partiellement
voire très abîmés avant de lancer un
appel d’offres. Le budget le plus bas
« Les Français aiment la voiture, malgré la politique autophobe que l’on subit »,
explique François Allain, animateur de « Vintage Mecanic ».
remporte le chantier de rénovation.
Depuis 2016, l’émission connaît un
succès ininterrompu et s’est ouverte à
de nouveaux engins comme des trac-
teurs ou des motos. « Cela montre que
les Français aiment la voiture, malgré
la politique autophobe que l’on subit,
explique-t-il. Les gens ont envie de
vrai. Cet amour du vintage, qu’il
s’agisse de voitures, de déco ou de
mobilier, s’inscrit dans un mouvement
rattachés. D’ailleurs, la politique anti-
voiture chez nous est un mépris total
des Français ! On peut être respec-
tueux des autres, être écoresponsable
et avoir une voiture. »
Apparue plus récemment, l’émis-
sion « French Mecanic » (lundi
6 mars à 21 h 10) innove avec les
aventures de deux Français installés
aux États-Unis, spécialisés dans l’ex-
portation de voitures rares en
France. Quant à Vincent Lagaf,
passionné de mécanique, il sort de sa
retraite d’animateur pour voler au
global. On tient aussi un équilibre entre secours des garagistes en difficulté
voitures inaccessibles qui font rêver et dans « SOS Garage » (RMC Décou-
celles très populaires comme la Renault verte, quatre premiers numéros dif-
4 L ou la Peugeot 404 de tonton ou de fusés en décembre 2022). À l’image
papy. C’est un plaisir familial, qui peut d’un Philippe Etchebest dans « Cau-
aussi être intergénérationnel. » chemar en cuisine » (M6), Lagaf aide
Ces programmes ont, depuis, fait ces professionnels de la mécanique à
des petits. Dans « Enchères mécani- redémarrer sur de bonnes bases.
ques » (jeudi 9 mars à 21 h 10), animée Tout comme ces voitures anciennes
par le comédien Philippe Lellouche, qui, à l’heure de l’obsolescence
encore sur RMC Découverte, les pro- programmée, font de la résistance !
 le figaro samedi 4 - dimanche 5 mars 2023

télévision Tous les programmes

dans TV Magazine et sur l’appli TV Mag météo par 39
ÉPHÉMÉRIDE St-Casimir
L’essentiel Soleil : Lever 07h25 - Coucher 18h38 - Lune croissante

