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Par Claire Bommelaer
Publié le 07/07/2022 à 18:41,
Mis à jour le 08/07/2022 à 16:24
La chapelle du prieuré des Moulineaux (XIIe siècle) à Poigny-la-Forêt, près de Rambouillet. Marie Briand-
Locu/PHOTOPQR/LE PARISIEN/MAXPPP
Il ne s’agit pas d’une catastrophe, mais plutôt d’un désastre annoncé. Selon un
rapport sénatorial sur l’état du patrimoine religieux en France, ce dernier souffrirait
d’un déficit d’entretien ou d’un entretien trop irrégulier. Or, qui dit manque d’entretien
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dit, à terme, trous dans la toiture, charpentes mangées aux insectes ou décors
infiltrés d’eau. Sans parler des factures qui grimpent, les gros travaux coûtant
toujours plus que le petit entretien. «Les édifices protégés sont en meilleur état que
ceux qui ne le sont pas», nuancent Pierre Ouzoulias (Hauts-de-Seine, CRCE) et
Anne Ventalon (Ardèche, LR) Tous sont par ailleurs plus dégradés en milieu rural
qu’en milieu urbain, et les parties intérieures sont davantage négligées.»
Déchristianisation
Les menaces qui pèsent sur ce patrimoine religieux sont connues. Mises bout à bout,
elles forment un paysage inextricable pour leur sauvegarde. Au premier chef,
viennent la perte de pratique croissante des Français et la désertification des
campagnes, qui ont pour conséquence de vider les églises. S’y ajoutent les
contraintes budgétaires accrues des communes et enfin le développement des
intercommunalités, ou des relations parfois conflictuelles entre le curé affectataire et
les maires. «Les édifices aujourd’hui fermés et dans lesquels le culte n’est plus
célébré sont menacés d’être abandonnés, vendus ou détruits», affirment-ils. Le
risque, selon eux, est moins qu’ils passent aux mains de propriétaires privés qu’ils ne
soient plus entretenus, au point de rendre leur démolition inéluctable. Le danger
guette particulièrement les bâtiments de qualité médiocre ou dont la valeur
architecturale est moins prisée, à l’instar des plus récents, construit parfois en béton.
«Il ne faudra pas que dans cinquante ans on regrette de ne pas avoir pris soin des
églises du XXe siècle», résume Pierre Ouzoulias.
Selon l’OPR, entre 2500 et 5000 édifices, parce que vides, seraient menacés
d’abandon, ou de suppression pure et simple. Pour l’instant, les destructions sont très
résiduelles, ne serait-ce que parce que les habitants se dressent contre cette idée,
même s’ils ne fréquentent aucune paroisse. Et que la Conférence des évêques de
France fait tout pour éviter cela, quitte à faire tourner les curés sur un nombre
incalculable de paroisses. En 2019, Rouen avait lancé un appel à projet pour quatre
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Dans l’immédiat, les sénateurs plaident pour en dresser un état des lieux: «Il faut
lancer une opération nationale d’inventaire du patrimoine religieux et une
cartographie précise sur l’ensemble du territoire, à l’horizon 2030. Sinon, les églises
non protégées disparaîtront progressivement, dans l’indifférence générale»,
concluent-ils.
Sur place, l’association Sauvons les Moulineaux, qui compte 200 membres, joue
aussi un rôle d’aiguillon. Elle fait parfois venir des artistes pour animer le lieu, et
l’ouvre aux visites lors des Journées du patrimoine pour que chacun puisse
comprendre l’intérêt du soutien du village à la chapelle. Grâce à cette mobilisation, et
à l’ouverture d’une souscription à la Fondation du patrimoine, pour 60.000 euros, les
dons arrivent régulièrement. «Les pratiquants se mobilisent pour l’un des derniers
témoignages de cet ordre monastique. Les autres, au nom de l’histoire ou de
l’architecture, ont fini par s’approprier cet espace», poursuit-il. Au départ un peu
réticent face au projet, le conseil municipal a lui aussi fini par suivre le maire, et les
travaux devraient démarrer à l’automne. «Qu’on aime le patrimoine ou pas, il est là et
il faut s’en occuper», juge-t-il.
Loïse Vermeulen, maire de Piencourt (165 habitants, Eure): «Il faut savoir se
débrouiller pour obtenir de l’aide»
Au XIXe siècle, Piencourt accueillait plus 700 habitants, qui fréquentaient assidûment
l’église Saint-Saturnin. Deux siècles plus tard, l’église ouvre quatre ou cinq fois par
an, dont les 11 novembre et le deuxième week-end de juillet pour la fête communale.
«Le reste du temps, l’édifice est fermé, car nous voulons le protéger des vols»,
indique la maire. Datant des XIIe et XVIIe siècles, l’église Saint-Saturnin est une
vieille dame. Le prédécesseur de Loïse Vermeulen avait lancé la restauration de la
toiture principale, très dégradée. «Lors de la première réunion de chantier, l’architecte
des bâtiments de France nous a dit que le clocher était lui aussi en danger, et que
cela ne pouvait plus attendre», se souvient la maire. Résultat, entre la reprise du toit
et celle du clocher, la commune se retrouve avec un devis de 145.000 euros sur les
bras.
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L’église Saint-Saturnin à Piencourt (XIIe et XVIIe siècles) dans l’Eure. Henk van Gaal/Wikimedia Commons
«Dans ce cas, il faut se débrouiller pour monter des dossiers et frapper à toutes les
portes», explique-t-elle. Munie des devis, la maire va se tourner vers l’État, le
département, la Fondation du patrimoine et la Sauvegarde de l’art français. Elle
témoigne lors des assises du Patrimoine normand, distribue des prospectus dans les
boîtes aux lettres, agite la question quand elle le peut. Elle songe parfois à ces petits
maires qui maîtrisent mal internet ou n’aiment pas la paperasserie: pour eux,
explique-t-elle, tout cela n’est pas très facile à faire aboutir. À force, elle décroche des
subventions et des dons, et va réussir à sauver le toit et le clocher. «Je ne suis pas
baptisée, mais il s’agit de maintenir un patrimoine communal auquel les gens sont
attachés», dit-elle.
À VOIR AUSSI - Stéphane Bern regrette que le patrimoine religieux ne soit «plus un
enjeu électoral»
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