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Braunstein
et Jean-François Pépin
1 kilo
DE CULTURE GÉNÉRALE
La voie de la facilité,
une voie rapide
Telle est l’image répandue dans l’opinion, même si dans les faits, ce n’est pas
toujours le cas. Au contraire, la culture générale demande du temps, beaucoup
de temps et notre époque ne l’a plus – elle veut du certifié, de l’authentifié exact
en un temps record. On labellise, on clone, on démultiplie les logos, les images,
les expressions, les modes de vie. Tout s’autoproclame, s’autojustifie, s’autosi‐
gnifie en boucle ou en figure d’Ouroboros, le serpent qui se mord la queue. Or,
loin de ce survol conformiste – toujours plus vite, toujours plus fort –, mais aus‐
si loin des salons mondains et des précieux ridicules, la culture générale au
cours des siècles s’est forgé une place médiane. Elle révèle, un peu comme dans
la bibliothèque de Jorge Luis Borges, que chaque détour, chaque carrefour, dé‐
bouche sur d’autres détours, d’autres carrefours, menant à d’autres intersections,
alors qu’on pensait être arrivé au bout du chemin. Une pensée déroutante en dé‐
coule, révélant la complexité de ce qui nous entoure et nous invitant à nous y in‐
vestir. Ne voir dans un cercle que le symbole d’une figure géométrique est plus
rapide, mais moins satisfaisant que de pouvoir aller au-delà de la simple évi‐
dence et se rendre capable d’y reconnaître en Inde la représentation du cycle du
karma, en Chine le complément dynamique, dans La Monade hiéroglyphique
(1584) de John Dee le paradoxe du cercle, dans le thateron platonicien l’inter‐
médiaire nécessaire entre le même et l’autre, ou la matérialisation des circu‐
mambulations dans les temples, autour d’un stupa, dans les cathédrales, et « que
sais-je » encore comme le disait Montaigne.
Suivre l’opinion commune nécessite moins d’efforts et de connaissances, mais
nous fait voir aussi le monde à travers une lucarne. La culture générale a tou‐
jours eu cette volonté d’ouverture sur l’extérieur, sur les autres et sur soi. Elle re‐
fuse l’isolement, le fixisme et privilégie la remise en cause, le questionnement,
même si notre époque croit valoriser ceux qui aiment les réponses toutes prêtes,
les contenus sans forme, le préfabriqué dans la construction de l’individu où le
paraître a détrôné depuis longtemps l’être. Elle constitue le meilleur rempart
contre les idéologies totalitaristes, amies des idées uniques et simplificatrices te‐
nues pour un ersatz de culture générale à ceux qui en sont justement dépourvus.
Les totalitarismes brisent la pensée, l’arrêtent dans son élan, refusent d’accepter
les différences des autres et, en ce sens, castrent l’identité de ces richesses. Ce
sont des « misologies » au sens où Kant l’entendait, une ruse de la raison contre
l’entendement, un discours contre la raison. L’inculture devient leur fonds de
commerce, elles l’entretiennent, le soignent, car elles ne seront ainsi jamais re‐
mises en cause. Alors, comment doit-on comprendre son rejet ? Certes, elle a le
même effet que le sfumato dans l’art : trop de lumière fait ressortir l’ombre, trop
de jugement la médiocrité. Sa mort est constamment annoncée, et avec elle celle
de la culture française11, devenue cadavre exquis, entraînant dans son sillage
toute la disparition du culturel. Avant d’essayer de saisir les enjeux de la dispari‐
tion de tout un pan de la façade culturelle et de la culture générale elle-même,
tournons-nous d’abord vers la définition des termes « culture » et « culture géné‐
rale », puisqu’ils sont souvent confondus.
De la culture des peuples à la culture du cultivé : les
trois sens du mot culture
Nous pourrions dire de la culture ce que Valéry disait de la liberté : « C’est
un de ces détestables mots qui ont plus de valeur que de sens, qui chantent plus
qu’ils ne parlent12. »
Notes
1. Locution latine d’Horace, Épîtres, I, 2, 40, reprise par Emmanuel Kant qui a exprimé de manière
exemplaire toute la rigueur du mot d’ordre des Lumières : sapere aude, « aie le courage de te servir de ton
propre entendement ».
2. Jacques Rigaud, La Culture pour vivre, Paris, Gallimard, 1975, p. 27.
3. Rappelons à ce sujet que d’après l’Iliade (XIV, 321-323), Europe est la fille de Phénix et la mère de
Minos, Rhadamanthe et Sarpédon, dont le père est Zeus. Ce dernier, changé en taureau blanc, enlève Eu‐
rope qu’il transporte sur son dos, de Phénicie en Crète, en traversant la mer.
4. Serge Chaumier, L’Inculture pour tous. La nouvelle utopie des politiques culturelles, Paris, L’Harmat‐
tan, « Des hauts et débats », 2010, p. 13.
5. Selon l’expression de Claude Javeau dans « La controverse sur l’élitisme dans la culture occidentale
contemporaine », in Simon Langlois, Yves Martin (dir.), L’Horizon de la culture. Hommage à Fernand Du‐
mont, Sainte-Foy, Presses de l’université de Laval, 1995.
6. Claude Lévi-Strauss, Regarder, écouter, lire, Paris, Plon, 1993.
7. Alain-J. Trouvé, « Défense et illustration de la culture générale », in Atala, no 14, Avant-propos,
2011.
8. « École de Francfort » : nom donné à des intellectuels allemands analysant la société dans une pers‐
pective néomarxiste.
9. Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Les Héritiers. Les étudiants et la culture, Paris, Minuit,
1964.
10. Ibid.
11. Voir notamment Donald Morrison, « The Death of French Culture », Time Magazine, 21 novembre
2007, ainsi que Que reste-t-il de la culture française ?, suivi de Antoine Compagnon, Le Souci de la gran‐
deur, Paris, Denoël, 2008.
12. Paul Valéry, Regards sur le monde actuel, Paris, Gallimard, « Folio essais », 1988.
13. Alain Finkielkraut, La Défaite de la pensée, Paris, Gallimard, « Folio essais », 1989, p. 81.
14. Ibid.
15. G.W.F. Hegel, L’Esthétique, trad. Flammarion in Georges Bataille, L’Érotisme, Paris, Éditions 10/18,
1965, p. 237.
16. Alain-J. Trouvé, « Défense et illustration de la culture générale », art. cit.
17. M.I. Finley, « L’héritage d’Isocrate », in Mythe, mémoire, histoire, Paris, Flammarion, 1981, p. 175-
208.
18. Florence Dupont, Rome, la ville sans origine, Paris, Le Promeneur, 2011, p. 10.
19. Ibid., p. 174.
20. Ibid., p. 175.
21. Jean Sirinelli, Les Enfants d’Alexandre. La littérature et la pensée grecques, 334 av. J.-C. – 529
apr. J.-C., Paris, Fayard, 1993, p. 27.
22. Edgar Morin, Penser l’Europe, Paris, Gallimard, « Folio actuel », 1990, p. 22.
23. Au cours des Journées de l’Europe du 9 mai 2005.
24. Jean-Marie Domenach, Approches de la modernité, Paris, Ellipses, « Cours École polytechnique »,
1987, p. 107.
25. Serge Chaumier, L’Inculture pour tous, op. cit., p. 26.
26. Dictionnaire de l’Académie française, 8e édition, 1932-1935.
27. Voir l’article remarquable de Michèle Rosellini, « La culture générale, condition de survie ? », Atala,
no 14, 2011.
28. Primo Levi, Les Naufragés et les rescapés. Quarante ans après Auschwitz, Paris, Gallimard, « Ar‐
cades », 1989.
PREMIÈRE PARTIE
LA PRÉHISTOIRE
CHAPITRE PREMIER
Expliquer l’univers
3. Le Big Bang
Paradoxalement, afin de satisfaire aux exigences de sa théorie de la relativité
générale, énoncée en 1916, Einstein n’adopte pas le modèle de l’univers en ex‐
pansion qu’il a pourtant pressenti mais celui de l’univers stationnaire. C’est en
janvier 1933, alors qu’il participe en Californie à une série de séminaires avec
Georges Lemaître, qu’Albert Einstein a l’occasion de l’entendre présenter sa
théorie du Big Bang. Enthousiasmé, Einstein se serait levé à la fin de la présen‐
tation pour applaudir, disant : « C’est la plus belle et satisfaisante explication de
la création que j’aie jamais entendue ». Ce modèle cosmologique est défendu par
l’astrophysicien britannique Fred Hoyle (1915-2001), les physiciens autrichien
Thomas Gold (1920-2004) et austro-britannique Hermann Bondi (1919-
2005). L’univers y est présenté comme immuable, infini et éternel. Identique à
lui-même en tout point de l’espace à une époque donnée, il connaît de possibles
modifications dues à un phénomène de création continue de matière produite
par le champ C, C pour « création », mais c’est uniquement pour compenser son
actuelle expansion, qui diminue sa densité de matière. Une telle immutabilité
exclut la possibilité d’un réchauffement, d’une densité accrue et de l’explosion
initiale du Big Bang. Cette théorie, dominante jusque dans les années 1950, est
aujourd’hui battue en brèche par les observations. L’univers n’est pas station‐
naire, il est né d’une gigantesque explosion il y a 13,7 milliards d’années envi‐
ron. Il n’est pas éternel, ne crée pas continuellement de la matière et disparaîtra
dans 100 milliards d’années selon la théorie du Big Crunch. Fred Hoyle conteste
le décalage spectral des galaxies vers le rouge, qui indique qu’elles s’éloignent de
plus en plus. Or, c’est l’élément fondamental de toute théorie d’un univers en ex‐
pansion. En 1929, l’astrophysicien américain Edwin Powell Hubble (1889-
1953), après une série d’observations faites à l’aide d’un télescope géant, relève
le rougissement du spectre des galaxies. Si elles se rapprochaient, le spectre se‐
rait de plus en plus violet. Le rougissement, en revanche, atteste d’un éloigne‐
ment continu. Il formule alors la loi qui porte son nom, selon laquelle les ga‐
laxies s’éloignent les unes des autres à une vitesse proportionnelle à leur dis‐
tance. Puisque les galaxies s’éloignent, l’univers ne peut être stationnaire, il doit
être en expansion continue et ne connaître aucune limite. C’est le chanoine
belge Georges Lemaître (1894-1966), professeur de physique et astronome à
l’Université catholique de Louvain, qui élabore le premier modèle d’univers en
expansion, à partir de ce qu’il nomme « l’hypothèse de l’atome originel ».
Contrairement à Einstein qui pense qu’une « constante cosmologique » main‐
tient l’univers stable, Lemaître, à partir de ses calculs et, avant Hubble, de l’ob‐
servation du rougissement du spectre des étoiles, dit que les galaxies s’éloignent
de nous et que l’univers est en expansion, dans un article des Annales de la So‐
ciété scientifique de Bruxelles en 19272. Son travail passe inaperçu, Einstein es‐
time ses calculs corrects, mais sa conception de la physique abominable. Tout
change quand Hubble confirme le contenu de l’article par sa loi de 1929. La so‐
ciété royale d’astronomie en publie à son tour une traduction dans ses « Monthly
Notices » en mars 1931. Selon Lemaître, l’univers est né d’un unique atome,
« le jour d’avant-hier », qui a en explosant, il y a 13,7 milliards d’années envi‐
ron, libéré une température de plusieurs milliards de degrés. L’expression « le
jour d’avant-hier » révèle qu’avant le Big Bang, l’explosion créatrice, le temps
n’existe pas et les quatre forces fondamentales (gravitationnelle, électromagné‐
tique, nucléaire faible, nucléaire forte) sont encore indistinctes, c’est le temps de
Planck, du nom du physicien allemand Max Planck (1858-1947), auteur de
cette théorie de l’avant Big Bang. La théorie du Big Bang permet de dater l’ap‐
parition d’un temps, en fonction de ses phases. En effet, le Big Bang lui-même
se produit à 10–43 s., puis est suivi de plusieurs étapes : à 10–35 s. apparaît la
matière ; à 10–33 s. la température s’abaisse ; à 10–4 s. les protons et les neutrons
se forment. Puis, le temps s’accélère, à + 3 minutes un quart des protons et des
neutrons se combinent en noyaux d’hélium ; à + 2 milliards d’années, les ga‐
laxies se forment. L’expression Big Bang est due à un opposant acharné à sa
conception, Fred Hoyle. Chroniqueur scientifique à la BBC, en 1950, dans un
exposé intitulé The Nature of Things (« La nature des choses »), il raille la théo‐
rie de Lemaître en l’affublant de l’expression Big Bang, le « Grand Bang »,
l’onomatopée soulignant le peu de crédit à lui accorder. Rapidement populaire,
c’est pourtant ce surnom ironique qui sert toujours à désigner familièrement la
thèse d’un univers en expansion. Depuis le début du XXIe siècle, elle permet l’ac‐
cord de la communauté scientifique sur un modèle standard de la cosmologie.
Inspiré du modèle standard de la physique des particules, il permet de décrire en
détails l’univers, sans pour autant pouvoir répondre à l’énigme de ses compo‐
santes principales.
En 1988 le professeur britannique Stephen Hawking (né en 1942) publie
aux États-Unis A Brief History of Time. From the Big Bang to Black Holes, ou
Une brève histoire du temps. Du Big Bang aux trous noirs, où il explique le Big
Bang à la lumière de ses apports personnels de chercheur et le prolonge par
l’analyse de la théorie des cordes. Mathématicien, physicien, enseignant à l’uni‐
versité de Cambridge, Stephen Hawking affine le champ d’études de la cosmo‐
logie. Il présente un univers issu du Big Bang, donnant naissance à l’espace et
au temps, destiné à finir dans des trous noirs. Les trous noirs sont des objets
massifs dont le champ gravitationnel est intense au point d’empêcher toute
forme de matière de s’en échapper. Hawking démontre, contrairement à la doc‐
trine courante, qu’ils émettent un rayonnement, baptisé rayonnement Hawking,
qui s’achève par la désintégration dans un éclair d’énergie pure. Il émet l’hypo‐
thèse que le Big Bang se serait accompagné de la dispersion dans l’espace de
trous noirs dont la taille varie d’un proton à plusieurs millions de fois la masse
du Soleil. L’univers, sans frontière, naît dans un temps imaginaire, proposition
qui réconcilie la relativité générale et la physique quantique, puisque l’univers
n’a ni début ni fin, ni aucune limite.
De quoi l’univers est-il fait ?
• 5 % environ de matière baryonique, ou matière ordinaire, protons, neutrons, ainsi
nommée à partir du grec barys, « lourd », les baryons sont plus lourds en général
que les autres types de particules. Ils forment les atomes et les molécules, tout ce
qui est observable dans l’univers, étoiles, galaxies.
• Le fond diffus cosmologique, rayonnement électromagnétique fossile qui date
du Big Bang, époque d’intense chaleur, et qui se refroidit depuis. La longueur d’onde
de ce rayonnement est celui des micro-ondes ;
• Le fond cosmologique de neutrinos, une particule élémentaire, le fond regrou‐
pant l’ensemble des neutrinos produits lors du Big Bang. Leur existence est certaine,
mais ils demeurent indétectables faute d’instrument propre à mesurer leur énergie
individuelle, infime ;
• 25 % de matière noire, ou matière sombre, matière apparemment indétectable,
non baryonique ;
• 70 % d’énergie noire, ou énergie sombre, dont la nature est aujourd’hui encore
inconnue en laboratoire mais dotée d’une pression négative qui la fait se comporter
en force gravitationnelle répulsive. Présentée parfois comme faite de particules in‐
connues, elle est plus souvent assimilée à l’énergie du vide quantique. Une énergie
sombre, uniforme, constante dans tout l’univers, invariable en fonction du temps re‐
joint l’hypothèse d’Albert Einstein d’une constante cosmologique.
Notes
1. Albert Einstein, « Zur Elektrodynamik bewegte Körper », dans Annalen der Physik, vol. 17, 30 juin
1905, p. 891-921.
2. Georges Lemaître, « Un univers homogène de masse constante et de rayon croissant rendant compte
de la vitesse radiale des nébuleuses extragalactiques », Annales de la Société scientifique de Bruxelles,
vol. 47, p. 49, avril 1927.
CHAPITRE II
L’atmosphère terrestre
Elle enveloppe la Terre sur environ un millier de kilomètres d’épaisseur. Plus l’altitude
s’élève, moins l’atmosphère contient de gaz. Au niveau de la Terre, elle est composée de
78 % d’azote, 21 % d’oxygène et 1 % de gaz rares. L’atmosphère s’est formée il y a envi‐
ron 3 milliards d’années, après que des pluies torrentielles se sont abattues sur la Terre.
Au fil du temps, elle s’est enrichie en oxygène et a développé, à 25 km d’altitude, une
couche d’ozone (gaz bleu toxique à forte odeur), véritable écran qui filtre les rayonnements
mortels, les rayons ultraviolets émis par le Soleil, et laisse passer ceux dont nous avons
besoin pour le maintien de la vie. Chaque jour, 12 à 15 m3 d’air nous sont nécessaires
pour respirer. Voici comme se décompose l’atmosphère :
LE PALÉOZOÏQUE
LE CÉNOZOÏQUE
Le Paléogène
Le Néogène
Différentes hypothèses ont été émises depuis le XIXe siècle, mais en général
c’est celle due à la position des continents sur le globe terrestre, dite théorie de
Milankovitch, qui est retenue. Pendant les phases froides, les glaciers recouvrent
la quasi-totalité de l’Europe du Nord et les Alpes, le Massif central, les Pyré‐
nées ; quant au niveau de la mer, il varie en fonction du stockage de glace sur
les continents, de l’ordre de 120 m d’épaisseur pour la dernière période gla‐
ciaire. Les deux derniers inlandsis (nappe de glace très étendue connue aussi
sous le nom de calotte polaire) sont aujourd’hui l’inlandsis du Groenland et ce‐
lui de l’Antarctique. La présence des moraines glaciaires et des traces d’érosion
glaciaire permettent de déduire le paysage que ces phénomènes ont laissé. La
température moyenne était plus basse que celle d’aujourd’hui de 8 à 12 °C. Des
pluies abondantes prennent alors place en Afrique du Nord, de l’Est, du Sud.
Les grands déserts, celui du Sahara ou du Kalahari, sont habitables. Lorsque le
niveau de la mer baisse, le pont terrestre entre l’Asie et l’Amérique se trouve de
nouveau asséché, tout comme l’isthme de Panama, rétablissant un accès pos‐
sible entre ces trois continents.
4. L’Holocène
L’Holocène qui le suit est la période géologique la plus récente, qui a com‐
mencé 10 000 ans avant notre ère environ. C’est une période interglaciaire, mar‐
quée par la montée des océans provoquée par la fonte des glaciers. La tempéra‐
ture s’élève, la forêt tropicale remonte vers le Nord, les savanes remplacent les
déserts. La mégafaune, les animaux de grande taille, disparaît d’Amérique du
Nord. D’autres espèces sont victimes de l’homme et disparaissent à leur tour. Ce
dernier utilise le feu, taille la pierre, déploie de nouvelles stratégies de chasse à
l’arc ou à l’aide d’un propulseur à sagaie.
Notes
1. Ma : millions d’années avant notre ère.
2. Brittonique : langues celtiques regroupant le celte, le cornique, le gallois, le cambrien (éteint).
CHAPITRE III
1. Les Paléolithiques
Six grandes zones délimitées en Afrique orientale livrent les principales dé‐
couvertes d’Australopithèques (de pithèque, singe, et austral, du sud) : dans la
Rift Valley, l’aire de l’Aouach, de Melka Kunturé, de l’Omo, lacs Turkana (an‐
ciennement nommés lac Rodolphe, Baringo, Eyasi) et l’ancien lac Victoria au
nord du Kenya. Le Tchad et l’Afrique du Sud sont également des zones riches
en vestiges. Les sédiments qui en proviennent sont d’origine fluviatile, lacustre
ou deltaïque. Les conditions d’aridité du Rift ont préservé une importante docu‐
mentation sur les fossiles, mieux conservés que dans les zones forestières.
En France
Le site de Chilhac (Haute-Loire), à la fin du Pliocène, a préservé les osse‐
ments d’une faune exceptionnelle, datée de 2 millions d’années, exactement de
1,9 million d’années, grâce à des galets aménagés. Un cours d’eau bordé de ma‐
récages à l’époque avait attiré des grands mammifères tels le mammouth méri‐
dional, Mammuthus meridionalis, un mastodonte, Anancus arvenensis, des cer‐
vidés, Eucladoceros senezensis, un cheval, equus slenonis, un type de gazelle,
Gazellospira torticornis, et des ours, des hyènes, un félin à dents de sabre. La
grotte du Vallonnet a été occupée par l’homme entre – 1 million d’années et –
900 000 ans. La grotte découverte en 1958 fut longuement fouillée par Marie-
Antoinette et Henry de Lumley. C’est le plus vieil habitat, sous forme de grotte,
connu en Europe. Elle s’ouvre à 110 m d’altitude dans le vallon du même nom,
près de Roquebrune-Cap-Martin. À l’intérieur de celle-ci, les industries lithiques
rudimentaires sont associées à une faune variée : hyène, jaguar européen, ours,
bison, cervidés. À peu près à la même date, le site de Soleihac dans le Velay,
dans la commune de Blanzac, en Haute-Loire, représente tous les niveaux du
Villafranchien, depuis le plus ancien qui fait partie des premiers campements de
plein air. Il a été daté de 800 000 ans, il s’agit vraisemblablement d’un campe‐
ment de chasseurs d’éléphants, d’hippopotames et de rhinocéros. Les traces
d’habitat y sont indiscutables et des blocs de basalte et de granit délimitaient
une surface d’occupation sur les rives d’un ancien lac de volcan. Le matériel li‐
thique y est très varié : choppers, éclats, racloirs épais.
En Espagne
En Italie
En Géorgie
Sur le site en plein air de Dmanissi, quatre crânes, trois mandibules, une
quinzaine de restes postcrâniens et une douzaine de dents isolées ont été exca‐
vés. L’ensemble appartient à un minimum de quatre individus, deux adolescents
et deux adultes. Les diverses datations effectuées ont donné 1,8 million d’années
d’ancienneté. Pour la première fois, à une époque aussi reculée, l’homme est
présent en Europe, en Transcaucasie. L’installation de ce groupe humain a pu
être motivée par un environnement plus humide qui succédait à une aridifica‐
tion de l’Est. La nouvelle espèce a été appelée Homo georgicus, sa capacité crâ‐
nienne était de 600 à 700 cm3.
Le Paléolithique inférieur
Paléolithique inférieur : – 1,7 Ma à – 500 000 ans. Biface - Homo erectus - Abbevillien - Acheuléen -
Micoquien
La subdivision du Paléolithique inférieur en « Abbevillien11 » et « Acheu‐
léen » provient des sites éponymes où l’outillage lithique12 s’y rapportant a été
découvert. Les bifaces les plus anciens sont des rognons de pierres dures, frap‐
pés sur les deux côtés de façon à dégager des éclats. Le passage de l’Abbevillien
à l’Acheuléen est mal connu. La culture acheuléenne13, représentée dans la ré‐
gion d’Amiens, sur le site de Saint-Acheul, perdure jusqu’à environ – 80 000 ans
et jusqu’à – 55 000 ans en Afrique, à Kalambo Falls (Zambie).
Le héros de cette histoire de près de sept cent mille ans est l’Homo erectus,
dont les premiers représentants africains sont séparés de la lignée de l’Homo er‐
gaster, attribuée à une autre espèce. L’Homo erectus est le premier représentant
de l’espèce humaine à quitter l’Afrique pour l’Asie, l’Afrique du Nord et la vallée
du Jourdain, à découvrir la domestication du feu, et à tailler des bifaces. Ses ca‐
ractéristiques morphologiques sont celles d’un homme grand, environ 1,75 m14,
à la capacité crânienne de 850 cm3. Le nom d’Eugène Dubois (1858-1940) est
lié à la découverte de ce que l’on pensait être alors le chaînon manquant. Dans
la publication et la description des fossiles mis au jour le long de la rivière Solo
à Java (Indonésie), le savant utilise la désignation Pithecanthropus erectus, fai‐
sant ainsi allusion à sa position érigée. Ce n’est qu’après la Seconde Guerre
mondiale que la nature humaine du pithécanthrope de Java est reconnue – il
sera alors rebaptisé Homo erectus.
Le Paléolithique moyen
Paléolithique moyen : – 300 000 à – 30 000 ans. Néandertalien - Moustérien - Levalloisien - Sépulture
- Homo sapiens au Proche-Orient
Aucune preuve formelle n’existe à ce jour et le débat sur ce sujet est toujours
en cours, bien que, depuis les années 1980, les données issues de la préhistoire,
de la linguistique, des neurosciences, de la communication animale, conjointes,
font évoluer le problème. La plupart des chercheurs aujourd’hui supposent que
l’acquisition d’un système de communication se fait en deux étapes. D’abord un
protolangage, celui d’Homo erectus, caractérisé par un lexique, quelques mots
juxtaposés mais pas de syntaxe. Derek Bickerton, linguiste, a proposé cette hy‐
pothèse en 1990, fondée sur le fait qu’il n’y aurait pas eu de grammaire mais un
vocabulaire très limité. Les recherches actuelles ont mis en évidence le lien
entre langage et technique. Dans les années 1940 à 1960 domine la notion
d’Homo faber, qui fait de la fabrication d’outils la conséquence directe de l’essor
du langage. Aujourd’hui on ne pense plus l’outil comme la condition sine qua
non mais plutôt comme une interrelation entre les deux, car les deux fonctions
impliquent le lobe frontal, les régions pariéto-temporo-frontales. L’hémisphère
gauche du cerveau, la zone de Broca, responsable du langage, agit sur la partie
droite du corps montrant ainsi l’imbrication de la pensée et du langage.
Néandertal, cannibale ?
La disparition des Néandertaliens pour laisser place aux Homo sapiens vers –
35 000 ans, lors du Paléolithique supérieur, n’a toujours pas trouvé d’explica‐
tion. Elle semble s’être produite de façon progressive et la cohabitation entre les
deux espèces a dû durer plusieurs millénaires. Les innovations techniques sont
nombreuses. La technique Levallois est abandonnée au profit d’un débitage sys‐
tématique des lames, modifiées par des séries de retouches en fonction des ou‐
tils désirés. La taille se fait aussi bien à l’aide de percuteurs durs que tendres. La
technologie osseuse adopte des procédés de fabrication complexes en vue de
l’outil à réaliser (rainurage, suage, grattage), comme les aiguilles à chas. La ma‐
tière animale est utilisée pour les harpons, les sagaies, les hameçons. La parure
fait son apparition dans une grande diversité de formes.
• Le Magdalénien (17 000-10 000) doit son nom aux fouilles de l’abri de la
Madeleine près de Tursac en Dordogne, terme proposé par Gabriel de Mortillet.
Il représente la culture la plus avancée de cette époque. En effet, les propulseurs,
la sagaie, les harpons, se perfectionnent. On voit apparaître de petits hameçons
à double ou triple fourchette. Avec cet armement perfectionné, le chasseur mag‐
dalénien peut atteindre presque tous les animaux de cette époque. La chasse aux
oiseaux devient possible et leurs os délicats permettent la création de toutes
sortes d’outils : étuis à aiguilles, broyeurs de couleurs, etc. La civilisation mag‐
dalénienne évolue au cours de la dernière phase de la glaciation de Würm. À
cette époque, il y a une formidable exubérance animale et végétale, abondance
de rennes, d’aurochs, de chevaux, de bisons, de mammouths, de rhinocéros lai‐
neux. La pêche tient aussi une part dans l’alimentation. Les installations se font
en plein air, dans les grottes, sous des abris sous roche. Des peintures et des gra‐
vures sont exécutées sur les parois des grottes. De nombreuses gravures et
sculptures en ossement sont montées sur des objets d’usage courant. C’est ainsi
que des javelots en bois de renne portent souvent sur le manche un animal
sculpté, comme celui du Mas-d’Azil. De même les bâtons de commandement
sont ornés de gravures géométriques ou de silhouettes gravées d’animaux. Dans
ce type de représentation l’homme n’a pas sa place, seul le gibier figure. À la fin
du Magdalénien apparaît une certaine stylisation. Le Magdalénien est présent
sur une large partie du continent européen, de l’océan Atlantique à la Pologne,
mais il ne franchit jamais le sud des Alpes. Ses centres les plus importants sont
localisés essentiellement dans le Sud-Ouest. Voici les principaux sites : Dor‐
dogne : Laugene-Haute, la Madeleine ; le Bassin parisien : Pincevent, Étiolles,
Verberie, la Ferme de la Haye ; Landes : Duruthy ; en Vienne : le Roc-aux-Sor‐
ciers ; Ariège : la grotte de la Vache ; Charente : la grotte du Placard.
Deux hypothèses sur l’origine de sapiens ont été avancées : la première sup‐
pose qu’à partir de l’Afrique subsaharienne, il se serait ensuite propagé dans tout
l’Ancien Monde. Cette hypothèse s’appuie sur des données génétiques et l’ana‐
lyse de fossiles retrouvés en Afrique subsaharienne. La seconde envisage des
évolutions indépendantes à partir des populations locales en Afrique et en Asie.
Elle se fonde sur des traits morphologiques constants présents dans différentes
régions, la continuité entre ces populations archaïques et les populations mo‐
dernes. Les deux hypothèses combinées ne sont pas non plus rejetées. Le repré‐
sentant des Homo sapiens sapiens est appelé « homme de Cro-Magnon » : aux
Eyzies-de-Tayac, au lieu dit Cro-Magnon, un abri assez profond est découvert.
La capacité crânienne de Cro-Magnon est de 1 600 cm 3, sa face large et basse
contraste avec le crâne long et étroit des Néandertaliens. Sa taille est de 1,86 m.
Les caractéristiques morphologiques d’Homo sapiens varient par rapport à celles
de son prédécesseur, mais il en est différent aussi par son psychisme, puisqu’il
nous a laissé un grand nombre de gravures, de peintures, d’innovations cultu‐
relles et sociales.
Les habitats les mieux connus sont ceux de plein air avec leurs unités d’habi‐
tation souvent allongées ou circulaires, parfois quadrangulaires. Certains de ces
habitats montrent un meilleur aménagement intérieur et une parfaite adaptation
à leur milieu environnemental.
• Pincevent, près de Montereau au bord de la Seine, tire sa réputation non de
la profusion de ses œuvres d’art, ni de la qualité exceptionnelle de son outillage
lithique ou osseux, mais du fait que ses structures d’habitat y ont été conservées
de manière exemplaire. Découverts fortuitement en 1964, les restes d’une habi‐
tation mis au jour par André Leroi-Gourhan montrent qu’il s’agissait d’une de‐
meure d’été et d’automne. Grâce à la densité des trouvailles, son plan se détache
nettement sur le sol. Trois unités d’habitation se dégagent. Chacune possédant
un foyer rempli de cendres et de pierres éclatées à la chaleur, un espace en
forme d’arc riche en objets, os et pierre, une place d’atelier et une entrée. Devant
deux des foyers se trouvaient de grandes pierres utilisées comme sièges. L’étude
de tous ces objets a démontré l’existence de trois tentes juxtaposées. On y a
trouvé des os d’aurochs, de cerfs, de loups, mais les ossements de rennes sont
majoritaires. Le campement couvrait plus d’un hectare pendant quelques se‐
maines. D’autres sites sont contemporains comme Verberie (Oise) ou Étiolles
(Essonne).
• Le site de Mezhirich, en Ukraine, a livré encore une documentation plus
intéressante, celle d’une construction circulaire d’un diamètre de 5 m et d’une
surface approximative de 40 m2, conservée parfaitement grâce au lœss qui la re‐
couvrait. Les fondations de la construction étaient constituées par des mandi‐
bules de mammouths. La voûte était formée par les défenses de ces animaux.
Toujours en Ukraine, sur le site de plein air de Gontsy, des habitats en os de
mammouths ont été découverts à Mézine : cinq cabanes de mammouths et
quelques centaines de milliers de pièces d’outillage lithique.
Jusqu’aux années 1970, l’Europe est tenue pour lieu presque unique de l’art
magdalénien. En fait, ce phénomène est universel. Des travaux récents per‐
mettent de montrer que l’Australie, l’Amérique du Sud, le Chili, le Brésil, mais
aussi l’Asie, l’Inde offrent des sites comparables. Les premières manifestations
artistiques, fussent-elles très sommaires, ne remontent pas avant la fin du Paléo‐
lithique moyen. Les plus grandes découvertes des peintures et gravures ru‐
pestres se font dans les monts Cantabriques (en Espagne du Nord), dans les Py‐
rénées et en Dordogne. Les thèmes les plus représentés dans l’art rupestre occi‐
dental sont les humains, les animaux, les signes. Les grands herbivores sont ma‐
joritaires. Les peintures les plus anciennes vont de – 31 000 pour la grotte de
Chauvet, à – 10 000 pour les plus récentes du Magdalénien : Altamira, Font-de-
Gaume, Rouffignac, Lascaux. Les représentations humaines sont soit anthropo‐
morphes soit figurent seulement les mains. Les premières sont rares, une ving‐
taine, souvent schématisées, parfois composites mi-homme mi-cheval. Certaines
parties du corps sont en revanche privilégiées, vulve féminine, phallus, mains.
Ces dernières sont dites positives, quand elles sont recouvertes de peintures et
appliquées sur la paroi, négatives utilisées en pochoir. La grotte de Chauvet est
la découverte majeure de ces dernières années. Sous la direction de Jean
Clottes, près de quatre cent quarante animaux sont répertoriés, des espèces ra‐
rement figurées le sont : la panthère, le hibou, le bœuf musqué, datés entre –
24 000 et – 32 000.
Lascaux, dans la vallée de la Vézère, offrait les peintures les mieux conser‐
vées lors de sa découverte en 1940 de façon fortuite. En 1948, la grotte est ou‐
verte au public et dix ans plus tard est installée une machinerie pour renouveler
l’air vicié. L’abbé Henri Breuil (1877-1961) et le père André Glory (1906-
1966) en font l’analyse et les relevés. L’entrée franchie, on se retrouve dans une
grande salle peinte à fresque de 30 sur 10 m qui se prolonge par une galerie
étroite, elle aussi ornée de fresques, c’est la salle des Taureaux. Cette dernière
présente la plus spectaculaire composition de Lascaux, où se croisent aurochs,
bouquetins, chevaux menés par une sorte de licorne. Dans les différentes salles,
d’abord le Passage, puis la Nef, le Diverticule axial où dominent les félins, ce
sont plus de mille figures dessinées, alignées ou superposées. Les figures du Di‐
verticule axial sont trop en hauteur pour avoir été peintes sans l’aide d’un écha‐
faudage. La grotte de Lascaux est considérée par André Leroi-Gourhan
comme un sanctuaire, l’un des premiers monuments religieux. Victime de son
succès, Lascaux est fermé le 20 avril 1963 par André Malraux. L’équilibre bio‐
logique de la grotte dépend de trop de paramètres (température, taux de gaz car‐
bonique). En 2001, la cavité fait une « rechute » foudroyante, auquel répond
d’avril à juin de la même année dans la salle des Taureaux un traitement des li‐
chens repérés. Mais les moisissures blanches, fusarium solani, continuent leur
avancée menaçant l’intégrité des parois. Le constat alarmant amène à un relevé
de la grotte en trois dimensions tout en continuant de traiter au mieux le mal qui
la ronge. En 1983, un fac-similé, Lascaux 2, est ouvert au public mais, dès
2008, si endommagé qu’il n’ouvre que quelques mois par an. Lascaux 3 est le
nom d’une exposition, Lascaux révélé (2008). Depuis 2012, le projet Lascaux 4
d’une reproduction intégrale de la grotte est en cours.
Les questions qui fâchent : un calendrier sur os ?
En examinant un jour, en 1965, au microscope un fragment d’os de renne vieux de plus de
trente mille ans, un archéologue américain, Alexander Marshack, a supposé que des
traces en zigzag étaient de nature astronomique. Un homme de Cro-Magnon aurait consi‐
gné le passage des saisons en relevant les phases de la lune. Cette théorie du calendrier
a été très controversée. Elle s’est faite sur la découverte d’un os à l’abri Blanchard en Dor‐
dogne, non loin des grottes de Lascaux. L’observation à l’œil nu révèle un certain nombre
de marques creusées en sorte de spirales. Celles-ci correspondent, selon Marshack, à
une période lunaire de deux mois et demi. L’os fait apparaître soixante-trois marques sur
la tranche et quarante sur le verso. L’ensemble des traces sur l’os couvrait ainsi une pé‐
riode de six mois. Sur la capacité à compter des chasseurs paléolithiques, les indices sont
vraiment infimes. Pourtant une base de numérotation pourrait être évoquée au Magdalé‐
nien, sur un os gravé dont le décor offre une systématisation numérique. Il y a cinq
groupes de traits verticaux et cinq horizontaux, au total dix groupes qui ont été gravés.
Mais c’est davantage un souci esthétique qui l’emporte plutôt qu’une numérotation. Très
semblable, le cas des Miaos du Haut-Tonkin qui font des bâtons de bois cochés mais uni‐
quement comme simple aide-mémoire à caractère individuel, décodables par eux seuls.
Dans les années 1950, un autre archéologue, Jean de Heinzelin, avait retrouvé dans les
environs d’Ishango, au Congo, un os marqué d’encoches. Il daterait d’environ 20 000 ans.
Il présente un quartz à l’une de ses extrémités et trois colonnes d’entailles. Jean de Hein‐
zelin y voit « une calculette préhistorique » et Marshack un calendrier lunaire.
2. L’Épipaléolithique et le Mésolithique
L’Épipaléolithique (11 800 environ) - armatures pointues de petites dimensions, pirogues - et le Mé‐
solithique (10 200-6500) - arcs et flèches
À la fin du XIXe siècle, il existe un hiatus important, si l’on se fonde sur le fait
que l’on ne distingue pour la Préhistoire que deux périodes, celle du Paléoli‐
thique et celle du Néolithique, termes créés par John Lubbock (1834-1913) en
1865. Mais pour Gabriel de Mortillet, il ne s’agit que d’une simple lacune de
nos connaissances, les restes de l’époque de transition ou de passage n’ont pas
été encore trouvés ou reconnus. Pendant quarante ans, la querelle du hiatus dure
mais se termine par la découverte de l’Azilien, du nom du site du Mas-d’Azil en
Ariège, par Édouard Piette (1827-1906). Suivent le Campignien, le Touras‐
sien, le Tardenoisien, connu surtout dans le nord du Bassin parisien. En Europe,
les principaux groupes épipaléolithiques sont l’Azilien16, le Valorguien17, le
Montadien18. Ils succèdent à la culture magdalénienne, mais se caractérisent
comme des cultures moins localisées que les précédentes et plus changeantes.
Dans les pays du Maghreb, à l’Atérien, succèdent aussi le Capsien et l’Ibéromau‐
rusien. Ces deux cultures correspondent aux cultures mésolithiques euro‐
péennes. L’Afrique de l’Est dispose d’une série de faciès culturels locaux à l’ap‐
parition plus tardive qu’en Europe : Sangoen et Lupembien, régions du Congo et
de l’Angola.
CARACTÉRISTIQUES DES CULTURES ÉPIPALÉOLITHIQUES EN
EUROPE
3. Le Néolithique
Le Néolithique vers – 10 000 ans : sédentarisation, poterie, domestication, premières maisons, pre‐
miers villages
La diffusion à partir de l’Ouest a été sans conteste favorisée par une naviga‐
tion importante en Méditerranée, dès le VIIIe millénaire avant notre ère, bien
avant la fabrication de la poterie. En Égée, l’obsidienne de Mélos fait déjà l’objet
d’importation. On trouve des traces d’occupation dès l’Épipaléolithique en
Corse, abri de Curacchiaghiu et abri d’Araguina-Sennola, au VIIe millénaire, et
un millénaire plus tard pour les Baléares. La diffusion des premières cultures à
céramique le long des côtes de la Méditerranée occidentale est aussi l’une de ses
conséquences. On les retrouve en Toscane, en Provence, au Languedoc, en Ca‐
talogne, au Portugal, en Oranais, au nord du Maroc. La néolithisation s’impose
d’abord comme un phénomène côtier. À partir de la façade provençale et lan‐
guedocienne, elle va s’étendre progressivement à la moitié sud de la France. Le
Néolithique ancien prend place dans une période allant du VIe millénaire jus‐
qu’à la charnière du Ve millénaire avant notre ère, 6000-5500 avant J.-C. envi‐
ron. C’est l’époque de la culture cardiale, décors sur la poterie faits par im‐
pressions de coquillages ou de poinçons, que l’on découvre sur la côte adriatique
des Balkans, en Italie, en France, au Portugal, en Afrique du Nord. Les habitats
sont nombreux et se font soit en grotte, soit en plein air, mais aucun n’évoque
des communautés importantes. Dans la moitié nord de la France, la néolithisa‐
tion tient ses origines des groupes agricoles venus des vallées de l’Europe cen‐
trale. La civilisation danubienne n’atteindra le Bassin parisien et le bassin de la
Loire qu’à la transition du Ve-IV e millénaire avant notre ère. Parallèlement, un
autre ensemble se met en place, le long de l’axe principal du Danube et de ses
affluents, avec la culture rubanée, qui tire son nom de la décoration incisée, en
méandres ou en volutes, qui orne ses poteries. L’est de la France et l’axe du Rhin
seront imprégnés de cette culture, culture de Michelsberg, tandis que la moitié
orientale du Bassin parisien développe une culture de communautés de paysans,
sur le site des Fontinettes, à Cuiry-lès-Chaudardes, dans la vallée de l’Aisne,
avec des maisons de grandes dimensions (10 × 4 m), datées de 4600 avant J.-
C., au Néolithique moyen. La première moitié du IVe millénaire avant notre ère
y est illustrée par un nombre très important de sites d’habitat, avec le groupe de
Cerny. Les maisons y sont de tradition danubienne, comme à Marolles-sur-
Seine, trapézoïdales. Les tombes sont présentes à Passy (Yonne). C’est à cette
époque que le phénomène mégalithique s’affirme sur la façade atlantique, dol‐
mens à couloirs et grands tumulus. Le Chasséen s’impose et assimile les tradi‐
tions locales de la plus grande partie du territoire tout en se métissant au contact
de divers groupes, lors de son extension vers 3700-2600 avant J.-C., dans la
zone méridionale, et vers 3500-2400 avant J.-C. dans la zone septentrionale. De
toutes les cultures néolithiques en France, c’est celle qui a la plus longue durée,
un millénaire, et la plus grande extension. L’habitat de plein air y est représenté
en grand nombre avec une superficie plus importante que lors du Néolithique
ancien. L’existence de fossés ou de systèmes composés de fossés et de palis‐
sades, entourant les villages, semble être la règle dans le Bassin parisien. C’est
aux alentours du milieu du IVe millénaire avant J.-C. que de profondes modifi‐
cations sont observables dans l’économie. Les communautés sont plus nom‐
breuses et pleinement sédentarisées. La métallurgie apparaît dans les Balkans et
en Europe centrale, puis en France un millénaire plus tard. Dès 2500 avant J.-
C., le Néolithique final est marqué par la continuité de certains groupes méri‐
dionaux qui gardent pendant un temps les techniques néolithiques alors que
d’autres s’initient aux rudiments de la métallurgie de l’or et du cuivre. La moitié
nord de la France est dominée par la culture Seine-Oise-Marne de 2500 à
1700 avant J.-C. C’est une période de développement aussi pour les hypogées,
les sépultures collectives et les fosses. La connaissance de la métallurgie
contribue au développement de la culture des gobelets campaniformes, vers
2300-2200 avant J.-C.
Évolution du Néolithique en Europe
• Néolithique ancien, 6000-5500 av. J.-C. → 3800 av. J.-C.
En Méditerranée, il évolue du VIIe au VIe millénaire avant notre ère, plus tardivement en
Aquitaine et sur la côte atlantique. Au – Ve millénaire, la moitié nord de la France connaît
un phénomène de colonisation à partir de la zone danubienne. Les colons de la civilisa‐
tion rubanée ne franchissent le Rhin que dans la seconde moitié du Ve millénaire avant
notre ère. Leur extension dans le Bassin parisien et la Loire ne remonte pas au-delà du
IVe millénaire avant notre ère. Dans l’Est, le Roessen se substitue au rubané au début du
IVe millénaire avant notre ère.
• Néolithique moyen, IVe millénaire av. J.-C. → 2800-2700 av. J.-C.
Extension dans la majeure partie de l’Europe occidentale de groupes à poteries mono‐
chromes et lisses. Plus anciennes manifestations de dolmens sur l’Atlantique. Groupe de
Michelsberg, fin du IVe millénaire dans l’est de la France. Le Chasséen s’étend à la ma‐
jeure partie du territoire français (3700-2600).
• Néolithique récent, 2700 av. J.-C. → 2100 av. J.-C.
Dans le nord de la France, civilisation Seine-Oise-Marne (2500-1700 avant J.-C.). Phéno‐
mène mégalithique à allée dans le Bassin parisien et en Armorique, puis dans le Midi.
Culture des gobelets campaniformes (2300-2200 avant J.-C.).
Chypre : la transition
LES DOLMENS
LES MENHIRS
Les menhirs sont des pierres dressées. Leur distribution est bien plus large
que celle des dolmens, il n’y a pas un département en France qui n’en possède
au moins un, mais leur densité est surtout grande dans les régions armorique et
avoisinantes, dans le Bassin parisien, jusqu’en Bourgogne. Leur forme varie
beaucoup en fonction de la roche utilisée. Le plus souvent, ils sont allongés ver‐
ticalement. En général, on a tiré parti des blocs, isolés par l’érosion, parfois
après les avoir dégrossis. Ils peuvent aussi présenter, en surface, des restes d’or‐
nementations, similaires à celles des sépultures néolithiques, soit par incision,
soit en relief, à l’exemple du menhir du Manio, à Carnac, et de celui de Kermar‐
quer dans le Morbihan. Notons la démesure de certains, 350 tonnes pour celui
brisé de Locmariaquer qui devait faire 20 m de haut, partie enterrée comprise.
LES STATUES-MENHIRS
Une statue-menhir est une sculpture, fichée en terre, à bord parallèle et avec
une partie supérieure arrondie, dont la forme générale évoque celle du dolmen.
Mais la surface est sculptée en bas-relief ou gravée. Elles figurent des person‐
nages féminins ou masculins, parfois au sexe indéterminé, portant des orne‐
ments ou des attributs énigmatiques. Le visage est inscrit dans l’ogive supérieure
de la dalle, le corps est symbolisé par saillants, se détachant sur champlevé, les
bords ne sont pas creusés. Les mains et les pieds sont stylisés. Seuls les yeux et
le nez sont tracés. On trouve les statues-menhirs dans le sud de la France, dans
les départements de l’Aveyron, du Tarn, de l’Hérault, groupe dit du rouergat.
Les statues-menhirs rodéziennes sont les plus nombreuses, souvent sculptées,
elles donnent des indications précises sur les costumes, l’équipement et les
armes.
Notes
1. Boucher de Perthes serait plutôt l’avocat de la Préhistoire, s’étant chargé de faire admettre après une
lutte méritoire des idées qu’il n’avait pas forgées lui-même. C’est à Casimir Picard que revient, en 1835, le
mérite d’avoir mis en lumière la contemporanéité des haches taillées et de la faune disparue.
2. La mâchoire de Moulin-Quignon, observée à la lumière des comparaisons anatomiques avec les fos‐
siles humains connus aujourd’hui, présente de grands airs de modernité. L’intérêt de cette supercherie fut à
l’époque d’avoir créé une commission de savants, géologues, paléontologues, archéologues sous la direc‐
tion d’Henri Milne-Edwards, réunis pour venir inspecter le site de Moulin-Quignon. Les minutes du dé‐
bat ont été consignées dans les Mémoires de la société d’anthropologie de Paris (1863).
3. André Leroi-Gourhan, Le Geste et la Parole, 1 : Technique et Langage, 2 : La Mémoire et les
Rythmes, Paris, Albin Michel, 1964-1965.
4. Le terme « quaternaire » a été inventé, en 1829, par le géologue Jules Desnoyers. L’ère quaternaire
se divise en deux : le Pléistocène de – 2,7 Ma à – 780 000 ans (terme établi, en 1839, par le géologue bri‐
tannique Charles Lyell) et l’Holocène vers – 10 000 ans (terme créé par le Français Paul Gervais, en
1867, pour désigner les dépôts récents).
5. Découverte effectuée par une équipe internationale dirigée par Yves Coppens, Donald C. Johanson et
Maurice Taieb.
6. Découverts au Kenya, ces vingt et un fossiles comprennent des mâchoires supérieures et inférieures,
des fragments de crânes et une partie de tibia.
7. Retrouvé au Tchad près du fleuve Bahr el Ghazal, « fleuve des gazelles », il est le premier Australopi‐
thèque à avoir été découvert à l’ouest de la vallée du Rift.
8. Appelé aussi l’Homme du millénaire, il fut découvert dans la formation de Lukerno, au Kenya.
D’après les ossements, il pouvait mesurer 1,40 m, et peser 50 kg. Il était bipède.
9. Son nom signifie « homme à face plate du Kenya ».
10. Il présente des caractères intermédiaires entre Homo habilis et Homo erectus, avec 700 cm3 de capa‐
cité crânienne pour le plus grand, et 600 cm3 pour le plus petit.
11. Jusqu’à la découverte de la grotte du Vallonnet (Alpes-Maritimes), l’Abbevillien représentait la plus
ancienne industrie connue, à Chelles (Seine-et-Marne) et sur les terrasses de la Garonne.
12. Les bifaces acheuléens sont le plus souvent taillés sur les deux faces ; la taille au percuteur cylin‐
drique s’ajoute aux procédés connus. D’abord assez épais, les bifaces deviennent plus minces, les arêtes
plus rectilignes. Les formes sont plus symétriques et comprennent des ovoïdes aplatis appelés « li‐
mandes ». L’évolution de l’Acheuléen culmine dans des formes longues, lancéolées, comme les bifaces mi‐
coquiens, à base large et pointe étroite. La technique « Levallois », préformage du nucleus pour déterminer
les éclats, se fait plus présente à l’Acheuléen moyen. Au cours de l’Acheuléen, d’autres industries comme le
Clactonien, en Angleterre, sont supposées avoir évolué indépendamment.
13. Représentée également sur les sites du Caune de l’Arago, du Lazaret, de la Micoque, de Terra Ama‐
ta, d’Olduvai (Tanzanie).
14. Des empreintes de pieds retrouvées dans le nord du Kenya révèlent qu’il y a un million d’années
l’Homo erectus marchait de la même façon que nous. Le gros orteil est semblable aux autres, différence no‐
table avec les grands singes qui les ont séparés afin d’assurer la prise des branches. La voûte plantaire est
prononcée. L’Homo erectus est le premier hominidé à présenter les mêmes proportions corporelles que
l’Homo sapiens : bras plus courts, jambes plus longues.
15. L’Afrique du Nord connaît une forme sans doute dérivée des erectus africains (découverte à Djebel
Irhoud au Maroc). Le Proche-Orient au contraire connaît des formes très évoluées dès – 90 000 ans.
16. L’Azilien, daté de 12 000-9000 av. J.-C. environ, a pour caractéristique des galets peints ou gravés
dans des endroits comme les Pyrénées, l’Espagne cantabrique, la Suisse. Au Maghreb, on parle du Capsien
et de l’Ibéromaurusien.
17. Appelé anciennement Romanellien, il a été défini par Max Escalon de Fonton à partir de l’indus‐
trie de Valorgues. Il est réparti sur le littoral du Languedoc oriental ; contemporain de l’Azilien, il s’en dis‐
tingue par son absence de harpon.
18. Il succède au Valorguien et se situe géographiquement dans les Bouches-du-Rhône et chronologi‐
quement au VIIIe millénaire.
19. Son nom vient du site de Wadi en-Natouf en Cisjordanie, ses dates s’étalent entre – 12 000 et –
10 000.
20. « Révolution néolithique » : expression utilisée par Vere Gordon Childe (1892-1957), dans les an‐
nées 1920, pour décrire les révolutions agricoles qui eurent lieu au Proche-Orient et qui se manifestèrent
par un passage radical de l’économie de prédation à celle de production.
21. Le site prédynastique de Nagada, en Égypte, a livré des petites perles de cuivre.
CHAPITRE IV
Le VIIIe siècle avant J.-C. fut une période de grands mouvements de popula‐
tion. À l’âge du bronze, deux peuples de cavaliers indo-européens sortent des
steppes orientales et progressent vers l’Ouest et le Sud. Les Cimmériens, qui
viennent de Crimée, franchissent, vers – 750, le Caucase et menacent l’Asie Mi‐
neure et l’Assyrie. Les Scythes du Turkestan, qui chasseront les précédents, fini‐
ront par pénétrer dans les Balkans, et parviendront sur le cours moyen du Da‐
nube dans les plaines de Pannonie ainsi que dans le sud des Carpates. Cette pro‐
gression vers le sud mène Scythes et Cimmériens en Allemagne de l’Est (Ba‐
vière) et, avec les Thraces, en Italie du Nord. Les premiers sont les intermé‐
diaires du Proche-Orient, les seconds influencent les civilisations de Hallstatt, le
premier âge du fer, et de La Tène, le deuxième âge du fer.
Les périodes de l’âge du fer
• Hallstatt ancien (725-625 av. J.-C) : mise en place des Thraco-cimmériens en Europe
centrale. Constitution d’une aristocratie de cavaliers qui sera caractéristique des fonde‐
ments de la société gauloise.
• Hallstatt moyen (625-540 av. J.-C.) : présence d’épées de fer à antennes, de rasoirs
semi-circulaires, de bouteilles, de bracelets à boules qui serviront de « fossiles direc‐
teurs ».
• Hallstatt final (540-450 av. J.-C.) : civilisation de Vix et des Joganes, est et nord de la
France. Plus grandes diffusions des productions méditerranéennes par l’axe Rhône-Saône.
Sépultures en Bourgogne (Chars), en Alsace et dans le Jura.
L’ARCHÉOLOGIE CELTIQUE
Quelques oppida
Pour étudier la religion des Celtes, les vestiges archéologiques, les sources
contemporaines grecques ou non, l’épigraphie, l’iconographie fournissent une
indication de premier choix. Les sanctuaires à l’intérieur des villages celtiques
sont souvent monumentaux et renseignent sur les pratiques religieuses. Celui de
Gournay-sur-Aronde, à quelques kilomètres de Compiègne, près d’un lieu ma‐
récageux, est choisi par les Bellovaques, puissante et nombreuse population du
nord de la Gaule. À proximité a été retrouvée une enceinte fortifiée de 3 hec‐
tares, abandonnée au IIIe siècle av. J.-C. L’ensemble des travaux du sanctuaire
relève aussi du IIIe siècle av. J.-C. Il s’étend sur une surface de 1 500 m2, sous la
forme d’un rectangle, entouré d’un fossé de 2,50 m de long et de 2 m de profon‐
deur, ceint d’une palissade de bois. Au centre, une grande fosse de 3 m sur 4 m,
de 2 m de profondeur, ainsi que neuf autres plus petites avaient été creusées. Un
espace de 1,50 m permettait la déambulation autour de la fosse principale. Dans
la grande fosse se trouvent les restes de carcasses de bœufs, environ 45, d’une
centaine d’agneaux, d’une quarantaine de porcelets. Dans le courant du IIe siècle
av. J.-C., le sanctuaire fait l’objet de réaménagements : reconstruction de la pa‐
lissade et du porche d’entrée, un de ses éléments essentiels qui se présente
comme une porte d’oppidum où étaient fixés les crânes des ennemis et des os
humains. Les armes mises au jour portent des traces de combat, sans doute des
prises de guerre. D’autres sanctuaires présentent l’élévation de trophées avec les
dépouilles de vaincus, à Ribemont-sur-Ancre, près d’Amiens, ou à celui de
Roquepertuse, dans les Bouches-du-Rhône, construit dans la ville haute avec
son bâtiment aux crânes qui pourrait donner raison à la littérature gréco-latine
selon laquelle les cavaliers celtes décapitaient leurs ennemis pour accrocher
leurs têtes à leurs chevaux. Celui de Ribemont-sur-Ancre est sans doute l’un des
plus vastes sanctuaires de Gaule avec ses 800 m de long et son plan complexe.
Les fouilles archéologiques, menées depuis 1982, ont révélé un trophée guer‐
rier, érigé à l’endroit où fut menée une importante bataille entre une armée
belge et une armée armoricaine ayant fait probablement un millier de morts. La
bataille se serait déroulée vers 260 av. J.-C. et terminée par la victoire des
Belges. Le trophée, monument cubique de 1,60 m de côté, était tourné vers
l’Ouest et séparé par un fossé. L’enclos de forme polygonale était entouré d’un
mur de 6 m de haut. Des milliers d’os humains mélangés à deux cents pièces
d’armement, épées, boucliers y ont été retrouvés, en général des hommes âgés
d’entre 15 et 40 ans ayant reçu des blessures mortelles. Leurs dépouilles décapi‐
tées avaient été installées dans trois bâtiments en bois, suspendues à des por‐
tiques, les unes contre les autres. Dans l’enclos polygonal, une découverte en‐
core plus étonnante : un empilement de membres humains et d’os de chevaux,
environ deux mille, est agencé en une sorte d’autel cimenté par du torchis et de
la terre. Les os humains avaient été broyés et brûlés. Les sacrifices offerts sont,
dans les sanctuaires et les temples, de toute sorte : représentation de la divinité
en offrandes, mais aussi parties d’animaux. Les sources latines font allusion à
d’horribles sacrifices humains et cette vision des Celtes barbares et sanguinaires
continue de subsister au cours du temps. Lucain (39-65) évoque ainsi « ceux
qui apaisent par un sang affreux le cruel Teutates et l’horrible Esus ». Un com‐
mentateur de ce poète précise même la nature des sacrifices humains, ceux des‐
tinés à Taranis sont immolés par le feu, pour Teutates, noyés dans une cuve,
consacrés à Esus, suspendus à un arbre et écorchés. Les fouilles archéologiques
permettent de relativiser considérablement ce point de vue, les sacrifices consti‐
tués d’offrandes d’objets, armes, torques étant les plus attestés, même si pour
certains sanctuaires et oppida, les fouilles révèlent des squelettes entiers d’ani‐
maux ou d’êtres humains.
Le chaudron de Gundestrup, Ier siècle av. J.-C., trouvé en 1880 dans une tour‐
bière du Jutland au Danemark, se rattache par son répertoire figuratif à l’essen‐
tiel des thèmes celtiques de la mythologie. Des 15 plaques qui le composaient,
seules 13 nous sont parvenues. La pièce pèse plus de 90 kilos pour un diamètre
de 68 cm sur 40 cm de haut. Il fait partie d’une série de grands récipients litur‐
giques retrouvés en Scandinavie, chaudron de Brâ, de Rynkeby, probablement
destinés à des libations rituelles en l’honneur de divinités. Celui de Gundestrup,
à partir des représentations d’armement, trompettes à embouchures en gueule de
dragon, grands boucliers oblongs, casque de La Tène III, a été rattaché au mi‐
lieu du Ier siècle av. J.-C. Sur les monuments ou objets, les divinités sont sou‐
vent accompagnées d’animaux dont les traits distinctifs sont reconnaissables.
Leur choix est symbolique, par exemple d’une fonction sociale. Allant de l’infi‐
niment petit, l’abeille qui évoque l’immortalité de l’âme, jusqu’au plus gros, le
taureau, animal représenté en sacrifice sur le chaudron de Gundestrup, symbole
de la reine, le cheval étant réservé au roi.
Leurs dieux sont mentionnés par César dans un court passage de sa Guerre
des Gaules (VI, 17), mais aussi par Lucain dans la Pharsale. Bien intégrés, les
Celtes continuent d’adorer leurs dieux jusqu’à l’adoption du christianisme par
Rome. Leur religion commence dès lors à décliner, sauf dans certaines régions,
comme en Irlande où l’on continue de la maintenir oralement. En effet, dès le
Ve siècle, les moines recopient ces légendes. En dehors du pays de Galles, ces
récits ne sont pas consignés par écrit. Les sources continentales, épigraphiques
et gallo-romaines sont séparées chronologiquement des sources insulaires par
une bonne dizaine de siècles. Les secondes ont tenté une insertion d’histoire na‐
tionale et de les concilier avec les écrits bibliques, par exemple dans le cycle de
la quête arthurienne du Graal. Cette littérature, consignée par les clercs du
Moyen Âge à partir des traditions orales, s’étend du VIIIe siècle au XVe siècle. La
mythologie des Celtes d’Irlande nous est connue par le cycle mythologique de la
bataille de Mag tured dont le texte principal est le Cath Maighe Tuireadh, le
cycle historique composé d’annales légendaires, le Lebor Gabála, le Cycle Fe‐
nian (ou Cycle de Finn), consacré aux aventures de Finn Mac Cumaill, le Cycle
d’Uster (ou Cycle de la branche rouge) qui décrit l’intervention des dieux et les
rois de l’Irlande protohistorique. L’ensemble de ces textes reste le moyen d’ap‐
procher la civilisation de l’âge du fer sous le prisme déformant des moines chré‐
tiens. Le culte rendu sous la forme de l’adoration de la nature chez les Celtes est
sans doute le plus connu. Grands cours d’eau, lacs, montagnes sont adorés
comme des personnes divines. Presque tous les fleuves et les montagnes sont
ainsi divinisés, tel Renus, le Rhin. Les menhirs sont remis au goût du jour par la
nouvelle religion. Mais il est faux de dire que les dolmens aient pu servir d’au‐
tels aux druides. Il est également difficile de discerner le faux du vrai en ce qui
concerne les arbres, qui font l’objet pour certains d’entre eux d’une véritable vé‐
nération, ainsi que de nombreuses inscriptions l’attestent. Le chêne semble de‐
voir exciter tout particulièrement les imaginations. On a souvent cru que les
druides lui sont liés par l’étymologie de leur nom qui proviendrait de drus, le
chêne en grec, hypothèse aujourd’hui abandonnée au profit de dru-wid-es, « très
savants ». Les lieux de culte sont soit des sanctuaires en forme d’enclos qua‐
drangulaire, délimités par un fossé et une palissade, soit à l’image des monu‐
ments romains, un temple de forme carrée ou circulaire.
◆ Lug selon César est le plus grand des dieux gaulois, le plus vénéré. Aussi
le compare-t-il à Mercure, dont l’importance en Gaule se vérifie par le topo‐
nyme Lugdunum (Lyon), la ville de Lug : « Le dieu qu’ils honorent particulière‐
ment est Mercure : ses statues sont fort nombreuses ; ils lui attribuent l’inven‐
tion de tous les arts ; ils en font le dieu qui indique au voyageur la route à suivre
et qui le protège, celui aussi qui peut le plus leur faire gagner de l’argent et pro‐
téger le commerce » (Commentaires sur la Guerre des Gaules, VI, 17). Mercure
est le dieu du commerce et des marchands. On l’a souvent assimilé au dieu gau‐
lois Toutatis, pris lui-même pour Mars. Lug est le dieu celtique du soleil, repré‐
senté souvent comme un beau et jeune guerrier. Son correspondant irlandais est
Lug Samidalnach qui est le principal acteur dans le récit du Cath Maighe Tui‐
readh, équivalent de la lutte des dieux grecs contre les Titans. Le texte mytholo‐
gique relatant ses aventures trouve sa version la plus ancienne dans un manuscrit
du XVe siècle.
◆ Taranis, le Jupiter gaulois, a pour correspondant irlandais Dagda, le dieu
bon. C’est dans la mythologie celtique irlandaise le second dieu après Lug. Les
représentations du premier sont l’éclair, le sceptre, l’aigle, et il est souvent figuré
par une roue. Le second a pour attribut une massue si grande, si lourde qu’il
faut la déplacer sur des roues. Le chaudron, élément important dans la mytholo‐
gie celtique, matérialisé par le chaudron de Gundestrup en archéologie, lui per‐
met d’assouvir la faim de chacun grâce à son contenu inépuisable. Il est aussi le
dieu tutélaire des musiciens, puisqu’outre la roue et le chaudron il possède une
harpe magique. Mentionnons aussi au sujet du Jupiter celtique qu’un de ses as‐
pects originaux est celui de Cernunnos, le dieu à ramure de cerf, portant le
torque au cou accompagné d’animaux qu’il semble dominer.
◆ Ogmios gaulois est assimilé par Jules César à Mars, le conducteur des
âmes. Lucien de Samosate (120-180) le rapproche d’Héraklès, mais un Hérak‐
lès bien différent de celui des Grecs : « c’est un vieillard très avancé, dont le de‐
vant de la tête est chauve ; les cheveux qui lui restent sont tout à fait blancs ; la
peau est rugueuse, brûlée jusqu’à être tannée comme celle des vieux marins, on
pourrait le prendre pour un Charon ou Japhet des demeures souterraines du Tar‐
tare pour tout enfin plutôt qu’Hercule »3. Il porte pourtant peau de lion, masse,
arc carquois. Des chaînes d’or fixées à ses oreilles retiennent une multitude
d’hommes. Il est rapproché d’Ogma, dieu irlandais de l’éloquence et inventeur
de l’ogham, premier système d’écriture utilisé en Irlande. L’écriture oghamique
est composée de vingt lettres, elle est en usage dans les îles Britanniques et se‐
rait apparue aux alentours du IIIe siècle apr. J.-C., composée à partir de l’alpha‐
bet latin. Ses traces ont été recueillies sur des vestiges d’os, de bois, mais aussi
sur des pierres levées. Son utilisation est réservée aux druides qui privilégient
néanmoins la tradition orale. Les vingt signes qui composent l’alphabet sont for‐
més de un à cinq traits qui peuvent être droits ou obliques, disposés de part et
d’autre d’une ligne médiane. Ils se lisent de bas en haut. En fait les Celtes
adaptent l’alphabet en usage lors de leur migration : le celtibère en Espagne, le
lépontien ou alphabet de Lugano, dans le nord de l’Italie. En Gaule, ils utilisent
l’alphabet grec jusqu’à ce que les Romains, lors de leur conquête, imposent le
leur. Ogma est l’un des fils de Dagda décrit comme « le seigneur du savoir ». Il
est chargé aussi de convoyer les âmes vers un autre monde.
◆ Belenos, à l’origine, ne faisait pas partie du panthéon celte, il lui est trans‐
mis par l’intermédiaire des Étrusques. Sous le règne de l’empereur Auguste, il
devient un véritable dieu du soleil. Les inscriptions le rattachent à Apollon, dieu
qui lui est comparable. Son nom signifie « lumineux, resplendissant ». Ses fonc‐
tions concernent la médecine et les arts. Il est honoré lors de la fête de Beltaine
ou « feu de Bel ». Celle-ci marque, le 1er mai, la fin des mois de grisaille aux‐
quels succèdent ceux pleins de lumière. Belenos, compte tenu des inscriptions
retrouvées en un grand nombre de lieux divers, reçoit un culte dans l’ensemble
du monde celtique. En Irlande, ses fonctions sont remplies par Dianceht qui
rend la vie aux Tuatha De Danann, morts au combat, en les plongeant dans la
Fontaine de Santé, récit relaté par le Cath Maighe Tuireadh.
◆ Brigit, ou Brigantia, est mentionnée par César dans les Commentaires sur
la Guerre des Gaules comme la déesse de l’artisanat et des métiers. Minerve lui
est souvent comparée, car elles présentent des attributs communs, toutes deux
protègent poètes et médecins, président au travail de la forge. Dans l’Irlande cel‐
tique, elle est la fille de Dagda, déesse de la fertilité, elle assiste les femmes en
couches. Sa fête, l’Imbolc, est célébrée le 1er février, moment où les brebis al‐
laitent. Elle n’apparaît guère dans les textes mythologiques, car elle est assimilée
à sainte Brigitte patronne de l’Irlande.
Les druides
Notes
1. L’art du nuraghe, dont le nom provient des tours forteresses de pierre qui caractérisent la période du
bronze, repose sur quelque quatre cents statuettes et figurines de bronze. Datées d’entre le VIIIe et le
VIe siècle d’avant notre ère, celles-ci représentent des divinités et des déesses. Ce sont souvent des guerriers
armés, coiffés de casques, parfois des déesses tenant un enfant dans leurs bras ou des animaux figurés en
ronde-bosse, taureau, bélier, cerf, mouton. Des barques funéraires ou nefs de bronze comptent aussi parmi
les témoins artistiques de cette plastique paléosarde.
2. Le murus gallicus, décrit par César dans La Guerre des Gaules (VII, 23), est le type de rempart le
plus courant. Composé d’un poutrage horizontal, les rangs perpendiculaires et parallèles au parement s’al‐
ternent successivement. Le parement est formé de grosses pierres, encastrées dans ces intervalles. Au-des‐
sus s’élève un second rang semblable avec un intervalle de deux pieds entre les poutres, afin qu’elles ne
touchent pas celles du rang inférieur. La pierre permet de lutter contre le feu, les poutres contre les heurts
des béliers.
3. Ch.-J. Guyonwarc’h, Magie, médecine et divination chez les Celtes, Paris, Payot, 1997, p. 149.
CHAPITRE V
1. La Chine
Les preuves de l’existence d’un homme très ancien se sont limitées pendant
longtemps à quelques pays et continents. Les découvertes, parfois fortuites, la
volonté de mieux connaître son histoire, ses origines ont permis de démontrer
sa présence aujourd’hui un peu partout dans le monde. Ainsi la Chine fut long‐
temps limitée au célèbre Sinanthropus, « l’homme de Pékin », découvert en
1929 à Zhoukoudian, et à ses mythes qui situent l’origine de l’homme avec P’an-
kou, l’homme primordial. Depuis 1998, l’Académie des sciences chinoise a lan‐
cé un programme de recherches pour les périodes les plus anciennes de la Pré‐
histoire et a pu ainsi reposer la question des plus anciens hominidés. Le ramapi‐
thèque de Shihuba, près de Kunming dans le Yunnan, avec ses huit millions
d’années, reste l’un des premiers maillons de cette chaîne. L’homme de Yuan‐
mou et celui de Lantian, dans le Shaanxi, semblent plus anciens que l’homme de
Pékin. Le premier aurait 1,7 million d’années, le second serait vieux de six cent
mille ans. Les cultures néolithiques, celles de Yangshao dans la région du
Huang He, en Chine du Nord, et de Cishan, découverte en 1976, ont fourni res‐
pectivement les datations de – 5150 à – 2690 pour la première, – 6000 pour la
seconde, faisant de leurs céramiques parmi les plus anciennes au monde. La
culture d’Erlitou, dans le Henan, qui se situe entre la fin du Néolithique et les
débuts de l’âge du bronze, vers 2100-1600 avant J.-C., révèle l’existence de
bâtiments, de constructions importantes avec des caractéristiques qui perdurent
dans les siècles suivants : forme rectangulaire, orientation selon les points cardi‐
naux, quadrillage orthogonal des voies. En 1988, Erlitou est déclaré patrimoine
culturel de première importance.
2. Le Japon et la Corée
Le Japon est rentré dans la Préhistoire lorsqu’en 1949 on découvre à Iwajuku,
département de Gumma, un outillage lithique dans une couche de lœss, datée
d’entre – 50 000 et – 40 000 ans, ce qui démontre bien l’existence d’un Paléoli‐
thique. En effet, il y a un million d’années, les îles actuelles de Sakhaline (russe
aujourd’hui), Hokkaidō, Honshū et Kyūshū forment un arc continental et sont
rattachées les unes aux autres. Les Ryūkyū au sud, les Kouriles au nord sont re‐
liées au continent d’un seul tenant, tandis que mer de Chine orientale, mer du
Japon et mer d’Okhotsk forment des lacs intérieurs. La configuration actuelle de
l’archipel est un phénomène très récent, daté d’environ – 20 000 ans1. Plus de
trois mille sites ont été fouillés mais seulement une trentaine apportent la preuve
d’un peuplement au-delà de 30 000 ans avant notre ère. Le Néolithique ja‐
ponais est original à plus d’un titre. On n’assiste pas à une révolution agricole
qui irait de pair avec la sédentarisation, phénomène semblable à ce qui se pro‐
duit un peu partout dans le monde. Chasse, cueillette, pêche semblent avoir été
suffisantes pour nourrir ces populations. Cette économie semi-sédentaire
connaît, dès – 8000, la céramique. Jōmon est la traduction littérale des mots
anglais de cord mark : on note pour la première fois dans un rapport, en 1877,
la particularité d’une céramique imprimée au moyen de cordelettes torsadées, la
période Jōmon s’étend du IXe millénaire au IIIe siècle avant J.-C.
En Corée, la vision traditionnelle du Néolithique, contrairement au Paléoli‐
thique très ancien, est revue au regard de découvertes récentes. La présence des
premiers hommes y est certes attestée depuis un demi-million d’années environ,
sur le site de Tokch’on et à proximité de Pyongyang, mais les industries du Pa‐
léolithique ancien et moyen y sont mal définies. Vers – 30 000 ans, les indica‐
tions se font moins rares, plus précises : on détecte une utilisation abondante de
l’obsidienne, de grattoirs, burins, et la présence d’habitats en grotte ou de plein
air. Paradoxalement la période de 10 000 à 6 000 ans avant J.-C. est la moins
connue, bien que l’existence de sites montre que les hommes n’avaient pas com‐
plètement quitté la péninsule. La plus ancienne poterie est apparue entre les
IXe et VIIIe millénaires, sur le site de Gosan-ri, sur l’île de Jeju. Mais, là en‐
core, il s’agit d’un outillage proche de celui du Mésolithique et on ne trouve au‐
cune preuve de domestication animale ou végétale. La question de l’origine de
ces populations, autrefois considérées comme venues de Chine, est remise en
cause. Pendant longtemps, pour toute réponse à cette question, il fallait se tour‐
ner vers le mythe. En 2333 avant notre ère, Hwanung, le fils du dieu du ciel,
descendit sur les monts Taebaek (aujourd’hui Baekdu). Il fit la rencontre d’une
ourse et d’une tigresse qui lui demandèrent de leur donner une forme humaine.
À l’issue d’une épreuve de cent jours, la tigresse ayant rompu le jeûn imposé,
l’ourse transformée en femme donna naissance, après avoir épousé Hwanung,
au premier Coréen, Tangun. Paradoxalement, la présence de l’ourse, dans ce
mythe, rappelle les origines sibériennes de ces premières populations et
confirme les résultats archéologiques de poteries similaires à celles de Sibérie,
retrouvées dans les tombes.
3. L’Inde
L’Inde a été peuplée dès les premiers temps. Les vestiges paléolithiques dans
tout le sous-continent indien sont là pour l’attester, mais le manque de données
contextuelles rend souvent difficiles la compréhension et la reconstitution des
faits préhistoriques. Le Paléolithique ancien est reconnu dans le nord-ouest du
pays dans la vallée de Soan (Pakistan actuel). Les découvertes faites en 2001
dans le golfe de Khambhat, au large des côtes de la province du Gujarat, au
nord-ouest de l’Inde, ont révélé deux vastes cités englouties, submergées il y a
entre huit mille et sept mille ans au moment de l’élévation des niveaux marins, à
la fin de l’ère glaciaire. Deux mille objets ont été remontés et datés aux alen‐
tours du VIIIe et du VIIe millénaire avant notre ère. On y a retrouvé les restes
d’une digue de plus de 600 m de long, traversant le cours de l’un des fleuves
existant alors. La ville submergée est au moins cent cinquante fois plus vaste
que les grandes colonies proche-orientales, tel le village de Çatal Hüyük pour
la même date. Ces villes appartiendraient à la civilisation d’Harappa, connue
pour s’être développée entre 3000 et 5000 ans avant J.-C. Mais plus extraordi‐
naire encore est la découverte de traces d’écriture gravée en mode circulaire et
inconnue. Vers la seconde moitié du IIIe millénaire, une civilisation urbaine
comparable à celle de la Mésopotamie2 et de l’Égypte se développe. L’urba‐
nisme y est remarquablement coordonné, une écriture non déchiffrée présente
quelque quatre cents pictogrammes sur des sceaux3, des amulettes.
4. Le continent américain
Pour expliquer le peuplement du continent américain, on se fie davantage
aux données climatologiques qu’à celles fournies par l’anthropologie, moins pré‐
sentes. Le débat est encore en cours pour savoir par quels chemins, par quels
moyens, les premiers hommes parvinrent sur le continent. Les études apportées
par la génétique devraient permettre de se faire une idée plus exacte de ces pre‐
mières colonisations et des premiers colonisateurs. Plusieurs scénarios sont au‐
jourd’hui avancés sur ce peuplement. L’hypothèse classique concerne une pos‐
sible immigration venue d’Asie, via le détroit de Béring entre – 13 000 et –
11 000 ans. Toutefois, les restes de l’homme de Kennewick, retrouvés près du
fleuve Columbia, montrent des caractéristiques caucasoïdes, soit européennes.
Pendant longtemps le site de Clovis aux États-Unis sert de modèle, car des ou‐
tils, datant de – 13 500 à – 11 000 ans, y sont mis au jour en 1932, lors de cam‐
pagnes de fouilles. Mais la découverte du site de Lewisville au Texas avec des
foyers associés à des charbons de bois et des os brûlés d’espèces disparues, daté
de – 38 000 ans jusqu’à – 12 000 ans, remet en cause cette primauté. Les sites
dits « préclovis » abondent aussi en Amérique du Sud : celui de Pikimachay
dans les Andes péruviennes (– 22 000 ans), la caverne de Pendejo (– 55 000 à –
33 000 ans) et la grotte de Sandia (30 000-25 000 av. J.-C.) au Nouveau-
Mexique. L’Amérique du Sud, dont le peuplement semblait plus tardif, apporte
des preuves de cultures très anciennes. Les premiers résultats d’analyse ADN
montrent que les marqueurs génétiques des Indiens actuels sont comparables,
non à ceux des habitants de Sibérie arctique, mais d’Europe et d’Asie centrale. Il
semblerait donc qu’il faille situer le berceau des peuples indiens d’Amérique vers
les régions du lac Baïkal. Plutôt que de parler d’une seule migration, il faut en
envisager plusieurs, peut-être même par voie maritime.
Notes
1. Jean-Paul Demoule et Pierre-François Souyri (dir.), Archéologie et patrimoine au Japon, Paris, Mai‐
son des sciences de l’homme, 2008.
2. Aujourd’hui plus de mille sites ont été découverts dont cent quarante se trouvent sur les rives du cours
d’eau saisonnier Ghaggar-Hakra, qui arrosait alors la principale zone de production de la civilisation de
l’Indus.
3. Les premiers sceaux d’Harappa apparaissent dans une publication faite en 1875, sous la forme de
dessins, par Alexander Cunningham (1814-1893).
DEUXIÈME PARTIE
L’ANTIQUITÉ
A. LES PREMIÈRES GRANDES CIVILISATIONS ANTIQUES
DU PROCHE ET DU MOYEN-ORIENT
Notes
1. Samuel Noah Kramer, L’Histoire commence à Sumer, Paris ; Flammarion, « Champs histoire », 2009.
CHAPITRE PREMIER
La Mésopotamie
L’invention de l’écriture à Sumer fait entrer de plein pied les hommes dans
l’histoire. Les plus anciennes formes d’écriture se composent d’idéogrammes :
l’écriture représente de manière figurative exclusivement objets ou êtres vivants.
Les premiers scribes gravent ces représentations dans l’argile molle à l’aide de
poinçons. Lorsque le premier trait du dessin est ébauché, le poinçon forme dans
l’argile meuble un petit coin d’où le nom futur d’« écriture cunéiforme », écri‐
ture en forme de coins. Les premiers documents écrits naissent aux alentours de
3400-3300 avant J.-C. Il s’agit de documents administratifs, souvent comp‐
tables, établissant des listes. Les progrès de l’écriture aidant, les annales royales
et d’autres types de texte se développent, les tablettes augmentent de taille et
adoptent une forme rectangulaire. Le texte achevé, la tablette est cuite, ce qui
permet sa conservation et explique le grand nombre d’archives trouvées sur les
sites d’Uruk, Suse, Kish, Ur, soit plus de cinq mille cinq cents tablettes. La pé‐
riode d’Uruk, outre l’écriture, développe un système numérique, qui lui est
peut-être même antécédent. Les traces en sont attestées sous la forme de calculi
(calculus au singulier, « caillou » en latin). Ce sont des billes, sphères, bâtonnets,
cônes perforés, dont la taille détermine la valeur. Les Sumériens utilisent la nu‐
mérotation de base 60, ou sexagésimale. Dans ce système, le petit cône vaut 1,
la bille 10, le grand cône 60, le grand cône perforé 3 600 et la sphère perforée
36 000. Les sceaux-cylindres naissent avec l’écriture. Ce sont de petits cy‐
lindres, parfois montés en bague, gravés de représentations, de divinités et de
signes cunéiformes. On les roule sur l’argile fraîche pour signer un document,
marquer une amphore en indiquant son contenu, l’exactitude des comptes d’un
temple, etc. Ils jouent donc le rôle d’une marque authentifiant des transactions
économiques, des documents officiels, des actes privés de donation, de partage,
de succession. Ils apparaissent à Uruk, vers – 3200, et se répandent rapidement.
Les motifs gravés sont variés, du moins au début (scènes religieuses, vie quoti‐
dienne), puis le style évolue vers une forme plus épurée, une frise géométrique
qui peut être reproduite à l’infini.
LA NAISSANCE DE LA ROYAUTÉ
Outre le palais royal de Kish, celui de Mari, connu sous le nom de palais de
Zimri-Lim, s’impose par ses dimensions. D’une superficie supérieure à 2,5 ha,
long de 200 m, large de 120, il compte presque trois cents pièces. Certaines sont
parfaitement identifiées, comme la salle du trône, longue de 25 m, large de
11,5 m et haute de 12 m, ou encore les écuries, la Maison du roi, la Maison des
femmes, les réserves. Les archives de Mari ont en outre fourni près de vingt
mille tablettes en akkadien, renseignant autant sur les événements politiques
que sur la vie quotidienne au palais. De nombreuses statues ont été découvertes
à Mari, dont celle d’Iddin-El, prince gouverneur de Mari, conservée au musée
du Louvre, ou celle de la Grande Chanteuse Ur-Nanshé ou Ur-Nina, présentée
au musée de Damas. Pour les temples, le modèle le plus remarquable est celui
du « temple ovale », nommé ainsi car une enceinte de cette forme délimite son
périmètre dans la ville. Le temple lui-même, construit au centre, repose sur une
terrasse. Les tombes royales d’Ur sont découvertes par Charles Leonard
Woolley (1880-1960) en 1927, sur le site de l’antique cité-État, qu’il fouille
entre 1919 et 1934. Plus de mille huit cents tombes sont mises au jour, plus ou
moins riches selon le rang du défunt. D’extraordinaires tombes royales, seize au
total, sont fouillées, les plus remarquables étant celles des rois Meskalamdug et
Akalamdug, et de la reine Pû-abi. Énumérer l’ensemble de ce qui a été retrouvé
à l’intérieur de ces fosses mortuaires permet de prendre conscience de la ri‐
chesse et de la variété de leur contenu : lits, instruments de musique, armes,
coffres, vaisselle, bijoux et parures somptueuses. Les corps des grands person‐
nages sont entourés de chars avec ânes, bœufs. On a également découvert, dans
ces tombes royales, un panneau de bois représentant la Guerre et la Paix sur
chacune des faces. Il s’agit d’un diptyque composé de panneaux séparés, l’un
nommé « Guerre » et l’autre « Paix ». Le décor est fait de coquillages, nacres,
découpes de calcaire rouge et lapis-lazuli. Un roi et des soldats conduisant des
chariots figurent, sur le panneau « Guerre », une scène d’armée en campagne.
Faute de mieux, on lui a donné le nom d’Étendard d’Ur, ce qui suppose sa fonc‐
tion militaire.
La stèle de Naram-Sin
C’est le souverain qui octroie les différents pouvoirs. Son palais, sa résidence
symbolisent le centre administratif suprême. Il détient le pouvoir en vertu d’at‐
tributs personnels et d’un mandat reçu des dieux. Sa fonction est de constituer
un lien entre le divin et l’humain. Le roi mésopotamien est le représentant de la
divinité, et son pouvoir s’étend donc à tous les domaines de la vie collective.
L’appareil administratif se compose de dignitaires, de notables locaux et d’un
immense personnel. Son recrutement se fait dans l’ensemble des couches so‐
ciales de la population. Les esclaves ne jouent pas un rôle important dans ce
type de système économique, en général captifs de guerre, ils n’apparaissent que
rarement dans les listes du personnel. On doit les distinguer des serviteurs dont
la vie est liée à celle de leur maître. Les droits de la femme sont protégés juridi‐
quement. Elle dispose de ses biens propres, qu’elle administre librement, occupe
de nombreuses professions et parfois même assume d’importantes responsabili‐
tés. Dans le mariage, elle est subordonnée à l’autorité de son mari. Après la mort
de celui-ci, elle peut gérer et défendre les intérêts de ses héritiers. Le code fixe
les détails de succession, mais aussi le cas où la femme serait répudiée injuste‐
ment.
C’est par l’architecture que cette période est marquante. Les premières
grandes ziggourats, temples à degrés, sont édifiées à Ur par Ur-Nammu et Shul‐
gi. Elles gagnent ensuite les principaux centres religieux : Nippur, Eridu, Uruk.
Le principe consiste à édifier des degrés les uns sur les autres à partir de briques
cuites posées sur un mortier d’asphalte. La solidité assurée à l’ensemble explique
la survie non seulement des fondations, mais aussi des parties de la superstruc‐
ture. La ziggourat d’Ur est un temple à trois degrés, trois cubes massifs se su‐
perposant, pour une hauteur dépassant les 21 m et une base de 62 m sur 43 m.
Elle fut restaurée par Nabonide, dernier souverain de l’Empire néobabylonien
aux environs de 560 avant notre ère.
LA LITTÉRATURE BABYLONIENNE
C’est aux premiers temps de la dynastie amorrite que sont composées les La‐
mentations sur la destruction d’Ur, poème déplorant la fin tragique de la resplen‐
dissante cité, vers 2004 avant J.-C. C’est en des termes poignants que cette der‐
nière est relatée :
Ô, père Nanna, cette ville s’est changée en ruines…
Ses habitants, au lieu de tessons, ont rempli ses flancs ;
Ses murs ont été rompus, le peuple gémit.
Sous ses portes majestueuses où l’on se promenait d’ordinaire, gisaient les cadavres ;
Dans ses avenues où avaient lieu les fêtes du pays, gisaient des monceaux de corps.
Ur – ses forts et ses faibles sont morts de faim :
Les pères et les mères restés dans leur demeure ont été vaincus par les flammes ;
Les enfants couchés sur les genoux de leur mère, comme des poissons, les eaux les ont emportés
Dans la cité, l’épouse était abandonnée, l’enfant était abandonné, les biens étaient dispersés.
Ô, Nanna, Ur a été détruite, ses habitants ont été éparpillés4 !
C’est également durant la Ire dynastie de Babylone que commencent à s’éla‐
borer deux récits fondamentaux de la mythologie mésopotamienne : celui de la
création du monde, la geste cosmogonique de l’Enuma Elish (« Lorsqu’en
haut »), et le tout premier récit du Déluge, plus tard repris dans l’Ancien Testa‐
ment, la vie mouvementée d’Um-Napishtim, le « Très Sage ».
Notes
1. Vladimir Grigorieff, Les Mythologies du monde entier, Alleur, Marabout, 1987, p. 48.
2. Abed Azrié, L’Épopée de Gilgamesh, Paris, Berg international, 1991, p. 176.
3. Florence Braunstein, « L’Épopée de Gilgamesh », in Encyclopædia Universalis.
4. Samuel Noah Kramer, « Lamentation over the Destruction of Ur », in Assyriological Studies, no 12,
Chicago, 1940, p. 39.
CHAPITRE II
L’Anatolie
L’Anatolie, l’Orient des Grecs, également nommée Asie Mineure, est une pé‐
ninsule formant l’essentiel de l’actuelle Turquie d’Asie, à l’est. Elle est délimitée
par la mer Noire au nord, la mer Méditerranée au sud, la mer Égée à l’ouest,
l’Euphrate et la chaîne du Taurus à l’est. C’est dans ce cadre géographique que
se succèdent deux grandes civilisations, celle des Hattis (apogée : v. 2400-
v. 1900 av. J.-C.), fusionnant avec de nouveaux venus, les Hittites, qui fondent
un vaste empire au Proche-Orient avant de succomber aux attaques des Peuples
de la mer aux alentours de – 1900 et – 1200. Plus au sud, toujours en Asie Mi‐
neure, s’établissent les Phéniciens, vers 2000 avant notre ère.
L’art hittite est le fruit de la rencontre entre celui des Hattis et les apports
indo-européens de l’âge du bronze. Plus de trente mille tablettes, rédigées en
cunéiforme, dans ses langues diverses (hittite, akkadien, hourrite), nous ren‐
seignent sur la diplomatie, la religion, le droit. À défaut de statuaire monumen‐
tale, on trouve de nombreuses effigies humaines ou animales, idoles, en plomb,
argent, ivoire, des sceaux en or. Le premier Empire hittite ne modifie pas ces
fondements. Tout change avec l’apogée de l’Empire hittite, la naissance de l’ar‐
chitecture monumentale. Ainsi, à Hattusa, le Grand Temple occupe une superfi‐
cie de 160 m de long sur 135 m de large. Il est voué à Tarhunt, ou Teshub, le
dieu de l’Orage. À l’intérieur de cette vaste enceinte, le temple a la forme d’un
rectangle, avec une cour intérieure. Après une salle hypostyle, le cœur du sanc‐
tuaire est composé de neuf chapelles. La plus grande, consacrée à Tarhunt,
abrite sa statue. L’une des particularités de ce temple est l’existence de fenêtres à
balustrade sur le mur extérieur du temple, rompant avec le système de construc‐
tion mésopotamien de murs aveugles. Ne connaissant pas les colonnes, les Hit‐
tites assurent le support des toits par des piliers carrés. À environ 2 km au nord-
est d’Hattusa se trouve le site de Yazilikaya, un centre cultuel rupestre à ciel ou‐
vert, où abondent les représentations en bas-relief. La fonction exacte du sanc‐
tuaire est encore débattue, entre lieu de culte funéraire, mémorial associé au
grand temple d’Hattusa, ou volonté du roi d’ordonner le panthéon hittite en le
rapprochant de celui des Hourrites, prolongement dans la pierre de sa réforme
liturgique.
La religion hittite reflète la capacité des Hittites à conserver les cultes qu’ils
empruntent à tous les peuples auxquels ils s’agrègent. Cela explique l’existence
d’un panthéon surnuméraire que les Hittites eux-mêmes, bien en peine de le
connaître en totalité, dénomment les « mille dieux du Hatti ». Outre l’influence
du Hatti, celle des divinités hourrites s’inscrit dans la religion hittite, notamment
sous l’influence de la forte personnalité de la reine hourrite Puduhepa, épouse
de Hattusil III (v. 1265-v. 1238 av. J.-C.). Originaire du royaume de Kizzuwat‐
na, elle est prêtresse de l’une des formes de la déesse Ishtar. Cosignant les actes
royaux avec son époux, elle joue un rôle fondamental en matière politique mais
aussi religieuse, favorisant le syncrétisme entre la Déesse-soleil d’Arinna, déjà la
Wurushemu hattie et la déesse hourrite Hebat. La plupart des divinités sont les
incarnations des forces naturelles. Leur place dans le panthéon n’est pas fixe,
leurs relations sont évolutives. Les mythes de Sumer et d’Agadé (Akkad), l’épo‐
pée de Gilgamesh ou la hiérogamie dont naît Sargon sont adoptés par les Hit‐
tites.
Les principales divinités hittites sont le dieu de l’Orage, Tarhunt en hittite,
Teshub en hourrite, muni de l’éclair, symbolisé par le taureau, adoré à Hattusa ;
son épouse, la Déesse-soleil d’Arinna ; Wurunkatte, dieu de la guerre ; Telibinu,
dieu de la végétation et de la fertilité ; Khalmasuit, la « déesse-trône ». Le dieu
de l’Orage est assimilé au dieu hourrite Teshub, tout comme lui maître des élé‐
ments en action dans l’atmosphère, pluie, vent, foudre, et la Déesse-soleil l’est à
sa parèdre, Hebat.
L’ART HOURRITE
La religion hourrite repose sur le fonds anatolien. Les dieux principaux sont
Teshub, dieu de l’Orage, sa parèdre Hebat et leur fils Sharruma. S’y ajoutent
Shaushka, déesse de l’Amour, apparentée à Ishtar ; Shimegi, dieu du Soleil ;
Ishara, dieu de l’Écriture ; Kushukh, le dieu Lune ; Hepit, dieu Ciel ; Kumarbi,
dieu Nature. Le principal mythe hourrite qui nous soit en partie parvenu est le
Cycle de Kumarbi, ou Chant de la Royauté du Ciel, du nom du premier chant. Il
est composé de cinq chants. Seuls les fragments des deux premiers permettent
de retracer un mythe que l’on retrouve, adapté au monde grec, dans la Théogo‐
nie d’Hésiode. Le plus ancien texte religieux retrouvé en langue hourrite est le
dépôt de fondation connu sous le nom de Lion d’Urkish, conservé au musée du
Louvre. La pièce, datée du XXIe siècle avant J.-C., provient probablement de Sy‐
rie du Nord-Est, se compose de deux parties : un lion rugissant, en cuivre, tient,
sous ses pattes avant, une tablette également en cuivre, sa queue en forme de
clou maintient sous la tablette de cuivre une seconde tablette de pierre blanche.
Toutes deux portent un même texte de malédiction, où Tishatal, souverain d’Ur‐
kish, menace de la colère des dieux quiconque détruirait le temple qu’il édifie
pour le dieu Nergal.
CHAPITRE III
Les Phéniciens
Les Phéniciens, les « Rouges » selon les Grecs qui les nomment ainsi en rai‐
son des tissus teints de pourpre qu’ils exportent, occupent, au IVe millénaire
avant notre ère, l’actuel Liban, pour l’essentiel, auquel il faut adjoindre des ter‐
ritoires aujourd’hui en Syrie, en Palestine et en Israël. Leur langue, une forme
de cananéen, s’apparente à l’hébreu, il n’existe pas de véritable État phénicien
unifié sous la direction d’un souverain, mais plutôt un groupe de cités, le plus
souvent sur la côte, et leur arrière-pays peu étendu. Chaque cité est gouvernée
par un prince assisté d’un conseil de notables. Selon les époques considérées,
l’une ou l’autre exerce une certaine prééminence. Les principales sont : Tyr, Si‐
don, Byblos, Bérytos au Liban ; Arvad, Ougarit, en Syrie. À l’étroit entre les
chaînes de montagnes et la mer, les Phéniciens, excellents navigateurs, vont fon‐
der, à partir de Tyr, un empire maritime véritable. Flotte de guerre et flotte de
commerce évoluent entre la métropole et les colonies de Méditerranée occiden‐
tale : Malte, Sicile, Sardaigne, fondations en péninsule Ibérique (les futures Lis‐
bonne, Cadix, Carthagène, Malaga) ou sur les côtes d’Afrique du Nord (les fu‐
tures Tripoli, Carthage, Tunis, Alger, Mogador). C’est par les cités phéniciennes
ou les comptoirs que transitent non seulement les denrées alimentaires (huile,
vin, blé), mais aussi les métaux et pierres rares, les parfums, le bois de cèdre.
Les capacités exceptionnelles de marins des Phéniciens, vantées déjà dans l’An‐
tiquité, sont attestées également par les périples, navigations lointaines de dé‐
couverte. Les principaux sont entrepris par les descendants des Phéniciens, les
Carthaginois, aux alentours de 450-400 avant J.-C. par Hannon ou Himilcon.
1. L’alphabet phénicien
L’alphabet phénicien est un alphabet qui ne note que les consonnes, appelé al‐
phabet consonantique ou abjad. C’est le cas de l’arabe ou de l’hébreu. Les pre‐
mières traces de cette écriture alphabétique se trouvent sur le sarcophage du roi
Ahiram de Byblos, daté du XIIe siècle avant J.-C., œuvre classée sur la liste
« Mémoire du monde » de l’Unesco en 2005. L’alphabet phénicien, probable‐
ment issu d’un alphabet linéaire, ou protocananéen, de vingt-trois signes dérivés
des hiéroglyphes égyptiens, donne naissance à l’alphabet grec, qui ajoute les
voyelles, et à l’araméen. Nombre d’alphabets lui doivent par la suite leur exis‐
tence, arabe et hébreu à partir de l’araméen, romain par transmission du modèle
étrusque.
Notes
1. Pline l’Ancien, Histoire naturelle, XXXVI, 5.
CHAPITRE IV
L’Assyrie
L’art assyrien de la période paléo-assyrienne (IIe millénaire av. J.-C.) est lar‐
gement éclipsé par celui de la période néo-assyrienne, entre 911 et 609 av. J.-C.
Héritier de son devancier mésopotamien, il est toutefois loisible d’en dégager
quelques traits généraux, qui perdurent durant toute l’histoire de l’Assyrie. C’est
un art officiel, destiné à glorifier le dieu Assur et donc son vicaire sur terre, le
roi. Palais et temples ont pour fonction de montrer aux sujets du royaume tout
comme aux étrangers la puissance divine et royale. La forme choisie est le bas-
relief, représenté sur des orthostates, plaques d’albâtre ou de calcaire travaillées
en bas-relief, d’environ 1 m de long sur 2 à 2,50 m de large. Les sujets illustrent
la gloire du roi, bâtisseur ou général vainqueur.
L’architecture assyrienne
2. La religion assyrienne
La religion assyrienne ne présente pas de grande originalité, puisqu’elle s’ins‐
pire du modèle mésopotamien, les dieux de Babylone sont les siens. Deux
grands dieux dominent le panthéon, Adad, dieu de l’Orage, le Teshub des Hour‐
rites, ou le Hadad des Araméens, et surtout le dieu national et roi des dieux, As‐
sur. Il est le véritable maître de la ville et du royaume éponyme, en assurant son
triomphe et sa prospérité. Pour gouverner, il délègue ses fonctions au roi, son
représentant, mais ce dernier n’agit pas de son propre chef, il exécute les ordres
du dieu suprême, se fait l’interprète de ses volontés. Le culte d’Assur prend
place dans son grand temple de la capitale, l’Esharra, la « Maison du tout ». Il
est édifié au nord-est, sur un éperon rocheux au-dessus du cours du Tigre. Il se
compose d’une cour en forme de trapèze, ceinte d’un mur, qui donne accès à la
chapelle du dieu. Son extension est de 110 m de long sur 60 m de large. S’y
ajoute une ziggourat, puis au VIIe siècle avant J.-C., une seconde cour et une
rampe processionnelle bâties par le roi Sennachérib (704-681 av. J.-C.). Assur
est le « Dieu du tout », créateur du monde, des Enfers, de l’humanité. Sa parèdre
est la déesse Ishtar. Il est représenté armé d’un arc en position de tir, dans un
disque ailé. Le nouveau roi est couronné dans son temple et c’est à lui qu’il fait
le rapport de ses campagnes victorieuses.
Le trésor de Ziwiyé a été découvert, en 1947, dans une région isolée de l’ac‐
tuel Kurdistan iranien. Il se compose de trois cent quarante et un objets d’or,
d’argent, d’ivoire comprenant diadèmes, torques, fourreaux de poignard, brace‐
lets, ceintures, des têtes de lion et d’oiseau en ronde-bosse, un vase en or, trou‐
vés dans une cuve en bronze. Les styles d’orfèvrerie y sont divers, mêlant les in‐
fluences assyrienne, syrienne et scythe. La pièce la plus importante en est un
pectoral d’or, en forme de demi-lune, décoré de scènes mythologiques. Un arbre
sacré, au centre, est flanqué de deux bouquetins et de deux taureaux ailés. De
part et d’autre, des bandeaux sont ornés de griffons, hommes-taureaux ailés,
sphinx. La date proposée pour l’ensemble se fonde sur la cuve de bronze, un
cercueil dont la décoration montre un tribut apporté à un souverain scythe, soit
aux environs de 645 à 615 avant notre ère1.
Notes
1. Tadeusz Sulimirski, « The Background of the Ziwiye Find and Its Significance in the Development
of Scythian Art », Bulletin of the Institute of Archaeology (London), no 15, 1978, p. 7-33.
CHAPITRE V
La Perse
Séleucos Ier Nicator (v. 358-280 av. J.-C.), « le Vainqueur », est l’un des
Diadoques, ou successeurs d’Alexandre le Grand. Satrape de Babylonie, il se
proclame roi de Syrie (305 av. J.-C.) et fonde la dynastie des Séleucides. Il bâtit
un empire comprenant la Mésopotamie, la Syrie et la Perse. Mais, au cours du
IIe siècle avant J.-C., les satrapies orientales, dont la Perse, passent sous le
contrôle des Parthes, avec tous les territoires à l’est de la Syrie.
Les Parthes occupent le nord-est du plateau iranien. La Parthie est l’une des
satrapies de l’Empire achéménide. Après son effondrement, les Parthes entrent
en lutte contre les Séleucides et finissent par s’emparer de toute la partie orien‐
tale de leur empire, dont la Perse. En 115 avant J.-C. ils dominent la Bactriane,
au nord de l’actuel Afghanistan, la Mésopotamie et la Perse. Il faut attendre 224
de notre ère pour que le Sassanide Ardachêr Ier (224-221) renverse le dernier
roi parthe, Artaban V (216-224), et fonde une nouvelle dynastie perse, celle
des Sassanides (224-651).
Cyrus établit ses premières capitales à Ectabane, ancienne capitale des rois
mèdes, et à Pasargades. Le vestige le plus important est le tombeau de Cyrus,
élevé sur un soubassement à degrés, portant la chambre funéraire recouverte
d’un toit, plat à l’intérieur, à deux pentes à l’extérieur. Darius Ier choisit une nou‐
velle capitale, Persépolis. Pasargades conserve son rôle de centre religieux et de
lieu de couronnement des souverains achéménides.
La terrasse de Persépolis
La Suse achéménide
L’Avesta (Éloge) est une collection d’hymnes, ou gāthā, réunis pendant plu‐
sieurs siècles, entre le IIIe et le VIIe siècle après J.-C., formant ainsi le livre
saint du mazdéisme ou zoroastrisme. Il comprend plusieurs parties : le Yasna
(les sacrifices), dans lequel les gāthā forment la partie la plus sainte de l’en‐
semble, car ces hymnes sont attribués à Zoroastre lui-même ; le Visperad (hom‐
mage aux maîtres spirituels), prolongement du Yasna, avec lequel il est toujours
récité ; le Vendidad (la loi), moyens donnés aux fidèles pour obliger les démons
à se démasquer. Il s’agit d’un dialogue entre Zoroastre et le dieu suprême Ahura
Mazda. On y trouve à la fois les interdits, les prières pour éloigner les maladies,
mais aussi la création d’un monde dualiste, dû à un créateur bon et à un autre
mauvais, ou le Déluge. Les Yasht sont un ensemble de vingt et un hymnes
consacrés aux divinités, anges, idées divinisées. Un Yasht est un bienheureux,
honoré par la prière. Le Siroza (Trente jours) énumère et invoque les trente di‐
vinités qui président chacune à un jour du mois. Le Khodeh Avesta (Petit Aves‐
ta) regroupe des textes moins importants, une version plus populaire du texte
sacré, quand Yasna, Visperad et Vendidad renferment davantage des pièces li‐
turgiques plus appropriées aux besoins du clergé zoroastrien. L’Avesta a fait
l’objet de commentaires en perse moyen ou Pahlavi, regroupés dans les écrits
Zend (interprétation), réalisés entre le IIIe et le Xe siècle de notre ère. De nos
jours, l’Avesta demeure le livre saint des communautés parsies en Inde, guèbres
en Iran, qui perpétuent le culte zoroastrien. Ahura Mazda crée le monde et les
hommes pour qu’ils le soutiennent dans sa lutte contre le Mal, mais en les lais‐
sant libres de choisir leur camp. La création se fait en six étapes : Ciel, Eau,
Terre, Taureau, Plantes, premier Homme. Notre monde durera douze mille ans,
suivant quatre périodes de trois mille ans. Les trois premiers mondes finissent
par une catastrophe majeure, dont le Déluge. Le dernier s’achève par une parou‐
sie, le retour d’Ahura Mazda pour un règne éternel.
Notes
1. Hérodote, Histoires, I, 107-130.
CHAPITRE VI
L’Égypte
L’Égypte fascine dès l’Antiquité et prend place dans les ouvrages d’Hérodote,
ou les fragments de l’Histoire de l’Égypte de Manéthon, mais il faudra attendre
la contribution des savants qui accompagnent l’expédition de Bonaparte à la fin
du XVIIIe siècle pour en avoir une présentation exhaustive, et surtout le génie
précoce de Jean-François Champollion, avec la publication en 1822 de sa Lettre
à M. Dacier, expliquant son système de déchiffrement des hiéroglyphes. Long
ruban fertile de 1 200 km, la vallée du Nil ne représente qu’une petite bande
cultivable, de 1 ou 2 km de large. C’est sur cet espace réduit que la presque tota‐
lité de l’histoire égyptienne se déroule. Il faut nuancer ce schéma, quelque peu
réducteur, pour la période des premiers villages. Soumises à d’incessants chan‐
gements climatiques, la vallée du Nil et ses bordures désertiques n’ont offert
bien souvent que la possibilité d’habitats temporaires. C’est fréquemment le cas
des premiers villages dont le point commun est de ne nous avoir jamais préser‐
vé, ou peu s’en faut, de structures d’habitats : sites de Nabta Playa daté du
VIIIe millénaire, du Fayoum du VIe millénaire ou de Mérimdé du IVe millé‐
naire. Les périodes dites prédynastiques débutent avec le IVe millénaire avant
J.-C. et multiplient les communautés urbaines : Nagada, El-Amrah. En Basse-
Égypte (au Nord), à la différence de ce qui est constaté en Haute-Égypte (au
Sud), le monde funéraire est moins représenté, à en croire le peu d’offrandes re‐
trouvées ou la simplicité des tombes. La dernière période de Nagada, vers 3200
avant J.-C., connaît les premières ébauches d’écriture et la mise en place des
premiers royaumes.
L’art thinite est connu pour ses stèles, ses éléments de mobilier funéraire plus
que pour ses villes, palais et temples, dont il ne reste pratiquement rien, car les
bâtisseurs usent encore de briques de terre crue et d’éléments végétaux. La
pierre, réservée aux dieux et aux rois, ne commence à être vraiment utilisée qu’à
l’extrême fin de la IIe dynastie. Toutefois, les pièces retrouvées témoignent
d’une exceptionnelle qualité, comme la Palette de Narmer, la tête de massue du
roi, la Stèle du roi Serpent (ou du roi Djet), les statues de pierre du roi Khase‐
khemouy. La Palette de Narmer, une palette à fard votive, mise au jour en 1898
dans le temple d’Horus à Hiérakonpolis, à environ 100 km au nord d’Assouan,
est le plus ancien document où figurent les preuves des luttes qui ont présidé à
l’union des deux parties de l’Égypte, la Haute et la Basse. Elle atteste de l’exis‐
tence du premier roi à régner sur un ensemble unifié, Narmer. Celui-ci est re‐
présenté sur un côté avec la couronne blanche de Haute-Égypte, en forme de
mitre, sur l’autre, la rouge de Basse-Égypte, à la forme d’un mortier. Assem‐
blées, la blanche dans la rouge, elles forment la coiffure royale par excellence,
Pa-sekhemty, « Les deux puissantes », dont le nom déformé devient pschent.
C’est le regroupement du « Pays des roseaux » : Ta-shema, la Haute-Égypte, les
régions du centre et du sud, et Ta-mehu, « Pays du papyrus », la Basse-Égypte,
le delta du Nil. Nekhbet, la déesse vautour, protège la première, la déesse cobra
Ouadjet, la seconde.
L’art égyptien de l’Ancien Empire est celui d’une architecture funéraire mo‐
numentale : des complexes royaux mis en place autour des pyramides. La sta‐
tuaire, également monumentale, est complétée par un art parfaitement maîtrisé
du relief, un grand raffinement des objets composant le mobilier funéraire. Djé‐
ser, ou Djoser (v. 2665-v. 2645 av. J.-C.), est surtout connu pour son complexe
funéraire, comprenant la pyramide à degrés de Saqqara, édifiée sur les plans de
l’architecte Imhotep. Jusqu’à la IIIe dynastie, la forme la plus courante du
tombeau est le mastaba, « banc » ou « banquette » en arabe, en briques, édifié
au-dessus d’un puits comblé de gravats qui donne accès, après un couloir à
angle droit, à la chambre funéraire. Djéser rompt avec cette tradition. Sa pyra‐
mide est plutôt une superposition de mastabas, mais en pierre, de plus en plus
petits, posés les uns sur les autres. Autour de la sépulture royale, une enceinte à
redans, de 550 m de long sur 300 de large, haute de 10 m, abrite les bâtiments,
véritables ou factices, nécessaires à l’éternité de pharaon : le temple funéraire et
son serdab, pièce aveugle renfermant la statue de Djéser, de multiples chapelles.
L’architecture végétale est transposée dans la pierre, ce qui explique l’impor‐
tance des reprises sculptées, nattes roulées, colonnes papyriformes.
C’est au cours de l’Ancien Empire que naît un genre promu à un grand avenir
dans la littérature égyptienne, les Sagesses ou Enseignements. Pour leur donner
plus de portée, ils sont attribués à des souverains ou de grands personnages qui
n’en sont pas forcément les auteurs. Leur survie se fait par les exercices imposés
aux jeunes scribes, qui doivent souvent les recopier, apprenant ainsi non seule‐
ment l’écriture, mais plus encore comment il faut se comporter, dans toutes les
situations de l’existence, afin de ne jamais enfreindre l’ordre indispensable au
maintien de Maât, la Vérité-Justice. Imhotep en aurait rédigé un, qui n’a jamais
été retrouvé. Les plus anciens sont l’Enseignement de Djedefhor, prince de la
IVe dynastie, qui détaille les obligations du culte funéraire d’un fils envers son
père, et l’Enseignement de Ptahhotep, haut fonctionnaire de la Ve dynastie, qui
transmet à son élève le comportement adéquat à chaque âge de la vie. La pre‐
mière période intermédiaire laisse l’un des enseignements les plus célèbres,
l’Enseignement pour Mérikarê, roi de la IXe dynastie. Il s’agit des conseils sur
l’art de gouverner prodigués par le pharaon Khéty à son fils et successeur Méri‐
karê.
– Les Textes des Pyramides (Ancien Empire) étaient destinés au seul roi, de‐
vant lui permettre de triompher des ennemis qui cherchaient à détruire sa mo‐
mie, puis à devenir dieu en se fondant avec le Soleil.
– Les Textes des Sarcophages (Moyen Empire) sont peints sur les parois de
ceux-ci. C’est une démocratisation du parcours du combattant qui attend les
nobles et les personnages importants dans l’au-delà. Les parois peintes des sar‐
cophages en bois, à l’intérieur et à l’extérieur, balisent les étapes dangereuses à
franchir pour parvenir enfin devant le tribunal d’Osiris, roi des morts.
– Le Livre des Morts (Nouvel Empire et périodes postérieures) : il s’agit de
rouleaux de papyrus déposés près des momies, ou sous leur tête. Ils constituent
le plus classique des aide-mémoire dans l’autre monde. Au long de son voyage
dans l’au-delà, le mort accompagne la barque solaire dans son périple nocturne.
Il faut sans arrêt passer des portes redoutables ou répondre à des génies malfai‐
sants. Toute erreur entraîne la destruction. Heureusement, un coup d’œil au
livre, et le mort est sauvé ! Pour les plus fortunés, d’amples passages du Livre
sont inhumés avec le défunt, posés sous sa tête ou sur sa poitrine. Les plus
pauvres tentent au moins d’avoir une copie de la Confession négative pour éviter
de fâcheux trous de mémoire devant le tribunal osirien :
Je n’ai pas commis d’injustice. Je n’ai pas tué de bétail sacré.
Je n’ai pas dérobé. Je n’ai pas espionné.
Je n’ai tué personne. Je n’ai pas été vantard.
Je n’ai pas été insolent. Je n’ai pas forniqué.
Je n’ai pas désobéi. Je n’ai été ni sodomite ni pédéraste1.
L’art du Moyen Empire est en partie, comme c’est le cas depuis les débuts de
la religion en Égypte, un art funéraire. Si les premiers princes de la XIe dynastie
se contentent de modestes hypogées à Thèbes, Montouhotep II fait réaliser à
Deir el-Bahari un complexe grandiose. Un temple de la vallée, ou d’accueil,
donne accès à une vaste cour. En son centre, une première plate-forme repose
sur des colonnes carrées, à laquelle on accède par une rampe en pente. Sur ce
premier niveau, on trouve un second édifice lui aussi à colonnes, sommé d’une
pyramide. Le tombeau royal est creusé dans la falaise.
La XIIe dynastie revient à la pyramide, celle de Sésostris Ier à Licht, de Sé‐
sostris II à Illahoun, de Sésostris III à Dachour ou d’Amenemhat III à Hawara.
Les nomarques ne sont pas en reste. Ils font creuser des tombes dans la falaise,
à Béni Hassan, à Assouan, richement décorées de peintures et bas-reliefs. À
Béni Hassan, plusieurs registres montrent des scènes de luttes, illustrant les di‐
verses prises utilisées par les deux compétiteurs. Des stèles cintrées montrent le
défunt devant une table d’offrandes. L’art du bas-relief connaît plusieurs styles,
depuis les grandes tailles et les traits ronds du sarcophage de la reine Kaouit,
épouse de Montouhotep II, qui la montre à sa toilette, coiffée par une servante,
dégustant une coupe de vin offerte par son échanson, jusqu’au sarcophage exté‐
rieur de bois peint d’élégants hiéroglyphes du chancelier Nakhti sous la XIIe dy‐
nastie. La statuaire évolue considérablement au cours de cette période. La
XIIe dynastie connaît deux types de sculptures, reprise de l’art traditionnel
ou un courant réaliste : pour l’essentiel, les formes sont délivrées de la lour‐
deur massive, il y a une évidente volonté de réaliser des portraits véritables au
lieu de visages stéréotypés du roi, avec une recherche de l’équilibre des formes
et de la grâce. En témoignent les statues d’Amenemhat II ou de Sésostris Ier. En
revanche, le règne de Sésostris III marque une rupture. Pharaon est d’abord
portraituré, sculpté, jeune et vigoureux, comme le veut la tradition. Mais les
œuvres suivent ensuite les étapes du vieillissement du monarque, livrant sans
concession des traits ravagés, orbites enfoncées, paupières tombantes, rides
sillonnant le visage, tant pour les portraits en pied, les bustes ou les seules têtes
royales. Le Moyen Empire inaugure également le modèle de la statue cube, re‐
présentant un personnage assis dans un vêtement tiré autour du corps qui pré‐
sente quatre faces lisses couvertes de hiéroglyphes. N’émergent que la tête et les
orteils. Elle permet de mettre en valeur la titulature et les actions destinées à la
postérité.
La religion égyptienne, fixée dès l’Ancien Empire, évolue peu jusqu’à la pé‐
riode ptolémaïque et romaine. Une brève époque rompt cette stabilité qui ne
doit pas être assimilée à l’immobilité, mais à une évolution sur le long terme.
Pendant presque vingt ans, Aménophis IV (ou Akhenaton) impose le culte du
disque solaire Aton. Cette solarisation existe déjà à l’Ancien Empire, avec le
culte de l’astre sous ses formes de Khépri-Rê-Atoum, soleil levant, zénith, cou‐
chant. Aton lui-même est présent dans les Textes des Pyramides. La particularité
de la réforme amarnienne – du nom arabe de Tell el-Amarna, le site de la ville
d’Akhetaton, « horizon d’Aton », promue capitale à partir de l’an 5 du règne –
est de rejeter dans l’ombre les autres dieux, de réduire leur culte à néant, au pro‐
fit du seul Aton. Akhenaton, « Rayonnement d’Aton » ou « Utile à Aton », est
l’intermédiaire suprême entre son père Aton et les hommes. Présenté comme un
hénothéisme au profit d’Aton, le culte égyptien contient tous les autres principes
divins. La réforme religieuse d’Aménophis IV est également pensée comme le
tout premier monothéisme. C’est à Aménophis IV lui-même qu’est attribué
l’Hymne à Aton, magnifique poème retrouvé sous deux formes, le Grand hymne
à Aton gravé sur les parois de la tombe prévue pour Ay à Amarna, ou le Petit
hymne à Aton dans les tombes d’autres dignitaires. La ferveur manifestée pour
l’Aton, visible de tous, dispensateur de bienfaits universels, inspire par la suite
les Psaumes de David, le livre des Proverbes de Salomon et l’Ecclésiaste.
L’ART DE TANIS
Tanis, situé sur une branche orientale du delta du Nil, est la capitale des rois
des XXIe et XXIIe dynasties, même si ces derniers conservent à Memphis un
centre administratif et se limitent peut-être à en faire un lieu d’inhumation. La
ville s’enorgueillit d’un temple d’Amon aussi vaste que celui de Louxor, un autre
pour Mout et des tombes de la nécropole royale. Les conditions climatiques et
les bouleversements politiques n’ont pas permis de conserver ces monuments,
contrairement à la rivale du Sud, Thèbes. Toutefois, les campagnes de fouilles
permettent d’en rendre l’architecture d’ensemble. Commencé sous la XXIe dy‐
nastie, le temple d’Amon, long de 400 m et large de 100 m, s’ouvre à l’ouest par
une porte monumentale de granit, due à Sheshonq III (823-772 av. J.-C.), en‐
cadrée de statues colossales. Suit une avant-cour aux colonnes palmiformes
donnant accès au premier pylône d’Osorkon II (870-847 av. J.-C.), qui ouvre
sur une cour ornée de colosses et de deux obélisques. Un second pylône est at‐
tribué à Siamon (978-959 av. J.-C.), le troisième comporte quatre obélisques.
Comme à Karnak, dont il s’inspire, le temple d’Amon inclut un lac sacré. Il était
relié par une allée processionnelle aux temples de Mout – reconstruit à la Basse
Époque par Ptolémée IV (238-205 av. J.-C.) –, la parèdre d’Amon, et à celui de
Khonsou, leur fils divin. La fouille, notamment des cours, permet d’exhumer
nombre de statues, pharaons, sphynx et au sud de l’avant-cour, la nécropole
royale. C’est là que la tombe, intacte, du pharaon Psousennès Ier (1032-991
av. J.-C.) révèle le plus riche mobilier funéraire après celui de la tombe de Tou‐
tankhamon : masque en or, grand collier en or, bijoux, amulettes, vaisselle d’or
et d’argent et un sarcophage en argent. La découverte, en 1940, est due à l’égyp‐
tologue français Pierre Montet (1885-1966). Outre à Tanis, les souverains,
comme Osorkon II de la XXIIe dynastie, construisent à Bubastis, ville du delta
située sur la branche canopique du Nil. Celui-ci y agrandit le temple de la
déesse chat Bastet et fait édifier dans sa seconde cour son grand hall jubilaire,
aux colonnes à chapiteaux hathoriques.
Les Mésaventures d’Ounamon
Les Mésaventures d’Ounamon est le seul texte d’intérêt daté des débuts de la troisième
période intermédiaire. Il est connu par le Papyrus Pouchkine conservé à Moscou. L’histoire
d’Ounamon prend place soit à la fin du règne de Ramsès XI (v. 1098-v. 1069 av. J.-C.),
dernier souverain de la XXe dynastie, soit au début de celui de Smendès (v. 1069-v. 1043
av. J.-C.), premier pharaon de la XXIe dynastie. Ounamon est chargé par le grand prêtre
d’Amon de Karnak, Hérihor, d’aller acquérir au Liban des troncs de cèdre, seuls dignes
d’être utilisés pour la barque d’apparat du dieu, nommée Ouserhat. C’est sur cette dernière
qu’Amon voyage de Karnak à Louxor lors de la grande fête d’Opet. Ounamon va vivre une
expérience mouvementée : dépouillé, retenu à Byblos où nul ne lui accorde un quelconque
crédit, il échoue au retour sur l’île de Chypre et échappe de peu à la mise à mort et au
pillage de son navire. Le récit s’interrompt après cet épisode, nous laissant à jamais dans
l’incertitude quant à l’issue de sa mission.
L’art égyptien des périodes d’occupation perse reprend les archétypes tradi‐
tionnels. Certains souverains perses bâtissent en Égypte. Darius Ier fait édifier
un temple dans l’oasis de Kharga, reconstruire celui de la déesse Nekhbet à Ne‐
kheb. Artaxerxès III se signale, lors de son séjour en Égypte, par une abondante
production numismatique. Ses ateliers frappent des pièces d’argent à l’imitation
de celles d’Athènes. Sous la XXIXe dynastie, Achoris (390-378 av. J.-C.) en‐
treprend une politique de grands travaux dans les plus prestigieux sanctuaires,
Louxor, Karnak, Memphis, mais aussi à Médinet-Habou, El Kab ou Éléphan‐
tine. À la dynastie suivante, Nectanébo Ier (380-362 av. J.-C.) réalise de
grandes constructions. Il inaugure à Karnak l’édification du premier pylône, en‐
toure le complexe cultuel d’une enceinte de briques crues. À Louxor, il crée une
allée monumentale d’accès au temple d’Amon, le dromos, bordée de sphinx des
deux côtés. Il lance les travaux du temple d’Isis à Philae et y fait édifier un
kiosque. Cet évergétisme monumental se retrouve dans le temple d’Amon
construit à son initiative à Kharga, celui d’Abydos, le premier mammisi, ou cha‐
pelle vouée à retracer la naissance divine du souverain, à Dendérah, modèle de
ceux des époques ptolémaïque et romaine. Son petit-fils, Nectanébo II, est le
digne continuateur de son œuvre architecturale. Il construit un pylône à Philae,
le naos, chapelle cœur du temple qui abrite la statue du dieu, à Edfou, continue
à Karnak les travaux du premier pylône, édifie un temple d’Isis à Saqqara, un
autre pour Osiris-Apis, des galeries pour entreposer les momies des animaux
sacrés, chats de la déesse Bastet, ibis du dieu Thot, faucons d’Horus. Si les sou‐
verains perses construisent peu, après les derniers feux de l’architecture égyp‐
tienne autochtone sous les deux Nectanébo, la conquête d’Alexandre inaugure
une riche période où l’art grec s’égyptianise.
En 331 avant J.-C., Alexandre le Grand fonde Alexandrie sur le site égyptien
de Rhacotis. L’architecte Dinocratès de Rhodes en fait le plan, inspiré de la
chlamyde, le manteau macédonien : un rectangle étroit aux rues parallèles qui se
coupent à angles droits. Deux portes monumentales donnent accès à la voie
principale, la Platéia, ou « grande rue », la Porte du Soleil et la Porte de la Lune.
Le site de la ville occupe l’espace compris entre la mer et le lac Mariout (ou
Maréotis), entouré d’une muraille. Le palais d’Alexandre en occupe environ le
tiers, regroupant les casernes, un musée, une bibliothèque, le théâtre de Diony‐
sos et des jardins. Au large, l’île de Pharos, sur laquelle est élevé le phare
d’Alexandrie, l’une des Sept Merveilles du monde, est reliée à la cité par une je‐
tée de pierre couverte d’une chaussée, longue de sept stades, soit environ
1 300 m, d’où son nom d’Heptastadion. Elle coupe le port en deux parties, le
Grand Port à l’Est, celui d’Eunostos, et le Bon retour à l’Ouest. La ville se divise
en deux quartiers principaux, le Bruchion, celui du palais, à l’Est, renfermant les
principaux édifices, et Rhacotis, à l’Ouest, comprenant le temple de Sérapis.
Notes
1. Trad. É. Drioton, cité dans L’Égypte, de Arpag Mekhitarian, Paris, Bloud & Gay, 1964, p. 39.
2. Plutarque, Vie d’Antoine, LXXVII-LXXXV.
CHAPITRE VII
1. Les Hébreux
Les Hébreux, les « nomades » de la Bible, appartiennent au groupe de
peuples sémitiques du Proche-Orient. Vers – 1760, le patriarche Abraham les
conduit de Mésopotamie en Palestine, le pays de Canaan, entre Méditerranée et
Jourdain et, en échange de l’alliance avec un dieu unique, Yahvé, marquée par la
circoncision, les Hébreux se voient promettre la domination sur « le pays des
Qénites, des Qénizites, des Qadmonites, des Hittites, des Phéréziens, des Re‐
phaïms, des Amorrites, des Cananéens, des Girgashites et des Jébuséens » (Ge‐
nèse XV, 19-21). C’est par les documents égyptiens que les Hébreux sont un
peu mieux connus. Ils y sont agrégés aux groupes de pillards nomades désignés
par le terme générique d’Apirou. La Stèle de Mérenptah (v. 1210 av. J.-C.) dé‐
signe pour la première fois Israël : « Israël est détruit, sa semence même n’est
plus1. » Vers – 1250, Moïse reçoit la révélation par Yahvé de la législation
connue sous le nom des Dix commandements. Il conduit les « enfants d’Israël »
hors d’Égypte où ils étaient réduits en servitude. Après quarante ans d’errance,
ils parviennent au pays de Canaan. Ils s’installent en Palestine, à l’ouest du Jour‐
dain. Cependant ils doivent, par l’alliance ou la force militaire, s’insérer dans un
espace déjà peuplé, où riches terres, pâturages, oasis sont l’objet de rivalités. Les
tribus d’Israël s’unissent ainsi aux habitants de Gabaon, pour repousser les at‐
taques des rois amorrites de Jérusalem, Hébron, Tel Yarmouth, Lakish, Églon.
Josué, successeur de Moïse, les conduit à une première série de conquêtes : la
ville de Jéricho est prise et rasée, les villes de Lakish, Hébron, Églon, Débir
sont dominées. Toutefois, les tribus ne peuvent s’installer dans toute la Pales‐
tine, faute de contrôler les plaines littorales, les villes les plus importantes et les
grands axes commerciaux. C’est la période dite des « Juges », chefs choisis pour
combattre les souverains voisins. Pourtant, Cananéens et tribus d’Israël se re‐
groupent pour repousser un ennemi commun, les Peuples de la mer, ici les Phi‐
listins. Sans être vaincus et chassés, ces derniers sont cantonnés au nord de la
Palestine. C’est vers – 1010 que le juge Samuel répond à la demande de douze
tribus de se doter d’un roi, Saül, de la tribu de Benjamin. Ce dernier doit à la
fois combattre les Philistins à l’Ouest et les Amorrites à l’Est. Après une série
de victoires contre les Philistins, Saül perd la vie lors d’une bataille qui l’oppose
au mont Gelboé. L’histoire de Saül est racontée dans le Premier Livre de Sa‐
muel, sans que son existence historique soit attestée. Il faut attendre son succes‐
seur, David, pour que le récit biblique et l’histoire commencent à se recouper.
LE JUDAÏSME
L’histoire des patriarches est à la fois celle des origines, de la fin des ancêtres
de Terah, père d’Abraham, et aussi la sienne et celle d’Isaac, de Jacob, de Joseph
et de ses frères. Abraham, dont le nom signifie « père d’une foule » (de futures
nations), fut le premier des patriarches du peuple d’Israël. Les récits patriarcaux
fonctionnent comme un prologue à la future grande épopée de l’Exode avec
Moïse. Ce sont surtout des listes de généalogies, qui mettent différentes généra‐
tions successives en rapport avec d’autres groupes, d’autres ethnies. Le clan
d’Abraham se forme pendant la période dite des patriarches qui va durer près de
six siècles.
◆ Le clan d’Abraham
Terah, père d’Abraham, s’installe à Ur, en Mésopotamie, puis à Haran. C’est
un homme de son temps, polythéiste comme il se doit, adorant sans doute Sin,
le dieu lunaire d’Ur et de Haran. Ur, à cette époque, est une ville prospère et
confortable. Mais cette prospérité ne dure pas longtemps puisque les Élamites,
originaires des montagnes du golfe Persique, attaquent et anéantissent cette ville.
Terah, qui réussit à s’enfuir, gagne Haran où, malheureusement, il meurt. Il
semble que son intention ait été de se réfugier dans les collines du pays de Ca‐
naan. Son fils aîné, Abram (Abraham), accomplira ce que son père avait prévu,
suivant ainsi l’ordre de Dieu. Arrivée en Canaan, après un passage en Égypte, sa
tribu reçoit le nom d’Hébreux, provenant sans doute du cunéiforme habiru qui
signifie « émigrants, nomades ». Vers – 1760, Abraham conduit la grande tribu
nomade des Hébreux à partir du territoire au sud du Caucase jusqu’en Palestine.
D’après l’Ancien Testament, Dieu, Yahvé, conclut la première alliance avec lui.
Il exige une croyance totale en lui en contrepartie de quoi, il offre à sa descen‐
dance la domination sur la région qui s’étend « depuis le fleuve d’Égypte jus‐
qu’au grand fleuve, le fleuve Euphrate, le pays des Qénites, des Qénizites, des
Qadmonites, des Hittites, des Phéréziens, des Rephaïms, des Amorrites, des Ca‐
nanéens, des Girgashites et des Jébuséens » (Genèse XV, 18-21). À la mort de
son père, Isaac devint le chef de la tribu. Sa personnalité est moins marquante
que celle d’Abraham, dont il continua l’œuvre. Dieu renouvelle avec lui son al‐
liance par la circoncision, signe rituel de consécration, devenu signe de l’appar‐
tenance à la nation abrahamique. Après Isaac, Jacob, son fils, hérite de la pro‐
messe faite à Abraham.
◆ Le sacrifice d’Isaac
La servante et esclave Agar a donné un fils à Abraham, Ismaël, qui serait
l’ancêtre mythique des Arabes. Abraham avait déjà quatre-vingt-dix-neuf ans. La
promesse de Dieu d’avoir un fils de Sarah, sa femme, jusqu’alors stérile, est as‐
sortie de la condition que tous les descendants d’Abraham soient circoncis, en
témoignage de l’Alliance. Le patriarche en reçoit l’annonce par trois visiteurs,
des anges. Ils lui dirent que sa femme Sarah enfanterait un fils, Isaac (« Joie »).
Plus tard, pour éprouver Abraham, Yahvé lui demande d’immoler le jeune
Isaac, mais au moment où il allait le faire, un ange l’en empêche, Dieu se
contentant de cet acte d’obéissance et de foi. Après ces événements, Abraham
s’en retourne à Hébron où Sarah devait mourir quelque temps plus tard. Abra‐
ham lui-même mourut à l’âge avancé de cent soixante-quinze ans, non sans
s’être remarié et avoir eu d’autres enfants.
Vers – 1250, sous la direction de Moïse, les Hébreux quittent l’Égypte pour
s’installer en Palestine, où vivent déjà des tribus qui leur sont apparentées, c’est
l’épisode de l’Exode. L’Exode offre autant d’intérêt que la Genèse, par le
charme des récits et les grandes scènes qui y sont décrites. Moïse en est à la fois
le héros et l’historien. Le moment où il prend place se situe aux alentours de
1250 av. J.-C., époque à laquelle règne Ramsès II (règne : 1279-1213 av. J.-C.),
pharaon d’Égypte. Après avoir réclamé en vain à Pharaon la libération des Hé‐
breux, Moïse annonce les dix plaies qui s’abattent sur l’Égypte. L’eau fut
d’abord changée en sang. C’est Aaron, le frère de Moïse, qui, en étendant la
main sur l’eau, réalise cette transformation. Les grenouilles montent à l’assaut de
l’Égypte, image destinée à montrer les conséquences de l’aveuglement de Pha‐
raon sur l’ensemble de son peuple. La grêle, si violente qu’il n’y en avait jamais
eu semblable dans tout le pays, montre qu’il existe une force plus puissante que
celle du pharaon. Puis vinrent les moustiques, les mouches venimeuses, la peste
du bétail, les ulcères, les sauterelles. Les ténèbres font sans doute allusion au
pouvoir du dieu Rê, dieu solaire, qui serait anéanti. Quant à la dixième plaie, la
mort des premiers nés, elle permet aux Hébreux de fuir hors d’Égypte. Il est dif‐
ficile de dire avec exactitude quel chemin ils suivirent pour rejoindre Canaan à
partir de l’Égypte, tout autant que leur nombre exact. Lors de leur entrée en Pa‐
lestine, les tribus israélites sont conduites par Josué, fils de Noun, désigné
comme le serviteur de Moïse, car ce dernier meurt avant d’entrer en Terre pro‐
mise. Il ne parvient pas à soumettre toute la Palestine, car les Cananéens (habi‐
tants de Phénicie et de Palestine) se maintiennent dans les villes commerciales
les plus importantes et contrôlent ainsi les routes des échanges. Ne pouvant, non
plus, pénétrer dans les plaines fertiles de la côte, les Israélites s’établissent seule‐
ment dans les territoires qui bordent les montagnes. À l’ouest du Jourdain, le
pays est réparti entre l’ensemble des tribus qui ont pris part à la conquête. Après
elle, en effet, se met en place une première partie de l’histoire propre des Hé‐
breux, dirigés par des juges dont le rôle est à la fois celui d’un chef politique et
d’un prophète et théologien.
Vers – 1200, le juge Samuel, à une époque où la pression des Philistins, les
habitants de la Palestine, à laquelle ils donnent son nom, est particulièrement
forte, maintient pourtant la cohésion et l’unité des tribus. Les Hébreux forment
alors douze tribus au nom des douze fils de Jacob : Ruben, Siméon, Lévi, Juda,
Issacar, Zabulon, Joseph, Benjamin, Dan, Nephtali, Gad, Asher. Les Cananéens
et les Israélites s’allient contre les Philistins et il règne une paix provisoire. Puis
les tribus demandent à Samuel de nommer un roi. Ce sera, en – 1010, Saül de la
tribu de Benjamin. Il s’empale sur sa propre épée après une défaite contre les
Philistins alliés cette fois aux Cananéens. C’est la plus ancienne des religions
dites monothéistes. Le judaïsme est marqué par l’alliance entre Dieu, nommé
Yahvé, et le peuple élu. Après la destruction du Temple de Salomon par Titus,
en 70 de notre ère, le judaïsme se répand sur le pourtour du bassin méditerra‐
néen dans le cadre de la diaspora. Il se caractérise par l’affirmation d’un dieu
unique et transcendant. L’histoire du judaïsme est étroitement liée à celle du
peuple juif sur une terre, celle de Judée.
LA BIBLE HÉBRAÏQUE
La Bible hébraïque est le Tanakh, acrostiche, mot formé à partir des initiales
de ses trois livres, Torah, Nebhî’îm, Kethûbhîm. Le canon juif, c’est-à-dire la
liste officielle des livres retenus, est fixé lors du synode de Jamnia, vers 90 de
notre ère. Les rabbins présents n’ont conservé que les livres écrits en hébreu, et
les ont répartis en trois ensembles intitulés La Loi (Torah), Les Prophètes
(Nebhî’îm) et Les Écrits (Kethûbhîm), dénommés aussi « Autres Écrits », soit
au total trente-neuf livres. Les autres livres écrits en grec, en araméen, ont été
rejetés. L’origine du Tanakh remonterait au XIIIe siècle avant J.-C. Transmise
au début oralement, la Bible hébraïque aurait été rédigée progressivement entre
le XIe et le VIe siècle avant J.-C., à partir de versions multiples, pour prendre sa
forme définitive au Ier siècle avant J.-C. Sous le nom d’Ancien Testament, elle
fait aussi partie des Écritures saintes du christianisme. Il existe toutefois
quelques différences dans la liste des livres considérés comme sacrés, apparte‐
nant au canon, par le judaïsme, le catholicisme ou le protestantisme. Les livres
écartés sont les apocryphes, considérés comme non authentiques, ou d’origine
douteuse.
◆ La Torah
La première partie de la Bible hébraïque est la Loi (ou Torah), formée du
Pentateuque, les cinq livres en grec. Le Pentateuque comprend en effet la Ge‐
nèse, l’Exode, les Nombres, le Lévitique, le Deutéronome. Ces livres réunissent
toute la tradition mosaïque, relative à l’histoire du monde, depuis l’histoire des
ancêtres, l’organisation et la formation du peuple jusqu’à sa délivrance et la fuite
hors Égypte (vers 1250 av. J.-C.), et l’entrée en Terre promise. La Torah en‐
seigne la tradition, dirige les aspects pratiques de la vie quotidienne : le culte,
les règles de conduite morale, les exemples à suivre ou à proscrire. Longtemps,
la tradition juive lui donne Moïse pour auteur. Toutefois, les cinq rouleaux ne
forment pas une unité absolue : les récits présentés sont variés et leur rassem‐
blement en une collection unifiée ne s’est fait qu’après le retour de l’exil à Baby‐
lone (568-538).
– La Genèse relate le tout début de l’humanité. Les principaux épisodes en
sont la création du monde, Adam et Ève au jardin d’Éden, la Chute, le Déluge,
la descendance de Noé, la tour de Babel, puis l’histoire des patriarches, Abra‐
ham, Isaac, Jacob et ses douze fils.
– L’Exode raconte la sortie du peuple de la terre d’Égypte, sous la conduite
de Moïse, puis l’alliance de Dieu avec son peuple sur le mont Sinaï.
– Les Nombres mettent en place le dénombrement du peuple juif durant son
séjour au désert.
– Le Lévitique, ou livre des Lévites, contient un grand nombre de prescrip‐
tions rituelles et morales.
– Le Deutéronome, ou deuxième loi, est le discours de Moïse aux tribus
d’Israël, avant l’entrée en Terre promise, dans le pays de Canaan. Moïse y rap‐
pelle les principales prescriptions fixées pour vivre dans le respect de l’alliance
conclue avec Dieu.
◆ Les livres prophétiques
Les livres prophétiques, ou Nebhî’îm, « hommes de la parole de Dieu »,
constituent le deuxième groupe, la deuxième partie du canon juif. Ils com‐
portent deux sections : les « premiers prophètes » et les « derniers prophètes ».
La première section constitue un ensemble historique, qui s’ouvre après la mort
de Moïse, et qui se termine avec la chute de Jérusalem en 586. La seconde sec‐
tion comprend les textes ou discours prophétiques proprement dits. Un classe‐
ment en a été fait en fonction de leur longueur entre les « premiers prophètes »
– le Livre de Josué, le Livre des Juges, le Premier Livre de Samuel, le Second
Livre de Samuel, le Premier Livre des Rois, le Second Livre des Rois – et les
« derniers prophètes » – Isaïe, Jérémie, Ézéchiel, Osée, Joël, Amos, Abdias, Jo‐
nas, Michée, Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie.
Les Écrits
Après la Loi, et les Livres prophétiques, la Bible hébraïque présente une troi‐
sième collection de livres assez hétéroclite. Aucun titre caractéristique ne lui est
attribué, on l’appelle simplement Kethûbhîm, ou les Écrits, livres inclassables
dans les deux précédentes catégories, ce sont des livres historiques, des livres de
sagesse, des écrits narratifs, l’expression du lyrisme liturgique. Il s’agit des
Psaumes, du Livre de Job, des Proverbes, du Livre de Ruth, du Cantique des
Cantiques, du Qohélet (ou l’Ecclésiaste), des Lamentations, du Livre d’Esther,
du Livre de Daniel, du Livre d’Esdras, du Livre de Néhémie, des premier et se‐
cond livres des Chroniques.
◆ Le Talmud
Le nom « talmud » vient d’une racine hébraïque qui signifie : étudier. La ré‐
daction du Talmud est reconnue comme celle d’un commentaire autorisé de la
Torah par toutes les communautés juives. Il est fondé sur l’autorité de la parole
de Dieu, et est la forme écrite de la Loi orale, reçue selon la tradition par Moïse
en même temps que la Loi écrite du Pentateuque. Il en existe deux versions dif‐
férentes : l’une est originaire des milieux palestiniens, le Talmud de Jérusalem,
l’autre originaire de Babylonie, le Talmud de Babylone. Le Talmud est devenu
la base de la jurisprudence à partir de laquelle ont été composés les codes de
lois juives. Sa rédaction se poursuivit sur plusieurs siècles. Il est constitué de la
Mishnah hébraïque et la Gémara araméenne, ou « complément », qui en est une
compilation.
◆ La Mishnah
La Mishnah rassemble les lois, les enseignements, les commentaires de toute
la tradition orale, de façon que la Torah ne se perde pas. C’est en ce sens que
cette compilation de l’ensemble des codes du peuple juif reçut le nom de Mish‐
nah, ou « répétition » de la Loi. La finalité était de permettre l’unification des
juifs du monde entier. Les rabbins et les docteurs, craignant la disparition de la
Loi orale, commencèrent à mettre un peu d’ordre dans les traditions reçues
après la destruction du temple de Jérusalem, en 70 après J.-C. La Mishnah a été
rédigée en hébreu. Elle est divisée en six sections comprenant chacune un cer‐
tain nombre de traités, soixante-trois au total, eux-mêmes subdivisés en cha‐
pitres et en paragraphes.
LA DOCTRINE
Le judaïsme est la première des religions abrahamiques avant le christianisme
et l’islam. Israël honore YHWH (Yahvé), Élohim (Seigneur) au Nom ineffable.
Alors que toutes les religions cherchent à trouver une réponse aux grandes in‐
terrogations qui traversent l’humanité, le peuple juif, au contraire, a reçu de
Dieu lui-même la réponse, au cours de sa longue histoire. Le nom de Dieu a été
révélé par Moïse mais il n’est jamais dit dans les textes de façon évidente ou
distinctement. Ainsi : « Moïse dit à Dieu : Voici je vais aller vers les fils d’Israël
et leur dire : Le Dieu de vos pères m’a envoyé vers vous. S’ils me disent : Quel
est son nom ? Que leur dirai-je ? Dieu dit à Moïse : “Je suis celui qui est.” Et il
ajouta : c’est ainsi que tu répondras aux enfants d’Israël : Celui qui s’appelle “je
suis” m’a envoyé vers vous » (Exode III, 13-14). Cela explique le recours au té‐
tragramme (les quatre lettres) YHWH, prononcé Jéhovah ou encore Yahvé.
Sont employés concurremment la racine sémitique El que l’on retrouve dans le
patronyme de nombreux personnages de la Bible (Daniel, Emmanuel, Élie) ou
sa forme plurielle, Élohim. En ce cas, c’est un pluriel de majesté évoquant la
toute-puissance de Dieu. Ce dernier est encore Isevoat, « dieu des armées », ou
Shaddaï, le « Maître » ou le « Tout-puissant ».
Les prophètes
Le prophète peut être entrevu comme le sage qui va proférer une parole di‐
vine sortie du néant grâce à lui. Il se caractérise par cette qualité de posséder
« un cœur capable de discerner le bien du mal » (I Rois III, 9). En fait, il est l’in‐
terprète de Dieu, envoyé par lui pour révéler une vérité ou mettre en garde. Les
prophètes hébreux parlent au nom de leur dieu Yahvé. Selon la Bible, les pre‐
miers prophètes furent Abraham et Moïse. À l’origine de l’histoire religieuse se
trouve la migration d’une tribu sumérienne conduite par un chef patriarche du
nom d’Abraham.
◆ Abraham, une figure pour trois religions
Abraham est une figure pour les trois religions monothéistes et chacune inter‐
prète cet épisode différemment. Pour les chrétiens, le sacrifice d’Isaac, fils
d’Abraham que Dieu lui demande pour le mettre à l’épreuve, le remplaçant au
dernier instant par un agneau, annonce celui de Jésus qui meurt crucifié pour
sauver l’humanité. Pour les musulmans, la victime est Ismaël, considéré comme
l’ancêtre du peuple arabe. Pour les juifs, c’est une épreuve divine qui se produit
sur le Mont Moriah, lequel se trouverait, selon la tradition, à Jérusalem où sera
bâti le temple de Dieu. Abraham enfin est le modèle pour tout musulman, car il
se soumet avant tout à la volonté de Dieu. Il existe d’ailleurs dans le Coran une
sourate qui porte son nom, Ibrahim.
La nature de Dieu
Dieu est unique, différent de la nature qu’il a créée entièrement. C’est un être agissant
continuellement dans l’histoire humaine. Au départ, le Dieu d’Israël n’est pas un dieu limité
à Israël. Il est le Dieu de tout l’univers et de tous les humains. Sa relation historique avec
Israël ne l’empêche pas d’être le Dieu de tous, au contraire. Il dépasse toutes choses.
L’univers entier lui est soumis et il est en droit d’être le seul à recevoir honneur et gloire. En
ce sens, c’est un dieu transcendant.
Dieu a créé l’être humain à son image. Doté du libre arbitre, l’être humain a fait entrer le
mal dans le monde. Il doit lutter contre une tendance à faire le mal qui coexiste en lui avec
la tendance à faire le bien. Il peut toutefois choisir le bien par ses propres forces.
Dieu a fait alliance avec l’homme afin qu’il ne se perde pas. Il lui a donné la Torah afin
qu’il se perfectionne. L’ensemble des préceptes viennent de Dieu et ont été révélés à
Moïse au mont Sinaï. Seul le peuple d’Israël a entendu la voix de Dieu et désormais Israël
a une mission dans le monde : celle de témoigner de Dieu par la mise en pratique de la
Torah qui est universelle.
Le peuple d’Israël, bien que dispersé, se verra un jour rassemblé en Terre sainte,
animé également d’une espérance fondamentale : l’avènement du règne messianique. Le
messianisme a été développé dès le VIe siècle avant J.-C. par les prophètes et s’est affiné
durant toute l’histoire juive. Il consiste en la croyance en un personnage providentiel, le
Messie, envoyé par Dieu pour instaurer son royaume sur la terre. Cette attente n’est pas
partagée ni acceptée par tous les courants du judaïsme.
◆ Moïse, le libérateur
Au XIIIe siècle av. J.-C., Moïse naît à Goshen dans l’Égypte ancienne. Il a
pour frère Aaron, qui sera le premier grand prêtre juif, et pour sœur Myriam. Il
fait partie de la tribu de Lévi, l’une des douze tribus hébraïques à émigrer au
XVIIe siècle avant J.-C. en Égypte. Ce sont les livres du Pentateuque, de l’Exode
au Deutéronome, qui parlent le plus de lui. Moïse échappe de peu à l’ordre de
Pharaon de tuer tous les nouveau-nés de sexe masculin. Placé dans une corbeille
d’osier et confié aux eaux du fleuve, il est recueilli par la fille de Pharaon qui
l’élève comme un fils. Elle lui donne le nom de Moïse : « tiré des eaux ». Il re‐
çoit à la cour de Pharaon, où il est élevé, l’éducation d’un véritable prince
d’Égypte. Après avoir pris le parti d’un esclave et avoir tué un chef de corvée
égyptien, il s’enfuit dans le désert. Devenu berger dans le Sinaï, Dieu lui appa‐
raît pour la première fois et lui ordonne de libérer son peuple. Pharaon ne vou‐
lant pas laisser partir son peuple, l’épisode des dix plaies sur l’Égypte se réalise.
Le personnage de Moïse est commun aux trois monothéismes. Il est appelé
Mosheh dans le judaïsme, Mussa dans l’islam et Moïse dans le christianisme.
Dans l’Ancien Testament, il est présenté comme le chef qui a conduit les Israé‐
lites hors d’Égypte.
Après la mort de Saül, David (v. 1004-v. 966 av. J.-C.) devient roi d’Israël.
Sa vie est connue d’après les Premier et Second Livres de Samuel et le Premier
Livre des Rois. Il est élu par la tribu de Juda et les tribus du Sud, fixe sa pre‐
mière capitale à Hébron. Il est célèbre pour avoir, alors qu’il n’est encore qu’un
jeune berger, abattu d’un coup de fronde le champion des Philistins, le géant
Goliath, dans la vallée d’Elah. Il épouse Mikhal, fille du roi Saül, se lie d’amitié
avec son fils, Jonathan. Pourtant la jalousie de Saül à l’égard de David ne cesse
de croître. Il doit fuir pour éviter de finir assassiné, erre dans les zones déser‐
tiques, entre au service des Philistins. La mort de Saül et de ses fils à la bataille
de Gelboé le fait roi. David chasse les Jébusiens de leur cité, Jébus, ancien nom
de Jérusalem, dont il fait sa nouvelle capitale. C’est un choix habile, à une
époque où l’autorité royale doit se faire accepter, car encore toute récente, par
les tribus d’Israël et de Juda, Jérusalem n’appartenant ni aux unes ni aux autres.
L’arche d’alliance y est transférée, installée plus tard dans le temple de son fils
Salomon. L’arche d’alliance est à l’origine un coffre en bois, plus tard recouvert
d’or pur et surmonté de deux chérubins faits eux aussi d’or, contenant les Tables
de la Loi, données par Moïse. Elle suit partout les douze tribus hébraïques avant
son installation par David à Jérusalem. Comme les Hébreux sont marqués par le
nomadisme, avant cet épisode, l’arche est entreposée lors de leurs étapes dans la
« Tente du rendez-vous », comprenez le rendez-vous donné par Yahvé à son
peuple, où elle est adorée. Salomon édifie en son honneur le Premier Temple.
L’arche personnifie l’alliance avec Yahvé. C’est ainsi qu’elle conduit les Hébreux
à la victoire, et que si les ennemis s’en emparent, ils connaîtront la défaite et la
mort. Elle disparaît avec la destruction du Temple, en – 587, mais une tradition
apparue au IIe siècle de notre ère veut que le prophète Jérémie l’ait cachée dans
une grotte du mont Nébo, selon un récit du Livre II des Maccabées. Les
membres des familles influentes forment la cour à Jérusalem, sous le titre de
« serviteurs du roi ». L’armée, réorganisée, est confiée à Joab, le neveu de Da‐
vid. C’est à Joab qu’échoit la mission de faire tuer, en le plaçant seul en première
ligne, Urie le Hittite, guerrier dont David a séduit la femme, Bethsabée, en‐
ceinte de ses œuvres. Admonesté par le prophète Nathan, David se repent,
mais le fils de Bethsabée meurt, c’est le châtiment divin infligé au roi. Les
drames personnels se poursuivent avec le viol de sa fille Thamar par son demi-
frère Amnon. Ce dernier est tué par le frère de Thamar, Absalon, qui se révolte
contre David, se fait proclamer roi à Hébron. Joab, à la tête de l’armée, le vainc
et le tue alors qu’il s’est accroché à un arbre par les cheveux dans sa fuite. Au
prix de plusieurs campagnes, David reprend aux Philistins presque toute la côte
de Palestine. Il bat les Ammonites, leurs alliés araméens, Hadadézer, roi de
Zoba, et occupe une grande partie de son royaume dont Damas. Il s’allie avec
les rois de Sidon.
◆ David et la musique
C’est déjà par le charme de son jeu à la harpe que David parvenait à apaiser
la fureur de Saül. Roi musicien, il est crédité de nombreux psaumes. C’est un
genre nouveau dont il est le créateur. Le psaume est un récitatif qui accompagne
le chant. Le contenu des Psaumes de David est variable, depuis l’exhortation des
troupes à la victoire jusqu’à l’exaltation de la grandeur divine ou les règles à
suivre pour psalmodier. C’est à sa cour, à Jérusalem, que David crée une école
de musique où se perfectionnent les « récitants du roi ». On y étudie le chant, la
musique instrumentale, avec notamment la harpe ou le gittith, une cithare, le
luth, les flûtes, les tambourins. Une chorale regroupe près de trois cents chan‐
teurs. Le Psaume 51, attribué à David, est une imploration du roi à Dieu, pour
lui pardonner d’avoir envoyé Urie le Hittite à la mort. Il est connu aussi par son
invocation, miserere, « pitié pour moi », l’un des Psaumes de David.
Quand Natân le prophète vint à lui parce qu’il était allé vers Bethsabée.
Pitié pour moi, Dieu, en ta bonté, en ta grande tendresse efface mon péché,
Lave-moi tout entier de mon mal et de ma faute purifie-moi2…
La tradition attribue au roi David la rédaction du Livre des Psaumes, le Sefer
Tehillim hébreu (Livre des Louanges), premier livre des Kethûbhîm, les Écrits
hagiographes. Au nombre de 150, les psaumes chantent la gloire de Dieu.
Chaque psaume est un véritable poème, formé d’un nombre variable de vers.
Toutefois, les historiens tendent aujourd’hui à considérer que le Livre des
Psaumes est une œuvre collective anonyme, même si certains d’entre eux ont pu
être l’œuvre de David. Pour les juifs, certains psaumes sont à réciter quotidien‐
nement, pour former une lecture complète au bout de trente jours. Pour les
chrétiens, particulièrement les protestants, ils forment un ornement musical à la
célébration religieuse. Ils ont ainsi été traduits par le poète Clément Marot
(1497-1544), publiés en 1551, et mis en musique par Claude Goudimel (1514-
1572) en 1563. Leur célébrité à travers les siècles s’explique par la qualité poé‐
tique de l’écriture et l’abandon confiant en la foi en Dieu, tel le Psaume 119 :
Je suis un étranger sur la terre
Mon âme est attachée à la poussière et quand
J’y retournerai, rends-moi la vie selon ta parole
Tes mains m’ont créé, elles m’ont formé
Éternel que ta miséricorde vienne sur moi3.
Salomon est fils de David et de Bethsabée. Son règne est relaté dans le Pre‐
mier Livre des Rois. Son autorité s’exerce pendant quarante ans sur les douze
tribus de Juda et d’Israël. C’est une époque d’apogée, fondée sur une prospérité
maintenue. Elle est issue de l’organisation administrative du royaume en douze
districts, chacun dirigé par un préfet, le nesîb, nommé et révoqué par le roi.
Chacun doit fournir, à son tour, un mois de subsistance en nature à la cour
royale. La prospérité provient aussi du commerce et de la sécurité que Salomon
assure aux routes caravanières entre Damas, l’Égypte, la Mésopotamie, l’Arabie.
Les marchands versent une redevance, notamment en produits de haute valeur,
encens ou aromates. Un corps de fonctionnaires d’État, les lévites, est créé. L’af‐
flux de richesses vers Jérusalem permet à Salomon de tenir la promesse faite à
son père David et d’édifier le Temple destiné à abriter l’arche d’alliance. Toute‐
fois, les impôts sont lourds, les inégalités sociales se creusent et la révolte
gronde, attisée par les prophètes qui accusent Salomon d’adorer des idoles
païennes. Il s’agit, plus probablement, de sa tolérance à l’égard des divers cultes
pratiqués par les marchands et commerçants traversant ou établis dans le
royaume. À sa mort, ce dernier subit une partition. Réputé pour sa sagesse, le
roi est connu pour le fameux jugement de Salomon : deux femmes se pré‐
tendent mère d’un enfant et en réclament la garde. Salomon ordonne de le cou‐
per en deux. La mère véritable préfère renoncer et que son enfant demeure en
vie, ce qui permet au souverain de la reconnaître et de lui restituer l’enfant.
◆ Le temple de Jérusalem
L’expression « temple de Jérusalem » recouvre en réalité deux bâtiments dis‐
tincts : le Premier Temple, ou Temple de Salomon, édifié durant son règne (vers
966-926 av. J.-C.), détruit par Nabuchodonosor II en – 587, et le Second
Temple, construit entre – 536 et – 515, après la fin de la captivité à Babylone. Il
faut adjoindre à ce Second Temple le temple d’Hérode, roi de Judée de – 37 à –
4, ensemble de bâtiments ajoutés pendant son règne. Le Temple de Salomon
est l’unique lieu reconnu comme sanctuaire par le judaïsme. Selon la Bible, son
édification a duré sept ans et nécessité cent soixante-dix mille ouvriers. Il s’agit
d’une forteresse, destinée à protéger l’arche d’alliance, conservée dans le saint
des saints, accessible au seul grand prêtre. L’ensemble, massif, est composé de
terrasses, d’épais murs, de places publiques, portiques, bassins d’ablutions ri‐
tuelles, d’autels à sacrifice. L’intérieur, somptueux, en était orné du précieux et
odorant bois de cèdre, fourni par le roi phénicien de Tyr, Hiram. C’est égale‐
ment ce monarque qui aurait dépêché auprès de Salomon son propre architecte,
Houram-Abi. Le mur des Lamentations est l’unique vestige du temple édifié par
le roi de Judée, Hérode Ier le Grand, sur le Mont Moriah. Ce nom lui est don‐
né par les chrétiens qui y voient les juifs pieux venir déplorer la destruction du
Temple de Salomon par Titus en 70 de notre ère, et la dispersion, ou Diaspora,
du peuple juif. Pour les juifs, il est le Hakotel Hama’aravi (le Mur occidental),
nom le plus souvent abrégé en Kotel. La coutume veut que celui qui va y prier
dépose dans les interstices entre les pierres un petit papier plié où sont inscrits
ses souhaits.
◆ L’arche d’alliance
L’arche d’alliance est une sorte de coffre en bois d’acacia de 1,20 m de long
sur 0,70 m de large et de haut. Selon la légende, elle aurait été rehaussée d’un
placage d’or et conservé, outre les Tables de la Loi, la manne et la verge d’Aa‐
ron : « Yahvé parla à Moïse et lui dit : Tu feras en bois d’acacia une arche
longue de deux coudées et demie, large d’une coudée et demie et haute d’une
coudée et demie. Tu la plaqueras d’or pur, au-dedans et au-dehors, tu feras sur
elle une moulure d’or tout autour. Tu fondras pour elle quatre anneaux d’or et tu
les mettras à ses quatre pieds : deux anneaux d’un côté et deux anneaux de
l’autre. Tu feras aussi des barres en bois d’acacia, tu les plaqueras d’or et tu enga‐
geras dans les anneaux fixés sur les côtés de l’arche les barres qui serviront à la
porter » (Exode XXV, 10). L’arche d’alliance et son contenu sont reproduits sur
le portail nord de la cathédrale de Chartres. Plusieurs explications ont été avan‐
cées : l’arche d’alliance aurait été enterrée sous la cathédrale, après avoir été
prise à Jérusalem, en 1118, au moment de la mort du roi Baudouin, par des
chevaliers français. D’autres auraient supposé le retour de l’arche en France par
le biais des Templiers. Aucune de ces deux hypothèses n’a été vérifiée.
LES DEUX ROYAUMES (926-587 AV. J.-C.)
LA LITTÉRATURE PROPHÉTIQUE
Le Livre d’Isaïe fait état de quatre grands prophètes, Isaïe, Jérémie, Ézé‐
chiel, Daniel et de douze petits : Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée,
Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie et Malachie. Les prophètes sont
les envoyés de Yahvé, venus maintenir l’alliance conclue entre les Hébreux et
Dieu par Abraham. Ils surviennent en temps de crise, d’idolâtrie, pour exiger le
retour au strict monothéisme et menacer les rois du châtiment divin s’ils ne
s’amendent pas et ne renoncent pas aux idoles ou à leurs mœurs dissolues.
Chaque refus du souverain ou du peuple de les écouter les voit annoncer le châ‐
timent divin, prédire la destruction de Jérusalem et la captivité pour ceux qui se
sont détournés du seul vrai Dieu ou révoltés contre lui.
◆ Isaïe (ou Ésaïe pour les protestants), en hébreu Yeshayahou (Yahvé est
salut), est l’un des plus grands prophètes de la Bible hébraïque. Il nous est connu
par les Manuscrits de Qumrân, ou Manuscrits de la mer Morte, car, parmi les
rouleaux trouvés dans une grotte de la région en 1947, figurait un exemplaire
du Livre d’Isaïe datant du IIe siècle avant J.-C. L’existence historique d’Isaïe se
situe entre – 765 et – 700 environ. Après cette date, on perd sa trace. C’est en –
740 qu’il aurait reçu le don de prophétie, afin d’annoncer aux royaumes d’Israël
et de Juda leur fin prochaine. Isaïe ne cesse de mettre en garde les juifs contre la
détérioration des mœurs, le relâchement du culte dû à Yahvé. Il condamne aussi
la politique des rois de Juda, à la recherche d’alliés contre l’Assyrie, là où, selon
Isaïe, il conviendrait de s’en remettre à la seule volonté de Yahvé. Le Livre
d’Isaïe se présente sous forme d’une succession de soixante-six chapitres, qui
correspondent à trois périodes nettement différentes, et renvoient à des
contextes eux aussi divers.