21.10 21.10 21.10

du dimanche SAMEDI
The Voice, la plus belle voix 100 % logique : la réponse Meurtres à... 21.10 Belle fille 8
Divertissement est sous vos yeux Série. Policière Film. Comédie. Fra. 2020. 30
Réal. : Méliane Marcaggi. 1h27. 8
8 7 8
Avec Alexandra Lamy. Inédit. 7
Une femme trompée passe une 8
7 8
nuit avec un inconnu qui ne se 9
9 8 8
réveille pas. Elle doit jouer le jeu 8
quand la mère de celui-ci la 10
10 10 10
considère comme sa belle-fille.
10
Prés. : Nikos Aliagas. 2h30. Pour cette Jeu Fra/Blg. 2023. Avec Isabel Otero. 21.10 La deuxième étoile
nouvelle saison de «The Voice», Prés. : Cyril Féraud. 2h15. Ce jeu Meurtres en Béarn. Inédit. Au pied Film. Comédie. Fra. 2017. Réal. : 20 11
plus de 50 000 candidatures ont été des montagnes du Béarn, l’épouse
12
familial est le premier quiz qui ne Lucien Jean-Baptiste. 1h32. Avec 10
reçues, un record depuis la création teste pas la culture générale et les d’un notable est retrouvée noyée. La Lucien Jean-Baptiste. En vacances 11
du show. Seule une centaine de connaissances, mais la logique et le policière qui mène l’enquête doit gérer aux sports d’hiver, une famille tente 12 13
candidats, âgés de 16 à 78 ans, a été sens de l’observation. Quel que soit le divorce houleux de sa progéniture. de resserrer ses liens en partici- 14 16
retenue pour les Auditions à l’aveugle. son âge ou son niveau d’étude tout pant à une compétition sur neige, 16
22.40 Meurtres à... Série. Policière. 11 11
23.40 The Voice, la suite.
le monde peut donc participer.
Meurtres au Pays basque. affublée de costumes ridicules.
16 14
Divertissement. Le Late Show. 23.25 Quelle époque ! Talk-show. 00.25 Roméo et Juliette. Ballet.
21.10 Les enquêtes de 15 30
Murdoch
14
Série. Policière. Can/GB. 2021.
Saison 15. Avec Yannick Bisson.
DIMANCHE
21.05 20.50 21.10 Ce qu’on fait par amour. Inédit.
Murdoch est à Montréal pour 20
7
Rugby : Top 14 Notre-Dame de Paris, NCIS : Hawaï retrouver Anna Fulford et leur fils, 7
Sport le chantier du siècle Série. Action Harry, toujours recherchés par
7 6 5
la Main noire. Watts enquête sur 8
la mort d’une femme japonaise. 7
5 6
8
8 7 7
21.05 Rugby : Top 14 6
8
Sport. 20e journée : Racing 92 -
8 8 7
Toulouse. En direct. Le solide
9
leader toulousain vient sur la
pelouse de la Défense Arena
20e journée : Toulon - Stade Français Documentaire EU. 2021. Saison 1. Avec Vanessa de Nanterre du Racing 92 pour 11 10
Paris. En direct. Le Stade Français Fra. 2022. Réal. : Vincent Amouroux. Lachey, Alex Tarrant. 2 épisodes. encore renforcer sa position. 20 9 11
Paris est parti en chasse du leader 0h52. 2 épisodes. Inédit. Dès le len- Inédit. Un quartier maître japonais est Les Franciliens de Laurent 12
Travers savent qu’il va falloir 12
le Stade Toulousain. En se déplaçant demain de l’incendie de Notre-Dame, tué sur le sol américain, le NCIS doit
sortir un grand match pour 14 14
sur le terrain de Toulon, les Parisiens des groupes de travail se constituent trouver le coupable avant que l’affaire 16
viennent chercher des points lors pour contribuer à sa restauration. ne provoque une crise diplomatique. déstabiliser les Haut-Garonnais. 14 12
de cette 20e journée de Top 14. 15
23.30 Dans le ventre de l’orgue 22.50 Hawaii 5-0. Série. Policière . 14
20.50 60
22.57 Canal Rugby Club le débrief de Notre-Dame. Documentaire. 3 épisodes. Avec Alex O’Loughlin. La canonnière du Yang-Tsé 16
Film. Guerre. EU. 1966. 12
Réal. : Robert Wise. 2h51.
Avec Steve McQueen. En 1927, T (en °c)
en pleine guerre civile chinoise,
le «San Pablo», un patrouilleur <-10 à 0 0 à 10 10 à 20 20 à 30 30 à >40
19.11 TPMP people 17.00 La petite histoire de France 19.50 Les mystères de l’amour américain, tente de secourir
21.19 Les années Sébastien 21.05 La petite histoire 21.05 Columbo des missionnaires menacés par
de France des Chinois insurgés.
Divertissement. Prés. : Patrick Série. Policière. EU. 1978. Saison 7. ALGER 6/13 AMSTERDAM 3/8 ATHÈNES 12/16
Sébastien. 2h20. Inédit. Première Série. Humoristique. Fra. Avec Peter Falk. Des sourires et des 4/15 5/10 2/5
21.10 Capital BARCELONE BELGRADE BERLIN
diffusion.Diffusées pendant 20 ans Avec Alban Ivanov. Tout le monde armes. Un poète d’origine irlandaise
et 13 ans, «Le Plus Grand Cabaret du connaît Jeanne d’Arc, Louis XIV et est en fait clandestinement impliqué
Magazine. Prés. : Julien Courbet. BERNE -1/9 BRUXELLES 2/8 BUDAPEST -1/11
monde» et «Les Années bonheur» Napoléon. Leurs cousins en revanche dans la vente d’armes à l’IRA.
2h05. Alimentation : manger COPENHAGUE 1/4 DUBLIN 3/9 LISBONNE 8/16
sont deux émissions emblématiques ne sont pas rentrés dans l’histoire.
100 % français est-ce encore LONDRES 3/9 MADRID 1/13 PRAGUE -3/6
22.55 90’ Enquêtes. Magazine. possible ? Inédit. Agriculteurs
de la carrière de Patrick Sébastien.. RABAT 9/17 ROME 5/16 TUNIS 7/15
23.00 La petite histoire de France. Samu, pompiers : urgences vitales français : pourront-ils encore
23.42 Enquête sous haute tension Série. Humoristique. dans les quartiers nord de Marseille. nous nourrir demain ? / Frites &
chips : qui profite de nos patates LUNDI MARDI MERCREDI
françaises ? / Kiwi français :
enquête sur un business juteux. 1/7 -1/5
2/4
20.05 C l’hebdo la suite. Talk-show. 20.00 Wheeler Dealers France 20.00 Historiquement Show 1/8 -1/5 3/6 0/7 1/7 0/4
21.00 Échappées belles 21.10 100 jours avec 20.50 Cold Case 0/8 0/6
Magazine. Prés. : Ismaël Khelifa. 1h30. les gendarmes de Bourgogne Documentaire. All. 2022. Réal. : Keti 1/7
Suisse, de village en village. Inédit. Documentaire (3/4). Fra. 2021. Vaitonis. 0h52. 2 épisodes. Les cir- -1/11
« Audition publique », 4/14 2/11 3/13 5/9 7/14
Ismaël Khelifa tente de comprendre Réal. : Laura Tamarelle. 1h05. Guerre constances de la mort de Ramsès III,
« Points de vue », « Le Club
comment les villages suisses ont des voisins et fous du volant. l’un des grands pharaons du Nouvel
Le Figaro Politique »,
lachainemeteo.com
su garder leur authenticité, leurs Les 15 gendarmes du PSIG de Dijon Empire d’Égypte, ont été récemment
« Le Buzz TV »... Retrouvez
traditions et leur patrimoine. sont énormément sollicités. élucidées par des spécialistes.
toute l’actualité et tous nos Par téléphone : LIVE 24/24 Sur L’APPLI
00.05 Akrotiri, les derniers jours 23.45 100 jours avec les gendarmes 22.35 David Suchet dans les pas programmes sur Figaro Live
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d’une cité antique. Documentaire. de Bourgogne. Documentaire (4/4). de saint Pierre. Documentaire.
Samedi 4 mars 2,99 €/appel La Chaîne Météo