Ils ont reçu cette épithète, non que leurs écrits soient moins méritants, mais
ils sont considérés comme moins importants, et pourtant c’est le même Dieu qui
parle par leur bouche. Ils annoncent les malheurs aux nations. Durant les trois
siècles qui s’écoulent depuis le schisme des dix tribus jusqu’au retour de captivi‐
té (800-500 av. J.-C.), les prophéties des hommes de Dieu retentissent dans
toute la Judée. On les voit tour à tour apparaître dans les cours, sur les places
publiques, dans les assemblées du peuple… Ils rapportent fréquemment la pa‐
role des grands prophètes – Isaïe, Jérémie, Ézéchiel et Daniel –, celle des livres
de la Bible qui leur sont consacrés. Amos, « porteur de fardeau », le plus ancien
des petits prophètes, vit au VIIIe siècle avant J.-C. Il dénonce les excès des plus
riches et annonce la fin d’Israël. Osée, dont le nom signifie « salut, déli‐
vrance », combat ceux qui ont découvert les divinités païennes tels Baal ou
Astarté. Il chante l’amour divin vers – 700. Joël, dont le nom veut dire « l’Éter‐
nel est Dieu », prophétise vers – 800. Il annonce une armée de sauterelles. Na‐
hum, ou « Consolation », décrit la destruction de Ninive. Sophonie, « l’Éternel
a protégé », blâme l’ensemble des dirigeants et leur enjoint d’éviter l’anéantisse‐
ment de Jérusalem. Michée, « Qui est comme Dieu », paysan venu de la région
située à l’ouest d’Hébron, annonce la ruine de Jérusalem et la destruction du
Temple. Habacuc, « Amour », prophétisait une prochaine invasion des Chal‐
déens. Il fait aussi des reproches et adresse des plaintes à Dieu au sujet de la
corruption du peuple. Abdias, dont le nom signifie « serviteur de l’Éternel », est
l’auteur du livre le plus court de la Bible. Il est probable qu’il prophétisa peu de
temps après la destruction de Jérusalem. Aggée, « en fête », le fait à son tour
mais à Jérusalem vers – 530. Il encouragea les juifs à rebâtir le Temple. Zacha‐
rie, « l’Éternel se souvient », est l’auteur du Livre de Zacharie classé parmi les
Nebhî’îm dans la tradition israélite. Rédacteur d’un des livres de la Bible hé‐
braïque qui contient la déclaration de Dieu, adressée à Israël, il dénonce notam‐
ment les négligences apportées au culte de Dieu. Jonas, ou « Colombe », est le
personnage principal du livre du même nom. Il est célèbre pour son séjour dans
le ventre d’une baleine. Il prédit la destruction de Ninive, mais Dieu change
d’avis.
Notes
1. Claire Lalouette, L’Empire des Ramsès, Paris, Flammarion, 1999, p. 276.
2. La Bible de Jérusalem, Paris, Éditions du Cerf, 1997, p. 79.
3. Ibid., p. 95.
CHAPITRE VIII
C’est vers le Ve millénaire que la vallée de l’Indus connaît les débuts d’une
urbanisation importante. Près de quatre cents sites s’alignent le long de ses rives
d’où le nom de civilisation de l’Indus (v. 2500-v. 1500 av. J.-C.). L’apogée de
cette culture se situerait vers le milieu du IIIe millénaire. L’écriture retrouvée sur
les sceaux n’a pas encore été déchiffrée, elle ne ressemble à aucune forme
connue. Près de trois cent cinquante pictogrammes ont pourtant été identifiés,
inscrits de droite à gauche. Deux sites dominent alors tous les autres, celui de
Mohenjo-Daro, dont le nom signifie « le tumulus des morts », et celui d’Ha‐
rappa. Chacun a un périmètre de 5 km et couvre quelque 60 ha.
Si les dieux de l’Inde sont si nombreux, c’est que le panthéon indien n’est ja‐
mais demeuré immuable. Depuis la première composition du premier hymne
védique vers 1800 avant J.-C. jusqu’aux dernières compilations des Textes des
Temps Anciens (Purāṇa), recueils mythologiques d’un accès plus simple que les
Brāḥmaṇa, vers les IIIe et IVe siècles de notre ère, les divinités n’ont cessé de se
modifier, comme leurs mythes d’ailleurs. Les trois principales vénérées restent
Brahmā, Vishnou, Shiva qui forment la Trimūrti, la trinité hindoue. Les dieux
sont associés à des formes divines d’essence féminine dont la plus importante
reste Shakti, la déesse-mère. En dépit de cet aspect polythéiste, tous et toutes
émanent d’une seule et même force cosmique créatrice, le Brahman.
◆ Agni, dieu du feu dans l’hindouisme, est celui qui chauffe, qui éclaire, qui
purifie. Les Indiens védiques en font un dieu à part entière. Mythologiquement,
il est l’intermédiaire entre les dieux et les hommes.
◆ Arjuna, le héros guerrier, est dans la Bhagavad-Gītā le troisième des cinq
fils de Pandu, les Pandava, en réalité celui du dieu Indra et de Kunti, la femme
de Pandu. Kunti le conçoit parfois avec plusieurs dieux. Il apprend l’art du com‐
bat auprès du brahmane Drona, en particulier l’archerie. Avant la grande bataille
de Kurukshetra, Krishna, le huitième avatar du dieu Vishnou, prend l’apparence
du conducteur de son char et lui offre alors son enseignement spirituel, lui re‐
commandant de faire son devoir de membre de la Kshatriya, la caste des guer‐
riers, de combattre en surmontant ses doutes. La Bhagavad-Gītā, ou « Chant du
Bienheureux », relate cet entretien devenu célèbre.
◆ Brahmā est le premier membre de la Trimūrti, la trinité de dieux, formée
avec Shiva et Vishnou. Dieu tout-puissant, principe de tout, il est représenté par
un cercle dans un triangle sur les monuments, possède quatre têtes, tient dans
ses quatre mains la chaîne qui soutient les mondes, le livre de la Loi, le poinçon
à écrire, le feu du sacrifice. Ses têtes sont ornées de lotus. Sarasvatī, déesse de
l’érudition, de la parole, à qui l’on prête l’invention du sanscrit, est sa parèdre,
son épouse divine, son énergie féminine ou Shakti.
◆ Durgā, la guerrière, est une des formes de Shakti, la déesse-mère, revêtue
pour combattre le buffle démon Mahisha. Elle porte le sari rouge et chevauche
un lion.
◆ Ganesh, fils de Shiva et de Pārvatī son épouse, aussi appelé Ganapati,
est le dieu de l’intelligence, du savoir, protecteur des lettrés. Sa qualité de Vigh‐
neshvara, « Seigneur des obstacles », lui permet de les écarter, ce qui en fait l’un
des dieux les plus vénérés en Inde. Il est traditionnellement représenté avec un
corps d’homme, surmonté d’une tête d’éléphant à une seule défense, l’autre
s’étant brisée au combat. Il est nanti de quatre bras et chevauche pour monture
un rat. Il peut aussi être figuré assis sur un trône de lotus.
◆ Kālī la Noire, déesse destructrice et créatrice, revêt l’apparence d’une
femme noire. Entièrement nue, elle semble danser sur un cadavre humain qu’elle
écrase de ses pieds, le corps soumis de Shiva. Elle incarne la puissance de la
destruction et de la création, l’aspect féroce de la Devī, la déesse suprême.
L’épée qu’elle brandit d’une main dans ses représentations évoque son rôle des‐
tructeur, ainsi que son long collier de crânes humains, la tête coupée tenue par
les cheveux d’une autre main. Elle possède plusieurs bras, car les dieux lui ont
donné chacun une arme pour combattre : Shiva son trident, Vishnou son disque
et un nœud coulant, l’arc et la flèche de Surya, dieu du soleil, la hache de Chan‐
dra, dieu de la lune, la lance de Kumara la conscience du monde, une masse de
Yama, le seigneur de la mort.
◆ Krishna, le berger amoureux, incarne le huitième avatar de Vishnou. Ce
dieu apparaît dans l’hindouisme sous de nombreux et multiples aspects : Krish‐
na berger, Krishna enfant, Krishna l’amoureux joueur de flûte, gardien des trou‐
peaux. Pour les sages, il est celui qui enseigne le chemin de la libération et de la
dévotion, le grand vainqueur du mal. C’est lui qui enseigne le Dharma, la loi, à
Arjuna dans un épisode fameux de la Bhagavad-Gītā. Il est le héros des deux
plus célèbres poèmes hindous : le Gītā-Govīnda, « Chant d’amour de Krishna »,
et la Bhagavad-Gītā, « Chant du Bienheureux ». Lorsqu’il descend sur terre,
c’est pour délivrer les hommes des méfaits du roi Kamsa, assassin des fils de
Devaki, sa propre cousine.
◆ Shiva, le destructeur et le générateur, est sans doute l’un des dieux les plus
anciens de l’Inde. Il est le dieu de toutes les manifestations vitales. En lui se ré‐
sument toutes les forces tumultueuses qui animent le monde. Sa forme épouvan‐
table est vénérée du nord au sud de l’Inde. Shiva est aussi le maître des yogis
lorsqu’on le tient pour le grand ascète. Son épouse, que l’on nomme du terme
général de Devī, « la Déesse », a une personnalité tout aussi complexe que la
sienne. Elle est adorée sous un grand nombre d’aspects divers et de noms. Elle
peut être aussi Kālī la Noire. La demeure de Shiva est le mont Kailash, chaîne
de montagnes du plateau tibétain. Ses principaux attributs sont le chignon, siège
de son pouvoir d’ascète, le cobra Kuṇḍalinī, qui représente l’énergie sexuelle,
une peau de tigre, manifestation de sa puissance sur la nature, le troisième œil
fermé, car son regard détruit, le croissant de lune posé sur ses cheveux. Le Lin‐
ga, le phallus, symbolise sa capacité créatrice. Sa monture est le taureau Nandī.
Les différents aspects de Shiva traduisent la variété des légendes :
Chandragupta Ier Maurya (v. 320-v. 300 av. J.-C.) usurpe le trône des Nan‐
da. Ses victoires sur les satrapes d’Alexandre lui permettent de reprendre les
provinces indiennes conquises par les Macédoniens et de réunir sous son autori‐
té toute l’Inde du Nord. Ashoka (304-232 av. J.-C.), son petit-fils, fait tuer dans
sa capitale de Pātaliputra ses frères et prend le pouvoir. La période qui com‐
mence est considérée comme un âge d’or de l’histoire indienne. Lorsqu’Ashoka
monte sur le trône, il hérite d’un empire considérable reliant au nord le Cache‐
mire à l’actuel Karnataka au sud, et le delta du Gange à l’Afghanistan au nord-
ouest. Il contrôle la région de Kaboul et celle de Kandahar. Il favorise le boud‐
dhisme. Au IIIe concile de Pātaliputra vers 249 avant J.-C., les theravādin,
adeptes du Theravāda (Voie des Anciens), également nommé bouddhisme
Hīnayāna (du petit véhicule), pensent que chacun peut parvenir à la libération,
au Nirvāṇa. Ils fixent leur foi et en affirment la supériorité sur toutes les autres
écoles bouddhiques. Pendant son règne, Ashoka tolère avec une grande ouver‐
ture d’esprit la pratique des autres religions. À sa mort, l’unité du royaume s’ef‐
fondre, et ses fils se partagent ses différentes régions. Les inscriptions laissées
par ce roi sont non seulement les plus anciennes connues en Inde, mais ont en
plus révélé l’usage de l’écriture brahmi qu’on lit de gauche à droite. Parmi les té‐
moignages artistiques qui ont subsisté jusqu’à nos jours, le Pilier de Sarnath est
particulièrement célèbre. Il est couronné d’un chapiteau, représentant quatre
lions sur une « Roue de la loi », le Dharmacakra, roue de chariot symbolisant
le Dharma, l’enseignement du Bouddha. Les Maurya disparaîtront en 187 au
profit de la dynastie Shunga.
Les belles lettres sont d’origine presque exclusivement sanscrite, mais dès les
premiers siècles de l’ère chrétienne d’autres langues s’imposent, comme le ta‐
moul. Le brahmi remonte aux environs du IVe siècle avant J.-C., le prakrit, le
plus anciennement connu, celui des inscriptions d’Ashoka, au IIIe siècle avant J.-
C. Plusieurs écritures ont été utilisées pour les édits d’Ashoka, le grec et l’ara‐
méen en Afghanistan, système Kharoshtī à Mansehra, au nord de l’Indus, et
brahmi pour le reste des autres régions, forme qui survit à toutes les autres. De
même d’autres dialectes du sanscrit sont dérivés, tel le pali dans lequel sont rédi‐
gés les canons du bouddhisme. Le système ne cesse d’évoluer au cours du temps
pour aboutir au développement d’écritures très nettement individualisées. La lit‐
térature sanscrite touche essentiellement le domaine religieux, avec des épo‐
pées : Bhagavad-Gītā, Mahābhārata (La Grande (guerre) des Bhārata),
Rāmāyana (Geste de Rama) et les Purāṇa, un recueil de mythes, ou le Tantra,
manuel de pratique religieuse. L’épopée a permis de familiariser l’Inde avec ses
nouveaux dieux Vishnou et Shiva. Les sūtas, poètes de cour et bardes itinérants,
contribuent à son développement. Un autre genre littéraire fort cultivé en Inde
est le sutra, qui édicte les règles du rituel et s’adapte aux grands mouvements hé‐
térodoxes bouddhique et jaïn qui se développent entre 400 et 300 avant J.-C.
Ces sutra, ou aphorismes, genre littéraire fort apprécié, sont de véritables
« aide-mémoire », dont le nom signifie « fil ». Ils traitent de questions diverses,
droit pénal, sacrifice, de plusieurs sciences rattachées aux Veda.
La première grammaire
◆ Le Mahābhārata
Le Mahābhārata ou « La Grande Guerre des Bhārata » constitue avec ses
dix-neuf livres, ne contenant pas moins de cent vingt mille versets, la plus vaste
œuvre connue de la littérature hindoue. Elle aurait commencé à prendre forme
aux alentours du IVe siècle avant J.-C. pour s’élaborer jusqu’au IVe siècle de
notre ère. Compilation de récits oraux à l’origine, cette œuvre collective est
néanmoins traditionnellement attribuée au mythique sage Vyāsa. Le thème
principal de ce qui constitue la plus grande épopée de la littérature mondiale est
l’opposition entre les Pandava et les Kaurava, de la famille royale des Bhārata,
originaire de la vallée de l’Indus. Ces deux branches familiales s’opposent, et les
premiers livres sont consacrés aux sources du conflit et expliquent comment les
cinq Pandava, après la mort de leur père Pandu, sont élevés avec leurs cousins,
les Kaurava, qui, jaloux, souhaitent se débarrasser d’eux. Consacrée à Vishnou,
cette épopée gigantesque insiste continuellement sur le rôle déterminant du kar‐
ma, le cycle des actions, dans notre vie quotidienne. Le metteur en scène Peter
Brook (né en 1925) en fit une adaptation éblouissante au théâtre en 1986, puis
une série télévisée et un film en 1989.
◆ Le Rāmāyana
Le Rāmāyana retrace la vie et l’offensive guerrière, la marche, ou ayana, de
Rāma, prince d’Ayodhyā, et de son épouse Sītā, fille du roi Janaka. Rédigée
en sanscrit, divisée en sept livres ou sections de longueur inégale mais d’environ
vingt-quatre mille quatrains, soit près de cent mille vers, cette gigantesque épo‐
pée aurait été constituée entre le IVe siècle et le Ve siècle de notre ère et est attri‐
buée au poète Vālmīki. Plus que toute autre œuvre indienne, le Rāmāyana a été
adapté et commenté dans toutes les langues de l’Inde. Il est difficile de ne pas
rapprocher cette épopée de celle du Mahābhārata. Le Rāmāyana a une in‐
fluence considérable sur la littérature bouddhique et jaïn, et est connu de l’Occi‐
dent à partir du XIXe siècle, lorsque l’Asie s’ouvre à l’Europe, notamment par le
développement des études sur l’Inde. Ce poème exalte depuis deux mille ans la
mémoire de Rāma, le guerrier idéal, et de son épouse, Sītā, modèle de fidélité.
Le sujet du Rāmāyana est l’ordre (Dharma) menacé, sa restauration et le salut :
le héros, Rāma, est un roi en lutte pour retrouver sa légitimité. Lui seul est l’ava‐
tar complet de Vishnou, ses trois frères n’étant que des incarnations partielles de
la divinité. La structure du Rāmāyana s’organise autour de dieux et de héros qui
réalisent des exploits et surmontent des épreuves après avoir contourné maintes
difficultés. Les textes précédant ces grandes épopées forment la Smriti, « mé‐
moire ». Ils appartiennent à la tradition mais leur autorité est moins puissante
que celle des textes révélés, Sruti. Tous ces textes sont inspirés par les Veda.
Autres textes
Le Yoga
Le Yoga : le mot est utilisé à partir des Upanishads mais il faut attendre longtemps avant
qu’un système et une doctrine soient clairement définis. Les Yoga-Sūtra, compilés par Pa‐
tañjali (IVe siècle environ), présentent, sous ce mot (qui signifie « atteler », « joug »), des
pratiques proposant de détacher l’âme de sa condition charnelle. Comme le Sāṃkhya, le
yoga repose sur une conception dualiste, la prakṛiti, nature primordiale, et le purusha, es‐
prit universel. Sa finalité est de libérer l’âme, en la délivrant de ses liens avec la nature.
L’ascèse du yoga comprend huit étages, « les huit membres du yoga ». Lorsque le corps
est éveillé par la Kuṇḍalinī, celle-ci, guidée par la pensée lors des exercices de méditation,
va de chakra en chakra, centres d’énergie du corps humain, jusqu’au sommet du corps
subtil où elle s’unit à l’âme. On nomme Kuṇḍalinī le serpent qui, dans l’anatomie mystique
enseignée par les Tantras, représente l’énergie vitale de l’individu. Mircea Eliade a bien
montré dans le Haṭha-yoga tantrique les convergences avec l’alchimie dont la finalité pour
les deux est de purifier les substances impures par un processus de transmutation. En
1932, Carl Gustav Jung (1875-1961), au club psychologique de Zurich, introduit la notion
de Kuṇḍalinī, alors que le yoga est encore inconnu en Occident. Il existe plusieurs voies
du yoga : Jñana-yoga, yoga de la connaissance absolue, Bhakti-yoga, yoga de la dévo‐
tion, Karma-yoga, yoga de l’action, Haṭha-yoga, yoga de la force, Rāja-yoga, yoga royal ou
yoga de Patañjali, Mantra-yoga, yoga des formules.
– toute existence est par nature difficile voire décevante, même celle
des dieux ;
– la soif d’exister qui conduit à renaître est à l’origine de ce malheur ;
– la délivrance du cycle des renaissances, donc des malheurs et des
souffrances, est inhérente à l’existence ;
– la délivrance peut être obtenue en suivant la sainte voie, mārga,
aux huit membres : en corrigeant parfaitement ses idées, ses intentions, ses
paroles, ses actes, ses moyens d’existence, ses efforts, son attention, sa
concentration mentale.
Le terme de cette voie est appelé « extinction », nirvāṇa, des passions, des er‐
reurs, des autres facteurs de renaissance. Elle dure jusqu’à la mort du saint et
constitue un véritable état de sérénité après lequel il ne renaît plus nulle part. En
outre, la doctrine enseigne que tout être et toute chose sont transitoires, chan‐
geants, composés d’éléments eux-mêmes en perpétuelle transformation, soumis
à un rigoureux enchaînement de causes et d’effets. Il n’y a que des séries de
phénomènes se propageant plus ou moins rapidement, tout ayant un commence‐
ment et une fin, il n’existe donc ni âme immortelle, ni dieu éternel.
◆ Quand le bouddhisme devient-il une religion ?
Que se passe-t-il à la mort de Bouddha ? Il laisse derrière lui un vaste ensei‐
gnement fondé sur la parole et de ce fait susceptible d’être modifié au cours du
temps, lorsqu’il serait transmis, ainsi qu’une communauté monastique malheu‐
reusement sans autorité reconnue pour la diriger et la conduire. Très peu de
temps après son décès, des moines s’organisent et, lors d’un premier concile
tenu à Rajagrha, au Ve siècle avant J.-C., Ānanda, le disciple préféré, rassemble
les sermons du Bouddha, le Sutta Pitaka, Upali le plus vieux, précise la règle de
la sangha, la communauté dans le Vinaya Pitaka. Mais un deuxième concile de‐
vient nécessaire, les querelles s’intensifiant au sujet des pratiques, qui a lieu à
Vaiśālī, un siècle plus tard. C’est soit lors de ce deuxième concile, soit lors du
troisième, celui de Pātaliputra, vers 250 avant J.-C., que se produit la séparation
entre les modernistes du Mahāsānghika qui veulent réformer, et les traditiona‐
listes, les Sthavira favorables au Theravāda. Trois grandes écoles vont voir le
jour, trois véhicules, yānas, chaque école comparant son message à un vaisseau
qui transporte ses disciples jusqu’au nirvāṇa final.
◆ Un petit véhicule, et un grand véhicule pour progresser
Le bouddhisme du « petit véhicule » ou Hīnayāna est le bouddhisme du
Theravāda et des écoles anciennes. Dans cette voie, individuelle, chacun doit
tenter de parvenir à sa propre libération, d’atteindre le nirvāṇa. C’est le plus an‐
cien groupe, le plus fidèle aussi aux enseignements de Bouddha. Il a compté
une vingtaine de sectes, nées pour la plupart avant notre ère et dont subsiste au‐
jourd’hui le seul Theravāda ou « enseignement des anciens », qui ne reconnaît
que les textes prononcés du vivant de Bouddha, regroupés dans un corpus nom‐
mé Tipikata, ou Triple corbeille. La littérature est rédigée en pali (langue sœur
du sanscrit) et concerne surtout les moines auxquels elle enseigne la méthode à
suivre pour devenir des arhats, ou « hommes méritants », autrement dit des
saints ayant atteint le nirvāṇa. Car le salut vient en adoptant la vie monastique,
le Theravāda ne reconnaît aucun pouvoir d’intercession aux bodhisattvas. Au
contraire, le « grand véhicule », ou Mahāyāna, privilégie la libération univer‐
selle de tous les êtres. Il apparaît au début de l’ère chrétienne et se répand sur
une zone géographique plus grande que celle du petit véhicule, dans le nord de
l’Inde, dans l’Empire kouchan en Afghanistan et Ouzbékistan actuels, en Chine
et dans le reste de l’Extrême-Orient. Cette école refuse le seul salut individuel et
l’élargit à l’humanité tout entière. Des dix-huit écoles qui existent au temps
d’Ashoka (v. 304-232 av. J.-C.), empereur indien de la dynastie Maurya, seules
deux vont continuer d’exister : le Theravāda et le Mahāyāna.
◆ Le vajrayāna, la voie du diamant, et le tantrisme
Le vajrayāna est la voie bouddhique du diamant, en sanscrit vajra, terme qui
signifie à la fois le caractère adamantin, la dureté et la pureté du diamant et la
foudre, qui anéantit l’ignorance et hâte les étapes de la voie par son caractère
fulgurant. Cette forme de bouddhisme est qualifiée de tantrique. Le tantrisme
dérivé du bouddhisme du grand véhicule et de l’hindouisme met l’accent sur le
rituel et la magie. Diffusé dans la région himalayenne et au Tibet, il y constitue
le lamaïsme. L’étymologie du mot « tantrisme » provient du sanscrit tantra, si‐
gnifiant « trame », puis par extension « doctrine ». Phénomène hindou au début,
le tantrisme se répand ensuite en Asie avec d’autres religions. Il est impossible
de séparer le tantrisme du bouddhisme ou de l’hindouisme, puisque ce phéno‐
mène religieux n’en est que le prolongement sous une forme plus particulière.
Révélées par les savants orientalistes du XIXe siècle, les doctrines tantriques sont
présentes dans toutes les religions de l’Inde entre le Ve et le VIIIe siècle apr. J.-
C. Le tantrisme peut être défini comme un ensemble de rites et de pratiques
permettant au pratiquant de tendre vers l’acquisition de pouvoirs surnaturels, et
vers une délivrance du monde, par une suite de techniques mentales, corporelles
et spirituelles. Le but ultime est l’union avec l’énergie sexuelle féminine de la di‐
vinité, comme source de puissance cosmique et libératrice. Associés à des mé‐
ditations, les mantras doivent être répétés indéfiniment. La pratique du yoga
vient en aide. Les textes tantriques donnent le nom de mandala, cercle, aux fi‐
gures les plus élaborées et celui de yantra, instrument de maîtrise, à celles de
formes plus géométriques. Le mandala désigne le territoire sacré d’une déité,
domaine situé en dehors du monde phénoménal. Il peut servir de support médi‐
tatif, mais aussi de cadre à un rituel initiatique. Il rassemble par ordre hiérar‐
chique autour d’une divinité centrale d’autres divinités. Il peut rappeler aussi par
sa structure certains temples comme celui de Borobudur, édifié au IXe siècle sur
l’île de Java par la dynastie Śailendra, présentant un plan sur le principe des
mandalas.
◆ Le jaïnisme, pratique ascétique
Le jaïnisme présente de nombreux traits communs avec l’hindouisme et le
bouddhisme. Il se réclame de l’enseignement de l’un de ses Jina, ou prophètes,
ayant atteint l’illumination, Mahāvīra (599-527 av. J.-C.), le fondateur. Le but
suprême du jaïnisme est de libérer les hommes du karma qui revêt dans son
contexte particulier un sens presque matérialiste de résidu qui entache l’âme, la
souille. La sévérité de sa pratique ascétique le distingue des deux autres reli‐
gions tout autant que, par souci du respect de la non-violence, ses interdits ali‐
mentaires qui vont bien au-delà du strict végétarisme. La volonté est d’aboutir à
l’« âme parfaite » ou tirthānkara incarnée, titre porté par Mahāvīra et ses vingt-
trois prédécesseurs. Soulignons que la philosophie jaïne est dualiste. L’univers
s’explique par deux notions fondamentales indépendantes l’une de l’autre : l’ani‐
mé, jiva, et l’inanimé, ajiva. La matière est composée d’atomes qui s’unissent en
agrégats. Si dans le sāṃkhya, école philosophique classique, il n’existe pas de
lien entre les deux principes, le jaïnisme enseigne que les âmes sont soumises à
la loi karmique et aux réincarnations. Elles sont aussi pourvues de toute éternité
d’un substrat matériel.
Le svastika
Que signifie le svastika, la croix gammée, pour un jaïn ? Le svastika est l’emblème de la
roue cosmique montrant l’évolution perpétuelle autour du centre immobile. L’étymologie du
terme vient du sanscrit su, « bien », et asti, « il est », signifiant « qui conduit au bien-être ».
La croix est faite de bras égaux s’infléchissant selon un angle droit tourné dans le même
sens et dans celui des aiguilles d’une montre. Utilisés aussi fréquemment dans l’hin‐
douisme et le bouddhisme, que dans le jaïnisme, les quatre bras symbolisent les quatre
états d’existence dans lesquels la réincarnation est possible, le monde divin en haut, le
monde infernal en bas, le monde humain à gauche, le monde animal à droite. Le cercle
formé par les bras de la croix gammée représente la fatalité du karma. Pourquoi lui a-t-on
donné le nom de croix gammée ? Tout simplement parce que chacun de ses bras montre
une certaine ressemblance avec la lettre grecque gamma. Dans plusieurs pays, elle est
aussi représentée, avec une symbolique proche, dans des cadres aussi différents qu’en
Mésopotamie, en Amérique du Sud, ou en Amérique centrale chez les Mayas. Ce symbole
est perverti quand il devient, en 1920, celui du NSDAP, le parti nazi, qui en inverse le sens
de rotation.
Pour les Indiens, toute connaissance est scientifique, quel qu’en soit le do‐
maine (médecine, psychologie, grammaire ou philosophie). Chaque école de
pensée a sa théorie sur la connaissance. Certaines disciplines comme la phy‐
sique ne sont abordées que sous une forme spéculative. L’apport de l’Inde
concerne trois domaines : sciences médicales, astronomie, mathématiques. Le
premier zéro attesté figure dans un traité de cosmologie, le Lokavibhāga, qui
daterait de 458. Son adoption s’est faite lentement mais, dès le VIe siècle, il est
d’usage courant : il avait rendu les colonnes de l’abaque inutiles et la première
numérotation de position était née. Dans ce traité de cosmologie, pour la pre‐
mière fois, le mot śūnya est employé, transcrit par « vide », terme qui y repré‐
sente le zéro. L’introduction du système d’écriture (brahmi) a été un outil fonda‐
mental dans la suite du développement des sciences en Inde. C’est donc entre le
IIe et le IVe siècle que l’introduction des opérations mathématiques est apparue
(racines carrées, algèbre, le zéro), grâce au manuscrit Bakhshali. Lors de la pé‐
riode suivante, les auteurs de traités mathématiques sont Āryabhaṭṭa, Varāha‐
mihira, Bhāsvkara, Brahmagupta. Vers le Ve siècle, ces ouvrages sont inclus
dans les traités d’astronomie. Varāhamihira écrit, au VIe siècle, Les Cinq Ca‐
nons astronomiques (Panca siddhantika), qui contient un résumé de la trigono‐
métrie hindoue. Le traité d’astronomie Bṛhatsaṃhitā (La Grande Compilation,
Ve-VIe s.) comporte une description des éclipses. Brahmagupta est l’un des plus
célèbres astronomes mathématiciens. Son œuvre, la Doctrine correctement éta‐
blie de Brahma (Brāhmasphuṭasiddhānta), datée de 628, contient deux chapitres
de mathématiques dans lesquels, pour la première fois, sont énoncées des règles
de calcul avec le zéro. Les dix siècles qui s’écoulent entre 500 avant J.-C. et 500
apr. J.-C. sont les plus fastes pour la pensée indienne. Jusqu’aux Xe et
XIIe siècles, ces traités sont périodiquement commentés et expliqués pour les re‐
mettre au goût du jour.
◆ L’āyurveda, science de la vie
La médecine indienne est dominée, depuis l’époque des Veda, par le constat
de souffles organiques présents dans le corps humain. Le Rigveda comme
l’Atharvaveda mentionnent en effet l’existence de cinq souffles distincts. Toute
maladie y est conçue comme la conséquence d’une infraction au rta, à la mo‐
rale, ou la punition donnée par quelque divinité offensée. L’āyurveda, science
de la vie, est divisé en huit branches : chirurgie générale (śalya), obstétrique et
puériculture (kaumārabhṛtya), toxicologie (agadatantra), médecine des posses‐
sions démoniaques (bhūtavidyā), médecine tonifiante (rasāyana), thérapeutique
générale (kāyacikitsā), ophtalmologie (śālākya), médecine des aphrodisiaques
(vājīkaraṇa). Ce n’est qu’après la période védique que la médecine commence
véritablement à se rationaliser. Les deux traités les plus importants de l’āyurve‐
da sont la Collection médicale (Carakasaṃhitā), texte attribué à Charaka
(Ier siècle), et la Suśrutasaṃhitā, collection due à Suśruta (vers 800 av. J.-C.).
Le premier serait l’enseignement du sage Ātreya Punarvasu, rédigé par Chara‐
ka qui aurait exercé à la cour du roi Kaniṣka (78-110). Le second rapporte l’en‐
seignement du dieu Dhanvatari, un avatar de Vishnou, par l’intermédiaire du
médecin Suśruta. Celui-ci aurait été complété par Nāgārjuna (IIe-IIIe siècle),
sans doute le philosophe bouddhiste du même nom. À l’opposé des médecines
religieuses et magiques, l’āyurveda se veut rationnel, se fondant essentiellement
sur l’observation en vue de fonder un diagnostic. Selon ses principes, le corps
humain comprend les cinq éléments qui composent l’univers :
2. La Chine
Depuis les débuts de son histoire, Zhonguo, « Pays du Milieu », nom donné
par les Chinois à leur pays, fascine par la constance de sa tradition. Le céleste
empire, autre nom de la Chine, gouverné par un empereur « Fils du Ciel », obéit
à des lois immuables établies entre les hommes et les forces de la nature. Il faut
alors faire sienne les arcanes de sa pensée pour saisir les subtiles intentions de
l’architecte, du sculpteur, du poète, du penseur. Son histoire est celle d’un vaste
empire, sans cesse entre éclatement et unité, dans lequel Laozi (Lao Tseu),
Kung Fuzi (Confucius) jettent les fondements de la philosophie et de la morale
politique. La religion y est dominée par deux écoles, taoïsme indigène et boud‐
dhisme importé. Radicalement différente de toute sagesse philosophique et reli‐
gieuse de l’Occident, la pensée chinoise s’est enrichie sur place, dans l’immense
étendue de son territoire.
C’est pendant l’époque, pourtant troublée par d’incessants conflits, des « Prin‐
temps et des Automnes » que se développent les grands courants philosophiques
de la pensée chinoise. Ils deviennent les classiques de la Chine impériale. Leur
connaissance, par exemple, est le fondement des examens impériaux de recrute‐
ment de fonctionnaires.
◆ Le confucianisme : doctrine philosophique et éthique de Kung Fuzi, dont
le nom latinisé devient Confucius (v. 551-v. 479). Ses disciples à sa mort ex‐
posent son système philosophique : l’homme doit s’en tenir aux conditions so‐
ciales qui ont présidé à sa naissance. Fondée sur les devoirs, sa doctrine montre
que l’homme en les accomplissant trouve sa pleine signification.
◆ Le taoïsme : à la fois philosophie et religion, ses principes sont fixés par
Laozi, dont le nom francisé devient Lao Tseu (v. 570-v. 490 av. J.-C.). Le re‐
cueil d’aphorismes composé par Lao Tseu porte le titre de Tao-tö-king (livre du
Tao [voie] et de la vie humaine). Pour lui, l’homme par l’extase doit s’identifier
au reste de l’univers et aboutir au Tao. Il peut y parvenir par des pratiques phy‐
siques. Le taoïsme est une morale individualiste qui enseigne le détachement de
toutes choses.
◆ Le légisme (la loi, rien que la loi) : courant de pensée fondé par un groupe
de légistes, vivant au IVe siècle avant J.-C. Il s’agit d’accepter l’homme et le
monde tels qu’ils sont, et de se conduire en fonction de trois idées fondamen‐
tales : la loi, la position de force, le contrôle social.
◆ Le mohisme : du nom de son fondateur Mozi (468-381 av. J.-C.), auteur
du Livre de Mozi. Il y prône l’égalité, la paix et l’amour universel. Ce courant de
pensée est largement mis de côté avec l’avènement du premier empereur de
Chine, Qin Shi Huangdi, vers 220 avant notre ère.
Durant ce Ier millénaire, nous n’avons que peu de textes littéraires, bien que
l’écriture à cette date soit complètement formée. La plus ancienne connue s’ap‐
pelle Kou wen et celle qui suit Ta-Ta-chouan, grande écriture des sceaux.
La littérature taoïste
Le taoïsme a sans doute donné à la Chine ses plus belles œuvres littéraires.
Le Tao-tö-king est attribué à Laozi (Lao Tseu) qui ne l’a sans doute pas écrit.
Le livre est composé de cinq mille caractères et de quatre-vingt-un chapitres. La
philologie laisse supposer que le texte a été rédigé au début du IIIe siècle avant
J.-C. Le tao, « la voie », constitue le principe essentiel du cosmos. Sans forme,
sans nom, il peut constamment se modifier. La philosophie traditionnelle chi‐
noise fait remonter le taoïsme à une date plus ancienne que cet ouvrage, en s’ap‐
puyant sur le Yi-king. L’autre grand texte du taoïsme, le Zhuangzi écrit, vers le
IVe siècle avant J.-C., relate tout ce que doit être la vie de l’adepte et ses pra‐
tiques rituelles. La voie y est conçue comme un principe d’explication ration‐
nelle. Le corps humain est envisagé comme la représentation de l’univers.
LA CHINE DES HAN (206 AV. J.-C.-220 APR. J.-C.) ET DES TROIS
ROYAUMES (220-265)
Les Han illustrent un âge d’or de l’histoire chinoise. La dynastie est fondée
par Liu Bang, un paysan révolté contre les Qin, devenu empereur sous le nom
dynastique de Gaozu (202-195 av. J.-C.). La dynastie des Han se scinde en
deux branches, les Han occidentaux ou Han antérieurs (206 av. J.-C.-9
apr. J.-C.) et les Han orientaux ou Han postérieurs (25-220). C’est au début
du règne des Han occidentaux que le bouddhisme est introduit en Chine, même
si l’adoption du confucianisme comme idéologie d’État donne au pays sa cohé‐
sion. L’empereur Wudi (156-87 av. J.-C.) crée un corps de fonctionnaires d’État
dévoués et efficaces, recrutés par un système d’examens impériaux, et qui porte
obligatoirement sur au moins l’un des classiques de Confucius. Sseu-ma Ts’ien
(v. 135-v. 93 av. J.-C.) est alors le fondateur de l’histoire chinoise, au-delà des
traditionnelles annales. Il est surtout connu pour les Shiji, ou Mémoires histo‐
riques dans lesquels il donne une biographie de Laozi. Considéré comme l’Hé‐
rodote chinois, il appuie ses écrits sur des enquêtes, des voyages. La dynastie
des Han occidentaux s’achève par une succession d’empereurs enfants, morts
en bas âge, et les intrigues d’une impératrice. Wang Mang (8-23) fonde la dy‐
nastie Xin, du « renouveau », dont il est l’unique empereur. Son règne est mar‐
qué par des réformes radicales : réforme agraire afin de distribuer les terres aux
paysans payant l’impôt, prix et production des biens contrôlés par l’État,
contrôle de ce dernier par les fonctionnaires confucéens. Han Guang Wudi
(25-57) devient le premier empereur des Han orientaux et transfère la capitale à
Luoyang. Après lui, les empereurs sont incapables de réformer une fiscalité pe‐
sant en totalité sur les paysans libres, alors que les dépenses militaires croissent,
que les fonctionnaires recrutés le sont plus par népotisme qu’en raison de leur
succès réel aux concours. De 185 à 205, la révolte des Turbans Jaunes affaiblit
la dynastie, livrée au bon vouloir des généraux qui la défendent encore. Les
principautés périphériques recouvrent leur indépendance. L’époque suivante,
connue sous le nom des Trois Royaumes (220-265), marque la désunion de la
Chine, les royaumes de Shu au Sud-Ouest, de Wei au Nord, et de Wu au Sud-
Est s’opposent, tentent de recréer l’unité impériale à leur profit exclusif. Sima
Yan (265-290) du royaume Wei fonde la dynastie Jin (265-420) qui met fin
aux Trois Royaumes en prenant le royaume de Shu en 265, celui de Wu en 280.
◆ L’art sous les Han
De l’architecture des Han, il ne nous est rien parvenu hormis la disposition
caractéristique de la tombe monumentale. S’il ne nous reste rien des monuments
de cette époque, cela tient au fait que les constructions étaient en bois et peu en‐
tretenues. Les sépultures, véritables modèles réduits des habitats, nous per‐
mettent de nous faire une idée des plans des maisons, comportant de vastes ou‐
vertures, des murs s’évasant dès la base. Les toits en tuile à larges avancées se
terminent par des figures d’animaux décoratifs. Les tombeaux de Luoyang se
composent de chambres funéraires construites principalement en bois et en
briques. La fabrication de la soie s’intensifie et devient un article d’exportation,
destiné aux Parthes, aux Romains et autres peuples de la Méditerranée, grâce à
la célèbre route de la soie. Sa fabrication, en revanche, reste pendant longtemps
un secret.
3. Le Japon
Le Japon se désigne à l’origine par le nom de yamato, plaine centrale et fer‐
tile de l’île principale de Honshū. Celui de Nihon ou de Nippon, déformé en Ja‐
pon, n’apparaît qu’à partir du VIIe siècle, lorsque les premiers États commencent
à se former. Il signifie « origine du soleil », ce que nous avons traduit par « Pays
du soleil levant ». Le premier est utilisé dans le vocabulaire quotidien, alors que
le second est réservé aux documents officiels, administratifs. Plus tard, Marco
Polo emploie le nom de Cipangu, selon lui issu du mandarin, pour désigner le
Japon. Ce dernier connaît un long succès, notamment auprès des poètes. En
1893, dans « Les Conquérants », poème issu du recueil Les Trophées, José Ma‐
ria de Heredia (1842-1905) évoque encore l’or, le « fabuleux métal » que « Ci‐
pango mûrit dans ses mines lointaines ».
Un mythe fondateur
C’est vers le VIIe siècle avant J.-C. que le mythe fondateur situe le règne de l’empereur my‐
thique Jimmu Tenno, descendant direct de la déesse shintō Amaterasu. Le Kojiki, récits
des faits anciens, évoque les origines du Japon selon les récits du conteur Hiyeda no Are
sur l’ordre de l’impératrice Gemmei. Considéré comme le plus ancien recueil écrit en japo‐
nais, il relate la création du monde et décrit les principales divinités. Si l’on suit la chronolo‐
gie du Nihonshoki, Chroniques du Japon, ouvrage achevé en 720, l’avènement de Jimmu
Tenno aurait eu lieu en 660 avant notre ère. Le but essentiel du Kojiki est l’affirmation de
la légitimité de droit divin des dynasties du Yamato, une présentation en filiation directe
avec les dieux. Selon une autre légende, les envahisseurs venus pour conquérir le Japon
à cette époque auraient trouvé sur l’île un peuple qui savait fort bien se battre et auquel ils
se seraient soumis. Le Tenno, l’« empereur céleste », a incarné pendant des siècles une
force spirituelle. Gouverner devenait un acte éminemment religieux, d’où le titre d’Aki-Tsu-
Mi-Kami, « Auguste divinité sous forme humaine », ou celui de Mikado, « Auguste porte ».
Notes
1. Il existe deux versions du Yajurveda : le Yajurveda blanc qui contient seulement des formules, et le
Yajurveda noir où les formules sont accompagnées d’un commentaire traditionnel qui en explique le sens
mystique.
2. Elle symbolise les états de conscience : éveil, rêve, sommeil et la conscience suprême.
3. À ce sujet, voir Florence Braunstein, Histoire de civilisations, Paris, Ellipses, 1998, p. 88.
4. Pierre Hadot, Qu’est-ce que la philosophie antique ?, Paris, Gallimard, « Folio essais », 1995, p. 151-
152.
CHAPITRE IX
4. La culture Vicús
Localisée entre le Pérou et l’Équateur, la culture Vicús, entre le Ve siècle
av. J.-C. et le VIe siècle apr. J.-C., prend place parmi celles du Pérou préhispa‐
nique. Sa découverte remonte aux années 1960. Son aire d’expansion est diffi‐
cile à cerner, même si les centaines de sépultures découvertes dans la vallée de
Piura ont permis d’y situer son foyer. La diversité de sa céramique laisse suppo‐
ser deux origines distinctes, l’une venue de l’Équateur, l’autre purement locale,
qui ont donné lieu à deux traditions stylistiques plus ou moins contemporaines
bien que différentes. La première, Vicús-Vicús, comporte une céramique
fruste, aux formes simples. La seconde, dite de Vicús-Moche, montre un style
directement issu du style Mochica ou Moche.
Notes
1. Les Olmèques ont été rattachés par certains à la famille linguistique maya, mixe-zoque, pour d’autres,
ou à un ensemble multiethnique.
2. Le site occupe 500 ha, dix têtes colossales et plusieurs trônes formaient des alignements rituels. On
trouve une résidence royale, ainsi qu’un système de canaux souterrains.
3. Située dans le sud de Mexico, c’est la première cité à s’installer sur les rives du lac Texcoco, pendant
le Ier millénaire avant J.-C. Elle constitue la plus importante ville de la vallée de Mexico.
CHAPITRE X
L’ARCHITECTURE KOUCHITE
LA RELIGION MÉROÏTIQUE
Amon reste l’une des principales divinités du panthéon royal. D’anciennes di‐
vinités locales, comme Apademak, à tête de lion, créateur et guerrier, s’im‐
posent. Amesemi, sa parèdre, est représentée en femme dont la tête est surmon‐
tée d’un ou de plusieurs faucons. Shebo, dieu à l’apparence humaine, est coiffé
de la double couronne pharaonique. On trouve également Masha, dieu soleil,
dont il n’existe aucune représentation mais dont le clergé est cité dans les textes.
L’ÉCRITURE MÉROÏTIQUE
La Grèce antique
Quel est l’héritage qu’ont pu transmettre la Crète, les Cyclades aux poleis, les
cités grecques ? La cité-État fonctionne grâce à l’existence de fonctionnaires dès
le Minoen ancien puis au Mycénien. Le commerce se forme à partir de l’activité
des navigateurs cycladiques, à laquelle s’ajoutent les expériences phéniciennes et
chypriotes. Référence pour les classes dominantes, mis en scène dans l’épos, le
discours épique, le prince guerrier mycénien, présenté comme un héros dans le
Pélopéion, monument à la gloire de Pélops, ancêtre des Atrides à Mycènes, sub‐
siste jusqu’à la fin des tyrannies. Dans le domaine de l’art, les multiples céra‐
miques donnent naissance à celles qui ont su magnifier l’art athénien. Quant aux
écritures du monde préhomérique, elles sont ignorées par l’archéologie et l’his‐
toriographie du XIXe siècle. Il faut l’acharnement du savant anglais Arthur
Evans (1851-1941) pour fournir les preuves de l’existence de plusieurs écritures
« préphéniciennes », avant de distinguer finalement trois systèmes graphiques :
l’écriture hiéroglyphique, appelée ainsi pour sa pictographie, le linéaire A, puis
le linéaire B, postérieur. Les premiers documents en linéaire A, administratifs,
sont consignés uniquement pendant le Minoen moyen (1800-1700 av. J.-C.),
pour ensuite se généraliser à toute la Grèce et aux îles de la mer Égée. Le li‐
néaire B est représenté surtout dans les riches archives de Cnossos, Pylos, Ti‐
rynthe, Mycènes et disparaît vers 1200 avant J.-C., lors de la chute des cita‐
delles helladiques, à l’exception de Chypre où le lien avec le centre du pouvoir
était moins fort. L’héritage de l’écriture mycénienne, sa continuité dans le
monde grec sont inexistants. De ce point de vue, il y a une rupture entre les
deux civilisations. Le nouveau système, issu du système phénicien, ne doit rien
aux syllabaires égéens.
En plus des sources archéologiques, la période est connue en partie par les
œuvres d’historiens de l’époque classique comme Hérodote et Thucydide. C’est
l’époque de création de la cité, née des nécessités militaires, commerciales et de
l’accroissement de la population. Les principales cités sont Chalcis en Eubée,
Thèbes en Béotie, Athènes en Attique, Sparte et Argos dans le Péloponnèse. La
colonisation se poursuit et prend fin au VIIe siècle avant notre ère : Massalia, ac‐
tuelle ville de Marseille, Nikaia, Nice, Cyrène en Cyrénaïque, Naucratis en
Égypte, Byzance en Thrace. L’alphabet grec se met en place, transposant les
vingt-deux lettres de l’alphabet phénicien et en y ajoutant cinq semi-consonnes
(nos voyelles). Au milieu du VIIe siècle avant J.-C., une grave crise sociale se
produit. Les paysans s’endettent et se retrouvent asservis par les grands proprié‐
taires. C’est l’époque des tyrans, aristocrates qui s’appuient sur le mécontente‐
ment populaire pour s’arroger le pouvoir et favoriser la bourgeoisie urbaine. Les
tyrans affaiblissent les autres aristocrates, confisquent leurs terres, les déportent.
La fin de Mycènes
Pendant l’Helladique récent (1600-1400 av. J.-C.), le cœur de la civilisation reste My‐
cènes, centre commercial riche et prospère où l’or s’accumule. La Grèce s’enrichit. Aux
anciennes tombes bâties sous la terre, les princes substituent d’énormes structures à cou‐
poles, telle celle du Trésor d’Atrée, de 14 m de diamètre et de 13 m de hauteur près de
Mycènes, autrefois dénommée « Tombe d’Agamemnon ». L’architrave, placée au-dessus
de la porte d’entrée et destinée à soutenir la voûte, pèse 100 tonnes. Les six tombes du
premier cercle, découvertes par Heinrich Schliemann (1822-1890), sont de loin les plus
riches. Elles contenaient matériaux précieux, armes, céramiques, masques en or, caracté‐
ristiques de cette période, tel le Masque d’Agamemnon. La céramique voit naître le style
protogéométrique, décoration de lignes, de losanges, limitée à la partie supérieure du
vase. Sa diffusion se fait d’Athènes jusqu’en Thessalie et au sud du Péloponnèse. Les
fresques apparaissent à partir de 1400 avant J.-C. à l’intérieur des palais mycéniens,
sous forme de scènes de chasse, de guerre. La métallurgie du bronze n’est plus en usage,
celle du fer s’installe. Des marchés se créent. Les villes s’entourent d’enceintes. Mycènes
possède, vers la fin du XIIIe siècle avant J.-C., plus de 900 m de murs, percés de trois
portes, entourant une aire de 30 000 m2. L’épaisseur moyenne des murs est de 5 à 6 m et
leur hauteur de 8 m. À cette époque, la Grèce forme une féodalité morcelée en quantité de
petites principautés, le Péloponnèse étant le cœur du royaume. Le grec est la langue de
l’administration ainsi que l’attestent les nombreuses tablettes en linéaire B qui laissent sup‐
poser un système de comptabilité et d’archivage à l’image des grandes cités mésopota‐
miennes. Vers le XIIe siècle avant J.-C., la dernière phase de la civilisation est caractéri‐
sée par l’affirmation d’un nouvel ordre. Les citadelles de Mycènes et de Tirynthe sont dé‐
truites, le palais de Pylos est incendié, peut-être par les Peuples de la mer. Aujourd’hui, la
rupture paraît beaucoup plus progressive même si l’hypothèse d’une grande invasion do‐
rienne fait encore débat.
L’année 776 avant J.-C. marque la date des premiers Jeux olympiques grecs,
concours sportif pentétérique (qui a lieu tous les quatre ans) à Olympie. L’in‐
vention de ces jeux est attribuée à plusieurs personnages, dont Héraclès et Pé‐
lops, un Phrygien dont les descendants dominent le Mycènes des Achéens.
Donnés en l’honneur de Zeus Olympien, ils vont perdurer pendant presque mille
ans, jusqu’en 393 apr. J.-C., lorsque l’édit de Théodose ordonne l’abandon des
lieux de culte païens. La récompense des vainqueurs consiste en la remise d’une
seule branche d’olivier. Leur nom figurera sur la liste officielle, leur statue sera
érigée dans le bois sacré d’Olympie. Cette liste des vainqueurs fournit des indi‐
cations précieuses pour la date exacte d’un événement. Une fois chez lui, le
vainqueur est libre de tout impôt. Seuls y sont admis les Grecs libres et de bon
renom. Ils nous sont connus par la Description de la Grèce de Pausanias (115-
180), les peintures sur vases et le site archéologique d’Olympie.
En 500 avant J.-C., l’Ionie, actuelle région autour d’Izmir, et ses riches cités
grecques (Milet, Éphèse) se révoltent contre la domination perse. En dépit de
l’aide athénienne, la bataille de Ladé (494 av. J.-C.) est perdue. Quatre ans plus
tard, une invasion perse est arrêtée à Marathon en 490 avant J.-C. par les Athé‐
niens et les Platéens, habitants de la Grèce centrale. En 480 avant J.-C. une se‐
conde tentative échoue devant le sacrifice des Spartiates de Léonidas à la ba‐
taille des Thermopyles et la défaite navale de Salamine2. La découverte des
mines d’argent du Laurion permet à Athènes d’exercer une emprise économique
sur le monde grec. Vers 470 avant J.-C. Athènes ouvre l’ère de son empire en
prenant le contrôle de la Ligue de Délos. Il s’agit à l’origine d’une alliance mili‐
taire de circonstance destinée à conjurer le péril perse. Athènes profite de l’ar‐
gent du Laurion et de sa puissance navale, ou thalassocratie, pour s’imposer aux
autres cités qui deviennent ses vassales. Délos devient le siège de la confédéra‐
tion et abrite son trésor, jusqu’à son transfert à Athènes en 454 avant J.-C. Péri‐
clès (v. 495-429 av. J.-C.), un petit-neveu de Clisthène, est choisi pour gouver‐
ner Athènes. Il le fait avec un éclat tel que la période de son action est connue
sous le nom de « siècle de Périclès ». Désireux d’établir l’Empire athénien sur
des bases démocratiques, il institue une indemnité, le misthos, pour les citoyens
pauvres susceptibles d’exercer une magistrature. En 458 avant J.-C., il fait
construire les Longs Murs entre Athènes, Le Pirée et Phalère. Il fortifie ses
ports, afin de protéger ce territoire en cas de guerre, de plus en plus probable,
avec Sparte. Les mines du Laurion, le trésor de Délos qui se fond avec les
caisses athéniennes, permettent l’édification du Parthénon. Après 450 avant J.-
C. et la victoire de Salamine de Chypre, les Grecs et les Perses cessent de s’af‐
fronter, chacun se concentrant sur son propre territoire. De ce fait, la Ligue de
Délos est devenue sans objet, mais Athènes la maintient de force. Elle évolue
alors en confédération athénienne, les contributions deviennent des tributs dus à
Athènes, les confédérés des sujets athéniens. L’expansion d’Athènes inquiète
Sparte, qui mobilise ses alliés de la Ligue du Péloponnèse. La guerre dite du Pé‐
loponnèse éclate et dure de 431 à 404 avant J.-C. Elle entraîne la défaite et
l’abaissement d’Athènes. L’effondrement d’Athènes semble devoir octroyer à
Sparte la première place en Grèce. Mais ni l’Empire spartiate, ni un retour du
pouvoir athénien ne sauront perdurer. Thèbes, à son tour, exerce son hégémonie
sur les autres cités. Chacune de ces courtes dominations les épuise dans une
lutte fratricide permanente. Alors qu’elles n’ont pas clairement perçu le déclin ir‐
rémédiable dont elles sont elles-mêmes la cause, les principales cités grecques
laissent croître la puissance nationale des rois de Macédoine, qui vont mettre fin
à leurs querelles en les soumettant toutes.
La Ligue achéenne déclare la guerre à Sparte sans l’avis de Rome. Elle est
vaincue par Rome, Corinthe pillée et détruite (146 av. J.-C.). Toutes les villes
grecques conquises sont annexées à la province de Macédoine. Athènes se ré‐
volte en vain en 88 avant J.-C. Protectorat romain depuis - 146, la Grèce de‐
vient par la volonté d’Auguste province d’Achaïe en - 27.
La période hellénistique est celle que les historiens situent depuis la mort
d’Alexandre le Grand en 323 avant J.-C. jusqu’à Actium en 31 avant J.-C. Le
siège principal des lettres et des sciences est Alexandrie en Égypte. Les traits ca‐
ractéristiques de cette période sont l’érudition, l’art critique et l’étude des
sciences, l’adoption d’une langue commune qui survit jusqu’à la fin de l’époque
byzantine, la koiné.
La vie politique dans cette fin du VIe siècle avant J.-C. est caractérisée par la
mise en place par Clisthène d’une réforme en enlevant au genos, familles ayant
un ancêtre commun, les grandes familles et les grands propriétaires, toute leur
importance politique. À en croire Hérodote, il serait le fondateur du système dé‐
mocratique, bien que le terme de « demokratia » ne soit pas employé dans ce
cadre. Ce grand réformateur n’est connu que par bien peu de sources : celles des
opposants qui le citent, Hérodote dans l’Enquête et Aristote qui l’évoque dans
sa Constitution d’Athènes. Ce texte, connu à partir d’un papyrus trouvé en 1879,
en Égypte, à Hermopolis, décrit cent cinquante-huit constitutions de cités
grecques. La première partie décrit les différentes étapes de la démocratie, la
seconde détermine le rôle des pouvoirs législatif et exécutif, classe les citoyens,
fixe les droits et devoirs. La garde de la constitution à Athènes est confiée à des
nomothètes, législateurs nommés pour un an. Afin d’assurer le triomphe de la
cité sur le genos, la répartition tribale de la famille est remplacée par un décou‐
page territorial de l’Attique et d’Athènes. La ville, l’intérieur du pays et la région
côtière sont divisés en une centaine de petites circonscriptions, les dèmes, eux-
mêmes divisés en dix groupes, les trittyes. Le citoyen athénien se définit par le
nom du dème où il réside. La conséquence de cette mesure est de disséminer les
grandes familles puisque leurs membres peuvent appartenir à des dèmes diffé‐
rents. L’idée d’isonomie3, d’égalité entre les citoyens, est fondamentale et déci‐
sive pour la démocratie. Le Conseil des Quatre-Cents, institué par Solon, est
remplacé par un Conseil des Cinq-Cents, correspondant à cinquante fois dix dé‐
légués tribaux. Sous le commandement d’un stratège élu, les dix tribus four‐
nissent un régiment de fantassins, un régiment de phalangistes, lanciers en ar‐
mure, et un escadron de cavalerie. En 493 avant J.-C., Thémistocle (525-460
av. J.-C.) est nommé archonte. Dans l’histoire d’Athènes, il est perçu comme ce‐
lui qui « amena la cité à se tourner et à descendre vers la mer » pour reprendre
l’expression de Plutarque (Vies parallèles, IV)4. Il dote Athènes d’une flotte
puissante, de fortification et d’un port, Le Pirée, qui sera achevé en 479 avant
J.-C., devant la menace de Sparte et de ses alliés. La force de la cité repose sur
ses rameurs, les thètes, citoyens pauvres, et non plus sur ses hoplites, fantassins
lourdement armés, issus de la classe des propriétaires fonciers. La bataille de
Salamine est celle des thètes et Marathon celle des hoplites.
Le fonctionnement des institutions
L’ARCHITECTURE GRECQUE
Les temples au début du VIIe siècle sont encore bâtis sur le plan d’une
simple cella, pièce sanctuaire abritant la statue du dieu, avec parfois une co‐
lonne axiale. La transition du bois à la pierre dans la construction des temples se
fait peu à peu, même s’il s’agit d’abord des fondations qui supportent les co‐
lonnes. L’emploi des tuiles en argile pour couvrir le toit rend nécessaire une plus
grande solidité dans le soutènement, ce qui aboutit à remplacer le bois par des
colonnes de pierre. Dans les temples les plus anciens, une rangée de colonnes
est indispensable au point de vue architectural, dans l’axe longitudinal de la cel‐
la. Après le remplacement du bois par la pierre, les techniques de construction
ne changent pas, et les parties du bâtiment, jadis en bois, restent les mêmes. À
l’Héraion d’Olympie, toutes les colonnes ont été remplacées les unes après les
autres et Pausanias raconte qu’il possédait la dernière des quarante colonnes en
bois. Du point de vue décoratif, les métopes, panneaux rectangulaires ornés de
reliefs, les plus anciennes se résument à des plaques d’argile peintes comme
celles du temple d’Apollon à Thermos. Dans le dernier tiers du VIIe siècle avant
notre ère, les ordres ionique et dorique font leur apparition. L’ordre corinthien
n’apparaît qu’à l’époque romaine. La construction la plus représentative, vers 590
avant J.-C., reste le temple d’Artémis à Corfou. Les tyrans embellissent les
villes, Pisistrate et ses fils laissent à Athènes, sur l’Acropole, le vieux temple
d’Athéna, l’Hécatompédon. La riche famille eupatride (noble) des Alcméonides
fait exécuter en marbre et en pierres le temple d’Apollon à Delphes, s’assurant
ainsi la bienveillance de l’oracle. Dans les cités, au – VIe siècle, il n’existe pas en‐
core d’architecture privée, mais les travaux édilitaires se multiplient : aménage‐
ments de ville comme à Syracuse, fontaines d’Athènes, aqueducs de Mégare et
de Samos. Les grands sanctuaires s’organisent, de l’Ionie à la Sicile, édifiant des
trésors, petits édifices votifs. Ainsi le Trésor de Sicyone, à Delphes, dont les
métopes représentent la légende des Argonautes, ou celui de Siphnos illustrant
la guerre de Troie, le tholos circulaire de Marmaria. Les temples atteignent des
dimensions exceptionnelles comme celui d’Apollon, à Sélinonte, en Grande
Grèce, avec ses 110 m de long et ses 11 m de large. Une conception aussi gran‐
diose de l’architecture et de l’urbanisme se retrouve dans d’autres colonies de
Grande Grèce, à Métaponte, à Paestum.
Les trois ordres en colonnes
Le théâtre d’Épidaure
L’ARCHITECTURE HELLÉNISTIQUE
L’Acropole et le Parthénon
L’Acropole, c’est le nom de la colline qui surplombe Athènes à 156 m de hauteur. Le nom
d’Acropole, « Acropolis » en grec, signifie « ville haute ». On en trouve dans de nom‐
breuses cités grecques, à Corinthe, par exemple. L’Acropole et ses temples, ses monu‐
ments glorieux voués aux dieux, sont opposés à la « ville basse », où se traitent les af‐
faires des hommes. Celle d’Athènes offre quatre chefs-d’œuvre de l’architecture classique :
les Propylées, l’Érechthéion, le temple d’Athéna Niké et le Parthénon.
Les Propylées, véritables « portes d’entrée » du complexe de temples, ont été édifiés
entre 437 et 432 avant J.-C. Ils présentent une façade à six colonnes.
L’Érechthéion est le temple dédié à Érechthée, l’ancêtre fabuleux des Athéniens.
Construit entre 420 et 407 avant J.-C., il aurait abrité la plus ancienne statue de culte de la
déesse Athéna.
Le temple d’Athéna Niké (Niké : la Victorieuse) célèbre la victoire des Grecs sur les
Perses à la suite des guerres médiques (490 av. J.-C. et 480 av. J.-C.). Il met en scène le
rôle protecteur traditionnel de la déesse, qui doit toujours mener les Athéniens à la victoire.
Le Parthénon est le temple majeur d’Athéna. Il est édifié entre 447 et 438 avant J.-C.,
pendant que le stratège Périclès dirige la ville. Sa construction est confiée au plus grand
architecte et sculpteur classique, Phidias (490-430 av. J.-C.). Fait de marbre blanc, il
compte huit colonnes en façade, et dix-sept sur les côtés. La grande salle abrite la statue
de la déesse debout, sculptée par Phidias. Elle mesure 15 m et est qualifiée de chrysélé‐
phantine, c’est-à-dire faite d’or et d’ivoire. Tout autour du temple, sur les métopes, l’espace
entre les architraves, au-dessus des chapiteaux de colonnes et le fronton, court la frise des
Panathénées. C’est la représentation de la procession annuelle des jeunes filles et
femmes en l’honneur de la déesse.
LA SCULPTURE GRECQUE
La sculpture archaïque
Vers 580 avant J.-C., l’œuvre la plus célèbre reste celle de Polymédès d’Ar‐
gos, en ronde-bosse, représentant les deux frères d’Argos, Cléobis et Biton. En
comparaison du géométrisme schématique qui prévalait jusque-là, les deux sta‐
tues sont plus finement modelées, les traits physiques davantage accentués, no‐
tamment les genoux. Leur pose est celle des kouroi de l’époque. La tête reste en‐
core massive. Vers 560 avant J.-C., la représentation de la figure humaine se
libère des contraintes du géométrisme. Les deux statues les plus représentatives
sont l’Apollon de Ténéa en Corinthie et le Kouros du Ptoion IV, en Béotie, sta‐
tues qui n’ont plus rien de colossal puisqu’elles mesurent 1,50 m environ. Les re‐
liefs du corps apparaissent plus nettement et le fameux « sourire archaïque » fait
son apparition. Mais il faut attendre encore trente ans pour que le corps humain
soit représenté avec des structures internes apparentes, les muscles reflétant l’ac‐
tion en cours. La musculature abdominale prend cette forme de cuirasse qui de‐
viendra l’une des règles canoniques. Apparaît également la découpe antique du
bassin suivant une ligne d’inclinaison de celui-ci.
La sculpture de la Grèce classique
LA SCULPTURE HELLÉNISTIQUE
La sculpture, au IIIe siècle avant J.-C., est soumise elle aussi aux influences de
l’Orient. À Athènes, les maîtres de cette nouvelle tradition classique sont les fils
de Praxitèle, Timarchos et Céphisodote, auteurs d’un portrait du poète Mé‐
nandre. Des Éros adolescents, des satyres, le Faune Barberini, satyre endormi
dont Edmé Bouchardon fait une copie en 1726, témoignent de la vogue persis‐
tante de Praxitèle. Alors que l’influence de Scopas est sensible dans les têtes pa‐
thétiques, les portraits d’hommes d’État et de philosophes, les statues d’athlètes
s’inspirent plutôt de la tradition de Lysippe. La tradition classique d’Asie se ma‐
nifeste aussi dans ses écoles, avec des copies d’artistes. À Pergame, le premier
manifeste de l’école est l’ex-voto d’Attale Ier, élevé en souvenir de sa victoire sur
les Galates, dont l’auteur serait Épigonos. Le second est le grand autel de Zeus
dont la frise représentait, sur 120 m de long, la Gigantaumachie, combat des
dieux et des géants. Le maître du gladiateur Borghèse est un Éphésien, Agasias,
comme celui des Gaulois de l’Agora des Italiens de Délos. Au IIe siècle avant J.-
C., Délos accueille toutes les influences. Beaucoup de copies sont faites. Dans le
Péloponnèse, Damophon de Messène exécute l’Aphrodite ou Vénus de Milo.
Au Ier siècle avant J.-C., Athènes est le centre d’une renaissance néo-attique
avec Apollonios, fils de Nestor, qui signe le Torse du Belvédère, Glycon
d’Athènes l’Héraklès Farnèse, copie d’un original de Lysippe. Mentionnons aus‐
si, parmi les œuvres du Ier siècle avant J.-C., l’Apollon de Piombino, œuvre réali‐
sée en bronze selon la technique de la fonte à la cire perdue. Cette période tend
vers le réalisme ainsi que le montre le Groupe du Laocoon, où le prêtre troyen
Laocoon et ses deux fils sont tordus dans l’horreur d’être attaqués par les ser‐
pents, œuvre attribuée aux Rhodiens Agésandros, Athanadore et Polydore, vers
40 avant J.-C.
L’ART CÉRAMIQUE
La céramique connaît aussi des changements et son style s’oppose à celui des
basses époques mycéniennes et minoennes. Les ornementations délaissent les
formes animales et végétales, les dessins géométriques les remplacent. Le re‐
cours à la ligne droite, l’angle aigu, le cercle, l’absence de méandre sont caracté‐
ristiques de cette époque. Le style protogéométrique des premières périodes est
remplacé par le style géométrique qui libère le vase : on voit clairement le pied,
le corps, l’épaulement, le col. Ces différentes parties sont soulignées par une dé‐
coration appropriée. La panse et le col sont richement décorés. Au cours du
IXe siècle, la qualité s’accroît. Lors de la transition du IXe au VIIe siècle se produit
un changement qui consiste en la représentation de personnages stylisés géomé‐
triquement. Un triangle constitue la partie supérieure du corps, sur laquelle on
aperçoit la tête en forme de point. Ces représentations sont traitées de façon
théâtrale : sur les grands vases funéraires, c’est une lamentation sur les morts, et
sur les vases plus petits, les combats de héros apparaissent déjà. Le centre de ce
nouveau style est l’Attique, la région athénienne. Le Péloponnèse rivalise avec
Athènes, Sparte, les Ioniens sont moins concernés par ce nouvel esthétisme. En
ce qui concerne l’évolution spirituelle de cette époque, les documents font dé‐
faut, néanmoins on a retrouvé à Samos un autel archaïque, consacré à la déesse
Héra.
La céramique à figures noires et rouges
L’influence orientale, entre 725 et 625 avant J.-C., se révèle sur les peintures
sur vases. Le développement commercial inspire de nouvelles formes et de nou‐
veaux décors : Rhodes, Samos, Milo, Corinthe produisent des vases à décor
orientalisant de fleurs et de palmettes qui se répand sur tout le pourtour du vase.
Les motifs géométriques se raréfient de plus en plus dans la première moitié du
VIIe siècle avant notre ère pour laisser la place à des scènes souvent mytholo‐
giques. Les écoles dans diverses régions de la Grèce apparaissent. De nombreux
ateliers voient le jour à Naxos, à Mélos, à Délos, à Paros. Mais le plus célèbre
reste celui de Rhodes pour ses pots en céramique et ses assiettes. À la fin du
VIe siècle avant J.-C., – 575 marque le triomphe en Attique de la céramique à fi‐
gures noires avec Athènes comme centre de production, très influencé par Co‐
rinthe. Sophilos, Lydes, Amasis sont parmi les plus célèbres peintres de vases
qui nous soient parvenus. Nicosthènes, à fin du VIe siècle avant notre ère, est
sans doute l’inventeur de la technique à figures rouges sur fond noir.
4. La littérature grecque
La question homérique, entre ceux qui défendent la thèse d’un auteur unique
et ceux qui optent pour plusieurs voix, interroge à la fois l’identité de l’auteur et
la composition de l’Iliade et de l’Odyssée. Homère vit parce que ses œuvres
l’Iliade et l’Odyssée existent à travers les siècles. Introduits en Grèce par Ly‐
curgue selon la tradition, chantés par des rhapsodes, les poèmes d’Homère7
constituent à l’origine des morceaux détachés, chacun intitulé différemment.
L’Iliade présente les traits caractéristiques de ce qu’il est convenu de nommer
l’art homérique. Monument de la littérature, cette épopée se compose de près de
seize mille vers répartis en vingt-quatre chants. Les épisodes essentiels en sont
la querelle d’Achille et d’Agamemnon (chant I), la mort de Patrocle (chants XV
à XIX) et celle d’Hector (chants XX à XXIV), qui marque la réconciliation
entre le roi et le héros. Les descriptions sont simples, précises, montrant tour à
tour les héros comme des demi-dieux et comme des êtres de chair et de sang :
ainsi, Achille n’hésite pas à solliciter le concours de sa mère, la nymphe Thétis,
mais pleure à chaudes larmes la mort de Patrocle. Fréquentes, les répétitions de
vers ou de groupes de vers, rythmant le texte, étaient nécessaires pour l’aède qui
déclamait l’œuvre en musique, et appréciées d’un public qui pouvait connaître
par cœur ces courts passages.
À la différence de l’Iliade, épopée guerrière, l’Odyssée est une épopée à la
fois familière et domestique. La vie quotidienne y est évoquée dans de nom‐
breuses scènes : la plus fameuse est celle où Nausicaa, fille du roi Alcinoos, se
rend au fleuve pour laver du linge : « On lava, on rinça tout ce linge sali ; on
l’étendit en ligne aux endroits de la grève où le flot quelquefois venait battre le
bord et lavait le gravier » (chant VI). De même, Ulysse est un héros plus humain
que les valeureux guerriers de l’Iliade : proche de la nature, il est guidé par
l’amour de la patrie et du foyer. Assez fort pour résister à la séductrice Calypso
ou pour combattre le cyclope Polyphème, Ulysse pleure au récit de la guerre de
Troie fait par l’aède Démodocos, dans le palais d’Alcinoos ; « humain, trop hu‐
main », il lui arrive aussi de mentir, de tricher : « Devant les Phéaciens, il eût
rougi des pleurs qui gonflaient ses paupières ; mais, à chaque repos de l’aède di‐
vin, il essuyait ses pleurs » (chant VIII).
Les Grecs considèrent la musique comme un art majeur, au même titre que la
poésie ou la danse. L’époque archaïque, des origines au VIe siècle avant notre
ère, voit le triomphe des aèdes, chanteurs d’épopée de leurs propres œuvres,
s’accompagnant de la phorminx, ancêtre de la cithare, et des rhapsodes qui eux
chantent les œuvres des autres. L’art du chant se transmet oralement. Puis, à
l’époque classique, du VIe au IVe siècle avant J.-C., la musique s’intègre au sys‐
tème éducatif, liée à l’étude des mathématiques. Elle évolue ensuite de manière
autonome. La musique exerce son pouvoir sur les âmes, proche en cela des pra‐
tiques magiques illustrées par les accents de la lyre d’Orphée, capable même
d’enchanter les animaux et de charmer les divinités présidant aux Enfers, Hadès
et son épouse Perséphone, afin que lui soit rendue sa compagne défunte, Eury‐
dice. Il y a donc lieu de séparer les musiques amollissantes, qui dépouillent
l’âme de sa fermeté, des musiques épanouissant le courage, la vigueur, l’ardeur
guerrière. Les principaux instruments utilisés sont la lyre, la cithare, l’aulos,
flûte à anche double, la syringe ou flûte de Pan. La musique accompagne les cé‐
rémonies religieuses, les concours et jeux, la préparation au combat. Les parties
pour chœur des tragédies grecques sont chantées. La gamme la plus connue de
l’Antiquité grecque est la gamme dorienne : ré mi fa sol la si do ré, essentielle‐
ment descendante. Un système de gammes élaboré, ou mode, structure une mé‐
lodie. Le mode dorien est réputé austère, l’ionien voluptueux, etc. En revanche,
les Grecs ne connaissent pas l’harmonie. Nous ne possédons que quelques frag‐
ments, sur papyrus d’époque gréco-romaine, d’œuvres musicales, mais des ar‐
tistes fameux ont traversé le temps. Ainsi Timothée de Milet (v. 446-357 av. J.-
C.) ajoute quatre cordes à la lyre, accompagne ses chants lui-même à la cithare.
Il parvient à une grande expressivité. Un chant en l’honneur de la bataille de Sa‐
lamine permettait ainsi d’entendre jusqu’aux plaintes des naufragés.
La poésie
La poésie tient dans la littérature grecque une place particulière. En effet, elle
prend place à la fois dans la vie quotidienne pour célébrer jeux et victoires et
dans la vie religieuse pour s’adresser aux dieux ou présider aux cérémonies éso‐
tériques. Le poète est un homme inspiré par le divin tel que le suggéra plus tard
Platon8 dans Phèdre. L’aide reçue est souvent due à une muse. Homère en ad‐
jure une au début de chacune de ses épopées de raconter un récit, Hésiode,
dans la Théogonie9, raconte comment, grâce à elle, il sait ce qu’il doit chanter
après avoir entendu sur l’hélicon un instrument de musique à vent. L’étymologie
du terme poésie, « poïesis » en grec, souligne l’importance et la diversité du rôle
qu’elle joue dans la vie des anciens Grecs. Il signifie « savoir faire », dans le
sens de compétence, réduisant cet art à une technique, mais aussi « créer », au
sens de l’action qui transforme le monde, lui donnant une élévation spirituelle
autant qu’intellectuelle. Ainsi le poète a une double fonction : transmettre l’ins‐
piration divine qu’il reçoit, avec le meilleur savoir-faire possible.
◆ La poésie lyrique, ou ode, célèbre l’amour, la nature, la mort. À l’origine,
il s’agit de poèmes chantés accompagnés à la lyre, la musique est presque insé‐
parable de la poésie. Il en est ainsi pour les compositions lyriques d’Alcée de
Mytilène (VIIe s. av. J.-C.) et d’Anacréon de Téos (v. 550-v. 464 av. J.-C.). La
poésie élégiaque, qui chante la mélancolie, et iambique fait son apparition. À
l’hexamètre épique, vers de six pieds, succède le dimètre élégiaque, de quatre
pieds, illustré par Tyrtée. Enfin lui succède l’iambe, syllabe brève suivie d’une
longue, au rythme proche de celui de la langue, utilisé par Archiloque. Sappho
(VIIe s. av. J.-C.) et Anacréon de Téos, dont ne subsistent que des élégies, ré‐
digent des épigrammes où ils chantent l’amour et la jeunesse. Les principaux au‐
teurs sont Archiloque (712-664 av. J.-C.), Tyrtée (VIIe av. J.-C.) et Solon
(v. 640-558 av. J.-C.).
◆ Le style épique, des grands récits historiques, employé par Homère, appa‐
raît aussi chez Hésiode. Des nombreux ouvrages qu’on lui attribue, trois seule‐
ment nous sont parvenus : Les Travaux et les Jours, la Théogonie, Le Bouclier
d’Hercule. Il aime les maximes brèves, marquées par le bon sens. Par là, il se
fait comprendre et apprécier des classes populaires qui trouvent dans ses pré‐
ceptes de morale un fond d’enseignement à leur portée. Entre le VIIIe et
VIIe siècle avant J.-C., il compose le long poème de la Théogonie, dans lequel il
présente la multitude des dieux célébrés par les mythes grecs. Trois générations
divines s’y succèdent : celle d’Ouranos, celle de Chronos et celle de Zeus. À
cette généalogie divine s’ajoute une cosmogonie qui retrace la création du
monde. Les thèmes chers à Hésiode d’un âge d’or révolu et d’une humanité
vouée au malheur se retrouvent dans presque tous les grands mythes, textes fon‐
dateurs et philosophiques, de la Bible aux Confessions de Jean-Jacques Rous‐
seau. Pisandre de Rhodes (v. 645-v. 590 av. J.-C.) crée la première épopée
consacrée à Héraclès, l’Héracléide.
La naissance de la tragédie
« Avoir inventé la tragédie est un beau titre de gloire ; et ce titre de gloire ap‐
partient aux Grecs », écrit Jacqueline de Romilly10. En effet, la tragédie
connaît ses premiers essais, vers 530 avant J.-C., à l’occasion de la 61e olym‐
piade11. Les fêtes de Bacchus, célébrées à l’époque des vendanges, sont accom‐
pagnées de danses et de chants spéciaux, le dithyrambe, en l’honneur de ce dieu.
Un bouc est immolé pour l’occasion, ce que rappelle l’étymologie du mot tragé‐
die : tragos (bouc) et oidê (chant), le « chant du bouc ». Thespis (580-?), en
535 avant J.-C., imagine de faire donner la réplique au chœur par son chef, le
coryphée. Le chœur, partie essentielle, est composé de personnages intermé‐
diaires entre les hommes et les dieux. Leur rôle est de calmer les passions. Ils ne
quittent jamais la scène. À la différence de nos pièces, celles des Grecs ne sont
jamais coupées par des actes. La pièce commence par une scène d’exposition, le
prologue, puis le chœur entre en chantant dans l’orchestre, le parados. Ensuite,
les scènes jouées se succèdent. La scène, disposée en demi-cercle, est séparée
du public par un orchestra, cercle de terre battue, notre parterre.
La part de l’éloquence
LA COMÉDIE
En poésie, les seuls genres originaux sont ceux des bucoliques ou idylles,
consacrées aux amours des bergers. Les principaux poètes sont Bion de
Smyrne (v. 300 av. J.-C.), qui se distingue plutôt dans la poésie lyrique, Calli‐
maque (v. 305-v. 240), Théocrite (v. 315-v. 250). Ce dernier donne un véri‐
table essor à la poésie pastorale présentant des scènes vivantes encadrées dans
de riants paysages éclairés par le soleil de Sicile. Apollonius de Rhodes
(v. 295-215 av. J.-C.) se distingue dans la poésie épique avec Les Argoniques,
qui relatent l’expédition des Argonautes. Aratos de Soles (v. 315-v. 245 av. J.-
C.) est connu pour sa poésie didactique, dont le but est de former les esprits.
Les Ptolémée tentent vainement de remettre au goût du jour, à Alexandrie, les
concours dramatiques. C’est à Athènes qu’il faut chercher à cette époque le véri‐
table créateur de la comédie : Ménandre (342-292 av. J.-C.). S’abstenant de
toute satire personnelle, la comédie crée des personnages véritables, évoluant au
sein d’une intrigue fort simple.
5. L’histoire de l’histoire
Les premiers historiens, sûrement involontaires, pourraient être les aèdes, ces
poètes épiques de l’époque archaïque qui, dans leurs poèmes, redonnent vie aux
traditions des âges précédents. Ce besoin de consigner les premiers événements
est celui des logographes, les chroniqueurs jusqu’à Hérodote, ainsi nommés par
Thucydide. En fait, ils travaillent pour les historiens au sens moderne du terme
en collectant les matériaux de réflexion, « des événements vrais qui ont
l’homme pour acteur15 ». L’esprit de recherche appliqué à l’étude de l’homme en
tant qu’être social s’impose comme la conséquence logique des réflexions philo‐
sophiques qui précèdent. Le travail de conceptualisation de Platon et d’Aristote,
tel que le souligne François Châtelet16 (1925-1985), a été indispensable à
l’émergence de l’histoire. L’Historia, ou « Enquête », constitue les débuts de
l’histoire telle qu’elle sera définie aux XVIIe et XVIIIe siècles, comme le rappelle
Henri-Irénée Marrou (1904-1977) : « Le savoir par l’intermédiaire du mot
histôr “celui qui sait”, l’expert, le témoin17 ». Au début, l’historien relate faits et
savoirs. Puis il se détache de la chronique pour devenir analyste et dégager une
compréhension des faits.
◆ Hécatée de Milet (v. 550-v. 480 av. J.-C.) est considéré comme l’un des
premiers logographes, car après avoir visité tous les pays de son temps il
consigne ses connaissances dans un ouvrage intitulé Périégèse. Il aurait dessiné
l’une des toutes premières cartes du monde, la Méditerranée au centre, entourée
de l’eau d’un fleuve qu’il nomme « océan ». Les Généalogies, son second ou‐
vrage, traitent des légendes ioniennes et doriennes.
◆ Hérodote d’Halicarnasse (v. 484-v. 425 av. J.-C.) voyage beaucoup en
Asie, à Babylone, en Égypte. Il est à la fois considéré comme le père de l’ethno‐
logie et de l’histoire. En effet, l’histoire des Scythes n’a été connue pendant long‐
temps qu’à travers ses récits. La force d’Hérodote est de raconter ce qu’il voit.
Les mythes ne sont plus son propos. Il tente d’expliquer les événements aux‐
quels il assiste. Histoires, ou Enquête, est le titre donné à son propre ouvrage, à
prendre au sens de recherche. Son œuvre comprend neuf livres, chacun d’entre
eux portant le nom d’une muse, dont l’objet principal est la grande lutte des
Perses contre les Grecs, c’est-à-dire les guerres médiques dont la durée fut de
cent vingt ans.
◆ Thucydide (460-395 av. J.-C.), l’Athénien, fait un pas de plus dans la
conception moderne de notre histoire. Il pose les premiers principes de la mé‐
thode historique. L’histoire devient politique et savante. Il ne s’agit plus de dra‐
matiser les événements. L’Histoire de la guerre du Péloponnèse centre son inté‐
rêt sur la politique : quelles sont les raisons de l’affaiblissement d’Athènes ?
Quelle est l’origine de ses maux ? Il reste d’une impartialité absolue. Comme
Hérodote, Thucydide a recours à la notion d’ironie, érigée par Socrate au rang
de méthode. Elle consiste à s’interroger ou à interroger un raisonnement ou la
connaissance pour en dévoiler les lacunes.
◆ Xénophon (426-354 av. J.-C.) est le premier biographe de l’Antiquité. Le
quatrième de ces premiers historiens a laissé des ouvrages historiques, poli‐
tiques, philosophiques et didactiques. Les premiers comportent des récits,
comme l’Anabase, relatant la retraite des Dix Mille, dans lequel il est, un peu à
la façon de César, l’historien de ses propres exploits. On y trouve de précieux
documents historiques, mais aussi géographiques et stratégiques. En sept livres,
ses Helléniques continuent l’œuvre de Thucydide, mais c’est surtout l’Apologie
de Socrate qui le rend célèbre, car il y décrit l’attitude de celui-ci lors de son
procès.
1 2 3 4 5
1 a b c d e
2 f g h ij k
3 l m n o p
4 q r s t u
5 v w x y z
Ainsi, pour la lettre e, on aura une torche brandie à gauche et cinq à droite.
◆ Diodore de Sicile (Ier siècle av. J.-C.) publie une Bibliothèque historique,
long ouvrage divisé en quarante livres sur l’histoire, depuis les temps les plus
anciens, jusqu’à l’an 60 avant J.-C. Il donne de remarquables conseils sur la fa‐
çon d’écrire l’histoire. Son œuvre est aussi une mine de renseignements en ce
qui concerne la géographie (la Gaule, l’Ibérie, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Arabie,
l’Inde mais aussi la Grèce et la Sicile), l’archéologie, l’ethnographie, les sciences
physiques et naturelles.
6. La philosophie
Au VIe siècle avant J.-C., à l’opposé de la mentalité positive imposée par les
Ioniens de l’école de Milet (Thalès, Anaximandre, Anaximène), les religions à
mystères, l’orphisme, le culte dionysiaque, le pythagorisme développent en
Grande Grèce un puissant courant mystique. Au milieu du Ve siècle, sous l’im‐
pulsion de l’école atomiste d’Abdère, les spéculations physiques, bien qu’arrêtées
un moment par l’idéalisme des éléates, reprennent. Les philosophes, à la suite
des guerres médiques, s’installent à Athènes, devenu un centre intellectuel et ar‐
tistique. Par la suite, ils exploitent l’instrument logique apporté par les sophistes,
remplaçant le logos, discours rationnel, par la dialectique, tel Socrate, et mettent
à profit l’héritage de l’Ionie et de la Grande Grèce, tel Platon. Aristote montre
ensuite que sa philosophie première ne peut être réduite à une simple physique.
L’école cynique garde de Socrate le goût de l’anticonformisme religieux et so‐
cial. À la mort d’Alexandre, sceptiques, épicuriens et stoïciens ont en commun
la préoccupation de l’individu et celle de l’instant immédiat. Leur démarche
pour échapper à la succession des crises politiques qui surviennent est de cher‐
cher les moyens d’éviter le malheur.
La philosophie grecque naît des questions posées sur la nature. L’école io‐
nienne est la plus ancienne école de philosophie. Elle fleurit dans les grandes ci‐
tés côtières d’Asie Mineure, plus particulièrement dans la ville de Milet, et re‐
monte au VIIe siècle avant J.-C. Ces premiers sages qui se nomment eux-mêmes
des curieux de la nature – des « physiciens » ou des « physiologues » –
cherchent les principes et les causes de tout, l’explication des phénomènes phy‐
siques sans avoir recours à celle d’une intervention divine en mettant en avant
un premier principe matériel. Plusieurs noms sont à retenir.
◆ Thalès de Milet (v. 625-v. 546 av. J.-C.) est considéré comme le père de
l’astronomie. Il rapporte d’Égypte des faits mathématiques. Aucun écrit de Tha‐
lès ne nous est parvenu, et il n’existe aucune source contemporaine. Son nom fi‐
gure parmi les Sept Sages. De nombreuses sentences lui furent attribuées,
comme « Connais-toi toi » et « Rien de trop ». On suppose aussi qu’il a utilisé
ses connaissances de la géométrie pour mesurer les pyramides d’Égypte et cal‐
culer la distance de la côte des navires en mer. Le poète philosophe Xénophane
(v. 570-v. 475 av. J.-C.) a affirmé que Thalès avait prédit l’éclipse solaire qui a
arrêté la bataille entre le roi de Lydie Alyatte (610-560 av. J.-C.) et Cyaxare, roi
des Mèdes (625-585 av. J.-C.), en 585. On lui attribue aussi la découverte de
cinq théorèmes géométriques19. L’affirmation selon laquelle Thalès a été le fon‐
dateur de la philosophie européenne repose essentiellement sur Aristote (384-
322 av. J.-C.), qui écrit que Thalès a été le premier à suggérer un substrat maté‐
riel unique pour l’univers, à savoir, l’eau. Sa cosmogonie fait de l’eau toute chose
et toute vie. Il emploie le terme d’archè, pour faire allusion à ce principe pre‐
mier. Il pense que la matière, celle qui compose toute chose et tout être, est en
perpétuelle transformation et que celle-ci est produite par les dieux.
◆ Anaximandre (610-v. 546 av. J.-C.) est le premier savant à avoir dressé
une carte des limites de la terre et de la mer. La théorie de Thalès est bientôt
remplacée par celle d’Anaximandre, son disciple, qui délaisse l’eau comme élé‐
ment fondamental et la remplace par l’apeiron, espace illimité, l’infini. Seul un
fragment du travail de ce philosophe nous est parvenu. Il est le premier à penser
que le monde visible n’est pas le seul monde existant, d’autres univers meurent
et naissent dans un espace infini. Il aurait également mis en place un gnomon,
bâton projetant une ombre, à Sparte, et l’aurait utilisé pour démontrer les équi‐
noxes et les solstices et peut-être même les heures de la journée. Pour lui, la
terre est plate : il la représente comme une sorte de cylindre flottant entre le so‐
leil et la lune, anneaux creux remplis par le feu. Comme Thalès, il énonce une
hypothèse sur les origines de la vie. Il a également supposé que les premières
créatures provenaient de la mer, êtres recouverts d’écailles. Les hommes consti‐
tueraient la dernière étape de l’évolution. Anaximandre a aussi examiné les
causes des phénomènes météorologiques tels que le vent, la pluie et la foudre.
Alors que Thalès avait déjà renoncé à des explications divines du monde autour
de lui, Anaximandre est allé beaucoup plus loin en essayant de donner un
compte unifié de toute la nature.
◆ Anaximène (v. 585-v. 525 av. J.-C.) fournit une explication de la rotation
des astres en les comparant à des disques plats. Il reprend le concept d’air. Son
œuvre est peu connue, à la différence de celle d’Anaxagore (500-428 av. J.-C.),
qui est considéré par Sextus Empiricus (v. 126-210) comme « le physicien par
excellence20 ». Ses écrits n’existent plus que dans le passage de ceux d’auteurs
plus tardifs. Comme pour les théories précédentes, il s’agit encore d’expliquer le
passage du non-être à l’être. Tout d’abord, le principe absolu est le monde
concret, l’être empirique posé comme absolu. Ensuite, celui-ci se voit défini
comme l’être pur, détaché du concret, non plus empirique et réel, mais logique
et abstrait. Plus tard, il devient un mouvement, un processus de polarité. Selon
Anaxagore, tout est issu d’un je-ne-sais-quoi indéterminé et confus. Ce qui fait
sortir les choses de cet état, c’est l’intelligibilité organisatrice, le noûs. Cette dé‐
couverte de l’intellect comme cause du mouvement est fondamentale dans l’his‐
toire de la pensée grecque.
◆ Anaxagore de Clazomènes (500-428 av. J.-C.) croit à la pensée organisa‐
trice, le noûs. Comme Empédocle, il reconnaît que notre pensée est dépendante
des sens et il s’appuie sur la force de la raison appuyée par l’expérience. Celle-ci
le conduit à la doctrine des homoeméries, appelée ainsi depuis Aristote et qui
signifie « parties semblables ». Tout être est un mélange de tous les « objets »,
qu’il s’agisse de n’importe quel être particulier ou de l’état initial de l’univers. Il
n’y a plus d’éléments au sens d’Empédocle, c’est-à-dire de réalités qui se perdent
dans un composé en se mélangeant, il n’existe que des objets qui ne se perdent
jamais et se conservent partout, car en se mélangeant, ils se juxtaposent mécani‐
quement. Il en vient à élaborer une théorie où chair et os pouvaient se constituer
à partir d’éléments végétaux.
◆ Pour Héraclite d’Éphèse (v. 550-480 av. J.-C.), tout est en perpétuel de‐
venir. Le feu est en même temps matière et raison, logos. Héraclite, le dernier
des Ioniens, est le premier à avoir esquissé une théorie de la connaissance, la
doctrine du logos. Il développe en effet l’opposition des contraires et l’harmonie
capable de les unir momentanément. Tout selon lui dans l’univers est réglé par
la loi universelle de l’être. Héraclite fait du feu l’élément principal, sa source de
vie et sa source de destruction en alternance. Il y a continuellement lutte. L’exis‐
tence est la conséquence de l’accord fugitif de ces deux moments opposés. S’il
saisit la double face des choses, il ne prétend pas pour autant que chaque
contraire passe dans son contraire et qu’ainsi la thèse et l’antithèse se dépassent
dans une synthèse. Il est le premier à qualifier les pythagoriciens de « philo‐
sophes ».
Les Anciens sous-entendaient par Vers d’or les vers où la doctrine la plus
pure est enfermée. Ils en attribuent à Pythagore la rédaction, non qu’ils tenaient
celui-ci pour son auteur exact, mais parce qu’ils pensaient que cette poésie
contenait l’essentiel de la doctrine qu’il avait exposée. Vers la fin de sa vie, Py‐
thagore s’enfuit pour Métaponte, à la suite du complot fomenté en son absence
contre tous les pythagoriciens. Il y serait mort à l’âge de quatre-vingt-dix ans.
C’est à partir des Vers d’or, règle de la confrérie, que l’on peut reconstituer la
doctrine et la méthode de Pythagore. Pour la première fois, dans l’histoire occi‐
dentale, un maître instaure un système méthodologique qu’il tente de faire ap‐
pliquer sur plusieurs années.
Les atomes
Les atomistes pensent que les atomes ont un mouvement continu et éternel
faisant partie de leur essence même. Les univers font naître des atomes et du
vide. Chacun d’eux provient d’un tourbillon « de toutes sortes d’aspects »
(ideôn). À l’origine, il n’a pas de mouvement parfaitement défini, mais il se ré‐
gularise avec, au centre, les atomes les plus réfractaires. Le mécanisme réduit
l’âme comme le reste à n’être qu’un agrégat d’atomes. Seule la nécessité réalise
la continuité de ce mouvement, son mécanisme. Mais il s’agit d’une physique
sans physis. Lorsque ce terme est employé, il prend le sens de « formes », de
« figures » ou d’idées (idea), terme qui prendra toute sa signification chez Pla‐
ton.
◆ Socrate (470-399 av. J.-C.) est connu pour ne pas avoir consigné par écrit
sa doctrine et, si nous le connaissons, c’est de manière modeste par Platon et
Xénophon. Fils du sculpteur Sophronisque et d’une sage femme, il naît à la fin
des guerres médiques, à Athènes. Socrate est le philosophe moral qui a voulu
éveiller ses concitoyens à travers sa vie et son exemple, par la réflexion ration‐
nelle menée dans ses entretiens dialogués. Il les pousse à un véritable examen
de soi par la relation dialoguée et son jeu « dialectique », qui consiste à montrer
par une série de questions enchaînées que l’on peut réfuter son adversaire en le
mettant en contradiction avec lui-même, méthode pratiquée dans les milieux so‐
phistiques. Ce qui se dégage de cette réfutation n’est pas une vérité, mais la faus‐
seté de l’opinion de celui à qui l’on s’adresse. La dialectique socratique nécessite
l’adhésion de soi-même à ses propres paroles. Socrate s’est illustré par trois faits
qui dominent sa biographie : dans l’affaire des généraux de la bataille des Argi‐
nuses, accusés de trahison, il est le seul à refuser de les juger collectivement ;
sous le gouvernement tyrannique des Trente, il refuse, au péril de sa vie, de
prendre part à une arrestation comme on le lui a ordonné ; lors de son procès,
son intransigeance le mène à la mort. Socrate, nous dit Aristote25, recherche en
toute chose le général et applique d’abord la pensée aux définitions. C’est là
toute sa méthode dialectique : « La méthode dialectique est la seule qui tente de
parvenir méthodiquement à l’essence de chaque chose26. » Socrate pratique aus‐
si la maïeutique ou accouchement des esprits. Il recherche ou fait rechercher à
son interlocuteur la définition générale qui est la loi même de la chose en ques‐
tion.
Le premier travail des sophistes concerne d’abord celui des mots. Parler, c’est
convaincre, et le besoin de mettre au point une méthode imparable se fait sentir.
La grammaire figure donc comme leur œuvre. Ils étudient l’origine des mots,
l’étymologie, la structure des propositions, la signification des temps et des
modes. Protagoras distingue les trois genres des substantifs, les temps des
verbes. Prodicos dispense un cours sur les synonymes. Hippias d’Élis se vante
de connaître la puissance des lettres et des syllabes. Il faut ajouter que les so‐
phistes sont liés à une théorie de la connaissance. Selon Protagoras, il n’existe
pas de vérité absolue, nous ne pouvons jamais dire d’une chose qu’elle est, mais
seulement qu’elle est en devenir. Sur toute chose, il existe deux logoi, discours
rationnels, qui s’opposent l’un à l’autre. De là, sa proposition célèbre : « De tous
les objets, la mesure est l’homme ; de ceux qui existent, en tant qu’ils existent ;
de ceux qui n’existent pas, en tant qu’ils n’existent pas. » Ce qui signifie qu’à par‐
tir de tout objet peuvent être mises au point des séries de propositions, montrant
comment des valeurs contradictoires, le beau, le laid, le juste, l’injuste, sont au
cœur du réel.
◆ Platon (v. 428-v. 347 av. J.-C.) est à l’origine du fondement de la pensée
méthodique. Il réalise une synthèse de toutes les spéculations antérieures et
contemporaines, mais n’élabore aucun véritable système. Il s’impose comme le
père de la philosophie idéaliste en critiquant le monde sensible, social et poli‐
tique. Aux idées éternelles, simples et absolues, il oppose les choses du monde
sensible, éphémères, composées et relatives. À la fois théorie de la connaissance
et théorie du salut qui rappelle ses liens étroits avec le pythagorisme, sa philoso‐
phie se développe par la suite en un double axe : spiritualiste, auquel se rat‐
tachent Plotin, saint Augustin, Malebranche, et rationaliste, dont se réclament
Leibniz et Husserl (idéalisme objectif). Bien que désillusionné par la tyrannie
des Trente, Platon est certain qu’Athènes a besoin d’une politique fondée sur
une philosophie. Pourtant sa grande œuvre reste la création de l’Académie où
sont enseignées la philosophie, les mathématiques, la politique et la médecine.
L’Académie est à l’origine le nom d’une promenade d’Athènes, endroit légué par
un contemporain de Thésée, Akadêmos. L’ensemble des thèses platoniciennes27
est fait pour repousser celles des sophistes. D’après l’allégorie de la caverne, des
hommes enchaînés dans une caverne tournent le dos à l’entrée et ne voient que
leurs ombres qu’ils prennent pour la réalité, au livre VII de la République, il
existe deux mondes distincts – mais néanmoins en liaison – dans la connais‐
sance :
ARISTOTE, L’ENCYCLOPÉDISTE
La force du syllogisme
La doctrine des catégories consiste à reconnaître, quel que soit le sujet dont
on parle, que le réel peut se ranger dans toutes ses attributions : la substance, la
qualité, la quantité, la relation, le lieu, le temps, la situation, l’avenir, l’agir ou le
pâtir. Aristote distingue deux modes de l’être : l’acte et la puissance. L’être en
acte a une forme et une perfection déterminée, l’être en substance est suscep‐
tible de modification, de perfectionnement. Il se demande comment on peut
respecter l’unité de l’être en utilisant pour le définir une multiplicité de termes.
Il en vient à dire que chaque substance peut exister en puissance et en acte. Si
nous partons de cette idée de mouvement, nous parvenons à nous faire une idée
de l’être assez exacte : ainsi la statue existe en puissance bien avant que le sculp‐
teur ne la réalise, elle existe en acte lorsqu’il achève son travail. La puissance
constitue l’intermédiaire entre l’être et le non-être. Elle n’a pas d’existence propre
et ne se conçoit que par rapport à l’être qui l’achève, c’est-à-dire par rapport à
l’acte.
Tels sont les deux principes essentiels qui, selon Aristote, expliquent l’uni‐
vers. Les choses se meuvent et passent ainsi de la puissance à l’acte. Nous avons
vu qu’il fallait quatre causes pour qu’elles se réalisent. La place des êtres dans la
nature dépend de leur hiérarchie. Aux échelons supérieurs, se trouve l’homme
dont l’âme est spirituelle et les animaux dont l’âme est sensitive. Dans les
plantes, la forme devient végétative. À la différence de Platon, l’âme n’est plus
prisonnière du corps, c’est l’entéléchie d’un corps organisé ayant la vie en puis‐
sance. Il veut signifier que l’âme est le premier principe de l’organisation et de la
vie du corps. Celui-ci est en puissance de vivre : il a la vie en acte par la vertu
de l’âme à laquelle il est uni. L’âme possède aussi la faculté de raisonner et de
sentir.
Le cynisme
Le scepticisme
La philosophie d’Épicure (v. 341-270 av. J.-C.), le fondateur, est avant tout
une morale dont le but essentiel est l’accès à l’âme par la sérénité. Épicure naît
vers 341 avant J.-C. sur l’île de Samos où ses parents colons se sont installés. Il
fonde sa première école à Mytilène et y professe jusqu’à sa mort en – 270. Il re‐
prend la philosophie atomiste de ses prédécesseurs Leucippe et Démocrite.
Celle-ci se heurte à deux obstacles : la croyance aux dieux et à l’immortalité de
l’âme, la croyance à une nécessité inéluctable. Pour se débarrasser de ses
craintes, une physique précède la morale, exigeant la connaissance de certaines
règles pour distinguer le bien du mal. Ce sera le but de la canonique (logique).
La canonique, selon les épicuriens, est la science du critère et constitue une vé‐
ritable épistémologie. L’épicurisme croit que le devoir de l’homme est de re‐
chercher le bonheur que l’on peut trouver dans la sagesse. L’ensemble de sa doc‐
trine aura pour plus illustre représentant Lucrèce qui fera du système un magni‐
fique poème : le De rerum natura (De la nature des choses). Le grand poète
Horace se portraiture en « pourceau du jardin d’Épicure », Épicure enseignait en
effet dans un jardin. La doctrine d’Épicure se définit par sa morale qui insiste
sur le but à atteindre, le souverain plaisir, et l’absence de douleur. Pour cela il
conseille au sage de vivre près de la nature et de se garder de ses passions. Il
distingue trois causes engendrant la crainte : la mort, la fatalité, les dieux. Il faut
partir des choses visibles pour connaître celles qui sont invisibles. C’est par le
biais du langage qu’elles s’expriment. Puis c’est en les confrontant avec les sen‐
sations et avec l’intuition que l’on peut les observer. Sa doctrine se fonde sur
l’empirisme et ce qui concerne le problème de la perception sur le matérialisme.
La conception de l’homme est matérialiste pour Démocrite comme pour Épi‐
cure : « L’âme, cette substance si mobile doit être formée des atomes les plus
petits, les plus lisses, les plus arrondis. » Lorsque ces atomes sont mis en mou‐
vement par des éléments extérieurs, qu’il y a contact, naissent les sensations.
Véritables émanations issues des objets vers les sens, les simulacres permettent
par leur structure de frapper directement les sens. L’âme dans la conception
d’un tel système est mortelle. Divisés en deux parties distinctes, soit les atomes
se concentrent dans la poitrine, et sont appelés « intellect », soit ils se diffusent
dans tout le corps et sont appelés « âme ». Les mouvements de l’âme sont donc
les mouvements des atomes. Ces derniers se meuvent en ligne droite de haut en
bas, en vertu de leur seule pesanteur. Pourtant en déviant de leur simple trajec‐
toire ils peuvent se heurter et se combiner avec d’autres atomes, c’est le clinamen
de Lucrèce, autrement dit la déclinaison. Épicure s’est élevé contre la religion
mais essentiellement contre la superstition. Il ne nie pas l’existence des dieux
mais veut montrer que les divinités, au contraire, ont un très grand rôle à jouer
dans l’acquisition du bonheur et de la sagesse.
7. La religion grecque
La Grèce vit par ses dieux. Ils sont la source des institutions, de la vie ci‐
vique, artistique, et la source d’inspiration des poètes. Il est possible de distin‐
guer une triple origine aux dieux grecs : personnification de forces naturelles,
culte des ancêtres défunts, dieux importés d’Orient. La religion grecque est une
affaire locale, de la cité, de la tribu, de la famille, de chaque individu même.
Certes, les grandes divinités panhelléniques sont reconnues et vénérées partout,
mais, jalousement, chaque cité leur décerne un qualificatif local pour mieux se
les approprier. C’est ainsi qu’à Athènes, la ville dont elle est éponyme, la seule
Athéna est vénérée sous les formes suivantes :
LA RELIGION DE LA CITÉ
Les familles se regroupent, plusieurs génos forment une phratrie chez les
Grecs ioniens et doriens. À leur tour, les phratries forment la subdivision d’une
tribu ou phylê. La phratrie est une association religieuse et civile. Religieuse, car
chaque phratrie honore son dieu propre, en plus de Zeus Phratrios et d’Athéna
Phratria. L’athéisme, ou la simple accusation de s’en réclamer, de le prôner, re‐
vient aux yeux des magistrats à s’exclure de la vie civique dans ses fondements
mêmes. C’est l’un des chefs d’accusation portés contre Socrate, le plus grave.
C’est à la cité que revient d’édifier et d’entretenir les sanctuaires. Pour les princi‐
paux dieux, le téménos est vaste. Le temple est entouré de bois, jardins, her‐
bages, où peuvent s’ébattre les animaux favoris de la divinité : bœufs pour Hé‐
lios, chevaux ou paons pour Héra, etc. Religion de la cité, la religion grecque
laisse l’homme seul face à son destin, il doit trouver une réponse à la nature de
ses rapports avec les dieux, avec les autres hommes, se forger une morale. Les
dieux immortels, et non éternels, s’opposent de ce fait aux hommes mortels. Ces
derniers doivent s’attacher à une conduite respectueuse, à ne pas vouloir dépas‐
ser leur condition, à ne pas se laisser gagner par l’hybris, la démesure. Il faut
suivre la dikê, la loi commune, la coutume. Chacun a sa place et doit s’y tenir.
Pourtant, dieux et hommes sont soumis au destin, la morale des hommes est va‐
lable pour les dieux.
Le héros civilisateur
La création du monde
La création de l’homme
La création de l’homme, telle qu’elle est relatée par Hésiode dans la Théogo‐
nie et par Eschyle dans le Prométhée enchaîné, n’est pas due aux dieux seuls.
Leur auteur en est le Titan Prométhée, dont le nom signifie en Grec « le pré‐
voyant ». Il démontre cette qualité en conseillant à ses frères Titans de ne pas
affronter Zeus directement, mais d’employer la ruse, préférable à la force face
au maître des dieux. Ne recevant aucun soutien, Prométhée rallie le camp de
Zeus, et évite de ce fait d’être précipité au Tartare. Selon la Théogonie, c’est lui
qui façonne les hommes à partir d’une argile de Béotie. Immortel, Prométhée
n’est toutefois pas un démiurge. Sans le souffle, ses figurines de terre ne peuvent
s’animer. Il reçoit alors l’aide de la déesse Athéna, fille de Zeus, qui vient leur
insuffler la vie. Par la suite, Prométhée doit continuer à protéger l’humanité ain‐
si créée de la colère de Zeus, qui entend les priver du feu pour les anéantir.
Avant la venue de l’homme actuel sur la terre, d’autres grandes races l’y ont pré‐
cédé, suivant Les Travaux et les Jours d’Hésiode : les hommes de l’âge d’or, ceux
de l’âge d’argent, de l’âge de bronze, enfin les héros et demi-dieux. L’humanité
n’est en conséquence que la race de fer, la plus tardivement apparue, vouée,
contrairement à celles plus tôt venues à l’existence, à connaître les affres des mi‐
sères proprement humaines.
La médecine
Le dieu de la médecine, Asclépios, s’illustre déjà dans l’Iliade par deux de ses
fils, Machaon et Podalire, à la tête de Thessaliens et cités comme médecins.
Même si elle existe déjà à cette époque, la médecine ne sera pleinement recon‐
nue qu’au Ve siècle avant J.-C. avec Hippocrate. Sans doute héritée des civilisa‐
tions proche-orientales, la médecine grecque tire ses moyens de soigner des
plantes, des rituels et des dieux. Il n’est pas étonnant que, malades, les Grecs se
tournent d’abord vers leurs dieux. C’est à Apollon que l’on attribue le pouvoir de
guérison. L’imagination populaire enrichit ce thème, en fait le centaure Chiron
détenteur, qui lui-même fait d’Asclépios l’héritier de sa science. Ce dernier de‐
vint si habile dans l’art de guérir qu’Hadès finit par se plaindre à Zeus du trop
grand dépeuplement des Enfers. Des temples lui sont édifiés à Épidaure, Cos,
Cnide, Cyrène, Rhodes. Les asclépiades, des religieux, prodiguent alors les mé‐
dicaments et effectuent les cérémonies requises. Jusqu’alors les Grecs n’ont
connu que le médecin ambulant, le demiourgos, qui se déplace avec ses instru‐
ments. Les écoles vouées à Asclépios acquièrent une certaine renommée,
comme celle de Crotone où exerce Alcméon (actif vers 500 av. J.-C.). Il dis‐
sèque d’abord des cadavres d’animaux afin de comprendre comment ceux-ci
sont constitués, leur fonctionnement de l’intérieur. Il décrit le nerf optique et le
canal qui permet de faire communiquer l’oreille interne et le tympan, appelé
aussi trompe d’Eustache du nom de son découvreur, deux mille ans plus tard,
Bartolomeo Eustachi. L’école de Cnide et celle de Cos portent davantage leur
attention sur les maladies et les soins à donner. Hippocrate (v. 460-v. 377
av. J.-C.) joue pour elles un rôle décisif, puisqu’il fait la synthèse de leurs buts.
À son époque, le corps est supposé être constitué des quatre éléments (terre,
eau, air, feu), caractérisés par les quatre types d’humeur correspondant à quatre
types humains : le sang, la lymphe, l’influx nerveux, la bile. Ses traités liés à la
pathologie, à l’hygiène, à l’anatomie, à la thérapeutique nous sont parvenus en
assez grand nombre. Le serment portant son nom, extrait des Aphorismes, est
encore là aujourd’hui pour rappeler la déontologie. Avec Hippocrate, une méde‐
cine rationnelle se constitue : la relation immédiate médecin/patient devient
centrale. Sa classification des tempéraments est reprise par Galien, le médecin
grec au IIe siècle après J.-C., mais aussi par Lavater au XVIIIe siècle et même jus‐
qu’au XXe siècle par Pavlov qui s’appuya sur sa théorie et la défendit. C’est à
Alexandrie qu’est encouragé, par l’intermédiaire des Ptolémée, le développe‐
ment de la médecine. Le plus célèbre des médecins de cette époque est Érasis‐
trate (v. 310-v. 250 av. J.-C.), dont le nom reste attaché à la naissance de la
physiologie. D’autres branches de la médecine voient le jour : la gynécologie
avec Démétrius d’Apamée, l’oculistique avec Andreas de Caryste.
Les mathématiques
Notes
1. L’expression « siècles obscurs » est la traduction du concept anglo-saxon de « dark age », littérale‐
ment « époque sombre », mis en avant par Anthony Snodgrass dans The Dark Age of Greece (1971),
Edimburg, University Press, 1971, et par Vincent Robin d’Arba Desborough avec The Greek Dark Ages
(1972), Benn, 1972. Elle couvre la période du XIIe siècle avant J.-C. marquée par la décadence et la fin du
monde mycénien jusqu’au renouveau grec du VIIIe siècle avant J.-C.
2. Ces événements, connus sous le nom de guerres médiques, sont développés dans le chapitre consacré
à l’histoire perse.
3. La démocratie attache beaucoup d’importance à l’égalité des droits et à l’égalité matérielle alors que
l’isonomie, pour les Athéniens, s’intéresse plus à l’égalité politique.
4. Plutarque, Vies parallèles, trad. B. Latzarus, Paris, Garnier, 1950.
5. Hervé Loilier, Histoire de l’art, Paris, Ellipses, 1995, p. 114.
6. Galien, De temperatura, I, 9. Polyclète, dans son Canon, écrit : « La beauté réside dans les rapports
non entre les éléments mais entre les parties… »
7. Plusieurs villes se disputaient l’origine d’Homère : Chios, Smyrne, Cymé, Colophon.
8. Platon, Phèdre, 244a, 245e. ; Ion, 532b, 542b.
9. Hésiode, Théogonie, 30 sq.
10. Jacqueline de Romilly, La Tragédie grecque, Paris, Puf, « Quadrige », 2006, p. 5.
11. À l’occasion de la 61e olympiade, une première représentation de comédie a lieu, car, à cette époque,
536 av. J.-C., les concours de poésie font partie des Jeux olympiques.
12. Jacqueline de Romilly, La Tragédie grecque, op. cit., p. 113.
13. Alceste, Médée, Les Héraclides, Les Troyennes, Électre, Hélène, Iphigénie en Tauride, Ion, Oreste,
Les Phéniciennes, Iphigénie à Aulis, etc. Bon nombre d’auteurs se sont inspirés du thème de ses pièces.
Corneille, Médée (1635) ; Racine, Iphigénie (1674), Phèdre (1677) ; Goethe, Iphigénie en Tauride (1786) ;
Claudel, Protée (1937) ; Sartre, Les Troyennes (1965).
14. Il a écrit quarante-quatre pièces dont onze nous sont connues.
15. Paul Veyne, Comment on écrit l’histoire, Paris, Le Seuil, 1971, p. 47.
16. François Châtelet, La Naissance de l’histoire : la formation de la pensée historienne en Grèce, Paris,
Minuit, 1961.
17. Henri-Irénée Marrou, « Qu’est-ce que l’histoire ? », in L’Histoire et ses méthodes, Paris, Gallimard,
« Encyclopédie de la Pléiade », 1961, p. 4.
18. Il met en place l’anacyclose, théorie s’appuyant sur les six régimes existants, royauté, autocratie ou
despotisme, aristocratie, oligarchie, démocratie, ochlocratie (gouvernement de la masse). Il décrit en six
phases ce qui fait basculer la monarchie dans la tyrannie, à laquelle fait suite l’aristocratie qui se dégrade en
oligarchie mais sombre dans l’ochlocratie, le pire de tous les régimes.
19. Premier théorème : le cercle est divisé en deux par son diamètre. Deuxième théorème : les angles
d’un triangle en face de deux côtés de même longueur sont égaux. Troisième théorème : les angles opposés
formés par l’intersection de deux droites sont égaux. Quatrième théorème : l’angle inscrit dans un demi-
cercle est un angle droit. Et cinquième théorème : découverte d’un triangle qui est déterminé si sa base et
les deux angles à la base sont donnés.
20. Sextus Empiricus, Adversus mathematicos, 1, 90.
21. À ce sujet, voir Jean-François Mattéi, Pythagore et les pythagoriciens, Paris, Puf, « Que sais-je ? »,
2013.
22. Aristote, Métaphysique, A, 6, 987 b28.
23. Ibid., A, 5, 985 b4.
24. Aristote, De generatione animalium, V, 8, 789 b2.
25. Aristote, Métaphysique, A, 6, 987 b.
26. Platon, République, VII, 532a-535a.
27. À ce sujet, voir Alexandre Koyré, Introduction à la lecture de Platon, Paris, Gallimard, 1991, et
Vincent Descombes, Le Platonisme, Paris, Puf, 2007.
28. Platon, Phédon, 72e-77a.
29. Aristote, Analytiques premiers, I, 1, 24 b, 18.
30. Le terme avait été déjà employé par Platon dans le Théétète dans le sens où l’on joint plusieurs dis‐
cours (A appartient à B, C appartient à A donc C appartient à B).
31. Aristote, Métaphysique, Λ, 7, 1072 a25.
32. Ibid., Κ, 1.
33. Aristote, Éthique à Nicomaque, II, 7, 1106 b36.
34. Montaigne, Essais, livre II, chap. 12.
35. Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes, I, 4.
36. Lambros Couloubaritsi, Aux origines de la philosophie européenne. De la pensée archaïque au néo‐
platonisme, Bruxelles, De Boeck, 2003, p. 547.
37. Paul Veyne, Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes ?, Paris, Le Seuil, « Points Essais », 1992, p. 28.
38. Mircea Eliade, Traité d’histoire des religions, Paris, Payot, « Bibliothèque historique », 2004, p. 349.
39. Ernst Cassirer, La Philosophie des formes symboliques, tome 1, Paris, Minuit, 1972, p. 59.
40. Marcel Detienne, Dionysos mis à mort, Paris, Gallimard, 1977, p. 46.
41. Roger Caillois, Le Mythe et l’homme, Paris, Gallimard, 1981, p. 20.
42. Mircea Eliade, Les Cahiers de l’Herne, Plon (1978), dans J. Masui, Mythes et symboles, Paris, Dervy,
1984, p. 298.
43. Ibid., p. 20.
44. Il ne fut pas le premier à condenser en livres les notions géométriques. C’est ce que firent, après
Hippocrate de Chios, Eudoxe et son contemporain Léon.
45. Alexandre Koyré, Études galiléennes, à l’aube de la science classique, Paris, Hermann, 1939, p. 9.
CHAPITRE XII
Les Étrusques
2. L’art étrusque
L’art étrusque est un art essentiellement funéraire. Les morts étaient enterrés
non loin des villes. Les tumuli, de tumulus, ou tertre, rivalisent d’ampleur et at‐
teignent jusqu’à 50 m de diamètre. Depuis 1958, à Cerveteri et à Tarquinia, le
nombre de tombes explorées se compte par milliers. Le contenu mis au jour re‐
produit la vie quotidienne des défunts. Les vases sont entassés sur les ban‐
quettes qui longent les murs. Les tombes les plus riches s’ornent de fresques
comme celles des sites de Monterozzi et Cerveteri. Selon une règle fréquente,
les morts reposent dans des cercueils, parfois représentés en relief, couchés de
côté et appuyés sur un oreiller.
Les nécropoles
– La nécropole de Cerveteri
Les nécropoles étrusques reproduisent les cités, avec leurs rues et leurs
places. Celle de Cerveteri, non loin de Rome, porte le nom de nécropole de
Banditaccia. Comme dans la vie passée, les riches y sont plaisamment installés
dans de vastes tombeaux formés de plusieurs pièces, avec banquettes, ustensiles
de cuisine en pierre, bref toutes les commodités de la vie, agrémentées de somp‐
tueuses gravures, telles les tombes des Reliefs, des Chapiteaux. Tout est prêt
pour la célébration d’un banquet auquel, rareté dans un univers inspiré de la
Grèce, les femmes participent. Un tumulus recouvre l’ensemble. Les pauvres, les
femmes, se contentent d’un cippe, simple colonne ou petite reproduction d’une
demeure.
– La nécropole de Tarquinia
Les premiers vestiges archéologiques sur le site d’origine de Tarquinia sont
datés du IXe siècle avant J.-C. et appartiennent au villanovien (âge du fer). Les
fouilles, menées de 1934 à 1938, ont mis au jour les restes d’un cercle imposant
de murs, qui sont les fondations d’un grand temple étrusque connu sous le nom
de Ara della Regina. Sa décoration comprend un groupe en terre cuite de che‐
vaux ailés dans le style hellénistique, considéré comme un chef-d’œuvre de l’art
étrusque. La célèbre nécropole étrusque de Tarquinia, située sur une crête sud-
ouest de l’ancienne ville, abrite les tombeaux peints les plus importants de
l’Étrurie. La plupart des tombes à chambre, taillées dans la roche, datent du VIe
au IVe siècle avant J.-C. La plus célèbre est la tombe de la Chasse et de la Pêche
avec ses fresques polychromes peintes vers 520 avant J.-C. Les tombes des
Lionnes, des Augures et des Bacchantes, toutes du VIe siècle av. J.-C., révèlent
des spectacles de danse et des scènes de banquet. La tombe du Bouclier est un
chef-d’œuvre de la peinture du IVe siècle avant notre ère. Les plus célèbres sont :
la tombe des Jongleurs, la tombe des Léopards, la tombe des Augures, la tombe
des Lionnes, la tombe des Taureaux et la tombe des Olympiades.
3. L’écriture étrusque
À peu près onze mille inscriptions étrusques ont aujourd’hui été retrouvées.
Rien en ce qui concerne leur littérature qui devait pourtant être assez impor‐
tante. L’empereur Claude (41-54)1 évoque de nombreuses tragédies et surtout
des épopées historiques. L’alphabet étrusque est à présent bien connu. Il est for‐
mé d’un alphabet grec de vingt-six lettres soit vingt et une consonnes et cinq
voyelles. Utilisé vers 700 avant J.-C., il est au fil du temps adapté aux exigences
de la langue étrusque, notamment pour la prononciation. Elle s’écrit de gauche à
droite ou de droite à gauche. Mais là où le bât blesse, c’est dans la compréhen‐
sion de la langue. Si les courtes inscriptions funéraires ou celles indiquant le
propriétaire d’un objet sont assez aisées à déchiffrer, il n’en va pas de même des
textes plus longs, dont le sens exact reste largement ignoré, faute de trouver
l’équivalent d’une pierre de Rosette, un document bilingue ou trilingue.
4. La religion étrusque
Grâce à ses héritières grecque et romaine qui en ont maintenu certains traits,
la religion étrusque a livré quelques-unes de ses particularités. Ainsi Turan, en
qui on reconnaît Aphrodite, Laran qui adopte les traits d’Arès, Tinia, Jupiter
qui a une épouse du nom de Uni, Juno. L’Apollon grec se nomme Aplu. Les
Étrusques sont connus aussi pour leur pratique de l’haruspicine, lecture de l’ave‐
nir dans les entrailles des animaux, et surtout de l’hépatoscopie, c’est-à-dire
l’examen du foie des victimes sacrifiées. Le Foie de Plaisance, modèle en
bronze retrouvé en 1878, est une sorte de memento, « souviens-toi » en latin,
destiné à l’interprétation du foie d’un animal. Mais d’autres pratiques divina‐
toires existent, telles que l’interprétation du vol des oiseaux, des éclairs. La Divi‐
nation chez les Étrusques (Etrusca Disciplina) est un ensemble de textes où sont
consignés les rites et les cérémonies. Ces textes décrivent les rapports que l’on
devait avoir avec les dieux. Mais les Étrusques ont également leurs propres divi‐
nités formant un riche panthéon : Carmenta, déesse des Enchantements ;
Funa, déesse de la Terre, des Forêts, de la Fertilité ; Februns, dieu de la Mort,
de la Purification ; Lucifer, dieu de la Lumière ; Manthus, dieu des Morts ;
Meane, déesse de la Mer, etc. Les prêtres se réunissent une fois par an pour la
cérémonie d’hommage aux dieux, le Fanum voltumnae, dans le sanctuaire
consacré à Tinia-Jupiter. Les dieux étrusques, auprès desquels intercédaient les
prêtres, se rangent en trois catégories. D’abord les formes supérieures, incon‐
naissables pour les hommes, jamais figurées, qui président au destin, celui des
humains comme celui des dieux. Ce sont les dii involuti, les « dieux cachés ».
Puis vient un groupe de douze dieux et déesses, proches du panthéon grec, re‐
pris par les Romains. Enfin, les esprits, génies que sont les Pénates, gardiens du
foyer, les Lares, esprits des ancêtres familiaux, les Mânes, les esprits favorables.
Ce sont d’ailleurs des génies, la nymphe de la fertilité Bégoé et le génie Tagès,
enfant chauve chtonien, né d’un sillon de la terre, qui révèlent aux hommes
l’existence des dieux et les rites appropriés pour les satisfaire, ainsi que l’art de
la divination.
Notes
1. D’après son discours au Sénat conservé dans le bronze de la Table claudienne de Lyon.
CHAPITRE XIII
La Rome antique
Le principat dure de 27 avant J.-C. jusqu’en 284 de notre ère, le dominat lui
succède jusqu’en 476, date convenue de la fin de Rome. Il s’agit en réalité de
l’Empire romain d’Occident, séparé depuis 395 de l’Empire romain d’Orient,
qui lui survit jusqu’en 1453 où il tombe sous les coups des Turcs ottomans.
Durant cette période, la dynastie julio-claudienne1 (27 av. J.-C.-68 apr. J.-
C.) agrandit l’Empire. L’Espagne septentrionale, la Gaule occidentale, la Bre‐
tagne (Angleterre), la Rhétie, l’actuelle Autriche du Danube à l’Inn, le Norique,
régions actuelles du sud de l’Autriche et de la Bavière, provinces de Vienne et
de Salzbourg, la Pannonie (actuelle Hongrie), la Cappadoce (Turquie orientale),
Mésie (nord de la Bulgarie), Serbie, la Commagène (centre sud de l’actuelle
Turquie) sont soumis à Rome. Mais la dynastie s’achève dans la confusion avec
le règne de Néron (54-68), archétype du tyran sanguinaire, matricide, pour les
auteurs chrétiens. Après l’Année des quatre empereurs, au cours de laquelle
quatre souverains se succèdent rapidement : Galba, Vitellius, Othon, Vespasien,
de 68 à 69, Vespasien (69-79) fonde la dynastie des Flaviens. Les règnes de Ti‐
tus (79-81) et Domitien (81-96), outre Jérusalem déjà pris en 70, voient la fin
de la conquête de la Bretagne, mais aussi la catastrophique éruption du Vésuve,
en 79, qui engloutit Pompéi, Stabies et Herculanum. Aux Flaviens succèdent les
Antonins (96-192), après l’assassinat de Domitien. La Mésopotamie, l’Armé‐
nie, une partie de l’Arabie, la Dacie, qui est en partie l’actuelle Roumanie, sont
soumises à Rome. C’est l’époque des empereurs fameux guerriers ou philo‐
sophes : Trajan (98-117), Hadrien (117-138), Antonin le Pieux (138-161),
Marc Aurèle (161-180) et le règne désastreux de Commode (180-192) qui
signe la fin des Antonins. Hadrien succède à Trajan en 117. Il entreprend aussi‐
tôt une tournée d’inspection de l’Empire pour s’assurer de la fiabilité des
troupes aux frontières, mater une révolte en Maurétanie, mesurer le risque
parthe à l’Est. Il décide alors de protéger les zones frontalières les plus exposées
par un mur qui porte son nom, régulièrement entretenu sous son règne par les
garnisons. Grand voyageur, esprit curieux, il s’éprend du Bythinien Antinoüs,
qui devient son compagnon, jusqu’à sa tragique noyade dans le Nil en 130 lors
du séjour de l’empereur en Égypte. Désireux de s’inscrire dans la lignée du fon‐
dateur de l’Empire, Auguste, dont il adopte le prénom, devenant Hadrianus Au‐
gustus, il simplifie l’accès aux lois romaines en les réunissant dans un Code. Bâ‐
tisseur, il fait restaurer le Panthéon, incendié sous le règne de son prédécesseur,
édifier une villa à Tivoli et son tombeau, devenu le château Saint-Ange. Il
meurt en 138, non sans avoir choisi pour prendre sa suite un jeune homme de
dix-huit ans, le futur Marc Aurèle. Cependant, ce dernier devra attendre la mort
de l’autre personne adoptée par Hadrien, Antonin (138-161), pour monter sur le
trône. Préparée depuis longtemps, le règne d’Antonin devant être à l’origine un
simple intermède, une succession facile permet à Marc Aurèle (161-180) d’ac‐
cèder à l’empire sans troubles. Cultivé, maniant le grec encore mieux que le la‐
tin, le nouveau souverain s’attache à la législation romaine, qu’il humanise, rend
plus accessible, tout en lui donnant une plus grande homogénéité. Homme de
cabinet, c’est aussi un guerrier, qui doit à plusieurs reprises intervenir contre les
Parthes, en Mésopotamie, sur le Danube, pour refouler les tribus germaniques.
Sa politique à l’égard des chrétiens reflète une ambiguïté : officiellement, les
chrétiens peuvent être dénoncés, poursuivis par les gouverneurs et les autres
magistrats romains, mais sans que cela ne soit encouragé, sans persécutions.
Marc Aurèle est également connu pour ses Pensées, un recueil inspiré du stoï‐
cisme. Il meurt atteint de la peste en 180. En 193, l’empire éclate de nouveau et
l’Année des quatre empereurs se reproduit : Didius Julianus à Rome, Pescen‐
nius Niger en Syrie, Clodius Albinus en Bretagne, Septime Sévère en Panno‐
nie. Septime Sévère (193-211) fonde la dynastie des Sévères (193-235). Celle-
ci sera éphémère, car l’empire doit affronter à l’extérieur les Francs, les Ala‐
mans, les Burgondes, mener une guerre en Bretagne et à l’intérieur. De plus, les
règnes de Caracalla (211-217) et d’Élagabal ou Héliogabale (218-222) seront
chaotiques. Le IIIe siècle annonce à la fois les empereurs soldats et l’éclatement
de l’empire, aux prises avec les Perses sassanides, les Arabes, les Goths et une
division plus profonde encore, opposant le monde païen traditionnel à l’avancée
du christianisme, au sein des élites dirigeantes, puis dans le peuple. De 235 à
268, Rome est au bord de l’éclatement. Des usurpateurs, les Trente Tyrans,
une série d’usurpateurs qui se succédent à la tête d’un royaume gaulois, per‐
durent de 260 à 274. Aurélien (270-275), seul, parvient à reconstituer briève‐
ment l’unité territoriale et politique sous la dynastie des Illyriens (268-284).
Le dominat (284-476)
L’ARCHITECTURE ROMAINE
C’est par l’architecture que s’exprime le grand art romain. Le seul traité d’ar‐
chitecture qui nous soit parvenu est celui de Vitruve (Ier s. av. J.-C.). Après
avoir été les élèves des Étrusques puis des Grecs, les Romains innovent dans di‐
vers genres de monuments, inconnus jusqu’alors, les aqueducs, les amphi‐
théâtres, les arcs de triomphe. Leur architecture est surtout connue par les mo‐
numents de l’époque impériale. Dans l’imitation des ordres grecs, ils s’attachent
peu au dorique ou à l’ionique mais utilisent le corinthien auquel ils savent attri‐
buer des formes nouvelles. Contrairement aux Grecs pour lesquels le temple re‐
présente la construction essentielle, les Romains sont davantage dominés par
des nécessités pratiques telles que l’approvisionnement de l’eau par des aque‐
ducs ou évacuation de celle-ci par le grand égout, ou Cloaca Maxima, bâti par
Tarquin l’Ancien. Au IIIe siècle avant J.-C., à la suite des conquêtes romaines et
de la colonisation systématique, un réseau de routes conformes à un plan d’en‐
semble est entrepris. La Table théodosienne est une carte romaine du IIIe et du
IVe siècle où figurent de nombreux renseignements quant à l’organisation de la
circulation dans l’empire. Nous la connaissons par sa copie du XIIIe siècle, la
Table de Peutinger. L’architecture romaine est née des besoins de la cité. Deux
choses distinguent les divers systèmes d’architecture : d’abord la construction
des supports verticaux, murs, piliers, ensuite la méthode employée pour couvrir
ou couronner un édifice. La plupart des architectures antiques ont fait usage du
même mode de couverture. Sur des points d’appui verticaux, elles ont posé de
grandes pièces. Mais l’élément de construction reste toujours la plate-bande et
l’angle droit. L’architecte romain résout le problème autrement. Il substitue aux
poutres horizontales une couverture de bois ou de pierres. Les Romains lui
donnent à leur tour une place importante dans leur construction mais se limitent
aux types suivants : la voûte en berceau pour les allées et les couloirs, la voûte
d’arête qui est faite de deux voûtes en berceau se coupant à angles droits et la
voûte hémisphérique pour les salles rondes. Lorsque Brunelleschi se voit
confier, vers 1420, l’achèvement de la cathédrale de Florence par la construction
d’une coupole qui doit surmonter le transept, il reprend le système dynamique et
statique de l’Antiquité.
L’architecture privée
LA SCULPTURE ROMAINE
Sous la République, l’influence étrusque joue un rôle prépondérant, les maté‐
riaux employés sont la terre cuite et le bronze. Les premières sculptures à
l’image des fonctionnaires romains qui obtiennent le droit d’en faire réaliser sont
des bustes exécutés en cire. On les garde dans une armoire spéciale appelée ta‐
blinum, sorte de reliquaire placé dans l’atrium. Les images en cire des illustres
ancêtres étaient alors portées en grande pompe à travers la ville par les survi‐
vants des familles aristocratiques romaines dans les grandes occasions. Il faut
attendre le IIIe siècle avant J.-C. pour que les patriciens romains ayant voyagé en
Grèce et en Orient commencent pour leurs collections personnelles à importer
des statues. Bientôt la nécessité d’avoir des statues devant satisfaire à des be‐
soins purement romains se fait sentir. Les artistes adoptent le portrait, délaissé
par les Grecs. Le plus célèbre de ces portraits est celui d’Antinoüs, amant de
l’empereur Hadrien, mort tragiquement noyé à vingt ans, loué pour sa beauté,
que les sculpteurs représentent en Hercule, en Bacchus ou en Apollon. Au der‐
nier siècle du Bas-Empire, le Rome des Césars produit un art à la fois plus po‐
pulaire et plus provincial où le culte du portrait, surtout à partir de l’époque
d’Auguste (63 av. J.-C.-14 apr. J.-C.), prend une place considérable. Le corps
perd l’importance qu’il avait pour les Grecs et les bustes idéalisés font leur appa‐
rition. L’attitude classique est recherchée, prisée, les sculpteurs cherchent à
rendre la dignité de l’âge et non plus sa déchéance. La caractéristique des por‐
traits du temps d’Auguste est l’abandon du réalisme brutal du passé, les traits
s’adoucissent. Les statues équestres sont aussi fort prisées, ainsi celle de Marc
Aurèle, sur le Capitole. Le Gran cavallo, l’œuvre équestre pour Francesco Sfor‐
za par Léonard de Vinci (1452-1519), est inspirée du célèbre précédent de Ly‐
sippe pour Alexandre le Grand qui aboutit à la forme classique de la statue de
Marc Aurèle, à Rome. Puis cet art évolue vers le relief historique, la colonne
Trajane. Après le transfert de la capitale de l’Empire romain à Constantinople,
un art du portrait romain oriental, d’une nature particulière, s’établit au IVe siècle
après J.-C. On sculpte des statues à toge, ornées de riches vêtements. Elles ne
sont travaillées que de face, le dos est à peine ébauché.
En 27 avant J.-C., Tibère quitte Rome pour s’installer à Capri et fuir les in‐
trigues de son entourage. Au sommet de l’île il se fait construire sa villa. De
cette époque peu de monuments nous sont connus mais date le Grand Camée de
France vers 20 après J.-C., de 31 cm de haut et 26 de large. Sur l’un des trois re‐
gistres, Auguste apparaît en compagnie de Drusus II et de Germanicus s’envo‐
lant, monté sur Pégase. Le trésor découvert à Boscoreale, cent neuf pièces de
vaisselle, objets de toilette et bijoux dans une villa romaine située sur les pentes
du volcan, enfoui par le propriétaire avant le drame, aurait peut-être appartenu à
un membre d’une des familles impériales. Il faut attendre le règne de Néron
pour qu’une nouvelle esthétique s’affiche, combinant un goût pour l’ornementa‐
tion et l’illusionnisme. Sous les Flaviens, l’art connaît une diversité des monu‐
ments et une grande variété dans les tendances. La célèbre colonne de Trajan
élevée à partir de 110 glorifie les actes de l’homme de guerre qui vainquit les
Parthes et les Daces. L’ensemble du monument mesure 42,20 m de hauteur. La
colonne elle-même est faite de dix-huit tambours de 2,50 m de diamètre et les
deux mille reliefs, s’ils étaient déroulés, formeraient une bande de 200 m de
long. Vespasien, premier empereur à ne pas être issu d’une famille aristocra‐
tique, inaugure une période heureuse de cent ans. Le Colisée à Rome est
construit sous son règne.
Le Colisée
Le Colisée ou amphithéâtre Flavien est une affaire de famille. Il a été entrepris sous Ves‐
pasien (69-79) pour être achevé du temps de son fils Titus (79-81) et légèrement modifié
par son frère Domitien (81-96). C’est un amphithéâtre de pierre, capable de contenir entre
cinquante mille et soixante-dix mille spectateurs assis. En son centre, une arène en forme
d’ellipse longue de 86 m et large de 54 m. Sous cette dernière, des couloirs, des systèmes
de machinerie permettent de garder les fauves, puis de les hisser dans l’arène au moment
du spectacle. Il accueille les combats d’animaux, de gladiateurs, des reconstitutions de ba‐
tailles navales, sur une superficie de plus de 2 ha. Les spectateurs s’installent sur des gra‐
dins de pierre, sous lesquels passent encore des couloirs voûtés. Les gradins ne sont plus
bâtis aux flancs des collines mais sur des constructions voûtées qui fournissent sous les
arcades une multitude d’issues vers l’extérieur. Le Colisée est formé de trois étages circu‐
laires comportant chacun quatre-vingts arcades séparées entre elles par des demi-co‐
lonnes en saillie. Puis une architrave, poutre d’entablement posée sur les colonnes, do‐
mine l’arc de la voûte. Au-dessus de l’architrave, une voile en toile naturelle peut être ten‐
due sur deux cent quarante-quatre mâts de console pour abriter les spectateurs du soleil :
le velarium. Lors de son inauguration officielle sous Titus, en 80, un célèbre combat op‐
pose deux grands gladiateurs esclaves, Priscus et Verus. De force égale, aucun ne vainc
l’autre, mais leur ardeur émeut la foule et l’empereur, qui leur accorde à chacun le glaive
doré de la liberté. Fait unique, les épisodes de leur affrontement épique sont relatés dans
un poème de Martial (40-104).
La première moitié du IIe siècle est pour l’art romain une période particulière‐
ment faste, marquée par l’inauguration du forum de Trajan, construit par l’archi‐
tecte Apollodore de Damas (v. 60-v. 129) sur la demande de l’empereur. La
colonne Trajane contiendra ses cendres, recueillies dans une urne d’or et placées
en son socle. Hadrien (117-138), son successeur, se plaît non seulement à ad‐
mirer les monuments des lointaines provinces d’Orient, mais il tente en plus de
les imiter dans la capitale impériale. Il construit une villa à Tivoli, dont la
construction dure vingt ans, nombre d’années de son règne, d’une superficie
d’environ 1,5 km2. Au bord du Tibre, il fait élever son mausolée. De l’extérieur,
il rappelle celui d’Auguste. On lui doit encore la réédification du Panthéon de
Rome qui exprime le mieux l’architecture romaine. Sa coupole est considérée
comme la plus parfaite de l’Antiquité, produisant un effet de perspective parti‐
culier grâce aux caissons qui la décorent et dont les dimensions vont en s’ame‐
nuisant vers le haut. Par une ouverture centrale circulaire de 9 m de diamètre,
l’oculus, la lumière filtre et éclaire ainsi les dalles de marbre du sol. Les vestiges
de ce sanctuaire montrent que les reliefs du portique devaient être polychromes
et son antique porte en bronze. Le modèle inspire les architectes de la Renais‐
sance dont Brunelleschi pour le dôme de Santa Maria del Fiore, à Florence, en
1436. Vers le milieu du IIe siècle, l’art renoue avec des traditions préchrétiennes,
grecques ou étrusques, qui suscitent aussi le passage de l’incinération à l’inhu‐
mation. Dès cette époque, l’art des sarcophages se développe et remplace les
urnes funéraires. Les Romains appartenant à de grandes familles sont inhumés
dans des sarcophages en marbre, ceux des empereurs sont en porphyre. Les re‐
présentations des bas-reliefs figurent des scènes de mythologie ou de la vie quo‐
tidienne. Avec l’époque des Antonins (138-192), des mutations dans le domaine
de l’art se produisent. La représentation est plus abstraite et on renonce complè‐
tement à l’anecdote comme dans la Colonne de Marc-Aurèle qui relate les hauts
faits de l’empereur. L’action se concentre sur l’homme tenu pour essentiel.
L’évolution intervenue dans la sculpture montre un traitement du corps et des
visages plus brutal aussi. La tension dramatique est marquée par la mise en
scène d’un grand nombre d’épisodes sanglants. L’empreinte hellénisante s’efface
et est remplacée par une angoisse, un désarroi faisant place aux forces surnatu‐
relles. Les œuvres se distinguent par une profusion d’éléments décoratifs, une
technique sculpturale produisant des reliefs qui se découpent en ombres et lu‐
mières très marquées. La seule statue équestre conservée est celle de Marc Au‐
rèle que Michel-Ange place devant le Capitole. Elle deviendra pour celles du
Moyen Âge et de la Renaissance un modèle.
Au IIIe siècle, l’une des dernières périodes de l’art romain s’amorce. Dans les
provinces romaines, le naturalisme de l’art impérial est remplacé peu à peu par
les traditions locales, qui dans le domaine religieux voient naître des temples ro‐
mano-africains, romano-celtiques, romano-syriens. Un style nouveau, anticlas‐
sique, lié à la décadence se fait jour. L’art a évolué au contact des tendances phi‐
losophiques du IIe siècle. À l’épicurisme des Césars s’est substitué le stoïcisme
moralisateur des Antonins. L’effet pratique, la plastique ont plus d’importance
que la réalité. C’est pour cette raison qu’on insiste davantage sur l’impression
laissée par l’ombre et la lumière que sur la silhouette ou le contour de l’image.
La morale stoïcienne peut se retrouver dans le choix de certains sujets. Au cours
du IIIe siècle, ce sont surtout les influences orientales qui s’affirment de plus en
plus dans le monde romain. Elles concernent non seulement la littérature, mais
aussi la religion et l’art dans les provinces les plus lointaines comme dans la ca‐
pitale. Avec Caracalla (règne : 211-217), les thermes impériaux les plus grands
sont bâtis.
Les thermes de Caracalla
L’empereur Caracalla (211-217) rejoint Néron au panthéon des princes sanguinaires, mais
il veille pourtant de près au bien-être de ses sujets. Rome est depuis toujours confronté à
un grave problème d’hygiène publique, les bains manquent pour satisfaire les besoins de
l’ensemble de la population. Les bains publics seront commencés par l’empereur Septime
Sévère en l’an 206 et achevés par son fils l’empereur Caracalla en 216. Parmi les bains
les plus beaux et luxueux de Rome, conçus pour accueillir environ mille six cents bai‐
gneurs, les thermes de Caracalla seront utilisés jusqu’au VIe siècle. Ce sont les plus impor‐
tants de tous les établissements de bain romains qui nous soient parvenus. Ils se com‐
posent au centre de grandes chambres voûtées couvrant une superficie de 230 m
par 115, avec les tribunaux et les salles auxiliaires, entourés par un jardin avec un espace
utilisé pour l’exercice et les jeux. Il y avait trois chambres destinées au bain : le frigidarium,
ou chambre froide ; le caldarium ou salle chaude, et le tepidarium, ou chambre tiède.
Entre le frigidarium et le tepidarium se trouvait la grande salle, couverte par une voûte
avec des fenêtres hautes. Il y avait aussi de grandes piscines en plein air. Le marbre a été
utilisé abondamment, la décoration à l’intérieur était riche en sculptures, mosaïques,
fresques.
L’art du IVe siècle est marqué par plusieurs faits déterminants pour son évolu‐
tion tels la disparition du régime tétrarchique, la prise du pouvoir par Constan‐
tin, le choix de Constantinople, le « nouveau Rome », le développement du
christianisme rendu possible par Constantin. De nouveaux monuments adaptés à
la nouvelle liturgie se bâtissent avec des thèmes au répertoire neuf, les autres
s’inspirent de la tradition romaine. L’Arc de Constantin est souvent considéré
comme le plus représentatif de cette période. Érigé pour commémorer sa vic‐
toire sur Maxence en 312, il reprend l’architecture de l’arc de triomphe à trois
portes déjà connu. Il est constitué d’éléments de périodes très diverses : c’est
sous le règne d’Hadrien que les médaillons sont exécutés, les bas-reliefs de l’at‐
tique sous celui de Marc Aurèle. Il s’agit avant tout de décrire plus que de sus‐
citer une émotion esthétique. Cet art ne s’intéresse plus à la diversité des formes
que produit la nature mais s’enferme dans des types conventionnels de représen‐
tation, les personnages sont montrés de face avec une taille correspondant à leur
place dans la hiérarchie militaire ou politique. Le corps humain représenté sert
à exprimer des idées telles que l’autorité, la douleur ou la tension spirituelle.
L’image de l’empereur s’impose sous toutes ses formes. Les camées connaissent
un exceptionnel renouveau. En sculpture, le traitement de la tête, telle la tête gi‐
gantesque de Constantin provenant de la basilique du forum, reprend à la Grèce
l’arrondi des formes, mais les yeux énormes et impérieux s’adressent aux specta‐
teurs pour leur imposer l’essence surhumaine du nouveau dominus. Constantin
fonde aussi à Rome les premières églises chrétiennes monumentales. La plus cé‐
lèbre est celle qui se trouvait recouvrir un modeste monument que les chrétiens
avaient bâti sur le Vatican au temps de Marc Aurèle où ils pensaient avoir enter‐
ré le corps de l’apôtre Pierre. La mosaïque constitue alors le principal élément
décoratif non seulement des sols, mais aussi des voûtes des murs. Celles retrou‐
vées à Tunis, le Triomphe de Bacchus, ou à Constantine, le Triomphe de Nep‐
tune et d’Amphitrite, sont caractéristiques de cette période. L’héritage artistique
sera au début du Ve siècle exploité pendant des siècles, faisant de l’art carolin‐
gien un de ses dignes prolongements.
3. La philosophie à Rome
La philosophie à Rome n’aura jamais la même place que celle qu’elle avait oc‐
cupée en Grèce. Pourtant Rome en hérite, la transmet, la modèle à son image.
Pendant longtemps les Romains l’ignorèrent, ils mirent à l’honneur la virtus, le
courage, privilégièrent le génie militaire et politique. Elle sera étudiée comme
un moyen pratique, un instrument permettant de se perfectionner dans l’art de la
politique et dans l’art oratoire. La philosophie nouvellement introduite rencontre
aussi de fervents défenseurs dont fait partie Cicéron, même si elle reste suspecte
pour les milieux les plus traditionnels. À l’époque de Néron, elle est persécutée
et un sage comme Sénèque (4 av. J.-C.-65 apr. J.-C.) devient insupportable au
régime parce qu’il dit ce qu’il pense. Les Antonins, à partir d’Hadrien, la sou‐
tiennent. L’État depuis Marc Aurèle subventionne les quatre écoles (stoïcienne,
péripatéticienne, épicurienne, académicienne), protection qui dure jusqu’au mo‐
ment où Justinien ferme les écoles d’Athènes, en 529.
Carnéade (v. 215-v. 129 av. J.-C.), à la suite de son prédécesseur Arcésilas
de Pitane (315-241), avait scandalisé les Romains, dont Caton, car, lors de
l’ambassade des philosophes en 156 avant J.-C., il fit des discours à deux jours
d’intervalle sur le thème de la justice d’un point de vue opposé. L’idée était de
montrer par cet exercice qu’il est possible d’émettre pour ou contre des idées sur
un point de vue, bien qu’en considérant que tous les points de vue se valent. Il
s’oppose à Chrysippe comme Arcésilas s’était opposé à Zénon de Citium. Il
recherche dans les choses la probabilité et non une certitude. Le scepticisme ra‐
dical sera représenté par Énésidème au Ier siècle après J.-C. et Sextus Empiri‐
cus au IIIe siècle. Ils développent les arguments sceptiques dont le plus fort est le
diallèle ou cercle vicieux, car pour juger de la valeur d’une démonstration il faut
une démonstration. Sur Énésidème, nous avons peu de renseignements. Il classa
sous le nom de « tropes » les dix principaux arguments en faveur du scepticisme
et montra par eux l’impossibilité de savoir si les choses sont bien telles qu’elles
nous apparaissent. Le dernier épisode notable de cette école se rattache au nom
de Sextus Empiricus dont les principaux arguments sont résumés dans les Es‐
quisses pyrrhoniennes et qui tentent de prouver que toutes les sciences reposent
sur des conventions et des commodités intellectuelles.
LE STOÏCISME NOUVEAU EST ARRIVÉ, Ier-II e SIÈCLES
Panétius de Rhodes (v. 180-110 av. J.-C.) est le disciple de Diogène de Baby‐
lone et d’Antipater de Tarse, puis le maître de Posidonius. Ils forment ce qu’on
appelle le stoïcisme moyen. C’est par Sénèque (4 av. J.-C.-65 apr. J.-C.), Épic‐
tète (50-130), Marc Aurèle (121-180) que Guillaume Du Vair, Montaigne, Vi‐
gny et bien d’autres connaîtront la sagesse stoïcienne. C’est surtout à l’époque
impériale qu’elle se développe et connaît son apogée. Le stoïcisme à Rome met
l’accent sur la morale appliquée, ainsi Panétius fournira à Cicéron le modèle de
son Traité des devoirs. Après la mort de Marc Aurèle, le stoïcisme se mêle au
néoplatonisme, façonnant ainsi le milieu intellectuel de la pensée juridique, reli‐
gieuse et morale du monde romain. Il s’impose comme la morale la mieux ap‐
propriée à une perfection et à une béatitude naturelle. Sénèque se voit confier
l’éducation de Néron pour devenir son conseiller, une fois celui-ci nommé em‐
pereur. C’est sur l’ordre de Néron qu’après la conjuration de Pison, il se donne la
mort. Il s’impose dans son œuvre de retrouver les remèdes découverts par les
Anciens, de les appliquer à son âme et à celle des autres, prônant l’importance
d’un retour à soi. Pourtant, s’il est considéré comme l’un des meilleurs représen‐
tants de la doctrine stoïcienne, il s’en dégage, imposant sa propre réflexion. Ses
œuvres en prose sont surtout connues, même si ses tragédies évoquent les
conséquences du vice et de la folie humaine : Hercule furieux, Les Troades, Les
Phéniciennes, Médée, Phèdre, Œdipe, Agamemnon, Thyeste, Hercule sur l’Oeta,
Octavie. Les Lettres à son ami Lucilius constituent l’autre grande œuvre de Sé‐
nèque, mais rien ne nous dit qu’il s’agit du même Lucilius à qui il adresse le trai‐
té De la providence, ouvrage destiné à élever l’âme en contemplant la nature, à
lui apporter paix et tranquillité. Le but est que l’homme retrouve son harmonie
intérieure, la concordia, qui ne peut être retrouvée qu’en accord avec l’harmonie
universelle. Il s’agit de s’élever d’un moi individuel à un moi universel qui n’est
autre que la raison elle-même. La tâche du philosophe est de libérer l’homme de
la fortuna, du sort, de la tempora, des circonstances, pour qu’il prenne
conscience de ce qui dépend de lui ou non.
◆ Épictète (50-130), esclave philosophe, a eu une destinée étonnante. Es‐
clave affranchi, il se voue tout entier à la philosophie. C’est à son disciple Fla‐
vius Arrien (v. 85-v. 165) que nous devons de pouvoir lire les Entretiens et le
Manuel, car Épictète n’a rien écrit, son enseignement se faisait par oral. Nulle
part n’apparaît d’exposé de la doctrine stoïcienne dans son ensemble. Les Entre‐
tiens, dans les quatre livres qui nous sont parvenus, se rattachent à des discus‐
sions, à des thèmes fondamentaux de la doctrine, même si souvent ils sont anec‐
dotiques. La grande affaire à ses yeux est de savoir comment nous comporter en
toute circonstance. Mais ses concepts fondamentaux portent sur la prohairesis,
le choix réfléchi, désir délibéré des choses qui dépendent de nous, et de celles
qui ne dépendent pas de nous, les choses extérieures4. Il y a un travail à effec‐
tuer sur les représentations mentales, éliminer celles qui n’ont aucun fondement
dans la réalité, celles qui sont à l’origine de nos passions, ne juger que de celles
qui sont justes et adéquates. Libérons-nous par l’opinion droite et le fait de vou‐
loir ce que Dieu veut, car le bonheur se trouve dans la domination des désirs.
◆ Marc Aurèle (121-180) est né à Rome. L’excellence de son éducation le
fait remarquer par Hadrien. Adopté par Antonin le Pieux et investi du titre de
César, Marc Aurèle accède au pouvoir en 161 à quarante ans et connaît un
règne rendu difficile par les constantes attaques des Barbares sur tous les fronts.
Il semble qu’il ait rédigé les Pensées à la fin de sa vie, recueil de maximes tour‐
nées davantage vers l’éthique que vers la physique ou la logique. Il s’agit d’une
suite d’aphorismes dans lesquels l’empereur veut retrouver les dogmes du stoï‐
cisme afin de les pratiquer correctement. L’ouvrage est rédigé en grec et com‐
porte douze livres. On ne peut discerner un ordre agencé parmi eux mais, en re‐
vanche, la progression du sage dont la finalité est, par son autonomie, une adé‐
quation à l’ordre naturel des choses, à une vision du tout, à laquelle il se doit de
s’intégrer.
5. La littérature à Rome
Nous retrouvons dans la littérature romaine, durant toute son histoire, l’em‐
prunt des genres et des sujets à la Grèce. Pendant cinq siècles, Rome, occupé à
conquérir l’Italie, n’a pas eu beaucoup l’occasion de se livrer à la culture des
lettres. La conquête de la Grèce (146 av. J.-C.) lui permet de parfaire l’imitation
de la reine des Lettres et des Arts. Athènes devient le rendez-vous des jeunes in‐
tellectuels lettrés pendant que les rhéteurs grecs tiennent école à Rome. Avant la
troisième guerre punique (150-146 av. J.-C.), les Romains montrent peu d’en‐
thousiasme réel pour l’imagination ou la sensibilité dans le domaine artistique.
L’éloquence, le droit sont beaucoup plus adaptés à leur esprit. À leur tour, ils
savent tirer parti de ces genres plus conformes à leur caractère, les élever à la
perfection et nous laisser, ainsi qu’aux siècles futurs, d’admirables modèles. Les
grandes conquêtes entreprises par Rome mettent l’Italie en contact avec diffé‐
rents pays, Afrique, Gaule, mais surtout avec la Grèce dont les colonies sont
partout. Son influence se fait sentir autant dans le domaine de la poésie que
dans la prose. La comédie seule, avec Plaute et Térence, connaît un véritable
éclat. Rome, défavorisé par rapport à la Grèce, ne possède ni véritable passé na‐
tional ni véritable religion rattachée à ce genre littéraire. Les goûts mêmes des
Romains les portent davantage vers les jeux du cirque, les combats de gladia‐
teurs.
◆ Plaute (Titus Maccius Lautus, 254-184 av. J.-C.) est connu comme l’auteur
classique de la comédie latine. Vingt et une de ses pièces nous sont parvenues
sur les cent trente qu’on lui attribue. Les plus célèbres sont Amphitryon qui ins‐
pira Molière, La Marmite (Aulularia), Poenulus. Il se sert de sujets grecs qu’il
adapte en latin et transforme très librement. Toutes sont des comédies amou‐
reuses bâties sur des intrigues de confusion de personnes et de reconnaissance
finale. L’Aulularia est une comédie de mœurs. Euclion, digne précurseur de
l’Harpagon de Molière, a trouvé une marmite pleine d’or qu’il cache au prix de
mille sollicitations. Dans le prologue, Plaute nous apprend par l’intermédiaire
d’une divinité protectrice du foyer le double problème de l’intrigue : les inquié‐
tudes d’Euclion devenu riche, et le désir du dieu lare de marier la fille d’Euclion,
Phaedra.
◆ Térence (Publius Terentius Afer, 190-159 av. J.-C.) a composé six comé‐
dies : L’Andrienne, L’Eunuque, Phormion, L’Hécyre, Le Bourreau de soi-même
(Héautontimorouménos) et Les Adelphes. À l’instar de Plaute, il a puisé dans le
théâtre grec et se fait une gloire d’imiter ses pièces, mais c’est surtout de Mé‐
nandre qu’il s’inspire. Il s’efforce de donner unité et conséquence à l’action de
ses pièces et de dessiner avec précision le caractère de ses personnages. La
force comique des anciennes comédies, leur bouffonnerie reculent. Il privilégie
l’élégance des jeux de mots qui s’adressent à un public raffiné.
La littérature au siècle de Cicéron (106-43 av. J.-C.) devient une force so‐
ciale et l’éloquence y tient une place prépondérante. Celle-ci est d’abord une
puissance avant d’être un art. Le besoin de convaincre, de haranguer au Sénat,
au forum, fait du don de la parole la condition nécessaire du succès. Caton l’An‐
cien (234-149 av. J.-C.), Tiberius Sempronius Gracchus et Caius Sempronius
Gracchus, de la famille des Gracques, s’illustrent comme les plus fameux tri‐
buns du peuple. Mais, au milieu des diverses agitations politiques qui conduisent
à la chute de la République, l’éloquence s’élève surtout avec Cicéron au plus haut
point de la perfection. Nous ne possédons qu’une partie de son œuvre, certains
de ses discours sont judiciaires et politiques, les Verrines, Pro Milone (Discours
pour Milon), les Catilinaires ; certains portent sur la rhétorique, De oratore (Le
livre de l’orateur) ; d’autres sont philosophiques, les Tusculanes, le De republica
(Traité de la République).
Virgile (Publius Vergilius Maro, 70-19 av. J.-C.) se distingue dans la poésie
épique. Ses œuvres, l’Énéide et les Géorgiques, exaltent les passions humaines.
Dante, en écrivant La Divine Comédie, rend hommage à son génie en le prenant
pour guide pour le conduire à travers les lieux expiatoires. Il fait un éloge de la
campagne et du travail des champs et tente de magnifier l’histoire romaine dans
la tradition des légendes de l’Antiquité. Les Bucoliques, écrites de 49 à 39 avant
J.-C., sont une transposition de la campagne italienne dont il loue les traditions.
La partie annonçant la venue d’un enfant extraordinaire qui apportera le salut
aux hommes sera perçue par les chrétiens comme l’annonce de la venue du
Christ. Son autre grande œuvre, les Géorgiques, divisée en quatre livres, traite
de la culture des champs, de l’arboriculture, de l’élevage et de l’apiculture. Mais
son legs le plus important reste l’Énéide, rédigée sur la demande d’Auguste afin
d’exalter la grandeur de Rome, il souhaite y rivaliser en prestige avec l’Odyssée.
Horace (Quintus Horatius Flaccus, 65-8 av. J.-C.) illustre son génie dans les
Satires, les Odes, les Épîtres dont une des dernières, intitulée l’Art poétique,
livre les principaux préceptes à respecter en matière de poésie. Cette idée sera
reprise plus tard par trois poètes : Vida, poète du XVIe siècle, Boileau au
XVIIe siècle et Verlaine au XIXe siècle. Il fait ses études à Athènes, grandit à
Rome et devient l’ami de Brutus, l’assassin de César. Après avoir trouvé un mé‐
cène, il devient l’un des poètes les plus importants de Rome et surtout le fonda‐
teur des satires classiques. Le genre traité est celui de la vie quotidienne des Ro‐
mains. L’homme y tient une place prépondérante.
Tibulle (Albius Tibullus, 50-19 av. J.-C.) est le plus grand poète élégiaque ro‐
main avec Properce. L’amour, le désir, la souffrance sont ses thèmes de prédi‐
lection qu’il exprime pour Délia, son premier amour, Némésis qui lui succède et
Marathus, un jeune garçon. Le recueil des Élégies, Eligiarum libri, comprend
poèmes et pièces amoureuses qui ont fait considérer sa poésie lyrique amou‐
reuse comme une métaphysique de l’amour. Les Élégies de Lygdamus se placent
tout à fait dans la tradition de Tibulle.
Les œuvres d’Ovide (Publius Ovidius Naso, 43 av. J.-C.-17 apr. J.-C.) com‐
prennent des élégies de différentes sortes : Les Tristes, Les Pontiques, des
poèmes mythologiques, Les Fastes et Les Métamorphoses. Il décrit aussi facile‐
ment les combats que les moments de volupté, les héros que les bergers et il
plaît jusque dans ses défauts. Il ne croit plus, comme Virgile, à une fatalité à la‐
quelle les hommes doivent se plier. L’amour, la volonté dirigent les hommes et
se dressent contre les pouvoirs impersonnels que les lois, les mœurs peuvent
leur imposer. Ses œuvres concernent les élégies amoureuses, Les Remèdes
d’amours, Les Héroïdes, L’Art d’aimer, Les Tristes.
Pline l’Ancien (Caius Plinius Secundus, 23-79) ne doit pas être confondu
avec son neveu adoptif Pline le Jeune. Pline l’Ancien est fonctionnaire adminis‐
tratif et commandant d’une flotte. Dans son œuvre gigantesque Histoire natu‐
relle, dédiée à l’empereur Titus, où il traite de tous les sujets concernant le
monde (terre, soleil, planètes, animaux terrestres, botanique), la nature est
conçue comme « une souveraine et ouvrière de la création5 ». Le livre XXXV
constitue une véritable histoire de l’art, nous fait connaître les œuvres autant que
les artistes de l’Antiquité, permet à la Renaissance de puiser dans ce vaste réper‐
toire artistique. Pline assure qu’il avait consulté deux mille volumes pour mener
à bien sa gigantesque enquête. Il a également rédigé des œuvres de grammaire,
de rhétorique, de stratégie. C’est en s’approchant trop près du Vésuve pour por‐
ter secours aux habitants et étudier son éruption qu’il trouve la mort.
Lucain (Marcus Annaeus Lucanus, 39-65) nous laisse la seule Pharsale,
œuvre épique en dix chants, sur la guerre menée entre César et Pompée. Il s’at‐
tache à retracer les événements historiques datant de moins d’un siècle.
L’Africain Apulée (125-170), philosophe rattaché à l’école de Platon et
d’Aristote, nous livre Les Métamorphoses (parfois appelées L’Âne d’or). Long‐
temps considérée comme une œuvre scabreuse, un roman divertissant, elle est
aujourd’hui perçue comme ayant davantage une portée religieuse et mystique.
Comme Marcus Cornelius Fronto (v. 100-v. 170), il fait une large part à l’irra‐
tionnel. Par pure curiosité le héros se fait transformer en âne par une sorcière et
oublie l’antidote. Ce n’est qu’après de nombreuses aventures qu’il parvient à re‐
trouver sa forme première, grâce à la déesse Isis au culte de laquelle il se fera
initier. Dans ce récit, raconté à la première personne, un certain Lucius fournit
un remarquable tableau de la vie quotidienne au IIe siècle de l’empire. À cette
histoire principale sont rattachés d’autres récits de longueur variable. Le plus
long est le Conte d’Amour et de Psyché, dans lequel une vieille servante dans une
caverne de brigands raconte à une jeune fille, venant d’être enlevée par ceux-ci,
l’histoire de Lucius.
◆ Caton l’Ancien (Marcus Porcius Cato, 234-149 av. J.-C.) est le premier
historien dans la littérature historique romaine à écrire en latin. Il compose, la
cinquantaine passée, les Origines, en prose. Cet ouvrage relate, en sept livres,
l’histoire de Rome depuis sa fondation dans une conception qui refuse l’idée
d’une prédestination de Rome d’essence divine. Son autre œuvre, De agri cultu‐
ra (De l’agriculture), est la seule qui nous soit parvenue dans son intégralité.
C’est lui rendre justice que de voir en lui le fondateur du discours latin tant poli‐
tique qu’artistique. Son conservatisme et ses principes rigides lui valurent le sur‐
nom de Caton le Censeur.
◆ Parmi plusieurs œuvres de Salluste (Caius Sallustius Crispus, 87-35 av. J.-
C.), trois nous sont connues intégralement : La Conjuration de Catilina, La
Guerre de Jugurtha et son chef-d’œuvre, les Histoires. Cet ouvrage, dont on ne
possède que des extraits, décrit les événements qui ont eu lieu après la défaite
des Gracques. Salluste s’impose comme le peintre des groupes politiques. La
Conjuration de Catilina analyse les raisons qui ont contribué à la décadence de
l’esprit romain. Pour lui, la force qui domine les faits n’est pas celle des événe‐
ments, de la fortuna, destin, mais bien celle de l’action responsable des hommes.
Salluste prête à César un long discours au moment où la conjuration est démas‐
quée, sachant qu’il deviendrait le maître du monde. Salluste rédige La Guerre de
Jugurtha après La Conjuration de Catilina. Il y relate la guerre menée contre le
roi de Numidie, Jugurtha, entre 110 et 104. L’impartialité s’impose comme une
nécessité en histoire, alors qu’un genre nouveau apparaît : les monographies.
◆ Strabon (63 av. J.-C.-25 apr. J.-C.), géographe grec, continue l’œuvre de
Polybe dans ses Mémoires historiques. Il traite, en quarante-sept volumes, la pé‐
riode allant de 146 à 31 avant J.-C. Mais cet ouvrage est entièrement perdu. En
revanche, les dix-sept livres de sa Géographie, qui nous livre les idées que le
peuple romain se faisait de lui-même, de l’Europe (livres III à X), de la Grèce,
de l’Asie Mineure (livres XI et XIV), de l’Orient (livres XV à XVI), de l’Égypte
(livre XVII) sont conservés. Il ne sort de l’ombre qu’au Ve siècle et est retraduit
au XVe siècle par l’érudit italien Guarino Veronese (1370-1460).
◆ L’œuvre de Tite-Live (Titus Livius, 59 av. J.-C.-17 apr. J.-C.), Histoire de
Rome depuis sa fondation (Ab Urbe condita libri), apparaît dans le siècle rayon‐
nant d’Auguste. Nourrie des leçons du passé, cette œuvre monumentale, en cent
quarante-deux livres, veut, en retraçant l’histoire de Rome depuis sa fondation
jusqu’à la mort de Drusus (9 apr. J.-C.), en tirer des leçons pour l’avenir. Seuls
trente-cinq livres sont conservés. L’exactitude des faits lui importe peu, il se
contente des dires de ses prédécesseurs. Son récit est entrecoupé de portraits,
Hannibal, Scipion l’Africain, à la psychologie aiguë.
◆ Les Commentaires de Jules César (Caius Julius Caesar, 100-44 av. J.-C.)
prennent place parmi les Mémoires qui se multiplient au Ier siècle avant J.-C. Il
reçoit une bonne formation littéraire de son maître, le rhéteur et grammairien
Marcus Antonius Gnipho, puis d’Apollonius Molon, sans être pour autant
considéré comme un homme de lettres. Les sept livres des Commentaires sur la
Guerre des Gaules (Commentarii de bello gallico) sont des aide-mémoire, des
dossiers sur les campagnes qu’il a menées en Gaule de 58 à 52 avant J.-C. et re‐
tracent ses avancées jusqu’au Rhin et en Grande-Bretagne. La fin est dominée
par la défaite du chef arverne Vercingétorix à Alésia. César a également rédigé
un traité de grammaire, De analogia, un pamphlet politique, l’Anticato, des
poèmes et une tragédie, Œdipe.
◆ Tacite (Publius Cornelius Tacitus, 55-120) est considéré comme l’un des
plus grands historiens romains. Après lui, on assiste à un émiettement de l’his‐
toire en sous-genres limités dans leur portée et leur contenu. Les annales dispa‐
raîtront et seront remplacées par des mémoires et des biographies. Tacite reçoit
une éducation d’orateur et devient consul en 97, puis proconsul de la province
d’Asie l’année suivante. Il commence à publier ses travaux après la mort de
l’empereur Domitien dont il dénonce la tyrannie dans la Vie d’Agricola, hom‐
mage à son beau-père tant apprécié. Tacite commence véritablement son œuvre
avec le Dialogue des orateurs, sorte de prolongement du De oratore cicéronien.
Il y fait le constat de la dégradation des mœurs et de l’éloquence, établissant un
rapport entre la réflexion politique et la nostalgie de la poésie. Après un second
essai, La Germanie (De situ ac populis Germaniae), au caractère ethnogra‐
phique puisqu’il y décrit les mœurs des tribus vivant au nord du Rhin et du Da‐
nube, il aborde le genre historique avec ses Histoires, retraçant l’histoire ro‐
maine de la mort de Néron jusqu’à l’assassinat de Domitien, et ses Annales, al‐
lant de la mort d’Auguste à celle de Néron. Le titre « Annales » provient sans
doute du fait qu’il décrit les événements année par année, le titre le plus exact
est Après la mort du divin empereur Auguste, Ab excessu divi Augusti. La
conception de l’histoire n’est plus celle qui domine sous l’ancienne République,
elle devient celle de la toute-puissance d’un seul homme. Tacite préfère s’en te‐
nir à une vérité connue comme telle par la tradition historique. Tout en dénon‐
çant les vices et en encensant les vertus, l’historien est dispensateur de gloire.
◆ Suétone (Caius Suetonuis Tranquillus, v. 70-v. 140), érudit, homme de bi‐
bliothèque, est avant tout un biographe. Sa nomination au poste de secrétaire ab
epistulis latinis, directeur de la correspondance diplomatique d’Hadrien, lui per‐
met d’avoir accès aux archives impériales. Les Vies des douze Césars présentent
les biographies de César à Domitien. Suétone inaugure cette nouvelle forme de
l’histoire constituée par le règne des empereurs successifs. L’accessoire est aussi
important que l’essentiel, il note leurs faits et gestes, les moindres détails, car ce
sont eux qui dévoilent bien une personnalité. C’est l’homme privé et intime qui
l’intéresse bien davantage que l’homme public : « Les caractères originaux de
cette histoire “biographique” la rapprochent des laudationes que l’on prononçait
aux funérailles. On sait que ces éloges portaient non seulement sur l’action mili‐
taire ou politique du défunt mais aussi exaltaient ses qualités morales, et celles
dont il avait donné l’exemple dans sa vie privée. Ces éloges funèbres procé‐
daient, eux aussi, per species et non par récit suivi. On peut penser que leur in‐
fluence s’exerça sur Suétone, que nous savons avoir été intéressé par toutes les
traditions nationales de Rome, depuis les spectacles jusqu’au costume et à la vie
des soldats7. »
◆ Dion Cassius (Cassius Dio Correianus, 155-235), avant d’être consul, en
229, était connu pour son Histoire romaine, gigantesque travail de quatre-vingts
livres qui relate l’histoire de Rome de sa fondation à Septime Sévère. Il exprime
son opposition formelle à la prédominance de l’Italie et du Sénat dans le gou‐
vernement de l’Empire. Déçu par Septime Sévère, il se montre à l’égard de sa
politique d’une grande hostilité.
Temps et calendrier
L’astronomie
Outre son intérêt pour les poètes et les récits mythiques, l’astronomie, sou‐
vent confondue avec l’astrologie, passionne les Romains. Ils connaissent les
constellations, la Grande Ourse notamment, mais il s’agit surtout d’un savoir po‐
pulaire. Le plus célèbre astronome est Claude Ptolémée. Ses observations as‐
tronomiques s’échelonnent entre les années 127 et 151. Il vit et meurt à Alexan‐
drie, probablement vers 168. Auteur d’une Syntaxe mathématique (l’Almageste),
il y expose son système, selon lequel la terre serait fixe au centre de l’univers,
alors que le Soleil, la Lune, les étoiles tournent autour d’elle. Il établit un cata‐
logue des étoiles de mille vingt-deux astres, calcule la distance de la Terre à la
Lune, le diamètre de cette dernière. Son œuvre demeure incontestée du IIe siècle
au XVIe siècle, en dépit d’Aristarque de Samos, qui au IIIe-IIe siècle avant notre
ère avait déjà placé le Soleil au centre de notre système planétaire.
La médecine
En 293 avant J.-C., le culte d’Esculape est introduit à Rome, et avec lui la mé‐
decine grecque, qui conquiert rapidement tous les suffrages. La médecine ro‐
maine est connue de par une partie de l’encyclopédie de Celse (Ier siècle apr. J.-
C.). Le vocabulaire médical y est grec, les auteurs cités également. Celse in‐
dique comment traiter les blessures par projectiles, l’extraction et les soins pos‐
térieurs, celles par armes empoisonnées. Il prodigue des conseils d’hygiène,
trace le portrait du chirurgien : « Le chirurgien doit être jeune, ou, du moins, en‐
core près de la jeunesse ; il doit avoir la main ferme et sûre, jamais tremblante,
doit être aussi adroit d’une main que de l’autre, avoir la vue claire et perçante, le
cœur intrépide. Déterminé à guérir celui qui se confie à ses soins, il ne doit pas
se hâter plus que le cas ne l’exige, ni couper moins qu’il n’est nécessaire : il doit
tout faire comme si aucune plainte du patient ne l’affectait8 ». L’Histoire natu‐
relle de Pline l’Ancien fournit les recettes des remèdes venus de la médecine
grecque.
Galien (130-v. 201), médecin de Commode, héritier de Marc Aurèle,
consacre de nombreux volumes à la médecine. Son œuvre sert de référence à
toute l’époque médiévale, avant les efforts de Vésale, Servet. Galien, profondé‐
ment imprégné du finalisme aristotélicien, conçoit l’individu comme un système
d’organes au service d’une âme. Il dissèque cochon, mouton, bœuf, reconnaît
l’analogie anatomique de l’homme et des grands singes, décrit le rôle des nerfs,
des os, des articulations, montre que le sang est contenu dans les artères, dis‐
tingue sang artériel et sang veineux.
Notes
1. Les Julio-Claudiens appartiennent tous à deux familles patriciennes, la gens Julia et la gens Claudia.
Les empereurs Auguste, Tibère et Caligula sont issus de la première, Claude et Néron, de la seconde.
Quant aux Flaviens, issus de la gens Flavii, 69 à 96 après J.-C., on y retrouve les empereurs Vespasien, Ti‐
tus, Domitien.
2. Dès 240 avant J.-C., Livius Andronicus fait représenter aux jeux romains la première tragédie tra‐
duite d’un modèle attique, la résistance nationale reste vive.
3. La théorie des simulacres permet d’expliquer non seulement la perception des sens mais aussi des
rêves et du travail de la pensée. Les simulacres se détacheraient de tous les corps, sortes de membranes lé‐
gères, chacune d’elles présentant en miniature la forme et l’aspect de l’objet dont elle émane. Elles pénétre‐
raient dans les organes des sens, en voltigeant dans les airs.
4. Épictète, Entretiens III, 2, 1-2, trad. Joseph Souilhé, Paris, Les Belles Lettres, 1963.
5. Pline l’Ancien, Histoire naturelle, XXII, 117.
6. Elles consistent en un recueil publié année par année regroupant les procès-verbaux des délibérations
des pontifes. La plupart de ces archives disparurent avec le grand incendie de Rome, provoqué par les
Gaulois. Selon Cicéron, le grand pontife inscrivait sur un tableau blanchi la tabula dealbata, les noms des
consuls, magistrats puis, par ordre chronologique, les événements qui avaient eu lieu.
7. Pierre Grimal, La Littérature latine, Paris, Fayard, 1994, p. 478.
8. Aurelius Cornelius, Celse. Traité de médecine, traduction nouvelle, livre VII, Paris, Masson, 1876.
CHAPITRE XIV
Le christianisme
Le Nouveau Testament
Attribués à Luc, les Actes des Apôtres sont des sources fondamentales. Les
voyages missionnaires effectués par Pierre et par Paul de façon séparée y sont
racontés en détails. Le récit débute avec l’Ascension de Jésus suivie de la Pente‐
côte et relate les débuts de l’Église primitive.
Les Épîtres de Paul, adressées à une communauté particulière ou à un desti‐
nataire précis, sont complétées par sept épîtres catholiques, c’est-à-dire adres‐
sées à toute l’Église, probablement datées des années 60.
L’Apocalypse
2. L’évolution du christianisme
LA DOCTRINE GNOSTIQUE
Parmi les nombreux évangiles du IIe siècle, celui de Judas, découvert dans les an‐
nées 1970 en Moyenne-Égypte, est classé comme gnostique. C’est un manuscrit en papy‐
rus, composé de vingt-six pages, faisant partie d’un codex d’une soixantaine de pages, ap‐
pelé codex Tchacos, contenant également deux autres textes apocryphes, l’Épître de
Pierre à Philippe et la Première Apocalypse de Jacques. Il tente de définir qui est le Christ
et comment le caractériser. Traduit en 2006 et publié par la National Geographic Society,
ce texte donne un éclairage sur les origines du christianisme au Ier siècle. Irénée de Lyon
mentionne son existence dans un groupe gnostique caïnite. Son auteur est anonyme mais
a pris le nom de Judas afin de placer le texte sous une haute autorité. Le déchiffrement du
papyrus contredit les enseignements du Nouveau Testament. La traduction montre un
texte non sectaire où Judas est celui que Jésus choisit pour le livrer : « Tu les surpasseras
tous, car tu sacrifieras l’homme qui me sert d’enveloppe charnelle3. » Cette vision, Judas
traître et héros, diffère de celle des Évangiles canoniques, aujourd’hui remise en question
par la communauté scientifique, lors d’un congrès en mars 2008, à l’université Rice de
Houston. Judas y est montré comme un être sous l’emprise de son destin et de celui dicté
par les astres, qualifié de treizième daimon, il est celui qui gouvernera sur ceux qui le
maudissent. Par l’entremise de son étoile, il devra « sacrifier l’enveloppe charnelle de son
maître et l’offrir au dieu Saklas4 ». C’est au IVe siècle que Judas devient important et, au
Ve siècle, selon saint Augustin, « Judas est la figure du peuple juif5 ». Il y a un parallé‐
lisme entre le regard porté sur Judas et celui que les chrétiens posent sur le judaïsme
comme déicide : Judas devient alors le symbole de la culpabilité du peuple juif. Au
Moyen Âge, on justifie les impôts spécifiques qu’on fait payer aux juifs en disant qu’ils sont
une compensation aux trente deniers perçus par Judas. Le regard porté sur lui commence
à s’humaniser au XVIIIe siècle.
LE CHRISTIANISME CONSTANTINIEN
À la fin du IIIe siècle, Aurélien (empereur de 270 à 275) fonde une nouvelle
religion monothéiste d’État, celle du Sol invictus, le dieu soleil invaincu dont il
fait reproduire le symbole sur les enseignes militaires. Il espère par le caractère
exclusif de cette religion endiguer la montée du christianisme. Les chrétiens et
tous ceux qui refusent de la suivre seront persécutés. Constantin (Flavius Vale‐
rius Aurelius Claudius Constantinus, v. 285-337), comme son père Constance
Chlore, suit d’abord cette religion solaire. Puis constatant l’avancée du christia‐
nisme et renonçant à la politique de persécution de ses prédécesseurs, il prend
le parti de s’appuyer finalement sur le christianisme pour consolider l’unité de
son empire. Par l’édit de tolérance du 30 avril 311, Constantin et son coempe‐
reur Licinius mettent fin à la persécution des chrétiens. Après la mort de Galère
à Sardique, Maximin II Daïa obtient l’Asie et sous son règne de nouvelles per‐
sécutions antichrétiennes ont lieu. Constantin s’allie à Licinius contre ce dernier
et Maxence. La bataille décisive a lieu devant Rome en 312 au pont Milvius.
Maxence y trouve la mort. La légende veut qu’avant cette bataille Constantin ait
vu dans le ciel une croix entourée d’une banderole et, convaincu de la puissance
du dieu des chrétiens, ait voulu se convertir. Constantin reste seul empereur
d’Occident, pendant que Licinius, vainqueur de Maximin II Daïa, règne sur le
monde oriental. Après sa victoire, Constantin fait ériger sur le Forum Roma‐
num sa statue en pied avec la croix en guise d’insigne de son triomphe. C’est la
première représentation de l’empereur chrétien. Mais plus encore, le ralliement
de Constantin au christianisme est le couronnement de l’évolution de cette reli‐
gion6 même si, encore au IVe siècle, subsistent bon nombre de religions orien‐
tales, culte d’Isis ou de Mithra. Les chrétiens ne sont encore en 312 qu’une mi‐
norité dans l’Empire.
◆ L’édit de Milan, de 313 après J.-C., rétablit dans l’Empire romain la paix
en accordant la liberté de culte à tous les habitants de l’Empire. Les évêques se
voient accorder les mêmes droits et les mêmes honneurs que les sénateurs.
L’Église reste étroitement liée à l’État même si elle est habilitée à recevoir des
legs. Pour la première fois dans la Rome antique, un empereur est aussi chef de
l’Église. La vie publique, à la suite de l’édit, est considérablement modifiée, le
culte païen est refoulé, les sacrifices païens officiellement interdits en 319. Les
chrétiens occupent les plus hauts postes administratifs. En 321, le dimanche,
jour de la résurrection du Christ, est déclaré jour de repos légal. En 325, les
jeux de gladiateurs sont supprimés. Les pièces de monnaie comportant des em‐
blèmes païens sont peu à peu retirées. Enfin une de ses conséquences concerne
l’art, lui permettant de se développer librement. De nombreuses églises seront
construites sous le pape Sylvestre Ier (314-335) et ses successeurs.
◆ Le concile de Nicée, en 325, premier concile œcuménique, est réuni par
l’empereur pour résoudre le problème soulevé par Arius concernant la Trinité,
qui divise les Églises d’Orient. Rattaché à l’Église d’Antioche, Arius, élève de
Lucien, soutient que le fils, Jésus, n’est pas identique à Dieu mais à un autre re‐
vêtu par lui de pouvoirs divins. Deux théologiens, Eusèbe, évêque de Césarée,
et Eusèbe, évêque de Nicomédie, contribuent à la diffusion de cette doctrine,
source possible de la division de l’Église, menace pour la politique intérieure.
Constantin, conscient du danger, appuyé par le pape Sylvestre, lance un appel
aux évêques. Le concile, dont le siège se trouve au palais d’été de l’empereur,
réunit environ deux cent cinquante évêques dont seulement trois d’Occident.
Athanase7 est à la tête des adversaires d’Arius. Le concile fait l’unité et formule
ce qu’on appellera le « Credo de Nicée ». Arius sera banni ainsi qu’Eusèbe de
Nicomédie. Pourtant Constantin le fait revenir et le problème de l’arianisme
reste en suspens. Il bannit, en revanche, Athanase comme fauteur de troubles.
Toute la chrétienté d’Orient va devenir arienne, tandis que celle d’Occident s’en
tient au Credo de Nicée. Un an auparavant, Constantinople est fondé, rempla‐
çant Byzance pour des raisons stratégiques – il s’agit d’un point de contact entre
l’Orient en plein essor et l’Occident. Constantin entreprend officiellement, en
326, la transformation de Byzance en une nouvelle Rome chrétienne. Constanti‐
nople devient alors une copie de Rome avec sa division en quatorze districts et
ses sept collines. L’hippodrome est semblable au Grand Cirque romain. Mais,
contrairement à Rome, il n’y a ni lieu ni culte païens. L’Église romaine devient
politiquement plus indépendante et la puissance du pape s’accroît du fait de son
éloignement de la cour impériale. La langue cléricale y devient le latin. Le di‐
manche 22 mai 337, jour de la Pentecôte, Constantin meurt à Nicomédie. Son
mausolée n’étant pas encore construit, sa dépouille est conduite à l’Église des
Saints-Apôtres. Ses trois fils seront proclamés Auguste. Constantin II reçoit
l’Occident, Constance II l’Orient et Constant, âgé de quatorze ans, sous la tu‐
telle de son frère aîné, reçoit un empire du centre. Le fils fut déclaré de même
« substance » que le père. Le concile reconnaît aussi la prééminence du siège
d’Alexandrie sur toutes les églises d’Égypte, fixe la date de Pâques. Ce texte est
prolongé en 451 par le concile de Chalcédoine qui évoque les deux natures du
Christ, humaine et divine, réunies en une seule personne. Au VIIIe siècle, les Oc‐
cidentaux introduisent dans le Credo l’expression filioque, « il procède du père
et du fils ».
LE CHRISTIANISME APRÈS CONSTANTIN
En Orient
En Orient, le premier ermite chrétien est saint Antoine (v. 251-v. 356), qui
s’était retiré dans le désert. Son exemple fait école mais pose des problèmes à la
vie chrétienne, car un autre ermite, saint Pacôme (292-348), découvre dans la
vie érémitique sans règle des dangers qu’il s’efforce de pallier en fondant une
communauté assujettie à un régime commun de prière et de travail sous l’autori‐
té d’un supérieur. Après avoir été attesté en Égypte, le monachisme l’est aussi en
Palestine, avec Hilarion et son âge d’or, sous Euthyme le Grand (377-473) et
saint Sabas (439-532). La laure, village de moines, se généralise dans le désert
de Jérusalem.
Les termes de l’érémitisme
• Anachorétisme : la solitude complète est un élément essentiel de l’ascèse de
l’ermite.
• Semi-anachorétisme : regroupement des anachorètes autour d’un même lieu
pour recevoir d’un ancien l’enseignement. Il n’implique nullement la recherche d’une
vie communautaire.
• Le cénobitisme : communauté monastique constituée pour mener une vie com‐
munautaire. Il reste une forme du monachisme du désert puisqu’il reprend le semi-
anachorétisme mais y adjoint une vie communautaire sur le modèle de l’Église pri‐
mitive de Jérusalem. Les biens sont mis en commun. La soumission et le respect
des règles communes le définissent. Il emprunte au monachisme urbain un carac‐
tère ecclésial et liturgique nettement plus marqué que dans le semi-anachorétisme.
LA CHRISTIANISATION DE L’EUROPE
Entre 375, invasion des Huns, et 568, migration des Lombards, en Europe,
des migrations vont avoir lieu. La puissante et constante intrusion de ces
peuples en Europe va en modifier le statut politique et la civilisation. La plupart
des peuples barbares8, la France exceptée, sont déjà christianisés au moment où
ils envahissent l’Occident, christianisés mais de confession arienne, hérésie
condamnée en 325 par le concile de Nicée. Les invasions vont créer un désarroi
immense chez les Romains. Le sac de Rome par Alaric en 410 connaît un re‐
tentissement considérable. Les tribus germaniques pillent les provinces ro‐
maines. Incapables de faire face sur tous les fronts, les autorités impériales s’ef‐
forcent de disperser les Barbares, de les éloigner des zones les plus riches et les
plus urbanisées. L’arrivée des Huns a des répercussions tout le long du limes
jusqu’en Germanie occidentale. En 406, Vandales, Suèves et Alains franchissent,
à la hauteur de Mayence, le Rhin. Ils se répandent en Gaule et dévastent tout.
D’autres peuples barbares s’engouffrent à leur suite et progressent à l’ouest du
Rhin : Burgondes, Alamans, Francs. En 409, Vandales, Suèves et Alains se ré‐
pandent en Espagne, poursuivant leur pillage. L’empereur Honorius, en 413,
installe les Wisigoths en Narbonnaise, sous la direction du roi Athaulf, et, en
415, il leur demande de combattre les Vandales pour les rappeler définitive‐
ment trois ans plus tard et les installer en Aquitaine. Le royaume de Toulouse
est le premier royaume barbare établi à l’intérieur du royaume. Les Alamans
s’étendent sur la rive gauche du Rhin, tandis que les Francs profitent de la désor‐
ganisation de l’Empire pour s’avancer à l’ouest du Rhin. Des peuples entiers sont
désormais installés dans l’Empire. Sous l’autorité d’un roi national, ils jouissent
d’une autonomie totale mais sont considérés comme des troupes régulières au
service de Rome et leur roi occupe une place dans la hiérarchie militaire. Avec
la désorganisation de l’Empire, ce sont les évêques qui vont jouer un rôle impor‐
tant entre les Romains et les Barbares. Léon le Grand, pape au Ve siècle, va au-
devant d’Attila pour négocier. Un tableau de Raphaël, au Vatican, montre cette
rencontre avec le Hun. Ce dernier accepte de ne pas marcher sur Rome et de se
retirer. Mais il y a aussi des moniales comme sainte Geneviève qui remonte le
moral des Parisiens, lorsque ce même Attila se présente aux portes de Paris.
Accueillis comme hôtes, les envahisseurs sont fixés au sol sur la base d’un trai‐
té, foedus, d’où le nom de fédérés qui leur est définitivement donné. Le véritable
artisan de cette politique de collaboration, laissant supposer qu’entre 423 et 450
la crise des invasions a été surmontée, est Aetius (v. 395-454). Généralissime
des légions romaines, avec l’aide des Huns, il défait les Burgondes du Rhin infé‐
rieur, dont le roi Gunther a violé ses engagements envers Rome. Aetius installe
le reste du peuple burgonde à titre de fédérés sur le Rhône supérieur et la Saône
avec pour centre Genève, leur donnant pour mission de garder les frontières de‐
vant les Alamans. Pourtant, il ne peut empêcher Genséric, roi des Vandales,
quittant l’Espagne, de prendre Carthage. Il acquiert ainsi une base importante de
la Méditerranée, lui fournissant une puissance navale. Aetius doit accepter la
paix que Genséric lui propose. Les plus riches régions autour de Carthage lui
sont concédées non en qualité de fédéré, selon le droit colonial romain, mais en
tant que conquérant. Les biens des propriétaires romains et des clercs catho‐
liques sont confisqués. En contrepartie, Genséric s’engage à faire des livraisons
de céréales à Rome. Les conséquences quant à l’installation de ces peuples fédé‐
rés sont décisives, la situation variant néanmoins en fonction des régions. On as‐
siste à un recul du christianisme, là où s’installent les Francs dans le nord de la
Gaule et là où se trouvent les ariens qui font de leur foi un facteur d’identité na‐
tionale. Une autre conséquence, après 476, permet à l’aristocratie sénatoriale
d’investir des charges épiscopales. Leur légitimité est assez vite acceptée par
l’Église. Les souverains païens acceptent aussi cette collaboration avec l’Église,
les évêques assurant la survie des institutions romaines. Ils sont les premiers à
se convertir et demander le baptême, comme Clovis.
La christianisation chez les Germains orientaux débute au IVe siècle avec
Wulfila (v. 311-383). Elle demande plus de huit siècles pour l’ensemble des
Germains. La mission de christianisation dépend du pouvoir de persuasion du
missionnaire pour montrer l’inefficacité des dieux païens face au dieu des chré‐
tiens. Lorsqu’il parvient à convaincre, la foi est débattue en assemblée. Mais le
fait le plus important de l’histoire de la chrétienté en Occident reste la propaga‐
tion du christianisme dans les îles Britanniques, en Angleterre méridionale, en
Écosse et en Irlande. Le christianisme se répand en premier dans la province de
Bretagne, conquise par les Romains sur les Celtes. Vers le IVe siècle, l’Église bri‐
tannique, sous les attaques des Pictes au Nord, des Gaels irlandais à l’Ouest, des
Angles et des Saxons venus de l’Est, succombe en même temps que la souverai‐
neté romaine. Les chrétiens restés dans l’île se réfugient dans les montagnes à
l’Ouest. En 429, afin de lutter contre le pélagianisme, saint Germain, évêque
d’Auxerre, s’y rend. Le résultat en est le rétablissement d’un ordre chrétien sur
des bases nouvelles. Un mouvement missionnaire se développe vers l’Écosse et
l’Irlande. Sur l’ordre du pape, l’évêque Palladius évangélise l’Irlande. Mais la
christianisation complète de l’île sera le travail mené par saint Patrick (v. 385-
461) en 431. Son organisation diffère de celle de la chrétienté du continent et
même de Rome. Les couvents y constituent la base de l’administration ecclé‐
siastique. Le diocèse d’un couvent recouvre le territoire temporel d’une tribu
dont le chef est le fondateur et le propriétaire. Dès 602-603 on s’efforcera de
faire disparaître par des « conciles d’union » les oppositions : calcul de la fête de
Pâques, rite du baptême, coutumes liturgiques se sont réunifiés. Les principaux
missionnaires irlandais en Bretagne et sur le continent sont Colomban l’Ancien
(ou Colomban d’Iona, 521-597), apôtre des Pictes, des Angles et des Saxons, et
Colomban le Jeune (ou Colomban de Luxeuil, 540-615), fondateur de plu‐
sieurs couvents en Gaule. Au nombre de ses disciples figure Gall de Suisse, fon‐
dateur d’un ermitage qui deviendra le monastère de Saint-Gall.
LE CHRISTIANISME ORIENTAL
Tandis que l’Occident chrétien des royaumes barbares s’enfonce dans une nuit
culturelle et intellectuelle des premiers siècles du Moyen Âge, l’Orient se dé‐
chire religieusement, construit des monastères et des églises, ébauche sa liturgie,
envoie ses missionnaires évangéliser l’Arménie, la Géorgie, la Perse. Deux mo‐
numents d’Orient sont encore à la gloire de son Empire chrétien, la cathédrale
Sainte-Sophie et le Code Justinien, recueil de toutes les lois de l’Empire. Néan‐
moins, il manque à l’Orient un centre apostolique semblable à Rome pour l’Oc‐
cident. Les communautés ecclésiastiques se développent considérablement et
des divisions religieuses internes voient le jour. L’empereur byzantin, ou le pa‐
triarche de Constantinople, le plus puissant prélat, n’est pas pour autant le chef
de l’église d’Orient. Le pape reste le successeur apostolique de saint Pierre, le
prince des apôtres. Les doctrines théologiques d’Orient sont conçues comme
des sources permanentes d’attaques envers l’autorité doctrinale de l’évêque de
Rome. Les réformes de Justinien provoquent aussi des désagréments pour l’ad‐
ministration ecclésiastique et le clergé. La liaison étroite avec l’État entraîne la
sécularisation de l’Église. Ainsi voit-on d’anciens fonctionnaires, des hommes
sans formation, devenir évêques. C’est à prix d’or que les nouveaux prêtres
doivent acheter leur entrée dans le clergé. La liturgie se transforme au VIe siècle,
se détachant de plus en plus de celle pratiquée en Occident. Le faste et le solen‐
nel des cérémonies, la préciosité des habits sacerdotaux font que celle-ci se dé‐
marque plus en Orient. L’emploi du grec permet au peuple de participer aux cé‐
rémonies. Mais le fossé se creuse encore plus avec l’innovation du mystère de
l’Eucharistie, qui, au lieu de se dérouler sous les yeux des fidèles, s’enferme
dans le secret du Saint des Saints où seuls les prêtres y assistent. Un rideau, ou
un mur, l’iconostase, dérobe, en effet, l’incarnation du Christ aux regards de la
communauté. Les prêtres avant et après la consécration effectuent une proces‐
sion afin de montrer le mystère au peuple. La fin du VIe siècle est marquée par
l’ascension à la papauté de Grégoire Ier le Grand, premier moine à monter sur
le trône de Saint-Pierre. Il se révèle un éminent chef de l’Église par l’élaboration
d’un ordre nouveau dans l’administration ecclésiastique de l’Italie et des pays
nouvellement acquis au christianisme et de par son action missionnaire : qua‐
rante bénédictins évangélisent les Angles et les Saxons. Sa politique avisée per‐
met, par la suite, la préparation d’une étroite liaison entre l’Église et les souve‐
rains germains, d’autant plus essentielle que reposera dessus toute la politique
occidentale à venir. Son activité pastorale est effective par huit cent cinquante
lettres et missives, une documentation essentielle sur la théologie au
Moyen Âge.
L’ART PALÉOCHRÉTIEN
C’est seulement à partir du IIIe siècle que certains bâtiments sont voués à la
célébration du culte. Lors des persécutions, ces édifices sont détruits, les com‐
munautés se réunissent alors dans les catacombes, voire dans les maisons de
particuliers transformées en églises. Les cimetières chrétiens, qui ne diffèrent
pas des catacombes païennes et juives, existent dès le IIe siècle dans tout l’Em‐
pire, à Rome, à Naples, à Alexandrie, à Syracuse, à Malte, en Afrique du Nord,
en Asie Mineure. Les maisons des particuliers ne sont que de simples construc‐
tions, parfois de riches villas comme celles de certains sénateurs ou de ma‐
trones. Des églises sont toutefois utilisées, car en 260 une ordonnance de Gal‐
lien (empereur de 253 à 268) en restitue certaines à Rome. Les thèmes pictu‐
raux qui décorent les catacombes avant d’emprunter ceux des païens utilisent de
nombreux symboles comme mode de reconnaissance : croix, poisson, co‐
lombes, ancres. Le mot grec ichtyos (poisson) sert d’anagramme pour Jésus-
Christ, fils de Dieu et sauveur. L’art chrétien n’est pas une création originale. On
le trouve aussi bien à Rome qu’au Proche-Orient. On peut dire que l’art antique
se christianise. Les motifs sont en partie des transpositions d’images païennes.
Ainsi le motif des Amours et des Psychés, au cimetière de Domitille (IIIe siècle),
sert à évoquer les destinés de l’âme, l’antique porteur de veau ou de bélier donne
son attitude au bon pasteur, tout comme le mythe d’Orphée, aux catacombes de
Priscille. Mais des thèmes purement chrétiens apparaissent également, des
scènes de l’Ancien Testament (le Sacrifice d’Abraham, Jonas et la Baleine) ou
du Nouveau Testament (la résurrection de Lazare). Dès le IIe siècle, des figures
du Christ, au cimetière de Prétextat, et de la Vierge, aux catacombes de Pris‐
cille, font leur apparition. Mentionnons les fresques de la synagogue de Doura
Europos qui succombe aux attaques perses vers le milieu du IIIe siècle : elles
constituent encore aujourd’hui l’un des plus monumentaux ensembles de pein‐
tures de l’Orient romain. Elles prouvent que malgré l’interdiction judaïque des
images, il existait chez les juifs une peinture religieuse figurative.
L’ARCHITECTURE CHRÉTIENNE
LA SCULPTURE CHRÉTIENNE
L’ART COPTE
L’art copte est l’art des chrétiens d’Égypte qui perdure de l’édit de Milan en
313, où l’on reconnaît l’existence de la communauté chrétienne, jusqu’après 640,
moment où les Arabes conquièrent le pays. Ses origines sont à chercher dans
l’art romain qui, après l’art hellénistique, s’est développé dans tout l’Empire. Les
coptes sont des chrétiens monophysites dont la langue liturgique est restée le
copte, dernière forme du langage pharaonique, qui disparaît de l’usage courant
pendant le XVIIe siècle. Le mot « copte » dérive de l’arabe qubti, corruption du
grec aiguptios transformé en (ai)gubti(os) puis qubti. L’Égypte reste fidèle à ses
anciennes conceptions religieuses jusqu’au IIIe siècle C’est également en Égypte
que la vie monastique se développe avant de se propager en Orient et en Occi‐
dent latin. De l’architecture copte, les monuments typiques seront d’ailleurs les
monastères et les églises, leurs constructeurs, les évêques. Parmi les plus cé‐
lèbres de ces créations : le couvent Blanc, Deir el-Abiad, et le couvent Rouge,
Deir el-Ahmar. De même les chapelles du monastère de Baouit, fondé au
IVe siècle, sont bâties sur le plan basilical des églises constantiniennes, avec le
dôme abside tréflé et la couverture de la nef en poutres. L’architecture médié‐
vale est influencée par ce type de plan. Le monastère prospère jusqu’au
VIIIe siècle puis décline avec l’islamisation du pays.
Notes
1. Florence Braunstein, À quoi servent les religions ?, Paris, L’Harmattan, 2002, p. 274.
2. Définition du « gnosticisme », in Encyclopædia Universalis.
3. L’Évangile de Judas. Du Codex Tchacos, traduction et commentaires de R. Kasser, M. Meyer et
G. Wurst, traduit de l’anglais par D. Bismuth, Paris, Flammarion, « Champs classiques », 2008, p. 33.
4. André Gagné, « A Critical Note on the Meaning of Apophasis in Gospel of Judas 33 : 1 », in Laval
théologique et philosophique 63, Laval, Éd. Faculté de philosophie, 2007, p. 337-383.
5. Fadiedy Lovesky, Antisémitisme et mystère d’Israël, Paris, Albin Michel, 1955, p. 139.
6. À ce sujet, voir Yves Modéran, L’Empire romain tardif : 235-395 apr. J.-C., Paris, Ellipses, 2006.
7. Lorsque, exilé d’Alexandrie, Athanase vient à Rome et à Trèves, il prêche en Occident l’idéal de re‐
noncement au monde et la vie monastique. Il est l’auteur d’une description d’une vie de saint Antoine qui
aura une grande importance sur le monachisme occidental.
8. À ce sujet, voir Roger-Pol Droit, Généalogie des Barbares, Paris, Odile Jacob, 2007.
TROISIÈME PARTIE
LE MOYEN ÂGE
CHAPITRE PREMIER
Les Lombards sont un peuple germanique qui envahit l’Italie au VIe siècle. Ils
donnent son nom, la Lombardie, à la partie septentrionale de la péninsule, mais
leur contrôle s’exerce, selon les époques, sur une grande partie de l’Italie, sans
toutefois qu’ils parviennent à l’unifier. Ils font de Pavie la capitale d’un royaume
s’étendant de la plaine du Pô, l’Ombrie, le nord de la Toscane jusqu’aux duchés
de Spolète et de Bénévent au sud. Le royaume est organisé à partir d’un do‐
maine royal d’un seul tenant entouré de duchés. Les propriétés royales sont ad‐
ministrées par des nobles, les hommes libres peuvent s’y établir en échange du
service militaire. Les Romains sont sujets, relativement libres, mais soumis aux
codes lombards jusqu’en 680. Agilulf (591-616) est proclamé roi à Milan en
591. Il renonce à l’arianisme pour le christianisme, parvient à une trêve avec
Byzance et la papauté. Une réaction arienne se fait jour dans la population et
porte sur le trône Rothari (636-652), qui codifie, en 643, le droit lombard par
l’Edictus Rothari, l’édit de Rothari, mais ne parvient pas à empêcher les duchés
de devenir de plus en plus indépendants. La monarchie retrouve son éclat avec
Grimoald (662-671), duc de Bénévent, devenu roi en 662. Il mène plusieurs
campagnes victorieuses contre les Byzantins, les Francs, les Avars. Il installe
des mercenaires bulgares dans le duché de Bénévent. À sa mort, en 671, la no‐
blesse exerce la réalité du pouvoir sous des rois affaiblis. Il faut attendre le
règne de Liutprand (712-744), le plus grand des souverains lombards, pour
que la monarchie connaisse son apogée. En 738, ce dernier appuie Charles
Martel dans la bataille de l’étang de Berre contre les Arabes. Il entreprend de
conquérir les territoires byzantins, menace le duché de Rome, mais doit finale‐
ment se retirer. Il conclut en 742 une paix de vingt ans avec le pape Zacharie.
C’est le duc de Frioul, Réchis ou Ratchis (744-749), qui lui succède, mais il
sera contraint d’abdiquer au terme de quatre ans de règne en raison de son im‐
popularité. Son frère Aistolf (749-756) devient alors roi. En 751 il s’empare de
l’exarchat de Ravenne, dernière possession byzantine en Italie. Mais il menace
Rome et, en 755, est assiégé et vaincu à Pavie par Pépin le Bref. Il se soumet au
roi franc et au pape, mais, l’année suivante, assiège Rome. Pépin revient, le bat,
l’oblige à céder au pape Étienne II les anciennes terres byzantines, à reconnaître
la souveraineté franque. Didier (757-774), dernier roi des Lombards, force le
frère d’Aistolf à lui céder ses droits au trône. Il met en place une stratégie d’al‐
liances en mariant une de ses filles, Liutpéra, au duc de Bavière, Tassilon III, et
l’autre, Désirée, à Charles, roi des Francs. Ce dernier la répudie en 771 afin
d’être libre de contracter une alliance plus prestigieuse encore. Appelé par le
pape Adrien Ier (772-795), menacé par les Lombards, Charles (Charlemagne)
envahit ses États, assiège et prend Pavie en 774. Didier est alors enfermé dans
un monastère jusqu’à la fin de ses jours. De 774 à 781 c’est Charlemagne qui
porte la « couronne de fer » des rois lombards. Puis il fait sacrer son fils, Carlo‐
man, âgé de quatre ans, qui prend le nom de Pépin, roi des Lombards. Pépin
d’Italie (781-810) échoue pourtant à soumettre les trois duchés lombards de
Bénévent, Salerne et Capoue qui se maintiennent encore pendant trois siècles.
L’ART GERMANIQUE
L’art produit par l’époque des grandes invasions barbares s’apparente encore
largement à celui de l’âge du fer et se limite à un géométrisme abstrait unique‐
ment ornemental. Au IVe siècle apparaît un style d’ornementation nouveau, em‐
pruntant à l’art iranien et à celui des Scythes ses motifs et principes que les
Goths de la mer Noire introduisent en Europe. L’utilisation des pierres semi-
précieuses de toutes les couleurs, appliquées sur des feuilles d’or battu, la tech‐
nique de l’ornementation cloisonnée, s’allie au décor géométrique pour consti‐
tuer l’essentiel de cet art d’orfèvrerie. Le style géométrique des peuples germa‐
niques continue à se perpétuer dans les miniatures des moines irlandais. L’ori‐
gine des Germains, envisagés comme ethnie, se situe aux alentours du Ve siècle
avant J.-C., début de la période de l’âge du fer. À l’époque du paganisme, les
Germains incinèrent leurs morts. Pourtant, dès le Ier siècle, l’archéologie nous
révèle des cadavres ensevelis. Les tombeaux découverts se composent de
grandes chambres funéraires souterraines, le plus souvent recouvertes d’un tu‐
mulus de pierrailles. De tels tombeaux ont été mis au jour en Poméranie, à Lüb‐
sow, en Brandebourg, en Bohème, en Pologne et au Danemark. Mais dans la ré‐
gion située entre le Rhin et l’Elbe, ce sont les cimetières mixtes qui prédominent
et non les sépultures princières.
Installés au IVe siècle aux limites de l’Empire, afin de défendre les frontières,
les Barbares vont développer une forme artistique bien éloignée des formes du
classicisme. L’intérêt de la présentation humaine qui devait persister jusqu’au
moment de la crise iconoclaste du VIIIe siècle commence à disparaître peu à peu
en Occident au Ve siècle et elle sera complètement absente dans les arts bar‐
bares.
Les arts du métal nous sont connus grâce au rituel de l’inhumation habillée,
coutume reprise aux Ostrogoths présents dans la péninsule entre 472 et 474.
Les techniques du cloisonné et du montage des pierres en bâte sont transmises
par les Germains orientaux installés entre le Ve et le VIe siècle en Occident. Leur
décoration est géométrique et le décor habituel est le cloisonné. En général, il
s’agit de fibules qui reproduisent un même type d’oiseau. Ces objets témoignent
d’une prédilection pour les matériaux nobles, or, incrustation de grenats pour les
plus luxueux. Le Trésor de Guarrazar, découvert en 1858, est le cadeau des rois
wisigoths, fait de vingt-six couronnes votives et d’une croix en or, à l’Église ca‐
tholique en témoignage de leur foi. Les œuvres sont marquées par l’influence
byzantine et dénotent une grande maîtrise technique.
La tombe de Childéric Ier, père de Clovis, est découverte par l’effet d’un pur
hasard à Tournai en Belgique, en 1653, par un maçon. Un anneau sigillaire,
c’est-à-dire utilisé comme sceau au nom du roi avec son portrait, figurant dans
le mobilier, permet de savoir à qui appartient cette sépulture, constituant un tu‐
mulus de 20 à 40 m de diamètre. Childéric y fut inhumé et, à proximité, se
trouvent trois fosses comportant respectivement les squelettes de 7, 4 et 10 che‐
vaux. La chambre funéraire révèle des parures, une fibule cruciforme en or,
sorte d’épingle permettant de fixer un vêtement, un bracelet en or également et
l’anneau sigillaire royal. Il faut ajouter à cette liste une longue épée à poignée en
or et un court scramasaxe, petit sabre d’origine orientale.
LA LITTÉRATURE GERMANIQUE
Vers 200 commence l’époque préclassique germanique qui dure jusqu’à 450
environ. Différents dialectes se développent, le gotique se sépare du premier
germanique commun. Wulfila (v. 311-383) traduit la Bible mais il existe aussi
beaucoup de chants épiques, dont le plus célèbre est celui de la Légende de
Hilde, dont les dernières versions contiennent l’Épopée de Gudrun et des récits
en prose de l’époque islandaise tardive. Mais il ne nous reste rien de la forme
originale de ses épopées, les versions que nous en avons sont d’époque plus tar‐
dive. Au IIIe siècle apparaît aussi le poème courtois qui suppose une vie de cour
raffinée. Nous avons également de cette époque des chants à danser et des
chœurs.
LES HUNS
Si l’histoire des Vikings est relativement courte, entre la fin du VIIIe siècle et
1066, date de la conquête de l’Angleterre par Guillaume le Conquérant, elle est
riche en fait d’armes et combats. Une étymologie possible dérive d’ailleurs du
radical vig, « le combat » en scandinave. Mais le nom de « viking » pourrait pro‐
venir également du mot « vik », « baie », le Viking est celui qui apparaît dans la
baie. Ils sont appelés Nord-manni, hommes du Nord, par les Francs, Dani,
« Danois », par les Anglo-Saxons ou Rus, « Rameurs », en Russie. Leur histoire
peut se scinder en deux périodes : les conquêtes de 793 à 911 et l’installation de
911 à 1066. Après cette date, ils se fondent dans les populations locales. Régis
Boyer1, pour sa part, distingue quatre phases. La première, entre 800 et 850,
permet de découvrir la vulnérabilité occidentale. La deuxième, entre 850 et
900, est marquée par de nombreux raids. Puis, pendant presque un siècle, de
900 à 980, les Vikings se mêlent aux populations anglaise, normande, irlan‐
daise, à celles des îles nord-atlantiques, d’Écosse du Nord-Ouest, de Russie. La
dernière phase, de 980 à 1066, est caractérisée par des opérations militaires, des
raids massifs par voie de terre ou de mer. En revanche, dans le domaine artis‐
tique, on ne distingue qu’une seule phase, entre le début du VIIIe et le milieu du
XIIe siècle, coïncidant pour le monde scandinave à une période particulièrement
brillante et une expansion, en direction des îles Britanniques, de styles venus de
l’Europe du Nord.
Les sources écrites ne sont pas plus anciennes que le XIIe siècle. Seule l’ar‐
chéologie fournit des informations pour reconstituer les grandes étapes de l’his‐
toire des Vikings. On trouve des traces de leur passage en Norvège, au Dane‐
mark, en Suède, en Finlande, au nord de la France et tout particulièrement dans
les îles Britanniques.
L’art viking, avant le milieu du IXe siècle, nous est parvenu surtout par des
pièces d’orfèvrerie, des stèles sculptées, les roues de char et têtes de dragons de
la tombe d’Oseberg et du style du même nom. Après cette date, en raison du
lien politique et économique établi entre les établissements vikings de part et
d’autre de la mer du Nord, se développent des styles décoratifs anglo-scandi‐
naves : de Borre, de Jelling, de Mammen, de Ringerike, d’Urnes.
Les Ases
– Odin
• Ses attributs :
– l’épieu Gungnir, qu’il jette dans un camp pour lui donner la
victoire ;
– l’anneau Draupnir, qui par magie se multiplie par 8 toutes les
9 nuits ;
– le cheval Sleipnir, doté de 8 pattes.
• Ses fonctions :
– dieu psychopompe, il accueille les âmes des guerriers élus au
Walhalla ;
– dieu du savoir, il connaît les runes (caractères écrits) et maî‐
trise la magie ;
– dieu de la guerre.
- Frigg
Épouse d’Odin. Mère de Baldr, elle peut se changer en faucon. Pour protéger
son fils Baldr, elle exige des animaux, végétaux, minéraux, l’engagement de ne
jamais lui nuire, en oubliant le gui.
- Thor
Dieu du tonnerre, il est fils d’Odin et de Jörd. Son épouse, Sif, lui donne deux
fils, Magni (Force) et Modi (Courage). Son palais est le Bilskirnir, aux
540 portes. Thor voyage sur un char tiré par deux boucs, Grince-Dents et
Dents-Luisantes. Prompt à la colère, Thor est le protecteur de l’humanité, le
destructeur de Géants.
• Ses attributs :
– le marteau Mjöllnir, qui est utilisé contre les Géants ;
– les gants de fer, sans lesquels Mjöllnir ne peut être saisi ;
– la ceinture magique qui double sa force.
- Tyr
- Baldr
Fils d’Odin et de Frigg, son nom signifie « Seigneur » (en vieil islandais).
Son surnom, « Le Bon », indique ses qualités, reconnues par tous les Ases. De
son épouse Nanna il a un fils, Forseti. Doué du pouvoir de divination, Baldr
prévient les Ases des catastrophes qui les menacent, mais il s’attire la jalousie de
certains. Le serment obtenu par sa mère Frigg ne le met pas à l’abri de tous les
végétaux, il meurt transpercé par une jeune pousse de gui. Prototype du chef se‐
courable, il est brûlé sur son bateau. Son frère Hermodr tente en vain de fléchir
la déesse Hel qui préside au royaume des morts, Baldr ne peut revenir parmi les
vivants. Son retour s’effectuera après la fin des temps.
- Loki
Fils du géant Farbauti et de Laufey (ou Nal). Époux de Sigyn, il a pour fils
Narfi. Petit, apparenté à l’air et au feu, Loki est le mal, le voleur, le destructeur.
Il amène le chaos et le malheur aux hommes et aux dieux. Instigateur du
meurtre de Baldr, les Ases le châtient d’une terrible manière : lié à une pierre
par les intestins de son fils, on lui jette régulièrement au visage une coupe de
venin qui provoque d’atroces brûlures.
De ses amours avec la géante Angroboba naissent :
Les Vanes
- Njördr
Dieu des vents, de la mer et du feu. Époux de la géante Skadi qui donne son
nom à la Scandinavie. Il a pour descendants Freyr et Freyja. Il est le protecteur
des marins et de la navigation.
- Freyr
Fils de Njördr, frère de Freyja, son nom signifie « Seigneur » (en vieux nor‐
rois). Principal dieu vane, il protège les récoltes, assure la paix aux hommes.
Époux de la géante Gerdr, il réside avec elle dans le monde des Elfes, l’Alf‐
heimr.
• Ses attributs :
– le bateau magique Skidbladnir, qu’il utilise dans le monde des
Elfes ;
– le sanglier Gullinborsti ;
– le porc et l’étalon lui sont consacrés.
- Freyja
Le Destin
Bien au-delà, au-dessus des dieux, Ases ou Vanes, et des hommes, la force
agissante du monde est le Destin. Maître de tout ce qui est et de tout ce qui sera,
il domine le Bien et le Mal. Les divinités, qui ne sont pas dans ce cas, devront
inéluctablement s’affronter au cours du Ragnarök, le « Jugement des Puis‐
sances », véritable apocalypse, illustrée par Le Crépuscule des dieux de Richard
Wagner. Le déroulement du Ragnarök :
Notes
1. Régis Boyer, Les Vikings : histoire, mythes, dictionnaire, Paris, Robert Laffont, 2008.
CHAPITRE II
Les maires du palais, notamment ceux de la famille des Pépin, nommés fré‐
quemment ainsi après le fondateur, Pépin de Landen (v. 580-640), prennent
peu à peu la réalité du pouvoir. Pépin de Herstal (679-714) porte la fortune
des Pépin, ou Pippinides, à un niveau qui lui permet de prétendre à la royauté.
Pépin le Bref (715-768) dépose, en 751, Childéric III (v. 714-755), dernier des
Mérovingiens, le fait tondre, enfermer dans un couvent. La tonsure signale
moins un état monastique imposé que la perte d’un pouvoir magique présent
dans la chevelure royale. Les Mérovingiens portent de ce fait les cheveux longs.
Tondre Childéric III, c’est lui enlever la source de son pouvoir. Pépin est sacré
roi par saint Boniface, avec l’approbation du pape Zacharie (741-752) à Saint-
Denis. Il fonde la dynastie des Carolingiens, qui porteront les cheveux courts.
L’ART MÉROVINGIEN
Les arts du métal vont connaître un véritable épanouissement : ils sont héri‐
tiers de l’art antique tout en développant certaines innovations. Innombrables
sont les objets de parure, fibules, bagues, boucles de ceinture, de même que les
objets de toilette. La technique de la cire perdue est employée pour les pièces
d’exception. À la fin du VIe siècle, les motifs géométriques en fil d’argent prédo‐
minent dans la production. Au VIIe siècle apparaît la « manière monochrome »
qui combine incrustation et broderie d’argent. Dans la seconde moitié du siècle,
la bichromie s’impose, avec placage des feuilles d’argent. Le damassage, alter‐
nance de couche de fer doux et de fer dur, est obtenu par corroyage, martelage à
chaud, surtout employé pour les épées, leur surface laissant apparaître des mo‐
tifs. La damasquinure, art d’incruster du métal sur un support métallique diffé‐
rent, connaît un nouvel essor à la fin du VIe siècle. Au VIIe siècle, les bijoux sont
rehaussés de filigranes, fils d’or torsadés et soudés, de pierres ou de verroteries
montées dans des bâtes, petites montures sertissant des cabochons. Saint Éloi, le
ministre de Dagobert qui fut orfèvre, réalise une grande croix surmontant la ba‐
silique de Saint-Denis.
L’enluminure mérovingienne
L’enluminure mérovingienne naît à la fin du VIIe siècle. Par son style, elle se
distingue des modèles insulaires, d’Irlande notamment, et italiens tout comme
par sa préférence pour les ouvrages chrétiens, ceux des Pères de l’Église, saint
Jérôme ou saint Augustin. L’ornementation des lettres est l’élément le plus im‐
portant des enluminures mérovingiennes qui surpassent en ce domaine l’art in‐
sulaire. Les initiales et lettrines deviennent, avec le temps, de plus en plus
grandes et de plus en plus nombreuses. Les grandes lettrines, occupant une page
entière, ne sont pas utilisées à la différence de l’art insulaire. Les initiales sont
comprises dans le texte. Les lettres composées de poissons ou d’oiseaux en sont
caractéristiques. La flore joue un rôle important et remplit l’intérieur des let‐
trines. La décoration mérovingienne perdure en Espagne, dans le sud de la
France, et enrichit l’art roman dès la fin du Xe siècle.
À la mort de Pépin en 768, le royaume est partagé entre ses deux fils.
Charles, l’aîné, reçoit la Neustrie et l’Aquitaine occidentale. À Carloman re‐
viennent la Septimanie, l’Aquitaine orientale, la Provence, la Bourgogne, l’Al‐
sace, l’Alémanie, une partie de la Neustrie avec Paris et Soissons. Le partage est
si inégal que la guerre est inévitable. Mais Carloman meurt brutalement en 771,
laissant à Charles la totalité du royaume. Roi des Francs (768-814), il s’empare
du royaume lombard (774-814) et devient empereur le 25 décembre 800 par
son couronnement à Rome par le pape Léon III (795-816). Il est désormais
Charles le Grand, Carolus Magnus (Charlemagne), et donne son nom à la
dynastie carolingienne.
Empereur d’Occident, Charlemagne réunit par la conquête une grande par‐
tie de l’Europe occidentale sous son unique autorité : au royaume des Francs
s’ajoutent la plus grande partie de la Germanie, de l’Italie, de l’Espagne. Ce vaste
empire est administré depuis sa capitale d’Aix-la-Chapelle selon une organisa‐
tion militaire et administrative. Aux militaires, le titre de duc et le duché, ou
zone récemment conquise, où l’autorité impériale doit s’imposer, ou celui de
marquis ou margrave pour les marches, les zones frontières de l’empire. Aux
administrateurs civils le titre de comte et le comté où ils ont pouvoir militaire,
judiciaire, perçoivent taxes et impôts. Les comtes sont des fonctionnaires, en
principe révocables, choisis parmi les membres des familles de riches proprié‐
taires fonciers. Rénovateur de l’Église qui l’appuie et le conseille, Charlemagne y
recrute les clercs dont il a besoin pour en faire les « envoyés du maître », ou
missi dominici, à la fois médiateurs pour les conflits locaux, inspecteurs, pléni‐
potentiaires chargés de recevoir le serment de fidélité des sujets.
LA RENAISSANCE CAROLINGIENNE
L’EMPIRE EFFRITÉ
L’architecture carolingienne reste l’art majeur. Elle puise son inspiration dans
celle de Rome et renoue avec les édifices à bâtiment central comme la chapelle
du palais d’Aix, bâtiment le plus important parmi les édifices carolingiens. Cette
dernière est une transposition de l’église Saint-Vital à Ravenne, à l’origine cha‐
pelle palatine de Justinien. Sa construction sous l’égide d’Odon de Metz (742-
814) s’étend de 796 à 805. Charlemagne préférait Aix-la-Chapelle à toutes ses
résidences, car elle se trouvait, après la conquête de l’Italie et celle de la Saxe,
au centre de son Empire. Par rapport à l’église byzantine, la chapelle carolin‐
gienne, dans le domaine de la construction, ajoute un progrès, celui d’avoir des
galeries porteuses de voûtes s’étageant autour du bâtiment central. Pour ré‐
soudre le problème d’un clergé et d’une assistance de plus en plus nombreux, les
architectes carolingiens agrandissent les basiliques par les trois absides situées à
l’est, à l’opposé du porche. Le plus ancien exemple d’édifice symbolisant le re‐
tour aux sources paléochrétiennes est celui de l’abbatiale de Saint-Denis. Édifiée
sur l’ordre de Charlemagne sur l’emplacement de l’ancienne église mérovin‐
gienne, consacrée en 775 par l’abbé Fulrad, elle disparaît quatre siècles plus tard
après la décision de l’abbé Suger d’en faire la basilique la plus prestigieuse du
royaume, nécropole royale. Le plan de Saint-Gall, dessiné entre 817 et 823, re‐
flète les nouvelles tendances, nées du concile d’Aix (816-817). La basilique re‐
présente une parfaite synthèse de tout ce dont une communauté monastique a
besoin pour vivre en autonomie.
Si l’art de l’enluminure carolingienne nous est parvenu, c’est grâce aux écoles
palatines et aux monastères, où l’on enseigne l’illustration des livres à une élite
cultivée. L’intensité de la production littéraire et artistique, la diffusion des
œuvres favorisent l’élaboration des livres sous tous leurs aspects : décoration,
texte, écriture, reliure. Les plus anciens manuscrits carolingiens commencent
avec l’Évangéliaire de Godescalc, réalisé sur un parchemin pourpre, à l’encre
d’or et d’argent, pour Charlemagne et sa femme Hildegarde, afin de commémo‐
rer la rencontre de l’empereur, en 781, avec le pape Hadrien Ier. Un deuxième
foyer artistique qui perdure après la mort de Charlemagne a son centre en
Champagne à l’abbaye d’Hautvillers, près d’Épernay, et à celle de Reims. Les
évangéliaires datés d’entre 790 et 810 sont particulièrement luxueux : Évangé‐
liaire du couronnement, Évangéliaire de Xanten, Évangéliaire de Liuthar.
L’œuvre prolifique des artistes enlumineurs se poursuit sous le règne de son fils,
Louis le Pieux, dès 820-830, et consacre l’influence de la nouvelle école de
Reims, avec l’Évangéliaire d’Ebbon. De la même façon que pour la sculpture sur
ivoire, l’enluminure carolingienne représente, sur un plan unique, ce qui en réali‐
té s’échelonne dans la nature en profondeur. De même, les événements échelon‐
nés dans le temps sont figurés simultanément. On y note également une person‐
nification symbolique d’éléments, tels les astres, les divinités, qui ne sont plus
secondaires comme sur les manuscrits antiques, mais participent directement à
l’événement.
Les Capétiens règnent en France de 987 à 1848. Leur nom leur vient
d’Hugues Ier (987-996), dit « Capet » ou à la courte cape. Duc des Francs, il est
élu roi en 987. Il gouverne pleinement son domaine royal limité au nord par
l’Escaut et la Meuse, à l’est par la Saône et le Rhône. La Bretagne est indépen‐
dante, sa suzeraineté au sud toute nominale. Il inaugure la stratégie des Capé‐
tiens pour se maintenir et accroître peu à peu leur pouvoir : mariages avanta‐
geux, fiefs sans héritiers récupérés, usage du droit féodal, notamment l’ost, ser‐
vice militaire dû au seigneur. Soutenus par l’Église, les Capétiens acquièrent un
caractère sacré en allant recevoir le sacre à Reims. Jusqu’en 1328, ils peuvent
en outre compter en permanence sur un héritier mâle pour assurer la continuité
de la dynastie. Au sein des Capétiens, certains souverains se détachent par leur
personnalité et leur activité. Louis VI le Gros (1108-1137) en fait partie. En
convoquant, le premier, l’ost, il empêche l’empereur germanique Henri V
(1111-1125) d’envahir le pays. Il confie l’administration au sage abbé Suger
(v. 1080-1151) qui renforce l’autorité royale et lui attire le soutien de la bour‐
geoisie dont les droits sont réglementés. Il fait édifier la nouvelle basilique go‐
thique de Saint-Denis, dont il est abbé. Son fils Louis VII (1137-1180) parti‐
cipe à la seconde croisade (1145-1149), épouse Aliénor d’Aquitaine (v. 1122-
1204), mais cette riche région lui échappe après l’annulation du mariage en
1152, et revient au nouvel époux d’Aliénor, le roi d’Angleterre Henri II Planta‐
genêt (1154-1189). Philippe II, dit Philippe Auguste (1180-1223), est le pre‐
mier grand Capétien, par son œuvre d’accroissement du royaume, de contrôle
des féodaux. Il donne un prestige à la dynastie, porte le premier, après 1190, le
titre de rex franciae, roi de France, et non plus celui de rex francorum, roi des
Francs. Il confirme en 1185 sa possession du Vermandois, de l’Artois et de
l’Amiénois contre les féodaux. Préoccupé par l’importance des possessions
continentales des Plantagenêt, il doit un temps renoncer à lutter contre eux pour
participer avec Richard Cœur de Lion (1189-1199), duc de Normandie et
d’Aquitaine, comte du Maine et d’Anjou, à la troisième croisade (1190-1199).
Revenu en France en 1191, Philippe Auguste reprend la lutte contre le souve‐
rain anglais. Il conquiert ainsi entre 1202 et 1205 le Maine, l’Anjou, la Touraine,
le nord du Poitou et de la Saintonge. Le 27 juillet 1214 il remporte une écla‐
tante victoire à Bouvines sur les armées du comte de Flandre et de l’empereur
germanique. Il est alors au faîte de sa gloire, considéré comme le plus puissant
souverain d’Europe. Il améliore l’administration du royaume, découpé en cir‐
conscriptions, les bailliages, placés sous l’autorité d’un fonctionnaire royal, le
bailli. Mieux administré, le royaume produit plus d’impôts, enrichissant le trésor
royal. Il encourage le commerce, accorde des privilèges aux métiers et guildes,
aux communes. Il fait construire la forteresse de Gisors et celle du Louvre à Pa‐
ris.
Saint Louis
En 1328, c’est un cousin du dernier Capétien direct qui est choisi comme roi
sous le nom de Philippe VI (1328-1350). Il inaugure la dynastie des Valois
(1328-1589). Son règne tout comme celui de son fils Jean II (1350-1364) sont
sans éclat, marquant principalement le développement de la guerre de Cent
Ans, la défaite de Crécy en 1346, celle de Poitiers en 1356. Le premier grand
souverain de la dynastie des Valois est le roi Charles V (1364-1380).
Rarement souverain est monté sur le trône dans des conditions si difficiles.
Depuis le désastre de Poitiers, en 1356, le roi est captif en Angleterre, le futur
Charles V, le premier à porter le titre de dauphin en tant qu’héritier depuis que
le Dauphiné a été rattaché à la couronne, doit exercer la réalité du pouvoir. Face
à lui, la grande noblesse avide de le maintenir sous tutelle, ses plus proches pa‐
rents en premier, la bourgeoisie de Paris qui saisit là l’occasion de s’émanciper
des taxes avec Étienne Marcel (v. 1305-1358), prévôt des marchands, un
royaume entre les mains anglaises pour les trois cinquièmes. Roi de plein exer‐
cice à partir de 1364, en moins de vingt ans, il a endigué la révolte des bour‐
geois de Paris, dompté les nobles, ne laissant aux Anglais qu’une frange littorale
dans le Sud-Ouest et Calais. Prince lettré, il crée une importante bibliothèque
royale, aménage le Louvre, fait édifier la Bastille pour surveiller les Parisiens. Il
commet l’erreur majeure, sur son lit de mort, d’abolir les impôts, croyant la
guerre de Cent Ans achevée, grâce notamment aux exploits de son connétable,
Bertrand Du Guesclin (1320-1380), auquel il accorde le formidable privilège
posthume d’être inhumé en l’abbatiale de Saint-Denis, nécropole royale. La folie
de son fils Charles VI, l’affaiblissement du pouvoir royal permettent aux An‐
glais de s’emparer d’une grande partie du pays. Il semble alors disparaître pour
devenir une France anglaise, condition sous laquelle nous la traiterons jusqu’à
son retour à l’indépendance avec Charles VII.
CHAPITRE III
Un monde chrétien
Les États pontificaux sont le temporel territorial du pape, qui les gouverne en
souverain. Leur origine naît de la nécessité de protéger le Saint-Siège des em‐
piètements des Lombards. L’autorité pontificale, limitée encore par le poids des
grandes familles, s’exerce difficilement sur Rome. En 754, l’alliance de la pa‐
pauté et de la dynastie carolingienne se noue. Pépin le Bref est sacré par le pape
ainsi que ses deux fils, reconnu roi légitime au détriment du dernier souverain
mérovingien. Il repousse les Lombards et, à Quierzy-sur-Oise, signe le traité de
Quierzy ou donation de Pépin, par laquelle la papauté reçoit l’exarchat de Ra‐
venne dont la Pentapole, la Corse, la Sardaigne, la Sicile, les provinces d’Émilie.
Cependant Pépin, en dépit de sa puissance naissante, ne représente pas un sou‐
verain au prestige assez grand pour asseoir la donation. Les chancelleries caro‐
lingienne et pontificale vont s’accorder sur un faux, connu comme la donation
de Constantin. Selon ce document apocryphe, Constantin aurait donné, en 335,
toutes les provinces d’Occident au pape Sylvestre Ier (314-335). Révélée par
Pépin en 754, la donation de Constantin est confirmée par son fils Charlemagne
en 774. Les États pontificaux sont ainsi créés. En 1198, Innocent III (1198-
1216) forme le Patrimoine de Saint-Pierre, province autour de Viterbe, Civita‐
vecchia, excluant Rome. L’empereur Louis le Pieux (814-840) leur impose en
824 la Constitutio Romana qui revient à les placer sous tutelle impériale et sur‐
tout à conférer aux empereurs le droit d’intervenir dans l’élection pontificale. Ce
rôle est mis en œuvre en 962. La papauté est une fois de plus confrontée à l’aris‐
tocratie romaine. Elle se trouve un protecteur en la personne du roi Otton Ier
(936-973) de Germanie. Ses armées assurent la protection du pape qui le cou‐
ronne « empereur des Romains ». Il est le premier empereur romain germa‐
nique. L’intervention de ses successeurs ne se limite pas à l’élection du souve‐
rain pontife et réduit trop fréquemment l’élu à un rôle de figuration. Jusqu’en
1059, le pape est désigné par l’empereur germanique. Un décret de Nicolas II
(1059-1061) prévoit son élection par un collège de cardinaux, validée par accla‐
mation par le clergé et le peuple de Rome. Le décret renouvelle la condamna‐
tion de la simonie et du nicolaïsme (la vente des sacrements ou la vie en concu‐
binage). L’intervention impériale devient une simple confirmation. Gré‐
goire VII (1073-1085) dénie au pouvoir séculier l’investiture des abbés ou
évêques, provoquant la querelle des Investitures et sa déposition par l’empereur
germanique Henri IV (1056-1105). Si le concordat de Worms (1122) met fin
au conflit, l’empereur germanique intervient encore dans les affaires temporelles
de l’Église à la suite de la révolte d’Arnaud de Brescia (v. 1100-1155), moine
dénonçant le pouvoir temporel du pape. Rome devient une République pour dix
ans, entre 1145 et 1155, le pape cantonné au spirituel. Frédéric Ier Barbe‐
rousse (1152-1190) débarrasse le pape du moine mais en échange veut un pon‐
tife à sa dévotion. N’obtenant pas ce qu’il désire, il suscite un antipape, en 1159,
Victor IV (1159-1164), contre le légitime Alexandre III (1159-1181). Les
États pontificaux s’accroissent en 1115 des biens donnés par la comtesse Ma‐
thilde de Toscane (1046-1115), fervente guelfe, parti du pape opposé aux gi‐
belins favorables à l’empereur. C’est en son château que Grégoire VII se réfugie
et que l’empereur Henri IV (1056-1105) s’humilie lors de l’entrevue de Canos‐
sa, où il s’agenouille devant le pape et reconnaît sa suprématie. La donation de
Mathilde comprend la Toscane, Reggio d’Émilie, Modène, Parme, Ferrare, les
duchés de Spolète et de Camerino.
Si la réforme grégorienne doit son nom à Grégoire VII (1073-1085), elle est
en réalité, sous son pontificat, un prolongement et non une initiative naissante.
La réforme commence bien auparavant et se poursuit jusqu’au début du
XIIe siècle. Elle repose sur trois fondements principaux : la lutte contre le
manque de formation du clergé, la place éminente du pape, élu depuis 1059 par
le tout nouveau collège des cardinaux ; l’indépendance de l’Église, seule à même
de se diriger et de choisir et promouvoir ses membres, notamment contre les
prétentions des empereurs germaniques. La réforme est la réponse à une crise
profonde aux Xe et XIe siècles. Confrontée à l’ordre carolingien en voie de dispa‐
rition, l’Église tombe sous la coupe des empereurs germaniques, Otton Ier
(936-973) convoque un synode à Rome pour déposer le pape Jean XII (955-
964) qui l’avait sacré empereur deux ans auparavant. Les rois de France et d’An‐
gleterre considèrent les évêchés comme des fiefs à distribuer à leurs fidèles. Le
bas clergé est trop souvent ignorant, occupe la cura animarum, le « soin des
âmes », par favoritisme, sans véritable formation théologique. Les abbayes sont
souvent placées en commandite, un abbé nommé, qui peut être un laïc, ne s’y
rend jamais, en confie l’administration à un tiers et se contente d’en percevoir
les revenus. La simonie, vente des sacrements, le nicolaïsme, mariage ou concu‐
binage des prêtres, évêques, se répandent. La multiplication d’indignes pasteurs
favorise le développement des hérésies. La première racine de la réforme
pousse à Cluny au Xe siècle. Suivant la règle bénédictine de Benoît de Nursie,
au VIe siècle, prolongée par les apports de Benoît d’Aniane au IXe siècle, elle
définit le cadre strict de la vie monastique : prière, travail manuel, étude de
l’Écriture. La journée est réglée, tout comme la vêture et le comportement, par
la tenue des offices, en dehors desquels les moines travaillent de leurs mains ou
étudient. La maison-mère essaime dans tout l’Occident. Les clunisiens vont
faire partie de l’entourage pontifical pour y guider la réforme. Le futur Gré‐
goire VII, connu à ce moment-là comme le moine Hildebrand, est l’un d’eux. Il
sert ainsi cinq pontifes avant de le devenir lui-même, vingt-cinq durant.
Au XIIe siècle, la réforme se poursuit dans la lutte contre les hérésies. Les
vaudois, du nom de Vaudès (Pierre Valdo, v. 1130-v. 1217), en Piémont et en
région lyonnaise, prônent le retour à la pauvreté du Christ, refusent la transsub‐
stantiation. Déclarés hérétiques, lors du concile de Latran IV (1215), ils re‐
gagnent l’Église, rejoignent les ordres mendiants ou, plus tard, adhèrent à la Ré‐
forme protestante.
Les cathares, les « purs » en grec, sont implantés au sud-ouest de la France,
dans le comté de Toulouse, à Béziers, Carcassonne, Albi. Pour eux, le monde
est création d’un principe du Mal, auquel Dieu, principe Bon, n’a aucune part.
Les hommes retourneront au Dieu Bon quand ils auront épuré leur support ma‐
léfique, le corps, afin de retourner à Dieu. Il y a donc une eschatologie cathare :
quand le Mal aura vaincu, possédant tous les corps, il signera sa perte, les es‐
prits revenant au Dieu Bon. Privé du mélange élevé (esprit) et bas (corps), ne
conservant que la chair corruptible, le Mal reviendra au Néant. Croyant à la ré‐
incarnation, les cathares refusent le baptême des nouveau-nés, le baptisé doit
avoir treize ou quatorze ans pour choisir et non subir le baptême. Ils recon‐
naissent le seul Nouveau Testament, l’Ancien Testament est œuvre du Mal. La
seule prière est le « Notre Père ». Ils refusent le culte des saints ou des reliques.
Le sacrement principal est le consolament, du latin consolamentum, la « conso‐
lation », vécu comme le « baptême de l’esprit ». Il se fait par imposition des
mains d’un Parfait, personne déjà ordonnée. Car il s’agit d’une ordination, enga‐
geant l’impétrant dans une vie de Bon Homme ou Bonne Dame, mélange d’as‐
cèse, de rigueur morale évangélique, de renoncement, à manger de la viande par
exemple. Innocent III (1198-1216) lance contre eux la croisade des Albigeois
(ou cathares) en 1208. La guerre dure vingt ans (1209-1229) et Simon de
Montfort (v. 1164-1218), à la tête de la croisade, prend Béziers, Carcassonne,
le Languedoc et Toulouse. Les cathares sont arrêtés, brûlés. Le concile de La‐
tran IV (1215) donne à Simon de Montfort le comté de Toulouse, les vicomtés
de Béziers et Carcassonne, le duché de Narbonne. À partir de 1231, c’est l’In‐
quisition, confiée souvent aux Dominicains, qui traque les hérétiques. Isolés, les
derniers cathares sont condamnés au début du XIVe siècle, après la prise de
Montségur (1244) et le bûcher de deux cents Parfaits. Si le roi de France Phi‐
lippe Auguste (1180-1223) refuse de prendre part à la croisade des Albigeois,
son fils Louis VIII (1223-1226) entreprend la conquête du Languedoc, rattaché
au domaine royal à la fin du XIIIe siècle.
Les croisades
Depuis l’expansion de l’islam, dès le VIIIe siècle, les lieux saints de Palestine
sont aux mains de conquérants qui font montre de tolérance en laissant un libre
accès aux pèlerins chrétiens qui le désirent. Cette politique d’ouverture se pour‐
suit jusque sous les Fatimides qui exercent de plus en plus de mesures vexa‐
toires, entraînant en Occident une vague de réprobation. En outre, l’empereur
romain d’Orient a davantage de mal à contenir les raids pillards des Turcs Seld‐
joukides, ce qui conduit Alexis Ier Comnène (règne : 1081-1118), empereur ro‐
main d’Orient, à demander en 1089 l’aide du pape Urbain II (1088-1099). Ce
dernier, le 24 novembre 1095, lance depuis Clermont un appel à la croisade
pour reconquérir les lieux saints profanés par une occupation impie. En cas de
mort pendant l’expédition, le pape promet l’indulgence plénière, c’est-à-dire la
rémission de tous les péchés commis : « Si ceux qui iront là-bas perdent leur vie
pendant le voyage sur terre ou sur mer ou dans la bataille contre les païens,
leurs péchés seront remis en cette heure, je l’accorde par le pouvoir de Dieu qui
m’a été donné1. » La première croisade dure de 1097, siège de Nicée, à 1099,
prise de Jérusalem. Elle est conduite par Godefroy de Bouillon (1058-1100)
qui devient protecteur du Saint-Sépulcre, puis premier souverain du royaume
chrétien de Jérusalem, avant de mourir en 1100. La deuxième croisade (1147-
1149) échoue complètement en raison des désaccords entre rois chrétiens. Il y
en aura encore quatre autres jusqu’en 1291, la principale étant la quatrième,
1202-1204, où les croisés pillent Constantinople. Une fois la Terre sainte recon‐
quise, les croisés doivent l’administrer, et c’est à cette époque que naissent les
principaux ordres de moines-chevaliers. L’ordre des Templiers apparaît en 1119
et adopte la règle de saint Bernard de Clairvaux, qui leur accorde sa protection.
Leurs vœux sont la pauvreté, la chasteté, l’obéissance, et leur but la protection
des pèlerins. Le nom de « Templier » provient de la première demeure commu‐
nautaire de l’ordre à Jérusalem, située à proximité de l’ancien Temple de Salo‐
mon. C’est en 1137 que sont créés les Hospitaliers de l’ordre de Saint-Jean, du
nom de l’hôpital de Jérusalem, qui se consacrent aux soins et à l’assistance des
derniers instants des pèlerins. Après la chute de Saint-Jean-d’Acre en 1291, les
Hospitaliers s’installent à Rhodes, puis à Malte, d’où leur nom actuel d’ordre de
Malte. C’est la colonie allemande originaire de Lübeck et de Brême qui fonde
en 1190, à Saint-Jean-d’Acre, l’ordre des chevaliers Teutoniques, organisé mili‐
tairement à partir de 1198. Leur principal terrain d’action missionnaire n’est pas
la Palestine, mais les marges païennes de l’Europe orientale. Après la conquête
de la Prusse, les chevaliers Teutoniques y fondent dans la première partie du
XIIIe siècle un véritable État.
L’ART ROMAN
Le nom d’art roman a été créé par l’historien de l’art Charles de Gerville
(1769-1853), en 1824, alors qu’il est à la recherche d’un qualificatif capable de
désigner l’ensemble de l’évolution artistique qui a précédé la période du go‐
thique pour son ouvrage Essai sur l’architecture du Moyen Âge. L’art dit « ro‐
man » l’est par référence à l’utilisation architecturale de l’arc dérivé de la pé‐
riode romaine. Traditionnellement, les débuts de l’art roman coïncident avec
ceux du XIe siècle, car c’est le moment d’une stabilisation de l’Église dans les
monarchies européennes. L’évolution se fait de l’Allemagne, en direction de
l’Italie et de la France, puis de l’Espagne septentrionale, avant que le gothique, à
la fin du XIe siècle, ne soit annoncé par les modes architecturaux qui se déve‐
loppent alors en Angleterre et en Normandie. On peut placer l’apogée du roman
vers la fin du XIe siècle, aux alentours de 1080, lorsque le problème de la voûte
dans un édifice du type monumental est résolu, comme c’est le cas à Cluny. Le
problème de sa fin est plus délicat à résoudre. Certes, les prémices du gothique
sont évidentes dès 1140 en France dans la construction de la basilique royale de
Saint-Denis, mais l’influence romane se prolonge jusqu’au dernier tiers du
XIIe siècle. L’art roman est subdivisé, selon les aires géographiques, en dénomi‐
nations multiples : le premier art roman en France correspond de ce fait à l’otto‐
nien tardif, ou au style dit « anglo-saxon », cependant que le second art roman,
également qualifié de « haut roman », correspond au salien tardif ou à l’art nor‐
mand. Il apparaîtra presque simultanément en France, en Allemagne, en Es‐
pagne, en Italie. Il possédera ses propres caractéristiques dans chacun de ces
pays, bien que, pour la première fois, il existe une unité suffisante pour le consi‐
dérer comme un style commun dans le cadre de l’Europe.
Cluny et Cîteaux
L’ART GOTHIQUE
Parce que ce sont désormais les évêques qui sont à l’origine de la construc‐
tion des églises, la cathédrale tient la place centrale des villes, comme c’est le cas
en Île-de-France ou en Picardie. L’architecture la plus conforme au gothique est
celle de la cathédrale de Chartres en 1220. Le maître d’œuvre est à la tête de
toute construction. Villard de Honnecourt a laissé des carnets remplis de cro‐
quis et d’écrits sur les pratiques architecturales pendant le XIIIe siècle. On y
trouve des instructions précises pour l’exécution d’objets spécifiques, des dessins
explicatifs sur les procédures techniques, des dispositifs mécaniques, des sug‐
gestions pour faire des figures humaines et animales, et des notes sur les bâti‐
ments et les monuments qu’il a vus. Dans ses notes, Honnecourt a décrit le tra‐
vail qu’il a fait sur la rosace de la cathédrale de Lausanne. Il a passé la plupart
de sa vie à voyager (Reims, Chartres, Laon, Meaux et Lausanne). Il s’est rendu
en Hongrie en 1245, peut-être pour y travailler en tant qu’architecte. Dans ses
écrits, il fusionne les principes transmis de la géométrie ancienne, les techniques
médiévales et les pratiques de son temps.
La cathédrale est l’église où siège l’évêque sur une cathèdre, chaise à haut
dossier. La particularité de la cathédrale de Chartres réside dans l’existence de
son labyrinthe, figure géométrique figurant dans le pavement de la nef princi‐
pale, se trouvant exactement entre la troisième et la quatrième travée, qui évolue
en arcs concentriques sur toute la largeur. Sa dimension est de 261,55 m, mais,
même en partant du centre ou de l’extérieur, le chemin parcouru présente très
exactement le même enchaînement de tournants et d’arcs de cercle. Différentes
interprétations symboliques ou philosophiques ont été données à son existence,
notamment celle qui y voyait un chemin symbolique qui mènerait l’homme à
Dieu.
Notre-Dame de Paris
Cœur sacré de Paris, Notre-Dame, sur l’île de la Cité, incarne le pouvoir ec‐
clésiastique à l’époque médiévale. Face à elle, l’autre moitié de l’île est dévolue
au pouvoir royal, avec le palais, sa Sainte-Chapelle construite par Saint Louis
pour abriter la couronne d’épines du Christ. En un face-à-face de pierre, pouvoir
ecclésiastique et pouvoir royal s’opposent ou se complètent, en fonction des
époques. La cathédrale a subi plusieurs transformations :
– au IVe siècle son emplacement était à l’ouest de l’édifice actuel ;
– au cours du XIIe siècle, la construction principale commence et dure de
1163 à 1345 ;
– elle est restaurée au XIXe siècle par Eugène Viollet-le-Duc (1814-1879).
Le gothique flamboyant
Les vitraux tiennent une place importante dans l’art médiéval pour décorer
les baies des cathédrales. Les premières écoles de décorateurs de vitraux en
France ont été celles de Saint-Denis et de Chartres. Un des plus beaux exemples
reste celui de la Sainte-Chapelle. Les thèmes figurés représentent des scènes de
l’Ancien et du Nouveau Testament. Dès le début du XIVe siècle, afin d’illuminer
les vitraux, on emploie des couleurs de plus en plus claires sur des verres de plus
en plus amincis. De nouveaux colorants font leur apparition, comme le jaune
d’argent qui évolue du jaune pâle à l’orangé. La tapisserie se développe de plus
en plus et les ateliers parisiens au XIVe siècle tiennent la première place pour la
laisser un siècle plus tard aux lissiers d’Arras ; l’Apocalypse d’Angers, vaste ten‐
ture de 144 m de long, reste le chef-d’œuvre de cet art. Paris s’est acquis, au
XIVe siècle, une renommée universelle pour l’exécution des émaux translucides
sur or et argent. Dès le XIIIe siècle, Limoges est célèbre pour le travail des
émaux champlevés (le métal est creusé pour déposer l’émail en poudre) et
peints, comme le Grand émail de Geoffroy Plantagenêt, sa plaque funéraire.
3. Les lettres
L’avènement des Carolingiens, au milieu du VIIIe siècle, en même temps qu’il
amène l’unification du monde franc et celui de la liturgie, favorise la propaga‐
tion des ouvrages et leur création. Les écoles se développent. Le pape Paul Ier
(757-767) envoie à Pépin le Bref différents traités de grammaire, d’orthographe,
de géométrie. Les abbayes se fondent en grand nombre, créent leurs propres bi‐
bliothèques dotées de beaucoup d’ouvrages. L’abbaye de Saint-Gall, avec des
ouvrages venus de tous les horizons culturels de l’époque, en est un bel exemple.
Bède le Vénérable (672-735) est l’auteur d’ouvrages de la culture littéraire, his‐
torique et scientifique du haut Moyen Âge. Il est connu aussi pour être l’un des
grands commentateurs de la Bible. C’est autour d’Alcuin, d’abord directeur de
l’école de la Cathédrale à York, en 778, qui vient en 782 à Aix-la-Chapelle à la
demande de Charlemagne, que se regroupe l’élite intellectuelle de cette époque
dans une société littéraire qu’il baptise « académie ». Ses neuf membres
prennent des noms de l’Ancien Testament ou de l’Antiquité gréco-romaine, celui
d’un poète ou d’un roi : Charlemagne est David ; Angilbert Homère ; Alcuin
Horace ; Théodulf Pindare…
Raban Maur (v. 780-856), disciple d’Alcuin, fait de l’abbaye de Fulda un
centre intellectuel à l’usage des archevêques, des missionnaires destinés à ins‐
truire le peuple de la foi. La littérature carolingienne, sous l’impulsion de ces
écoles monastiques, s’exprime à la fois dans une poésie païenne qui s’est trans‐
mise oralement et enrichie et par une poésie chrétienne, expression du jeune
christianisme germain. Au VIIIe siècle est rédigé le Lai de Beowulf, prototype du
héros anglo-saxon qui vainc le monstre marin Grendel avant de succomber aux
blessures occasionnées par un combat pourtant victorieux contre un dragon. Ce
long poème épique de trois mille cent quatre-vingt-deux vers conte la vie et les
exploits d’un jeune prince du sud de la Suède. L’histoire connaît pendant la pé‐
riode carolingienne un développement remarquable. En Italie, un genre littéraire
proche fait son apparition : la chronique. Cependant, le nom le plus connu ratta‐
ché à cette discipline est celui d’Éginhard (v. 775-840) qui, inspiré par les Vies
des douze Césars de Suétone, relate la vie de Charlemagne dans la Vita Caroli
Magni.
Il serait plus exact de parler des littératures du Moyen Âge. D’autant plus vrai
que le Moyen Âge débute à la fin de l’Empire romain, dès la fin du Ve siècle, et
s’étend de la France féodale de Louis VI le Gros, morcelée aux mains des
grands vassaux, à celle de Louis XI, avec une monarchie centralisée et une ad‐
ministration moderne. Les quatre siècles qui la constituent voient le mode de vie
et la vie quotidienne, ses mentalités, sa langue évoluer, changer. François Vil‐
lon (1431-après 1463) pastiche dans sa Ballade en vieil langage françois cette
langue devenue opaque pour les gens du XVe siècle. Peu à peu le latin va devenir
une langue morte, restant la seule langue des élites et des églises, alors que se
forme la langue française. Le concile de Tours, en 813, prescrit de s’adresser
aux fidèles dans leur langue et de tous les jours prêcher en langue vulgaire.
Louis, le petit-fils de Charlemagne, fait transcrire dans ce même gallo-roman le
Serment de Strasbourg en 842. Ce parler prend différentes formes selon les ré‐
gions, langue d’oc au sud, langue d’oïl au nord de la Loire. Au XIIe siècle, les
textes de l’Antiquité latine sont traduits en roman, langue vulgaire commune.
Jusqu’au XIVe siècle, il n’y a pas d’œuvres qui ne transitent par la voix, l’oralité y
est fondamentale. Avant la naissance du roman, dans la seconde moitié du
XIIe siècle, toutes les formes de littérature en langue vernaculaire sont destinées
au chant. Pourtant l’écrit n’occupe pas une place secondaire. Il constitue avec
l’écriture une expression et une garantie d’autorité. Si un texte existe d’abord en
performance orale, sa mise en mémoire, sa conversation sont confiées à l’écrit.
Avant le XIIe siècle, nous possédons peu de textes en langues vulgaires. Au‐
cune trace écrite ne nous est parvenue des Quatre Branches du Mabinogi (Mabi‐
nogion), ces récits gallois, datés du XIIIe siècle, appartenant à une tradition orale
remontant sans doute aux VIe et VIIe siècles. La Chanson de Roland fut, elle aus‐
si, sans doute récitée avant le XIe siècle, date du manuscrit. La question de l’au‐
teur reste donc tout aussi épineuse. Par auteur, on entend, en latin médiéval, ce‐
lui qui produit quelque chose en le développant, du latin augere (signifiant : am‐
plifier), ensuite celui qui fait, ago (agir), enfin celui dont l’œuvre procède. La
création du texte part de l’auteur qui revendique l’œuvre, s’étend au compositeur
qui la met en forme, au scribe qui assure sa retranscription sur un parchemin.
Les clercs assurant cette dernière étape. Le jongleur avec son rôle de mime,
d’acrobate, de récitant, interprète un vaste répertoire et, au gré de son inspira‐
tion, retraduit l’œuvre.
Les chansons de geste évoquent la société du XIe et du XIIe siècle. Geste, ges‐
ta en latin, désigne l’histoire. Très vite le mot est pris pour évoquer les hauts
faits du passé. Elles évoquent des sujets essentiellement guerriers qui ont la par‐
ticularité de se situer à l’époque carolingienne, le plus souvent au temps de
Charlemagne lui-même ou de son fils Louis le Pieux. Elles se définissent
comme un récit en vers mettant en scène des exploits de chevaliers, forme qui
se met en place du VIIIe au Xe siècle. Les traditionnalistes recherchent à travers
les récits épiques les traces des origines. Les chansons de geste se développent
dans le nord de la France, plus particulièrement en Normandie. Destinées à être
chantées, avec un léger accompagnement musical, elles sont écrites en vers, di‐
visés en strophes de longueur variable qu’on appelle des « laisses ». Les vers ne
riment pas mais sont construits sur le principe d’assonance, soit la répétition de
la dernière voyelle du mot. De la fin du XIe à la fin du XIIIe siècle, cent cinquante
chansons de geste ont été écrites. Les plus anciennes sont La Chanson de Ro‐
land et La Chanson de Guillaume, dont la composition remonterait à 1100.
L’élaboration de la majorité des chansons de geste prendrait place à une époque
se situant aux alentours de 1150 à 1250. Du XIIIe au XIVe siècle se constituent
des cycles, c’est-à-dire des ensembles de chansons concernant un même héros
ou ses proches parents. Aux XIVe et XVe siècles, c’est plutôt une période de ré‐
écriture, de mises en prose de textes déjà existants. D’auteurs inconnus, les
chansons de geste sont souvent regroupées sous le nom des personnages princi‐
paux auxquels elles font allusion ou de grands cycles nommés d’après eux. Ain‐
si, le Cycle de Guillaume d’Orange qui comprend vingt-quatre chansons ; le
Cycle de Charlemagne composé de La Chanson de Roland et du Voyage de
Charlemagne ; le Cycle des Croisades ; le Cycle breton de Chrétien de Troyes
(1135-1183), en une trilogie Lancelot, Yvain, Perceval.
La poésie lyrique
Les troubadours, à la fois poètes et musiciens, qui ont écrit en langue d’oc se‐
raient à l’origine de la poésie lyrique en langue vernaculaire entre 1100 et la fin
du XIIe siècle. La nouvelle représentation poétique de l’amour a été reprise et
systématisée par les troubadours puis par les trouvères sous le nom de fin’amor
ou d’amor cortes, amour courtois. L’amant se met au service de la dame que sa
beauté, son rang et sa situation de femme mariée rendent inaccessible. La poésie
des troubadours est une poésie difficile, écrite dans une langue très codée, très
allusive.
Même si le XIVe siècle conserve une part d’héritage des siècles précédents, il
se caractérise par certaines nouveautés qui créent une rupture. La poésie lyrique
domine, elle, tous les autres genres. Un véritable façonnage des langages poé‐
tiques, des genres s’amorce sous l’effet de la mutation de la langue française,
l’ancien français laissant la place au moyen français. Le statut de l’écrivain se
modifie lui aussi. Le XIVe siècle voit se développer le mécénat qui explique
d’une certaine façon la diversité de production des œuvres littéraires, celles-ci
sont des commandes et naissent d’un rapport nouveau, celui du pouvoir et de
l’écriture. La fin du Moyen Âge s’accompagne du goût accru pour l’histoire.
Chroniques, mémoires apparaissent. La guerre de Cent Ans (1337-1453), les
épidémies de peste noire vont peu à peu orienter la réflexion historique vers
plus d’interrogations. Plusieurs noms sont à rattacher à ce genre : outre Jean
Froissart (1337-1404) qui couvre avec ses Chroniques une période qui va de
l’avènement d’Édouard III d’Angleterre, en 1327, à la mort de Richard II, en
1400, Christine de Pizan (v. 1365-v. 1431) écrit une œuvre considérable extrê‐
mement variée traitant à la fois de politique et de morale mais aussi de philoso‐
phie. Philippe de Commynes (1447-1511) consacre les huit livres de ses Mé‐
moires aux démêlés entre le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, et
Louis XI, roi de France. Il est le créateur d’un genre littéraire, les mémoires, qui
serviront de modèle aux mémorialistes des XVe et XVIIe siècles. Le XIVe siècle
voit apparaître le théâtre sous toutes ses formes, religieux ou comique, et
marque l’apogée du genre dramatique. L’intérêt de ce théâtre est de mettre en
scène, d’offrir en spectacle la société qui s’affirme et se questionne sur elle-
même.
◆ Les miracles sont le genre le plus en vogue. Ce sont de petites narrations
qui se jouent sur les parvis des églises et racontent la vie de saints ou des lé‐
gendes pieuses : Le Jeu de saint Nicolas de Jean Bodel (1165-1210), Le Mi‐
racle de Théophile de Rutebeuf (XIIIe siècle).
◆ Les mystères ne font leur apparition qu’au XVe siècle. Ils mettent en scène
dans leur totalité la vie d’un saint, ou celle du Christ. Ils duraient de six à vingt-
cinq jours au moment de Noël, de Pâques et de la Pentecôte. Les Passions se
jouent sur le parvis des églises, comportant parfois des intermèdes comiques.
Parmi les œuvres les plus connues, citons La Passion du jongleur (XIIIe siècle),
ainsi nommée car elle est récitée par un jongleur, La Passion du Palatinus, La
Passion d’Arras, cette dernière attribuée à Eustache Marcadé (?-1440), La
Passion de sainte Geneviève de Jehan Michel (fin XIVe siècle).
◆ À la même époque se développe le théâtre profane, représenté entre
autres par les « jeux partis », drames dialogués poétiques dans lesquels se suc‐
cèdent les scènes satiriques, burlesques, comme chez Adam de la Halle
(v. 1240-v. 1287) et son Jeu de Robin et Marion. La représentation théâtrale au
XVe siècle comporte un mystère, une moralité, une farce. Du répertoire impor‐
tant de ces dernières, cent cinquante œuvres environ sont conservées, toutes ré‐
digées entre 1450 et 1560. La Farce de Maître Pathelin (1464) est exception‐
nelle par la longueur de ses vers, au nombre de mille cinq cent quatre-vingt-dix-
neuf, soit trois fois plus que les autres farces. Contrairement à la sottie, genre in‐
tellectuel tendant au comique immédiat, transmettant par son action un mes‐
sage, et portant un jugement contestataire, comme la Sottie contre le pape
Jules II, elle est peu axée sur l’actualité.
◆ L’allégorie devient le mode d’expression le plus prisé au XIIIe siècle pour
la poésie. Le chef-d’œuvre du genre reste Le Roman de la Rose commencé par
Guillaume de Lorris, vers 1230, et continué par Jean de Meung. La poésie tra‐
duit une nouvelle sensibilité au temps, à la vieillesse. Mais ce qui la marque le
plus est la séparation définitive du vers et de la musique. Pour pallier ce
manque, la musique naturelle des vers la remplacera. Guillaume de Machaut
fut le dernier poète musicien, il prenait soin de noter les pièces accompagnées
de musique, de les séparer des pièces non lyriques. Cette rupture permet de
mettre en place les formes poétiques nouvelles : le rondeau qui finit et com‐
mence de la même façon, le virelai qui se compose de strophes de deux parties,
le lai, suite de douze strophes, divisées en demi-strophes. La poésie prend le
« je » comme thème principal puis évolue pour devenir un lieu de débat et de
dialogue. Christine de Pizan (v. 1365-v. 1431), avec Le Débat des deux
amants (1400-1402), Le Recueil des cent ballades d’amants et de dames (1409-
1410), et Charles d’Orléans (1394-1466) avec ses Ballades sont les grands
poètes de cette époque. François Villon (1431-après 1463) en recueille le suc
poétique dans Le Lais (1457), Le Testament. Auteur d’un meurtre, il doit fuir
Paris en 1455, car il est soupçonné d’avoir partagé la vie criminelle de la bande
des Coquillards. De nouveau condamné à mort en 1461, époque de la composi‐
tion de la Ballade des pendus, il échappe à l’exécution par l’accession au trône
de Louis XI, qui lui vaut l’amnistie. Il disparaît définitivement des témoignages
après 1463. Son œuvre poétique est à la fois fondée sur le réalisme descriptif,
l’angoisse de la mort et la fugacité de l’amour et des plaisirs de la vie.
4. La philosophie
L’une des grandes innovations du XIIe siècle sur le plan culturel est l’essor
d’écoles urbaines, même si celles des monastères n’ont pas disparu pour autant.
Elles connaissent en Angleterre et en Italie un certain éclat jusqu’à l’époque des
universités. Au fur et à mesure que l’on progresse dans le XIIe siècle, les liens
entre écoles et structures ecclésiastiques se relâchent. Le quartier Latin au
XIIIe siècle est consacré à l’enseignement donné aux moines à Saint-Germain-
des-Prés et à Sainte-Geneviève, écoles exemptes de l’autorité épiscopale. C’est là
qu’enseignent Albert le Grand et Thomas d’Aquin, mais aussi d’autres savants
venus de tous les pays d’Europe : des Anglais comme Jean de Salisbury, Ro‐
ger Bacon, Jean Duns Scot, Guillaume d’Ockham. Jusqu’au XIIIe siècle, les
lieux du savoir sont les écoles épiscopales. À l’imitation des corporations mé‐
diévales, l’université se met en place sous la tutelle de l’évêque puis du pape. Le
mécénat laïc se manifeste par la fondation de collèges, pensionnats destinés aux
étudiants pauvres d’une province, tel celui fondé à Paris par le conseiller de
Saint Louis, Robert de Sorbon (1201-1274), qui deviendra la Sorbonne. La
scolarité passe par l’étude des sept arts libéraux regroupés en deux cycles, le tri‐
vium (grammaire, rhétorique, dialectique) et le quadrivium (géométrie, arithmé‐
tique, astronomie, musique). L’ensemble du cursus universitaire repose sur une
connaissance approfondie de la grammaire. Les grandes universités (Paris, Bo‐
logne, Oxford) délivrent la licence d’enseigner partout, la licentia ubique docen‐
di. L’université est divisée en quatre facultés : arts, décret ou droit canon, méde‐
cine, théologie. La théologie est le summum du cursus universitaire et est abor‐
dée entre vingt-cinq et trente-cinq ans, âge minimum requis pour obtenir le titre
de docteur.
Le but de la scolastique (schola signifie école en latin) est le même que celui
des écoles monastiques, à savoir trouver Dieu par la science, mais la méthode
d’enseignement diffère profondément. Née dans les villes au XIe siècle et surtout
développée au cours du XIIe siècle, la scolastique reprend les programmes du
trivium et du quadrivium, mais met l’accent sur la science du raisonnement, la
dialectique. La lecture traditionnelle des textes, ou lectio, et avant tout de la sa‐
cra pagina, la Bible, demeure, mais elle est suivie d’une questio, interrogation
rationnelle, puis d’une discussion, la disputatio, avant que le maître ne tire la le‐
çon de l’ensemble de l’exercice par une conclusio personnelle. Alors que le mou‐
vement dialectique partait des écoles épiscopales en France, le principal oppo‐
sant se trouvait dans un monastère en Italie, et ce fut Pierre Damien.
◆ Jean Scot Érigène (v. 810-v. 877), originaire d’Écosse ou d’Irlande, vient
en France, appelé par Charles le Chauve, à l’école du Palais, à Aix-la-Chapelle.
Il y passe toute sa vie jusqu’au moment, entre 865 et 867, où il est dénoncé
comme hérétique par le pape Nicolas Ier. À la fois philosophe et théologien, son
œuvre a une portée considérable. Penseur original, nourri des lectures d’Ori‐
gène, il se rattache à la tradition alexandrine et s’oppose à Gottschalk d’Orbais
et à sa doctrine de la double prédestination. Il compose à ce propos De la pré‐
destination (De praedestinatione), en 851. Son œuvre essentielle, De la division
de la nature (De divisione naturae), comporte cinq livres de dialogues entre un
maître et son disciple.
◆ Pierre Damien (1007-1072) défend contre les dialecticiens les dogmes de
l’Église en prônant l’ascétisme. La foi tiendra la place du savoir et elle n’a que
faire de la philosophie, puisque le message de Dieu a été véhiculé par des
hommes simples et non des philosophes. Comme la grammaire, il s’agirait d’une
invention diabolique. Elle doit accepter de se soumettre comme une servante à
sa maîtresse.
◆ Pierre Abélard (1079-1142) est un grand maître de la scolastique qu’il
enseigne à Paris sur la montagne Sainte-Geneviève. Ayant séduit la jeune Hé‐
loïse, il est mutilé par les amis de l’oncle de la jeune fille, épisode de sa biogra‐
phie connue d’après son Histoire de mes malheurs (Historia calamitatum). Il se
retire à l’abbaye de Saint-Denis, puis dans un couvent en Bretagne, avant de re‐
prendre son enseignement à Paris. Auteur supposé du Sic et non (Oui et non),
considéré comme le discours de la méthode médiéval, il écrit un traité de théo‐
logie, l’Introduction à la théologie (Introductio ad theologiam) et se voit
condamné pour ses prises de position par les conciles de Soissons (1121) et de
Sens (1140). Il applique systématiquement la dialectique à l’étude théologique.
◆ Pierre Lombard (v. 1100-1160), né en Italie, vient à Paris y enseigner la
théologie et devient évêque de cette ville en 1159. Son œuvre principale est une
Somme de sentences, également appelée Les Quatre Livres des Sentences, dans
laquelle il classe par matière les écrits des Pères de l’Église, contribuant ainsi à
leur plus large diffusion. Considérée très vite comme un classique, la Somme
entre au programme des études de théologie, au même titre que les écrits patris‐
tiques qu’elle présente. Cet effort de présentation rationnelle fait de la Somme
une œuvre fondamentale de la scolastique médiévale.
L’âge d’or de la scolastique voit, entre le XIIe et le XIVe siècle, renaître un cou‐
rant aristotélicien introduit par les philosophes arabes : Avicenne (980-1037) et
surtout Averroès (1126-1198). Dès le début du XIIIe siècle, les écrits d’Aristote,
Éthique à Nicomaque, Métaphysique, Physique, De l’âme, sont utilisés comme
textes fondamentaux. Chez les penseurs franciscains et dominicains ainsi que
dans d’autres milieux, comme pour Albert le Grand, les mystiques rhénans,
Maître Eckhart, le néoplatonisme exerce une grande influence. Au XIIIe siècle, il
n’existe pas encore d’écoles véritables mais des théories. La tendance la plus tra‐
ditionnelle est représentée par Bonaventure (v. 1221-1274) dont les idées de‐
meurent dans la lignée augustinienne. Avec Siger de Brabant (v. 1235-
v. 1281) se développe l’averroïsme latin, puis Albert le Grand, maître de saint
Thomas d’Aquin (1224-1274), remet à l’honneur le courant aristotélicien.
◆ Bonaventure (Giovanni di Fidanza, v. 1221-1274) est, à côté de saint
Thomas d’Aquin, la personnalité marquante de ce siècle d’or de la scolastique.
Surnommé « Docteur séraphique », il est canonisé en 1482 et proclamé docteur
de l’Église en 1587. Il joint à l’emploi de la scolastique dans la théologie celui
du mysticisme. Le but suprême reste, pour lui, l’union dans la contemplation
avec Dieu. Ne pouvant l’atteindre dans cette vie, il doit former la souveraine es‐
pérance de l’avenir. Le raisonnement ne permet pas de parvenir à la complète
intelligence des choses divines et la philosophie n’a pu découvrir le dogme fon‐
damental de la création. Comme pour saint Augustin, l’existence de Dieu est
une évidence.
Surnommé le « Docteur angélique », parce qu’il avait résisté à toutes les ten‐
tations à Aquino, il naît en 1224 à Aquino, près de Naples, pour s’éteindre en
1274, après avoir été l’élève d’Albert le Grand. Il fera de la théologie une véri‐
table science de Dieu. Sa philosophie intègre les grands principes de l’aristoté‐
lisme. Si saint Thomas, à maints égards, s’appuie sur Aristote, il le dépasse aus‐
si, car, rendue possible par la révélation chrétienne, l’œuvre thomiste comprend
non seulement l’étude des réalités surhumaines (ontologie), mais aussi celle d’un
Dieu créateur (téléologie). La révélation chrétienne a permis de comprendre
qu’entre ces deux pôles de réflexion il n’existe pas de hiatus. Bien au contraire,
pouvoir comprendre l’essence divine doit permettre une meilleure compréhen‐
sion des réalités terrestres. Il est l’auteur de deux importantes contributions
entre 1252 et 1259 : le Commentaire des Sentences de Pierre Lombard, les
Commentaires des œuvres d’Aristote et de Denys l’Aréopagite ; puis entre 1259
et 1273 : la Somme théologique (1265-1273, inachevée), la Somme contre les
Gentils (1259). Son œuvre littéraire considérable est en fait rédigée en une ving‐
taine d’années. Saint Thomas mêle dans sa doctrine les sagesses chrétienne et
païenne. Il les fait parfaitement coexister en différenciant leur sphère d’activité.
De la même façon, il intègre les conclusions de l’augustinisme dans un cadre
aristotélicien. Sa philosophie a une valeur évidente, non en raison de sa christia‐
nité mais par son authenticité. L’école thomiste ne constitue qu’un courant mi‐
noritaire dans la scolastique.
- Raison et foi
Saint Thomas d’Aquin veut unifier foi et raison, celles-ci étant au service de
l’intelligence et ne s’opposant nullement. La preuve de l’existence de Dieu pour‐
ra ainsi être démontrée par la raison. On ne peut donc comprendre qu’à la
condition de croire. En ce qui concerne la structure de l’homme, saint Thomas
met l’accent sur la relation corps-âme, c’est-à-dire l’union de l’esprit et de la ma‐
tière dans un être unitaire. Souvent, son évolution ne reflète pas les idées préco‐
nisées par saint Thomas et la philosophie de l’être est négligée par la première
école thomiste créée au XVe siècle. La philosophie thomiste est aujourd’hui étu‐
diée selon les principes de la méthode historique.
- Dieu
5. La musique médiévale
LA MUSIQUE CAROLINGIENNE
Notes
1. Foucher de Chartres, Histoire de Jérusalem, in Guizot, Collection des Mémoires relatifs à l’histoire de
France, Brière librairie, 1825.
2. Alain Erlande-Brandenburg, L’Architecture gothique, Paris, Éd. Jean-Paul Gisserot, 2003, p. 3.
3. Florence Braunstein et Jean-François Pépin, La Culture générale pour les Nuls, Paris, First, 2009,
p. 482.
4. Thomas d’Aquin, Somme théologique, tome 1, Paris, Éditions du Cerf, 1984, p. 172-173.
5. Florence Braunstein et Jean-François Pépin, La Culture générale pour les Nuls, op. cit., p. 480.
CHAPITRE IV
L’Allemagne médiévale
LES OTTONIENS
LES HOHENSTAUFEN
LES HABSBOURG
LES LUXEMBOURG
2. L’art
L’ART OTTONIEN
Mais c’est surtout dans le domaine de l’enluminure que l’art ottonien atteint
un sommet. La supériorité de l’enluminure allemande est la conséquence du
soutien tant de l’empereur que des évêques. Les grandes églises de l’Empire sont
pourvues de moyens importants et de manuscrits de choix. Le monastère de
Reichenau joue ici un rôle considérable. Parmi ses œuvres les plus remar‐
quables, on trouve de nombreuses séries de miniatures sur la vie du Christ ainsi
que des portraits d’empereurs. Dans l’Évangéliaire de Liuthar, Otton III apparaît
trônant, entouré de symboles évangéliques. Les thèmes et les décors démontrent
l’importance de l’influence byzantine. Le style des enluminures ottoniennes au
regard de celui de l’époque carolingienne paraît très abstrait. La surface, le plus
souvent recouverte de peinture dorée, est là pour donner aux personnages ou
aux animaux représentés une profondeur que l’absence de perspective ne leur
permettrait pas d’atteindre. Les pages de dédicace avec le portrait du commandi‐
taire et ceux des évangélistes ont une grande importance.
L’orfèvrerie et les arts mineurs ottoniens
Orfèvrerie et arts mineurs figurent parmi les témoignages les plus éclatants
de l’art ottonien, avec une technique de la gravure et du repoussé magistrale. In‐
signes du pouvoir impérial (Couronne de la Vierge d’Essen), objets liturgiques,
couverture de codex (Évangéliaire d’Otton III), crucifix (Crucifix de l’Empire)
constituent les principales réalisations de cet art. Pourtant l’autel portatif de
Trèves, dit de saint André, et l’autel de Gertrude du Trésor des Guelfes forment
parmi l’ensemble de ces travaux d’orfèvrerie des pièces d’exception. Le travail
de l’ivoire tient une place très importante aussi, ceux de Lotharingie sont consi‐
dérés comme les plus beaux, à l’image de la couverture du Codex Aureus d’Ech‐
temach. Le « maître de Trèves » est l’un des plus grands artistes à la fin du
Xe siècle. Il est l’auteur du Registrum Gregorii, copie des lettres de Grégoire et
travaille pour l’archevêque Egbert à Trèves entre 970 et 980.
La sculpture gothique
3. La littérature
La poésie lyrique est illustrée par le Minnesang, genre caractéristique qui uti‐
lise le lied, suite de strophes régulières, ou le lai composé de vers irréguliers. Le
Minnesang est un chant véritable, conçu pour être accompagné au luth ou à la
vielle, et dont les thèmes d’inspiration sont étroitement codifiés. Il met en scène
un personnage de basse extraction, un serf le plus souvent, amoureux d’une in‐
accessible dame de haut parage. La femme idéale et convoitée, selon les rites de
l’amour courtois, se révèle au fur et à mesure du développement poétique d’une
essence parfaite et radicalement différente, qui interdit à tout jamais une tenta‐
tive d’approche. Le Minnesang de l’époque courtoise cède peu à peu la place à
un genre plus bourgeois et populaire, le Meistergesang, ou « maître-chant ». Le
Meistergesang, chanté avec accompagnement musical, est défini par des règles
très strictes : le thème doit en être édifiant, allégorique ou héroïque, les strophes
sont arrangées par groupe de trois.
La poésie profane de cour n’est pas la seule forme exprimée. Au XIVe siècle
se développe une littérature mystique, fondée sur le contact direct avec Dieu, au
travers d’expériences personnelles. C’est un autre Dominicain, Maître Eckhart
(1260-1327), qui représente à Paris cette façon de ressentir le divin. Accusé
d’hérésie, il doit plusieurs fois passer devant les tribunaux ecclésiastiques, ce‐
pendant qu’une partie de son corps de doctrine est condamnée.
CHAPITRE V
L’Angleterre médiévale
GUILLAUME LE CONQUÉRANT
Le 1er décembre 1135, Henri Ier Beauclerc meurt. Il était le plus jeune fils de
Guillaume le Conquérant et régnait sur l’Angleterre depuis 1100. Normalement,
il a prévu de laisser le trône à sa fille, Mathilde, mariée en premières noces avec
l’empereur Henri V, d’où son surnom de « l’emperesse », l’impératrice, puis
après le décès de celui-ci en 1125, au comte d’Anjou Godefroy V Plantagenêt,
surnom dû aux branches de genêts dont il se plaît à orner son casque. Mais les
barons anglais rechignent à obéir à une femme. Étienne de Blois (1135-1154)
saisit sa chance. Neveu du défunt monarque, il traverse en hâte la Manche, ar‐
rive à Londres, s’y fait reconnaître pour roi. La guerre civile va l’opposer à Ma‐
thilde (1102-1167) jusqu’à la fin de son règne. Étienne meurt sans héritier mâle
mais il a reconnu le fils de Mathilde comme successeur peu avant son trépas. Ce
dernier devient le roi Henri II Plantagenêt (1154-1189). La plus grave crise
du règne l’oppose à Thomas Becket (1117-1170), archevêque de Cantorbéry.
Conseiller du roi, brillant penseur ayant étudié à Bologne, Paris, Thomas s’op‐
pose à l’application des Constitutions de Clarendon, texte qui autorise le roi à in‐
tervenir dans les affaires ecclésiastiques, notamment en matière judiciaire. Cela
revient à faire disparaître le privilège de clergie. Thomas s’enfuit en France.
Henri le rappelle, se réconcilie avec lui, mais ne renonce pas aux Constitutions.
Le 29 décembre 1170, quatre chevaliers royaux assassinent Thomas Becket
dans sa cathédrale de Cantorbéry. Le roi n’a pas expressément ordonné le
crime, mais il avait publiquement souhaité être débarrassé de Thomas Becket.
Après une ultime résistance, menacé d’excommunication, Henri II fait pénitence
publique à Avranches en 1172, se réconcilie avec le pape en 1174, effectue un
pèlerinage sur la tombe de Becket, reconnu martyr et canonisé par l’Église dès
1173. Henri II meurt le 6 juillet 1189, à Chinon, alors que les hostilités ont re‐
pris depuis un an avec l’un de ses fils, le prince Richard. Celui-ci devient le roi
d’Angleterre Richard Cœur de Lion (1189-1199). À peine monté sur le trône,
il part en croisade, laissant l’administration de son royaume à l’archevêque de
Cantorbéry, l’évêque de Durham, et de hauts barons. Si la croisade vaut la gloire
à Richard, elle lui aliène le roi de France Philippe II Auguste et le duc Léopold
d’Autriche (Léopold V de Babenberg). Ce dernier le capture sur le chemin du
retour et le garde en captivité jusqu’en 1194. En son absence, son frère, le
prince Jean, essaie d’usurper le trône. Revenu en Angleterre, Richard poursuit la
guerre contre la France. Il meurt d’une blessure reçue lors du siège de Châlus en
Limousin, le 6 avril 1199.
Le frère de Richard Cœur de Lion, Jean sans Terre (1199-1216), lui suc‐
cède. Ses propres barons se soulèvent contre lui et le contraignent à accorder, le
15 juin 1215, la Magna Carta Libertatum, plus connue sous le nom de Magna
Carta ou Grande Charte. Ses soixante-trois articles limitent l’arbitraire royal. Le
monarque ne peut lever d’impôt sans le consentement du grand conseil formé
de seigneurs, de représentants du clergé et de la cité de Londres. Les villes se
voient garantir leurs libertés, l’Église les siennes. Il est interdit d’emprisonner un
homme libre sans jugement. Cette étape fondamentale de la mise en place des
garanties constitutionnelles anglaises est d’autant plus facile que Jean sans Terre
meurt peu après, le 18 octobre 1216, et que son successeur Henri III (1216-
1272) n’a que neuf ans et doit adopter solennellement la Grande Charte pour
obtenir le soutien des barons, un temps tentés de laisser le trône d’Angleterre au
prince Louis (futur Louis IX), fils du roi de France. En 1258 les barons lui im‐
posent une réduction plus grande encore du pouvoir royal par le texte des Provi‐
sions d’Oxford. C’est mettre la couronne sous la tutelle de commissions compo‐
sées de barons. La guerre éclate entre Simon de Montfort (1208-1265), comte
de Leicester et chef des mécontents, et les armées royales. Montfort remporte la
bataille de Lewes en 1264, emprisonne la famille royale, gouverne quelques
mois, convoque un parlement en janvier 1265. Cette même année cependant, le
prince héritier Édouard parvient à s’enfuir, lève une armée, bat à son tour Mont‐
fort à la bataille d’Evesham, où il perd la vie. Henri III remonte sur le trône, en
laissant le gouvernement à son fils Édouard, et meurt le 16 novembre 1272.
Édouard Ier (1272-1307) laisse le souvenir d’un prince énergique. Il conquiert
le pays de Galles et soumet l’Écosse pour un temps. Mais il doit régulièrement y
revenir pour réprimer des révoltes sporadiques. Son œuvre législative com‐
mence avant son règne, alors qu’il exerce une régence de fait, avec le Statut de
Marlborough, de 1267, qui définit les cas où s’exerce la justice royale aux dé‐
pens des coutumes. C’est en combattant une fois de plus les Écossais que le roi
meurt le 7 juillet 1307. Son fils Édouard II (1307-1327), pusillanime, consacre
le pouvoir de ses favoris et amants, Pierre Gaveston (1282-1312) puis Hugh
Le Despenser (1284-1326). Édouard II est arrêté, incarcéré, il abdique en fa‐
veur de son fils le 24 janvier 1327. Il meurt, probablement assassiné, le 21 sep‐
tembre de la même année.
Surnommé le « Docteur admirable » par ses pairs, il fut sans doute l’un des
penseurs les plus influents de son temps. C’est après des études à Oxford, puis à
Paris, qu’il rentre dans l’ordre des Franciscains et entreprend l’étude des œuvres
d’Aristote. Il se dirigera pourtant vers la science. Il écrit son Opus majus ou
Œuvre majeure (1267) à la demande du pape Clément IV (1265-1268), dans
laquelle il défend la nécessité de réformer la science de son temps, à partir de
nouvelles méthodes. Les seuls moyens d’approcher une réelle connaissance de la
nature, selon lui, sont les mathématiques et l’expérimentation. L’Opus majus est
une vaste encyclopédie de la science comprenant la grammaire, la logique, la
philosophie morale, les mathématiques, la physique. Néanmoins, trop révolu‐
tionnaires, ses thèses lui vaudront la condamnation des Franciscains pour héré‐
sie, et quinze ans de prison jusqu’en 1292. Il eut le pressentiment de presque
toutes les inventions modernes : poudre à canon, verres grossissants, télescope.
Il est à l’origine de la découverte, en optique, de la réfraction. Ses ouvrages fon‐
damentaux sont l’Encyclopédique Compendium studii philosophiae (Abrégé des
études philosophiques) et le Compendium studii theologiae (Abrégé des études
théologiques). Bacon crédite les croyances de son temps et fonde les sciences
naturelles sur l’alchimie, l’astrologie, la magie.
L’Italie médiévale
Naples est fondé au VIIe siècle avant J.-C. sous le nom de Parthenope, « la
Vierge », rebaptisée Néapolis, la « Nouvelle Ville », en 475 avant J.-C. Capitale
de la Campanie, la ville est rattachée à l’Empire byzantin après la chute de
Rome (476). En 567, elle fait partie du nouvel exarchat de Ravenne. Elle en
connaît les vicissitudes avant d’être conquise en 751 par le roi lombard Aistolf
(749-756). Naples devient alors la capitale d’un duché indépendant. Au
XIe siècle, ses ducs doivent accueillir pour le défendre des groupes de plus en
plus importants de Normands, à tel point que ceux-ci finissent par y représenter
le pouvoir véritable. En 1130, Roger II (1130-1154) crée le Royaume normand
de Sicile et incorpore Naples en 1139. En 1282, les Vêpres siciliennes pro‐
voquent la partition du royaume de Sicile. Le roi Charles Ier de Sicile (règne :
1266-1285) est chassé de Sicile par l’armée de Pierre III d’Aragon (1282-
1285). Se repliant sur ses possessions continentales, Charles II d’Anjou devient
le premier roi de Naples de 1282 à 1285. Le terme de « royaume de Naples »
est une convention, en principe il s’agit toujours de celui de Sicile, que les Ange‐
vins espèrent, en vain, pouvoir reconquérir. En réalité, Alphonse V d’Aragon
(1416-1458) arrache le royaume de Naples à René d’Anjou (1435-1442) en
1442. Il reconstitue ainsi à son profit le royaume de Sicile à partir de 1443. Les
Espagnols gardent la maîtrise de la ville jusqu’en 1707.
En 1447, le dernier Visconti meurt sans héritier mâle. Après une courte Ré‐
publique ambrosienne, dirigée entre 1447 et 1450 par un groupe de nobles et de
juristes de l’université de Pavie, nommée ainsi en hommage à Ambroise, saint
patron de Milan, le condottiere Francesco Sforza (1401-1466) prend la ville et
se proclame duc. Les Sforza vont dominer Milan jusqu’en 1535. Cette domina‐
tion sera remise en cause par les guerres d’Italie conduites par les rois de
France. En 1499 Louis XII s’empare de Milan. La ville est française jusqu’en
1543, puis entre 1515 et 1521. Entre-temps, puis après 1521, les fils de Fran‐
cesco règnent, quand les Espagnols, vainqueurs des Français à Pavie (1525), y
consentent toutefois. En 1535, la dynastie Sforza s’éteint sans héritier.
Dante et Béatrice
Il faut ménager ici une place particulière à Dante Alighieri (v. 1265-1321),
le plus grand poète florentin de l’époque, qui puise son inspiration principale
dans l’amour éperdu voué à Béatrice, morte en 1290 à vingt-quatre ans. Citoyen
actif, Dante prend fermement position contre Boniface VIII. Le pape parvient à
le faire exiler, puis condamner à mort par contumace, alors qu’il est exilé à Vé‐
rone, puis à Ravenne où il finit ses jours. Dante partage son œuvre entre les
deux langues qui lui semblent les plus appropriées pour parvenir à la maîtrise du
sommet de son art, le latin et l’italien. Il rédige en latin plusieurs ouvrages, De
l’éloquence vulgaire (De vulgari eloquentia), consacré au langage, De la monar‐
chie (De monarchia), sur la domination universelle, des Epistolae ou Lettres, et
Eclogae (Églogues, Les Bucoliques), ainsi qu’un essai sur la valeur symbolique
de la terre et de l’eau, Quaestrio de aqua et terra. Son œuvre en italien se tourne
à la fois vers l’amour et la philosophie. La Vie nouvelle (La vita nuova) exprime
son amour de jeunesse et lui donne la force nouvelle de l’immortalité. Forte‐
ment influencé par le platonisme, il rédige Le Chansonnier (Il canzoniere), en‐
semble de poèmes voués au beau sous toutes ses formes. L’ouvrage le plus cé‐
lèbre de Dante demeure La Divine Comédie, qui occupe toute sa vie. Il s’agit
d’un voyage en trois parties, Inferno (l’Enfer), Purgatorio (le Purgatoire) et Pa‐
radiso (le Paradis), destiné à assurer au poète son salut. Dante est guidé à la fois
par un autre poète, Virgile, et par Béatrice, symbole de la grâce divine. L’étape
ultime est la traversée des « neuf cieux » et la contemplation de Dieu. C’est à
peine un demi-siècle après sa mort, en 1373, que Florence, reconnaissante du
génie de son fils, crée la première chaire d’explication des œuvres de Dante,
confiée à Boccace.
Pétrarque et Laure
Francesco Petrarca (1304-1374), membre de l’Église, passe une partie de
son existence au service de prélats, tel le cardinal Colonna, ce qui le conduit à la
cour pontificale d’Avignon, où il rencontre sa muse, Laure, à laquelle il déclare
sa flamme dans le recueil Il canzoniere. Reprenant, en l’amplifiant, la forme du
sonnet, Pétrarque1 se consacre aussi à l’épopée, au dialogue, au traité. C’est au
travers de ces genres multiples qu’il remet à l’honneur les œuvres de Cicéron et
l’exégèse de saint Augustin. Les principales créations de Pétrarque peuvent être
classées en fonction à la fois de la langue employée, italien ou latin, et du genre
développé.
Notes
1. À ce sujet, voir Jean-François Pépin, « Pindare », in Encyclopædia Universalis.
CHAPITRE VII
L’Espagne médiévale
La Russie médiévale
La Rus’ de Kiev, ou Rous’, est une principauté fondée par les Varègues, Vi‐
kings danois et suédois. Elle est gouvernée par la dynastie des Riourikides (862-
1598) qui exerce son autorité sur l’État de Kiev, jusqu’en 1132, puis la Mosco‐
vie, après 1276, et donne naissance à la Russie. Le nom de la dynastie vient de
Riourik (860-879), prince de Novgorod. En 882, Oleg le Sage (879-912)
transfère sa capitale de Novgorod à Kiev. Il est considéré comme le fondateur
véritable de la Rus’ aux alentours de 880. L’apogée de la principauté se situe
pendant les règnes de Vladimir le Grand (980-1015) et d’Iaroslav le Sage
(1019-1054). Vladimir fait entrer la Rus’ dans le christianisme de rite byzantin.
Afin de pouvoir épouser la princesse byzantine Anna (963-1011), il reçoit le
baptême en 988. Iaroslav le Sage, son fils, lui succède à l’issue de quatre années
de guerre contre ses frères. Il écarte la menace petchénègue, des nomades turcs,
par sa victoire de 1036, favorise l’accession au trône de Casimir Ier de Pologne
(1039-1058). En revanche, les attaques lancées par son fils Vladimir contre
l’Empire byzantin sont des échecs. À sa mort en 1054, ses cinq fils se partagent
sa principauté, l’aîné portant le titre de grand-prince. C’est le début de la déca‐
dence. Les principautés se multiplient au fil des successions, dépassent la cin‐
quantaine au XIIIe siècle, les princes se combattent et tentent de s’approprier les
deux cités les plus prestigieuses, Kiev et Novgorod. C’est d’autant plus difficile
que Kiev demeure la propriété commune des Riourikides. En 1276 naît la prin‐
cipauté de Moscou. Un mode de gouvernement original se met en place avec la
République de Novgorod (1136-1478).
L’exécutif est confié à l’archevêque, élu, tout comme le Premier ministre, par
l’assemblée populaire, vietche, comprenant population urbaine et ruraux libres,
la plus haute instance politique. Les invasions mongoles des successeurs de
Gengis Khān, fondateur de l’empire mongol, jettent à bas la Rus’, entre 1237 et
1242. Les villes de Vladimir, Kiev, Moscou tombent tour à tour et sont dé‐
truites. Seule Novgorod parvient à garder une certaine autonomie. Après les
razzias, les Mongols repartent, ils n’occupent pas la Rus’, mais en exigent tribut.
La future Russie se déplace en Moscovie. La souveraineté mongole dure envi‐
ron deux siècles et demi. Ils nomment le grand-prince, exigent, outre le tribut,
des hommes d’armes et des paysans. L’Église et les princes reçoivent en échange
des lettres de privilège, ou yarlik. Les territoires soumis aux Mongols rompent
peu à peu leurs liens diplomatiques, économiques et culturels avec l’Occident, se
replient sur la sphère asiatique. Alexandre, prince de Vladimir-Souzdal, reçoit
du khan Batū (1237-1255) de la Horde d’Or la principauté de Kiev en 1249. Il
est célèbre, sous le nom d’Alexandre Nevski (1220-1263), pour ses victoires
contre les Suédois en 1240, au bord de la Neva, origine de son surnom, et
contre les chevaliers Teutoniques au lac Peïpous en 1242.
Le futur Justinien Ier naît en Macédoine en 482 dans une famille paysanne.
Sa fortune est liée à celle de son oncle Justin. Ce dernier, simple soldat à l’ori‐
gine, se hisse au commandement de la garde impériale, puis au trône en 518.
Son neveu, Flavius Petrus Sabbatius, reçoit grâce à lui une éducation soignée
à Constantinople. En 518, il le place à la tête des troupes de la cour, le fait
consul en 521, et l’adopte. C’est alors qu’il ajoute aux siens un nouveau nom,
Justinianus, Justinien, qu’il nomme corégent en avril 527. Justin meurt en août
de la même année, Justinien devient alors empereur. Étant prince, Justinien a
bénéficié d’une vaste culture, d’une préparation au pouvoir. Devenu empereur,
avec à ses côtés une femme au caractère bien trempé, Théodora (v. 500-548),
il désire reconstituer l’unité de l’Imperium Romanum. En 532, la ville de By‐
zance se révolte contre l’empereur Justinien. Cet épisode est connu sous le nom
de « sédition Nika », de niké (victoire) en grec, cri de ralliement des insurgés.
Effondré, Justinien est prêt à fuir, voire à abandonner le trône. Théodora inter‐
vient alors, lui redonne courage, galvanise les troupes demeurées fidèles. La ré‐
volte est écrasée. Courageuse, énergique, Théodora poursuit seize ans encore
son règne aux côtés de l’empereur, favorisant la tolérance religieuse, multipliant
les fondations pieuses et caritatives. En 529 est publié le monument législatif du
règne de Justinien, le Corpus Juris Civilis ou Code Justinien, qui collationne, en
latin, toutes les constitutions impériales depuis Hadrien (117-138). Suit en 533
le Digeste, ou Pandectes, réunissant la jurisprudence connue, ainsi que les Insti‐
tutes, manuel de droit destiné à former les magistrats et juristes. Enfin les lois
récentes sont regroupées à partir de 534 dans un code à part, celui des Novelles,
en grec, langue vernaculaire de l’Empire. Prince bâtisseur, Justinien fait édifier
Sainte-Sophie à Constantinople, église dédiée à la Sagesse divine (sophia en
grec).
À la mort de Justinien, en 565, son neveu Justin II (565-578) lui succède
pour un règne sans éclat, dominé par les favoris et l’impératrice Sophie. Cette
dernière place sur le trône un militaire pour prendre sa suite, Tibère II (578-
582). Après ce court règne, son gendre devient l’empereur Maurice Ier (582-
602). Il établit les exarchats de Ravenne et de Carthage, contient un temps les
Slaves et les Avars, avant d’être renversé et décapité à la suite de la révolte de
l’armée du Danube, en même temps que ses cinq fils, en 602.
2. L’art byzantin
L’ART PRÉBYZANTIN
L’ARCHITECTURE
La sculpture
L’enluminure byzantine
Une icône, du grec eikona, « image », est à l’origine une représentation reli‐
gieuse, quelle qu’en soit la technique, mais le terme par la suite s’applique à
celles peintes sur un panneau de bois, représentant le Christ, la Vierge ou les
saints. Les premiers modèles ont dû puiser leur inspiration à partir des portraits
sur cire de défunts, retrouvés en grand nombre au Fayoum (en Égypte), à
l’époque hellénistique et romaine. Leur évolution est liée au mouvement monas‐
tique. Les premières icônes remontent aux Ve et VIe siècles, et proviennent du
Sinaï, de Moyenne-Égypte, de Rome. Les grands principes stylistiques sont déjà
présents, nimbes, frontalité, yeux grand ouverts, hiératisme, traitement de l’es‐
pace, postures. Très tôt, des règles concernant leurs lieux d’exposition dans
l’église se mettent en place en fonction de la vénération portée au saint.
3. La littérature byzantine
L’ÉCRITURE ET L’ENLUMINURE
Le changement d’écriture – on délaisse l’onciale pour la cursive – a pour
conséquence la multiplication de livres. L’enluminure ne connaît pas de rupture,
malgré la crise iconoclaste, avec la tradition de l’Antiquité tardive. Un des chefs-
d’œuvre de cette époque reste Le Rouleau de Josué du Vatican qui montre bien
la continuité de la tradition dans la façon de traiter le corps et les vêtements, le
schématisme géométrique et la solution à la présentation de l’espace : le passage
du premier plan au dernier se fait sans discontinuité. Les couleurs plates et lu‐
mineuses sont davantage prisées. L’orfèvrerie, utilisée pour la couverture des
manuscrits, en partie sous l’influence de l’islam, connaît un renouveau, par l’in‐
clusion d’émail selon la technique du cloisonné. Les objets les plus courants res‐
tent des reliquaires, celui de Limbourg-sur-la-Lahn est rapporté en Allemagne à
l’issue de la quatrième croisade.
COMPILATEURS ET MYSTIQUES
LE DROIT
Les premiers codes romains sont des codes privés, de simples compilations
de constitutions impériales, tels les codes Grégorien et Hermogénien. Le pre‐
mier code officiel de l’Empire romain est promulgué par l’empereur Théo‐
dose II à Constantinople et l’empereur Valentinien III à Rome. Ce Code Théodo‐
sien reprend toute la législation depuis Constantin et élimine les mesures
désuètes et les contradictions. C’est le seul code connu en Occident du Ve siècle
au XIe siècle, essentiellement au travers du Bréviaire d’Alaric, la loi romaine des
Wisigoths, rédigée par Alaric, destinée à ses sujets gallo-romains. Comme le
Code Théodosien, celui de Justinien, divisé en douze livres pour rendre hom‐
mage au douze tables, fondatrices du droit romain, est un recueil de constitu‐
tions impériales d’une ampleur sans précédent.
Après la dynastie amorienne (820-867), qui rétablit le culte des images, Ba‐
sile Ier (867-886) fonde la dynastie macédonienne (867-1056), véritable âge
d’or byzantin. Il entreprend de diminuer le pouvoir écrasant de l’aristocratie et
de réduire l’écart entre les deux classes, les Pénètes, les pauvres, et les Dynatoï,
les riches. Ces derniers possèdent d’immenses propriétés foncières, laissant de
plus en plus de paysans sans terre. Basile s’efforce de leur permettre d’accéder à
une petite propriété, les transformant ainsi en contribuables plus nombreux. Il
fait échec au blocus naval des Arabes contre Raguse (Dubrovnik) en 867, prend
Bari et Tarente en Italie du Sud. Toute l’histoire de la dynastie macédonienne
est ensuite tissée de succès militaires, parfois ralentis par des revers. Non seule‐
ment la sécurité aux frontières est garantie, permettant à la population de s’ac‐
croître, aux richesses créées d’être plus nombreuses et diverses, mais le territoire
byzantin s’étend considérablement. Deux militaires d’exception se succèdent sur
le trône, Nicéphore II Phocas (963-969) et Jean Ier Tzimiskès (969-976),
s’implantant en Syrie, et prenant Chypre, la Crète. Mais la grande affaire de‐
meure la puissance bulgare. Ils sont écrasés définitivement par Basile II (976-
1025) en 1018, qui y gagne le surnom de « Bulgaroctone », le « tueur de Bul‐
gares ». Il aurait fait crever les yeux à quatre-vingt-dix-neuf guerriers bulgares
sur cent, le dernier ne perdant qu’un œil afin de pouvoir guider les autres. L’Em‐
pire atteint alors sa plus grande extension géographique, comprenant l’Asie Mi‐
neure, la Syrie du Nord, la haute Mésopotamie, l’Arménie, les Balkans et l’Italie
du Sud. Il contient les califes fatimides du Caire, mais sans parvenir à s’assurer
un avantage stratégique. Il conclut une trêve de dix ans en l’an 1000.
Les successeurs de Basile sont faibles, menés par l’aristocratie qui s’enrichit
en négligeant l’entretien militaire des thèmes. Comme Rome avant elle,
Constantinople s’appuie de plus en plus sur des mercenaires. Mourant, Constan‐
tin VIII marie sa fille Zoé (1028-1050) à Romain Argyre (1028-1034) qui de‐
vient l’empereur Romain III. C’est un intellectuel pieux, éloigné des exigences
du pouvoir et de la guerre. Il est vaincu par les Arabes près d’Alep en 1031. Il
est assassiné aux bains, peut-être à l’instigation de Zoé, en 1034. Cette dernière
épouse aussitôt Michel IV le Paphlagonien (1034-1041). Les Normands com‐
mencent à s’implanter en Italie, dont ils chassent les Byzantins en 1071. La fin
de la dynastie est marquée par les soulèvements et l’avance des Turcs Seldjou‐
kides en Asie Mineure. La défaite de Manzikert, face à ces derniers, en 1071,
signe la fin d’un empire conquérant. Le général Isaac Comnène renverse le der‐
nier empereur, Michel VI (1056-1057), et se proclame empereur sous le nom
d’Isaac Ier (1057-1059). La dynastie des Comnènes commence.
1. La religion musulmane
Au VIe siècle, l’Arabie est une vaste péninsule désertique avec quelques belles
oasis, et ses côtes jalonnées de ports. Le commerce des épices, du cuir, des
peaux, des esclaves se fait par les voies caravanières. Au centre, on trouve la
province de Hedjaz, sans doute la plus riche, quelques grandes villes, centres ca‐
ravaniers dont La Mecque. Qusay (400-487) parvint à fédérer les Quraychites,
une tribu du Nord, et à obtenir, après une alliance matrimoniale, le contrôle de
La Mecque. Des tentatives régulières d’invasions du monde byzantin avaient eu
lieu par le Nord, par l’Égypte pour la conquête du Yémen mais en vain. Aucune
organisation politique ne domine, mais des clans polythéistes, répartis sur de
vastes ensembles, croyant aux djinns, créatures surnaturelles. Des minorités
chrétiennes, surtout monophysites et nestoriennes, ou juives se sont implantées
dans les centres caravaniers et les oasis. Religion du désert, l’islam reprend les
cultes traditionnels anciens, mais emprunte aussi au judaïsme et au christia‐
nisme de nombreux éléments.
En dix ans, Mahomet organise un État et une société dans laquelle la loi de
l’islam se substitue aux anciennes coutumes de l’Arabie. De son séjour à Mé‐
dine, début de l’Hégire, date une deuxième série de sourates, de style moins
tourmenté que les premières, dites sourates de La Mecque, antérieures à l’Hé‐
gire. Œuvre d’un législateur religieux et social, elles contiennent surtout des
prescriptions destinées à organiser le nouvel ordre instauré par l’islam. Souvent
très précises, ces règles s’appliquent à la vie de l’époque. Il s’y joint des sen‐
tences permettant de définir l’idéal religieux et moral propre à l’islam. La
Mecque, après de durs affrontements, en 624, 625, 627 contre les Quraychites,
se rallie en 630 à Mahomet. Mahomet s’éteint le 8 juin 632 à Médine, ne lais‐
sant aucune instruction pour assurer sa succession. Un de ses proches, Omar, ne
réussit pas à s’imposer comme chef politique à la communauté des croyants
contre Abū Bakr, père d’Aïcha, sa veuve, en tant que « représentant et envoyé
de Dieu ». Les trois années de son califat ramènent la paix au sein des tributs
révoltées et permettent de réprimer les tentatives de soulèvement organisées par
le faux prophète Mousaïlima. Omar devient deuxième calife, « successeur » du
prophète, reprend le titre de « Prince des croyants » et organise la communauté
musulmane. Ses conquêtes comprennent la Syrie (634-636), la Perse (635-651)
et l’Égypte (639-644). La ville de Jérusalem est prise en 638. Peu avant sa mort,
Omar avait chargé un collège de six musulmans reconnus de choisir son succes‐
seur.
LE SOUFISME
Si les Abbassides perdent le pouvoir sur cette région, il faut plus d’un demi-
siècle pour que l’émirat de Cordoue s’impose. L’apogée se produit avec le règne
d’‘Abd al-Raḥmān III (912-961), qui prend en 929 le titre de calife. Riche de
son art florissant, centre intellectuel brillant, le califat de Cordoue disparaît dans
la guerre civile entre la fin du Xe et le début du XIe siècle. En 1031, le califat est
aboli, les princes locaux se partagent son territoire en établissant de nombreux
petits royaumes qui sont absorbés par les Almoravides après 1086.
L’architecture musulmane
Contraint de fuir Damas où sa famille est assassinée pour des raisons poli‐
tiques, le prince omeyyade ‘Abd al-Raḥmān (731-788) passe en Espagne en
755 à la tête de ses troupes. Il y évince rapidement le gouverneur installé par le
calife de Damas et entre à Cordoue en 756. Il s’y fait proclamer émir des mu‐
sulmans d’Espagne, et fait de Cordoue la capitale de son nouvel État. La ville
devient un centre politique, artistique, culturel, avec une bibliothèque dotée d’un
fonds de plus de quatre cent mille volumes. Le joyau architectural en devient la
grande mosquée. Commencée en 786, elle est agrandie à plusieurs reprises au
cours des IXe et Xe siècles, avant son ultime modification en 988. Son agence‐
ment intérieur la transforme en une forêt de colonnes aux fûts de pierre sombre,
surmontées d’arcs en fer à cheval où alternent brique rouge et calcaire blanc, sur
plus de 10 000 m2. À l’époque omeyyade, l’utilisation de la pierre se mêle à
d’autres matériaux. En Espagne, on lui préfére la brique et le torchis. L’architec‐
ture se caractérise par l’emploi d’arcs en fer à cheval avec des claveaux de cou‐
leurs alternées. Les arcs polylobés sont également très utilisés. C’est vers le mi‐
lieu du Xe siècle qu’est construit près de Cordoue le palais de Madīnat al-Zahrā,
comprenant une mosquée, des jardins, des vignes, les bâtiments du harem ceint
par un rempart. On y a retrouvé également d’impressionnantes rondes-bosses en
bronze, des bouches de fontaines, l’eau s’évacuant par la bouche des animaux fi‐
gurés, aux formes extrêmement géométriques.
Leur décoration rassemble tout ce qui était connu alors comme procédés :
peinture murale, mosaïque, travail de la pierre ou du stuc. Il est habituel de re‐
couvrir les grandes surfaces murales d’une abondante décoration, réalisée avec
un grand souci du détail. Elle est constituée de formes purement ornementales,
avec des combinaisons infinies de motifs géométriques ou végétaux, car, même
si elle n’exclut pas complètement l’image figurative, elle refuse néanmoins la
conception d’un dieu anthropomorphe. Aussi la calligraphie est valorisée et des
inscriptions coraniques en bandes se développent à l’intérieur comme à l’exté‐
rieur. Les palais, tout comme l’urbanisme mettent en scène la puissance des ca‐
lifes et leur vocation à dominer le monde dans l’esprit des grands empires pas‐
sés. Les thèmes décoratifs affirment donc la suprématie de ce nouveau pouvoir.
Les mosaïques du Dôme du Rocher, excluant toute représentation humaine, ré‐
vèlent tout un registre de motifs végétaux inspirés des décors sassanides ou by‐
zantins.
Que l’art islamique soit aniconique en raison des interdits coraniques est un
point de vue à modérer. Quelques très rares allusions à l’art apparaissent dans le
Coran, des œuvres réalisées avec « la permission d’Allah » par les djinns pour
Salomon, mais davantage que les images ce sont leurs auteurs que blâme Maho‐
met, car seul Dieu, le créateur, peut insuffler la vie. Les images sont presque
toujours absentes dans l’architecture religieuse, il n’en est pas de même dans l’ar‐
chitecture civile et les objets d’art, mettant en scène la figure du prince dans
l’exercice de son autorité, ou des scènes de banquets ou de chasse. Dès la fin du
IXe siècle, après avoir subi différentes influences, le répertoire décoratif aborde
tous les sujets avec des différences selon les lieux et les époques. Jusqu’au
XVe siècle, le visage princier reste idéalisé pour devenir ensuite, sous l’influence
de l’Europe, un véritable portrait. Mais les scènes évoquées ne concernent pas la
seule vie du prince, la vie à la campagne, la vie nomade ou religieuse sont éga‐
lement représentées. L’illustration d’ouvrages littéraires donne aussi un rôle im‐
portant à la représentation figurée en ornant des fables, des œuvres historiques,
des romans d’amour, des ouvrages cosmographiques. À Qasr al-Hayr al-Gharbī,
un château du désert des princes omeyyades, près de Palmyre, les grandes com‐
positions à même le sol, 12 m de long sur 4 m de large, mettent en scène la
déesse Gaïa selon une inspiration très gréco-romaine.
Au style mozarabe succède l’art mudéjar qui fera de Séville, Tolède, Sara‐
gosse ses principaux centres. À Cordoue, la chapelle San Fernando, à Burgos, la
porte de San Estéban, à Ségovie, l’Alcazar royal (XVe siècle) sont les principaux
témoignages de cet art. Après la construction de l’Alcazar de Séville par les
Omeyyades, lequel sera modifié plusieurs fois par la suite, surtout sous le règne
de Pierre le Cruel (1350-1369) à partir de 1350, l’Alhambra, à Grenade, est
érigé à partir du XIIIe siècle par Muḥammad al-Ahmar (1203-1273), fondateur
de la dynastie des Nasrides. Le nom d’Alhambra, qui signifie « rouge », lui a été
donné à cause des briques rouges de son mur extérieur que l’on voit de loin. Son
plan s’inscrit dans une vaste enceinte de murailles qui lui donne l’aspect d’une
forteresse. L’aménagement intérieur est fait au contraire pour flatter l’œil avec
son édifice le plus important, le palais. Son plan complexe met en évidence trois
unités autour desquelles il s’articule : le lieu où le sultan rendait la justice, le
mexuar ; celui pour les réceptions où se trouvait la salle du trône, le dīwān ; les
appartements privés du prince, le harem. Toute son ornementation était poly‐
chrome, azulejos, carreaux de faïence de couleur, marqueterie, reliefs de plâtre
constituent les éléments principaux. La vie quotidienne se déroulait entre la
cour du bassin, cour des myrtes, centre du dīwān, et celle des lions. Cette der‐
nière, de forme rectangulaire, présente en son centre douze lions de marbre
noir, rare représentation animale dans l’art musulman, ils soutiennent une
vasque d’albâtre d’où jaillit une fontaine.
Les miniatures mozarabes qui illustrent les livres entre le IXe et le Xe siècle
sont une des manifestations les plus originales de l’art espagnol à cette période.
Leurs thèmes et leurs types iconographiques en seront repris par les peintres ro‐
mans. Parmi les œuvres les plus marquantes dominent les illustrations qui ac‐
compagnent les textes du Commentaire de l’Apocalypse dont la rédaction est ha‐
bituellement attribuée à un moine du VIIIe siècle, Beatus, qui aurait vécu dans le
monastère asturien de Liébana. Aujourd’hui, on possède vingt-six copies dont
certaines partielles du Commentaire présentant des illustrations dont l’origine se
trouve certainement dans le premier exemplaire de Beatus. Parmi ces illustra‐
tions originelles au nombre de cent huit, soixante-huit s’appuient sur le texte de
l’Apocalypse.
REFAIRE LA NUBA : LA MUSIQUE ARABO-ANDALOUSE
Ce sont de véritables joyaux de l’art musulman que nous ont laissés ces
grands constructeurs qu’étaient les Aghlabides. On leur doit notamment plu‐
sieurs grandes réalisations architecturales comme les remparts de Sousse, englo‐
bant 32 ha de superficie, et al-Qasaba, édifiée en 851, tour haute de 77 m. Elle
sera plusieurs fois agrandie entre les XIIe et XIXe siècles. Les remparts de Sousse
permettent de se faire une idée de l’architecture défensive ifriqiyenne à l’époque
médiévale. La grande mosquée de Kairouan, à 150 km de Tunis, est un des
chefs-d’œuvre de l’art islamique. Reconstruite par Ziyādat Allāh Ier (817-838),
en 836, elle est à l’origine au VIIe siècle un simple oratoire. La mosquée apparaît
comme une forteresse, percée de huit portes, hérissée de tours et de bastions.
Ses plafonds sont en bois peint et sculpté. La nouveauté architecturale de cette
période tient à la rencontre en T d’une travée plus large avec la large nef axiale,
soulignée par des doubles colonnes. Une coupole est élevée sur la zone carrée
délimitée par la rencontre de ces deux éléments. Le plan en T perdure dans de
nombreuses mosquées jusqu’à l’époque ottomane et se diffuse dans le Maghreb,
en Sicile, en Égypte fatimide. Le soin de la décoration se révèle dans celle, luxu‐
riante, du mihrab, outre la peinture qui orne sa voûte, vingt-huit panneaux de
marbre, sculptés de motifs végétaux, ainsi que l’intérieur et sa façade sont mis
en valeur par des carreaux de céramique à reflets métalliques. C’est également
au IXe siècle, en 864-865, qu’est édifiée la grande mosquée de Tunis, al-
Zaytūna. Une collection de manuscrits rares, se rapportant principalement au
droit musulman, y a été retrouvée dans une pièce privée. Elle constitue le plus
ancien fonds documentaire sur la littérature malékite, une des quatre écoles de
droit sunnite du IXe siècle, mais la mosquée possède également la plus riche col‐
lection de codex coraniques.
La particularité de cet art est le contact établi entre l’art musulman et celui
des steppes asiatiques. De grandes villes sont créées, Nichapour (Iran), Ghazni
(Afghanistan), alors que le pouvoir passe aux mains des gouverneurs. Le monu‐
ment le plus célèbre reste la grande mosquée d’Ispahan. D’autres mosquées ira‐
niennes sont contemporaines : Qazvin, Qurva. De nouvelles formes de mina‐
rets, cylindriques, apparaissent. L’architecture profane offre une nouveauté au
monde musulman : le caravansérail, édifice en deux parties, avec une grande
cour et un vaste hall. Différents types d’architectures funéraires apparaissent, tel
le mausolée des Samanides à Boukhara, monument cubique surmonté d’une
coupole de briques haute d’une dizaine de mètres de côté. La disposition des
briques tient lieu de décor. Des portes placées sur les quatre côtés ouvrent vers
l’extérieur.
Il faudrait, en s’inspirant de Jean Jolivet1, faire une distinction entre les philo‐
sophes dans l’islam et les philosophes de l’islam. Mais rien n’empêche non plus
qu’un philosophe de l’islam ne puisse se révéler sous certains rapports un philo‐
sophe dans l’islam. Font partie des philosophes dans l’islam ceux qui n’ont pas
hiérarchisé le savoir philosophique par rapport au savoir prophétique, et ceux de
l’islam sont ceux qui situeront au-dessus de toutes les connaissances humaines
la prophétie. Leurs savoirs sont issus de la traduction, aux VIIIe et IXe siècles,
d’ouvrages de la philosophie antique. Ils se trouvent à la lisière de la pensée is‐
lamique, alimentés avant tout par un désir de rationalité. Les premières sectes
philosophiques qui suivent de près l’établissement régulier de l’islam semblent
en être issues. La langue arabe va faire en très peu de temps un effort termino‐
logique et se doter de termes techniques, dès les Abbassides, pour traduire des
termes nouveaux. C’est aussi l’époque où figurent sur des miniatures Platon et
Aristote, habillés à l’orientale, représentations traduisant la volonté d’un retour
vers la philosophie grecque.
Les plus grands penseurs sont :
◆ Al-Kindī (Abū Yūsuf ibn Ichaq al-Kindī, 801-873) naît à Kūfa, première
capitale abbasside. Il séjourne également à Bagdad, autre ville essentielle pour
le mouvement intellectuel, lieu de la traduction des textes grecs en arabe. Ibn
al-Nadīm (?-998), le bibliographe, lui donne la paternité dans son catalogue de
plus de deux cent soixante-dix ouvrages, mais la plupart ont été perdus. Il est
d’abord cité comme savant, car il écrit dans tous les domaines : astronomie, op‐
tique, pharmacologie, météorologie, astrologie, musique, etc. Sa pensée est en
rapport avec le kalām, la recherche des principes théologiques. Il est persuadé
que les doctrines de la création du monde ex nihilo, la résurrection corporelle et
la prophétie n’ont pas pour source la dialectique rationnelle. Dans son Épître sur
le discours de l’âme, il donne un résumé d’Aristote et de Platon. Il tombe en dis‐
grâce en 848 sous le calife al-Mutawakkil.
◆ Al-Fārābī (Muḥammad ibn Muḥammad ibn ṭarkhān ibn Uzalagh al-
Fārābī, 872-950) naît à Fārāb dans le Turkestan, en Transoxiane. Il reçoit le
titre de Magister Secundus, Second Maître de l’intelligence, Aristote étant le
premier. Il est l’un des premiers à étudier, commenter et diffuser l’œuvre d’Aris‐
tote. Ses œuvres très nombreuses comprennent des commentaires sur l’Orga‐
non, la Physique, la Métaphysique, l’Éthique d’Aristote, mais ils sont aujourd’hui
perdus. Son étude sur les termes utilisés en logique s’inspire des deux traités de
l’Organon. Il est également l’auteur d’un livre sur la musique qui est sans doute
l’exposé le plus important pour la théorie musicale au Moyen Âge. Mais il
marque son époque comme le grand fondateur de la gnoséologie, la forme de la
connaissance qui repose sur la raison universelle. L’unité politique est aussi
l’une de ses préoccupations philosophiques, il fait de l’unité de la société et de
l’État un sujet central. Dans cette optique, philosophie et religion sont deux
mêmes vérités nullement en contradiction. Ces conceptions, qui s’associent à
une doctrine métaphysique complète, sont exprimées dans plusieurs ouvrages :
Traité des opinions des habitants de la meilleure cité, Épître sur l’intellect, dans
laquelle il introduit de nouvelles notions de psychologie, l’intellect acquis, son
Dénombrement des sciences, connu en Occident, instrument de classification du
savoir et réflexion politique, son livre De la remémoration de la voie de la félici‐
té où il exprime sa conviction que la béatitude suprême consiste dans la contem‐
plation des sciences spéculatives.
◆ Avicenne (Ibn Sina, 980-1037) fut un disciple d’al-Fārābī. L’universalité
d’Avicenne s’exprime par un génie philosophique nouveau, une somme d’ency‐
clopédie philosophique dans laquelle sont traités tous les sujets. Le catalogue de
ses œuvres comporte à peu près cinq cents titres, quatre cent cinquante-six rédi‐
gés en arabe, vingt-trois en persan. Sur cet ensemble cent soixante de ces livres
nous sont parvenus. Sa somme intitulée Kitāb al-shifa, Livre de la guérison, est
une véritable encyclopédie philosophique en quatre parties, une consacrée à la
logique, une aux sciences physiques et aux sciences antiques et médiévales, une
aux mathématiques, la dernière à la métaphysique. Dans ce livre, il combine la
doctrine d’Aristote et le néoplatonisme. Dieu y est défini comme le seul être
pleinement réel, essence et existence n’y font qu’une. Traduit partiellement au
XIIe siècle, le Livre de la guérison ouvre l’Occident aux œuvres de ce philosophe
antique.
◆ Averroès (Ibn Rushd, 1126-1198), surnommé le « commentateur », reste
sans doute le philosophe arabe dont l’influence fut la plus importante pour l’Oc‐
cident. Par lui, c’est toute l’appropriation de la philosophie gréco-arabe par l’Eu‐
rope qui s’accomplit, la transmission et le renouvellement de la science et de la
philosophie antiques, qui prend naissance au IXe siècle au temps des califes ab‐
bassides à Bagdad, puis passe au XIIe siècle dans la ville de Cordoue des Almo‐
hades, et arrive dans les universités du XIIIe au XVe siècle du monde chrétien.
Averroès naît à Cordoue, son père et son grand-père y sont juges. Il le fut lui
aussi mais embrasse la carrière médicale, en 1182. Banni par le calife à la fin de
sa vie, en 1195, il doit s’exiler au Maroc où il meurt trois ans après. Son œuvre
touche à de nombreuses disciplines, ouvrages médicaux, philosophiques, juri‐
diques, théologiques. Sur Aristote, il écrit de nombreux commentaires. Il réfute
al-Ghazālī (1058-1111), qui, déçu par la philosophie, lui préfère la mystique,
dans Incohérence de l’incohérence. Mais toute sa vie il se consacre à Aristote,
désireux de retrouver le sens originel de son œuvre. Avec puissance, il a su ex‐
pliciter ses principaux concepts. Nous lui devons la théorie de la double vérité,
l’une concerne tous les croyants, elle est d’ordre religieux, l’autre, au contraire,
d’ordre philosophique et ne peut que concerner une élite intellectuelle. Le Coran
sous sa forme littérale est destiné aux masses et comporterait, pour les philo‐
sophes, un sens caché. La vérité ne pouvant être contraire à la vérité, toute
contradiction peut être soulevée parce qu’apparente. L’argumentation philoso‐
phique, pas davantage que les interprétations ne doivent être révélées à qui n’est
pas susceptible de les saisir. Il tente d’éclairer les dogmes fondamentaux du Co‐
ran sans oublier la raison. Il réfute également l’idée de création et soutient que
Dieu agit selon sa nature. Mais ce qui est original, chez Averroès, reste sa
conception de l’intellect agent unique pour toute l’humanité et de l’intellect pas‐
sif qu’il distingue en l’homme. L’intellect actif, immortel se situerait au-delà de
l’individu et à lui seul seraient accessibles les lumières de la révélation. Aussi en
vient-il à séparer foi et raison. Ses principes, considérés comme dangereux, sont
condamnés par l’Église en 1240.