MOTS CROISÉS Par Vincent Labbé SU DO KU

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PROBLÈME N° 6230 chaque colonne et chaque carré de 3 x 3 contienne une seule et unique fois tous les chiffres de 1 à 9.
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émission confidentielle. - 7. A un ton naturel. - 8. Se fait
3 4 3 7 2 1 3 8 2 3 9 6
régulièrement étriller. Fait le beau devant un inconnu. 4 2 9 8 3 6 2 7 6
- 9. Brillant orateur. Jeu de boules. - 10. D’une maison
de briques. - 11. Habitent au pays des chimères. - 12. 5 3 4 5 6 7 2 4 9 8 4 2 8 9
Bien entraînées.
6 2 9 4 9 2 1 2 3
VERTICALEMENT 7
8 2 9 5 6 3 8 7 1 8 3 5 6
1. A le talent d’Achille. - 2. Le temps d’un soupir. Forment
une barrière. - 3. Dans le Grand Lyon et anagramme du
7 8 5 9 3 7 5 5
8
1 vertical. - 4. Ne se pique plus sous cette forme. Bien 1 6 4 7 1 8 3 6 2 7 8
fournie. Amène à la raison ou à la station. - 5. A donné la
parole à Mireille. Terre de milliardaires. Sans confession.
9 4 5 8 5 4 1 9 2
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LETTRES EN PLUS LETTRES EN MOINS
SOLUTION DES MOTS MÉLANGÉS

les deux sens. Sortie d’affaire. - 8. Manifestation d’hu-

manité. Fin limon déposé par le vent. 11
Composez un mot de six lettres avec la lettre en plus. Dans chacun des mots horizontaux, rayez une lettre afin de
12 Un p’tit gars encore vert créer un mot nouveau et reportez cette lettre dans la colonne
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Fait la voix française S A U T E U R C R O C H E
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VERTICALEMENT 1. Infécondités. - 2. Nième. Aunage. - 3. Désinfection. - 4. Il. Réal. Er. - 5. Glua. Icarien. P R E N D R E G A Z I E R
A

Paquet d’effets
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A T O L L + B = R A V I E R E R E S I N E
04_03_23_P2 13 09/02/2023 14:56
 samedi 4 - dimanche 5 mars 2023 le figaro

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PORTRAIT L’agricuLteur et auteur de « Peace & food »

contribue activement à combattre Les idées reçues
sur Le monde agricoLe via Les réseaux sociaux.