La conquête de l’Égypte au VIIe siècle par les Arabes les met en possession de
cet art. L’histoire de l’alchimie arabe pourrait débuter quand le prince Khâlid
ibn al-Yazid est initié à cette discipline en 685 par un certain Marianus, élève
de l’alchimiste Étienne d’Alexandrie (VIIe siècle). Mais bien que des médecins
arabes tels que Rāzi, qui décrit dans son traité Secretum secretorum (Le Secret
des Secrets) de nombreuses opérations chimiques (distillation, évaporation, cris‐
tallisation…), ou qu’Avicenne pratiquant également l’alchimie, c’est avec Jābir
ibn Ḥayyān (721-815), assimilé au Pseudo-Geber, que cette science prend son
essor. Marcelin Berthelot pensait que les ouvrages latins de Geber appartenaient
à la fin du XIIIe siècle, car sont décrits des substances chimiques, des acides mi‐
néraux inconnus des Arabes. Selon lui, il s’agirait de Paul de Tarente. Selon
l’historien des sciences E.J. Holinyard (1891-1951), Jābir aurait vécu au
VIIe/VIIIe siècle et serait bien l’auteur d’une volumineuse collection de livres qui
lui sont attribués. C’est dans le Livre des Balances ou Kutub al-Mawazin qu’il
expose sa théorie alchimique. Il propose une classification des éléments selon
leur qualité : le sec et l’humide, le chaud et le froid. Le nombre de ses ouvrages
s’élève à cinq cents d’après la liste fournie par le Kitab-al-Fihrist (Livre de tous
les livres). Ces textes furent traduits au Moyen Âge en latin par Robert de
Chester en 1144, et le Kitab-al-Sabeen, le Livre des Soixante-dix, par Gérard
de Crémone au XIIIe siècle.
Notes
1. Jean Jolivet, « L’idée de sagesse et sa fonction dans la philosophie des IVe et Ve siècles », in Arabic
Sciences and Philosophy, vol. 1, Cambridge University Press, 1991, p. 31-65.
2. Ou Moré Névoukhim, « Guide de ceux qui sont dans la perplexité », traduit en hébreu en 1200 par Sa‐
muel ibn Tibbon (1150-1230).
CHAPITRE XI
L’Empire Harsha, qui unifie l’Inde du Nord pour une quarantaine d’années,
est la création du prince Harshavardhana (590-648) ou Harsha. Ses hauts
faits sont connus par un roman chinois, Voyage vers l’Occident, œuvre du moine
bouddhiste Xuanzang (602-664) qui séjourne à la cour de Harsha, en 643-644,
peu de temps après la conversion de l’empereur au bouddhisme. À l’origine,
Harsha est fils du rāja (roi) de Kanauj, en actuel Uttar Pradesh. Il y devient rāja
en 606. Le jeune souverain se lance alors dans une série de conquêtes : le Pan‐
jab, une partie du Bihar, du Bengale, le Sind, le Cachemire, le Népal sont sou‐
mis. Il échoue en revanche, en 620, à prendre le royaume des Chalukya plus au
Sud. Il intègre à son Empire nombre de minuscules royaumes, laissant à leur
tête leur roi, devenu vassal. Shivaïte à l’origine, il se convertit au bouddhisme et
organise en 643, à Kanauj, une assemblée qui réunit des brahmanes, des moines
bouddhistes, plusieurs souverains des royaumes proches. À cette occasion il ac‐
corde sa protection au moine chinois Xuanzang, en périple en Inde depuis plu‐
sieurs années, afin de rapporter en Chine des textes du canon du grand véhicule,
ou Mahāyāna. Après sa mort, en 648, son petit-fils lui succède, mais sans son
habileté politique, il ne peut empêcher l’Empire de se dissoudre en multiples pe‐
tits États, proies faciles pour la conquête musulmane qui a commencé avec l’in‐
vasion du Sind en 643.
L’INDE MUSULMANE
Après les invasions des Huns par les passages du Nord-Ouest, l’Empire Gupta
s’effondre. Le nord de l’Inde est ravagé et morcelé en une multitude de petits
royaumes indépendants au moment même où leur chef Attila pénètre jusqu’en
Europe occidentale. Trois dynasties s’implantent : les Pāṇḍya, les Chalukya et
les Pallava, la dernière est tenue pour la créatrice d’un art sud-indien indépen‐
dant.
Les souverains Pallava, au sud de l’Inde, sur la côte du golfe du Bengale, du
VIIe siècle jusqu’au XIe siècle, édifient Kanchipuram, leur capitale, et les monu‐
ments de Mahabalipuram. Sous le règne de Mahendravarman Ier (600-630)
naissent de nombreux temples et cavernes sculptées, principalement dédiés à
Shiva. Parmi les temples de Kanchipuram, celui de Kailashanata, construit au
VIIe siècle, s’inspire de celui d’Ellora. Le site comporte cinq rochers sculptés, les
rathas, des temples monolithiques taillés en forme de char céleste au milieu
desquels ont été sculptés d’énormes animaux et un immense relief évoquant la
descente du Gange. Cette composition, inachevée à une extrémité, s’organise à
partir d’un fleuve évoqué par une faille verticale peuplée de naga et nagini, ser‐
pents aux bustes humains. Sous le règne du roi Narasimhavarman Ier (630-
670), le style dit de Mamalla se distingue plus particulièrement, par l’emploi des
colonnes à la place des piliers, des corniches avec des réductions d’architecture
souvent inachevées, des lions à la base de la colonne qui évoluent en lions cor‐
nus puis en lions dressés. La caverne Koneri marque la transition entre ce style
et celui plus ancien de Mahendravarman Ier, caractérisé essentiellement par
des soutiens d’entablement nus, des piliers sobres tripartites, une grande salle
ouverte avec plusieurs sanctuaires qui comporte une rangée de piliers et une
rangée de colonnes. Les cavernes Mahishamardini et Vahara II, situées à Maha‐
balipuram, sont caractéristiques du style mamalla. La peinture Pallava, quant à
elle, subit également l’influence de la tradition Gupta. Le maniérisme y est pré‐
sent comme dans la sculpture lorsque les formes des personnages se font plus
opulentes au VIe siècle. Mais l’originalité disparaît et les peintres ne font plus
que reproduire des poncifs. L’art pictural tombe en décadence au VIIIe siècle.
Il est possible de parler d’art médiéval pour l’Inde, à partir du IXe siècle entre
la période gupta dite classique et la période moghole, lorsque l’islam et les Eu‐
ropéens interviennent dans son histoire. À la fin du IXe siècle, ce qui est déjà en
Inde du Nord l’âge d’or de la dynastie Pratihara atteint son apogée, son degré le
plus extrême de raffinement. Même si les principaux dieux honorés sont Shiva,
Indra, Vishnou, on rend de plus en plus le même culte à tous les dieux, ce qui
n’est pas sans conséquence sur l’architecture religieuse. Sont d’abord construits
des groupes de temples, puis des temples uniques comportant de nombreuses
chapelles et images cultuelles. L’iconographie et l’idéologie hindoue atteignent
un sommet de complexité. Une autre forme de temple s’affirme, construit sur
des plates-formes et possédant de multiples parties, escalier intérieur, cour à pi‐
lier ceinte de balustrades, salle cultuelle à balcons, sanctuaire entouré de déam‐
bulatoires à trois galeries de colonnes. L’exemple le plus ancien à Bhubaneswar
est le temple de Parasuramesvara (VIIe siècle). Mais ces édifices restent très
massifs de forme, issus d’énormes blocs empilés les uns sur les autres. Les pi‐
liers remplacent souvent les murs, le tout surmonté d’un sikhara, toit creux qui
s’élève depuis la base, ou d’un toit pyramidal. Sous la dynastie Rashtrakuta
(753-982), on aménage les derniers temples rupestres d’Ellora mais l’architec‐
ture rupestre passe peu à peu de mode. Après le style Pallava, au sud de l’Inde
se succèdent des styles dits dravidiens :
L’art Pāla
La dynastie Pāla (770-1086) puis celle des Sena (1150-1190) règnent sur un
immense royaume comprenant le Bengale et le Bihar. Les traits caractéristiques
de cette période, en dehors de ces deux dynasties marquées par une destruction
massive des monuments, sont l’essor prodigieux de l’architecture religieuse et
l’emploi simultané de la sculpture en haut-relief comme décor et complément
architectural. Cette combinaison des deux techniques, bien plus qu’une innova‐
tion, s’impose comme la conséquence logique des architectures rupestres à Ma‐
habalipuram au VIIe siècle ou à Ellora au VIIIe siècle. Il n’y a pas à proprement
parler de mutations brutales mais plutôt une évolution lente procédant par une
accumulation systématique d’éléments traditionnels, peu à peu transformés. Aux
alentours du Xe siècle, cette accumulation prend des proportions gigantesques.
Le temple bouddhique devient peu à peu semblable au temple à tour hindou. La
niche abritant la statue du Bouddha est considérablement agrandie, placée à l’in‐
térieur du tambour du stupa. De nombreux temples hindous sont agrandis.
L’art Chola
Les Pāṇḍya, les prédécesseurs des Chola, ne furent pas des constructeurs reli‐
gieux émérites, car les divers bâtiments édifiés le sont dans un dessein utilitaire
et fonctionnel. Le plus caractéristique de la période de Parantaka est la sur‐
charge décorative. Le Koranganatha, construit vers 940, multiplie les étapes de
décoration des différentes parties des bâtiments, une innovation qui se retrouve
par la suite dans les futurs temples impériaux. La période Chola marque l’apo‐
gée de la civilisation de l’Inde du Sud, et ce plus particulièrement sous le règne
de Radjaradja le Grand (985-1014) qui organise l’administration, crée une
flotte mais aussi protège les sciences et les arts. Les temples deviennent de véri‐
tables villes et sont des centres économiques, politiques et religieux. Ils entre‐
prennent dans le premier quart du Xe siècle des constructions plus monumen‐
tales, comme le temple de Brhadisvara de Shiva (1011) et celui de Gangaikon‐
dacolapuram (1025) à Thanjavur où l’ensemble est encore plus imposant, avec
sa cour dotée d’une salle hypostyle de cent cinquante piliers sur l’un des axes,
qui préfigure le maṇḍapam, « aux mille piliers », élément constant à une époque
plus tardive des grands temples. Lorsque la puissance des Chola décline, les
grandes constructions religieuses cessent. Dans le domaine de la sculpture, les
innombrables statues qui ornent les temples poursuivent la tradition de la sculp‐
ture Pallava. Les œuvres traduisent une impression de fragilité juvénile, la taille
des statues croît, les visages perdant toute expression.
L’art indo-musulman
Les territoires soumis au sultan de Delhi sont le lieu d’une double influence
architecturale : le polythéisme figuratif hindouiste et le monothéisme icono‐
claste de l’islam. Toutefois, les formes sont amenées à s’influencer réciproque‐
ment pour donner naissance à un art indo-musulman. Les caractéristiques prin‐
cipales des édifices sont les arcs brisés bordés de petits arceaux finissant en
boutons de fleurs et les décors à fonds floraux surmontés d’inscriptions cora‐
niques. Au nombre des plus importantes réalisations architecturales du sultanat
de Delhi comptent le Quṭb Minār, minaret de Quṭb, commencé en 1199, la
mosquée Arhal-din Kajhompra en Adjmar, commencée en 1200, de nombreux
mausolées : du sultan Balban (1266-1287), du sultan Ghiyas ud-Din Tugluk
(1320-1325), des palais, comme celui d’Adilabad, la « Maison de la Justice »,
par Muhammad ibn Tughluq (1325-1351), des quartiers entiers, comme celui
de Hauz i-khass, le « Réservoir royal », sous Fīrūz Shāh (1351-1388). Le Quṭb
Minār est le plus grand minaret du monde. Fait de grès rouge, au XIIIe siècle, il
s’élance vers le ciel sur une hauteur de près de 73 m ; son nom signifie « tour de
la Victoire ». Le plus impressionnant édifice indo-musulman de Delhi reste le
Lal Qila (fort Rouge), forteresse considérable de grès rose, édifiée au
XVIIe siècle. Ce sont les conquérants moghols qui lui donnent son aspect actuel.
Sa muraille d’enceinte est longue de 2,5 km, haute selon les endroits de 16 à
33 m. Outre ses entrées colossales, il a conservé de son rôle de résidence impé‐
riale, ses bains, ses salles d’audience, privées et publiques, ses mosquées. La dé‐
licatesse extrême d’une architecture légère et décorée s’oppose à la puissance de
la construction à vocation militaire.
2. La Chine médiévale
Outre les poteries vernissées, l’art délicat des poèmes de cour, les Tang
léguent à la Chine un monument du droit, le Code Tang, établi entre 624 et 653.
Il est le fondement du système juridique chinois jusqu’à la disparition de l’em‐
pire en 1911. Il est commandé par l’empereur Gaozu (618-626) auquel une pre‐
mière version est soumise en 624. Amendé en 627, puis en 637, il est accompa‐
gné de commentaires en 653. Il est organisé en douze sections qui comprennent
cinq cents articles au total. Les peines sont définies par un magistrat en fonction
de la nature du délit incriminé et de la relation sociale entre victime et coupable.
L’organisation sociale doit en effet reposer sur l’harmonie et le respect des auto‐
rités voulus par le confucianisme.
LA CHINE ÉCLATÉE : LA PÉRIODE DES CINQ DYNASTIES ET DES
DIX ROYAUMES (907-960)
La dynastie mongole des Yuan (1279-1368) est proclamée en 1271 par Kou‐
bilaï Khan (1271-1294) mais elle est la seule à régner sur la Chine après l’éli‐
mination des derniers Song en 1279. La difficulté pour ses empereurs consiste à
vivre à la croisée de deux mondes, les aspirations des Mongols d’une part, la vo‐
lonté de s’intégrer aux dynasties chinoises et de se siniser d’autre part. Les
Mongols organisent la société chinoise en reflet de ses aspirations contradic‐
toires : les hauts postes sont confiés aux Mongols, qui forment la première caté‐
gorie de citoyens. Viennent ensuite les autres ethnies, les Han, puis les Jürchens
et les Mandchous, enfin les habitants de l’ancien Empire des Song du Sud. La
tradition des fonctionnaires recrutés par examens impériaux est reprise, ces der‐
niers sont rétablis en 1313. Koubilaï Khan, devenu empereur Shizu, tente en
vain de conquérir le Japon, le Viêtnam, la Birmanie, l’Indonésie. C’est sous son
règne que prend place le séjour de Marco Polo. C’est à peu près à l’âge de vingt
ans que Marco Polo (1254-1324) atteint la Chine du Nord, qu’il nommait Ca‐
thay. Il fut très favorablement reçu par Koubilaï Khan, heureux d’entendre
d’étranges récits sur la contrée dont il venait. Cela lui permit de se rendre dans
les différentes parties de l’Empire. À en croire son livre Il milione (Le Livre des
merveilles du monde), il eut des responsabilités administratives et gouverna
même la cité de Yangzhou pendant trois ans entre 1282 et 1287.
Les Yuan fixent leur capitale à Pékin. Rapidement, ils suscitent le méconten‐
tement de leurs sujets chinois, en majorité Han, qui rejettent cette dynastie
étrangère. La révolte des Turbans rouges, entre 1351 et 1368, accélère la dé‐
composition du pouvoir mongol. Des seigneurs de guerre gouvernent en toute
indépendance des provinces chinoises, rejoints par des généraux de l’armée
Yuan. Zhu Yuanzhang (1328-1398) rejoint les Turbans rouges en 1352. Ce
paysan se révèle vite un redoutable général, qui bat à plusieurs reprises les
troupes mongoles. En 1368, il contraint le dernier empereur Yuan à s’enfuir et
se proclame souverain sous le nom de règne de Hongwu (1368-1398), fonda‐
teur de la dynastie des Ming (1368-1644).
En dépit des difficultés politiques que connaît alors la Chine, sa culture ac‐
complit de grands progrès. Elle fonde, nourrie des recherches menées par les
Tang, le modèle des créations ultérieures. Plusieurs événements la modifient en
profondeur : la pénétration de l’islam aux environs de l’an 1000, la disparition
progressive du bouddhisme, qui laisse place à une réaction confucianiste.
L’usage généralisé de l’imprimerie est décisif pour sa diffusion. La médecine
fait, comme toutes les sciences en Chine, d’importants progrès. En 1145 a lieu
la première dissection. On rédige d’ailleurs à cette époque une encyclopédie sur
tout l’acquis médical alors connu.
La peinture est sans conteste l’art le plus représentatif de cette période. Des
académies sont créées, soutenues aussi bien par les empereurs septentrionaux
que méridionaux. Huizong (1100-1126) fut un esthète et un collectionneur pas‐
sionné. Il réunit dans son palais de Kaifeng un véritable musée de peintures,
étant lui-même un peintre de talent. Cet art est marqué par un bouleversement
complet des genres au profit de la peinture de paysage. Les artistes les plus cé‐
lèbres de cette époque des jeux d’encre à l’encre de Chine et des paysages sont
Guo Xi (1020-1090) et son Début de printemps (1072) et Li Longmian (Li
Gongli, 1040-1106), le premier spécialiste de vastes paysages exaltant le senti‐
ment de puissance de la nature, le second s’intéressant aussi à la représentation
picturale des êtres humains et des animaux, portraitiste de cour.
La céramique devient un objet précieux que les familles aisées et les lettrés
recherchent afin de la collectionner. Plusieurs styles existent. Le plus célèbre
reste la porcelaine dite « céladon » au vert si caractéristique. De même les por‐
celaines blanches montrant une décoration gravée sous le glaçage, ou peinte au-
dessus, font leur apparition. De la fin de cette époque datent les porcelaines
bleues et blanches dont le bleu cobalt est importé d’Asie intérieure.
L’aristocratie, une fois la cour installée dans le Sud, peut se destiner à l’art et
à ses plaisirs. La Chine connaît une grande époque de développement et d’épa‐
nouissement, édifiant une culture d’un grand raffinement. Les principaux
peintres sont Ma Yuan (v. 1160-1225) et Xia Gui (v. 1190-1225) qui créent un
style personnel de paysages. Deux autres grands maîtres marquent leur époque,
Liang Kai (1140-1210) et Mu Qi (1240-1270). La caractéristique de ces
peintres, dans le domaine du cadrage, est une plus grande originalité, jouant sur
l’opposition des pleins et des vides. Le subjectif entrant davantage en compte,
les peintres accentuent un élément pour mettre en valeur l’ensemble du tableau.
Cette peinture exerce une influence prépondérante à l’époque Ming.
La littérature sous les Tang connaît, comme les autres arts, un épanouisse‐
ment de sa production. La poésie atteint son sommet. Les souverains, notam‐
ment Xuanzong (602-664), protègent et favorisent les lettres et les arts. En
outre la Chine peut s’ouvrir à d’autres modes de pensée avec les textes apportés
d’Inde par les moines, qui font l’objet de traductions. Le VIIIe siècle développe
toute une littérature spécialisée, mystique, de l’école indienne du Dhyana (chan
en chinois, zen en japonais). Ce sont d’abord des épisodes de la vie de Bouddha
romancés, des légendes extraites des écritures canoniques, des textes de propa‐
gande bouddhique. La même forme littéraire est utilisée par la suite pour des
textes non bouddhiques, des récits tirés de la tradition historique nationale. Pa‐
rallèlement se met en place une forme propre au roman moderne en langue vul‐
gaire, et une littérature romanesque en langue orale se développe. La dynastie
des Tang marque un tournant dans l’histoire de l’écriture poétique. La poésie at‐
teint son apogée : le « nouveau style » de cette poésie met à l’honneur le genre
shi, lié à une certaine métrique, un poème de huit vers de cinq ou de sept pieds.
Ce style est divisé en gushi, « vieux poèmes », et jintishi, « poésie moderne ».
Les princes de ce type de poésie sont Wang Po (647-675), Lou Chao-lin
(VIIe s.), Lo Pin-wang (619-687). Quant à Han Yu (768-824), confucianiste
convaincu, il introduit dans la littérature en prose le style dit gu wen, « vieille
prose », style sans fioriture qui prend celui de l’époque Han comme modèle et
vient remplacer le style chargé et fleuri en usage depuis le IVe siècle. À la fin de
la période Tang apparaît le tseu, poème spécialement écrit pour un air de mu‐
sique. L’Histoire des Trois Royaumes, roman historique évoquant la fin de la dy‐
nastie Han et la période des Trois Royaumes (220-265), d’après l’œuvre de
Chen Shou (233-297), est l’épopée historique la plus populaire de la littérature
chinoise.
Le théâtre connaît un grand essor, et c’est sous les Yuan qu’est introduit l’ac‐
compagnement musical. Le système des examens ayant été aboli, nombre de
lettrés se tournent vers la dramaturgie. La littérature dramatique écrite en langue
populaire connaît ses premiers succès. En effet, les drames de cette époque sont
des opéras comprenant dialogues, chants et danses et sont articulés en un pro‐
logue et quatre actes. Cette distinction est surtout valable dans le Nord. Dans le
Sud, on compose des pièces avec de nombreux tableaux. Leurs thèmes
concernent la mythologie, la vie quotidienne et une critique discrète de la vie
politique. Parmi les drames du Sud, le Pi-pa-ki, ou L’Histoire d’un luth, est com‐
posé vers 1355, sans doute par Kao Ming (1305-1370). Un autre nom reste lié
au monde du théâtre, celui de Guan Hanqing (Kouan Han-k’in, v. 1225-
v. 1302) et son Rêve du papillon, l’une des multiples facettes d’une riche inspira‐
tion. Une nouvelle forme poétique émerge, le sanqu, issu des chansons de cour‐
tisanes. Le roman connaît un grand succès, au XIVe siècle, les récits sont organi‐
sés en deux cycles. L’Histoire des Trois Royaumes et Au bord de l’eau, attribué à
Shi Naian (v. 1296-v. 1370), sont les plus populaires.
3. Le Japon médiéval
Ashikaga Takauji (1305-1338) fait entrer le shogunat dans son clan, mais
l’exercice du pouvoir à l’époque de Muromachi (1336-1573) se révèle extrême‐
ment difficile. Pour conquérir le shogunat, il s’est appuyé sur une partie de la fa‐
mille impériale contre le reste de ses membres. Il en résulte, entre 1336 et 1392,
le Nanbokuchō, « période des cours du Nord et du Sud », deux dynasties ri‐
vales, deux empereurs. C’est le troisième shogun, Ashikaga Yoshimitsu (1368-
1408), qui met fin à la querelle, à la guerre civile entre les partisans des empe‐
reurs rivaux. En 1392, il impose le système d’une alternance. La cour du Nord
inaugure le règne avec son empereur Go-Komatsu (1392-1412), qui doit abdi‐
quer au terme de dix ans de règne au profit de l’empereur du Sud. L’accord n’est
pas respecté et les empereurs de la cour du Nord sont considérés comme seuls
légitimes jusqu’en 1911. À cette date, le gouvernement décide que la lignée im‐
périale légitime est celle de la cour du Sud, les empereurs du Nord sont quali‐
fiés de « prétendants de la cour du Nord ». La réunification du trône impérial
continue avec le fils de Go-Komatsu, l’empereur Shōkō (1412-1428). L’autorité
du shogun est battue en brèche par la montée en puissance des daimyōs qui
fondent des dynasties puissantes, de plus en plus indépendantes et souveraines.
Ces seigneurs entrent en lutte permanente, plongeant le Japon dans une guerre
civile continue, province contre province. Le commerce se développe, favori‐
sant les ports, des corporations d’artisans et de commerçants voient le jour. Mais
une grande partie de la richesse ainsi créée est captée par les maisons nobles et
les couvents bouddhiques qui renforcent leur mainmise sur le pays. Vers 1543,
les Portugais, depuis Macao, gagnent le Japon, établissent les premières rela‐
tions commerciales. Les suivent de près les missionnaires ; dès 1549 Fran‐
çois Xavier (1506-1552) s’efforce de répandre le christianisme. Au XVIe siècle,
la maison impériale a perdu son prestige, le clan Ashikaga la réalité du pouvoir.
Trois grands chefs militaires vont réunifier le Japon : Nobunaga Oda (1534-
1582), Toyotomi Hideyoshi (1536-1598) et Ieyasu Tokugawa (1543-1616).
Successivement, ces daimyōs vont mettre fin à l’anarchie politique, prenant le
pouvoir à la suite de leurs victoires militaires. Nobunaga Oda est à l’origine un
petit seigneur local du centre de l’île principale de Honshū. Une succession de
victoires, entre 1568 et 1582, lui permet de contrôler tout le centre du Japon,
comme la bataille de Nagashino (1575) où ses troupes utilisent pour la première
fois au Japon des mousquets. En 1573, il écarte Ashikaga Yoshiaki (1568-
1573), dernier shogun de cette lignée. Le Japon entre alors, entre 1573 et 1603,
dans l’ère des guerres civiles.
La peinture domine l’art, fortement influencée par l’esprit zen. Les peintres
ont acquis une nouvelle technique, Sumi-e ou Suibokuga, peinture à l’encre de
Chine, permettant de mieux rendre l’essence du paysage. Les plus célèbres sont
des moines : Sesshū (1420-1508), qui atteint la maîtrise du trait au pinceau et
du dégradé, Josetsu (1370-1440), Noāmi (1397-1494), Sōami (1459-1525),
Kanō Masanobu (1434-1530), fondateur de l’école de Kanō qui prend une
grande importance au XVIIe siècle. L’art de la laque atteint un haut degré de per‐
fection, les laques en relief et dorées font leur apparition de même que la pote‐
rie et l’armurerie.
Le début de l’époque Heian est marqué par trois calligraphes, les Sampitsu,
ou « Trois Pinceaux », puis, au Xe siècle, un autre courant de trois autres grands
calligraphes, les Sanseki, « Trois Traces ». Les premiers sont Kūkai (774-835),
l’empereur Saga (786-842) et Tachibana no Hayanari (782-842). Chacun
d’entre eux a permis à la calligraphie japonaise de se détacher des bases tech‐
niques de la calligraphie chinoise. La souplesse et l’ampleur caractérisent ses
successeurs et grâce à eux la spécificité japonaise atteint son plein épanouisse‐
ment dans le style wa-yō, ou « japonais », parvenu à sa maturité.
À l’époque Asuka (v. 550-710), les palais des princes et les résidences de
l’aristocratie comportent déjà de vastes jardins aménagés de mares, de ponts à la
manière chinoise. Les villes se multiplient à l’époque de Nara ainsi que les pa‐
lais secondaires agrémentés de jardins. De l’époque de Heian, de nombreux jar‐
dins sont demeurés célèbres : le Shinsen-en de l’empereur Kammu, le Saga-in,
le Junna-in, le Nishi no in. Ceux-ci comportent des étangs suffisamment vastes
pour y faire voguer des bateaux entiers. Alors que les bâtiments de cette époque
sont aménagés de façon symétrique, les premiers jardins ne le seront pas et c’est
leur agencement qui aura une influence sur l’asymétrie dans l’architecture japo‐
naise. Il existe des témoignages sur l’agencement de ces jardins dans Le Dit du
Genji. Le jardin du temple Daikaku-ji à Kyōto était à l’origine un jardin shin‐
den, organisé autour d’un bâtiment central. Les jardins de l’époque de Heian
sont marqués par des valeurs esthétiques spécifiques : miyabi, le raffinement,
muyo, la mélancolie liée à l’impermanence dans le bouddhisme, et aware, la
compassion.
C’est au VIIe siècle que les premiers documents écrits, au Japon, font leur ap‐
parition. Le Kojiki, Récit des choses anciennes (712), est écrit exclusivement en
kanji, caractères empruntés au chinois, mais utilisés en japonais. Grâce à la pré‐
face, nous savons que l’empereur Temmu avait commandé deux récits afin d’as‐
seoir le pouvoir de la famille impériale. En effet, divisé en trois livres, le Kojiki
retrace l’histoire du Japon et de la famille impériale, depuis l’origine du monde
jusqu’au règne de l’impératrice Suiko (593-628). Compilé sous la direction du
prince Toneri (676-735), le Nihonshoki, Chroniques du Japon, une fois rédigé,
est remis à l’impératrice Gensho (680-748) en 720. Véritable ouvrage politique,
il tente de fournir au Japon un cadre historique, il ne comporte ni biographie ni
monographie. Le Man’yōshū, Recueil de dix mille feuilles, contient quatre mille
cinq cents poèmes, répartis en vingt livres, dont la rédaction s’étend de 550 au
milieu du VIIIe siècle, en l’an 759 pour le plus récent. La plupart des poètes sont
anonymes, exception faite de Kakinomoto no Hitomaro (662-710) à qui l’on
attribue plus d’une vingtaine de chōka, poèmes longs, et soixante tanka, poèmes
courts, et de Yamabe no Akahito (v. 700-v. 736) qui vivait en Chine et compo‐
sait en chinois. Ses chōka sont d’inspiration confucéenne et bouddhiste.
La lutte qui oppose les Taira et les Minamoto devient source d’inspiration et
donne naissance à une nouvelle forme de récit historique, les Gunki monogatari,
les récits guerriers. Ainsi, une trilogie met en scène les principales étapes du
conflit entre les deux clans : le Récit des troubles de l’ère Hogen (Hogen mono‐
gatari) relate les événements survenus entre 1156 et 1184, le Heiji monogatari
(Épopée de la rébellion de Heiji) ceux des années 1158 à 1199, le Heike mono‐
gatari (L’Aventure d’Heike) la victoire des Minamoto en 1185. La poésie lyrique
est marquée par Le Nouveau Recueil de Jadis et Naguère (Shin-kokin-shū), an‐
thologie des poèmes japonais de cette période. Cependant, une nouvelle ma‐
nière de considérer les événements, en tentant de les analyser, apparaît. D’autres
genres fleurissent : le Kikō bungaku, « littérature de voyage », un thème particu‐
lièrement important ; les Otogi-zōshi, nouvelles de fiction dont on ne connaît ni
les dates ni les auteurs, aux influences shintō ou bouddhistes. Ces récits relatent
la fondation d’un temple ou encore des histoires d’amour entre des moines et de
jeunes garçons.
Le shintoïsme
Le bouddhisme
L’introduction du zen
LA CIVILISATION D’ANGKOR
LE DÉCLIN D’ANGKOR
La musique khmère
La musique khmère est étroitement liée à la spiritualité. Son nom, phleng, dé‐
rivé du verbe « leng », « jouer » ou « se distraire », la présente comme un diver‐
tissement sacré. Elle accompagne tous les moments de la vie. Elle se sépare en
musique de cour et musique populaire. Il existe, pour la forme royale, deux
types d’orchestre, le Pin Peat solennel des grandes cérémonies, le Mohori des
divertissements privés. Les principaux instruments sont les skor thom ou « gros
tambours », les chhing, cymbales, le kong thom ou « gros gong » et le kong toch,
« petit gong », ainsi que les xylophones, roneat ek et roneat thung, aux lames de
bambou ou de teck. Le métallophone, roneat dek, est fait de lames de bronze. Il
faut ajouter une sorte de hautbois, le sralaï. Les instruments à cordes sont le
krapeu, le tro chlé ou le sor. La flûte khluy propage un doux son. La musique
khmère n’est pas écrite, elle se transmet de maître à disciple par la répétition des
thèmes joués. Elle se joue sur une gamme pentatonique, de cinq tons, divisée en
sept degrés égaux. L’improvisation y joue un grand rôle, à partir d’une brève
phrase mélodique de deux thèmes qui se répondent, repris ensemble entre deux
et quatre fois. La musique accompagne mariages, funérailles, combats de boxe.
5. L’Indonésie médiévale
Notes
1. À ce sujet, voir Florence Braunstein, Penser les arts martiaux, Paris, Puf, 1999, p. 210.
2. Pierre-François Souyri, Le Monde à l’envers, Paris, Maisonneuve et Larose, 1998, p. 240.
3. Florence Braunstein, « Le Dit du Genji », in Encyclopædia Universalis.
4. À ce sujet, voir Florence Braunstein, « Heike Monogatari », in Encyclopædia Universalis.
5. À ce sujet, voir Florence Braunstein, Penser les arts martiaux, op. cit., p. 310.
6. À ce sujet, voir Jean Herbert, Les Dieux nationaux du Japon, Paris, Albin Michel, 1965.
7. À ce sujet, voir Florence Braunstein, « Bouddhisme et arts martiaux », in Lumières sur la voie boud‐
dhique de l’éveil (revue Connaissance des religions), Paris, L’Harmattan, 2003, p. 302.
CHAPITRE XII
L’Amérique précolombienne
1. La civilisation maya
Conventionnellement, l’histoire maya se scinde en trois périodes : la période
préclassique (v. 2600 av. J.-C.-150 apr. J.-C.), la période classique (v. 150-
v. 900), enfin la période postclassique (v. 900-1521). Après la mise en place des
communautés des temps préclassiques, les royaumes mayas, centrés sur des ci‐
tés-États, s’épanouissent durant l’ère classique, comme Tikal, Calakmul, Chi‐
chén Itzá, Uxmal, chacune prenant le relais, au tout début de la dernière époque.
Chaque cité est gouvernée par un roi qui détient tous les pouvoirs. Il est assisté
d’un conseil de nobles, religieux, militaires. Le nom et des éléments de biogra‐
phie de plusieurs grands souverains mayas nous sont parvenus : 18 Lapin de
Copán, K’awiil de Tikal, Pakal le Grand de Palenque. Palenque est dirigé
par un prince d’exception en la personne de K’inich Janaab’ Pakal (603-683),
Bouclier-Jaguar, connu aussi comme Pakal le Grand. Seigneur de Palenque
dès l’âge de douze ans, en 615, marié en 624 à la princesse Oktan, il rend non
seulement sa puissance militaire à la cité-État, mais se révèle être un roi bâtis‐
seur, faisant ériger temples et pyramides. Parmi eux, le Temple des Inscriptions,
qui renferme sa tombe. Édifié entre 675 et 683, il se présente sous la forme
d’une base pyramidale, surmontée du temple lui-même. Un escalier mène sous
le temple à une crypte funéraire, où le roi Pakal, paré de ses attributs royaux de
jade, repose sous une impressionnante dalle sculptée, fermant un sarcophage de
3 m sur 2.
Les représentations figurées sur le couvercle du sarcophage et dans le caveau
relatent les étapes de la transformation de Pakal en un dieu immortel, vainqueur
du monde inférieur, celui de la mort et des créatures démoniaques. Copán a
pour 13e souverain Waxaklajuun Ub’aah K’awiil (695-738), connu sous le
nom de 18 Lapin. Devenu roi de Xukpi, c’est-à-dire Copán, le 2 janvier 695,
18 Lapin est capturé et sacrifié aux dieux par son vainqueur, le roi de Quiriguá,
après la défaite du 3 mai 738. Après que 18 Lapin a été décapité, la cité de
Copán peine à retrouver sa splendeur, son âge d’or est terminé. C’est lui qui a
fait édifier de nombreuses stèles sur la Grande Place, agrandir le terrain de jeu
de pelote, le temple 22 lui est consacré. Son nom de 18 Lapin, encore couram‐
ment employé, remonte aux débuts des études consacrées aux Mayas et provient
d’une altération de sens, le nom véritable du roi est : « Dix-huit sont les images
de K’awiil », K’awiil étant le nom de l’un des principaux dieux mayas, associé à
l’exercice de la royauté divine. Tikal voit le soleil de la gloire se lever quand
monte sur le trône Yik’in Chan K’awiil (734-760), K’awiil qui obscurcit le
Ciel. Il abat en effet la puissante cité rivale de Calakmul en 736, avant de dé‐
faire ses anciens principaux alliés entre 743 et 744. Il prend pour épouse la
Noble Dame Shana’Kin Yaxchel Pakal, Geai vert du mur, de Lakamha. La ci‐
vilisation maya est encore aujourd’hui une énigme. Les cités du Sud se vident de
leurs habitants à partir de la fin du VIIIe siècle, ceux-ci semblent avoir migré vers
le Nord, la péninsule du Yucatán.
Des fouilles récentes y attestent d’un monde de cités comparable, alors que,
jusqu’à il y a peu, on le croyait importé par les habitants du Sud. Le phénomène
se reproduit dans l’ensemble du monde maya au début de la période postclas‐
sique. Plusieurs phénomènes peuvent permettre de cerner certaines raisons de ce
déclin, comme les guerres et les soulèvements populaires, mais la sècheresse su‐
bie régulièrement semble en être la cause principale. Il est également possible de
mettre en avant l’introduction par les prêtres et les princes, à partir du
VIIIe siècle, du culte nouveau du dieu Kukulkan, le Serpent à Plumes, repris par
les Aztèques sous le nom de Quetzalcóatl. Ce nouveau venu, au culte vite hégé‐
monique, aurait indisposé les sectateurs des divinités plus anciennes, Chaac,
dieu de la pluie, Itzmana, le dieu soleil, Ah Mun, dieu du maïs, provoquant des
affrontements au sein même des cités.
Notre connaissance des Mayas bénéficie d’un document unique sur la cosmo‐
gonie et la mise en place de l’univers, la création de l’homme avec le Popol Vuh,
ou Livre des Temps. Rédigé en maya, avec des caractères latins, par un groupe
de compilateurs, au milieu du XVIe siècle, il décrit le monde des dieux, celui des
hommes et les grandes actions des souverains mayas Quichés jusqu’à son
époque de rédaction. Les Quichés sont un groupe ethno-linguistique du Guate‐
mala, encore présent de nos jours, avec la figure bien connue de la prix Nobel
de la paix Rigoberta Menchú, en lutte pour la reconnaissance de leurs droits ci‐
viques. Le texte, rapidement perdu, est redécouvert au XVIIIe siècle par un prêtre,
au Guatemala, qui en fournit la première traduction. Il est parvenu jusqu’à nous
grâce à une copie, elle aussi en langue maya, ainsi qu’une traduction en espa‐
gnol, dues à un Dominicain, Francisco Jimenez, datées de la fin du XVIIe siècle.
Le Popol Vuh retrace la bataille victorieuse des jumeaux Hunahpu et Xba‐
lanque. Il est la principale source de connaissance de la religion maya, avec les
textes de Chilam Balam, écrits en yucatèque, mais toujours en caractères la‐
tins, aux XVIe et XVIIe siècles. Chilam Balam est le nom du groupe des « Prêtres-
Jaguars », connus pour leur don de prophétie, leurs pouvoirs surnaturels. Les
livres de Chilam Balam présentent à la fois les mythes, les prophéties, dont l’ar‐
rivée des Européens, et des recettes prophylactiques ou médicinales.
2. La civilisation toltèque
Les Toltèques occupent la région du Mexique central et choisissent le site de
Tula pour y implanter leur capitale politique, ou reprennent d’une civilisation
antérieure celui de Teotihuacán pour y édifier un vaste complexe religieux, cités
toutes deux situées au nord de l’actuelle ville de Mexico. Cette division recoupe
les deux moments de leur histoire. Les prêtres dominent la société jusqu’aux
alentours du XIe siècle, puis ils laissent la place aux guerriers. Leur puissance
militaire cède cependant devant les forces aztèques au cours du XIVe siècle, et le
monde toltèque indépendant disparaît pour se fondre dans celui de son vain‐
queur. Adorateurs, comme les Mayas, du Serpent à Plumes, auquel ils donnent
son nom définitif de Quetzalcóatl, ils honorent également des dieux sanglants,
qui se nourrissent du sang versé des victimes humaines sacrifiées, tel le redou‐
table Tezcatlipoca qui préside à la mort.
Tula, le grand site des Toltèques, un peuple migrant installé au IXe siècle sur
le plateau central mexicain, est la capitale des Toltèques et des Aztèques, à envi‐
ron 80 km au nord de Mexico. L’apogée du monde toltèque se situe entre le Xe
et le XIIe siècle. Tula naît au moment où la plus grande cité mésoaméricaine,
Teotihuacán, entre en déclin, lors du VIIe siècle. Le premier noyau urbain est ap‐
pelé Tula Chico, la « Petite Tula ». Le dieu-serpent Quetzalcóatl, associé à la
planète Vénus, y est déjà adoré. Sa grandeur se développe à partir du règne de
Ce Acatl Topiltzin, « 1-Roseau », entre 980 et l’an 1000 environ. Considéré
comme le fondateur de Tula Grande, la « Grande Tula », il la dote d’un nouveau
centre religieux. La cité recouvre alors entre 10 et 16 km2, pour une population
qui a pu dépasser les cinquante mille habitants. Sont édifiés les monuments les
plus prestigieux, les pyramides à plates-formes surmontées d’un temple, comme
La Quemado, ou Palacio Quemado, incluant le temple sis au sommet de la Py‐
ramide B. Cette Pyramide B, ou Pyramide de Tlahuizcalpantecuhtli, le dieu
Serpent à Plumes Quetzalcóatl, sous sa forme de Vénus, est célèbre pour ses
Atlantes, quatre colonnes en forme de guerriers toltèques, hautes de près de
5 m, qui soutenaient le toit du temple. Outre ses Atlantes, Tula est connu pour
ses chaac-mols ou « Jaguar rouge », statues bloc représentant un homme semi-
allongé sur ses coudes, tête tournée pour faire face à l’arrivant, que l’on retrouve
à Chichén Itzá, autre cité toltèque. Toltèques, Chichimèques, Mixtèques, autant
de peuples destinés à se fondre dans la grande fédération dominée par les Az‐
tèques.
La cité de Chichén Itzá, ou « Dans la Bouche du Puits des Itzá », est fondée
vers l’an 400, avant d’être laissée à l’abandon environ cent ans plus tard. Elle re‐
naît au IXe siècle pour honorer le dieu Kukulkan, devenu Quetzalcóatl, le « Ser‐
pent à Plumes », pour les conquérants toltèques. Chassés de leur capitale, Tula,
ils se fondent aux Mayas à Chichén Itzá, cité qui mêle les deux civilisations.
Chichén Itzá se dresse dans la péninsule du Yucatán, au Mexique, et couvre une
superficie de 300 ha environ. Les monuments les plus remarquables sont la
grande pyramide, ou Castillo, le Jeu de pelote, le temple des Guerriers. Il
convient d’y ajouter un puits naturel, ou cénote, lieu de culte du dieu de la pluie,
Chaac. La grande pyramide, haute de 24 m, ou Castillo, le « château » en espa‐
gnol, est réservée au culte du dieu Quetzalcóatl, le « Serpent à Plumes », repré‐
senté par des têtes de serpent au bas de l’escalier d’accès. Sa construction res‐
pecte une division calendaire, quatre faces de quatre-vingt-onze marches, soit
trois cent soixante-quatre auxquelles s’ajoute la plate-forme formant un total de
trois cent soixante-cinq, correspondant aux jours de l’année. Le Jeu de pelote,
le plus grand de toute la péninsule du Yucatán, avec ses 90 m de long sur 30 m
de large, est un terrain rectangulaire. Sur un mur, un anneau de pierre est scellé
en hauteur. Deux équipes s’affrontent pour y faire passer une balle de caou‐
tchouc, sans utiliser les mains ou les pieds. Tout repose sur l’habileté à projeter
la balle à partir des hanches, coudes, avant-bras. Il s’agit d’un jeu sacré, en hom‐
mage à la course du soleil dans le ciel. Les forces du monde inférieur, de la
mort, luttent contre les forces de vie du monde supérieur, terrestre. Le temple
des Guerriers (ou des Jaguars) est plus nettement toltèque. Les fresques l’ornant
illustrent les exploits de ce peuple guerrier. Au sommet de la pyramide, le
temple lui-même est précédé d’un autel de sacrifice, ou chaac-mol, en forme
d’homme semi-allongé, appuyé sur ses coudes, tête dressée, dont le ventre fait
office de plateau sur lequel allonger le sacrifié. Chichén Itzá recouvre en fait
deux histoires, celle de la cité des Mayas, gouvernés par des rois prêtres, adora‐
teurs de Chaac, à partir de 400, puis la ville des Toltèques, qui sont arrivés en
deux vagues, l’une vers 850, l’autre vers 1150, du Mexique central, vénérant le
« Serpent à Plumes ». Les luttes avec les cités rivales, dont Mayapán, hâtent
probablement la fin de Chichén Itzá, abandonnée à la fin du XIIIe siècle.
La religion toltèque, dans son ensemble, est largement reprise par les Az‐
tèques. Toutefois, deux figures divines méritent une approche particulière, Tez‐
catlipoca, « Seigneur du Miroir Fumant », et Quetzalcóatl, « Serpent à
Plumes ».
◆ Tezcatlipoca, « Seigneur du Miroir Fumant », est le démiurge mésoaméri‐
cain par excellence. Créateur du Ciel et de la Terre, il est le Soleil-Jaguar du tout
premier univers. Dieu suprême, omniscient, tout-puissant, il est à lui seul toutes
les divinités, le « Créateur », l’« Être de toute chose ». Invisible, omniprésent, il
possède un miroir magique auquel fait écho le miroir de marcassite qui est son
symbole, à l’aide duquel il prédit l’avenir et lit dans le cœur des hommes. Son
culte se met en place lors de l’arrivée des Toltèques au cours du Xe siècle. Ses at‐
tributions sont infinies, dieu de la Guerre, de la Mort, de la Nuit, de la Grande
Ourse, inventeur du feu, protecteur des récoltes, mauvais génie des hommes,
protecteur des sorciers et nécromanciens, incarnation des jeunes guerriers, de la
beauté, de la connaissance, de la musique, etc. Insaisissable tant il est multiple,
paradoxal et ambigu, Tezcatlipoca est le Dieu Noir, sa couleur, pour les Az‐
tèques corrupteur de son frère Quetzalcóatl qu’il initie à la boisson et aux plai‐
sirs érotiques. Il est le plus souvent représenté le visage peint de bandes hori‐
zontales jaunes et noires alternées, le pied droit, perdu lors de son combat
contre le Monstre de la Terre, remplacé par un miroir ou un serpent. Parfois, le
miroir repose sur sa poitrine, et des volutes de fumée en émanent. Son repré‐
sentant animal, ou sa forme animale, son nagual, est le jaguar. Il est rapproché
de plusieurs dieux mayas, le créateur suprême K’awiil, ou Tohil, « Obsidienne »,
associé aux sacrifices.
◆ Quetzalcóatl, le « Serpent à Plumes de Quetzal », le quetzal étant un oi‐
seau tropical aux plumes de vives couleurs bleues, vertes, rouges, est plus cou‐
ramment nommé « Serpent à Plumes ». Frère de Tezcatlipoca pour les Az‐
tèques, il est aussi dieu créateur, protecteur des connaissances, des artisans, des
scribes, Vénus, l’Étoile du Matin, celui qui donne la civilisation aux hommes,
leur apprend l’art de l’agriculture, du commerce, du tissage et de la poterie.
Quetzalcóatl est adoré par les Mayas sous le nom de Kukulkan, sous celui de
Quetzalcóatl à Teotihuacán, chez les Toltèques puis les Aztèques. Protecteur des
prêtres, il serait à l’origine du régime des rois prêtres de Tula, au Xe siècle. Il se‐
rait alors à rattacher à la figure du roi Ce Acatl Topiltzin Quetzalcóatl, chassé
par les séides du dieu rival Tezcatlipoca. Quetzalcóatl, dieu pacifique, reçoit des
sacrifices de fleurs, plumes de quetzal, jade ou animaux, serpents, oiseaux, pa‐
pillons. Sa chute à Tula inaugure l’ère des sacrifices humains exigés par son
sombre opposé, Tezcatlipoca.
3. La civilisation inca
Les Incas sont à l’origine un groupe, venus probablement du lac Titicaca, à la
frontière entre le Pérou et la Bolivie. À partir du Xe siècle, ils essaiment dans les
vallées péruviennes, créant de nombreux petits royaumes rivaux. Au XIIIe siècle,
regroupés, ils commencent à préparer l’avènement, autour de Cuzco, de ce que
sera l’Empire inca qui, à son apogée, au début du XVIe siècle, couvre environ
3 millions de km2. Le legs des Incas est familier depuis l’enfance, entre Les Sept
Boules de cristal et Tintin et le Temple du Soleil, il perdure aussi dans la célébra‐
tion pérenne de la principale fête en l’honneur du Soleil. L’Inti Raymi, la fête du
Soleil, correspondant au solstice du 24 juin, continue à être célébrée au Pérou,
non loin de Cuzco, sur le site de Sacsayhuamán. Chaque année, plusieurs cen‐
taines de milliers de personnes, Péruviens et touristes, viennent assister à la re‐
constitution en costumes d’époque des fêtes données autrefois par les Incas. Le
point d’orgue de la cérémonie est le discours prononcé par le figurant incarnant
l’empereur, le Sapa Inca, en langue quechua, avant d’être promené en procession
sur un trône d’or. Survivent encore la langue, le quechua et l’ayllu, communauté
villageoise solidaire. Leur monde demeure encore présent et vivant à la fois
dans la langue quechua, toujours pratiquée, ou runasimi, « langue des
hommes », la langue parlée dans les Andes, depuis le sud de la Colombie jus‐
qu’au nord de l’Argentine.
L’HISTOIRE DES INCAS
Il faut attendre le Ier millénaire de notre ère pour voir naître deux empires vé‐
ritables, Tiahuanaco et Huari. Tiahuanaco, site classé au patrimoine mondial de
l’Unesco, se développe à proximité du lac Titicaca, sur l’actuelle Bolivie. Son
grand temple célèbre le culte dû aux huaca, les forces spirituelles. Il disparaît au
XIe siècle, sans que la cause exacte en soit déterminée. L’empire de Huari est
centré sur l’actuelle ville d’Ayacucho, dans la province péruvienne du même
nom, à plus de 2 700 m d’altitude dans la cordillère des Andes. Les Huaris, ar‐
chitectes, tisseurs, maîtres dans l’art de la céramique, préfigurent les talents in‐
cas. La fin de l’Empire huari coïncide avec la constitution d’États régionaux
dont le plus important est celui de Chimú, dans la région de l’actuelle ville de
Trujillo. Né au IXe siècle, il perdure jusqu’à la fin du XVe siècle, moment où il est
incorporé à l’Empire inca. Sa capitale, Chanchán, est révélatrice de l’organisa‐
tion de la société en castes, chacune occupant le quartier qui lui est dévolu. Les
Incas quittent probablement les alentours du lac Titicaca au cours du XIe siècle,
pour gagner peu à peu la vallée de Cuzco et s’y établir. Il leur faut d’abord com‐
battre les groupes locaux, puis s’agréger à une coalition. Cette dernière est nette‐
ment organisée : le Hanan, « le Haut », revient à ceux qui exercent les pouvoirs
civils et religieux ; le Hurin, « le Bas », détient les pouvoirs militaires.
Très vite, les Incas monopolisent le Hurin. Le premier à pouvoir véritable‐
ment être considéré comme empereur serait l’Inca Manco Cápac, au XIIe siècle.
Les Incas dominent alors la fédération qu’ils ont servie un temps militairement.
Un seul groupe s’oppose encore localement à leur pouvoir : les Chancas. En
1438, ils assiègent Cuzco, dont le nom signifie « nombril », ou « centre », du
monde, quitté précipitamment par l’Inca Viracocha (v. 1400-1438). Il est
d’abord connu sous le nom de Hatu Tupac Inca, qu’il change pour celui de Vira‐
cocha quand il a la révélation de l’existence de ce dieu. Il est le créateur véri‐
table de l’Empire inca par sa politique d’assimilation des populations conquises,
après les phases de conquêtes militaires. Alors que les Chancas assiègent Cuzco,
il se réfugie dans une place forte, semble prêt à renoncer à se battre. Son fils,
Pachacutec, prend la tête de l’armée, bat les Chancas, et le dépose. Avec son
règne s’ouvre la période de l’apogée du monde inca. Le futur Pachacutec
(1438-1471) est un prince ombrageux. Puis les règnes suivants poussent les li‐
mites de l’Empire jusqu’à la Bolivie, l’Équateur, le nord du Chili. Huayna Cá‐
pac, le « Jeune Magnifique » (1493-1527), consacre par son règne l’apogée de
la splendeur de l’Empire Inca, le Tahuantisuyu. Mais l’Empire inca repose sur
des bases fragiles. Sa structure de base est l’ayllu, ou communauté villageoise.
Les provinces sont gouvernées par des Curacas, nobles Incas qui les admi‐
nistrent. Le véritable ciment de cette mosaïque de groupes est religieux, c’est le
culte du Soleil, Inti. En 1527, Huayna Cápac meurt sans désigner de successeur.
Ses deux fils, Huascar et Atahualpa, se disputent le territoire pendant cinq ans.
En 1532, Huascar est éliminé, Atahualpa (1532-1533) est seul souverain. Il oc‐
cupe le nord de l’Empire inca lorsque son père Huayna Cápac décède. Son
demi-frère Huascar (1527-1532) est proclamé Sapa Inca, à Cuzco, appuyé par
les membres de la famille royale et la noblesse. Mais Atahualpa refuse de l’ac‐
cepter et entre en guerre. Cinq années de manœuvres et d’affrontements suivent,
avant que Huascar ne soit définitivement défait, non loin de Cuzco, en 1532.
Atahualpa devient Inca, le dernier. C’est à cette même date que Francisco Pi‐
zarro (v. 1475-1541) entre au Pérou. Par traîtrise, il s’empare d’Atahualpa. La
perte de l’Inca est une catastrophe pour son peuple. Une énorme rançon, consis‐
tant en une pièce entièrement remplie d’objets en or, est versée. Mais Pizarro
fait exécuter Atahualpa le 29 août 1533. Il faut quinze ans aux Espagnols pour
achever la conquête, facilitée par les ravages provoqués dans la population par
les maladies apportées par les Espagnols.
L’Empire inca s’incarne dans son souverain, l’Inca, à la fois chef de guerre et
plus haut dignitaire religieux, proche du divin. Si les sept premiers Incas ont
une existence légendaire en grande partie, certains de leurs successeurs vont
porter à son apogée le monde qu’ils dominent : Viracocha Inca (v. 1400-
1438), guerrier redoutable et réformateur religieux, Pachacuti Yupanqui, ou
Pachacutec (1438-1471), le « Réformateur du monde », Huayna Cápac
(1493-1527) dont le règne marque l’acmé de l’empire, Atahualpa (1532-1533)
enfin, l’infortuné dernier souverain. Le dieu dominant du panthéon inca est Inti,
le Soleil, concurrencé puis supplanté sous le règne de Pachacutec par un nou‐
veau démiurge, Viracocha, « le Créateur ». Un culte est rendu à d’autres divini‐
tés, Killa, la Lune, parèdre d’Inti, Illapa, l’éclair, ou encore Taguapica, le fils
maléfique de Viracocha, qui s’évertue à détruire au fur et à mesure ce qui est
créé par son père. Les sacrifices humains, plus rares que dans le monde aztèque,
font partie des rites, notamment lors de l’intronisation du nouvel Inca. Les
mythes évoquent la création du monde, celle des trois humanités successives,
quand la plus belle légende rend hommage à Manco Cápac, fondateur du monde
inca et de ses structures impériales. Les Vierges du Soleil, ou Accla, sont choi‐
sies à l’âge de huit ans pour devenir les compagnes du Soleil et les servantes de
l’Inca et de la famille royale. Elles vivent recluses dans des bâtiments spéciaux,
les acclahuasi, sous l’autorité de femmes plus âgées, les Mama Cuna. C’est par‐
mi les Accla que sont choisies les concubines de l’Inca, offertes également en
mariage aux princes étrangers auprès desquels l’empereur est désireux de s’allier
politiquement.
LA MUSIQUE INCA
4. La civilisation aztèque
Les Aztèques, connus également sous le nom de Mexicas, appartiennent ainsi
que les Chichimèques et les Toltèques au groupe des tribus nahuas, venues du
nord du Mexique, dont la langue commune est le nahuatl. Les Nahuas entament
leur migration vers le Mexique central actuel aux environs du VIe siècle. Il
semble que Chichimèques et Aztèques ne s’y dirigent pas avant le XIIe siècle.
L’origine exacte des Aztèques demeure sujette à interprétation. Les intéressés
eux-mêmes évoquent volontiers une origine mythique, une sortie du centre du
monde, le Chicomotzoc ou « Lieu des Sept Cavernes » ou une cité d’abondance,
Aztlán.
Les codex
Le Codex Mendoza est un document essentiel pour la compréhension de la culture az‐
tèque. Cet ouvrage de soixante-douze pages, réalisé en 1541 sur du papier européen, est
destiné à Charles Quint (1500-1558). Son nom lui vient de son commanditaire, Antonio
de Mendoza (1495-1552), vice-roi de la Nouvelle-Espagne. Il comporte trois parties, la
première évoquant l’histoire des Aztèques depuis la fondation en 1325 de Tenochtitlán,
jusqu’à la conquête de Hernán Cortés en 1521. La deuxième partie évoque le nom des
villes soumises par la triple alliance aztèque, qui regroupe Tenochtitlán, Texcoco et Tlaco‐
pan. La troisième concerne la vie quotidienne des Aztèques. Il existe d’autres codex
comme le Codex Aubin, de 1576, racontant l’histoire aztèque depuis ses débuts légen‐
daires jusqu’à la destruction de Tenochtitlán par les Espagnols, ou encore le Codex Fejer‐
vary-Mayer, le Codex Borbonicus. Les codex sont réalisés par des spécialistes, les tracui‐
lo, mot qui désigne à la fois le scribe et le peintre. Lors de la conquête espagnole, beau‐
coup sont brûlés, considérés comme païens. Par la suite, ceux appelés « codex colo‐
niaux » sont redessinés par les Indiens et annotés par des Espagnols. Aztlán, dans de
nombreux ouvrages dont le Codex Boturini, nom d’un célèbre collectionneur du
XVIIe siècle, aurait été une île située en plein milieu d’un lac. Son nom signifie « lieu de la
blancheur » ou « des hérons ». Aztlán était une ville pacifique, vouée à la déesse Coatli‐
cue, déesse de la Terre, mère de Huitzilopochtli, dieu de la Guerre et du Soleil. Cet éden
symbolique est recherché, dès le XVIe siècle, sans avoir été retrouvé avec certitude. On
cite souvent comme lieu possible l’île de Janitzio, au milieu du lac de Pátzcuaro, dans
l’État mexicain de Michoacán, ou celle de Mexcaltitan dans l’État de Nayarit.
Après une longue errance, les Aztèques nomades fondent leur capitale, Te‐
nochtitlán, en 1325, sur le site de la ville actuelle de Mexico. Le lieu ne doit
rien au hasard : les dieux l’ont choisi en se manifestant par un signe, celui d’un
aigle tenant en son bec un serpent, juché sur un cactus. Ce symbole orne tou‐
jours le drapeau mexicain actuel. Selon la légende, les Aztèques, désireux d’as‐
surer une descendance noble à leur ville, demandent au roi toltèque de Culhua‐
can son fils comme premier souverain. C’est ainsi que vers 1375, Acamapichtli
(v. 1375-v. 1395), dont le nom signifie « Celui qui empoigne le bâton » ou en‐
core « Poignée de roseaux » en nahuatl, devient roi, le premier roi prêtre des
Aztèques. Lorsque son fils Huitzilihuitl (v. 1395-1417) (Plume de colibri) lui
succède, les Aztèques se sont affirmés dans l’art de la guerre en combattant aux
côtés des Tépanèques. Marié à l’une des filles de Tezozomochtli (règne :
v. 1367-v. 1426), souverain d’Azcapotzalco, il obtient de ce dernier la diminu‐
tion des tributs à lui verser. C’est aussi une période de consolidation, de paix
avec leurs voisins. Désormais, les Aztèques sont prêts à dominer leur monde, le
Cem-Anahuac, le « Monde Unique ». Le rayonnement de l’Empire aztèque com‐
mence à la mort d’Itzcoatl en 1440. Tlacaelel est toujours conseiller du nouveau
roi Moctezuma Ier (1440-1469). Ils poursuivent l’expansion de l’Empire az‐
tèque en affrontant les Huastèques du Nord-Est et les Mixtèques du Centre-Est.
Jamais autant de richesses n’ont afflué vers la capitale, provenant des tributs
imposés aux régions soumises. Moctezuma II (v. 1480-1520), littéralement
Moctezuma Xocoyotzin (Celui qui se fâche en seigneur le plus jeune), devient
souverain en 1502 contre sa volonté. Il règne d’une façon autoritaire, réduit la
classe des guerriers et les prétentions de la noblesse, mais sait nommer au sein
de l’administration des hommes plus jeunes. Lorsque Cortés débarque avec ses
troupes, il est persuadé d’assister au retour de Quetzalcóatl. À cette occasion, il
fait de nombreux sacrifices humains, ce qui choque considérablement les Espa‐
gnols. La tradition raconte que, déjà prisonnier de Cortés à la suite de la prise
de Mexico en 1520, poussé à haranguer la foule d’un balcon du palais, il est tué
par une pierre lancée. Mais on n’a jamais su si celle-ci l’a été par un Espagnol ou
par un Aztèque, mécontent de la piètre représentation d’une autorité ou de la
collaboration avec l’ennemi. Son frère Cuitlahuac lui succède. L’arrivée des Es‐
pagnols a lieu le 8 novembre 1519 sous les règnes de Moctezuma II (1502-
1520) et de Cuitlahuac (1520). Ils leur prêtent allégeance, persuadés de se re‐
trouver en face du dieu Quetzalcóatl, revenu prendre possession de ses terres.
Bien que les forces de la triple alliance aztèque soient plus nombreuses que
celles des conquistadors, ceux-ci savent néanmoins se rallier les tribus Chalcas,
Tépanèques et Tlaxcaltèques qui refusent la domination aztèque. Les Espagnols
donnent l’assaut et rapidement la triple alliance est décimée. Quand Tenochtitlán
est définitivement pris le 13 août 1521, l’Empire aztèque s’effondre. Le dernier
tlatoani (empereur), Cuauhtémoc (1520-1525), est capturé, emprisonné, et
pendu en 1525. Cuauhtémoc, dont le nom signifie « aigle qui descend », est
connu pour avoir été le dernier des rois aztèques, mais aussi pour sa forte per‐
sonnalité qui n’a régné que quatre-vingts jours. Succédant à Cuitlahuac, l’his‐
toire l’a retenu comme celui qui se dresse contre les conquérants espagnols.
Après que Pedro de Alvarado a massacré à l’intérieur du Templo Major (le
Grand Temple) prêtres et nobles, il supporte un siège de soixante-quinze jours,
enfermé à l’intérieur de la capitale. Après avoir chassé les Espagnols de Tenoch‐
titlán, au cours de la Noche Triste, il est obligé de se rendre. La Noche Triste (la
nuit triste) est le nom donné à un épisode tragique de la conquête mexicaine par
Cortés. Le 30 juin 1520, les troupes commandées par Hernán Cortés sont mas‐
sacrées par les Aztèques dans leur ville de Tenochtitlán.
L’au-delà chez les Aztèques correspond à trois mondes : celui des guerriers,
des femmes en couches, est le plus enviable. Les deux autres sont le Tlalocan et
le Mictlan. L’au-delà des guerriers et des femmes mortes en couches est solaire,
les uns et les autres portent le palanquin du soleil, les femmes elles-mêmes de‐
venant guerriers. Passé un cycle de quatre années au service du soleil, ils re‐
viennent sur terre, sous la forme de colibris, oiseaux mouches, papillons. Le
Tlalocan est l’au-delà de Tlaloc, dieu de la Pluie, de l’Eau, de la Végétation. Il
accueille les noyés et tous ceux morts d’un accident lié à l’élément liquide. Les
défunts connaissent là une éternité de joie et de plaisirs au milieu d’une exubé‐
rante végétation. Le Mictlan, au Nord, accueille tous les autres trépassés, ceux
qui ne sont ni guerriers, ni femmes mortes en couches, ni élus de Tlaloc. Après
un voyage périlleux, le mort traverse les neuf fleuves des Enfers et gagne le
monde des neuf terres de la mort avec lequel il se fond totalement. Le monde
des ténèbres est régi par Mictlantecuhtli, maître des Enfers, seigneur de la mort.
L’Afrique médiévale
1. L’Éthiopie médiévale
LE SYSTÈME ROYAL
Il est très tôt influencé par la conversion des monarques au catholicisme : dès
la fin du XVe siècle. Le roi le plus notable de l’époque prend le nom d’Alfon‐
so Ier et règne de 1506 à 1543. Durant cette longue période, il entretient des
contacts étroits avec Rome et le Portugal. Il envoie même au Portugal une partie
de la jeunesse aristocratique, afin qu’elle y reçoive une formation dans l’art d’ad‐
ministrer et celui de combattre. C’est également à cette époque que s’établit, puis
s’intensifie, le trafic d’esclaves à partir du royaume du Kongo, au profit des né‐
griers de Lisbonne. Le roi du Kongo, qui porte le titre de manikongo, est placé,
et les successeurs d’Alfonso Ier le paient durement, dans une position fausse, car
il est à la fois un souverain coutumier et un roi catholique, soutenu, à partir du
XVIIe siècle, par la seule volonté des Portugais, mais privé de l’appui des élites
locales, entrées en rébellion. Cette situation, qui ne cesse de se dégrader, connaît
son épilogue lors de la bataille d’Ambuila, en octobre 1665, où le roi révolté,
Antonio, est écrasé par les Portugais, qui le décapitent. Après cette date, le
royaume du Kongo est déchiré entre les clans rivaux, qui accaparent tour à tour
brièvement la royauté, jusqu’à la fin du XIXe siècle, où les Européens font du
royaume du Kongo l’une de leurs colonies.
LA SOCIÉTÉ KONGOLAISE
Les arts du royaume du Kongo sont voués à la puissance du roi, des ancêtres,
de Dieu. Il s’agit principalement de statuettes de bois, mais aussi de bronze ou
de fer. Les artisans façonnent ainsi de nombreux fétiches, destinés au nganga,
médecin-magicien. Le fétiche sert de support à la guérison ou à l’envoûtement
de la personne représentée. Les statuettes de bois couvertes de clous de fer, de
coquillages, de colliers, de perles de pierres tendres sont caractéristiques des arts
du Kongo. L’apport chrétien est visible surtout dans l’orfèvrerie, par la réalisa‐
tion de croix pectorales, de statuettes en bois représentant les principaux saints.
Outre le royaume du Kongo, les peuples Bantous, probablement originaires des
régions du Cameroun et du Nigeria qui ont migré vers l’Afrique centrale et de
l’Est, fondent plusieurs États après le XIe siècle : royaumes du Monomopata, de
Kuba, de Luba, de Lunda, du Butua, Bamoun, Bamiléké. Au royaume du Mono‐
mopata, riche de ses mines d’or, un groupe de monuments remarquables est édi‐
fié, connu sous le nom de Grande Enceinte du Zimbabwe. La Grande Enceinte
du Zimbabwe domine, depuis un plateau situé au sud-est d’Harare, l’Empire
shona comprenant l’actuel Zimbabwe, l’est du Bostswana et le sud-est du Mo‐
zambique. C’est un vaste complexe de pierres de granite non cimentées, com‐
mencé vers 1100. La Grande Enceinte, haute de 10 m, englobait un espace de
250 m de diamètre. La réalisation de l’ensemble de la structure s’est étalée sur
environ un siècle : complexe de la Colline, complexe de la Vallée, Grande En‐
ceinte. Le premier est réservé au roi, ses conseillers, son médecin et les prêtres.
Souverain et religieux y entrent en communication avec les dieux. Le complexe
de la Vallée abrite les nobles, la Grande Enceinte est la demeure des épouses du
roi. Au total, le complexe du Grand Zimbabwe couvre 27 000 m2. Les gens du
peuple vivent à l’extérieur de ces trois ensembles. La population totale est éva‐
luée à environ cinq mille personnes. Cette impressionnante cité royale est aban‐
donnée lorsque sonne le glas de la puissance du Grand Zimbabwe, au milieu du
XVe siècle.
LA RELIGION DU KONGO
4. L’empire de Kanem-Bornou
L’empire de Kanem-Bornou ( IXe-XIXe s.) commence avec le royaume de Ka‐
nem, dans la région du lac Tchad. Depuis sa capitale, Ndjimi, le roi, ou maï de
la dynastie des Sefawa, contrôle une partie du commerce transsaharien. Aux
XVe et XVIe siècles, le centre du pouvoir se déplace vers le Bornou, plus à
l’Ouest, fondant un vaste empire islamisé du Soudan central. Le maï gouverne
appuyé par le Grand Conseil qui l’a choisi, mêlant membres de la famille royale
et aristocratie militaire. Des conseillers participent aussi au gouvernement, choi‐
sis à la fois parmi les libres, les kambé, et les esclaves, les katchella. L’aristocra‐
tie se voit confier par le roi l’administration des provinces. Au XVIe siècle, à son
apogée, le Kanem-Bornou fonde sa prospérité sur les caravanes transsaha‐
riennes et le commerce des esclaves. Au XIXe siècle, face aux menaces des Peuls,
le Kanem-Bornou perd sa souveraineté et disparaît en 1849.
5. Le royaume du Mali
La création de l’empire du Mali est inséparable de la personnalité de son fon‐
dateur, Soundiata Keita (1190-1255). À l’origine modeste souverain d’un petit
royaume d’Afrique occidentale, il a l’intelligence politique de profiter de la dé‐
composition de l’empire du Ghana pour s’en emparer en grande partie et se pro‐
clamer empereur du Mali avec le titre de Mansa, ou « roi des rois ». Il organise
son territoire au sein d’une fédération, exploite les mines d’or et le commerce
transsaharien. Musulman, il règne également sur des populations animistes et
pratique la tolérance en accordant la Charte du Mandem, texte qui reconnaît les
droits fondamentaux et abolit l’esclavage. Le royaume du Mali naît des dé‐
combres de celui du Ghana. Les fils de Keita lui succèdent. Kankan Moussa
(règne : 1312-1337) fait connaître à l’empire du Mali un âge d’or. Il est célèbre
pour le pèlerinage qu’il effectue à La Mecque entre 1324 et 1325. Sa richesse
est telle que sa suite se compose de centaines de chameaux chargés d’or, de
quelques milliers de personnes. Il fait de Tombouctou, sa capitale, un centre
économique, commercial et intellectuel.
8. L’Empire songhaï
L’Empire songhaï (XIVe-XVIe s.), à ses débuts dominé par l’empire du Mali,
connaît une période d’expansion durant les deux siècles suivants. Riche du com‐
merce transsaharien, il couvre le Niger, le Mali et une partie du Nigeria actuels.
Ses villes fameuses sont Gao et Tombouctou, qui attire les lettrés du monde
musulman par son rayonnement intellectuel, et les caravanes par son commerce
actif. Fondé au VIIe siècle, l’empire brille de tous ses feux avec la dynastie des
Sonni au XVe siècle. Ewuare le Grand (règne : v. 1440-v. 1473) est l’un des
plus grands obas, ou rois sacrés du Bénin. Fondateur de l’empire du Bénin, il est
renommé pour sa vaillance militaire et aurait soumis des centaines de chefferies
dans le sud du Nigeria. Il stabilise sa dynastie en instituant la succession hérédi‐
taire. Le pouvoir des chefs coutumiers, les uzamas, est diminué par la création
de nouveaux titres, dépendants du roi. Il fait de Edo (Benin City), sa capitale,
une forteresse capable de repousser les agressions éventuelles. Il inaugure un vé‐
ritable âge d’or de l’empire du Bénin. Au XVIe siècle, il centralise l’or venu du
Soudan, le sel convoyé depuis les mines de Teghazza au Sahara. Mais l’édifice
est fragile, en raison des luttes entre animistes et musulmans et de par la fai‐
blesse structurelle que représente la succession au trône, régulièrement disputée.
C’est ce problème qui finit par emporter l’Empire songhaï en 1591, écrasé par
les armées marocaines à la bataille de Tondibi. Mohammed Silla ou Touré
(1493-1528) fonde la dynastie musulmane des Askia et conduit l’Empire son‐
ghaï à son apogée. Il parvient au pouvoir, alors que, général, il renverse le fils
du dernier empereur de la dynastie Sonni.
9. L’architecture soudano-sahélienne
Représentée à Tombouctou, Djenné et Gao, l’architecture soudano-sahé‐
lienne repose sur la maîtrise de la brique de terre crue, l’adobe, appelée banco
en Afrique. La terre, choisie avec soin par les familles d’artisans du banco, est
malaxée, foulée aux pieds. Afin de la rendre plus solide, on y adjoint de la
paille. Puis on lui donne, à la main ou à l’aide d’un coffrage, une forme de petite
brique ou de boule. Les murs sont ensuite édifiés par ajout de couches succes‐
sives, séchées au soleil. Ils sont traversés de branches en saillie qui ont pour
fonction de consolider l’édifice et de permettre d’y grimper plus aisément quand
il faut le réparer après la saison des pluies. Djenné, au Mali actuel, abrite le plus
important édifice construit en terre crue, ou adobe, la Grande mosquée. Édifiée
au XIIIe siècle sur l’emplacement d’un ancien palais royal, elle est détruite par un
conquérant qui la remplace par un monument plus simple. C’est l’administration
coloniale française qui rebâtit le lieu de culte d’origine, à l’identique, entre 1906
et 1907. La grande façade est formée de trois tours séparées par cinq colonnes
en terre battue. Le mur d’enceinte est orné de cent piliers. Le banco est une
technique exigeante, d’autant qu’après chaque saison des pluies il faut réhabiliter
en partie la mosquée, dans une restauration-reconstruction permanente. Située
le long du fleuve Niger, au Mali actuel, Tombouctou est connue comme la
« perle du désert ». Fondée au Xe siècle par les Touaregs, son nom viendrait de
tin (le lieu) et de Bouctou, nom d’une vieille femme qui vivait là, selon une éty‐
mologie populaire. Il provient probablement plutôt du berbère buqt (lointain),
tin-buqt signifiant alors « le lieu lointain ». Successivement capitale des
royaumes et empires du Ghana, du Mali, Songhaï, elle passe sous domination
marocaine, puis française. Centre du commerce transsaharien, Tombouctou est
aussi la cité des lettrés, des érudits musulmans. En témoignent trois monuments
d’exception : la mosquée Jingereber, l’université Sankoré, avec sa mosquée, et la
mosquée Sidi Yahya.
La mosquée Jingereber est bâtie en 1327 sur un ordre de l’empereur du
Mali Kankan Moussa (règne : 1312-1337), qui verse 200 kg d’or à l’architecte
et maître d’œuvre Abu es-Haq es-Saheli . Si l’on excepte une petite partie de la
façade nord, tout l’édifice est en terre crue mêlée de paille hachée. Elle com‐
prend deux minarets, trois cours intérieures, vingt-cinq rangs de piliers alignés
est-ouest, peut accueillir deux mille fidèles. Inscrite depuis 1988 comme site
d’héritage mondial de l’Unesco, elle est également l’une des madrasas, ou écoles
coraniques, de l’université Sankoré. L’université Sankoré, ou Sankoré Masjid,
compose, avec les mosquées Jingereber et Sidi Yahya, l’université de Tombouc‐
tou. Elle est créée au XVe siècle, à l’initiative d’une pieuse femme. Bâtie de terre
et de sable, elle accueille jusqu’à vingt-cinq mille étudiants qui suivent des for‐
mations en droit, médecine, théologie, histoire. La mosquée Sidi Yahya, du
nom du professeur pour lequel elle fut fondée, avec sa madrasa, date du début
du XVe siècle. Sa forme générale rappelle celle des autres édifices religieux de
Tombouctou, dont elle diffère toutefois par une ornementation des portes qui
traduit une influence marocaine. Elle comporte trois rangs de piliers orientés
nord-sud, une cour principale située au sud, dominée par un minaret.
QUATRIÈME PARTIE
LA RENAISSANCE
CHAPITRE PREMIER
Dans ses Vies des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes (1550), le
peintre et architecte Giorgio Vasari (1511-1574) avait déjà mentionné une ri‐
nascita, une renaissance des arts qu’il opposait à la maniera gotica, le style go‐
thique, la barbarie artistique de l’époque postantique. En 1860, Jacob Burck‐
hardt sera le premier à insister sur la « Renaissance » en tant qu’époque de
l’histoire des civilisations et donc de l’art. Le terme français qu’il utilise sera re‐
traduit en italien par Rinascimento. La Renaissance doit être considérée comme
une période de rupture dans l’évolution des idées et des doctrines qui avaient
jusqu’alors dominé au Moyen Âge. L’unité de la chrétienté en sortira brisée. Dé‐
couvertes scientifiques, géographiques, innovations technologiques vont pro‐
duire un développement économique et démographique considérable. Les men‐
talités seront touchées également par ces différents bouleversements : l’élite va
s’engager dans ce puissant mouvement qui, parti d’Italie, gagnera toute l’Europe.
La Renaissance puise ses racines en profondeur sur l’immense territoire fertilisé
par Guillaume d’Ockham, Bacon, Dante ou même les premiers gnostiques
qui ont œuvré pour combler la séparation entre monde païen et monde chrétien.
Mais bien plus qu’une philosophie, on assiste à une attitude nouvelle dans la‐
quelle l’individu prime sur la société.
HUMANISME ET HUMANITÉS
LE NÉOPLATONISME
PENSER LE POLITIQUE
Le corps antique est une rencontre entre la conciliation d’un idéalisme et d’un
naturalisme qui caractérisera la période de la Renaissance. Mais la vie et le
mouvement l’emportent, même si ils sont torturés comme dans les corps vus par
Michel-Ange. Les artistes tels Botticelli, Raphaël recherchent une expression
totale dans les visages, reflétant l’harmonie du monde. La recherche ne porte
pas uniquement sur le corps lui-même, mais dans l’espace, dans lequel il se si‐
tue, considéré à son tour comme objet d’étude, en dehors de toutes qualités sen‐
sorielles. L’espace, comme le corps qu’il met en scène, est représentable et me‐
surable. Peu à peu, il deviendra discipline géométrique avec la perspective co‐
nique. À la différence de Florence qui développe une perspective plus linéaire,
Venise développera une perspective plus aérienne, fondée sur le rôle de la lu‐
mière. Le maniérisme montrera une nouvelle approche du corps où celui-ci
pour les besoins de l’art sera déformé en courbe, ou allongé, Bronzino (1503-
1572), ou illustré en une exubérance de formes contournées, le Pontormo
(1495-1557) en peinture. L’érotisme des corps domine, mais aussi l’imaginaire
avec Arcimboldo (1527-1593). Le style de Titien (v. 1488-1576) montrera
l’influence du maniérisme sur les corps par des raccourcis audacieux, des fi‐
gures tourmentées dans une lumière contrastée. Il saura mettre en valeur la
splendeur des corps par les paysages, dégageant une intense sensualité. La Re‐
naissance nous aura donc appris à concevoir l’œuvre d’art en tant qu’image
concentrée de la réalité, vue sous un seul angle, une structure formelle qui
émerge de la tension entre le vaste monde et le sujet intégral opposé à ce
monde. Le maniérisme analysé, parfois, comme une période de transition vers
le baroque va briser cette unité de l’espace, héritée de la période précédente.
Le corps de l’autre
L’origine du refus du corps pourrait se situer vers le XIIIe siècle avec l’appari‐
tion des ordres mendiants. Le corps sera, alors, ravalé au niveau de chair, parce
que lieu du péché originel, et, si elle n’est pas foncièrement mauvaise, elle reste
précaire. La Renaissance s’impose dans la littérature comme une redécouverte
du corps sous toutes ses formes. En ce qui concerne le corps de l’autre, les In‐
diens ramenés en Europe posent la problématique question à Valladolid de sa‐
voir s’ils ont une âme. « Tous les hommes que j’ai vus, raconte Christophe Co‐
lomb dans son livre de bord, étaient tous très bien faits, très beaux de corps et
avenants de visage avec des cheveux quasi aussi gros que de la soie de la queue
des chevaux, courts et qu’ils portent tombants jusqu’aux sourcils […]. Certains
d’entre eux se peignent le corps en brun et ils sont tous comme les Canariens, ni
nègres, ni blancs, d’autres se peignent seulement le tour des yeux et d’autres
seulement le nez5. » Le corps surgit du passé avec le retour aux Antiquités
grecque et romaine, par la découverte de statues. Comment s’établit le contact ?
Pierre Clastres indique que, de Montaigne à Diderot et Rousseau, on ne
manqua pas de rappeler que le vrai barbare n’était pas celui que l’on croyait. Des
civilisations d’une grande sagesse furent ainsi découvertes, mais il y eut une
« différence entre la manière dont s’opéraient la rencontre et le contact de l’Eu‐
rope avec les primitifs et la fonction que ceux-ci assumèrent, dès leur décou‐
verte, dans la pensée de certains écrivains… C’est une critique politique ou mo‐
rale de leur propre société que nous offrent les poètes et les philosophes6 ».
Aristote dans sa Poétique et Horace dans l’Art poétique avaient déjà exposé
l’ensemble des règles censées régir la création artistique et posé que l’idéal était
de reproduire la nature. La mimesis, doctrine de l’imitation, va donc s’élaborer
en cherchant à représenter les formes visibles d’une nature prodigue qu’Aristote
appellera la nature naturée, ou la nature naturante, qui porte par ses opérations
créatrices tout être vers la plénitude de sa forme visible. Les théoriciens de la
Renaissance, tel Pietro Dolce (XVIe s.), auteur du premier grand traité huma‐
niste de peinture, estiment qu’il faut s’efforcer d’imiter la nature, mais aussi la
dépasser. Cela n’est possible que pour le corps en mouvement, sinon, il faut se
référer aux statues antiques, détentrices de l’idéal du Beau. Alberti nous met en
garde, car « les éléments de beauté ne se trouvent pas rassemblés dans un corps
unique ; ils sont au contraire rares et dispersés en grand nombre7 ». De la Re‐
naissance au XIXe siècle, la mimesis deviendra pour la plupart des artistes
l’axiome de référence. Au XVIe siècle, le statut du corps s’en trouve modifié, il se
dénude, bien que l’art de cette période reste chrétien, il continue de raconter
la Passion, mais il montre le corps du Christ, celui des saints dénudés. Le corps
grec est de retour à travers une vision tout à fait chrétienne, mais aussi l’idée
d’une correspondance entre littérature et peinture énoncée dans le célèbre Ut
pictura poesis (La Peinture est comme la poésie) d’Horace : « Il en est d’une
poésie comme d’une peinture : telle vue de près, captive davantage, telle autre
vue de plus loin. L’une veut le demi-jour, l’autre la lumière, car elle ne redoute
pas le regard perçant du critique, l’une a plu une fois, l’autre, si l’on revient dix
fois, plaira encore8. » Cette conception de correspondances entre les diffé‐
rents arts marquera profondément les artistes de la Renaissance. Jusqu’au
XVIIIe siècle, les artistes penseront que le problème sera de délimiter les fron‐
tières communes de la littérature et de la peinture pour se demander, au siècle
suivant, quel devait être le rapport entre le fond et la forme, de l’imagination et
de l’imitation. Pourtant, cet humanisme n’aura en peinture que peu de répercus‐
sions, hormis sur quelques peintres, Léonard de Vinci (1452-1519), Botticelli
(1445-1510), Michel-Ange (1475-1564). Ce siècle retrouvera le naturalisme
qui avait su donner une plastique particulière à la figure humaine. Peut-on dire
que les formes antiques renaissent en Occident à partir du XVIe siècle ? L’antique
va être modifié dans le sens où il est mis au service du dieu chrétien, aussi ne
peut-on parler de résurrection de formes. À la fois guide et porte, la période an‐
tique va susciter, à travers une recherche d’équilibre et d’harmonie, un désir de
retourner à la nature. L’identité humaine doit s’intégrer parfaitement dans celle
de la nature. L’artiste doit obtenir une « sympathie » entre la nature humaine et
la nature cosmique. Les caricatures réalisées vers 1490 illustrent bien cette re‐
cherche de vie et d’individualité. L’artiste devient un vrai savant. Le Saint Jé‐
rôme de Léonard de Vinci en est un exemple flagrant, l’anatomie de celui-ci, dé‐
crite avec soin, permet de mieux saisir l’extrême tension intérieure par celle, agi‐
tée, des tendons et nerfs. Les études musculaires réalisées par Michel-Ange,
pour la Sibylle de Libye de la Sixtine, montrent l’importance accordée à l’archi‐
tecture humaine. Les muscles saillants, les torses tournés sont utilisés pour
mettre en valeur un geste, une intention, servent même à devenir le pivot d’une
composition et à en rythmer le mouvement comme dans Le Jugement dernier.
Les études physionomiques, en parallèle de la recherche de plus en plus impor‐
tante accordée à la représentation du mouvement, triomphent dans la dernière
œuvre florentine de Léonard de Vinci : la fresque aujourd’hui perdue de la ba‐
taille d’Anghiari, commencée en 1504. Il ne nous est parvenu que des copies du
carton, dont la plus célèbre est celle de Rubens au Louvre. Cette œuvre a été
commandée par la République. Il s’agit d’une illustration véritablement scienti‐
fique « de la folle bestialité9 » dont parle Dante, au sens littéral de l’identité des
réactions psychophysiques de l’homme, image de Dieu, et celles de la bête brute
sans âme. Michel-Ange reprend plus tard cette conception du tourbillon
« violent et enchaîné ».
Les éléments moteurs : cadavres, statuaire antique et proportions
3. L’art en Italie
LES PRÉCURSEURS ARTISTIQUES DU DUECENTO ET DU TRECEN‐
TO
Le trecento désigne l’art toscan entre 1300 et 1400. Pour certains spécialistes
en art, la Renaissance débute au XIVe siècle avec les prodigieuses œuvres de
Giotto di Bondone. Quant aux autres, ils considèrent cet artiste comme isolé et
ne font débuter le style Renaissance qu’avec la génération d’artistes en activité à
Florence au début du XVe siècle, d’où cette dénomination de pré-Renaissance.
L’art, à travers les pinceaux des maîtres, s’exprime d’une façon nouvelle. Le
Moyen Âge avait inventé la personne humaine, mais ignorait l’individu,
l’homme original. On glisse d’une peinture de « l’âme » à une peinture de « l’es‐
prit ». Tout va s’ordonner autour de l’homme, peu à peu, en fonction de sa vi‐
sion individuelle. La peinture florentine est à la pointe de ce mouvement artis‐
tique. Trois peintres s’imposent plus particulièrement :
◆ Giotto di Bondone (v. 1266-1337) sera le père de la peinture moderne,
jusqu’au milieu du XIXe siècle. Pendant près de sept siècles, Giotto a été considé‐
ré comme le père de la peinture européenne et le premier des grands maîtres
italiens. Contrairement à la peinture antique à fresque, il dispose ses scènes fi‐
guratives dans un cadre carré où toutes les directions essentielles deviennent les
bases de la composition : c’est ce qui permettra l’apparition du tableau auto‐
nome au sens moderne du terme. Tout accessoire à l’intérieur y est éliminé, l’ac‐
tion centrée sur son sujet, ainsi Le Baiser de Judas, fresque de la chapelle de
l’Arena, Padoue. De grandes nouveautés sont introduites, notamment la règle
d’isocéphalie, qui prône une hauteur commune pour la tête des personnages fi‐
gurés, mais le peintre parvient à une synthèse avec la tradition gothique. Par ses
peintures, il raconte les miracles de saint François en de larges fresques, qui ont
trouvé place dans la basilique Saint-François. La majorité des scènes, la plupart
du temps narratives, sont révolutionnaires dans leur expression de la réalité et
de l’humanité. Dans celles-ci, l’accent est mis sur le moment dramatique de
chaque situation, incorporant des détails précis tout en priviligiant une réalité
intérieure, une émotion humaine renforcée par des gestes et des regards cru‐
ciaux comme la Vie de saint François à Assise et église Santa Croce à Florence,
Scènes de la vie du Christ, à l’Arena de Padoue, pour la chapelle des Scrovegni.
◆ Cimabue (v. 1240-1302), maître de Giotto, puise son inspiration à la
source byzantine qui l’a formé. Considéré comme le disciple de Giunta Pisano
(première moitié du XIIIe s.), Cimabue est influencé ensuite par les nouvelles
tendances de son époque et suit les traces de Coppo di Marcovaldo (1225-
1280) et du Romain Pietro Cavallini. Cimabue semble également avoir été l’un
des premiers à reconnaître les potentialités de l’architecture peinte, qu’il intro‐
duit dans ses scènes afin de fournir une indication sur le lieu et de mettre en évi‐
dence un sens aigu de la tridimensionnalité. Malgré le petit nombre d’œuvres de
Cimabue qui nous soit parvenu, il soutient pleinement la réputation que l’artiste
a acquise. Avec la représentation des crucifix et des retables de grande taille, Ci‐
mabue reste très proche de la tradition byzantine. Enfin, il a apporté à la pein‐
ture italienne une nouvelle prise de conscience de l’espace et de la forme sculp‐
turale.
◆ La sculpture est représentée par Nicola Pisano (v. 1210-av. 1284), qui
révèle son nouveau style classique. Celui-ci reste en effet fidèle aux canons de la
tradition byzantine, tout en la portant à sa capacité d’expression maximale et en
se lançant dans une recherche innovatrice sur les formes et sur les couleurs. Au‐
cun travail ne peut certainement être attribué à Pisano avant sa chaire de la ca‐
thédrale de Pise (1259-1260). La chaire de Pise marque l’un des moments ex‐
traordinaires dans l’histoire de l’art occidental avec l’élaboration d’un nouveau
style, distinct de tous ses prédécesseurs, mais qui s’inspire néanmoins de la
sculpture gothique française et de l’architecture.
LE QUATTROCENTO
L’architecture du quattrocento
À Florence
À Venise
La peinture du quattrocento
À Florence
À Mantoue
À Pérouse
À Pise
La sculpture du quattrocento
LE QUINTECENTO
La peinture du quintecento
À Rome
À Florence et à Venise
– Andrea del Sarto (1486-1531) fut un peintre et dessinateur italien dont les
œuvres de composition exquise ont joué un rôle dans le développement du ma‐
niérisme florentin. Son œuvre la plus frappante, entre autres œuvres connues, est
la série de fresques sur la vie de saint Jean-Baptiste dans le cloître du Scalzo
(v. 1515-1526) en Toscane. Il opte pour des coloris chauds, des Vierges au sou‐
rire délicat : L’Annonciation (1528), La Madone des Harpies (1517).
– Antonio Allegri (v. 1489-1534) dit le Corrège, du nom de son village na‐
tal, aime les formes gracieuses et arrondies des anges et des cupidons : Vierge à
l’enfant avec saint Jean (1515), La Madone de Saint-François (1515). Il est sans
doute l’un des plus importants peintres de la Renaissance de l’école de Parme,
dont les œuvres influenceront le style baroque et rococo de nombreux artistes.
– Giovanni Bellini (v. 1425-1516). On en sait peu sur la famille Bellini. Son
père, Jacopo, un peintre, était un élève de Gentile da Fabriano. Il introduit les
principes de la Renaissance florentine à Venise avant l’un de ses fils. En dehors
de son frère Gentile, Giovanni est considéré comme le précurseur de l’école vé‐
nitienne. Son style retraduit tout l’intérêt que les artistes vénitiens de la Renais‐
sance pouvaient porter en matière de recherche stylistique. Il fut d’abord in‐
fluencé par le style du gothique tardif de son père Jacopo. Ses premiers travaux
seront a tempera, peinture dans laquelle est utilisée une émulsion pour lier les
pigments. Pendant cinq ans, de 1470 à 1475, à Rimini, il peint la Pala di San
Francesco. Il subit tout d’abord l’influence de Mantegna dans ses figures lourdes
et anguleuses, mais ce sont surtout ses relations avec les écoles transalpines qui
présentent une certaine importance. Peu à peu ses lignes vont s’adoucir et il va
trouver une harmonie entre ses personnages et la composition de ses tableaux.
L’influence flamande se fait sentir aussi dans son œuvre la Pietà de Brera
(1455-1460). Il peindra à la fin de sa vie de magnifiques portraits, Le Doge
Leonardo Loredan. Parmi l’ensemble des œuvres, il faut noter : La Résurrection
du Christ (1475-1479), Allégorie sacrée (1490-1500), L’Assomption (1513),
Jeune femme à sa toilette (1515).
Dans les années 1520, le maniérisme s’impose jusqu’aux débuts du style ba‐
roque, autour de 1620. Le style maniériste originaire de Florence et de Rome se
propage en Italie du Nord, puis dans une grande partie du centre et du nord de
l’Europe. Ce style est une réaction à l’harmonie du classicisme et l’esthétique de
la Renaissance, qui avaient trouvé en Léonard de Vinci, Michel-Ange et Ra‐
phaël leurs meilleurs interprètes. Les peintres maniéristes développent un style
caractérisé par l’artificialité, l’élégance, la facilité technique. Les membres des
personnages représentés sont allongés, les têtes petites et les traits du visage sty‐
lisés, tandis que leur pose semble souvent artificielle. Ils cherchent également
une amélioration continue de la forme et du concept, poussant l’exagération et
le contraste jusqu’à leurs ultimes limites. Les principaux représentants de cette
période sont : Bronzino (1503-1572), Giorgio Vasari (1511-1574), le Tinto‐
ret (1519-1594), Véronèse (1528-1588), le Pontormo (1495-1557).
Les caractéristiques du style maniériste :
– la recherche du mouvement ;
– la déformation et la torsion des corps ;
– la modification des proportions des parties du corps ;
– la perte de clarté et de cohérence de l’image ;
– la multiplication des éléments et des plans ;
– une symbolique complexe qui se réfère à des domaines méconnus au‐
jourd’hui (alchimie, art du blason, langage des fleurs, etc.) ;
– le goût prononcé pour un érotisme esthétisant ;
– le goût des schémas sinueux, dont la « figure serpentine » (en S) ;
– les contrastes de tons acides et crus ;
– l’allongement des formes.
Au XXe siècle, Arcimboldo (1527-1593) a fait l’admiration des peintres sur‐
réalistes, notamment Dalí, pour ses compositions étranges en fruits, légumes di‐
vers qui, regroupés, donnent l’aspect d’un visage humain. Arcimboldo put déve‐
lopper son talent lorsqu’il fut invité à la cour de Vienne entre 1565 et 1587 par
l’empereur Maximilien II. Ses têtes composées s’organiseront en séries allégo‐
riques : les quatre saisons, les quatre éléments : Allégorie de l’été, Allégorie de
l’eau.
Mais les œuvres les plus délicates, annonciatrices du maniérisme, se
trouvent chez :
◆ Francesco Mazzola (1503-1540), surnommé le Parmigianino (le Par‐
mesan), originaire de Parme. Inspiré par Michel-Ange, il lui emprunte sa figure
serpentine, visible dans la Vierge à l’enfant avec des saints, mais surtout dans La
Madone au long cou. Dans la décennie qui suit la mort de Raphaël, entre 1520
et 1530, le style de la haute Renaissance tourne au maniérisme. Florence dé‐
clenche le mouvement avec Michel-Ange. Pour la première fois, il tourne les
formes et les proportions artistiques renaissantes dans le sens d’une expérience
personnelle. De l’intérêt qui caractérisait la Renaissance pour l’individuel, on
dérive au particulier. Le principe du maniérisme, considéré comme un pro‐
cessus de déclin au XVIIe siècle, est énoncé par Giovan Pietro Bellori (1613-
1696) dans sa biographie d’Annibal Carrache. Vasari entend par maniera l’indi‐
vidualité artistique. Le maniérisme va commencer par détruire la structure de
l’espace acquise par la Renaissance. La scène sera figurée en fragments séparés.
◆ Vittore Carpaccio (v. 1460-1526) fut le peintre attitré des confréries de
marchands qui faisaient peindre certains épisodes de leur vie. Parmi quelques-
unes de ses œuvres : La Visitation (1509), La Naissance de la Vierge (1504). Il
est célèbre pour avoir peint des spectacles, des défilés et autres rassemblements
publics qui se distinguent par la richesse de leurs détails réalistes, leurs colora‐
tions et les récits dramatiques.
◆ Giorgio da Castelfranco dit Giorgione (1477-1510) inaugure, par son
œuvre, un nouveau style et ouvre un chapitre de la peinture que Manet fermera.
Influencé par Léonard de Vinci, il utilise le sfumato. Avec La Vénus endormie
(1508-1510), il fait apparaître un nouveau type de femme qui inspirera les nus
féminins de Titien, Vélasquez, Goya et Manet : Titien avec Le Concert cham‐
pêtre, Manet avec Le Déjeuner sur l’herbe, dans une scène de conception plus
réaliste. Parmi ses principales œuvres notons aussi La Tempête (1507), qui
marque une étape importante dans la peinture de paysage de la Renaissance, et
Les Trois Philosophes (1509). Giorgione fait franchir une étape à la peinture vé‐
nitienne par l’utilisation de son sfumato, de la lumière, et une conception mo‐
derne du paysage. Il est aussi le premier, dans ses portraits, à traduire, à faire
ressortir la psychologie du modèle et son caractère.
La crise du maniérisme, entre 1530 et 1540, est surmontée par le génie de
Titien qui est le premier des peintres car ses pinceaux semblent enfanter sans
cesse des signes expressifs de vie.
◆ Titien (v. 1488-1576), Tiziano Vecellio, se différencie tout de suite de son
maître Giorgione. Sa peinture est plus humaine, plus terrestre, et évolue dans
une magie de couleurs. Les paysages sont plus réels (Baptême du Christ, 1512)
et il y mêle des éléments empruntés soit à la mythologie, soit à la vie quoti‐
dienne. Aux environs de 1515, ses compositions deviennent plus souples, plus
amples. Le style de Titien fait revivre une nouvelle nature. L’influence du ma‐
niérisme se traduit dans sa peinture par des raccourcis audacieux, des figures
tourmentées dans une lumière contrastée, comme son portrait de Charles Quint.
Les dernières œuvres qu’il réalise avec ces procédés lumineux annoncent avec
cent ans d’avance l’art de Rembrandt. Titien fait naître un art nouveau, par des
moyens expressifs sans cesse renouvelés, dans lequel l’homme et la nature s’in‐
terpénètrent. Dessins et reliefs se perdent dans la couleur et deviennent à leur
tour couleur. Parmi ses principales œuvres, notons : La Vénus d’Urbino (1538),
Portrait de l’Arétin (1545).
◆ Paolo Caliari, dit Véronèse (1528-1588), essaie lui aussi de résoudre les
problèmes posés par la lumière et les formes, mais, à travers ceux-ci, il met en
scène la joie des sens. La jouissance esthétique est un des buts qu’il s’impose et
ses sujets mythologiques sont souvent prétexte à louer les formes généreuses
des Vénitiennes de son temps, comme dans Le Repas chez Lévi (1573) et Les
Noces de Cana (1562-1563).
◆ Quant au Tintoret (1519-1594), Jacopo Robusti, il est entrevu comme
une sorte de précurseur des peintres modernes. Ses études préliminaires, rapide‐
ment esquissées, ne lui laissent pas toujours le temps de dessiner, et les formes
jaillissent sur la toile spontanément sous son pinceau. Néanmoins, pour parvenir
à sa prodigieuse connaissance de l’anatomie, il prend modèle sur les sculptures
de Michel-Ange, comme la Suzanne au bain (1560-1562). Il nous révèle la vi‐
sion d’une humanité complexe et variée que l’on ne trouve pas chez Michel-
Ange. D’autres peintres maniéristes traduisent dans leurs œuvres la transition
qui s’opère.
◆ Michelangelo Merisi ou Merighi, dit le Caravage (v. 1571-1610), sera
l’un des peintres les plus importants de la transition que constitue le maniérisme.
Italien du Nord, irascible et violent, il sera sans cesse impliqué tout au long de
sa vie dans des querelles, des rixes sanglantes. Sa force réside surtout dans son
réalisme froid et observateur qui caractérise même ses portraits de saints, ce qui
suscitera l’indignation du clergé. Il innove tout particulièrement par l’utilisation
de la lumière, génératrice de formes et qui dramatise le sujet. L’éclairage
contrasté reste son principal moyen d’expression. En effet, il est connu pour ses
compositions simples où la lumière latérale provoque une forte opposition entre
les zones illuminées et les ombres. Ses dernières œuvres montrent déjà une in‐
fluence du baroque par l’abolition de la dynamique des corps et d’un espace
créateur qui enveloppe les figures. Parmi ses œuvres, relevons : Le Repos pen‐
dant la fuite en Égypte (1597), Corbeille de fruits (1595-1596), Bacchus (1594)
et La Décapitation de saint Jean-Baptiste (1608).
Parmi les sculpteurs maniéristes, il faut compter :
◆ Benvenuto Cellini (1500-1571) : son Persée en bronze est la première
sculpture conçue en fonction de l’espace et en trois dimensions. Il réalise aussi
la Salière de François Ier.
◆ Jean Bologne (1529-1608), qui crée des statues s’élevant en spirales que
l’on peut contempler en trois dimensions et conçues en fonction de l’espace : la
Fontaine de Neptune (1463-1487), à Bologne, L’Enlèvement des Sabines (1575-
1580).
Nicolas Machiavel
Notes
1. Albert Labarre, Histoire du livre, Paris, Puf, « Que sais-je ? », 1985, p. 85.
2. Giordano Bruno, De l’infini, de l’univers et des mondes, Œuvres complètes, vol. IV, trad. Jean-Pierre
Cavaillé, Paris, Les Belles Lettres, 2003, p. 172-174, p. 248-250 et p. 82-84.
3. Giorgio Vasari, La Vie des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, traduction française et édition
commentée sous la direction d’André Chastel, Paris, Berger-Levrault, « Arts », 12 vol., 1981-1989.
4. « Ainsi naît l’idée des “Beaux Arts” bien qu’il faille attendre jusqu’au milieu du XVIe siècle pour qu’ils
soient désignés par une seule et unique appellation “arti di diseguo”. En même temps les critiques en ar‐
rivent à l’idée de l’œuvre d’art comme quelque chose de distinct d’un objet défini par son utilité pratique,
comme quelque chose que sa seule beauté justifie, comme produit de luxe. » Anthony Blunt, La Théorie
des arts en Italie de 1450 à 1600, Paris, Gallimard, 1966, p. 99.
5. Christophe Colomb, Journal de bord, Paris, Maspero, 1979, p. 179.
6. Pierre Clastres, « Entre silence et dialogue », in L’Arc, no 26, 1968.
7. Leon Battista Alberti, De la peinture, LII, 44.
8. Horace, Art poétique, v. 361-365.
9. Dante, L’Enfer, XI, 82.
10. Cennino Cennini, Le Livre de l’art ou traité de la peinture [1437], Paris, F. de Nobele, 1978.
11. Albrecht Dürer, Lettres, écrits théoriques. Traité des proportions, textes traduits et présentés par
Pierre Vaisse, Paris, Hermann, « Miroirs de l’art », 1964 ; Géométrie, éd. et trad. Jeanne Peiffer, Paris, Le
Seuil, « Sources du Savoir », 1995.
12. René Huyghe, Dialogue avec le visible, Paris, Flammarion, 1993, p. 63.
13. Cité par Georges Minois, L’Âge d’or. Histoire de la poursuite du bonheur, Paris, Fayard, 2009,
p. 165.
14. Cité par André Chastel, in Marsile Ficin et l’art, Genève, Droz, 2000, p. 92.
CHAPITRE II
La France
Charles VIII (1483-1498) devient roi à l’âge de treize ans. La régence est
exercée par sa sœur aînée, Anne de Beaujeu, qui est contrainte de convoquer les
états généraux à Tours en 1484. Vaine réunion, ceux-ci n’obtiennent rien, au
contraire la régente en profite pour renforcer la monarchie, réprimer les troubles
féodaux. En 1488, Charles VIII épouse Anne de Bretagne et devient duc de
Bretagne, au moins en titre. En 1495, en qualité d’héritier du testament du der‐
nier roi de Naples en faveur de son père Louis XI, Charles VIII entreprend les
guerres d’Italie. Il prend Naples mais se heurte à la Sainte Ligue de Venise re‐
groupant le futur empereur Maximilien Ier et le roi Ferdinand II d’Aragon. En
1497, battues en Italie du Nord, les troupes françaises capitulent. Charles VIII
meurt en 1498 en heurtant violemment de la tête un linteau de pierre d’une
porte du château d’Amboise. Il est le dernier Valois direct. Son cousin, un Va‐
lois-Orléans, le duc Louis d’Orléans, lui succède sous le nom de Louis XII
(1498-1515).
LOUIS XII ET LE RÊVE ITALIEN
Louis XII (1498-1515) épouse à son tour Anne de Bretagne (1514), veuve
de son prédécesseur. À la mort de cette dernière, faute d’héritier pour le duché,
la Bretagne est rattachée à la France. Le nouveau souverain reprend les guerres
d’Italie, réclame Naples mais aussi Milan, se veut « roi de France, de Naples et
de Jérusalem, duc de Milan ». Il prend Milan en 1500, occupe Rome et Naples
l’année suivante. Dès 1504, les Espagnols reprennent Naples. Le pape Jules II a
organisé contre la France la Sainte Ligue qui regroupe Venise, l’Espagne, Hen‐
ri VIII d’Angleterre. Le jeune et brillant Gaston de Foix (1489-1512), neveu du
roi, remporte une victoire à Ravenne en 1512, mais y perd la vie. Ensuite les
défaites se succèdent, en 1515 toute l’Italie est de nouveau perdue. Le 1er jan‐
vier 1515, Louis XII meurt à Paris. Sans fils pour lui succéder, la couronne re‐
vient à une autre branche des Valois, les Valois-Angoulême, avec François Ier
(1515-1547).
En octobre 1534 éclate l’affaire des Placards : des libelles reprochant au roi
son inconduite, ses maîtresses et attaquant violemment la messe sont apposés
dans les rues de Paris, Tours, Orléans et jusque sur la porte de la chambre du roi
à Amboise. Ce dernier, plutôt tolérant jusqu’alors, entame une politique de per‐
sécution. Les protestants risquent le bûcher. Le ferment des guerres de Religion
est en place. Par l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539, le français devient
langue obligatoire de tous les actes administratifs et juridiques du royaume,
remplaçant le latin. Elle impose aussi l’enregistrement des baptisés par les
prêtres, premier stade du futur état-civil. Au grand scandale des autres mo‐
narques catholiques, François Ier se rapproche des Turcs dans les Capitulations,
traité signé définitivement après sa mort, en 1569. La France obtient le droit
d’envoyer ses navires dans les ports turcs, les Échelles du Levant, ou escales de
l’Est. Le sultan lui reconnaît aussi un droit de protection des catholiques au sein
de son propre empire.
CHARLES IX ET LA SAINT-BARTHÉLEMY
Son frère, élu roi de Pologne en 1573, rentre en France après s’être enfui de
Cracovie et devient Henri III (1574-1589). Intelligent, cultivé, tête politique, il
doit affronter à la fois la Sainte Ligue d’Henri de Guise (1550-1588) dit « le
Balafré » – dont le but depuis sa création en 1576 est d’extirper définitivement
le protestantisme en France avec l’aide du pape et du roi d’Espagne –, les Mal‐
contents, aristocrates de vieille souche opposés aux hommes nouveaux de la
cour, groupés autour du dernier frère, François d’Alençon (1555-1584), tou‐
jours prêt à comploter et à vendre son ralliement momentané le plus cher pos‐
sible quitte à s’allier aux protestants, et ces derniers enfin, avec à leur tête le
prince de Condé, Henri Ier de Bourbon (1552-1588), et son cousin Henri, roi de
Navarre. L’édit de Beaulieu (1576) se veut pourtant apaisant. Le culte protestant
est reconnu et de nombreuses garanties sont accordées. Mais dès l’année sui‐
vante, l’édit de Poitiers (1577) les restreint. Cela n’empêche en rien les combats
de se poursuivre. La situation se complique après la mort de François d’Alen‐
çon. L’héritier du trône est désormais le protestant Henri de Navarre. En 1585,
contraint par le duc de Guise, Henri III signe le traité de Nemours par lequel il
déclare la guerre à son héritier et promet de chasser les protestants du royaume.
En octobre 1587, la bataille de Coutras est un désastre pour l’armée catholique
du roi, balayée par celle d’Henri de Navarre. Henri de Guise en profite pour
soulever Paris à son profit. Le roi, après l’insurrection de la journée des Barri‐
cades (12 mai 1588), fuit Paris pour Chartres. Il convoque les états généraux à
Blois. C’est là, en décembre, qu’il fait assassiner le duc de Guise et son frère, le
cardinal de Guise. Paris prend la tête de la révolte, Henri III ne contrôle plus
guère que quelques villes de province. En avril 1589, il se réconcilie avec Henri
de Navarre. En août de la même année, Henri III est tué d’un coup de couteau à
Saint-Cloud, d’où il assiège Paris, par un moine fanatique : Jacques Clément.
LE MANIÉRISME EN FRANCE
C’est ainsi que naît un des premiers foyers de maniérisme en Europe. L’in‐
fluence italienne se fait sentir aussi par l’arrivée d’autres artistes que François Ier
fait venir : Léonard de Vinci qui meurt près d’Amboise, en 1519 au Clos Lucé,
deux ans après son arrivée, et Andrea del Sarto (1486-1531). Pendant ce
temps, il Rosso apporte des réminiscences de Michel-Ange et le Primatice une
douce langueur qu’il doit à Raphaël. L’école de Fontainebleau nous a laissé des
œuvres telles que la Diane chasseresse, le portrait de Diane de Poitiers, celui de
Gabrielle d’Estrée, avec son Gabrielle d’Estrée au bain avec sa sœur, la du‐
chesse de Villars, révèle un érotisme froid. Deux peintres français rejoignent le
groupe, Antoine Caron (v. 1520-v. 1599) avec Les Funérailles de l’Amour, et
Jean Cousin (v. 1490-v. 1560) avec son Eva Prima Pandora. Sous Henri III
et Henri IV, une nouvelle génération d’artistes fait son apparition. Toussaint
Dubreuil (v. 1561-1602) exécute le portrait d’Henri IV en Hercule ; Martin
Fréminet (1567-1619), considéré comme le dernier grand peintre de l’école de
Fontainebleau, décore la voûte de la chapelle de la Trinité au château de Fontai‐
nebleau. Les peintres des Valois sont Jean Clouet (v. 1485-v. 1540) et Fran‐
çois Clouet (v. 1510-1572), qui restent complètement étrangers aux influences
italiennes et nous laissent au contraire des portraits d’inspiration flamande
(Diane de Poitiers).
L’ÉCOLE DE FONTAINEBLEAU
Les guerres d’Italie, menées à la fin du XVe siècle et au début du XVIe siècle
par les souverains français, Charles VIII, Louis XII, puis François Ier, per‐
mettent à ceux-ci de côtoyer le raffinement d’une civilisation nouvelle qui éclot
en Italie du Nord : la Renaissance. L’aristocratie française après les guerres
d’Italie ramène en France de nombreux artistes qui vont importer les idées de la
Renaissance italienne. Leur désir de mener une vie insouciante va conduire de
nombreux seigneurs à bâtir des résidences à la campagne tandis que les plus
riches se font construire des châteaux où le luxe remplace l’armement défensif
devenu inutile.
De retour en France, éblouis par la lumière de Florence, de Milan, ou de
Rome, les princes veulent à leur tour marquer leur époque de bâtiments nou‐
veaux. Ce sont sur les rives de la Loire, sur lesquelles les princes résident volon‐
tiers, ou à proximité, que vont s’édifier palais et châteaux. Brusquement, dans la
tiédeur des étés ligériens, la France passe du château-fort à la résidence de plai‐
sir d’une cour raffinée. Dans les châteaux construits vers 1495 sous
Charles VIII (1483-1498), comme Amboise (1495-1498), se combinent cré‐
neaux, tourelles, fenêtres à croisillons avec l’arc de plein cintre, façades à colon‐
nades et frontons triangulaires. Les principaux châteaux édifiés sur les bords de
la Loire sous Louis XII (1498-1515) et sous François Ier (1515-1547) sont
Azay-le-Rideau (1518-1524), Chenonceau (1515-1581) avec sa galerie de Phi‐
libert Delorme, et Blois avec son aile François Ier (1515).
Cependant le plus grand château de la Renaissance reste Chambord (1519-
1560) : 156 m par 117 m avec 56 m de hauteur au clocheton central, 28 m au
niveau des terrasses, comprenant quatre cent quarante pièces, soixante-quatorze
escaliers et trois cent soixante-cinq cheminées, édifié d’après des plans italiens,
dont un de Léonard de Vinci. Le maître d’œuvre en est François de Pont‐
briand (1445-1521) qui, pendant quinze ans, emploie mille cinq cents ouvriers.
À partir de 1525, en France, les résidences princières se multiplient : La
Muette, Fontainebleau. Le château de Madrid, à Boulogne, montre une nouvelle
façon de concevoir la décoration. Édifice à loggia, il est décoré de terres cuites.
Il est démoli en 1792. D’autres châteaux illustrent, en dehors du Val de Loire ou
de Fontainebleau, l’architecture de la Renaissance. Ainsi, le château d’Écouen,
construit sur l’ordre d’Anne de Montmorency (1493-1567), connétable du roi,
maréchal de France ; en s’inspirant du château de Bury, il se fit en plusieurs
étapes. Actuellement ce château abrite le musée de la Renaissance en France.
Les architectes de grand renom
Paradoxalement, les guerres d’Italie menées par Charles VIII et ses succes‐
seurs donnent naissance à une longue tradition d’accueil de l’art italien à la cour
de France. Le Val de Loire et la Normandie deviennent les premiers centres de
diffusion de ces nouveaux styles. Vers le milieu du XVIe siècle, Philibert De‐
lorme (1514-1570) et Pierre Bontemps (v. 1507-apr. 1563) font évoluer la
sculpture vers une plus grande complexité, comme le montre le modèle des
tombeaux royaux, avec l’arc de triomphe du tombeau de François Ier, à l’abba‐
tiale de Saint-Denis. Ces nouveaux artistes se révèlent à la fois théoriciens et
praticiens. Ainsi Jean Goujon (v. 1510-v. 1566), auteur de la fontaine des
Saints-Innocents, à Paris, ou Germain Pilon (v. 1525-1590), sculpteur des
Trois Parques et du tombeau de Catherine de Médicis.
BRIGADE ET PLÉIADE
Vers 1547, un groupe de jeunes gens signe le manifeste d’une nouvelle école,
par la plume de Joachim Du Bellay, qui rédige sa Défense et illustration de la
langue française, parue en 1549. Ce groupe se donne le nom de Pléiade. La dé‐
fense de la langue française a pour but de lutter contre les auteurs qui utilisent
systématiquement le latin en référence à l’Antiquité. Du Bellay estime qu’il est
nécessaire de produire des œuvres aussi importantes en langue française. Il s’agit
également de promouvoir une nouvelle forme de poésie, sans se référer à celle
de l’époque médiévale. Cette poésie, à la fois faite de formes nouvelles, comme
le sonnet, retrouve les thèmes d’inspiration des Anciens, de l’Antiquité classique.
Le terme de Pléiade a été utilisé pour vaincre l’ignorance et l’arrogance des dis‐
ciples de l’humaniste Jean Dorat (1508-1588). Ce sont sept écrivains qui, sous
la direction de Pierre de Ronsard, ont eu pour but d’élever la langue française au
niveau des langues classiques. Voulant apporter de nouveaux mots à la langue
française, ils se tournent vers l’imitation des Anciens. En 1553, Ronsard choisit
sept d’entre eux, leur nombre n’étant pas sans évoquer la Pléiade mythologique
des sept filles d’Atlas, changées en constellation, et surtout la Pléiade des sept
poètes alexandrins du IIIe siècle avant J.-C. sous le règne de Ptolémée II.
La seule forme de sonnet non antique qu’ils admettent est celui imité de Pé‐
trarque. Du Bellay, dans la Défense et illustration de la langue française, préco‐
nise l’enrichissement de la langue française par l’imitation discrète et l’emprunt
des formes linguistiques et littéraires des classiques et des œuvres de la Renais‐
sance italienne, y compris des formes telles que l’ode d’Horace et de Pindare,
l’épopée virgilienne, et le sonnet de Pétrarque. Les sept qui acceptent sont :
Ronsard (1524-1585), Du Bellay (1522-1560), Jean Antoine de Baïf (1532-
1589), Étienne Jodelle (1532-1573), Jean Bastier de La Péruse (1529-
1554), remplacé en 1554 par Rémi Belleau (1528-1577), s’y associent Pontus
de Tyard (1521-1605) et Guillaume Des Autels (1529-1581) auquel succède
Jacques Peletier du Mans (1517-1582), remplacé à sa mort par Jean Dorat
(1508-1588).
Du Bellay a également encouragé la renaissance de mots français archaïques,
l’incorporation des mots et des expressions du patois, l’utilisation de termes
techniques dans des contextes littéraires, la frappe des mots nouveaux, et le dé‐
veloppement de nouvelles formes de la poésie. Les écrivains de la Pléiade sont
considérés comme les premiers représentants de la poésie de la Renaissance
française, la raison étant qu’ils remettent au jour l’alexandrin, forme dominante
poétique de cette période. Ils se regroupent au collège de Coqueret, situé dans
le quartier Latin. Cette brigade d’un nouveau genre se révèle être une école fé‐
dérée par la même volonté de rénover les formes poétiques : à côté d’une inspi‐
ration libre pour l’imitation des Anciens, les poètes se mettent au service d’une
langue volontiers érudite. Leurs principales œuvres sont : de Baïf : Les Amours
(1552), Les Jeux (1572) ; Du Bellay : Défense et illustration de la langue fran‐
çaise (1549), L’Olive (1550), Les Antiquités de Rome (1558), Les Regrets
(1558) ; Ronsard : Abrégé de l’art poétique français (1565), Discours (1562-
1563), Odes (1550-1552), Hymnes (1556), Les Amours (1552).
◆ Pierre de Ronsard (1524-1585) est considéré comme le chef de file de la
Pléiade. Son œuvre peut se diviser en trois périodes. Jusqu’en 1559, elle est
marquée par l’influence de l’Antiquité et de l’Italie. Il publie des livres d’Odes,
imitées du poète grec Pindare ou du poète latin Horace. Entre 1560 et 1574,
Ronsard est poète de cour. Il rédige les Discours des misères de ce temps, les
Élégies, mascarades et bergeries. La dernière période de son existence, de 1574
à 1585, est consacrée à une retraite dans le prieuré de Saint-Cosme-les-Tours. À
cette époque, Ronsard compose le recueil connu sous le nom des Amours d’Hé‐
lène. Au groupe de la Pléiade, on doit opposer celui des « écrivains combat‐
tants ». Ils ne recherchent pas tant dans l’Antiquité leur inspiration ou dans la
poésie de l’Italie de la Renaissance la forme à suivre. Le fait essentiel dans leurs
écrits est de peindre à la fois le milieu militaire auxquels ils appartiennent sou‐
vent et de promouvoir leur religion. Il s’agit donc soit de catholiques demeurés
convaincus, soit de nouveaux protestants.
◆ Joachim du Bellay (1522-1560) est un maître du sonnet, bien qu’il ait
exercé la carrière diplomatique au début de sa vie. En 1549, il compose L’Olive,
recueil de sonnets imités de Pétrarque, suivis en 1558 des Antiquités de Rome et
des Regrets. Dans les Regrets, poèmes de la séparation et de l’exil, Du Bellay
montre que cette séparation permet à l’être de se découvrir lui-même. Toute la
thématique de ces poèmes tourne autour du voyage, du retour, de l’expérience
malheureuse. Lorsqu’il publie son manifeste, il entre en guerre contre le latin et
la langue de Jean de Meung, de Villon, de Marot.
Les Essais
Le terme « essai », qui n’avait alors jamais encore été utilisé dans son sens
moderne pour un genre philosophique ou littéraire, prend chez Montaigne le
sens d’une attitude intellectuelle de questionnement et d’évaluation continue.
Tout au long de ses écrits, comme il l’a fait dans sa vie privée et publique, il ma‐
nifeste la nécessité d’entretenir des liens avec le monde, les autres et les événe‐
ments. Nous assistons à un va-et-vient entre l’intériorité de l’individu et l’exté‐
riorité du monde. Il utilise l’image de l’arrière-salle : les êtres humains ont leur
chambre à l’avant, donnant sur la rue, où ils se rencontrent et interagissent avec
les autres, mais ils ont aussi parfois besoin de pouvoir se retirer dans la salle du
fond, la leur, où ils peuvent réaffirmer leur liberté par la réflexion sur les aléas
de l’expérience. Dans ce cadre, il préconise les voyages, la lecture, surtout celle
des livres d’histoire, et les conversations avec des amis. Mais il est impossible de
parvenir à une connaissance complète. Il fait sienne l’interrogation philoso‐
phique du sceptique Sextus Empiricus : « que sais-je ? », pour relativiser tout
savoir. Il étend néanmoins sa curiosité aux habitants du Nouveau Monde, dont il
fait la connaissance avec la rencontre en 1562 de trois Indiens du Brésil que
l’explorateur Nicolas Durand de Villegagnon avait ramenés en France. Mon‐
taigne donne ici un rare exemple de relativisme culturel et de tolérance pour son
époque, et estime que ces personnes sont, dans leur fidélité à leur nature, leur
dignité, bien supérieures aux Européens qui ont montré qui étaient les vrais bar‐
bares avec la conquête violente du Nouveau Monde et leurs guerres internes.
Tout au long de son travail le corps occupe une place importante, à travers ses
vastes interrogations sur la maladie, la vieillesse et la mort. La présence de cette
dernière imprègne les Essais, et Montaigne veut se familiariser avec elle, à la
manière des stoïciens ou des épicuriens.
Rénovation de la pédagogie
LA POÉSIE LYONNAISE
Josquin des Près (v. 1440-v. 1521) figure au nombre des plus grands com‐
positeurs de la Renaissance. Après une formation à la cathédrale de Cambrai, il
entre au service du roi René d’Anjou, mécène avisé, puis à celui du pape, pour
sa chapelle privée. Lors de son séjour en Italie, il sert également les cours prin‐
cières de Milan et de Ferrare. Il laisse vingt messes, des motets marqués par un
sens aigu de la déploration et le recours aux graves, de nombreuses chansons. Il
reprend les techniques du canon et du contrepoint, utilisés pour la musique reli‐
gieuse, en les adaptant aux œuvres profanes. L’imprimerie en plein essor, la dif‐
fusion des psaumes chantés par les protestants, puis les effets de la Contre-Ré‐
forme catholique contribuent à donner à la musique une place nouvelle, relayée
par les écoles des Pays-Bas, de Paris, de la Loire. Outre Roland de Lassus
(v. 1532-1594), les autres musiciens d’importance sont : Antoine Brumel
(1460-1525), Pierre de La Rue (v. 1460-1518), Loyset Compère (v. 1450-
1518), Jacob Obrecht (1450-1505). Les instruments sont le luth, la harpe,
l’orgue. Les danses sont à la mode, avec la pavane, la gaillarde ou l’allemande.
Notes
1. Le nom de « grands rhétoriqueurs » concerne une douzaine de poètes regroupés auprès des ducs de
Bourgogne, Bretagne et des rois de France. Leur poésie sera tournée en discrédit par la génération de
1530-1550 parce que tenue pour une démonstration de virtuosité creuse.
2. • Les « placards » sont des libelles, favorables à la Réforme, affichés (placardés) jusque sur la porte de
la chambre du roi. Cette maladresse irrite François Ier, auparavant tolérant à l’égard des idées religieuses
nouvelles.
3. Prologue de Gargantua.
CHAPITRE III
L’Espagne
Miguel de Cervantès
Le théâtre espagnol
Lors de la fin du XVe siècle et des premières décennies du XVIe siècle, les Fla‐
mands restent encore très attachés au maniérisme du gothique tardif. Hierony‐
mus van Aken, Jérôme Bosch (v. 1450-v. 1516), voit plusieurs étapes jalonner
sa peinture : tout d’abord L’Extraction de la pierre de folie (1485), on extrait une
pierre du cerveau d’un fou, puis La Crucifixion (1480-1485), La Table des sept
péchés capitaux (1485), La Nef des fous (1490-1500). Au fur et à mesure qu’il
trouve des thèmes plus riches en fantasme, ses couleurs le deviennent aussi, ses
scènes plus compliquées : Le Jardin des délices. Son originalité le place en de‐
hors de toute influence extérieure. Il a su traduire, en se libérant du réel, l’an‐
goisse et la terreur du péché. Jan Gossaert dit Mabuse (v. 1478-1532) traite de
thèmes mythologiques (Neptune et Amphitrite, Hercule et Omphale). Le manié‐
risme va s’épanouir avec l’Amsterdanois Lambert Sustris (v. 1515-v. 1584),
disciple de Titien, puis avec Bartholomeus Spranger (1546-1611), dont
l’œuvre sera connue surtout à travers les gravures de Hendrik Golzius (1558-
1617). Pieter Brueghel l’Ancien (v. 1525-1569) tire de l’oubli les œuvres de
Jérôme Bosch et trouve en lui une grande source d’inspiration. Nous ne possé‐
dons de lui qu’une trentaine d’œuvres, la série consacrée aux mois de l’année (La
Rentrée des troupeaux), les sujets concernant les paraboles (La Parabole des
aveugles, La Parabole du semeur) ou l’évocation des fêtes villageoises (Le Repas
de noce) et des sujets fabuleux (La Tour de Babel). Ses fils Brueghel d’Enfer
(1564-1638) et Brueghel de Velours (1568-1625) imitent son art.
Notes
1. Les principaux représentants, outre Cranach l’Ancien, en sont Albrecht Altdorfer (1480-1538) et
Wolf Huber (1490-1553).
CHAPITRE V
L’Angleterre
L’activité de la sculpture est limitée par la proscription des images dans les
sanctuaires à l’ornementation funéraire. Pourtant Henri VIII s’intéresse aux nou‐
velles idées esthétiques apportées par l’art de la Renaissance. De nombreux ar‐
tistes italiens s’installent autour de Londres et Southampton, principalement des
sculpteurs. Les tombes et les chapelles funéraires à l’italienne datent de ce roi,
celle de Margaret Beaufort (1443-1509), sa grand-mère, sculptée en 1511 par
Pietro Torrigiani (1472-1528), mais surtout celles d’Henri VII et d’Élisabeth
d’York (1512), son épouse, à l’abbaye de Westminster. D’une façon générale,
l’impact de la Renaissance italienne sur la sculpture funéraire demeure superfi‐
ciel. Les sculpteurs anglais montrent plus de talent dans la décoration, le plafond
de Hampton Court, les stalles du King’s College à Cambridge, en 1536.
Notes
1. À ce sujet, voir Jean-François Pépin, « Shakespeare », in Encyclopædia Universalis.
CHAPITRE VI
L’Allemagne
Luther et la grâce
ZWINGLI
Le concile de Trente est convoqué par le pape Paul III en 1542 et s’ouvre en
1545, pour durer jusqu’en 1563, à Trente dans le Tyrol. Le concile a pour but
d’opérer la réforme des abus et d’assurer la précision du dogme. La première
session amène la formulation d’une doctrine de la Contre-Réforme et la promul‐
gation d’un certain nombre de décrets d’autoréformation. C’est au cours de cette
même session qu’il est décidé de confronter la tradition de l’Église avec les
Saintes Écritures, afin d’en retrancher ce qui ne leur serait pas conforme. La
deuxième session dure de 1551 à 1552, et elle est dominée, avec la troisième
(1562-1563), par l’influence des jésuites, qui accélèrent la réforme interne. La
grâce est définie comme un don de Dieu, mais l’homme conserve la liberté de la
refuser. Les sept sacrements sont conservés, les offices sont toujours dits en la‐
tin et non dans les diverses langues nationales, le texte de référence pour la
Bible demeure la Vulgate. L’autorité pontificale est réaffirmée, ainsi que l’obli‐
gation de célibat faite aux prêtres. Des écoles de théologie, les séminaires (le
petit et le grand), sont ouvertes pour former les futurs prêtres à leurs devoirs, et
leur enseigner une véritable culture religieuse. Ouvertes dans chaque diocèse,
ces écoles sont placées sous l’autorité épiscopale. Parallèlement à cette action
réformatrice, la papauté entreprend de lutter contre les hérésies en restaurant
l’Inquisition, qui passe sous son contrôle. Les pontificats de Paul IV (1555-
1559) et de Pie V (1566-1572) sont marqués par un retour accentué à l’austéri‐
té de la cour romaine. Pie V forme une commission de cardinaux, la congréga‐
tion de l’Index, et la charge de dresser la liste des ouvrages dangereux pour la
foi, dont la lecture est interdite aux fidèles. Les décisions de la commission en‐
traînent dans les États catholiques l’interdiction de vente et de diffusion. Le re‐
nouveau de l’Église passe par la création de nouveaux ordres comme celui des
Théatins, ordre né de la volonté de l’évêque Carapa de Chieti (Chieti en latin :
Theatinus), futur pape Paul IV, bientôt doublé par la création de l’ordre féminin
correspondant. Les Théatins ont pour but essentiel la pratique quotidienne de la
charité, la propagation et le soutien de la foi aussi bien que l’assistance aux ma‐
lades. Après une vie nobiliaire, Ignace de Loyola (1491-1556) fonde en 1535
la Compagnie de Jésus. À l’origine les jésuites sont six amis qui ont effectué en‐
semble leurs études de théologie, mais le groupe s’étoffe lors de leur installation
à Rome en 1539. Le pape Paul III approuve les statuts de la compagnie en
1540. Les jésuites font vœu de pauvreté, de célibat et d’obéissance. L’autorité
supérieure est dévolue au pape, qui la délègue à un général, élu à vie par les
principaux membres de l’ordre. Ignace de Loyola est le premier général de la
compagnie. Le rôle des jésuites est prédominant dans le renouveau du catholi‐
cisme militant ; éducateurs, ils dispensent un excellent enseignement secon‐
daire, théologiens, ils font reculer le protestantisme dans les Pays-Bas, les états
rhénans, en Bavière, en Autriche. Organisés en une véritable armée, ce que le
titre de « général » de leur supérieur vient souligner, les jésuites se livrent à l’ac‐
tion missionnaire, et ils évangélisent le Brésil, le Pérou, à la suite de saint Fran‐
çois Xavier, parti en 1541 pour la Chine et le Japon. Leur vœu d’obéissance par‐
ticulier, qui les place sous l’autorité pontificale directement, en fait les cham‐
pions de Rome et des idées ultramontaines, favorables à l’autorité du Saint-
Siège, ce qui leur vaut en France l’hostilité ouverte des Parlements et de l’Uni‐
versité, défenseurs du gallicanisme, ou suprématie du roi sur l’Église de France.
En fondant une congrégation de prêtres séculiers réalisée sur le principe de l’au‐
tonomie absolue de chaque maison, l’absence de vœux et la liberté intérieure,
saint Philippe Néri (1515-1595), avec l’Oratoire, est à l’opposé des jésuites.
L’élément d’union, l’amour fraternel, et non l’obéissance commune, permet à la
congrégation de s’étendre rapidement en Europe, puis en Amérique du Sud et
en Extrême-Orient. La Contre-Réforme voit la naissance de nombreux ordres et
congrégations : les Oblats par saint Charles Borromée (1578), les Pères de la
Bonne Mort par saint Camille de Lellis (1584), la Trappe (Trappistes) en
1664. Le renouveau du sentiment religieux a permis de considérer la période
qui s’étend entre 1560 et 1660 comme un véritable « siècle des saints ».
L’époque baroque est marquée par deux grandes figures mystiques : saint
François de Sales (1567-1622) et saint Vincent de Paul (1581-1660). Saint
François de Sales crée en 1618 l’Ordre de la Visitation, dont les membres
doivent pratiquer dans le siècle la charité, alliée à la prière intérieure. L’approba‐
tion papale n’est obtenue qu’en modifiant le projet de saint François de Sales,
pour faire de la Visitation un ordre uniquement contemplatif. La pratique active
de la charité chrétienne, l’intervention directe sur les maux du siècle reviennent
à saint Vincent de Paul, aumônier des galères royales. Il est le fondateur de deux
ordres : les lazaristes et les Filles de la Charité. La Contre-Réforme donne nais‐
sance, tout au long du XVIIe et du XVIIIe siècle, à des mouvements religieux po‐
pulaires, notamment le quiétisme et le piétisme. Ces deux doctrines réclament
une disponibilité totale pour la méditation religieuse. La contemplation perma‐
nente de Dieu est l’activité essentielle du croyant. Les deux formes de pensée se
séparent toutefois sur des points de dogme, car le piétisme protestant valorise
les relations de fraternité directe entre les fidèles, là où le quiétisme catholique
laisse une part importante à la direction morale de l’Église établie.
L’ANGLICANISME
C’est en 1526 que le roi Henri VIII (1491-1547) d’Angleterre décide de ren‐
voyer sa femme Catherine d’Aragon, déjà veuve de son frère aîné Arthur, qu’il
avait épousée en secondes noces. Le pape refuse d’annuler leur mariage, annula‐
tion que le souverain obtient en 1532 du nouvel archevêque de Canterbury,
Thomas Cranmer. La rupture officielle avec Rome survient par la promulgation
par le Parlement, le 30 avril 1534, de l’Acte de Suprématie, qui fait du roi le
chef de l’Église d’Angleterre. Les ecclésiastiques du royaume sont tenus de prê‐
ter serment d’obéissance et de fidélité au roi, en sa qualité de tête de l’Église an‐
glicane, ceux qui s’y refusent, comme l’évêque Fisher, de Rochester, ou le chan‐
celier Thomas More sont exécutés, le premier le 22 juin, le second le 6 juillet
1535. Henri VIII utilise sa nouvelle autorité religieuse pour dissoudre les com‐
munautés, et rattacher leurs biens à ceux de la couronne. Le schisme anglican
est une manifestation profondément nationale, le remariage du roi avec sa favo‐
rite Anne Boleyn ressort davantage du prétexte, son action est soutenue ferme‐
ment par le Parlement, la résistance épiscopale est brisée par la force. Seule l’Ir‐
lande refuse de rompre avec Rome et demeure dans l’obédience du catholicisme
romain.
Notes
1. Cité par Georges Casalis, Luther et l’église confessante, Paris, Le Seuil, 1963, p. 40.
CINQUIÈME PARTIE
L’ÉPOQUE MODERNE
A. LE MONDE DU XVIIe SIÈCLE
CHAPITRE PREMIER
Parmi les peintres du XVIe siècle, nous devons tout particulièrement étudier
d’abord le Caravage (v. 1571-1610), car il opère un retour à la réalité et s’at‐
taque aux formes plastiques et à la pureté idéale de la Renaissance. Toute l’his‐
toire de l’art sacré moderne commence avec lui en fondant ses bases sur la pri‐
mauté des formes. Il transforme les allégories complexes des maniéristes en
symboles et réalise ainsi une distinction élémentaire entre art sacré et art pro‐
fane. Son contact avec la vérité des épisodes sacrés exprime la tendance reli‐
gieuse de la Contre-Réforme. Grâce aux contrastes d’ombres et de lumières, il
met en scène une violence intérieure qui annonce dans la même lignée Zurbarán
(1598-1664), en Espagne, et Georges de La Tour (1593-1652), en France.
Mais l’art baroque trouve avec Vélasquez (1599-1660) le moyen de privilégier
l’impression sur la conception. La forme prédomine sur les contours qu’elle es‐
tompe peu à peu. Les Vénitiens ont donné naissance à ce « premier impression‐
nisme » et la courbe supplante la ligne droite. Rubens (1577-1640) joue avec
les lignes onduleuses et figure comme le grand peintre d’extérieur de l’histoire
de l’art. C’est en cela qu’il est résolument moderne. Sa liberté le rapproche de
Renoir, et peut-être plus près encore de nous, de Matisse. La peinture de pay‐
sage progresse et le paysage sauvage de l’école de Barbizon nous vient de Hol‐
lande et d’Angleterre, par Ruisdael (v. 1628-1682). Rome a atteint le plus haut
prestige après la Contre-Réforme, avec ses papes bâtisseurs, le prestige de
Saint-Pierre. Deux courants vont apparaître, le premier réaliste autour du Ca‐
ravage, le second autour des frères Carrache avec l’éclectisme décoratif.
◆ Le Caravage (v. 1571-1610) : son naturalisme, ses cadrages insolites, son
réalisme mordant, la particularité de son éclairage lui vaudront très rapidement
un grand succès. Sa vie dissolue, riche en scandales, lui vaudra condamnation à
mort, emprisonnement. Il prend ses modèles dans la rue, dans les bas-fonds
(des valets, des paysans). Le réalisme des personnages, leur attitude dynamique,
toujours en mouvement, sinon sur le point de bouger, l’adoption d’une palette
sombre rompue par des éclats violents de lumière constituent une révolution ra‐
dicale par rapport à ce qui existait. Si Léonard de Vinci a toujours opposé
l’ombre jointe à l’ombre portée, à partir de Caravage, ce que l’on recherche, c’est
l’ombre forte en contraste avec la lumière. Ceux qui s’inspirent de lui n’aiment
pas non plus les vastes panoramas, la scène se rapproche du spectateur, les fi‐
gures sont montrées grandeur nature, en entier ou à mi-corps. Le caravagisme,
le courant issu de son art, correspond aux huit dernières années du XVIe siècle et
aux dix premières du XVIIe, à ses périodes d’activité. Le mouvement se perpétue
jusqu’en 1620. Ses grandes œuvres sont les tableaux La Vocation de saint Mat‐
thieu (1600) de la chapelle Contarelli, La Diseuse de bonne aventure (1594),
Corbeille de fruits, première nature morte, en 1596, dans l’histoire de la pein‐
ture, Bacchus adolescent (1596), La Mort de la Vierge (1605-1606), Le Souper
d’Emmaüs (1601). Ses disciples seront Orazio Borgianni (v. 1578-1616), Bar‐
tolomeo Manfredi (1582-1622) et Orazio Gentileschi (1563-1647).
◆ Les Carrache, Annibal (1560-1609), Augustin (1557-1602), Ludovic
(1555-1619), influencés par les artistes de Parme et notamment le Parmesan et
le Corrège, reviennent à une peinture idéalisée. Les Carrache fondent, sous
l’influence notamment de l’archevêque Paleotte, l’Accademia degli Incamminati,
institution bolognaise qui n’est pas simplement vouée à la peinture, mais aussi à
la médecine, la philosophie et l’astronomie. La finalité en est de former des ar‐
tistes cultivés, tout en reposant sur trois points fondamentaux : le retour à l’étude
de la nature, l’étude de l’antique à la recherche du beau idéal, l’étude des grands
maîtres du passé. À Bologne, Annibal peint des portraits, des paysages, des
scènes de genre. Avec ses deux frères, il réalise les décors des palais Fava et
Magnani, 1584 et 1587. L’invitation du cardinal Farnèse amène Annibal à
Rome, pour y décorer son palais. Il s’occupe du cabinet, le camerino, sur le
thème de la légende d’Hercule, et la voûte de la galerie Farnèse qui célèbre le
triomphe de l’amour. Son style, à la différence de celui du Caravage, évolue vers
un plus grand classicisme. En dehors du palais Farnèse, d’autres œuvres lui sont
attribuées : L’Assomption (1590), L’Apparition de la Vierge à Luc (1592), La
Pêche (1595), La Chasse (1582-1588), L’Homme au singe (1591), Le Buveur
(1560-1609).
La musique baroque se développe entre 1600 et 1750 environ, elle cède en‐
suite la place à la musique classique. Il s’agit à l’origine d’une réaction, née en
Italie, contre les formes anciennes, celles qui ont traversé tout le XVIe siècle,
abandonnées au profit des formes nouvelles. C’est l’opéra qui représente le
mieux la rupture, les récitatifs parlés y sont remplacés par le chant. Le premier
auteur notable d’opéra est Claudio Monteverdi (1567-1643), avec son Orfeo
(1607) et son Arianna (1608). L’opéra est introduit en France en 1647, il s’y
illustre avec les compositions de Jean-Baptiste Lully (1632-1687) et celles de
Jean-Philippe Rameau (1683-1764). D’autres genres se développent, comme les
cantates dont la forme est fixée par Giacomo Carissimi (1605-1674) et illus‐
trée par Alessandro Scarlatti (1660-1725) ou Heinrich Schütz (1585-1672),
ou les oratorios, construits comme les opéras sur les alternances d’airs, de
chœur, de récitatifs instrumentaux. La sonate et le concerto font leur apparition.
Si la musique de chambre et orchestrale est dominée par les Italiens, tel Anto‐
nio Vivaldi (1678-1748), elle s’inscrit pleinement dans les variantes nationales
dues au talent de Henry Purcell (1659-1695) en Angleterre ou de François
Couperin (1668-1733) en France. L’ère de la musique baroque connaît son
apogée avec les compositions de Jean-Sébastien Bach (1685-1750) et celles de
Georg Friedrich Haendel (1685-1759), tous deux luthériens allemands, tous
deux organistes, le premier maître des cantates, compositions liturgiques, le se‐
cond variant de l’opéra à l’oratorio, aux compositions davantage profanes. La
musique classique couvre la période comprise depuis la seconde moitié du
XVIIIe siècle jusqu’à la fin du XIXe siècle environ. Elle se démarque des courants
précédents par une aspiration à toucher un public plus étendu, dans une dé‐
marche proche des aspirations à donner un rôle véritable au peuple issue des
mouvements révolutionnaires. La symphonie en devient l’expression, au début
simple construction d’ouverture fondée sur l’alternance de mouvements rapide,
lent, rapide. Le concerto acquiert sa forme classique, la musique de chambre
s’étoffe du quartet à cordes. L’opéra entame son âge d’or, avec Gluck (1714-
1787) et son Orphée et Eurydice de 1762, les genres de l’opéra-comique et de
l’opéra bouffe. Le passage d’un opéra proprement italien à sa variante alle‐
mande se fait par un passeur de génie, Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
et ses œuvres majeures : Les Noces de Figaro (1786), Don Giovanni (1787) en
italien, La Flûte enchantée (1791) en allemand. L’époque suivante, bien qu’ap‐
partenant encore au classique au sens large, s’en démarque cependant par les in‐
fluences véhiculées par le romantisme.
CHAPITRE II
RÉVOLTES ET COMPLOTS
LE RÈGNE PERSONNEL
LES GUERRES
Le début du règne est marqué par les guerres : guerre de Dévolution (1667-
1668) ayant pour but de faire respecter les droits dévolus à Marie-Thérèse de
son héritage espagnol, opposant la France à la Triple Alliance (Angleterre, Hol‐
lande, Suède) ; guerre contre les Pays-Bas (1672-1679) afin d’affaiblir ces alliés
de l’Angleterre et briser un concurrent économique. En 1668, la paix d’Aix-la-
Chapelle conclut la première, la France annexe Lille. En 1679, les traités de Ni‐
mègue laissent les Pays-Bas entiers, l’Espagne cède à la France la Franche-
Comté. L’ensemble du règne est émaillé de conflits telles la guerre de la ligue
d’Augsbourg (1689-1697) – paix de Ryswick (1697) marquant l’arrêt de l’ex‐
pansionnisme français –, la guerre de Succession d’Espagne (1702-1712) – les
traités d’Utrecht (1713) et de Radstadt (1714) reconnaissant le trône d’Espagne
à Philippe d’Anjou, petit-fils de Louis XIV, devenu en 1700 le roi d’Espagne
Philippe V (1700-1746).
LE ROI ET DIEU
L’architecture française s’inspire de l’art italien dans ses débuts et adopte ses
formes les plus caractéristiques, dômes, coupoles, frontons triangulaires et co‐
lonnades monumentales. Le classicisme s’impose autour de 1630-1640, style
voué à l’affirmation de la monarchie absolue. Les bâtiments classiques sont en
parfaite adéquation avec leur fonction, marqués par une dominante de lignes
droites, une symétrie parfaite, sans vouloir un effet décoratif comme lors de la
période baroque. L’art des jardins se doit de montrer une nature dominée, sou‐
mise à l’homme, avec ses perspectives savantes, ses bassins géométriques, ses
jeux d’eau. L’urbanisme se développe, les rues sont droites, les villes de pro‐
vince s’enrichissent de places et monuments (la place Mirabeau d’Aix-en-Pro‐
vence, l’hôtel de ville d’Arles). L’influence de Vauban marque par son style les
fortifications et les villes fortes (comme Neuf-Brisach).
◆ Salomon de Brosse (v. 1571-1626) réalise le palais du Luxembourg pour
Marie de Médicis.
◆ Jacques Le Mercier (v. 1585-1654), sous le règne de Louis XIII,
construit le palais Cardinal pour Richelieu devenu à sa mort le Palais-Royal,
ainsi que la chapelle de la Sorbonne où se trouve son tombeau.
◆ Louis Le Vau (1612-1670) réalise au début de sa carrière de nombreux
hôtels particuliers, comme l’hôtel Lambert, puis édifie pour Fouquet le château
de Vaux-le-Vicomte, à partir de 1656. Il dessine les plans du Collège des quatre
nations, l’actuel Institut de France. En 1661, au service du roi, il sera chargé de
doubler la surface d’habitation du château de Louis XIII à Versailles.
◆ François Mansart (1598-1666) devient architecte du roi en 1636 et réa‐
lise le château de Maisons-Laffitte entre 1642 et 1650. Il édifie le Val-de-
Grâce, commandé par Anne d’Autriche.
◆ Jules Hardouin-Mansart (1646-1708) était le petit neveu et l’élève de
François Mansart. Devenu premier architecte de Louis XIV en 1681 et surin‐
tendant des bâtiments royaux huit ans plus tard, il est chargé de l’avènement du
château de Versailles. Il y conçoit la façade donnant sur les jardins, la galerie
des Glaces, les grandes ailes Nord et Sud, les Grandes Écuries, la Chapelle
royale, le Grand Trianon, l’Orangerie. Nous lui devons également, à Paris, la
place Vendôme, la place des Victoires et l’église des Invalides, monument qui
combine les éléments classiques et baroques avec un plan en croix grecque.
◆ Claude Perrault (1613-1688), sous le règne de Louis XIV, élève la co‐
lonnade de la nouvelle façade du Louvre, en 1666. Il dessine les plans de l’Ob‐
servatoire de Paris et construit l’arc de triomphe du faubourg Saint-Antoine.
◆ Robert de Cotte (1656-1735) contribue au rayonnement du classicisme
français en achevant la chapelle du château de Versailles.
◆ Versailles
En 1624, Louis XIII y fait bâtir un pavillon de chasse. Huit ans plus tard,
Philibert Le Roy le remanie, entre 1631 et 1638, sur le modèle d’architecture
de briques et de pierres. Louis XIV, échaudé par la Fronde, désire quitter le
Louvre pour s’implanter en dehors de Paris sans risque de menace. L’architecte
Le Vau réalise les projets d’agrandissement puis François d’Orbay (1670-
1677), Jules Hardouin-Mansart en sont les autres architectes. Ce dernier fait
construire la galerie des Glaces, longue de 73 m sur 6 m de large avec ses dix-
sept croisées, ses dix-sept arcades peintes et ses trois cent six glaces. Dans la
voûte dix grandes compositions de Le Brun évoquent les fastes années mili‐
taires de Louis XIV. Les Salons de la guerre et de la paix complètent cette gale‐
rie. Les jardins sont dessinés par André Le Nôtre (1613-1700) qui après avoir
réalisé ceux de Vaux-le-Vicomte pour Fouquet devient le jardinier de
Louis XIV à Versailles. Le sculpteur François Girardon (1628-1715) contri‐
bue à les ornementer.
La monarchie absolue mise en place par Louis XIII et Louis XIV a permis à
la France de devenir l’État le plus puissant d’Europe. Le pouvoir français choisit
de s’afficher dans une image qui le montre au sommet de sa puissance et le met
en valeur. Le paraître devient dans la communication l’élément primordial ainsi
qu’à la cour de Versailles. Le classicisme, en exaltant les valeurs morales, va ré‐
pondre aux besoins de la politique française. Sous Louis XIV, dans la seconde
moitié du siècle, sous Colbert et Charles Le Brun (1619-1690) le classicisme
s’identifie avec le « grand goût ». L’art du classicisme offre une composition
claire, ordonnée. Le message y est compréhensible tout de suite.
Les arts décoratifs sont représentés par Le Brun qui s’inspire de Rome avec
ses attributs, ses trophées, ses armes, ses boucliers, ses victoires ailées, ses divi‐
nités allégoriques. La feuille décorative est l’acanthe large, mais on utilise des
fleurs de lys, les deux L affrontés de Louis XIV. Le style Berain doit son nom à
Jean Berain (1640-1711) et rappelle les panneaux arabesques de la Renais‐
sance italienne, les peintures architecturales de Pompéi, portiques étagés, dômes
en treillage. Il mélange toutes sortes de motifs, des originaux aux plus fantai‐
sistes. Il crée des décorations temporaires pour les fêtes de la cour et assure les
décors des opéras de Lully.
L’art de la tapisserie
L’art de la tapisserie est florissant et connaît une grande vogue depuis la créa‐
tion des Gobelins. Les œuvres les plus importantes sont l’Ancien Testament et
Ulysse (1627) de Simon Vouet, L’Histoire du roi et Maisons royales de Le Brun
(1663), La Vie de la Vierge de Philippe de Champaigne (1638-1657). Les prin‐
cipales manufactures sont les Gobelins, Colbert et Louis XIV lui donnent un
développement considérable ; la manufacture de Beauvais, créée en 1664 par
Colbert, pour concurrencer celles des Flandres en réalisant des tapisseries de
basse lisse sur des métiers à tisser horizontaux ; la Savonnerie, fondée en 1627
par Louis XIII ; la manufacture d’Aubusson, élevée par Colbert, en 1664, au
rang de manufacture royale.
L’art du mobilier
L’art du mobilier gagne ses lettres de noblesse avec les célèbres Boulle, An‐
dré-Charles (1642-1732), le plus réputé, et ses quatre fils, Jean-Philippe, Pierre
Benoît, André-Charles II et Charles-Joseph. Le type de marqueterie à laquelle il
donne son nom se caractérise par un placage d’écaille de tortue ou de corne
combinées à du métal. Il donne aussi de l’importance aux ornements de bronze
ciselé et doré.
Sa doctrine
La diffusion du cartésianisme
Théorie de la connaissance
La métaphysique
Notes
1. Nicolas Boileau, Art poétique, chant I, 1674.
2. Lewis Mumford, Technique et civilisation, Paris, Le Seuil, « Esprit », 1950, p. 23.
3. Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, Paris, Puf, 1962.
4. La formule est de Galilée dans L’Essayeur, trad. G. Chuviré, L’Essayeur de Galilée, Paris, Les Belles
Lettres, 1989, p. 141.
5. François Jacob, La Logique du vivant, Paris, Gallimard, 1976, p. 41.
6. René Descartes, Discours de la méthode [1637], Paris, Gallimard, « Folio essais », 1991.
7. Ibid.
8. Ibid.
9. Ibid.
10. Ibid.
CHAPITRE III
Mathias Ier (1612-1619) succède à son frère Rodolphe II. Il choisit en 1617
son cousin Ferdinand (1578-1637) comme successeur, lui remet le pouvoir
comme roi de Bohême dès 1617, roi de Hongrie en 1618. Les protestants se ré‐
voltent à la suite de la défenestration de Prague (23 mai 1618) où leurs repré‐
sentants jettent par la fenêtre les émissaires catholiques de l’empereur. Ces der‐
niers, tombés sur un tas de fumier, en sont quittes pour la peur, mais la rébellion
est déclarée, la guerre de Trente Ans commence. Elle occupe tout le règne de
Ferdinand, qui veut rétablir le catholicisme. La guerre de Trente Ans se poursuit
jusqu’à la signature des traités de la paix de Westphalie en 1648. À la mort de
Ferdinand, le 15 février 1637, la population de l’Allemagne a considérablement
diminué et le pays est ruiné. Son second fils, Ferdinand III (1608-1657), roi
des Romains depuis 1637, devient empereur. Il poursuit la guerre de Trente Ans
contre la France, qu’il perd, consacrant l’abaissement de la puissance Habsbourg
en Europe. La paix de Westphalie de 1648 reconnaît cet état de fait, les diffé‐
rents États de l’Allemagne bénéficient de leur indépendance politique, autori‐
sant l’émergence de la Bavière, la Saxe, la Prusse. Le Reichstag, qui siège à Ra‐
tisbonne depuis 1663, ne prend plus de décisions véritables, au profit de débats
stériles qui s’enlisent, auxquels ni l’empereur ni les princes électeurs ne parti‐
cipent plus. Léopold Ier (1640-1705), le fils de Ferdinand III, devient empereur
germanique en 1658. Il met fin à la guerre avec la Suède dès 1660, puis entre‐
prend plusieurs campagnes contre les Ottomans entre 1663 et 1683, jusqu’à leur
défaite après l’échec de l’ultime siège de Vienne à la bataille de Kahlenberg
(12 septembre 1683). Il parvient à affirmer ses couronnes de Hongrie et de Bo‐
hême entre 1655 et 1705. À l’intérieur de ses États, il promeut une politique
économique mercantiliste. Les dernières années du règne sont marquées par une
révolte en Hongrie née en 1703 et la guerre de Succession d’Espagne à partir de
1701. Léopold Ier meurt le 5 mai 1705.
2. La pensée rationaliste au XVIIe siècle en Alle‐
magne : Leibniz
Gottfried Wilhelm Leibniz (1646-1716) est un esprit universel : historien,
naturaliste, politicien, diplomate, érudit, théologien, mathématicien. Comme le
disait Fontenelle : « Il y a plusieurs hommes en Leibniz. » Disciple de Des‐
cartes, il utilise pour l’explication de l’univers des notions mathématiques, et es‐
saie de trouver un équilibre entre le rationalisme de Descartes et l’empirisme de
Locke. Pour lui, l’univers est constitué d’une infinité de substances qui sont de
véritables atomes de la nature, les monades. L’œuvre de Leibniz est immense.
Mentionnons, au fil du temps, parmi ses principaux travaux : Discours de méta‐
physique (1686) ; Système nouveau de la nature et de la communication des sub‐
stances (1695) ; Nouveaux essais sur l’entendement humain (1703), critiques
adressées à Locke ; Essais de théodicée (1710), sur la bonté de Dieu, la liberté
de l’homme et l’origine du mal ; La Monadologie (1714), qui résume tout son
système en français en quatre-vingt-dix propositions. Leibniz défend le rationa‐
lisme. L’idée d’une mathématique universelle est reprise sous le nom d’« art
combinatoire ». Il s’oppose à Locke, à la table rase où seule l’expérience est
source de connaissance. À l’empirisme, il oppose le rationalisme : « Cette table
rase, dont on parle tant n’est à mon avis qu’une fiction que la nature ne souffre
point et qui n’est fondée que dans les notions incomplètes des philosophes,
comme le vide, les atomes, et le repos ou absolu ou respectif de deux parties
d’un tout entre elles, ou comme la matière première qu’on conçoit sans aucune
forme1. » Pourtant il se sépare du mécanisme cartésien ; au lieu d’aller de soi-
même et de Dieu aux choses, il part de la matière et de ses lois et s’élève, de là,
à la métaphysique et à Dieu. De la même façon, il sent plus profondément que
Descartes l’importance des premiers principes et en détermine deux :
De même que Locke, Leibniz pense que l’homme n’a pas d’idées toutes for‐
mées à l’état de germe, à la naissance, elles ne se développent qu’au contact de
l’expérience. Pourtant perceptions et passions sont issues « de notre propre
fonds avec une parfaite spontanéité ».
Notes
1. Gottfried Wilhelm Leibniz, Nouveaux essais sur l’entendement humain, II, I, Paris, Flammarion, 1921,
p. 475.
2. Leibniz, La Monadologie, trad. et étude par Émile Boutroux, Paris, Delagrave, 1881, § 31.
3. Ibid.
4. Ibid., § 3.
CHAPITRE V
LA RESTAURATION
Il s’impose très tôt comme le réformateur d’une idée générale des sciences et
toute sa vie il en poursuivit le projet et la réalisation. Il a étudié les mathéma‐
tiques, l’astronomie, l’optique, l’alchimie et les langues. Pour lui la connaissance
expérimentale plus précise de la nature serait d’une grande utilité pour confir‐
mer la foi chrétienne, et il estime que ses propositions seraient d’une grande im‐
portance pour le bien de l’Église et des universités. Son grand ouvrage devait
avoir pour titre Instauratio magna scientarum, « Grande restauration », et com‐
porter six parties. Bacon n’acheva que les deux premières : le Du progrès et de
la promotion des savoirs (De dignitate et augmentis scientarum) et le Novum or‐
ganum, « nouvelle logique ». Dans la première, il fait l’éloge de la science posi‐
tive, et énonce les causes qui ont empêché le progrès des sciences. Dans la se‐
conde, il expose la science inductive qui doit supplanter la science déductive, et
donne les règles de la nouvelle méthode.
Sa doctrine
La méthode inductive
Dans le premier livre du Novum organum, intitulé Pars destruens, Bacon dé‐
termine quatre sortes de préjugés, obstacles à la connaissance :
Sa doctrine
Hobbes est devenu célèbre par sa théorie sur l’État et son origine. « L’homme
étant un loup pour l’homme », il peut échapper à cette destinée en se soumettant
au prince qui a tous les droits puisqu’il sauve à chaque instant ses sujets de la
mort. Pour cette raison, il leur impose tout ce qu’il veut. La doctrine de Hobbes
procède selon un raisonnement déductif, son interprétation de la nature est mé‐
caniste, sa psychologie matérialiste. Il commence par séparer la métaphysique et
la théologie de la philosophie et donne une définition de celle-ci, en tant que
connaissance acquise par raisonnement. Sa philosophie a pour objet les corps,
car tout ce qui est connaissable est corporel, et ne s’occupe pas des êtres incor‐
porels. Ce qui n’est pas sensible, âme, esprit, ne peut pas être pensé. Tout ce que
nous pouvons penser, c’est ce que nous sentons. Les choses ne sont connues que
par les sensations. L’esprit humain est sensation, de même la mémoire, puisque
se souvenir, c’est sentir ce qu’on a senti. Il faut combiner les sensations entre
elles pour qu’elles deviennent pensées. La pensée est une série, un train d’idées.
Hobbes ne voit dans l’âme humaine que des mouvements successifs provenant
de ces premiers mouvements qui sont sensations. Nous ne sommes pas libres
pour autant puisque nous sommes entraînés par le plus fort de nos mouvements
intérieurs : désir, crainte, aversion, amour. Cependant nous délibérons, ou plus
exactement nous croyons le faire. La délibération se résume être une succession
de différents sentiments et celui qui l’emporte porte le nom de volonté. La liber‐
té n’existe donc ni chez les hommes ni chez les animaux. Volonté et désir sont
en fait la même chose considérée sous des aspects différents. Tout est détermi‐
né, liberté et hasard traduisent notre ignorance des phénomènes de la nature.
La morale utilitaire
Dès lors, il n’y a plus de morale possible. Hobbes répond par la morale utili‐
taire. Le but de toute recherche pour l’homme est le plaisir, mais un plaisir vrai
et permanent, utilitaire. L’utile, c’est d’être bon citoyen, autrement dit la morale
se confond avec la morale du devoir.
La politique
De cive montre que l’homme n’a pas d’autre souci que sa conservation, ce que
traduit sa décision d’entrer en lutte avec les autres hommes. La force domine et
fait loi. Mais c’est dans le Léviathan, ce monstre biblique évoqué par le Livre de
Job, qui symbolise l’État, qu’Hobbes va développer ses théories politiques, ses
théories sur la société. Seul l’intérêt personnel fait bouger les hommes.
L’égoïsme, l’instinct subsistent pour le mieux et de là font que bien ou mal ne
trouvent véritablement leur définition que dans ce qui est utile ou nocif. Cet état
dans lequel sombre l’humanité amène un état de guerre. « L’homme est un loup
pour l’homme » dans cet état de nature. La paix ne peut être établie que si cha‐
cun renonce à ses intérêts. Le souverain est l’expression de la volonté de cha‐
cun.
Sa doctrine
Pour Locke, il n’y a pas d’idées innées. L’esprit doit être envisagé avant sa
rencontre avec le monde extérieur comme une table rase, et il n’y a rien en lui
qui n’ait été d’abord dans le sens. L’idée est identique à ce que Descartes appelle
la pensée. C’est une sensation enregistrée par le cerveau, et ce sont des sensa‐
tions élaborées et modifiées par la réflexion. Elles s’associent de manière natu‐
relle et c’est l’ensemble de ces associations que l’on nomme réflexion. Toutes
nos idées proviennent de l’expérience. Il faut distinguer l’expérience interne, ou
sensation, de l’expérience externe, ou réflexion : « Mais comme j’appelle l’autre
source de nos idées sensation, je nommerai celle-ci réflexion parce que l’âme ne
reçoit par son moyen que les idées qu’elle acquiert en réfléchissant sur ses
propres opérations2. » Toutes deux fournissent des idées simples, parce que,
comme le souligne Bergson, elles sont des données immédiates de la
conscience. Ce sont les idées de la sensation (couleur, odeur). Les idées de la ré‐
flexion appartiennent à la mémoire, à l’imagination. Par combinaison, vont se
créer les idées complexes. Celles-ci sont soit des idées de substance, c’est-à-dire
des idées appartenant à un substrat, soit des idées de relations énoncées sous
forme de principe (principe de causalité). Idées simples ou idées complexes sont
des idées particulières. Quant aux idées générales, elles ne correspondent à rien
de réel et servent à exprimer par un mot (homme) une collection d’idées parti‐
culières (Jean, Paul, par exemple), leur fonction est de « représenter également
plusieurs choses individuelles dont chacune étant en elle-même conforme à cette
idée est par là même de cette espèce de choses3 ». C’est le nominalisme. Le sens
des mots lorsqu’il devient relatif aux idées est source d’erreur.
Valeur de la connaissance
Politique
Notes
1. Francis Bacon, Novum organum, I, Paris, Puf, « Épiméthée », 2010, p. 48.
2. John Locke, Essai sur l’entendement humain, II, 1.
3. Essai philosophique concernant l’entendement humain, traduction par Pierre Coste, Paris, Vrin, 1972,
§ 7.
CHAPITRE VI
LA PEINTURE FLAMANDE
Hugo de Groot, dit Grotius, dont le nom est souvent associé à celui de Sa‐
muel von Pufendorf (1632-1694), juriste romaniste allemand, est considéré
comme le père fondateur de l’école du droit naturel. Il est en effet le premier à
tenter une construction du droit en un « système » fondé non plus sur la nature
concrète des choses et des faits, mais sur des principes logiques construits par la
raison. Il publie en 1625 Du droit de la guerre et de la paix (De jure belli ac pa‐
cis), code du droit international public, son ouvrage majeur. Il est également
l’auteur du Droit de prise (De jure praedae), dans lequel il prône la liberté du
commerce et des mers. Opposé à l’athéisme, il s’efforce toute sa vie de rappro‐
cher les Églises protestante et catholique et prône une large tolérance.
Sa doctrine
Au premier niveau, nous trouvons l’expérience par ouï-dire, ainsi nous
connaissons la date de notre naissance, puis la connaissance par expérience
vague, qui fait partie avec la précédente des connaissances du premier genre ;
elles ont en commun de présenter des faits sans liens, des conséquences sans
prémisses. Celles-ci ne peuvent dépasser le niveau de l’opinion. La connaissance
du deuxième genre appartient au modèle mathématique, c’est la démonstration,
la déduction, elle apporte l’intelligibilité. Celle du troisième genre est celle de
l’intuition, principe suprême qui permet de saisir Dieu. Spinoza montre que
l’idée vraie s’affirme d’elle-même. L’idée vraie exclut toute forme d’erreur et de
doute possible.
La métaphysique
La morale
Notes
1. Spinoza, Éthique, I, prop. 29.
2. Ibid., II, prop. 12.
3. Ibid., V, prop. 3.
CHAPITRE VII
Le baroque russe
1. L’Inde moderne
C’est au XVIe siècle qu’une langue nouvelle se forge en Inde, sous l’influence
de l’arrivée des conquérants musulmans venus de Perse : l’urdu. C’est un creuset
de persan et d’hindou. Il est utilisé à l’origine par les musulmans, mais gagne
peu à peu l’ensemble de l’Inde où il est connu sous le nom d’hindoustani. À tout
seigneur tout honneur, le fondateur de la dynastie moghole, Bābur, laisse des
mémoires qu’il a rédigés dans sa langue maternelle, le turco-chagatai, dérivée
du turc et du mongol chagatai. Le plus grand poète de langue hindi, Goswani
Tulsidas (1532-1623), s’attache à la refonte des grands classiques, comme le
Rāmāyana, et écrit, pour ce faire, son chef-d’œuvre, un poème épique, Les
Chants de Rama (Ramcharimanas). En langue marathi, cinq poètes se dé‐
gagent. Namdev (v. 1270-v. 1350) compose des hymnes sacrés, ou abhangas,
réunis dans le Livre des Hymnes (Namdev Gatha). Bhanudas (1483-1513) ré‐
dige des poèmes dévotionnels. Eknath (1533-1599), brahmane versé en sans‐
crit, arabe, urdu, perse, hindi en sus du marathi, écrit des analyses philoso‐
phiques à partir du commentaire de la Bhagavad-Gītā rédigé par un saint poète
marathe, Dnyaneshwar (1275-1296). Il traduit et commente le Bhāgavata
Purāṇa en langue marathi. Tukaram (1608-v. 1650), après un début d’exis‐
tence voué au commerce, devient un sectateur zélé de Krishna, sous sa forme
marathe de Vithoba. Il compose des abhangas, hymnes sacrés. Ramdas (1608-
1681) crée la secte des ramdasis, fidèles de Vishnou sous sa forme marathe
d’avatar, Vithoba. Les ramdasis sont les « serviteurs de Dieu ». Ses hymnes
marquent la renaissance de la poésie hindoue.
2. La Chine moderne
Si la sculpture ne présente pas sous les Ming une originalité d’œuvres nova‐
trices, la peinture, en revanche, bénéficie de la part des empereurs d’une atten‐
tion redoutable. Redoutable, car les peintres officiels vivant dans le milieu pro‐
tégé de la cour, ils y sont embrigadés, doivent produire en suivant l’art officiel.
Le modèle des Ming demeure la peinture sous les Song, surtout les paysages. La
suite en est prise par Tai Wen-Ching (1388-1462) qui fonde l’école Tche,
s’adonne à la reprise des techniques traditionnelles, y ajoute le lavis à l’encre de
Chine. L’autre représentant de cette école est Lan Ying (1585-1644). La se‐
conde école, l’école Wou, poursuit les créations de la peinture littéraire de
l’époque Yuan. Une troisième sensibilité s’épanouit, véritable lien entre les
écoles du Nord et du Sud, celle des artistes individualistes. Deux écoles s’op‐
posent, les peintres narrateurs du Sud, adeptes du lavis et des jeux de pinceaux,
contre les artistes du Nord, académiques, ayant recours aux couleurs vives. Les
deux écoles ont en commun de recopier à satiété les œuvres du passé. C’est au
cours du XVIIe siècle que la gravure sur bois polychrome atteint à Nankin son
apogée.
La porcelaine Ming
Si, dans la littérature comme en peinture, les Ming n’innovent guère, leur nom
évoque pourtant chez chacun d’entre nous un univers de grâce et de couleurs
chatoyantes, celui de la porcelaine. C’est l’art par excellence de l’époque des
Ming. La matière première, le kaolin, tire son nom, Kao Ling (la passe haute),
du site d’extraction proche de la manufacture impériale. L’art des couleurs porte
la porcelaine Ming à la perfection, depuis les pièces monochromes blanches,
bleues ou céladon, un vert pâle transparent, jusqu’aux créations San Tsai (Trois
couleurs), mariant le vert, le jaune et le violet foncé, ou aux remarquables Wou
Tsai (Cinq couleurs) reprenant les trois précédentes en y adjoignant le bleu et le
rouge. Les thèmes favoris, repris des classiques de la peinture sur soie, sont les
motifs floraux, les oiseaux, les papillons.
L’opéra, né sous les Yuan, poursuit son évolution. Le compositeur le plus fa‐
meux est Tang Sien tsou (1556-1617), auteur des œuvres demeurées les plus
célèbres que sont le Mou tan t’ing, un drame d’amour où une jeune fille de la
haute société finit par s’unir à celui qu’elle aime, de milieu social inférieur, et
Les Quatre Rêves. Ce sont des œuvres du style théâtral typique des Ming ou
tchouan-k’i, qui supplante peu à peu la première forme régulière du théâtre chi‐
nois, le tsa-kiu de la dynastie Yuan.
L’architecture est enrichie de peintures des portes à glissière mais aussi de pa‐
ravents d’un éclat éblouissant. Les artistes les plus célèbres sont les maîtres de
l’école Kanō : Kanō Eitoku (1543-1590), Kanō Sanraku (1559-1635). Leurs
peintures se reconnaissent à leurs fonds dorés. La peinture au lavis est représen‐
tée par les écoles de Kaiho et de Tosa : Kaiho Yushō (1533-1615), Tosa Mit‐
suhide (1539-1613), Hasegawa Tohaku (1539-1610).
Le christianisme importé par les Portugais fait son entrée dans l’empire insu‐
laire. Au début, les progrès de la christianisation sont bien accueillis et rapides.
Des monastères, des églises apparaissent un peu partout. Les missionnaires les
plus importants sont François Xavier (1506-1552), Alessandro Valignani
(1539-1606). Mais en 1587, le christianisme se voit interdit par le Kanpaku,
Premier ministre, Toyotomi Hideyoshi (1536-1598). En 1596, une persécution
très violente débute.
On assiste pendant cette période à la naissance d’un art bourgeois marqué par
la paix, la prospérité, l’isolement. Dans le domaine de la culture, la première
moitié du XVIIe siècle apparaît comme une période de transition entre la précé‐
dente, celle de Momoyama, et celle d’Edo. Kyōto demeure, au début, le centre
d’activité culturelle. Les représentants de la culture Kan’ei ne se recrutent que
parmi les héritiers de la culture traditionnelle, nobles de la cour, moines, savants
entretenus par les Tokugawa. Ils vivent dans une ambiance raffinée qui n’est pas
loin des « salons », teintée de dilettantisme, d’un goût aristocratique pour les re‐
présentations de nō, la pratique de l’art poétique, waka. Le néoconfucianisme
pénètre dans la société des guerriers qui en font leur doctrine officielle. Celle-ci
présente l’avantage, avec ses principes moraux devant régir les rapports sociaux
fortement centralisés du moment, de justifier la structure sociale en vigueur.
Tout le long du XVIIe siècle, la production agricole ne cessant de croître, peu à
peu les arts deviennent l’affaire de la bourgeoisie et des classes commerçantes
enrichies.
La période des Tokugawa est marquée par une prospérité dans le domaine
des arts et de l’artisanat. Le gouvernement tente d’empêcher la concentration
économique et politique entre les mains de quelques aristocrates. Les arts ne
sont plus seulement destinés à la noblesse, et peuvent d’étendre à la bourgeoisie
qui se trouve en contact avec elle. La littérature devient populaire. On décrit la
vie humaine, ses vertus, ses faiblesses sur un ton moralisateur ou badin. Les ro‐
mans de mœurs d’Ihara Saïkaku (1642-1693) sont typiques de cette tendance.
Le second grand auteur de cette période est Chikamatsu Monzaemon (1653-
1724), représentant du drame. Son véritable nom est Sugimori Nobumori, des‐
cendant d’une famille de bushi, guerrier. Il commence à écrire des jōruri pour le
théâtre de poupée. Takemoto Gidayu (1651-1714), créateur du théâtre de pou‐
pée chanté, lui demande en 1686 de s’associer. Jusqu’en 1703, il n’écrit que des
jōruri historiques, puis la ferveur du public pourra se répartir entre les sewa-
mono, théâtre d’actualité, et les jidai-mono, théâtre d’époque. À côté du théâtre
nō réservé à l’aristocratie et aux gens de la cour, apparaît le théâtre populaire, le
kabuki, qui aurait été précédé par celui des marionnettes. C’est au Bunraku,
nous apprend André Leroi-Gourhan, dans Pages oubliées sur le Japon2, que le
kabuki doit d’être devenu, dans une certaine mesure, un théâtre, car presque
toutes les œuvres théâtrales du kabuki ont été empruntées au théâtre de marion‐
nettes. Il confie des rôles aux femmes, pratique interdite à partir de 1628. La
naissance du kabuki est liée à la danseuse O-Kuni, danseuse sacrée du temple
d’Isé qui finit par s’installer à Kyōto après avoir quitté la vie religieuse. Le ka‐
buki est orienté vers le spectacle, le plaisir de l’œil, l’émotion immédiate. Si l’on
attribue à Chikamatsu Monzaemon de cent à cent cinquante jōruri, drames
pour marionnettes, nous lui devons une trentaine de pièces pour kabuki. Les
jōruri mettront en scène Yoshitsune et son fidèle Benkei, le moine guerrier co‐
lossal.
Bashō et le haikai3
Les deux grandes écoles de pensée sont celles de Mito, qui fonde sa réflexion
sur l’histoire, et celle de Shingaku, qui veut développer une véritable pédagogie
pour l’enseignement populaire de masse. Le confucianisme est ancien au Ja‐
pon, puisqu’il fut introduit, d’après la tradition, au Ve siècle. Lors des périodes
Kamakura (1185-1333) et Muromachi (1333-1568), il est étudié dans les éta‐
blissements bouddhiques, enseignement qui reste d’ailleurs le monopole de
l’aristocratie, des familles de cour jusqu’à l’ère Edo. Ito Jinsai (1627-1705)
pense que les hommes partagent une nature identique, ouverture d’accès à la
Voie. D’autres penseurs suivent le même cheminement intellectuel comme Ni‐
shikawa Joken (1648-1724).
4. La Corée
LE DÉCLIN DE LA DYNASTIE JOSEON (XVIIe-XVIIIe SIÈCLES)
La dynastie Joseon, qui a connu son moment de splendeur au XVe siècle, en‐
tame ensuite une longue période de décadence, dont le début est marqué par la
soumission à la nouvelle dynastie mandchoue des Qing qui prennent le pouvoir
en Chine en 1644. Désormais, la Corée vit au rythme des dominations étran‐
gères, dans une indépendance de principe. En revanche, la sclérose sociale et
politique, le repli sur soi qui vaut au pays le surnom de « royaume-ermite »,
s’accompagne d’un formidable renouveau intellectuel.
LE RENOUVEAU DU SIL-HAK
Notes
1. À ce sujet, voir Florence Braunstein, Penser les arts martiaux, op. cit., p. 287.
2. André Leroi-Gourhan, Pages oubliées sur le Japon, recueil posthume établi et présenté par Jean-Fran‐
çois Lesbre, Paris, Jérôme Millon, 2003.
3. Voir Florence Braunstein, « Bashō, La Sente étroite du bout du monde », in Encyclopædia Universa‐
lis.
CHAPITRE X
1. L’architecture éthiopienne
L’église Beta Giorgis (Saint-Georges) est l’une des onze églises monolithiques
sculptées dans les rochers, reliées entre elles par des galeries creusées elles aussi
à même le roc, de Lalibela, une ville de la province du Tigré, à 2 600 m d’alti‐
tude. La plus grande, Medhane Alem (église du Saint-Sauveur), est longue de
30 m, haute de 11 m, large de 24 m. Beta Giorgis adopte la forme générale
d’une croix. À Gondar, fondée par le roi Fasiladas (1603-1667) en 1635-1636,
est édifié le Fasil Ghebbi, un complexe-forteresse aux influences architecturales
mêlées, qui renferme plusieurs églises, des écuries, une chancellerie, le château
Fasiladas et le palais Lyasu. Les matériaux employés sont la pierre basaltique et
le tuf rouge, les styles empruntés à la fois aux palais arabes, aux forteresses in‐
diennes, au baroque importé d’Europe.
2. La littérature éthiopienne
Le Kebra Nagast (ou Livre de la Gloire) des rois d’Éthiopie est rédigé au
XIVe siècle en langue guèze, ou éthiopien classique, langue littéraire. Compre‐
nant cent dix-sept chapitres d’inégale longueur, le Kebra Nagast mêle mythes,
légendes, histoires dynastique depuis Makeda, reine de Saba. De ses amours
avec le grand roi Salomon naît Ménélik, ancêtre des empereurs d’Éthiopie. Il y
est aussi question du transfert de l’arche d’alliance de Jérusalem en Éthiopie.
L’ouvrage est présenté comme une controverse entre trois cent dix-huit pères
orthodoxes du premier concile de Nicée (325), portant sur ce qui fait la gran‐
deur ou la gloire des rois. Selon la tradition, Ménélik ramenant l’arche d’alliance
et Hélène, mère de l’empereur Constantin, qui a trouvé la croix du Christ, sont
les seuls à avoir connu la gloire des rois. Le Kebra Nagast, qui prétend que
l’arche d’alliance est en Éthiopie, est à rapprocher du Dersane Sion (ou Homélie
à Sion), une homélie adressée à l’arche d’alliance pour lui rendre gloire. Il s’agit
de glorifier Sion selon les trois sens du terme, la ville de David, l’arche d’al‐
liance, Marie. Selon une légende, l’arche d’alliance serait cachée dans la cathé‐
drale d’Axoum. L’ouvrage s’achève sur la certitude que Rome devra céder de‐
vant la puissance spirituelle de l’Éthiopie. Le Kebra Nagast est considéré par
certains chrétiens éthiopiens comme un livre saint, dont le contenu est authen‐
tique, une attitude partagée par les rastafaris, chanteurs jamaïcains comme Bob
Marley.
B. LE MONDE DU XVIIIe SIÈCLE
CHAPITRE XI
LA RÉGENCE (1715-1723)
Le système de Law
Philippe d’Orléans se retrouve avec des caisses de l’État vidées par les
guerres à sa prise de pouvoir. Il favorise donc la mise en place du système de
Law. John Law (1671-1729), banquier écossais, est autorisé en 1716 à créer la
Banque générale qui émet du papier-monnaie échangé contre de l’or. Le succès
du papier-monnaie, plus pratique, est rapide, l’appui du régent rassure. En 1717,
John Law crée la Compagnie d’Occident qui met en valeur la Louisiane. En
1718, la Banque générale devient Banque royale. En 1719, la Compagnie per‐
pétuelle des Indes est fondée, elle prête plus d’un milliard de livres à l’État, ra‐
chète les rentes que celui-ci versait contre un taux d’intérêt annuel de 3 %. Les
règlements se font en billets de banque, la Compagnie reçoit le privilège d’émis‐
sion de la monnaie. En 1720, Banque Royale et Compagnie fusionnent. John
Law est nommé surintendant des Finances. Mais le prince de Conti (Louis-Ar‐
mand de Bourbon-Conti, dit « le Singe Vert », 1695-1727) et le duc de Bourbon
(Louis IV Henri de Bourbon-Condé, 1692-1740) provoquent la faillite du sys‐
tème en demandant à réaliser leurs avoirs en or en mars 1720. Ces derniers sont
si énormes qu’il faut trois fourgons chargés d’or pour le seul prince de Conti.
Cette manœuvre voyante – les princes se sont déplacés en personne – provoque
une crise de confiance et la panique. Des émeutes ont lieu au siège de la
Banque, rue Quincampoix à Paris. On déplore quelques dizaines de morts. En
octobre, la banqueroute est achevée. Law s’enfuit en décembre. Si la faillite em‐
porte les économies de nombre d’actionnaires de la Compagnie et enracine du‐
rablement en France la méfiance à l’égard du papier-monnaie, elle ne présente
pas que des inconvénients. L’expérience de Law permet d’apurer les dettes de
l’État liées aux guerres de la fin du règne de Louis XIV.
Les états généraux sont convoqués le 8 août 1788 pour le 1er mai 1789. Le
vote traditionnel se fait par ordre, une voix pour chaque. Le tiers état obtient le
doublement de sa représentation, six cents députés, mais le roi laisse en suspens
la question du vote. Dans chaque baillage se tiennent les élections des députés
des trois ordres, des assemblées rédigent les cahiers de doléances qui réclament
tous les mêmes réformes : une monarchie définie et limitée par une Constitu‐
tion, l’égalité devant l’impôt, la fin des privilèges. L’abbé Sieyès (1748-1836)
publie alors son célèbre pamphlet Qu’est-ce que le tiers-état ? en janvier 1789,
où il énonce clairement que le tiers, d’un poids nul dans l’État, devient en réalité
la souveraineté nationale :
« Le plan de cet écrit est assez simple. Nous avons trois questions à nous
faire :
1°) Qu’est-ce que le tiers état ? Tout.
2°) Qu’a-t-il été jusqu’à présent dans l’ordre politique ? Rien.
3°) Que demande-t-il ? À y devenir quelque chose. »
Les états généraux se réunissent à Versailles, le roi les ouvre solennellement
le 5 mai 1789. Dans son discours, rien sur la Constitution ni le vote par tête. Le
17 juin, lassé, le tiers état rejoint en grande partie par le bas-clergé et quelques
nobles libéraux se proclame Assemblée nationale sous la présidence de Jean
Sylvain Bailly (1736-1793), mathématicien. Le roi fait fermer leur salle de
réunion. L’Assemblée se rend à la salle du Jeu de paume où les députés prêtent
le serment du Jeu de paume, à savoir ne pas se séparer avant d’avoir donné une
Constitution à la France. Le 23 juin, le roi demande aux députés de retourner
siéger par ordre. L’Assemblée refuse, se proclame inviolable. Mirabeau (1749-
1791) se serait alors exclamé : « Nous sommes ici par la volonté du peuple et
nous ne sortirons d’ici que par la puissance des baïonnettes ! » Louis XVI cède,
ordonne à la noblesse et au haut-clergé de rejoindre l’Assemblée, le 27 juin, qui
prend le nom, le 9 juillet, d’Assemblée nationale constituante. La monarchie ab‐
solue a cessé d’exister.
Les débuts de la Révolution
LA RÉPUBLIQUE (1792-1799)
L’affrontement entre les deux groupes prend place ensuite jusqu’en juin 1793.
En mars 1793 éclate l’insurrection de Vendée, les « Blancs », qui refusent Révo‐
lution et République, veulent rétablir la monarchie, et les « Bleus » républicains.
La Convention décrète une levée de trois cent mille hommes contre les souve‐
rains européens qui se sont ligués contre la France après l’exécution du roi. La
province se soulève contre Paris : en mai la ville de Lyon est prise et pillée par
les républicains. La cherté de la vie, le chômage, l’incertitude liée à la guerre,
l’opposition de la province exaspèrent les Parisiens. Le groupe des enragés ré‐
clame la peine de mort contre les profiteurs. Le 6 avril 1793, la Convention se
dote d’un organe exécutif, le Comité de salut public, créé par les Montagnards
pour surveiller les prix. Les Girondins, députés de province, sont de plus en plus
en butte à l’hostilité. Le 2 juin 1793, la foule houleuse encercle la Convention,
exige leur arrestation. La Convention s’incline. Ceux qui ne parviennent pas à
s’enfuir sont exécutés. Le 5 septembre 1793, par décret, la Convention instaure
la Terreur, programme destiné à éliminer les ennemis de la nation. Elle se
marque par une sanglante répression, le recours au Tribunal révolutionnaire de
Fouquier-Tinville (1746-1795) qui multiplie les condamnations à mort et se
définira à son propre procès comme la « hache de la Convention ». Le 17 sep‐
tembre 1793, la loi des suspects permet d’arrêter n’importe qui à partir du plus
petit soupçon d’être un « ennemi de la liberté ». Le 16 octobre 1793, la reine
Marie-Antoinette (1755-1793) est guillotinée.
La Convention adopte, pour consacrer une ère nouvelle, le calendrier révolu‐
tionnaire dont le poète Fabre d’Églantine (1750-1794) imagine les noms nou‐
veaux des mois de trente jours, divisés en décade. Les Montagnards se déchirent
alors entre enragés tel Hébert (1757-1794), fondateur du populaire journal Le
Père Duchesne en 1790, indulgents comme Danton (1759-1794), désireux de
mettre fin à la Terreur, et les amis de Robespierre (1758-1794), qui veulent la
poursuivre. Le 24 mars 1794, Hébert et ses proches sont exécutés, Danton et
ses partisans suivent le 5 avril. Robespierre prend la tête du Comité de salut pu‐
blic. Il fait célébrer le 8 juin 1794 la fête de l’Être suprême, nouvelle déité de la
République, dont il se voudrait le desservant national, tout en renforçant la Ter‐
reur. Des milliers de personnes sont guillotinées sous son gouvernement. Ef‐
frayés, inquiets pour leur vie, les députés survivants de la Convention décrètent
son arrestation le 27 juillet 1794. Il est guillotiné, déjà mourant d’un coup de
pistolet qui lui a emporté la mâchoire, avec ses amis politiques, le lendemain,
28 juillet 1794.
Les thermidoriens
Antoine Barnave
Jacques Cathelineau
Camille Desmoulins
Joseph Fouché
Joseph Fouché (1759-1820) est préfet des études chez les Oratiens de Nantes
quand éclate la Révolution. Député jacobin à la Convention, il passe au groupe
des Montagnards, vote la mort du roi. Il anime la déchristianisation dans la
Nièvre, puis déploie son zèle lors de la Terreur à Lyon : la guillotine n’est pas
assez rapide pour les exécutions de masse, il ordonne de mitrailler les groupes
de condamnés pour aller plus vite. Attaqué par Robespierre à la Convention,
craignant pour sa vie, Fouché rejoint les thermidoriens. Brièvement incarcéré
après l’échec de la tentative de Gracchus Babeuf en 1795, Fouché est amnistié.
Ministre de la Police en 1799, il se met au service de Napoléon Bonaparte, y
reste sous le Consulat et sous l’Empire. Disgracié en 1810, il revient brièvement
aux affaires sous Louis XVIII, en 1815, avant d’être proscrit et condamné à
l’exil comme régicide en 1816. Il meurt à Trieste en 1820. Homme de l’ombre,
il avait accumulé les honneurs, Napoléon le fait comte d’Empire, duc d’Otrante.
Ses lourds et redoutables secrets d’État disparaissent avec lui : mourant, il
confie au prince Jérôme Bonaparte qui est à ses côtés la tâche de brûler ses do‐
cuments et papiers personnels. Il semble qu’il ne l’ait pas quitté des yeux pen‐
dant les heures que cette opération nécessite.
Jean-Paul Marat
Maximilien de Robespierre
Louis Saint-Just
Née dans une famille bourgeoise néerlandaise, Etta Palm d’Aelders (1743-
1799) connaît une carrière d’espionne, notamment au service de la France. Ins‐
tallée à Paris depuis 1773, elle tient salon en 1789, recevant notamment Marat.
Elle s’implique alors dans la Révolution, défendant la cause de l’égalité des
femmes au sein de la Société fraternelle de l’un et l’autre sexe ou participant aux
travaux de la Société patriotique des amis de la vérité. Mais en 1795 les armées
françaises envahissent les Pays-Bas, la République batave est proclamée. Etta
Palm d’Aelders devient suspecte aux yeux des nouvelles autorités. Revenue aux
Pays-Bas depuis 1792, elle navigue entre espionnage pour le stathouder, le gou‐
verneur militaire, et pour les autorités françaises. Ce mélange des genres lui vaut
d’être incarcérée jusqu’en 1798, dans des conditions qui altèrent sa santé et pro‐
voquent sa mort le 28 mars 1799 à La Haye.
Le Directoire (1795-1799)
Le régime du Directoire est fondé sur l’espoir populaire d’un retour à la paix
civile, du rétablissement de l’ordre et de la mise en place d’une économie pros‐
père. En réalité, le Directoire est une succession de coups d’État. En 1796,
Gracchus Babeuf (1760-1797), signataire du Manifeste des Égaux de Sylvain
Maréchal, tente de renverser le Directoire. Il voulait la fin des classes sociales,
la restitution au peuple de la souveraineté réelle, une société communiste. La
conspiration échoue, Babeuf est exécuté en 1797. Le Directoire se débarrasse
ensuite des royalistes cette même année, puis des Jacobins en 1798. Le pro‐
blème, pour le régime, est de ne survivre que grâce à l’appui de l’armée, qui est
la seule à le soutenir. Le régime est déconsidéré par les scandales financiers, le
peuple confronté au luxe déployé dans un raffinement de bizarreries vestimen‐
taires sans fin par les Merveilleuses et les Incroyables, jeunes filles et jeunes gens
à la jeunesse dorée, qui multiplient les extravagances de vêture et de langage, re‐
fusant par exemple l’emploi du « r » et de certaines consonnes, rendant leur dis‐
cours incompréhensible au non-initié. Leur protecteur attitré, Paul Barras
(1755-1829), est l’un des directeurs, usant de son poste pour favoriser l’agiotage
et son enrichissement personnel considérable, grand dispensateur de fêtes
somptueuses. Le 9 novembre 1799, ou 18 brumaire an VIII, Bonaparte par‐
vient péniblement à réussir un coup d’État, uniquement grâce à l’intervention de
son frère Lucien, président des Cinq-Cents, qui fait donner la troupe pour chas‐
ser les députés, qui vilipendaient un Bonaparte confus et bégayant.
LA DÉESSE RAISON
Les salons ont un rôle essentiel dans la diffusion des connaissances, par le
pouvoir de la parole, du contact humain. Montesquieu, Marivaux, Helvétius,
d’Alembert, Van Loo, La Tour fréquentent celui de Mme Geoffrin (1699-
1777). Montesquieu, Marivaux, celui de la marquise du Deffand (1697-1780),
et enfin celui de Mlle de Lespinasse (1732-1776) l’est par Diderot, Helvétius,
Marmontel. À peine l’héritage grec retrouvé, il a été aussi vite oublié, malgré
les Commentaires sur Aristote d’Averroès (1126-1198). La science de la méde‐
cine à peine ébauchée par les médecins est mise elle aussi de côté. Foucault dé‐
crira tout particulièrement Pinel, le médecin, dans son Histoire de la folie à l’âge
classique (1961), comme un personnage machiavélique. L’essentiel reste que
toutes les démarches entreprises d’une façon scientifique tournent autour de
l’homme et du besoin d’expliquer que son corps n’est pas une simple mécanique.
Le propre du XVIIe siècle a été de préparer à ce fait, en concevant une taxinomie
des passions, afin de cerner le domaine de psychologie affective.
Paris rayonne intellectuellement par l’intermédiaire des salons, mais aussi des
cafés, dont le plus connu est celui du Procope, rue de l’Ancienne-Comédie. La
France propose un nouvel art de vivre qui se répand en Europe à l’unisson : les
modes y prennent leur point de départ, on copie aussi le palais de Versailles qui
trouve ses répliques au Portugal, à Potsdam en Prusse chez l’empereur d’Au‐
triche, à Schönbrunn. Beaucoup d’étrangers résident à Paris comme le juriste
italien Beccaria, les Anglais David Hume et Horace Walpole, et certains
même y sont définitivement adoptés comme l’Allemand Jacob Grimm (1785-
1863). L’embellissement et l’assainissement de la ville commencent à l’époque
de Colbert par le lieutenant de La Reynie et continuent pendant tout le
XVIIIe siècle. Les anciens remparts de Louis XIII sont abattus et leurs terrains
cédés à la ville. Sur leur emplacement se développe la ligne des boulevards.
Ceux de la rive droite sont plantés d’arbres et deviennent, entre 1670 et 1704,
une promenade. Des arcs de triomphe, appelés porte Saint-Denis ou porte
Saint-Martin, se substituent aux anciennes portes à pont-levis. La Reynie
éclaire la ville, fait paver les rues, creuser des égouts. Paris, au commencement
du XVIIe siècle, compte environ cinq cent mille habitants. La ville, du point de
vue de son étendue géographique, ne dépasse pas les anciens remparts
d’Étienne Marcel et de Charles V le Sage. Un des coins les plus curieux de la
capitale est sans conteste le cimetière des Innocents. Il est entouré sur trois cô‐
tés de charniers, vieux charniers, charnier des écrivains. Ces ossuaires, du côté
du cimetière, sont des cloîtres semés de tombes ; du côté extérieur, ils pré‐
sentent des boutiques occupées par des écrivains publics ou des lingères. Au-
dessus des cloîtres et des boutiques se trouvent d’immenses greniers, plein d’os‐
sements, de crânes, de débris humains. En 1782, les greniers crevèrent sous les
ossements et les étalages de mode disparurent sous ce sinistre fardeau.
L’Encyclopédie fut comme une levée en masse, une bataille rangée de tous les
hommes du siècle nouveau contre toutes les puissances du passé. Par sa masse,
et la durée de sa publication, elle fut à cette époque une institution. Elle eut jus‐
qu’à quatre mille souscripteurs et provoqua un mouvement d’affaires de huit
millions de livres tournois (une livre tournoi de 1760 équivaudrait à 12 euros en
2013). Son but est de faire l’inventaire, la somme des connaissances humaines,
en faisant un compromis entre les auteurs et les exigences du public, intéressé
par une vaste documentation et moins par les querelles philosophiques. L’ori‐
gine grecque du mot encyclopédie permet de comprendre à la fois quels furent
les moyens de diffusion et la finalité de ce monument de connaissances réunies
par d’Alembert et Diderot : énkyklos, le cercle, et paideia, l’éducation, les sa‐
voirs, soit la succession des connaissances. Ce terme est appliqué à un ouvrage
où l’on traite de toutes les sciences, de tous les arts, soit par ordre alphabétique,
soit méthodiquement par thème. C’est le premier ouvrage dans lequel diffé‐
rentes connaissances sont rangées sous des titres appropriés, placées par ordre
alphabétique et traitées de façon à montrer en même temps un tableau complet
des diverses branches de la science ainsi que leur connexité. L’éloge de son plan
se trouve dans la Grande Encyclopédie française. Son succès en Angleterre ne
fut certainement pas étranger à la détermination de Diderot de doter la France
d’un ouvrage de ce genre. Son Encyclopédie devait avoir dix volumes, mais
l’étendue de ses matières est telle qu’elle comptera dix-sept volumes de textes et
onze volumes de planches lorsqu’elle sera terminée (1751-1772). On y ajoutera
cinq volumes de suppléments et deux volumes de tables (1776-1780).
Les fondateurs
Les idées
LA FRANC-MAÇONNERIE
À partir de 1717, la maçonnerie devint une institution dont la caractéristique
était la réalisation d’une finalité susceptible d’être propagée par tous les peuples
civilisés. Le passage de la maçonnerie médiévale à la maçonnerie spéculative
fut ratifié, en 1723, par la rédaction et la publication des Constitutions. Il est
consigné désormais que la cathédrale ne sera plus un temple de pierre à
construire, mais que l’édifice, qui doit être élevé en l’honneur du grand archi‐
tecte, est la cathédrale de 1’univers, c’est-à-dire l’humanité elle-même. Que re‐
présente la maçonnerie au XVIIIe siècle ? C’est « une société moralisante, vo‐
lontiers épicurienne, jouant de ses mystères, qui ne pouvaient qu’exciter la cu‐
riosité, qui fut probablement un atout moteur des plus puissants du mouvement
d’adhésion aux loges à une époque de recherche hédonique sans contrainte. La
multiplication des sociétés de plaisirs plus ou moins ritualisés en est la
preuve5. » Les historiens se sont interrogés sur le mode de diffusion des idées
dans les différentes régions de France6. À la veille de la Révolution, la maçon‐
nerie comptait environ trente mille membres. Né dans une Angleterre déchirée,
le texte fondateur interdit, entre autres, toute discussion sur la politique et la re‐
ligion. Pourtant, l’article 1 des Constitutions d’Anderson de 1723 s’intitule
« Concerning god and religion » (« À propos de Dieu et de la religion ») bien
qu’on ne parle plus de Dieu dans le texte7. Ainsi peut-on dire qu’il existait au
XVIIIe siècle deux types de maçonneries, ou plus exactement deux écoles :
Malgré son apparente unité d’esprit, l’art du XVIIIe siècle présente des formes
diverses. Au cours de la période de régence exercée par Philippe d’Orléans, l’art
européen va évoluer du baroque vers le style régence. La lourdeur somptueuse
du baroque s’allège, les formes angulaires laissent place à des arrondis. Ce style
atteint son apogée aux alentours de 1720. L’une de ces caractéristiques est d’être
influencée par l’art d’Extrême-Orient que les artistes prennent comme mo‐
dèle. On voit naître des tapisseries à motifs chinois ou des meubles de laque
rouge ou noire. Un art de société va succéder à un art de cour. En effet on pré‐
fère l’intimité, le confort, l’agrément. L’ornementation plastique est moins im‐
portante en volume et s’intègre mieux à la surface des édifices. Vers 1730, une
nouvelle manifestation du goût pour le style ornemental et la décoration inté‐
rieure apparaît. Le style rococo qu’on confond souvent à tort avec le style ba‐
roque n’est que le style Louis XV à l’étranger. Un peu avant le règne de
Louis XVI le goût revient au classicisme, en reprenant la tradition de
Louis XIV mais avec un rythme plus discret, des proportions plus harmonieuses
et un sens impeccable de la mesure, ce qui donnera un aspect un peu froid.
Le mot de rococo, « rocaille », s’inspire pour la décoration des formes asy‐
métriques du coquillage. Les Italiens sont les spécialistes du façonnage du stuc
et ont une grande richesse d’invention pour trouver de nouvelles formes. La vie
mondaine se déroule plus facilement à la ville et le décor joue un rôle dominant
et devient une composante du bonheur à laquelle toute cette époque aspire. La
ville devient le centre d’une vie fondée sur l’intimité et la recherche du bonheur.
Les pièces des appartements se réduisent en taille considérablement, favorisant
le rapprochement des gens. Dans toute l’Europe, les artistes vont bénéficier du
mécénat des princes comme en Allemagne, en Italie, ou des rois comme en
Prusse, Suède. Les mécènes font partie de la bourgeoisie, tels des financiers
comme Crozat, protecteur de Watteau. Tous les grands maîtres se tournent,
pour trouver leur inspiration, vers l’Antiquité. De cette époque datent les fouilles
d’Herculanum, en 1738, et de Pompéi, en 1748. Les Réflexions sur l’imitation
des œuvres des Grecs en peinture et en sculpture de Johann Joachim Winckel‐
mann paraissent dès 1755. De 1770 à 1830 environ, le néoclassicisme est la
forme d’art qui va prévaloir en Europe, même si, dès le début du XIXe siècle, elle
est pénétrée par le romantisme.
Question de style
• Le style régence s’épanouit entre les styles Louis XIV et Louis XV pendant la régence de
Philippe d’Orléans (règne : 1715-1723).
• Le style rocaille qui se développe au milieu du siècle est en vogue sous Louis XV après
la Régence. On abandonne la ligne droite et privilégie la ligne ondulée et contournée évo‐
quant la forme des coquillages et des volutes. On parle de style rococo pour l’architecture.
Il atteindra en Bavière son apogée. Par la suite le style se diffuse dans toute l’Europe, en
Italie, puis dans le reste de l’Europe centrale. Ce phénomène sera favorisé par le déplace‐
ment des artistes. Les mécènes ne sont plus ni la monarchie, ni l’Église mais les riches
particuliers qui sont devenus les principaux protecteurs et commanditaires des artistes.
• Le néoclassicisme se développe de 1750 à 1830. Il est marqué par un retour à l’an‐
tique, le goût pour les lignes droites, l’ornementation discrète et recherche avant tout la
clarté, la simplicité. En effet, le néoclassicisme se targue de renouer avec la tradition de
l’antique, berceau de la culture occidentale. Les formes antiques sont considérées comme
bonnes et vraies. Historiquement le néoclassicisme se rattache certes aux Lumières mais
aussi à la Révolution française et à la bourgeoisie. Pour les Lumières, ce style symbolise
la croyance en des lois reconnaissables, tangibles. Pour la bourgeoisie, les valeurs et les
vertus civiques et républicaines et à travers cet art, elle veut symboliser ses revendica‐
tions. Les académies seront utilisées pour propager l’art et ses techniques et pour veiller à
la représentation de leurs grands principes éthiques.
Quelques peintres
Alors que dans la seconde moitié du XVIIe siècle, l’art du portrait en France
avait subi l’influence du faste absolutiste de Versailles, la disparition du mo‐
narque, en 1715, marque une nouvelle étape pour ce genre. Ce changement qui
se traduit dans l’art de la peinture par un goût nouveau pour les teintes claires
conduit à une plus grande recherche de la personnalité dans le portrait. La pro‐
fondeur psychologique est désormais l’une des composantes essentielles de l’art
du portrait. Il répond également à une nécessité sociale, car toute personne de
qualité se doit d’avoir son portrait. On le montre ou on l’offre en gage d’amitié.
Rousseau voulait offrir le sien à Mme d’Épinay, mais une brouille entre eux le
lui fera donner au maréchal de Luxembourg (Charles François de Montmoren‐
cy-Luxembourg, 1702-1764). Disciples de Rubens et de Van Dyck, Largil‐
lière et Rigaud prolongent l’idéal de Charles Le Brun. Rigaud devient le
chantre du portrait masculin, faisant ressortir la puissance du modèle là où Lar‐
gillière excelle dans le rendu délicat des étoffes, des dentelles. Une technique
nouvelle apparaît dès la Régence, et partage l’apogée de l’épanouissement du ro‐
coco : le pastel. À l’origine de cette vogue, la pastelliste vénitienne Rosalba
Carriera (1675-1757) qui le lance à Paris en 1720.
◆ Le Perpignanais Hyacinthe Rigaud (1659-1743), bien qu’ayant commen‐
cé à peindre au siècle précédent, est l’élève officiel de Van Dyck. Il réalise des
portraits de Louis XIV et Louis XV enfant, et veut assurer la transition.
◆ Maurice Quentin de La Tour (1704-1788) est considéré comme l’un des
plus grands portraitistes de cette période. À ce qui n’était considéré que comme
du dessin, le pastel, La Tour saura donner une force exquise à des nuances va‐
poreuses, délicates, estampées. En 1737, après avoir obtenu l’accord de l’Acadé‐
mie, il expose au Salon près de cent cinquante portraits qui en feront longtemps
la gloire. Portraitiste du roi, il le restera jusqu’en 1773.
◆ Jean-Marc Nattier (1685-1766), peintre des jolies femmes, représente La
Princesse de Lambesc (1749), Madame Henriette (1742), Madame Adélaïde
(1750), Mademoiselle de Clermont en sultane (1773) qui posèrent en nymphe,
en Minerve, en Flore et en Diane. La mythologie n’est qu’un prétexte à l’amuse‐
ment.
◆ Élisabeth Louise Vigée-Lebrun (1755-1842) témoigne d’un esprit tout
différent où se déclare la sentimentalité fin de siècle. Élève de Greuze, elle peint
de nombreux portraits de Marie-Antoinette. Celui où elle s’est représentée, ha‐
billée à la grecque avec sa fille, est tout aussi connu. Le sentiment qui s’en dé‐
gage est tendre et délicat.
La nature
La vie privée
◆ Jean-Baptiste Greuze (1725-1805) en est le meilleur représentant. Ses ta‐
bleaux aux tendances moralisatrices ont trouvé dans Diderot son apôtre thurifé‐
raire et plus particulièrement dans des œuvres comme L’Accordée de village
(1761), La Malédiction paternelle (1777), Le Fils puni (1777). « Le sujet est pa‐
thétique et l’on se sent gagné d’une émotion douce en le regardant. La composi‐
tion m’en a paru très belle : c’est la chose comme elle a dû se passer. Il y a
douze figures […] Comme elles s’enchaînent toutes ! comme elles vont en on‐
doyant et en pyramidant15 ! » Diderot ne voyait dans un tableau que prétexte à
discours, mais son génie est en train d’inventer le journalisme. Seul Philostrate,
rhéteur alexandrin dont on possède les écrits16, avait dépeint avec autant d’en‐
thousiasme des peintures.
◆ Jean-Baptiste Siméon Chardin (1699-1779) s’inspire aussi du quotidien.
Il aime représenter la petite bourgeoisie, ses voisins, ses proches. Sa Pour‐
voyeuse en est le meilleur exemple, ainsi que L’Enfant au toton (1738), fils d’un
joaillier du quartier. Les restes du repas traduisent également l’immobilité des
choses familières. C’est dans les intérieurs, et non dans les dehors mytholo‐
giques ou aristocratiques, que Chardin va chercher la réalité et non des images
conventionnelles de celle-ci.
La peinture d’histoire
Elle va devenir un des grands genres de l’art pictural. Ses thèmes de prédilec‐
tion sont les scènes bibliques, antiques, historiques, religieuses ou mytholo‐
giques. Des peintres comme Fragonard, Boucher, Van Loo, et surtout Jacques-
Louis David et plus tard Ingres, Girodet ont tous traités de tels thèmes. La ré‐
volution esthétique du néoclassicisme accompagne et précède la révolution poli‐
tique de 1789. La peinture d’histoire se veut alors morale au service des idées
nouvelles.
Jacques-Louis David (1748-1825) est l’élève de Joseph-Marie Vien. Prix de
Rome en 1774, il adopte la théorie du beau idéal néoclassique. Sa première
œuvre, le Bélisaire demandant l’aumône, exposée à Paris en 1781, lui vaut d’être
agréé à l’Académie de peinture. Avec Le Serment des Horaces (1785), on reste
dans la gravité de la tragédie cornélienne. Il se voue à l’interprétation des sujets
liés à l’histoire : Socrate (1787), Brutus (1789). Le Serment du Jeu de paume
(1791), son succès, le fait nommer membre de la Convention. Il vote la mort du
roi, joue un rôle important dans l’administration des arts. Il peint les derniers
moments de Lepelletier de Saint-Fargeau (1793), ceux de Marat, L’Ami du
peuple assassiné (1793). L’Empire utilise son pinceau et il devient le premier
peintre de l’empereur : Le Sacre de l’empereur Napoléon (1805-1807), Bona‐
parte franchit le Saint-Bernard (1800-1803). Toutes ses œuvres montrent un
désintéressement pour la couleur au profit d’une recherche pour un dessin d’une
grande netteté.
Montesquieu (1689-1755)
Contrat et nature
Au début, alors que la société n’est pas constituée, il existe une proportion
parfaite entre les besoins de l’homme, relativement modiques, et leur satisfac‐
tion. Autrement dit, dans l’état de nature, l’homme ne peut faire qu’un bon usage
de sa liberté. Mais très tôt, il tient compte des autres hommes. Tout état social
est mal puisqu’il prive 1’homme de la source du bien qui est la liberté indivi‐
duelle. La société se révèle donc être un mal nécessaire. L’évolution serait d’en
faire une « forme d’association […] par laquelle chacun s’unissant à tous,
n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant ». La solution
est une aliénation de la liberté, non pas au profit d’un seul (monarchie), ni de
plusieurs (aristocratie) mais de tous (démocratie). Ce qu’il faut, c’est un contrat
social, tous les membres d’une société s’engageant librement à suivre la volonté
générale.
◆ L’œuvre de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (1732-1799) illustre
le déclin qui va se produire pendant l’Ancien Régime. De sa vie, il aurait pu dire
comme son Figaro : « J’ai tout vu, tout fait, tout usé. » En effet il exerce diffé‐
rents métiers : horloger, musicien, financier, auteur dramatique, armateur, édi‐
teur… Dans ses comédies, il introduit une satire explosive de la société du
XVIIIe siècle : Le Barbier de Séville (1775), Le Mariage de Figaro (1778).
Si la forme versifiée est employée avec habilité par Voltaire dans son poème
sur le désastre de Lisbonne, la poésie ne se libère pas du classicisme. C’est tout
particulièrement André Chénier (1762-1794) qui retient l’attention. Il écrit du‐
rant son emprisonnement dans la prison de Saint-Lazare, entre le 7 mars et le
23 juillet, ses œuvres les plus remarquables : La Jeune Tarentine, une élégie,
ainsi que des Iambes satiriques qui visent clairement les Jacobins. Il se situe déjà
dans la lignée des romantiques du siècle suivant. Le XVIIIe siècle inventera
d’autres genres littéraires comme la critique d’art, Diderot, dans ses Salons, la
vulgarisation scientifique, Buffon, dans son imposante Histoire naturelle, le dis‐
cours politique, Mirabeau, Saint-Just, Danton, Robespierre. À la fin du
XVIIIe siècle, sous l’influence de Rousseau, le sentiment et l’émotion prennent
autant d’importance que la raison.
PHILOSOPHIE ET HISTOIRE
- Pensée et sensation
- Le moi
Notes
1. Et des récits de grands voyageurs comme Le Voyage en Perse, de Chardin (1686), ou la description
d’un lieu utopique : La Terre australe connue, de Gabriel de Foigny (1676), L’Histoire des Sévarambes, de
Denis Veiras (1677).
2. Honoré de Balzac, La Duchesse de Langeais, Paris, Le Livre de Poche, 1989.
3. À ce sujet, voir Marie Jean Antoine Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet, Esquisse d’un tableau
historique des progrès de l’esprit humain, 1791.
4. Emmanuel Sieyès, Qu’est-ce que le tiers-état ?, Paris, Flammarion, 2009, p. 51.
5. Jacques Brengues, « Les écrivains francs-maçons au XVIIIe siècle », in La Franc-Maçonnerie et Lu‐
mières au seuil de la Révolution française, Institut d’études et de recherches maçonniques, 1984, p. 83.
6. Deux éléments de diffusion : les auteurs d’ouvrages représentent environ quatre mille écrivains, soit
12,5 % des loges : Cazotte, Chamfort, Choderlos de Laclos, Florian, Joseph de Maistre, Montesquieu. Il y
a donc beaucoup d’auteurs mineurs et ce serait par eux que les concepts maçonniques auraient pu se trans‐
mettre. Leur centre d’intérêt reste le passé, et l’histoire représente 17 %, franc-maçonnerie 15 %, politique
14 %, philosophie 6 %. Ils sont surtout fascinés par les grands personnages de l’histoire, le culte de la per‐
sonnalité qui s’étend aussi à soi-même, puisqu’il y a beaucoup d’ouvrages autobiographiques. Tout ce qui
concerne l’ésotérisme, la symbolique, l’alchimie, l’occultisme, l’hermétisme ne représente que 20 % de l’en‐
semble des écrits maçonniques. (Source : Jacques Brengues, ibid.)
7. Jacques Brengues, « Origines et originalités des constitutions d’Anderson au XVIIIe siècle », in Institut
d’études et de recherches maçonniques, 1980, p. 13-21.
8. Le plus connu de ces systèmes maçonniques est le régime des philalètes, dont le fondateur était Sava‐
lette de Lange. Des enquêtes sont menées sur l’origine des hauts grades, particulièrement ceux des Rose-
Croix, sur les mystères religieux coexistant avec la religion chrétienne.
9. William Warburton, Essai sur les hiéroglyphes des Égyptiens, Paris, Aubier-Montaigne, 1992. D’autres
savants se penchèrent sur le déchiffrement des hiéroglyphes : Nicolas Claude Fabri de Peiresc (1580-
1637), Athanase Kircher (1602-1680), Bernard de Montfaucon (1655-1741), Jean-Jacques Barthélemy
(1716-1795), Georg Zöega (1755-1809).
10. Georges Gusdorf, Les sciences de l’homme sont-elles des sciences humaines ?, PUS, 1995, p. 85.
11. Systema naturae per regna tria naturae, secundum classes, ordines, genra species, cum characteribus,
differentiis synonymis, locis. Système de la nature, en trois règnes de la Nature, divisés en classes, ordres,
genres et espèces, avec les caractères, les différences, les synonymes et les localisations.
12. Michel Foucault, Naissance de la clinique, Paris, Puf, 2009, p. 198-199.
13. Essais, traduction en français moderne par A. Lanly, chap. XIII, Paris, Gallimard, « Quarto », 2009.
14. À ce sujet, voir Georges Gusdorf, L’Avènement des sciences humaines au siècle des Lumières, Paris,
Payot, 1973.
15. Denis Diderot, cité par Geneviève Cammagre, Carole Talon-Hugon, Diderot : l’expérience de l’art.
Salons de 1759, 1761, 1763 et Essais sur la peinture, Paris, Puf, 2007, p. 64.
16. Philostrate, La Galerie de tableaux, Paris, Les Belles Lettres, 1991.
17. Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, Paris, Bordas, 1993, livre I, p. 59.
18. Condorcet, Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain, Paris, Flammarion, 1998.
19. Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon, Les Époques de la nature, 1778.
20. Voltaire, Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, vol. 3, chap. LXXXI.
21. É. de Condillac, Œuvres complètes, 23 vol., Paris, 1798 ; 31 vol., Paris, 1803 ; 16 vol., Paris, 1882.
CHAPITRE XII
Peu sensible au baroque, l’architecture anglaise à cette époque puise son ins‐
piration chez Palladio. Robert Adam (1728-1792) et son frère James (1730-
1794) s’inspirent des antiquités grecques et latines qu’ils ont visitées à Pompéi.
Leur architecture retraduit toutes les tendances, goût des pilastres corinthiens,
ou ioniques, fûts décorés d’arabesques. Ils donnent leur nom à une décoration
de style pompéien. Sir John Soane (1753-1837) contribue à développer la
mode du dorique. Les meubles de Thomas Chippendale (1718-1779) per‐
mettent par leur succès une vaste diffusion en Angleterre mais aussi à l’étranger.
Ses œuvres, surtout en acajou, constituent une interprétation libre des thèmes
rocaille et gothique. Les coiffeuses ou les consoles ont une décoration exubé‐
rante ; elle sera plus équilibrée pour les meubles d’usage courant. Son style do‐
mine jusqu’à l’arrivée du style néoclassique d’Adam. À la fin du siècle s’impose
le jardin à l’anglaise d’allure plus capricieuse avec ses sentiers sinueux, ses lacs,
ses ponts rustiques, ses bosquets. William Chambers (1723-1796) apporte une
contribution importante dans l’art des jardins. Sa conception des jardins paysa‐
gers s’était enrichie à la suite d’un voyage en Chine. Les jardins de Bagatelle réa‐
lisés en 1777 par l’anglais Thomas Blaikie (1758-1838) s’en inspirent directe‐
ment.
◆ Thomas Gainsborough (1727-1788), comme Reynolds, est un portrai‐
tiste de grand talent, mais ne se consacre pas pour autant à cet unique genre. Il
peint pourtant la famille royale, dont huit portraits de George III. En 1768, à la
création de la Royal Academy, il figure parmi ses trente-six membres fonda‐
teurs. Son œuvre est d’une grande originalité. Il a su souligner les caractéris‐
tiques psychologiques en peignant les visages (Les Sœurs Linley, 1772). Il peut
être tout aussi mélancolique et solennel avec La Charrette du marché (1786),
lorsqu’il évoque la campagne anglaise.
◆ Joseph Mallord William Turner (1775-1851). Issu d’un milieu modeste
– son père était barbier –, Turner fera une série de voyages décisifs pour sa for‐
mation dans le Kent, en Écosse et sur le continent européen en 1802. Il peint
quelques marines très fortement inspirées de la tradition hollandaise du
XVIIe siècle. C’est à partir de 1800 environ que la qualité de sa peinture éclate en
ce qui concerne la luminosité de l’atmosphère ambiante (Didon construisant
Carthage, 1815, L’Incendie du Parlement, 1835). Il va aussi utiliser les forces de
la nature pour donner une puissance supplémentaire à ses paysages. Dans l’en‐
semble de son œuvre il a privilégié lumière et couleur. Ses compositions de plus
en plus fluides suggèrent espace et mouvement.
La doctrine métaphysique
La doctrine de Berkeley se définit comme un spiritualisme. Nous ne sommes
pas toujours la cause de nos perceptions, de nos idées qui sont inertes et pas‐
sives. Il faut la chercher dans l’auteur du monde sensible : Dieu. Une sorte de
langage existant dans la nature nous permet de connaître ses attributs en faisant
de Dieu la cause directe et nécessaire de nos sensations. Tout est esprit et le
monde n’est que le langage que nous parle Dieu. Dans le Siris, il s’aventure un
peu plus loin dans la métaphysique, dissertant à la fois sur Dieu, sur l’éther, sur
les archétypes. La purification intérieure est le moyen d’accéder à une intuition
des idées divines, en allant au-delà de la simple connaissance du sensible. Ainsi
l’éther, feu très pur animé par les idées, se concentre à son tour dans l’eau de
goudron et lui transmet ses effets bienfaisants.
Après avoir fait une critique de l’innéisme, le but essentiel de Hume (1711-
1776) est une critique du principe de causalité pour aboutir à la condamnation
de toute métaphysique. Il ne croit qu’à l’expérience. Il veut édifier une science
de la nature humaine, saisir ainsi tout ce qui se passe en l’homme.
Né à Édimbourg en 1711, il fait pendant trois ans un séjour à La Flèche où il
rédige son premier ouvrage, Traité de la nature humaine, qui est publié à
Londres entre 1739 et 1740. À partir de cette date, peu encouragé par le
manque de succès de son vaste ouvrage en trois volumes, il écrit au contraire
des essais courts sur des thèmes divers, englobant la politique, la littérature, la
psychologie, la religion. Les principaux essais sont Essais de morale et de poli‐
tique (1741), Essais philosophiques sur l’entendement humain (1748), Histoire
de la Grande-Bretagne (1754), Histoire naturelle de la religion (1757). En
1763, il fait un séjour en France où il a l’occasion de rencontrer le groupe des
encyclopédistes. Puis il rentre en Angleterre et occupe une place dans la diplo‐
matie. À partir de 1769, il se retire à Édimbourg où il meurt en 1776.
Sa doctrine
« Nous pouvons donc diviser toutes les perceptions de l’esprit en deux classes
ou espèces qui se distinguent par leurs différents degrés de force et de vivacité.
On nomme communément les perceptions moins fortes et moins vives, idées ou
pensées. La seconde espèce n’a pas encore reçu de dénomination commune.
[…] On me permettra d’user ici d’une petite liberté et de les nommer impres‐
sions1. » Hume résume les perceptions humaines à deux genres bien définis : les
pensées et les impressions. Les premières sont les perceptions faibles, les se‐
condes fortes. Pour vérifier la réalité d’une idée, il suffit de préciser l’impression
d’où elle dérive. Après avoir analysé les états psychiques, il tente de découvrir
les lois qui sont à l’origine de la synthèse de ces éléments. Il découvre trois prin‐
cipes : « Pour moi, il me paraît qu’il y a seulement trois principes de connexion
entre les idées, à savoir ressemblance, contiguïté dans le temps ou dans l’espace
et relation de cause à effet2. » Ainsi ressemblance, contiguïté et relation de
cause à effet constituent les trois principes nécessaires à la connexion des idées.
Or « ce n’est pas la raison mais l’expérience qui nous instruit des causes et des
effets ».
- Le principe de causalité
- Le scepticisme
Le scepticisme que prône Hume n’a rien à voir avec celui des Anciens. « Il y
a un scepticisme mitigé, une philosophie académique qui peut devenir durable
et utile ; elle peut être le résultat du pyrrhonisme ou scepticisme outré, après que
le bon sens et la réflexion ont réformé ses doutes universels3. » Rien, hormis
nos impressions, ne nous est connaissable, exception faite de nos perceptions
ainsi que le soulignent déjà Locke et Berkeley. C’est donc un scepticisme mo‐
derne que Hume élabore, un système fondé sur le statut des relations et leur ex‐
tériorité. Le scepticisme ancien, lui, avait édifié ses théories en tenant compte
de la variété des apparences sensibles et des erreurs des sens. Son enquête sur la
connaissance aboutit donc à une critique qui confond scepticisme, phénoména‐
lisme et subjectivisme. Le premier but du scepticisme moderne est de découvrir
les croyances illégitimes, celles qui ne sont pas susceptibles de justification phi‐
losophique ou qui ne donnent pas de probabilités. Autrement dit, il faut « limi‐
ter nos recherches à des sujets qui sont adaptés à l’étroite capacité de notre en‐
tendement ». La métaphysique quant à elle « est la région des sophismes et de
l’illusion ».
Notes
1. David Hume, Essais philosophiques sur l’entendement humain, I, deuxième essai, traduction française
de Philippe Folliot, Paris, Vrin, 2002, p. 133.
2. Ibid.
3. Victor Cousin, Histoire générale de la philosophie depuis les temps les plus anciens jusqu’au
XIXe siècle, Paris, Didier, 1872, p. 49.
CHAPITRE XIII
Naples, Venise reprennent peu à peu l’importance occupée par Rome jusque-
là.
◆ Filippo Juvaira (1676-1736), après un séjour bref à Rome, est nommé
premier architecte du roi du Piémont, en 1714. Une période féconde de ses
créations commence avec la reconstruction du dôme de l’église Saint-Philippe,
la façade de l’église Sainte-Christine. Il donne des dessins pour le château de Ri‐
voli et l’église Sainte-Croix à Turin. Formé au goût baroque, il possède l’art de
faire s’interpénétrer les volumes. Nous lui devons également le palais Madame à
Turin au décor travaillé.
◆ Giovanni Ballesta Piranesi dit Piranèse (1720-1778). À la demande des
Rezzonico, une aristocratique famille vénitienne, entre 1760-1770, il exerce ses
talents d’architecte. Il fournit des dessins pour l’aménagement des appartements
pontificaux, à Monte Cavallo, ainsi qu’à Castel Gondolfo.
C’est surtout à Venise que se manifeste le style rococo. Seule l’école véni‐
tienne continue de s’épanouir. Dans les autres villes, Florence, Rome, Naples, la
peinture entre dans une phase de léthargie, se contentant de prolonger la tradi‐
tion baroque hollandaise et française du XVIIe siècle. C’est à Venise que la pro‐
duction se distingue par un art pictural nouveau.
◆ Giovanni Battista Piazetta (1683-1754) est tenu pour le fondateur de ce
style en Italie avec ses teintes pesantes, dénuées de tout contraste, sa composi‐
tion mouvante et décontractée.
◆ Le peintre Giambattista Tiepolo (1696-1770) apparaît au milieu de cette
effervescence artistique. Il peint en 1726 sa première série de fresques dans le
palais de l’archevêché d’Udine, puis, en 1745, l’Histoire d’Antoine et Cléopâtre
dans le salon du palais Labia. Vers 1750-1751, il décore et orne le grand esca‐
lier de la Residenz Würzburg. De 1757 datent L’Iliade, L’Énéide, Le Roland fu‐
rieux. Invité par Charles III, il meurt à Madrid. Une des caractéristiques de son
art est sa façon de rendre la lumière. Lorsqu’il évoque les fêtes et les carnavals à
Venise, il utilise une gamme chromatique plus chaude encore. Tiepolo reste l’un
des rares peintres du XVIIIe siècle à décorer de vastes surfaces architecturales in‐
térieures par des fresques murales. Il n’utilise plus le clair-obscur cher au
XVIIe siècle mais fait preuve d’un sens monumental de la mise en scène. Contrai‐
rement aussi aux représentations passées, ses personnages ne pénètrent pas dans
le tableau mais viennent à la rencontre du spectateur, l’invitant à participer à la
scène.
◆ Giovanni Antonio Canal, surnommé Canaletto (1697-1768), est le
peintre des lieux, Venise, Londres et de l’Angleterre par excellence, qui a su
« trouver une atmosphère particulière » par rapport à d’autres artistes. Il emploie
souvent une camera obscura, une chambre noire, produisant de nombreuses
vues de Venise. Mieux qu’aucun autre, il a su retraduire l’esprit de Venise dans
une mouvance architecturale soyeuse de lumière et de reflets dans l’eau.
◆ Francesco Guardi (1712-1793) réalise quelques œuvres à caractère reli‐
gieux : La Douane et La Giudecca (1775), peintures de l’église dell’Angelo Raf‐
faele. Il inaugure le type des Vedute, tableaux se voulant l’exact rendu de la réa‐
lité des paysages. Afin d’y parvenir, il utilise aussi la camera obscura, appareil
permettant de reproduire des images par une opération de décalquage. Rendre
avec réalisme le jeu de l’ombre et de la lumière, tout comme une application
stricte des lois de la perspective sont les caractéristiques de sa peinture qui
donne une vision pourtant sublimée de Venise (Le Départ du Bucentaure,
1780). Ses peintures londoniennes (La Tamise, 1747) témoignent d’une atmo‐
sphère et d’une transparence vaporeuse qui inspirera plus tard Gainsborough et
Turner.
Joseph Ier (1705-1711) poursuit la guerre contre la France, servi par des gé‐
néraux d’exception, le prince Eugène (Eugène de Savoie-Carignan, 1663-
1721) et John Churchill, duc de Marlborough (1650-1722), au service de
l’Angleterre. Il meurt prématurément de la petite vérole en 1711. Son frère
Charles VI (1711-1740) lui succède. En 1713, il promulgue la Pragmatique
Sanction qui assure à ses filles le trône en cas d’absence d’héritier mâle, dans ses
domaines patrimoniaux. Le prince Eugène remporte les victoires de Peterwar‐
dein (1716) et Belgrade (1717) sur les Turcs, contraints de signer la paix de
Passarowitz (21 juillet 1718) par laquelle l’Autriche garde le Banat, la Petite Va‐
lachie et l’essentiel de la Serbie, conquêtes rendues, après la mort du prince Eu‐
gène, au traité de Belgrade en 1739. Charles VI meurt le 20 octobre 1740. Il est
le dernier souverain masculin des Habsbourg d’Autriche. Sa fille, Marie-Thé‐
rèse (1740-1780), lui succède, mais elle est contestée par Philippe V d’Espagne
et l’électeur de Bavière, pendant que le roi de Prusse Frédéric II (1740-1786)
en profite pour occuper en partie la Silésie.
C’est son grand-père, Frédéric III (1688-1713), électeur de Brandebourg,
qui, le premier, reçoit le 18 janvier 1701 la couronne de Prusse et devient le roi
Frédéric Ier de Prusse (1701-1713). Son fils, Frédéric-Guillaume Ier (1713-
1740), économe, travailleur acharné, forge la Prusse par une administration
contrôlée étroitement et le développement de l’armée, dont les officiers oc‐
cupent les postes principaux de l’État. Gestionnaire avisé, il laisse à son fils Fré‐
déric II le Grand (1740-1786) un État prospère et l’une des premières armées
d’Europe. La guerre de Succession d’Autriche (1740-1748) oppose Marie-Thé‐
rèse et son alliée l’Angleterre à la Prusse, la Saxe, la Bavière, la France, le Pié‐
mont-Sardaigne et l’Espagne. La paix d’Aix-la-Chapelle (18 décembre 1748) re‐
connaît les droits de Marie-Thérèse en dépit de la perte de la Silésie au profit de
la Prusse. Son époux, François-Étienne de Lorraine (1708-1765), élu empereur
François Ier (règne : 1745-1765), voit son titre impérial reconnu. Marie-Thé‐
rèse est impératrice consort. Par la guerre de Sept Ans (1756-1763), Marie-
Thérèse tente en vain de reprendre la Silésie, riche région minière, à la Prusse.
En 1772, elle prend part à la partition de la Pologne, reçoit la Galicie (en
Ukraine) et la Petite Pologne (au sud-est de l’État actuel). À partir de 1756,
l’Autriche se rapproche de la France et de la Russie pour contrer la menace
grandissante de la Prusse. Son fils Joseph II (1765-1790) est élu empereur à la
mort de son père en 1765.
Il devient pleinement souverain des possessions héréditaires des Habsbourg à
la mort de Marie-Thérèse en 1780. Il s’allie à la Prusse et à la Russie pour se
partager la Pologne en 1772. Ses ambitieuses réformes, sa volonté d’unifier à
marche forcée les divers mondes culturels de ses possessions, la vaine tentative
pour prendre le contrôle de la Bavière laissent le souvenir d’un prince adminis‐
tratif et froid. Connu pour son goût prononcé pour la musique, il commande à
Mozart en 1782 L’Enlèvement au sérail, Die Entführung aus dem Serail, premier
opéra en allemand. En Prusse, le faible Frédéric-Guillaume II (1786-1797)
succède à Frédéric II, sans pouvoir poursuivre l’œuvre entreprise. Le frère de
Joseph II, Léopold II (1790-1792), lui succède brièvement. Il met fin à la
guerre avec les Turcs par la paix de Sistova (1791).
L’ABANDON DU RATIONALISME
LE CRITICISME
Les influences
D’origine protestante, Kant est marqué par la théologie luthérienne dont il re‐
tient la conception de la foi comme acte pratique sans fondement théorique. Les
thèses essentielles de sa métaphysique, la liberté, l’immortalité de l’âme, l’exis‐
tence de Dieu, prennent racine dans ces bases. L’étude du phénoménisme de
Hume le tire de son « sommeil dogmatique ». De Rousseau, il retient que la
conscience morale est un absolu, que la moralité réside dans la pureté d’inten‐
tion. Enfin, la seule métaphysique qu’il connaît est celle de Christian von Wolff
(1679-1754). Malheureusement trop dogmatique, elle ne peut justifier et criti‐
quer la raison, puisqu’elle est a priori et indépendante de toute expérience. Il
conserve l’idée qu’elle est néanmoins a priori. Afin de garder de ces influences
la part la plus importante, il pose « le problème critique », problème visant à la
connaissance humaine en général.
Sa doctrine
Afin de cerner les pouvoirs et les limites de la raison, Kant s’interroge sur
quatre questions fondamentales de la philosophie : Que puis-je savoir ? (la mé‐
taphysique y répond) ; Que dois-je faire ? (la morale y répond) ; Que m’est-il
permis d’espérer ? (la religion y répond) ; Qu’est-ce que l’homme ? (l’anthropo‐
logie y répond). Le point de départ de la doctrine de Kant s’appuie sur le
constat de deux faits dont l’esprit humain est certain puisqu’ils lui sont inté‐
rieurs : le fait de la science, celui de la morale. Il existe des connaissances vraies
et des obligations morales, les deux s’imposent à toute conscience raisonnable.
Afin de répondre à la question de savoir comment la science et la morale sont
possibles, comment concilier l’une et l’autre, l’une supposant la nécessité des lois
naturelles et l’autre celle des actes humains, il met au point une critique de la
raison pure.
L’attitude critique
L’analyse transcendantale
L’esthétique transcendantale
L’analytique transcendantale
Si les sciences n’ont pas besoin de critique préalable, ce n’est pas le cas de la
métaphysique. Dans la dernière partie de Critique de la raison pure, c’est ce que
Kant essaie de faire. L’étude de la raison est le moyen de saisir a priori « l’in‐
conditionné », condition dernière de toutes les conditions. Il définit trois types
de raisonnement : catégorique, hypothétique et disjonctif. Ceux-ci permettent
d’atteindre l’âme, le monde et Dieu. Le cogito permet à la raison d’aboutir à
l’existence de l’âme. Pour passer du cogito à la res cogitans (chose pensante),
Kant distingue quatre paralogismes. Il conclut à l’impossibilité de construire par
le raisonnement théorique une métaphysique qui ait une valeur objective et
réelle, quant au sujet de l’univers, la raison se perd dans des antinomies6 inso‐
lubles. C’est à partir de ces distinctions, que la réfutation kantienne se nourrit
pour développer l’argument ontologique : il est impossible de prouver l’exis‐
tence d’un objet par la simple valeur de l’analyse de son concept. Dieu reste
donc un idéal pour la raison. « Par conséquent, la preuve ontologique (carté‐
sienne) si célèbre qui veut démontrer par concepts l’existence d’un Être su‐
prême, fait dépenser en vain toute la peine que l’on y consacre7. »
L’impératif catégorique est un ordre donné par la raison qui ne nous en ex‐
plique pas les finalités : « Les impératifs sont de différentes sortes, ils com‐
mandent soit hypothétiquement, soit catégoriquement […] L’impératif catégo‐
rique serait celui qui représenterait une action comme objectivement nécessaire
en elle-même indépendamment de tout autre but8. » La morale de Kant est
avant tout une morale du devoir, il entend par devoir une loi qui s’impose à tout
être raisonnable par l’a priori de la raison. L’intention de se conformer au de‐
voir par souci du devoir est ce que Kant appelle « la bonne volonté ». Cette loi
morale ne peut venir que de l’individu lui-même : l’agent moral est autonome.
Seul le devoir est le fondement de la morale et non le bien. Ce qui en dépend :
la liberté, l’immortalité de l’âme, l’existence de Dieu. Il s’agit d’un déterminisme
« phénoménal » et d’une liberté « nouménale ».
Développement de la doctrine
Notes
1. Johann Wolfgang von Goethe, Les Souffrances du jeune Werther, trad. B. Groethuysen, Paris, Galli‐
mard, 1954, p. 98.
2. Kant, Préface à la seconde édition de la Critique de la raison pure (1787).
3. Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, Paris, Puf, « Quadrige », 2012, p. 18.
4. Ibid.
5. Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, A 369, AK IV, 232, TP, 299.
6. Antinomies : opposition de deux propositions contradictoires, thèse et antithèse, démontrées toutes
deux par des arguments aussi probants.
7. Emmanuel Kant, Critique de la raison pure, chap. III, section IV, op. cit.
8. Emmanuel Kant, Fondation de la métaphysique des mœurs, deuxième section, trad. A. Renaut, Paris,
GF-Flammarion, p. 88-89.
CHAPITRE XV
Le soulèvement d’Aranjuez est un échec pour Napoléon Ier. Il lui faut une Espagne sou‐
mise pour contrôler le Portugal qui le défie, ne respecte pas le blocus continental et conti‐
nue de commercer avec l’Angleterre. Il convoque donc en urgence la famille royale espa‐
gnole à Bayonne, Charles IV l’ancien roi, Ferdinand VII, son fils, le nouveau. L’empereur
menace Ferdinand qui restitue le trône à son père. Lequel s’empresse de le troquer contre
des terres et des revenus en France, au profit de Napoléon Ier. Ce dernier nomme son
frère, Joseph Bonaparte (1768-1844), roi d’Espagne. Il devient Joseph-Napoléon Ier
d’Espagne (1808-1813). Charles IV demeure l’otage de Napoléon jusqu’en 1814, puis se
réfugie à Rome où il meurt le 20 janvier 1819. Son épouse Marie-Louise l’a précédé dans
la tombe le 2 janvier 1819, mais avec la satisfaction de mourir entourée du fidèle Godoy
qui ne les a pas quittés, d’exil en exil.
Les nobles choisissent alors une nièce de Pierre le Grand, Anne Ivanovna
(1693-1740), qui devient l’impératrice Anne Ire (règne : 1730-1740). Ils lui ont
imposé des capitulations limitant son pouvoir, qu’elle se dépêche de renier une
fois sur le trône. Peu apte à régner, elle laisse le pouvoir à ses favoris, dont Ernst
Bühren ou Biron (1690-1772). En 1734 l’Ukraine est définitivement annexée.
Une guerre contre l’Empire ottoman se termine par la perte des conquêtes, sauf
Azov. Anne désigne son petit-neveu Ivan VI (1740-1741) pour lui succéder.
L’enfant est détrôné en bas âge. Élisabeth Ire (1741-1762), seconde fille de
Pierre le Grand, monte sur le trône. La guerre contre la Suède, qui a repris,
s’achève par l’annexion de la Finlande. Elle gouverne avec son amant, le comte
Alexis Razoumovski (1709-1771), qu’elle épouse en secret. La guerre contre la
Prusse se termine par une série de victoires russes. Seule la mort d’Élisabeth
sauve la Prusse du désastre. Son successeur, son neveu Pierre III (règne : janvier
1762-juillet 1762), est de culture germanique, ardent admirateur de la Prusse. Il
met aussitôt fin aux combats. Un coup d’État met fin à son règne : il est assassi‐
né le 17 juillet 1762. Son épouse, Catherine, princesse d’origine allemande qui a
commandité cet assassinat, devient l’impératrice Catherine II (1762-1796).
Souveraine des Lumières, elle ouvre la Russie à la culture occidentale, se
montre la digne héritière de Pierre le Grand. En 1764, elle fait assassiner
Ivan VI, emprisonné depuis 1741. Elle conclut une alliance avec la Prusse
contre la Pologne. La guerre contre l’Empire ottoman reprend en 1768. La
flotte turque est défaite en 1770, l’armée russe en 1771.
En 1783, elle annexe la Crimée prise aux Ottomans. La guerre contre la
Suède, entre 1788 et 1790, confirme la possession des territoires conquis par
Pierre le Grand. En 1793 Prusse et Russie se partagent la Pologne. Catherine II
a apporté plus de 500 000 km2 à la Russie. À l’intérieur, elle écrase la révolte de
Pougatchev (v. 1742-1775) et de ses cosaques en 1773-1774. Le gouverne‐
ment est marqué par la forte personnalité du prince Grigori Potemkine (1739-
1791), qu’elle épouse secrètement en 1774, et celle de Grigori Orlov (1734-
1784), l’un de ses amants favoris, qui joue un rôle fondamental dans la chute de
Pierre III. Persuadée des faibles capacités de son fils Paul, Catherine souhaitait
laisser le trône à son petit-fils Alexandre, mais à sa mort c’est Paul Ier (1796-
1801) qui lui succède. Opposé depuis toujours à Catherine, proche de caractère
de son père Pierre III, Paul Ier est peu aimé en Russie. Il place le pays à la tête
de la deuxième coalition contre la France révolutionnaire. Mais la colère contre
le souverain gronde dans l’armée. Il est assassiné par un groupe d’officiers le
23 mars 1801, qui proclame empereur Alexandre Ier (1801-1825).
VERS L’INDÉPENDANCE
LA COLONISATION
LE PROBLÈME INDIEN
1. L’Inde
La mort d’Aurengzeb, en 1707, clôt l’ère des Grands Moghols, les souverains
suivants sont désignés sous la seule appellation de Moghols. Bahadur Shah
(1707-1712) règne encore avec une certaine autorité, mais ne peut contenir la
montée en puissance des nawabs, gouverneurs de province devenus indépen‐
dants. Après lui, les empereurs ne le sont guère que de nom, sans pouvoir véri‐
table. Ils dépendent du bon vouloir de seigneurs de la guerre et de courtisans qui
consentent à les honorer d’un titre vide de réel pouvoir. La ville de Delhi est
prise et saccagée à deux reprises, par Nādir Shah (1736-1747) de Perse et par
Ahmed Shah Abdali (1747-1772), créateur de l’Empire Durrani (1747-1826)
en Afghanistan. L’essentiel du territoire de l’Empire moghol passe sous contrôle
des Marathes, redoutables princes guerriers. Après 1800, douze petites princi‐
pautés des environs de Lahore s’unissent sous l’autorité unique de Ranjit Singh
(1780-1839) formant l’Empire sikh autour du Panjab, qui dure cinquante ans
avant d’être annexé par les Britanniques en 1849. La puissance de l’État s’appuie
sur une armée de quatre-vingt-dix mille hommes habillés d’uniformes de type
anglais. Les instructeurs sont français et italiens. Après la soumission des sikhs
et la défaite de Tippu Sahib (ou Tippu Sultan) (1749-1799) à Mysore en
1799, seuls les Marathes s’opposent à l’avancée britannique. La troisième guerre
des Marathes qui défend l’hindouisme dure de 1817 à 1818. Les princes ma‐
rathes appuient les incursions des pillards pindaris sur les territoires de la Com‐
pagnie anglaise des Indes orientales. Finalement les Anglais parviennent à
abattre les princes marathes considérablement affaiblis par leurs dissensions en
leur infligeant une série de défaites, qui entraîne par son ampleur la disparition
de la confédération marathe. Le Moghol doit également faire face à l’Empire
sikh et aux Nizams ou princes de Hyderabad. En 1804 Shah Alam II (1759-
1806) accepte la protection de la Compagnie anglaise des Indes orientales. C’est
une mise sous tutelle, bien rendue par le titre de « roi de Delhi » que lui attri‐
buent les Britanniques, omettant à dessein celui, de pure forme pourtant,
d’« empereur des Indes ». Les Britanniques dissolvent l’armée moghole. En
1857, ils prennent prétexte de la révolte des Cipayes pour déposer le dernier
Moghol, Bahadur Shah Zafar (1837-1857), exilé en Birmanie jusqu’à sa mort
en 1862. La révolte des Cipayes est celle des auxiliaires indigènes de l’armée
britannique, les Cipayes, lassés d’être considérés par le racisme et le mépris
comme des soldats de seconde catégorie. Commencée en mai 1857 à Meerut,
au nord-est de Delhi, elle devient rapidement une guerre d’indépendance quand
rajahs, princes indiens la rejoignent, comme la Rani, ou reine de Jhansi (1828-
1858). La guerre dure jusqu’en 1859. En 1858, la Compagnie anglaise des
Indes orientales qui administrait les territoires soumis pour la couronne britan‐
nique est dissoute. Désormais, dans le cadre du British Raj, Empire indien bri‐
tannique, la couronne administre elle-même l’empire, avec à sa tête un vice-roi
des Indes.
2. La Chine
La dernière dynastie chinoise véritable, celle des Ming, périclite dans la pre‐
mière moitié du XVIIe siècle, avant de s’effondrer face aux Mandchous venus du
Nord en 1644. Le contrôle des frontières de l’Empire n’est plus assuré, faute de
troupes en nombre suffisant et aguerries. Les régions de la péninsule indochi‐
noise, en principe assujetties au versement d’un tribut, ne le livrent plus, la suze‐
raineté chinoise y est au mieux de pure forme. Au nord-est de la Chine, les clans
mandchous se sont unis et harcèlent la zone frontalière de l’empire des Ming. La
faiblesse de la dynastie devient si évidente aux yeux de tous que des bandes de
brigands et de paysans prennent la ville de Pékin et la pillent. L’empereur est
contraint au suicide, le général en chef de ses armées sollicite l’aide des Mand‐
chous. Ces derniers reprennent aisément la capitale, mais n’entendent nullement
restaurer les princes précédents. Ils prennent le pouvoir et fondent l’ultime dy‐
nastie impériale, celle des Qing, les « Purs », qui dure de 1644 à 1911.
C’est Nurhachi (1582-1626) qui, en 1582, prend la tête des Jürchens mand‐
chous et commence à unifier sous son autorité les autres tribus. En 1616 il se
proclame khan et fonde la dynastie des Jin postérieurs (1616-1644). Elle prend
fin en 1644, quand son successeur Shunzhi (1644-1661) devient le premier
empereur de la nouvelle et ultime dynastie régnante en Chine, celle des Qing.
Nurhachi organise les clans mandchous, querelleurs, prompts à la guerre civile,
en unités dévouées à ses ordres, les « Huit Bannières ». C’est un système poli‐
tique et social. En temps de paix, les hommes de la bannière fournissent un
contingent. Les membres des bannières, une fois la Chine conquise, forment
l’aristocratie mandchoue, qui a vocation à gouverner l’ethnie majoritaire des
Chinois Han. Le fils de Nurhachi, Huang Taiji (1626-1643), est un souverain,
stricto sensu, de la dynastie des Jin postérieurs, mais il est considéré comme le
second monarque de la dynastie Qing, par convention. Déjà maître du monde
mandchou, il s’empare d’une grande partie de la Chine. La conquête définitive
bénéficie toutefois à son fils, Shunzhi. Empereur de Chine du Nord en 1643, il
devient monarque du pays tout entier en 1644. Reprenant les rites des Ming, il
est proclamé « Fils du Ciel » et détenteur du « mandat céleste » : le Ciel le laisse
régner tant qu’il démontre les qualités d’un souverain véritable. Le système des
examens impériaux pour recruter des mandarins est renforcé, le prince veut la
fusion entre Mandchous minoritaires mais au pouvoir et Chinois d’ethnie majo‐
ritaire Han. Il inaugure une politique à éclipse à l’égard de l’Occident en Chine,
faite d’alternance d’accueil et d’interdiction, de rejet xénophobe, en autorisant la
venue à Pékin du jésuite Adam Schall.
Deux princes d’exception portent la dynastie Qing à son apogée, les empe‐
reurs Kangxi (1662-1722) et Qianlong (1735-1796). Leurs longs règnes as‐
surent à la Chine prospérité et puissance. Leurs successeurs, enfermés dans la
Cité pourpre interdite de Pékin, laissant la mainmise du palais aux eunuques, se
replient sur le rêve d’une Chine impériale redoutable défunte. Incapables de ré‐
former l’empire de l’intérieur, ils le laissent dépecer peu à peu par les puissances
occidentales renforcées par la révolution industrielle et le Japon. La révolution
sociale et politique menée par ce dernier inspire une tentative de réforme de
l’appareil d’État, en 1898, par l’empereur Guangxu (1875-1908), mais l’impé‐
ratrice douairière Cixi (1835-1908) l’évince du pouvoir, le détient jusqu’à sa
mort en étroite et humiliante tutelle, enfermé et gardé. Kangxi (1662-1722) est
l’exact contemporain de Louis XIV, avec lequel il échange une correspondance,
où, suivant les usages des princes, ils se nomment réciproquement « cousin ».
Souverain lettré, curieux, il ouvre la cour à un père jésuite, Jean-François Ger‐
billon (1654-1707), chargé de l’enseignement des mathématiques et de l’astro‐
nomie, qui traduit en chinois les Éléments d’Euclide, introduit la peinture occi‐
dentale. À l’extérieur, les Mongols, les Tibétains, les Russes sont contenus. À
l’intérieur, les derniers princes encore fidèles à l’ancienne dynastie Ming tentent
une révolte dans le Sud, vite écrasée. Désormais, en reprenant le système des
examens déjà à l’honneur sous les Tang, les Qing recrutent par méritocratie des
fonctionnaires dont ils s’assurent la fidélité. La politique religieuse de Kangxi
suit deux périodes : en 1692 il annule l’édit impérial de 1665 qui prohibait le
christianisme en Chine. Mais le pape refuse la pratique d’un syncrétisme local,
teinté de rites comme le culte des ancêtres. Cette condamnation modifie l’atti‐
tude de l’empereur, en 1717 la prédication est interdite, en 1724 son successeur
expulse les missionnaires. Qianlong (1735-1796), au long de ses soixante et
une années de règne, agrandit l’empire par l’expansion et la création de nou‐
velles provinces au Nord-Ouest, élimine les menaces turque et mongole. Il res‐
taure et embellit la Cité interdite, qui portait encore les marques des troubles de
1644. Il maintient un contact avec le monde occidental, mais surtout sous la
forme d’entretiens savants avec des pères jésuites reçus à la cour, le christia‐
nisme demeure en revanche interdit. L’empereur comprend que le maintien de
sa dynastie est lié à sa capacité à assurer aux Chinois une nourriture abondante,
ses édits favorisent le développement d’une paysannerie de petits et moyens
propriétaires, la triple récolte annuelle de riz se généralise.
ARTS ET LETTRES SOUS LES PREMIERS QING
L’ÉPOQUE CONTEMPORAINE
A. LE MONDE DU XIXe SIÈCLE
Le XIXe siècle est marqué par deux dates qui ouvrent et ferment la période, la
Révolution française de 1789 et les débuts de la Première Guerre mondiale en
1914. La première marque la fin de l’Ancien Régime dans un pays gouverné de‐
puis le Moyen Âge par des dynasties royales. Les horizons nouveaux qui
s’ouvrent sont dus à l’énoncé de la souveraineté populaire, enjeu des révolutions
de 1830, 1848, 1871. Toutes les revendications politiques et sociales qui tra‐
versent le XIXe siècle y seront puisées, respect de l’individu, égalité au sein des
valeurs de la Révolution. La France effectivement sera traversée par de nom‐
breuses crises, trois révolutions, plusieurs formes de gouvernement : un consu‐
lat, deux empires, trois monarchies et deux républiques. Il est difficile d’évaluer
l’héritage culturel que laisse la Révolution française. Toujours est-il que libérant
la pensée de l’autorité de l’Église et de la tutelle royale, elle permet au progrès
intellectuel d’émerger. Les théories sur l’évolutionnisme relèguent le fixisme,
fondé sur l’interprétation de la Genèse, au second plan. Le comtisme, le positi‐
visme remplacent l’ordre divin par l’ordre naturel et montrent l’émancipation de
ces sociétés modernes à l’égard des religions et de l’Église. Époque d’instabili‐
té politique, sociale, économique, le XIXe siècle est marqué par l’apparition de
nombreux courants artistiques et littéraires : romantisme, réalisme, naturalisme,
impressionnisme, symbolisme, correspondant à une vie originale de l’homme
dans le monde.
CHAPITRE PREMIER
Le Premier Empire
Napoléon Ier réforme la France en profondeur, lui donne les structures d’un
État apte à traverser le XIXe siècle. Il s’attache tout d’abord à mettre fin aux que‐
relles religieuses nées de la Révolution française. Il signe le 15 juillet 1801 un
concordat avec le pape Pie VII. Le catholicisme cesse d’être « religion d’État »,
donc obligatoire, pour devenir religion « de la majorité des citoyens français ».
Le Constitution civile du clergé est désavouée, le pape accorde l’investiture ca‐
nonique aux évêques choisis par Bonaparte. Ce concordat reste en vigueur jus‐
qu’à la loi de 1905 de séparation de l’Église et de l’État. Les protestants et les
juifs se voient plus tard reconnaître la liberté de culte. Le 13 février 1800, la
Banque de France est fondée, elle reçoit en 1803 le monopole de l’émission de
la monnaie. Le 28 mars 1803 est créé le franc germinal, pièce d’argent de
5 grammes. Le franc germinal annonce une stabilité de la monnaie qui ne prend
fin qu’en 1914. C’est également dans le domaine financier qu’intervient l’empe‐
reur en établissant une fiscalité indirecte sur le tabac et les boissons, les droits
réunis. En 1807 est mise en place la Cour des comptes qui a la charge de véri‐
fier les comptes des administrations publiques. Après les tourmentes révolution‐
naires, Napoléon Ier entend jeter les bases d’une société stable, qu’il nomme lui-
même les « masses de granit » : l’éducation, la légion d’honneur, le Code civil.
Pour éduquer les enfants de la bourgeoisie, les lycées, organisés militairement,
préparent depuis 1802 à l’université impériale née en 1808. L’empereur veut des
administrateurs, civils et militaires, efficaces. L’instruction civique est fondée
sur le catéchisme impérial de 1806 qui prévoit les obligations des sujets :
amour, obéissance, service militaire, tributs ordonnés pour la conversion de
l’empire, prières ferventes pour le salut de l’empereur. L’aristocratie est rétablie
avec la création le 19 mai 1802 de la Légion d’honneur, destinée à récompenser
les meilleurs, suivie par le retour de la noblesse, d’empire cette fois. À partir de
1808, Napoléon Ier distribue les titres de comte, duc, baron. Mais le monument
laissé est sans conteste le Code civil publié en 1804 qui, pour l’essentiel, de‐
meure en usage jusqu’après 1968. Au long de ses deux mille deux cent quatre-
vingt-un articles, il définit droits et devoirs du citoyen, garantit la propriété pri‐
vée, promeut la famille, mais officialise une conception napoléonienne de l’infé‐
riorité de la femme, éternelle mineure sous tutelle de son père, son époux, un
parent masculin.
LA RESTAURATION (1815-1830)
Charles X, l’absolutiste
Le prince président
Boulanger
Dreyfus
Mais le plus grand scandale commence à peine, après quelques années de re‐
lative modération politique. Il s’agit de l’affaire Dreyfus (1894-1899). En 1894,
il apparaît qu’un officier d’état-major fournit à l’Allemagne des secrets mili‐
taires. Après une enquête hâtive, le capitaine Alfred Dreyfus (1859-1935), à la
fois juif et Alsacien, est arrêté. Déclaré coupable par le conseil de guerre, il est
condamné à la dégradation militaire et à la détention à vie dans une enceinte
fortifiée. En mars 1896, le lieutenant-colonel Georges Picquart (1854-1914),
nouveau chef du renseignement militaire, découvre que le vrai coupable est le
commandant Esterházy (1847-1923) et fournit les preuves à ses chefs. Il est
expédié en Tunisie. La famille de Dreyfus, de son côté, obtient l’appui du séna‐
teur Scheurer-Kestner (1833-1899) qui interpelle le gouvernement en no‐
vembre 1897. Le volet politique de l’affaire commence. La France se divise en
deux camps violemment antagonistes : les antidreyfusards soutiennent l’armée
qui va reprendre l’Alsace-Lorraine et ne peut être qu’infaillible, insoupçonnable.
Il s’agit de la grande masse des catholiques avec le journal La Croix, de Mau‐
rice Barrès (1862-1923), de la Ligue de la patrie française, d’Édouard Dru‐
mont (1844-1917) et de la Ligue nationale antisémitique de France, d’intellec‐
tuels, Albert de Mun (1841-1914), Jules Lemaître (1853-1914), du musicien
François Coppée (1842-1908). Les dreyfusards sont conduits par Clemenceau
et son journal L’Aurore, dans lequel Émile Zola (1840-1902) fait paraître, le
13 janvier 1898, une lettre ouverte au président de la République sous le titre
terrible de « J’accuse », où il dresse l’acte d’accusation de tous ceux, civils et mi‐
litaires, qui ont couvert la forfaiture. La cour d’assisses le condamne à un an de
prison, qu’il ne fait pas, car il fuit à Londres, et 3 000 francs d’amende, payés
avec les frais de justice par Octave Mirbeau (1848-1917). Ils sont soutenus par
Le Figaro, la Ligue des droits de l’homme, fondée en 1898, et Jean Jaurès. Ils
exigent le respect des droits de la personne, de la défense, de l’innocence. En
1898 est révélé que le colonel Hubert-Joseph Henry (1846-1898) a forgé de
toutes pièces un faux pour accabler Dreyfus. La Cour de cassation autorise un
second procès en révision, annule le jugement de 1894. Une nouvelle cour mili‐
taire, à Rennes, reconnaît Dreyfus coupable une fois encore mais avec d’invrai‐
semblables « circonstances atténuantes » et le condamne à dix ans de prison, en
août 1899. Le président Émile Loubet (1838-1929) use aussitôt de son droit
de grâce. Dreyfus est libéré, mais doit attendre 1906 pour être réhabilité et réin‐
tégré, à sa demande, dans l’armée, où il poursuit sa carrière jusqu’à la retraite.
Au milieu des écoles nouvelles, un style officiel se maintient, ayant les fa‐
veurs du public et des critiques. Art issu du néoclassicisme, l’académisme prend
aussi le nom d’art pompier, peut-être en allusion à certains personnages casqués
dans les compositions, d’un style chargé, très théâtral. Il est l’aboutissement d’un
système créé par Louis XIV qui, se rendant compte du pouvoir subversif de
l’art, souhaitait, en créant les Académies royales, garder un contrôle sur les acti‐
vités de ses artistes. Ce système fonctionna jusqu’en 1914.
Les principales caractéristiques artistiques de la peinture aca‐
démique
• La forme prime sur la couleur
• La perfection du dessin, de la ligne, de la composition prend le pas sur la valeur
des contours
• Utilisation de la lumière en coup de phare
• Représentation du moment avant l’action
• Thème moralisateur, souvent propagandiste (Napoléon)
• Mise en avant de la simplicité, du naturel
• Mise en avant des valeurs civiques
• Art de la précision
• Thèmes inspirés de l’Antiquité grecque et romaine
• Peinture soutenue par des institutions
L’école de Barbizon, dite « école de 1830 », tient son nom du petit village à
60 km de Fontainebleau, où des peintres regroupés autour de Théodore Rous‐
seau cherchent dans la nature un renouveau du paysage. Jean-François Millet,
Théodore Rousseau, Jules Dupré (1811-1889) et leurs amis y trouvent une
source incomparable d’inspiration dans la contemplation du paysage à toutes les
heures et en toutes saisons. Ils parviennent à ce que leurs tableaux ne soient pas
seulement une reproduction du lieu donné mais l’expression d’un état d’âme de‐
vant ce lieu.
◆ Théodore Rousseau (1812-1867). Son matérialisme se double d’une re‐
cherche métaphysique. Il débute à un moment où l’école du paysage historique
et mythologique est encore prépondérante. En 1860, il travaille en juxtaposant
des touches de couleurs pures, technique qu’il enseignera à Monet et à Sisley.
L’exécution de ses peintures est très précise et précieuse, les arbres sont dessinés
presque feuille à feuille. Il obtient à l’Exposition de 1855 un très grand succès :
Les Chênes d’Apremont (1852), Orée de la forêt à l’aube (1846), Lisière du mont
Girard (1854).
◆ Jean-François Millet (1814-1875) a fait du paysage un simple décor où
prennent place des hommes des champs, laboureurs, bergers. Il a su encadrer
ses personnages dans des paysages superbes de couleur, d’intensité. Il en ressort
un sentiment virgilien et biblique de l’homme dans la simplicité de la vie : Les
Glaneuses (1857), L’Angélus (1859), L’Homme à la houe (1860-1862).
◆ Camille Corot (1796-1875) ne peut être rattaché seulement aux peintres
de Barbizon au regard des œuvres historiques et peintures religieuses qu’il ex‐
pose dans les salons après 1830. Les premières œuvres de Corot parurent en
France au salon de 1827, le peintre venait de quitter l’Italie. La Forêt de Fontai‐
nebleau, qu’il expose au salon de 1833, lui vaut une médaille. Après ses nom‐
breux voyages, il se fixe dans la vallée de la Seine aux coteaux de Ville-d’Avray.
Il verra dans la nature ce que nul avant lui n’a su exprimer : il sait si bien trans‐
poser la réalité, lui donner les bonnes et justes tonalités, aucun n’a su donner la
sensation d’une vérité aussi puissante et captivante. Ses principales œuvres
sont : Le Pont à Nantes (1825), Le Moulin de Saint-Nicolas-les-Arras (1874), Le
Moulin de la Galette (1840), Un chemin au milieu des arbres (1870-1873).
L’impressionnisme
C’est en 1874 qu’un groupe de jeunes peintres, dont les toiles sont refusées à
l’exposition officielle, « le Salon », organise sa propre exposition, et se voit, en
raison du titre du tableau Impression, soleil levant de Claude Monet, affublés
du substantif, caricatural à l’époque, d’« impressionnistes ». Le terme impres‐
sionnisme sera employé pour la première fois par un critique du journal Le Cha‐
rivari, Louis Leroy, lors de son commentaire sur le tableau de Monet. Mais, se‐
lon les souvenirs d’Antonin Proust consacrés à Manet et publiés dans La Revue
blanche, les deux hommes auraient employé le terme au cours de leur conversa‐
tion. Le mouvement, né en 1874, va durer jusqu’en 1886, puis évoluer par
l’éclatement de tendances divergentes. Les peintres impressionnistes se caracté‐
risent par le refus des sujets religieux ou historiques, l’inspiration provient sur‐
tout des paysages, des groupes de la société, des individus que l’on portraiture.
La technique picturale évolue, elle doit correspondre à un désir de dissoudre
dans une impression les objets de la réalité complète, et l’abandon de la compo‐
sition s’accompagne du choix de couleurs pures, directement appliquées sur la
toile, et non plus mélangées sur la palette, elles sont posées sur le tableau au pin‐
ceau ou au couteau, même parfois au tube directement. Le travail en plein air
a poussé les peintres à utiliser des couleurs pures et lumineuses. L’invention de
pigments artificiels, celle des tubes de couleurs permirent d’étendre le nombre
de couleurs disponibles et d’élargir la palette chromatique. Turner en est le
grand précurseur par son utilisation de la couleur, le brouillage des formes. Les
contours dans les œuvres impressionnistes n’avaient pu rester aussi arrêtés que
dans l’ancienne peinture, les lignes aussi rigides, les formes aussi précises.
Quand l’impressionniste peignait le brouillard ou les buées qui enveloppent les
objets, quand il peignait les plaques de lumière vacillante, qui, à travers les
arbres agités par le vent, viennent éclairer certaines parties du sol, quand il pei‐
gnait l’eau houleuse de la mer, se brisant en embrun sur les rochers, ou le cou‐
rant rapide d’une inondation, il ne pouvait espérer réussir à rendre son effet
qu’en supprimant les contours rigides et arrêtés.
C’était réellement l’impression que les choses faisaient sur son œil qu’il vou‐
lait rendre, des sensations de mouvement et de lumière qu’il voulait donner, et il
ne pouvait y parvenir qu’en laissant souvent sur sa toile les lignes indéfinies et
les contours flottants2. La préoccupation qui demeure au centre de l’impression‐
nisme est celle de rendre les couleurs changeantes sous les jeux d’ombre et de
lumière, la fugacité des sujets sans forme définie, comme la vapeur et les nuages
de La Gare Saint-Lazare (1877) à Paris de Claude Monet. La nécessité pour
quelques artistes, Frédéric Bazille (1841-1870), Claude Monet (1840-1926),
Auguste Renoir (1841-1919), Alfred Sisley (1839-1899), de faire une pein‐
ture vivante et nourrie de sensations face au monde que l’on observe se fait
pressentir. Ils quitteront l’atelier de Charles Gleyre (1806-1874), déçus par un
enseignement académique, pour rejoindre la forêt de Fontainebleau et y
peindre.
Les principales caractéristiques artistiques de l’impression‐
nisme
• Recul de l’importance du contenu
• La mise en valeur de la couleur préparant l’autonomie des moyens artistiques qui
caractérise la peinture du XXe siècle
• On ne prépare plus la composition par une multitude de dessins
• Il n’y a plus de préparation en plusieurs couches de glacis du tableau
• La couleur est appliquée au pinceau ou au couteau
• Le chevalet est placé dans la nature
• On peint des objets en mouvement ou en transformation
• La disposition spatiale n’obéit plus à la perspective linéaire
• Les couleurs sont juxtaposées en tons purs sans intermédiaire
• Influence de l’Ukiyo-e, art de l’estampe japonaise
• Influence de la photographie
Ils ne constituent pas une école, chacun d’entre eux a son style, ses particula‐
rités, ses recherches picturales. La première exposition a lieu en 1874, puis les
suivantes s’étalent jusqu’en 1886, soit huit expositions qui ponctueront le mou‐
vement. Il faut rattacher à ces événements les noms d’Eugène Boudin, Gustave
Caillebotte, Mary Cassatt, Paul Cézanne, Berthe Morisot, Camille Pissar‐
ro, Alfred Sisley pour les principaux. Ce ne sont pas les peintres mais des mar‐
chands d’art qui feront la promotion de leurs œuvres à l’étranger. En 1870, Paul
Durand-Ruel les présente dans sa galerie londonienne en même temps que les
toiles des peintres de Barbizon. Le XIXe siècle en peinture sera l’histoire de l’ac‐
quisition de la liberté pour l’artiste. L’histoire d’une rupture qui consiste à privi‐
légier la couleur et la lumière aux dépens du dessin, seul Manet y restera atta‐
ché, et décomposer cette même lumière en touches franches juxtaposées que
l’œil reconstituera par effet d’optique. Ce sera le mouvement pictural le plus
marquant du siècle, car il est le premier à illustrer totalement la liberté de créa‐
tion sans règles préconisées par les romantiques.
Les théories de Chevreul
Si Léonard de Vinci avait déjà remarqué que les couleurs s’influencent réciproquement,
ce fut Goethe qui attira l’attention sur les contrastes qui accompagnent le phénomène. Les
impressionnistes, sans les appliquer rigoureusement, se servent des théories de Michel
Eugène Chevreul (1786-1889) sur la composition du spectre solaire. Il existe les couleurs
primaires (bleu, jaune, rouge) et les couleurs secondaires obtenues par le mélange de
deux primaires dont il résulte une couleur binaire (vert, violet, orangé). Chaque couleur
tend à colorer de sa complémentaire l’espace environnant : le violet s’exalte auprès du
jaune, le vert près du rouge. Mais deux complémentaires binaires (vert et violet par
exemple) se détruisent entre elles si on les juxtapose puisqu’elles contiennent la même
couleur pure. Dès 1860, Monet et Sisley animent leur toile en juxtaposant des touches de
couleurs pures. Ce sera à l’œil du spectateur de mêler ces taches colorées pour voir la
couleur désirée. Vingt ans plus tard, en 1880, Seurat voulant redonner un souffle à l’im‐
pressionnisme revient à ces résultats scientifiques. Le pointillisme remplacera par des
points minuscules de couleurs savamment choisies les coups de pinceau.
◆ Édouard Manet (1832-1883), formé dans l’atelier de Thomas Couture
(1815-1879), qui concurrence l’École des beaux-arts, présente ses premières
toiles dès 1860. C’est lui qui découvre le Café Guerbois, en fait le Café Baude‐
quin de l’œuvre de Zola, on y commente les événements du Salon officiel de
peinture. La plupart des peintres se retrouvent au Café Guerbois et, comme il se
trouve au 11 de la Grand’rue des Batignolles, ils formeront l’école des Bati‐
gnolles. Les préférences de Manet vont vers Vélasquez, Zurbarán, Goya. Ses
premières œuvres, Le Déjeuner sur l’herbe (1862-1863), Olympia (1863), Le
Tigre (1879-1880), seront l’occasion d’un scandale sans précédent. En 1859,
Manet rencontre Baudelaire, qui sera l’un des premiers à remarquer le mélange
de modernité et de tradition chez ce peintre. Baudelaire considère la critique
d’art comme une discipline littéraire et devient un des observateurs les plus
perspicaces de son temps. Pourquoi le refus du Déjeuner sur l’herbe ? Celui-ci
met en avant la nudité choquante pour son époque de la femme. Il n’y a là au‐
cune dimension mythologique. Le pourquoi de la scène ne trouve aucune expli‐
cation. Le modèle nu ne se justifie pas. Une partie du tableau est non terminée,
le paysage à peine en esquisse montre une peinture en train de se faire. Le fait
aussi que la femme soit la seule à regarder le spectateur est une source d’indi‐
gnation supplémentaire. Les personnages ou le panier sont traités au même ni‐
veau de hiérarchie.
◆ Claude Monet (1840-1926) est reconnu comme le chef de file du mouve‐
ment impressionniste et le créateur le plus prolifique. Peintre de la lumière, il
pose d’abord son chevalet dans la forêt de Fontainebleau. Après la défaite de
Sedan, il se rend à Londres où il fait la connaissance de Durand-Ruel, protec‐
teur de la plupart de ses amis. Il peint quelques tableaux de la Tamise. Puis il
s’installe à Argenteuil, séjournant de temps en temps en Normandie. C’est à
cette époque qu’il fixe les grands principes de l’impressionnisme auxquels se‐
ront fidèles Alfred Sisley (1839-1899), Armand Guillaumin (1841-1927),
Gustave Caillebotte (1848-1894). C’est en 1874 qu’ils organisent, dans une
salle fournie par le photographe Nadar, la première exposition. Sept autres ex‐
positions collectives seront organisées entre 1876 et 1877, pendant lesquelles il
réalise sur ses toiles différentes interprétations de la gare Saint-Lazare. Il se fixe
ensuite à Vétheuil puis à Poissy et Giverny où il peint Les Nymphéas, entre
1895 et 1926. Il laisse une œuvre considérable : plus de deux mille pièces réper‐
toriées.
◆ Auguste Renoir (1841-1919) connut son premier succès avec Lise à l’om‐
brelle (1867). Son art, après quelques succès et l’appui de Durand-Ruel et de
Caillebotte, commença à être estimé. Il envoie à la première exposition impres‐
sionniste La Loge (1874) et, en 1876, plusieurs tableaux réalisés sont considérés
comme les meilleures créations de sa période impressionniste, La Liseuse
(1874-1876), le Portrait de Victor Choquet (1875). Il préfère le portrait ou les
scènes à personnages aux paysages, comme le Bal du moulin de la Galette
(1876). À partir de 1880, il s’éloigne de la technique impressionniste. Un
voyage un an plus tard en Italie, le désir de retrouver la prépondérance de la
forme, du coloris sur le dessin déterminent cette période « ingresque », Les Pa‐
rapluies (1881-1886), Les Grandes Baigneuses (1887). Après 1893, commence
sa période nacrée où il représente des figures féminines nues mais aussi des
scènes d’intérieur. Les œuvres de la fin de sa vie évoquent Rubens ou le
XVIIIe siècle.
Le postimpressionnisme
L’art naïf
L’art naïf désigne une école de peinture prônant un style pictural figuratif ca‐
ractérisé par la minutie apportée aux détails, l’emploi de la couleur gaie en
aplats et une mise en scène de paysages campagnards, animaux domestiques ou
sauvages, costumes folkloriques, la vie citadine ou rurale. Le plus représentatif
en est le douanier Rousseau, Henri Rousseau (1844-1910). Ses sources d’ins‐
piration sont diverses : Jardin des Plantes, cartes postales illustrées, paysages
exotiques. Le paysage est presque toujours sur le même plan que les sujets, jux‐
taposés, ils paraissent massifs : Danses italiennes (1885), Rendez-vous dans la
forêt (1889), Les Joueurs de football (1908).
Le symbolisme
La croissance urbaine est l’une des caractéristiques des sociétés au XIXe siècle.
Londres a dépassé le million d’habitants, Paris en compte un peu plus de cinq
cent mille. Période de grandes transformations économiques, politiques, so‐
ciales, le XIXe siècle va modifier le concept de ville, ses aspects architecturaux et
urbanistiques. Les innovations techniques, l’essor industriel, le développement
des transports comptent parmi les facteurs de sa transformation. Les premiers
travaux du siècle sont bien davantage un retour vers le passé qu’un accès vers la
modernité marqué en France par le structuralisme gothique.
Le néoclassicisme
Le néogothique
L’art nouveau
Ce mouvement artistique de la fin du XIXe siècle sera diffusé dans toute l’Eu‐
rope et les États-Unis. Le thème principal est un mode végétal très présent dans
des formes ornementales complexes imitant des fleurs et des feuilles avec une
répétition de motifs, parfois extravagants. Les sujets montrent une absence de
lignes droites ou d’angles droits. Les principaux représentants en sont Hector
Guimard (1867-1942), architecte, Émile Gallé (1846-1904), céramiste, Émile
André (1871-1933), architecte. Le style art nouveau, appelé également « style
nouille », se trouve représenté par les immeubles situés 29, avenue Rapp et
place Étienne-Pernet, à Paris. Les œuvres les plus célèbres sont celles de Gaudí
à Barcelone.
Durant le premier tiers du XIXe siècle, le romantisme s’est manifesté dans les
productions littéraires, musicales et picturales. La sculpture jusqu’alors paraissait
avoir été encore insensible à ses aspirations. Néanmoins, autour de 1830, cer‐
tains sculpteurs tendent à se débarrasser du vieux moule antique des décennies
précédentes. Contrairement au classicisme, le romantisme cherche à exprimer
les émotions, les profondeurs intérieures de l’homme, ses tourments, ses ré‐
voltes. Mais ce mouvement de liberté aura peu d’échos chez les sculpteurs hor‐
mis quelques-uns. Le style Empire subit encore le style de Canova et se tourne
vers la réalisation de nombreux portraits : Joseph Chinard (1756-1813) où do‐
mine la psychologie, Madame de Récamier (1805), François-Joseph Bosio
(1768-1845), Buste de la duchesse d’Angoulême (1825). Les artistes de la Res‐
tauration exaltèrent dans les effigies historiques un élan bonapartiste ou monar‐
chique : Jean-Pierre Cortot (1787-1843), Le Triomphe de 1810 (1833), Au‐
guste Dumont (1801-1883), Le Génie de la liberté (1835-1840), au sommet de
la colonne de Juillet sur la place de la Bastille. Le romantisme se fait jour, en
1831, avec l’œuvre de Jehan Duseigneur (1808-1866), Roland furieux. Une
conception animée des masses remplace le modelé lisse propre aux acadé‐
miques. François Rude (1784-1855) exprime un lyrisme épique dans La Mar‐
seillaise, ou Le Départ des Volontaires (1835-1836), le plus beau bas-relief de
l’Arc de triomphe, et le Napoléon s’éveillant à l’immortalité (1847). Le grand ro‐
mantique est Antoine Augustin Préault (1809-1879), avec Tuerie (1834-
1851). La monarchie de Juillet voit en James Pradier (1790-1852) son
meilleur représentant : Odalisque (1841), La Victoire (1795-1815), groupe de
onze statues à l’hôtel des Invalides. L’évolution de la sculpture ne suit pas le
même cheminement que celle de la peinture. On ne passe pas du naturalisme
vers le réalisme. Cela est dû au fait que les sculpteurs, moins indépendants,
vivent des commanditaires. Éclectisme signifie sous le Second Empire qu’on
fait un choix éclectique du style en fonction du type de bâtiment et de sa fonc‐
tion. Sous le Second Empire, des artistes comme Jean-Baptiste Carpeaux
(1827-1875) veulent dépasser le néoclassicisme et le romantisme, cherchent
leur inspiration dans tous les styles du passé sans privilégier l’Antiquité. Ses
œuvres par la profonde recherche psychologique qu’elles traduisent deviennent
le départ de la sculpture moderne. Il recherche dans ses sculptures le mouve‐
ment et l’instantané : La Danse (1865-1869), Ugolin et ses fils (1857-1861),
Les Quatre Parties du monde soutenant la sphère céleste (1872). Il renoue avec
la puissante tradition du portrait réaliste tel que le XVIIIe siècle l’avait connu :
Bacchante aux roses (1875).
◆ Auguste Rodin (1840-1917) marque la fin du XIXe siècle par sa puissance
créatrice, l’expressivité et la diversité de son œuvre. Il est sans doute le sculpteur
qui connaît la plus grande gloire de son vivant, considéré comme un maître, re‐
connu par l’État qui lui passe des commandes. S’opposant à la théorie du fini en
matière d’art, Rodin laisse certaines de ses œuvres à l’état brut, la figure sculptée
semble se détacher du bloc de pierre sans être achevée. Un voyage en Italie lui
révélera Michel-Ange et les bronziers de la Renaissance. L’une de ses pre‐
mières œuvres, L’Âge d’airain, thème emprunté à Hésiode, fut l’objet de vives
discussions au salon de 1877. Le Saint Jean-Baptiste est sa deuxième grande
œuvre. Commence pour lui une période intense de production pendant laquelle
il réalise des bustes, des monuments, de grandes compositions : le groupe en
bronze des Bourgeois de Calais (1884-1885), le Monument à Victor Hugo
(1885-1895), le Balzac (1891-1897) à la silhouette à peine esquissée. Son
œuvre majeure, inspirée de Dante, fut La Porte de l’enfer, il y travaillera jusqu’à
sa mort, imaginant pour elle ses figures les plus célèbres : Le Penseur (1902),
Le Baiser (1882-1889). Peu avant sa mort, il fera don à l’État de son hôtel parti‐
culier et de son atelier afin de les transformer en musée.
◆ Camille Claudel (1864-1943), sœur aînée du poète et diplomate français
Paul Claudel, arrive à Paris en 1883 pour se perfectionner en sculpture auprès
des maîtres. Elle étudie d’abord avec Alfred Boucher puis avec Auguste Rodin
dont elle deviendra le modèle. Elle vivra avec lui une liaison passionnée qui la
conduira à passer les trente dernières années de sa vie à l’asile d’aliénés. L’Âge
mûr (1899) témoigne du cruel abandon de Rodin. Elle a utilisé plusieurs maté‐
riaux comme l’onyx et fonde ses compositions sur un jeu élégant de courbes :
La Valse (1893).
◆ Aristide Maillol (1861-1944) ne fut reconnu qu’à partir de 1905 avec La
Méditerranée alors qu’il a quarante ans. Son œuvre reproduit presque exclusive‐
ment des corps féminins, robustes et massifs. Influencé par les civilisations an‐
tiques (Grèce, Rome, Inde), il privilégia les formes douces et arrondies du corps
féminin. Dix-huit de ses bronzes ornent le jardin des Tuileries. Avant 1900,
Maillol peint, influencé par Puvis de Chavannes. Il exposera également en
1893 un premier « essai de tapisserie ». Ses principales sculptures sont : La Nuit
(1909), Pomone (1910).
Paul Valéry disait qu’il fallait avoir perdu l’esprit pour définir le romantisme.
Comme les autres mouvements littéraires, naturalisme, réalisme, symbolisme,
ils se retrouvent dans des périodes chronologiques aux limites fluctuantes.
D’une façon générale, les ouvrages classiques font commencer ce mouvement
entre la publication des Méditations poétiques de Lamartine, en 1820, celle des
Burgraves de Victor Hugo, en 1843, mais d’autres se contentent de le placer
dans le premier tiers du XIXe siècle. Enfin certains font du Génie du christia‐
nisme de Chateaubriand, en 1802, tout comme le traité De l’Allemagne (1813)
de Madame de Staël, et la préface de Cromwell, en 1827, de Victor Hugo son
acte de naissance. Celle-ci est une véritable défense et illustration du drame ro‐
mantique. Les préceptes dont la tragédie est dotée depuis le grand siècle, notam‐
ment la règle des trois unités, sont remis en question. L’intrigue devait former
un tout, unité d’action, mais aussi unité de lieu, un seul lieu devait être évoqué,
unité de temps, la durée des événements évoqués ne devait pas dépasser vingt-
quatre heures. Trois ans plus tard dans la préface d’Hernani, Victor Hugo, de‐
venu chef de file du mouvement, affirme que « le romantisme, c’est le libéra‐
lisme en littérature ». La controverse prend un tour passionné à propos de trois
textes, considérés comme les manifestes du romantisme, la préface de Victor
Hugo pour son premier drame, Cromwell, le texte d’Alexandre Dumas (1802-
1870), Henri III et sa cour (1829), et surtout la pièce de Hugo, Hernani, dont la
première, le 25 février 1830, déclenche une bataille rangée parmi les specta‐
teurs, inconditionnels ou farouches opposants du romantisme naissant. C’est
surtout avec le mouvement allemand du Sturm und Drang que le mot prend son
sens moderne pour désigner au début le goût pour la poésie médiévale et cheva‐
leresque.
Le romantisme va se manifester surtout comme un refus des règles définies
par les classiques depuis Boileau. En dehors de Rousseau, les grands initiateurs
seront : François René de Chateaubriand (1768-1848), Mémoires d’outre-
tombe (1848), René (1802), Les Martyrs (1809) ; Victor Hugo (1802-1885),
Odes et poésies diverses (1822), Hernani (1830), Ruy Blas (1838), Les Contem‐
plations (1856), Notre-Dame de Paris (1831) ; Alphonse de Lamartine (1790-
1869), Méditations poétiques (1820) ; Alfred de Musset (1810-1857), Loren‐
zaccio (1833), Les Nuits (1835-1837) ; Gérard de Nerval (1808-1855), Les
Filles du feu (1854), Les Chimères (1854) ; Charles Nodier (1780-1844),
Smarra ou les démons de la nuit (1821) ; Madame de Staël (1766-1817), De la
littérature (1800), De l’Allemagne (1813), Delphine (1802) ; Alfred de Vigny
(1797-1863), Chatterton (1835), Les Destinées (1864). Nous devons également
au romantisme la rénovation de l’histoire avec Augustin Thierry et Michelet,
Histoire de la Révolution française (1847), ainsi que les débuts de la critique lit‐
téraire moderne avec Sainte-Beuve. Avant 1830, le héros romantique puise ses
principales caractéristiques dans le romantisme allemand et recherche l’infini
dans l’expression de sa sensibilité. Après 1830, le héros romantique devient un
guide pour le peuple, les nations.
Plusieurs thèmes dominent : la nostalgie, la passion amoureuse, la nature et
l’homme, l’irrationnel. Ainsi que le résume Georges Gusdorf, le XIXe siècle est
le temps « de la première personne3 ». L’ordre émotionnel devient une des di‐
mensions essentielles de l’existence humaine. Écrire et décrire son moi revient à
rendre vivantes ses peurs, ses certitudes, ses émotions. Chez Hugo le « Je » de‐
vient guide, voyant, prophète.
Isidore Ducasse, qui publie ses œuvres sous le pseudonyme de comte de Lau‐
tréamont (1846-1870), laisse à la poésie une œuvre magistrale et étrange, Les
Chants de Maldoror (1869), ensemble de six chants d’une telle violence que la
diffusion en sera suspendue l’année même de leur parution. Lautréamont donne
une place essentielle à la construction poétique, ignorant les figures classiques, il
les malmène afin que son écrit vive de lui-même, devienne le livre par excel‐
lence, indépendant dans son existence propre. L’ensemble est dominé par le per‐
sonnage de Maldoror, être bestial et sadique en quête perpétuelle de la pureté
originelle.
LE RÉALISME (1850-1880)
Le réalisme s’épanouit dans les romans français et les peintures entre 1850 et
1880. L’une des premières apparitions du terme « réalisme » se trouve dans Le
Mercure de France du XIXe siècle, en 1826, dans lequel le mot est utilisé pour
décrire une doctrine fondée non pas sur l’imitation des dernières réalisations ar‐
tistiques, mais sur la représentation véridique et précise des modèles que la na‐
ture et la vie contemporaine offrent à l’artiste. Honoré de Balzac est le principal
précurseur du réalisme, avec sa volonté de faire un portrait encyclopédique de
l’ensemble de la société française dans La Comédie humaine (1829-1850). Les
cycles de romans d’Honoré de Balzac et de Zola développent un nouveau mode
de réalisme social dans un pays qui a été transformé par la révolution indus‐
trielle et économique. Avec Stendhal, Flaubert, Proust, une autre sorte de réa‐
lisme voit le jour, centré sur l’analyse de l’action individuelle, la motivation et le
désir ainsi que sur la forme. En 1857, Gustave Flaubert publie Madame Bovary
avec lequel le réalisme atteint son sommet.
L’une des étapes du naturalisme, en 1880, passe par Les Soirées de Médan,
recueil de nouvelles d’Émile Zola, Guy de Maupassant, Joris-Karl Huysmans,
Henry Céard, Léon Hennique et Paul Alexis. Les naturalistes adoptent une ap‐
proche plus scientifique et plus analytique de la réalité. Aussi Zola emprunte à
Hippolyte Taine, philosophe positiviste, le terme de naturalisme. En fait, le
terme s’est déjà aussi imposé en peinture. Mais dans Le Roman expérimental
(1880), Zola développe un parallèle entre les méthodes du romancier et celles
de la science expérimentale. La définition du naturalisme s’approfondit encore
avec Maupassant dans l’introduction de son roman Pierre et Jean (1888), avec
Huysmans qui souligne que le naturalisme peut être défini comme l’étude analy‐
tique d’un milieu donné, la relation déterministe entre le milieu et les person‐
nages, l’application d’une théorie mécaniste de la psychologie, et le rejet de
toute forme d’idéalisme. Guy de Maupassant, dans Le Roman (1887), déclare
que son intention est d’« écrire l’histoire du cœur, de l’âme et de l’esprit dans
leur état normal », ce qui implique l’utilisation de détails importants pour mettre
en relief les névroses et les désirs masqués par les apparences quotidiennes.
Dans Les Rougon-Macquart de Zola, l’étude à travers une seule famille met l’ac‐
cent sur les conséquences déterministes de l’hérédité et de l’environnement. En
vingt volumes, Émile Zola met en scène le destin des hommes, ouvriers de L’As‐
sommoir (1877), courtisanes comme Nana (1880), mineurs de Germinal
(1885), paysans exploités de La Terre (1887).
DANDYS ET DÉCADENTS
Le symbolisme
LE SPIRITUALISME
La morale
La religion
Le temps bergsonien
Bergson ne cherche pas, dans son Essai sur les données immédiates de la
conscience, à analyser l’idée abstraite du temps, mais son expérience concrète. Il
introduit la notion de durée et tente de transposer la métaphysique « sur le ter‐
rain de l’expérience ». Le seul temps que l’on peut saisir est le temps personnel,
la durée intérieure. Peut-on mesurer la durée de sa conscience ? Nous sommes
confrontés à deux réalités parfaitement différentes : d’une part, l’étendue quanti‐
tative, divisible, homogène, unique objet du positivisme, et d’autre part, la durée
qualitative fournie par l’expérience interne.
Matière et mémoire
Auguste Comte
Sa doctrine
Par philosophie positive, Comte sous-entend l’ensemble des connaissances
scientifiques de l’univers. Le positivisme trouve son sens équivalent dans le mot
empirisme lorsqu’il veut montrer que la seule source de connaissance reste l’ex‐
périence.
Son premier travail consiste en une classification des sciences, hypothèse fon‐
dée sur le fait que les sciences ont développé à partir de la compréhension de
principes simples et abstraits la compréhension de phénomènes complexes et
concrets. Par conséquent, les sciences ont évolué ainsi : à partir des mathéma‐
tiques, l’astronomie, la physique et à partir de la chimie, la biologie et, enfin, la
sociologie. Selon Comte, cette dernière discipline non seulement conclut la série
mais réduit aussi les faits sociaux à des lois, synthétise l’ensemble des connais‐
sances humaines, ce qui rend la discipline apte à guider la reconstruction de la
société.
La religion de l’humanité
LA SOCIOLOGIE
Le sociologisme
Il part d’une étude scientifique des faits sociaux pour expliquer l’homme tout
entier par la société. Son principe est qu’il existe des phénomènes extérieurs à
l’individu, qui n’en font plus partie. Ces phénomènes, il les nomme « faits so‐
ciaux ». Ce sont les nations, les gouvernements, les groupes religieux. « Notre
règle n’implique donc aucune conception métaphysique, aucune spéculation sur
le fond des êtres. Ce qu’elle réclame, c’est que le sociologue se mette dans l’état
d’esprit où sont les physiciens, chimistes, physiologistes quand ils s’engagent
dans une région encore inexplorée dans leur domaine scientifique11. » Tout ce
dont le rationalisme rend compte par la raison s’explique par la société. Un bon
jugement, une bonne morale est ce qui est reconnu, admis par elle. Mais ce sont
des valeurs relatives puisqu’aucune société n’est fixe. La morale, la vérité sont
autant d’éléments qui se modifient. Dans Le Suicide, Durkheim constate de la
même façon que l’individu est dominé par une réalité morale qui le dépasse : la
réalité collective. Cet acte qui semble individuel au premier abord est analysé
pour montrer que chaque peuple a son propre taux de suicide, généralement
plus constant que celui de la mortalité, qui obéit tout autant à des lois définies.
Le suicide est envisagé comme l’expression d’un acte collectif, puisqu’il est la
conséquence des faits sociaux. Il étudie les trois types principaux du suicide :
égoïstes, anémiques (caractéristiques des sociétés modernes, où les individus
sont rendus de plus en plus autonomes par rapport à la pression collective) et al‐
truistes (qui se manifestent dans les sociétés primitives, ou dans les sociétés mi‐
litaires, quand l’homme est fortement intégré à la société).
Mathématiques et astronomie
Les travaux des mathématiciens fournissent à l’astronomie une application di‐
recte. Elle est la première science qui utilise de plus en plus un langage mathé‐
matique, aussi bien pour son raisonnement que pour ses théories : en 1846, l’as‐
tronome Urbain Le Verrier (1811-1877), sans observation possible, établit par
ses calculs l’existence de Neptune, confirmée le 23 septembre 1846 par Galle,
directeur de l’observatoire de Berlin, qui voit la planète au point indiqué. Au dé‐
but du siècle, sous l’influence de Jean-Baptiste Monge (1746-1818), une partie
de la jeune école mathématique se concentre sur l’étude des diverses branches
issues de la géométrie.
Physique
C’est dans ce domaine que les sciences expérimentales réalisent les progrès
les plus considérables. L’ingénieur français Augustin Fresnel (1778-1827) dé‐
montre, en 1818, que les phénomènes lumineux sont d’origine mécanique, pro‐
venant de vibrations qui se propagent par ondes successives. S’intéressant à la
chaleur, Nicolas Léonard Sadi Carnot (1796-1832) établit le système en vertu
duquel un système matériel tend toujours vers l’équilibre des températures. Il est
suivi dans ses recherches par le Britannique James Prescott Joule (1818-1889)
qui énonce le principe de conservation de l’énergie.
L’électricité
Le premier libéralisme
Le libéralisme repose sur l’idée d’un homme rationnel, tout d’abord du point
de vue politique, puis économique, apte à assumer sa liberté. Il trouve son affir‐
mation juridique dans la Constitution américaine et dans la Déclaration des
droits de l’homme en France. Les hommes sont égaux en droit, les hiérarchies
liées à la naissance abolies. Dans le domaine économique, la liberté nouvelle se
fait par l’abolition du système des corporations par la loi Le Chapelier de 1791.
Lié à la modernité, le libéralisme place l’individu avant la liberté. C’est une en‐
treprise dont le but est de fonder la société sur l’individu, suprême valeur, là où
auparavant ont régné la religion, la philosophie, la liberté. Afin d’y parvenir, il
faut opérer suivant un processus de création continue. Politique, le libéralisme
est garant des libertés civiques, protecteur de l’individu ; économique, il prône
l’économie de marché fondée sur l’entreprise privée et la libre concurrence. Se‐
lon Max Weber, le libéralisme naît au XVIe siècle avec le mouvement de la Ré‐
forme protestante. L’élu de Dieu voit sa situation matérielle s’améliorer, la pros‐
périté est la marque de son choix. La Grande-Bretagne du XVIIe siècle lui donne
ses prémices avec les écrits de Locke, plus tard une théorie avec Adam Smith,
cependant qu’en France le médecin Quesnay développe l’école physiocratique,
à laquelle se rattachent Du Pont de Nemours, Mercier de La Rivière. La Révo‐
lution française en donne la lecture juridique avec la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen de l’Assemblée nationale constituante, le 26 août 1789.
Désormais l’individu, le citoyen, se voit assurer la garantie des droits inalié‐
nables et sacrés, au premier rang desquels la liberté. Benjamin Constant fonde
une conception du libéralisme, en continuité avec l’idéologie du progrès du
siècle des Lumières. Il le conçoit comme politique, économique, formant un
corps de pensée unitaire. Tout au long du XIXe siècle, cette façon de penser se
divise, pour donner naissance à des libéralismes : opposé à l’absolutisme en po‐
litique, au socialisme en économie, à toutes les intolérances dans le domaine de
la pensée. Il est courant d’accoler, au XIXe siècle, libéralisme et idéologie de la
bourgeoisie. Cela demande à être nuancé, dans la mesure où le libéralisme s’ex‐
prime plutôt dans la vie politique en France, où il recouvre largement les aspira‐
tions bourgeoises de la monarchie de Juillet (1830-1848), alors qu’il se fond en
Angleterre avec l’utilitarisme de Bentham, s’humanise avec Stuart Mill, est
poussé jusqu’à l’anarcho-libéralisme par Stirner en Allemagne. Après l’échec des
mouvements révolutionnaires de 1848, le retour au pouvoir de régimes réac‐
tionnaires, contre-révolutionnaires, infléchit le sens donné au terme de libéra‐
lisme. En France, pendant le Second Empire (1852-1870), le libéralisme éco‐
nomique s’efface devant le protectionnisme, trouve son expression dans la vo‐
lonté d’étendre les libertés politiques. Après l’effondrement du régime, la
IIIe République, difficilement mise en place par les lois constitutionnelles de
1875, s’approprie le libéralisme politique, pour lui conférer une dimension so‐
ciale, notamment avec les lois scolaires votées entre 1881 et 1883. En Angle‐
terre, Spencer fait évoluer le libéralisme par une perversion du darwinisme. Il
transpose les faits biologiques à la société : reprenant le principe de l’évolution,
il en fait une adaptation au milieu, réalisée pour le plus grand nombre grâce au
progrès scientifique. Il est pour Spencer nécessaire de cantonner l’État à ses
fonctions judiciaires, tous les autres domaines relèvent de l’initiative privée.
Avec la constitution de l’Empire britannique, la reine Victoria devenue impéra‐
trice des Indes, le libéralisme évolue pour devenir une composante de l’impéria‐
lisme.
Les utopistes
Les communistes
Notes
1. À ce sujet, voir Nadine Vivier, Dictionnaire de la France au XIXe siècle, Paris, Hachette, 2002.
2. Théodore Duret, Histoire des peintres impressionnistes, Paris, Floury, 1939, p. 26.
3. Georges Gusdorf, Naissance de la conscience romantique au siècle des Lumières, Paris, Payot, 1976.
4. Pierre Citti, « Le symbolisme », in Encyclopædia Universalis.
5. Henri Bergson, « La Pensée et le mouvant », in Œuvres, Paris, Puf, 1959, p. 1395.
6. Henri Bergson, Les Deux Sources de la morale et de la religion, Paris, Flammarion, 2012.
7. Cours de philosophie positive, I, quatre tomes, éd. BookSurge Publishing, 2001, p. 3.
8. Préface à la Politique positive, III, 1854, Système de politique positive, Paris, Vrin, 2000.
9. Raymond Aron, Les Étapes de la pensée sociologique, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des sciences
humaines », 1967, p. 16.
10. Raymond Aron, Le Développement de la société industrielle et la stratification sociale, C.D.U.,
1958, p. 10.
11. Émile Durkheim, Règles de la méthode sociologique [1895], rééd. Paris, Puf, 2004, p. 14.
12. Guy Thuillier et Jean Tulard, La Méthode en histoire, Paris, Puf, « Que sais-je ? », 1993, p. 38.
13. Pierre-Laurent Assoun, Histoire de la psychanalyse, t. I, Paris, Hachette, 1982, p. 159.
14. Rappelons que la notion d’inconscient était déjà introduite dans le vocabulaire philosophique par
Descartes et Leibniz. Mais il s’agit d’un inconscient physiologique. Les phénomènes que constituent « pas‐
sion » ou « petites perceptions » sont des manifestations corporelles.
15. Sigmund Freud, La Naissance de la psychanalyse, Paris, Puf, 1973, p. 315.
16. Sigmund Freud, L’Interprétation des rêves, Paris, Puf, 1976, p. 14.
17. Philippe Buonarroti, Histoire de la conspiration pour l’égalité dite de Babeuf : suivie du procès au‐
quel elle donna lieu, G. Charavay jeune, 1850, 253 p.
CHAPITRE II
LE SIÈCLE DE VICTORIA
La reine Victoria Ire (1837-1901) domine tout le second XIXe siècle britan‐
nique. Reine du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande, proclamée im‐
pératrice des Indes en 1876, elle donne son nom à l’ère victorienne, apogée de
la puissance économique et colonisatrice du pays, mais aussi carcan des mœurs
et incapacité à accompagner les transformations sociales nées dans les tensions.
En 1846, l’Angleterre adopte le libre-échange en abolissant les Corn Laws, les
lois sur les blés, régime protectionniste qui permet aux grands propriétaires ter‐
riens de vendre leur blé à un cours élevé. Après cette date, conservateurs et libé‐
raux ne s’opposent plus fondamentalement et alternent au pouvoir, avec les fi‐
gures dominantes de Benjamin Disraeli (1804-1881) pour les conservateurs et
de William Gladstone (1809-1898) pour les libéraux. Disraeli gouverne entre
1866 et 1868 puis de 1874 à 1880, Gladstone de 1868 à 1874 puis de 1880 à
1886. Après 1886, les conservateurs demeurent au pouvoir jusqu’en 1905. Ben‐
jamin Disraeli, orateur talentueux, est le ferme soutien de la reine et le promo‐
teur de l’Empire britannique et de sa mystique. William Gladstone veut défendre
le peuple, les opprimés, favoriser la paix. Victoria règne en respectant le parle‐
mentarisme britannique, mais se retire des affaires du gouvernement après le
décès de son consort, le prince Albert de Saxe-Cobourg-Gotha (1819-1861)
qu’elle épouse en 1840. Elle échappe à plusieurs tentatives d’assassinat et de‐
vient la « grand-mère de l’Europe » par l’intermédiaire de ses neufs enfants al‐
liés aux couronnes européennes. Mais la fin du règne est assombrie, après 1890,
par les difficultés économiques et les tensions sociales nées d’une crise agricole
et industrielle. La reine meurt le 22 janvier 1901, après soixante-trois ans de
règne. Son fils aîné, Édouard, prince de Galles (1841-1910), lui succède sous
le nom d’Édouard VII (1901-1910).
RÉFORMES ET PROBLÈMES
L’EMPIRE BRITANNIQUE
LA PEINTURE ROMANTIQUE
Elle se caractérise par ses paysages, sa lumière, ses couleurs. William Blake
(1757-1827), poète et aquarelliste mystique, produit une œuvre essentiellement
graphique visant à illustrer ses propres textes ou ceux de Dante, de la Bible, de
Shakespeare, le Newton dont le regard fixe un compas. Joseph Mallord
William Turner (1775-1851) privilégie le paysage et octroie à la lumière un
rôle prépondérant qui confère à ses œuvres la dimension du rêve, en annulant
le dessin et les contrastes d’ombre et de lumière. Sa peinture évolue d’un métier
classique et illusionniste aux teintes tonales et à la couleur intense dans une pâte
maçonnée, puis à un tourbillon de couleurs et de lumières parfois informel :
Pluie, vapeur et vitesse (1844), toile représentant une locomotive passant sur le
pont du chemin de fer ; Vaisseau dans la tempête (1842). Là encore, dans ce ta‐
bleau, la sérénité cède le pas au mouvement. John Crome et John Constable
(1776-1837) inaugurent la tradition des grands paysagistes et des auteurs de
marines. Ce dernier cherche surtout à s’affranchir de la tradition, à voir par ses
propres yeux. Il se soucie seulement de la réalité et veut peindre le vrai. Paysa‐
giste, son travail repose sur des esquisses faites à l’extérieur puis retravaillées en
atelier. Sa Charrette de foin (1821), exposée à Paris, lui vaudra la célébrité.
Un roman social
Développement de la doctrine
Darwin, en un peu moins de vingt-cinq ans (1858-1882), mit fin aux mythes
de la création que l’Occident, païen puis chrétien, avait fait siens depuis des mil‐
lénaires pour les remplacer par un système cohérent d’évolution fondé pour l’es‐
sentiel sur la variation, la lutte, l’élimination. À peu près à la même époque, un
modeste moine, Gregor Johann Mendel (1822-1884), trouve les lois de l’héré‐
dité, mais ses découvertes restent méconnues jusqu’au début du XXe siècle. À
partir de 1837, Darwin travaille sur le concept désormais bien connu de l’évolu‐
tion qui est l’aboutissement de l’interaction de trois principes : la variation, pré‐
sente dans toutes les formes de vie, l’hérédité, la force conservatrice qui se
transmet d’une génération à l’autre, et la lutte pour l’existence, qui détermine les
variations qui confèrent des avantages dans un environnement donné, modifiant
ainsi les espèces à travers une reproduction sélective. Toutes les théories racistes
prendront appui sur ce système. Gobineau se livrera à l’étude de la race
aryenne, groupe mythique qui aurait selon lui fondé la civilisation et dont les
descendants directs auraient été les Germains. Hitler reprendra à son compte les
grandes lignes de ce système de pensée pour justifier sa politique antisémite.
LE CRÉATIONNISME
Sa doctrine
Notes
1. Edward Sapir, Anthropologie, Paris, Minuit, 1967, p. 360.
CHAPITRE III
L’ASCENSION DE LA PRUSSE
La Prusse connaît un net recul de son influence à la suite de ses défaites face
à la France, elle ne doit sa survie en tant qu’État qu’aux interventions du tsar de
Russie. Le congrès de Vienne (novembre 1814-juin 1815) crée une Confédéra‐
tion germanique, Deutscher Bund, de trente-neuf États sous la tutelle, purement
symbolique, de l’empereur d’Autriche. Ce dernier est surtout tourné vers les par‐
ties slaves de son empire, la principale puissance de la Confédération est en réa‐
lité la Prusse, en dépit de la mise en place d’une assemblée des représentants des
États, la Diète de Francfort, présidée par l’Autriche. Les princes s’engagent à
mettre en place dans leur État une Constitution parlementaire. Cet espoir de ré‐
gime libéral est de courte durée. Autriche et Prusse se rapprochent après l’assas‐
sinat de l’écrivain antilibéral August von Kotzebue (1761-1819) par un étu‐
diant favorable aux libertés politiques, Karl Ludwig Sand (1795-1820). L’Acte
final de Vienne (1820) poursuit les décrets de Karlsbad d’instaurer la censure, la
surveillance des universités, mais va plus loin en affirmant que le souverain dé‐
tient en sa personne tout le pouvoir politique. La Prusse se prépare déjà à une
future unification allemande à son profit et commence par supprimer ses
douanes intérieures en 1818. L’Allemagne du Sud et du Centre constituent en
1828 leurs unions douanières. Elles sont réunies le 1er janvier 1834 dans le
Deutsche Zollverein, l’Union douanière allemande, dominé par la Prusse.
LE VORMÄRZ
L’UNIFICATION ALLEMANDE
C’est sans doute en Allemagne que le romantisme aura le poids le plus fort.
Pays protestant, il est marqué par des influences philosophiques puissantes dont
celles de Baruch Spinoza, ce dernier considérant que la peinture était la face vi‐
sible de Dieu. Au XIXe siècle, le paysage est un genre mineur sous-estimé, mais
on assiste en Allemagne à une revalorisation de celui-ci plus rapide qu’en
France. C’est par lui que s’exprimera le romantisme allemand. Les principaux
noms qui y sont rattachés : l’Autrichien Joseph Anton Koch (1768-1839) et
Philipp Otto Runge (1777-1810). Le romantisme est représenté aussi par Cas‐
par David Friedrich (1774-1840) qui s’astreint jusqu’à la mélancolie afin de
mieux saisir l’angoisse dans ses paysages de ruines gothiques, de cimetières. Le
renouveau dans la peinture allemande se concrétise avec le groupe des naza‐
réens, six artistes qui veulent y parvenir par la religion. La guerre contre les ar‐
mées napoléoniennes avait considérablement développé en Allemagne la nostal‐
gie de voir se regrouper les Allemands à l’intérieur d’un empire unique. Les na‐
zaréens seront les premiers à utiliser la chanson des Nibelungen et à représenter
des événements historiques servant à la prise de conscience nationale. Ils se ré‐
clament de Dürer et de Raphaël. Pour eux l’art doit consolider la foi. La
confrérie de Saint-Luc sera fondée en 1809 par les jeunes peintres et élèves de
l’Académie des beaux-arts : Pforr (1788-1812), Overbeck (1789-1869), Vogel
(1788-1879), Joseph Wintergest, Joseph Sutter, Johann Hottinger. Le nom
se réfère à l’art du Moyen Âge qu’ils ont redécouvert au musée du Belvédère de
Vienne. L’association avait pour but de s’ériger contre l’esthétique du baroque
tardif, de s’opposer à l’Académie qu’ils jugeaient corrompue. La vie et l’art ne
devaient pas être séparés selon eux, mais s’interpénétrer et fusionner en une
unité. Ils vivent en communauté à Rome dans le couvent de San Isidoro. Leur
influence s’efface vers 1855 devant le succès du réalisme.
DU RÉALISME AU SYMBOLISME
L’origine du nom Biedermeier trouve ses sources dans le nom donné à une
caricature de petit bourgeois figurant dans les Poèmes de l’instituteur souabe
Gottlieb Bierdermeier et de son ami Horatius Treuherz publiés par Adolf Kuss‐
maul et Ludwig Eichordt dans le Münchener Fliegende Blätter. Il s’applique
pendant la période 1815-1848 à un mode de vie mené bourgeoisement et à la
décoration intérieure, mais aussi à la littérature et à la peinture. Il incarne parfai‐
tement le type du bourgeois allemand entre la période du congrès de Vienne en
1815 et celle de la révolution de mars en 1848, et traduit la vie de la classe
moyenne sans prétention. Ses plus belles réussites se trouvent dans les paysages
et dans les portraits : ainsi Ferdinand Waldmüller (1793-1865) peint Le Fils de
Waldmüller Ferdinand et son chien (1836). Le style Biedermeier se produit
pendant la période dite du Vormärz, avant mars, en même temps que le style
Louis-Philippe en France. Le mobilier Biedermeier qui envahit les maisons
connues de la bourgeoisie se veut une adaptation simple aux exigences nou‐
velles du confort. La simplicité du matériau est compensée par une grande di‐
versité des meubles.
LE RÉALISME ALLEMAND
LE CLASSICISME DE WEIMAR
Sa doctrine
Fichte pense restituer ce que Kant n’a pas dit formellement. Ce dernier reje‐
tait l’intuition des choses en soi. Fichte rétablit l’intuition, la conscience que l’es‐
prit a de sa propre activité. Son système s’appuie sur trois principes. Le premier
principe, le moi, est présupposé par toute connaissance, il est absolu, incondi‐
tionné. Or, ce moi ne peut prendre conscience de soi qu’en se limitant et en
s’imposant selon la formule célèbre de Fichte : « Le moi ne se pose qu’en s’op‐
posant à un non-moi 1 », ce qui constitue le second principe. Les deux principes
ne peuvent être conciliés que si apparaissent entre eux deux termes corrélatifs :
« un moi divisible » et un « non-moi divisible ». Autrement dit, le moi oppose
en lui-même un moi divisible et un non-moi divisible. La triade hégélienne est
réalisée à l’intérieur de moi (thèse-antithèse-synthèse).
Sa doctrine
Les grandes idées qui font la force du système philosophique de Hegel sont
empruntées à Schelling : l’idée d’une philosophie de la nature et de l’histoire, les
rapports étroits entre art, religion et philosophie. Schelling corrige ce qu’il y a
de trop radical dans l’idéalisme de Fichte. Il restaure le monde extérieur. Pour
lui, le non-moi existe et le moi aussi, au même titre, et ont une source commune
qui est une « volonté primitive ». Tous deux sont la nature, véritable « odyssée
de l’esprit ». Schelling attaque les savants comme Bacon qui penchent plutôt
pour la science que pour la philosophie. La nature ne peut pas appréhender les
phénomènes scientifiques qui la composent. Seule une intuition artistique peut
les révéler. Lorsqu’il se tourne vers la religion, Schelling s’inspire des théories
de Jacob Böhme et il esquisse dans Philosophie et religion (1804) une véritable
théosophie. En face de l’homme et de la nature, de ce premier monde, il en ré‐
sulte un second : Dieu. Dieu est l’infini, le parfait et particulièrement la volonté
parfaite et infinie. Il est « l’être de tous les êtres ». La perspective de Schelling
est parfaitement panthéiste. L’homme, émanation de Dieu, pour se diviniser,
doit abdiquer son égoïsme et tendre à la divinisation par la raison et la volonté.
Georg Wilhem Friedrich Hegel : penser les choses et le réel dans leur unité
Sa doctrine
La philosophie
La philosophie de l’esprit
Religion et philosophie
L’hégélianisme
Sa doctrine
Pour Nietzsche, Dieu ne saurait être mort puisqu’il n’a jamais existé.
L’homme se découvre meurtrier de Dieu, aspire à devenir Dieu lui-même, parce
qu’il tourne le dos à la religion, et abandonne radicalement les valeurs anciennes
pour mettre en place les siennes, « humaines, trop humaines », celles du progrès,
de la science. « Les dieux aussi se décomposent ! Dieu est mort ! […] La gran‐
deur de cet acte est trop grande pour nous. Ne faut-il pas devenir dieux nous-
mêmes pour simplement avoir l’air dignes d’elle9 ? » La mort de Dieu est une
étape qui porte l’espoir de créer un univers neuf. Nietzsche se livre à une cri‐
tique impitoyable de l’homme moderne qui ne croit ni aux valeurs divines ni
aux valeurs humaines. Sa volonté n’est plus volonté de puissance, mais volonté
de néant. Au-delà du dernier homme, il y a l’homme qui veut périr. Selon Gilles
Deleuze, le dernier homme représente le stade ultime du nihilisme, celui qui
consiste à cesser tout combat et à s’abrutir dans l’inertie. Le dernier homme se‐
rait le dénouement de cette marche du nihilisme : « Ainsi racontée, l’histoire
nous mène encore à la même conclusion : le nihilisme négatif est remplacé par
le nihilisme réactif, le nihilisme réactif aboutit au nihilisme passif. De Dieu au
meurtrier de Dieu, du meurtrier de Dieu au dernier des hommes10. »
Nietzsche et le nazisme
Né dans une riche famille de banquiers, après avoir suivi les cours de Fichte
et du sceptique Schulze, Schopenhauer obtient en 1814 à Iéna son doctorat inti‐
tulé « La Quadruple Racine du principe de raison suffisante ». Après la publica‐
tion, en 1818, du Monde comme volonté et comme représentation, il est chargé
de cours, en 1819, à l’université de Berlin dont il n’obtient pas la chaire. À partir
de 1833, il rédige Les Deux Problèmes fondamentaux de l’éthique, Parerga et
Paralipomena, une fois retiré à Francfort-sur-le-Main . Les qualités littéraires
qui sont les siennes ne sont pas étrangères ni à l’engouement provoqué par son
œuvre ni à l’influence exercée sur des écrivains tels Maupassant, Zola, Piran‐
dello, Thomas Mann.
Sa doctrine
LE MATÉRIALISME
Les années 1830 sont dominées par la pensée idéaliste de Hegel. Pourtant,
c’est sur les théories matérialistes de Hobbes, de Feuerbach, de Saint-Simon que
Marx s’appuie pour développer la notion de matérialisme historique. Celle-ci
l’amène à présenter un matérialisme dialectique dont il se distingue comme une
méthode d’une doctrine. Si le matérialisme repose sur une conception philoso‐
phique qui fait de la matière le fondement de l’univers et s’oppose au spiritua‐
lisme, pour qui tout provient de l’esprit, le matérialisme dialectique considère la
matière en tant qu’engagée dans un développement historique. Feuerbach
(1804-1872) est le chaînon intermédiaire pour que l’idéalisme absolu se trans‐
forme en matérialisme historique tel que nous le retrouvons chez Marx.
Né à Trêves, Karl Marx (1818-1883) fait d’abord des études de droit, mais
termine par une thèse de philosophie, en 1841, intitulée « La différence entre la
philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure ». En 1845, expulsé de
France, il part en Angleterre. 1848 marque la date de la rédaction du Manifeste
du parti communiste. Après plusieurs expulsions, il reste à Londres. Étroitement
mêlé à la vie politique de son époque, après avoir été affilié en 1845 à la ligue
des communistes, il fonde, en 1864, l’Association internationale des travailleurs.
En 1867, il publie la première partie de son ouvrage Le Capital. Il meurt en
1883. Lors de l’enterrement de Marx à Highgate Cemetery, Engels a déclaré
que Marx avait fait deux grandes découvertes : la loi de développement de l’his‐
toire humaine et la loi du mouvement de la société bourgeoise.
Sa doctrine
Marx commence par critiquer Hegel et les idéalistes, à démontrer que leurs
théories sont davantage prouvées par le matérialisme. Le texte qui résume le
mieux sa conception d’ensemble est la célèbre préface de la Contribution à la
critique de l’économie politique. Il y dit que chaque société est déterminée et ca‐
ractérisée par un état des rapports de production lui-même correspondant à un
certain état du développement des forces productives. Par force de production,
Marx sous-entend un certain développement de notre niveau de connaissance
technique et une certaine organisation de travail en commun. Par moments, ce
sont les forces productives qui entrent en contradiction avec les rapports de pro‐
duction existants. Les changements qui se produisent dans la base économique
bouleversent la superstructure. Ainsi plusieurs thèmes se dégagent :
La dialectique
Le matérialisme marxiste
L’homme
Le point de départ de l’histoire humaine est l’homme vivant, qui cherche à ré‐
pondre à certains besoins primaires. L’activité humaine est essentiellement une
lutte avec la nature qui doit lui fournir les moyens de satisfaire ses besoins :
boisson, nourriture, vêtements, développement de ses pouvoirs et de ses capaci‐
tés intellectuelles et artistiques. Dans la prise de conscience de sa lutte contre la
nature, l’homme trouve les conditions de son épanouissement, la réalisation de
sa vraie stature. L’avènement de la conscience est inséparable de la lutte. Com‐
prise dans sa dimension universelle, l’activité humaine révèle que pour l’homme,
l’homme est l’être suprême. Il est donc vain de parler de Dieu, de la création, et
des problèmes métaphysiques.
Les structures
L’art espagnol au XIXe siècle n’évolue pas en marge des transformations qu’il
subit en Europe. Dans le sillage de Manet, de nombreux peintres et écrivains
prendront, à la fin du XIXe siècle, le chemin de l’Espagne afin d’y acquérir une
formation artistique, comme Constantin Meunier, Émile Verhaeren, James
Ensor.
LA PEINTURE EN ESPAGNE AU XIXe SIÈCLE
Garibaldi tente de prendre Rome en 1867, mais la France envoie des troupes
qui le repoussent. Il faut attendre la chute du Second Empire en sep‐
tembre 1870. Dès le 20 septembre 1870, l’armée italienne entre dans Rome. Un
plébiscite favorable conclut le rattachement au royaume d’Italie. Victor-Emma‐
nuel II s’y installe en juillet 1871, en fait la capitale du royaume. La loi des ga‐
ranties de mai 1871 reconnaît le pape comme souverain inviolable de la cité du
Vatican, lui laisse le Latran et Castel Gandolfo, lui octroie une rente annuelle de
plus de 3 millions de lires (la pièce de 20 lires pèse 5 g d’or). Le pape refuse, ne
reconnaît pas le royaume d’Italie. La situation se normalise en 1929 avec la si‐
gnature des accords du Latran qui fondent l’État du Vatican. Victor-Emma‐
nuel II meurt le 9 janvier 1878.
Son fils Humbert Ier (1878-1900) lui succède. Il signe une alliance, la Triple
Alliance ou Triplice, en 1882 avec les empires centraux, Allemagne et Autriche-
Hongrie. Il est assassiné par un anarchiste italien le 29 juillet 1900. Depuis
1882, l’Italie s’impose en Abyssinie (actuelle Éthiopie pour l’essentiel), s’em‐
pare de l’Érythrée et de la Somalie, place le régime du négus d’Abyssinie sous
protectorat italien. Jusqu’au moment où le négus se révolte, bat les Italiens à
deux reprises, à Amba Alaghi (décembre 1895) et à Adoua (mars 1896). C’est
l’échec de la politique coloniale abyssinienne. Le nouveau roi, Victor-Emma‐
nuel III (1900-1946), se rapproche de la France, renonce aux prétentions ita‐
liennes sur le Maroc en échange de la Tripolitaine, région occidentale de la Li‐
bye. Une guerre contre la Turquie, en 1911, permet à l’Italie d’occuper les îles
turques de la mer Égée, d’ajouter la Cyrénaïque à la Tripolitaine pour contrôler
la Libye tout entière (paix de Lausanne, 18 octobre 1912). Lorsque la Première
Guerre mondiale éclate, l’Italie, qui avait pris soin de faire acter que la Triplice
n’était pas dirigée contre l’Angleterre et qu’elle ne participerait pas à une agres‐
sion allemande contre la France, se proclame neutre. Elle rejoint le camp des
Alliés, basculant ses alliances, en février 1915, et se retrouve au nombre des
vainqueurs lors de la signature du traité de Versailles le 28 juin 1919.
Son frère Nicolas Ier (1825-1855) lui succède. Autocrate convaincu, réac‐
tionnaire, il maintient le servage, qu’il réprouve pourtant, afin de ne pas s’aliéner
la noblesse, mais réforme les lois par un nouveau code en 1835, qui remplace
l’Oulojénie de 1649. Une tentative de jeunes officiers pour amener le tsar à une
réforme vers une monarchie constitutionnelle, celle des décembristes, en dé‐
cembre 1825, est écrasée, mais ancre Nicolas Ier dans le conservatisme le plus
étroit. Il encourage les monarques européens à mettre fin au Printemps des
peuples et aux révolutions de 1848 afin de restaurer partout l’absolutisme. Il se
lance en 1853 dans la guerre de Crimée (1853-1856) contre les Ottomans, mais
est vaincu par les troupes franco-anglaises, notamment à Sébastopol. L’humilia‐
tion est grande pour la Russie. Nicolas Ier meurt le 2 mars 1855, laissant à ses
successeurs le soin de réaliser des réformes de plus en plus urgentes.
ALEXANDRE II LE LIBÉRATEUR
Sans les réformes menées par Pierre Ier au tournant du XVIIe siècle à grande
échelle et dans tous les domaines, la culture russe au XIXe siècle n’aurait sans
doute pas pu se développer. Le fait d’avoir installé sa capitale à Saint-Péters‐
bourg était déjà un pas de fait vers l’occidentalisation. Pendant tout le
XIXe siècle, le grand débat intellectuel russe sera de savoir si l’on rejoint la voie
occidentale ou si l’on mise sur le génie national du pays. L’hésitation de la Rus‐
sie à répondre directement à cette question montre qu’il y a eu constamment
une volonté de développer l’identité nationale. L’Allemagne a fait connaître au
XVIIIe siècle ses Lumières aux Russes. Dans la société cultivée, la langue alle‐
mande domine jusqu’au dernier quart du XVIIIe siècle et, dans les milieux acadé‐
miques, elle gardera sa place jusqu’au XIXe siècle. Mais l’idéologie des Lumières
influence les lettrés et la noblesse cultivée qui suivent les idées de Voltaire, Hel‐
vétius et Rousseau et qui, pour ce faire, parlent leur langue. La Révolution
française après l’exécution du roi, la dictature jacobine et ses excès trouvent de
moins en moins de sympathisants. La vieille Russie jusqu’alors s’était présentée
comme un monde pluriel. Les réformes menées par Pierre le Grand vont mar‐
quer une véritable cassure dans les profondeurs spirituelles mais aussi au sein de
la société, créant un fossé entre les élites dirigeantes et la masse qui perdurera
pendant tout le siècle. La domination absolue de l’Église touche à sa fin. Les
réalisations techniques, économiques se tournent vers l’Europe pour être me‐
nées à bien. Les bases d’un système éducatif posé sont libérées du joug reli‐
gieux. Tandis que la noblesse s’approprie les façons de faire et de vivre de celle
d’Europe. Les conséquences dans le domaine des arts, de la culture et des
connaissances seront lourdes mais se feront sentir lentement. Comme partout
ailleurs, le développement de l’instruction, la création d’écoles, l’essor d’univer‐
sités, la création d’instituts de formation, en 1801, celui des ingénieurs en com‐
munication, l’institut de technologie à Saint-Pétersbourg favorisèrent l’accès à la
culture. Pendant le XIXe siècle, l’art russe adoptera le même découpage stylis‐
tique que l’Europe, romantisme, réalisme mais sans avoir toujours la même du‐
rée.
Le XVIIIe siècle de l’art russe avait été marqué par des emprunts considérables
faits à l’Occident dans tous les domaines, y compris l’architecture avec les chan‐
tiers entrepris à Saint-Pétersbourg : Jean-Baptiste Le Blond (1679-1719) fait
les jardins, Domenico Trezzini (1670-1734) en dessine de nombreux bâti‐
ments. Les œuvres de Francesco Bartolomeo Rastrelli (1700-1771), premier
architecte à la cour de l’impératrice Elisabeth, qui reconstruit parmi ses
soixante-quinze réalisations le palais d’Hiver à Saint-Pétersbourg, déterminent
le baroque russe. Le classicisme s’épanouit avec Jean-Baptiste Vallin de La
Mothe (1729-1800), auteur du pavillon de l’Ermitage, des quais de la Neva, qui
fait connaître aux Russes le style Louis XVI. Un de ses élèves, Vassili Bajenov
(1737-1799), se voit confier la construction du nouveau palais au Kremlin mais
le projet de ce visionnaire n’aboutira pas. Peu à peu les architectes russes vont
mettre au point un style national, tout en améliorant les formes du classicisme.
Dans le « style empire Russe », l’espace devient le centre d’intérêt dominant de
l’architecte. L’édifice de l’amirauté dessiné par Adrian Zakharov (1761-1811)
en est le meilleur exemple. De même Carlo Rossi (1775-1849) réalise à partir
de 1810 des œuvres de même qualité, l’État-major sur la place du palais, le pa‐
lais du Sénat et du Saint-Synode. À Moscou, l’architecture de la seconde moitié
du XIXe siècle sera marquée par des œuvres de grandes dimensions abandonnant
peu à peu les formes classiques au profit de celles de l’éclectisme.
Le XVIIIe siècle avait été l’âge d’or du portrait avec Ivan Nikitine (1680-
1742) et Andreï Matveïev (1701-1739) et, sous le règne d’Elisabeth, avec l’ar‐
rivée de nombreux peintres étrangers. Jusqu’au XIXe siècle, la peinture russe est
sous la dépendance de l’Europe occidentale. Ivan Argounov (1729-1802)
trouve ses modèles dans la peinture d’Hyacinthe Rigaud ou Jean-Marc Nallier.