Étienne Fourmont
100 vaches laitières,
100 000 abonnés

ColleCtion Personnelle
Eugénie Boilait sociaux. Suivi par plus de 30 000 person-
nes sur Twitter, il cumule près de 17 mil-
lions de vues sur ses vidéos YouTube et
vient tout juste de publier un livre sur le

C
e matin-là, une silhouet-
te à grandes bottes appa-
raît derrière une maison
en pierre. Quelques chats
courent d’un bâtiment
agricole à l’autre : « Ici,
c’est leur paradis », nous
glisse-t-elle tout sourire.
D’aussi loin qu’il s’en souvienne,
Étienne Fourmont a toujours arpenté la
grande ferme familiale, au cœur de la
Sarthe, à Viré-en-Champagne. En plus
d’être agriculteur, cet original d’une qua-
rantaine d’années porte une autre cas-
quette : il est l’un des célèbres visages du
monde agricole. Et ce grâce aux réseaux
sujet, Peace & Food (Hugo & Doc).
Cet homme aux grands yeux bleus et
aux cheveux roux en bataille nous décrit
au-dessus des meuglements ce décor
qu’il connaît mieux que quiconque : le
fourrage, la salle de traite, les box des
veaux. Le pas assuré et la voix franche, il
raconte que son père, et son grand-père
avant lui, foulait déjà cette terre pour
s’occuper des vaches et pour produire du
lait. C’est une histoire familiale de cinq
générations qui se niche au milieu des
hectares de verdure.
Enfant, Étienne court dans la ferme
non pour travailler, mais pour y trouver
des trésors. Il fouille et se faufile. Un jour,
il rapporte à la maison cette lampe à huile
qui, aujourd’hui encore, trône sur l’un
des meubles du salon. Il n’imagine alors
pas faire de ces grandes bâtisses et des di-
zaines de vaches qu’elles protègent, son
quotidien. Et pourtant la chose s’impose
comme une évidence à la sortie du collè-
ge. « Pour moi, c’était la liberté d’être
agriculteur, d’être son propre patron,
d’entreprendre, d’évoluer », dit-il en
pointant du doigt une fenêtre à travers
laquelle on aperçoit des ouvriers qui s’af-
fairent à rallonger une bâtisse. « On
agrandit l’espace de couchage, car les va-
ches sont plus nombreuses. »
Dès ses premières années en tant
qu’associé dans la ferme, il s’engage chez
les Jeunes Agriculteurs et gravit rapide-
ment les échelons. Jusqu’à devenir admi-
nistrateur au niveau national. Les réu-
nions se multiplient pour faire part des
revendications, et le son des sirènes pari-
siennes remplace trop souvent le gronde-
ment des machines agricoles.
L’« agri youtubeurre »
À la même période, il découvre les réseaux
sociaux, où les discours hostiles contre
l’agriculture gagnent de l’audience. « Je
découvre L214 (association militante de
défense des animaux, NDLR) dès 2015, sur
Twitter et je lis tout ce qui est raconté sur no-
tre métier. » Pêle-mêle : « Les vaches sont
maltraitées et violées », « 15 000 litres d’eau
sont nécessaires pour faire 1 kg de viande »,
« L’élevage pollue plus que les transports. »
Stupéfié par ces critiques, l’agriculteur
alors trentenaire décide d’y répondre.
« Les gens comparaient nos animaux de
ferme à leurs animaux de compagnie, sans
comprendre la différence, et parfois même ils
les comparaient à des humains : il était
temps de casser les idées reçues. »
Le jeune homme se prend au jeu et la
machine s’emballe, car ils ne sont que
quelques agriculteurs à être présents sur
internet. Il glisse alors progressivement
du statut de syndicaliste à celui de pé-
dagogue. Après les tweets, il adopte le
format vidéo sur YouTube sur des sujets
techniques mal perçus, car « mal com-
pris » : l’insémination chez les vaches, la
détection des chaleurs, la rumination.
L’aventure numérique rebute d’emblée
son père, qui n’y voit pas d’intérêt. « On
n’est pas de la même génération, et on n’a
pas la même façon de travailler. » Étienne
cite notamment l’introduction de la tech-
nologie au sein des exploitations. « Mon
père a perdu ses repères rapidement avec
les nouvelles machines et ça a été très diffi-
cile… Mais c’est le cas dans toutes les fa-
milles d’agriculteurs, le conflit surgit forcé-
ment. » Le regard rieur, il souligne tout de
même que les yeux de son père se sont
adoucis en constatant l’intérêt de la presse
pour le travail de l’« agri youtubeurre ».
« Un éleveur sur Twitter, c’est déjà
amusant, mais un éleveur sur YouTube, ça
attire les médias », s’exclame-t-il, souri-
re en coin. Un rire qui tranche avec
l’image aujourd’hui répandue de l’agri-
culteur harassé et déprimé. « Quand j’ai
choisi ce métier, je le savais : c’est plus de
35 heures semaine et je n’ai pas cinq se-
maines de vacances. » Avant d’affirmer :
« Mais j’aime ça. » Sa voix s’alourdit ce-
pendant quand il mentionne les drames
que traversent trop souvent des familles
d’agriculteurs. « Il y a les difficultés finan-
cières, la fatigue à cause de l’intensité du
travail et la pression sociétale et environ-
nementale… Certains prennent le fusil ou la
corde. » Son visage se referme.
Sur le mur du salon, qui a vu les généra-
tions défiler, se côtoient des natures mortes
peintes par la mère d’Étienne et son tro-
phée des 10 000 abonnés sur YouTube. Ici,
se mêlent l’intime, le familial et le profes-
sionnel. Et c’est aussi tout cela, que raconte
Étienne Fourmont. « La ferme, c’est la
maison », glisse-t-il avec douceur. ■