Avec la création de l’Académie des beaux-arts en 1757, la peinture historique
fait son apparition, les professeurs qui enseignent la peinture sont français : La‐
grenée l’Aîné (1725-1805) et Gabriel François Doyen (1726-1806). Au début
du XIXe siècle, le romantisme marque la peinture et le portrait est à l’honneur
avec Orest Kiprenski (1782-1836) et son Portrait d’Adam Schwalbe (1804). La
peinture de Sylvestre Chtchedrine (1791-1830) inaugure la peinture de pay‐
sage peinte à l’extérieur. Les scènes de genre trouvent en Alexis Venetsianov
(1780-1847) leur maître avec ses scènes de la vie paysanne comme Le Berger
endormi (1823-1826). La peinture historique suit avec Karl Briullov (1799-
1852) et Le Dernier Jour de Pompéi (1830-1833). La seconde moitié du
XIXe siècle, marquée par l’influence des idées philosophiques et éthiques, le dé‐
veloppement intense des sciences et des techniques, la tradition réaliste dans la
littérature de Tolstoï et Tchekhov, finit par imprégner la peinture à son tour.
Vassili Perov (1834-1882) cherche à stigmatiser les plaies de la société, de
même que Vassili Poukirev (1832-1890). En 1864, un groupe d’artistes refuse
de concourir à l’Académie selon les sujets imposés, car ils veulent des sujets
russes contemporains. C’est la révolte des quatorze qui ouvre la voie à un réa‐
lisme nouveau, déchargé du pittoresque sentimental et misérabiliste. Les photo‐
graphes affichent leur attachement aux coutumes de l’ancienne Russie, fixant
dès 1860 un peu de l’âme russe sur la pellicule, travaux des champs, métiers ar‐
tisanaux. Cette quête d’identité se poursuit dans tous les domaines artistiques
ainsi qu’en peinture. L’art populaire se voit recensé dans les dernières années du
XIXe siècle et devient une source de renouveau esthétique. Son rôle sera déter‐
minant dans l’art nouveau russe, le « style moderne ». Victor Vasnetsov (1848-
1926) prendra ses sujets dans les contes russes, les Trois Preux, trois chevaliers
légendaires qui combattirent les Mongols. Mickaël Vroubel (1856-1910) éla‐
bore son propre style, à partir de l’académisme, de fresques et de mosaïques by‐
zantines. En 1899, la revue du Monde de l’art, fondée par Alexandre Benois
(1870-1960) et Serge de Diaghilev (1872-1929), remplace l’idéal slavophile
par un projet cosmopolite et oppose l’art pour l’art à l’art social. L’exposition te‐
nue à Moscou en 1907 marque le point de départ du bouillonnement de l’art
russe et cela pendant vingt-cinq ans. En 1910, l’exposition Le Valet de carreau
regroupe les artistes attirés par le primitivisme, comme Vassili Kouprine
(1880-1960) qui en fut l’un des organisateurs.
Il faut arriver à Pouchkine (1799-1837) pour voir apparaître une forme na‐
tionale du romantisme russe. Sa principale œuvre, Boris Godounov (1825), est
un drame en cinq actes. Il est aussi l’auteur d’une sorte d’épopée bourgeoise, un
tableau réaliste et poétique des mœurs dont le cadre se situe en Crimée : Le Pri‐
sonnier du Caucase (1821), La Dame de pique (1833). La littérature nationale
ne conquiert vraiment ses lettres de noblesse qu’avec Nicolas Vassiliévitch Go‐
gol (1809-1852), créateur de l’école « naturelle », c’est-à-dire réaliste. Il débute
par Les Soirées du hameau (1831-1832) mais son succès date du Manteau
(1843), courte nouvelle écrite dans le style réaliste de Balzac. Son œuvre capi‐
tale reste Les Âmes mortes (1835), roman inachevé où il dépeint avec force une
succession de tableaux de la vie russe. Tarass Boulba (1839) est le résultat de
recherches approfondies sur les vieilles épopées russes, dont l’action se déroule
au XVIe siècle pendant la lutte des Cosaques contre les Polonais et les Russes.
Ivan Sergueïevitch Tourguéniev (1818-1883) est sans doute l’écrivain le
plus lu à Paris aux alentours de 1850. Il voyage en France pendant la deuxième
partie de sa vie et se lie intimement avec des auteurs comme Mérimée, Flau‐
bert, Zola. Aussi s’impose-t-il davantage comme un Occidental dans sa façon
d’écrire : Les Récits d’un chasseur (1847) sont réalisés pour provoquer un mou‐
vement d’opinion contre le servage par une suite de nouvelles. Dans le premier
de ses romans, Roudine (1856), il peint un jeune utopiste qui croit que ses idées
auront une influence sur son temps.
Le roman russe moderne est dans son essence même la création de son intel‐
ligentsia qui considère la littérature comme le moyen de faire une critique so‐
ciale poussée. L’université de Moscou en est un des principaux centres. Les sla‐
vophiles sont les héritiers intellectuels de Burke, de Maistre, d’Herder, tout
comme les Occidentaux sont les disciples de Voltaire, des encyclopédistes, et
plus tard des socialistes, Saint-Simon, Fourier et Comte. Ceux-ci interprètent
l’isolement, la solitude de l’homme moderne comme la conséquence du pro‐
blème de la liberté. Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski (1821-1881)1 dépeint
ses héros aux prises avec ce problème et glorifie dans ses romans la solidarité
humaine et l’amour pour éviter un nihilisme à la Flaubert. Pour lui, la source de
tous nos maux se trouve dans notre volonté et notre orgueil. La seule voie de sa‐
lut qui nous reste est l’humilité. Avant tout, il s’impose comme écrivain de la
psychologie humaine : Les Pauvres Gens (1846), Crime et Châtiment (1866),
Les Possédés (1871), Les Frères Karamazov (1880). Léon Tolstoï (1828-1910),
moins nationaliste que Dostoïevski, est en revanche plus préoccupé par l’Évan‐
gile dont les conséquences poussées jusqu’à l’absurde mènent tout droit à l’anar‐
chisme. Tolstoï est surtout connu pour ses deux plus longs travaux, Guerre et
Paix (1864-1869) et Anna Karénine (1873-1877). Les œuvres de Tolstoï pen‐
dant les années 1850 et début des années 1860 expérimentent de nouvelles
formes pour exprimer ses préoccupations morales et philosophiques. Après
avoir terminé Anna Karénine, Tolstoï tombe dans un profond état de désespoir
existentiel. Attiré d’abord par l’Église orthodoxe russe, il décide qu’elle comme
toutes les autres Églises chrétiennes sont des institutions corrompues qui ont
soigneusement falsifié la nature authentique du christianisme. Après avoir dé‐
couvert ce qu’il croyait être le message du Christ et après avoir surmonté sa peur
paralysante de la mort, Tolstoï consacre le reste de sa vie à développer et à pro‐
pager sa foi nouvelle. Il a été excommunié de l’Église orthodoxe russe en 1901.
Il considère le conflit entre l’individu et la société, non en tant que tragédie in‐
évitable, mais comme une calamité attribuée à un manque de discernement et
de compréhension morale. Parmi ses œuvres, on peut également citer : La So‐
nate à Kreutzer (1889), Résurrection (1899), La Puissance des ténèbres (1887).
La littérature danoise
La littérature suédoise
La littérature suédoise trouve son écho pour la première fois en Europe avec
August Strindberg (1849-1912). Dans ses nouvelles et ses drames, Le Mystère
de la guilde (1881), Mariés (1885), Premier avertissement (1893), Le Songe
(1901), il passe d’un socialisme positif à l’individualisme, puis finalement à un
mysticisme chrétien teinté de symbolisme. Selma Lagerlöf (1858-1940) de‐
vient célèbre par la publication de La Saga de Gosta Berling (1891). Les per‐
sonnages de ces récits sont tous Suédois. Son ouvrage le plus populaire est Le
Merveilleux Voyage de Nils Holgersson (1906). C’est une description des pay‐
sages de Suède tels que les entrevoit un enfant qui voyage sur le dos d’une oie
sauvage. En 1909, Selma Lagerlöf reçoit le prix Nobel. Pour beaucoup, son
chef-d’œuvre reste Anna Svard (1928).
La littérature norvégienne
Les premiers écrits remontent au IVe siècle de notre ère et sont des inscrip‐
tions runiques. Tour à tour, la littérature norvégienne subit les influences islan‐
daise au XIe siècle, et française au XIIIe siècle. Après cette période, presque
quatre siècles de silence suivent. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, elle s’eu‐
ropéanise avec Björnstjerne Björnson (1832-1910) et Henrik Ibsen (1828-
1906). Le premier, qui vécut en France et se mêla à l’agitation politique, fut
poète, dramaturge et romancier. Ses œuvres, dont La Fille du pêcheur (1880),
recèlent une puissante couleur locale. Il reçut le prix Nobel en 1903. Quant à
Ibsen, son œuvre évolue peu à peu du néoromantisme à la critique sociale. Il
tente de démasquer le mensonge de la vie, étudie les rapports entre les sexes, et
la personnalité de la femme. Vers 1890, la critique et le public lettré français se
passionnent pour cet auteur qui vient de produire au théâtre une œuvre aussi ori‐
ginale.
Le théâtre d’Ibsen
Le développement du théâtre naturaliste avait été favorisé par la création partout en Eu‐
rope de compagnies théâtrales indépendantes, comme le Théâtre-Libre fondé par André
Antoine à Paris en 1887, ou celui de la Freie Bühne à Berlin par Otto Brahm en 1889. Le
théâtre d’Ibsen (1828-1906) ramène sur scène l’art, la beauté, l’idée sans lesquels le
Théâtre-Libre était en train de s’enliser. Les pièces d’Ibsen peuvent être soit philoso‐
phiques ou symboliques, Brand (1866), Peer Gynt (1867), soit réalistes, la Maison de pou‐
pée (1879).
Notes
1. À ce sujet, voir Jean-François Pépin, « Dostoïevski », in Encyclopædia Universalis.
CHAPITRE VII
EXTENSION ET CONQUÊTES
L’une des conséquences de cette guerre est l’énoncé, quelques années plus
tard, de la doctrine de Monroe, souvent résumée par une formule lapidaire :
« L’Amérique aux Américains. » Dans son message annuel au Congrès du 2 dé‐
cembre 1823, le Président James Monroe (1817-1825) formule la position qui
demeure celle des États-Unis jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Cette doc‐
trine définit trois axes : Amérique du Nord et du Sud ne sont plus ouvertes à la
colonisation européenne, toute intervention européenne sur le continent améri‐
cain est considérée comme une menace directe à l’endroit des États-Unis, ces
derniers s’engagent à ne pas intervenir dans les affaires européennes. Ce dernier
point explique en partie l’entrée tardive des États-Unis dans les deux conflits
mondiaux. Les républicains sont demeurés au pouvoir entre 1801 et 1829. Ils
représentent bien les États du Nord, mais mécontentent ceux du Sud esclava‐
giste et les nouveaux États qui se forment à l’Ouest. En 1829, Andrew Jackson
(1829-1837), originaire du Tennessee, est élu Président des États-Unis. Vain‐
queur des Britanniques et des Indiens, il a failli être victime de sa popularité le
jour de son élection. Ses partisans se pressent en si grand nombre que peu s’en
faut qu’il ne meure étouffé, puis, ivres de joie, ceux-ci pillent consciencieuse‐
ment la Maison Blanche, joyeusement mise à sac. Ses mandats sont marqués
par les guerres indiennes, les Indiens commencent à être parqués dans des ré‐
serves. Andrew Jackson est le premier Président démocrate. Le parti démocrate
est né d’un regroupement des représentants des États du Sud et de l’Ouest. Cette
coalition dure jusqu’à la guerre de Sécession. Jackson se rend impopulaire en
instaurant au sein de l’administration fédérale le spoil system ou « système des
dépouilles ». Démocrate, il renvoie les fonctionnaires républicains pour donner
leur poste à des démocrates. Ce système est toujours en vigueur, chaque nou‐
veau Président installe sa propre administration pendant que la précédente fait
ses cartons. Ce procédé, souvent mal compris hors des États-Unis, repose sur
une volonté démocratique, offrir au plus grand nombre la possibilité d’occuper
une place parmi les membres de l’administration fédérale.
L’ESCLAVAGE
LA GUERRE DE SÉCESSION
En 1860, Abraham Lincoln (1860-1865), républicain, est élu Président. Il
veut l’abolition et le maintien de l’Union, contre les États du Sud tentés par la
Sécession. La rupture intervient en quelques étapes, entre décembre 1860 et
avril 1861. Le 20 décembre 1860, la Caroline du Sud fait sécession la première,
suivie par le Mississippi, la Floride, l’Alabama, la Géorgie, la Louisiane, le
Texas, la Caroline du Nord, la Virginie (mais pas la Virginie occidentale), le
Tennessee, l’Arkansas. Ils adoptent en mars 1861 la Constitution des États
confédérés d’Amérique, version définitive d’une Constitution provisoire utilisée
depuis février. Le premier, et seul Président, est élu en la personne de Jefferson
Davis (1861-1865). Le 12 avril 1861 les troupes sudistes du général Pierre
Gustave Toutant de Beauregard (1818-1893) attaquent Fort Sumter, devant
Charleston en Caroline du Sud, tenu par une garnison nordiste, ouvrant la
guerre de Sécession. En mai 1861, la capitale confédérée est installée à Rich‐
mond, en Virginie.
La guerre de Sécession en quelques dates essentielles
La guerre de Sécession est un nom qui ne traduit pas parfaitement le terme américain qui
s’y réfère de Civil War ou « Guerre civile ». Elle dure de 1861 à 1865, et s’achève par la
défaite des États confédérés du Sud et la proclamation du 13e amendement à la Constitu‐
tion américaine, abolissant l’esclavage.
12 avril 1861 : Les Confédérés attaquent Fort Sumter en Caroline du Sud.
21 juillet 1861 : Bataille de Bull Pun, défaite du Nord.
1862 : Abraham Lincoln impose un blocus aux ports du Sud.
1er mai 1862 : Bataille de la Nouvelle-Orléans, victoire du Nord.
25 juin 1862 : Bataille des sept jours, victoire du Sud.
17 septembre 1862 : Bataille d’Antietam, victoire du Nord.
1er juillet 1863 : Bataille de Gettysburg, victoire du Nord.
23 novembre 1863 : Bataille de Chattanooga, victoire du Nord.
2 septembre 1864 : Bataille d’Atlanta, victoire du Nord.
31 janvier 1865 : Vote du 13e amendement à la Constitution américaine, abolissant l’es‐
clavage.
9 avril 1865 : Bataille d’Appomattox, victoire du Nord.
Les généraux du Nord : Ulysse S. Grant (1822-1885), George G. Meada (1815-1872),
William T. Sherman (1820-1891), George A. Custer (1839-1876), George K. Thomas
(1816-1870), Joseph Hooker (1814-1879).
Les généraux du Sud : Robert Lee (1807-1870), Joseph E. Johnston (1807-1891),
Braxton Bragg (1817-1876), Pierre Gustave Toutant de Beauregard (1818-1893), John
B. Hood (1831-1879), Thomas J. Jackson (1824-1863), James Longstreet (1821-
1904).
L’esclavage, aboli, n’est pas la seule cause de la guerre de Sécession, liée aussi
à des problèmes de tarifs douaniers, de commerce, de monnaie. Les vainqueurs
ne sont pas d’accord sur l’avenir du Sud, dévasté économiquement, affaibli mo‐
ralement. Les radicaux souhaitent prendre le contrôle total du Sud, économi‐
quement et politiquement, retirer le droit de vote aux Blancs et le donner aux
Noirs. Lincoln, puis son successeur Johnson, s’y opposent, organisent des élec‐
tions. Les États du Sud, contraints d’admettre l’abolition, font des Noirs des ci‐
toyens de seconde zone : pas de droit de vote, interdiction des mariages mixtes.
Au pouvoir au Congrès en 1867, les radicaux imposent le vote des Noirs, rem‐
portent les élections dans le Sud. Certains Blancs forment alors des mouve‐
ments extrémistes, dont le Ku Klux Klan, créé en 1865, interdit en 1871, mais
qui continue ses activités dans la clandestinité. Interdit de vote depuis 1867, les
Blancs le retrouvent en 1872. Les radicaux perdent le pouvoir au profit du nou‐
veau parti démocrate.
LA PROSPÉRITÉ RETROUVÉE
Tandis que les arts plastiques restent dans le sillage de l’Europe, l’architecture
d’Amérique du Nord s’engage sur de nouvelles voies. L’incendie de Chicago en
1871 offre l’occasion de réfléchir sur l’utilisation de nouveaux matériaux asso‐
ciant le fer à un habillage de briques crues rendant les immeubles incombus‐
tibles. On donnera le nom d’école de Chicago à ce mouvement architectural qui
se développera avec William Le Baron Jenney (1832-1907) et l’un de ses
élèves Louis Sullivan (1856-1924), qui travaillera en association avec l’ingé‐
nieur Adler. La mise au point d’un ascenseur électrique en 1881 permet la
construction d’immeubles de plus en plus hauts. Henry Hobson Richardson
(1838-1886), tout en s’inspirant de l’architecture romane du Midi de la France,
montre un sens audacieux des masses et la maîtrise du détail. Pour ce faire, il
utilise différents matériaux : grès, granit. Son œuvre maîtresse est l’église de la
Trinité à Boston. Louis Sullivan, dès les années 1890, a recours à l’ossature
d’acier qui donne naissance aux premiers buildings.
Jusqu’à la fin du XIXe siècle, l’art pictural américain reste tributaire de l’art oc‐
cidental. Il faut attendre la moitié du XIXe siècle pour que débutent des échanges
entre les artistes américains et ceux d’Europe et que ceux-ci viennent faire dans
les ateliers de peintres français leur apprentissage. La peinture des débuts, au
XVIIe siècle, préfère la réalité brute, un art sans art. Ce sont d’abord des portrai‐
tistes, ou qui représentent des scènes de l’arrivée des premiers colons. L’école
d’Hudson, au début du XVIIe siècle, est la plus active. Ses œuvres se fondent sur
des gravures anglaises. À partir du premier tiers du XIXe siècle, la peinture de
paysage émerge. L’Hudson River School influencée par le romantisme est le
premier mouvement pictural des États-Unis. Son fondateur Thomas Cole
(1801-1848) et les autres peintres qui la constituent peignent en grands formats
la vallée de l’Hudson River et de ses environs. Entre 1850 et 1870, une seconde
génération de peintres de l’Hudson River, à la mort de Cole, se concentre sur‐
tout sur les effets de lumière, recourant à une technique précise ne laissant au‐
cune trace de travail du pinceau. Asher Durand (1796-1886) prendra la tête du
mouvement. La fin du siècle est marquée par les œuvres de William H. Har‐
nett (1848-1892) qui excelle dans l’art de la nature morte en trompe-l’œil.
Mary Cassatt (1844-1926), amie de Degas, est très proche de l’impression‐
nisme (Le Toréador, 1873). Son goût pour les estampes japonaises se retrouve
sur un grand nombre de ses tableaux exécutés après 1890. L’impressionnisme
américain s’achève avec l’exposition internationale d’art moderne de l’Armory
Show, en 1913.
C’est au milieu du XIXe siècle que l’Amérique assure son autonomie tant sur
le plan de l’architecture, de la science que de la littérature. New York devient,
pendant le premier tiers du XIXe siècle, le centre intellectuel. Washington Ir‐
ving (1783-1859) traite surtout de sujets américains (Une excursion dans les
prairies, 1835). Il est le premier auteur qui s’impose en Angleterre et en Europe.
Edgar Allan Poe (1809-1849) devient le maître incontesté de la nouvelle, mais
se fait connaître et apprécier comme critique et poète avec La Chute de la mai‐
son Usher (1839) et Les Contes du grotesque et de l’arabesque (1840). Un autre
grand représentant du roman est Herman Melville (1819-1891) dont l’œuvre
fut aussi très variée : Moby Dick (1851), White Jacket (1850), Pierre ou Les am‐
biguïtés (1852). À cette époque, New York cesse d’être le point de rencontre du
monde intellectuel au profit de Concord, petite ville de la banlieue de Boston.
C’est là que naît le Club transcendantal de Concord qui regroupe philosophes,
poètes et critiques de la Nouvelle-Angleterre. Ralph Waldo Emerson (1803-
1882) publie des ouvrages et des essais qui défendent le transcendantalisme
américain et traduisent son interprétation de la nature, de la vie de l’homme
(Nature, 1836). Henry David Thoreau (1817-1862), par son mysticisme, son
idéalisme, fait aussi partie de l’école transcendantale, tout comme Margaret
Fuller (1810-1850), grande prêtresse de l’émancipation féminine, en fut l’hégé‐
rie. Les poèmes de John Greenleaf Whittier (1807-1892) sont pleins de pas‐
sion et constituent de violentes diatribes indignées contre les planteurs du Sud
qui pratiquent l’esclavagisme, Narrative and Legendary Poems (1831), comme
Harriet Beecher-Stowe (1811-1896) avec La Case de l’oncle Tom (1852). Poe
contribue aussi grandement au développement de la poésie par l’audace de son
imagination, par ses préoccupations morales et religieuses, par son effort à
rendre le vers musical : Tamerlan (1827), To Helen (1831). James Russell Lo‐
well (1819-1891) puise son inspiration des grands romantiques anglais Keats et
Shelley (Endymion, 1817).
Après la guerre de Sécession, le nombre d’ouvrages de littérature augmente,
mais malheureusement pas la qualité. La nouvelle dès 1870 est un genre très
prisé. La période qui succède à cet âge optimiste et sentimental est au contraire
sombre et réaliste, et plus américaine, même si certains auteurs comme Lew
Wallace (1827-1905) puisent leur sujet dans l’antique Judée : Ben Hur (1880).
Naît aussi une littérature écrite par les Noirs. Le roman le plus connu est celui
de Margaret Mitchell (1900-1949), Autant en emporte le vent (1936). Mark
Twain (1835-1910) inaugure le genre humoristique bien que son chef-d’œuvre,
Les Aventures de Tom Sawyer (1876), soit une peinture fine de l’âme enfantine.
Henry James (1843-1916) est le peintre de la psychologie intérieure, l’historio‐
graphe du grand monde et des intellectuels (Portrait de femme, 1881, Les Ailes
de la colombe, 1902).
L’IDÉALISME
Notes
1. Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique [1840], Paris, Gallimard, 1961, t. II, p. 11.
CHAPITRE VIII
En 1900, le relais est pris par les Boxers de la secte Yihequan (Poings de jus‐
tice et de concorde), le terme de « poing » donnant leur appellation occidentale,
Boxers ou Boxeurs. Anti-Mandchous, anti-Européens, ils changent sur le pre‐
mier point en recevant l’appui de la cour impériale en la personne de l’impéra‐
trice douairière Cixi qui les appelle à chasser les étrangers. Un massacre d’Euro‐
péens, réfugiés dans les légations, quartiers réservés aux étrangers, commence
en juin 1900. Dès juillet, une coalition regroupant Européens et Japonais aborde
en Chine. Pékin est pris un mois plus tard. La cour s’enfuit, les Boxers sont exé‐
cutés. Par le traité du 7 septembre 1901, la Chine promet de verser une indem‐
nité faramineuse, 1 600 millions de francs-or (1 franc-or équivaut à 3,22 g d’or),
et de s’ouvrir aux étrangers. La dynastie mandchoue, la dernière, est désormais
sous tutelle occidentale, jusqu’à son effondrement en 1911.
IMPÉRATRICE DE CHINE
Le XIXe siècle, avec son lot de guerres civiles et de guerres contre les empiè‐
tements des puissances occidentales et du Japon, nuit au simple maintien des
arts, à défaut de toute expansion.
L’époque Edo est l’âge d’or de la peinture par la diversité des écoles et des
tendances en dépit de la fermeture du pays à partir de 1639. Un grand engoue‐
ment pour celle-ci, de la part d’une couche élargie de la population, aura pour
conséquence dès le début du XVIIIe siècle de déclencher aussi pour tout ce qui
vient d’ailleurs une grande curiosité. Le renouveau de la peinture pendant cette
période s’appuie sur une exploitation de la couleur plutôt que du trait, l’effet dé‐
coratif, la composition narrative. La monochromie chinoise a fait du paysage
son centre d’intérêt et se développa d’abord dans les monastères zen. Le réa‐
lisme occidental fondé sur le clair-obscur, la perspective géométrique intro‐
duite grâce à l’enseignement des missionnaires au XVIe siècle trouve, après leur
expulsion, grâce à la venue des Hollandais au XVIIIe siècle, un regain d’intérêt.
Ces différents facteurs constitueront les bases de nouvelles techniques des diffé‐
rentes écoles de peinture. L’influence étrangère à la fin du XVIIIe siècle apporta
également un renouveau important tant dans la technique que dans la concep‐
tion. Bien que séduits par les idéaux exotiques dans leurs rapports inédits aux
modes de représentation, les Japonais n’en demeurent pas moins fidèles à leur
conception de la création artistique liée à la pensée zen et à la notion de pureté.
La diffusion de l’esthétique occidentale se fera par un mouvement appelé Yoga
(style occidental) avec des peintres comme Asai Chu (1856-1907), Kuroda
Seiki (1866-1924). En réaction contre celui-ci se forme le Nihonga, autour
d’Okakura Tenshin (1862-1913), Yokoyama Taikan (1868-1958), Shimo‐
mura Kanzan (1873-1930). En 1905, le fauvisme, Seurat et Van Gogh sont
connus au Japon. Cinq ans plus tard, ce sera le tour de l’impressionnisme de
faire son entrée en scène. Une nouvelle génération se met en place.
Le paysage au XIXe siècle fournit le thème principal de représentation et son
second souffle à l’estampe. Katsushika Hokusai (1760-1849) introduit la pers‐
pective linéaire, l’étude de la lumière. Après 1820, il crée des réalisations d’une
puissance prodigieuse, véritables études de lignes. En fait c’est par la xylogra‐
phie qu’il se fait connaître et l’illustration de nombreux romans comme Coup
d’œil sur les deux rives de la rivière Sumida (1803) ou la Hokusai Manga
(1814). Mais ses estampes l’emporteront au plus haut du succès, telle La Grande
Vague de Kanagwaga (1829-1832), estampes de la série des trente-six vues du
mont Fuji. Utagawa Hiroshige (1797-1858) est lui aussi un maître du paysage
et il se fait connaître avec Cinquante trois étapes de la route du Tokaido (1883-
1884). L’art d’Hiroshige comparé à celui d’Hokusai est plus statique, plus calme.
L’homme trouve place comme l’un des éléments de la nature : Le Mont Fuji
(1858).
1. Le royaume d’Abomey
Le royaume d’Abomey, dans le sud du Bénin actuel, apparaît au XVIIe siècle,
mais c’est au XVIIIe siècle que commence son expansion, quand le roi Agaja
(1708-1732) achète des armes aux Européens sur les côtes, et se lance dans la
traite négrière pour les payer. Devenu royaume du Dahomey, il prospère sous
les rois Kpengla (1774-1789) et Ghezo (1818-1858). La monarchie y est abso‐
lue, un système élaboré permet au souverain de tout contrôler depuis son palais,
au travers d’un réseau de fonctionnaires très surveillés. Un système original de
conscription obligatoire, instauré dans le premier tiers du XIXe siècle, permet
l’existence d’une armée permanente, où les femmes aussi sont enrôlées, les cé‐
lèbres amazones du Dahomey, qui, lors des périodes de paix, sont chargées de
la garde rapprochée et de la protection du roi. Société conçue par la guerre et
pour la guerre, elle résiste mal à l’avancée des colonisateurs européens, après
avoir vu ses revenus s’effondrer avec les abolitions de l’esclavage en Occident,
en dépit de sa poursuite au Moyen-Orient. En 1892, la France en fait l’un de ses
protectorats, le roi Behanzin (1889-1894) est déposé en 1894.
L’ART D’ABOMEY
Les arts dahoméens sont liés à la personnalité des rois qui ont voulu, par le
choix des artistes et des représentations, marquer durablement leur époque.
C’est le cas des palais des rois Ghezo (1818-1858), Gléglé (1858-1889) et Be‐
hanzin (1889-1894). Ces souverains font édifier des palais de terre cuite, ornés
de plaques carrées d’un peu moins d’un mètre de côté, exécutées en demi-bosse
ou « relief dans le creux ». Les représentations, polychromes, figurent à la fois
des animaux (éléphant, singe, requin…), des êtres mythologiques, des scènes
guerrières. L’ensemble de ces scènes est une véritable propagande au service du
souverain qui les a commanditées. Sous une forme imagée, elles relatent les
grands épisodes et hauts faits de son règne. Ces représentations se retrouvent
sur les tissus, où le requin, symbole du roi Behanzin, apparaît sur les tapisseries
destinées à orner son palais.
Le vaudou, vodou ou vodoun est un culte animiste pratiqué par les Yorubas,
Kongos, Dahoméens. Tout y est esprit, les puissances naturelles, les loas, leur
forme secondaire, personnifiés pour les besoins du culte par Erzulie, l’Amour,
ou Papa Legba, le messager. La pratique consiste en des danses, chants, sacri‐
fices, jusqu’à la transe et la possession. Là, tout comme en Haïti où il est tou‐
jours pratiqué, il se christianise, en un syncrétisme qui mêle les saints et les loas,
au point d’utiliser le calendrier romain des fêtes de saints pour honorer en
même temps leur équivalent loa. Le vaudou (le dieu), selon le sens premier, est
une force de la nature (tonnerre, éclair, mer), mais aussi un lieu (rocher, mare
d’eau…). Au sommet du panthéon trône le démiurge Mawu, incréé, éternel, il
est « l’Inaccessible », jamais représenté, mais souvent invoqué. Parmi les loas,
Erzulie, déesse de l’Amour, Papa Legba, messager des dieux, Hebieso, dieu de
la Foudre, Gu, dieu des Forgerons et de la Guerre. Originaire des pays du golfe
du Bénin, Ghana, Togo, Bénin, Nigeria, le vaudou se répand, par la traite des
esclaves, en Haïti, en République dominicaine actuelle où il porte aussi le nom
de macumba, à Cuba, sous celui de santeria, au Brésil où il est le candomblé.
2. Le royaume Asante
Le royaume Ashanti, ou Asante (XVIIIe-XIXe s.), a son berceau au centre de
l’actuel Ghana. Précédé, au XVIIe siècle, par le royaume de Denkyéra, au sud du
Ghana, il est créé au XVIIIe siècle par une réunion de chefferies réalisée par le
roi Osaï Tutu (règne : v. 1680-1712). Le souverain ou Asantehene n’est pas un
autocrate, il est élu après avis du Haut Conseil, l’Asantenam hyia. Fondé sur la
puissance militaire, le royaume prend un soin constant de l’armée et des moyens
efficaces à trouver pour mobiliser le plus grand nombre d’hommes possible.
Dès son origine, il fonde sa puissance sur le commerce de l’or et celui des es‐
claves, qu’il vend aux Britanniques sur les côtes en échange d’armes à feu. C’est
d’ailleurs l’abolition de la traite qui porte un premier coup aux relations écono‐
miques, puis diplomatiques, entre les deux peuples ; les Britanniques occupent
une partie du royaume, prennent en 1874 la capitale, Koumasi, qu’ils n’occupent
pas, déposent les souverains hostiles à leur politique d’implantation. En 1901, la
conquête est achevée et le royaume, en raison de sa richesse en or, devient la
Gold Coast, la Côte de l’Or.
L’art ashanti
L’art ashanti est surtout celui du travail de l’or, depuis les masques funéraires
des rois jusqu’aux lamelles qui ornent les bâtons des interprètes des chefs, per‐
sonnes tellement sacrées que l’on ne peut leur adresser la parole directement.
L’art ashanti est surtout celui du modelage de l’or et du cuivre selon la technique
de la fonte à la cire perdue. Il est avant tout royal et de cour. Il s’agit de manifes‐
ter la puissance du souverain et des membres de sa famille, et d’assurer leur pé‐
rennité dans l’au-delà. Le masque recouvert d’or, porté sur un bâton ou une
canne de bois, représente l’âme humaine (okra) d’un ancêtre. Le porteur d’âme
du roi est choisi dans sa proche famille. Un objet usuel des Ashanti exprime
toute la délicatesse de leur art ; il s’agit des poids à peser l’or, le plus souvent en
bronze travaillés sous des formes animales ; ils révèlent le souci de l’exactitude
dans le détail, un sens rigoureux de l’observation et une maîtrise évidente des
techniques de réalisation. Le symbole du royaume Ashanti est un tabouret d’or
venu du ciel, le sika dwa. Renfermant à la fois le pouvoir royal et l’âme de la na‐
tion tout entière, les vivants, les morts, les enfants à naître, c’est un objet de
culte sur lequel nul ne s’assied. Le posséder confère autorité, prestige et force
surhumaine. Il ne doit jamais toucher le sol, les dieux l’ont déposé directement
sur les genoux du premier roi. C’est pourquoi, ordinairement, il est placé sur
une couverture. Lors d’une intronisation, le roi est élevé au-dessus du sika dwa
sans jamais le toucher.
Le royaume zoulou (XIXe s.) s’étend en Afrique du Sud, en grande partie sur
la côte orientale du Natal, sous l’impulsion de Chaka (v. 1783-1828), roi en
1816. Il lance le Mfecane (mouvement tumultueux de populations), en langue
sotho, une série de combats, entre 1818 et 1834, grâce à une puissante armée
permanente, ce qui est une nouveauté, estimée entre trente mille et cinquante
mille hommes dotés d’une sagaie, ou lance, à manche court et lame élargie, l’as‐
segai. Il révolutionne la tactique des impis, ou régiments, en les divisant en
quatre corps spécialisés : vétérans, nouvelles recrues, troupes d’assaut d’élite, ré‐
serve. Les vaincus sont assimilés de force aux Zoulous, quelle que soit leur eth‐
nie d’origine. En 1827, la mort de la mère adorée de Chaka, Nandi, le plonge
dans une affliction démesurée, des milliers de victimes auraient été sacrifiées
aux mânes de la défunte. Ses excès conduisent deux de ses demi-frères à l’assas‐
siner en septembre 1828. Ses successeurs peinent à maintenir leur autorité sur
l’immense territoire conquis, se heurtent aux Boers, les descendants des colons
néerlandais, et aux Britanniques qui veulent s’implanter dans la région. Ces der‐
niers mettent un terme à la puissance zouloue avec leur victoire au terme de la
guerre de 1879.
La religion zouloue
LA GUERRE DE MOUVEMENT
Au début du mois de mars 1916, le capitaine de Gaulle est au nombre des dé‐
fenseurs de Douaumont. Au cours des combats, il est blessé d’un coup de baïon‐
nette et capturé. Après avoir reçu des soins, il est interné dans un camp de pri‐
sonniers à Osnabrück. Après une tentative d’évasion, il est transféré au camp
pour officiers d’Ingolstadt. Entre de nombreuses tentatives pour s’évader, cinq
au total, il dispense à ses camarades des cours de géostratégie militaire où il ex‐
pose les événements militaires en cours. Il est libéré après l’armistice de no‐
vembre 1918.
Nivelle est démis au profit de Pétain, qui doit faire face aux mutineries de
1917 en mai et juin. Elles éclatent partout, désertions sur le front russe, italien,
révolte de la marine allemande en juillet 1915 suivie d’une sévère répression.
En France, des soldats refusent de monter au front, écœurés par les massacres
du Chemin des Dames. À Soissons, des régiments menacent de monter sur Pa‐
ris. La révolte gronde aussi contre les « planqués » de l’arrière, qui mènent
joyeuse vie quand les poilus vivent l’enfer des tranchées. Pétain use d’une poli‐
tique double : des tribunaux militaires expéditifs condamnent plus de trois mille
militaires, dont cinq cent cinquante-quatre à mort et en font fusiller quarante-
neuf d’un côté ; cantonnement, ravitaillement, fréquence de la relève et des per‐
missions sont améliorés de l’autre. Les relèves sont plus fréquentes, les repas
chauds, et surtout Pétain renonce au mythe de la percée, aux offensives perma‐
nentes qui déciment les rangs. Dans le monde civil aussi, l’hécatombe provoque
des remous. Le pape Benoît XV (1914-1922) tente de faire aboutir l’idée d’une
paix de compromis. Joseph Caillaux (1863-1944), ancien ministre des Fi‐
nances favorable au rapprochement franco-allemand, tente de fédérer les
bonnes volontés. Il est arrêté en janvier 1918. Georges Clemenceau (1841-
1929) est au pouvoir depuis novembre 1917 et prône la guerre à outrance :
« Politique intérieure ? Je fais la guerre. Politique étrangère ? Je fais la guerre »
(Discours à l’Assemblée du 8 mars 1918). Il met fin à tout possible rapproche‐
ment pour une paix de compromis.
Le coût de la guerre est avant tout humain, elle se solde par dix millions de
morts, dont deux millions de soldats allemands et 1,5 million de Français. Un
cinquième des hommes de vingt à quarante ans a disparu en France et en Alle‐
magne. André Maurois évoquera le tragique d’un jeune homme de vingt ans
condamné à vivre toute sa vie sans voir vieillir à ses côtés ses amis de jeunesse,
à traverser la vie dans une poignante solitude. À cela s’ajoutent les décès liés à
l’épidémie de grippe espagnole, plus de vingt millions de victimes entre 1918 et
1919. La puissante Europe ne domine plus le monde, la Grande Guerre, dont on
espère qu’elle est la « der des der », la dernière, l’ultime conflit, est un suicide
véritable pour l’Europe. La production agricole et industrielle a diminué d’un
tiers par rapport à 1913. La France doit reconstruire sept cent mille maisons,
60 000 km de voies ferrées et de routes. De banquier du monde avec 60 % des
réserves d’or, l’Europe devient le débiteur des États-Unis.
Aristide Briand (1862-1932) est l’homme politique français qui incarne les
espérances en une paix durable, après les massacres de la Grande Guerre et
avant que les troubles des années trente ne rendent illusoire la réalisation de cet
espoir. Avocat, socialiste, il est en 1905 le rapporteur de la loi de séparation de
l’Église et de l’État. Plusieurs fois président du Conseil à partir de 1910, il est
ministre des Affaires étrangères de 1925 à 1932. À ce titre, il joue un rôle clef
dans les accords de Locarno et le pacte Briand-Kellog. Orateur de grand talent,
il use de la tribune de la SDN pour y propager sans relâche son idéal de paix,
tente d’empêcher les tensions internationales de déboucher sur de nouveaux
conflits. Il aurait pu devenir président de la République, mais, certain d’être élu,
il ne fait pas campagne auprès des parlementaires, qui lui préfèrent Paul Dou‐
mer, le 13 juin 1931. La déception hâte certainement la fin de Briand, qui
meurt peu après, en 1932.
ON TUE UN PRÉSIDENT !
L’Action française, les Croix de Feu, l’Union nationale des combattants orga‐
nisent une manifestation le 6 février 1934. Les manifestants affluent place de la
Concorde, se dirigent vers la Chambre des députés. En fin de journée, des
échauffourées éclatent avec la police, la manifestation dégénère en émeute. Les
manifestants veulent prendre d’assaut la Chambre des députés, mais, pour ce
faire, ils doivent franchir le pont de la Concorde, fermé par la police à cheval,
qui fait feu sur les manifestants qui tentent de forcer le barrage. L’affrontement
dure de 22 heures à 3 heures du matin. Il y a vingt morts et des centaines de
blessés. Daladier démissionne, un gouvernement d’Union nationale présidé par
Gaston Doumergue (1863-1937) le remplace. Pour la droite, le 6 février 1934
est une manifestation brutalement réprimée par un régime corrompu jusqu’à la
moelle, pour la gauche, il convient d’y voir une tentative de coup d’État fasciste
qui a échoué. Le 12 février 1934, une contre-manifestation de la CGT, la
CGTU, la SFIO et le PCF, dénonçant le danger du fascisme que font peser les
ligues, aboutit à un rapprochement qui se conclut par une alliance électorale, ap‐
pelée le Front populaire, en 1936, et rejoint par les radicaux.
LE FRONT POPULAIRE
Auditeur au conseil d’État, Léon Blum est acquis aux idées socialistes par le
charisme de Jean Jaurès. Il entame une carrière de premier plan après l’éclate‐
ment consécutif au Congrès de Tours, où les communistes fondent leur propre
parti, les socialistes se regroupant au sein de la SFIO, dont Léon Blum prend la
tête. En 1936, après la victoire du Front populaire, il devient président du
Conseil, mais doit quitter le pouvoir un an plus tard, sans avoir pu mener à bien
la totalité des réformes qui lui tenaient à cœur, comme la nationalisation de la
Banque de France et des industries d’armement, qui ne sont que partiellement
réalisées. Après la défaite de 1940, il est arrêté, condamné à l’issue du procès de
Riom et finalement déporté en Allemagne. De retour en France en 1945, il se
place en retrait de la vie politique et meurt en 1950.
1. La République de Weimar
UN EMPIRE S’EFFONDRE…
Le problème pour Ebert et les socialistes est de donner naissance à une répu‐
blique dans des conditions difficiles. L’armée n’a pas admis la défaite, se consi‐
dère comme invaincue et propage la thèse du « coup de poignard dans le dos »
selon laquelle les combats auraient pu continuer si les civils, ici surtout les juifs,
les socialistes et les républicains n’avaient pas trahi en acceptant un armistice
puis des conditions de paix infamantes. Les grands industriels, comme le ma‐
gnat de l’acier Hugo Stinnes, regardent avec méfiance ce nouveau régime, fra‐
gile, peu crédible pour attirer les capitaux. L’Allemagne doit verser des répara‐
tions de guerre écrasantes alors que ses colonies lui ont été prises, ainsi que sa
flotte commerciale. La crise économique qui se profile se conjugue aux tensions
nationalistes exacerbées. Ceux qui souhaitent la République de Weimar sont mi‐
noritaires au moment où elle doit affronter une tentative de révolution inspirée
de celle de Lénine en Russie.
Les socialistes au pouvoir doivent compter sur l’extrême gauche, les sparta‐
kistes. Communistes, admirateurs de Lénine, leurs principaux représentants
sont le député de Berlin Karl Liebknecht (1871-1919) et la théoricienne mar‐
xiste Rosa Luxembourg (1871-1919). Ensemble, ils fondent la Ligue sparta‐
kiste puis le Parti communiste d’Allemagne (Kommunistische Partei Deut‐
schlands, ou KPD). Le nom « spartakiste » provient de celui du gladiateur et es‐
clave Spartacus, dont la révolte menaça Rome au Ier siècle avant J.-C. Pendant la
guerre, Karl Liebknecht publie ses Lettres à Spartacus qui lui valent une
condamnation à la prison. Le Parti social-démocrate (Sozialdemokratische Par‐
tei Deutschland ou SPD), au pouvoir, s’appuie sur l’armée et les groupes para‐
militaires qui en sont issus, les Corps francs, pour écraser la tentative de révolu‐
tion spartakiste lors de la semaine sanglante de Berlin, du 6 au 13 janvier 1919.
Le 2 janvier, Liebknecht et Rosa Luxembourg proclament la grève générale et
lancent un appel aux armes, mais la réaction rapide des militaires étouffe la ré‐
volution dans l’œuf, la répression est immédiate et brutale. Karl Liebknecht et
Rosa Luxembourg sont arrêtés et exécutés sur l’ordre du commissaire du
peuple à la guerre, Gustav Noske (1868-1946).
2. L’Allemagne nazie
Hitler doit encore régler le problème posé par les SA et leur chef, Ernst
Röhm (1887-1934), qui croient en la « révolution » promise, professent un anti‐
capitalisme virulent de nature à inquiéter le monde des affaires soutenant les
nazis. C’est fait avec l’organisation de la Nuit des longs couteaux, le 30 juin
1934. Les chefs SA réunis en Bavière sont arrêtés, leurs troupes dispersées,
Röhm est arrêté, exécuté sommairement à la prison de Stadelheim à Munich.
Hitler en profite pour faire abattre conservateurs et catholiques susceptibles de
lui occasionner une gêne, comme l’ancien chancelier Schleicher. Le 2 août
1934, Hindenburg meurt et Hitler devient Reichsführer, à la fois chancelier et
Président, il a entre les mains tous les pouvoirs. Seule l’armée peut exister
comme contre-pouvoir, mais elle est mise sous le boisseau en janvier 1938
quand Hitler supprime le ministère de la Guerre et se proclame commandant de
toutes les forces armées.
3. L’Allemagne en guerre
LE BLITZKRIEG
L’AGONIE DU NAZISME
1. Les crises
La vie politique reste dominée par le Parti conservateur, mais le Parti libéral
s’efface au profit du Labour Party, ou Parti travailliste, qui devient la seconde
force politique du pays. Le Parti libéral, indispensable à toute coalition gouver‐
nementale, est traversé de deux courants, Lloyd George (1863-1945) et les li‐
béraux-nationaux souhaitent l’alliance avec les conservateurs, mais la majorité
des libéraux veulent gouverner avec les travaillistes. En cas de crise grave, no‐
tamment les conséquences de la crise de 1929 à partir de 1930, des cabinets
d’Union nationale sont aux affaires. Entre 1916 et 1922, Lloyd George dirige un
ministère libéral-national, allié aux conservateurs. Puis ces derniers et les tra‐
vaillistes alternent au pouvoir. Les conservateurs, avec Stanley Baldwin (1867-
1947) comme Premier ministre, ne restent au pouvoir que quelques mois, de
mai 1923 à janvier 1924. Mais les travaillistes perdent les élections d’oc‐
tobre 1924 et Baldwin redevient Premier ministre pour quatre ans, assisté de
Winston Churchill comme Chancelier de l’Échiquier. De 1929 à 1931, les tra‐
vaillistes sont aux affaires, mais Ramsay MacDonald (1866-1937) doit former
un cabinet d’Union nationale pour faire face aux difficultés nées de la crise de
1929. Au sein du ministère, l’essentiel du pouvoir est en réalité entre les mains
de Baldwin, qui porte le titre de « Lord président du Conseil privé », et de Ne‐
ville Chamberlain (1869-1940), Chancelier de l’Échiquier. Les ministres tra‐
vaillistes quittent, de ce fait, assez vite le gouvernement, que MacDonald pré‐
side nominalement pourtant jusqu’en 1935. Les conservateurs sont en fait au
pouvoir jusqu’en 1939.
L’ÉPINE IRLANDAISE
2. L’Angleterre de Churchill
En 1936 le royaume est secoué par une grave crise dynastique. Le roi
George V (1910-1936) meurt le 20 janvier 1936. Son fils aîné devient le roi
Édouard VIII (20 janvier 1936-11 décembre 1936). Son couronnement doit
avoir lieu le 12 mai 1937. La personnalité du futur monarque, démagogue, au‐
toritaire, éprouvant des sympathies pour le fascisme, lui aliène en partie le sou‐
tien des élites politiques traditionnelles. Mais le problème véritable naît au début
du mois de décembre 1936, quand l’Église anglicane, par la voix d’un de ses
évêques, lui reproche son intention de conclure un mariage morganatique avec
une Américaine déjà divorcée et en passe de l’être pour la seconde fois, Wallis
Simpson (1896-1986). Le roi est confronté à une opposition générale : le Pre‐
mier ministre Baldwin, la hiérarchie de l’Église anglicane, les travaillistes der‐
rière leur chef Attlee. La population lui reproche de l’abandonner au profit
d’une femme, son incapacité à privilégier ses devoirs de futur souverain au lieu
de sa vie personnelle. Le problème est aussi religieux, puisque l’Église angli‐
cane, dont le roi est le chef, ne reconnaît pas le divorce. Il abdique donc le
11 décembre 1936. Titré duc de Windsor, il quitte l’Angleterre, épouse Wallis
Simpson. Son frère cadet, le duc d’York, lui succède sous le nom de George VI
(1936-1952). Il entreprend en 1939 une visite au Canada, aux États-Unis. La
première partie de son règne est dominée par la Seconde Guerre mondiale. En
1940, le Premier ministre Neville Chamberlain est remplacé par Winston Chur‐
chill qui occupera ce poste pendant toute la durée du conflit.
LE VIEUX LION
La crise sociale frappe la bourgeoisie, les rentiers, les paysans sans terre qui
veulent la réforme agraire promise mais toujours ajournée. Ils occupent les
terres en 1919 et 1920. Si le Nord connaît une industrialisation réussie depuis la
fin du XIXe siècle, l’Italie paie encore le retard dû à une unification politique tar‐
dive, achevée seulement en 1871. Quelques groupes prestigieux, comme la Fiat
(Fabbrica Italiana Automobile Torino) fondée en 1899, ne font pas un tissu in‐
dustriel assez dense. L’activité économique repose encore largement sur les sec‐
teurs traditionnels que sont l’agriculture et l’artisanat. Plus inquiétante encore est
la situation du Sud, le Mezzogiorno, presque uniquement agricole, où les grands
propriétaires fonciers absentéistes mettent peu ou pas du tout leurs terres en va‐
leur, accroissant le désarroi des braccianti, journaliers agricoles, d’autant plus à
leur merci que la population croît. Les révoltes paysannes sont fréquentes, les
autorités, locales ou nationales, frappées d’impéritie pratiquent un immobilisme
dangereux ; les latifundiaires, maîtres de propriétés très vastes, se tournent alors
vers l’Onorata Società della Mafia, plus connue sous le seul nom de Mafia,
qui terrorise les paysans et ramène l’ordre. Mais c’est là un choix bien dangereux
à long terme, la Mafia comprend vite comment devenir un État dans l’État.
LA CRISE POLITIQUE
2. L’Italie fasciste
Aux élections législatives de 1919, les chefs fascistes ne sont pas élus. Italo
Balbo (1896-1940), qui dirige le mouvement à Ferrare, organise les fascistes en
squadri, « escouades ». Les squadristes portent un uniforme, la chemise noire,
sont régis militairement, armés, se saluent avec le salut olympique de l’époque,
ou salut de Joinville, changé depuis 1946, car symbolique du fascisme et du na‐
zisme. Groupes violents, ils brisent les grèves, tabassent les représentants syndi‐
caux, terrorisent les paysans occupant les terres, s’attirant les sympathies des
propriétaires fonciers et des industriels. Dino Grandi (1895-1988) se charge de
l’organisation de syndicats fascistes qui s’opposent, par la violence, aux commu‐
nistes et socialistes. Il s’agit d’éviter le retour aux grèves révolutionnaires, telle
celle qui s’est déroulée aux usines Alfa Romeo de Milan, en août 1920, avec oc‐
cupation des usines et défense des sites occupés par des brigades de « gardes
rouges ». En 1921, le mouvement fasciste devient un parti politique, le Parti na‐
tional fasciste (PNF), mais aux élections de mai 1921 seuls trente-cinq députés
élus en sont issus. Le président du Conseil, Giovanni Giolitti (1842-1928), se
rapproche alors des fascistes, croyant pouvoir les utiliser sans risques pour parti‐
ciper aux fragiles coalitions gouvernementales. Dans l’entourage même du roi
Victor-Emmanuel III, des membres de la famille royale sont favorables au fas‐
cisme, solution selon eux à la situation de guerre civile que connaît le pays.
La société est étroitement contrôlée. La loi Rocco d’avril 1926 interdit les
syndicats, sauf fascistes, ainsi que la grève. En février 1934, ils sont regroupés
en corporations coiffées par un Conseil des corporations. Le système de Dopo‐
lavoro, de l’après-travail, offre des distractions aux ouvriers mais permet aussi
une propagande efficace. Cette dernière est partout, dans la presse, la radio, au
cinéma. La jeunesse est glorifiée, l’hymne fasciste s’intitule Giovinezza, « jeu‐
nesse », mais elle est surtout embrigadée dès l’âge de six ans dans les « Enfants
de la louve », puis de huit à quatorze ans dans les groupes de jeunesse, les Balli‐
las, du nom d’un jeune Génois héros d’un soulèvement contre l’occupant autri‐
chien en 1746, avant de devenir « avant-gardistes » jusqu’à dix-huit ans, âge
d’entrée pour les garçons aux « Jeunes faisceaux de combat ». L’équivalent pour
les jeunes filles se trouve dans les « Jeunes italiennes ». Garçons et filles sont
étroitement contrôlés jusqu’à dix-huit ans, leur ferveur entretenue par les lec‐
tures et les commentaires des discours du Duce. La mythique développée autour
de sa personne veut qu’au palais Venezia une fenêtre allumée toute la nuit soit
celle du bureau de Mussolini, travaillant jour et nuit pour le bien de l’Italie.
Toute déviance par rapport à l’orthodoxie fasciste est dénoncée par la Milice vo‐
lontaire pour la sécurité nationale (MVSN), réprimée par l’Organisation volon‐
taire pour la répression de l’antifascisme (OVRA). Le régime fasciste réconcilie
la monarchie avec la papauté. Le 11 février 1929 sont signés les accords du La‐
tran. Le pape est souverain de la cité du Vatican mais reconnaît le royaume
d’Italie. Il reçoit 750 millions de lires pour les pertes subies et une rente de 5 %
sur un capital de 1 milliard de lires. Le catholicisme devient religion d’État,
toute autre religion est seulement tolérée. Pourtant, les relations entre fascisme
et Église s’altèrent vite, chacun prétendant exercer un rôle prépondérant sur la
formation de la jeunesse.
LA VIA DELL’IMPERO
Depuis mai 1939, l’Italie est liée à l’Allemagne nazie par le pacte d’Acier, al‐
liance défensive et offensive. En septembre 1940 est signé le pacte tripartite
avec le Japon comme nouveau partenaire. L’Italie rentre en guerre aux côtés de
l’Allemagne, mais se fait battre en Grèce, puis sur tous les autres fronts, ne se
maintenant dans le conflit qu’avec le soutien de l’armée allemande. En
juillet 1943, les troupes anglo-américaines débarquent en Sicile. À la fin de ce
mois, le roi Victor-Emmanuel III fait arrêter Mussolini, espérant ainsi ne pas
être entraîné par la chute du fascisme. Une expédition allemande le délivre en
septembre. Mussolini va gouverner un État fantoche, la République sociale ita‐
lienne (RSI) ou République de Salò, ville où s’installe le gouvernement. Cette
éphémère république en Italie du Nord ne survit que par la présence des troupes
allemandes. Elle s’effondre devant l’avance alliée en avril 1945. C’est en tentant
de fuir que Mussolini est arrêté par des résistants italiens. Un ordre émanant du
Comité de libération nationale de Rome réclame son exécution. Il est fusillé le
28 avril 1945, son corps exposé, avec celui de sa maîtresse, Clara Petacci
(1912-1945), pendus par les pieds sur une place à Milan. L’armée allemande en
Italie a capitulé depuis le 25 avril 1945. Victor-Emmanuel III a mésestimé l’im‐
pact de son soutien au fascisme. En 1946, un référendum met fin à la monar‐
chie et proclame la naissance de la République d’Italie. Une nouvelle constitu‐
tion entre en vigueur le 1er janvier 1948.
CHAPITRE XV
1. La fin de la monarchie
2. Vers le franquisme
La guerre civile espagnole dure de 1936 à 1939, les deux camps rivalisent
d’atrocités dont sont victimes les civils. Le 1er octobre 1936, Franco reçoit les
pleins pouvoirs de la Junte militaire, l’ensemble des généraux. La puissante
Église espagnole le soutient, évoque une nouvelle croisade. En dépit d’un prin‐
cipe de non-intervention réaffirmé, certains pays lui apportent leur soutien.
L’Allemagne envoie la Légion Condor, une unité de l’armée de l’air, qui, le
26 avril 1937, bombarde la ville basque de Guernica, massacrant plus de mille
six cents personnes. L’Italie envoie des corps expéditionnaires de miliciens fas‐
cistes. L’URSS envoie quelques chars, les partis et organisations de gauche
viennent au secours du Front populaire par la création des Brigades internatio‐
nales. Composées de volontaires venus de plus de cinquante pays, elles passent
de deux mille à plus de trente mille personnes entre 1936 et 1938. Elles com‐
battent au côté des républicains de l’armée populaire de la République espa‐
gnole. Les Milices confédérales regroupent les anarchistes de la Confédération
nationale du travail (CNT) et ceux de la Fédération anarchiste ibérique (FAI).
S’ajoutent aux forces républicaines les hommes du Parti ouvrier d’unification
marxiste (POUM), du Parti socialiste unifié de Catalogne (PSUC), l’Eusko Gu‐
darostea, armée du gouvernement basque. Le camp nationaliste, outre l’armée
d’Afrique, les phalangistes, les requetés, miliciens monarchistes, la Confédéra‐
tion espagnole des droites autonomes (CEDA), comprend également des
groupes de volontaires étrangers : Viriatos portugais, Légion Saint-Patrick irlan‐
daise, Bandera Jeanne d’Arc française. La guerre civile s’achève en 1939 par la
victoire du général Franco, reconnu dès le mois de février par la France et le
Royaume-Uni. C’est toutefois le 1 er avril 1939 que Franco déclare officielle‐
ment la fin de la guerre. Le bilan du conflit est très lourd, entre trois cent
quatre-vingts mille et quatre cent cinquante mille tués, près d’un demi-million
d’Espagnols qui fuient leur pays. Certaines individualités d’exception en
émergent, telle la Pasionaria, Dolores Ibárruri (1895-1989), et son célèbre ap‐
pel No pasarán ! (« Ils ne passeront pas ! ») contre les franquistes assiégeant
Madrid.
L’ère qui s’ouvre de 1939 à 1975 est celle de l’Espagne franquiste, dirigée par
le général Franco. C’est une dictature nationaliste, fondée sur une idéologie
conservatrice, l’appui de l’Église, des institutions autoritaires. Un parti unique,
seul à être autorisé, est le relais efficace de la volonté du caudillo, le chef, titre
de Franco, lequel concentre entre ses mains tous les pouvoirs. Le corporatisme
inspiré du fascisme italien remplace tous les éléments de la démocratie parle‐
mentaire par ceux d’une démocratie organique fondée sur la famille, la munici‐
palité, le syndicat unique. Les représentants sont nommés ou choisis sur liste
par les corporations. Le parti unique, Falanga Española Tradicionalista y de las
Juntas de Ofensiva Nacional Sindicalista (FET y de las JONS), contrôle les
rouages du syndicat unique. Le catholicisme devient la religion d’État. La ré‐
pression est sanglante contre les républicains, les francs-maçons. Franco, en dé‐
pit de rencontres avec Hitler, conserve la neutralité de l’Espagne durant toute la
guerre. En 1947, il réaffirme le principe monarchique espagnol, mais sans pré‐
sence effective d’un monarque. Alphonse XIII est mort à Rome en 1941, Fran‐
co écarte le prince Juan de Bourbon (1913-1993), lui préférant son fils, Juan
Carlos, qu’il titre « prince d’Espagne » et nomme comme successeur en 1954.
CHAPITRE XVI
1. L’effondrement du tsarisme
La Russie du début du XXe siècle est plus que jamais un « colosse aux pieds
d’argile ». Elle entre tardivement dans l’Europe moderne par l’abolition du ser‐
vage, en 1861, mais ses structures sociales et politiques sont encore marquées
par l’archaïsme. Forte de ses cent cinquante-neuf millions d’habitants et de ses
20 millions de km2, elle aligne à peine plus de 60 000 km de voies ferrées en
1913. Les grandes entreprises dépendent trop souvent des capitaux étrangers.
L’industrie est très concentrée géographiquement, textile dans le bassin de Mos‐
cou, sidérurgie et exploitation minière en Ukraine. L’agriculture occupe encore
80 % de la population active. L’abolition du servage a ruiné nombre de proprié‐
taires, sans pour autant améliorer la condition paysanne dans son ensemble,
faute de réforme agraire. Seuls les koulaks, paysans aisés, ont pu racheter les
terres des nobles ruinés sur lesquelles ils exploitent à leur tour les journaliers
agricoles. Dans les grandes villes où se propage l’industrialisation se constitue
un prolétariat urbain, formé en grande partie de ruraux déracinés. Il est traversé
de courants réformistes ou révolutionnaires. Une période troublée s’annonce :
entre 1905 et 1920, le pays traverse deux guerres, une guerre civile et subit
deux révolutions.
LE DIMANCHE ROUGE
Le futur Lénine (1870-1924) est fils d’un fonctionnaire, il naît dans la bour‐
geoisie moyenne à Simbirsk, sur la Volga. Il est très tôt en contact avec les idées
révolutionnaires, par l’exemple d’un frère aîné admiré, au destin tragique : il fi‐
nit exécuté après une tentative avortée de complot. Converti au marxisme, il
fonde l’Union de lutte pour la libération de la classe ouvrière. Ses activités lui
valent une arrestation en 1895, deux ans de prison suivis de la déportation en
Sibérie, sur les rives du fleuve Léna, d’où lui viendra son surnom. Après son
temps d’exil forcé, il quitte la Russie pour s’installer en Europe occidentale, le
plus souvent en Suisse, où il crée son propre journal marxiste, baptisé l’Iskra
(Étincelle), en 1900. C’est en 1902, avec Que faire ?, qu’il définit sa conception
d’un parti marxiste, puis appelle à la révolution dans plusieurs pays par L’Impé‐
rialisme, stade suprême du capitalisme en 1916. À la tête de la majorité bolche‐
vique du Parti social-démocrate à partir de la scission de 1903, il prône le re‐
cours à la révolution et l’instauration d’une dictature du prolétariat. Il séjourne
clandestinement en Russie de 1905 à 1907. En 1912, il fonde le parti bolchevik
et un nouveau journal, la Pravda. La révolution de février lui offre l’occasion de
voir son destin et celui de la Russie se confondre. Il quitte la Suisse en
avril 1917, traverse l’Allemagne dans un wagon plombé et se prépare à déclen‐
cher la révolution.
Lénine est revenu à Petrograd. Avec les bolcheviks il organise une révolution
de professionnels qui commence par un coup d’État le 25 octobre 1917 (calen‐
drier julien), ou 7 novembre (calendrier grégorien). Dans la nuit du 24 au
25 octobre 1917, des groupes d’ouvriers, soldats, marins bolcheviks occupent
tous les points stratégiques de la ville. Le palais d’Hiver, siège du gouvernement
provisoire, est investi la nuit suivante, par de petits groupes qui en prennent peu
à peu le contrôle. Le croiseur Aurore tire un seul coup, à blanc, pour donner le
signal de l’infiltration du palais d’Hiver. La propagande soviétique, ultérieure‐
ment, transformera ces faits en un assaut de la foule, afin de donner de la révo‐
lution d’Octobre l’image d’un soulèvement populaire spontané. Kerensky s’en‐
fuit. Le pouvoir passe au Conseil des commissaires du peuple, tous bolcheviks,
présidé par Lénine. Un premier décret sur la terre, qui lance la réforme agraire,
ne nationalise pas les terres mais les socialise. Confiées au mir, elles sont répar‐
ties entre les familles. De même, les usines sont remises à des soviets ouvriers.
La dictature du prolétariat est proclamée. Les bolcheviks doivent résoudre de
nombreux problèmes : la guerre, les opposants, les alliés devenus encombrants,
le contrôle d’une opinion qui s’est crue libre. Après un armistice signé le 15 dé‐
cembre, Lénine accepte le 3 mars 1918 les conditions draconiennes de la paix
de Brest-Litovsk avec l’Allemagne. La Russie perd la Finlande, les Pays-Bas, la
Pologne, soit un quart de sa population, un quart de sa surface agricole, les trois
quarts de sa capacité de production d’acier. Si la révolution est un succès à Pe‐
trograd, il n’en va pas de même dans le reste du pays.
Léon Trotski (Lev Davidovitch Bronstein, 1879-1940) naît dans une famille
juive de propriétaires terriens aisés d’Ukraine. Il fait ses études à Odessa, crée
en 1897 un Syndicat ouvrier du Sud de la Russie. Arrêté pour activités révolu‐
tionnaires, il est interné à Odessa, puis déporté en Sibérie, d’où il s’évade en
1902. C’est au cours de cette évasion qu’il use de faux papiers au nom de Trots‐
ki, celui d’un gardien de la prison d’Odessa. Émigré à Londres, il y rencontre
Lénine, collabore à l’Iskra. Clandestinement rentré en Russie, il prend une part
active aux événements de 1905, préside le soviet de Saint-Pétersbourg. Lors de
la répression qui suit, il est condamné une nouvelle fois à la déportation en Si‐
bérie, parvient à s’enfuir, s’exile à Vienne. De retour en Russie, il rallie les bol‐
cheviks, devient membre de leur bureau politique. Après la révolution d’Oc‐
tobre, il crée l’armée Rouge, en février 1918, pour lutter contre les Blancs, mo‐
narchistes, appuyés par des corps expéditionnaires des puissances alliées, britan‐
niques et françaises notamment, qui redoutent une extension du mouvement ré‐
volutionnaire. Il faut aussi affronter les revendications nationales armées. Biélo‐
russie et Ukraine se proclament indépendantes. Refusant de servir sous les
armes des Rouges ou celles des Blancs, les paysans forment à leur tour des ar‐
mées vertes, refuge des déserteurs des deux bords, qui s’opposent à la fois aux
forces communistes et aux monarchistes. Les principales armées blanches sont
celles d’Alexandre Koltchak (1874-1920), Anton Denikine (1872-1947) ou
Piotr Wrangel (1878-1928). Ils se révèlent incapables de coordonner leurs ef‐
forts, ne disposent que de très peu de soutien populaire. Ils sont vaincus tour à
tour. Koltchak en 1920 après l’échec de sa tentative de marche sur la Volga est
fusillé. Denikine perd l’Ukraine qu’il occupe, se replie en Crimée. Wrangel, bat‐
tu en 1920, se réfugie à Istanbul. Le communisme de guerre décrété permet à
l’armée Rouge toutes les réquisitions, les terres sont en partie collectivisées dans
le cadre des Kolkhozes, coopératives d’État. Cela provoque un rejet massif des
bolcheviks dans les campagnes. En 1921 l’armée Rouge, très efficacement orga‐
nisée et contrôlée par Trotski, a vaincu toutes les oppositions armées.
Vainqueur, celui-ci semble devoir être l’un des successeurs possibles de Lé‐
nine. Il est toutefois écarté au profit de Staline qui le marginalise rapidement.
Exilé en 1927 en Asie centrale, il est contraint en 1929 de fuir l’URSS. Après
un passage en Turquie, puis en Europe, il gagne le Mexique où Staline le fait as‐
sassiner en 1940.
LE RÈGNE DE STALINE
Entre 1935 et 1937 les grandes purges éliminent les ennemis, réels ou sup‐
posés, du régime. Le pouvoir politique organise des procès à grand spectacle,
où les accusés reconnaissent, devant un parterre de journalistes étrangers, avoir
comploté la faillite de l’URSS, réclament contre eux-mêmes les plus lourdes
sanctions. Condamnés à mort, ils sont fusillés. Ces procès de Moscou sont mar‐
qués par la virulence d’Andreï Vychinski (1883-1954), procureur de l’URSS,
qui forge sur mesure les éléments de droit utiles à l’élimination, de ce fait en ap‐
parence légale, des opposants. Après les politiques vient le tour des militaires,
trop populaires aux yeux de Staline, qui a instauré à son profit depuis 1929 un
véritable culte de la personnalité. Le maréchal Mikhaïl Thoukhatchevski
(1893-1937), qui s’oppose aux prémices du futur pacte germano-soviétique,
préconise de multiplier les divisions blindées contre l’opinion de Staline. Il est
exécuté en 1937. Une partie des hauts gradés de l’armée Rouge subit le même
sort, affaiblissant la défense soviétique, ce qui aura des conséquences lors de
l’agression allemande en juin 1941. Les grandes purges se prolongent dans la
grande terreur qui dure jusqu’en 1938. Elle aurait fait entre un et deux millions
de victimes, exécutées sommairement, au cours de leur déportation ou dans le
Goulag (Glavnoie oupravlenie laguereï, « Direction principale des camps »,
camps de travail forcé). C’est pourtant en même temps que la nouvelle Constitu‐
tion est promulguée, en 1936. Elle peut paraître plus libérale, avec par exemple
le recours au scrutin à bulletin secret, mais renforce la dictature en excluant tou‐
jours le multipartisme.
1. La prospérité et la crise
2. Relancer la machine
LE SAUVEUR : FRANKLIN DELANO ROOSEVELT (1882-1945)
Roosevelt naît en 1882 dans une riche famille de l’État de New York. Ses an‐
cêtres viennent de Hollande au XVIIe siècle. Le pouvoir est aussi un héritage fa‐
milial, Théodore Roosevelt est Président des États-Unis de 1901 à 1909. Frank‐
lin Delano épouse sa nièce, Éléonore Roosevelt. Membre du parti démocrate, sa
carrière est favorisée par le Président Wilson qui le nomme sous-secrétaire
d’État à la marine. Il le reste de 1912 à 1920. C’est alors que le destin semble
tout devoir remettre en cause, il est victime d’une poliomyélite, ses deux jambes
restent paralysées. Indomptable, il parvient, à force de rééducation, à marcher
de nouveau. En 1928 il remporte le poste de gouverneur de l’État de New York.
Ses qualités dans cette fonction font de lui le candidat démocrate à l’élection
présidentielle de 1932, qu’il remporte. Les États-Unis subissent alors les consé‐
quences de la grande crise de 1929 et il y répond par la mise en place du New
Deal. Il est réélu sans discontinuer quatre fois Président, en 1932, 1936, 1940 et
1944. Son rôle pendant la Seconde Guerre mondiale est primordial pour la vic‐
toire. Affaibli par un cancer, il meurt au cours de son dernier mandat, en
avril 1945. Roosevelt est aussi connu pour être le premier Président américain à
user des médias pour s’adresser directement au peuple. Ses « causeries au coin
du feu » débutent à la radio dès 1933. Un genre promis à un grand avenir,
Pierre Mendès France et De Gaulle s’en inspirent en France, Kennedy en fait un
art aux États-Unis.
1. L’Inde
Les affrontements avec la population peuvent être sanglants, comme lors des
événements d’Amritsar en 1919. Au début des années 1930, Mohandas Karam‐
chand Gandhi (1869-1948) prône la désobéissance civile et la non-violence
pour contraindre les Britanniques à quitter l’Inde. Il lance la « Marche du sel »,
bravant le monopole britannique sur le commerce de ce produit, puis en 1942 la
résolution Quit India pour une indépendance immédiate. Elle prend place le
15 août 1947 à minuit, avec la création de la République indienne et des deux
Pakistan, avant que le Pakistan oriental ne devienne le Bangladesh en 1971.
Fils d’un riche brahmane, Jawaharlal Nehru (1889-1964) fait ses études en
Angleterre. De retour en Inde en 1912, il exerce le métier d’avocat. Sept ans
plus tard, il devient membre du Congrès national indien, alors dirigé par le Ma‐
hatma Gandhi. À neuf reprises, il est emprisonné, entre 1929 et 1945, en rai‐
son de ses activités en faveur de l’indépendance de l’Inde. En 1942, il remplace
Gandhi à la tête du parti du Congrès. Puis, il est nommé Premier ministre en
1947 lors de l’indépendance. L’Inde, sous sa direction, devient une puissance
importante. Sa fille, Indira Gandhi (1917-1984), du nom de son mari, sans au‐
cun lien avec le Mahatma Gandhi, devient Premier ministre à son tour de 1966
à 1977 et de 1980 à 1984. Elle est assassinée par ses gardes du corps en 1984.
Son fils, Rajiv Gandhi (1944-1991), devient Premier ministre à son tour de
1984 à 1989. Il est également assassiné en 1991. Sa veuve, Sonia Gandhi (née
en 1946), reprend le flambeau politique familial en prenant la tête du parti du
Congrès et en préparant leur fils Rahul Gandhi (né en 1970) à maintenir la dy‐
nastie.
Littérature : Tagore
En Inde, philosophie et religion sont étroitement liées, la religion étant conçue comme une
manière de bien vivre. C’est pour cela que les premiers penseurs se tournent vers l’expli‐
cation des textes sacrés. La modernité les conduit à des réflexions plus politiques, à envi‐
sager l’avenir d’une Inde devenue indépendante. Rabindranath Thākur, dit Tagore
(1861-1941), prix Nobel de littérature en 1913, met l’Inde et les valeurs essentielles de
l’existence humaine en contact avec le reste du monde. Son enfance se déroule au sein
d’une famille de réformateurs sociaux. Après des études avortées de droit à Londres, il re‐
tourne chez lui au bout de dix-huit mois. Son talent de poète se révèle très vite. Parallèle‐
ment à son œuvre littéraire, il prend conscience de la noblesse de l’abnégation, tout en
étudiant la société qui l’entoure. Il met l’Inde en contact avec le monde et l’ouvre à celui-ci
en créant l’université de Visva Bharati en 1921, centre international de culture et d’études
humanistes, scientifiques, agricoles, d’arts appliqués. Traduite par André Gide, son œuvre
littéraire la plus connue reste Gītāñjali, ou L’Offrande lyrique, en 1912, pour laquelle il re‐
çut le prix Nobel de littérature.
Tchang Kaï-chek (1887-1975) naît en 1887 dans le milieu fortuné d’une fa‐
mille de commerçants, dans la province du Zhejiang, région côtière au sud de
Shanghai. Entré dans l’armée, il y devient officier, avant un long exil au Japon,
entre 1906 et 1910, au cours duquel il se familiarise avec les techniques de la
guerre. Sun Yat-Sen le charge en 1922 de créer une armée chinoise moderne.
C’est alors que le Parti communiste chinois et le Guomindang s’allient pour
mettre fin au règne des seigneurs de la guerre. À la mort de Sun Yat-Sen en
1925, il prend la tête du Guomindang. Il lance en 1926 et 1927 l’Expédition du
nord-Beifa afin de placer sous son autorité toute la Chine du Nord. Pékin est
pris en 1928. Tchang Kaï-chek semble alors maître du pays, devient président
du gouvernement central de la République de Chine dont il installe la capitale à
Nanjing (Nankin). Il instaure une dictature nationaliste fondée sur le respect de
la tradition confucianiste et les emprunts au fascisme. En 1931, le Japon envahit
la Mandchourie. Tchang Kaï-chek est contraint de démissionner de la prési‐
dence au profit de Lin Sen (1931-1943) dont le pouvoir est honorifique.
Tchang Kaï-chek conserve le commandement de l’armée nationale révolution‐
naire et le contrôle effectif sur les cadres du Guomindang. Cependant l’autorité
de Tchang ne s’étend pas à la Chine entière, il doit encore compter avec certains
puissants seigneurs de la guerre, tel Zhang Xueliang (1901-2001), maître de la
Chine du Nord-Est, auquel la Mandchourie échappe lors de l’invasion japonaise.
Pour la reprendre, il a besoin de l’alliance entre nationalistes et communistes. En
décembre 1936, Zhang n’hésite pas à séquestrer Tchang Kaï-chek pour le forcer
à signer un accord avec le communiste Zhou Enlai (1898-1976), l’accord de
Xi’an, afin d’unir leurs forces contre le Japon. Ce dernier accentue sa conquête
en cours accompagnée d’exactions et de massacres, le plus célèbre étant le mas‐
sacre de Nankin. Après la prise de la ville contre les troupes nationalistes en dé‐
cembre 1937, l’armée japonaise se livre à un massacre de la population qui dure
six semaines et provoque la mort de près de trois cent mille personnes. Le pré‐
sident Lin Sen meurt en 1943. Tchang Kaï-chek assure l’intérim. Après la dé‐
faite japonaise, la guerre reprend en 1946 avec les communistes. Une nouvelle
constitution naît en 1947. C’est en avril 1948 que Tchang Kaï-chek est élu par le
parlement président de la République, poste qu’il occupe jusqu’à sa démission en
janvier 1949. En octobre de la même année, il est contraint par la victoire des
communistes et la proclamation de la naissance de la République populaire de
Chine de fuir à Formose (Taiwan). Il y installe une République de Chine, auto‐
ritaire, dont il est le premier président de 1950 jusqu’à sa mort en 1975.
Tchang Kaï-chek doit toutefois faire face à ses anciens alliés communistes
qui créent en 1931 la République soviétique chinoise implantée surtout dans le
Jiangxi, au sud-est du pays, présidée par Mao Zedong (1893-1976).
Le futur fondateur de la République populaire de Chine naît en 1893 dans
une famille de paysans aisés du Hunan, une province située au sud du fleuve
Jiangzi Jiang. Mao Zedong (1893-1976) s’élève socialement par de solides
études, où il manifeste un goût pour la poésie, puis se tourne vers les écrits de
Sun Yat-Sen. Après la révolution de 1911, il occupe divers postes subalternes à
Pékin, avant de participer à la création du Parti communiste chinois en 1921.
C’est en 1927 que la rupture entre les communistes et les nationalistes lui offre
la possibilité de jouer un rôle de premier plan. Il met en pratique sa théorie du
marxisme-léninisme approprié à la masse paysanne chinoise en créant en 1931
la République soviétique chinoise du Jiangxi, au sud-est du pays. Mais les natio‐
nalistes s’emparent de sa capitale, Ruijin, en 1934. Mao Zedong, l’armée Rouge
chinoise et les responsables du Parti communiste chinois entament alors la
Longue Marche, entre octobre 1934 et 1935, qui les mène du Jiangxi jusqu’au
Shaanxi situé 12 000 km plus au nord. L’épuisement, les poursuites de l’armée
de Tchang Kaï-chek, l’hostilité des habitants de certaines régions traversées
transforment la Longue Marche en un calvaire, environ cent mille hommes en
seraient morts. Seuls vingt mille parviennent au but. Mao Zedong, contesté au
sein du parti en raison de ses erreurs politiques, y reprend l’avantage en qualité
de chef de guerre. Il fait par la suite de la Longue Marche le geste héroïque de
l’armée Rouge et du Parti communiste chinois ou PCC. Parvenu au Shaanxi en
1935, il y fonde la République soviétique chinoise du Yan’an, du nom d’une
ville de la province. Entre 1937 et 1945, il combat les Japonais aux côtés des
nationalistes, puis la guerre civile reprend entre eux. Elle s’achève par la victoire
des communistes en 1949. Le nom de Mao et celui de la Chine ne vont plus dès
lors faire qu’un jusqu’à sa mort en 1976.
LA FIÈVRE NATIONALISTE
L’INCIDENT DE MOUKDEN
Mais, en raison de ses rapports difficiles avec les États-Unis et la SDN, le Ja‐
pon a besoin d’un prétexte pour entreprendre une conquête en Chine. Il lui est
fourni par « l’incident de Moukden » : en juillet 1931, un capitaine de l’armée
impériale japonaise est tué non loin de cette ville, puis, le 18 septembre de la
même année, une bombe, visant les troupes japonaises, y éclate. C’est l’occasion
attendue. Le Japon conquiert facilement la Mandchourie, au nord-est de la
Chine. Pour habiller cette agression d’une façade acceptable, la province est
transformée en un État fantoche, le Mandchoukouo, à la tête duquel les occu‐
pants japonais placent leur marionnette, le dernier empereur de Chine, Pou-Yi.
La crise de 1929 monopolise les grandes puissances tout autant que le sort de
leurs colonies pour celles qui en possèdent. Seule la SDN ose une timide
condamnation, offrant sur un plateau le prétexte idéal au Japon pour rompre
avec elle et ignorer plus superbement encore ses avis : en mars 1933, la déléga‐
tion japonaise la quitte, dans un bel ensemble de fracs froissés et de mines of‐
fensées.
LE CAS HIROHITO
L’art qui prend place au XXe siècle en France est un art prolifique, riche de
tendances souvent contrastées, voire opposées. La mécanisation grandissante au
profit d’une bourgeoisie triomphante, liée au rendement et à la production, pro‐
duit rejet des tenants du monde de l’art qui se regroupent en force contestataire.
Peu à peu les liens qui rattachaient les artistes aux formes dirigeantes se défont,
les tenants de l’art prenant conscience qu’ils devaient investir un espace poli‐
tique. L’art devra concerner la multitude et non plus une élite, évoluer en dehors
de l’institution, et en gagnant son autonomie réintégrer la vie. C’est ainsi que
s’effectue le premier virage de la modernité. À la différence de l’art moderne qui
a respecté les catégories esthétiques traditionnelles, un nouvel art libéré de
toutes les conventions apparaît, créant un bouleversement encore plus profond
que celui qui a marqué le début du siècle.
◆ Entre 1901 et 1904, la période bleue domine d’une façon presque mono‐
chrome, volontairement froide. Ce bleu est utilisé pour retranscrire la vision que
le peintre a du monde, mélange d’angoisse, de pessimisme, pleine de compas‐
sion pour la misère humaine. Il peint des mendiants, des aveugles, des estro‐
piés : La Celestina (1904), Las Dos Hermanas (1904).
◆ Entre 1904 et 1906, la période rose marque l’utilisation de tons roses et
oranges, le style en est moins expressionniste : Les Bateleurs (1905). Les réfé‐
rences au monde du cirque et du zoo y sont nombreuses : Le Meneur de cheval
nu (1906), Les Saltimbanques (1905). Le souci réaliste qui domine les œuvres
de jeunesse laisse place à des préoccupations formelles de décor en aplanissant
l’espace et en le privant de profondeur.
◆ La période cubiste est caractérisée par les recherches qu’il fait avec
Braque sur l’objet, envisagé sous toutes ses faces. Personnages aux visages-
masques inspirés de l’art nègre et figures géométriques dominent.
Vers les années 1920, on parle d’une période gréco-romaine, avec des repré‐
sentations de figures néoclassiques aux dimensions extrêmes. Des œuvres en‐
gagées comme Guernica, en 1937, des portraits de Staline après avoir rejoint le
parti communiste en 1944. À partir des années 1950, sa production se diversi‐
fie, avec des céramiques, des sculptures, des lithographies, des affiches.
L’ART ABSTRAIT
LE FUTURISME
Le futurisme et l’orphisme
Le Manifeste du futurisme est publié en 1909 dans Le Figaro par le poète ita‐
lien Filippo Marinetti (1876-1944). L’art, comme la littérature, la morale
doivent regarder vers l’avenir, faisant table rase du passé. Le futurisme veut re‐
présenter les trépidations de la vie moderne. Les futuristes associent donc uni‐
vers mécanique et technique, où les hommes et machines tendent à se ressem‐
bler. Umberto Boccioni (1882-1916), avec La Ville qui monte, Gino Severini
(1883-1966), par son Train de banlieue arrivant à Paris, illustrent cette fusion
involontaire. Ces peintres appliquent le système de touches de couleurs pures
jusqu’en 1912, date à laquelle ils exposent pour la première fois à Paris.
Confrontés aux cubistes, ils s’approprient leurs techniques de fragmentation des
volumes du plan. Leur finalité n’est pas de montrer tous les aspects d’un objet
mais plutôt de se servir de la décomposition des volumes pour montrer l’effet de
la vitesse du mouvement, de l’accélération sur les objets et leur environnement.
Pour désigner cette technique, les futuristes parlent de simultanéité, tous les ins‐
tants du mouvement sont représentés en même temps. En 1912, Guillaume
Apollinaire donne le nom d’orphisme à la peinture de Robert Delaunay
(1885-1941) qui fait par suite figure de chef de file de cette école, et son tableau
Paris-Saint-Séverin. Il déclare, dans ses Méditations esthétiques, que c’est l’art
« de peindre des ensembles nouveaux avec des éléments empruntés, non à la
réalité visuelle, mais entièrement créés par l’artiste et doués par lui d’une puis‐
sante réalité ». D’autres artistes sont rattachés à l’orphisme comme : Fernand
Léger (1881-1955), La Femme en bleu (1912), L’Escalier (1914) ; Marcel Du‐
champ (1887-1968), Nu descendant un escalier (1912) ; František Kupka
(1871-1957), série des Gigolettes (1906-1910).
Le futurisme ailleurs
Lydia Harambourg, spécialiste de la peinture des XIXe et XXe siècles, dans son Dictionnaire
des peintres de l’École de Paris, recense les artistes d’origine étrangère qui vinrent à Paris
au XXe siècle. Le premier mouvement se produit :
LE SURRÉALISME
Le mouvement
Le surréalisme en résumé
Définition : issu de Dada, il vise à découvrir les nouveaux rapports entre les objets. Rôle
de l’inconscient et de l’irrationnel.
Point de départ : A. Breton, Manifeste du surréalisme, 1924.
Principaux peintres : Tanguy, Ernst, Dalí, Miró, Duchamp, Magritte, Arp, De Chirico, Bell‐
mer, Malkine.
Dans une lettre à Paul Dermée de mars 1917, Apollinaire, suivant les
conseils de Pierre Albert-Birot qui semble lui avoir soufflé le mot, écrit :
« Tout bien examiné, je crois en effet qu’il vaut mieux adopter surréalisme que
surnaturalisme que j’avais d’abord employé. » Utilisé par « MM. les philo‐
sophes » et par Gérard de Nerval dans la dédicace des Filles du feu (1854), le
surnaturalisme ne servira donc pas à qualifier les Mamelles de Tirésias (1917).
Guillaume Apollinaire, en préface de sa pièce, prétend qu’il y opère « un re‐
tour à la nature », mais en ne recourant ni à la photographie ni au symbole
énoncé : « Pour caractériser mon drame, je me suis servi d’un néologisme qu’on
me pardonnera car cela m’arrive rarement, j’ai forgé l’adjectif surréaliste qui ne
signifie pas du tout symbolique. » Ce même mot sera ensuite utilisé en 1920 par
Paul Dermée dans la revue L’Esprit nouveau, dans le manifeste « Pour Dada »,
signé André Breton, puis, en 1924, choisi par Yvan Goll comme titre d’une pu‐
blication qui ne connaîtra qu’un numéro et qui fait du surréalisme « une transpo‐
sition de la réalité dans un plan supérieur5 ». L’idée surréaliste s’amorce en
marge de Dada dans la revue Littérature (1919-1923), dans laquelle seront pu‐
bliés les premiers chapitres des Champs magnétiques d’André Breton et Phi‐
lippe Soupault, conçus comme le premier ouvrage surréaliste, puisqu’y sont ap‐
pliquées les premières techniques de l’écriture automatique. Lorsqu’en 1922,
André Breton prend congé de Dada, la rupture avec Tzara consommée, il fau‐
dra à peine deux ans pour que ce projet entamé se concrétise dans le Manifeste
du surréalisme en 1924. Breton définit ainsi le surréalisme : « Automatisme
psychique pur par lequel on se propose d’exprimer soit verbalement, soit par
écrit ou de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée ; Dictée de
la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute
préoccupation esthétique ou morale », suivi de son commentaire philoso‐
phique : « Le surréalisme repose sur la croyance à la réalité supérieure de cer‐
taines formes d’associations négligées jusqu’à lui, à la toute-puissance du rêve,
au jeu désintéressé de la pensée. Il tend à ruiner définitivement tous les autres
mécanismes psychiques et à se substituer à eux dans la résolution des princi‐
paux problèmes de la vie. »
Il ne s’agit pas là d’une nouvelle école artistique, mais d’explorer de nouveaux
moyens de connaissance, le rêve, l’inconscient, les états hallucinatoires, la folie,
tout ce qui ne dépend pas de la logique. Le rêve, la rêverie éveillée, les états
d’abandon où l’esprit se libère de ses freins sont au centre d’un intérêt inconnu
pendant le romantisme. Paris joue un rôle central pour favoriser l’osmose du
réel et de l’imagination, favorisant le hasard des rencontres, un hasard quasi di‐
vinisé et introduisant le sacré dans la vie quotidienne. Autour de Breton se re‐
groupent Louis Aragon, Paul Éluard, Benjamin Peret, Robert Desnos, Georges
Limbour, Georges Malkine, Philippe Soupault, Max Ernst, Man Ray, Francis
Picabia, Marcel Duchamp, Michel Lures, Joan Miró pour les principaux. La
même année que le manifeste, le 1er décembre, paraît le premier numéro de La
Révolution surréaliste. Dirigé par Pierre Naville et Benjamin, cet organe essen‐
tiel devient, en 1930, Le Surréalisme au service de la Révolution, traduisant
l’orientation politique du mouvement, lequel avait adhéré en 1927 au parti com‐
muniste. Cet engagement politique et la personnalité d’André Breton donneront
lieu à certaines brouilles et départs, ceux d’Artaud, de Soupault, ou à certaines
arrivées avec la publication en 1929 de nouvelles œuvres, celles de René Char,
de Francis Ponge.
La peinture surréaliste
En rentrant dans le XXe siècle, la sculpture entre dans une phase évolutive,
avec une audace croissante, tout en se libérant des contraintes réalistes des
siècles précédents. L’artiste contraint désormais la nature à se plier à ses visions
du monde pour lui substituer le monde réel qui l’entoure. Jamais, pendant ce
siècle, la diversité des styles n’aura été si grande. Influencée par les révolutions
esthétiques, la sculpture présente des recherches sur des matériaux dont l’ex‐
trême diversité exprime les inquiétudes modernes en rupture avec toutes les tra‐
ditions. La sculpture du XXe siècle devra son affranchissement à certains artistes
déjà connus en tant que peintres autant qu’aux recherches de sculpteurs de pro‐
fession dans le même temps. La Méditerranée (1905), de Maillol, pourrait être
la première grande œuvre statuaire du XXe siècle : « Je construis mes figures se‐
lon un plan géométrique, la Méditerranée est encadrée dans un carré parfait6 »,
disait-il d’elle. Mais la première œuvre à s’écarter des voies traditionnelles de la
sculpture est La Guitare de Picasso, en 1912, composition en tôle sans socle.
Matisse commence la sculpture dès 1894, date de son entrée aux Beaux-Arts.
Au départ, il se consacre à des sculptures animalières. En dix ans, entre 1900 et
1910, il produit quelque soixante-dix sculptures sans s’intéresser à la recherche
de nouveaux matériaux. Comme Rodin, il partage la même adoration pour le
nu féminin. Ses Deux négresses, en 1908, à la rudesse d’expression, coïncident
avec le début de sa collection africaine et océanienne. Ses quatre bas-reliefs sur
Les Nus de dos, 1900, en versions successives s’échelonnent entre 1909 et 1930
et atteignent un maximum de dépouillement, la figure faisant de plus en plus
corps avec le fond. Dans le Nu de dos no 4, il y a une simplification des formes
et une monumentalisation du corps que l’on retrouve dans La Danse (1911).
D’autres peintres mèneront la sculpture à sa totale autonomie. On peut se de‐
mander s’il y a une sculpture cubiste qui ne se soit pas qu’une imitation stylis‐
tique de la peinture. Le grand reproche qui lui avait été fait était d’avoir été
conçue par des peintres. La multiplicité des voies et des œuvres défend de la sai‐
sir autrement que dans une réalité plurielle et multiforme. À partir de 1907 ap‐
paraissent des tentatives nouvelles pour représenter les objets. Braque, Picasso
inaugurent la sculpture cubiste. Alexander Archipenko (1887-1964), qui eut le
premier l’intuition de la valeur volumétrique des vides, fait alterner dans ses
œuvres convexe et concave et a recours aux matériaux transparents : Figure de‐
bout (1920). Tous les sculpteurs cubistes auront la volonté de rompre avec l’ap‐
proche psychologique d’imposer l’objet au monde. Les arts africains, océa‐
niens, dans le Paris du début de ce siècle, exercent une grande influence sur ces
artistes en laissant découvrir la primauté de l’objet sur le sujet, évoquant la réali‐
té par un ensemble de signes, d’emblèmes, d’abréviations. Ce sont les « vides ac‐
tifs » d’Archipenko, et les « trouées » d’Ossip Zadkine (1890-1967), avec Or‐
phée (1956), Henry Moore (1898-1986), fondateur du renouveau de la sculp‐
ture anglaise et ses silhouettes percées, les volumes dématérialisés d’Antoine
Pevsner (1886-1962) et de Naum Gabo (1890-1977) aux contrepoints d’Arp,
la dialectique du convexe et du concave, de l’ouvert et du fermé.
◆ Marcel Duchamp (1887-1968), vers 1913, s’écarte de la peinture et se
tourne vers les ready-mades, ces objets « tout faits », qu’il choisit pour leur neu‐
tralité esthétique : Roue de bicyclette (1913) ; Porte-bouteilles (1914) ; Fontaine
(1917), qui est un urinoir renversé et signé R. Mutt, montrant ainsi que n’im‐
porte quel objet peut devenir une œuvre d’art.
◆ Picasso (1881-1973). L’activité créatrice de son génie protéiforme s’exer‐
cera dans toutes les directions et dans tous les matériaux, de sa première figu‐
rine de bronze, en 1962, aux grands découpages de tôle peinte, de ses premières
têtes de femmes en terre glaise, en boules superposées, de ses corps en boudins
de pâte assemblés. Picasso va révolutionner la sculpture du XXe siècle. La Tête
de Fernande, en 1909, comporte un traitement en facette de la surface mais son
originalité réside dans les différents objets hétéroclites qu’il va assembler, asso‐
cier, carton et tôle pour La Guitare, en 1912, ou verre et véritable cuillère à ab‐
sinthe pour Le Verre d’absinthe, en 1914, tissu, bois et métal pour Construction
à la fleur, en 1938. L’assemblage célébrissime de la Tête de taureau (1942) as‐
socie une selle et un guidon. On peut considérer Le Fou (1905), dérivé d’un
portrait de Max Jacob, comme le premier échelon notable de son évolution.
Dans les années 1930, toute une série de statuettes, féminines le plus souvent,
montre que la déformation des apparences humaines atteint son paroxysme. Des
années 1940 à 1950, c’est le triomphe de la sculpture à partir d’objets de rebut :
La Femme à la voiture d’enfant (1950), La Guenon et son petit (1952).
◆ Avant Constantin Brancusi (1876-1957) personne n’avait recherché la
forme pure, poussé au plus loin le dédain de l’accident. Ses sculptures tirent leur
puissance de leur simplification extrême. Il vise à retrouver « l’essence des
choses ». Le Baiser (1923), l’une de ses premières créations, est aussi l’une des
plus célèbres, s’opposant au Baiser de Rodin dont il refuse les méthodes. Entre
le moment où il réalise La Muse endormie, en 1910, la dernière version et la
première, en 1906, il découvre l’œuf, forme mère de la tête humaine, forme qui
contient toutes les autres. Repris sous diverses répliques, il donnera naissance au
Nouveau-Né, en 1915, puis au Commencement du monde, en 1924. Brancusi se
concentre sur les grands thèmes universels : la vie, la mort, l’amour. À partir de
1910, celui de l’animal y prendra une place importante. La Maïastra (1912), un
oiseau fabuleux, dans sa première version, sera une tentative pour mettre ses
sculptures en espace. Dans des versions ultérieures, il éliminera le bec : L’Oi‐
seau dans l’espace, en 1921. L’artiste aspire à une élévation de l’âme et de l’être,
son travail se tourne vers l’infini avec Colonne sans fin, de 30 m de haut, qui
devient le premier pilier d’une architecture imaginaire. Même si le monde ani‐
malier trouve une place importante dans son œuvre, avec Coq gaulois, en 1935,
Le Poisson, en 1922, la figure humaine qu’il traite de la même façon y a aussi
sa place : Mademoiselle Pogany, La Danseuse, Princesse X, en 1920, jugée obs‐
cène et retirée du Salon des indépendants. Son influence sera grande sur des ar‐
tistes comme Arp, Archipenko, Pevsner ou dans la sculpture américaine des an‐
nées 1960-1970.
Notes
1. John Golding, Le Cubisme, Paris, Le Livre de Poche, 1968.
2. Michel Ragon, L’Aventure de l’art abstrait, Paris, Robert Laffont, 1956, p. 56.
3. Kasimir Malevitch, La Lumière et la couleur, textes inédits de 1918 à 1928, in Écrits sur l’art, t. 4,
Lausanne, L’Âge d’Homme, « Slavica », 1993, p. 10.
4. Ibid.
5. Gérard de Cortanze, Le Monde du surréalisme, Bruxelles, Éditions Complexe, 2005, p. 9.
6. Judith Cladel, Aristide Maillol, sa vie, son œuvre, ses idées, Paris, Grasset, 1937.
CHAPITRE XX
Littérature et manifeste
4. La phénoménologie husserlienne
Edmund Husserl (1856-1938), mathématicien de formation, se dirige vers
la philosophie sous l’influence de Franz Brentano (1838-1917). Il publie La
Philosophie de l’arithmétique, en 1891, Les Recherches logiques, en 1900, La
Philosophie comme science rigoureuse, en 1910-1911, La Crise des sciences eu‐
ropéennes et la phénoménologie transcendantale, en 1936. Son but est d’établir
les fondements de la vérité scientifique sans avoir recours au positivisme et au
psychologisme. Dans ses Recherches logiques, avant d’en préciser le statut dans
les Méditations cartésiennes, en 1931, la phénoménologie, bien plus qu’une phi‐
losophie de la connaissance, est une science capable de restituer le lien entre le
moi et le monde, le sujet et l’objet. Il existe une interaction permanente et réci‐
proque entre la conscience du sujet et le monde. La conscience permet de four‐
nir une explication du monde, lequel en contrepartie enrichit et construit la
conscience. Les deux concepts sur lesquels se fonde la phénoménologie sont
l’intentionnalité et la présence. Le premier est un mouvement de la conscience
vers le monde et le second, un retour de celui-ci vers la conscience. La présence
au monde est une expérience fondatrice et existentielle de l’être humain. La
phénoménologie de Husserl se veut être un dépassement de l’empirisme et de
l’idéalisme en alliant l’intuition cartésienne et la constitution kantienne dans la
notion de donation de sens propre à la conscience. Heidegger, en ouvrant le
champ des phénoménologies de l’existence par une ontologie critique de la mé‐
taphysique, sera le premier opposant de Husserl. Si la phénoménologie est un
effort pour restituer à la philosophie sa tâche première, celle d’une science ri‐
goureuse, c’est aussi une méthode en partant d’un principe du « retour aux
choses ».
Le monde n’est pas la somme des objets qu’il contient, il faut expliquer les
objets par lui et non le monde par les objets. Ce monde personnel réduit aux ob‐
jets de nos préoccupations, cet « Umwelt », n’est pas nécessairement ce qui est
voisin de nous dans l’espace. Les réalités de notre monde environnant ne sont
pas tant des choses que des outils liés ontologiquement à d’autres outils et qui
renvoient nécessairement à l’existence d’un Dasein, l’enclume réclame le mar‐
teau et le forgeron.
De la même façon qu’il n’y a pas de moi sans le monde, il n’y a pas de moi
sans d’autres moi. Les autres sont ceux qui existent en même temps que moi.
Avec « mit et auch » sont des existentiaux, c’est-à-dire des constituants de l’être
de ma propre existence. Il n’y a de moi que par relation à l’autre. C’est parce que
le « Mit Sein », « l’être avec », passe inaperçu de la plupart des personnes qu’ont
pu naître les théories sur l’origine artificielle des sociétés. Plongée dans le Mit
Sein, mon existence est hétéronome. Le On, la collectivité, retire à chacun le
sentiment de sa responsabilité. Il y a une possibilité de s’élever au Dasein au‐
thentique. Pourtant nous sommes « jetés-dans-le-monde » bien malgré nous et
privés de tout secours. De là deux sentiments, angoisse et peur. Le vrai seule‐
ment qui nous arrache au Dasein inauthentique nous fait passer au Dasein au‐
thentique est l’angoisse, provoquée par le monde lui-même. Nous sommes libé‐
rés de l’empire du On et placés devant une option inéluctable d’être nous-
mêmes. L’angoisse nous conduit à des aperceptions que nous existons pour la
mort. De là pour Heidegger, il faudrait se connaître inclusivement jusqu’à la
mort, savoir qui en fait nous est refusé, car nous n’expérimentons pas la mort
pour le mourant. La pensée de Heidegger eut une influence considérable sur des
penseurs comme Jean-Paul Sartre, Maurice Merleau-Ponty, Alexandre Ko‐
jève, Paul Ricœur, Emmanuel Levinas, Jean-Luc Marion, mais également
Foucault, Althusser, des écrivains comme Maurice Blanchot, Georges Ba‐
taille, René Char.
Notes
1. Gottlob Frege, Les Fondements de l’arithmétique, Paris, Le Seuil, « L’ordre philosophique », 1969.
2. Robert Blanché, L’Épistémologie, Paris, Puf, « Que sais-je ? », 1972, p. 120.
3. Jean Beaufret, Dialogue avec Heidegger, Paris, Minuit, 1973-1985, 4 vol.
CHAPITRE XXII
C’est en mai 1940 que débute la campagne à l’Ouest. Le 10 mai 1940 la Bel‐
gique, les Pays-Bas, le Luxembourg sont envahis. Une armée franco-britannique
se porte au secours de l’armée belge. Mais l’armée allemande surprend en tra‐
versant les Ardennes avec ses blindés sous le commandement du général Heinz
Guderian (1888-1954). Ce dernier atteint la Manche le 19 mai, prenant à re‐
vers les troupes franco-britanniques. Le 15 mai les Néerlandais capitulent, sui‐
vis des Belges le 27 mai. Les armées françaises et anglaises se sont réfugiées
dans la poche de Dunkerque, où l’aviation allemande les pilonne. La marine bri‐
tannique déploie alors un effort gigantesque. La bataille de Dunkerque, entre le
25 mai et le 3 juin 1940, permet d’embarquer environ trois cent mille hommes.
La bataille de France dure du 10 mai au 22 juin 1940. Les troupes françaises at‐
tendaient l’ennemi dans les fortifications de la ligne Maginot, le long des fron‐
tières de la Belgique à l’Allemagne. Les troupes y tuent le temps depuis sep‐
tembre 1939. C’est ce qu’on appelle la « drôle de guerre », le pays est en guerre,
mais sans ennemi avant l’attaque foudroyante du 10 mai 1940. Les armées fran‐
çaises sont bousculées, la ligne Maginot, prise à revers, perd son utilité. L’exode
pousse des millions de Français sur les routes, empêchant le regroupement des
unités militaires. Le gouvernement de Paul Reynaud (1878-1966) se replie à
Tours, puis à Bordeaux. Nombre de parlementaires se retrouvent bloqués sur les
routes. Le 10 juin l’Italie déclare la guerre à la France. Le 12 juin, le général
Maxime Weygand (1867-1965) ordonne la retraite. Il propose au Conseil des
ministres un armistice soutenu par Philippe Pétain (1856-1951), vice-président
du Conseil. En dépit de demandes réitérées, il se heurte à un refus. Le 16 juin
Paul Reynaud présente la démission de son gouvernement. Le président Albert
Lebrun (1871-1950) fait appel au maréchal Pétain pour lui succéder. Le
17 juin Pétain demande un armistice par l’intermédiaire de l’Espagne. Il est si‐
gné le 22 juin 1940 à Rethondes, dans le wagon où les Allemands avaient signé
l’armistice de 1918. La IIIe République s’effondre, remplacée par l’État français
(1940-1944), le régime du maréchal Pétain. Le 18 juin 1940 le général de
Gaulle lance depuis Londres son célèbre appel à continuer le combat contre
l’Allemagne jusqu’à la victoire finale. Sous-secrétaire d’État dans le cabinet Rey‐
naud, il quitte Bordeaux le 16 juin 1940 pour gagner Londres, déclarant deux
jours plus tard sur les ondes britanniques : « La France a perdu une bataille,
mais elle n’a pas perdu la guerre. » Le 30 juin 1940, il fonde la France libre, re‐
groupant au début quelques centaines de volontaires de la première heure pour
continuer le combat contre l’Allemagne. Ils sont organisés plus tard au sein des
Forces françaises libres (FFL), participent aux batailles aux côtés des Alliés,
comme le général Leclerc au Tchad et en Libye, entre 1941 et 1943, le général
Kœnig défendant Bir Hakeim en 1942. Elle prend de l’importance avec le rallie‐
ment du gouverneur général Félix Éboué au Tchad, mais une tentative de débar‐
quement à Dakar échoue en septembre 1940. De Gaulle doit aussi faire face à
l’extrême méfiance de Roosevelt, qui voit en lui un rebelle ambitieux et main‐
tient des relations avec le gouvernement de Vichy, ne l’informe pas du projet de
débarquement en Afrique du Nord en novembre 1942, et, une fois ce dernier
réussi, préfère traiter sur place avec le général Giraud, fidèle à Pétain.
Hitler se retourne alors contre l’URSS. En dépit de Staline qui y voit une
zone tampon de sécurité, l’Allemagne s’empare de la Bulgarie en mars 1941. Le
22 juin 1941 elle lance l’opération Barbarossa, l’attaque de l’Union soviétique.
En URSS, la Wehrmacht progresse rapidement, arrive à une centaine de kilo‐
mètres de Moscou. Elle y est bloquée par l’hiver russe. Au printemps 1941 l’of‐
fensive reprend, le général Friedrich Paulus (1890-1957) atteint le Don, puis
la Volga, arrive devant Stalingrad. Il doit alors affronter un second hiver russe
avant de reprendre son offensive au printemps de 1942. Ce répit permet aux
Russes de se préparer à la bataille décisive, grâce au repli des usines d’Ukraine
vers l’Est, à la création de nouvelles unités industrielles dans l’Oural et en Sibé‐
rie, sans compter l’aide américaine sous forme de milliers de chars et d’avions.
Afin de porter secours à leur allié italien qui essuie des défaites en Tripoli‐
taine, province de Libye, l’Allemagne envoie un corps expéditionnaire, l’Afrika
Korps, commandé par Rommel. Ce dernier retourne la situation à son avantage,
fonce sur l’Égypte. Le 3 novembre 1942 le général Bernard Montgomery
(1887-1976) bat à El-Alamein, en Libye, les troupes de l’Afrika Korps du ma‐
réchal Erwin Rommel (1891-1944). C’est une étape fondamentale dans le sau‐
vetage de l’Égypte et du canal de Suez, axe vital pour ravitailler les Alliés. L’ar‐
mée de Rommel qui s’était approchée à quelques centaines de kilomètres
d’Alexandrie est repoussée en Libye, puis vers l’Ouest, car la division blindée du
général Leclerc remonte du Tchad et menace de prendre l’armée allemande en
tenaille. Le 8 novembre 1942 a lieu le débarquement anglo-américain en
Afrique du Nord, des centaines de navires prennent les ports d’Algérie et du
Maroc, sous la direction du général américain Eisenhower. Les deux tombent
rapidement, en dépit de la résistance des troupes coloniales obéissant à Vichy.
C’est en s’imposant face à Giraud que de Gaulle, arrivé en mai 1943, devient
l’unique chef de la France libre. Giraud éliminé par sa démission le 27 octobre
1943, de Gaulle prend la tête du Comité français de libération nationale, un
gouvernement des zones libérées. En réaction, les armées allemandes enva‐
hissent en France la zone Sud le 11 novembre. L’escadre de Toulon se saborde
pour ne pas tomber aux mains des Allemands, mais sans chercher à se joindre à
la France libre. Le 12 novembre, la Tunisie est prise par les forces italo-alle‐
mandes, la totalité du Maghreb n’a pu être libérée.
L’année 1943 voit des bouleversements sur les autres fronts. En mai 1943, les
forces germano-italiennes capitulent en Tunisie. Le 10 juillet 1943, la Sicile est
attaquée, conquise par les Alliés en septembre. Le gouvernement de Mussolini
s’effondre. Dans le Pacifique, les Japonais sont chassés de Guadalcanal en fé‐
vrier 1943. Deux gigantesques batailles aéronavales sont livrées, celle de la mer
de Corail (7-9 mai 1943) et de Midway (4 juin 1943). Les Japonais y perdent la
maîtrise du Pacifique Sud. Du 28 novembre au 1er décembre 1943 se tient la
Conférence de Téhéran, où se retrouvent Churchill, Roosevelt et Staline. Ce
dernier obtient l’ouverture d’un second front en Europe pour 1944. Ce sera le
débarquement de Normandie. Il exige de conserver les pays baltes et la Pologne
jusqu’à l’Oder.
Au printemps 1944, les offensives alliées reprennent. En mai 1944, Rome est
libérée. Le 6 juin 1944, les Anglais, Américains et Canadiens débarquent en
Normandie par l’opération Overlord. Le 25 août, la division blindée du général
Leclerc (Philippe Leclerc de Hauteclocque, 1902-1947) libère Paris. Le terri‐
toire français est entièrement libre en décembre. Le 15 août 1944 l’opération
Dragon constitue un débarquement franco-américain en Provence. En dé‐
cembre 1944, la Belgique est libérée. À la même époque, l’armée Rouge ap‐
proche de Varsovie. Les Soviétiques prennent une à une toutes les capitales,
Bucarest le 31 août 1944, Sofia le 18 septembre, Belgrade le 21 octobre, Buda‐
pest le 26 décembre. Les Britanniques débarquent en Grèce et la libèrent. L’Al‐
lemagne compte encore gagner la guerre en recourant aux nouvelles technolo‐
gies, les V1 et V2, missiles armés, menacent Londres. Les recherches sur l’arme
atomique se poursuivent. Deux offensives sont lancées en plein hiver, l’une
contre les Ardennes, l’autre en Hongrie, elles se soldent par des échecs. En jan‐
vier 1945, l’armée Rouge lance l’offensive définitive contre l’Allemagne. La Po‐
logne est intégralement reprise. Le 13 avril, la ville de Vienne est conquise. De
leur côté, les Américains arrivent le 14 avril sur la rive gauche de l’Elbe. L’ago‐
nie de l’Allemagne nazie commence. Le 25 avril, les troupes françaises du ma‐
réchal Jean de Lattre de Tassigny (1889-1952) contrôlent le Danube. Ce
même jour, Soviétiques et Américains font leur jonction à Torgau, en Saxe,
alors que l’armée Rouge rentre dans les faubourgs de Berlin. Hitler se suicide
dans son bunker avec sa compagne Eva Braun le 30 avril. Leurs corps auraient
dus, selon les instructions données, être brûlés, mais faute d’assez d’essence
pour ce faire, les troupes soviétiques retrouvent leurs cadavres à demi carboni‐
sés dans la cour de la Chancellerie. Hâtivement enterrés dans un bois près de
Berlin, lieu perdu puis retrouvé par les Russes, les restes d’Hitler sont dans le
plus grand secret transférés en URSS, où l’on perd définitivement leur trace. Le
8 mai 1845 le maréchal Keitel signe à Berlin la capitulation sans condition de
l’Allemagne. Le Japon continue seul la guerre. Les Américains ont débarqué en
juillet 1944 sur l’île Saipan, dans les Mariannes, puis à Okinawa et Iwo Jima, et
remontent en direction de l’île principale de Honshū. La résistance acharnée des
Japonais, allant jusqu’au suicide collectif, convainc le Président Truman de re‐
courir à l’arme atomique qui vient d’être mise au point. Un débarquement aurait
coûté, selon les estimations du Pentagone, la vie à cinq cent mille soldats améri‐
cains. Le lundi 6 août 1945 une première bombe atomique est lancée sur Hiro‐
shima par le bombardier Enola Gay, à 9h30, une seconde le 9 août sur Nagasa‐
ki. Le 14 août l’empereur Hirohito annonce la fin de la guerre à la radio. La ca‐
pitulation officielle est signée le 2 septembre 1945.
Le sort des principaux responsables d’une guerre, militaires ou civils, une fois
le conflit achevé est une préoccupation ancienne. Il s’est longtemps traduit par
la mort des vaincus, suicide, exécution hâtive. L’idée avait déjà fait son chemin
après 1919 de juger certains acteurs de premier plan, dont l’empereur
Guillaume II, mais il faut attendre 1945 pour qu’elle soit réalisée. Deux grands
procès vont avoir lieu à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, celui de Nurem‐
berg pour y juger les dignitaires de l’Allemagne nazie, celui de Tōkyō pour
leurs homologues japonais. Le procès de Nuremberg dure du 20 novembre
1945 au 1er octobre 1946. Y sont présents les principaux responsables militaires
(Keitel, Jodl, Dönitz, Raeder) et civils (Goering, Ribbentrop, Kaltenbrunner,
Hess, Frank, Speer…). Les chefs d’accusation sont : crimes contre la paix,
crimes de guerre, crimes contre l’humanité. Tous plaident non coupable, avec
une ligne de défense identique, ils ne décidaient de rien, n’ont fait qu’obéir à des
ordres qu’ils ne pouvaient en aucun cas refuser. Sur les vingt et un inculpés,
onze sont condamnés à mort, trois sont acquittés, les autres doivent purger des
peines de prison comprises entre dix ans et l’internement à vie. Les sentences de
mort sont appliquées par pendaison le 16 octobre 1946. Le procès de Tōkyō
s’achève en novembre 1948, après que le tribunal eut été officiellement mis en
place le 3 mai 1946. Il concerne vingt-huit responsables militaires et civils japo‐
nais. Les chefs d’accusation sont semblables, tout comme la ligne de défense des
accusés. Le 12 novembre 1948, le Premier ministre Tojo et six autres digni‐
taires sont condamnés à mort, les autres à la prison à vie. Les sentences de mort
sont exécutées par pendaison le 23 décembre 1948. Ces deux procès qui se
concluent par moins de vingt exécutions capitales semblent dérisoires au regard
des cinquante millions de morts provoquées par la Seconde Guerre mondiale.
Ils ont toutefois une double utilité : cathartique, exorciser par le concept nou‐
veau de crimes contre l’humanité l’atrocité innommable des camps d’extermina‐
tion, tirer un trait sur une période et ses responsables. Et ils évitent plusieurs
écueils : les guerres fratricides liées aux règlements de comptes, le jugement im‐
possible d’un peuple tout entier, la pérennité des haines faute de coupables ayant
expié.
LES RÉSISTANCES
Les femmes combattent avec les hommes dans les rangs de la résistance, ce
qui permettra, après l’égalité des risques et des souffrances, d’obtenir l’égalité ci‐
vique et le droit de vote en 1945. Au nombre de ces combattantes de l’ombre,
deux figures particulièrement attachantes se détachent, l’une bien connue, l’autre
bien oubliée : Lucie Aubrac et Danielle Casanova.
Née Lucie Bernard, à Mâcon, dans une famille de vignerons, Lucie Aubrac
(1912-2007) fait des études d’histoire, réussit l’agrégation, devient enseignante.
À la veille de la guerre, en 1939, elle épouse Raymond Samuel. Tous deux de‐
viennent des résistants de la première heure, fondateurs avec Emmanuel d’Astier
de La Vigerie (1900-1969) du réseau « Libération ». Leur pseudonyme dans
l’action clandestine, destiné à devenir le nom sous lequel la postérité les connaît,
est Lucie Aubrac et Raymond Aubrac. Tout en enseignant, elle participe aux ac‐
tivités du réseau, tracts, journal clandestin, fait le lien entre les membres. L’in‐
tensification de la chasse aux résistants, les « terroristes » pour Vichy, au cours
de l’année 1943, met par deux fois Raymond Aubrac en danger : arrêté, il doit
son salut à Lucie qui, par deux fois aussi, le fait évader. Demeurer en France
n’est plus possible, le couple parvient à gagner l’Angleterre en février 1944.
Après la guerre, Lucie Aubrac transmet aux jeunes générations le souvenir de
ce que fut la résistance. Raymond a perpétué sa mémoire avant de s’éteindre en
2012.
Née Vincentalla Perini, à Ajaccio, en 1909, dans une famille d’instituteurs,
Danielle Casanova (1909-1943) est une haute figure de la résistance, dont la
mort prématurée, à Dachau, du typhus, le 9 mai 1943, explique peut-être en
partie l’oubli dont elle est victime. Venue à Paris pour y devenir dentiste, elle y
fait surtout la connaissance de Laurent Casanova (1906-1972), un jeune com‐
muniste, futur collaborateur de Maurice Thorez, membre de l’appareil clandestin
du Parti communiste français. Elle milite activement pendant l’entre-deux-
guerres, rejoint la clandestinité dès septembre 1939, quand le Parti communiste
est interdit. Elle met en place les comités féminins communistes en oc‐
tobre 1940. Son activisme la rend vulnérable. Elle est arrêtée par la police fran‐
çaise en février 1942. Internée à la Santé puis au fort de Romainville, elle dé‐
ploie une remarquable énergie et continue tracts et activités militantes. Dépor‐
tée à Auschwitz, elle y soigne les affections dentaires, y contracte le typhus qui
l’emporte. Paris lui rend hommage par une rue perpendiculaire à l’avenue de
l’Opéra. La Monnaie de Paris édite en 2012 une pièce de 10 euros en argent où
elle figure sa Corse natale.
CHAPITRE XXIV
1. La IVe République
Cependant deux expériences politiques sortent d’un lot plutôt terne, celle
d’Antoine Pinay (1891-1994) de mars à décembre 1952, et celle de Pierre
Mendès France (1907-1982) entre juin 1954 et février 1955. Antoine Pinay
rassure le pays à un moment d’instabilité monétaire et financière par son profil
de notable provincial. Il stabilise le franc, lance un emprunt à 3,5 % indexé sur
l’or et surtout sans droits de succession qui remporte un grand succès et restaure
la confiance des milieux financiers en France et à l’extérieur. C’est le début pour
Pinay d’une réputation d’infaillibilité en matière monétaire, jusqu’à sa mort, à
l’âge de cent trois ans. On vient le consulter dès que le franc vacille.
Pierre Mendès France reçoit l’investiture à la suite de la défaite française de
Ðiện Biên Phủ (7 mai 1954), le 18 juin 1954. Depuis 1946, la guerre d’Indo‐
chine oppose la France, soutenue par les États-Unis dans le cadre de la guerre
froide, aux partisans d’Hồ Chí Minh, le front de résistance du Viêt-minh ap‐
puyés depuis 1949 par la Chine communiste. Depuis le mois de janvier 1954,
douze mille soldats français sont pris au piège dans la cuvette de Ðiện Biên
Phủ. Le 7 mai 1954, ils sont contraints à la reddition. En dépit de la longueur
de la bataille, c’est un coup de tonnerre en France où tout le monde les avait ou‐
bliés. Pierre Mendès France, surnommé PMF, arrive aux affaires dans l’urgence.
C’est la fin militaire de la guerre d’Indochine (1946-1954) à laquelle Mendès
France donne une conclusion politique en signant le 20 juillet 1954 les accords
de Genève, qui donnent son indépendance à l’Indochine. Le 31 juillet 1954 c’est
au tour de la Tunisie. Mais il échoue en Algérie, avec les événements de la
Toussaint, le 1er novembre 1954, qui marquent le début de la guerre d’Algérie
(1954-1962). Il ne parvient pas non plus à faire adopter par l’Assemblée le pro‐
jet de Communauté européenne de défense, ou CED, qui prévoit des forces
conjointes franco-allemandes contre la menace soviétique, qui la rejette par vote
en 1954. Le 5 février 1955, l’Assemblée lui refuse sa confiance, le contraignant
à démissionner. La IVe République se délite ensuite dans son incapacité à ré‐
soudre les conflits coloniaux. À partir de 1956 le socialiste Guy Mollet (1905-
1975) envoie pour les besoins de la guerre d’Algérie les soldats du contingent,
l’armée de métier ne suffit plus. Pierre Mendès France, ministre d’État de son
gouvernement, démissionne alors pour marquer sa désapprobation. La bataille
d’Alger de 1957 révèle le recours à la torture, la France est condamnée par
l’ONU. La crise de Suez, toujours en 1956, démontre la position internationale
plus fragile de la France, contrainte de reculer devant l’opposition américaine et
les menaces soviétiques.
2. La Ve République
Si le bilan politique de la IVe République est plus qu’en demi-teinte, son suc‐
cès est évident en matière économique et sociale. La France bénéficie du plan
Marshall (1947-1952) d’aide à la reconstruction, elle adopte un système de pla‐
nification souple de l’économie, se relève avec le plan Monnet de 1945 à 1952,
dû à l’un des pères de l’Europe, Jean Monnet (1888-1979). En 1951, sous l’im‐
pulsion d’un autre père de l’Europe, Robert Schuman (1886-1963), la France
intègre la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) avec la
RFA, République Fédérale d’Allemagne, le Luxembourg, le Pays-Bas, la Bel‐
gique et l’Italie. Par le traité de Rome de mars 1957 les six mêmes portent sur
les fonts baptismaux la Communauté économique européenne, ou CEE. Outre
la mise en place d’un État-providence, la IVe République améliore le niveau de
vie et le mode de vie des Français, avec l’instauration du Salaire minimum in‐
terprofessionnel garanti (SMIG) en février 1950 (il devient le Salaire minimum
interprofessionnel de croissance ou SMIC en janvier 1970) ou la troisième se‐
maine de congés payés en 1956.
Le gouvernement Guy Mollet tombe en mai 1957. Les suivants sont inca‐
pables d’agir, faute de temps, renversés à la première occasion. Ils sont de plus
en plus impopulaires auprès des colons français d’Algérie, qui les soupçonnent
de vouloir accorder son indépendance au pays. La situation empire encore à
compter du 15 avril 1958, en l’absence de gouvernement. À l’annonce de l’in‐
vestiture prévue de Pierre Pfimlin (1907-2000), le 13 mai 1958, dont on pense
qu’il s’apprête à négocier avec le Front de libération nationale (FLN) algérien,
les colons d’Alger organisent le jour même une gigantesque manifestation, pren‐
nant d’assaut le palais du gouverneur général, y installant un Comité de salut
public avec le soutien des généraux Jacques Massu (1908-2002) et Raoul Sa‐
lan (1899-1984). C’est un véritable coup d’État, armée et colons se placent en
dehors du cadre républicain et de ses institutions. Les gaullistes profitent de la
situation pour favoriser la fin de la « traversée du désert » du général de Gaulle,
éloigné des postes de décision de la vie politique depuis douze ans, condamnant
les élus de son parti, le RPF, qui, en 1953, rejoignent la majorité, entrent même
au gouvernement. Dès le 15 mai de Gaulle lui-même se déclare « prêt à assu‐
mer les pouvoirs de la République » à la demande des gaullistes d’Alger. Le
19 mai, il convoque la presse pour une conférence. À un journaliste qui lui de‐
mande s’il compte s’emparer du pouvoir, il répond avec humour : « Croyez-vous
qu’à soixante-sept ans je vais commencer une carrière de dictateur ? » Il appa‐
raît vite comme l’homme providentiel à une classe politique désemparée, qui re‐
doute un putsch militaire à Paris aussi, un débarquement des unités parachu‐
tistes. Elle n’a pas tort, l’opération Résurrection est bien prévue pour la nuit du
27 au 28 mai, un débarquement de soldats en métropole, en Corse notamment.
De Gaulle est le seul à pouvoir ramener l’armée dans le rang et apaiser les
craintes des colons. Le 28 mai, Pierre Pfimlin démissionne, le lendemain, le
président de la République, René Coty, fait appel à de Gaulle. Le 1er juin 1958,
l’Assemblée nationale l’investit par trois cent vingt-neuf voix contre deux cent
vingt-quatre, lui accordant les pleins pouvoirs pour six mois afin qu’il mène à
bien la rédaction d’une nouvelle Constitution. La guerre d’Algérie met fin à la
IVe République.
En avril 1961 les généraux d’Alger tentent un putsch, vite avorté devant le re‐
fus des soldats du contingent de les suivre et la réaction rapide de De Gaulle. Le
21 avril 1961, Alger est sous le contrôle de quatre généraux en retraite, Challe,
Jouhaud, Zeller, Salan. Le lendemain, ils arrêtent le gouverneur général et le
ministre des Transports, en visite, Robert Burton. Bien peu de régiments les
suivent. De Gaulle réagit par l’utilisation de l’article 16 de la constitution, pre‐
nant ainsi les pleins pouvoirs. Au soir du 23 avril, il prononce, en uniforme, un
discours télévisé où il dénonce les agissements « d’un quarteron de généraux en
retraite », et interdit aux Français de les suivre. Ce coup de semonce réduit à
néant la tentative de putsch. Challe et Zeller se rendent et sont condamnés à
quinze ans de prison, Jouhaud et Salan rejoignent la clandestinité de l’OAS. Ce
sont les ultras de l’Algérie française qui constituent alors l’Organisation de l’ar‐
mée secrète, ou OAS, multipliant les attentats, tentant à plusieurs reprises d’as‐
sassiner de Gaulle. Ce dernier comprend qu’il lui faut agir vite. Le 19 mars 1962
le cessez-le-feu est décrété en Algérie. C’est par les accords d’Évian, le 18 mars
1962, que la France reconnaît l’indépendance de l’Algérie. Entre huit cent mille
et un million de pieds-noirs, ces descendants des colons français, quittent l’Algé‐
rie. C’est aussi le cas pour environ cent mille harkis, ces Algériens qui se sont
battus dans les rangs de l’armée française, rapatriés, en dépit des consignes de
les laisser sur place, par leurs officiers refusant de les abandonner.
LA FRANCE GAULLISTE
Georges et Claude
C’est à Nice que Simone Veil (née en 1927) voit le jour, dans une famille
bourgeoise dont le père est architecte. En 1944 le drame se noue, elle est dépor‐
tée au camp d’Auschwitz avec sa mère et sa sœur. Rescapée de ce camp de la
mort, elle reprend ses études de droit, devient magistrat, se dévoue pour la mé‐
moire de l’extermination et la cause féminine. Elle est nommée à l’administra‐
tion pénitentiaire, s’y émeut des conditions de détention faites aux femmes, de‐
vient conseiller du Garde des Sceaux, puis entre au Conseil Supérieur de la Ma‐
gistrature. Entrée tardivement en politique, son nom reste attaché au vote de la
loi sur l’interruption volontaire de grossesse, en 1974, qu’elle défend avec cou‐
rage devant une Assemblée hostile, qui ne lui épargne pas les remarques igno‐
minieuses, sans parler des croix gammées taguées sur les murs de son im‐
meuble. Européenne convaincue, elle œuvre pour le rapprochement franco-alle‐
mand, devient la première femme présidente du Parlement européen de 1979 à
1982. De 1993 à 1995, elle est ministre d’État aux Affaires sociales. Elle est
présidente d’honneur de la fondation pour la mémoire de la Shoah.
La vague rose
Aux élections législatives de mars 1986 les partis de droite l’emportent, le re‐
tour au scrutin proportionnel, censé limiter les pertes du PS, permet au Front
national d’obtenir trente-cinq députés, autant que le parti communiste. La
Ve République inaugure pour la première fois un régime de cohabitation, au
président de gauche la défense et la politique étrangère, au Premier ministre de
droite, Jacques Chirac (né en 1932), les affaires intérieures. Rien de tel n’est
prévu dans la constitution, mais sa solidité est démontrée par une expérimenta‐
tion empirique qui fonctionne. Le gouvernement Chirac privatise les entreprises
nationalisées en 1981-1982, pratique une politique libérale. Mais le nouveau
ministre de l’Enseignement supérieur, Alain Devaquet (né en 1942), met lui
aussi le feu aux poudres en proposant une réforme qui reviendrait à instaurer
une sélection à l’entrée des universités. Rappelons à ce propos que le baccalau‐
réat, sous sa forme actuelle, n’est pas un diplôme du secondaire délivré par les
lycées, mais le premier grade de l’enseignement supérieur. Il est donc à ce titre
impossible de refuser l’inscription de quelqu’un déjà diplômé de l’Alma mater, la
« mère nourricière » de l’intellect. Cette fois, ce sont les étudiants qui mani‐
festent à Paris par centaines de milliers, tout comme dans les grandes villes de
province. Le projet est abandonné, le ministre démissionne. Entre dé‐
cembre 1985 et septembre 1986, la capitale est secouée par douze attentats ter‐
roristes, exécutés par le Hezbollah qui exige de la France la libération de trois
islamistes incarcérés sur son sol, qui font quinze morts et trois cents blessés.
Mitterrand 2, le retour
Jacques Chirac, élu, choisit Alain Juppé (né en 1945) comme Premier mi‐
nistre. Normalien, énarque, inspecteur des Finances, l’homme est réputé pour un
abord glacial. Le gouvernement met en place une réforme promise pendant la
campagne, la fin du service militaire obligatoire, remplacé par un service ci‐
vique volontaire et une journée d’appel de préparation à la défense obligatoire.
Il engage aussitôt une politique de réforme de la retraite dans la Fonction pu‐
blique, de la Sécurité sociale. Le plan Juppé prévoit l’allongement de la période
de cotisation de trente-sept ans et demi à quarante ans pour les fonctionnaires,
la réforme de l’hôpital, un régime universel d’assurance maladie, l’imposition
des allocations familiales, la remise en cause des régimes spéciaux, dont celui
des agents de la SNCF. La réaction des syndicats est virulente, dès novembre,
cinq cent mille personnes défilent contre le projet, les cheminots entrent en
grève en décembre, le pays est paralysé, il faut des heures pour aller au travail,
sans garantie de pouvoir regagner son domicile. Mais le mouvement s’essoufle
à la fin de l’année, une partie de la réforme est maintenue. Alain Juppé reste à
Matignon. L’année 1995 est aussi marquée par une vague d’attentats terroristes
d’inspiration islamique entre juillet et septembre. L’explosion d’une bombe, le
25 juillet, à la station de RER Saint-Michel fait sept morts et cent dix-sept bles‐
sés. À l’automne 1996, ce sont les routiers qui entrent dans la danse, bloquent
les grandes villes. Après d’âpres négociations, le mouvement prend fin en no‐
vembre. En mars de la même année, le pays vit au rythme des expulsions de
sans-papiers qui occupent l’église Saint-Ambroise dans le 11e arrondissement.
À la fin de l’année 1996, la cote de popularité des deux têtes de l’exécutif est au
plus bas. Jacques Chirac pense pourtant qu’une dissolution de l’Assemblée na‐
tionale lui permettra de reprendre la main. Fatale erreur…
LE SUCCÈS DE LA RFA
2. Depuis la réunification
LA RÉUNIFICATION ALLEMANDE
C’est le SPD Gerhard Schröder (né en 1944) qui succède à Helmut Kohl en
1998. Il opte pour une sortie du nucléaire civil à l’horizon de 2020, envoie l’ar‐
mée allemande au Kosovo en 1999. Réélu en 2002, il est le premier chef d’État
allemand à participer en 2004 aux cérémonies commémoratives du débarque‐
ment en Normandie. En 2005 le SPD reste de justesse le premier parti politique
aux élections législatives, mais la montée des petits partis empêche la reconduc‐
tion du chancelier, qui ne peut former un gouvernement de coalition. C’est donc
Angela Merkel (née en 1954) qui accède à la chancellerie. Dirigeante de la
CDU depuis 1998, elle prend la tête de la grande coalition qui regroupe CDU,
son alliée bavaroise la CSU et le SPD. Les élections de 2009 conduisent au dé‐
part du SPD, à la fin de grande coalition, la chancelière gouverne avec le parti
libéral-démocrate, le FPD. C’est la coalition noire-jaune. Elle s’oppose à l’entrée
de la Turquie dans l’Union européenne, réforme le système du travail pour in‐
troduire davantage de libéralisme et lutter contre le chômage. Depuis la crise de
2008 et les difficultés rencontrées en Europe, elle est le pivot de toute décision
économique concernant l’avenir de l’euro. Elle est reconduite à la tête de l’Alle‐
magne après sa victoire aux élections de septembre 2013.
CHAPITRE XXVI
1. État-providence et crises
MARGARET THATCHER
Née en 1925, dans une famille modeste – son père est épicier –, Margaret
Thatcher (1925-2013) est élevée dans la pratique méthodiste, qui suit les pré‐
ceptes d’une éthique protestante rigoureuse, où la place de l’homme en ce
monde est le fruit de son travail et de ses efforts personnels. Elle travaille tôt à
l’épicerie familiale, auprès de son père, y acquiert la ferme conviction que seul
le libéralisme peut avoir un sens en économie. Une bourse lui permet d’étudier
la chimie à Oxford, dont elle sort diplômée. Elle y préside l’association des étu‐
diants conservateurs. Après un échec aux élections législatives en 1950, où elle
a le courage de se présenter dans un bastion travailliste, elle délaisse l’industrie
chimique qui l’emploie pour étudier le droit. Elle le fait avec l’appui financier de
Denis Thatcher (1915-2003), qu’elle épouse en 1951. Devenue spécialiste de
droit fiscal, elle est élue à la Chambre des communes en 1959. De 1961 à 1964,
elle travaille auprès du ministre des Affaires sociales, s’indigne de l’excès des
dépenses qui, selon elle, découragent le travail. Porte-parole du parti conserva‐
teur de 1964 à 1970, elle devient à cette date ministre de l’Éducation et des
Sciences. Elle y pratique des coupes dans les dépenses, mais prolonge la scolari‐
té obligatoire jusqu’à l’âge de seize ans. À la surprise générale, elle prend la tête
du parti conservateur en 1975. Elle est en 1979, la première et à ce jour l’unique
femme à devenir Premier ministre en Angleterre. Elle décède au mois
d’avril 2013. Le Royaume-Uni, à défaut de funérailles nationales, lui accorde un
hommage marqué par la présence exceptionnelle de la reine, le protocole ne lui
permettant pas, en principe, d’assister aux obsèques d’un Premier ministre.
Inspirée par les écoles de pensée libérale en matière économique, elle lance
une campagne de privatisations, diminue les dépenses sociales, encourage les
occupants de logements sociaux à les acquérir, les employés à devenir action‐
naires de leurs entreprises, dans un esprit de responsabilisation des acteurs de
l’économie. Elle engage en 1984-1985 un bras de fer avec les mineurs soutenus
par les syndicats. Après un an d’affrontement, ces derniers sortent du conflit très
affaiblis. Suit une vague de lois déréglementant le marché du travail, mettant fin
au privilège du Closed shop permettant aux syndicats de contrôler le recrute‐
ment des salariés. En Ulster la violence prend un caractère récurrent entre 1981
et 1988. Les attentats se multiplient, de plus en plus meurtriers. En 1981 Mar‐
garet Thatcher ne cède pas à une grève de la faim poursuivie par des activistes
irlandais emprisonnés, qui réclament en vain le statut de prisonniers politiques.
Dix prisonniers décèdent, dont Robert « Bobby » Sands (1954-1981) à la pri‐
son de Maze en Irlande du Nord.
Bobby Sands
Robert Gerard Sands, dit « Bobby » Sands, est connu pour ses activités en Irlande du
Nord en faveur de la communauté catholique et de l’IRA (armée républicaine irlandaise). Il
rejoint celle-ci en 1972 et participe à plusieurs attentats à la bombe avant d’être arrêté et
condamné en 1977 à quatorze ans de prison. Les conditions de détention des accusés po‐
litiques se dégradent et Bobby Sands commence une grève de la faim le 1er mars 1981.
Le 9 avril, il est élu député mais le nouveau Premier ministre Margareth Thatcher refuse
un statut spécial aux membres de l’IRA. Bobby Sands poursuit sa grève de la faim et
meurt le 5 mai 1981.
Tony Blair naît en Écosse en 1953, dans une famille de petite bourgeoisie,
son père est avocat. Après des études de droit, il devient avocat lui aussi, sé‐
journe en France quelques années, y vit de petits boulots, dont celui de barman.
Sa passion précoce pour la politique le conduit à gagner les rangs du Labour
Party, le parti travailliste. Après un échec en 1982, il est élu député en 1983.
Très vite remarqué, il gravit rapidement les échelons du parti, dont il prend la
tête en 1994. La victoire travailliste de 1997 lui ouvre les portes de Downing
Street. Conscient de l’amélioration des conditions de vie ouvrières grâce aux
Trente Glorieuses et à l’État-providence, il imprime au Labour, qui devient le
New Labour, un virage au centre.
Tony Blair est Premier ministre pendant dix ans, de mai 1997 à juin 2007. À
l’intérieur du Royaume-Uni, Tony Blair enregistre plusieurs succès. La signature
du Good Friday Agreement, ou accord du vendredi saint, du 10 avril 1998 avec
les principaux représentants politiques d’Irlande du Nord met fin à près de
trente ans de guerre civile. Une assemblée et un gouvernement, présidé par un
Premier ministre d’Irlande du Nord, sont créés. Un référendum organisé en Ir‐
lande du Nord (Ulster) et en République d’Irlande (Eire) approuve très large‐
ment cet accord. Si la politique terroriste suivie semble avoir effectivement pris
fin, des attentats sporadiques sont encore perpétrés. Tony Blair est également à
l’origine de la doctrine Blair énoncée dans le discours de Chicago du 22 juin
1999, selon laquelle la politique étrangère du Royaume-Uni se fonde sur la dé‐
fense des valeurs et principes de manière internationale et non plus sur celle des
seuls intérêts nationaux. Le pays participe, aux côtés des États-Unis, à la guerre
d’Irak en 2003. Il obtient en 2005 l’organisation des Jeux olympiques de 2012.
Cette même année, Londres est victime à deux reprises d’une campagne d’atten‐
tats terroristes.
Le 27 juin 2007, Tony Blair présente sa démission à la reine Élisabeth II,
souveraine depuis 1952. Son successeur est Gordon Brown (né en 1951). Il
demeure Premier ministre jusqu’en mai 2010. Ancien Chancelier de l’Échiquier,
ou ministre de l’Économie et des Finances, il doit faire face en 2007 aux me‐
naces d’attentat. La crise des subprimes, prêts immobiliers accordés par des
banques à leurs clients les plus pauvres moyennant des taux d’intérêt variables et
élevés, le conduit à un important programme de nationalisations dans le secteur
bancaire. En avril 2010 il provoque des élections anticipées qu’il perd au profit
du conservateur David Cameron (né en 1966). En l’absence d’une majorité ab‐
solue, ce dernier gouverne avec une coalition s’appuyant sur le parti des libé‐
raux-démocrates de Nicholas (dit Nick) Clegg (né en 1967). Les premières
mesures concernent l’allègement de la dette publique qui atteint 186 milliards
d’euros et se traduisent par une politique d’austérité.
La future reine Élisabeth naît le 21 avril 1926 à Londres. Issue d’une branche
qui n’est pas appelée en principe à régner, sa jeunesse se déroule dans une atmo‐
sphère familiale, sans le formalisme de la cour. En 1936, après l’abdication
d’Édouard VIII, son père devient le roi George VI, elle est princesse héritière.
Elle épouse en 1947 le prince Philip Mountbatten (né en 1921), dont elle s’est
éprise en 1939. Lors d’une visite au Kenya, elle y apprend le décès de son père,
le 6 février 1952. Elle est désormais reine du Royaume-Uni de Grande-Bre‐
tagne et de seize autres nations. Énergique, réservée, la reine règne mais ne gou‐
verne pas, selon la formule traditionnelle, ce qui ne l’empêche pas de s’entrete‐
nir régulièrement avec les douze Premiers ministres qui se succèdent sous son
règne. Elle maintient par sa personne la permanence de la monarchie britan‐
nique, assume ses obligations officielles. Éprouvée par des remous dans la fa‐
mille royale, elle manifeste en toutes circonstances une grande dignité et un hu‐
mour qui peut s’avérer redoutable. De février à juin 2012, elle célèbre son jubilé
de diamant, à l’occasion de ses 60 ans de règne.
CHAPITRE XXVII
1. L’Espagne franquiste
Depuis 1939, et ce jusqu’en 1975, l’Espagne est placée sous le régime fran‐
quiste, la dictature du général Francisco Franco (1892-1975). De 1945 à
1950, l’Espagne vit repliée sur elle-même, en autarcie, la paupérisation de la po‐
pulation s’y aggrave. Après 1950, Franco libéralise l’économie, apportant une
amélioration du niveau de vie, due notamment au bénéfice du plan Marshall,
accordé au pays en 1950. En avril 1954, Franco désigne pour lui succéder le
prince Juan Carlos de Bourbon (né en 1938), petit-fils du dernier roi Al‐
phonse XIII. La dictature franquiste s’appuie sur un parti unique, la Falange Es‐
pañola tradicionalista y de las Juntas de Ofensiva Nacional Sindicalista (FET y
de las JONS), plus connue sous le nom de Phalange. Tous les secteurs de la so‐
ciété sont contrôlés par ses représentants, avec l’appui de l’Église catholique, le
catholicisme étant reconnu religion d’État. Les institutions sont soumises au
principe de la démocratie organique : les représentants aux assemblées, les Cor‐
tès, sont nommés par le gouvernement, le monde syndical et son activité limitée
au système du « Syndicat vertical » responsable devant le ministre de la Pha‐
lange. Chef de l’État, Franco est caudillo, chef absolu, « par la grâce de Dieu ».
En principe, le régime est monarchique, mais sans roi jusqu’en 1975. Même
sans l’existence d’une alliance formelle durant la Seconde Guerre mondiale avec
l’Allemagne nazie, l’Espagne est considérée dans l’immédiate après-guerre
comme son alliée objective. Elle réintègre le concert des Nations à la faveur de
la guerre froide, se rapprochant des États-Unis, avec lesquels un pacte d’alliance,
le traité de Madrid, est signé en 1953. En 1955 l’Espagne devient membre de
l’ONU. En 1959 le président Eisenhower effectue une visite officielle à Madrid.
L’année 1959 est également celle d’un tournant majeur, celui du lancement du
Plan de Estabilización ou « Plan de stabilisation » de l’économie, dû à des
membres de l’Opus Dei, ou « Œuvre de Dieu », une association de laïcs catho‐
liques fondée en 1928 par le prêtre espagnol José Maria Escrivá de Balaguer
(1902-1975). Ces principales mesures ouvrent l’économie espagnole à la mon‐
dialisation, lançant une ère de prospérité marquée notamment par l’ouverture du
tourisme de masse. Après 1968, le régime du dictateur est de plus en plus
contesté, l’Église catholique elle-même entre en opposition à partir de 1970.
Franco, malade, vieilli, peine à maintenir son autorité sans partage. En sep‐
tembre 1974, il transfère ses fonctions de chef de l’État à Juan Carlos, puis
meurt le 20 novembre 1975.
4. Movida et modernisation
Le mouvement de la Movida madrilena, plus connu sous le seul terme de
Movida, est inséparable de la modernisation de l’Espagne. Né dans un quartier
madrilène, il porte les espoirs de la jeunesse, non seulement dans la démocratie
qui se met en place, mais aussi dans la construction d’une société ouverte et to‐
lérante, en opposition totale avec celle de la dictature franquiste. Ses chefs de
file sont des artistes, comme le cinéaste Pedro Almodóvar. Son développement
se fait entre les années 1980 et 1990. Leopoldo Calvo-Sotelo perd le pouvoir
aux élections d’octobre 1982 remportées par le Parti socialiste ouvrier espagnol
(PSOE) et son chef, Felipe González (né en 1942). Cette victoire met fin à la
période de transition démocratique. S’ouvre alors une époque d’ouverture poli‐
tique, sociale, culturelle, connue sous le nom de Movida. Felipe González pré‐
side le gouvernement à quatre reprises, en 1982-1986, 1986-1989, 1989-1993
et 1996. En 1986, l’Espagne adhère à la CEE. En 1992 s’y déroule l’Exposition
universelle de Séville et les Jeux olympiques de Barcelone. José Maria Aznar
(né en 1953), à la tête du Parti populaire (PP), de droite, gouverne de 1996 à
2000 et de 2000 à 2004. Il entreprend de lutter contre le chômage, qu’il ramène
de 20 % à 11 % de la population active, et contre le terrorisme basque d’Euska‐
di Ta Askatasuna (ETA), « Pays Basque et liberté ». Atlantiste convaincu, il se
rapproche des États-Unis et les soutient dans la guerre d’Irak de 2003. Le
11 mars 2004, Madrid est victime d’attentats islamistes. Plusieurs bombes ex‐
plosent dans des trains de banlieue, provoquant plus de 200 morts et 1 400 bles‐
sés. Vainqueur des élections en 2004, puis en 2008, le socialiste José Luis Za‐
patero (né en 1960) lui succède. Il retire les armées espagnoles d’Irak et renoue
le dialogue avec l’ETA. Il défend le projet de Constitution européenne, approu‐
vé par référendum avec 75 % des voix en 2005. Il légalise cette même année le
mariage homosexuel, suscitant l’ire de l’Église catholique et du Parti populaire.
C’est sous son gouvernement que disparaissent les derniers symboles du fran‐
quisme, notamment les statues équestres du général Franco. La Catalogne béné‐
ficie d’un nouveau statut d’autonomie, le Statut de la Catalogne est validé par le
Tribunal constitutionnel en 2006. La crise économique de 2008 frappe dure‐
ment l’Espagne, le PIB s’effondre à 0,3 % en 2008, le chômage atteint les 20 %
de la population active, le double chez les jeunes de moins de vingt-cinq ans. La
société espagnole est en crise complète. Le pays parvient à faire face à ses enga‐
gements financiers grâce à un prêt de l’Union européenne. Le gouvernement
met en place plusieurs plans d’austérité, sans résultats pour une sortie de crise,
mais qui provoquent la naissance d’une protestation nouvelle, celle des Indigna‐
dos, les « Indignés », jeunes Espagnols qui occupent les places et centre-villes
des grandes agglomérations, réclamant un changement radical de politique, cla‐
mant leur défiance à l’égard des partis traditionnels. José Luis Zapatero a indi‐
qué qu’il ne solliciterait pas un nouveau mandat de chef du gouvernement lors
des prochaines élections prévues en 2012. De fait, lors des élections anticipées
de 2011, le Parti populaire est largement vainqueur et son chef, Mariano Rajoy
(né en 1955), devient président du gouvernement.
CHAPITRE XXIX
KHROUCHTCHEV ET LA DÉSTALINISATION
Après la Seconde Guerre mondiale, l’URSS est dans une position ambiguë,
bénéficiant à la fois d’un immense prestige international pour son rôle pendant
le conflit, mais dévastée, humainement et matériellement par ce dernier. Les ef‐
forts de reconstruction sont gigantesques et s’achèvent vers 1950. Le pays se
dote en 1949 de l’arme nucléaire, possède la bombe H en 1953. Staline gou‐
verne d’une main de fer, développant le culte de la personnalité. Il meurt le
5 mars 1953 et Nikita Khrouchtchev (1894-1971) accède à la tête de l’État.
Lors du XXe congrès du Parti communiste d’Union soviétique (PCUS), en fé‐
vrier 1956, Khrouchtchev remet un rapport, en principe secret, mais rapidement
connu, dénonçant le culte de la personnalité sous Staline, ouvrant ainsi la voie à
la déstalinisation. Il favorise la reprise de relations normalisées avec les États-
Unis dans le cadre de la coexistence pacifique. Il s’agit de renoncer à une vision
datant de Lénine, exporter la révolution par les armes. Cette prise de position
conduit à la rupture avec la Chine en 1960. La rupture n’est pas limitée à l’idéo‐
logie. Nikita Khrouchtchev entend également moderniser la société soviétique
et élever le niveau de vie. Il souhaite ainsi « rattraper les États-Unis vers 1970 »,
lors du discours du 27 janvier 1957 devant l’assemblée du XXIe congrès du par‐
ti communiste. Une ambitieuse politique de conquête des terres vierges est lan‐
cée en 1959. Le nouveau plan septennal, au lieu d’être quinquennal comme au‐
paravant, veut favoriser la consommation intérieure et le logement, l’âge de la
retraite est abaissé à soixante ans, la durée hebdomadaire du travail ramenée de
quarante-huit à quarante-deux heures. Les réformes soulèvent des oppositions,
accentuées par l’échec du plan, abandonné en cours de route, le peu de résultats
en agriculture. Les apparatchiks, les « hommes d’appareil », dévoués au parti
qui leur assure pouvoir et statut, préparent sa chute. L’Occident prend ses dis‐
tances quand il écrase le soulèvement hongrois de 1956. En 1961, pour mettre
fin à la fuite des Allemands de l’Est vers l’Ouest, Khrouchtchev demande l’in‐
ternationalisation de Berlin ou son rattachement à la RDA. Les Américains re‐
fusent ; en août 1961 le « mur de Berlin » est édifié. Le rideau de fer se referme
totalement.
LE PRINTEMPS DE PRAGUE
En 1979 les accords SALT II consacrent la parité nucléaire entre les deux su‐
perpuissances (URSS et États-Unis). Mais l’économie stagne, hormis l’industrie
lourde. Pour éviter des famines, l’URSS est à plusieurs reprises contrainte d’im‐
porter du blé. En 1979, Brejnev lance le pays dans une guerre en Afghanistan,
dont les Soviétiques sortiront vaincus. Ses successeurs sont des vieillards qui
demeurent peu de temps aux affaires. Youri Andropov (1914-1984), ancien
président du KGB, accède au pouvoir avec l’appui de l’armée. L’élection d’un
pape polonais, Jean-Paul II (1920-2005) en 1978 contrarie l’URSS, soupçon‐
née d’avoir commandité, par l’entremise du KGB, l’attentat contre le souverain
pontife de 1981. Youri Andropov, même s’il est un apparatchik classique, en‐
tame la lutte contre la corruption au sein du parti, ébauche ce que sera plus tard
la politique de perestroïka. Konstantin Tchernenko (1911-1985) lui succède
et met fin à la relative ouverture initiée par son prédécesseur pour revenir aux
normes de la dictature brejnévienne. Gravement malade, il meurt peu de temps
après.
L’IMPLOSION DE L’URSS
1. Le temps de la surpuissance
2. Kennedy le réformateur
John Fitzgerald Kennedy (1917-1963) naît le 29 mai 1917 dans une riche
famille de Boston. Son père est nommé ambassadeur à Londres en 1938, il y
effectue une partie de ses études, médiocres, fréquemment interrompues par des
ennuis de santé. En dépit d’une maladie du dos dont il souffrira toute sa vie, il
participe à la Seconde Guerre mondiale, est blessé, là encore au dos, décoré. Peu
de gens imaginent le calvaire enduré par Kennedy tout au long de sa vie, trom‐
pés par un président actif, bronzé, souriant et sportif. Ses douleurs dorsales sont
intolérables, il parvient à les surmonter à force de volonté, mais aussi avec l’aide
du docteur Max Jacobson, qui lui injecte diverses substances et mérite le sur‐
nom de Docteur Feelgood (« docteur fais du bien »). Après la guerre, il est élu
représentant (député) puis sénateur du Massachussetts en 1952. C’est en 1953
qu’il épouse Jacqueline Bouvier (1929-1994). En 1960, il se présente à l’élec‐
tion présidentielle contre le candidat républicain Richard Nixon et la remporte
de justesse. Luttant contre la pauvreté et les inégalités raciales, il se préoccupe
de conquête de l’espace, lance le programme Apollo. Il est assassiné le 22 no‐
vembre 1963 à Dallas. Le vice-président, Lyndon B. Johnson (1908-1973),
termine le mandat de Kennedy avant d’être élu à son tour.
En 1960 succède à Eisenhower le démocrate et premier président catholique
John Fitzgerald Kennedy, le plus emblématique de tous les présidents améri‐
cains. Il a fait campagne sur le thème de la frontière, cher au cœur des Améri‐
cains depuis la conquête de l’Ouest. La frontière qu’il s’agit ici de repousser est
celle de la pauvreté, afin que tous les citoyens bénéficient des fruits de la crois‐
sance. Il doit faire face à la phase aiguë de la guerre froide. En avril 1961, c’est
l’échec du débarquement américain à la baie des Cochons à Cuba. Le projet
était de faire débarquer des exilés cubains, soutenus par les forces américaines,
afin de renverser Fidel Castro. Cuba est beaucoup trop proche des côtes de Flo‐
ride pour demeurer communiste. Castro est au courant, la tentative se termine
par un massacre. Kennedy, âgé seulement de quarante-trois ans, apparaît alors
comme inexpérimenté, peu à même de protéger le pays dans le contexte de
guerre froide. Le président, habilement, endosse dans un discours télévisé la
responsabilité de l’échec. Cet aveu et ses excuses plaisent aux Américains. Dans
la nuit du 12 au 13 août 1961 le mur de Berlin est érigé, les États-Unis sont im‐
puissants. Kennedy reprend la main en se rendant à Berlin ouest où il prononce
le célèbre discours émaillé de la formule « Ich bin ein Berliner » (« Je suis un
Berlinois »). La guerre du Viêtnam (1959-1975) prend de l’ampleur, avec l’en‐
gagement militaire américain, mais c’est, en octobre 1962, la crise de Cuba qui
plonge le monde au bord d’une troisième guerre mondiale.
LA CRISE DE CUBA
En octobre 1962, une flotte russe fait route pour Cuba. Kennedy réagit par
un discours à la télévision où il informe ses concitoyens qu’il s’agit à ses yeux
d’une agression contre les États-Unis. Il annonce la mise en place d’un blocus de
l’île par des navires américains. Si les Soviétiques tentent de le forcer, les États-
Unis rentreront en guerre. Le monde retient son souffle pendant une semaine,
puis Khrouchtchev finit par céder, les bâtiments russes font demi-tour. C’est une
victoire éclatante pour Kennedy qui acquiert une stature internationale. C’est à
la suite de cet épisode qu’est établi entre Moscou et Washington le « téléphone
rouge », en réalité un fax, qui permet aux deux chefs d’État de communiquer di‐
rectement, sans avoir à passer par des échelons intermédiaires.
Le scandale du Watergate
Le démocrate Bill Clinton (né en 1946), issu d’un milieu très modeste,
brillant étudiant en droit, est élu, en 1992, puis réélu en 1996. Il maintient les
effectifs américains en Somalie, engagés depuis début 1993 dans le cadre de
l’opération Restore Hope (« Rendre l’espoir »), mais celle-ci tourne au désastre.
Les potentats locaux mènent une guérilla meurtrière et les Américains quittent
le pays entre 1994 et 1995. Clinton engage les États-Unis dans les missions de
l’OTAN pendant les guerres de Yougoslavie (1991-1995). Il préside aux ac‐
cords d’Oslo en 1993 pour le rapprochement entre Israéliens et Palestiniens.
C’est l’occasion d’une poignée de main historique, sous le regard du président
américain, entre Yitzhak Rabin (1922-1995), Premier ministre de l’État d’Israël
et Yasser Arafat (1929-2004), président de l’Organisation de libération de la
Palestine (OLP). Pourtant, le plan de paix prévu ne sera pas mis en œuvre. Il
parvient pendant ses mandats à redresser l’économie américaine. Entre 1997 et
1999 il est atteint par le scandale Monica Lewinsky, une stagiaire de la Maison
Blanche dont il obtient des faveurs sexuelles, mais n’est pas démis de ses fonc‐
tions.
George Walker Bush (né en 1946), fils de l’ancien président, succède à Bill
Clinton de janvier 2001 jusqu’en janvier 2009. Il ouvre largement son gouver‐
nement aux minorités ethniques, avec des personnalités comme Condoleezza
Rice (née en 1954) au poste de secrétaire d’État, ou Colin Powell (né en 1937)
au même emploi. C’est le 11 septembre 2001 que des terroristes du groupe Al-
Qaïda détruisent les Twin Towers, les « Tours jumelles », du World Trade Cen‐
ter (symbole de la suprématie économique américaine) de New York. Ils dé‐
tournent deux avions de ligne qui vont s’écraser sur les tours avant de provoquer
leur effondrement. Un troisième est projeté sur le Pentagone, siège du départe‐
ment de la défense à Washington. Le quatrième avion qui se dirigeait vers cette
capitale s’écrase dans la campagne après l’affrontement entre passagers et équi‐
page avec les pirates terroristes. En riposte, les États-Unis interviennent en Af‐
ghanistan, où se cache Oussama ben Laden, responsable de l’attentat du 11 sep‐
tembre. En 2003, il lance une invasion militaire de l’Irak, soupçonnée de détenir
des armes de destruction massive. L’offensive débute en mars et s’achève rapi‐
dement début avril par une victoire, Saddam Hussein est renversé, mais les
troupes américaines doivent demeurer sur place pour mettre en place un État
démocratique. Il lance un ambitieux programme économique, qui s’achèvera sur
un bilan en demi-teinte. C’est en 2008, pendant son dernier mandat, qu’éclate la
crise des subprimes, ces crédits hypothécaires que les emprunteurs ne peuvent
rembourser en raison de l’augmentation des taux, qui plongent le monde dans la
récession.
C’est l’une des mesures phares de la présidence Obama, destinée à créer aux
États-Unis un véritable système d’assurance maladie, universel, obligatoire, sur
le modèle de ceux adoptés en France et au Royaume-Uni après la Seconde
Guerre mondiale. Il s’agit d’aller au-delà des lois Medicaid et Medicare et de
fournir à des millions d’Américains pauvres une couverture sociale. Après une
bataille juridique homérique à la Chambre des représentants, au Sénat, puis, une
fois le texte adopté, contre les procureurs généraux des États qui le considèrent
comme contraire à la constitution, la loi Patient Protection and Affordable Care
Act (loi sur la protection des patients et les soins abordables) est votée et pro‐
mulguée le 23 mars 2010. Elle prévoit l’obligation, pour tous les Américains,
d’avoir une assurance maladie au plus tard en 2014. Des mesures sont prévues
pour aider les plus démunis, que les compagnies d’assurance ne pourront refu‐
ser. En juin 2012, la Cour suprême approuve la loi.
CHAPITRE XXXI
L’EMPEREUR ROUGE
Après 1945, la guerre reprend, une fois les troupes japonaises reparties, entre
le Guomindang de Tchang Kaï-chek et le Parti communiste chinois (PCC) de
Mao Zedong. En 1949 ce dernier est maître de presque tout le pays, Tchang
Kaï-chek se réfugie à Taiwan où il proclame la continuité de la République de
Chine. En octobre 1949, la République populaire de Chine (RPC) est créée. Elle
se met en place dans un contexte de violente répression à l’encontre de tous
ceux qui ne sont pas communistes. En octobre 1950 est lancée la campagne
« pour éliminer les contre-révolutionnaires », puis en 1951 la campagne des
trois anti, lutte contre le détournement de fonds, le gaspillage, le « bureaucra‐
tisme ». Elle se poursuit l’année suivante dans la campagne des cinq anti, contre
la corruption, l’évasion fiscale, le détournement des biens de l’État, la fraude, le
vol d’informations économiques. Il s’agit d’autant de moyens d’imposer par la
peur le régime. En 1954 est mise en place la Constitution de la République po‐
pulaire de Chine. Elle est modifiée en 1975, 1978 et 1982. Le PCC domine to‐
talement, en qualité de seul parti légal, la vie politique. Il peuple les différentes
instances, Assemblée nationale populaire qui exerce le pouvoir législatif,
Conseil d’État pour le pouvoir exécutif, Cour populaire suprême pour le ju‐
diciaire (Constitution de 1982). Le président de la République est élu par l’As‐
semblée populaire nationale. En réalité, il n’y a qu’un seul candidat, choisi par
les instances dirigeantes du PCC. De février à juin 1957, Mao Zedong lance la
campagne des cent fleurs. C’est une manœuvre politique pour affaiblir ses op‐
posants au sein du PCC. En principe, les Chinois sont autorisés à dénoncer tout
ce qui ne va pas dans le fonctionnement du Parti et des institutions chinoises.
Mais ils usent réellement de ce droit nouveau à la parole, contestent dure‐
ment, dénoncent dysfonctionnement et privilèges indus. La campagne s’arrête
au bout de quelques mois, les mécontents sont poursuivis, arrêtés, déportés ou
exécutés. Cette répression féroce fait plusieurs centaines de milliers de victimes.
Entre 1958 et 1960, Mao Zedong lance le Grand Bond en avant. Au prétexte
de moderniser l’économie chinoise, il s’agit d’une collectivisation des terres sur
le modèle stalinien, la réalisation de grands travaux, la constitution de gigan‐
tesques complexes industriels. C’est aussi l’occasion de reprendre le pays en
main en éliminant toute contestation de ce programme. Sans rapport aucun avec
les réalités économiques, ce programme amène la Chine au bord du chaos, pro‐
voque une famine qui aurait entraîné la mort d’environ vingt millions de per‐
sonnes. L’échec est si patent que Mao est écarté du pouvoir entre 1960 et 1965.
Il demeure à la tête du PCC mais doit démissionner de son poste de président
de la RPC. Liu Shaoqi (1898-1969) est élu à sa place. Il s’efforce de remédier
au désastre du Grand Bond en avant. Il s’appuie sur le secrétaire général du
PCC, Deng Xiaoping. Mais Mao Zedong revient au pouvoir en lançant en 1966
la révolution culturelle. De son nom complet grande révolution culturelle prolé‐
tarienne, elle s’appuie sur la jeunesse, embrigadée dans les Gardes rouges, fana‐
tisée par la lecture du Petit livre rouge de Mao Zedong. Les jeunes livrent le
pays à la terreur, violentant les « révisionnistes » du PCC, les élites tradition‐
nelles, les intellectuels et les artistes, détruisant monuments religieux et culturels
évoquant l’ancienne Chine. Il faut absolument éradiquer les quatre vieilleries (ou
quatre vieilles choses) : vieilles idées, vieille culture, vieilles coutumes, vieilles
habitudes. Les dénonciations et condamnations des Gardes rouges fleurissent
sur les murs sous la forme de dazibao, des affiches placardées, désignant nom‐
mément les coupables d’attachement à l’ordre ancien. Mao parvient à son objec‐
tif, le contrôle à son service du PCC, au prix d’un pays au bord de la guerre ci‐
vile. C’est à Zhou Enlai (1898-1976) et à ses qualités diplomatiques qu’il re‐
vient de mettre peu à peu fin aux exactions, évitant la mise à sac de la Cité in‐
terdite, même si le mouvement se poursuit, de manière sporadique, jusqu’à la
mort de Mao Zedong en 1976.
LE BOOM ÉCONOMIQUE
L’ÉVOLUTION RÉCENTE
– une phase dans les années 1950, phase embryonnaire où celle-ci est
encore intégrée dans le modernisme et constitue ses dernières années ;
– une phase dans les années 1960, phase de démystification de l’art
concentrée surtout aux États-Unis. L’art populaire est revalorisé, de nou‐
velles technologies apparaissent ;
– une phase dans les années 1980, marquée par un retour du désen‐
chantement, bien que le postmodernisme soit reconnu soit par l’apologie,
soit par la détractation.
L’art contemporain a tenté sciemment de détruire le statut d’œuvre d’art et de
faire de la déconstruction de l’art son propre objectif pour faire en sorte que
l’objet ordinaire et l’œuvre se confondent. Abolie la frontière entre l’esthétique
industrielle et l’esthétique artistique, une chaise, un frigidaire, une voiture de‐
viennent de l’art. La publicité elle-même se fera art. Arthur Danto (né en
1924), philosophe et critique d’art américain, pense que l’art contemporain finit
par désigner la vie elle-même comme œuvre d’art, car l’essentiel est dans la ca‐
pacité de l’artiste « de nous amener à voir à sa manière de voir le monde ». Ain‐
si, loin de la théorie qui portait l’œuvre d’art, loin du marché de l’art qui quali‐
fiait le génie de celle-ci, loin d’un rapport avec l’objet, l’œuvre d’art devient une
exposition intérieure suscitée autant pour l’artiste que pour l’amateur d’art.
Le peintre se fait plasticien en quittant le monde de l’image et de la représen‐
tation. Il instaure sa propre architecture à l’aide d’objets qu’il assemble, il donne
à voir la présence. Les matériaux les moins nobles sont exploités, loin d’être dé‐
daignés, parce que porteurs d’une histoire. Énumérons les principaux groupes et
mouvements qui ponctuent l’art pictural contemporain.
LE POP ART
Le pop art est un mouvement artistique qui apparaît dans les années 1950 en
Grande-Bretagne et vers la fin des années 1950 aux États-Unis. Il n’aura qu’un
faible écho sur le continent et déformé. On y associa l’étiquette de nouveau réa‐
lisme et les artistes comme Yves Klein, Arman, Christo, Jean Tinguely. L’ori‐
gine du pop art anglais remonte à la création en 1952 du séminaire interdiscipli‐
naire de l’Indépendent Group, autour des peintres Eduardo Paolozzi (1924-
2005), Richard Hamilton (1922-2011) et du critique d’art Lawrence Alloway
(1926-1990). Ce groupe se caractérise par son intérêt pour les objets ordinaires,
ainsi que la confiance en la puissance des images. Le terme de « pop art », in‐
venté par Lawrence Alloway, indique qu’il s’appuie sur la culture populaire. Le
foyer du pop art américain se trouve à New York et prend ses racines dans l’art
populaire des peintres d’enseignes des XVIIIe et XIXe siècles, dans le cubisme, les
ready-mades de Duchamp. Ce mouvement aura une très grande influence sur
les artistes d’autres pays, en Espagne le groupe Equipo Crónica, nom d’un
groupe actif de 1964 à 1981, autour d’Antonio Toledo (né en 1940), Rafael
Solbes (1940-1981), en Grande-Bretagne, Richard Hamilton, Peter Blake (né
en 1932), en Allemagne, Sigmar Polke (1941-2010). Tout en gardant leur iro‐
nie, les artistes du pop art se tourneront peu à peu vers des préoccupations plus
contestataires dès les années 1970. Dans les années 1990, un artiste comme Jeff
Koons (né en 1955) se trouve au point de rencontre de plusieurs concepts, les
ready-mades de Duchamp, le pop art d’Andy Warhol, les objets gigantesques de
Claes Oldenburg (né en 1929) : Puppy (1992), Balloon Dog (1994-2000), Rab‐
bit le lapin (1997).
Les principaux artistes de ce mouvement seront : Andy Warhol, Roy Lichten‐
stein et Claes Oldenburg.
◆ Andy Warhol (1928-1987) peint dès 1960 ses premières toiles représen‐
tant Popeye ou Dick Tracy. Dès 1962, il leur préféra les grands poncifs de la
société de consommation. Les boîtes de soupe Campbell, les bouteilles de
Coca-Cola qu’il met en image grâce au procédé sérigraphique. En 1962, au mo‐
ment même où Roy Lichtenstein expose ses premières œuvres, à partir de vi‐
gnettes de BD, et où Marilyn Monroe décède, il achète une photographie d’elle
et la sérigraphie, procédé qui consiste à reporter mécaniquement une image sur
une toile en la réduisant à ses traits essentiels afin que la forme ait une plus
grande efficacité visuelle. L’image peut être ainsi reproduite à l’infini. Un an
plus tard, il ouvre la factory dans une usine désaffectée. Il réalise son premier
film en 16 mm, Sleep, constitué de séquences de dix minutes, chacune projetée
plusieurs fois, montrant un homme en train de dormir. En 1968, il sera victime
d’une tentative d’assassinat. En 1972, il se remet à peindre et fait le portrait d’un
grand nombre de célébrités : Mick Jagger, Michael Jackson.
◆ Roy Lichtenstein (1923-1997) est considéré comme l’un des artistes ma‐
jeurs du pop art. Après avoir peint des œuvres expressionnistes, il se met en
1961 à créer une œuvre originale, inspirée des bandes dessinées populaires, qui
perdurera jusqu’en 1964, ainsi que de la représentation d’objets de consomma‐
tion. Il en vient à peindre les effets produits par les techniques de l’imprimerie,
contours noirs, couleurs saturées, dessin synthétique. Il dira vouloir garder la
grande énergie de la bande dessinée, avec Whaam !, en 1963. Ce regard porté
sur l’un des aspects les plus spécifiques à la culture des médias s’explique par
l’engouement pour la bande dessinée dans la mentalité américaine des an‐
nées 1950. Il en retient les gros plans stéréotypés qu’elle a imposés. Ils pa‐
raissent les répliques exactes des personnages originaux mais se décalent sous
l’effet d’une perspective nouvelle, la pin-up ou l’adolescente sont montrées sous
une sensualité sage et naïve, comme dans Girl with Ball (1961). Lichtenstein
prend une distance par rapport au sujet en retirant toute émotion de son tableau.
◆ Claes Oldenburg (né en 1929) compose des œuvres dont le sujet est la re‐
présentation du quotidien. Il a redéfini la sculpture monumentale en montrant à
grande échelle des objets domestiques, invitation à la réflexion pour les pas‐
sants sur leur environnement. Entre les années 1950 et 1960, il crée des happe‐
nings, des intérieurs modernes : Ensemble de chambre à coucher (1963). De
manière récurrente, la nourriture apparaît dans son œuvre, et est même un des
éléments qui suscita son utilisation dans The Store en 1961. Les hamburgers en
plâtre peint, ou en pâte à papier, les gâteaux colorés sont à vendre comme n’im‐
porte quelle marchandise. Dans sa série de sculptures molles, il utilise le vinyl
pour ses salles de bains : Lavabo mou (1965). Il poursuit ses recherches et mo‐
difie la taille des objets quotidiens, pince à linge, petite cuillère sont reproduites
sur une très grande échelle en dehors des musées. Il travaillera également sur
des modèles d’objets n’ayant plus cours dans le marché.
Le terme d’art brut inventé en 1945 par le peintre français Jean Dubuffet
(1901-1985) désigne l’art de personnes dépourvues de tout conformisme cultu‐
rel et social. Il concerne les exclus, les malades, ignorants des valeurs artistiques
sociales et culturelles. Pour Dubuffet, cet art représentait la forme la plus pure
de la création. C’est d’un besoin que part sa créativité sans recherche intellectua‐
lisée. Même si cet art n’est pas qu’un « art des fous » en dépit des nombreuses
études qui se sont penchées sur ces œuvres créées par des malades internés, c’est
avant tout un art d’autodidactes et de spontanés qui communiquent leur rapport
au monde. Jean Dubuffet, à partir de matériaux et de techniques les plus di‐
verses, poils, végétaux, papier froissé mélangés à la peinture, au sable, à la terre,
au goudron, révèle un art qui répond au besoin profond de l’expression. Vers les
années 1970, il accède à une nouvelle dimension avec ses sculptures monumen‐
tales en polyester peint : Tour aux figures (1988), Groupe des quatre arbres
(1972). Parmi les autres artistes rattachés à l’art brut, citons Aloïse Corbaz
(1886-1964), Adolf Wölfli (1884-1930), Aristide Caillaud (1902-1990).
Selon Paulhan, le terme aurait été forgé dans les années 1950 pour qualifier
les dessins de Camille Bryen (1907-1977) qui transcendaient l’informel. L’art
informel regroupe différentes tendances de la peinture abstraite qui, à l’inverse
de l’abstraction géométrique, renonce à toute règle de forme, de composition et
privilégie l’acte spontané. La peinture informelle trouve son origine dans la
deuxième École de Paris où deux tendances s’imposent : celle de la peinture
gestuelle de Pierre Soulages (né en 1919), Georges Mathieu (1921-2012),
Serge Poliakoff (1900-1969), Hans Hartung (1904-1989), et celle des
peintres paysagistes autour de Jean Bazaine (1904-2001). C’est à Michel Ta‐
pié (1909-1987) que revient le grand mérite d’avoir réussi à imposer la matière
en tant que valeur totale, alors que la forme avait été dans l’histoire de toute la
peinture la valeur traditionnelle. Il travaille avec la matière, la texture, le geste,
la couleur auxquels il superpose la présence humaine de l’action, d’une déchi‐
rure, d’un signe à interpréter selon la trace qu’ils laissent. La pâte est exaltée et
n’en finit pas de dévoiler ses secrets : pâtes épaisses et rainurées de Fautrier,
pâtes stratifiées de Poliakoff. L’abstraction américaine développe ces années-là
amalgames de pâtes épaisses et richesses pigmentaires (Pollock, De Kooning ou
le Canadien Riopelle).
Peintres caractéristiques
L’EXPRESSIONNISME ABSTRAIT
L’expressionnisme abstrait est aussi connu sous le nom d’École de New York.
Les valeurs sociales et esthétiques sont rejetées et c’est surtout l’expression
spontanée de l’individu qui est mise en avant. Né après guerre, il donna pendant
vingt ans naissance à de nombreux courants en Europe, au Japon, à New York.
Il réunit Pollock, De Kooning, Rothko. Deux voies vont le définir : l’action
painting avec Jackson Pollock (1912-1956), qui à partir de 1940 couvre ses
toiles de lignes produites par le geste automatique. Peggy Guggenheim s’inté‐
resse à ses œuvres et en 1944 le Museum of Modern Art, MoMa, lui achète une
composition. Il met au point l’action painting, peint avec son corps en réalisant
une chorégraphie picturale. Comme l’énergie accumulée, le geste de Pollock la
libère au-delà de toute notion d’intentionnalité dans un état quasi médiumnique.
L’artiste n’est plus le créateur mais le transcripteur. Trois ans plus tard, c’est
l’époque du dripping et des toiles posées à même le sol sur lesquelles Pollock
fait couler de la peinture contenue dans un pot et la projette à l’aide d’un bâton.
C’est la technique du all over qui répand la peinture partout de manière égale ; il
ne s’agit plus de couches de peinture mais de strates de couleur. Alchemy (1947),
Out of the Web (1949) sont caractéristiques de cette période. La figure réappa‐
raît en 1951 sous l’action du dripping. Les dernières années de Pollock seront
des périodes de crise sombres avec Number 1 A (1948).
Alexander Calder (1898-1976) fait, dans les années 1930, preuve d’une au‐
dace inouïe dans le domaine de la sculpture en inventant le mobile : de l’œuvre
découle la possibilité de mouvement. Sa production artistique commence à New
York où il réalise ses premières œuvres dans les années 1920, mais c’est en
1931 qu’il crée son premier mobile. Il y avait déjà eu Les Contre-reliefs libérés
dans l’espace (1914) de Tatline (1885-1953), Les Constructions suspendues
(1920) de Rodtchenko (1891-1956), l’Abat-jour (1919) de Man Ray (1890-
1956). Ses rencontres à Paris avec Fernand Léger, Mondrian vont être décisives
pour l’orientation de son art. Les premiers mobiles mus par quelques procédés
mécaniques sont exposés à Paris en 1932. Dès lors, ses sculptures vont former
des « compositions de mouvement ». Si ces constructions motorisées (Machine
motorisée, 1933) sont qualifiées de « mobiles », Hans Arp appellera « Sta‐
biles » les sculptures fixes. Dix ans plus tard, le Museum of Modern Art de New
York organise une rétrospective. Mais Calder est surtout connu pour son
Cirque de Calder où des figurines réalisées en fil de fer jouent le rôle de forains,
animées par Calder lui-même sur un fond musical traditionnel au cirque : Hori‐
zontal Yellow (1972), Mobile (1941).
LE NOUVEAU RÉALISME
C’est autour d’Yves Klein, Arman, Pierre Restany, César, Niki de Saint
Phalle, Jean Tinguely que le nouveau réalisme est fondé dans les an‐
nées 1960 pour se poursuivre pendant une dizaine d’années. Ce nouveau réa‐
lisme entend décrire une réalité nouvelle issue de la réalité quotidienne de la so‐
ciété de consommation. La méthode artistique est très variable, compressions de
César, accumulations d’Arman, sculptures autodestructives de Tinguely, Tirs
(1961) de Niki de Saint Phalle, emballages de Christo. Contemporain du pop
art américain, dont il a été souvent présenté comme la transposition en France,
le nouveau réalisme prône le retour à la réalité en opposition avec le lyrisme de
la peinture abstraite. Le regroupement d’artistes autour de ce mouvement a été
motivé par l’apport théorique du critique d’art Pierre Restany qui se tournera
après sa rencontre avec Klein, aux alentours de 1958, vers une élaboration es‐
thétique sociologique. Les matériaux utilisés ne sont plus nobles, ce sont du ci‐
ment, du plâtre, de la tôle, Daniel Spoerri (né en 1930) ira jusqu’à se servir
dans les poubelles de ses voisins pour rendre compte de la société de consom‐
mation.
◆ Yves Klein (1928-1962), à partir de 1955, présente ses créations et ex‐
pose au Club des solitaires de Paris des monochromies différentes sous le titre
de Peintures. À partir de 1957, il se consacre à la période bleue. La société de
consommation sera le terrain de l’aventure monochrome. Durant son époque
bleue entre 1957 et 1958, les tableaux sont volontairement semblables, comme
dans l’impératif de la standardisation industrielle. L’inspiration de ce bleu, il le
doit à Giotto, lors d’un voyage à Assise, en Ombrie, Italie. Plus tard, s’y ad‐
joignent l’or, couleur matière de l’alchimie et des icônes, puis le rose couleur de
l’incarnation. En 1958, il organise à la galerie Iris Clert, rue des Beaux-arts à
Paris, l’exposition Le Vide, l’espace de la galerie est laissé vide comme incarna‐
tion du néant. La même année, il présente ses Anthropométries, œuvres exécu‐
tées par un « pinceau vivant » sur des modèles enduites de peinture. La couleur
sera pour Klein le moyen d’atteindre la sensibilité. Ses principales œuvres sont :
Peinture de feu sans titre (1974), Ci-gît l’Espace (1960), L’Arbre grande éponge
bleue (1962).
◆ Arman (1928-2005), né Armand Pierre Fernandez, rencontre, en 1947,
Yves Klein à l’école de judo qu’ils fréquentaient à Nice. En 1960, il fait l’exposi‐
tion Le Plein où il remplit la galerie d’Iris Clert de rebus et de contenus de pou‐
belles, et devient la même année membre du groupe des nouveaux réalistes. Il
s’intéresse aux rapports que la société moderne entretient avec l’objet, lui don‐
nant un statut entre sacralisation et consommation. À partir de 1970, grâce à
l’emploi de la résine de polyester, Arman entreprend un nouveau cycle de pou‐
belles organiques. Obsédé par l’objet, il organise des accumulations (La Vie à
pleines dents, 1960), de machines à écrire, de scies, dans une œuvre appelée
Madison Avenue. Ses Colères, en 1961, consistent en des destructions d’objets,
avec ses coupes de violons, de pianos, savamment replacés à l’horizontale sur
des murs. Dans Combustions en 1963, ces mêmes objets sont brûlés. Entre 1980
et 1999, ses techniques se diversifient et l’artiste multiplie les procédures d’exé‐
cution : Nu couché (1983).
◆ Jean Tinguely (1925-1991) crée, dès 1959, de petits engins motorisés
sous le nom de Méta-Matics qui produisent eux-mêmes des œuvres. Il avait tiré
de la roue à aube, en 1954, le principe des Moulins à prières, actionnés à la
main, fines sculptures de fil de fer. Le mouvement chez lui est associé au hasard
et au fait que la machine semble prendre vie. Par ses œuvres, il a tenté d’attirer
l’attention sur le fait que la seule chose certaine est le mouvement, le change‐
ment, qu’il n’existe pas de valeurs fixes absolues. Au lieu de considérer les
choses dans leur stabilité, dans leur continuité, il met en évidence de plus en plus
la dimension dynamique de la mentalité sociale. La hantise de la catastrophe et
de la mort jouera un rôle grandissant dans son œuvre. L’Hommage à New York
(1960), assemblage d’objets hétéroclites, s’autodétruit au bout de vingt-six mi‐
nutes dans le musée d’art moderne de cette ville. Euréka apparaît comme une
œuvre quasiment classique. Le Cyclop (1969-1994), immense structure métal‐
lique en forme de tête, formée de 600 tonnes de ferrailles, œuvre collective à la‐
quelle participèrent Niki de Saint Phalle, Arman, Soto, reste son œuvre la plus
connue.
◆ Niki de Saint Phalle (1930-2002), née Catherine Marie-Agnès Fal de
Saint-Phalle, ne connut pas le succès immédiatement. En 1965, elle montre à
Paris ses premières Nanas de papier mâché, fil de fer et laine. Son œuvre com‐
mencera à être connue grâce à ses Tirs, une poche de peinture est pulvérisée par
une balle tirée par l’artiste. Elle réalisa Hon Elle (1966) avec Jean Tinguely, qui
devient son mari, femme de 20 m de haut au Moderna Museet de Stockholm,
puis la Fontaine Stravinski, en 1982.
◆ César, César Baldaccini (1921-1998), est connu pour ses célèbres com‐
pressions, Compressions, à partir de 1960, Les Expansions (1967), Les Em‐
preintes humaines (1965-1967), Le Centaure (1983-1985), œuvre de 4,70 m, et
ses trophées du 7e art qu’il réalisa.
SUPPORTS/SURFACES
Sous cette appellation un certain nombre d’artistes dans les années 1960 dé‐
veloppent des expériences et des théories sur la matérialité du tableau. Ils entre‐
prennent une déconstruction du tableau, de l’œuvre d’art. Comme le nouveau ro‐
man ou la Nouvelle Vague au cinéma, le mouvement décloisonnera une certaine
pensée esthétique trop repliée sur elle-même. À partir de 1966, tous les consti‐
tuants physiques du tableau de chevalet, à savoir toile, châssis, cadres seront
passés en revue. Daniel Dezeuze (né en 1942) dissociera les toiles du châssis.
Claude Viallat (né en 1936) utilise des matériaux de récupération. Pierre Bu‐
raglio (né en 1939) récupère des morceaux de toile et des éléments de fenêtre
qu’il regroupe. Marc Devade (1943-1983) compose ses créations à partir de
toiles formées de bandes horizontales.
Courants d’art
Art conceptuel : fait disparaître l’objet d’art au profit de son analyse. Daniel Buren (né en
1938) en est un bon représentant.
Art corporel : fondé en 1958 par Michel Journiac qui utilise le corps comme matériel à
peindre dans Les Messes pour un corps (1969).
Art minimal : au milieu des années 1950, ce courant veut débarrasser la peinture de tout
ce qui ne lui est pas spécifique. Citons l’œuvre de Morris Louis (1912-1962), Troisième
élément, 1961.
Art pauvre en Italie : refus d’assimiler l’art à un produit de consommation, culte de la pau‐
vreté né en 1967 avec le manifeste du critique Germano Celant.
Groupe BMPT : il doit son appellation aux premières lettres du nom de ses représen‐
tants : Daniel Buren, Olivier Mosset, Michel Parmentier, Niele Toroni, qui revendiquent une
peinture avec un minimum de signification.
Esthétiques relationnelles : dans les années 1990, le critique Nicolas Bouriard juge les
œuvres d’art en fonction des relations interhumaines qu’elles figurent ou suscitent.
Figuration narrative : né en France dans les années 1980, ce mouvement prône un re‐
tour à la figuration spontanée. Citons Robert Combas (né en 1957) avec La Basse-Cour
à Germaine (1986).
Happening : mouvement mis au point dans les années 1950, il s’agit d’une performance
collective ayant lieu devant un public et ayant valeur d’art, adulée un temps par Jackson
Pollock (1912-1956).
Hyperréalisme : ce mouvement des années 1960 s’appuie sur la photographie, car il se
situe au-delà des capacités visuelles de l’œil pour faire en sorte qu’une œuvre achevée
semble photographique. Les noms liés à cette mouvance sont ceux de Chuck Close (né
en 1931) avec Lucas II (1996) et Malcolm Morley (né en 1931) avec Go Carts ou The Art
of Painting (2000).
Neo-Geo : peinture abstraite de la fin des années 1980.
Simulationnisme : tendance qui s’affirme vers les années 1970 et se caractérise par une
réflexion sur les modes de représentations artistique contemporains en les recyclant et en
les détournant.
Sots Art : la variante soviétique du pop art, nom donné dans les années 1970.
Supports/surfaces : groupe constitué à Nice en 1969 par des peintres, développant de‐
puis 1966 des expériences sur la matérialité de la peinture. Le tableau retrouve sa voca‐
tion de support et de surface.
Notes
1. Marc Jimenez, Qu’est-ce que l’esthétique ?, Paris, Gallimard, « Folio essais », 1997, p. 418.
CHAPITRE XXXIII
La littérature contemporaine
À partir des années 1950, la littérature avec ses best-sellers et ses prix litté‐
raires va devenir un enjeu commercial par le biais des maisons d’édition. Les
best-sellers se font, se défont, mais c’est une culture de l’éphémère qui s’impose
dans la littérature. Un livre pas davantage qu’un auteur ne sont faits pour durer.
Un souci actuel de rentabilité privilégie une littérature conventionnelle au détri‐
ment d’une véritable littérature de création. Après le nouveau roman, le genre
narratif sera en pleine expansion. Le personnage et l’histoire sont de retour. Les
années 1980 s’inscrivent contre la mauvaise conscience des années après guerre,
avec les romans de Romain Gary-Ajar, Roman Kacew (1914-1980), avec
L’Angoisse du roi Salomon (1979), mais aussi La Vie devant soi (1975). L’his‐
toire sera un genre privilégié, dénonçant l’innommable – Robert Antelme
(1917-1990) avec L’Espèce humaine (1947), Modiano et sa Place de l’Étoile
(1968), Perec qui rend hommage à la grande hache de l’histoire – ou traitant
d’une époque plus spécifique – Marguerite Yourcenar avec Mémoires d’Ha‐
drien1 (1951), extraordinaire reconstitution du monde antique au IIe siècle après
J.-C., L’Œuvre au noir (1968) qui se déroule à la fin du Moyen Âge, le person‐
nage central en étant Zénon Ligre, un alchimiste. D’autres définissent leur
propre genre dans lequel ils s’imposent : Henri Troyat (1911-2007), pseudo‐
nyme de Lev Tarassov, raconte de vastes fresques romanesques où la vie de
plusieurs générations se déroule sur un fond historique, évoquant la vie de la
Russie, La Lumière des justes (1959-1963), ou l’histoire de ses tsars,
Alexandre Ier (1981). Après le succès de Bonjour tristesse, en 1954, Françoise
Sagan continue de publier des œuvres définies par une écriture désinvolte et lé‐
gère, telle La Chamade (1965). Les avant-gardes, les grandes théories sont dé‐
laissées au profit d’une grande diversité de formes, les clivages entre catégories
s’estompent. Une nouvelle période s’amorce pour certains, marquant un renou‐
veau, pour d’autres une période de crise. Marqué déjà par La Mort de l’auteur
(1968), le texte de Roland Barthes, le « je » de l’auteur s’affirme de nouveau
bien loin d’une vision romanesque avec Georges Perec, W ou le souvenir d’en‐
fance (1975), roman dans lequel une fiction alterne avec une autobiographie.
Les années 1990 se placent sous le signe de la diversité. Le Mexicain Octavio
Paz obtient le prix Nobel de littérature en 1990. Milan Kundera publie son Im‐
mortalité (1990), tandis que Gao Xingjian est traduit et se fait connaître avec
son chef-d’œuvre, La Montagne de l’âme (1990). Cinq ans plus tard, Andreï
Makine, avec Le Testament français (1995), obtient le prix Goncourt. Mais les
années 2000 sont aussi les années de phénomènes de grande ampleur, de diffu‐
sion de livres en masse, Dan Brown, Da Vinci Code (2003), des grands best-sel‐
lers, J.K. Rowling, Harry Potter (1997-2007), des auteurs prolifiques, Amélie
Nothomb, Marc Levy, d’une littérature du sexe au féminin, Virginie Des‐
pentes, Catherine Millet pour ne citer qu’elles.
Bien que Gracq ait « jugé contre nature », dans La Littérature à l’estomac2, le
fait d’associer le nom de Sartre à celui de Camus, c’est pourtant dans un monde
en pleine mutation où venaient de disparaître Valéry, Bernanos, Gide que ces
deux auteurs allaient s’imposer, dans la littérature, par un nouveau système de
pensée : l’existentialisme. C’est pendant la décennie 1940-1950 que l’existentia‐
lisme littéraire se développe avec Sartre et Simone de Beauvoir. Sartre trans‐
pose dans la littérature l’essentiel de ses premiers ouvrages philosophiques :
L’Être et le Néant (1943), L’Existentialisme est un humanisme (1945). La Nausée
(1938) est considéré comme le premier de ces romans existentialistes. « Exis‐
ter » devient un mot clef dans ces années d’après guerre loin de tout idéalisme
trompeur, un message empreint de liberté et d’action. La formule la plus célèbre
qui définit ce courant de pensée est : « L’existence précède l’essence3. » Tout est
ramené à l’humain, le rendant responsable de son sort et de ses actes. Acculé à
l’action, il doit s’engager dans son existence. Dans les œuvres qu’il nous a lais‐
sées, il cherche, selon la formule de Simone de Beauvoir, « à exprimer sous
une forme littéraire des vérités et des sentiments métaphysiques4 ». Les
Mouches, en 1943, mettent en scène l’opposition tragique entre liberté et fatali‐
té. L’Être et le Néant, Huis clos illustrent le rôle de la mauvaise foi dans les rap‐
ports interpersonnels. Entre 1945 et 1949, un cycle de trois romans voit le jour,
Les Chemins de la liberté, qui retracent la vie de plusieurs individus à l’époque
de la Seconde Guerre mondiale. L’auteur, dans une série de pièces de théâtre,
met en scène un de ses drames les plus populaires, Les Mains sales, en 1948, re‐
flétant la notion de liberté à laquelle l’homme est condamné.
◆ Simone de Beauvoir (1908-1986) fait son entrée en scène littéraire avec
L’Invitée (1943), qui marque aussi sa sortie de l’Éducation nationale. Les Man‐
darins, en 1954, qui lui valent le prix Goncourt, se déroulent dans les milieux
intellectuels parisiens et relatent la vie de deux intellectuels, Anne et Henri, qui
vivent leur amour de façon très libre. Le roman est une transposition évidente
du couple Sartre-Beauvoir et de la liaison qu’elle eut avec l’écrivain américain
Nelson Algren. Son essai le plus célèbre, Le Deuxième Sexe5 (1949), marque la
conscience féminine, car, en analysant la condition de la femme, elle analyse
aussi la sienne : « D’où vient que ce monde a toujours appartenu aux hommes et
que seulement aujourd’hui les choses commencent à changer6 ? » Question en‐
core d’actualité. Beauvoir n’a jamais cherché à constituer un système philoso‐
phique dans ses essais. Elle expose ses options pratiques, elle ne se contente pas
d’exprimer une pensée, la pensée se cherche tout au long de son œuvre. Dans
ses autres essais, elle développe les paradoxes de l’homme et de la morale mais
en conciliant la liberté du moi et celle d’autrui : Pour une morale de l’ambiguïté
(1947), Privilèges (1955). Puis elle fixera ses mémoires : Mémoires d’une jeune
fille rangée (1958), Une mort très douce (1964), Tout compte fait (1972). La
mort de Sartre lui inspirera l’un de ses livres les plus émouvants : La Cérémonie
des adieux (1981).
LE THÉÂTRE DE L’ABSURDE
Ce qu’on appelle « nouveau roman » dans les années 1950, ce sont quelques
auteurs comme Alain Robbe-Grillet (1922-2008), Michel Butor, Nathalie
Sarraute, Claude Simon, auteur de La Route des Flandres, en 1960, rattachés
au même éditeur, les Éditions de Minuit de Jérôme Lindon (1925-2001). Jean
Ricardou (né en 1932) et Marguerite Duras (1914-1996) se joignent à eux
plus tard. L’expression « nouveau roman » est due à Émile Henriot qui, dans un
article du Monde, le 22 mai 1957, entendait rendre compte de La Jalousie
d’Alain Robbe-Grillet et de Tropismes de Nathalie Sarraute.
Le « nouveau roman » ne sera jamais une école ou un mouvement, mais il
s’attache entre les années 1950 et 1960 à remettre en question les techniques
principales qui définissent jusqu’alors le genre romanesque. Il se définit comme
un autre roman, ne proposant rien d’autre qu’un roman sans intrigue, sans per‐
sonnage, sans contenu. On tient souvent pour manifeste les livres L’Ère du soup‐
çon (ou Essais sur le roman), en 1956, de Nathalie Sarraute, et Pour un nouveau
roman, en 1963, de Robbe-Grillet. Au moment de sa publication, le premier est
présenté comme le résultat des recherches de l’auteur sur ses propres expéri‐
mentations romanesques. La valeur polémique de l’ouvrage éclate seulement en
1964 lors de sa réédition. Le nouveau roman ne se donne plus d’autre objet que
lui-même : les mécanismes par lesquels il s’engendre. Une fois mis à nu, le ro‐
man raconte le récit de sa propre création. Il est appelé aussi « l’école du re‐
gard » et propose de transmettre une présence, non une signification. Une al‐
liance s’instaure entre ce dernier et les thèses d’une nouvelle critique littéraire
dont les travaux de Roland Barthes sont le centre. Issue des sciences humaines,
tous deux auront pour but commun le décentrement du sujet, une dilution du
sens comme idée que l’engagement de l’écrivain se fait au cœur de l’écriture.
Dans Histoire (1967) de Claude Simon, dans Dans le labyrinthe (1959) de
Robbe-Grillet, les épisodes d’une histoire sont plus difficiles à saisir, il est ardu
d’en rendre compte. Une nouvelle logique s’est installée, celle qui consiste à
abandonner tout lien avec le réel, le vraisemblable. On assiste alors à une com‐
position en rébus, une image appelle une autre image, une scène une autre
scène, aucune intrigue cohérente n’est possible à restituer, comme le Projet pour
une révolution à New York de Robbe-Grillet (1970). Le texte devient ce lieu où
tout discours de la vérité se déconstruit, un lieu où n’existe aucune vérité.
Voici d’autres auteurs qui sont venus tardivement dans le nouveau roman.
◆ Michel Butor (né en 1926), en 1957, inaugure, avec La Modification, le
premier nouveau roman. Comme dans ces autres livres, le roman est composé
de deux romans. L’un réaliste, une intrigue entre trois personnages, la femme, le
mari, la maîtresse, l’autre symbolique qui nous introduit en plein mystère en
nous éloignant du quotidien. Son livre présente un étrange récit autobiogra‐
phique à la deuxième personne du pluriel. L’action principale est racontée au
présent, elle se déroule dans le train lors du trajet Paris-Rome, et alterne
constamment avec les réminiscences du voyageur, racontées au passé. Le récit
échappe ainsi à la monotonie. Tout le livre est une recréation du réel.
◆ Marguerite Duras (1914-1996) n’est pas toujours rangée sous l’étiquette
« nouveau roman », pourtant son écriture la rapproche de ce courant. Elle a tra‐
vaillé sur plusieurs genres, roman, théâtre, cinéma, suscitant parfois de nom‐
breuses polémiques. C’est avec Les Petits Chevaux de Tarquinia (1953), et parti‐
culièrement Moderato Cantabile (1958), qu’elle trouve son style si personnel,
qui cultive l’ambiguïté, l’intuition, l’ellipse. Les décors, les événements sont ré‐
duits au minimum. Le dialogue direct ou indirect y joue un rôle fondamental,
comme dans Le Ravissement de Lol V. Stein, en 1964. Dans le courant des an‐
nées 1980, ses livres deviennent plus autobiographiques, avec L’Amant (1984),
L’Amant de la Chine du Nord (1991).
La Nouvelle Vague du cinéma
Le terme de « nouveau » reste en vogue dans les décennies qui suivent celles du nouveau
roman. Dans le domaine du cinéma la nouveauté est aussi de mise. La Nouvelle Vague
est le fait de jeunes cinéastes : Claude Chabrol, François Truffaut, Godard. Les films de
cette mouvance se caractérisent par le refus de respecter les techniques traditionnelles de
découpage, les réalisateurs incluent de fausses coupes, des arrêts sur image, des bandes
sonores enregistrées en extérieur, comme beaucoup de scènes. Ce fut le cas pour À bout
de souffle (1960) de Godard. Ces techniques ont pour but de créer une distance critique
entre le spectateur et le film. Dans un film classique, le spectateur devait se reconnaître,
ici au contraire, à travers les héros de François Truffaut, Éric Rohmer, Agnès Varda,
Jean Eustache, Jacques Rivette, le personnage central se cherche avant tout lui-même.
Ces réalisateurs vont de pair avec l’arrivée de nouveaux comédiens qui contribuent forte‐
ment à leur diffusion : Jean-Paul Belmondo, Jean-Pierre Léaud, Bernadette Lafont, Jean
Seberg, Anna Karina.
LA NOUVELLE CRITIQUE
Le terme de « nouvelle critique » est utilisé par Raymond Picard dans son
ouvrage daté de 1965, Nouvelle critique ou nouvelle imposture, où il dénonce le
travail de Roland Barthes qui écrivait dans Critique et Vérité : « La spécificité
de la littérature ne peut être postulée qu’à l’intérieur d’une théorie générale des
signes : pour avoir le droit de défendre une lecture immanente de l’œuvre, il faut
savoir ce qu’est la logique, l’histoire, la psychanalyse7. » Cette critique et les
contributions d’autres penseurs prennent le nom de nouvelle critique pour s’op‐
poser à une critique plus académique qui prétend expliquer l’œuvre par l’exté‐
rieur, par autre chose qu’elle-même. Raymond Picard attaquait indifféremment
toutes les critiques : la critique psychanalytique, celle de Charles Mauron, la
critique biographique, la critique sociologique, notamment le structuralisme gé‐
nétique de Lucien Goldmann, la critique structuraliste de Roland Barthes, la
critique phénoménologique de Jean-Pierre Richard et de son équipe. Bien
qu’elles diffèrent toutes, elles ont en commun la recherche du langage. Toutes
rejettent les critiques traditionnelles. Roland Barthes, en 1953, s’était fait remar‐
quer par son ouvrage Le Degré zéro de l’écriture. Il s’inspire de la linguistique
moderne pour étudier le phénomène de la création littéraire. Au cours des dix
années suivantes, de 1954 à 1963, il s’inspire des structuralistes et applique aux
œuvres littéraires une méthode d’analyse qui vise à découvrir « les constantes »
d’une œuvre ainsi que leurs relations significatives. Les travaux sur Michelet et
sur Racine et surtout sur la polémique qui s’ensuit peuvent être considérés
comme l’avènement révélateur de la nouvelle critique. En s’intéressant à l’auteur
de Phèdre et de Bérénice, Barthes cherchait à expliquer l’œuvre de l’intérieur
pour découvrir la structure signifiante du texte, son essence, il cherche à recons‐
tituer une anthropologie racinienne à la fois structurale et analytique. D’autres
critiques n’ont cessé de s’interroger sur la validité du discours de la critique pre‐
nant aussi pour cible les méthodes mêmes de la nouvelle critique : Umberto
Eco (né en 1932), Julia Kristeva par le biais de la sémiotique, l’étude des
signes qui s’intéresse à la manière dont les textes sont structurés et concerne
tous les types de signes ou de symboles.
Les quatre modèles de la critique moderne
– Les structures de la langue constituent une recherche née des travaux du lin‐
guiste Saussure, puis de ceux de Jakobson et de Lévi-Strauss qui permettent à
Barthes, Todorov, de porter l’effort d’analyse sur les structures formelles qui orga‐
nisent le récit et le rendent explicite au niveau du sens.
– Le modèle sociologique et idéologique : l’analyse de l’œuvre la restitue dans son
univers social d’invention et de réception, chez L. Goldmann, G. Lukács, P. Barbéris,
C. Duchet qui formalise le concept de « sociocritique ».
– Le modèle psychanalytique : il se rapproche de la littérature à partir de Freud.
Jacques Lacan ira plus loin. Julia Kristeva définit la sémanalyse, de « sémantique »
et « analyse », étude du signe du point de vue du flux inconscient des pulsions.
– Le formalisme russe : mouvement critique littéraire en cours dans les an‐
nées 1915-1930 en Russie, qui ne sera découvert en France que dans les an‐
nées 1960, selon lequel il faut rompre avec les interprétations esthétiques ou psy‐
chologiques, l’objet de la littérature n’est pas la littérature mais la littéralité représen‐
tée par Tzvetan Todorov (né en 1939). Il permettra l’éclosion de la sémiotique, qui
définit la narratologie, étude des structures littéraires.
Au début du XXe siècle, les romanciers se tournent vers les bas-fonds des
villes. À travers la laideur et la disgrâce morale, ils pensent trouver des effets
dramatiques nouveaux. Marqués par la guerre, ils sont devenus sans illusion sur
la civilisation et la société dans laquelle ils vivent. Ernest Hemingway (1899-
1961) nous montre le désespoir que la guerre cause dans L’Adieu aux armes
(1929). Les activités violentes comme la boisson sont des dérivatifs : Mort dans
l’après-midi (1932). Le Vieil Homme et la mer (1952) est l’histoire d’un homme
déjà brisé qui se bat jusqu’au bout. William Faulkner (1897-1962) obtint le
prix Nobel pour l’œuvre pleine de violence qu’il a laissée. L’anormal côtoie
l’horrible et chacun de ses livres contient une vraie tragédie grecque : Sanc‐
tuaire (1931), L’Intrus (1948). John Dos Passos (1896-1970) montre toute
l’horreur que lui suggère la guerre dans Trois soldats (1921) dont le thème est la
destruction morale de trois jeunes gens par le système militaire. Manhattan
Transfer (1925) donne une peinture des bas-fonds de New York. Gertrude
Stein (1874-1946) a aussi sa place parmi les naturalistes, The Making of Ameri‐
ca (1925). John Steinbeck (1902-1968) est l’homme de la crise de 1929 et
souligne l’exploitation des travailleurs par les grands propriétaires terriens : Les
Raisins de la colère (1939), Des souris et des hommes (1937). Il montre le côté
incontrôlable des passions humaines. Scott Fitzgerald (1896-1940) s’est révélé
être à la fois un romancier satirique, mais aussi d’invention, surtout dans ses
nouvelles. Ses personnages entourés par le luxe, gâtés par la vie matérielle ne
cessent de s’entre-déchirer : Gatsby le Magnifique (1925), Tendre est la nuit
(1934). Pearl Buck (1892-1973) tient une place un peu à part, car elle décrit
les mœurs de la Chine où elle a passé toute sa jeunesse. La crise de 1929 pas‐
sée, l’Amérique se tourne vers la réussite comme centre d’intérêt. Truman Ca‐
pote (1924-1984) a su décrire cette société d’opulence, Petit déjeuner chez Tif‐
fany (1958), et se présente comme le continuateur de Fitzgerald : La Harpe
d’herbes (1951), De sang-froid (1966). Jack Kerouac (1924-1969) décrit des
jeunes déçus de la société qui préfèrent se risquer à l’aventure ou à l’errance :
Sur la route (1957).
Vers les années 1960, se dessine l’école juive de New York, en fait cette re‐
naissance juive n’est le fait que du hasard. Les principaux écrivains sont : Philip
Roth (né en 1933) qui a révélé la littérature juive américaine, avec Portnoy et
son complexe (1969), où il montre la frustration des juifs dans leur vie quoti‐
dienne de citoyens américains. Henry Miller (1891-1980), dans Tropique du
Cancer, 1934, entre en rébellion ouverte contre l’Amérique. Il y gagne une ré‐
putation d’anarchiste, de rebelle et d’écrivain érotique, voire pornographique
avec sa trilogie La Crucifixion en rose (Sexus, Plexus, Nexus). Isaac Bashevis
Singer (1904-1991) est reconnu comme le plus grand écrivain juif de ce siècle.
Aussi s’est-il vu attribuer le prix Nobel en 1978. Sa culture fournit l’essentiel des
sujets de son œuvre. Les sagas juives, La Famille Moskat (1950), l’enseignement
rabbinique lui donnent des sujets de romans, c’est le cas aussi sur le surnaturel,
avec La Corne du bélier (1934). Il existe aussi une littérature noire : Richard
Wright (1908-1960) et James Baldwin (1924-1987). Un autre pays (1962), le
roman de ce dernier, raconte des amours interraciales qui finissent par conduire
les héros à la folie. Ralph Ellison (1914-1994) prend comme thème de ses ro‐
mans la nécessité pour l’homme noir de se faire intégrer dans la société des
Blancs : L’Homme invisible (1952).
PLACE AU THÉÂTRE
Le théâtre ne se développa que récemment, le puritanisme ayant freiné son
apparition. Eugene O’Neill (1888-1953) domine le théâtre américain d’après
guerre. Il peint les émotions – Anna Christie (1920) porte un coup au mythe
matérialiste, Le Grand Dieu Brown (1926) – et traque l’inconscient – Étrange
interlude (1923), Le Deuil sied à Électre (1931). Il obtint le prix Nobel en 1936.
La vision de la société dans les années 1940 est aussi reprise par Tennessee
Williams (1911-1983), avec Un tramway nommé désir (1947), ou Arthur Mil‐
ler (1915-2005), Mort d’un commis voyageur (1949), Les Sorcières de Salem
(1952), ou encore par Edward Albee (né en 1928), Qui a peur de Virginia
Woolf ? (1962). Le Off Broadway est une tentative de jeunes auteurs, en 1945,
pour proposer un répertoire plus large, plus diversifié des pièces d’avant-garde.
Rivalisant avec Broadway, l’expérience se soldera par un échec et le Living
Theatre en 1970 doit capituler. Pourtant le Off Broadway se veut être un théâtre
hors du théâtre fondé par David Shepherd et Paul Sills (1927-2008), dont
l’inspiration est issue du zen ou du mouvement dada. En 1946, Elia Kazan
(1909-1991) et Lee Strasberg (1901-1982) fondent l’Actor’s Studio. Les plus
grands acteurs s’y forment et reçoivent un enseignement dont les principes sont
tirés de la psychanalyse. Le théâtre devient de plus en plus un outil politique de
réflexion et de revendication, protestations contre la guerre au Viêtnam, où des
minorités américaines trouvent leur place. Après 1970, le théâtre se stabilise et
Bob Wilson (né en 1941) lui donne une nouvelle approche en recherchant une
nouvelle dimension à l’espace et au temps.
La poésie et le théâtre au XVIe siècle sont les premiers genres littéraires ex‐
ploités par les missionnaires et les colons. Góngora suscite des imitateurs jus‐
qu’au XVIIIe siècle, époque où règnent la science et la polémique. La France in‐
fluence considérablement les écrivains de cette période, et le Contrat social de
Rousseau figure parmi les œuvres les plus lues. Les journaux apparaissent, sus‐
citant une véritable rénovation littéraire. Le romantisme trouve, avec l’écrivain
poète Esteban Echeverria (1805-1851), adepte de Saint-Simon, une nouvelle
forme, celle de romantisme social. À partir de 1845, des romans historiques in‐
fluencés par ceux de Walter Scott ou d’Eugène Sue prolifèrent. Mais très vite,
les écrivains prennent pour sujet d’étude les Indiens. Ainsi, Manuel de Jesús
Galván (1834-1910) et León Juan Mera (1832-1894) situent invariablement
leur action lors de la période coloniale. L’influence européenne se fait aussi par
l’immigration et traduit les mêmes préoccupations que l’Europe à la fin du der‐
nier tiers du XIXe siècle. Eugenio Cambaceres (1843-1888) est tenu comme
l’introducteur du roman réaliste avec Le Sang (1887). Isamelillo (1882), du Cu‐
bain José Martí (1853-1895), est considéré comme la première œuvre du mo‐
dernisme qui gagne bientôt toute l’Amérique latine jusqu’à prendre l’apparence
d’un nouveau créolisme. En effet, la réaction contre ce mouvement ne se fait
pas attendre, car on lui reproche d’être bien éloigné des véritables thèmes hispa‐
no-américains.
Gabriela Mistral (1889-1957) sera la première femme de cette époque à re‐
cevoir le prix Nobel en 1945 et à développer les nouvelles tendances : Sonnets
de la mort (1914). Deux noms dominent le début du XXe siècle : César Vallejo
(1892-1938), avec Les Hérauts noirs (1918), et Pablo Neruda (1904-1973), Né
pour naître (1996), Chant général (1984). Mais un autre domaine de la littéra‐
ture est bientôt exploité : le fantastique. Adolfo Bioy Casares (1914-1999) et
L’Invention de Morel (1940), Jorge Luis Borges (1899-1988), avec Fictions
(1944), Histoire universelle de l’infâmie (1935), nous plongent dans un monde
bizarre où fantastique et réalité se complètent savamment. La littérature hispa‐
no-américaine se définit surtout par son extrême variété, essais consacrés à
l’idéologie du pays, ou à l’histoire, à la philosophie : Alejandro Korn (1860-
1936) avec Influences philosophiques dans l’évolution nationale (1912).
Notes
1. À ce sujet, voir Florence Braunstein, « Mémoires d’Hadrien », in Encyclopædia Universalis.
2. Julien Gracq, La Littérature à l’estomac, Paris, José Corti, 1950.
3. Jean-Paul Sartre, L’existentialisme est un humanisme, Paris, Gallimard, 1996, p. 26.
4. Simone de Beauvoir, La Force de l’âge [1960], Paris, Gallimard, p. 326.
5. À ce sujet, voir Florence Braunstein, « Le Deuxième Sexe », in Encyclopædia Universalis.
6. Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe, Paris, Gallimard, 1949.
7. Roland Barthes, Critique et Vérité, Paris, Le Seuil, 1966, p. 37.
8. Les principaux représentants de cette tendance sont F. Wedekind (1864-1918), R. Schickele (1883-
1940), E. Stadler (1883-1914), G. Benn (1886-1956), G. Heym (1887-1912), G. Trakl (1887-1914),
B. Brecht (1898-1956).
CHAPITRE XXXIV
L’École de Francfort est née à la suite d’un constat, la nécessité d’une institu‐
tion permanente vouée à l’étude des phénomènes sociaux, en 1923, avec la fon‐
dation de l’Institut für Sozialforschung, l’Institut de recherches sociales. L’école
sera fermée en 1933, lors de l’arrivée des nazis au pouvoir, et ses principaux
membres seront obligés de s’exiler. Il s’agit d’Erich Fromm (1900-1980), Max
Horkheimer (1895-1973), Theodor Adorno (1903-1969), Herbert Marcuse
(1898-1979), Ernst Bloch (1885-1977) et Jürgen Habermas (né en 1929) qui
feront partie de la seconde génération de l’école, et ce dernier contribuera à la
fonder par un réinvestissement de la théorie critique. Ce qui unit ces chercheurs
est un choix politique et une attitude philosophique commune. Tous marxistes,
ils sont intéressés avant tout par le rôle de la raison dans l’extension de la domi‐
nation au cours du XXe siècle. L’École de Francfort est connue aussi pour s’être
intéressée à l’apparition de la culture de masse dans les sociétés modernes. Pour
rentabiliser une pensée critique, il faut s’appuyer sur les recherches menées en
économie, sociologie, psychologie. Max Horkheimer dans Théorie tradition‐
nelle et théorie critique, en 1937, oppose théorie traditionnelle, classique, à
« une théorie critique » qui doit révéler les contradictions et transformations de
la société. Horkheimer et Adorno partiront du postulat selon lequel la raison
peut aider l’émancipation. La philosophie des Lumières en avait fait un outil de
savoir et en avait fait son arme pour détruire les mythes. Mais la bourgeoisie,
elle, l’a uniquement mise au service des intérêts privés. D’autres questionne‐
ments concernent le fait de savoir si le fascisme peut s’expliquer par une logique
économique capitaliste.
Theodor Adorno (1903-1969) ne fut pas que philosophe, il fut aussi musi‐
cien, musicologue, sociologue, critique littéraire. Contre le primat de la raison, il
met en avant une dialectique négative, car, à la différence de la critique hégé‐
lienne qui tend vers la synthèse du sujet et de l’objet dont les oppositions sont
systématiquement surmontées, elle se maintient dans l’opposition du sujet et de
l’objet où le sujet amène son altérité à la parole, ne cherchant pas à maîtriser
l’objet. Cette approche de la dialectique restera constamment au centre de
l’œuvre d’Adorno. Dans sa Dialectique négative, en 1966, sa pensée s’oppose à
l’idéalisme allemand qui plaçait en position de supériorité un sujet rationnel, ac‐
tif par rapport à un objet passif. Il s’oppose au postulat kantien de l’inaccessibi‐
lité radicale de la « chose en soi » qui enferme le sujet en lui-même. Il propose,
en fait, une conception de la vérité historique, exigeant que le sujet y ait une
part active, en exerçant sa liberté critique face à l’état des choses. La dialectique
négative est le résultat du primat de l’objet et de cette part à jouer par le sujet.
Dans sa Théorie esthétique, en 1970, deux idées se distinguent : celle que la na‐
ture de l’art se manifeste par la contemplation d’œuvres d’art particulières, et que
celles-ci ont un mode particulier d’être, une identité spécifique.
Il étudiera la dynamique composante de l’art dans trois domaines qui inter‐
fèrent en se modifiant de façon quasi imperceptible : l’œuvre d’art, la réception,
la production. L’œuvre d’art, selon Adorno, présente un état paradoxal, quelque
chose qui existe en devenant. Son essence est la tension. Il montre que l’art est
un espace de liberté, de créativité dans un monde technocratique. Le monde de
l’art doit être un lieu d’utopie, un lieu de désir d’un monde libéré. Indissociables
de sa philosophie, sont ses études sur l’art contemporain. Pour lui l’art est bien
plus qu’un simple reflet de la société, l’œuvre révèle la société dans sa structure
et sa forme constitue un contenu idéologique et social. Ses monographies sur
Beethoven, Mahler, et bon nombre d’autres mettent en évidence la manière dont
les techniques de composition, la texture d’une œuvre sont le reflet d’une idéo‐
logie du moment. Doutant de la possibilité de bien vivre après Auschwitz, le
philosophe remit en question une re-construction immédiate de la culture. Au‐
schwitz s’imposait comme un échec total de celle-ci. Dans Prismes (1955), Cri‐
tique de la culture et de la société (1949), il déclarait qu’il serait « barbare »
d’écrire des poèmes après le génocide et sous-entendait qu’il fallait tout recons‐
truire, les mots, la littérature mais de façon différente. Il prenait position contre
toute représentation profanatrice, inadéquate qui aurait minimisé la souffrance,
l’horreur donnant un sens à ce qui n’en avait pas.
Herbert Marcuse
Jürgen Habermas
LA PHILOSOPHIE POLITIQUE
Paul Ricœur
LA POSTMODERNITÉ EN PHILOSOPHIE
2. Le structuralisme
L’histoire des sciences humaines au début du XXe siècle est marquée par l’ap‐
parition de deux faits importants : la linguistique se libère de la philologie avec
la publication du Cours de linguistique générale de Ferdinand de Saussure en
1916 ; l’ethnologie moderne se dégage de la méthode historique. Le structura‐
lisme ne se définit pas comme une théorie, mais comme une méthode. À ce
titre, il est un courant de pensée regroupant la linguistique, l’histoire, la psycha‐
nalyse ou l’ethnologie, l’ensemble ne formant pas, en raison de sa diversité, une
doctrine. Il naît de la publication, en 1916, du Cours de linguistique générale de
Ferdinand de Saussure. L’histoire s’en empare avec les travaux de Fernand
Braudel sur La Méditerranée sous Philippe II (1949), et de Georges Dumézil
avec Jupiter, Mars, Quirinus (1941-1948).
Mais la révélation du structuralisme au grand public est due à l’ethnologie,
quand Claude Lévi-Strauss publie en 1949 Les Structures élémentaires de la pa‐
renté. C’est le début de l’âge d’or de ce courant de pensée, illustré par Michel
Foucault dans Les Mots et les Choses (1966), ou Roland Barthes avec Le Degré
zéro de l’écriture (1953).
Le structuralisme repose sur une interrogation du statut du sujet et de sa li‐
berté. Comment, en effet, le concevoir comme libre, s’il dépend de structures ?
Peut-il encore dans ces conditions produire de l’histoire ? C’est l’objet de la que‐
relle opposant les structuralistes à Sartre, qui considérait l’homme comme apte
à dépasser les structures pour créer l’histoire. Les sciences humaines permettent
alors une approche du sujet, mais ne doivent pas servir à l’enfermer, comme le
montrent les événements de mai 1968 qui le replacent au centre de toute ré‐
flexion.
Le structuralisme offrit les moyens d’un outil bien pensé, mais dont l’utilisa‐
tion fut rapidement limitée. S’il souleva autant de critiques à son encontre, c’est
qu’il lui fut reproché la même chose qu’au raisonnement analogique, de mettre
face à face, de rapprocher, deux mots, deux comparaisons difficiles à coordon‐
ner. D’autant plus qu’aujourd’hui, l’apport des sciences humaines conjointement
à celui des sciences exactes nous a offert un enchevêtrement d’informations, is‐
sues de relations, de liaisons sociales, culturelles, excluant la mise en évidence,
même relative, d’un point de départ.
Dépouiller le subjectivisme
LE STRUCTURALISME ÉLARGI
Tout comme pour les musiques savantes, développées au XXe siècle en réac‐
tion aux règles de l’expression classique pour les approfondir ou les dépasser, les
musiques populaires connaissent un remarquable développement. Puisant ses
sources dans la musique des esclaves, dans les plantations du sud des États-Unis,
et étroitement lié à l’improvisation, le jazz connaît un essor important au début
du XXe siècle grâce à une succession d’artistes talentueux : Jelly Roll Morton
(v. 1885-1941), pianiste faisant le lien entre ragtime et jazz dans les an‐
nées 1920, Duke Ellington (1899-1974), pianiste et chef d’orchestre, et Django
Reinhardt (1910-1953), guitariste gitan, premier grand musicien de jazz euro‐
péen, font partie des pionners. Louis Armstrong (1901-1971) fut un chanteur
et un trompettiste exceptionnel. Count Basie (1904-1984), pianiste, composi‐
teur et chef de big band (grand orchestre), est à l’origine du « swing » dans les
années 1930 et 1940. Dizzy Gillespie (1917-1993), trompettiste, est un pion‐
nier de « be-bop », dont Charlie « Bird » Parker (1920-1955), saxophoniste
alto, sera considéré comme le maître incontesté. Le contrebassiste Charlie
Mingus (1922-1979) allie le jazz moderne et le blues, tandis que le trompettiste
Miles Davis (1926-1991) est l’initiateur de la fusion jazz/rock des années 1960.
John Coltrane (1926-1967), au saxo ténor et au saxo alto, et Oscar Peterson
(1925-2007), au piano, sont réputés pour leurs improvisations. Chanteuse de
blues, Bessie Smith (1894-1937) exerça une forte influence sur le jazz et la
pop. Dans le domaine du jazz, Billie Holiday (1915-1959) fut à son zénith dans
les années 1930 et 1940. Le jazz contemporain est traversé de nombreux cou‐
rants, d’influences subtiles qui lui donnent dans chaque registre une coloration
propre. Ainsi l’acid jazz ou groove jazz développé depuis les années 1990 se
fond dans la soul, musique populaire afro-américaine dérivée du gospel, qui
s’adresse à l’âme, le funk syncopé illustré par Michael Jackson (1958-2009), le
disco, musique de danse en discothèque, le hip-hop ou rap. Le rock tire son
origine d’un compromis entre la country music, musique populaire américaine,
le bluegrass, du nom des Blue Grass Boys, le premier groupe de Bill Monroe
(1916-1986), et le rhythm and blues, l’une des formes d’expression du jazz.
Dans les années 1950, il est vulgarisé aux États-Unis sous le nom de rock and
roll (titre d’une chanson de 1934 ; littéralement, « balance et roule »). Avant
l’avènement des Beatles et des Rolling Stones, le plus grand rocker de l’époque
est sans conteste Elvis Presley (1935-1977), alias le « King ». Il évolue dans
des tonalités plus lourdes avec le hard rock qui donne une place prépondérante
aux riffs de guitare et à la batterie. Les groupes emblématiques britanniques de
ce courant sont Led Zeppelin et Deep Purple. Artiste unique, inclassable tant
son talent se prête à des jeux de guitare a priori inimaginables à tout autre, Jim‐
my Hendrix (1942-1970) pratique un rock psychédélique, hypnotique, joué
sous l’influence de modificateurs de conscience. Le rock se poursuit dans le
mouvement punk et l’emblématique groupe des Sex Pistols ou dans le heavy
metal, forte accélération du tempo, accentuation de la sonorité pour la rendre
agressive, celui du groupe Metallica. Le style disco a été indiscutablement lan‐
cé par le film de John Badham (né en 1939), La Fièvre du samedi soir, qui a
révélé John Travolta. Puis le succès de Grease a contribué à imposer le genre,
qui évolue peu à peu vers le funk, c’est-à-dire une interprétation sensuelle de la
musique populaire. Le mouvement rap se rattache à celui du hip hop (de l’an‐
glais to be hip, « être dans le vent », et to hop, « sautiller »). La rythmique en est
fortement saccadée. Rap, en anglais, signifie « frapper ». Le premier tube est
enregistré à New York sous le titre « Rapper’s Delight », en septembre 1979,
par le Sugar Hill Gang. Le rythme est scandé, volontairement syncopé. Ses
origines africaines évoquent le dit du griot mais il ne s’agit plus d’un conte. Les
phrases enchaînées frappent, clament la révolte. Le reggae dérivé du calypso,
musique de carnaval des Antilles, s’impose comme une musique jamaïquaine
des années 1940, découverte en Occident en 1974, lors de la reprise d’un titre
de Bob Marley (1945-1981), « I Shot the Sheriff ». Le reggae évolue sous di‐
verses formes, dont le dub reggae ou dub poetry aux textes plus engagés, ou le
nu roots ou new roots attaché à des écrits plus culturels, qui se détachent des
thèmes traditionnels du sexe et de la violence. La techno est née à Chicago,
mélange de synthétiseur et de musiques à rythme diffusés simultanément. Elle
est sans cesse remise à jour grâce au détournement d’autres musiques. Les prin‐
cipaux groupes français sont St Germain, Funk Mob et Dimitri from Paris.
Notes
1. Christian Delacampagne, Histoire de la philosophie au XXe siècle, Paris, Le Seuil, 2000.
2. Olivier Revault d’Allonnes, « Témoins de Sartre », Les Temps Modernes, 45e année, no 531 à 533, oc‐
tobre-décembre 1990, p. 83.
3. Alain Renaut, La Philosophie, Paris, Odile Jacob, 2006, p. 56.
4. In Éthique et Infini, Paris, Livre de Poche, « Biblio », 2000, p. 95.
5. Paul Ricœur, Le Conflit des interprétations : essai d’herméneutique, Paris, Le Seuil, 1969, p. 311.
6. J.-F. Lyotard, La Pintura del Segreto Nel’Epoca Postmoderna, Baruchello, Milan, Feltrineli, 1982.
7. J. Derrida, La Différance, conférence prononcée à la Société française de philosophie, le 27 janvier
1968, publiée simultanément dans le Bulletin de la société française de philosophie (juillet-septembre
1968) et dans Théorie d’ensemble (« Tel Quel »), Paris, Le Seuil, 1968.
8. François Fourquet, L’Idéal historique, Paris, UGE, « 10/18 », 1973, p. 136.
9. Jean Piaget, Le Structuralisme, Paris, Puf, « Que sais-je ? », 2007, p. 5.
10. Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Paris, Plon, p. 205.
11. Claude Lévi-Strauss, Les Structures élémentaires de la parenté, Berlin/New York, Mouton de Gruy‐
ter, 2002, p. 309.
12. Claude Lévi-Strauss, Parole donnée, Paris, Plon, p. 83.
13. Claude Lévi-Strauss, Mythologiques, Paris, Plon, 1964-1971.
14. À ce sujet, voir Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, op. cit., p. 463.
15. Claude Lévi-Strauss, Anthropologie structurale, Paris, Plon, p. 255.
16. Michel Foucault, Les Mots et les Choses. Une archéologie des sciences humaines, Paris, Gallimard,
« Bibliothèque des sciences humaines », 1966.
En route pour le XXIe siècle…
Le Proche-Orient
La « question du Proche-Orient » naît avec la Première Guerre mondiale. En
1915, les Britanniques promettent aux Arabes, alors sous souveraineté turque,
de reconnaître leur indépendance et de garantir l’inviolabilité de leurs lieux
saints. Peu après, la déclaration Balfour de 1917 annonce la possible création
d’un « foyer national juif » en Palestine. Le terme, très flou, il ne s’agit pas d’un
État juif, autorise toutes les interprétations. Par les accords de San Remo, en
1920, le Royaume-Uni obtient mandat sur la Palestine. L’avenir de la région dé‐
pend des promesses britanniques faites à la fois aux juifs et aux Arabes. Une
Agence juive représente en Palestine les intérêts de la communauté auprès des
autorités britanniques. Une assemblée est élue, chaque localité juive a son
conseil municipal. Une armée clandestine, la Haganah, est créée. En 1939, les
juifs forment 30 % de la population de la Palestine. Les heurts entre populations
arabes et juives se multiplient, sans réaction britannique, hormis la publication
de deux « livres blancs » de recommandations qui ne sont suivies d’aucun effet.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, des groupes sionistes s’en prennent aux
forces britanniques.
L’ÉTAT D’ISRAËL
L’Almageste
De quoi l’univers est-il fait ?
La structure de la Terre
Les différents âges du Paléolithique (– 7 Ma à – 10 000 ans)
Les grandes glaciations de l’ère quaternaire
Traces de pas et bipédie
Des roses trémières et autres fleurs dans les sépultures
Pégase à Solutré ?
Les questions qui fâchent : un calendrier sur os ?
La tête dans le plâtre
Évolution du Néolithique en Europe
Un calendrier avec des poignards en guise d’aiguilles pour le mont Bégo
Les périodes de l’âge du fer
Ça vous rappelle quelque chose, l’éternel retour ?
Noms de dieux
Un prince pieux : Gudea de Lagash (v. 2141-v. 2122 av. J.-C.)
L’argent au temps d’Hammourabi
Architecture monumentale : la ziggourat de Tchogha-Zanbil
Les grands textes funéraires égyptiens
Les Mésaventures d’Ounamon
La nature de Dieu
Le Yoga
Le svastika
Une armée en terre cuite
Un mythe fondateur
Principales cultures précolombiennes
La fin de Mycènes
L’Acropole et le Parthénon
Le carré de Polybe
Le mythe d’Orphée
Le Colisée
Les thermes de Caracalla
Boèce et L’Institution musicale (De institutione musica)
Les principales sectes juives à l’époque d’Hérode
L’Évangile de Judas
Les termes de l’érémitisme
Jeanne d’Arc
Lieux les plus saints de l’islam : le Dôme du Rocher et la Kaaba
Les codex
La semaine aztèque
Enjeux de la Renaissance
Principales écoles artistiques italiennes
Lettres et troubles politiques
Les 95 thèses (1517)
La querelle des Anciens et des Modernes : 1687-1715
Plusieurs caractéristiques définissent le XVIIIe siècle
Constitution du 24 juin 1793
Tableau extrait des 56 principales dates de l’histoire de la franc-maçonnerie
Les théoriciens de l’art au XVIIIe siècle
Question de style
La guerre de l’oreille de Jenkins (1739-1748)
La comédie de Bayonne (mai 1808)
Les principales caractéristiques artistiques de la peinture académique
Les principales caractéristiques artistiques de l’impressionnisme
Les théories de Chevreul
Impressionnistes entre eux
Le japonisme
L’idéologie selon Karl Marx
L’idéologie selon Friedrich Engels
Le réalisme allemand
Le théâtre d’Ibsen
La seconde guerre d’indépendance
La guerre de Sécession en quelques dates essentielles
La Grosse Bertha
Gabriele D’Annunzio
Littérature : Tagore
Le cubisme en résumé
L’art abstrait en résumé
Différence entre le constructivisme et le suprématisme
L’École de Paris
Le dadaïsme en résumé
Le surréalisme en résumé
Les grandes caractéristiques du premier XXe siècle littéraire
Bobby Sands
Le tsar Boris
Les nouvelles problématiques artistiques et l’indianité
Courants d’art
La Nouvelle Vague du cinéma
Les quatre modèles de la critique moderne
Caractéristiques du postmoderne
Index des noms
18 Lapin de Copán 1 2 3 4 5
Aaron 1 2 3
Abadie, Paul 1
Abbas 1
‘Abd al-Mālik 1 2 3 4
‘Abd al-Mu’min 1
‘Abd al-Raḥmān III 1
‘Abd al-Raḥmān 1
Abdias 1 2 3
Abel 1
Abel (Australopithèque) 1 2
Abélard, Pierre 1
Abetz, Otto von 1 2
Abraham 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
Absalon 1
Abu al-Aswad al-Du’ali 1
Abū al-’Atahiyah 1
Abū Bakr 1 2
Abu es-Haq es-Saheli 1
Abū ḥanīfa 1
Abū Nuwās 1
Abū Yūsuf Yalgib 1
Acacius 1
Acamapichtli 1
Achab 1 2
Achard, Marcel 1
Achille 1 2 3 4
Achoris 1
Adad 1
Adad-Nirāri II 1 2
Adam 1 2
Adam, James 1
Adam, Robert 1 2
Adam de la Halle 1 2
Adami, Valerio 1 2
Adamov, Arthur 1
Adams, John 1
Adams, Samuel 1
Adenauer, Konrad 1 2
Aditi 1
Adler, Dankmar 1
Adolphe de Nassau 1
Adonis (Ali Ahmad Sa’id) 1
Adorno, Theodor W. 1 2 3 4 5 6 7
Adrien Ier 1
Aegidius 1 2
Aelders, Etta Palm d’ 1 2 3 4
Aethelbert 1
Aether 1
Aetius 1 2 3 4 5
Affre, monseigneur 1
Agaja 1
Agamemnon 1 2
Agapet II 1 2
Agar 1
Agasias 1
Agésandros 1
Aggée 1 2 3
Agilulf 1
Agnès d’Aquitaine 1
Agni 1 2 3
Agricola 1
Agrippa, Cornelius 1
Ahiram 1
Ahmed Shah Abdali 1
Ahmôsis Ier 1
Ah Mun 1
Ahriman 1 2
Ahura Mazda 1 2 3 4 5 6 7 8
Ai (ou Zhaoxuan) 1
Aïcha 1 2
Ailly, Pierre d’ 1
Aistolf 1 2 3
Ai Ts’ing 1
Akadêmos 1
Akalamdug 1
Akamatsu 1
Akamatsu Sadanori 1
Akbar le Grand 1 2
Akihito 1 2
Alain-Fournier 1
Al-Akhṭal 1
Al-Amīn 1
Alard d’Amsterdam 1
Alaric Ier 1 2 3 4
Al-Balādhurī 1
Albee, Edward 1
Alberoni, Jules 1 2
Albert, Alexandre Martin 1
Albert, Marcelin 1 2 3
Albert-Birot, Pierre 1
Albert de Saxe-Cobourg-Gotha 1
Alberti, Leon Battista 1 2 3 4 5 6 7 8
Albert Ier de Habsbourg 1
Albert II de Habsbourg 1
Albertine 1
Albert le Grand 1 2 3 4 5 6
Albornoz, Gil de 1
Al Bustani, Butrus 1
Alcalá-Zamora, Niceto 1
Alcée de Mytilène 1
Al-Chāfi’ī 1
Alcinoos 1 2
Alcmène 1
Alcméon 1
Alcuin 1 2 3 4 5 6 7 8
Alechinsky, Pierre 1
Alenza, Leonardo 1
Alexandre, Arsène 1
Alexandre Ier de Russie 1 2 3 4 5 6
Alexandre II de Russie 1 2 3
Alexandre III (pape) 1
Alexandre III de Russie 1 2 3 4
Alexandre IV (pape) 1
Alexandre le Grand 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
23 24
Alexandre Nevski 1 2
Alexandre VII Chigi 1 2
Alexis, Paul 1
Alexis Ier Comnène 1 2 3 4
Alexis Ier de Russie 1 2
Alexis II 1
Alexis III 1 2
Alexis IV 1 2
Alexis V 1 2
Al-Fārābī 1 2
Al-Farazdaq 1
Alfieri, Vittorio 1
Alfonso Ier 1 2
Alfred le Grand 1 2 3 4 5 6
Al-Ghazālī 1
Algren, Nelson 1
Al-ḥasan ben Kannūn 1
Ali 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Aliénor d’Aquitaine 1 2
Al Khattabi, Abdelkrim 1 2
Al-Khattabi, Mohamed ben Abdelkrim 1
Al-Kindī 1 2
Alloway, Lawrence 1 2
Al Malaïka, Nazik 1
Al-Manṣūr 1
Al-Ma’mūn 1
Almeida, Luis de 1
Almodóvar, Pedro 1
Al-Mutawakkil 1
Alp Arslan 1
Alphand, Jean-Charles 1
Alphonse V d’Aragon (le Magnanime) 1 2 3
Alphonse VI 1
Alphonse XII d’Espagne 1 2 3 4
Alphonse XIII d’Espagne 1 2 3 4 5 6
Alphonse X le Sage (ou le Savant) 1 2
Al-Saffāh 1
Altdorfer, Albrecht 1
Althusser, Louis 1 2 3 4 5 6
Alvarado, Pedro de 1
Álvarez de Tolède, Fernando (duc d’Albe) 1
Al-Walīd 1
Alyatte 1
Al Yaziyi, Nasif 1
Amadis 1
Amadou Sekou 1
Amalthée 1
Amanishakheto 1
Amasis 1
Amaterasu 1 2 3
Amato, Giuliano 1
Ambigatos 1
Ambroise de Milan 1 2 3
Amda Sion Ier 1 2
Amédée de Savoie 1
Amédée Ier d’Espagne 1
Amenemhat Ier 1 2 3
Amenemhat II 1
Aménophis II 1
Aménophis III 1 2 3 4 5 6 7
Aménophis IV (Akhenaton) 1 2 3 4 5 6 7 8
Amesemi 1
Amitābha 1 2 3
Ammonios Saccas 1 2
Amnon 1
Amon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Amonherkopsef 1
Amos 1 2 3 4
Ampère, André-Marie 1
Amyntas III 1
Amytis 1
An 1 2
Anacréon de Téos 1 2
Anafesto, Paoluccio 1
Anastase Ier 1 2 3
Anath 1
Anaxagore 1 2 3 4
Anaximandre 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Anaximène 1 2
Andersen, Hans Christian 1
Andocide 1
André, Émile 1
Andrea del Castagno 1 2 3
Andrea del Sarto 1 2 3
Andreas de Caryste 1
Andreotti, Giulio 1
Andronic Ier 1 2
Andronic III 1
Andropov, Youri 1 2 3 4
Angilbert 1 2 3
Angrand, Charles 1
Angroboba 1
Anguier, François 1
Aniko 1
Ankhesenmeriré II 1
Anna 1
Anne Boleyn 1 2
Anne de Beaujeu 1
Anne de Bretagne 1 2
Anne de France 1
Anne de Grande-Bretagne 1 2 3
Anne d’Autriche 1 2 3 4 5 6 7
Anne Geneviève de Bourbon-Condé 1
Anne Ire de Russie 1
Annen 1
Anno de Cologne 1
Anouilh, Jean 1
Antelme, Robert 1
Anthémios de Tralles 1
Antigone 1
Antinoüs 1 2
Antiochos Ier 1 2
Antiochos IV 1 2
Antipater de Tarse 1
Antiphon 1
Antisthène 1
Antoine, André 1
Antokolski, Mark 1
Antonin le Pieux 1 2 3 4
Antonio Ier du Kongo 1
Anu 1
Apademak 1 2
Apel, Karl-Otto 1
Aphrodite 1 2 3
Apia 1
Apis 1 2
Aplu 1
Apollinaire, Guillaume 1 2 3 4 5 6 7 8
Apollodore de Damas 1
Apollon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Apollonios 1
Apollonius de Perga 1
Apollonius de Rhodes 1 2
Apollonius Molon 1
Appel, Karel 1 2
Appiani, Andrea 1
Apulée 1 2 3
Arafat, Yasser 1 2
Arago, François 1 2
Aragon, Louis 1 2 3 4 5 6 7
Aratos de Soles 1
Arcadius 1 2 3 4
Arcelin, Adrien 1 2
Arcésilas 1 2 3 4
Archiloque 1 2
Archimède 1 2 3 4 5 6
Archipenko, Alexander 1 2 3
Arcimboldo, Giuseppe 1 2 3 4
Ardachêr Ier 1
Arendt, Hannah 1 2 3 4
Arès 1 2
Argès 1
Argounov, Ivan 1
Arioste, l’ 1 2 3
Aristarque de Samos 1
Aristophane 1
Aristote 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51
52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67
Arius 1 2 3 4 5 6 7
Arjuna 1 2 3
Arman 1 2 3 4 5 6
Armand de Bourbon (prince de Conti) 1
Armstrong, Louis 1
Arnaud de Brescia 1
Arnauld, Angélique 1 2
Arnauld, Antoine (le Grand Arnauld) 1 2 3 4
Aron, Raymond 1 2 3 4 5
Arp, Hans 1 2 3 4 5 6 7
Artaban V 1
Artaud, Antonin 1 2 3 4 5
Artaxerxès Ier 1
Artaxerxès II 1
Artaxerxès III 1
Artémis 1 2 3
Arthur 1 2 3 4
Arthur Tudor 1 2
Artimpaasa 1
Asai Chu 1
Asam, Cosmas-Damian 1
Asam, Egid Quirin 1
Asclépios 1 2 3 4
Asher 1
Ashera 1
Ashikaga Takauji 1 2 3
Ashikaga Yoshiaki 1
Ashikaga Yoshimitsu 1 2
Ashoka 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Assur 1 2 3 4 5
Assurbanipal 1
Astarté 1 2
Astier de La Vigerie, Emmanuel d’ 1
Astyage 1 2 3
Atahualpa 1 2 3 4 5 6
Athalie 1 2 3
Athanadore 1
Athanase d’Alexandrie 1 2 3 4 5
Atharan 1
Athaulf 1
Athelstan le Glorieux 1
Athéna 1 2 3 4 5 6 7 8
Atlas 1
Aton 1 2 3 4 5
Atrée 1
Attale Ier 1
Attila 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Attlee, Clement 1 2 3 4 5
Aubigné, Théodore Agrippa d’ 1 2 3
Aubrac, Lucie 1 2 3 4 5 6
Aubrac, Raymond 1 2 3
Audran, Claude 1
Aue, Hartmann von 1
Auenbrugger, Leopold 1
Auguste 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
Augustin de Cantorbéry 1 2
Auquetin, Louis 1
Aurangzeb 1 2 3
Aurélien 1 2
Aurengzeb 1
Aurier, Georges-Albert 1
Aurore 1
Austen, Jane 1
Auster, Paul 1
Austin, John 1 2
Authari 1
Averroès 1 2 3 4 5 6
Avicenne 1 2 3 4
Avvakum, Petrovitch 1
Ay 1
Aybak 1
Ayrault, Jean-Marc 1
Azaña, Manuel 1
Aznar, José Maria 1
Azraïl (archange) 1
Ānanda 1
Āryabhaṭṭa 1
Ātreya Punarvasu 1
Baal 1 2 3 4 5 6 7
Baaltis 1
Baal Zebub 1
Babel, Isaac 1
Babeuf, Gracchus 1 2 3 4 5
Babrius 1
Bābur 1 2 3 4 5 6 7 8
Baccani, Gaetano 1
Bacchus 1 2 3 4 5
Bacchylide 1
Bach, Jean-Sébastien 1
Bachelard, Gaston 1 2 3 4 5
Bachofen, Johann Jakob 1
Bacon, Francis (peintre) 1 2 3
Bacon, Francis (philosophe) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Bacon, Roger 1 2 3 4 5 6
Badham, John 1
Bahadur Shah 1
Bahadur Shah Zafar 1
Baïf, Jean Antoine de 1 2
Bailly, Jean Sylvain 1 2
Bajenov, Vassili 1
Baki 1
Balakirev, Mili Alexeïevitch 1
Balban 1
Balbo, Italo 1
Baldr 1 2 3 4 5 6 7
Baldung, Hans 1
Baldwin, James 1
Baldwin, Stanley 1 2 3 4
Balfour, Arthur 1
Ball, Hugo 1
Balladur, Édouard 1 2 3
Baltard, Victor 1 2 3
Balthus 1
Balzac, Honoré de 1 2 3 4 5 6
Banville, Théodore de 1 2 3
Barbari, Jacopo de’ 1
Barbenfouillis 1
Barbéris, Pierre 1
Barbie, Klaus 1
Barnave, Antoine 1 2
Barras, Paul 1
Barre, Raymond 1
Barrès, Maurice 1 2
Barry, comtesse du 1 2
Barsbay 1
Barth, John 1
Barthélemy, Jean-Jacques 1
Barthes, Roland 1 2 3 4 5 6 7 8
Barthez, Paul Joseph 1 2
Bartók, Béla 1
Bartolomeo, Fra 1
Bartsch, Adam von 1
Bashō, Matsuo 1 2 3 4 5
Basie, Count 1
Basile Ier 1 2 3 4
Basile II 1 2
Basile le Grand 1 2
Basquiat, Jean-Michel 1 2
Bassani, Giorgio 1
Bastet 1 2 3
Bastian, Adolf 1
Bastien-Thiry, Jean-Marie 1
Bataille, Georges 1
Batū 1
Baudelaire, Charles 1 2 3 4 5 6 7 8
Baudouin Ier (Baudouin IX de Flandre) 1 2
Baudouin Ier (roi de Jérusalem) 1
Baudouin II de Courtenay 1 2
Baudrillard, Jean 1 2 3
Baumgarten, Alexander Gottlieb 1
Bayazid Ier 1 2 3 4 5 6 7
Bayazid II le Juste 1 2
Baybars 1
Bayle, Pierre 1
Bazaine, Jean 1
Bazille, Frédéric 1 2 3 4
Béatrice 1 2 3
Beatus 1 2
Beaufort, Margaret 1
Beaufret, Jean 1
Beaumarchais, Eugène de 1
Beaumarchais, Pierre-Augustin Caron de 1 2
Beaumont, Élie de 1 2
Beauvoir, Simone de 1 2 3 4 5
Beccaria, Cesare Bonesana de 1
Becket, Thomas 1 2 3 4
Beckett, Samuel 1 2 3 4 5
Bécquer, Gustavo Adolfo 1
Bède le Vénérable 1 2 3 4
Beecher-Stowe, Harriet 1 2
Beethoven, Ludwig van 1 2 3 4
Bégoé 1
Behanzin 1 2 3
Bélanger, François Joseph 1
Belenos 1 2
Belgrand, Eugène 1
Bélisaire 1 2 3
Belleau, Rémi 1
Bellini, Gentile 1
Bellini, Giovanni 1 2 3 4 5
Bellini, Jacopo 1 2
Bellini, Vincenzo 1
Bellmer, Hans 1
Bello, Muhamad 1
Bellori, Giovan Pietro 1
Belmondo, Jean-Paul 1
Belzébuth 1
Ben Ali, Zine el-Abidine 1
Benet, Juan 1
Ben Gourion, David 1
Benjamin 1 2 3 4
Benjamin, Walter 1
Benkei 1
Ben Laden, Oussama 1 2
Benn, Gottfried 1
Bennett, Matthew 1
Benois, Alexandre 1
Benoît de Nursie 1 2 3
Benoît d’Aniane 1
Benoît XIII 1 2
Benoît XV 1 2
Benoît XVI 1
Bentham, Jeremy 1
Benvenuti, Pietro 1
Berain, Jean 1
Berchet, Giovanni 1
Bérégovoy, Pierre 1 2
Bérenger 1
Berenguer, Dámaso 1
Berg, Alban 1
Bergson, Henri 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Béring, Vitus Jonassen 1
Berio, Luciano 1
Berkeley, George 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Berlinguer, Enrico 1
Berlioz, Hector 1
Berlusconi, Silvio 1 2 3 4 5 6
Bernanos, Georges 1
Bernard, Claude 1 2
Bernard, Émile 1
Bernard de Clairvaux 1 2 3 4 5
Bernhardt, Sarah 1
Bernin, le 1 2 3 4 5 6
Bernini, Pietro 1
Bernon 1
Bernstein, Carl 1
Bérose 1
Béroul 1
Berruguete, Alonso 1
Berry, Charles Ferdinand de 1 2
Berthe 1
Berthelot, Marcelin 1 2
Berthollet, Claude Louis 1
Bérulle, Pierre de 1
Bestla 1
Bethsabée 1 2 3 4
Beveridge, William 1 2
Bhanudas 1
Bhāsvkara 1
Bichat, François Xavier 1
Bickerton, Derek 1
Bidault, Georges 1 2
Bion de Smyrne 1
Bioy Casares, Adolfo 1
Birnbaum, Pierre 1
Biron, Ersnt Johann von 1
Bismarck, Otto von 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Biton 1
Björnson, Björnstjerne 1
Blaikie, Thomas 1
Blair, Tony 1 2 3 4 5 6
Blake, Peter 1
Blake, William 1 2
Blanc, Louis 1 2
Blanchot, Maurice 1
Blanqui, Auguste 1 2
Bleda 1 2 3 4
Bloch, Ernst 1
Blondel, Jean-François 1
Blondin, Antoine 1
Blum, Léon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Boabdil 1
Boccace 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Boccioni, Umberto 1 2
Böcklin, Arnold 1
Bodel, Jean 1
Bodin, Jean 1 2
Boèce 1 2 3 4 5 6 7
Boffrand, Gabriel Germain 1
Bofill, Ricardo 1
Boileau, Nicolas 1 2 3 4 5 6 7 8
Boissieu, Alain de 1
Bokassa Ier 1
Böll, Heinrich 1
Bologne, Jean 1
Bomberg, David 1
Bon, Bartolomeo 1
Bon, Giovanni 1
Bonaparte, Jérôme 1
Bonaparte, Lucien 1
Bonaventure 1 2 3
Bondi, Hermann 1
Boniface IX 1
Boniface VIII 1 2 3 4
Bonito Oliva, Achille 1
Bonnard, Pierre 1 2 3 4
Bontemps, Pierre 1
Borges, Jorge Luis 1 2
Borghèse 1
Borgia, César 1 2
Borgianni, Orazio 1
Börne, Ludwig 1
Borodine, Alexandre 1 2
Borromini 1 2
Bosch, Jérôme 1 2 3
Bosio, François-Joseph 1
Bossi, Giuseppe 1
Bossi, Umberto 1
Bossuet, Jacques Bénigne 1 2 3 4 5
Botta, Paul-Émile 1
Botticelli, Sandro 1 2 3 4 5 6 7 8
Bouchardon, Edmé 1 2 3
Boucher, Alfred 1
Boucher, François 1 2 3 4
Boucher de Perthes, Jacques 1 2 3 4 5
Boucicaut, Aristide 1
Bouddha Amida 1 2 3
Bouddha Śakyamuni 1 2
Boudin, Eugène 1 2 3
Bouillé, François Claude de 1
Bouillon, Godefroy de 1
Boukharine, Nikolaï 1
Boulanger, Georges 1 2 3 4 5 6 7
Boulez, Pierre 1
Boulle, André-Charles 1
Boulle, André-Charles II 1
Boulle, Charles-Joseph 1
Boulle, Jean-Philippe 1
Boulle, Pierre Benoît 1
Boullée, Étienne Louis 1
Bourdieu, Pierre 1 2 3
Bourgeois, Léon 1
Bourget, Paul 1
Bourguiba, Habib 1
Bouriard, Nicolas 1
Bousquet, René 1
Bovary, Emma 1
Boyer, Régis 1
Boyle, Robert 1
Bradamante 1
Bragg, Braxton 1
Brahe, Tycho 1 2 3
Brahm, Otto 1
Brahmā 1 2 3 4 5 6
Brahmagupta 1 2
Brahms, Johannes 1
Braidwood, Robert John 1
Bramante 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Brancusi, Constantin 1 2
Brandes, Georg 1
Brandt, Willy 1
Brant, Isabella 1
Brant, Sébastien 1
Braque, Georges 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Brasillach, Robert 1
Brassens, Georges 1
Braudel, Fernand 1 2
Braun, Eva 1
Brecht, Bertolt 1 2 3
Brejnev, Leonid 1 2 3 4 5
Brel, Jacques 1
Brennus 1 2 3 4
Brentano, Franz 1 2
Breton, André 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
Breuil, Henri 1 2 3
Briand, Aristide 1 2 3 4 5 6
Brigit (ou Brigantia) 1
Brigitte (sainte) 1
Briullov, Karl 1
Brod, Max 1
Broglie, Albert (duc de) 1
Brokmeyer, Henry 1
Brontë, Charlotte 1 2
Brontë, Emily 1 2
Brontès 1
Bronzino 1 2
Brook, Peter 1
Broom, Robert 1
Brosse, Salomon de 1
Broussel, Pierre 1
Brown, Brockden 1
Brown, Dan 1
Brown, Gordon 1
Brueghel de Velours 1 2
Brueghel d’Enfer 1
Brueghel l’Ancien, Pieter 1
Brumel, Antoine 1
Brunehaut 1
Brunelleschi, Filippo 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Brunet, Michel 1
Brüning, Heinrich 1
Bruno, Giordano 1 2
Brunschvicg, Léon 1 2 3 4 5
Brutus 1
Bryen, Camille 1
Buber, Martin 1
Buck, Pearl 1
Buckland, William 1
Budé, Guillaume 1 2 3
Buffon, comte de 1 2 3 4 5 6 7 8
Bullant, Jean 1 2
Buñuel, Luis 1
Buoninsegna, Duccio di 1
Buraglio, Pierre 1
Burckhardt, Jacob 1 2
Buren, Daniel 1 2
Burgess, Anthony 1
Burke, Edmund 1 2
Burr 1
Burton, Robert 1
Bush, George Herbert Walker 1 2 3 4
Bush, George W. 1 2
Butler, Samuel 1
Butor, Michel 1 2
Byron, George Gordon 1 2 3
C
Caballero, Fernan 1
Cabanel, Alexandre 1 2
Cabanis, Georges 1
Cabet, Étienne 1 2 3
Cabeza de Vaca, Álvar Núñez 1
Cadoudal, Georges 1
Caedmon 1
Cage, John 1 2
Cagliostro, comte de 1
Caillaud, Aristide 1
Caillaux, Henriette 1
Caillaux, Joseph 1 2 3 4
Caillebotte, Gustave 1 2 3 4
Cailliaud, Frédéric 1
Caillois, Roger 1
Caïn 1
Caius Sempronius Gracchus 1
Calabacillas 1
Calder, Alexander 1 2 3 4
Calderón de la Barca, Pedro 1
Caligula 1 2
Calixte II 1
Callaghan, James 1
Callimaque 1
Callimaque de Cyrène 1 2 3
Calliope 1 2
Callixte III 1
Calmette, Gaston 1
Calonne, Charles de 1 2
Calvin, Jean 1 2 3 4 5 6
Calvo Sotelo, José 1
Calvo-Sotelo, Leopoldo 1 2
Calypso 1
Cambaceres, Eugenio 1
Cambacérès, Jean-Jacques Régis de 1
Cambyse Ier 1
Cambyse II 1
Cameron, David 1
Camille de Lellis 1
Camus, Albert 1 2 3
Canaletto 1
Canetti, Elias 1
Canguilhem, Georges 1 2
Canova, Antonio 1 2
Cantillon, Richard 1
Cao Xueqin 1
Capitan, Louis 1
Capote, Truman 1 2
Capuana, Luigi 1
Caracalla 1 2 3 4 5
Caravage, le 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Cardan, Jérôme 1
Carducci, Filippo 1
Carducci, Giosuè 1
Caribert Ier 1
Carissimi, Giacomo 1
Carloman Ier 1 2 3
Carlos, don 1 2 3 4
Carmenta 1
Carnap, Rudolf 1
Carnéade 1 2 3
Carnot, Lazare Nicolas Marguerite 1
Carnot, Nicolas Léonard Sadi 1
Caron, Antoine 1
Carpaccio, Vittore 1 2 3
Carpeaux, Jean-Baptiste 1
Carrache, Annibal 1 2 3 4 5 6 7 8
Carrache, Augustin 1 2 3 4
Carrache, Ludovic 1 2 3 4
Carriera, Rosalba 1
Carrière, Eugène 1
Carter, Jimmy 1 2 3
Casanova, Danielle 1 2 3
Casanova, Laurent 1
Caserio, Santo 1
Casimir Ier de Pologne 1
Cassatt, Mary 1 2 3
Cassiodore 1 2 3 4
Cassirer, Ernst 1 2
Castiglione, Baldassare 1 2
Castiglione, Giuseppe 1
Castoriadis, Cornelius 1
Castro, Fidel 1 2
Castro, Guillén de 1
Cathelineau, Jacques 1 2 3
Catherine 1
Catherine de Médicis 1 2 3
Catherine de Rambouillet 1
Catherine d’Aragon 1 2 3
Catherine II de Russie 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Catherine Ire de Russie 1 2
Catilina 1
Caton 1
Caton l’Ancien 1 2 3 4 5 6 7
Catulle 1 2 3
Cauchon, Pierre 1
Cavaignac, Louis Eugène 1
Cavalcanti, Guido 1
Cavallini, Pietro 1
Cavendish, Henry 1
Cavour, Camillo Benso de 1 2 3 4 5 6 7 8
Cazotte, Jacques 1 2
Ce Acatl Topiltzin Quetzalcóatl 1 2
Céard, Henry 1
Cela, Camilo José 1
Celant, Germano 1
Célestin III 1
Céline, Louis-Ferdinand 1
Cellini, Benvenuto 1 2
Celse 1 2
Celsius, Anders 1
Celtill 1
Cendrars, Blaise 1 2
Cennini, Cennino 1
Céphisodote 1
Cerbère 1 2
Cernunnos 1 2
Cervantès, Miguel de 1 2 3
Césaire, Aimé 1
César, Jules 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41
César (sculpteur) 1 2 3
Césarion 1
Cézanne, Paul 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Chaac 1 2 3 4
Chabaka 1
Chaban-Delmas, Jacques 1 2 3 4
Chabataka 1
Chabrol, Claude 1
Chagall, Marc 1 2
Chaka 1 2
Challe, Maurice 1 2
Chamberlain, Joseph 1
Chamberlain, Neville 1 2 3 4
Chambers, William 1
Chambord, comte de 1 2 3
Chamfort 1
Champaigne, Philippe de 1 2
Champollion, Jean-François 1 2
Chandra 1
Chandragupta Ier 1
Chandragupta Ier Maurya 1
Channing, William Ellery 1
Chaos 1
Chapelain, Jean 1
Chapuys-Montlaville, Benoît Marie Louis Alceste 1
Char, René 1 2 3
Charaka 1 2
Charcot, Jean-Martin 1 2 3
Chardin, Jean 1
Chardin, Jean-Baptiste Siméon 1 2
Charette 1 2 3
Charlemagne 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31
Charles Borromée 1
Charles de Gontaut (duc de Biron) 1
Charles de Lorraine (duc de Mayenne) 1
Charles de Valois 1
Charles d’Anjou 1
Charles d’Orléans 1
Charles Édouard Stuart 1
Charles Ier de Sicile 1
Charles Ier d’Angleterre 1 2 3 4 5 6 7
Charles II d’Angleterre 1 2 3
Charles II d’Anjou 1
Charles II d’Espagne 1 2 3 4 5
Charles III d’Espagne 1 2 3 4 5 6
Charles III le Gros 1
Charles II le Chauve 1 2
Charles IV du Saint-Empire 1 2 3
Charles IV d’Espagne 1 2 3 4 5
Charles IV le Bel 1
Charles IX de France 1 2 3 4
Charles le Simple 1 2
Charles le Téméraire 1 2 3 4 5 6
Charles Martel 1 2 3
Charles Quint 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Charles VI de France 1 2
Charles VI du Saint-Empire 1 2
Charles VII de France 1 2 3 4 5 6
Charles VIII de France 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Charles V le Sage 1 2 3 4 5 6 7
Charles X (comte d’Artois) 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Charles XII de Suède 1 2 3
Charlotte de Savoie 1
Charon 1 2
Charpentier, Marc-Antoine 1
Chateaubriand, François René de 1 2 3 4 5 6
Châtelet, François 1
Chatrian, Alexandre 1
Chaucer, Geoffrey 1
Chaumier, Serge 1 2
Chautemps, Camille 1
Chelles, Jean de 1
Chénier, André 1 2
Chen Shou 1
Chevreul, Michel Eugène 1 2
Chia, Sandro 1
Chiappe, Jean 1
Chikamatsu Monzaemon 1 2
Childebert Ier 1 2
Childéric Ier 1 2 3 4 5
Childéric III 1 2 3
Chilpéric Ier 1
Chinard, Joseph 1
Chippendale, Thomas 1
Chirac, Jacques 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
Chiron 1
Chiron, Léopold 1
Choiseul, Étienne de 1
Cholokhov, Mikhaïl 1
Chongzhen 1
Chopin, Frédéric 1
Chosroès II 1
Choubine, Fedot 1
Chrétien de Troyes 1 2 3
Christie, Agatha 1
Christine de Pizan 1 2
Christo 1 2 3
Christy, Henry 1
Chrodegang 1
Chronos 1
Chrysippe 1 2 3
Chtchedrine, Sylvestre 1 2
Churchill, Winston 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Churchill, Winston (écrivain) 1
Churriguera, José Benito 1
Cian 1 2
Cicéron 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Cimabue 1 2 3 4 5 6
Cino da Pistoia 1
Cinq-Mars, Louis d’Effiat, marquis de 1 2
Cixi 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Claire d’Assise 1
Clari, Robert de 1
Clarín 1
Clastres, Pierre 1
Claude 1 2 3 4
Claudel, Camille 1
Claudel, Paul 1 2 3
Cléanthe 1 2
Clegg, Nick 1
Clélie 1
Clemenceau, Georges 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Clément, Eudes 1
Clément, Jacques 1
Clément d’Alexandrie 1 2
Clemente, Francesco 1
Clément III 1
Clément IV 1
Clément V 1
Clément VII 1 2
Clément VIII 1 2
Cléobis 1
Cléopâtre VII 1 2 3 4 5 6 7
Clinton, Bill 1 2 3 4 5
Clinton, Hillary 1
Clisthène 1 2 3
Clodion le Chevelu 1 2
Clodius Albinus 1
Clodomir 1
Close, Chuck 1
Clotaire 1
Clotaire II 1
Clottes, Jean 1
Clouet, François 1
Clouet, Jean 1 2
Clovis 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Coatlicue 1
Cochin, Charles Nicolas 1
Cohn-Bendit, Daniel 1
Colbert, Charles (marquis de Croissy) 1
Colbert, Jean-Baptiste 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Colbert, Jean-Baptiste (marquis de Seignelay) 1
Colbert, Jean-Baptiste (marquis de Torcy) 1
Cole, Thomas 1 2
Colebrooke, Thomas 1
Coleridge, Samuel Taylor 1
Coligny, Gaspard de 1
Colleoni, Bartolomeo 1 2
Collot, Marie-Anne 1
Colomb, Christophe 1 2 3
Colomban le Jeune 1
Colomban l’Ancien 1
Colombe, Michel 1
Colonna, Giovanni 1
Coltrane, John 1
Coluche 1
Combas, Robert 1 2
Combes, Émile 1 2 3
Commode 1 2
Commynes, Philippe de 1
Compère, Loyset 1
Comte, Auguste 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Comte-Sponville, André 1
Conche, Marcel 1
Concini, Concino 1 2 3 4
Condillac, Étienne Bonnot de 1 2 3 4 5 6
Condorcet, marquis de 1 2 3
Confucius 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Conon 1
Conrad Ier de Germanie 1
Conrad III de Hohenstaufen 1
Conrad II le Salique 1 2
Considérant, Victor 1
Constable, John 1 2
Constance Chlore 1
Constance II 1 2
Constant 1
Constant, Benjamin 1 2
Constant (peintre) 1 2
Constantin Ier le Grand 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39
Constantin II 1
Constantin V 1 2 3
Constantin VI 1
Constantin VII 1
Constantin VIII 1
Constantin XI Paléologue 1 2
Coolidge, Calvin 1
Copernic, Nicolas 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
Coppée, François 1 2 3 4
Coppens, Yves 1
Coq de Suie 1
Corbaz, Aloïse 1
Corbin, Henry 1
Corday, Charlotte 1 2 3 4 5 6
Coré 1
Corneille, Guillaume 1 2
Corneille, Pierre 1 2 3 4 5 6 7 8
Corot, Camille 1 2 3 4 5 6
Corrège, le 1 2 3 4 5
Cortés, Hernán 1 2 3 4 5
Cortot, Jean-Pierre 1
Coste, Pascal 1
Cotte, Robert de 1 2
Coty, René 1
Couperin, François 1 2 3
Courbet, Gustave 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Cournot, Antoine Augustin 1 2
Cousin, Jean 1
Cousin, Victor 1
Coustou, Guillaume 1
Coustou, Nicolas 1 2
Couthon, Georges Auguste 1 2
Couture, Thomas 1
Couve de Murville, Maurice 1
Coysevox, Antoine 1 2 3 4
Cranach le Jeune, Lucas 1
Cranach l’Ancien, Lucas 1 2 3
Cranmer, Thomas 1 2
Crassus 1
Cratès de Thèbes 1
Crawford, Marion 1
Crébillon père 1
Crémone, Gérard de 1
Cresson, Édith 1
Crétin, Guillaume 1
Crispo, Giordano 1
Critios 1
Croce, Benedetto 1
Crome, John 1 2
Cromwell, Oliver 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Cromwell, Richard 1
Cronin, Archibald Joseph 1
Cronos 1 2 3 4 5 6 7
Cross, Henri 1
Crozat, Pierre 1
Ctésibios d’Alexandrie 1
Cuauhtémoc 1 2
Cucchi, Enzo 1
Cueco, Henri 1
Cui, César Antonovitch 1
Cuitlahuac 1 2
Cumberland, duc de 1
Cunningham, Alexander 1
Cunobelinus 1
Curie, Marie 1
Curie, Pierre 1
Curtius, Ernst 1
Cusi Coyllur 1
Custer, George A. 1
Cuvier, Georges 1 2 3 4 5 6 7
Cyaxare 1 2
Cybèle 1
Cynewulf 1 2
Cyrus II le Grand 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Dagda 1 2 3
Dagobert Ier 1 2
Daguerre, Louis 1
Dahn, Félix 1
Dainichi Nōnin 1
Dainichi Nyorai 1
Dai Zhen 1
Daladier, Édouard 1 2 3 4 5 6
Dalí, Salvador 1 2 3 4 5 6 7
Dalla Chiesa, Carlo 1
Damase 1
Damiens, Robert François 1
Damophon de Messène 1
Dan 1
Dandolo, Enrico 1
Daniel 1 2 3 4 5
Daniel Moskovski 1
Dante Alighieri 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Danto, Arthur 1
Danton, Georges Jacques 1 2 3 4 5 6 7 8
Darboy, Georges 1
Darius Ier 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Darius II 1
Darius III Codoman 1 2
Darlan, François 1
Darnand, Joseph 1 2
Dart, Raymond 1
Darwin, Charles 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Daumier, Honoré 1 2
David 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
David, Jacques-Louis 1 2 3 4 5 6 7 8
Davioud, Gabriel 1
Davis, Jefferson 1
Davis, Miles 1
Déat, Marcel 1 2
Debré, Michel 1 2
Debré, Robert 1
Debret, François 1
Debussy, Claude 1 2
Dèce 1
Déchelette, Joseph 1
De Chirico, Giorgio 1 2 3 4
Dee, John 1
Déesse-soleil d’Arinna 1 2
Deffand, marquise du 1
Defferre, Gaston 1
Defoe, Daniel 1 2
Degas, Edgar 1 2 3 4 5 6 7 8 9
De Gaulle, Charles 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47
48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61
De Gaulle, Yvonne 1 2
Déjocès 1
De Klerk, Frederik Willem 1
De Kooning, Willem 1 2
Delacroix, Eugène 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Delanoé, Bertrand 1
Delaunay, Robert 1 2 3 4 5 6 7
Deleuze, Gilles 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Délia 1
Della Robbia, Luca 1 2
Dell’Abbate, Niccolò 1
Delorme, Philibert 1 2 3 4
Delors, Jacques 1
De Maria, Pierre 1
Déméter 1 2
Démétrios de Phalère 1
Démétrius d’Apamée 1
Démocrite 1 2 3 4 5
Démodocos 1
Démosthène 1 2
Deng Xiaoping 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Denikine, Anton 1 2
Denis, Maurice 1 2 3 4
Dents-Luisantes 1
Denys d’Halicarnasse 1 2
Denys l’Aréopagite 1
Déon, Michel 1
Derain, André 1 2
Derjavine, Gabriel 1
Dermée, Paul 1 2
Déroulède, Paul 1
Derrida, Jacques 1 2 3 4 5 6 7 8
Desai, Anita 1
Des Autels, Guillaume 1
Desborough, Vincent Robin d’Arba 1
Descartes, René 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36
Deschanel, Paul 1 2
Désirée 1
Desmarets de Saint-Sorlin, Jean 1
Desmoulins, Camille 1 2 3 4 5 6
Desnos, Robert 1
Desnoyers, Jules 1
Despentes, Virginie 1
Destutt de Tracy, Antoine 1
Detienne, Marcel 1
Devade, Marc 1
Devaki 1
De Valera, Eamon 1 2
Devaquet, Alain 1
De Vere Stacpoole, Henry 1
Devi, Mahasweta 1
Dewey, John 1 2
Dezeuze, Daniel 1
Dhanvatari 1
Diaghilev, Serge de 1
Diane 1
Diane de Poitiers 1 2
Dias, Bartolomeu 1
Dickens, Charles 1 2 3
Diderot, Denis 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27
Didier 1 2
Didius Julianus 1
Diego, Gerardo 1
Dieulafoy, Jeanne 1
Dieulafoy, Marcel 1
Dilthey, Wilhelm 1
Dimitri III 1
Dimitri IV 1 2
Dinarque 1
Dinocratès de Rhodes 1
Dioclétien 1 2 3 4
Diodore de Sicile 1 2 3
Diogène de Babylone 1
Diogène de Sinope 1 2
Diogène Laërce 1
Dion Cassius 1 2 3
Dionysos 1 2 3 4
Diophante 1
Di Rosa, Hervé 1
Disraeli, Benjamin 1 2 3 4
Djéser (Djoser) 1 2
Djong Yak-Yong 1
Dnyaneshwar 1
Dogen 1
Dōkyō 1
Dolce, Pietro 1
Domenico Ghirlandaio 1
Domitien 1 2 3 4 5 6 7 8
Dom Pernetti 1
Donatello 1 2 3 4 5 6 7 8
Dönitz, Karl 1 2
Donizetti, Gaetano 1
Don Juan 1
Don Quichotte 1
Dorat, Jean 1 2
Doriot, Jacques 1
Dos Passos, John 1
Dostoïevski, Fiodor Mikhaïlovitch 1 2
Dotremont, Christian 1
Douglas-Home, Alec 1
Doumer, Paul 1 2 3
Doumergue, Gaston 1
Downing, Andrew Jackson 1
Doyen, Gabriel François 1
Doyle, Arthur Conan 1
Drachmann, Holger 1
Dracon 1
Drexter, Anton 1
Dreyfus, Alfred 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Drieu La Rochelle, Pierre 1
Drona 1
Drumont, Édouard 1
Drusus 1
Drusus II 1
Dubček, Alexander 1 2
Du Bellay, Joachim 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Dubois, Ambroise 1
Dubois, Eugène 1 2
Dubois, Guillaume 1
Dubreuil, Toussaint 1 2
Dubuffet, Jean 1 2 3
Duc, Joseph Louis 1
Ducatel, Louis 1
Duchamp, Marcel 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Duchet, Claude 1
Duclos, Alain 1
Dufaure, Jules 1 2
Dufay, Guillaume 1
Dufort, Yves 1
Dumas, Alexandre 1 2 3 4 5 6
Dumézil, Georges 1
Dumont, Auguste 1
Dumont, René 1
Dumouriez, Charles François 1 2 3
Dumuzi (Tammuz) 1 2 3 4 5
Duns Scot, Jean 1 2 3 4 5
Dunstable, John 1
Dupont, Florence 1
Du Pont de Nemours, Éleuthère Irénée 1
Dupré, Jules 1
Dupré, Julien 1
Duquesney, François-Alexandre 1
Durand, Asher 1
Durand-Ruel, Paul 1 2 3 4
Duras, Marguerite 1 2
Dürer, Albrecht 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Durgā 1
Durkheim, Émile 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Durrell, Lawrence 1
Duseigneur, Jehan 1
Du Vair, Guillaume 1
Duval, Paul-Marie 1
Dvořák, Antonin 1
Dzerjinski, Felix 1
D’Alembert, Jean le Rond 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
D’Annunzio, Gabriele 1 2 3 4 5
E
Ea 1 2 3
Eannatum 1 2
Ebert, Friedrich 1 2 3 4 5
Ebih-Il 1
Éboué, Félix 1 2
Echeverria, Esteban 1
Eck, Jean 1
Eco, Umberto 1
Eden, Anthony 1 2
Edmond Côte de Fer 1
Édouard de Middleham 1
Édouard Ier d’Angleterre 1
Édouard II d’Angleterre 1 2
Édouard III d’Angleterre 1 2
Édouard IV d’Angleterre 1 2
Édouard le Confesseur 1 2
Édouard l’Ancien 1
Édouard V d’Angleterre 1 2 3
Édouard VI d’Angleterre 1
Édouard VII du Royaume-Uni 1
Édouard VIII du Royaume-Uni 1 2 3
Edwards, Jonathan 1
Egas, Enrique 1
Egbert de Trèves 1 2
Éginhard 1 2
Ehrard, Ludwig 1
Eichendorff, Joseph von 1
Eichmann, Adolf 1
Eichordt, Ludwig 1
Eiffel, Gustave 1
Einstein, Albert 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Eisai 1
Eisaku Satō 1
Eisenhower, Dwight David 1 2 3 4 5
Ekkehard de Saint-Gall 1
Eknath 1
El 1
El Cid Campeador 1 2 3 4
El-Hadj Omar 1 2 3
Eliade, Mircea 1 2
Élie 1 2
Eliot, George 1 2
Élisabeth d’York 1 2
Élisabeth II d’Angleterre 1 2 3
Élisabeth Ire de Russie 1
Élisabeth Ire d’Angleterre 1 2 3 4 5 6
Élisée 1
Ellington, Duke 1
Ellis, Bret Easton 1
Ellison, Ralph 1
Elstir 1
Eltsine, Boris 1 2 3 4 5 6 7 8
Éluard, Paul 1 2 3 4 5
Emerson, Ralph Waldo 1 2
Émery, Michel Particelli d’ 1 2
Emmanuel 1
Empédocle 1 2
Empereur, Jean-Yves 1
Encolpe 1
Énée 1 2 3 4
Énésidème 1 2 3 4
Engels, Friedrich 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Enki 1 2 3 4
Enkidu 1 2
Enlil 1 2 3 4 5 6
Ensor, James 1
Éphialtès 1
Éphraïm 1
Épicharme 1
Épictète 1 2 3 4 5
Épicure 1 2 3 4 5 6 7
Épigonos 1
Épinay, marquise d’ 1
Épiphane 1
Epona 1
Érasistrate 1 2 3
Érasme 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Erckmann, Émile 1
Érèbe 1 2
Érechthée 1
Ereshkigal 1 2
Eridu 1
Ernest-Auguste I er de Hanovre 1
Ernst, Max 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Erzulie 1 2
Escalon de Fonton, Max 1
Eschenbach, Wolfram von 1
Eschine 1
Eschmoun 1
Eschyle 1 2 3 4 5
Escrivá de Balaguer, José Maria 1
Esculape 1
Ésope 1 2 3 4 5
Esquirol, Jean Étienne Dominique 1
Esterházy, Charles-Ferdinand 1
Estève, Maurice 1
Estienne, Henri Ier 1
Estienne, Robert 1 2
Estrée, Gabrielle d’ 1
Esus 1 2
Etana 1
Ethelred le Malavisé 1 2 3
Étienne (saint) 1
Étienne de Blois 1 2
Étienne d’Alexandrie 1
Étienne II 1 2
Étienne IV 1
Euclide 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Euclion 1 2 3
Eudes de France 1 2
Eudoxe 1
Eugène de Savoie-Carignan 1 2 3
Eugène IV 1 2
Eugénie de Montijo 1 2
Euripide 1 2
Europe 1 2
Eurydice 1 2 3 4 5 6
Eusèbe de Césarée 1
Eusèbe de Nicomédie 1 2 3
Eusèbe de Verceil 1
Eustache, Jean 1
Eustachi, Bartolomeo 1
Euthyme le Grand 1
Eutychès 1
Evans, Arthur 1
Ève 1
Évhémère 1
Ewuare le Grand 1 2
Exter, Alexandra Alexandrovna 1
Ezana 1 2
Ézéchias 1 2
Ézéchiel 1 2 3 4 5 6
Fabius, Laurent 1 2 3
Fabre d’Églantine 1
Fagg, Bernard 1
Fahrenheit, Daniel Gabriel 1
Falcone, Giovanni 1
Falconer, Hugh 1
Falconet, Étienne Maurice 1 2
Falkenhayn, Erich von 1 2 3
Fallières, Armand 1
Falloux, comte de 1
Fancelli, Lucas 1
Fanfani, Amintore 1
Fantin-Latour, Ignace Henri 1
Faraday, Michael 1
Farbauti 1
Farinelli 1
Farnèse, Alexandre (cardinal, futur pape Paul III) 1 2
Farnèse, Élisabeth 1 2
Farnèse, Ranuccio 1
Farrère, Claude 1
Fasiladas 1 2
Fatima 1 2 3
Fatimides 1
Fattori, Giovanni 1 2
Faulkner, William 1 2
Fautrier, Jean 1
Favart, Charles-Simon 1
Februns 1
Fédor Ier 1
Fédor II 1
Fédor III 1
Félix V 1
Fénelon 1 2 3 4 5 6
Feng Youlan 1
Fenrir 1 2 3 4
Ferdinand Ier des Deux-Siciles 1
Ferdinand Ier du Saint-Empire 1
Ferdinand Ier d’Autriche 1
Ferdinand Ier le Grand 1
Ferdinand II du Saint-Empire 1 2 3
Ferdinand II d’Aragon 1 2 3
Ferdinand III de Castille 1
Ferdinand III du Saint-Empire 1 2
Ferdinand IV de Toscane 1
Ferdinand VI d’Espagne 1 2 3 4
Ferdinand VII d’Espagne 1 2 3 4 5 6 7 8
Fermat, Pierre de 1
Ferré, Léo 1
Ferro, Marc 1
Ferry, Jules 1 2 3 4 5
Ferry, Luc 1
Ferstel, Heinrich von 1
Feuerbach, Ludwig 1 2 3 4 5
Feyerabend, Paul 1
Fichte, Johann Gottlieb 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Ficin, Marsile 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Fielding, Henry 1 2
Fieschi, Giuseppe 1 2
Figaro 1
Fillon, François 1
Finley, Moses I. 1
Fioravanti, Aristote 1
Fīrūz Shāh 1
Fisher, John 1
Fitzgerald, Edward 1
Fitzgerald, Scott 1 2
Fjalarr 1
Flandin, Eugène 1
Flaubert, Gustave 1 2 3 4 5
Flavius Arrien 1
Flavius Josèphe 1 2
Fleury, André Hercule de 1 2
Flore 1 2
Florian, Jean-Pierre Claris de 1
Foch, Ferdinand 1 2
Fogazzaro, Antonio 1
Foigny, Gabriel de 1
Fontaine, Pierre 1 2
Fontenelle, Bernard de 1 2 3 4 5 6
Fonvizine, Denis 1
Ford, Gerald 1
Forseti 1
Förster, Bernard 1
Förster-Nietzsche, Elisabeth 1 2 3
Fortuny, Mariano 1
Foscolo, Ugo 1
Foucault, Michel 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Fouché, Joseph 1 2 3 4 5
Foujita, Léonard 1
Fould, Achille 1
Fouquet, Nicolas 1 2 3 4
Fouquier-Tinville, Antoine 1 2 3
Fourcroy, Antoine François de 1
Fourier, Charles 1 2 3 4 5 6 7
Fra Angelico 1 2 3 4
Fragonard, Jean Honoré 1 2 3 4
France, Anatole 1
Franck, Bernard 1
Franco, Francisco 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
François (pape) 1 2
François de Guise 1 2 3
François de Sales 1 2 3
François d’Alençon 1 2
François d’Assise 1 2 3 4
François-Ferdinand d’Autriche 1 2
François Ier 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28
François Ier du Saint-Empire 1
François Ier d’Autriche 1 2
François II de France 1 2
François II de Habsbourg-Lorraine 1
François II des Deux-Siciles 1
François II du Saint-Empire 1 2 3 4 5
François-Joseph I er d’Autriche 1 2
François Xavier 1 2 3
Francon de Cologne 1
Frank, Hans 1
Franklin, Benjamin 1 2 3 4
Frazer, James George 1 2 3 4
Frédégonde 1
Frédéric-Guillaume Ier de Prusse 1
Frédéric-Guillaume II de Prusse 1 2
Frédéric-Guillaume IV de Prusse 1 2 3
Frédéric Ier Barberousse 1 2 3 4 5
Frédéric Ier de Prusse 1
Frédéric II de Danemark 1
Frédéric II de Hohenstaufen 1 2
Frédéric II de Prusse 1 2 3 4 5 6
Frédéric II de Sicile 1
Frédéric III du Saint-Empire 1
Frédéric III d’Allemagne 1
Frederick d’York 1
Frédéric le Sage 1
Frege, Gottlob 1 2 3 4
Fréminet, Martin 1 2
Fresnel, Augustin 1
Freud, Sigmund 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Freyja 1 2 3
Freyr 1 2 3
Friedmann, Alexandre 1
Friedrich, Caspar David 1
Frigg 1 2 3 4
Frîja 1
Fritsch, Théodore 1
Froissart, Jean 1
Fromm, Erich 1
Frumentius 1
Fujiwara no Michinaga 1
Fujiwara no Yorimichi 1
Fujiwara Takanobu 1
Fuller, Margaret 1
Fulrad 1
Fumimaro Konoe 1
Funa 1
Fustel de Coulanges, Numa Denis 1 2 3
Fuxi 1 2
Fuzûlî 1
Gabo, Naum 1 2 3
Gabriel, Ange Jacques 1
Gabriel (archange) 1 2
Gad 1
Gadamer, Hans Georg 1 2
Gaddi, Agnolo 1
Gagarine, Youri 1
Gage, Thomas 1
Gaïa 1 2 3 4 5 6
Gainsborough, Thomas 1 2
Galba 1
Galère 1
Galien 1 2 3 4 5
Galigaï, Léonora 1
Galilée 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Galla Placidia 1 2 3
Gall de Suisse 1
Gallé, Émile 1
Galle, Johann Gottfried 1
Gallien 1
Gallieni, Joseph 1 2
Gallus 1
Galton, Francis 1
Galus Sextius Galvinus 1
Galván, Manuel de Jesús 1
Gama, Vasco de 1 2 3
Gambetta, Léon 1 2
Gandhi, Indira 1
Gandhi, Mohandas Karamchand 1 2 3 4
Gandhi, Rahul 1
Gandhi, Rajiv 1
Gandhi, Sonia 1
Ganesh 1
Ganjin 1
Gao Kegong 1
Gao Xingjian 1
Gaozu (Liu Bang) 1
Gaozu (Li Yuan) 1 2
Gapone, Gueorgui 1
García Lorca, Federico 1
Gargantua 1 2
Garibaldi, Giuseppe 1 2 3
Garnier, Charles 1 2
Garuda 1
Gary, Romain 1 2
Gasperi, Alcide de 1
Gassendi 1
Gaston de Foix 1
Gau, François Christian 1
Gauchet, Marcel 1 2 3 4
Gaudí, Antonio 1 2 3
Gaudin, Martin Michel Charles 1
Gauguin, Paul 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Gautier, Théophile 1 2 3 4
Gaveston, Pierre 1
Gbagbo, Laurent 1
Gebra Maskal Lalibela 1
Gélase Ier 1
Gelede 1
Gemmei 1 2 3 4
Gengis Khān 1 2 3 4
Genséric 1 2 3 4
Gensho 1
Gentile da Fabriano 1 2
Gentileschi, Orazio 1
Genyoku Kuwaki 1
Geoffrin, Marie-Thérèse 1
George, Lloyd 1 2 3
George Ier de Grande-Bretagne 1
George II de Grande-Bretagne 1 2 3
George III du Royaume-Uni 1 2 3 4 5 6 7
George IV du Royaume-Uni 1 2 3
George V du Royaume-Uni 1
George VI du Royaume-Uni 1 2
Gerbillon, Jean-François 1 2
Gerdr 1
Géricault, Théodore 1 2 3 4
Germanicus 1
Gersimi 1
Gervais, Paul 1
Gerville, Charles de 1
Géryon 1
Geshtinanna 1 2
Ghezo 1 2
Ghiberti, Lorenzo 1 2 3 4 5
Ghiyas ud-Din Tugluk 1
Ghosh, Amitav 1
Giacometti, Alberto 1
Gide, André 1 2
Gilgamesh 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Gillespie, Dizzy 1
Gillet, Nicolas François 1 2
Gillot, Claude 1
Giolitti, Giovanni 1 2
Giorgione 1 2 3 4 5 6
Giotto di Bondone 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Girard, René 1 2
Girardon, François 1 2 3
Giraud, Henri 1 2 3
Giraud de Barri (ou Giraud le Cambrien) 1
Giraudoux, Jean 1 2 3
Girodet 1
Giscard d’Estaing, Valéry 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Giusti, Giuseppe 1
Gladstone, William 1 2 3 4 5
Glass, Philip 1
Gléglé 1
Gleizes, Albert 1 2
Gleyre, Charles 1
Glinskaya, Elena 1
Glory, André 1
Gluck, Christoph Willibald von 1 2 3
Glycon d’Athènes 1
Gobineau, Joseph Arthur de 1
Go-Daigo 1 2 3
Godard, Jean-Luc 1 2
Godechot, Jacques 1
Godefroy V Plantagenêt 1
Gödel, Kurt 1
Godoy, Manuel 1 2 3 4 5 6
Goebbels, Joseph 1 2 3
Goebbels, Magda 1
Goering, Hermann 1 2
Goethe, Johann Wolfgang von 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Gogol, Nicolas Vassiliévitch 1 2
Go-Komatsu 1 2
Gold, Thomas 1
Goldfaden, Avrom 1
Golding, John 1
Golding, William 1
Goldmann, Lucien 1 2
Goldoni, Carlo 1
Goliath 1
Golitsyne 1
Golzius, Hendrik 1
Gómez de Mora, Juan 1
Gongdi 1
Góngora y Argote, Luis de 1 2
Gontcharova, Nathalie 1
Gonzales, Eva 1
González, Felipe 1 2
Gorbatchev, Mikhaïl 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Gordios 1
Gordon, Charles 1
Gordon, Patrick 1 2
Gordon Childe, Vere 1
Gorgias 1
Gorgulov, Paul 1 2
Göring, Hermann 1 2
Gorki, Maxime 1
Gorky, Arshile 1
Go-Sanjō 1
Gossec, François Joseph 1
Gottfried de Strasbourg 1
Gottschalk d’Orbais 1
Goudimel, Claude 1
Gouges, Olympe de 1 2
Gouin, Félix 1
Goujon, Jean 1 2
Gournay, Vincent de 1
Goya, Francisco de 1 2 3 4 5 6 7
Goytisolo, Juan 1
Grabbe, Christian Dietrich 1
Gracián y Morales, Baltasar 1
Gracq, Julien 1 2
Gramme, Zénobe 1
Gramsci, Antonio 1
Grande Mademoiselle, la 1
Grandi, Dino 1
Grant, Ulysse S. 1
Grass, Günter 1
Gratien 1
Greco, le 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Greene, Graham 1
Grégoire de Naziance 1 2 3
Grégoire de Nysse 1
Grégoire de Tours 1
Grégoire Ier le Grand 1 2 3 4 5 6
Grégoire VII 1 2 3 4 5 6 7
Grégoire XI 1
Grégoire XII 1
Grégoire XIII 1
Grendel 1
Greuze, Jean-Baptiste 1 2
Grévy, Jules 1 2 3
Grey, Charles 1
Grey, Jeanne 1
Griffith, Francis Llewellyn 1
Grignan, Madame de 1
Grillo, Beppe 1
Grillparzer, Franz 1
Grimm, Jacob 1 2
Grimm, Wilhelm 1
Grimoald 1
Grince-Dents 1
Gris, Juan 1 2 3
Grisey, Gérard 1
Gromaire, Marcel 1
Gropius, Walter 1 2
Grosz, George 1
Grotius 1
Grünewald, Matthias 1
Gu 1
Guangxu 1
Guan Hanqing 1
Guardi, Francesco 1
Guarino Veronese 1
Guattari, Félix 1 2
Gudea 1 2 3 4 5
Guderian, Heinz 1
Guénolé de Landévennec 1
Guggenheim, Peggy 1
Guglielmo, Ciardi 1
Guillaume de Champeaux 1
Guillaume de Lorris 1 2 3
Guillaume de Malmesbury 1
Guillaume de Prusse 1
Guillaume d’Ockham 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Guillaume Ier d’Allemagne 1 2 3
Guillaume Ier d’Aquitaine 1
Guillaume II d’Allemagne 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Guillaume III d’Orange-Nassau 1 2 3 4
Guillaume IV 1 2
Guillaume le Conquérant 1 2 3 4 5 6 7
Guillaume le Roux 1
Guillaumin, Armand 1 2
Guillet, Pernette du 1
Guimard, Hector 1
Guitry, Sacha 1
Guittone d’Arezzo 1
Guizot, François 1 2 3
Gullinborsti 1
Gullinkambi 1
Gunther 1
Guo Xi 1
Guru Nānak 1
Gusdorf, Georges 1 2
Gutenberg, Johannes 1 2 3
Guthrum l’Ancien 1 2
Guynement de Kéralio, Louise-Félicité 1 2
Guyton de Morveau, Louis Bernard 1
Habacuc 1 2 3 4
Habermas, Jürgen 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Hácha, Émil 1 2
Hadad 1 2 3
Hadadézer 1
Hadès 1 2 3 4 5 6
Hadj, Messali 1
Hadot, Pierre 1 2
Hadrien 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Hadrien Ier 1
Haendel, Georg Friedrich 1
Hahn, Hans 1
Hajime Sugiyama 1
Hajime Tanabe 1
Halimi, Gisèle 1
Halley, Peter 1
Hallyday, Johnny 1
Hals, Frans 1 2 3
Hamilton, Richard 1 2
Hammourabi de Babylone 1 2 3 4 5
Hammourabi d’Ougarit 1
Hamsun, Knut 1
Hanabuso Itcho 1
Han Guang Wudi 1
Hannibal 1
Hannon 1
Han Yu 1
Harald III de Norvège 1
Harambourg, Lydia 1
Harding, Warren Gamaliel 1
Hardouin-Mansart, Jules 1 2 3
Haring, Keith 1
Harnett, William H. 1
Harold Ier Pied-de-Lièvre 1
Harold II 1 2 3
Haroun al-Rachid 1 2 3 4
Haro y Sotomayor, Luis de 1
Harpagon 1
Harshavardhana (ou Harsha) 1 2
Hartung, Hans 1 2
Harvey, William 1
Hasegawa Tohaku 1
Hassan 1
Hassan, Ihab 1
Hastings, Warren 1
Hatchepsout 1 2
Hattusil III 1
Haussmann, Georges Eugène 1 2 3 4 5
Havel, Vaclav 1
Hawking, Stephen 1 2 3
Haydn, Joseph 1 2
Hayez, Francesco 1
Heath, Edward 1 2
Hebat 1 2 3
Hébert, Jacques René 1 2 3 4
Hebieso 1
Hécatée de Milet 1 2
Hector 1
Hegel, Georg Wilhelm Friedrich 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38
Heidegger, Martin 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Heine, Heinrich 1 2
Heinzelin, Jean de 1 2
Heisenberg, Werner 1
Hel 1 2
Hélène 1
Hélène (sainte) 1 2 3
Héliogabale (ou Élagabal) 1
Hélios 1 2
Héloïse 1
Helvétius, Claude Adrien 1 2 3 4 5 6
Héméré 1
Hemingway, Ernest 1 2
Hémiounou 1
Hendrix, Jimmy 1
Hennique, Léon 1
Henri de Guise (le Balafré) 1 2 3 4 5
Henriette de France 1
Henriette d’Angleterre 1
Henri Ier Beauclerc 1
Henri Ier de Bourbon 1
Henri Ier de Constantinople 1
Henri Ier de Germanie 1
Henri II de Bavière 1
Henri II de Condé 1
Henri II de France 1 2 3 4 5 6 7
Henri II de Guise 1 2
Henri II de Longueville 1
Henri II de Montmorency 1
Henri III de France 1 2 3 4 5 6
Henri III du Saint-Empire 1
Henri III d’Angleterre 1 2 3
Henri II le Saint 1
Henri II Plantagenêt 1 2 3 4
Henri IV de Castille 1
Henri IV de France 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
Henri IV du Saint-Empire 1 2 3 4 5
Henri IV d’Angleterre 1
Henri le Navigateur 1
Henriot, Émile 1
Henri V du Saint-Empire 1 2 3 4 5 6
Henri V d’Angleterre 1 2
Henri VI du Saint-Empire 1 2
Henri VI d’Angleterre 1 2 3 4 5 6
Henri VII d’Angleterre 1 2 3 4 5 6 7
Henri VIII d’Angleterre 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Henry, Hubert-Joseph 1
Henry, Michel 1 2
Héphaïstos 1
Hepit 1
Héra 1 2 3 4 5
Héraclès 1 2 3 4 5 6 7
Héraclite 1 2 3 4
Héraclius 1 2 3
Héraklès 1
Herbin, Auguste 1 2
Hercule 1 2 3 4 5
Herder, Johann Gottfried von 1 2 3 4 5
Heredia, José Maria de 1 2 3
Hérihor 1 2
Hermès 1
Hermodr 1
Hermogénès de Priène 1
Hérode 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Hérodote 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Hérophile 1
Herrera, Juan de 1 2
Herriot, Édouard 1 2 3 4 5
Herzen, Alexandre 1
Hésiode 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Hess, Moses 1 2
Hess, Rudolf 1 2
Hesse, Hermann 1
Hestia 1 2
Heym, Georg 1
Hichām 1
Hi-Chang 1
Hideki Tojo 1 2
Hiéron de Syracuse 1 2
Hilarion de Gaza 1
Hildebrand, Adolf von 1
Hildegarde 1
Hilliard, Nicolas 1
Himilcon 1
Himmler, Heinrich 1
Hindenburg, Paul von 1 2 3 4 5 6 7
Hipparchia 1
Hipparque 1 2 3 4 5 6
Hippias d’Élis 1 2
Hippocrate 1 2 3 4 5 6
Hippolyte 1
Hiram 1
Hirohito 1 2 3 4 5 6 7 8
Hiroshige, Utagawa 1 2
Hisahito d’Akishino 1
Hitler, Adolf 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49
50 51 52 53 54
Hiyeda no Are 1
Hnoss 1
Hobbes, Thomas 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Hobrecht, James 1
Hồ Chí Minh 1 2
Hoffmann, Ernst Theodor Amadeus 1
Hogarth, William 1 2 3
Hokusai 1 2 3
Holbach, baron d’ 1 2
Holbein le Jeune, Hans 1 2 3
Holbein l’Ancien, Hans 1
Hölderlin, Friedrich 1 2
Holiday, Billie 1
Holinyard, E.J. 1
Hollande, François 1
Homère 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Hongwu 1 2
Hongxi 1
Honnecourt, Villard de 1 2
Honorius 1 2 3 4 5 6
Honorius III 1
Hon’Ami Koetsu 1
Hood, John B. 1
Hooker, Joseph 1
Hoover, Herbert C. 1 2 3
Horace 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Horatius Coclès 1
Horkheimer, Max 1 2 3 4 5
Horus 1 2 3 4 5
Hottinger, Johann 1
Houdar de La Motte, Antoine 1
Houdon, Jean-Antoine 1
Houni 1 2
Houram-Abi 1
Hoyle, Fred 1 2 3 4
Hrosvitha 1
Hua Guofeng 1 2
Huang Gongwang 1
Huang Taiji 1 2
Huascar 1 2 3 4
Huayna Cápac 1 2 3 4
Hubble, Edwin Powell 1 2 3
Huber, Wolf 1
Hudson, Henry 1
Hugenberg, Alfred 1
Hugo, Victor 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Hugues Capet 1 2
Huian-Tsang 1
Huitzilihuitl 1
Huitzilopochtli 1 2
Huizong 1
Hu Jintao 1 2
Humāyūn 1 2 3
Humbert Ier d’Italie 1
Humboldt, Alexander von 1
Hume, David 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Hunahpu 1
Hund, baron de 1
Hu Shi 1
Huss, Jean 1
Hussein, Saddam 1 2 3
Hussein (roi de Jordanie) 1
Husserl, Edmund 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Huszár, Vilmos 1
Hutten, Ulrich von 1 2
Hu Yaobang 1 2
Huysmans, Joris-Karl 1 2 3
Hwanung 1 2
Hymir 1
Hypéride 1
Iaroslav le Sage 1 2
Ibárruri, Dolores 1
Ibn al-Azīz, Omar 1
Ibn al-Nadīm, Abu Muhammad 1
Ibn al-Qāsim, Muḥammad 1
Ibn al-Walīd, Khālid 1
Ibn al-Yazid, Khâlid 1
Ibn Anas, Mālik 1
Ibn Arslan, Toghrul 1
Ibn Bājjā 1
Ibn Gabirol, Salomon 1
Ibn ḥanbal, Aḥmad 1
Ibn Ḥayyān, Jābir (Geber) 1 2
Ibn Ishāq, Hunayn 1
Ibn Qurra, Thābit 1
Ibn Tāshfīn, Yūsuf 1
Ibn Tibbon, Samuel 1
Ibn Tughluq, Muhammad 1
Ibn Tūlūn, Ahmad 1
Ibn Tūmart, Muhammad 1
Ibn Yûssuf, Al-Hajjaj 1
Ibsen, Henrik 1 2 3 4 5 6
Iddin-El 1
Idris Ier 1
Idris II 1
Ignace de Loyola 1 2
Igor 1
Ihara, Saïkaku 1
Ildico 1
Illapa 1
Ilusuma 1
Il-yeon 1
Imhotep 1 2
Immerman, Karl 1
Inanna (Ishtar) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Indra 1 2 3 4 5
Indravarman 1 2 3
Ingres, Jean Auguste Dominique 1 2 3 4 5 6
Innocent III 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Innocent VI 1
Innocent X 1
Innocent XI 1
Inshushinak 1
Inti 1 2 3
Ionesco, Eugène 1 2 3
Irène (impératrice) 1
Irénée 1 2 3
Irving, Washington 1
Isaac 1 2 3 4 5 6 7 8
Isaac Ier 1 2
Isaac II Ange 1 2 3 4
Isaac Israeli ben Salomon 1
Isaac le Juif 1
Isabelle de Castille 1 2 3
Isabelle de France 1
Isabelle d’Aragon 1
Isabelle II d’Espagne 1 2 3 4
Isaïe 1 2 3 4 5 6 7 8
Isée 1
Iseult 1
Ishara 1
Ishtar (Inanna) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Isidore de Milet 1 2
Isis 1 2 3 4 5
Ismaël 1 2
Ismaïl 1 2
Ismaïl Ier 1
Ismail Pacha 1
Isocrate 1 2 3
Israfil (archange) 1
Issacar 1
Ithobaal Ier 1
Ito Jinsai 1
Itzcoatl 1
Itzmana 1
Ivan Ier de Russie 1 2
Ivan III de Russie 1 2
Ivan IV le Terrible 1 2
Ivan V de Russie 1 2
Ivan VI de Russie 1 2
Iwasa Matabei 1
Jackson, Andrew 1 2 3 4 5
Jackson, Michael 1 2
Jackson, Thomas J. 1
Jacob 1 2 3 4
Jacob, François 1
Jacob, Max 1 2
Jacob ben Isaac Ashkenazi de Janow 1
Jacobi, Friedrich Heinrich 1
Jacobson, Max 1
Jacques 1
Jacques Ier d’Angleterre 1 2 3 4 5 6
Jacques II d’Angleterre 1 2 3 4 5 6 7
Jagger, Mick 1
Jaguer, Édouard 1
Jahangir 1
Jakobson, Roman 1
Jamal ad-Din al-Afgani 1
Jamblique 1 2 3
James, Henry 1 2
James, William 1 2
Jameson, Fredric 1
Jamyn, Amadis 1
Janaka 1
Janet, Pierre 1
Jansen, Zacharias 1 2
Jansenius 1
Japhet 1
Jarīr al-ṭabarī 1 2
Jarry, Alfred 1 2
Jaruzelski, Wojciech 1 2 3
Jason 1
Jaspers, Karl 1
Jaurès, Jean 1 2 3 4 5
Javeau, Claude 1
Jayavarman II 1 2 3
Jayavarman VII 1 2
Jayavarman VIII 1 2
Jean 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Jean (usurpateur) 1
Jean Chrysotome 1
Jean Damascène 1
Jean de Gand 1
Jean de Garlande 1
Jean de la Croix 1 2
Jean de Luxembourg 1
Jean de Meung 1 2 3 4
Jean de Salisbury 1 2
Jean de Souabe 1
Jean de Worcester 1
Jean Ier Tzimiskès 1
Jean II Comnène 1
Jean II de France (Jean le Bon) 1
Jean II de Portugal 1
Jean IV de Portugal 1
Jean le Baptiste 1 2
Jeanne-Claude 1
Jeanne d’Arc 1 2 3 4
Jeanne la Folle 1
Jean Paul (Johann Paul Friedrich Richter) 1
Jean-Paul II 1 2 3
Jean sans Terre 1 2 3
Jean Scot Érigène 1
Jean VI Cantacuzène 1
Jean V Paléologue 1
Jean XII 1 2 3
Jean XIII 1
Jean XXII 1
Jean XXIII 1
Jefferson, Thomas 1 2 3
Jehoshaphat 1
Jéhu 1 2
Jenkins, Robert 1 2 3 4 5
Jenney, William Le Baron 1
Jensen, Johannes Vilhelm 1
Jérémie 1 2 3 4 5 6 7
Jéroboam Ier 1 2
Jéroboam II 1 2
Jésus-Christ 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49
50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68
Jézabel 1
Jianen 1
Jiang Qing 1
Jiang Zemin 1
Jimenez, Francesco 1
Jimmu Tenno 1 2
Jirinovski, Vladimir 1
Joab 1 2
Joad 1
Joas 1 2
Jocaste 1
Jōchō 1
Jodelle, Étienne 1
Jodl, Alfred 1 2
Joël 1 2 3
Joffre, Joseph 1 2 3 4 5 6 7
Johannes IV 1
Johanson, Donald C. 1
Johnson, Andrew 1
Johnson, Lyndon B. 1 2 3 4 5
Johnson, Samuel 1
Johnston, Joseph E. 1
Jolivet, Jean 1
Jonas 1 2 3 4
Jonas, Hans 1
Jonathan 1
Jonathan Maccabée 1
Joram 1
Jörd 1
Jorgensen, Johannes 1
Joseph 1 2
Joseph Ier du Portugal 1
Joseph Ier du Saint-Empire 1 2
Joseph II du Saint-Empire 1 2 3
Joséphine 1
Joseph-Napoléon I er d’Espagne 1 2 3
Josetsu 1
Josias 1
Jospin, Lionel 1 2 3 4 5
Josquin des Prés 1
Josquin des Près 1 2
Josse de Moravie 1
Josué 1 2
Jouhaud, Edmond 1 2
Joukov, Gueorgui 1
Joule, James Prescott 1
Jourde, Pierre 1
Journiac, Michel 1
Jovellanos, Gaspar Melchor de 1 2
Joyce, James 1
Juan Carlos Ier d’Espagne 1 2 3 4 5 6 7 8
Juan de Bourbon 1
Juan José d’Autriche 1
Juba Ier de Numidie 1
Juda 1 2 3 4
Judas 1 2 3 4 5 6
Judd, Donald 1
Jugurtha 1
Jules II 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Jules l’Africain 1
Jung, Carl Gustav 1 2 3
Jünger, Ernst 1
Junichiro Tanizaki 1
Juno 1
Junon 1
Jun’ichirō Koizumi 1
Jupiter 1 2 3 4 5 6 7 8
Juppé, Alain 1 2 3 4
Jussieu, Antoine Laurent de 1
Jussieu, Joseph de 1
Justinien Ier 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
Justinien II 1
Justin Ier 1 2 3
Justin II 1 2
Juvaira, Filippo 1
Juvénal 1
K
Kabila, Laurent-Désiré 1
Kabīr 1 2
Kacew, Roman 1
Kadhafi, Mouammar 1 2
Kafka, Franz 1 2 3 4
Kahnweiler, Daniel-Henry 1
Kaiho Yushō 1
Kaikei 1
Kakinomoto no Hitomaro 1
Kakuei Tonaka 1
Kālī la Noire 1 2
Kaltenbrunner, Ernst 1
Kaluza, Theodor 1
Kamenev, Lev 1
Kamil, Abou 1
Kammu 1 2 3
Kamsa 1
Kanami 1
Kandinsky, Vassily 1 2 3 4 5 6 7
Kangxi 1 2 3 4 5
Kaniṣka 1
Kankan Moussa 1 2
Kanō Eitoku 1
Kanō Masanobu 1
Kanō Sanraku 1
Kant, Emmanuel 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48
49 50 51 52 53 54 55 56 57 58
Kantemir, A.D. 1
Kao Ming 1
Kaouit 1
Kapp, Wolfgang 1
Karim Aga Khan IV 1
Karina, Anna 1
Katib Celebi 1
Kazan, Elia 1
Keats, John 1
Keitel, Wilhelm 1 2
Keller, baron 1
Kellogg, Frank 1
Kemal, Mustafa 1 2
Kenji Nakagami 1
Kennedy, Jacqueline 1
Kennedy, John Fitzgerald 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Kepler, Johannes 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Kerensky, Alexandre 1 2 3
Kerouac, Jack 1 2
Keshab Sandra Sen 1
Ketel, Cornelis 1
Khadija 1
Khâemouaset 1
Khalmasuit 1
Khasekhemouy 1 2
Khawarizmi 1
Khayyam, Omar 1 2 3
Khéops 1
Khéphren 1
Khéty 1
Khomeyni, Rouhollah Moussavi 1
Khonsou 1 2 3
Khrouchtchev, Nikita 1 2 3 4 5 6 7 8
Kierkegaard, Søren 1 2 3 4 5 6 7
Killa 1
King, Martin Luther 1 2 3
King, Stephen 1
King, William 1
Ki no Tsurayuki 1
Kipling, Rudyard 1
Kippenberger, Martin 1
Kiprenski, Orest 1
Kircher, Athanase 1
Kisling, Moïse 1
Kissinger, Henry 1
Klee, Paul 1 2
Klein, Oskar 1
Klein, Yves 1 2 3 4 5 6
Kleist, Heinrich von 1
Klimt, Gustav 1 2 3
Klinger, Friedrich Maximilian von 1
Klopstock, Friedrich Gottlieb 1
Knut le Grand 1 2
Knut le Hardi 1 2 3
Kobo Abe 1
Koch, Joseph Anton 1
Koch, Robert 1
Kœnig, Pierre 1 2
Koestler, Arthur 1
Kohl, Helmut 1 2 3 4
Kojève, Alexandre 1
Kok, Antony 1
Kōken 1
Kokoschka, Oskar 1
Koltchak, Alexandre 1 2
Komparu Zenchiku 1
Kōnin 1
Koons, Jeff 1
Köprülü, Fazil Ahmet 1
Korn, Alejandro 1
Kornilov, Lavr 1
Koskas, Georges 1
Kōtoku 1
Kotzebue, August von 1
Kouprine, Vassili 1
Koyré, Alexandre 1
Kozlovski, Mikhaïl 1
Kpengla 1
Kramer, Samuel Noah 1
Krishna 1 2 3 4 5 6
Kristeva, Julia 1 2
Krivine, Alain 1 2
Krupp, Bertha 1
Kuanyin 1
Kubaba 1
Kūkai (Kōbō Daishi) 1 2 3
Kukulkan (Quetzalcóatl) 1 2 3
Kumara 1
Kumarāgupta Ier 1
Kumarbi 1
Kundera, Milan 1
Kunti 1
Kupka, František 1 2 3
Kuroda Seiki 1
Kushukh 1
Kussmaul, Adolf 1
Kwestantinos Ier (Zara-Yacob) 1 2 3 4
Kyd, Thomas 1
K’awiil 1 2
Labarna Ier 1
Labarre, Albert 1
Labé, Louise 1
La Boétie, Étienne de 1 2 3 4 5
Labrouste, Henry 1
La Bruyère, Jean de 1 2
Lacan, Jacques 1 2 3 4 5 6
Lachelier, Jules 1 2
Laclos, Cholerdos de 1
Laennec, René 1
La Fayette, Madame de 1
La Fayette, marquis de 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Laffemas, Barthélemy de 1
Lafont, Bernadette 1
La Fontaine, Jean de 1 2 3 4
La Font de Saint-Yenne, Étienne 1 2
Laforgue, Jules 1 2
Lagerlöf, Selma 1 2
Lagos 1 2
Lagrenée, Louis (l’Aîné) 1
Laguiller, Arlette 1
Lakṣmī 1
Laloux, Victor 1
Lamarck, Jean-Baptiste de Monet de 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Lamartine, Alphonse de 1 2 3 4 5 6 7
Lambert, Madame de 1
Lambton, John 1
La Mettrie, Julien Offroy de 1
Langhans, Carl Gotthard 1
Lan Ying 1
Laocoon 1 2
Lao She 1
Lao Tseu 1 2 3 4 5
La Péruse, Jean Bastier de 1
Laplace, Pierre Simon de 1
Laran 1
Larbaud, Valery 1
Larentia 1
La Reynie, Gabriel Nicolas de 1 2 3
Largillière, Nicolas de 1 2 3
Larionov, Michel 1
La Rochefoucauld, François de 1 2
La Rocque, François de 1 2
Larra, José de 1
Larra, Mariano José de 1
Lartet, Eduard 1
La Rue, Pierre de 1
La Russa, Ignazio 1
La Salle, Robert Cavelier de 1 2
Lassus, Roland de 1
La Tour, Georges de 1 2 3
La Tour, Maurice Quentin de 1 2 3 4
Latrobe, Benjamin 1
Lattre de Tassigny, Jean de 1
Laube, Heinrich 1
Laufey 1
Laure 1 2
Laurent 1
Laurent le Magnifique 1 2 3 4 5
Lautréamont, comte de 1 2 3 4
Laval, Charles 1
Laval, Pierre 1 2 3 4 5 6
Lavater, Johann Kaspar 1
Lavoisier, Antoine Laurent 1 2 3
Law, John 1 2 3 4 5 6 7
Lawrence, David Herbert 1
Layard, Austen Henry 1
Lazare 1
Leakey, Louis 1 2
Leakey, Mary 1 2
Léaud, Jean-Pierre 1
Le Blond, Jean-Baptiste 1
Le Breton, André 1
Lebrun, Albert 1 2 3
Le Brun, Charles 1 2 3 4 5 6
Lebrun, Charles François 1
Leclerc, général 1 2 3 4 5
Le Clézio, J. M. G. 1
Lecomte, Claude Martin 1
Leconte de Lisle 1 2 3
Le Corbusier 1 2 3 4 5 6
Leczinska, Marie 1
Le Despenser, Hugh 1
Ledru-Rollin, Alexandre 1
Lee, Robert 1
Lefèvre d’Étaples, Jacques 1 2 3
Lefort, Claude 1 2
Léger, Fernand 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Leibl, Wilhelm 1
Leibniz, Gottfried Wilhelm 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Lemaître, Georges 1 2 3 4 5 6
Lemaître, Jules 1
Le Mercier, Jacques 1
Lemercier de La Rivière, Pierre Paul 1
Lemerre, Alphonse 1
Le Moiturier, Pierre Antoine 1
Lemoyne, Jean-Baptiste 1
Le Nain, Antoine 1 2
Le Nain, Louis 1
Le Nain, Matthieu 1
Lenbach, Franz von 1
Lénine 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Le Nôtre, André 1 2
Léon 1
Léonard de Vinci 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
24 25 26 27 28 29 30 31 32 33
Leone, Giovanni 1
Leoni, Leone 1
Leoni, Pompeo 1
Léonidas Ier 1 2
Léon Ier (général) 1
Léon Ier le Grand 1 2
Léon II 1
Léon III 1
Léon III l’Isaurien 1 2 3
Léonius 1
Léon IV le Khazar 1
Léon VIII 1
Léon X 1 2 3
Léon XIII 1 2
Leopardi, Giacomo 1
Léopold de Hohenzollern 1
Léopold Ier du Saint-Empire 1 2
Léopold II du Saint-Empire 1 2
Léopold V de Babenberg 1
Lepage, Jules Bastien 1
Le Pen, Jean-Marie 1 2
Lepère, Jean-Baptiste 1
Lépide 1 2
Lequeu, Jean-Jacques 1
Lerma, duc de 1
Leroi-Gourhan, André 1 2 3 4 5
Leroy, Louis 1
Le Roy, Louis 1
Le Roy, Philibert 1
Lescot, Pierre 1 2
Lespinasse, Julie de 1
Lesseps, Ferdinand de 1 2
Lessing, Gotthold Ephraim 1 2 3 4 5 6
Le Tellier, François Michel (marquis de Louvois) 1
Le Tellier, Louis François Marie (marquis de Barbezieux) 1
Le Tellier, Michel 1 2
Léto 1
Letta, Enrico 1
Leucippe 1 2 3
Le Vau, Louis 1 2 3 4
Le Verrier, Urbain 1
Lévi 1 2
Levi, Primo 1 2 3
Levinas, Emmanuel 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Lévi-Strauss, Claude 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Levy, Marc 1
Lévy-Bruhl, Lucien 1
Lewinsky, Monica 1
Lewis, Wyndham 1
Leygues, Georges 1 2
Lhermitte, Léon Augustin 1
Lhote, André 1 2
Lhote, Henri 1
Liang Kai 1
Liang Shuming 1
Lichtenstein, Roy 1 2 3 4 5