UN derNier mot Par étienne de Montety

edemontety@lefigaro.fr

Loyer (lo-ié) n. m.
Somme qui, si elle perdure, fait un bail.

L
e pape a décidé que les cardinaux paieraient désormais un loyer
pour l’appartement qu’ils occupent au Vatican.
Le mot vient du verbe latin locarium, qui désigne le prix d’un logement.
Il serait inexact de dire que jusqu’ici les cardinaux ne louaient rien.
Ainsi, ils louaient le Seigneur. Mais on apprend que jusqu’à ce jour, leur louange,
dès laudes, les exonérait de louer leur appartement.
Désormais c’est la loi, certes non pas divine, mais pontificale : chacun paie un loyer.
On ignore d’ailleurs le délai alloué pour s’en acquitter…
Leurs éminences louent-elles le pape d’avoir pris cette mesure ? Pas nécessairement,
même si l’exigence soudaine d’un loyer n’autorise pas qu’on devienne déloyal.
De son côté, François se loue certainement de tirer enfin des revenus du parc locatif
du Vatican : quelques saints louis pour un loyer, cela ne fait pas de mal.
C’est une mesure de bon aloi.
Et il doit penser : « Les cardinaux louent, Dieu soit loué. » ■

FIGARO-CI ... FIGARO-LÀ

Vladimir Fédorovski écrit le portrait
de celui qui était « l’espion du siècle »
L’écrivain, ancien diplomate sous l’ère Gorbatchev,
publiera début avril son cinquante et unième
ouvrage, intitulé Sorge, un espion pour l’éternité
Bernard BaKalian/divergenCe

(Éditions Balland). Ce livre foisonnant s’appuie

sur des archives inédites et se lit comme un roman
policier. L’occasion de saisir toute la complexité
de Richard Sorge (1895-1944), un personnage
proprement extraordinaire qui a inspiré
le personnage de James Bond. Surnommé « l’espion
du siècle », Sorge est plus que jamais d’actualité
aujourd’hui, car il a beaucoup réfléchi sur
l’approximation dans l’analyse politique, prévenant
du « danger de prendre ses désirs pour la réalité »…

Israël : Sara Netanyahou assiégée chez son coiffeur

L’épouse du premier ministre israélien a été bloquée pendant trois heures
par des milliers manifestants alors qu’elle se trouvait chez son coiffeur,
à Tel-Aviv. Elle a été exfiltrée après l’intervention d’agents du Shin Beth,
le service de sécurité intérieure. La foule dénonçait le projet de réforme judiciaire
controversé du gouvernement que l’opposition présente comme un premier pas
A

vers une « dictature ».