Licinius 1 2 3 4 5
Liebknecht, Karl 1 2 3 4
Lif 1
Lifthrasir 1
Li Gongli 1
Li Ik 1
Limbour, Georges 1
Limbourg, Herman 1
Limbourg, Jean 1
Limbourg, Paul 1
Lincoln, Abraham 1 2 3
Lindon, Jérôme 1
Linné, Carl von 1 2
Lin Sen 1 2
Lionne, Hugues de 1
Li Peng 1
Lipovetsky, Gilles 1
Lippi, Filippino 1
Lippi, fra Filippo 1
Liszt, Franz 1
Littré, Émile 1
Liu Shaoqi 1
Liutpéra 1
Liutprand 1
Liu Tsung-yuan 1
Liu Yuan 1
Livius Andronicus 1
Li Yu 1
Li Zhi 1
Li Zicheng 1 2
Lochner, Stephan 1
Locke, John 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31 32 33
Lodi, Bahlūl 1
Lodi, Ibrahim 1 2
Loermungandr 1
Loilier, Hervé 1
Loki 1 2 3
Loménie de Brienne, Étienne Charles de 1
Lomonossov, Michel V. 1
London, Jack 1
Long, John L. 1
Longhena, Baldassare 1
Longstreet, James 1
Lope de Vega 1
Lo Pin-wang 1
Lopoukhine, Eudoxie 1 2
Lorenzetti, Ambrogio 1
Lorenzetti, Pietro 1
Lorrain, le 1 2
Lothaire Ier 1 2 3 4
Lothaire III 1
Loti, Pierre 1
Loubet, Émile 1
Lou Chao-lin 1
Louis Antoine de Bourbon-Condé (duc d’Enghien) 1
Louis-Armand de Bourbon-Conti (« le Singe Vert ») 1 2
Louis de Lorraine (cardinal de Guise) 1
Louis Ier d’Espagne 1 2
Louis II de Bavière 1
Louis II de Bourbon-Condé (le Grand Condé) 1 2 3 4
Louis IV de Bourbon 1 2
Louis le Germanique 1 2
Louis le Pieux 1 2 3 4 5 6
Louis-Napoléon (Napoléon Eugène Bonaparte) 1 2
Louis-Philippe I er 1 2 3 4 5 6 7
Louis V 1
Louis VIII de France 1
Louis VII le Jeune 1 2
Louis VI le Gros 1 2
Louis XI de France 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Louis XII de France 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Louis XIII de France 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
23
Louis XIV 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50
Louis XV 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Louis XVI 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Louis XVIII 1 2 3 4 5 6 7 8
Lowell, James Russell 1
Lubbock, John 1 2
Luc 1 2 3 4 5 6
Luca di Borgo 1 2
Lucain 1 2 3 4 5 6
Lu Chiu-Yuan 1
Lucien 1
Lucien de Samosate 1
Lucifer 1
Lucilius 1 2
Lucilius (satiriste) 1
Lucius 1 2
Lucrèce 1 2 3 4 5
Lucy 1 2 3 4 5 6
Ludendorff, Erich 1 2
Lueger, Karl 1
Lug 1 2 3 4
Lugal-Zagesi 1
Lug Samidalnach 1
Lukács, György 1
Lukéni 1
Lula da Silva, Luiz Inácio 1
Lully, Jean-Baptiste 1 2 3 4
Lumière, Auguste 1 2 3
Lumière, Louis 1 2 3
Lumley, Henry de 1 2 3 4
Lumley, Marie-Antoinette de 1 2
Lures, Michel 1
Lutérios 1
Luther, Martin 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Luxembourg, Rosa 1 2 3
Lu Xun 1 2
Luynes, Albert de 1
Lvov, Gueorgui 1
Lycortas 1
Lycurgue 1 2 3
Lydes 1
Lyell, Charles 1 2
Lyotard, Jean-François 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Lysias 1
Lysippe 1 2 3 4 5 6
L’Hospital, Michel de 1
Maât 1
Mabuse 1
Mac Arthur, Douglas 1
Mac Cumaill, Finn 1
MacDonald, Ramsay 1 2
Machaon 1
Machaut, Guillaume de 1 2
Machiavel, Nicolas 1 2 3 4 5 6 7
Machuca, Pedro 1
Mac-Mahon, maréchal de 1 2 3 4 5 6
Macmillan, Harold 1 2 3
Macpherson, James 1
Maderno, Carlo 1 2 3
Madison, James 1 2
Madrazo, Federico de 1
Maffei, Scipione Alfieri 1
Maffesoli, Michel 1
Magellan, Fernand de 1
Magni 1
Magritte, René 1 2 3 4 5 6
Mahāvīra 1 2 3
Mahendravarman Ier 1 2
Mahfûz, Negîb 1
Mahisha 1
Mahler, Gustav 1
Mahomet 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26
Maïakovski, Vladimir 1
Maïeul de Cluny 1
Maillol, Aristide 1 2 3
Maimon, Salomon 1
Maïmonide, Moïse 1 2 3 4
Maine, duc du 1
Maine, Henry James Sumner 1
Maine de Biran, Pierre 1 2
Maintenon, Françoise d’Aubigné, marquise de 1
Maistre, Joseph de 1 2 3
Maître Conrad 1
Maître de Naumburg 1
Maître Eckhart 1 2 3
Maitreya 1
Major, John 1 2 3
Makeda (reine de Saba) 1 2
Makine, Andreï 1
Malachie 1 2
Malcolm X 1
Maldoror 1
Malebranche, Nicolas 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Malesherbes, Chrétien Guillaume de 1
Malevitch, Kasimir 1 2 3 4 5 6
Malherbe, François de 1 2 3 4
Malkine, Georges 1 2
Mallarmé, Stéphane 1 2 3 4 5 6
Malory, Thomas 1
Malraux, André 1 2 3 4
Malthus, Thomas 1
Manassé 1
Manco Cápac 1 2
Mandane 1
Mandela, Nelson 1 2 3
Manet, Édouard 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Manéthon 1 2
Manfredi, Bartolomeo 1
Mann, Thomas 1 2
Mannus 1
Mansart, François 1 2
Mansfield, Katherine 1
Mantegna, Andrea 1 2 3 4
Manthus 1
Manuel Ier Comnène 1 2
Manuel Ier de Portugal 1
Manuel II Paléologue 1
Manzoni, Alessandro 1 2
Mao Zedong 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Marat, Jean-Paul 1 2 3 4 5 6 7 8
Marathus 1
Marc 1 2 3 4 5
Marcadé, Eustache 1
Marc Antoine 1 2 3 4 5 6
Marc Aurèle 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Marcel, Étienne 1 2
Marchais, Georges 1
Marcien 1
Marcion 1 2
Marcovaldo, Coppo di 1 2
Marcus Antonius Gnipho 1
Marcus Cornelius Fronto 1
Marcuse, Herbert 1 2 3 4 5 6
Mardonios 1
Marduk 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Maréchal, Sylvain 1
Marguerite 1
Marguerite de Valois 1
Marguerite d’Angoulême 1
Marguerite d’Anjou 1
Marguerite d’Autriche 1
Marianus 1
Marie 1 2
Marie (avocat) 1
Marie-Anne d’Autriche 1
Marie Anne Victoire d’Espagne 1 2
Marie-Antoinette 1 2 3 4 5 6 7 8
Marie-Barbara de Portugal 1
Marie-Christine de Bourbon-Siciles 1 2
Marie-Christine d’Autriche 1
Marie II d’Angleterre 1 2
Marie Ire (Bloody Mary) 1 2
Marie-Louise de Bourbon-Parme 1 2
Marie-Louise de Savoie 1
Marie-Louise d’Autriche 1
Marie-Louise d’Orléans 1
Marie Stuart 1 2 3 4
Marie-Thérèse d’Autriche 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Marinetti, Filippo 1
Marion, Jean-Luc 1 2
Mariotte, Edme 1
Marius 1
Marivaux, Pierre Carlet de Chamblain de 1 2 3 4 5 6
Marlborough, duc de 1 2
Marley, Bob 1 2
Marlowe, Christopher 1
Marmont, maréchal de 1
Marmontel, Jean-François 1 2
Marot, Clément 1 2 3 4 5 6 7 8
Marot, Jean 1 2
Marrou, Henri-Irénée 1
Marroux, Francis 1
Mars 1 2 3 4 5
Marshack, Alexander 1 2 3
Martí, José 1
Martial 1 2 3
Martignac, vicomte de 1
Martini, Simone 1
Martín Santos, Luis 1
Martin V 1 2
Maruki 1
Marville, Jean de 1
Marx, Karl 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31 32
Maryam al-Fihriya 1
Masaccio 1 2 3 4 5
Masha 1
Masolino da Panicale 1
Massu, Jacques 1 2 3
Mata Hari 1
Mathias Ier du Saint-Empire 1
Mathieu, Georges 1
Mathilde de Toscane 1 2 3 4
Mathilde l’Emperesse 1 2 3 4
Matisse, Henri 1 2 3 4 5
Matta, Roberto 1 2
Matteotti, Giacomo 1
Matthieu 1 2 3 4
Matveïev, Andreï 1
Mauclair, Jacques 1
Maugham, Somerset 1 2
Maulbertsch, Franz Anton 1
Maupassant, Guy de 1 2 3 4 5 6
Maupeou, René Nicolas de 1 2
Maupertuis, Pierre Louis Moreau de 1
Maurice de Nassau 1
Maurice Ier 1 2 3 4
Maurois, André 1
Mauron, Charles 1
Mauroy, Pierre 1 2 3
Mawu 1
Maxence 1 2 3 4 5
Maxime le Grand 1
Maximien 1 2
Maximien de Ravenne 1 2 3
Maximilien (empereur du Mexique) 1 2
Maximilien de Bade 1 2
Maximilien Ier 1 2 3 4 5
Maximilien II 1
Maximin Daïa 1
Maximin II Daïa 1 2
Maxwell, James Clerk 1
Maynard, François 1
Ma Yuan 1
Mazarin, Jules 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Mazzini, Giuseppe 1 2 3
Mbeki, Thabo 1
McCarthy, Joseph 1
McCoy, Sherman 1
McKinley, William 1 2
McLennan, John Ferguson 1 2
Mead, George Herbert 1
Meada, George G. 1
Meane 1
Médicis, Cosme de 1 2 3 4
Médicis, Laurent II de 1
Médicis, Lorenzo di Pierfrancesco de 1
Médicis, Marie de 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Méduse 1
Medvedev, Dimitri 1 2
Mehmet Ier Çelebi 1 2
Mehmet II le Conquérant 1 2 3 4 5 6
Mehmet VI 1
Méhul, Étienne 1
Melanchthon, Philipp 1 2 3
Meléndez Valdés, Juan 1 2
Méliès, Georges 1 2 3
Melqart 1
Melville, Herman 1
Memnon 1
Ménandre 1 2 3
Ménandre Ier 1
Menchikov, Alexandre 1 2 3 4
Menchú, Rigoberta 1
Mencius 1
Mendel, Gregor Johann 1 2
Mendelssohn, Felix 1
Mendelssohn, Moïse 1
Mendès, Catulle 1 2
Mendès France, Pierre 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Mendoza, Antonio de 1
Ménélik Ier 1 2 3
Ménélik II 1
Mengs, Anton Raphael 1
Ménippe 1
Menteouab 1
Menzel, Adolf von 1
Mera, León Juan 1
Mercier de La Rivière, Pierre Paul 1
Mercure 1 2 3 4
Merda, Charles-André 1
Meredith, George 1
Mérenptah 1
Merenrê II 1
Mérikarê 1
Mérimée, Prosper 1
Merkel, Angela 1
Merleau-Ponty, Maurice 1 2 3 4 5 6
Mérovée 1
Meskalamdug 1
Mesmer, Franz Anton 1
Messmer, Pierre 1 2
Mesuë le Jeune 1
Metastasio 1
Métroclès de Maronée 1
Metternich, Klemens von 1
Metzinger, Jean 1
Meunier, Constantin 1
Meyer, Hannes 1
Meyer, Konrad Ferdinand 1
Michée 1 2 3
Michel, Jehan 1
Michel (archange) 1 2
Michel Alexandrovitch de Russie 1
Michel-Ange 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35
Michelet, Jules 1 2 3
Michel Ier 1 2
Michel IV le Paphlagonien 1
Michel VI 1
Michel VIII Paléologue 1 2
Mictlantecuhtli 1
Midas 1 2 3
Mies van der Rohe, Ludwig 1
Mignard, Pierre 1
Mignet, François 1
Mikechine, Michaïl 1
Mikhal 1
Mill, John Stuart 1 2
Miller, Arthur 1
Miller, Henry 1
Millerand, Alexandre 1 2 3
Millet, Catherine 1
Millet, Jean-François 1 2 3 4
Milne-Edwards, Henri 1
Miloš Obilić 1
Miltiade 1
Mimir 1
Minamoto no Yoritomo 1 2 3
Minerve 1 2 3
Mingus, Charlie 1
Minos 1 2
Mirabeau, Honoré Gabriel Riquetti, comte de 1 2 3 4 5 6 7 8
Mirabeau, Victor Riquetti, marquis de 1 2
Mirbeau, Octave 1
Miró, Joan 1 2 3
Misrahi, Robert 1
Mistral, Gabriela 1
Mitchell, Margaret 1
Mithra 1 2 3 4
Mitterrand, François 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Mobutu, Sese Seko 1
Mochi, Francesco 1
Moctezuma Ier 1
Moctezuma II 1 2
Modi 1
Modiano, Patrick 1
Modigliani, Amedeo 1
Mohammed 1
Mohammed Saïd Pacha 1
Mohen, Jean-Pierre 1
Moholy-Nagy, László 1
Mohommed Silla (ou Touré) 1
Moïse 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
Molière 1 2 3 4 5 6 7 8
Molinet, Jean 1
Mollet, Guy 1 2 3
Molotov, Viatcheslav 1 2
Mommsen, Théodore 1
Mommu 1 2 3
Mondrian, Piet 1 2 3 4 5 6
Monet, Claude 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Monge, Jean-Baptiste 1
Monk, George 1
Monluc, Blaise de 1 2
Monmouth, Geoffroy de 1 2
Monnet, Jean 1 2 3
Monod, Gabriel 1
Monory, Jacques 1 2
Monroe, Bill 1
Monroe, James 1 2 3 4
Monroe, Marilyn 1
Montaigne, Michel de 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
Montale, Eugenio 1
Montemayor, Jorge de 1 2
Montesquieu 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Montet, Pierre 1
Monteverdi, Claudio 1
Montfaucon, Bernard de 1
Montgolfier, Étienne 1
Montgolfier, Joseph 1
Montgomery, Bernard 1
Montherlant, Henry de 1
Monti, Mario 1 2
Monti, Vincenzo 1
Montmorency, Anne de 1
Montmorency-Bouteville, François de 1
Montmorency Luxembourg, prince de 1
Montou 1
Montouhotep II 1 2 3 4
Moore, George Edward 1
Moore, Henry 1
Mor, Antonis 1
Morante, Elsa 1
Moratin, Leandro Fernández de 1
Moratín, Leandro Fernández de 1
Moravia, Alberto 1
More, Thomas 1 2 3 4 5
Moréas, Jean 1 2
Moreau, Gustave 1 2 3 4 5
Morgagni, Jean-Baptiste 1
Morgan, Jacques de 1 2
Morgan, Lewis Henry 1 2
Morin, Edgar 1 2
Morisot, Berthe 1 2 3
Morley, Malcolm 1
Morny, duc de 1 2
Moro, Aldo 1 2
Morris, Louis 1
Morris, William 1
Morrison, Toni 1
Mortillet, Gabriel de 1 2 3 4
Morton, Jelly Roll 1
Mossadegh, Mohammad 1
Mosset, Olivier 1
Mouawiya 1 2 3 4 5 6 7
Moubarak, Hosni 1
Moulin, Jean 1 2 3 4
Mountbatten, Philip 1
Mousaïlima 1
Moussorgski, Modest Petrovitch 1
Mout 1 2 3 4 5 6
Mou Zongsan 1 2
Mozart, Wolfgang Amadeus 1 2 3 4 5 6 7
Mozi 1
Mucius Scaevola 1
Muḥammad al-Ahmar 1
Muller, Émile 1
Mumtâz Mahal 1
Mun, Albert de 1
Munch, Edvard 1 2
Mu Qi 1
Murail, Tristan 1
Murasaki Shikibu 1 2 3 4
Murat, Joachim 1
Murat Ier 1 2
Murat II 1 2
Muret, Marc-Antoine 1
Murillo, Benito 1
Musset, Alfred de 1 2
Mussolini, Benito 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
24 25 26 27 28 29 30
Mutsuhito 1 2 3 4
Myriam 1
Myron 1 2
N
Nabonide 1 2 3 4 5
Nabuchodonosor Ier 1 2 3
Nabuchodonosor II 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Nadar 1
Nādir Shah 1 2
Nagai Kafu 1
Nāgārjuna 1
Nagy, Imre 1 2
Nahum 1 2 3
Nakht 1 2
Nakhti 1
Nallier, Jean-Marc 1
Namdev 1
Nandi 1
Nandī (taureau) 1 2
Nanna 1
Nanna (Sin) 1 2 3 4 5
Naoto Kan 1 2
Napoléon Ier 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48
Napoléon III 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30
Napolitano, Giorgio 1
Naram-Sin 1 2 3
Narasimhavarman Ier 1
Narfi 1
Narmer 1 2
Narsès 1
Narváez, Pánfilo de 1
Nasser, Gamal Abdel 1
Natakamani 1
Nathan 1
Nattier, Jean-Marc 1
Nausicaa 1
Na’Tma 1
Necker, Jacques 1 2 3 4 5 6
Nectanébo Ier 1 2 3
Nectanébo II 1 2 3 4
Néfertari 1 2
Néfertiti 1 2
Nehru, Jawaharlal 1
Nekhbet 1 2
Nelson 1
Némésis 1
Néon 1
Nephtali 1
Neptune 1
Nergal 1 2
Néron 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Neruda, Pablo 1
Nerval, Gérard de 1 2 3 4 5
Nestor 1
Nestorius d’Antioche 1 2
Neurath, Otto 1
Newton, Isaac 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Nicandre de Naxos 1
Niccolini, Giambattista 1
Nicéphore II Phocas 1
Nicolas de Byzance 1
Nicolas de Cuse 1 2
Nicolas Ier (pape) 1
Nicolas Ier de Russie 1 2 3 4 5
Nicolas II (pape) 1
Nicolas II de Russie 1 2 3 4 5 6 7 8
Nicolas V (pape) 1
Nicomède Ier 1
Nicosthènes 1
Niépce, Nicéphore 1
Nietzsche, Friedrich 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
23
Nikitine, Ivan 1
Nikolaïevitch, Nicolas 1
Nikon 1
Nimier, Roger 1
Ningal 1
Ningirsu 1 2 3
Ningishzida 1
Ninhursag 1 2
Ninighi 1
Nin-lin 1
Nishi Amane 1
Nishida Kitarō 1 2
Nishikawa Joken 1
Nithard, Johann 1
Nitôkris 1
Nivelle, Robert Georges 1 2 3 4
Nixon, Richard 1 2 3 4 5 6 7 8
Ni Zan 1
Njördr 1 2 3
Noailles, Philippe Louis de 1
Noāmi 1
Nobunaga Oda 1 2 3 4
Nodier, Charles 1
Noé 1 2
Nogaret, Guillaume de 1 2
Nollet, Jean Antoine 1
Noske, Gustav 1
Nothomb, Amélie 1
Noun 1
Novalis 1 2
Nunez, Andrès 1
Nurhachi 1 2 3 4 5
Nuwa 1
Nyman, Michael 1
Nyx 1 2
Nzambi ampungu 1
Obama, Barack 1 2 3 4
Obrecht, Jacob 1
Océan 1 2
Octave 1 2 3 4 5 6 7
Octosyrus 1
Odin 1 2 3 4 5 6
Odoacre 1 2 3 4 5 6
Odon 1
Odon de Metz 1
Odr 1
Œdipe 1 2 3 4
Oe Kenzaburo 1
Offenbach, Jacques 1
Ogai, Mori 1 2 3
Ogata Korin 1
Ogma 1 2
Ogmios 1
Ogun 1
Ohrhan Gazi 1 2
Oisin 1
Okakura Kakuzo 1
Okakura Tenshin 1
Oktan 1
O-Kuni 1
Oldenburg, Claes 1 2 3
Oleg le Sage 1
Olivares, comte d’ 1 2 3 4
Ollivier, Émile 1
Olodumare 1
Olsen, Régine 1
Olympias 1
Omar 1 2 3 4 5
Omri 1 2
Oppenheim, Dennis 1
Oppenordt, Gilles Marie 1
Orbay, François d’ 1
Orbigny, Alcide Dessalines d’ 1
Oreste 1
Orgaz, comte d’ (Don Gonzalo Ruiz) 1 2
Orgétorix 1
Oriane 1
Origène 1 2 3 4 5
Orlando, Vittorio 1
Orlov, Grigori 1
Orphée 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Orseolo, Pietro II 1
Orsini, Felice 1 2
Orwell, George 1
Osaï Tutu 1
Osborne, John 1
Osée 1 2 3 4
Osiris 1 2 3 4 5 6 7
Osman Ier 1
Osorkon II 1 2
Ossian 1
Othon 1
Ottokar II 1 2
Otton Ier de Saxe 1
Otton Ier le Grand 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Otton II 1
Otton III 1 2 3
Otton IV de Brunswick 1 2 3 4
Ouadjet 1
Oud, Jacobus Johannes Pieter 1
Oudinot, Nicolas 1
Oudry, Jean-Baptiste 1
Ounamon 1 2 3
Ounas 1 2
Ouranos 1 2 3 4 5 6
Ousman dan Fodio 1 2
Ouyang Xiu 1
Overbeck, Johann Friedrich 1
Ovide 1 2 3 4 5 6 7 8
Owen, Robert 1 2 3
Ozenfant, Amédée 1
Ozias (Azarias) 1 2
O’Neill, Eugene 1
Pachacutec 1 2 3 4 5
Pacheco, Francisco 1
Pacinotti, Antonio 1
Pacôme de Tabennèse 1 2
Pagnol, Marcel 1
Paine, Thomas 1 2
Pajou, Augustin 1
Pakal le Grand de Palenque 1 2 3 4
Palacio Valdés, Armando 1
Paladino, Mimmo 1
Paleotte 1
Palizzi, Giuseppe 1
Palladio, Andrea 1 2 3 4 5
Palladius 1
Pan Chong-shu 1
Pandu 1 2 3
Panétius de Rhodes 1 2 3 4
Pāṇini 1
Pantagruel 1
Pantainos 1
Paolozzi, Eduardo 1
Papa Legba 1 2
Papen, Franz von 1 2
Papeus 1
Papin, Denis 1 2 3
Pappus 1
Paracelse 1 2 3
Pardo Bazán, Emilia 1
Paré, Ambroise 1
Paris, comte de 1 2
Pâris, Pierre Adrien 1
Parker, Charlie (« Bird ») 1
Parménide 1 2 3 4
Parmentier, Michel 1
Parmesan, le 1 2 3
Parnell, Charles 1 2
Parrot, André 1
Pärt, Arvo 1
Pārvatī 1
Pascal, Blaise 1 2 3 4 5 6 7 8
Pascoli, Giovanni 1
Pasolini, Pier Paolo 1
Passeron, René 1
Pasternak, Boris 1 2
Pasteur, Louis 1 2 3
Patañjali 1 2
Pathé, Charles 1
Patrick (saint) 1 2
Patrocle 1 2
Paul 1
Paul (saint) 1 2 3 4 5
Paul de Tarente 1
Paulhan, Jean 1
Paul Ier (pape) 1
Paul Ier de Russie 1 2
Paul III 1 2 3 4 5
Paul IV 1 2
Paul le Silentiaire 1
Paulus, Friedrich 1 2 3 4 5
Paul V 1
Pausanias 1 2
Pavlov, Ivan 1
Paz, Octavio 1
Peel, Robert 1
Pégase 1 2
Péguy, Charles 1
Peirce, Charles S. 1
Peiresc, Nicolas Claude Fabri de 1
Péladan, Joséphin 1
Pélage 1
Peletier du Mans, Jacques 1
Pella, Giuseppe 1
Pellico, Silvio 1
Pélops 1 2 3
Penda 1
Pépi II 1
Pépin de Herstal 1 2
Pépin de Landen 1
Pépin d’Italie 1 2
Pépin le Bref 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Percier, Charles 1 2
Perec, Georges 1 2
Pereire, Émile 1
Pereire, Isaac 1
Peret, Benjamin 1
Pérez Galdós, Benito 1 2
Périclès 1 2 3 4 5 6 7
Perov, Vassili 1
Perrault, Charles 1 2
Perrault, Claude 1 2
Perret, Auguste 1
Perry, Matthew Calbraith 1
Persée 1
Persée (roi) 1
Perséphone 1 2
Pérugin, le 1 2 3 4 5 6 7
Peruzzi, Baldassare 1
Pescennius Niger 1
Petacci, Clara 1
Pétain, Philippe 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
24 25 26 27 28 29
Petchevy 1
Peterson, Oscar 1
Pétrarque 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Pétrone 1 2
Pétrovitch, Alexis 1
Peutinger, Conrad 1
Pevsner, Antoine 1 2
Peyrony, Denis 1 2
Peyrony, Elie 1
Pfimlin, Pierre 1 2
Pforr, Franz 1
Phaedra 1
Phèdre (Caius Lulius Phaedrus) 1 2 3
Phénix 1
Phidias 1 2 3 4
Philarète 1
Philinus 1
Philippe Auguste 1 2 3 4 5 6 7
Philippeaux, Pierre 1
Philippe d’Orléans 1 2 3 4 5 6 7 8
Philippe Ier de Parme 1
Philippe Ier de Souabe 1 2 3
Philippe II de Macédoine 1 2 3
Philippe II d’Espagne 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Philippe III d’Espagne 1 2
Philippe II le Hardi 1 2
Philippe IV d’Espagne 1 2 3 4 5
Philippe IV le Bel 1 2 3 4 5 6 7
Philippe le Beau 1
Philippe le Bon 1
Philippe Néri 1
Philippe V d’Espagne 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Philippe VI de France 1 2
Philippidès 1
Philopœmen 1
Philostrate 1
Phocas 1 2
Photios 1
Phryné 1
Piankhy 1 2 3
Piazetta, Giovanni Battista 1
Picabia, Francis 1 2 3 4 5
Picard, Casimir 1
Picard, Raymond 1 2
Picasso, Pablo 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28
Piccinni, Nicola 1 2
Pic de la Mirandole, Jean 1 2 3 4
Pickford, Martin 1
Picquart, Georges 1
Pie IX 1 2 3 4
Piero della Francesca 1 2 3 4 5 6
Pierre (saint) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Pierre Damien 1 2
Pierre de Cortone 1
Pierre Ier le Grand 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22
23 24 25
Pierre II de Courtenay 1 2
Pierre II de Russie 1
Pierre III de Russie 1 2 3
Pierre III d’Aragon 1
Pierre le Cruel 1
Pierre le Vénérable 1
Pierre Lombard 1 2
Piette, Édouard 1
Pie V 1 2
Pie VI 1 2 3
Pie VII 1 2 3
Pie X 1
Pigalle, Jean-Baptiste 1 2
Pilgrim de Passau 1
Pilniak, Boris 1
Pilon, Germain 1 2
Pinay, Antoine 1 2 3 4 5
Pindare 1 2 3 4
Pineau, Christian 1
Pinel, Philippe 1 2
Pirandello, Luigi 1 2 3
Piranèse 1
Pisandre de Rhodes 1
Pisanello 1
Pisano, Andrea 1 2
Pisano, Giunta 1
Pisano, Nicola 1 2 3 4
Pisistrate 1 2
Pison 1
Pissarro, Camille 1 2 3 4 5 6 7 8
Pitt, William (le Jeune) 1 2 3
Pitt-Rivers, Augustus 1
Pizarro, Francisco 1 2
Plan Carpin, Jean du 1
Planck, Max 1
Platon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51
Platonov, Andreï 1
Plaute 1 2 3 4 5
Pline le Jeune 1 2
Pline l’Ancien 1 2 3 4 5 6 7
Plotin 1 2 3
Plutarque 1 2 3 4
Podalire 1
Poe, Edgar Allan 1 2 3
Poher, Alain 1
Poincaré, Raymond 1 2 3 4 5 6 7 8
Poinso-Chapuis, Germaine 1 2
Poliakoff, Serge 1 2
Polignac, prince de 1
Polke, Sigmar 1
Pollock, Jackson 1 2 3 4 5 6 7 8
Polo, Marco 1 2 3 4
Polonceau, Antoine-Rémy 1
Polybe 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Polyclète 1 2 3 4 5 6
Polyclète le Jeune 1
Polydore 1
Polymédès d’Argos 1
Polyphème 1
Pompadour, Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de 1 2
Pompée 1 2 3 4 5
Pompidou, Claude 1
Pompidou, Georges 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Ponce de León, Juan 1
Ponce Pilate 1
Ponge, Francis 1
Ponocrates 1
Pontbriand, François de 1
Pontormo, le 1 2 3
Pontos 1
Pontus de Tyard 1
Popeye 1
Popper, Karl 1 2
Porphyre de Tyr 1 2 3
Poséidon 1 2 3
Posidonius d’Apamée 1 2 3
Pot, Philippe 1
Potemkine, Grigori 1
Pottier, Eugène 1
Pouchkine, Alexandre 1 2 3
Pougatchev, Emelian Ivanovitch 1
Poukirev, Vassili 1
Pourbus, Frans (le Jeune) 1
Poussin, Nicolas 1 2 3 4 5
Poutine, Vladimir 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Pou-Yi 1 2
Powell, Colin 1
Pradier, James 1
Praxitèle 1 2 3 4
Préault, Antoine Augustin 1
Presley, Elvis 1
Prévert, Jacques 1
Previati, Gaetano 1
Priestley, Joseph 1
Primatice, le 1 2 3 4 5
Primo de Rivera, José Antonio 1
Primo de Rivera, Miguel 1 2 3
Princip, Gavrilo 1
Priscus 1
Proclus 1 2 3 4
Procope de Césarée 1 2 3
Profumo, John 1 2
Prokofiev, Serge 1
Prométhée 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Properce 1 2
Protagoras 1 2 3
Proudhon, Pierre Joseph 1
Proust, Antonin 1
Proust, Marcel 1 2 3 4 5 6 7 8
Psousennès Ier 1
Ptah 1
Ptolémée 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
Ptolémée Ier 1 2 3 4 5 6
Ptolémée II 1 2 3 4
Ptolémée IV 1 2
Ptolémée Keraunos 1
Pû-abi 1
Pucelle, Jean 1
Puduhepa 1
Pufendorf, Samuel von 1
Puget, Pierre 1
Pugin, Augustus Welby Northmore 1
Pukalesi II 1
Pulchérie 1
Purcell, Henry 1
Puvis de Chavannes, Pierre 1 2 3 4
Puyi 1 2 3
Pu Yi 1 2
Pyrrhon d’Élis 1
Pythagore 1 2 3 4 5 6
Pythéos 1
Pythie de Delphes 1
P’an-kou 1
Q
Qaitbey 1
Qansuh al-Ghuri 1
Qianlong 1 2 3 4 5 6
Qin Shi Huangdi 1 2
Quasimodo, Salvator 1
Quesnay, François 1 2 3
Quesnel, Pasquier 1 2
Quetzalcóatl (Kukulkan) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Queuille, Henri 1
Quintilien 1 2
Quintus Marcius Philippus 1 2
Qusay 1
Quṭb al-Dīn Aibak 1 2
Raban Maur 1 2
Rabelais, François 1 2 3 4 5
Rabin, Yitzhak 1 2
Racan, Honorat de 1
Racine, Jean 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Radagais 1
Radjaradja le Grand 1
Raeder, Erich 1
Raffarin, Jean-Pierre 1 2
Ragon, Michel 1 2
Rājarāja Ier Chola 1
Rajoy, Mariano 1
Rāma 1 2 3
Ramadier, Paul 1
Ramdas 1
Rameau, Jean-Philippe 1 2 3
Ram Moham Roy 1
Ramosé 1
Ramsauer, Johann Georg 1
Ramsès Ier 1 2
Ramsès II 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Ramsès III 1 2 3 4 5 6
Ramsès IX 1
Ramsès VI 1
Ramsès XI 1 2
Rancillac, Bernard 1
Rani (reine de Jhansi) 1
Ranjit Singh 1
Ranson, Paul 1
Rao, Narasimha 1
Raphaël 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Rastrelli, Francesco Bartolomeo 1 2
Ratchis 1
Ravaillac, François 1
Ravaisson-Mollien, Félix 1
Ravasi, Gianfranco 1
Ravel, Maurice 1
Rawls, John 1 2
Ray, Man 1 2 3 4 5
Rāzi 1 2
Razoumovski, Alexis 1
Rê 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Reagan, Ronald 1 2 3 4 5
Réaumur, René Antoine Ferchault de 1
Rebeyrolle, Paul 1
Redon, Odilon 1
Regiomontanus (Johannes Müller) 1
Régnier, Henri de 1
Reich, Steve 1
Reid, Thomas 1
Reinecke, Paul 1
Reinhardt, Django 1
Rembrandt 1 2 3 4 5 6
Remi de Reims 1
Remus 1 2 3 4 5 6
Renart 1
Renaudot, Théophraste 1
Renault, Louis 1
Renaut, Alain 1
René d’Anjou 1 2 3
Renoir, Auguste 1 2 3 4 5 6 7
Renouvier, Charles 1 2 3
Renouvin, Bertrand 1
Renus 1
Repgow, Eike von 1
Restany, Pierre 1 2
Retz, cardinal de 1
Revault d’Allonnes, Olivier 1
Reynaud, Paul 1 2 3 4 5
Reynolds, Albert 1
Reynolds, Joshua 1 2 3
Rhadamanthe 1 2
Rhazès 1
Rhéa 1 2 3
Rheticus 1
Ribbentrop, Joachim von 1 2
Ricardou, Jean 1
Ricci, Matteo 1 2
Rice, Condoleezza 1
Richard, Jean-Pierre 1
Richard Cœur de Lion 1 2 3 4 5
Richard de Shrewsbury 1
Richard d’York 1 2
Richard II de Normandie 1
Richard II d’Angleterre 1 2
Richard III d’Angleterre 1 2
Richardson, Henry Hobson 1 2
Richardson, Samuel 1
Richelieu, Armand Jean du Plessis de 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
17 18 19 20 21
Richelieu, duc de 1 2
Ricœur, Paul 1 2 3 4 5 6 7
Ridgway, Matthew 1
Rigaud, Hyacinthe 1 2 3 4 5
Rimbaud, Arthur 1 2 3 4 5
Rimski-Korsakov, Nikolaï Andreïevitch 1
Riopelle, Jean-Paul 1
Riourik 1
Rivette, Jacques 1
Rivière, Émile 1
Robbe-Grillet, Alain 1 2 3 4 5
Robert, Hubert 1
Robert de Chester 1
Robert de Courtenay 1
Robert-Houdin, Jean Eugène 1
Robert Ier de France 1
Robert Ier du Saint-Empire 1
Robert II Courteheuse 1
Robespierre, Maximilien de 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Roboam 1 2
Rocard, Michel 1 2 3 4
Rodin, Auguste 1 2 3 4 5 6 7 8
Rodolphe Ier de Habsbourg 1 2 3 4
Rodolphe II du Saint-Empire 1
Rodrigue (ou Rodéric) 1
Rodtchenko, Alexander Mikhaïlovitch 1 2
Roger 1
Roger II de Sicile 1
Roggeveen, Jacob 1
Rohan, Louis René Édouard 1
Rohan, Marie de (duchesse de Chevreuse) 1
Röhm, Ernst 1 2
Rohmer, Éric 1
Roland 1
Rolland, Romain 1
Rollon 1
Romain III 1
Romains, Jules 1
Römer, Ole 1
Romilly, Jacqueline de 1
Rommel, Erwin 1 2 3
Romney, Willard Mitt 1
Romulus 1 2 3 4 5 6 7
Romulus Augustule 1 2 3
Ronsard, Pierre de 1 2 3 4 5 6 7 8
Röntgen, Wilhelm Conrad 1
Roosevelt, Éléonore 1
Roosevelt, Franklin Delano 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Roosevelt, Théodore 1 2 3 4
Rorty, Richard 1
Roscelin 1 2
Rosenberg, Alfred 1
Rosenberg, Ethel 1
Rosenberg, Julius 1
Rosenzweig, Franz 1 2
Rossellini, Roberto 1
Rossetti, Dante Gabriel 1 2
Rossi, Carlo 1
Rossini, Gioachino 1 2
Rosso Fiorentino 1 2 3 4 5
Roth, Philip 1
Rothari 1
Rothko, Mark 1
Rouher, Eugène 1
Rousseau, Henri (douanier Rousseau) 1
Rousseau, Jean-Jacques 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
22 23 24 25 26 27 28 29 30 31
Rousseau, Théodore 1 2 3 4
Rousseff, Dilma 1
Rowling, J.K. 1
Royal, Ségolène 1
Royce, Josiah 1
Royer, Jean 1
Ruben 1
Rubens, Pierre Paul 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Rubrouck, Guillaume de 1
Rude, François 1
Rudiobus 1
Rufin 1 2
Ruga le Grand 1 2
Ruisdael, Jacob van 1 2 3
Runge, Philipp Otto 1
Rushdie, Salman 1 2
Ruskin, John 1 2 3
Russell, Bertrand 1 2 3 4 5
Rutebeuf 1
Ruzante 1
Rykov, Alexeï 1
Sabatelli, Pietro 1
Sabbatai Zvi 1
Sachs, Hans 1
Sadate, Anouar el- 1 2
Sadeddin 1
Sadi-Carnot 1 2
Saga 1
Sagan, Françoise 1 2
Saichō (Dengyo Daishi) 1
Saint Antoine 1 2
Saint Augustin 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Saint Boniface 1
Saint-Cyran, abbé de 1
Saint Dominique 1 2
Sainte-Beuve, Charles Augustin 1
Sainte Geneviève 1
Saint Éloi 1
Saint-Gelais, Mellin de 1
Saint Germain d’Auxerre 1
Saint Jérôme 1 2
Saint-John Perse 1
Saint-Just, Louis 1 2 3 4
Saint Louis 1 2 3 4 5 6 7 8
Saint-Martin, Louis Claude de 1
Saint Phalle, Niki de 1 2 3 4
Saint Sabas 1
Saint-Simon, Henri de 1 2 3 4 5 6 7 8
Saladin 1 2 3 4
Salan, Raoul 1 2 3
Saleh, Ali Abdallah 1
Salengro, Roger 1 2
Salisbury, lord 1
Salluste 1 2 3 4 5
Salmanasar Ier 1
Salmanasar III 1
Salmon, André 1
Salomon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Samudragupta 1
Samuel 1 2 3
Sand, Karl Ludwig 1
Sands, Bobby 1 2 3 4 5
Sansovino, il 1 2 3
Sanz de Sautuola, Marcelino 1
Sappho 1
Sarah 1 2 3
Sarasvatī 1
Sargon d’Akkad 1 2 3 4 5 6 7 8
Sarkozy, Nicolas 1 2 3 4
Sarpédon 1
Sarraute, Nathalie 1 2 3
Sartre, Jean-Paul 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Satuni 1
Saturne 1
Saül 1 2 3 4 5 6 7 8
Saussure, Ferdinand de 1 2 3 4 5
Savalette de Lange, marquis de 1
Savary, Alain 1
Savitar 1
Savonarole, Jérôme 1
Scarlatti, Alessandro 1
Scarpetta, Guy 1
Scarron, Paul 1
Scelba, Mario 1
Scelsi, Giacinto 1
Scève, Maurice 1 2
Schacht, Hjalmar 1
Schall, Adam 1 2 3 4
Scheele, Carl Wilhelm 1
Scheidemann, Philipp 1 2
Schelling, Friedrich Wilhelm Joseph von 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
16 17 18 19
Scheurer-Kestner, Auguste 1
Schickele, René 1
Schiele, Egon 1
Schiller, Friedrich von 1 2 3 4 5 6 7
Schinkel, Karl Friedrich 1
Schlegel, August Wilhelm von 1
Schlegel, Friedrich von 1
Schleicher, Kurt von 1 2
Schlick, Moritz 1
Schliemann, Heinrich 1 2
Schmidt, Helmut 1
Schœlcher, Victor 1
Schoenberg, Arnold 1 2
Scholem, Gershom 1
Schopenhauer, Arthur 1 2 3 4 5 6 7
Schröder, Gerhard 1
Schrödinger, Erwin 1
Schubert, Franz 1 2
Schulze, Gottlob Ernst 1
Schuman, Robert 1 2 3 4 5
Schumann, Robert 1
Schütz, Heinrich 1
Schwitters, Kurt 1
Scipion Émilien 1 2
Scipion l’Africain 1
Scopas 1 2 3
Scott, Walter 1 2 3
Scudéry, Madeleine de 1
Searle, John Rogers 1
Seberg, Jean 1
Secrétan, Charles 1
Sédécias 1
Sedefhar Mehmet Aga 1
Sedgwick, Adam 1
Segalen, Victor 1
Segni, Antonio 1
Séguier, Pierre 1
Seki Takakazu 1
Séleucos Ier 1 2
Sélim Ier le Hardi 1 2 3 4
Sélim II 1
Sémiramis 1 2
Sénèque 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Senghor, Léopold Sédar 1
Senjuro Hayashi 1
Sennachérib 1 2 3
Senut, Brigitte 1
Septime Sévère 1 2 3 4 5 6 7
Sérapion d’Alexandrie 1
Sérapion le Vieux 1
Sérapis 1 2 3
Serreau, Jean-Marie 1
Sérusier, Paul 1 2 3 4
Servandoni, Jean-Nicolas 1
Servet, Michel 1 2
Sésostris Ier 1 2 3 4
Sésostris III 1 2
Sesshū 1
Séthi Ier 1 2 3 4
Sethnakht 1
Seuphor, Michel 1
Seurat, Georges 1 2 3 4 5
Severini, Gino 1
Sévigné, Madame de 1
Sextus Empiricus 1 2 3 4 5 6 7 8
Sforza, Francesco 1 2 3 4
Shabaka 1
Shadow, Johann Gottfried 1
Shaftesbury, comte de 1
Shah Alam II 1
Shah Jahan 1 2 3 4 5
Shai Ta-zong 1
Shakespeare, William 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Shakti 1 2 3
Shamash (Utu) 1 2 3 4 5
Shana’Kin Yaxchel Pakal 1
Shango 1
Shar-Kali-Sharri 1
Sharruma 1
Shaushka 1
Shaushtatar Ier 1
Shaw, George Bernard 1
Shebo 1
Shelley, Percy B. 1 2
Shennong 1
Shepherd, David 1
Sheridan, Richard Brinsley 1
Sherman, William T. 1
Sheshonq Ier 1 2
Sheshonq III 1
Shigeru Yoshida 1
Shimegi 1
Shimomura Kanzan 1
Shi Naian 1
Shinzo Abe 1
Shitao 1 2 3
Shiva 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Shizu (Koubilaï Khan) 1 2 3
Shōkō 1
Shōmu 1 2
Shotoku 1
Shuddhodana 1
Shulgi 1 2
Shunzhi 1 2 3 4
Siamon 1
Siddhārta Gautama (Bouddha) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Siegfried 1
Sieyès, Emmanuel Joseph 1 2 3 4
Sif 1
Sigebert Ier 1
Siger de Brabant 1
Sigismond Ier du Saint-Empire 1 2 3 4 5
Sigmund 1
Signac, Paul 1 2
Signorelli, Luca 1 2 3
Sigyn 1
Silène 1
Sills, Paul 1
Sima Yan 1
Siméon 1
Siméon de Durham 1
Simon, Claude 1 2
Simon, Jules 1
Simonide de Céos 1 2
Simon IV de Montfort 1 2
Simon V de Montfort 1 2 3
Simplicio 1
Simplicius 1
Simpson, Wallis 1 2 3 4
Sin (Nanna) 1 2 3
Sinan 1
Sinatra, Frank 1 2
Singer, Isaac Bashevis 1 2 3
Singer, Israel Joshua 1
Sinouhé 1
Sirinelli, Jean 1
Sisley, Alfred 1 2 3 4 5 6 7 8
Sītā 1 2
Sixte IV 1 2 3 4 5
Skadi 1
Skandagupta 1 2
Skiluros 1
Sleipnir 1
Sluter, Claus 1 2
Smendès Ier 1 2
Smetana, Bedřich 1
Smith, Adam 1 2
Smith, Bessie 1
Smithson, Robert 1
Smythson, Robert 1
Snéfrou 1 2
Snodgrass, Anthony 1
Sōami 1
Soane, John 1
Soboul, Albert 1
Socrate 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Sodoma, le 1
Solazkade 1
Solbes, Rafael 1
Soliman le Magnifique 1 2 3 4
Soljénitsyne, Alexandre 1
Solon 1 2 3 4 5 6
Solstad, Dag 1
Song Wudi 1
Sophie (impératrice) 1
Sophie de Hohenberg 1
Sophie Paléologue 1
Sophilos 1
Sophocle 1 2 3 4 5
Sophonie 1 2 3
Sophronisque 1
Sorbon, Robert de 1
Sorel, Georges 1
Soseki, Natsume 1 2
Sosigène 1
Sostrate de Cnide 1
Soto, Jesús Rafael 1
Soufflot, Jacques Germain 1 2
Soulages, Pierre 1 2 3
Soumarokov, A.P. 1
Soundiata Keita 1 2
Soupault, Philippe 1 2 3 4 5
Soutine, Chaïm 1
Souverbie, Jean 1
Spallanzani, Lazzaro 1
Spartacus 1 2
Speer, Albert 1
Spencer, Herbert 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Spinola, Carlo 1
Spinoza, Baruch 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Spoerri, Daniel 1
Spranger, Bartholomeus 1
Sseu-ma Ts’ien 1
Stadler, Ernst 1
Staël, Madame de 1 2 3 4
Stahl, Georg Ernst 1
Staline, Joseph 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31 32 33 34
Stateira 1
Stavisky, Alexandre 1 2 3 4 5 6
Steen, Jan 1
Stein, Gertrude 1
Steinbeck, John 1 2
Stella, Frank 1
Stendhal 1 2 3
Stéropès 1
Stevenson, Robert Louis 1
Stilicon 1 2
Stinnes, Hugo 1
Stirner, Max 1
Stockhausen, Karlheinz 1
Stoker, Bram 1
Stolpe, Hjalmar 1
Strabon 1 2 3 4 5
Strasberg, Lee 1
Strauss, Leo 1
Stravinsky, Igor 1
Stresemann, Gustav 1
Strindberg, August 1
Sturluson, Snorri 1
Suárez, Adolfo 1 2 3
Sue, Eugène 1
Suétone 1 2 3 4 5 6 7 8
Suffren, Pierre André de 1
Suger de Saint-Denis 1 2 3 4 5
Suiko 1 2
Sui Yangdi 1 2
Sullivan, Louis 1 2
Sully, Maximilien de Béthune, duc de 1
Sully Prudhomme 1 2
Sulzer, Johann Georg 1 2
Sumuabu 1
Sun Yat-Sen 1 2 3 4 5 6 7
Suppiluliuma II 1 2
Surya 1
Suryavarman Ier 1
Suryavarman II 1
Su Shi 1
Suśruta 1 2
Sustris, Lambert 1
Sutter, Joseph 1
Suzanne 1
Sven Ier à la Barbe fourchue 1 2
Sviatoslav de Novgorod 1
Swann, Charles 1
Swedenborg, Emanuel 1
Swift, Jonathan 1 2
Syagrius 1 2 3
Sydenham, Thomas 1 2
Sylla 1
Sylvestre Ier 1 2 3
Syméon Métaphraste 1
Symmaque 1
Tabiti 1
Tachibana no Hayanari 1
Tacite 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Taft, William H. 1
Tagès 1
Tagore, Rabindranath 1 2 3 4
Taguapica 1
Taharqa 1 2
Taieb, Maurice 1
Tailapa II 1
Taillandier, Yvon 1
Taine, Hippolyte 1 2 3 4 5
Tai Wen-Ching 1
Taizong 1
Taizong (Li Shimin) 1 2
Taizu (dynastie Jin) 1
Taizu (dynastie Song) 1 2
Takebe Katahiro 1
Takemoto Gidayu 1
Talleyrand, Charles Maurice de 1 2 3
Tambroni, Fernando 1
Tamerlan 1 2 3 4 5 6
Tammuz (Dumuzi) 1
Tanaka 1
Tang Sien tsou 1
Tang Tai 1
Tangun 1
Tanguy, Yves 1 2 3 4
Tang Xuanzong 1
Tang Yin 1
Tao Qian 1
Tapas 1
Tapié, Michel 1
Tàpies, Antoni 1
Tara 1
Taranis 1 2
Tardieu, André 1
Tarhunt (Teshub) 1 2 3
Tarquin l’Ancien 1
Tasse, le 1 2
Tassi, Agostino 1
Tassilon III 1
Tatischev, Vassili N. 1
Tatline, Vladimir Evgrafovitch 1 2
Taut, Bruno 1
Tawaraya Sotatsu 1
Tchang Kaï-chek 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Tchekhov, Anton 1 2 3
Tchernenko, Konstantin 1
Tchernychevski, Nikolaï Gavrilovitch 1
Teglath-Phalasar I er 1
Tejero, Antonio 1
Telibinu 1
Temmu 1
Tepeyollotl 1
Terah 1 2 3
Térence 1 2 3
Teshub (Tarhunt) 1 2 3 4 5
Tesla, Nikola 1
Tetzel, Jean 1
Teutates 1 2
Tezcatlipoca 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Tezozomochtli 1
Thackeray, William Makepeace 1
Thalès de Milet 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Thamar 1 2
Thatcher, Denis 1
Thatcher, Margaret 1 2 3 4 5 6 7 8
Thémistocle 1
Théocrite 1 2
Théodelinde 1
Théodora (femme de Justinien Ier) 1 2 3 4
Théodora (femme de Théophile) 1 2
Théodore de Cantorbéry 1
Théodoric le Grand 1 2 3 4 5 6 7 8
Théodoros II 1
Théodose Ier 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Théodose II 1 2 3 4 5 6 7 8
Théodulf d’Orléans 1 2 3
Théophile 1 2
Théophile d’Alexandrie 1
Théophraste 1
Thérèse d’Avila 1 2
Thésée 1 2
Thespis 1 2
Thétis 1
Theudius 1
Thierry 1
Thierry, Augustin 1 2
Thiers, Adolphe 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Thiersch, Hermann 1
Thin, Auguste 1
Thomas, George K. 1
Thomas d’Angleterre 1
Thomas d’Aquin 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Thor 1 2 3
Thoreau, Henry David 1 2
Thorez, Maurice 1 2
Thot 1
Thoukhatchevski, Mikhaïl 1
Thoutmôsis III 1
Thucydide 1 2 3 4 5 6 7
Thyeste 1
Tiamat 1 2
Tibère 1 2 3 4
Tibère II 1
Tiberius Sempronius Gracchus 1
Tibulle 1 2 3 4 5
Tiepolo, Giambattista 1 2 3 4
Timarchos 1
Timothée 1
Timothée de Milet 1
Tinguely, Jean 1 2 3 4 5
Tinia 1 2
Tintoret, le 1 2 3 4 5 6 7 8
Tippu Sahib (ou Tippu Sultan) 1 2
Tirso de Molina 1 2
Tishatal 1
Tite-Live 1 2 3 4 5 6 7
Titi 1 2
Titien 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Titus 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Tivoli, Serafino de 1
Tlacaelel 1
Tlaloc 1 2 3 4
Tobias, Phillip 1
Tocqueville, Alexis de 1
Todorov, Tzvetan 1 2
Toghrul-Beg 1
Tohil 1
Tokugawa, Ieyasu 1 2 3
Tokugawa, Yoshimune 1
Toledo, Antonio 1
Toledo, Juan Bautista de 1
Tolkien, John Ronald Reuel 1
Tolstoï, Léon 1 2 3 4 5 6
Tomasi di Lampedusa, Giuseppe 1
Tomichii Murayama 1
Toneri 1
Toroni, Niele 1
Torricelli, Evangelista 1
Torrigiani, Pietro 1
Tosa Mitsuhide 1
Tosa Mitsunaga 1
Totila 1
Toulouse-Lautrec, Henri de 1 2
Toumaï 1 2
Touraine, Alain 1
Tourguéniev, Ivan Sergueïevitch 1
Tournefort, Joseph Pitton de 1
Tournier, Michel 1
Toutankhamon 1 2
Toutant de Beauregard, Pierre Gustave 1 2
Toutatis 1
Toynbee, Arnold 1
Toyotomi Hideyoshi 1 2 3 4 5
Tracy, Dick 1
Trajan 1 2 3
Trakl, Georg 1
Travolta, John 1
Trediakovski, V.K. 1
Trezzini, Domenico 1
Trimalcion 1
Tristan 1
Trotski, Léon 1 2 3 4 5 6 7 8
Trouvé, Alain-J. 1
Troyat, Henri 1
Truffaut, François 1 2
Truman, Harry 1 2 3 4 5 6 7
Tsubouchi Shòyo 1
Tuisto 1
Tukaram 1
Tulsidas, Goswani 1
Tunapa 1
Turan 1
Turenne, Henri de la Tour d’Auvergne, vicomte de 1 2
Turgot 1 2 3 4 5 6 7
Turner, Joseph Mallord William 1 2 3 4 5 6 7
Twain, Mark 1
Twiggy 1
Tylor, Edward Burnett 1 2 3 4 5
Tyr 1 2
Tyrtée 1 2
Tzara, Tristan 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Vailland, Roger 1
Vaillant, Auguste 1
Vak 1
Valentin, le 1
Valentinien III 1 2 3
Valéry, Paul 1 2 3 4 5
Valignani, Alessandro 1
Vallejo, César 1
Vallès, Jules 1
Vallin de La Mothe, Jean-Baptiste 1
Vallotton, Félix 1
Valmier, Georges 1
Vālmīki 1
Van Doesburg, Theo 1 2
Van Dyck, Antoine 1 2 3 4 5 6 7
Van Gogh, Vincent 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Van Leeuwenhoek, Antoine 1
Van Loo, Carle 1 2
Van Scorel, Jan 1
Varāhamihira 1 2
Varda, Agnès 1
Varese, Edgar 1
Varron 1 2
Varuna 1 2
Vasarely, Victor 1 2
Vasari, Giorgio 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Vasnetsov, Victor 1
Vātsyāyana 1
Vattimo, Gianni 1 2 3
Vauban, Sébastien Le Prestre de 1
Vaudès (Pierre Valdo) 1
Vautier, Benjamin 1
Vaux, Clotilde de 1 2
Vauxcelles, Louis 1
Vé 1
Veil, Simone 1 2 3
Veiras, Denis 1
Vélasquez, Diego 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Velázquez, Eugenio Lucas 1
Venceslas Ier l’Ivrogne 1 2 3
Venetsianov, Alexis 1
Veneziano, Gabriele 1
Venturi, Robert 1
Vénus 1 2 3 4
Verbiest, Ferdinand (Nan Houei Jen) 1
Vercingétorix 1 2 3 4 5 6 7
Verdi, Giuseppe 1
Verga, Giovanni 1
Verhaeren, Émile 1 2
Verlaine, Paul 1 2 3 4 5 6 7
Vermeer de Delft 1 2
Verne, Jules 1
Vernet, Joseph 1
Véronèse 1 2 3 4 5 6 7
Verrazano, Giovanni de 1
Verrocchio, il 1 2 3 4
Verus 1
Vesaas, Tarjei 1
Vésale, André 1 2 3
Vespasien 1 2 3 4 5
Vespucci, Amerigo 1
Vesta 1
Vettori, Francesco 1
Veyne, Paul 1
Viallat, Claude 1
Vian, Boris 1
Victor-Emmanuel II d’Italie 1 2 3 4 5 6
Victor-Emmanuel III d’Italie 1 2 3 4 5 6
Victoria Ire 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Victor IV 1
Vida, Marco Gerolamo 1
Vigée-Lebrun, Élisabeth Louise 1
Vignole 1
Vignon, Claude 1
Vignon, Pierre Alexandre 1
Vigny, Alfred de 1 2 3 4
Vikramāditya VI 1
Vilar, Jean 1
Vili 1
Villegagnon, Nicolas Durand de 1
Villehardouin, Geoffroi de 1 2
Villèle, comte de 1
Villepin, Dominique de 1 2
Villiers, George (1er duc de Buckingham) 1
Villiers de L’Isle-Adam, Philippe Auguste 1
Villon, François 1 2 3
Villon, Jacques 1
Vincent de Paul 1 2 3 4
Vinteuil 1
Viollet-le-Duc, Eugène 1 2 3 4
Viracocha 1 2 3
Viracocha (Hatu Tupac Inca) 1 2
Virgile 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Visconti, Filippo Maria 1
Visconti, Galeazzo Ier 1
Visconti, Gian Galeazzo 1
Visconti, Giovanni Maria 1
Visconti, Matteo Ier 1 2 3
Visconti, Ottone 1 2 3 4
Vishnou 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Vitellius 1
Vitrac, Roger 1
Vitruve 1 2 3 4
Vitry, Philippe de 1
Vivaldi, Antonio 1
Vivès, Jean-Louis 1
Viviani, René 1
Vladimir (saint) 1
Vladimir le Grand 1
Vlaminck, Maurice de 1 2 3
Vogel, Ludwig 1
Volland, Sophie 1
Vollard, Ambroise 1
Volta, Alessandro 1
Voltaire 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29
Vouet, Simon 1 2
Vroubel, Mickaël 1
Vuillard, Édouard 1 2 3
Vulcain 1
Vyāsa 1
Vychinski, Andreï 1
Wadsworth, Edward 1
Wagner, Cosima 1
Wagner, Richard 1 2 3 4
Waitz, G.F. 1
Waldeck-Rousseau, Pierre 1 2 3
Waldmüller, Ferdinand 1
Walesa, Lech 1
Wallace, Lew 1
Wallon, Henri 1
Walpole, Horace 1
Wang Anshi 1
Wang Hongwen 1
Wang Ken 1
Wang Mang 1
Wang Meng 1
Wang Po 1
Wang Wei 1
Wang Yangming 1
Warburton, William 1
Warens, Françoise-Louise de 1
Warhol, Andy 1 2 3 4
Washington, George 1 2 3 4
Watt, James 1
Watteau, Antoine 1 2 3 4 5 6
Waugh, Evelyn 1
Webb, Philip 1
Weber, Carl Maria von 1
Weber, Max 1 2 3
Webern, Anton 1 2
Webster, Noah 1
Wedekind, Frank 1
Wellesley, Richard 1
Wellington, duc de 1 2
Wells, Herbert G. 1
Wendi 1
Westermarck, Edward 1
Weygand, Maxime 1
Whittier, John Greenleaf 1
Wickram, Jörg 1
Wilde, Oscar 1
Williams, Tennessee 1
Wilson, Angus 1
Wilson, Bob 1
Wilson, Daniel 1
Wilson, Harold 1 2 3 4
Wilson, Richard 1
Wilson, Thomas Woodrow 1 2 3 4 5 6
Winckelmann, Johann Joachim 1 2 3 4
Wintergest, Joseph 1
Wise, John 1
Witten, Edward 1 2
Wittgenstein, Ludwig 1 2 3 4 5 6 7
Witz, Conrad 1
Wodan 1
Wolfe, Tom 1
Wolff, Christian von 1 2
Wölfflin, Heinrich 1
Wölfli, Adolf 1
Wolgemut, Michael 1
Wolsey, Thomas 1 2
Woodward, Bob 1
Woolley, Charles Leonard 1
Wordsworth, William 1
Worth, Charles Frederick 1
Wrangel, Piotr 1 2
Wright, Richard 1
Wudi 1
Wudi (Sima Yan) 1
Wulfila 1 2 3
Wundt, Wilhelm 1
Wurunkatte 1
Wurushemu 1
Wu Wang 1
Wu Zetian 1 2 3
Wu Zhen 1
Wuzong 1
Wyatt, James 1
Wyatt, Thomas 1
Xbalanque 1
Xenakis, Ianis 1
Xénophane 1 2
Xénophon 1 2 3
Xerxès Ier 1 2 3 4 5 6 7 8
Xia Gui 1
Xianfeng 1
Xie Lingyun 1
Xie Tao 1
Xi Jinping 1
Xi Kang 1
Xolotl 1
Xuande 1
Xuanzang 1 2 3 4
Xuanzong 1
Xu Ling 1
Yama 1 2
Yamabe no Akahito 1
Yao Wenyuan 1
Yarim-Lim 1
Yasovarman 1
Yasuhiro Nakasone 1
Yasunari Kawabata 1 2
Yazīd II 1
Yekouno Amlak 1 2 3
Yen Li-pen 1
Ye-Shi 1
Yetbarak 1
Yik’in Chan K’awiil 1
Ymir 1
Yoas Ier 1
Yokoyama Taikan 1
Yongle 1 2 3 4
Yoshihiko Noda 1
Yoshihito 1 2
Yoshitsune 1
Ysengrin 1
Yuandi 1
Yuan Mei 1
Yuan Shikai 1 2 3
Yuanwu Keqin 1
Yu Dafu 1
Yukio Mishima 1
Yu le Grand 1
Zabulon 1
Zacharie 1 2 3 4
Zacharie (pape) 1 2 3 4
Zadkine, Ossip 1
Zadyk 1
Zakharov, Adrian 1
Zapatero, José Luis 1 2
Zarza, Vasco de la 1
Zay, Jean 1 2
Zaydan, Jurji 1
Zeami 1 2 3
Zeller, André 1 2
Zénon 1 2 3 4
Zénon de Citium 1 2
Zénon d’Élée 1 2 3 4 5
Zeus 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27
28
Zhang Chunqiao 1
Zhang Xueliang 1 2
Zhao Mengfu 1
Zhao Ziyang 1
Zheng He 1
Zhengtong 1
Zhenzong 1
Zhongzong 1
Zhou Dunyi 1
Zhou Enlai 1 2 3
Zhu Da 1 2 3 4
Zhu Qan 1
Zhu Xi 1 2
Zinoviev, Grigori 1
Ziryāb 1
Ziyādat Allāh Ier 1
Zoé 1 2
Zöega, Georg 1
Zola, Émile 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Zoroastre (Zarathoustra) 1 2 3
Zorrilla, José 1 2
Zuccaro, Federico 1
Zuma, Jacob 1
Zurbarán, Francisco de 1 2 3 4 5 6
Zweig, Stefan 1
Zwingli, Ulrich 1 2 3 4 5 6
Index des œuvres1
1984 1
95 thèses 1 2
Abat-jour 1
Abbaye aux Hommes 1
Abbaye de Cîteaux 1 2 3
Abbaye de Clairvaux 1 2
Abbaye de Cluny 1 2 3 4 5
Abbaye de Conques 1
Abbaye de Flux 1
Abbaye de Fulda 1
Abbaye de Gandersheim 1
Abbaye de Landévennec 1
Abbaye de Port-Royal des Champs 1 2
Abbaye de Reichenau 1
Abbaye de Saint-Gall 1 2 3
Abbaye de Saint-Germain-des-Prés 1
Abbaye de Vézelay 1 2
Abbaye de Westminster 1
Abbaye du Mont-Cassin 1
Abbaye Sainte-Geneviève de Paris 1
Abbaye Saint-Pierre de Brantôme 1
Abbaye Saint-Pierre d’Hautvillers 1
A Bonaparte liberatore 1
À bout de souffle 1
Abrégé de l’art poétique français 1
Abrégé des études philosophiques (Compendium studii philosophiae) 1
Abrégé des études théologiques (Compendium studii theologiae) 1
Abuseur de Séville (L’) 1
Accordée de village (L’) 1
Actes des Apôtres 1 2 3 4
Adam 1
Adam Bede 1
Adam et Ève 1 2
Adam et Ève chassés du paradis 1
Adelphes (Les) 1
Adieu aux armes (L’) 1 2
Ādī-Granth 1 2
Adolescence clémentine (L’) 1
Adoration des bergers (L’) (La Tour) 1
Adoration des bergers (L’) (Rubens) 1
Adoration des mages (Dürer) 1
Adoration des mages (Uccello) 1
Adoration des mages (Vignon) 1
Agamemnon 1
Âge de l’innocence (L’) 1
Âge d’airain (L’) 1
Âge d’or (L’) 1
Âge mûr (L’) 1
Agricultural Adjustement Act (AAA) 1
Ailes de la colombe (Les) 1
Ainsi va toute chair 1
Ajax furieux 1
Al-Ahram 1
À la noblesse chrétienne de la nation allemande 1
À la recherche du temps perdu 1 2 3 4
Alastor 1
Al-Azhar 1 2 3
Albertine disparue 1
Alcade de Zalamea (L’) 1
Alcazar de Ségovie 1
Alcazar de Séville 1
Alcazar royal de Madrid 1
Alceste (Euripide) 1
Alceste (Gluck) 1
Alchemy 1
Alciphon ou Le Pense-menu 1
Alcools 1 2
Alexandre Ier 1
Alexandre le Grand 1
Algèbre 1
Al-Hakim (mosquée d’) 1
Alhambra 1 2
Al-Hilal 1
Allégorie de l’eau 1
Allégorie de l’été 1
Allégorie de Rome 1
Allégorie sacrée 1
Allemagne année zéro 1
Almageste 1 2 3 4 5 6 7 8
Almanach du Cavalier bleu 1
Al-Qasaba (tour d’) 1
Al-Zaytūna (mosquée) 1
À l’ombre des jeunes filles en fleurs 1 2
Amadis de Gaule 1
Amant (L’) 1
Amant couronné (L’) 1
Amant de la Chine du Nord (L’) 1
Amant de Lady Chatterley (L’) 1
Amant et fils 1
Amazona 1
American Psycho 1
Âmes mortes (Les) 1
Améthystes 1
Amida 1
Ami des hommes, ou Traité de la population (L’) 1 2
Ami du peuple (L’) 1 2
Ami du peuple assassiné (L’) 1
Aminta 1
Amok 1
Amour et Psyché 1
Amour fou (L’) 1
Amour la poésie (L’) 1
Amours (Les) (Baïf) 1
Amours (Les) (Ronsard) 1
Amphitryon 1
Anabase (Saint-John Perse) 1
Anabase (Xénophon) 1
Analyse de la Beauté 1
Analytiques 1
Anastasis 1
Ancien Testament 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
Ancien Testament (Simon Vouet) 1
Andrienne (L’) 1
Andromaque 1 2
Âne d’or, ou Les Métamorphoses (L’) (Apulée) 1
Âne d’or (L’) (Machiavel) 1
Angélus (L’) 1 2
Angkor Vat 1 2 3
Angoisse du roi Salomon (L’) 1
Anna Christie 1
Anna Karénine 1 2
Annales 1 2
Annales (du règne d’Ezana) 1
Annales de la dynastie des Li 1
Annales de la Société scientifique de Bruxelles 1
Annales des pontifes 1
Annales de Winchester 1
Annales maximi 1
Anna Svard 1
Anne d’Autriche 1
Annonciation (L’) (Andrea del Sarto) 1
Annonciation (L’) (Léonard de Vinci) 1
Annonciation (L’) (Mochi) 1
Antéchrist (L’) 1
Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française 1
Anthologie de l’humour noir 1
Anthropométries 1
Anticato 1
Anti-Dühring 1
Antigone (Alfieri) 1
Antigone (Anouilh) 1
Antigone (Sophocle) 1
Antiquités celtiques et antédiluviennes 1
Antiquités de Rome (Les) 1 2
Antiquités juives 1
Antisemitische Correspondenz 1
Anti-tête (L’) 1
Antoine et Cléopâtre 1
Apadana de Persépolis 1 2
Apadana de Suse 1
Aphorismes (Hippocrate) 1
Aphorismes (Sérapion le Vieux) 1
Aphrodite de Cnide 1
Apocalypse de Jean 1 2 3 4 5 6 7
Apocalypse d’Angers 1
Apocalypse ou la prochaine rénovation démocratique et sociale de l’Europe (L’)
1
Apollon de Piombino 1
Apollon de Ténéa 1
Apollon du Belvédère 1
Apologie de Socrate (Platon) 1
Apologie de Socrate (Xénophon) 1
Apoxyomène 1
Apparition de la Vierge à Luc (L’) 1
Appel de la forêt (L’) 1
Après le banquet 1
Après-midi d’un faune (L’) 1 2
Ara della Regina 1
Aranyaka 1
Arbre grande éponge bleue (L’) 1
Arcane 17 1
Arc de Constantin 1
Arc de Septime Sévère 1
Arc de triomphe de l’Étoile 1 2 3 4
Arc de triomphe du Carrousel 1
Arc d’Auguste de Rimini 1
Archéologie du savoir (L’) 1
Archipel aux sirènes (L’) 1
À rebours 1
Argent (L’) 1
Argoniques (Les) 1
Arhal-din Kajhompra (mosquée) 1
Ariane 1
Arianna 1
Armée de métier (L’) 1
Arminius 1
Art (L’) 1
Art de la peinture (L’) 1
Art du chant mesurable (L’) (Ars cantus mensurabilis) 1
Art d’aimer (L’) 1
Art d’édifier (L’) (De re aedificatoria) 1
Artémision (temple) 1
Artiste (L’) 1
Art poétique (Boileau) 1 2
Art poétique (Horace) 1 2
Art poétique (Verlaine) 1
Art pour l’art (L’) 1
Artus (L’) 1
Ascension d’Isaïe 1
Assommoir (L’) 1
Assomption (L’) (Bellini) 1
Assomption (L’) (Carrache) 1
Assomption (L’) (Greco) 1
Astadhyayi 1
Astrée (L’) 1
Astronomie nouvelle (Astronomia Nova) 1
Atelier du peintre (L’) 1
Athalie 1 2
Atharvaveda 1 2 3
Atlantes (Les) 1
Atlantes de Tula 1 2 3
Attila 1
Au bord de l’eau 1 2
Au cœur des ténèbres 1
Augustinus 1 2
Au milieu des sollicitudes 1
Aurige de Delphes 1
Aurore (L’) 1 2
Autant en emporte le vent 1
Autel de Gertrude 1
Autel portatif de saint André 1
Au Texas 1
Autoportrait (Largillière) 1
Autoportrait (Poussin) 1
Autoportrait (Van Gogh) 1
Avanti 1
Avant le départ 1
Avare (L’) 1 2
Aventure d’Heike (L’) (Heike monogatari) 1
Aventures de Télémaque (Les) 1 2
Aventures de Tom Sawyer (Les) 1
Aventures du Cid (Les) 1
Avesta 1 2 3 4
A Vindication of The Government of New England Church 1
Cabotin (Le) 1
Cahiers de prison 1
Calligrammes 1 2
Campanile de Giotto 1
Campanile de Saint-Marc 1
Campo Giovanni e Paolo 1
Canard enchaîné (Le) 1
Cancionero general 1
Candida 1
Candide 1 2
Canon 1
Cantatrice chauve (La) 1
Cantique des Cantiques 1
Cantique des créatures 1
Canto novo 1
Cap (Le) 1
Capital (Le) 1 2 3 4 5 6
Capitale de la douleur 1
Capitalisme et Schizophrénie 1
Capitoli (Les) 1
Caractères (Les) 1 2
Cardinal-Infant (Le) 1
Cardinal Nino de Guevara (Le) 1
Carnaval d’Arlequin (Le) 1
Carré noir sur fond blanc 1 2
Carrie 1
Casa Batlló 1
Casa Milá 1
Casa Vicens 1
Case de l’oncle Tom (La) 1 2
Casseurs de pierres (Les) 1
Cathédrale de Cantorbéry 1
Cathédrale de Chartres 1 2 3 4 5 6
Cathédrale de Cologne 1 2
Cathédrale de Florence 1
Cathédrale de Fribourg 1
Cathédrale de la Dormition de Moscou 1
Cathédrale de Lausanne 1
Cathédrale de l’Assomption 1 2
Cathédrale de Timovo 1
Cathédrale d’Axoum 1
Cathédrale d’Orvieto 1 2
Cathédrale Il Duomo 1
Cathédrale Notre-Dame de Laon 1
Cathédrale Notre-Dame de l’Assomption de Pise 1
Cathédrale Notre-Dame de Noyon 1
Cathédrale Notre-Dame de Paris 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Cathédrale Notre-Dame de Tournai 1
Cathédrale Notre-Dame d’Amiens 1 2
Cathédrale Pierre-et-Paul 1
Cathédrale Sainte-Marie (Baltimore) 1
Cathédrale Sainte-Marie de Pampelune 1
Cathédrale Sainte-Marie de Tolède 1 2 3
Cathédrale Saint-Étienne de Bourges 1 2
Cathédrale Saint-Étienne de Sens 1
Cathédrale Saint-Patrick 1
Cathédrale Saint-Pierre de Beauvais 1 2
Cath Maighe Tuireadh 1 2 3
Catilinaires 1
Cavalier bleu (Le) 1
Ca’ d’Oro 1
Ceci n’est pas une pipe 1
Celestina (La) 1
Cendres de Gramsci (Les) 1
Cène (La) 1 2
Centaure (Le) 1
Cent Coursiers (Les) 1
Centre Georges-Pompidou 1
Cérémonie des adieux (La) 1
Cerisaie (La) 1
César et Cléopâtre 1
Cesareum (monument d’Alexandrie) 1
Chacun sa vérité 1
Chaire de la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption de Pise 1 2
Chaire de l’évêque Maximien 1 2
Chaise et la pipe (La) 1
Chamade (La) 1
Chambre des époux (La) 1
Chambre de Vincent à Arles (La) 1
Champs magnétiques (Les) 1 2
Chancelier Séguier (Le) 1
Chanson de Craonne (La) 1
Chanson de Guillaume (La) 1
Chanson de Roland (La) 1 2 3
Chansonnier (Le) (Il canzoniere) 1 2
Chant de la cloche (Le) 1
Chant de Sigurd 1
Chant des Nibelungen 1 2
Chant du Bienheureux (Bhagavad-Gītā) 1 2 3 4 5 6 7
Chant du départ (Le) 1
Chant du harpiste aveugle 1
Chant d’amour de Krishna (Gītā-Govīnda) 1
Chant d’Igor (Le) 1
Chant général 1
Chants de Maldoror (Les) 1 2
Chants de Rama (Les) (Ramcharimanas) 1
Chants des Saliens 1
Chants royaux 1
Chapeau de paille (Le) 1
Chapelle Brancacci 1 2
Chapelle Contarelli 1
Chapelle de King’s College 1
Chapelle de la Sorbonne 1
Chapelle de la Trinité (Fontainebleau) 1
Chapelle de l’Arena (chapelle Scrovegni) 1 2
Chapelle du château de Versailles 1
Chapelle Henri VII 1
Chapelle San Fernando 1
Chapelle San Francesco Grande 1
Chapelle Sixtine 1 2 3 4
Charivari (Le) 1
Charles Ier à la chasse 1
Charles Quint terrassant l’envie 1
Charmidès 1
Charrette de foin (La) 1
Charrette du marché (La) 1
Char solaire de Trundholm 1
Charte du Mandem 1
Chartreuse de Jerez 1
Chasse (La) 1
Chasse au sanglier 1
Château (Le) 1 2
Château de Blois 1 2
Château de Bury 1
Château de Chambord 1 2 3
Château de Chenonceau 1 2
Château de Cirey 1
Château de Fontainebleau 1 2 3 4 5 6
Château de Hampton Court 1
Château de Heidelberg 1
Château de Himeji 1
Château de la Muette 1
Château de La Roche-Guyon 1
Château de Loches 1
Château de Longleat 1
Château de Luneville 1
Château de Madrid (Boulogne) 1 2
Château de Maisons-Laffitte 1
Château de Marly 1 2 3
Château de Montségur 1
Château de Neuschwanstein 1
Château de Pierrefonds 1
Château de Rivoli 1
Château de Saint-Cloud 1
Château de Saint-Germain-en-Laye 1
Château de Saint-Maur 1
Château de Stolzenfels 1
Château de Vaux-le-Vicomte 1 2 3 4
Château de Versailles 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Château de Wittenberg 1
Château du Clos Lucé 1 2
Château d’Amboise 1 2 3 4 5
Château d’Anet 1
Château d’Azay-le-Rideau 1 2
Château d’Écouen 1 2 3
Château Fasiladas 1
Château Saint-Ange 1
Chatterton 1
Chaudron de Brâ 1
Chaudron de Gundestrup 1 2 3 4 5
Chaudron de Rynkeby 1
Chemins de la liberté (Les) 1
Chênes d’Apremont (Les) 1
Chercheur d’or (Le) 1
Chercheuse d’esprit (La) 1
Chevalier avec la main sur la poitrine 1
Chevaux de Marly 1
Chilam Balam 1 2
Chimères (Les) 1
Chimères (Mōsō) 1
Christ (Le) 1
Christ du Jugement dernier (Le) 1
Christ jaune (Le) 1
Christ portant sa croix 1
Chronique des Printemps et des Automnes 1 2
Chroniques 1
Chroniques d’al-Ṭabarī 1
Chronographiai 1
Chute de la maison Usher (La) 1
Cicérone (Le) 1
Cid (Le) 1
Ci-gît l’Espace 1
Cimetière juif 1
Cinna 1
Cinq Canons astronomiques (Les) (Panca siddhantika) 1
Cinq Classiques Véritables 1
Cinq leçons sur la psychanalyse 1
Cinq-Mars 1
Cinq nôs modernes 1
Cinq points de l’architecture moderne 1
Cinquante psaumes en français 1
Cirque de Calder (Le) 1
Citadelle (La) 1
Cité antique (La) 1
Cité de Dieu (La) 1
Cité de l’homme (La) 1
Cité interdite 1 2 3 4 5
Cité radieuse de Marseille 1
Cléobis et Biton 1
Cléopâtre 1
Cligès ou la Fausse Morte 1
Cloître du Scalzo 1
Clovis 1
Cobra 1
Code civil 1 2 3
Code de Hammourabi 1 2 3 4 5 6
Code de Taisho 1
Code de Théodose 1
Code d’Ur-Nammu 1 2
Code Engi 1
Code Justinien 1 2 3
Code Noir (Le) 1
Code royal (Fuero Real) 1
Code Taihō (Taihō-ritsuryō) 1
Code Tang 1 2
Code Théodosien 1 2
Codex Aubin 1
Codex Aureus d’Echtemach 1
Codex Borbonicus 1
Codex Boturini 1
Codex Fejervary-Mayer 1
Codex Mendoza 1
Cœur à gaz (Le) 1
Colères 1
Colisée 1 2 3 4
Collection d’illustrations des Trois Royaumes (San cai tu hui) 1
Collection médicale (Carakasaṃhitā) 1
Collections mathématiques 1
Collège des Jésuites de Salamanque 1
Colonne de Juillet 1
Colonne de Marc-Aurèle 1
Colonne de Trajan 1
Colonne sans fin 1
Colonne Trajane 1 2 3
Colonne Vendôme 1 2
Colosse de Barletta 1
Colosses de Memnon 1
Combat des Centaures (Le) 1
Combustions 1
Comédie humaine (La) 1
Commencement du monde (Le) 1
Commentaire de l’Apocalypse 1 2
Commentaire des Sentences 1
Commentaires sur la Guerre des Gaules (Commentarii de bello gallico) 1 2 3 4 5
6 7
Commentaire sur la Mishna 1
Commonplace Book 1
Complexe de la Colline 1
Complexe de la Vallée 1
Composition 6 1
Composition 7 1
Composition no 10 1
Compositions en plans de couleurs 1
Compressions 1
Comte de Carmagnole (Le) 1
Comte-duc d’Olivares à cheval (Le) 1
Comte Orlov 1
Concert champêtre (Le) 1
Condition postmoderne (La) 1 2 3
Confession d’Augsbourg 1
Confession d’Augsbourg (Confessio Augustana) 1
Confessions (Les) (Rousseau) 1
Confessions (Les) (saint Augustin) 1
Confessions d’un masque 1
Conflit des interprétations (Le) 1 2
Conformiste (Le) 1
Confusion des sentiments (La) 1
Coningsby 1
Conjuration de Catilina (La) 1 2 3
Conquête de Constantinople (La) 1
Considérations sur la marche des idées et des événements dans les temps mo‐
dernes 1
Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence 1
Consolation à M. du Périer 1
Constellations 1
Constitutio de fundis 1
Constitution d’Athènes 1
Constitutions de Clarendon 1
Constitutions de la France depuis 1780 (Les) 1
Constitutions de Melfi 1
Constitutions d’Anderson 1 2
Constitutions égidiennes 1 2 3 4
Construction à la fleur 1
Constructions suspendues (Les) 1
Conte de Sinouhé 1 2 3
Conte du coupeur de bambou (Le) 1
Conte du naufragé 1 2
Conte du tonneau (Le) 1
Conte d’Amour et de Psyché 1
Contemplations (Les) 1 2
Contes 1
Contes de Canterbury (Les) 1 2 3
Contes des douze tours 1
Contes des magiciens à la cour de Khéops (Papyrus Westcar) 1
Contes du grotesque et de l’arabesque (Les) 1
Contingence, ironie et solidarité 1
Contre la méthode 1
Contre-reliefs libérés dans l’espace (Les) 1
Contre-révolution et Révolte 1
Contribution à la critique de l’économie politique 1 2 3
Convive de pierre (Le) 1
Coq gaulois 1
Coran 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Corbeille de fruits 1 2
Coricancha (temple du Soleil) 1
Coriolan 1
Corne du bélier (La) 1 2 3
Cornet à dés (Le) 1
Corn Laws 1 2
Côté de Guermantes (Le) 1
Coup d’État permanent (Le) 1
Coup d’œil sur les deux rives de la rivière Sumida 1
Couple à cheval 1
Courbe dominante 1
Couronne de la Vierge d’Essen 1
Couronne des chroniques 1 2
Couronnement de la Vierge (Le) 1
Cours complet d’instruction 1
Cours de linguistique générale 1 2
Cours de philosophie positive 1
Courses de chevaux 1
Cours sur la philosophie de l’art 1
Couvent de Nuestra Señora de Guadalupe 1
Couvent de Sainte-Marie-des-Grâces 1
Couvent de San Isidoro 1
Couvent des Antonins 1
Couvent des Mercedari 1
Couvent San Domenico 1
Couveuse (La) 1
Crainte et Tremblement 1
Cratyle 1
Création d’Adam (La) 1
Crépuscule des dieux (Le) 1
Crépuscule des idoles (Le) 1
Cribleuses de blé (Les) 1
Cri du peuple (Le) 1
Crime de lord Arthur Savile (Le) 1
Crime de l’Orient-Express (Le) 1
Crime et Châtiment 1
Crise de l’esprit (La) 1
Crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale (La) 1
Critique de la culture et de la société 1
Critique de la faculté de juger 1
Critique de la raison pratique 1
Critique de la raison pure 1 2 3
Critique de la religion chez Spinoza ou Les fondements de la science spinoziste
de la Bible (La) 1
Critique de la technique et de la science (La) 1
Critique de l’École des femmes (La) 1
Critique du jugement 1
Critique et Vérité 1
Criton 1
Croc-Blanc 1
Croix (La) 1
Cromlech d’Avebury 1
Cromwell 1 2
Crucifix de l’Empire 1
Crucifix de San Domenico d’Arezzo 1
Crucifixion (La) (Bosch) 1
Crucifixion (La) (le Pérugin) 1
Crucifixion de Bâle 1
Crucifixion en rose (La) 1
Crypte de la Colonie Güell 1
Crystal Palace 1
Cycle breton 1
Cycle de Charlemagne 1
Cycle de Finn 1 2
Cycle de Guillaume d’Orange 1
Cycle de Kumarbi 1
Cycle des Croisades 1
Cycle d’Uster 1
Cyclop (Le) 1
Cylindre de Cyrus 1
Cyrille (Qerillos) 1
Dadais (Le) 1
Daibutsu (statue) 1
Daikaku-ji (temple) 1
Dame à la Licorne (La) 1
Dame à l’hermine (La) 1
Dame de pique (La) 1
Danse (La) (Carpeaux) 1
Danse (La) (Rodin) 1
Danse macabre 1
Danses italiennes 1
Danseuse (La) 1
Danseuse (La) (Maihime) 1
Dans le labyrinthe 1
Dante et Virgile en enfer 1
Das neue Pathos 1
David (Donatello) 1 2 3 4
David (Il Verrocchio) 1
David (Michel-Ange) 1
David Copperfield 1
Da Vinci Code 1
Dazhengdian 1
De analogia (traité de grammaire) 1
De Astrologia 1
Débat de Folie et d’Amour (Le) 1
Débat des deux amants (Le) 1
Début de printemps 1
Décaméron 1 2
Décapitation de saint Jean-Baptiste (La) 1
Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne 1
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen 1 2 3 4 5 6 7 8
Déclaration d’amour (La) 1
Déclaration d’indulgence 1
Déclin des Burgondes 1
Découverte de Moïse 1
Défense et illustration de la langue française 1 2 3 4
Degré zéro de l’écriture (Le) 1 2
Deir el-Abiad (couvent Blanc) 1 2
Deir el-Ahmar (couvent Rouge) 1 2
Deir el-Bahari 1 2 3 4
Déjeuner de paysans 1
Déjeuner sur l’herbe (Le) 1 2 3
De la captivité babylonienne de l’Église 1
De la cause, du principe et de l’unité 1
De la consolation de la philosophie 1
De la division de la nature (De divisione naturae) 1
De la division du travail social 1
De la docte ignorance (De docta ignorantia) 1 2
De la grammatologie 1
De la guerre civile (De bello civili) 1
De la liberté d’un chrétien 1
De la littérature 1
De la monarchie (De monarchia) 1
De la musique (De musica et portibus ejus) 1
De la notation du rythme musical (De musica mensurabili positio) 1
De la nouvelle étoile 1
De la peinture (De pictura) 1
De la philosophie classique 1
De la politique générale et du rôle de la France en Europe 1
De la prédestination (De praedestinatione) 1
De la providence 1
De la recherche de la vérité 1 2
De la religion chrétienne (De christiana religione) 1
De la remémoration de la voie de la félicité 1
De la statue et de la peinture (De statua) 1
De la Terre à la Lune 1
De la tyrannie 1
Délie 1
Delphine 1
De l’agriculture (De agri cultura) 1
De l’Allemagne 1 2
De l’âme 1
De l’amitié 1
De l’architecture allemande 1
De l’éloquence vulgaire (De vulgari eloquentia) 1
De l’esprit des lois 1 2 3
De l’essence de la vérité 1
De l’infini, de l’univers et des mondes 1
De l’institution des enfants 1
De l’interprétation de la nature 1
Démocratie contre elle-même (La) 1
Demoiselles d’Avignon (Les) 1 2
Démolition des maisons du pont Notre-Dame (La) 1
Dénombrement des sciences 1
Dentellière (La) 1
De oratore (Le Livre de l’orateur) 1
De oratore (Le livre de l’orateur) 1
Départ des Volontaires (Le) (ou La Marseillaise) 1
Départ du Bucentaure (Le) 1
Déploration du Christ (La) 1
Derby de 1821 à Epson (Le) 1
De republica (Traité de la République) 1
De rerum natura (De la nature des choses) 1 2
Der Freischütz 1
Dernier Jour de Pompéi (Le) 1
Derniers poèmes 1
Dersane Sion (ou Homélie à Sion) 1
Der Sturm 1
De sang-froid 1
Des cas d’illustres hommes (De casibus virorum illustrium) 1
Descente d’Ishtar aux Enfers 1
Des choses cachées depuis la fondation du monde 1 2
Description de la Grèce 1
Description de Sainte-Sophie 1
Description du phalanstère 1
Désenchantement du monde (Le) 1
Désiré 1
Des révolutions des sphères célestes (De revolutionibus orbium coelestium) 1 2
Des souris et des hommes 1
Des termes extrêmes des Biens et des Maux (De finibus bonorum et malorum) 1
Destination de l’homme (La) 1
Destinées (Les) 1
Destinée sociale (La) 1
Deuil sied à Électre (Le) 1
Deutéronome 1 2 3
Deux Gentilshommes de Vérone (Les) 1
Deuxième Sexe (Le) 1
Deux négresses 1
Deux Problèmes fondamentaux de l’éthique (Les) 1
Deux Sources de la morale et de la religion (Les) 1 2 3
Dévotion à la croix (La) 1
Diable amoureux (Le) 1
Diadumène 1 2
Dialectique de la nature 1
Dialectique négative 1
Dialogue des orateurs 1 2
Dialogue du désespéré avec son ba 1
Dialogues des morts 1
Dialogues entre Hylas et Philonoüs 1
Dialogue sur les deux grands systèmes du monde 1 2 3
Diane chasseresse 1
Dictatus papae (Dicté par le Pape) 1
Dictionnaire abrégé du surréalisme 1
Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française 1
Dictionnaire de l’Académie française 1 2 3
Dictionnaire des peintres de l’École de Paris 1
Dictionnaire de Trévoux 1
Dictionnaire Kangxi (Kangxi Zidian) 1
Dictionnaire philosophique 1 2
Didon 1
Didon construisant Carthage 1
Didone abbandonata 1
Die Aktion 1
Die Weissen Blätter 1
Différence entre les systèmes philosophiques de Fichte et de Schelling 1
Différence et Répétition 1 2
Digeste (ou Pandectes) 1
Digression sur les Anciens et les Modernes 1
Dilemmes de la métaphysique pure (Les) 1
Dioptrique (La) 1
Discobole 1
Discorde chez l’ennemi (La) 1
Discours (Les) 1 2
Discours à la nation allemande 1
Discours de la méthode 1 2 3 4
Discours de la servitude volontaire 1
Discours de métaphysique 1
Discours philosophique de la modernité (Le) 1
Discours socratique de Xénophon (Le) 1
Discours sur la première décade de Tite-Live 1
Discours sur les arts et les sciences 1
Discours sur les sept jours de la création (Heptaplus) 1
Discours sur l’histoire universelle 1
Discours sur l’homme 1 2 3
Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes 1 2
Diseuse de bonne aventure (La) (le Caravage) 1
Diseuse de bonne aventure (La) (le Valentin) 1
Dissertation de 1770 1
Divination chez les Étrusques (La) (Etrusca Disciplina) 1
Divine Comédie (La) 1 2 3
Divine Proportion (La) (De divina proportione) 1 2
Dix petits nègres 1
Docteur Jivago (Le) 1
Doctrine correctement établie de Brahma (Brāhmasphuṭasiddhānta) 1
Doge Leonardo Loredan (Le) 1
Dôme du Rocher 1 2 3 4 5 6
Domesday Book (Livre du Jugement dernier) 1
Don Carlos (Schiller) 1
Don Carlos (Vélasquez) 1
Don Giovanni 1
Don Juan (Byron) 1
Don Juan (Molière) 1
Don Juan et Faust 1
Données 1
Don paisible (Le) 1
Don Sebastian de Morra 1
Dormeuse 1
Doryphore 1 2
Douane (La) 1
Downing Street Declaration 1
Dracula 1
Dramaturgie de Hambourg 1
Drayton Hall 1
Droit de prise (L’) (De jure praedae) 1
Droit naturel et histoire 1
Du citoyen (De cive) 1 2
Du contrat social 1 2 3 4 5 6
Du corps (De corpore) 1
Du côté de chez Swann 1 2 3
Du droit de la guerre et de la paix (De jure belli ac pacis) 1
Du Laocoon, ou Des limites respectives de la poésie et de la peinture 1 2
Du progrès et de la promotion des savoirs (De dignitate et augmentis scienta‐
rum) 1 2
Durée et Simultanéité 1
Du spirituel dans l’art 1
Du système industriel 1
Du texte à l’action 1
D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? 1
Notes
1. Il s’agit ici des œuvres au sens le plus large du génie humain : œuvres littéraires, architecturales, pictu‐
rales, etc.
E
Habeas Corpus 1
Halte à la croissance ? 1
Hamac (Le) 1
Hamlet 1
Hampton Court 1
Hardwick Hall 1
Harmonie du monde (L’) (Harmonices Mundi) 1
Harmonie tranquille 1
Harmoniques 1
Harpe d’herbes (La) 1
Harry Potter 1
Hasards heureux de l’escarpolette (Les) 1
Hatfield House (palais) 1
Hauts de Hurlevent (Les) 1
Hebdomades vel de imaginibus (traité d’agronomie) 1
Hécatompédon (temple) 1
Hécyre (L’) 1
Hélène 1
Héliogabale 1
Helléniques 1
Henotikon 1
Henriade (La) 1 2 3
Henri III et sa cour 1
Henri IV 1
Henri IV jouant avec ses enfants 1
Héracléide 1
Héraclides (Les) 1
Héraion de Perachora (temple) 1
Héraion d’Olympie (temple) 1
Héraklès Farnèse 1
Hérauts noirs (Les) 1
Hercule au repos 1
Hercule et le Minotaure 1
Hercule et Omphale 1
Hercule furieux 1
Hercule sur l’Oeta 1
Héritiers (Les) 1
Hernani 1 2 3
Héroïdes (Les) 1
Hesperus 1
Heureuse Famille (L’) 1
Hippolyte et Aricie 1
Histoire 1
Histoire commence à Sumer (L’) 1
Histoire de Babylone (Babyloniaka) 1
Histoire de Charles XII 1
Histoire de France 1
Histoire de Ko-ryo 1
Histoire de la civilisation en France 1
Histoire de la folie à l’âge classique 1 2
Histoire de la Grande-Bretagne 1
Histoire de la guerre de Trente Ans 1
Histoire de la guerre du Péloponnèse 1
Histoire de la Révolution française (Michelet) 1
Histoire de la Révolution française (Thiers) 1
Histoire de la Révolution française de 1789 jusqu’en 1814 1
Histoire de la Russie 1
Histoire de la sexualité 1
Histoire de l’art de l’Antiquité 1
Histoire de l’Égypte 1 2
Histoire de l’Espagne (Estoria de España) 1
Histoire de mes malheurs (Historia calamitatum) 1
Histoire de Rome depuis sa fondation (Ab Urbe condita libri) 1 2
Histoire des animaux 1
Histoire des Francs 1
Histoire des oracles 1
Histoire des rois de Bretagne (Historia regum Britanniae) 1
Histoire des Sévarambes (L’) 1
Histoire des Trois Royaumes 1 2 3
Histoire du Consulat et de l’Empire 1
Histoire du monde arabe 1
Histoire du roi (L’) 1
Histoire du soulèvement des Pays-Bas 1
Histoire d’Antoine et Cléopâtre 1
Histoire ecclésiastique du peuple anglais 1 2
Histoire et Vérité 1
Histoire générale de la civilisation en Europe 1
Histoire naturelle (Buffon) 1
Histoire naturelle (Pline l’Ancien) 1 2
Histoire naturelle de la religion 1
Histoire naturelle des animaux sans vertèbres 1
Histoire poétique de Krishna (Bhāgavata Purāṇa) 1 2
Histoire populaire de la Révolution française de 1789 (L’) 1
Histoire romaine 1
Histoires (ou Enquête) 1 2 3 4
Histoires (Salluste) 1
Histoires (Tacite) 1 2
Histoire universelle 1
Histoire universelle de l’infâmie 1
Hokusai Manga 1
Home Rule 1 2 3 4
Hommage à New York 1
Hommage à Picasso 1
Homme à la houe (L’) 1
Homme approximatif (L’) 1
Homme au casque d’or (L’) 1
Homme au singe (L’) 1
Homme aux cheveux gris 1
Homme-Boîte (L’) 1
Homme communiste (L’) 1
Homme de cour (L’) 1
Homme invisible (L’) (Ellison) 1
Homme invisible (L’) (Wells) 1
Homme spéculaire (L’) 1
Homme unidimensionnel (L’) 1
Homo aestheticus 1
Hon Elle 1
Honneur perdu de Katharina Blum (L’) 1
Hôpital de Santa Cruz 1
Hôpital des Innocents 1
Horace 1
Horizontal Yellow 1
Horloge des trois Grâces 1
Hōryū-ji (Temple de la loi florissante) 1 2
Hosios Loukas (monastère) 1
Hôtel Bourbon 1
Hôtel Carnavalet 1
Hôtel de Cluny 1 2
Hôtel de Ludes 1
Hôtel des Invalides 1 2
Hôtel de Soissons 1
Hôtel de Soubise 1
Hôtel de ville de Paris 1 2
Hôtel de ville d’Arles 1
Hôtel d’Estrées 1
Hôtel Lambert 1
Housing Act 1
Huaca de la Luna (temple) 1 2
Huaca del Sol (temple) 1
Huaca Rajada (temple) 1
Hudson River Gothic 1
Huis clos 1
Humanité (L’) 1 2
Humanité dimanche (L’) 1
Hussard bleu (Le) 1
Hymne à Aton 1 2
Hymne à Hâpy (Adorer Hâpy) 1
Hymnes 1
Hymnes à la nuit 1
Hyperion 1
Iambes 1
Idées sur l’histoire de la philosophie de l’humanité 1
Idiot de Coria (L’) 1
Idiot du village (L’) 1
Île au trésor (L’) 1
Île de Cythère (L’) 1
Île du docteur Moreau (L’) 1
Île d’Arthur (L’) 1
Iliade 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Iliade (L’) (Tiepolo) 1
Iliade en vers burlesques (L’) 1
Illuminations 1 2
Illusion comique (L’) 1
Il Marchese di Roccaverdina 1
Il milione (Le Livre des merveilles du monde) 1
Il Popoplo d’Italia 1
Il primo amore 1
Image du monde 1
Immortalité (L’) 1
Impasse des deux palais 1
Impérialisme, stade suprême du capitalisme (L’) 1
Impression, soleil levant 1
Improvisation no 23 1
Incendie de l’opéra (L’) 1
Incendie du Parlement (L’) 1
Incohérence de l’incohérence 1
Indes galantes (Les) 1
Indigent Philosophe (L’) 1
Infante Marie-Thérèse (L’) 1
Influences philosophiques dans l’évolution nationale 1
Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche (L’) 1
Initiation à la vie bienheureuse 1
Innocent (L’) 1
Inondation à Port-Marly (L’) 1
Inspiration du poète (L’) 1
Institutes (manuel de droit) 1
Institution de la religion chrétienne (Christianae religionis instituto) 1
Institution imaginaire de la société (L’) 1
Institution musicale (L’) (De institutione musica) 1 2 3
Instruction sur les états d’oraison (L’) 1
Intérieur paysan 1
Intérieurs hollandais 1
Internationale (L’) 1
Interprétation des rêves (L’) 1
Intihuatana 1
Introduction à la médecine expérimentale 1
Introduction à la philosophie de l’histoire (L’) 1
Introduction à la psychanalyse 1
Introduction à la Révolution française 1
Introduction à la théologie (Introductio ad theologiam) 1
Introduction à l’étude de la médecine expérimentale 1
Intrus (L’) 1
Invariants plastiques (Les) 1
Invention démocratique (L’) 1
Invention de Morel (L’) 1
Investigations philosophiques 1
Invitée (L’) 1
Ion 1
Iphigénie 1 2 3
Iphigénie à Aulis 1
Iphigénie en Tauride (Euripide) 1
Iphigénie en Tauride (Goethe) 1 2
Isabelle de France 1
Isagoge 1
Isamelillo 1
Iskra (Étincelle) 1 2
Itala de Quedlinburg (manuscrit biblique) 1
Ivan le Terrible 1
Jacques le fataliste 1
Jalousie (La) 1
Jama Masjid (mosquée) 1
Jane Eyre 1
Jardin des délices (Le) 1
Jardin des Finzi Contini (Le) 1
Jardins des maraîchers dans la Crau 1
Jardins suspendus de Babylone 1
Jaune-Rouge-Bleu 1
Jean de la Lune 1
Jean Santeuil 1 2
Jérusalem délivrée (La) 1
Je suis un chat 1
Jeu de constructions anthropomorphes 1
Jeu de l’amour et du hasard (Le) 1
Jeu de pelote de Chichén Itzá 1 2
Jeu de pelote d’Uxmal 1
Jeu de Robin et Marion 1
Jeu de saint Nicolas (Le) 1 2
Jeu d’Adam 1 2
Jeune femme à sa toilette 1
Jeune Fille à la perle (La) 1
Jeune Homme (Le) 1
Jeune Parque (La) 1
Jeune Peintre (Le) 1
Jeunesse du Cid (La) 1
Jeune Tarentine (La) 1
Jeux (Les) 1
Joconde (La) 1
Joueur de guitare (Le) 1
Joueur de vielle (Le) 1
Joueurs de cartes (Les) 1 2
Joueurs de football (Les) 1
Joueurs d’échecs (Les) 1
Jour délicieux (Nave Nave Mahana) 1
Journal de dame Murasaki (Murasaki Shikibu nikki) 1
Journal des savants 1
Journal de Tosa (Le) (Tosa nikki) 1
Journal d’État et du Citoyen 1
Journal d’un génie (Le) 1
Journal officiel 1
Joyeux Buveur (Le) 1
Judith et Holopherne (Goya) 1
Judith et Holopherne (le Valentin) 1
Jugement dernier (Le 1 2
Jugement du roi de Behaigne (Le) 1
Jugend 1
Jules César 1
Junna-in (jardin) 1
Jupiter, Mars, Quirinus 1
Jusqu’au bout ! 1
Justes (Les) 1
« J’accuse » 1 2
K
Lachès 1
Lagon bleu (Le) 1
Lai de Beowulf 1
Lais (Le) 1
Laitière (La) 1
Lal Qila (fort Rouge) 1 2
Lamentation 1
Lamentations sur la destruction d’Ur 1
Lancelot ou le Chevalier de la Charrette 1 2
Langue des calculs (La) 1
Laocoon 1
Las Dos Hermanas 1
Lavabo (Le) 1
Lavabo mou 1
Laveuse au quai d’Anjou 1
Le avventure della differenza 1
Lebor Gabála 1
Leçon d’anatomie du docteur Jean Deyman (La) 1
Leçons de ténèbres 1
Lecture (La) 1
Légende de Hilde 1
Légende de la Vraie Croix (La) 1
Légende de Siegfried 1
Légende du Cid (La) 1 2
Lepelletier de Saint-Fargeau 1
Lettre à M. Dacier 1
Lettres 1
Lettres (Epistolae) 1
Lettres à Lucilius 1 2
Lettres à Spartacus 1
Lettres de juin 1
Lettres de prison 1
Lettres d’un habitant de Genève à ses concitoyens 1
Lettres écrites à un provincial à l’un de ses amis sur le sujet des disputes pré‐
sentes en Sorbonne (ou Les Provinciales) 1 2 3 4
Lettre semi-sérieuse de Chrysostome (La) 1
Lettres persanes 1 2
Lettres philosophiques (ou Lettres anglaises) 1 2 3 4
Lettres sur le dogmatisme et le criticisme 1
Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient 1 2
Lettre sur les occupations de l’Académie française 1
Lettre sur l’humanisme 1
Léviathan 1 2
Lévitique 1 2
Lexique de Suidas (la Souda) 1 2
Liber Fulguralis 1
Liber Tartarorum 1
Liberté guidant le peuple (La) 1 2
Lincoln Memorial 1
Lion d’Urkish 1
Lire le Capital 1
Lise à l’ombrelle 1
Liseuse (La) 1
Lisière du mont Girard 1
Liste royale summérienne 1
Littérature 1 2
Littérature à l’estomac (La) 1 2
Littérature sans estomac (La) 1
Livre à brûler 1
Livre à cacher 1
Livre de Babur (Bābur Nama) 1 2
Livre de Daniel 1 2 3
Livre de Jérémie 1
Livre de Job 1 2
Livre de Josué 1
Livre de l’Am-Douat 1
Livre de l’art (Le) 1
Livre de Mozi 1
Livre de Néhémie 1
Livre de Ruth 1
Livre de Samuel I 1 2 3
Livre de Samuel II 1 2
Livre des Cavernes 1
Livre des Chroniques I 1
Livre des Chroniques II 1
Livre des destins (Le) (Tonolamatl) 1 2
Livre des Hymnes (Namdev Gatha) 1
Livre des Juges 1
Livre des Lamentations 1 2 3
Livre des Maccabées II 1
Livre des Morts 1 2 3 4 5
Livre des Portes 1 2
Livre des Proverbes 1 2
Livre des Psaumes 1 2 3 4 5 6 7
Livre des Rois I 1 2 3
Livre des Rois II 1
Livre des snobs (Le) 1
Livre de Zacharie 1
Livre d’Esdras 1
Livre d’Esther 1
Livre d’Ézéchiel 1
Livre d’heures de Jeanne d’Évreux 1
Livre d’Isaïe 1 2 3
Livre ouvert (Le) 1
Livres des miracles 1
Loge (La) 1
Logique (La) 1
Logique de la découverte scientifique (La) 1
Logique de l’espèce (La) 1
Loi des douze tables 1
Loïe Fuller aux Folies bergères 1
Lois de Manu 1 2
Lokavibhāga (traité de cosmologie indien) 1
Longs Murs 1
Lord George Graham dans sa cabine 1
Lord Jim 1
Lorenzaccio 1
« Lorsqu’en haut » (Enuma Elish) 1 2 3
Losanges (Les) 1
Louange du duc Henri (De Henrico) 1
Louen yu (Analectes) 1
Loup des steppes (Le) 1
Lucas II 1
Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande 1
Lumière des justes (La) 1
Lysis 1
Macbeth 1
Machine infernale (La) 1
Machine motorisée 1
Madame Adélaïde 1
Madame Bovary 1
Madame Butterfly 1
Madame Cézanne dans un fauteuil jaune 1
Madame de Grignan (tableau) 1
Madame de Montespan (tableau) 1
Madame de Récamier 1
Madame Henriette 1
Madeleine pénitente (La) 1
Mademoiselle de Clermont en sultane 1
Mademoiselle de Maupin 1
Mademoiselle Pogany 1
Mademoiselle Rivière 1
Madison Avenue 1
Madone à la pomme 1
Madone à l’enfant 1
Madone au long cou (La) 1
Madone de Saint-François (La) 1
Madone des Harpies (La) 1
Madone de Sinigaglia (La) 1
Madone du Grand-Duc (La) 1
Magicien de Lublin (Le) 1
Magna Carta 1
Mahomet ou le fanatisme 1
Maïastra 1
Mains sales (Les) 1 2
Maison à l’estaque 1
Maison Carrée 1
Maison de Bernarda Alba (La) 1
Maison de poupée 1
Maison de thé (La) 1
Maison de vie (La) 1
Maisons royales 1
Mal, un défi à la philosophie et à la théologie (Le) 1
Malade imaginaire (Le) 1
Malaise dans la civilisation 1
Malédiction paternelle (La) 1
Mamelles de Tirésias (Les) 1 2 3
Mandarins (Les) 1
Mandragore (La) 1
Manfred 1
Manhattan Transfer 1
Manifeste Dada 1
Manifeste de Brunswick 1
Manifeste de Sandhurst 1
Manifeste des Égaux 1 2
Manifeste du futurisme 1
Manifeste du parti communiste 1 2 3 4
Manifeste du surréalisme 1 2 3 4 5
Manifeste du théâtre de la cruauté 1
Manifeste réaliste 1
Manifeste suprématiste 1
Manteau (Le) 1
Manuel de la philosophie ancienne 1
Manuel d’Épictète 1
Manuscrits de la mer Morte (Manuscrits de Qumrân) 1 2
Man’yōshū (Recueil de dix mille feuilles) 1 2
Marat assassiné 1
Marchand de Venise (Le) 1
Marchand d’eau de Séville (Le) 1
Mariage 1
Mariage à la mode 1
Mariage dans la mort (Le) 1
Mariage de Figaro (Le) 1
Mariage de la raison et de la misère noire (Le) 1
Mariage de la Vierge (Le) 1
Mariés 1
Marie Stuart 1 2
Marine avec Acis et Galatée 1
Marius 1
Marmaria (sanctuaire) 1
Marmite (La) (Aulularia) 1 2 3
Marseillaise (La) 1
Martyre de saint Laurent (Le) 1
Martyre de saint Matthieu (Le) 1
Martyre de saint Maurice (Le) 1
Martyrs (Les) 1
Masque d’Agamemnon 1
Masse et Puissance 1
Mastaba des deux frères 1
Matière et Mémoire 1 2 3
Mausolée de Galla Placidia 1
Mausolée des Samanides 1
Mausolée du maréchal de Saxe 1
Mausolée d’Akbar 1
Maximes 1
Maximes d’Alfred le Grand 1
Maximes et réflexions sur la comédie 1
Mayflower Compact 1
Médée (Corneille) 1 2
Médée (Euripide) 1
Médée (Sénèque) 1
Médinet-Habou (temple) 1 2 3 4 5 6
Méditations cartésiennes 1
Méditations chrétiennes et métaphysiques 1
Méditations esthétiques 1
Méditations métaphysiques 1 2
Méditations poétiques 1 2
Méditerranée (La) 1 2
Méditerranée sous Philippe II (La) 1
Médium 1
Meilleur Alcade est le roi (Le) 1
Mein Kampf 1
Meiroku Zasshi 1
Mélancolie (La) 1
Mélancolie hermétique 1
Mélite 1
Mémoires (Commynes) 1
Mémoires (Retz) 1
Mémoires (Saint-Simon) 1
Mémoires de guerre 1
Mémoires d’Hadrien 1
Mémoires d’outre-tombe 1
Mémoires d’une jeune fille rangée 1
Mémoires historiques 1
Mémoire sur la théorie des phénomènes électrodynamiques, uniquement déduits
de l’expérience 1
Mémorial 1
Ménandre 1
Meneur de cheval nu (Le) 1
Menhir du Manio 1
Ménines (Les) 1
Ménon 1 2
Mensonge et sortilège 1
Mensonge romantique et vérité romanesque 1
Menteur (Le) 1
Menu de Suiyuan (Suiyuan Shidan) 1
Mer aux arbres morts (La) 1
Mercure 1
Mercure de France (Le) 1 2
Mère (La) 1
Mère nature (La) 1
Mérope (Alfieri) 1
Mérope (Maffei) 1
Mérope (Voltaire) 1
Merveilleux Voyage de Nils Holgersson (Le) 1
Mésaventures d’Ounamon (Les) 1
Mes prisons 1
Messaline 1
Messes pour un corps (Les) 1
Messiade (La) 1
Méta-Matics 1
Métamorphose (La) 1 2
Métamorphoses (Les) (Ovide) 1
Métamorphoses (Pindare) 1
Métaphysique 1 2 3
Météores (Les) 1
Méthode (La) 1
Meurtre de Roger Ackroyd (Le) 1
Mexique, quatre lettres au maréchal Bazaine 1
Microcosme 1
Micromégas 1
Mille et Une Nuits (Les) 1 2
Milon de Crotone 1
Minna de Barnhelm 1
Miracle de Théophile (Le) 1
Misanthrope (Le) 1
Misericordia 1
Mishnah 1 2 3 4 5
Miss Siddons personnifiant la muse de la tragédie 1
Mithridate 1
Mobile 1
Moby Dick 1
Moderato Cantabile 1
Modification (La) 1
Moi comme principe de la philosophie (Le) 1
Moins que zéro 1
Moïse et le monothéisme 1
Monade hiéroglyphique (La) 1
Monadologie (La) 1
Monastère de Baouit 1 2
Monastère de Gračanica 1
Monastère de la Dormition 1
Monastère de Lindisfarne 1
Monastère de Stoudios 1
Monastère Saint-Nicolas de Moscou 1
Mondain (Le) 1
Monde (Le) 1
Monde comme volonté et comme représentation (Le) 1
Monde de l’art (Le) 1
Mong-tseu 1
Monsieur Bertin 1
Montagne de l’âme (La) 1
Montagne Sainte-Victoire (La) 1
Mont Fuji (Le) 1
Monument à Victor Hugo 1
Mort à Venise (La) 1
Mort dans l’après-midi 1
Mort de la Vierge (La) 1
Mort de l’auteur (La) 1
Mort de Sardanapale (La) 1 2
Mort d’un commis voyageur 1
Morte d’Arthur 1
Mort et les jeunes filles (La) 1
Mosaïque du Triomphe de Bacchus 1
Mosquée al-Manṣūr 1
Mosquée bleue 1
Mosquée de Dai Anga 1
Mosquée de Hassan 1
Mosquée de Kairouan 1
Mosquée des Andalous 1
Mosquée de Tinmel 1
Mosquée de Wazir-Khan 1
Mosquée Ibn Ṭūlūn 1
Mosquée Jingereber 1 2 3
Mosquée Qarawiyīn 1
Mosquée Sankoré 1
Mosquée Sehzade Mehmet 1
Mosquée Selimiye 1
Mosquée Sidi Yahya 1 2 3
Mosquée Süleymaniye 1
Mots et les Choses (Les) 1 2 3 4
Mouches (Les) 1 2
Mouette (La) (Caballero) 1
Mouette (La) (Tchekhov) 1
Moulin de la Galette (Le) 1
Moulin de Saint-Nicolas-les-Arras (Le) 1
Moulin près de Wijk bij Duurstede 1
Moulins à prières 1
Moulin sur la Floss (Le) 1
Mount Pleasant 1
Mou tan t’ing (Le Pavillon des pivoines) 1 2
Mouvement perpétuel (Le) 1
Multiplication des arcs 1
Münchener Fliegende Blätter 1
Mur des Lamentations 1 2
Murphy 1
Muse endormie (La) 1
Muses inquiétantes (Les) 1 2
Music for 18 Musicians 1
Musique à grande vitessse 1
Mystère cosmographique (Mysterium Cosmographicum) 1
Mystère de la guilde (Le) 1
Mythe du XXe siècle (Le) 1
Mythologiques 1
Nabucco 1
Nadja 1
Naissance de la clinique 1
Naissance de la tragédie (La) 1
Naissance de la Vierge (La) 1
Naissance de Vénus (La) (Botticelli) 1 2
Naissance de Vénus (La) (Cabanel) 1
Nana 1
Nanas 1
Napoléon s’éveillant à l’immortalité 1
Narrative and Legendary Poems 1
Nathan le Sage 1
National Housing Act 1
National Industrial Recovery Act (NIRA) 1
National Insurance Act 1
National Labor Relations Act (Wagner Act) 1
Nativité (La) (le Pérugin) 1
Nativité (La) (Piero della Francesca) 1
Nature 1
Nature morte à la chaise cannée 1
Nature morte au crâne 1
Nature morte au violon 1
Naufrage (Le) 1
Naufragés et les rescapés (Les) 1
Nausée (La) 1
Nebhî’îm (Les Prophètes) 1 2 3 4
Nécropole de Banditaccia 1
Nécropole de Naqsh-e Rostam 1
Nécropole de Tarquinia 1 2
Nef (La) 1
Nef des fous (La) (Bosch) 1
Nef des fous (La) (Brant) 1 2
Néo-plasticisme. Principe général de l’équivalence plastique (Le) 1
Né pour naître 1
Neptune et Amphitrite 1
Neue Wache 1
Neuf cents thèses de Pic de la Mirandole (Conclusiones) 1
Neveu de Rameau (Le) 1
News Letters 1
Nexus 1
Nicomède 1
Nihonshoki (Chroniques du Japon) 1 2 3
Nirvāṇa du Bouddha de Kongōbu-ji 1
Nishi no in (jardin) 1
Noces de Cana (Les) 1
Noces de Figaro (Les) 1
Nombres 1 2
Normal et le pathologique (Le) 1
Nostromo 1
Notes de chevet 1
Notre-Dame de Paris 1
Notre époque 1
Nouveau Christianisme (Le) 1
Nouveau Livre des Tang 1
Nouveau-Né (Le) 1
Nouveau Recueil de Jadis et Naguère (Le) (Shin-kokin-shū) 1
Nouveau Testament 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Nouveaux essais sur l’entendement humain 1
Nouveaux points de vue sur la société 1
Nouvel Esprit scientifique (Le) 1
Nouvelle critique ou nouvelle imposture 1
Nouvelle-Église 1
Nouvelle Héloïse (La) 1
Nouvelle Monadologie (La) 1
Nouvelle Revue française (La) 1
Nouvelles andalouses 1
Nouvelles exemplaires (Les) 1
Nouvelles recherches sur quelques problèmes d’histoire 1
Nouvel Observateur (Le) 1
Novelles 1
Novum organum 1 2 3 4
Nu couché 1
Nu de dos no 4 1
Nu descendant un escalier 1
Nuées (Les) 1
Nuées d’oiseaux blancs 1
Nuit (La) 1
Nuit et Brouillard 1
Nuits (Les) 1
Number 1 A 1
Nus dans la forêt 1
Nymphéas (Les) 1
Octavie (Alfieri) 1
Octavie (Sénèque) 1
Odalisque 1
Ode à la joie 1
Ode à Marie de Médicis 1
Odes (Horace) 1
Odes (Ronsard) 1 2
Odes au vent d’Ouest 1
Odes barbares 1
Odes et poésies diverses 1
Odyssée 1 2 3 4 5
Œdipe (Jules César) 1
Œdipe (Sénèque) 1
Œdipe à Colone 1
Œdipe roi 1
Œuvre au noir (L’) 1
Offrande lyrique (L’) 1
Oiseau dans l’espace (L’) 1
Oiseaux (Les) (Aristophane) 1
Oiseaux (Les) (Vesaas) 1
Olive (L’) 1 2
Oliver Twist 1
Olympéion (temple) 1
Olympia 1 2
Ombilic des Limbes (L’) 1
Oncle Vania 1
Ontologie de Hegel et la théorie de l’historicité (L’) 1
Opéra de quat’sous (L’) 1
Optique 1
Opus majus (Œuvre majeure) 1 2
Orage (L’) 1
Oraisons funèbres 1
Orange mécanique (L’) 1
Orangerie 1
Oratio de hominis dignitate (Discours de la dignité de l’homme) 1
Oratoire de Santa Maria en Valle 1
Orée de la forêt à l’aube 1
Oreiller d’herbe (L’) 1
Oreste 1
Orfeo 1
Organon 1 2 3 4 5 6
Orgueil et Préjugés 1
Origine de la famille, de la propriété privée et de l’État (L’) 1 2
Origine des espèces (L’) 1 2 3
Origine du monde (L’) 1
Origines (Les) 1
Origines de la France contemporaine (Les) 1
Origines de l’alchimie (Les) 1
Origines du totalitarisme (Les) 1 2 3
Orphée (Jean Cocteau) 1
Orphée (Ossip Zadkine) 1
Orphée et Eurydice 1 2
Orphelin de la Chine (L’) 1
Othello 1
Otto von Bismarck 1
Oulojénié (code de lois russe) 1
Ouplis-Tziké (basilique) 1
Out of the Web 1
R
Rabbit le lapin 1
Race et Histoire 1
Radeau de la Méduse (Le) 1 2
Raisins de la colère (Les) 1 2
Raison et révolution 1
Ramesseum (temple) 1 2
Raphaël et la Fornarina 1
Ravissement de Lol V. Stein (Le) 1
Razm Nama (ou Livre des guerriers) 1
Recherches logiques (Les) 1 2
Récit des troubles de l’ère Hogen (Hogen monogatari) 1
Récits d’un chasseur (Les) 1
Recueil des cent ballades d’amants et de dames (Le) 1
Réflexions morales sur le Nouveau Testament 1
Réflexions sur la beauté 1
Réflexions sur les hommes nègres 1
Réflexions sur Longin 1
Réflexions sur l’imitation des œuvres des Grecs en peinture et en sculpture 1 2
Réfutation de la Confession d’Augsbourg (Confutatio Augustana) 1
Regarder, écouter, lire 1
Regards sur le passé 1
Régente (La) 1
Registrum Gregorii 1
Règles de la méthode sociologique 1
Règles pour la direction de l’esprit 1 2
Regrets (Les) 1 2 3
Reichstag 1
Reine Mab (La) 1
Reine morte (La) 1
Religion dans les limites de la simple raison (La) 1
Religion de l’humanité (La) 1
Religion de mon temps (La) 1
Reliquaire de Limbourg-sur-la-Lahn 1
Remèdes d’amours (Les) 1
Remparts de Sousse 1 2
Renaissance 1
Rendez-vous dans la forêt 1
René 1
Renommée (La) 1
Rentrée des troupeaux (La) 1
Repas à l’auberge (Le) 1
Repas chez Lévi (Le) 1
Repas de noce (Le) 1
Repas de paysans 1
Repos de Diane (Le) 1
Repos pendant la fuite en Égypte (Le) 1
République (La) 1 2 3
Researches into Early History of Mankind 1
Réservoir, Horta de Ebro (Le) 1
Residenz Würzburg 1
Résurrection 1
Résurrection du Christ (La) 1
Retable de sainte Anne 1
Retable de Saint Esteban de Salamanque 1
Retable des Rois mages 1
Retable Paumgartner (Le) 1
Retour de chasse 1
Retour de chasse de Diane (Le) 1
Rêve dans le pavillon rouge (Le) 1
Rêve de d’Alembert (Le) 1
Rêve du papillon (Le) 1
Revenue Act 1
Rêve transformé (Le) 1
Révolution et contre-révolution en Allemagne 1
Révolutions de France et de Brabant (Les) 1
Révolution surréaliste (La) 1 2
Revue blanche (La) 1 2
Revue du progrès (La) 1
Revue fantaisiste (La) 1 2
Revue historique (La) 1
Richard III 1 2
Rideau, cruchon et compotier 1
Rigveda (Livre des hymnes) 1 2 3 4 5 6 7
Rimas 1
Rimes nouvelles 1
Rire (Le) 1
Robert (Le) 1
Robinson Crusoé 1
Rodogune 1
Roi des aulnes (Le) (Goethe) 1
Roi des aulnes (Le) (Tournier) 1
Roi Lear (Le) 1
Roland furieux 1 2
Roland furieux (Duseigneur) 1
Roland furieux (Le) (Tiepolo) 1
Roman (Le) 1
Romancero general 1
Romancero gitano 1
Roman comique (Le) 1
Roman de la Rose (Le) 1 2 3 4 5 6 7
Roman de Renart (Le) 1
Roman d’un inutile 1
Roman expérimental (Le) 1
Rome, la ville sans origine 1
Roméo et Juliette 1
Ronde de nuit (La) 1
Roudine 1
Roue de bicyclette 1
Rougon-Macquart (Les) 1
Rouleau de Josué (Le) 1
Rouleau des treize empereurs 1
Route des Flandres (La) 1
Route vue du chemin de Sèvres (La) 1
Running Fence 1
Ruodlieb 1
Ruy Blas 1
Rymes 1
Ubu roi 1 2
Ugolin et ses fils 1
Ulysse (James Joyce) 1
Ulysse (Simon Vouet) 1
Un autre pays 1
Un chemin au milieu des arbres 1
Un chien andalou 1
Un dimanche après-midi à la Grande Jatte 1
Une brève histoire du temps. Du Big Bang aux trous noirs 1
Une excursion dans les prairies 1
Une fleur en enfer 1
Une histoire sans début ni fin 1
Une journée d’Ivan Denissovitch 1
Une moderne Olympia 1
Une mort très douce 1
Un enterrement à Ornans 1
Une saison en enfer 1
Une soif d’amour 1
Une théorie de la population 1
Unigenitus (bulle) 1
Un tramway nommé désir 1
Upanishads 1 2 3 4 5
Utopie (L’) 1 2
Ut pictura poesis (La Peinture est comme la poésie) 1
V
Vagabonds (Les) 1
Vaisseau dans la tempête 1
Valse (La) 1
Van Gogh ou le suicidé de la société 1
Variation des animaux et des plantes à l’état domestique (La) 1
Vases communicants (Les) 1
Végétation 1
Vehementer nos 1
Vénus de Milo 1
Vénus d’Urbino (La) 1
Vénus endormie (La) 1
Vénus et Adonis 1
Vénus et Amour 1
Vénus et Mars 1
Vénus représentant l’amour 1
Vergilius vaticanus 1
Vérité de la religion chrétienne 1
Vérité et méthode 1
Verre d’absinthe (Le) 1
Verrines 1
Verrou (Le) 1
Vers d’or 1 2 3
Versets sataniques (Les) 1
Vers une architecture 1
Veuve rusée (La) 1
Via crucis 1
Victoire (La) 1
Vie à pleines dents (La) 1
Vie de Dante (La) (Vita di Dante) 1
Vie de la Vierge (La) 1
Vie de Marianne (La) 1
Vie de saint Dominique (La) 1
Vie de sainte Thérèse de Jésus 1
Vie de saint François 1
Vie devant soi (La) 1
Vie de Walther Fortes-Mains (La) (Vita Waltharii manufortis) 1
Vie d’Agricola 1
Vie d’Avvakum par lui-même 1
Vie est un songe (La) 1
Vieil Homme et la mer (Le) 1 2
Vie immédiate (La) 1
Vie mélangée (La) 1
Vie nouvelle (La) (La vita nuova) 1
Vie parisienne (La) 1
Vierge à la poire (La) 1
Vierge à l’enfant avec des saints 1
Vierge à l’enfant avec saint Jean 1
Vierge aux rochers (La) 1
Vierge de la victoire (La) 1
Vierge de Stuppach (La) 1
Vierge et les saints avec Federigo di Montefeltro (La) 1
Vierges aux rochers (Les) 1
Vies des douze Césars 1 2 3
Vies des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes 1 2
Vies parallèles 1
Vieux Cordelier (Le) 1
Villa Borghèse 1
Villa Carducci 1
Villa La Roche 1
Villa Medicea di Castello 1
Ville de Paris (La) 1
Villégiature (La) 1
Ville qui monte (La) 1
Violence et le sacré (La) 1
Violin Concerto 1
Violon (Le) 1
Violon et Palette 1
Violon et Pipe 1
Virgile travesti 1
Visible et l’Invisible (Le) 1
Vision après le sermon (La) (ou La Lutte de Jacob avec l’ange) 1
Visitation (La) 1
Vita Caroli Magni (Vie de Charlemagne) 1 2
Vocation de saint Matthieu (La) 1
Vœu de Louis XIII 1
Vœu de Louis XIII (Le) 1
Voix des héros morts (La) 1
Voix et le Phénomène (La) 1 2
Voleur et les Chiens (Le) 1
Völkischer Beobachter 1
Volonté de puissance (La) 1 2
Voltaire assis 1
Völund le forgeron 1
Vortex Temporum 1
Voting Right Act 1
Votivkirche 1
Voyage au Parnasse 1
Voyage dans la lune (Le) 1
Voyage de Charlemagne (Le) 1
Voyage en Alcarria 1
Voyage en Icarie 1 2
Voyage en Perse (Le) 1
Voyages de Gulliver (Les) 1 2
Voyageur sans bagages (Le) 1
Voyage vers l’Occident 1
Voyage vers l’Ouest 1
Vue de Delft 1
Vue du Snowdon 1
Vue d’Innsbruck 1
X
Xpace and the Ego 1
Yajurveda 1 2 3
Yeux fertiles (Les) 1
Yiheyuan (palais d’Été) 1 2
Yi-king (Classique des mutations) 1 2
Yoga-Sūtra 1
Yvain ou le Chevalier au Lion 1 2 3
Zadig 1 2
Zaïre 1 2
Zhong yong (L’Invariable Milieu) 1
Zhuangzi 1
Zi Bu Yu 1
Ziggourat de Tchogha-Zanbil 1 2
Ziggourat d’Ur 1
Index des lieux
Abaj Takalik 1
Abbeville 1 2
Abdère 1 2
Abou Simbel 1 2
Abousir 1 2
Abri Blanchard 1
Abri de Cro-Magnon 1 2
Abri de Curacchiaghiu 1
Abri de la Madeleine 1 2
Abri d’Araguina-Sennola 1
Abydos 1 2 3
Académie des beaux-arts de Munich 1
Acropole d’Athènes 1 2 3 4 5
Actium (bataille) 1 2 3 4
Addis-Abeba 1 2
Adélaïde 1
Adilabad 1
Adoua 1 2 3
Agadé (Akkad) 1 2 3 4
Agadir 1 2 3
Agnadel 1
Agra 1 2 3 4 5
Aix-en-Provence 1 2
Aix-la-Chapelle 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Ajaccio 1
Ajanta 1 2
Akhetaton 1
Alalakh 1 2
Alarcos (bataille) 1
Albe 1
Alençon 1
Alep 1 2 3 4 5 6 7 8
Alès 1
Alésia 1 2 3 4 5 6
Alexandrie 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31
Alfheimr (demeure des Elfes, mythologie nordique) 1
Alger 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Al-Kharga 1 2
Allahabad 1
Amba Alaghi 1
Amba de Guerchén (monastère) 1 2
Amboise 1 2 3
Ambuila (bataille) 1
Amiens 1 2 3
Ampurias 1
Amritsar 1
Amsterdam 1 2 3 4 5
Anagni 1 2
Andrinople 1 2
Angers 1
Anghiari (bataille) 1
Angkor 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Ankara (bataille) 1 2
Anoual (bataille) 1
Antibes 1
Antietam (bataille) 1
Antinoé 1
Antioche 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Antipolis (Antibes) 1
Anvers 1 2
Apamée 1
Appomattox (bataille) 1
Aquino 1 2
Aranjuez 1 2 3 4
Arcadiopolis (Luleburgaz) 1
Arcy-sur-Cure 1
Arezzo 1
Argenteuil 1
Argenton-sur-Creuse 1
Arginuses (bataille) 1
Argos 1 2 3
Arles 1 2 3 4 5 6
Arques 1
Arras 1 2 3 4
Artémision (cap) 1
Arvad 1
Assandun (bataille) 1
Assilah 1
Assise 1 2 3 4
Assouan 1 2
Assur 1 2 3 4 5 6 7
Atapuerca 1 2 3 4
Athènes 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51
52
Atlanta (bataille) 1
Auckland 1
Auerstadt 1
Augsbourg 1 2 3 4 5 6
Auschwitz 1 2 3 4 5 6 7
Austerlitz 1 2 3 4
Auvers-sur-Oise 1
Avaricon (Bourges) 1
Avebury 1
Aventin 1 2 3
Avignon 1 2 3
Avranches 1
Axoum 1 2
Ayacucho 1
Ayodhyā 1
Azincourt 1
Azov 1 2 3
Aztlán 1 2 3
Baden-Baden 1
Badr (bataille) 1
Bagdad 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Baie de Chesapeake 1 2
Baie des Cochons 1
Bâle 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Bāmyān 1
Bande de Gaza 1 2
Barbizon 1 2 3 4 5 6
Barcelone 1 2 3 4 5
Bari 1
Bar-le-Duc 1
Barranco León 1
Bassora 1 2
Bastille 1 2 3 4
Bauhaus 1 2 3
Baume Moula-Guercy 1
Bayeux 1
Bayonne 1 2 3 4
Beaugency 1
Beaulieu 1
Beauvais 1 2 3
Bedford 1
Belfort 1
Belgrade 1 2 3 4
Belzec 1
Bénévent 1 2
Béni Hassan 1 2
Benin City 1 2
Berlin 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42
Berne 1
Bérytos 1
Besançon 1
Beth Habaal 1
Bethléem 1
Béthune 1
Beyrouth 1 2 3
Béziers 1 2 3
Bhaja 1
Bhubaneswar 1
Biarritz 1
Bibliothèque d’Alexandrie 1
Bibliothèque d’Assurbanipal 1 2
Bibliothèque Laurentienne 1 2
Bibliothèque Sainte-Geneviève 1
Bibliothèque vaticane 1 2
Bibracte 1 2 3
Bilskirnir (manoir de Thor, mythologie nordique) 1
Bilzingsleben 1
Bir Hakeim 1
Blanzac 1
Blois 1 2 3
Bobigny (procès) 1
Bodh Gaya 1
Bois de Boulogne 1 2 3
Bois de l’Allier 1
Bois de Vincennes 1
Bologne 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Bombay 1 2 3 4
Bonn 1 2
Bordeaux 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Borre 1
Boscoreale 1
Boston 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Bosworth Field (bataille) 1
Bougon 1
Boukhara 1
Bourges 1 2
Bouvines (bataille) 1 2
Brassempouy 1 2
Brême 1
Brenodunum (Berne) 1
Brescia 1
Breslau 1
Brest 1
Brest-Litovsk (bataille et traité) 1 2 3
Bristol 1
British Museum 1 2
Broadway 1
Brooklyn Museum 1
Brousse 1
Bruges 1
Bruxelles 1 2 3 4 5 6 7 8
Bubastis 1 2
Bucarest 1 2
Budapest 1 2 3
Buenos Aires 1
Bull Pun (bataille) 1
Burgos 1 2
Butte Montmartre 1 2 3 4
Byblos 1 2 3 4 5
Byzance 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
Cadix 1 2 3
Caen 1 2 3
Café du croissant 1
Café Guerbois 1 2 3
Cahuachi 1
Calais 1 2 3 4 5
Calakmul 1 2
Calcutta 1 2 3 4
Callicut 1
Caluire-et-Cuire 1
Cambrai 1 2 3
Cambridge 1 2 3 4 5
Camp David (accords) 1 2
Campo-Formio (traité) 1 2 3
Canal de Suez 1 2
Cannes 1
Canossa 1 2
Capharnaüm 1
Capitole 1 2 3 4
Capitole (EUA) 1
Cap Mycale 1
Caporetto 1
Capri 1
Carcassonne 1 2
Carnac 1 2 3
Carthage 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Carthagène 1
Casa Belvédère 1
Castel Gandolfo 1
Castel Gondolfo 1
Castro 1
Catacombes de Priscille 1 2
Catacombes d’Alexandrie 1
Çatal Hüyük 1 2
Cateau-Cambrésis (traité) 1
Caucase 1
Caune de l’Arago 1 2
Caverne de Pendejo 1
Caverne Koneri 1
Caverne Mahishamardini 1
Caverne Vahara II 1
Cerny 1
Cerny-en-Lannois 1
Cerveteri 1 2 3 4 5
Cerzat 1
Césarée 1
Chalcédoine 1 2 3 4 5 6
Chalcis 1
Châlons-sur-Marne 1
Châlus 1
Chamonix 1
Champ-de-Mars 1 2 3 4
Champ des Merles (bataille) 1 2
Champs Catalauniques (bataille) 1 2
Champs-Élysées 1
Chanchán 1
Changan 1 2 3 4
Charavines 1 2
Charleston 1 2
Chartres 1 2 3 4 5 6 7
Châteaubriant (édit) 1
Châtelperron 1
Chattanooga (bataille) 1
Chavín 1 2
Cheikh Abd el-Gournah 1 2
Chelles 1
Chelmno 1
Chemin des Dames (bataille) 1 2 3 4 5 6 7
Cherbourg 1
Chéronée (bataille) 1
Chesowanja 1
Chester 1
Chicago 1 2 3 4
Chichén Itzá 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Chicomotzoc 1
Chilhac 1
Chinon 1 2
Chioggia 1 2
Chios 1
Chittorgarh 1
Cholet 1
Chongoyape 1
Chou Kou Tien 1
Cimetière de Domitille 1
Cimetière de Prétextat 1
Cimetière des Innocents 1
Cimetière du Père-Lachaise 1
Cishan 1
Cividale del Friuli 1
Clairvaux-les-Lacs 1 2
Clermont 1 2
Cloyne 1
Cluny 1 2
Clusium 1
Cnide 1 2
Cnossos 1
Collège de Coqueret 1
Collège Henri-IV de La Flèche 1
Cologne 1 2 3 4 5 6
Colombey-les-Deux-Églises 1
Colophon 1
Comacchio 1
Combe-Capelle 1 2
Combray 1
Compiègne 1 2 3 4
Concord 1 2 3
Constance 1 2 3 4
Constantine 1 2 3
Constantinople 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49
50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71
Copán 1 2
Copenhague 1 2 3
Cordoue 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
Corfou 1 2 3
Corinthe 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Cortone 1
Cos 1 2
Cougnac 1
Coutras (bataille) 1
Covadonga 1
Craonne 1 2
Crécy (bataille) 1 2
Crémone 1
Cronstadt 1 2
Crotone 1
Cueva de Ambrosio 1
Cueva de La Pasiega 1
Cuicuilco 1
Cuiry-lès-Chaudardes 1 2
Culloden (bataille) 1
Cuzco 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Cymé 1
Cyrène 1 2
D
Dachau 1 2
Dachour 1
Dahshour 1 2
Dakar 1
Dallas 1
Damas 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Dan-no-ura (bataille) 1
Dantzig 1
Deauville 1
Débir 1
Debre Berhan 1
Deir el-Medineh 1
Delhi 1 2 3
Délos 1 2 3 4 5
Delphes 1 2 3 4 5 6
Dendérah 1
Derby 1
Desio (bataille) 1
Dessau 1
Détroit de Béring 1
Détroit des Dardanelles 1 2
Didymes 1 2
Dieppe 1 2
Dijon 1 2 3 4 5
Djebel Irhoud 1
Djemdet-Nasr 1
Djenné 1 2
Djerba 1
Djibouti 1
Dmanissi 1 2
Dodone 1
Dolni Vestonice 1
Domrémy 1
Douai 1 2
Douaumont 1 2 3
Drancy 1 2
Dresde 1 2 3
Dublin 1 2
Dunkerque 1 2 3
Durazzo 1
Düsseldorf 1 2 3
Dyrrachium 1
Ebla 1 2 3
Eckmühl 1
École normale de Sèvres 1
Ectabane 1 2 3 4
Edfou 1
Ediacara 1
Édimbourg 1 2 3 4
Édirne 1
Edo 1 2 3
Egba 1
Églon 1 2
Eisleben 1
El-Alamein 1
El-Amrah 1
Élée 1
Éléphantine 1
El Kab (Nekheb) 1
Ellora 1 2 3 4 5
Emporion 1
Ems 1 2 3 4 5
Ensérune 1
Entremont 1
Épernay 1
Éphèse 1 2 3
Épidaure 1
Épinal 1
Épinay (congrès) 1
Eridu 1 2 3 4 5 6
Erlitou 1 2
Ermenonville 1
Esie 1
Esquilin 1
Essé 1
Étang de Berre (bataille) 1
Ethendun (Edington) 1
Étiolles 1 2
Evesham (bataille) 1
Évian (accords) 1
Eylau 1 2
Eyzies-de-Tayac 1 2
Falaise 1
Fārāb 1
Fatehpur Sikrī 1
Fayoum 1 2 3 4 5
Feldmelen 1
Ferme de la Haye 1
Ferney 1
Ferrare 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Fès 1 2 3 4
Fête de la Fédération 1
Fiavè 1
Fiesole 1
Fiume 1 2 3
Fleury 1
Florence 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50
51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67
Fontainebleau 1 2 3 4 5 6 7 8
Fontaine-Française (bataille) 1
Forêt de Fontainebleau 1 2
Formose (Taiwan) 1 2
Fort de la Citadelle 1
Fort de Montrouge 1
Fort de Portalet 1
Fort de Romainville 1
Fort de Vincennes 1
Fort Sumter 1 2
Fourneau-du-Diable 1
Francfort 1 2 3 4 5 6 7 8
Francfort-sur-le-Main 1
Friedland 1 2
Frohsdorf 1
Frombork 1
Fuente Nueva 3 1
Fukushima 1 2
Fulton 1 2
Funai 1
Fustat 1
Gabaon 1
Gadeb 1
Gaète 1
Galerie Doré 1
Galerie Greuze 1
Galerie Iris Clert 1 2
Galerie Maeght 1
Galerie Mathias Fels 1
Galgenberg 1
Gallipoli 1 2
Gand (paix) 1
Gao 1 2
Garches 1
Gare de Lyon 1
Gare de l’Est 1
Gare d’Orsay 1
Gare Saint-Lazare 1
Gaugamèles (bataille) 1
Gavrinis 1
Gdańsk 1 2
Gebel Barkal 1 2 3 4
Gelboé (bataille) 1 2
Gênes 1 2 3
Genève 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Gergovie (bataille) 1
Gettysburg (bataille) 1
Ghazni 1
Girsu 1 2 3 4 5
Giverny 1
Gizeh 1 2 3
Gloucester 1
Godin Tepe 1
Gondar 1 2
Gontsy 1
Gordion 1 2 3
Gori 1
Gosan-ri 1
Goshen 1
Gournay-sur-Aronde 1
Gran Dolina 1 2
Granique (bataille) 1
Grenade 1 2 3 4 5
Grenelle (accords) 1 2 3
Grenoble 1
Grotte aux Fées 1
Grotte Chabot 1
Grotte Cosquer 1 2 3
Grotte de Chauvet 1 2 3
Grotte de Cussac 1
Grotte de Font-de-Gaume 1 2
Grotte de Gargas 1 2 3
Grotte de Hayonim 1
Grotte de la Grèze 1
Grotte de la Mouthe 1
Grotte de la Salpêtrière 1
Grotte de Lascaux 1 2 3 4 5 6 7
Grotte de la Vache 1
Grotte de Niaux 1
Grotte de Pair-non-Pair 1
Grotte de Rouffignac 1
Grotte de Sandia 1
Grotte des Combarelles 1
Grotte des Lions 1
Grotte des Trois-Frères 1
Grotte de Teyjat 1
Grotte du Castillo 1
Grotte du Lazaret 1 2
Grotte du Mas-d’Azil 1 2 3
Grotte du Parpallo 1
Grotte du Pech Merle 1 2
Grotte du Placard 1
Grotte Duruthy 1
Grotte du Tuc d’Audoubert 1
Grotte du Vallonnet 1 2
Grotte d’Altamira 1 2 3
Grotte d’Aurignac 1
Grotte Guattari 1
Grottes de Longmen 1
Grottes des mille Bouddhas 1
Guadalcanal 1
Guadalete (bataille) 1
Guernica 1
Hadar 1
Haiphong 1
Halle 1
Hallstatt 1
Hangzhou 1 2 3 4
Hao 1
Haran 1 2
Harappa 1 2 3 4
Harare 1
Harfa 1
Harrar 1
Hassuna 1
Hastings (bataille) 1
Hattusa 1 2 3 4
Hawara 1
Hébron 1 2 3 4 5 6
Heiankyō (Kyōto) 1 2
Heidelberg 1
Heijōkyō (Nara) 1
Héliopolis 1 2
Hellespont 1
Helsinki (accords) 1
Herculanum 1 2 3
Hermopolis 1
Hesdin 1
Hiérakonpolis 1 2
Hiéria (concile) 1
Highgate Cemetery 1
Hiroshima 1 2 3
Hlidskjálf (Haut Siège d’Odin, mythologie nordique) 1
Hong Kong 1 2 3 4
Honolulu 1
Hôpital Goujon 1
Hôpital Santa Maria Nuova 1
Hornstaad 1
Hôtel-Dieu de Lyon 1
Houdibiya 1
Hueyapan 1
Hyères 1
Iéna 1 2 3 4
Ife 1 2 3
Igbo-Ukwu 1
Ijebu 1
Ikaruga 1
Île d’Elbe 1 2
Ileret 1
Illahoun 1
Ingolstadt 1
Institut de France 1
Ishango 1
Issenheim 1
Issos (bataille) 1
Istanbul 1 2 3 4
Isthme de l’Acté 1
Isthme de Panama 1 2 3 4
Isthme de Suez 1
Isturitz 1 2
Ivry 1
Iwajuku 1
Iwo Jima 1
Jamestown 1
Jamnia 1
Janicule (bataille) 1
Jardin des Hespérides 1
Jardin des Plantes 1 2 3
Jardin des Tuileries 1 2
Jardin d’Éden 1
Jardins de Bagatelle 1
Jarnac 1
Jelling 1
Jemappes 1 2 3
Jerf el-Ahmar 1
Jéricho 1 2 3
Jérusalem 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50
51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61
Jiankang 1 2
Jos 1 2
K
Kadesh (bataille) 1 2
Kahlenberg (bataille) 1
Kaifeng 1 2 3 4
Kaili 1
Kairouan 1 2 3 4 5 6
Kalambo Falls 1
Kamakura 1
Kanagawa 1
Kanauj 1 2
Kanchipuram 1 2
Kandahar 1
Kanesh (Nesa) 1 2
Kanheri 1
Kanikléion (concile) 1
Kanwaha (bataille) 1
Kapilavastu 1
Karkemish 1 2 3 4 5
Karnak 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Kennewick 1
Kermarquer 1
Khambhat 1
Khartoum 1 2 3 4
Khirokitia 1
Khorsabad 1
Kiel 1
Kiev 1 2 3 4 5 6
Kish 1 2 3 4
Königsberg 1 2
Koobi Fora 1
Kosovo (bataille) 1
Koulikovo (bataille) 1
Koumasi 1
Kourgane de Koul-Oba 1
Koursk (bataille) 1
Krapina 1 2
Kūfa 1 2
Kunming 1
Kurukshetra (bataille) 1
Kyōto 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Lacédémone 1
La Chapelle-aux-Saints 1 2
Lacs de Mazurie (bataille) 1
Ladé (bataille) 1
Laetoli 1
La Ferrassie 1 2
La Flèche 1
Lagash 1 2 3 4 5 6 7 8 9
La Haye 1 2 3
Lahore 1 2 3
La Jaunaye 1
Lakish 1 2
Lalibela 1 2 3
La Mecque 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
La Micoque 1 2
Lantian 1
Laon 1
La Quina 1
La Rochelle 1 2 3
Larsa 1 2
Latran 1 2 3 4 5 6 7
Laugene-Haute 1
Laugerie-Basse 1
Laugerie-Haute 1
Laurion 1 2 3
Lausanne 1 2
La Venta 1 2
Le Caire 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Le Havre 1
Leipzig 1 2
Le Moustier 1
Le Moyen Empire 1
Leningrad (Saint-Pétersbourg) 1 2 3 4
Léontopolis 1
Lépante 1 2
Le Pirée 1 2
Le Procope 1
Leptis Magna 1
Lesbos 1
Les Fontinettes 1
Lesnaya (bataille) 1
Les Pradelles 1
Lespugue 1
Lewes (bataille) 1
Lewisville 1
Lexington 1
Leyde 1
Licht 1 2
Liège 1
Ligne Maginot 1 2
Lille 1 2 3 4
Lima 1
Limbourg-sur-la-Lahn 1
Limoges 1
Lisbonne 1 2 3 4 5
Little Rock 1
Llerena 1
Locarno (accords) 1 2
Locmariaquer 1 2
Loggupo 1
Londres 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45
Longwy 1
Los Angeles 1
Los Millares 1
Louvain 1 2
Louxor 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Lübeck 1
Lübsow 1
Luçon 1
Lucques 1
Lugdunum (Lyon) 1
Lukerno 1
Lundy’s Lane (bataille) 1
Lunéville 1
Luoyang 1 2 3 4
Lyon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
L’Écluse (bataille) 1
Maastricht (traité) 1
Macao 1 2 3
Machu Picchu 1 2 3 4 5
Mâcon 1 2
Madaure 1
Madras 1
Madrid 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
Magdala 1
Magdebourg 1
Magenta 1
Magnésie du Méandre 1
Mahabalipuram 1 2 3
Mahendraparvata 1
Maïdanek 1
Maison Blanche 1 2 3 4 5
Malaga 1 2
Maldon (bataille) 1
Mallaha 1 2 3
Mammen 1
Manching 1
Mantoue 1 2 3 4 5 6
Manufacture de Beauvais 1
Manufacture de Sèvres 1
Manufacture d’Aubusson 1
Manzikert (bataille) 1 2
Marathon (bataille) 1 2 3 4 5
Marbourg 1
Marengo 1
Mari 1 2 3 4 5
Marignan (bataille) 1
Marillac-le-Franc 1
Marj Dābiq (bataille) 1
Marlborough 1
Marne (bataille) 1
Marolles-sur-Seine 1
Marrakech 1 2 3 4
Marseille 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Massachusetts Institute of Technology 1
Massalia (Marseille) 1 2 3 4
Matignon (accords) 1 2 3
Mayapán 1
Mayence 1 2 3 4
Mayenne 1
Maze (prison) 1
Mbanza Kongo 1
Meaux 1 2
Médine 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Médinet-Habou 1
Meerut 1
Mégare 1 2
Megiddo (bataille) 1
Mélos 1 2
Memel 1
Memphis 1 2 3
Memphis (EUA) 1
Menez Dregan 1
Mer de Corail (bataille) 1
Mérimdé 1
Méroé 1 2 3
Messine 1
Métaponte 1 2
Metropolitan Museum of Arts 1
Metz 1 2 3 4 5 6 7
Mexico 1 2 3 4
Mezhirich 1
Mézine 1
Michelangiolo (café) 1
Michelsberg 1
Mictlan (royaume de la mort (mythologie aztèque) 1 2
Midway (bataille) 1
Milan 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43
Milet 1 2 3
Milo 1
Modène 1 2
Moderna Museet de Stockholm 1
Mogador 1
Mohács 1
Mohenjo-Daro 1 2
Monaco 1
Monastère de Métaq 1
Monoïkois (Monaco) 1
Montagne Sainte-Geneviève 1
Mont Athos 1
Montauban 1 2
Mont Badon (bataille) 1
Mont Baekdu 1
Mont Bégo 1
Montbrison 1
Mont Caelius 1
Mont des Oliviers 1
Monte Cavallo 1
Mont Fuji 1 2
Mont Himeji 1
Mont Kailash 1
Mont Kōya 1 2
Mont Moriah 1 2 3
Mont Nébo 1
Montoire-sur-le-Loir 1 2
Mont Palatin 1 2 3 4
Montparnasse 1
Montpellier 1 2
Montreuil 1
Mont-roig del Camp 1 2
Mont Sinaï 1 2
Monza 1
Moret-sur-Loing 1
Moscou 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42
Mostaganem 1
Moukden 1 2
Moulin-Quignon 1 2 3
Mou-ye (bataille) 1
Munda 1
Munich 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Murcie 1
Mururoa 1
Musawwa es-Sufra 1
Musée Carnavalet 1
Musée copte du Caire 1
Musée de l’Ermitage 1 2
Musée de Pergame 1
Musée du Bargello 1
Musée du Belvédère de Vienne 1
Musée du Louvre 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Musée du Luxembourg 1 2
Musée d’Alexandrie 1 2
Musée d’art moderne de la ville de Paris 1 2
Musée égyptien du Caire 1
Musée national de Damas 1
Musée national de la Renaissance 1
Musée national des Arts et Traditions populaires 1
Muséum national d’Histoire naturelle 1
Museum of Modern Art (MoMa) 1 2 3 4
Mycènes 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Mylouthkia 1
Mysore 1 2
Mytilène 1
Nabta Playa 1
Naga 1
Nagada 1 2 3 4 5
Nagaoka 1
Nagasaki 1 2
Nagashino (bataille) 1 2
Nag Hammadi 1
Nahal Oren 1
Nancy 1 2
Nankin 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Nanterre 1 2
Nantes 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Napata 1 2
Naples 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
Naqsh-e Rostam 1
Nara 1 2 3 4 5 6 7 8
Narbonne 1 2
Narva (bataille) 1
Naseby (bataille) 1
Naucratis 1
Nauvoo 1
Naxos 1 2
Nazareth 1
Nazca 1
Ndjimi 1
Neerwinden (bataille) 1 2
Nekheb 1
Nekhen 1
Nemours (traité) 1
Néopolis 1
Neuilly (traité) 1 2
Neuschwanstein 1
Neuvy-en-Sullias 1
New York 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
Nice 1 2 3 4 5 6 7
Nicée 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Nichapour 1
Nicomédie 1 2
Nicopolis (bataille) 1 2
Nikaïa (Nice) 1
Nikolsburg 1
Nimègue (traité) 1
Nîmes 1
Ninive 1 2 3 4 5
Nippur 1 2 3 4 5
Nok 1
Nomonhan 1
Nottingham 1
Noubt 1
Nouméa (accords) 1
Novgorod 1 2 3 4 5 6 7 8
Noyon 1
Nuremberg 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Nush-i Jân 1
Nystad (traité) 1
Observatoire de Paris 1 2
Odessa 1 2 3 4 5
Okinawa 1 2
Olbia (Hyères) 1 2
Olduvai 1 2 3 4 5
Olympie 1 2 3 4 5 6 7
Orchies 1
Orléans 1 2 3 4 5
Oslo (accords) 1 2 3
Osnabrück 1
Ostie 1
Ottawa 1
Ougarit 1 2 3 4
Ouhoud 1
Oxford 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Oyo 1 2
Ōsaka 1 2 3 4
Pachacamac 1
Padoue 1 2 3 4 5 6 7 8
Paestum 1
Palais du Louvre 1 2 3 4 5 6 7
Palenque 1 2
Palerme 1 2 3 4
Palestro 1
Palmyre 1
Pañamarca 1
Panipat (bataille) 1
Pānipat (bataille) 1
Parme 1 2 3 4 5
Paros 1
Pasargades 1 2 3 4 5
Passarowitz (paix) 1
Passy 1
Pasto 1
Pātaliputra 1 2 3 4
Patmos 1 2
Pavie 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Pazyryk 1 2
Pearl Harbor 1 2 3 4
Pékin 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
Péloponnèse 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Pergame 1 2 3
Perm 1
Péronne 1 2
Pérouse 1 2 3 4 5 6
Perreux-sur-Marne 1
Persépolis 1 2 3 4 5 6 7
Peterwardein 1
Petrograd 1 2 3 4 5
Petrovaradin (bataille) 1
Peyzac-le-Moustier 1
Phalère 1
Pharos 1 2 3
Pharsale (bataille) 1
Philadelphie 1 2 3 4
Philae 1 2
Philippopolis (Plovdiv) 1
Phnom Penh 1
Phocée 1
Picquigny (traité) 1
Pikimachay 1
Pinacothèque de Brera 1
Pincevent 1 2
Pise 1 2 3 4 5 6
Place de Grève 1
Place de la Bastille 1
Place de la Concorde 1 2 3 4
Place des Victoires 1 2
Place Étienne-Pernet 1
Place Louis XV 1
Place Mirabeau (Aix-en-Provence) 1
Place Navone 1 2
Place Tiananmen 1 2
Place Vendôme 1 2 3
Plaine du Pô 1 2
Plaisance 1
Plateau du Golan 1 2 3
Platées (bataille) 1
Poissy 1 2
Poitiers 1 2 3 4 5 6
Poltava 1
Pompéi 1 2 3 4 5
Pont-Aven 1 2 3 4 5
Pont Milvius (bataille) 1 2 3
Pontoise 1
Portalban 1
Porte de Marduk 1
Porte de Shamash 1
Porte de Zabada 1
Porte du Roi 1
Porte d’Adad 1
Porte d’Enlil 1
Porte d’Ishtar 1 2 3
Porte d’Urash 1
Porte San Estéban 1
Potsdam 1 2 3
Poznan 1
Prague 1 2 3 4 5 6 7
Presbourg (paix) 1
Priène 1 2
Prison de la Santé 1 2
Prison de Saint-Lazare 1
Prison de Stadelheim 1
Prison du Châtelet 1
Puteoli 1
Pydna (bataille) 1 2
Pylos 1 2
Pyongyang 1
Q
Qafzeh 1 2
Qalaat Jarmo 1
Qazvin 1
Quartier Latin 1 2 3 4
Quierzy-sur-Oise 1
Quirinal 1
Qumrân 1
Qurva 1
Rabat 1
Radstadt (traité) 1 2
Raguse (Dubrovnik) 1
Rajagrha 1
Rambouillet 1
Rapallo (traité) 1
Rastatt 1
Ratisbonne 1 2
Ravenne 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Ravensbrück 1
Ray (Téhéran) 1
Regensbourg 1
Reggio d’Émilie 1 2
Reims 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Rennes 1 2
Rethondes 1 2
Rhacotis 1 2
Rhodes 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Ribemont-sur-Ancre 1 2
Richmond 1
Rimini 1 2
Ringerike 1
Rio de Janeiro 1 2
Riom (procès) 1 2
Roc-aux-Sorciers 1
Roccamonfina 1
Roc de Sers 1 2
Roche-aux-Fées 1
Roche de Solutré 1 2 3
Rochefort 1
Rochester 1
Rocroi (bataille) 1 2
Ronciglione 1
Roquebrune-Cap-Martin 1
Roquepertuse 1
Rotterdam 1 2
Rouen 1 2 3
Royal Academy of Arts 1 2 3
Rubicon 1
Rudna Glava 1
Ruijin 1
Ryswick (paix) 1
Sacsayhuamán 1 2
Sadowa (bataille) 1 2 3 4
Sagrajas (ou Zalaca) (bataille) 1
Saïda 1
Saint-Acheul 1
Saint-Albans (bataille) 1
Saint Augustine 1
Saint-Clair-sur-Epte (traité) 1
Saint-Cloud 1
Saint-Denis 1 2
Sainte-Hélène 1 2
Saint-Germain-en-Laye 1 2 3
Saint-Jean-d’Acre 1 2
Saint-Louis 1
Saint-Michel (station) 1
Saint-Nazaire 1
Saint-Omer 1
Saint-Pétersbourg 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
Saint-Quentin 1
Saint-Rémy-de-Provence 1
Saint-Sébastien (accord) 1
Salamanque 1
Salamine (bataille) 1 2 3 4 5 6
Salò 1
Salzbourg 1 2
Samarie 1 2 3 4 5
Samarra 1
Samos 1 2 3 4
Sanchi 1 2
Sanctuaire de Yasukuni 1
San Francisco 1
San Francisco (traité) 1
San Lorenzo 1 2
San Remo (accords) 1
Saragosse 1 2
Sarajevo 1 2
Sarcelles 1
Sardique 1
Satsuma (bataille) 1
Saumur 1
Savonnerie 1
Schelklingen 1
Schönbrunn 1 2
Sébastopol 1
Sedan 1 2 3
Ségou 1
Ségovie 1 2
Sekigahara (bataille) 1
Séleucie du Tigre 1
Seligenstadt 1
Senlis 1 2
Sens 1
Séoul 1
Sepphoris 1
Serdica (Sofia) 1
Sessrumnir 1
Sétif 1
Séville 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Sèvres (traité) 1 2 3
Shanghai 1 2 3 4
Shanidar 1
Shenyang 1
Shillourokambos 1
Shīrāz 1
Shrewsbury 1
Sichem 1 2
Sidon 1 2 3
Sienne 1 2 3
Siffīn (bataille) 1
Sigmaringen 1
Sikandra 1
Sima del Elefante 1
Simbirsk (Oulianovsk) 1
Sinaï 1 2 3 4 5 6
Sipán 1 2
Sippar 1 2 3
Sistova (paix) 1
Site de Clovis 1
Skull 1
Smyrne 1
Sobibor 1
Sofia 1
Soissons 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Sokoto 1
Soleihac 1
Solferino 1
Sorbonne 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Souzdal 1
Sparte 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Stabies 1
Stagire 1
Stalingrad 1 2 3 4 5 6 7
Stamford Bridge (bataille) 1
Star Carr 1
Steinheim 1
Sterkfontein 1
Stockholm (appel) 1
Stonehenge 1 2
Strasbourg 1 2
Stuttgart 1
Styx 1 2
Sumer 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Suse 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Sydney 1
Syracuse 1 2
Taganrog 1
Tahert 1
Taidu 1
Taiwan 1 2 3 4 5 6
Talavera 1
Tanis 1 2 3 4 5
Tannenberg 1
Tara 1
Tarente 1
Tarquinia 1 2 3 4 5
Tarragone 1
Tarse 1 2
Tartare (les Enfers, mythologie grecque) 1 2 3
Taung 1
Tchernobyl 1
Tegoulet 1 2
Téhéran 1 2 3
Tell Abu Hureyra 1
Tell Açana 1
Tell el-Amarna 1 2 3 4 5 6
Tello 1
Tel Yarmouth 1
Tenochtitlán 1 2 3 4 5 6 7
Tenta 1
Teotihuacán 1 2 3 4
Terçanabal 1
Terra Amata 1 2 3 4 5
Terracina 1
Tewkesbury (bataille) 1
Texcoco 1
Thagaste 1
Thanjavur 1
Thapsus (bataille) 1
Théâtre Alfred-Jarry 1
Théâtre Robert Houdin 1
Thèbes 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
Thermopyles (bataille) 1 2 3
Thermos 1
Thessalonique 1 2 3
Thinis 1 2
Thirsa 1 2
Thouars 1
Tiahuanaco 1 2
Tikal 1
Tilsit (traité) 1 2
Tinmel 1 2
Tirynthe 1 2
Titelberg 1
Tivoli 1 2
Tlacopan 1
Tlalocan 1 2
Tlemcen 1
Tokch’on 1
Tōkyō 1 2 3 4 5 6 7
Tolède 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Tombouctou 1 2 3 4 5 6 7
Tondibi (bataille) 1
Torgau 1
Toulon 1
Toulouse 1 2 3 4
Tour de Londres 1 2
Tournai 1 2 3
Tours 1 2 3 4 5 6 7
Towton (bataille) 1
Trafalgar (bataille) 1 2
Treblinka 1
Trente 1 2 3 4 5
Trèves 1 2 3 4 5 6
Trêves 1
Trianon (traité) 1 2
Trieste 1 2
Trinity College 1
Tripoli 1 2
Troie 1 2 3 4 5 6
Troyes 1 2
Trujillo 1
Tsarskoïe Selo (Pouchkine) 1 2
Tula 1 2 3 4 5 6 7 8
Tumulus de Babyna 1
Tumulus de Berel 1
Tunis 1 2 3 4 5 6
Turbigo 1
Turin 1 2 3 4 5
Tursac 1
Tyr 1 2 3 4 5 6
Udayagiri 1
Udine 1
Uji 1
Umma 1 2 3
Université catholique de Louvain 1
Université de Berlin 1 2
Université de Bologne 1
Université de Bonn 1
Université de Bordeaux 1
Université de Cambridge 1 2 3 4 5
Université de Chicago 1
Université de Copenhague 1 2
Université de Dublin 1
Université de Harvard 1 2 3
Université de Heidelberg 1 2
Université de Königsberg 1
Université de la Sorbonne 1
Université de Moscou 1
Université de Nanterre 1
Université de Pavie 1
Université de Prague 1
Université de Tōkyō 1
Université de Tombouctou 1
Université de Tübingen 1
Université de Valence 1
Université de Vienne 1
Université de Visva Bharati 1
Université d’Iéna 1 2 3
Université d’Oxford 1
Université Johann Wolfgang Goethe de Francfort-sur-le-Main 1
Université Rice (Houston) 1
Université Sankoré 1 2 3
Ur 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Urbin 1 2
Urbino 1 2
Urkish 1
Urnes 1
Uruk 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
Usine AZF de Toulouse 1
Utrecht 1
Utrecht (traité) 1 2 3
Uxmal 1 2 3 4 5 6
V
Vaiśālī 1
Valence 1 2 3
Valenciennes 1
Valladolid 1
Vallée de Côa 1
Vallée de la Vézère 1
Vallée de l’Indus 1 2 3 4
Vallée de Piura 1
Vallée des Merveilles 1
Vallée des Reines 1 2 3 4
Vallée des Rois 1 2 3 4
Vallée du Liri 1
Vallée d’Elah 1
Valmy (bataille) 1 2 3
Varanasi (Bénarès) 1
Varennes 1 2
Varna (bataille) 1
Varsovie 1 2 3
Varsovie (pacte) 1 2 3 4
Vaucresson 1
Vélodrome d’Hiver 1 2
Venise 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51
52 53 54 55
Verberie 1 2
Verdun (bataille et traité) 1 2 3 4 5 6 7
Vérone 1 2 3
Versailles 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31 32 33 34 35
Vertessolos 1
Vervins (paix) 1 2
Vésuve 1 2
Vétheuil 1
Vetulonia 1
Via dell’Impero 1 2
Vicence 1
Vichy 1
Victoria 1 2
Vienne 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26
27 28 29 30
Villacoublay 1
Villafranca 1
Villalar 1
Villanova 1
Villaviciosa 1
Villers-Cotterêts (édit) 1 2
Viminal 1
Vincennes 1 2 3
Vis I 1
Vittorio Veneto 1
Vix 1
Vladimir 1 2 3
Vogelherd 1
Vouillé (bataille) 1
W
Wadi en-Natouf 1
Wagram 1 2
Walhalla (paradis des guerriers, mythologie nordique) 1 2 3
Washington 1 2 3 4 5 6 7
Wassugani 1
Wassy 1 2
Watergate (scandale) 1 2 3 4 5
Waterloo 1 2 3
Wedmore (traité) 1
Weimar 1 2 3
Westminster 1 2
Westport 1
Willendorf 1 2
Wittenberg 1 2 3
Worms 1 2 3 4 5
Worms (diète) 1
Xi’an 1 2
Yalta 1
Yamazaki (bataille) 1
Yangshao 1
Yangzhou 1
Yarmouk (bataille) 1 2
Yazilikaya 1
Yeha 1
Yên Bái 1
York 1 2 3 4
Yorktown 1
Ypres 1
Yuanmou 1
Yverdon 1
Zagros 1 2 3 4 5
Zallāqa 1
Zéla (bataille) 1
Zhoukoudian 1
Zurich 1 2 3
Table des matières
Titre
Copyright
Dédicace
Au lecteur
Introduction : Sapere aude, « ose savoir »
PREMIÈRE PARTIE. LA PRÉHISTOIRE
CHAPITRE PREMIER. Expliquer l’univers
1. Le Précambrien
2. Le Phanérozoïque
3. Les grandes glaciations
4. L’Holocène
CHAPITRE III. La Préhistoire, de 7 millions d’années à l’apparition de la
métallurgie (2500 av. J.-C.)
1. Les Paléolithiques
2. L’Épipaléolithique et le Mésolithique
3. Le Néolithique
4. L’art rupestre du Néolithique et de l’âge du fer
5. Mégalithisme et art mégalithique
6. Les pieds dans l’eau : les cités lacustres
CHAPITRE IV. Les civilisations de la métallurgie (2500-25 av. J.-C.)
1. La Chine
2. Le Japon et la Corée
3. L’Inde
4. Le continent américain
DEUXIÈME PARTIE. L’ANTIQUITÉ
A. LES PREMIÈRES GRANDES CIVILISATIONS ANTIQUES DU PROCHE ET DU
MOYEN-ORIENT
CHAPITRE PREMIER. La Mésopotamie
1. L’alphabet phénicien
2. L’art phénicien, une influence venue d’Égypte
3. La religion phénicienne : fécondité et prostitution
CHAPITRE IV. L’Assyrie
1. Les Hébreux
2. Les royaumes hébreux des environs de l’an 1000 aux alentours de 600
av. J.-C.
CHAPITRE VIII. Nos voisins d’Asie
1. La religion musulmane
2. Les Omeyyades (661-750), de Damas à Cordoue
3. Les Abbassides (750-1258), califes des Mille et Une Nuits
4. Les Idrissides (789-926)
5. Les Aghlabides (800-909)
6. Les Fatimides d’Égypte
7. Les mamelouks d’Égypte (1250-1517)
8. Les Almoravides, la conquête sans fin (1056-1147)
9. Les Almohades (1130-1269)
10. Quand arrivent les Turcs : les Seldjoukides (1038-1307)
11. Du désert à Constantinople : les Turcs ottomans
12. La philosophie arabe
13. La philosophie juive
14. Sciences et savoirs du monde arabe
15. Les maîtres de la médecine arabe
16. L’alchimie arabe
CHAPITRE XI. Le Moyen Âge de l’Asie
1. La civilisation maya
2. La civilisation toltèque
3. La civilisation inca
4. La civilisation aztèque
CHAPITRE XIII. L’Afrique médiévale
1. L’Éthiopie médiévale
2. Les débuts de la dynastie salomonide (XIIIe-XVe siècle)
3. Le royaume du Kongo (v. 1350-1500)
4. L’empire de Kanem-Bornou
5. Le royaume du Mali
6. Les cités-États Yoruba
7. L’empire du Bénin
8. L’Empire songhaï
9. L’architecture soudano-sahélienne
QUATRIÈME PARTIE. LA RENAISSANCE
CHAPITRE PREMIER. La Renaissance : rupture et continuité en Europe
1. L’Inde moderne
2. La Chine moderne
3. Le Japon, de la fin du XVIe au XVIIe siècle
4. La Corée
CHAPITRE X. L’Afrique moderne : l’exemple de l’Éthiopie
1. L’architecture éthiopienne
2. La littérature éthiopienne
B. LE MONDE DU XVIIIe SIÈCLE
CHAPITRE XI. La France au XVIIIe siècle
1. L’Inde
2. La Chine
CHAPITRE XIX. Nos voisins d’Afrique : l’Éthiopie au XVIIIe siècle
1. Le royaume d’Abomey
2. Le royaume Asante
3. Les royaumes peuls
4. L’Éthiopie au XIXe siècle
5. En Afrique australe : le royaume zoulou (XIXe siècle)
B. LE MONDE DU PREMIER XXe SIÈCLE
CHAPITRE X. La Première Guerre mondiale (1914-1918)
1. La République de Weimar
2. L’Allemagne nazie
3. L’Allemagne en guerre
CHAPITRE XIII. L’Angleterre de 1919 à 1945
1. Les crises
2. L’Angleterre de Churchill
CHAPITRE XIV. L’Italie de 1919 à 1945
1. La fin de la monarchie
2. Vers le franquisme
CHAPITRE XVI. La Russie et l’URSS de 1917 à 1945
1. L’effondrement du tsarisme
2. La mise en place de l’URSS
CHAPITRE XVII. Les États-Unis de 1919 à 1945
1. La prospérité et la crise
2. Relancer la machine
CHAPITRE XVIII. Nos voisins d’Asie
1. L’Inde
2. La Chine de 1919 à 1945
3. Le Japon de 1919 à 1945
CHAPITRE XIX. L’art en France et en Europe du début du XXe siècle jus‐
qu’à 1945
1. La peinture au XXe siècle
2. L’architecture de 1914 à 1945
3. La sculpture de 1914 à 1950 : l’audace
CHAPITRE XX. La littérature en France de 1914 à 1945
1. La IVe République
2. La Ve République
CHAPITRE XXV. L’Allemagne depuis 1945
1. L’Espagne franquiste
2. Un roi, une démocratie
3. Le Coup d’État du 23-F
4. Movida et modernisation
CHAPITRE XXIX. L’URSS depuis 1945
1. Le temps de la surpuissance
2. Kennedy le réformateur
3. Le temps des crises
4. Obama, un nouveau réformateur
CHAPITRE XXXI. Nos voisins d’Asie depuis 1945